Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle

Un investissement dans la santé publique :

un investissement pour la relance économique et la prospérité future du Canada

Mémoire adressé au Comité permanent des finances de la Chambre des communes

par la

Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle

Le 12 août 2011


Qui sommes-nous ?

La Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle (CCSP21), créée en 2004 après la crise du SRAS, est un réseau de plus de 30 organismes à but non lucratif, associations professionnelles, organismes de bienfaisance du secteur de la santé et chercheurs universitaires dont le but commun est d'améliorer durablement la santé des Canadiens. Au cours des années, la CCSP21 a constamment milité en faveur d'un leadership fédéral vigoureux en santé publique et pour l'investissement dans notre infrastructure de santé publique, notamment par l'octroi d'un plein appui à l'Agence de santé publique du Canada (ASPC), la formation et le soutien d'un personnel compétent et doté de ressources suffisantes en santé publique, et la mise en œuvre de programmes et d'initiatives populationnelles efficaces, comme la Stratégie nationale d'immunisation.

Secrétariat

c/o Association canadienne de santé publique

1565, avenue Carling, bureau 400

Ottawa (Ontario) K1Z 8R1

Tél. : 613-725-3769, p. 160 (James Chauvin)

Courriel : coalition@cpha.ca

URL: http://www.cpha.ca/en/programs/ccph21.aspx

Synopsis

La Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle (CCSP21) est heureuse de pouvoir partager avec le Comité permanent des finances les raisons pour lesquelles elle considère qu'un investissement dans la santé publique est un investissement pour la prospérité du Canada. Les problèmes de « santé » et de « soins de santé » restent au premier plan des préoccupations des Canadiens. Au Canada, la « santé publique » englobe les services, programmes, institutions et activités de promotion et de protection de la santé et de prévention des maladies. Le « système » de santé publique comprend les services et programmes dispensés par les services de santé publique de première ligne, les établissements de soins et d’autres institutions et organismes exerçant plusieurs fonctions essentielles : évaluation de la santé de la population, surveillance de la santé, promotion de la santé, prévention des maladies et blessures, protection de la santé et préparation aux crises. Investir dans les éléments « en amont » du système de santé (c'est-à-dire les fonctions de la santé publique) réduit le fardeau éventuel sur les services d'urgence et de soins intensifs « en aval ».

Ces dernières années, plusieurs facteurs, comme la récession économique et la pandémie de H1N1, se sont conjugués pour exercer une pression considérable sur le système de santé publique. La capacité de réponse du « système » à protéger la santé des Canadiens reste une question appelant une attention renouvelée de la part de tous les paliers de gouvernement.

En réponse à l'invitation lancée par le Comité permanent des finances pour la préparation du budget fédéral de 2012-2013, la CCSP21 invite le gouvernement à se pencher sur trois recommandations :

Que le gouvernement fédéral examine et mette en place des incitatifs et stratégies à l'attention des secteurs à but lucratif et non lucratif ainsi que des collectivités pour appuyer la mise en œuvre d'interventions efficientes sur les déterminants sociaux de la santé, notamment ceux qui touchent les populations affectées par des conditions prédisposant à la vulnérabilité.

Que le gouvernement fédéral maintienne et, si possible, rehausse son appui au Programme de bourses d'études supérieures du Canada, et appuie la création de nouvelles possibilités d'emploi dans les services, agences et organismes de santé publique du pays.

Que le gouvernement fédéral maintienne au niveau de 2010-2011 la dotation budgétaire de l'Agence de santé publique du Canada, et qu’il s'efforce d'atteindre le niveau de financement recommandé pour l’ASPC en 2002 par le Comité consultatif national sur le SRAS et la Santé publique.


Introduction

Dans son mémoire prébudgétaire d'octobre 2005 adressé au Comité permanent des finances en octobre 2005, la Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle (CCSP21) demandait au gouvernement de réserver aux activités de santé publique une partie des ressources devant être fournies dans le cadre du plan décennal de Transfert canadien pour la santé (l'Accord sur la santé de 2003-2004)[1]. Elle demandait aussi que les fonctions fédérales touchant la santé publique, notamment le fonctionnement continu de l'Agence de santé publique du Canada, les partenariats de santé publique, la prévention et le contrôle des maladies transmissibles et non transmissibles, et la promotion de la santé de tous les Canadiens, soient financées au niveau recommandé par le Comité spécial sur l'avenir de la santé publique au Canada[2].

Depuis lors, la CCSP21 a milité en faveur d'un leadership fédéral vigoureux en santé publique et pour l'investissement dans notre infrastructure de santé publique, notamment au sujet des ressources humaines de la santé publique et de programmes et initiatives populationnelles efficaces comme la Stratégie nationale d'immunisation. Bon nombre des organisations membres de la CCSP21 ont adressé des mémoires prébudgétaires ces dernières années demandant aussi au gouvernement fédéral d'investir dans les activités, services et programmes essentiels de santé publique.

La CCSP21 est heureuse de pouvoir partager avec le Comité permanent des finances les raisons pour lesquelles elle considère qu'un investissement dans la santé publique est un investissement pour la prospérité du Canada.

Investir dans le système de santé publique pour la relance économique et la prospérité

Les problèmes de « santé » et de « soins de santé » restent au premier plan des préoccupations des Canadiens[3]. Dans un sondage réalisé par Ipsos Reid le 21 juillet 2011, neuf répondants sur dix étaient « d'accord » pour que le gouvernement fédéral joue un rôle de pointe dans la transformation du système de soins de santé. En outre, même si 60 % des répondants estimaient qu'il était « très important » que le système de soins de santé s'occupe de la santé et du bien-être des Canadiens en finançant adéquatement la promotion de la santé et la prévention des maladies, seulement 10 % jugeaient qu'il faisait un « très bon travail » à ce sujet[4].

Le Canada fait actuellement face à trois problèmes ayant une incidence sur notre santé, notre système de santé et la prospérité future de notre pays. Le premier est la conjoncture économique internationale ; le deuxième, la résurgence éventuelle de maladies infectieuses avec un risque potentiellement élevé de contagion pouvant éventuellement affecter de vastes pans de notre population, comme la grippe H1N1 ; le troisième, le fardeau financier auquel est confronté le système de soins de santé pour répondre aux multiples demandes qui lui sont adressées, qu'il s'agisse de la prestation de services cliniques de première ligne, de services dispensés en hôpital ou de soins palliatifs de fin de vie. Leur incidence conjuguée sur un système de santé déjà fortement mis à contribution pourrait entraîner sa défaillance systémique[5].

Au Canada, la « santé publique » englobe les services, programmes, institutions et activités de promotion et de protection de la santé et de prévention des maladies. Le « système » de santé publique comprend les services et programmes dispensés par les services de santé publique de première ligne, les établissements de soins et d’autres institutions et organismes exerçant plusieurs fonctions essentielles : évaluation de la santé de la population, surveillance de la santé, promotion de la santé, prévention des maladies et blessures, protection de la santé et préparation aux crises. Investir dans les éléments « en amont » du système de santé (c'est-à-dire les fonctions de santé publique) réduit le fardeau éventuel sur les services d'urgence et de soins intensifs « en aval ».

Nous avons un système de santé déjà surchargé, et le système de santé publique n'y fait pas exception. Bien des organismes locaux de santé publique subissent des tensions considérables pour répondre aux demandes « normales » de services de santé publique. Nous savons depuis plusieurs années que l'infrastructure de santé publique manque de ressources et est sous-financée. La crise économique qui a touché et continue de toucher notre pays, la pandémie de grippe et la rareté des ressources de santé publique ajoutent un fardeau supplémentaire au système et sont les signes avant-coureurs d'une crise en gestation. Le Canada doit renoncer à son approche de « juste à temps » au profit d'une approche de bonne préparation et de durabilité. Un investissement soutenu à long terme dans la promotion de la santé, la prévention des maladies, la protection de la santé et la préparation aux crises est nécessaire pour éviter l'effondrement du système et assurer la pérennité de notre système de santé pour les générations futures.

La réactivité future du système de santé est fortement tributaire de l'aptitude du système de santé publique à fonctionner avec efficacité et efficience. Nous avons tiré beaucoup de leçons de la crise du SRAS, de la contamination de l’eau à Walkerton et à North Battleford, de la crise de la listériose et de la pandémie de H1N1. Pourtant, malgré de nombreuses recommandations et malgré les mesures prises pour faire face à ces situations, la capacité de réaction de notre « système » de santé publique pour protéger la santé des Canadiens reste une question appelant une attention renouvelée de la part de tous les paliers de gouvernement.

A-t-on fait des investissements suffisants et ciblés pour assurer une réponse durable du système de santé à financement public s'il était confronté à plusieurs demandes simultanées ? Le système possède-t-il la « capacité de surtension » qui serait nécessaire pour y réagir pleinement et efficacement ? La CCSP21 estime que le système de santé du Canada n'a pas encore cette capacité.

 I.                    Assurer une reprise économique soutenue

Assurer une reprise économique soutenue exige une population active, des familles et des collectivités en bonne santé et productives. La crise financière de ces dernières années s'est traduite par une hausse du chômage et du nombre de Canadiens dont le gagne-pain et la sécurité financière sont vulnérables. En juin 2009, le chômage a atteint un record depuis 11 ans, les maximums étant enregistrés parmi les jeunes et les hommes de 25 à 54 ans. Certaines villes, notamment d'anciennes grandes villes manufacturières, ont connu des taux de chômage officiel de près de 18 % alors que le nombre de chômeurs renonçant à chercher un emploi augmentait considérablement[6]. Selon les données les plus récentes de Statistique Canada, le taux de pauvreté de toutes les personnes est passé de 9,4 % en 2008 à 9,6 % en 2009, et le taux de pauvreté des enfants, de 9,1 % à 9,5 %[7]. Bien que le nombre de personnes occupant un emploi ait augmenté et que le taux de chômage soit resté stable ces derniers mois, on a constaté un remplacement marqué d'emplois à temps plein par des emplois précaires de courte durée.

L'impact de la conjoncture économique sur la santé et le bien-être des Canadiens n'est pas tout à fait clair. On peut s'attendre à ce que certaines tranches de la population souffrent plus que d'autres, notamment les pauvres, les marginalisés, les personnes âgées et les habitants de régions en dépression économique. Plusieurs études et rapports récents font ressortir l'existence d'une relation étroite entre le revenu, le statut socio-économique et la santé[8],[9]. Il s'agit notamment de liens solides entre :

·         le revenu et les taux de suicide (en particulier chez les jeunes Autochtones) ;

·         le revenu, l'éducation, le logement, le chômage et la santé ; et

·         le revenu et le développement de la petite enfance[10].

Une étude publiée cette année a fait ressortir une forte corrélation entre l'incidence sur la santé de la précarité d'emploi et de la sécurité du revenu sur les personnes racialisées (personne en dehors de la population blanche historiquement dominante)[11]. Il s'agit notamment de problèmes de santé mentale (p. ex. dépression, assuétude), de troubles digestifs (p. ex. ulcères, constipation), de troubles physiologiques (p. ex. épuisement chronique, gain ou perte de poids, douleurs chroniques), de troubles cardiovasculaires (p. ex. hypertension, tension artérielle) et de blessures directes au travail. Un pourcentage élevé de participants à l'étude (40 %) a qualifié son état de santé actuel comme étant « passable » ou « mauvais », ce qui est quatre à cinq fois plus que la moyenne des Canadiens. Les participants étaient surtout préoccupés par l'impact sur la santé de leurs familles et de leurs enfants.

Comme l'indique le Conseil canadien de la santé, les gouvernements doivent changer leur approche en se penchant sur les besoins des Canadiens pauvres et socialement défavorisés s’il veut maîtriser le coût des soins de santé[12]. Se contenter d’accroître les dépenses de santé sans tenir compte des facteurs socio-économiques et contextuels plus larges qui influent sur la santé individuelle et collective ne produira pas nécessairement une population active ou une population générale en meilleure santé. Réorienter l'attention vers des investissements stratégiques dans les déterminants socio-économiques de la santé produira non seulement une amélioration des bilans de santé mais aussi des économies d'argent et des retombées économiques[13],[14]. Comme l'a par ailleurs souligné le Conference Board du Canada, des interventions bien ciblées en prévention des maladies, en promotion de la santé et en protection de la santé peuvent déboucher sur des économies d’argent à long terme, non seulement pour les entreprises mais, plus important encore, pour le système de soins de santé dans son ensemble[15]. Le secteur à but lucratif du Canada peut et devrait être encouragé à passer à l'action sur les déterminants sociaux de la santé.

Voilà pourquoi la CCSP21 demande instamment au ministère des Finances d'envisager sérieusement de répondre positivement à l'appel lancé par le Conference Board du Canada, le canadien  de la santé et d'autres organismes sur l'offre d'incitatifs pour promouvoir et appuyer la mise en œuvre de stratégies et d'interventions de santé publique dans le monde du travail et dans les collectivités au sujet des déterminants sociaux de la santé.

Recommandation no 1

Que le gouvernement fédéral examine et mette en place des incitatifs et stratégies à l'attention des secteurs à but lucratif et non lucratif ainsi que des collectivités pour appuyer la mise en œuvre d'interventions efficientes sur les déterminants sociaux de la santé, notamment ceux qui touchent les populations affectées par des conditions prédisposant à la vulnérabilité.

II.                    Créer des emplois durables et de qualité

Au sein de l'économie canadienne, le secteur de la santé produit des emplois de très grande qualité et à grande valeur ajoutée. Le secteur de la santé représente le troisième plus gros employeur du secteur des services du Canada. Comme l'indiquait Informetrica Limited, un investissement de 1 milliard de dollars dans les services reliés à la santé pourrait gonfler le PIB d'un facteur de 1,8 et créer près de 18 000 emplois[16].

La CCSP21 et d'autres organismes de la santé ont demandé à plusieurs reprises au gouvernement fédéral qu’il investisse pour appuyer une infrastructure élargie de ressources humaines de la santé[17]. L'un des éléments cruciaux d'un système de santé solide, durable et efficace est sa capacité en ressources humaines. Un élément crucial d'un système de santé dynamique et réactif est l'existence de professionnels et de praticiens spécialisés qui préviennent les maladies et les blessures, font la promotion de la santé et protègent la santé de tous les Canadiens, c'est-à-dire tous les travailleurs de la santé publique. Les travailleurs de la santé du Canada, y compris du secteur de la santé publique, sont cependant déjà au bout du rouleau[18]. Un système pancanadien de santé publique efficace et fonctionnel exige un investissement continu et substantiel. Il exige un leadership et une gouvernance compétents, des professionnels de la santé publique, des praticiens et des travailleurs alliés qualifiés et dotés de ressources adéquates, un bassin de ressources humaines efficace et en expansion, une capacité fiable de surveillance de la santé publique et d'analyse de données, et le moyen de transformer les données en politiques, programmes et services pertinents et opportuns, et une infrastructure de soutien adéquate[19]. Si l'on veut que le système de santé réponde aux besoins de la population canadienne, surtout en cette période d'incertitude économique et de nouvelles menaces potentielles à la santé de la population, il convient d'accroître rapidement le nombre de personnes travaillant dans le secteur de la santé, y compris dans celui de la santé publique.

Le gouvernement fédéral a beaucoup investi dans l'infrastructure du savoir par l'amélioration de l'infrastructure physique des universités et collèges et par l'octroi d'une rallonge budgétaire temporaire au Programme de bourses d'études supérieures du Canada. Un investissement supplémentaire dans la production du savoir au Canada et dans le développement des compétences et qualifications dans le domaine de la santé contribuerait non seulement à accroître l'effectif professionnel de la santé publique mais aussi à créer dans le secteur de la santé des occasions de recrutement de nouveaux diplômés et de soutien de leur capacité à concevoir et à dispenser des interventions efficientes de prévention des maladies, de promotion de la santé et de protection de la santé. Hélas, l'investissement fédéral dans le Programme de bourses d'études supérieures du Canada, qui était de 36,25 millions de dollars en 2010-2011 doit baisser de 22 % en 2011-2012[20]. Bien que cette baisse soit compensée par une hausse des crédits consentis au Programme de bourses d'études supérieures du Canada Vanier géré par les IRSC[21] et par une hausse de l'affectation budgétaire estimée en 2011-2012 pour les « subventions à des étudiants diplômés, à des étudiants au niveau post-doctoral et à des établissements d’enseignement postsecondaire pour augmenter les compétences et capacités professionnelles afin de renforcir le domaine de la santé publique », gérées par le truchement de l'Agence de santé publique du Canada (ASPC)[22], la CCSP21 est préoccupée par l'impact de la réduction des affectations budgétaires du gouvernement fédéral à l'appui des bourses d'études supérieures orientées vers la santé publique.

Bien que l'éducation relève en soi de la compétence des provinces, la CCSP21 demande instamment au gouvernement fédéral de revoir et, si possible, d'accroître son appui aux étudiants en sciences de la santé, en santé publique et en santé populationnelle, et d'appuyer la création de nouvelles possibilités d'emploi dans le secteur de la santé publique.

Recommandation no 2

Que le gouvernement fédéral maintienne et, si possible, rehausse son appui au Programme de bourses d'études supérieures du Canada, et appuie la création de nouvelles possibilités d'emploi dans les services, agences et organismes de santé publique du pays.

  III.               Maintenir les taux d'imposition à des niveaux relativement faibles et atteindre un budget équilibré

La CCSP21 est sensible aux défis que doit relever le gouvernement fédéral pour atteindre un budget équilibré à une époque d’incertitude économique. Dans ce contexte, elle soulève deux questions.

1)                  L'optimisation des ressources en investissant dans les éléments en amont de la santé publique. Au Canada, les dépenses de santé sont montées jusqu'à près de 12 % du produit intérieur brut, et elles continuent d'augmenter annuellement par rapport au total des dépenses provinciales et territoriales (la proportion s’approche de 50 % des dépenses totales de programmes en Ontario et dans plusieurs autres provinces). Les éléments de promotion et de protection de la santé dans le cadre de la santé publique sont particulièrement importants puisque près de 80 % du fardeau actuel de la maladie au Canada est dû aux maladies chroniques, dont la grande majorité peut être évitée[23]. À long terme, investir dans les éléments populationnels « en amont » de promotion de la santé et de prévention des maladies est plus rentable qu'accroître le soutien des éléments « en aval »[24].

2)                  La protection de l'institution nationale du pays pour la prévention et le contrôle des maladies. Le rapport du Comité national consultatif sur le SRAS et la Santé publique (2003) a mis en relief le faible niveau d'investissement public dans la santé publique au début du XXIe siècle (on l’estimait alors équivalent à 3,5 % des dépenses totales de santé)[25]. On recommandait aussi dans ce rapport un engagement fédéral envers les fonctions nationales de santé publique à hauteur de 1,1 milliard de dollars par an. Ce chiffre comprenait un budget de base de 500 millions de dollars (en dollars de 2002) pour les fonctions centrales de l'Agence de santé publique du Canada plus 200 millions de dollars au titre de la protection et de la promotion de la santé publique, avec dans les deux cas une indexation annuelle au taux d'inflation pour financer l'expansion des fonctions essentielles. En dollars constants, cela veut dire que le soutien fédéral annuel à l’ASPC serait actuellement de l'ordre de 850 millions de dollars.

La recommandation du Comité Naylor n'a pas été pleinement mise en œuvre. Au cours du dernier exercice budgétaire, l'affectation de l’ASPC est passée de 506,5 millions de dollars environ en 2007-2008 à 678 millions en 2010-2010[26]. Cela représente une hausse annuelle nette de 7 % environ, sur la base d'un taux d'inflation annuel moyen de 1,5 % pendant les quatre années intermédiaires. Le budget attribué à l’ASPC a baissé de 10,3 % entre 2007-2008 et 2008-2009 en passant de 658,3 millions de dollars environ à 590,5 millions, mais il a ensuite augmenté substantiellement en 2010-2011, en partie à cause des dépenses reliées à la réaction au H1N1[27].

L'examen stratégique annoncé par le gouvernement en 2009 s’est traduit par un objectif de retrait de 167,8 millions de dollars des budgets de Santé Canada et de l’ASPC sur trois exercices budgétaires (2009-2012)[28]. Dans le budget des dépenses de 2011-2012, la CCSP21 note avec inquiétude une réduction planifiée de 55,3 millions de dollars du budget de l’ASPC.

Considérant la conjoncture économique actuelle, la nécessité d'investir dans des mesures efficaces de prévention pour réagir au fardeau croissant de la maladie relié aux maladies non transmissibles et infectieuses, et la menace toujours présente de nouvelles maladies, il est crucial de préserver un institut national de santé publique bien financé pour assurer le bien-être, la prospérité et la sécurité des Canadiens. Pour cette raison, la CCSP21 demande instamment au gouvernement fédéral de veiller à ce que l'organisme de santé publique de pointe du gouvernement fédéral soit pleinement financé afin qu'il ait à sa disposition les ressources humaines et techniques nécessaires pour s'acquitter de son mandat de protection et d'amélioration de la santé de tous les Canadiens.

Recommandation no 3

Que le gouvernement fédéral maintienne au niveau de 2010-2011 la dotation budgétaire de l'Agence de santé publique du Canada, et qu’il s'efforce d'atteindre le niveau de financement recommandé pour l’ASPC en 2002 par le Comité consultatif national sur le SRAS et la Santé publique.

Le Canada doit impérativement se préparer à réagir de manière opportune et efficace aux menaces existantes et potentielles au bien-être, à la santé et à la prospérité de ses citoyens. Un système de santé efficace comprend nécessairement un volet robuste de santé publique. Si l'on néglige les besoins du volet de la santé publique, nos interventions face aux menaces à la santé ne seront que de simples réactions après-coup. Comme l'affirmait un premier ministre provincial, ne pas se préparer aux menaces à la santé publique reviendrait à rester les bras croisés devant un carambolage en puissance[29].



[1] Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle (CCSP21). Au-delà de l'écart Naylor : La santé publique et la productivité. Mémoire adressé au Comité permanent des finances de la Chambre des communes, 24 octobre 2005.

[2] Comité spécial sur l'avenir de la santé publique au Canada. L'avenir de la santé publique au Canada : Édifier un système de santé publique pour le XXIe siècle. 2003.

[3] Nanos Research. Healthcare and jobs/economy tied as top issue remains top issue. National Issue. 21 juin 2011. Téléchargé à : http://www.nanosresearch.com/library/polls/2011-06-IssueE.pdf.

[4] Ipsos Reid. Gap Between Perceived Level of Importance and Rating of Performance Suggests Ample Room for

Improvement in the Eyes of Canadians. 21 juillet 2011. Téléchargé à : http://www.ipsos-na.com/newspolls/pressrelease.aspx?id=5293.

[5] The economic crisis impacts on public health. Communication faite à la conférence « After Peak Oil », Johns Hopkins University, 12 mars 2009, cité à : http://www.energybulletin.net/print/48316 (téléchargé le 4 août 2009).

[6] Statistique Canada, Dernier communiqué de l'Enquête sur la population active, juillet 2009, 7 août 2009. Cité à : http://www.statcan.gc.ca/subjects-sujets/labour-travail/lfs-epa/lfs-epa-fra.htm (téléchargé le 9 août 2009).

[7] Statistique Canada, Le revenu des Canadiens. Le Quotidien, 15 juin 2011. Téléchargé à : http://www.statcan.gc.ca/daily-quotidien/110615/dq110615b-fra.htm.

[8] Organisation mondiale de la santé. Rapport de la Commission de l'OMC sur les déterminants sociaux de la santé. Août 2008.

  Comité sénatorial permanent des affaires sociales, les sciences et la technologie, Un Canada en santé et productif : une approche axée sur les déterminants de la santé. Rapport final du Sous-comité sénatorial sur la santé des populations, Sénat, juin 2009.

[9] Une étude du Royaume-Uni a montré que chaque augmentation de 1 % du taux de chômage est associée à une augmentation de 0,79 % des suicides et à une augmentation de l'abus d'alcool. Voir Stuckler D et al. The public health effect of economic crises and alternative policy responses in Europe: an empirical analysis. Lancet early on-line publication, 8 juillet 2009, cité à : http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(09)61124-7/fulltext (téléchargé le 9 juillet 2009).

Le Public Health Leadership Institute et le North Carolina Institute for Public Health ont organisé un débat sur le Web durant lequel des leaders de la santé publique ont discuté de l'aptitude des systèmes de santé publique à fonctionner efficacement durant une récession économique. L'une des préoccupations exprimées était l'aptitude des services de santé publique à répondre adéquatement étant donné qu'on pouvait s'attendre à ce que le nombre de personnes touchées par le déclin économique augmente sensiblement, ce qui augmenterait la demande exercée sur la santé publique à tous les niveaux. North Carolina Institute for Public Health, Public Health Survival: Leadership in a Falling Market, 5 décembre 2008. Cité à : http://www.sph.unc.edu/nciph/public_health_survival_leadership_in_a_falling_market_8968_9396.html (téléchargé le 19 décembre 2008)

[10] Administrateur en chef de la santé publique. Ibid.

[11] RM Wilson, P Landolt, YB Shakya, G-E Galabuzi et al. Working Rough, Living Poor: Employment and Income Insecurities face by Racialized Groups in the Black Creek area and their Impacts on Health. Income Security, Race and Health Working Group, Access Alliance Multicultural Health and Community Services. 2011.Téléchargé à : http://accessalliance.ca/content/launch-working-rough-living-poor-report.

[12] Conseil canadien de la santé, Changement de vitesse : Cibler, non plus les soins de santé au Canada, mais un Canada en santé, décembre 2010. Téléchargé à : http://healthcouncilcanada.ca/fr/index.php?page=shop.product_details&flypage=shop.flypage&product_id=102&category_id=10&manufacturer_id=0&option=com_virtuemart&Itemid=170.

[13] Conference Board of Canada. Healthy People, Healthy Performance, Healthy Profits. The Case for Business

Action on the Socio-Economic Determinants of Health. Décembre 2008.

[14] Agence de santé publique du Canada, Business Case for Active Living at Work: Business Case Studies [en ligne].

Janvier 2004. http://phac-aspc.gc.ca/pau-uap/fitness/work_e.html.

[15] Conference Board of Canada. Ibid.

[16] Cité dans Centre canadien d'alternatives politiques. Leadership for Tough Times: Alternative Federal Budget Fiscal Stimulus Package, Janvier 2009, p. 9.

[17] Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle. La santé publique dans une perspective durable, septembre 2008. www.cpha.ca/uploads/policy/ccph21/election2008_f.pdf.

Association canadienne de santé publique. Enhancing the Public Health Human Resources Infrastructure in Canada. Comparution devant le Comité de la santé de la Chambre des communes. Mai 2010. Www.cpha.ca/uploads/policy/ccph21/finance_comm_august2011.pdf.

Health Action Lobby (HEAL). Investing in our Most Important Health System Assets – People…. A Proposal to Establish a National Health Human Resources Infrastructure Fund. Mémoire prébudgétaire adressée au Comité permanent des finances de la Chambre des communes, 14 août 2009. http://www.healthactionlobby.ca/en/publications/government-submissions.html.

[18]  Groupe de travail conjoint sur les ressources humaines en santé publique, Édifier une main-d’oeuvre en santé publique pour le 21ième siècle : Un cadre pancanadien pour la planification des ressources humaines en santé publique. Gouvernement du Canada, 2005.

[19] Association canadienne de santé publique. Le budget 2008 obtient-il la note de passage en ce qui concerne la santé du public ? Mars 2008. http://www.cpha.ca/fr/programs/briefs/budget2008.aspx.

[20] Gouvernement du Canada, Budget des dépenses 2011-2012, Parties I et II, Plan de dépenses du gouvernement et Budget principal des dépenses, juin 2011, p. 325. http://www.tbs-sct.gc.ca/est-pre/20112012/me-bpd/docs/me-bpd-fra.pdf.

[21] Ibid. p. 325.

[22] Ibid. p. 329.

[23] Administrateur en chef de la santé publique. Rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada 2008. Agence de santé publique du Canada, juin 2008.

[24] Association canadienne de santé publique. Public Health in the Public Interest. Mémoire présenté au Comité permanent des finances de la Chambre des communes, septembre 2003.

[25] Santé Canada. Leçons de la crise du SRAS : Renouvellement de la santé publique au Canada. Un rapport du Comité consultatif national sur le SRAS et la Santé publique, octobre 2003, chapitre 4F.2.

[26] Gouvernement du Canada, Parties I et II - Budget principal des dépenses de 2007-2008. Secrétariat du Conseil du trésor du Canada. http://www.tbs-sct.gc.ca/est-pre/20072008/me-bpd/toc-tdm-fra.asp.

Gouvernement du Canada, Budget des dépenses 2011-2012, Parties I et II, Plan de dépenses du gouvernement et Budget principal des dépenses, juin 2011, op. cit.

[27] L'information citée ne comprend pas le Budget supplémentaire des dépenses.

[28] Ministère des finances du Canada. Plan d'action économique du Canada : Budget de 2009, déposé à la Chambre des communes par l'honorable James M. Flaherty, C.P., député, ministre des Finances. 27 janvier 2009.

[29] The Premiers and the flu. The Globe and Mail, 7 août 2009.