MÉMOIRE DE L’ASSOCIATION DES
COMPTABLES GÉNÉRAUX ACCRÉDITÉS DU CANADA

Sommaire

Bien que le gouvernement du Canada ait fait des efforts soutenus ces dernières années pour réduire les taux d’imposition, le régime fiscal s’est alourdi et est devenu de plus en plus complexe. Entreprises et particuliers doivent payer des centaines d’impôts et de taxes à tous les ordres de gouvernement, la plupart étant inutilement compliqués et difficiles à comprendre et comprenant souvent des chevauchements et des contradictions d’une administration à l’autre. Le résultat, c’est qu’il est souvent difficile et ardu de se conformer à la réglementation fiscale.

Sur une échelle internationale, le régime fiscal canadien compte parmi les plus compliqués du monde, ce qui nuit à notre économie et a des effets négatifs aussi bien sur les petites et moyennes entreprises (PME) que sur les particuliers.

Face à une situation financière difficile et à la nécessité de réduire les dépenses publiques, le gouvernement fédéral doit rechercher une plus grande efficacité ainsi que des mesures fiscalement neutres ou des initiatives peu coûteuses pour gérer sa plus haute priorité, l’économie. Prendre des mesures concrètes pour corriger les politiques et les procédures qui ajoutent inutilement à la complexité du régime fiscal constitue une solution évidente.

Les avantages de la simplification du régime fiscal sont clairs. Un régime simple accroît la transparence et réduit l’incertitude et la probabilité d’une planification fiscale abusive. Il augmente les taux de conformité et réduit les coûts d’observation pour les contribuables. Il diminue en même temps le fardeau de paperasserie des entreprises et les coûts administratifs du gouvernement. Le système n’en est que renforcé, l’assiette fiscale devenant plus sûre et les recettes plus prévisibles.

La simplification du régime fiscal est bonne pour les contribuables, les entreprises et le gouvernement, de même que pour l’économie canadienne. En fait, un régime fiscal simple, transparent et équitable comportant des taux d’imposition bas et compétitifs à l’échelle internationale stimule l’investissement et la croissance des emplois, facteurs qui font partie intégrante de la santé et du dynamisme soutenu de l’économie canadienne.

Certains des partenaires commerciaux du Canada, dont l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis, se rendent compte du fait qu’un régime fiscal inefficace réduit leur compétitivité et prennent actuellement des mesures pour le renforcer et le rationaliser.

Compte tenu de ses avantages fiscaux, le Canada ne peut pas se permettre de prendre du retard sur ses partenaires mondiaux et risquer ainsi de devenir un pays moins attrayant pour les investisseurs. Pour édifier l’économie forte et compétitive dont il a besoin au XXIe siècle, le gouvernement fédéral devrait établir un plan clair destiné à rationaliser et à moderniser le régime fiscal canadien.

Par conséquent, CGA-Canada recommande que le gouvernement fédéral prenne immédiatement des mesures pour simplifier la législation de l’impôt et le régime fiscal du Canada.

Introduction

L’Association des comptables généraux accrédités du Canada (CGA-Canada) se félicite une fois de plus de l’occasion de participer à cet important processus de consultation, en prévision du budget fédéral 2012. Nous sommes heureux de présenter nos observations et recommandations et espérons avoir la possibilité de comparaître devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes au cours de l’automne 2011.

Fondée en 1908, l’Association des comptables généraux accrédités du Canada est au service de 75 000  comptables généraux accrédités et étudiants en comptabilité du Canada et de plus de 90 pays. Professionnels respectés de la comptabilité et de la gestion financière, les CGA travaillent pour l’industrie, le secteur financier, le gouvernement et des cabinets privés. CGA-Canada fixe les conditions de délivrance du titre et les normes professionnelles. Elle offre des programmes de perfectionnement professionnel, mène des recherches et des activités de défense d’intérêts et représente les CGA à l’échelle nationale et internationale.

Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a invité les Canadiens à formuler un maximum de trois recommandations axées sur les priorités fédérales relatives à la fiscalité et aux dépenses de programmes. Cela étant et compte tenu de l’intérêt que CGA-Canada porte en permanence à la politique fiscale canadienne, nous présentons en particulier la recommandation suivante :

Que le gouvernement du Canada prenne immédiatement des mesures pour simplifier la législation de l’impôt et le régime fiscal.

Selon Benjamin Franklin, l’impôt, comme la mort, est une certitude absolue. Et, jusqu’à présent, la fiscalité continue d’être une réalité inéluctable et importante de la vie dans le monde moderne. Une étude publiée par le Fraser Institute en avril 2011 révèle que la famille moyenne canadienne a consacré plus de 41 p. 100 de son revenu annuel aux taxes et impôts en 2010 : c’est plus qu’elle n’a payé pour se nourrir, se vêtir et se loger. Plus précisément, la facture d’impôts d’une famille ayant un revenu moyen s’est accrue dans la proportion ahurissante de 1 686 p. 100 depuis 1961, au point où les taxes et impôts constituent aujourd’hui la plus importante dépense des familles, dépassant le coût des besoins de base, ce qui n’a pas été toujours le cas[1]. Il n’y a pas de doute que les impôts comptent.

Le présent mémoire adressé au Comité permanent des finances de la Chambre des communes vise à renforcer et compléter le travail accompli par CGA-Canada dans le domaine de la simplification du régime fiscal, y compris son document le plus récent, Point de mire – La nécessité de simplifier l’impôt – Un défi et une occasion, qui met en évidence quelques-uns des enjeux centraux entourant le régime fiscal canadien ainsi que la nécessité de le simplifier[2].

Le problème

Bien que le gouvernement du Canada ait fait des efforts soutenus ces dernières années pour réduire les taux d’imposition, le régime fiscal s’est alourdi et est devenu de plus en plus complexe. Entreprises et particuliers doivent payer des centaines d’impôts et de taxes à tous les ordres de gouvernement, la plupart étant inutilement compliqués et difficiles à comprendre et comprenant souvent des chevauchements et des contradictions d’une administration à l’autre. Le résultat, c’est qu’il est souvent difficile et ardu de se conformer à la réglementation fiscale. Pour leur part, les contribuables sont admissibles à certaines mesures ciblées d’allégement fiscal – exemptions, déductions, reports et crédits – que Finances Canada appelle des « dépenses fiscales » et qui se sont considérablement multipliées ces dernières années, ajoutant à la complexité d’un régime fiscal déjà compliqué.

Comme le mentionne le rapport provisoire Review of tax reliefs publié par le Bureau britannique de simplification de l’impôt en décembre 2006, la complexité fiscale revêt de multiples dimensions[3]. Il peut simplement s’agir d’une question de jargon qui fait qu’il est difficile pour le contribuable moyen de suivre et de comprendre. La complexité peut également être liée aux règles elles-mêmes ou encore à la diversité du régime fiscal, c’est-à-dire au nombre et à la portée des différents impôts, ou même à la fréquence à laquelle les règles changent. De plus, même dans le cas de la règle fiscale la plus simple, des complications peuvent surgir au stade de la mise en œuvre.

Le document Report on Tax Reform Options, produit en 2010 par le Conseil consultatif sur la reprise économique du président Obama, signale deux autres facteurs qui contribuent sensiblement à la complexité fiscale. Premièrement, de nouvelles dispositions sont ajoutées pour atteindre un objectif stratégique particulier, mais sans tenir suffisamment compte de leur interaction avec les dispositions existantes, ce qui donne lieu à des chevauchements, à des définitions multiples des mêmes concepts et à différentes dates de retrait et d’expiration. En second lieu, un peu comme au Canada, les règles fiscales sont devenues plus complexes parce que les législateurs ont recouru de plus en plus souvent à des dispositions fiscales ciblées pour atteindre des objectifs sociaux qui sont ordinairement réalisés au moyen de programmes de dépenses[4].

Par ailleurs, la complexité découle du simple fait que le régime fiscal vise souvent des objectifs contradictoires. Tout d’abord, il doit s’adapter à des conditions économiques et financières changeantes. Ensuite, il doit assurer l’équité aux contribuables. Troisièmement, le régime fiscal doit assurer à ceux-ci un degré raisonnable de certitude. Enfin, et c’est peut-être le facteur le plus important, le régime fiscal doit préserver les recettes du gouvernement.

Pour la vérificatrice générale du Canada, la complexité semble être synonyme d’un manque de clarté, de prévisibilité et de certitude inhérent à la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) du Canada. Dans son rapport de l’automne 2009, la vérificatrice générale attire l’attention sur un arriéré de plus de 400 changements techniques à apporter à la LIR : il s’agit de changements proposés annoncés par le gouvernement, que le Parlement n’a pas encore adoptés. La grande majorité de ces changements reste encore en suspens. En attendant, les contribuables, les comptables et même l’Agence du revenu du Canada (ARC) doivent se préparer en vue de la nouvelle politique gouvernementale, tenir des dossiers et garder des formulaires à des fins d’observation, sans savoir si les modifications législatives en question seront adoptées ou non. La vérificatrice générale du Canada en a conclu que la LIR est l’une des mesures législatives les plus longues et les plus complexes de la législation fédérale[5].

CGA-Canada a commandé à Recherche Nanos un sondage national sur le point de vue des Canadiens en matière de simplification du régime fiscal. Le sondage, réalisé en juin 2011, a révélé que seul un Canadien sur dix s’occupant de la préparation et de l’examen de déclarations de revenus croit que le régime fiscal des entreprises est moins complexe aujourd’hui qu’il ne l’était il y a 10 ans. De plus, seul répondant sur sept a dit que le régime de l’impôt sur le revenu des particuliers est actuellement moins complexe qu’il y a 10 ans.

Il est maintenant temps

Il n’y a pas de meilleur moment pour moderniser le régime fiscal canadien.

Pour le contribuable moyen, la législation canadienne de l’impôt – qui comprend une multitude de mesures fiscales ciblées – peut être difficile à comprendre et imposer des coûts imprévus, en temps, en effort et en argent. Déterminer quel crédit ou déduction s’applique dans une situation particulière ou combien d’argent on doit au gouvernement du Canada n’est pas toujours une affaire simple. Il faut souvent recourir aux services de comptables et d’avocats. Dans le sondage de Recherche Nanos, sept répondants sur dix ont déclaré qu’ils ne remplissent pas eux-mêmes leur déclaration de revenus personnelle. Par ailleurs, dans une étude menée en avril 2010, le Fraser Institute a estimé que le prix annuel de la préparation et de la production des déclarations de revenus personnelles se situe entre 4 et 5,8 milliards de dollars[6].

Même les praticiens de l’impôt et d’autres professionnels sont convaincus que les conditions de production des déclarations de revenus sont inutilement compliquées et que les décisions et interprétations sont difficiles à obtenir à temps. Lors d’une enquête nationale en ligne effectuée auprès de CGA en juillet et août 2006, les répondants ont été quasi unanimes à convenir que la simplification du régime fiscal et une administration fiscale juste et équitable constituaient leurs préoccupations les plus importantes.

Dans le secteur des PME, le régime fiscal canadien est inefficace, laborieux, coûteux et plein de tracasseries administratives. D’après la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, les entreprises du Canada paient chaque année le montant incroyable de 12,6 milliards de dollars pour se conformer à la réglementation, et ce, sans compter les impôts versés[7]. Et, à part ces coûts énormes, les entreprises doivent payer un prix encore plus élevé sous forme d’occasions perdues, c’est-à-dire de temps et d’argent qu’elles auraient autrement pu consacrer à des activités plus productives. Il importe de noter que les problèmes affrontés par le secteur des PME à cause de la complexité du régime fiscal – comme le fardeau lié à l’observation de la réglementation – touchent aussi le secteur sans but lucratif, y compris les organisations caritatives.

Pour le gouvernement, le régime est coûteux à administrer et à tenir à jour. Face à une situation financière difficile et à la nécessité de réduire les dépenses publiques, le gouvernement fédéral doit rechercher une plus grande efficacité ainsi que des mesures fiscalement neutres ou des initiatives peu coûteuses pour gérer sa plus haute priorité, l’économie. Prendre des mesures concrètes pour corriger les politiques et les procédures qui ajoutent inutilement à la complexité du régime fiscal constitue une solution évidente.

Les avantages de la simplification du régime fiscal sont clairs. Un régime simple accroît la transparence et réduit l’incertitude et la probabilité d’une planification fiscale abusive. Il augmente les taux de conformité et réduit les coûts d’observation pour les contribuables. Il diminue en même temps le fardeau de paperasserie des entreprises et les coûts administratifs du gouvernement. Le système n’en est que renforcé, l’assiette fiscale devenant plus sûre et les recettes plus prévisibles.

La simplification du régime fiscal est bonne pour les contribuables, les entreprises et le gouvernement, de même que pour l’économie canadienne. En fait, un régime fiscal simple, transparent et équitable comportant des taux d’imposition bas et compétitifs à l’échelle internationale stimule l’investissement et la croissance des emplois, facteurs qui font partie intégrante de la santé et du dynamisme soutenu de l’économie canadienne.

Le contexte international

Certains des partenaires commerciaux du Canada, dont l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis, se rendent compte du fait qu’un régime fiscal inefficace réduit leur compétitivité et prennent actuellement des mesures pour le renforcer et le rationaliser.

Le gouvernement australien avait lancé un processus d’examen indépendant en 2008 (l’Examen fiscal Henry) pour permettre au pays d’affronter les défis du XXIe siècle et, ce faisant, établir un cadre permettant de simplifier le régime fiscal et le rendre plus équitable et plus efficace pour les familles de travailleurs et les entreprises australiennes. L’examen de deux ans a abouti à 138 recommandations. En mai 2010, le gouvernement australien a fait connaître sa réaction préliminaire au rapport ainsi que le premier volet de son programme de réforme. Il s’est engagé à mettre en œuvre ces mesures dans les 10 années suivantes. Il s’agissait essentiellement de mesures touchant l’impôt des sociétés et des petites entreprises, les pensions de retraite, l’infrastructure et les ressources. Un deuxième volet, axé sur la simplification, l’encouragement de l’épargne et le renforcement de la gouvernance et de la transparence du régime fiscal, doit suivre[8].

Au Royaume-Uni, le Bureau britannique de simplification de l’impôt (Office of Tax Simplification, ou OTS) a été créé en juillet 2010 pour conseiller le gouvernement d’une façon indépendante sur la simplification du régime fiscal. L’OTS avait le mandat d’effectuer deux examens : d’abord, un examen de toutes les concessions fiscales afin de formuler des recommandations sur la question de savoir si chaque concession doit être conservée telle quelle, simplifiée pour alléger le fardeau administratif ou carrément éliminée; ensuite, un examen de la fiscalité des petites entreprises afin de conseiller le gouvernement sur la façon de simplifier le régime fiscal, d’en faciliter l’administration et de réduire l’incertitude pour les PME. Au cours de son examen et de ses consultations au sujet des concessions fiscales[9], l’OTS a étudié 155 mesures différentes, notamment liés à l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les gains de capital et à l’impôt sur les héritages, et les a évaluées en fonction d’un ensemble de critères pour en déterminer l’efficacité et la pertinence : existence de motifs encore valables, connaissance et utilisation par les contribuables et incidences probables du changement ou de l’élimination des mesures en cause. Dans son rapport final, l’OTS a noté que huit des concessions fiscales avaient expiré et devaient donc être retirées de la loi; il a recommandé en outre que 45 autres soient abolies, que 17 soient simplifiés et que 54 soient gardées tels quelles[10]. Le gouvernement britannique a annoncé dans son budget 2011 qu’il éliminerait les 43 mesures qui n’avaient plus leur raison d’être, ce qui réduira la complexité du régime fiscal et raccourcira la législation de l’impôt d’une centaine de pages[11]. Ayant reçu le rapport provisoire sur l’examen de la fiscalité des petites entreprises et devant recevoir un rapport final sous peu, le gouvernement britannique a déclaré officiellement qu’il avait l’intention de donner suite à d’autres recommandations précises formulées par l’OTS pour contribuer à la simplification du régime fiscal.

Aux États-Unis, le président Barack Obama, qui avait inscrit la réforme du régime fiscal comme élément de sa plate-forme lors des élections présidentielles de 2008, a chargé l’ancien président de la Réserve fédérale, Paul Volcker, de diriger le Conseil consultatif du Président sur la reprise économique (PERAB) afin de proposer des idées et des options visant à simplifier le régime fiscal, à relever le taux de conformité et à réviser l’impôt sur le revenu des sociétés. En 2010, le PERAB a présenté un rapport de 118 pages sur les options possibles de réforme de l’impôt, exposant en détail les avantages et inconvénients d’une vaste gamme de propositions, dont des options de simplification liées aux prestations familiales, à l’encouragement de l’épargne et de la retraite, à l’impôt sur les gains de capital, à la production de déclarations de revenus, aux petites entreprises et à l’impôt minimum de remplacement[12]. Dans le discours sur l’état de l’Union qu’il a prononcé devant le Congrès en janvier 2011, le président Obama a exprimé son plein appui à la réforme du régime fiscal et s’est dit disposé à collaborer avec les représentants aussi bien républicains que démocrates, ajoutant que « la meilleure chose que nous puissions faire au chapitre de l’impôt dans l’intérêt de tous les Américains est de simplifier le code de l’impôt des particuliers[13] ». Comme on l’a reconnu, cela ne sera pas facile. Pour réaliser cet objectif, il faudra du leadership politique, de la vision et de la détermination, surtout si l’on tient compte de la crise de la dette américaine et de la fragilité de l’économie des États-Unis.

Compte tenu de ses avantages fiscaux, le Canada ne peut pas se permettre de prendre du retard sur ses partenaires mondiaux et risquer ainsi de devenir un pays moins attrayant pour les investisseurs. Pour édifier l’économie forte et compétitive dont il a besoin au XXIe siècle, le gouvernement fédéral devrait examiner les moyens de rationaliser et de moderniser le régime fiscal canadien.

Les prochaines étapes

CGA-Canada recommande que le gouvernement du Canada prenne immédiatement les mesures suivantes pour simplifier la législation de l’impôt et le régime fiscal du Canada :

Faire adopter les centaines de propositions fiscales restées en suspens. Pour diverses raisons, le Parlement a adopté le dernier projet de loi technique relatif à l’impôt sur le revenu il y a plus de 10 ans. Comme le gouvernement a tenu d’importantes consultations sur une série de mesures législatives proposées au cours de l’année dernière, il devrait déposer au Parlement cet automne un projet de loi technique relatif à l’impôt sur le revenu.

Prévoir une disposition d’extinction dans le cas des propositions fiscales non adoptées. CGA-Canada croit que cette approche est la plus efficace pour régler le problème des propositions fiscales non adoptées. Dans le cadre d’une telle politique, si un changement fiscal est annoncé, mais n’est pas intégré dans la législation dans un laps de temps raisonnable, il est considéré comme périmé, comme dans le cas du Royaume-Uni. Cela donnerait à la législation fiscale plus de clarté, de certitude et de prévisibilité, réduirait le fardeau d’observation et de paperasserie et éliminerait l’embarrassant arriéré de propositions fiscales non adoptées.

Éviter toute nouvelle mesure ciblée d’allégement fiscal. Les mesures fiscales ciblées ont été critiquées pour diverses raisons : économiquement inefficaces, injustes parce qu’elles accordent un traitement préférentiel à un groupe ou à un secteur particulier, coûteuses à cause des exigences administratives et d’observation qu’elles imposent, et compliquées par rapport aux réductions d’impôt d’application plus générale. Dans le sondage réalisé en juin 2011 par Recherche Nanos sur les vues des Canadiens au sujet de la simplification du régime fiscal, une majorité de répondants (sept sur dix) ont dit préférer une baisse globale des taux d’imposition au maintien de crédits d’impôt spéciaux. De plus, il ressort clairement de l’examen mené par l’OTS britannique que « dans l’intérêt de l’équité, il faudrait éviter les concessions fiscales lorsqu’elles visent des groupes d’intérêts spéciaux ou des secteurs industriels particuliers[14] ». CGA-Canada est bien d’accord à ce sujet et croit que le gouvernement fédéral devrait même aller plus loin en évaluant l’efficacité des mesures fiscales ciblées qui existent ainsi que d’autres sources de recettes fiscales, comme les droits de permis et les cotisations, en s’inspirant de la méthodologie britannique.

Maintenir des taux d’imposition bas. Les taux et les seuils d’imposition du revenu des particuliers ont été rajustés ces dernières années, et le taux général d’imposition des sociétés baissera à 15 p. 100 d’ici 2012. Des taux d’imposition bas facilitent la conformité. En effet, ils réduisent la probabilité d’une planification fiscale abusive et, partant, d’autres mesures législatives encore plus compliquées pour remédier aux échappatoires fiscales.

Renforcer l’application des règles existantes plutôt que d’en ajouter des nouvelles. Dans son Report on Tax Reform Options, le PERAB américain a avancé l’idée de consacrer davantage de ressources à la mise en vigueur de la réglementation existante et à l’amélioration des moyens utilisés à cette fin afin de réduire l’« écart fiscal », c’est-à-dire la différence entre les obligations fiscales des contribuables dans une année donnée et les impôts effectivement acquittés à temps[15]. Même s’il est difficile de trouver des statistiques sur l’observation de la réglementation fiscale au Canada, une étude de l’OCDE portant sur un certain nombre de pays membres note qu’au Canada, les particuliers ont payé leurs impôts à temps plus de 90 p. 100 du temps entre 2002-2003 et 2006-2007. Au cours de la même période, ce pourcentage s’échelonnait entre 93,1 et 85,4 p. 100 dans le cas des sociétés imposables et entre 90,4 et 87,7 p. 100 dans le cas des employeurs[16]. Même s’il est clair que, dans l’ensemble, la plus grande part de l’impôt est payée à temps, les montants non perçus sont quand même importants. D’après la vérificatrice générale du Canada, le montant total de la dette fiscale non contestée, y compris les pénalités et les intérêts, s’établissait à 18 milliards de dollars au 31 mars 2005[17]. Si l’ARC renforçait ses efforts de mise en vigueur de la réglementation afin de percevoir les impôts dus, grâce à une formation et des ressources supplémentaires, il est probable que le coût de telles mesures serait facilement compensé par les recettes attribuables à ses capacités de détection améliorées.

Intensifier les efforts d’harmonisation. Le gouvernement fédéral devrait continuer à travailler avec les trois provinces « récalcitrantes » (Saskatchewan, Manitoba et Île-du-Prince-Édouard) pour faciliter leur transition vers une taxe provinciale à la valeur ajoutée harmonisée avec la TPS. Dans le cadre d’une taxe de vente harmonisée (TVH), les consommateurs et les entreprises n’ont affaire qu’à un seul taux d’imposition, une seule assiette fiscale, un seul ensemble de règles et un seul organe administratif au lieu de deux. Tous les avantages d’un régime fiscal simplifié s’appliqueraient aussi à un système unique de taxe de vente. De plus, l’harmonisation de la taxe de vente à l’échelle nationale donnerait au Canada l’important avantage fiscal qu’il recherche dans toutes les provinces, ce qui contribuerait au renforcement de la compétitivité des entreprises, attirerait de nouveaux investissements et augmenterait la productivité du pays.

Renforcer la surveillance parlementaire des dépenses fiscales fédérales. D’après une liste de « dix principes pour un meilleur régime fiscal » compilée par l’Institut des comptables agréés d’Angleterre et du pays de Galles, « la réglementation fiscale devrait être adoptée par voie législative et soumise par le Parlement à un examen démocratique adéquat[18] ». Compte tenu du fait qu’au Canada, les dépenses fiscales fédérales se sont élevées à plus de 100 milliards de dollars en 2009, CGA-Canada est d’accord avec le directeur parlementaire du budget, qui estime qu’« il serait bon que les parlementaires envisagent d’établir un processus d’examen des dépenses fiscales semblable à celui qu’on applique aux autres dépenses publiques[19] ». Avec une surveillance parlementaire accrue, on peut espérer que ces mesures fiscales seraient soumises à un examen plus rigoureux pour déterminer si elles satisfont à certains principes établis, comme la simplicité, la transparence, la certitude, l’efficacité, l’équité et la pertinence.

Demander l’avis de spécialistes. L’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont un point commun en matière de fiscalité : ils s’appuient tous les trois sur des experts indépendants pour l’examen du régime fiscal; ils tiennent d’importantes consultations et s’assurent que les législateurs et les décideurs profitent de l’avis de spécialistes de l’extérieur. Le Canada est bien placé pour tirer des enseignements de l’expérience de ses partenaires mondiaux. CGA-Canada croit en outre que le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a un rôle essentiel à jouer dans ce processus, en participant à l’élaboration du mandat et à la définition des enjeux d’une étude, par un comité d’experts, de la législation de l’impôt et du régime fiscal du Canada.

Conclusion

CGA-Canada remercie les membres du Comité permanent des finances de la Chambre des communes de lui avoir donné l’occasion de présenter son point de vue et ses recommandations sur la simplification et l’actualisation du régime fiscal canadien en vue de l’édification d’une économie forte et compétitive pour le XXIe siècle. Nous nous tenons à la disposition du Comité pour donner plus de détails ou répondre à des questions, et lui souhaitons beaucoup de succès dans ses délibérations.



[1]      The Fraser Institute, Taxes versus the Necessities of Life: The Canadian Consumer Tax Index 2011, avril 2011, http://www.fraserinstitute.org/uploadedFiles/fraser-ca/Content/research-news/research/publications/canadian-consumer-tax-index-2011.pdf.

[2]      Pour plus de renseignements, voir CGA-Canada, Point de mire – La nécessité de simplifier l’impôt – Un défi et une occasion, août 2011, http://www.cga-canada.org/fr-ca/ResearchAndAdvocacy/AreasofInterest/TaxSimplification/Pages/TaxSimplication.aspx.

[3]      Pour plus de renseignements sur l’examen des concessions, allocations et exemptions fiscales par le Bureau britannique de simplification de l’impôt (OTS), voir http://www.hm-treasury.gov.uk/ots.htm.

[4]      Pour plus de renseignements sur le document Report on Tax Reform Options: Simplification, Compliance, and Corporate Taxation publié par le President’s Economic Recovery Advisory Board (PERAB) en août 2010, voir http://www.whitehouse.gov/sites/default/files/microsites/PERAB Tax Reform Report.pdf.

[5]      Pour plus de renseignements, consulter le Rapport de la vérificatrice générale du Canada, automne 2009, Chapitre 3 – Les lois de l’impôt sur le revenu, http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/Francais/parl_oag_200911_03_f_33204.html.

[6]      The Fraser Institute, The Costs to Canadians of Complying with Personal Income Taxes, avril 2010, http://www.fraserinstitute.org/publicationdisplay.aspx?id=15958&terms=costs+to+canadians+of+complying+with.

[7]      Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, Le fardeau fiscal invisible : La perspective des entreprises sur le coût de la conformité fiscale, août 2008, http://www.cfib-fcei.ca/cfib-documents/rr3065f.pdf.

[8]      Pour plus de renseignements sur l’Examen fiscal Henry, voir www.taxreview.treasury.gov.au.

[9]      Le Bureau britannique de simplification de l’impôt (OTS) emploie l’expression tax relief (concession fiscale) dans le sens attribué par Finances Canada à l’expression « dépense fiscale ». Pour une définition plus précise de tax relief, consulter le document Review of tax reliefs: interim report, décembre 2010, p. 13, http://www.hm-treasury.gov.uk/d/ots_review_tax_reliefs_interim_report.pdf.

[10]   The Office of Tax Simplification, Review of tax reliefs: final report, mars 2011, http://www.hm­treasury.gov.uk/d/ots review tax reliefs final report.pdf.

[11]   HM Treasury, Budget 2011, mars 2011, page 28, http://cdn.hm-treasury.gov.uk/2011budget_complete.pdf.

[12]   Voir The Report on Tax Reform Options: Simplification, Compliance, and Corporate Taxation, publié par le President’s Economic Recovery Advisory Board en août 2010, http://www.whitehouse.gov/sites/default/files/microsites/PERAB Tax Reform Report.pdf.

[13]   Ryan J. Donmoyer et Peter Cohn, Obama Backs Corporate Rate Cut Along With Tax Simplification, Bloomberg, 26 janvier 2011, http://www.bloomberg.com/news/2011-01-26/obama-backs-cut-in-u-s-corporate-tax-rate-only-if-it-won-t­affect-deficit.html.

[14]   The Office of Tax Simplification, Review of tax reliefs: final report, mars 2011, p. 18.

[15]   The President’s Economic Recovery Advisory Board, The Report on Tax Reform Options: Simplification, Compliance, and Corporate Taxation, août 2010, p. 53.

[16]   Organisation pour la coopération et de développement économiques, Forum sur l’administration fiscale, Sous-groupe de l’observation, Final report, Monitoring Taxpayers’ Compliance: A Practical Guide Based on Revenue Body Experience, 22 juin 2008, p. 63, http://www.oecd.org/dataoecd/51/13/40947920.pdf.

[17] Bureau du vérificateur général du Canada, mai 2006, Rapport Le Point de la vérificatrice générale du Canada, Chapitre 8 – Agence du revenu du Canada – Le recouvrement des impôts et des taxes impayés, http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/Francais/parl_oag_200605_f_1118.html.

[18]   Mémoire, Tax Faculty of the Institute of Chartered Accountants in England and Wales (ICAEW), Office of Tax Simplification – Review of Tax Reliefs, janvier 2011, p. 5, http://www.icaew.com.

[19]   Bureau du directeur parlementaire du budget, Les dépenses fiscales fédérales : utilisation, rapports et examen, 1er juin 2011, http://www.parl.gc.ca/PBO-DPB/documents/Tax_Expenditures_Note_FR.pdf.