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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 131 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 8 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 131e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
    Avant de commencer, je demanderai à toutes les personnes présentes dans la salle de lire les directives imprimées sur les affichettes qui se trouvent sur la table. Ces mesures sont en place pour prévenir les incidents acoustiques et les retours de son et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris des interprètes.
    Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les participants à distance ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 8 novembre 2023, le Comité reprend son étude de l'épidémie d'opioïdes et de la crise des drogues toxiques au Canada.
    Je souhaite la bienvenue à notre groupe de témoins.
    Nous recevons Mme Sarah Larney, professeure agrégée à l'Université de Montréal, qui est en ligne. Sarah MacDonald et Lance Charles sont avec nous dans la salle. Nous accueillons la Dre Cornelia Wieman, médecin hygiéniste en chef de la Régie de la santé des Premières Nations qui est en ligne. Nous accueillons également par vidéoconférence Rory Kulmala, chef de la direction de la Vancouver Island Construction Association.
    Je vous remercie tous de prendre le temps de discuter avec nous aujourd'hui. Comme vous le savez sûrement, vous aurez un maximum de cinq minutes pour vos déclarations préliminaires. Nous passerons ensuite aux séries de questions. Nous allons commencer par Mme Larney.
    Madame Larney, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
    Merci, mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Sarah Larney. J'ai un doctorat en santé publique et je suis professeure agrégée à l'Université de Montréal. Mes recherches portent sur la santé et le bien-être de personnes qui consomment et s'injectent des drogues.
    J'ai mené plusieurs projets qui sont pertinents pour le mandat du Comité. Le plus récent est une analyse des résultats toxicologiques obtenus auprès de personnes décédées d'une surdose au cours de la dernière décennie au Québec. Ces données ont montré que, si le Québec était à l'abri du pire de l'offre de drogues toxiques et de l'épidémie de surdoses avant 2020, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Ces dernières années, le fentanyl est de plus en plus présent chez les personnes décédées d'une surdose, en plus d'une variété croissante de composés très puissants et toxiques, notamment les benzodiazépines, les nitazènes et la xylazine consommés à des fins non médicales.
    Le nombre de décès par surdose d'opioïdes au Québec a augmenté de façon spectaculaire en 2020 et demeure élevé. On compte 319 décès par surdose d'opioïdes au Québec au cours des six premiers mois de l'année, contre 236 au cours de la même période l'an dernier, soit une augmentation de 35 %. Le taux de mortalité par surdose est faible par rapport aux provinces de l'Ouest du Canada, mais la situation continuera probablement de s'aggraver en raison de la toxicité de l'offre de drogues.
    Nous avons également étudié la fréquentation des sites de consommation supervisée à Montréal depuis 2018. Dans le cadre de ce travail, nous avons constaté que la proportion de visites aux sites de consommation supervisée nécessitant l'intervention en cas de surdose a augmenté de façon marquée en 2020 et est restée élevée depuis. Cependant, ces surdoses n'ont pas été mortelles, car le personnel a pu intervenir rapidement, en fournissant de l'oxygène, de la naloxone et des soins supplémentaires au besoin. Les sites de consommation supervisée doivent être un élément central des mesures à prendre face à l'épidémie de surdoses. Le nombre de décès qui surviendraient sans ces sites dans les grandes villes, les régions et partout au pays est inconcevable.
    On dit que l'épidémie actuelle de surdoses remonte souvent à 2014 environ. Des travaux récents aux États‑Unis ont cependant montré que les décès par surdose ont en fait suivi une tendance exponentielle depuis près de 40 ans. En utilisant des données publiques de Statistique Canada, nous avons cerné une tendance de croissance similaire au Canada, avec une augmentation moyenne du taux de mortalité par surdose de 9 % par année, chaque année, depuis l'année 2000. Rien ne montre un ralentissement de cette tendance.
    Je tiens à souligner que la croissance exponentielle ne signifie pas seulement une croissance rapide; elle désigne un modèle spécifique soutenu par un ou plusieurs processus qui catalysent continuellement encore davantage de croissance. Si la nature toxique de l'offre de drogues est la cause immédiate de l'épidémie de surdoses, ces processus sous-jacents contribuent au maintien et à la croissance de l'épidémie. Il s'agit très probablement de tendances socioéconomiques comme l'augmentation des coûts du logement, l'accroissement des inégalités de revenu et la diminution de la mobilité du revenu. Ces tendances se recoupent et influent les unes sur les autres. Ce n'est pas une coïncidence si les décès par surdose ont augmenté à Montréal alors que les coûts du logement ont augmenté de façon spectaculaire et que les inégalités de revenu ont également augmenté.
    Je veux dire par là que des services de réduction des méfaits bien financés et plus contraignants sont essentiels pour gérer la crise aigüe de surdoses. Toutefois, ces services sont paralysés par un ensemble de politiques qui permettent que la croissance de décès par surdose se poursuive. Pour interrompre cette croissance, il faut réformer la politique sociale, s'occuper de la crise du logement, de la stagnation des revenus et d'autres problèmes, notamment la surcharge des systèmes de santé, en particulier ceux de santé mentale, dans tout le pays. La réforme de la politique sur les drogues est également essentielle pour remédier aux incitatifs pervers qui poussent les trafiquants de drogue à produire des substances toujours plus puissantes.
    Aucun des problèmes que j'ai mentionnés n'est la seule cause de l'épidémie de surdoses, et aucune politique ne permettra à elle seule de mettre fin à cette épidémie. Il est plutôt probable que tous ces problèmes devront être résolus d'une manière ou d'une autre et qu'il faudra renforcer le filet de sécurité sociale si nous voulons réussir à aplanir la courbe épidémique.
    Merci.
(1105)
    Merci, madame Larney.
    J'ai maintenant le plaisir d'accueillir Sarah MacDonald et Lance Charles, qui sont ici avec nous dans la salle.
    Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Je crois comprendre que vous allez partager les cinq minutes, si je ne me trompe pas.
    Vous avez la parole. Bienvenue.
    Merci de nous recevoir.
    Je m'appelle Lance Charles. Voici ma femme, Sarah MacDonald. Elle est la mère de Brianna MacDonald. Brianna est décédée de 23 août d'une surdose. Elle était aux prises avec des problèmes de santé mentale, qui l'ont entraînée sur un chemin sombre. C'était une petite fille extraordinaire. Elle avait un rire comme aucun autre enfant. Elle était là pour vous quand vous aviez besoin d'elle.
    À l'époque où je suis entré dans la vie de Brianna, elle a commencé à avoir des problèmes de santé mentale. Elle a également commencé à essayer des drogues. Sa drogue de prédilection était la Molly, ou MDMA, mais elle essayait tout ce qui lui tombait sous la main. Brianna avait plus de 20 tentatives de suicide enregistrées. Elle a essayé de faire une surdose de médicaments sur ordonnance qu'elle volait. Au fil du temps, on s'est rendu compte qu'elle s'engageait sur un chemin très sombre.
    Et nous, comme parents, avons commencé à discuter de ce que nous pouvions faire et avons essayé de lui apporter de l'aide. Nous avons cherché des centres de traitement, des centres de santé mentale, des médecins et des conseillers. Rien de tout cela n'a aidé. Les centres de traitement nous ont dit qu'elle était trop jeune. Les médecins nous ont dit qu'elle avait des problèmes de comportement. D'autres nous ont dit qu'elle était trop jeune pour que l'on puisse poser un diagnostic. Le père de Brianna et moi avons supplié les médecins de la garder à l'hôpital. Les médecins ont fait fi de ce que nous disions et ont signé son congé, en nous renvoyant à la maison avec des trousses de Narcan. La situation commençait à devenir très alarmante. Il semblait que nous passions une semaine sur deux avec Brianna à l'hôpital. On lui a prescrit de nombreux médicaments différents. Certains ont fonctionné un peu, d'autres pas du tout.
    Nous avons remarqué que les choses devenaient plus sombres. Elle est devenue une boule de rage. Elle restait debout toute la nuit à se déplacer furtivement et à prendre de la drogue. Elle a commencé à aller et venir à sa guise. Sarah et moi étions souvent réveillés par la police qui la ramenait à la maison parce qu'elle était extrêmement intoxiquée. La police devait intervenir lorsqu'elle avait des épisodes violents et qu'elle menaçait de se suicider. Un jour, un policier m'a demandé ce que je voulais qu'il fasse. Je lui ai dit: « Elle menace de se faire du mal. S'il vous plaît, invoquez la loi sur la santé mentale, la Mental Health Act, et amenez‑la de force à l'hôpital. » Le policier m'a répondu qu'il ne pouvait pas parce que c'était contre son gré.
    C'est à ce moment‑là que j'ai découvert la loi sur les nourrissons, la Infants Act. Cette petite fille avait plus de droits sur les décisions médicales la concernant que ses propres parents. Elle pouvait dire aux médecins tout ce qu'ils voulaient entendre, et ils lui donnaient son congé. En février de cette année, nous avons retrouvé Brianna dans la cuisine en train de faire une surdose. Sarah a appelé le 911. Une ambulance est arrivée peu de temps après pour amener Brianna à l'hôpital général d'Abbotsford. Sarah s'est mise en colère à l'hôpital. Elle a tenu tête aux médecins qui allaient lui faire un lavage d'estomac et la renvoyer chez elle. Sarah a dit sans ambages aux médecins que nous en avions assez de tout ça. Brianna avait besoin d'aide pour sa santé mentale.
    Cette fois, ils l'ont envoyée à l'hôpital pour enfants de Vancouver. Brianna ne s'en sortait pas bien là‑bas. Elle s'en prenait aux membres du personnel et hurlait. Ils ne pouvaient vraiment pas la gérer. Ils n'étaient pas en mesure de la gérer. Ils l'ont transférée dans un endroit appelé CAPSU, une unité de stabilisation psychiatrique pour enfants et adolescents, à l'hôpital Memorial de Surrey. Ils l'ont gardée pendant environ 10 jours. Là‑bas, elle a eu ses bons jours et ses mauvais jours. Sarah a eu une réunion avec les médecins. Ils lui ont dit que Brianna pouvait obtenir son congé alors que, en fait, ce n'était pas réaliste. Elle venait juste de s'enfoncer un crayon dans la main. Une fois de plus, Sarah s'est battue pour qu'on la garde là‑bas. Bien sûr, tout ce qu'ils ont fait, c'est nous renvoyer chez nous avec une trousse de Narcan.
    C'est à ce moment‑là que nous avons commencé à voir le côté sombre de Brianna. Nous avons remarqué qu'elle avait commencé à consommer régulièrement des drogues comme la Molly. Nous étions stupéfaits qu'elle puisse réellement se procurer ces drogues. Un soir, une voiture s'est arrêtée devant notre maison de manière inattendue. Je suis sorti après avoir demandé à ma femme qui était cette personne qui se trouvait devant notre maison. Nous n'en avions aucune idée. Je suis sorti pour vérifier. J'ai demandé à cette personne pourquoi elle était chez nous. Il s'agissait de deux jeunes de 16 ans qui étaient là pour vendre de la Molly à notre fille. Nous avons pris des photos de la plaque d'immatriculation et avons fait un signalement à la police. La police n'a rien fait. Elle ne nous a même pas fait rapport.
(1110)
    J'étais vraiment inquiet. Peu de temps après, Sarah a commencé à se demander ce que Brianna faisait d'autre, alors elle a commencé à la suivre.
    Brianna se rendait en fait dans un centre de réduction de méfaits. Elle achetait des sacs Ziploc remplis de seringues et d'aiguilles, d'articles servant à la préparation de la drogue et de brochures sur la façon de la préparer et de la consommer en toute sécurité. Nous avons été stupéfaits de voir que ce produit était accessible à une enfant. Comment une fille de 12 ans, à l'époque, pouvait-elle se les procurer? Elle ne peut pas acheter de marijuana dans un dispensaire et elle ne peut pas acheter d'alcool dans un magasin d'alcool, mais elle peut récupérer ces trousses à un site de réduction des risques pour consommer de la drogue, un site destiné aux personnes qui ne sont pas des enfants. Cela n'avait aucun sens.
    Nous voici maintenant aux moments les plus sombres, juste avant son décès. Vers la fin du mois de juillet 2024, Brianna est devenue très violente envers sa mère et moi. C'était le résultat direct non seulement des drogues, mais aussi de sa santé mentale, qui s'était énormément dégradée.
    Sarah était détruite en voyant ce que sa fille faisait. Nous en parlions tous les soirs, en essayant de comprendre quoi faire. Quelques jours plus tard, Brianna est devenue si violente avec nous qu'elle a causé de graves blessures à sa mère, qui s'est retrouvée à l'hôpital avec une grave commotion cérébrale et un grave traumatisme crânien. Je me suis retrouvé avec un œil au beurre noir et une fracture de la cavité orbitaire.
    Sa santé mentale était vraiment mauvaise, et nous ne nous sentions pas en sécurité en l'ayant à la maison alors que nous avions d'autres enfants. La police l'a retirée de notre maison et nous a dit que c'était dangereux qu'elle soit avec nos autres enfants parce qu'elle était devenue très violente. Ils ont fini par l'emmener dans un endroit appelé le Centre Cyrus. Les responsables du Centre Cyrus ont essayé de la maîtriser et de la garder là‑bas. Elle est restée une nuit. La nuit suivante, elle n'est pas revenue.
    Comme elle n'est pas revenue, le Centre Cyrus a publié un rapport de personne disparue. C'est à ce moment‑là que nous avons découvert qu'elle voulait maintenant être dans un camp de sans-abri. Les policiers l'ont trouvée là‑bas. Ils ne nous ont pas dit directement qu'elle était dans un camp pour sans-abri. Nous l'avons découvert quelques jours plus tard, par nous-mêmes.
    Tout ce qu'ils nous ont dit, c'est que l'endroit était sûr et qu'elle était avec une autre adulte — qui n'était personne pour nous. Nous ne la connaissions pas; nous ne connaissions même pas son nom. Depuis quand est‑il acceptable qu'une fille de 13 ans soit dans un camp de sans-abri? Pourquoi la police ne l'a‑t‑elle pas ramenée au Centre Cyrus? Pourquoi l'a‑t‑on laissée là avec une autre adulte qui ne nous fréquente pas?
    Nous sommes restés en contact avec Brianna tous les jours. Nous lui avons apporté de la nourriture et des vêtements, mais elle ne voulait pas rentrer à la maison. Nous avons essayé de lui imposer des règles et de lui donner plus de stabilité; nous lui avons dit que si elle rentrait à la maison, elle devait les suivre. Elle a dit: « Pourquoi? Je peux faire ce que je veux ici. » Cela n'avait aucun sens. Si elle avait besoin de vêtements ou de quoi que ce soit, elle pouvait toujours communiquer avec nous, et nous étions là pour elle.
    Nous arrivons maintenant au 22 et au 23 août 2024.
    Je suis allé travailler le 22 août, pensant que cela n'allait pas changer ma vie. J'étais au travail. Je travaille de nuit chez Seaspan international. J'ai reçu un appel téléphonique de ma femme, qui ne m'appelle jamais à trois heures du matin. C'était le coup de fil qu'un parent redoute.
    Elle a commencé la conversation en disant « je t'aime beaucoup », puis elle m'a alors annoncé que notre fille était décédée. C'est le cauchemar de tous les parents.
    C'est à ce moment‑là que nous nous sommes rendu compte que le système en place l'avait complètement laissée tomber. Les personnes vers lesquelles elle pouvait se tourner pour obtenir de l'aide l'avaient laissée tomber.
(1115)
    Ma question est, et sera toujours, pourquoi les lieux de réduction des méfaits sont‑ils perçus comme sécuritaires? Pourquoi les enfants sont‑ils autorisés... Je ne devrais pas dire « autorisés ». Pourquoi n'y a‑t‑il pas de programmes en place, en fait, pour nos enfants et leur santé mentale? En toute franchise, si elle avait reçu le soutien en santé mentale dont elle avait besoin, elle n'aurait jamais développé cette dépendance.
    Elle nous disait qu'elle voyait des démons et qu'elle entendait des voix dans sa tête, et que la seule façon de les étouffer, c'était avec des drogues. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais lorsqu'on prend du recul et qu'on y repense, c'est grave qu'un enfant ait recours à la drogue pour étouffer les voix dans sa tête. Les problèmes de santé mentale étaient présents, contrairement aux personnes à qui nous avons demandé de l'aide. Elles nous renvoyaient chez nous avec des trousses de Narcan, et nous disaient: « Nous ne pouvons pas la forcer à faire quoi que ce soit contre son gré. »
    Le 19 septembre, Chayton, l'ami de Brianna, un très charmant petit garçon... ils étaient meilleurs amis. Ils ont commencé à expérimenter avec des drogues parce qu'ils avaient, tous les deux, un problème de santé mentale. Il a eu énormément de mal à se faire à l'idée que Brianna était morte, au point de faire une tentative de suicide très peu après ses funérailles. Quelques jours après les funérailles, il a réussi à mettre fin à ses jours. Il n'est plus des nôtres. Ce sont deux enfants de 13 ans qui sont décédés, non seulement des suites de l'utilisation de substances, mais également en raison de problèmes de santé mentale. Il faut que les choses changent parce que nos enfants sont en train de mourir, et nous ne pouvons pas nous permettre d'en perdre davantage.
    Merci de nous avoir invités à nous exprimer ici. J'espère que l'histoire de Brianna et celle de Chayton pourront faire comprendre aux gens les problèmes de nos enfants ainsi que les problèmes avec lesquels les parents de ces enfants composent.
    Je souffre tous les jours de cette situation, car selon moi, si Brianna avait eu accès à du soutien adéquat en santé mentale, aujourd'hui, elle serait toujours parmi nous, et vous expliquerait ces choses, elle-même. Mais, c'est nous qui devons parler à sa place, car elle n'est plus des nôtres. Parler d'un enfant qui n'est plus en vie me brise le cœur. Les choses doivent changer; elles doivent changer maintenant. Nos enfants sont en train de mourir, et aucun autre parent ne devrait souffrir ainsi. J'espère qu'aujourd'hui, nous pourrons apporter quelques réponses et de la clarté quant à ce sujet.
(1120)
    Merci, monsieur Charles. Veuillez accepter mes condoléances, ainsi que celles de mes collègues, pour le décès de votre chère Brianna. Vous avez également notre respect pour le courage dont vous faites preuve en racontant une histoire aussi personnelle sur une tribune publique.
    Nous passons maintenant au First Nations Health Authority, avec la Dre Cornelia Wieman. Docteure Wieman, vous avez la parole pendant cinq minutes.
    Bonjour, boozhoo, aniin.
    Je suis la docteure Nel Wieman. Je suis originaire de la Première Nation Mishi-baawitigong, dans les terres visées par le Traité no 5, qui fait partie de la Nation Anishinabe. Je suis la médecin-hygiéniste en chef de la First Nations Health Authority, ici en Colombie‑Britannique.
    Je tiens à souligner que je m'adresse à vous aujourd'hui depuis les territoires traditionnels non cédés des Nations Musqueam, Squamish, et Tsleil-Waututh.
    La FNHA est la première organisation de son genre au Canada. Elle a été créée par et pour les peuples des Premières Nations de la Colombie‑Britannique afin de soutenir leur santé et leur bien-être. Avant que la crise des drogues toxiques ne soit déclarée une urgence sanitaire en 2016, nous étions aux premières lignes, à lutter contre les effets disproportionnés des drogues sur les membres et les communautés des Premières Nations, lesquelles composent avec des inégalités systémiques et historiques aggravées, ainsi que des traumatismes intergénérationnels.
    Nous avons pour mission de coopérer avec les communautés, et nous continuons de répondre à cette urgence en matière de santé publique, en collaboration avec nos partenaires de la gouvernance de la santé.
    Nos données concernant les Premières Nations de la Colombie‑Britannique sont inquiétantes. En 2023, 448 personnes issues des Premières Nations sont décédées des suites d'un empoisonnement lié à une drogue toxique. Ce chiffre correspond à une augmentation de 10,3 % depuis 2022. Les membres des Premières Nations sont victimes de décès 6,1 fois plus que les autres résidants de la Colombie‑Britannique. Les femmes et les jeunes sont particulièrement surreprésentés. Depuis 2016, nous avons perdu 2 356 personnes. Ces données ne sont pas juste des chiffres. Elles représentent les membres de nos familles, nos tantes, nos jeunes, nos aînés. Nous les aimons, et ils nous manquent. Il ne s'agit là que de la pointe de l'iceberg. Il existe encore un grand nombre de méfaits liés à la consommation de substances, tels que les lésions cérébrales acquises, le détachement, la détresse mentale, spirituelle et émotionnelle.
    Entre 2015 et 2021, l'espérance de vie des personnes issues des Premières Nations en Colombie‑Britannique a baissé de 7,1 années, en raison de la pandémie liée à la COVID‑19 et de l'urgence en matière de santé publique liée aux drogues toxiques. Ces données révèlent les pertes et les méfaits à long terme que nos communautés subissent, et le besoin urgent de prendre des mesures concrètes. À ce jour, la réponse de la FNHA a été axée sur la sécurité culturelle, la mobilisation communautaire ainsi que les initiatives innovantes qui découlent du savoir commun à nos cinq régions. Notre approche est axée sur la communauté et adaptée à chaque nation. Elle soutient un continuum de soins qui s'adapte aux individus, quel que soit leur état de bien-être. Nous avons mis en place et financé un programme culturellement sécuritaire, axé sur la communauté, qui vise à réduire les méfaits. Le programme a pour mission d'élargir l'accès au traitement par agonistes opioïdes, le TAO, de créer des groupes de soutien de pairs et des équipes de sensibilisation, de financer des sites de prévention des surdoses dirigés par les Premières Nations, et d'augmenter l'accès des communautés aux outils permettant la réduction de méfaits. Nous avons également soutenu l'éducation publique et la sensibilisation par l'entremise de notre programme de formation « Not Just Naloxone » et nos campagnes de communication. Nous avons élargi les programmes culturels, y compris en mettant sur pied des initiatives de guérison fondées sur la terre, et nous avons financé l'accès rapide aux centres de traitements et de guérison qui incorporent des pratiques culturellement sécuritaires.
    Si des progrès ont été faits, nous continuons d'être confrontés à des obstacles importants. Ces obstacles comprennent le manque d'accès aux services de traitement, en particulier dans les zones rurales et éloignées, et le manque de financement flexible, soutenu, à long terme, y compris pour les programmes culturels. Nous ne pouvons pas faire abstraction du fait que le racisme, la discrimination, et le manque de reconnaissance des conséquences intergénérationnelles de colonialisme contribuent à créer des centres de soins culturellement non sécuritaires. Cette situation est davantage accentuée par la stigmatisation entourant l'usage de substances, qui empêche les gens d'avoir accès aux soins.
    Pour conclure, la crise des drogues toxiques de 2024 est plus mortelle que celle d'il y a neuf ans. Les décès sont dus principalement à l'augmentation imprévisible de l'approvisionnement en drogues dangereuses, potentiellement mortelles, et non réglementées. La politisation de cette urgence menace le progrès, surtout dans la mesure où les réactions contre les mesures de réduction des méfaits, lesquelles sont susceptibles de sauver des vies et sont appuyées par des données probantes, touchent davantage les Premières Nations, et exacerbent les inégalités existantes.
(1125)
    Chaque perte est profondément ressentie par les familles et les communautés. Nous demandons à nos partenaires du réseau de la santé de mettre sur pied des solutions dirigées par les Premières Nations, qui soient culturellement sécuritaires, qui tiennent compte des traumatismes et qui soient financées de façon appropriée.
    Merci de votre attention aujourd'hui.
    Merci, meegwetch.
    Merci, docteure Wieman.
    Le prochain intervenant est Rory Kulmala de la Vancouver Island Construction Association.
    Monsieur Kulmala, bienvenue au Comité. Vous avez la parole.
    Je m'appelle Rory Kulmala; je suis chef de la direction de Vancouver Island Construction Association, la VICA, où j'ai le privilège de travailler et de vivre dans les territoires traditionnels des peuples Lekwungen, et sur les terres historiques avec lesquelles nous avons noué une relation par le biais des peuples Songhees, Esquimalt et Saanich jusqu'à ce jour.
    Cette année 2024 marque le huitième anniversaire de l'état d'urgence décrété par le gouvernement de la Colombie‑Britannique en 2016, en réponse à l'augmentation dramatique des décès liés aux surdoses. L'empoisonnement lié aux drogues toxiques et aux drogues illicites demeure la cause principale des décès non naturels en Colombie‑Britannique. Elle dépasse, de loin, les décès causés par le suicide, les accidents de voiture, les homicides, et les surdoses de médicaments sur ordonnance.
    En 2022, le bureau du coroner de la province a émis un rapport intitulé: « BC Coroners Service Death Review Panel: A Review of Illicit Drug Toxicity Deaths ». Selon le rapport, sur un échantillon représentatif de Britanno-Colombiens, les décès dus à l'empoisonnement lié aux drogues toxiques ont tendance à toucher principalement quelques groupes démographiques. Selon une conclusion importante de ce rapport, il y aurait une tendance par secteur d'emploi. Parmi ceux qui travaillaient au moment de leur décès, 52 % travaillaient dans la construction et les métiers spécialisés, le transport et l'opération d'équipements. Le nombre élevé des décès causés par l'empoisonnement lié aux drogues dans l'industrie de la construction a été, en partie, attribué à l'utilisation de substances et aux conséquences relatives aux environnements de travail pénibles, et aux quarts de travail longs et douloureux. La stigmatisation est omniprésente dans l'industrie de la construction, et il s'agit véritablement d'un obstacle à l'accès aux traitements, aux ressources et aux soutiens en matière de réduction des méfaits, y compris le soutien en santé mentale.
    Le projet « Tailgate Toolkit », une trousse à outils axée sur des discussions informelles, que nous avons mis sur pied, était initialement financé par Island Health. Il découle d'un besoin accru de soutiens et de services créés spécifiquement pour l'industrie de la construction. Le travail effectué par l'équipe de la VICA chargée de réduire les méfaits, dans le cadre de la création d'un programme et d'une discussion pour l'industrie, a été récompensé par le gouvernement provincial. Le financement du projet, reçu en janvier 2022, nous a permis d'offrir cette formation dans toute la province.
    Ce projet s'adresse aux travailleurs de la construction et à ceux des métiers spécialisés qui utilisent des substances, ainsi qu'aux employeurs qui souhaitent augmenter la sensibilisation à la réduction des méfaits sur leurs lieux de travail. Il a pour objectif de sensibiliser, d'accroître l'accès aux services de réduction des méfaits, et de fournir des idées à ceux qui œuvrent dans l'industrie de la construction. Le projet est le premier de son genre dans cette industrie. Il est innovateur dans la mesure où il collabore avec des gardiens autochtones du savoir, des avocats, une organisation qui soutient des personnes vivant avec de la douleur chronique, des personnes ayant une expérience vécue passée ou présente, des autorités sanitaires, des superviseurs et des propriétaires d'entreprises de construction et des groupes de métiers, afin d'éliminer la stigmatisation et de fournir une formation et une éducation qui répondent aux besoins de l'industrie. Il vise à réduire le nombre de décès liés aux drogues toxiques dans la province de la Colombie‑Britannique.
    La trousse à outils est composée de trois éléments. Les discussions informelles liées à la trousse à outils durent entre 30 et 45 minutes et peuvent se tenir sur le chantier, ou sur Zoom avec l'équipe de la VICA chargée de réduire les méfaits. Ces discussions soulignent les statistiques concernant la crise de l'empoisonnement lié aux drogues, la raison pour laquelle cette crise pose problème dans le secteur de la construction, la raison pour laquelle c'est particulièrement problématique pour les hommes, le lien entre la santé mentale et l'utilisation de substances, les ressources en santé mentale et physique, les ressources en matière de guérison et de réduction des méfaits, et tout autre type de ressources accessibles, ainsi que les soutiens dont les employés pourraient avoir besoin.
    Ces discussions peuvent également s'accompagner de la distribution de trousses de naloxone et d'une formation sur ces trousses.
    Pour ce qui est du deuxième élément, il s'agit d'un cours de formation qui s'adresse aux superviseurs et aux dirigeants. La formation se donne sur deux jours entiers ou sur quatre demi-journées. Elle porte sur les statistiques concernant la crise de l'empoisonnement lié aux drogues, présente l'approche de la réduction des méfaits et suppose des discussions concernant l'industrie de la construction, l'utilisation de substances et la santé mentale, les composantes de la stigmatisation, la façon de reconnaître les signes de l'utilisation de substances et les troubles, les premiers soins en santé mentale, les connaissances sur la santé mentale et l'utilisation de substances, l'accent étant mis sur les discussions de soutien efficaces, une formation sur l'administration du naloxone, les points de vue autochtones, l'écoute active, la compassion, la résilience, la différence entre la douleur chronique et la douleur aigüe, les préjugés entourant la gestion de la douleur, et bien d'autres choses, par le biais du résumé des services offerts.
(1130)
    Né d'une consultation avec les autorités sanitaires, le troisième élément de la trousse à outils se compose de ressources en format numérique et imprimé, à l'intention des employés et des employeurs. Les ressources soulignent les services de réduction de méfaits et les services de guérison accessibles aux travailleurs, lesquels sont compris, ou non, dans l'ensemble de leurs avantages sociaux. Les ressources en question sont un mélange de ressources accessibles à l'échelle des provinces et qui sont spécifiques à des régions. Elles comprennent les soutiens spécifiques à l'identité, y compris les organisations dirigées par les Autochtones ainsi que les groupes propres aux divers secteurs.
    L'équipe actuelle de la VICA chargée de réduire les méfaits est composée d'animateurs régionaux répartis dans les bureaux d'associations de construction provinciaux. Nous les appelons les RCA. Ce sont tous des travailleurs sociaux formés qui travaillent en collaboration avec les autorités sanitaires provinciales. Les animateurs recueillent de l'information sur les programmes et services accessibles dans leur région et dans la province. Ils se renseignent également sur les besoins des personnes qui vivent et travaillent dans ces régions.
    À l'heure actuelle, notre association de construction de la Colombie‑Britannique rejoint plus de 12 300 entreprises liées à la construction. Les animateurs offrent la formation soit en ligne soit en personne, ce qui permet aux communautés pour qui un déplacement serait un obstacle, d'y avoir accès.
    En partenariat avec la Umbrella Society, un centre de soutien en matière d'utilisation de substances, ici à Victoria le dernier élément du projet de la VICA organise des réunions hebdomadaires pour les travailleurs de la construction qui composent avec l'utilisation de substances. Ces réunions sont animées par les employés de la Umbrella Society qui ont une expérience vécue en tant que consommateur de substances, et en tant que travailleur de la construction.
    De janvier 2023 à la fin de mois de septembre 2024, l'équipe de la VICA chargée de réduire les méfaits a eu l'occasion d'animer 230 discussions. Plus de 5 500 personnes travaillant dans l'industrie de la construction...
(1135)
    Monsieur Kulmala, puis‑je vous demander de conclure? Vous aurez beaucoup de temps pour en dire plus sur votre exposé pendant la période de questions et de réponses qui suivra.
    Bien sûr. Cela résume nos éléments, et je vais m'arrêter là.
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant commencer nos périodes de questions en commençant par les conservateurs.
    Nous allons passer à M. Doherty pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par vous remercier, monsieur le président, d'avoir accordé à nos témoins le temps qu'ils méritent pour raconter leur histoire.
    Je vais concentrer mes questions sur M. Charles et Mme MacDonald.
    Je tiens à vous remercier de votre force. Je ne sais pas si j'aurais eu la même force que vous, alors je vous remercie.
    Si vous pouviez envoyer un message à Justin Trudeau concernant l'échec des politiques sur les drogues, quel serait‑il?
    Comment pouvez-vous mettre « sécuritaire » et « drogues » dans la même phrase? Cela n'a aucun sens. Ces deux mots se contredisent profondément l'un l'autre.
    Pour ce qui est des politiques, vous devriez vous concentrer sur ces deux mots, et ils devraient vous dire et vous donner une réponse. Les mots « sécuritaire » et « drogues » ne se mélangent pas.
    Le système a laissé tomber Brianna. Nous n'avions besoin que d'un adulte qui se lève dans la salle pour se battre pour vous.
    Vous avez prié les médecins et ces personnes qui auraient dû être là de ne pas faire de mal et d'aider votre fille. Quel message avez-vous reçu?
    L'aide n'était pas là. Les médecins nous renvoyaient toujours, et cela envoyait un message que vraiment…
    Ce n'était pas important.
    … ce n'était pas important du tout, qu'elle n'était pas importante et que sa santé mentale n'était pas importante.
    Je pense que j'ai lu quelque part qu'on vous a essentiellement dit que, si elle voulait se tuer, c'est son choix. Est‑ce vrai?
    Oui.
    C'est très vrai.
    Pensez-vous que Brianna serait vivante aujourd'hui si elle avait reçu l'aide dont elle avait besoin, l'aide en santé mentale?
    Je pense que non seulement elle serait ici aujourd'hui, mais elle pourrait s'exprimer à propos de sa propre situation et de ce qu'elle a traversé. Je pense que, si l'aide avait été là et offerte, son magnifique sourire serait toujours ici.
    Pour que tout soit clair, Brianna venait d'avoir 13 ans, n'est‑ce pas?
    Oui, en juillet, le 15 juillet.
    Elle avait donc 13 ans et un mois.
    Le 15 juillet, vous avez dit? C'est le même jour que l'anniversaire de mon fils. Je dois souligner qu'elle est décédée le jour de l'anniversaire de ma fille.
    Que dit l'histoire de Brianna sur l'état des soins de santé mentale au Canada?
(1140)
    Le système est essentiellement brisé. Le système conçu pour l'aider et la guider dans la vie, surtout pour ce qui est de composer avec la santé mentale, n'est tout simplement pas là.
    Toutes les fois où nous avons demandé aux médecins d'apporter des changements et de quelle façon l'aider, elle était ou bien trop jeune pour les programmes ou bien il n'y avait pas de programmes du tout.
    Ils ont permis à une jeune fille de 13 ans de rédiger ses propres plans de sortie à des fins de sécurité. Est‑ce exact?
    C'est exact.
    Elle a écrit sur ce plan, et c'était une petite fille très manipulatrice.
    Ma question est la suivante: pourquoi une enfant a‑t‑elle été autorisée à rédiger son propre plan de sortie à des fins de sécurité alors que les médecins sont censés le faire? Ce sont les adultes. C'est à eux de décider comment sa sécurité est censée être, pas à une enfant, et pas à une enfant qui ne va pas bien.
    Vous étiez impuissants.
    Absolument.
    Du moment où elle s'est retrouvée à la rue jusqu'à son décès, combien de temps s'est écoulé?
    C'était presque quatre semaines.
    Ses drogues de choix étaient la Molly et le fentanyl, n'est‑ce pas?
    C'était la Molly, le fentanyl ou tout ce sur quoi elle pouvait tomber, vraiment.
    La Molly était sa drogue de choix.
    C'était sa drogue de choix, oui.
    Les centres d'injection et de consommation supervisées fonctionnent‑ils?
    Non.
    Absolument pas.
    Non. Ils ne font pas de discrimination par rapport à l'âge et ils continuent de remettre des trousses à ces enfants. C'est très facile d'accès.
    C'est partout. Vous ne pouvez aller nulle part sans en voir maintenant. C'était autrefois tabou de voir quelqu'un fumer un joint dans la rue. Maintenant, vous pouvez passer à côté de gens qui fument du crack. C'est dégoûtant.
    Nous avons dîné une fois chez A&W. C'était à midi, en plein jour. J'ai dû dire à mon beau-fils de ne pas regarder par la fenêtre, parce que six personnes étaient assises en train de chauffer leur héroïne pour pouvoir se l'injecter. C'était juste à l'extérieur de la fenêtre où nous dînions.
    Ce n'est pas acceptable. Ce n'est pas ce que j'appelle sécuritaire.
    Nos collectivités sont-elles devenues moins sécuritaires ces dernières années?
    Absolument. Je pense qu'elles sont de moins en moins sécuritaires au fil des jours.
    Merci, monsieur Doherty, et merci, monsieur Charles.
    La prochaine est Mme Brière pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame MacDonald et monsieur Charles, vous avez toute ma sympathie. Je partage votre douleur. Je salue votre courage en racontant cette histoire bouleversante.
    À votre avis, que devrait‑on faire pour que les parents participent au travail de prévention pour protéger nos jeunes Canadiens?
    Nous devrions avoir plus de droits sur nos enfants. Nous devrions pouvoir nous porter à leur défense et défendre leurs intérêts, afin qu'ils n'aient pas à se défendre eux-mêmes lorsqu'ils sont trop jeunes. Nous sommes censés être leurs tuteurs légaux. Nous sommes censés prendre soin d'eux. Nous devons le faire. Nous devons retrouver cette autorité.
    À l'heure actuelle, nous ne sommes que des tuteurs des enfants du gouvernement. Ce ne sont même pas les nôtres.
    Saviez-vous où aller pour obtenir de l'aide ou des services?
    Absolument. J'ai exercé toutes les options qui étaient à ma disposition. Je suis allée dans les hôpitaux, je suis allée dans des établissements de santé mentale. Nous sommes allés partout. On nous a essentiellement dit: « Nous avons exercé toutes nos options. Nous sommes désolés. Nous vous présentons nos condoléances. Nous nous réjouissons de vos efforts. Nous vous remercions. »
    Le seul cadeau qu'ils nous ont donné, vraiment, c'était une trousse de Narcan. C'est assez alarmant en tant que parent de recevoir une trousse de Narcan plutôt que de se faire dire: « Hé, voici le numéro d'un médecin. Ces gens pourront peut-être aider. »
    Les travailleurs sociaux n'avaient aucune idée. La réponse qu'ils nous ont donnée était que leurs ressources étaient très limitées. Surtout à cause de son âge, il n'y avait pas grand-chose à faire.
    Pensez-vous que les services ciblent davantage les adultes que les jeunes?
    Je pense que lorsque la réduction des méfaits a été introduite, les enfants ne faisaient pas vraiment partie de l'équation à ce moment‑là. Les drogues récréatives et les choses du genre… C'était surtout une affaire d'adulte. Maintenant, cependant — je déteste le dire — cela atteint nos enfants à une vitesse très alarmante, et les enfants en souffrent. Je ne pense pas que c'est parce qu'ils choisissent de prendre des drogues; je pense que c'est parce que leur santé mentale est au plus bas.
    Les choses doivent changer. La santé mentale doit être changée, tout comme ces politiques.
(1145)
    Merci.
    Monsieur Kulmala, pouvez-vous parler un peu plus de la boîte à outils?
    Bien sûr.
    La boîte à outils a été générée à un moment où nous essayions de sensibiliser le secteur de la construction. Comme je l'ai mentionné, environ 52 % de ces travailleurs employés provenaient de notre secteur. Lorsque nous avons commencé ce programme en 2017, la statistique était effectivement qu'une personne sur quatre qui mourait travaillait dans la construction. Nous avons généralisé le mot « construction »; c'est le secteur des métiers, et les travailleurs commerciaux et les cols bleus.
    Encore une fois, je ne prétends pas avoir d'expérience dans les soins de santé, mais l'idée était la suivante: comment transmettre une information qui permet aux personnes qui l'éviteraient autrement ou ne demanderaient pas d'aide de trouver l'information, d'obtenir de l'attention et un traitement? J'ai reçu au départ un coordinateur de la réduction des méfaits provenant de l'Autorité sanitaire de l'île. Nous faisions des déjeuners-causeries, des séances d'une heure. Vous pouvez imaginer que, lorsque nous invitions des travailleurs à venir nous voir, personne ne se présentait. Nous avons trouvé cela un peu préoccupant, compte tenu des statistiques qui étaient publiées. Il y avait également l'idée que cela ne se passait pas dans notre secteur. C'était du déni. Il a fallu huit ans pour reconnaître que cette crise touche le secteur de la construction. Plus que cela, c'est une conséquence sociale.
    Nous essayons de faire notre part pour tendre la main aux travailleurs de la construction. Dans le cadre de notre stratégie de sensibilisation aux entreprises, nous travaillons également avec les collèges communautaires locaux qui fournissent une formation d'apprentis de première et deuxième année. Nous nous efforçons de créer une sensibilisation. Ce qui est arrivé, madame, c'est que nous avons reçu des travailleurs qui se tenaient debout avec les bras croisés dans une réunion matinale… À titre d'information et de sensibilisation générale, une « discussion informelle » est quelque chose qui se passe tout le temps sur un chantier de construction. C'est ainsi qu'on commence la journée. Cela se fait habituellement sur le hayon d'une camionnette. Nous disons: « Nous allons faire ces travaux. Tenez-vous loin de cette zone. Ces livraisons ont lieu. »
    Eh bien, depuis que nous avons instauré cet élément, il y a des travailleurs qui sont manifestement mal à l'aise avec la conversation, mais qui, à la fin, disent qu'ils connaissent quelqu'un qui doit obtenir ce dépliant, qui doit venir à ce groupe de soutien. Nous offrons un éventail de soins. C'est même utile pour les personnes qui ont une forte dépendance à l'alcool. Nous ne faisons pas de discrimination. Ce ne sont pas nécessairement des drogues toxiques; nous ne nous concentrons pas uniquement sur les drogues toxiques. Nous mettons l'accent sur des éléments qui forceraient une personne à, vous savez, sortir et faire la fête un soir et en commençant par quelques bières. L'instant d'après, elles sont en train de prendre de l'héroïne.
    Vous savez, nous estimons que les circonstances donnent à penser qu'il y a des moyens de les informer au sujet de ce qu'ils devraient rechercher, et aussi de former les employeurs pour dire: « Ne laissez pas les gens souffrir en vain. Si vous voyez quelqu'un qui éprouve clairement des difficultés… » Ils sont peut-être sobres ou lucides pendant le jour, mais le soir, ils rentrent chez eux et se retrouvent dans un endroit très sombre. Ils consomment des drogues pour composer avec la situation, puis se lèvent et recommencent le lendemain.
    Merci, monsieur Kulmala.
    Monsieur Thériault, allez‑y pour six minutes, s'il vous plaît.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Madame Macdonald, monsieur Charles, je joins ma voix à celle du président du Comité pour vous offrir mes pensées les plus sincères et ma compassion. Nous sommes ici pour tenter de trouver des solutions à des situations extrêmement difficiles sur le plan humain. J'ai l'impression que, plus nous avancerons dans cette étude, plus nous risquons d'avoir nous-mêmes besoin de ressources. En effet, le sujet nous touche énormément. Des gens meurent tous les jours dans les rues à cause de la crise des drogues toxiques et laissent derrière eux des frères, des sœurs, des parents, qui vivent ce drame. On compte jusqu'à maintenant plus de 45 000 décès dus à des surdoses, et on cherche des solutions.
    Comme les solutions doivent reposer sur des données probantes, j'aimerais parler d'une recherche sur laquelle je suis tombé, professeure Larney. J'aimerais aussi, par la même occasion, vous demander de déposer au Comité votre étude qui porte sur les tendances des résultats toxicologiques sur les décès par intoxication involontaire aux opioïdes et stimulants au Québec. Je veux que vous le fassiez pour que nous puissions avoir officiellement entre les mains ce document quand nous essaierons de faire un rapport.
    À la fin, vous dites qu'il existe une série d'interventions pour prévenir et répondre aux surdoses aiguës, notamment la consommation supervisée, les sites de prévention des surdoses, la prescription d'un approvisionnement plus sûr, la vérification des médicaments — j'imagine que vous parlez ici de la vérification des drogues —, la distribution de Naloxol, des traitements par antagonisme des opioïdes également. Vous dites plus loin qu'il faudrait aussi poursuivre les recherches pour établir, notamment en ce qui concerne la vérification des médicaments et l'approvisionnement sûr, s'il existe des résultats pouvant être considérés comme probants, et déterminer l'efficacité de ces mesures.
    Il y a présentement au Canada une tendance marquée, en politique, à revenir en arrière, à être frileux et, pour des considérations purement électoralistes, à dire qu'on va mettre fin à certaines mesures. J'aimerais que vous nous en disiez davantage là-dessus.
(1150)

[Traduction]

    Je vous remercie de la question. Je serai heureuse de communiquer au Comité le document dont vous venez de parler.
    L'une des interventions qui sont mises en œuvre dans l'ensemble du pays est l'approvisionnement sécuritaire. Nous participons actuellement à une partie des travaux d'examen de la littérature sur l'approvisionnement sécuritaire.
    Il y a des preuves, particulièrement dans l'équipe du Dr Bohdan Nosyk, dont le Comité a entendu parler, je pense, du fait que la prescription d'un approvisionnement sécuritaire ou que la prescription visant à atténuer des risques pendant la pandémie de COVID‑19 ont été associées à une réduction du risque de décès. C'est très prometteur. Plus de travail — nos recherches quantitatives en particulier — sur les répercussions de l'approvisionnement sécuritaire est nécessaire.
    Je pense qu'il est très important de dire que le manque de données probantes concernant une intervention n'est pas la preuve d'un manque d'efficacité. Ce qui se passe avec l'approvisionnement sécuritaire en ce moment, c'est un manque de données probantes dans de nombreux cas. Nous devons disposer de plus de travail quantitatif comme celui réalisé par le Dr Nosyk, soit des études quantitatives très soigneusement conçues qui évaluent les programmes d'approvisionnement sécuritaire dans l'ensemble du pays, de la manière dont nous le ferions avec toute nouvelle intervention médicale.
    Je pense que le retrait de ces programmes aurait des conséquences dévastatrices sur les personnes qui font actuellement partie des programmes d'approvisionnement sécuritaire. Nous savons que les programmes d'approvisionnement sécuritaire aident les personnes à regagner un certain degré de contrôle sur leur vie.
    En même temps, toutefois, je pense que nous avons besoin de plus d'études de ce que sont les éléments efficaces des programmes d'approvisionnement sécuritaire et que nous devons également tenir compte de l'éventail des programmes. À l'heure actuelle, il existe beaucoup de modèles différents, alors il s'agit de comprendre ces différents modèles, de parvenir à une compréhension plus claire de ce que cela signifie réellement lorsque nous parlons d'approvisionnement sécuritaire, et de comprendre ce que sont les éléments efficaces de ces modèles.
(1155)

[Français]

     Certains pensent que, si on oblige les gens à suivre des traitements, on va réussir à régler le problème dans les plus brefs délais possible.
    Selon ce que vous savez, croyez-vous que le traitement obligatoire serait efficace? Quand vous parlez d'une réforme en profondeur des politiques sociales, à quoi pensez-vous?

[Traduction]

    Veuillez répondre brièvement, si vous le pouvez, s'il vous plaît, madame Larney. Nous n'avons plus de temps.
    Le traitement obligatoire a été étudié dans un certain nombre de contextes et il est très peu efficace, parce que le traitement pour un trouble lié à la consommation de substances n'est pas un processus ponctuel. C'est une affection continue et récurrente qui nécessite une approche plus nuancée qu'un contexte obligatoire, qui est habituellement une solution universelle.
    Pour ce qui est des politiques sociales, je dirais que nous devons examiner la crise du logement. Nous devons examiner la stagnation et la mobilité des revenus, la mobilité des revenus intergénérationnels, le chômage, toutes ces choses qui contribuent à un filet de sécurité sociale robuste, que le Québec avait la réputation de posséder et dont les autres provinces étaient souvent jalouses, mais qui a été quelque peu…
    Merci.
    … endommagé ces dernières années.
    Merci, madame Larney.
    Le prochain est M. Johns, s'il vous plaît, pour six minutes.
    Tout d'abord, je tiens à remercier tous les témoins de leur témoignage, et en particulier vous, madame MacDonald et monsieur Charles, d'avoir le courage de venir jusqu'ici et de raconter votre histoire. Nous espérons qu'elle permettra de prévenir des décès de jeunes qui ne devraient pas se produire.
    Si un enfant se casse la jambe et qu'il va à l'hôpital, il ne se fera pas refuser des soins parce que nous n'offrons pas certains types de soins pour sa jambe cassée. Il recevra les soins. Nous n'avons pas de parité pour ce qui est des soins de santé mentale et physique, essentiellement à cause de la stigmatisation, je pense. Pensez-vous que nous n'avons pas de parité à cause de la stigmatisation dans la santé mentale et physique?
    À mon humble avis, oui, je pense qu'il existe toujours une grande stigmatisation de la santé mentale, surtout chez les jeunes. Je pense qu'on l'a négligée et elle a été reléguée au second plan par rapport à, encore une fois, l'approvisionnement sécuritaire et la réduction des méfaits. C'est presque comme si elle s'était perdue dans le vent.
    Vous avez mentionné qu'elle a été gardée pendant 10 jours puis a obtenu son congé. Quel type de soins espériez-vous qu'elle puisse recevoir plutôt que de recevoir son congé? Quel type de soins aurait aidé Brianna, selon vous, à se stabiliser et à se rétablir?
    Je pense que si les médecins avaient pris le temps d'examiner sa santé mentale et de l'évaluer correctement, ils auraient vu combien de problèmes elle avait.
    Vous avez mentionné le manque de disponibilité des programmes de santé mentale pour les jeunes. C'est assez clair. Pensez-vous que le gouvernement doit augmenter le financement des mesures de soutien de la santé mentale des jeunes? Avons-nous besoin de plus d'éducation pour les professionnels de la santé concernant la santé mentale des jeunes? Je pose la question parce que, de toute évidence, il semble que les professionnels ont prouvé qu'ils n'étaient pas équipés.
    Je suis d'accord avec vous, oui. Il doit y avoir plus d'éducation; il doit y avoir plus de formation pour les médecins et les infirmières.
    Une fois, un médecin nous a dit qu'elle était trop jeune pour qu'il puisse porter un diagnostic, ce qui est tout à fait faux à mon avis, parce que, aux États-Unis, ils posent des diagnostics pour des enfants très jeunes, et le processus fonctionne.
    Il doit y avoir un certain type de séparation entre les deux, et je pense que le manque d'éducation et le manque de… Il devrait y avoir plus de financement pour les traitements et l'éducation des fournisseurs de soins de santé.
(1200)
    Le fait d'avoir un enfant en proie à des problèmes de santé mentale et de consommation de substances est extrêmement difficile pour votre famille et pour vous, en tant que parents. Avez-vous reçu du soutien lorsque vous faisiez face à ces problèmes avec votre fille? Y a‑t‑il des mesures de soutien qui vous auraient aidés et auraient aidé vos enfants alors que vous naviguiez dans le système brisé pour vous occuper de Brianna?
    Nous avons reçu un peu d'aide, principalement de quelques travailleurs sociaux ici et là. Ils ont littéralement épuisé toutes leurs ressources. Ils ont même essayé de tirer quelques ficelles pour trouver des solutions novatrices. Leurs mains étaient liées parce que tout était très limité.
    Les quelques centres de traitement que nous devions payer de notre poche ne l'acceptaient pas parce qu'elle n'avait pas un âge donné.
    Oui, nous avons reçu un peu d'aide, mais encore une fois, il n'y avait pas de programme ni quoi que ce soit de disponible pour elle et sa situation.
    Je suis désolé de votre perte ainsi que pour Chayton et sa famille également.
    Merci.
    Docteure Wieman, je suis très reconnaissant que vous soyez ici et que vous vous joigniez à nous à distance aujourd'hui.
    De votre point de vue, le gouvernement fédéral en fait‑il assez pour réagir au traumatisme intergénérationnel découlant du colonialisme et des pensionnats?
    Pensez-vous que les Premières Nations reçoivent suffisamment de ressources du gouvernement fédéral pour satisfaire à la demande de soins de santé mentale et de soins liés à la consommation de substances qui soient adaptées à la culture?
    Je pense que vous savez que le Conseil tribal Nuu-chah-nulth a déclaré une urgence de santé mentale dans ma circonscription.
    Pourriez-vous également parler des obstacles à l'accès au financement fédéral, y compris les demandes au titre du Programme sur l'usage et les dépendances aux substances, qui ont été rejetées en Colombie-Britannique?
    Je vous remercie des questions.
    Pour commencer, je tiens à exprimer mes plus sincères condoléances à M. Charles et à Mme MacDonald qui ont présenté leur témoignage.
    Je vais commencer en disant que, pour les membres des Premières Nations, le plus souvent, la raison sous-jacente pour laquelle les gens choisissent de consommer des substances, ce sont les traumatismes — leur état de santé mentale — issus d'expériences historiques, d'expériences contemporaines de traumatisme ou d'expériences intergénérationnelles de traumatisme. Les gens consomment des substances parce qu'ils veulent changer la façon dont ils se sentent. C'est probablement très semblable pour les autres personnes qui ne sont pas des membres des Premières Nations.
    Ici en Colombie-Britannique, bien sûr, nous sommes très préoccupés, car j'ai communiqué les données concernant les membres des Premières Nations en Colombie-Britannique, surtout en ce qui concerne la diminution de l'espérance de vie, qui est principalement due à l'urgence de santé publique liée à la crise des drogues toxiques. Comme vous l'avez mentionné, il y a les diverses déclarations d'urgence concernant la crise des drogues toxiques dans des régions différentes de la province par les collectivités des Premières Nations ou les conseils tribaux, etc.
    Pour répondre à votre question, nous estimons que le niveau de financement qui pourrait être mis à profit pour lutter contre la crise des drogues toxiques de façon générale fait probablement défaut. Par exemple, j'ai dit plus tôt que le montant du financement qui a été affecté à la pandémie de COVID‑19 par rapport à ce qui a été attribué pour réagir à l'urgence de santé publique qui en est maintenant à sa neuvième année, où nous avons perdu beaucoup plus de gens en raison des drogues toxiques qu'à cause de la pandémie de COVID‑19, nous montre quelque chose.
    Je pense que nous avons déjà parlé devant le Comité de la stigmatisation.
    Merci, docteure Wieman.
    Nous allons passer à M. Doherty pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Charles et madame MacDonald, pourquoi Brianna a‑t‑elle commencé à consommer de la drogue, et à quel âge a‑t‑elle commencé?
    Elle a commencé à consommer de la drogue vers dix ans et demi, peu après que son beau-père et moi avons rompu. Elle ne le prenait tout simplement pas très bien.
(1205)
    Elle voulait aussi étouffer les démons et les voix qu'elle entendait sans cesse.
    L'approvisionnement sécuritaire est‑il vraiment sécuritaire?
    Comment pouvez-vous mettre les mots « sécuritaire », « approvisionnement » et « drogues » dans la même phrase? Il n'existe tout simplement pas de drogues sécuritaires.
    L'approvisionnement sécuritaire aurait‑il permis de sauver Brianna?
    Non.
    Pensez-vous que Brianna a été victime de l'échec d'une politique sur les drogues?
    Je pense que ce n'est pas seulement la politique sur les drogues qui l'a laissée tomber; c'est le système de santé public dans son ensemble. Il y a eu de nombreuses couches d'échec différentes. Ce n'était que l'une d'entre elles.
    Pouvez-vous nous parler un peu plus de Chayton?
    C'était un petit garçon aimant et très courtois.
    Brianna et lui parlaient au téléphone et discutaient pendant des heures. Ils s'adoraient tout simplement. C'était des meilleurs amis. Ils se connaissaient depuis quelques années et se renforçaient mutuellement, dans le bon comme dans le mauvais sens.
    Oui.
    Il l'a vraiment pris personnellement, et j'en suis vraiment désolée.
    Que peut faire le gouvernement fédéral pour s'assurer que des tragédies comme celles de Brianna et Chayton ne se produisent plus jamais?
    Apporter des changements à la politique de santé publique. Commencer à donner plus de fonds et à fournir plus de formation aux travailleurs de la santé qui en ont besoin. Pour les médecins, il doit y avoir plus de formation. Pour être honnête avec vous, on dirait que l'on néglige la santé mentale des enfants, et pour ce qui est des médecins et des psychologues, et des personnes qui s'occupent des soins psychiatriques, il y a trop de choses qu'ils ne comprennent pas.
    Comme je l'ai dit à M. Johns, aux États-Unis, on diagnostique les enfants qui ont des problèmes de santé mentale. Pourquoi ne pouvons pas le faire ici au Canada? Quelle est la différence?
    Vous avez dit que les drogues dans votre collectivité deviennent pires. Constatez-vous un détournement de l'approvisionnement sécuritaire vers nos enfants et vers les quartiers d'Abbotsford?
    Mettons les choses en perspective, monsieur Doherty: un enfant peut aller chercher un sac d'articles pour une injection sécurisée et préparer ses drogues, et dès qu'il sort de cet endroit, il se retrouve littéralement nez à nez avec un trafiquant de drogues. C'est comme ce qui est arrivé à Nanaimo récemment, où l'on distribuait les trousses de sécurité contre l'automutilation à l'avant, et les drogues circulaient à l'arrière. Je pense que cela suffit à prouver que oui, la situation devient alarmante.
    Il me reste environ une minute. Que voudriez-vous que notre pays et les personnes présentes dans la salle sachent d'autre à propos de Brianna?
    C'était une fille très aimante, magnifique et attentionnée. Elle a été emportée trop tôt. Elle avait tellement de compassion. Elle avait tellement de potentiel. Elle était tellement intelligente. Elle aimait faire des recherches sur tellement de choses. J'aimerais qu'elle soit ici pour raconter son côté de l'histoire en ce moment.
    On lui a volé sa vie. Je pense qu'elle avait tellement le potentiel de devenir une personne puissante, parce qu'elle prenait toujours les problèmes des autres sur ses épaules. Elle les prenait au sérieux. Peu importait s'ils étaient gros ou petits. C'était une personne puissante. Je pense qu'avec la bonne éducation et le bon traitement, elle aurait pu terminer l'école, elle aurait parfaitement trouvé sa place dans cette salle avec nous tous; elle était intelligente à ce point.
    Merci de nous avoir fait part de ce témoignage et d'être ici avec nous aujourd'hui.
    Merci.
    Merci, monsieur Doherty.
    Madame Kayabaga, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais également prendre ce moment pour vous remercier, monsieur Charles et madame MacDonald, de votre courage en nous racontant votre histoire et en continuant de défendre les intérêts de votre fille même si elle n'est plus avec nous. Je pense que ses frères et sœurs sont probablement très fiers de vous deux et du courage qu'il faut pour le faire.
    Madame MacDonald, vous avez un peu parlé de la genèse de son expérience. À votre avis, qu'est‑ce que le gouvernement fédéral aurait pu faire d'autre pour soutenir la province afin qu'elle l'empêche de se lancer dans cette expérience avant qu'elle ne consomme les drogues?
(1210)
    Je pense qu'il devait y avoir plus de soutien de santé mentale en place pour elle. Elle a parlé à des gens, entre autres, mais j'ai l'impression que beaucoup d'entre eux la négligeaient et qu'ils ne l'écoutaient pas véritablement dans l'ensemble. Ils voyaient seulement ce qui était devant eux, et pas toute l'histoire.
    Pensez-vous que, s'il y avait eu une prévention précoce dans son parcours de santé mentale, son chemin aurait été complètement différent?
    Je pense qu'il aurait été complètement différent. Je ne pense pas qu'elle aurait étouffé les bruits qu'elle entendait dans sa tête. Elle ne se serait pas sentie si triste à l'intérieur, si bouleversée et si désemparée au point de vouloir s'enlever la vie.
    Pensez-vous qu'il devrait y avoir plus de soutien dans les écoles — partout — pour les enfants comme Brianna, surtout s'il se produit un changement majeur dans leur vie comme une séparation parentale? Pensez-vous que ce sont des choses que nous pourrions mettre en œuvre dans notre système d'éducation à l'échelle provinciale?
    Je pense que des gens pourraient participer un peu plus. Je sais qu'il y a certaines personnes, comme des conseillers et ainsi de suite, dans les écoles, mais je pense qu'il pourrait y en avoir plus.
    Pensez-vous que le fait de réagir à une partie de la stigmatisation entourant les familles qui traversent quelques changements pourrait également aider les enfants à mieux gérer leur bien-être mental pendant qu'ils en sont témoins?
    Je pense que oui.
    Je tiens à vous remercier tous les deux d'être aussi courageux au moment de répondre à nos questions.
    Je vais maintenant adresser mes questions à Mme Larney.
    Vous avez parlé d'un article que vous avez publié concernant certaines des provinces, comme le Québec, qui ont été protégées contre l'épidémie de surdoses. Pourriez-vous parler des facteurs qui y ont contribué, et nous dire pourquoi ce n'est plus le cas?
    Certainement.
    Nous constatons une augmentation du fentanyl et d'autres substances entrant dans l'approvisionnement de drogues au Québec. En fait, cela a commencé légèrement avant la pandémie de COVID‑19, mais la pandémie a ensuite créé les conditions qui ont causé le chaos dans le marché des drogues, essentiellement. Lorsque ce niveau de perturbation, ces nouveaux joueurs et ces nouvelles substances arrivent sur le marché, c'est alors que nous commençons à constater des augmentations importantes du nombre de décès.
    C'est la cause aiguë de ce qui se passe. Ce changement dans le marché de la drogue s'éloigne de l'approvisionnement fiable qui existait auparavant, pour passer à un approvisionnement beaucoup plus imprévisible, ce qui ressemble davantage à ce que vous constatez dans d'autres provinces.
    Je viens d'une collectivité, London, qui est aux prises avec cette crise des opioïdes depuis bien avant la pandémie. Je pense qu'elle a augmenté, mais il est parfois arrivé que la réduction des méfaits imputables à ces drogues toxiques prouve qu'elle sauve des vies. Nous avons des chiffres qui le prouvent.
    Que dites-vous aux gens qui ont toujours besoin de plus de données et de renseignements pour prouver que la réduction des méfaits sauve des vies?
    Il existe énormément de données probantes montrant que la réduction des méfaits fait partie intégrante de la réponse.
    Si je peux aborder la question à partir d'un angle légèrement différent, une chose qui serait utile est de tenir compte du fait que nous n'avons pas besoin de choisir entre la réduction des méfaits ou d'autres interventions en matière de santé. Il s'agit de fournir des soins globaux qui rejoignent les gens là où ils sont. Cela comprend la réduction des méfaits lorsque c'est ce dont les gens ont besoin pour rester en vie, jusqu'à diverses options de traitement, en passant par les soins de santé mentale et des logements supervisés. C'est toute la gamme des services dont les gens ont vraiment besoin.
    Je pense que positionner la réduction des méfaits et d'autres interventions comme des solutions contraires, qui ne fonctionnent pas vraiment ensemble, est une fausse dichotomie.
    Par souci de clarté pour moi et d'autres personnes qui n'ont peut-être pas la réponse, quelle est la limite d'âge pour les centres de consommation supervisée? La politique est-elle la même dans l'ensemble du pays, ou diffère‑t‑elle d'une province à l'autre?
    Je pense qu'elle diffère d'une province à l'autre. Je n'ai pas sous la main les chiffres exacts, alors je ne veux pas spéculer.
    D'accord.
    Pourriez-vous…
(1215)
    Merci, madame Larney.
    Votre temps est écoulé.
    Je suis désolée, monsieur le président. J'aimerais simplement demander si elle peut soumettre ces renseignements au Comité une fois qu'elle les aura, pour que nous puissions les avoir.
    Certainement. Je serai heureuse de le faire.
    Merci.

[Français]

     Monsieur Thériault, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Professeure Larney, en ce qui concerne les déterminants sociaux de la maladie, si je dis que la pandémie a amplifié les failles et la fragilité des réseaux de santé et que ce phénomène était lié à un sous-financement chronique datant de plusieurs décennies, cela vous semble-t-il sensé?
    J'aborde ce sujet parce que vous dites dans vos conclusions qu'il va falloir intervenir en matière de politiques sociales et de déterminants sociaux de la santé. On ne peut cependant pas rétablir une telle situation du jour au lendemain.
     Le crime organisé étant opportuniste, il s'est totalement adapté à la situation de pandémie. Maintenant, nous subissons les conséquences de ce qu'on n'a pas réussi à faire correctement, notamment dans le domaine de la santé mentale. Ce problème, en fait, datait déjà de plusieurs décennies avant la pandémie.
    Ce que je dis a-t-il du sens, à votre avis?

[Traduction]

    Oui, assurément. En ce qui concerne le système de santé mentale à bout de souffle et le système de santé physique plus large et les personnes souffrant de douleurs chroniques, comme les travailleurs de la construction, je pense que tous les témoins disent que l'on doit mettre en place plus de ressources de soins de santé et de soins de santé mentale avant que les gens se retrouvent dans une situation où nous devons prescrire un approvisionnement sécuritaire. Absolument.

[Français]

     J'ai mené une bataille sans précédent pour que les provinces et le Québec reçoivent une augmentation des transferts en santé à la hauteur des défis qu'ils ont à relever. J'ai déjà dit, lors d'une intervention à la Chambre, que je trouvais que c'était criminel de donner une augmentation de seulement 46 milliards de dollars d'argent frais sur 10 ans.
    Partagez-vous mon point de vue?

[Traduction]

    Je dois dire que je ne connais probablement pas aussi bien les détails que vous. Je pense qu'il est vrai que le système de santé québécois a désespérément besoin de financement, comme tous les services de santé du pays.
    Merci, madame Larney.
    Monsieur Johns, vous avez deux minutes et demie, s'il vous plaît.
    Merci.
    Je vais revenir à vous, docteure Wieman. J'ai vraiment aimé vous entendre parler des comparables avec la COVID. Je veux dire, le gouvernement fédéral a dépensé moins de 1 % pour réagir à la crise des drogues toxiques par rapport à la COVID. Nous avons maintenant perdu plus de gens en raison de la crise des drogues toxiques que de la COVID, je pense.
    Nous avons constaté une augmentation du nombre de décès dans les provinces et les États voisins. L'Alberta a connu un nombre record de décès l'an dernier. L'Alaska, un État voisin, a connu une augmentation de 45 % du nombre de décès et a maintenant un taux de décès supérieur à celui de la Colombie-Britannique. Le taux de mortalité à Baltimore est cinq fois celui de la Colombie-Britannique. Tous ces endroits n'offrent pas de réduction des méfaits, et il n'y a pratiquement pas d'approvisionnement sécuritaire ni de décriminalisation.
    Vous pourriez peut-être parler de votre commentaire précédent concernant les répercussions de la politisation de cette crise. Je suis allé au Portugal l'an dernier, et on a parlé du fait que c'était les experts qui dirigeaient sa réponse, et non pas les politiciens. Les politiciens se sont tassés du chemin.
    Pourriez-vous parler du rôle que les politiciens devraient jouer ainsi que celui des experts et dire comment nous pourrions avancer avec moins de politisation?
    Je vous remercie de la question.
    Je pense que, en guise de réponse, je dirai qu'une chose que nous avons observée en Colombie-Britannique, c'est que beaucoup de désinformation est répandue dans le domaine public concernant la crise des drogues toxiques et les interventions visant à sauver des vies. Cette désinformation est vraiment dommageable. Elle a le potentiel de produire des effets dévastateurs, si, par exemple, les centres de consommation supervisée étaient fermés, comme l'a mentionné Mme Larney.
    À la First Nations Health Authority, nous favorisons un éventail complet de mesures de prévention, de réduction des méfaits, de désintoxication, de traitement et de rétablissement, ainsi que de suivi. Je pense que ce qui se passe avec la propagation de la désinformation à des fins « autres » que — vous savez, à des fins de politisation — c'est que cela augmente la stigmatisation, par exemple.
    Lorsque les gens utilisent l'expression « repaires de drogués » pour décrire les centres de consommation supervisée, je trouve cela tout à fait odieux. L'ensemble des données probantes selon lesquelles des vies ont été sauvées dans des centres de consommation supervisée est très robuste. Nous avons déjà utilisé l'analogie de la jambe cassée au Comité. Nous avons des centres qui offrent la dialyse, par exemple, pour les personnes ayant une défaillance rénale afin qu'elles n'aient pas à parcourir de longues distances. Nous n'appelons pas ces lieux de dialyse « repaires de drogués », mais à cause des stigmates entourant la maladie mentale et les personnes qui consomment des substances, c'est ainsi que nous les désignons.
    Je pense que cela ne s'est pas révélé très utile. Cela s'est révélé dommageable.
(1220)
    Merci, docteure Wieman.
    Le prochain est M. Vis.
    Je crois savoir que vous partagerez votre temps avec Mme Goodridge.
    Très bien. Vous avez la parole, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    En tant que député local de notre collectivité d'Abbotsford, je tiens à vous remercier d'être ici. Vous avez parlé du centre Cyrus. Je vis juste à côté de George Ferguson. Ce centre se trouve au coin de la rue où se trouve ma maison. Merci d'avoir raconté votre histoire.
     Si vous pouviez envoyer un message à la ministre de la Santé mentale et des Dépendances concernant l'échec de certaines politiques sur les drogues dont nous disposons au Canada, quel serait‑il?
    Ce serait que nous avons besoin de plus d'aide. Les fournisseurs de soins de santé ont besoin de beaucoup plus d'aide. Il n'y en a tout simplement pas assez. Je comprends qu'il y a une crise des opioïdes en cours et que beaucoup de gens meurent à cause des drogues, mais l'aspect de la santé mentale est un facteur principal. Nous ne pouvons pas négliger la santé mentale. La consommation de drogues et les problèmes de santé mentale vont de pair. Pour y mettre fin, nous avons besoin de plus de financement.
    Comme vous le savez, les gouvernements de la Colombie-Britannique et du Canada ont signé une entente spéciale pour décriminaliser les drogues dures en Colombie-Britannique.
    D'après votre expérience, est‑il devenu plus facile pour les enfants d'obtenir des drogues depuis le début de la décriminalisation? Comment Brianna se procurait-elle généralement ses drogues?
    Je pense que oui, en fait. La décriminalisation de la consommation de drogues et de la possession de drogues a contribué à l'augmentation des drogues arrivant en Colombie-Britannique. Elle a fait diminuer les prix. Elle les a rendues plus faciles à acquérir parce que, hé, beaucoup de vos médicaments pour la santé mentale sont expérimentaux, et vous devez les payer de votre poche et ils ne sont pas toujours couverts, mais les drogues peuvent remplacer cela. Les gens remplaçaient les comprimés et les ordonnances pour les problèmes de santé mentale par les drogues dures.
    Pour ce qui est de l'approvisionnement en drogues de Brianna, elle s'en procurait beaucoup auprès d'enfants de 15 et 16 ans. Ces enfants de 15 et 16 ans sont devenus très culottés et se sont présentés un soir à notre maison. J'ai en fait dû les escorter hors de mon quartier.
    Je vais juste poser une autre brève question avant de céder la parole à Mme Goodridge.
    En tant que parent dans le système scolaire public à Abbotsford également... quel rôle le district scolaire d'Abbotsford doit‑il jouer pour garder nos enfants en sécurité?
    Je pense qu'il devrait y avoir plus de liaison avec la police. Je pense que l'on devrait vérifier les enfants avant qu'ils arrivent à l'école. Si on découvrait des drogues sur eux, ils devraient être punis, pour qu'ils se rendent compte que c'est mal et qu'ils n'auraient pas dû avoir accès à ces drogues. Personne ne le devrait.
    Merci.
    Merci beaucoup de nous avoir raconté l'histoire de votre fille et d'être ici.
     Justin Trudeau a proposé les politiques sur les drogues les plus radicales que notre pays ait jamais connues, inondé les rues de drogues dures, comme vous l'avez dit, et fait en sorte qu'il est légal pour les enfants et les adultes de posséder du crack, de la méthamphétamine et même la drogue de choix de votre fille, la Molly, ou l'ecstasy.
     Pensez-vous que les choix stratégiques faits par le premier ministre ont contribué au décès de votre fille?
(1225)
    Oui, je le pense. Pour être honnête avec vous, j'ai l'impression que cette expérience — je vais l'appeler « expérience » — était dirigée vers nos enfants. Elle était dirigée vers les gens qui avaient des problèmes de santé mentale. Le fait qu'elle ait pu acquérir ces drogues massivement et très facilement, à son âge… Oui, je pense que sa politique a vraiment contribué à son décès. Ce n'est pas juste sa politique; c'est le fait qu'il y a un manque de financement pour la santé mentale.
    Si vous pouviez lui dire qu'il a la capacité, d'un coup de crayon, de changer ces politiques aujourd'hui, pensez-vous qu'il devrait le faire?
    Absolument. Pour être honnête avec vous, nous devons protéger nos enfants, et il doit commencer à s'en rendre compte pour protéger nos enfants et sauver la vie de magnifiques personnes innocentes qui le méritent. Ce sont nos enfants. À mes yeux de membre inscrit d'une Première Nation, c'est notre travail de les protéger et c'est son travail de nous aider à les protéger. Pourquoi ne peut‑il pas le faire? Mettez‑le sur le papier. Obtenons plus de financement pour les personnes et les enfants et mettons fin à tout cela. Faisons‑le tous ensemble, du haut jusqu'en bas où nous nous trouvons, en tant que parents. Nous avons besoin de plus de droits.
    Merci, monsieur Charles.
    La prochaine est Mme Sidhu.
    Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux partager mon temps avec M. Powlowski.
    Merci à tous les témoins d'avoir présenté leur témoignage bien informé. Mes sincères condoléances à Mme MacDonald et à M. Charles. Merci d'avoir fait ce plaidoyer.
    Ma première question s'adresse à M. Kulmala.
    Monsieur Kulmala, Santé publique Ontario a découvert en 2022 que presque une personne décédée à cause des opiacés sur 13 en Ontario était un travailleur de la construction. Qu'est‑ce qui se passe. Pourquoi la crise des opioïdes frappe‑t‑elle aussi durement les travailleurs de la construction?
    Je pense que la plus grande contribution que nous voyons, c'est que nous avons une situation démographique similaire. En dehors de la tragédie qui frappe les enfants, nous savons que le principal groupe démographique touché est celui des gens de 19 à 52 ans. Nous savons également que les obstacles à l'entrée à la construction sont plutôt faibles, particulièrement dans les métiers spécialisés, mais il y a un continuum d'ouvriers qui y travaillent. C'est un parcours professionnel accessible à de nombreuses personnes, mais beaucoup d'éléments entrent en jeu lorsqu'il s'agit de gestion de la douleur.
    Cela peut être un emploi stressant, mais aussi… C'est cette attitude de « travailler dur, jouer dur ». C'est imputable à la bravade des hommes en particulier qui ne veulent pas demander de l'aide, alors ils s'automédicamentent. Ils essaient de traiter eux-mêmes leurs propres difficultés. Lorsque la santé mentale est en cause, encore une fois, ils ne veulent pas que qui que ce soit le sache. Ils ont leur gagne-pain à assurer. C'est une bonne industrie qui génère de bons revenus. Elle permet aux gens d'obtenir des fonds.
    Dans certaines des statistiques, nous voyons que le nombre de personnes dans le secteur de la construction qui meurent d'une surdose ou d'une exposition à des drogues toxiques… Cela se passe dans une résidence, donc ces personnes ont les moyens.
    Entre la santé mentale, la gestion de la douleur, l'attitude de « travailler dur, jouer dur » et l'élément social que cela peut comprendre, je pense que cela contribue au fait qu'un nombre disproportionné de gens dans notre secteur sont victimes des drogues toxiques.
    Merci.
    L'été dernier, j'ai parlé à des membres de l'Union internationale des journaliers d'Amérique du Nord de Brampton de programmes novateurs visant à éveiller la conscience et à réduire la stigmatisation entourant la consommation de substances et la santé mentale chez les travailleurs de la construction.
    Vous nous avez dit que vous travailliez avec 12 300 organisations de la Colombie-Britannique, en mettant l'accent sur les employeurs et les employés, alors ce soutien par les pairs existe.
    Pouvez-vous parler de programmes similaires? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    La plupart d'entre nous qui font partie des associations professionnelles tentent de trouver des façons de tisser une relation avec nos employés. Nous essayons effectivement de faire... Dans notre cas, c'est un peu différent dans la mesure où nous nous rendons réellement sur les chantiers. Nous le faisons partout dans la province de la Colombie-Britannique. Nous l'avons fait dans le Nord. Nous nous rendons sur n'importe quel chantier, n'importe quand pour tenir ces discussions informelles.
    Nous sommes aussi une ressource pour des gens qui s'adressent à nous et qui nous demandent « Hé, j'ai besoin de renseignements. » Encore une fois, les associations professionnelles ou les associations de l'industrie sont actives. C'est une priorité, donc nous voulons tous trouver des façons innovantes de faire les choses.
    Je pense que la différence qu'il y a avec d'autres associations professionnelles, c'est que cela a tendance à se faire beaucoup sur le Web. Vous devez vous rendre en ligne, vous connecter, suivre le programme, et cela vous aidera. Il y a un numéro 811, nous avons un certain nombre de ressources que nous offrons aux gens qui sont en crise en leur disant « Voici les services de votre région auxquels vous pouvez accéder ».
    Nous réalisons que les gens sont réticents à l'idée de consulter un site Web. Ils sont réticents à l'idée de chercher activement du soutien, mais si nous allons les voir, que nous leur parlons, nous leur remettons une carte directement dans les mains, ils pourraient dire que cela ne les concerne pas eux, personnellement. Ils diront « j'ai un ami qui pourrait en avoir besoin ». Et cela pourrait être eux en fin de compte. Puisqu'il s'agit d'une question très personnelle, nous n'obtenons pas beaucoup de commentaires de gens qui disent « vous m'avez sauvé la vie », mais des gens nous disent effectivement « écoutez, je suis content que vous m'ayez donné cela parce que maintenant, je le sais, et je me sens mieux. »
    De même, nos employeurs disent « écoutez, merci pour l'information ». Il y a une nuance dans la loi au sujet de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation. Qu'est-ce que cela veut dire? Nous l'expliquons, et les entreprises disent maintenant « nous devons prendre soin de nos travailleurs ».
(1230)
    Monsieur Charles et madame MacDonald, j'ai été urgentologue pendant longtemps. Je suis sûr que, en Colombie-Britannique, le même genre de loi s'applique qu'en Ontario, où, les urgentologues peuvent — et je dirais doivent — exiger qu'une personne séjourne à l'hôpital pendant 72 heures à des fins d'évaluation psychiatrique s'ils croient que cette personne présente un danger pour elle-même ou pour les autres ou qu'elle est incapable de prendre soin d'elle.
    Combien de fois avez-vous amené Brianna aux urgences et combien de fois ont‑ils exercé ce pouvoir pour la garder en observation et du moins lui faire suivre un traitement?
    On a enregistré plus de 20 tentatives de suicide et de mutilation au cours d'une brève période; au point où son père et moi avons pris un médecin à part et lui avons dit « ne vous laissez pas duper par son narcissisme et sa manipulation. Elle va réussir à vous convaincre qu'elle peut sortir d'ici. Je vous supplie de nous écouter et de la garder ici. Elle a besoin d'une évaluation psychiatrique. »
    Bien entendu, ils ont continué de nous dire la même chose. « Nous allons faire de notre mieux ». Peu de temps après, ils nous ont tous mis à la porte de la chambre et lui ont parlé. Ils ont dit: « non, elle va bien », et l'ont renvoyée à la maison.
    Combien de fois l'ont‑ils gardée?
    Deux fois.
    Votre temps est écoulé. Merci.
    Madame Goodridge, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais revenir sur les questions de M. Powlowski.
    On l'a amenée plus de 20 fois à l'hôpital pour des tentatives de suicide, et on ne l'a gardée que deux fois. C'est bien cela?
    Oui.
    Lorsque vous étiez confrontés à ce genre de situation, je présume qu'à de nombreuses reprises vous n'avez pas eu l'occasion de l'amener à l'hôpital ou que vous avez décidé de ne pas le faire.
    À quelle fréquence étiez-vous confrontés à ce genre de situation? Pensez-vous que l'on en a fait assez pour vous aider?
    C'était quotidien, et vers la fin, elle faisait au moins une tentative par semaine ou une fois aux deux semaines. C'était assez grave. Nous ne nous rendions pas à l'hôpital très souvent parce que nous savions que nous allions tout simplement être retournés à la maison et que c'était une perte de temps.
    Je suis désolée.
    Je vais changer de sujet.
    Monsieur Kulmala, votre « Tailgate », votre trousse d'outils de discussions informelles inclut des ressources pour que les gens puissent accéder à ce que vous appelez l'approvisionnement sécuritaire.
    Est‑ce que les travailleurs ont le droit d'utiliser l'approvisionnement sécuritaire lorsqu'ils sont sur le lieu de travail?
    Non, et je pense que c'est une exigence sous-jacente. Nous n'avons aucune tolérance pour les gens dont les facultés sont affaiblies sur un chantier. Nous n'avons jamais vu personne mourir sur un chantier parce qu'il consommait activement, et je peux dire que l'on n'a jamais eu de signalement à cet égard.
    Sur le plan médical, je suis sûr qu'il y a différents degrés de perte de facultés, mais nous n'acceptons pas cela sur un chantier.
(1235)
    Vous ne permettez pas aux employés de consommer des drogues sur le chantier, un endroit où vous jugez la sécurité critique. Vous pensez que cet approvisionnement sécuritaire n'est bon que pour les autres personnes.
    Je suis confuse.
    Non, ce que nous tentons de faire, c'est d'offrir des ressources. Nous luttons pour le bien-être. Quand un approvisionnement sécuritaire est disponible, nous en informons les gens pour que, lorsqu'ils retournent chez eux et qu'ils veulent consommer, ils puissent rester en vie.
    Comme je l'ai dit précédemment, nous tentons seulement de leur lancer une bouée de sauvetage. Nous ne leur apprenons pas à nager. Ce n'est pas notre travail. Notre travail, c'est de sensibiliser.
    Quel financement recevez-vous du gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial de la Colombie-Britannique?
    Nous recevons du financement du gouvernement provincial par l'intermédiaire du ministère de la Santé mentale et des Dépendances afin que la trousse d'outils de discussions informelles soit accessible partout au pays.
    Si un employé devait avoir un quelconque accident et que son test était positif à l'hydromorphone, quelle serait la prochaine étape?
    Habituellement, la prochaine étape serait de suivre le processus de santé et de sécurité avec cet entrepreneur précis. Encore une fois, il n'est pas question de leur donner l'occasion de consommer sur le chantier.
    D'accord.
    Est-ce que la prochaine étape, c'est souvent de les envoyer suivre un traitement?
    Cela pourrait l'être. Il faut tout d'abord suspendre la personne. Si ses facultés sont clairement affaiblies sur le chantier, elle est suspendue. Puis, on ouvrira une enquête afin de proposer des traitements ou d'autres possibilités d'emploi.
    D'accord, donc, dans les faits, il n'y a aucune tolérance lorsqu'il est question de consommer des drogues sur le chantier, mais vous offrez aux gens des outils pour leur permettre de consommer s'ils décident de le faire, et vous leur dites qu'ils ne peuvent pas le faire sur le chantier. J'ai l'impression de tourner en rond.
    Comment soutenez-vous les employés qui reviennent et qui choisissent de suivre un traitement?
    Nous sommes une association professionnelle. Nous ne faisons que défendre les droits. Nous fournissons essentiellement les ressources qui permettent aux gens de savoir où aller. C'est quelque chose qui est décidé par l'employeur. C'est lui qui décide quel traitement doivent suivre ses employés, ce qu'ils doivent faire et la façon de les soutenir; ce n'est pas à nous en tant qu'association.
    En réalité, nous prenons les outils disponibles qui existent et les regroupons tous dans un genre de trousse en disant « voici ce qui est à votre disposition. » Que vous soyez d'accord ou non...
    D'accord.
    ... il y a un approvisionnement sécuritaire; nous ne sommes pas ici pour en débattre. Nous sommes ici pour dire « voici la situation; voici comment vous pouvez obtenir de l'aide. »
    Pensez-vous que l'on devrait rendre plus de ressources accessibles dans le cadre du traitement?
    Oui, tout à fait. Je pense que lorsque vous vous penchez sur les traitements disponibles pour gérer de la douleur et la santé mentale, vous réalisez qu'ils contribuent tous à vraiment... Encore une fois, c'est un enjeu personnel, et il n'a rien à voir avec le secteur de la construction, mais oui, il y a beaucoup de place à l'amélioration. Comme M. Charles et Mme MacDonald nous l'ont dit, nous pouvons améliorer les choses depuis un très jeune âge et surtout grâce aux médecins ici présents.
    Vous faites la promotion de la consommation de drogue dans votre trousse d'outils axée sur les discussions informelles. Faites-vous aussi la promotion du traitement des dépendances?
    Nous ne faisons pas la promotion du traitement, madame; nous sensibilisons. Nous disons aux gens de parler de cela s'ils ont besoin d'aide, et leur disons où qu'ils puissent en obtenir.
    Donc, dans votre...
    Merci, madame Goodridge.
    C'est maintenant au tour de M. Hanley; allez‑y, vous avez cinq minutes.
    Je voulais me faire l'écho de mes collègues ici présents en remerciant M. Charles et Mme MacDonald d'avoir eu le courage de nous raconter l'histoire de Brianna, d'autant plus que l'expérience est encore récente et que le deuil ne fait que commencer.
    Une des choses les plus convaincantes que vous avez dites dans votre témoignage très convaincant, c'est que Brianna consommait des drogues pour s'automédicamenter. Je crois que c'est là que se trouve l'un des liens clés entre la maladie mentale et la consommation de drogues.
    Madame MacDonald, vous avez mentionné la rupture lorsqu'elle était âgée de 10 ans et demi. Si vous revenez sur la courte vie de Brianna, selon vous, quelle était la première occasion où on aurait pu intervenir? Est-ce que c'était possible et accessible?
    La première intervention aurait sans doute pu survenir lorsqu'elle avait environ 11 ans et que je l'ai surprise à fumer activement de la marijuana. C'est la première fois que je l'ai surprise. Nous avons essayé de la faire entrer dans un centre de traitement à ce moment‑là. Elle n'avait pas l'impression qu'elle devait y aller parce qu'elle ne pensait pas que c'était une drogue suffisamment dure.
    Merci.
    Docteure Wieman, merci de votre témoignage.
    Au Yukon, selon le coroner en chef, en 2023, 14 des 20 décès dus à une surdose de stupéfiants toxiques étaient des membres des Premières Nations. Encore une fois, cela reflète la façon dont cela touche de façon disproportionnée les collectivités des Premières Nations. Pouvez-vous décrire certaines des réussites qui pourraient être répliquées, surtout en ce qui concerne la prévention, la guérison sur le territoire et les soins de suivi et dont nous pourrions tirer des enseignements compte tenu de ce que vous avez remarqué?
(1240)
    Comme je l'ai dit, en Colombie-Britannique, il y a cinq régions différentes, et nos équipes régionales s'occupent sans doute d'une communauté ou d'un groupe de communautés qui peuvent parler d'une histoire de réussite. L'un des modèles dont nous avons entendu parler le plus, c'est que la culture sauve la vie des gens des Premières Nations, donc nous luttons activement en faveur d'un modèle qui respecte tant la médecine occidentale et ce que la médecine clinique a à offrir, que les modes de guérison traditionnels, les cérémonies et le fait d'être sur la terre de nos ancêtres. Il y a des exemples à l'échelle de la province.
    Un autre exemple, c'est la Première Nation Cheam dans la région de Fraser-Salish, qui a été la première communauté des Premières Nations en Colombie-Britannique à avoir un site de prévention des surdoses situé sur une réserve. Je pense que cet endroit a été établi après que l'on a eu beaucoup de discussions au sein de la communauté et que l'on a réalisé qu'il fallait faire quelque chose compte tenu du nombre de décès.
    L'un de nos rôles à la FNHA, c'est aussi de favoriser la communication entre les communautés. Par exemple, la Première Nation des Tla'amins située sur la Sunshine Coast a dit publiquement qu'elle avait réussi, au cours des dernières années, à réduire le nombre de décès causés par des drogues toxiques, donc nous cherchons des occasions pour elle de faire part de ce qu'elle a appris à d'autres communautés, non seulement dans la région côtière de Vancouver, mais aussi dans d'autres régions de la Colombie-Britannique.
    Il existe des programmes de réduction des méfaits par les pairs, et nous avons diverses subventions axées sur cette question. Nous en avons octroyé 108 l'année dernière. Au cours de différents rassemblements, ces communautés ont l'occasion de faire part de ce qu'elles ont fait avec l'argent, par exemple, et d'expliquer comment cela a amélioré la situation au sein de leur communauté. Évidemment, nous surveillons cela et nous communiquons l'information sur différentes tribunes.
    Merci beaucoup. Je suis sûr que le Comité serait content de connaître certaines des réussites des peuples des Premières Nations de la Colombie-Britannique afin de pouvoir les répliquer et les communiquer.
    Brièvement, madame Larney, vous avez parlé de certaines tendances générales au Québec comparativement à d'autres provinces, et de ce que vous voyez venir.
    Je pense que le taux de décès en raison de surdoses est remarquablement bas comparativement à d'autres provinces.
    Y a‑t‑il des facteurs de protection au Québec qui diffèrent de ce qu'on trouve dans les autres provinces?
    Oui, certainement.
    Je vais commencer par rectifier quelque chose qui a été dit: la décriminalisation en Colombie-Britannique ne s'appliquait pas aux personnes de moins de 18 ans.
    L'une des choses qui distinguent la province de Québec des autres est que, historiquement, les drogues de choix sont les stimulants; il y a une préférence de longue date pour la cocaïne, plutôt que pour les opioïdes. Cela a, un peu étrangement, servi de facteur de protection contre les décès causés par une surdose d'opioïdes.
    Toutefois, la contamination et l'imprévisibilité de la composition des drogues ont éliminé ce facteur de protection. Essentiellement, toutes les drogues exposent maintenant les consommateurs à un risque beaucoup plus élevé de surdose en raison de la contamination liée au fentanyl et à d'autres substances.
    Merci, madame Larney.
    Je suis désolé de vous interrompre, mais nous avons largement dépassé le temps imparti.
    Monsieur Thériault, allez‑y; vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Monsieur le président, on a parlé, tout à l'heure, de l'accès qu'ont les jeunes aux drogues. Or, ce matin, une station de radio très crédible de Montréal, le 98,5 FM, a révélé que la Dre Marie‑Ève Morin, qui, vous vous le rappellerez sans doute, est déjà venue témoigner devant notre comité, s'est aperçue que les plateformes de Meta autorisaient des publicités de drogues illicites. Elle est intervenue, elle a fait des pieds et des mains pour joindre des gens de Meta pour qu'ils ferment ces comptes, mais elle n'a jamais réussi. Quand elle a révélé cette situation, Meta a fermé son compte.
    Je vais élucider cela et aller plus loin. J'espère que tous ceux qui se préoccupent de l'accès qu'ont les jeunes aux drogues vont cesser de faire de la publicité sur les plateformes de Meta. C'est une chose de faire des publications, mais c'est autre chose de faire de la publicité et de la promotion.
    Je vous en fais part, et j'y reviendrai. Je trouvais important d'en parler aujourd'hui, parce que ces plateformes sont très fréquentées par les jeunes. Il est inadmissible qu'une telle entreprise soit tolérée et encouragée.
(1245)
    Merci, monsieur Thériault.

[Traduction]

    Ce sera ensuite au tour de M. Johns, pour deux minutes et demie.
    Je vais commencer par poser des questions à M. Kulmala.
    Premièrement, je tiens à vous féliciter, vous et votre industrie, de votre leadership au chapitre de l'investissement dans la prévention et l'éducation. Nous ne parlons pas assez de prévention et d'éducation.
    Pouvez-vous nous parler du succès qu'a connu la trousse à outils axée sur les discussions informelles, qui est très populaire sur l'île de Vancouver, d'où nous sommes tous deux originaires.
    Également, pourriez-vous discuter de l'obstacle que représente la perte de revenus pour ceux qui souhaitent se faire soigner?
    Croyez-vous qu'il est possible de fournir un soutien du revenu pour ceux qui souhaitent se faire soigner et obtenir de l'aide?
    Merci.
    Je crois que l'intérêt porté à notre industrie et les personnes qui cherchent activement à prendre part au programme de trousse à outils témoignent de notre réussite. Les employeurs cherchent des moyens de soutenir leurs employés. Nous avons reçu des commentaires de personnes disant que le programme a aidé à favoriser chez elles une prise de conscience, ou elles ont dit connaître quelqu'un qui pourrait en bénéficier.
    Pour ce qui est du remplacement du revenu, les travailleurs peuvent augmenter leur revenu grâce à des mécanismes prévus par leur régime d'assurance-maladie et leur régime d'avantages sociaux, ce qui leur permet de prendre congé pour obtenir, par exemple, des soins de santé mentale ou tout autre type de soins. Il existe des assurances-invalidité de courte durée et des assurances-invalidité de longue durée. C'est pourquoi nous encourageons les employés à avoir un régime d'avantages sociaux, et non pas nécessairement un régime d'assurance-maladie robuste.
    Lorsqu'il est question des personnes auxquelles cela ne s'applique pas, il y a toujours des occasions de le faire. Le stress mental des consommateurs de drogues qui doivent obtenir un supplément de revenu, par exemple, pour payer leur hypothèque ou pour répondre aux besoins de leur famille, et qui ne sont pas en mesure de le faire, est intensifié.
    Monsieur le président, il me reste combien de temps?
    Vous avez un peu moins d'une minute.
    D'accord.
    Docteure Wieman, j'ai une question à vous poser. Souhaitez-vous commenter quelque chose qui a été dit aujourd'hui, ou souhaitez-vous suggérer quelque chose au gouvernement fédéral pour lutter contre la crise de drogues toxiques?
    Merci de la question. Je vais être brève.
    Je crois que ce que je souhaite que vous compreniez, c'est que, comme je l'ai dit plus tôt, la crise des drogues toxiques de 2024 n'est pas la crise des drogues toxiques d'il y a huit ou neuf ans. Les drogues obtenues illégalement au Canada sont très dangereuses et peuvent être mortelles.
    Je pense également que les personnes qui veulent sauver des vies militent pour toute la gamme de services, de la prévention, au suivi médical en passant par l'éducation et la sensibilisation, la réduction des méfaits, la cure de désintoxication, les traitements et le rétablissement. C'est ce que réclame la First Nations Health Authority. Comme l'a dit Mme Larney, la tentative d'en faire une fausse dichotomie, où il faut choisir entre la réduction des méfaits et les traitements, est erronée et dangereuse.
    Je crois qu'une autre chose qui doit être comprise, c'est que la crise des drogues toxiques est pleine de nuances. Les consommateurs viennent d'horizons différents. Je suis très heureux de voir M. Kulmala ici, aujourd'hui. Nous devons comprendre les nuances de gris de la crise des drogues toxiques. Il y a de nombreuses histoires différentes. Les consommateurs de drogues s'engagent sur de nombreux chemins différents pour atteindre la santé et le bien-être. Nous devons tenir compte du spectre dans son intégralité.
    Merci, docteure Wieman.
    Monsieur Ellis, allez‑y, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Charles et madame MacDonald, merci de comparaître devant nous. Je m'excuse d'être arrivé si tard, mais j'ai lu votre témoignage. Je vous en remercie et je vous remercie d'avoir raconté l'histoire de Brianna aux Canadiens.
    Je sais que vous n'êtes pas des experts du sujet, mais vous avez, évidemment, des expériences concrètes considérables. Si vous deviez concevoir un système qui traite de différents sujets, de la prévention de la consommation de drogues et de la réadaptation par la suite, que nous conseilleriez-vous, à nous et aux Canadiens?
(1250)
    Honnêtement, le temps est la clé. Tout cela est fait en fonction de l'état des enfants. Chaque enfant est différent. Chaque personne est différente. Il ne devrait pas y avoir des limites de temps imposées. Si le traitement est plus long, la personne mérite de se faire traiter plus longtemps. Si le traitement est inefficace, il doit y avoir un large spectre de recherches disponibles qui permettent de créer des traitements pour d'autres personnes. Certains traitements sont appropriés pour certaines personnes, mais pas pour d'autres. Ce ne peut pas être une solution universelle. Des recherches doivent être faites, et nous devons penser longuement au chemin à prendre pour l'avenir.
    Je ne crois pas qu'il y ait une seule bonne réponse. Je crois que si les facteurs de temps, de structure, d'éducation, etc., sont pris en considération, un programme adéquat serait mis en place, et ce genre de choses ne toucheraient plus nos enfants et nos proches.
    Merci beaucoup, monsieur Charles.
    Nous avons un peu parlé de la prévention, et nous sommes évidemment au Comité de la santé, mais je crois que cet aspect pourrait peut-être s'inscrire dans la sphère de l'éducation. Croyez-vous qu'il devrait y avoir en place, dans les écoles, des programmes pour éduquer les enfants sur les dangers des drogues et pour transmettre ce genre de message, y compris ce à quoi ressemblent les drogues et leurs effets? Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Je crois que oui; il y a des programmes d'éducation sexuelle et d'autres genres de programmes, donc pourquoi n'y en a‑t‑il pas pour l'éducation sur les drogues?
    Je partage votre avis, mais en même temps, il faut être prudent. On parle ici d'enfants et de leur cerveau. Il est sous-développé. Ils ne connaissent pas vraiment encore ces choses; mais ils en prendront peut-être connaissance à l'adolescence.
    C'est la même chose pour les programmes d'éducation sexuelle. Ils sont dispensés aux enfants de plus en plus jeunes, et les enfants se disent: « hé, regardez, je pense comme un adulte. J'apprends des choses que les adultes connaissent. » Cela les rend à l'aise — trop à l'aise. Je crois qu'il devrait y avoir un effort d'éducation, mais il devrait tenir compte du sous-développement du cerveau des enfants.
    Merci beaucoup. C'est une excellente observation. Nous devons faire attention aux messages que nous transmettons et à quel groupe d'âges ils sont transmis. Je crois que c'est très bien dit.
    Peut-être que nous pourrions regarder le côté criminel du problème. Encore une fois, que conseillerez-vous au gouvernement canadien pour dire: « il y a évidemment un élément criminel en jeu. Des gens vendent des drogues. Des gens les fabriquent illégalement. »
    Avez-vous peut-être des suggestions pour ce qui est des mesures punitives, des peines d'emprisonnement, etc.? Y aurait‑il des mesures différentes à prendre pour cela?
    Je crois que le système de justice pénale doit être plus strict en fait. Il doit sanctionner davantage les trafiquants de drogues et les gens qui vendent des drogues, en particulier aux enfants. Je crois que le problème du va‑et‑vient dans le système est très néfaste. Les criminels sont enfermés pour tout au plus quelques mois, puis ils sont libérés. Ils continuent sans cesse leur manège. Ils s'en fichent: ils font des profits. La seule chose qui compte, c'est l'argent.
    Je crois que des politiques plus strictes permettront de mettre fin à ce va‑et‑vient. Si les criminels sont pris à commettre le méfait plus d'une fois, ils devraient être enfermés indéfiniment. Ils devraient être gardés en prison, car ce sont eux qui tuent nos enfants. Selon moi, les politiques actuelles doivent subir une importante mise à jour. Le système de justice doit se tenir droit et défendre ce qui compte, soit les parents des enfants qui meurent.
(1255)
    Merci, monsieur Charles, et merci à vous, monsieur Ellis.
    Le docteur Powlowski conclura la période de questions pour la séance.
    Pour faire suite à mes questions précédentes, Brianna a visité les urgences plus de 20 fois. Malgré toutes ces visites, elle a seulement été hospitalisée deux fois.
    Comme je l'ai déjà dit, le médecin à l'urgence a le droit de retenir une personne qui a une maladie mentale et qui est un danger pour elle-même ou qui est incapable de s'occuper d'elle-même. Il a le droit d'hospitaliser la personne contre son gré pour un maximum de 72 heures. Selon moi, les médecins ont également le devoir de le faire.
    L'obligation comporte deux volets. Lorsque les gens me disent: « qu'en est‑il de mes droits? », eh bien, l'un des devoirs des médecins et de la société est d'intervenir auprès de ces personnes pour, premièrement, les protéger d'elles-mêmes. Avec le temps, l'état de ces personnes s'améliorera. Elles peuvent être en train de traverser une période difficile, comme Brianna. Souvent, avec un peu de chance et de temps, leur état s'améliorera. Vous devez intervenir pour les protéger d'elles‑mêmes.
    L'autre raison pour laquelle il faut intervenir, c'est pour protéger les familles, comme la vôtre, qui souffre des répercussions à long terme.
    Je dirais que les professionnels de la santé, les urgentistes, avaient le devoir d'agir et de l'hospitaliser s'ils pensaient qu'elle était suicidaire. Pourquoi ne l'ont-ils pas fait?
    Je crois qu'ils ne l'ont pas hospitalisée simplement parce qu'elle est très manipulatrice. Elle est capable de vous regarder dans le blanc des yeux et de vous dire que tout va bien, et vous allez la croire. Elle avait beaucoup de talent pour cela. Sa capacité de manipuler était si forte qu'elle pouvait dire n'importe quoi à n'importe qui, et on la croyait.
    Même lorsque nous avons mis les médecins de l'urgence en garde contre sa grande facilité à manipuler, je ne crois pas qu'ils nous aient crus. Honnêtement, c'est ce qui s'est passé. Je ne crois pas qu'ils aient pris au sérieux ce que nous leur avons dit. Ils pensaient que nous essayions seulement de se débarrasser du problème en leur refilant. En toute honnêteté, je ne crois pas que leur réponse était adéquate. Oui, il était de leur devoir de l'hospitaliser.
    Oui. Donc, je dirais que vous n'étiez pas satisfait de la qualité des soins que vous avez reçus des médecins. Vous les avez prévenus de ses tactiques de manipulation. Il est clair qu'elle a fait plusieurs tentatives qui ont mis en jeu sa vie. Selon moi, les soins que vous avez reçus à l'urgence étaient insatisfaisants.
    Avez-vous fait une plainte auprès du collège des médecins et des chirurgiens ou de l'hôpital, ou avez-vous envisagé d'intenter une poursuite judiciaire en raison de la façon dont elle a été traitée?
    Nous avons parlé d'intenter une poursuite judiciaire. Nous avons parlé de la façon d'aborder la situation, en particulier pour ce qui est des médecins et de l'hôpital de pédopsychiatrie à l'hôpital Surrey Memorial, et en particulier lorsque Brianna a enfoncé un crayon dans sa main et que les médecins — je veux dire les psychiatres — nous ont dit qu'elle pouvait retourner à la maison. Sarah les a suppliés de la garder. Elle était en larmes. Le médecin l'a regardée et lui a dit: « Non, nous l'allons pas l'hospitaliser. »
    Dans la société et le système juridique, je crois qu'il existe une sorte d'équilibre entre reconnaître l'autonomie et les droits d'une personne et l'obligation de la société, des autres personnes et de la famille d'intervenir, le cas échéant. Dans le système de soins de santé et le système judiciaire, croyez-vous que cet équilibre existe, ou croyez-vous plutôt que nous avons accordé trop de pouvoirs et d'autonomie aux personnes avec des problèmes de santé mentale et que nous sommes réticents à intervenir alors que nous devrions être prêts à intervenir pour protéger ces personnes?
    En toute honnêteté, je crois que nous avons accordé trop de pouvoirs aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale. Je pense que nous devons commencer à les restreindre pour être capables de nous faire entendre et de jouer un rôle de porte-parole.
    Madame Larney, vous avez l'air de vouloir ajouter quelque chose.
    Non.
    Merci, docteur Powlowski.
    Je remercie sincèrement tous nos témoins de s'être présentés ici, aujourd'hui.
    Honorables sénatrices et sénateurs, avant de lever la séance, je souhaite que l'on traite d'une question d'ordre administratif. Pourrions-nous fixer une date limite pour la soumission des mémoires dans le cadre de notre étude sur les lésions cérébrales? Je suggère qu'elle soit fixée au 16 octobre. Êtes-vous d'accord? Je vois des hochements de tête autour de la table.
    Est-ce que le Comité veut lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Le président: La séance est levée.
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