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SINT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 4 novembre 1997

• 1534

[Traduction]

Le président (M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.)): La séance est ouverte. Chers collègues, si vous voulez bien qu'on commence, j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est ici donnée pour souhaiter à tous ici la bienvenue aux audiences du Comité sur l'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI). Le Sous-comité du commerce ici réuni est un sous-comité du Comité des affaires étrangères. Le ministre nous a demandé—et j'apprécie beaucoup, monsieur le ministre—d'examiner la question fort importante qu'est celle de cet Accord multilatéral sur l'investissement.

Je sais que vous nous avez dit que vous aimeriez que nous déposions notre rapport d'ici à Noël, étant donné que vous êtes en cours de négociation et que des négociations particulières sont prévues pour janvier. Je suis certain que vous savez l'intérêt qu'ont les gens de partout au pays pour cette question. Différents groupes dans le pays nous ont soumis des demandes et nous allons consacrer surtout les deux dernières semaines de novembre à les entendre. J'inviterai tous ceux et celles qui sont devant leur poste et qui seraient désireux de nous soumettre un mémoire à le faire. Tant que le délai n'est pas écoulé, nous nous ferons un plaisir d'accepter les mémoires de Canadiens qui n'auront pas la possibilité de venir à Ottawa pour discuter de cette question fort importante.

• 1535

Chers collègues, si vous avez des questions précises au sujet de la façon dont le comité va mener à bien son travail, nous pourrions peut-être les réserver pour demain. Nous discuterons davantage à l'occasion de la séance de demain des témoins que nous allons entendre et nous mettrons la dernière touche à la liste des témoins dans le courant des semaines à venir.

Le ministre sera des nôtres jusqu'à 17 heures. Il a dit vouloir faire une présentation d'environ un quart d'heure, après quoi nous pourrons poser des questions. Je demanderai que les collègues se limitent à dix minutes chacun pour et les questions et les réponses. Cela nous permettra d'assurer que les choses roulent bien.

Monsieur le ministre, encore une fois, merci d'être venu. Je vous donne maintenant la parole.

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et bonjour, chers collègues. Ce fut un plaisir pour moi d'accepter votre invitation. Je suis reconnaissant que le comité ait jugé bon de discuter de l'AMI dans le contexte de tout un ensemble de questions, ce dans le but d'offrir des conseils au gouvernement, afin, bien sûr, que l'on puisse utiliser ces idées et ces renseignements dans le cadre du mandat qui nous revient relativement à nos négociateurs.

En guise d'introduction, j'aimerais vous présenter notre négociateur en chef pour l'AMI, M. Bill Dymond, que vous connaissez ou avez peut-être déjà entendu, et que vous allez certainement revoir dans les jours et les semaines à venir. Je lui suis reconnaissant d'être ici parmi nous, car cette séance est notre toute première réunion portant sur cette question.

Monsieur le président, je suis tout particulièrement heureux d'être devant vous pour discuter de l'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) parce que cette initiative a pour but d'établir des règles telles que le commerce et l'investissement internationaux continueront d'être une source d'emplois et de prospérité pour le Canada. Le Canada se tire mieux d'affaires lorsque ce sont des règles transparentes, plutôt que les caprices de certaines des nations les plus puissantes, qui gouvernent le commerce.

En effet, certains groupes critiquent déjà l'éventuel accord. Ils se servent de ce pacte sur l'investissement international pour s'en prendre au libre-échange, à la mondialisation, au concept des frontières ouvertes et à la participation de compagnies étrangères à notre économie. Nous devons prendre bonne note de ces opinions canadiennes, mais nous devrons en même temps les évaluer relativement à d'autres voix et à la réalité canadienne, car notre nation est tributaire du commerce. Notre bien-être futur et celui de nos jeunes dépendront dans une large mesure de la capacité du Canada d'être compétitif sur les marchés mondiaux, et non pas de la vitesse à laquelle nous pouvons fuir ces derniers. Et le Canada ne pourra être compétitif que si des règles claires encouragent les étrangers à investir chez nous et protègent en même temps les Canadiens—tant les entreprises que les simples citoyens—lorsqu'ils investissent à l'étranger.

Grâce à l'AMI, le gouvernement est tourné vers le futur plutôt que vers le passé, avec une vision et un plan qui assureront l'avenir économique de notre pays. Le débat sur l'AMI doit par conséquent être axé sur les faits et non pas sur les mythes. C'est en partie pourquoi j'ai demandé au comité de se pencher sur cette question et pourquoi, monsieur le président, j'apprécie l'occasion qui m'est ici donnée de vous faire part de mon point de vue. Mais, surtout, j'attends avec un vif intérêt les conseils que le comité sera en mesure de soumettre au gouvernement une fois qu'il aura entendu d'autres Canadiens dans les semaines à venir.

Permettez-moi cet après-midi de répondre brièvement à trois questions fondamentales sur l'AMI: En quoi l'accord consiste-t-il? Pourquoi en avons-nous besoin? Quels sont les objectifs du Canada dans le cadre de ces négociations?

Je vais commencer par vous donner quelques éléments de réponse à la question du quoi. L'AMI repose sur deux principes dominants: tout d'abord, l'absence de discrimination entre les investisseurs nationaux et étrangers; et, deuxièmement, une indemnisation juste et équitable de la part des gouvernements en cas d'expropriation.

Je dirais que la mosaïque actuelle de règles internationales ne sert pas les intérêts du Canada. Aussi incroyable que cela puisse paraître, l'on dénombre à l'heure actuelle dans le monde plus de 1 300 accords d'investissement bilatéraux. Le Canada en a déjà signé 24 et est en train d'en négocier 33 autres. En fait, lorsque le ministre du commerce et des affaires étrangères de l'Uruguay est venu nous rendre visite la semaine dernière, l'un de ses objectifs—et l'un des nôtres—était la ratification d'une entente sur la protection des investissements étrangers. Cela facilitera le commerce de nos gens d'affaires respectifs dans chacun de nos pays.

• 1540

Parce que le Canada dépend en bonne partie du commerce et de l'investissement internationaux pour son bien-être économique, il est clairement dans notre intérêt national d'établir une seule série de règles multinationales à normes élevées qui favorise l'investissement au Canada et protège les investissements canadiens à l'étranger.

Je peux également vous dire ce que l'AMI n'est pas. L'accord n'est pas une charte des droits des sociétés multinationales, et il ne sonne pas le glas de la souveraineté du Canada. Nous conserverons le droit de promulguer des lois dans tous les secteurs, notamment politique sociale et soins de santé, et de les faire s'appliquer tout autant aux entreprises étrangères qu'aux sociétés canadiennes.

Nous continuerons de pouvoir imposer des restrictions à l'investissement étranger dans des secteurs qui exigent selon nous une approche proprement canadienne, comme par exemple celui de la culture. Tout comme dans le cadre de l'ALENA, le Canada n'acceptera pas de souscrire à un quelconque engagement de portée générale quant au gel ou à l'élimination progressive de ses restrictions relatives à l'investissement étranger.

[Français]

De plus, l'AMI ne forcerait pas le Canada à abaisser ses normes en matière de travail et d'environnement. En fait, il doit empêcher d'autres pays d'abaisser les leurs pour détourner à leur profit l'investissement qui viendrait autrement au Canada. L'accord n'aurait pas pour effet de supprimer les règlements qui obligent les compagnies étrangères qui opèrent au Canada à embaucher des Canadiens en priorité. Le gouvernement continuera de pouvoir lier l'octroi d'incitations à l'investissement à des conditions comme la création d'emplois.

[Traduction]

Enfin, l'AMI ne facilitera pas les choses pour les compagnies étrangères qui veulent poursuivre le gouvernement en justice. Selon la loi canadienne, toutes les compagnies, qu'elles soient canadiennes ou étrangères, peuvent déjà s'adresser aux tribunaux canadiens si elles estiment avoir été traitées de façon inéquitable par un quelconque palier de gouvernement. Par conséquent, l'AMI ne fera qu'améliorer la protection des investisseurs canadiens à l'étranger.

Deuxièmement, pourquoi avons-nous besoin d'un AMI? Lorsqu'on commence à réfléchir à cette question, il semble que la réponse réside dans l'importance du commerce et de l'investissement internationaux pour le Canada. Comme vous le savez, le commerce et l'investissement sont les deux moteurs de l'avenir économique du Canada, et il s'agit des deux faces d'une même médaille. L'un alimente l'autre.

Aujourd'hui, un emploi canadien sur trois, toutes régions confondues, est lié au commerce et aux exportations. Cela signifie que plus de 40 p. 100 de notre PIB sont liés à la production et à la promotion de nos exportations, soit 2,5 fois le taux enregistré par les autres membres du G-7. Il est donc clair que cela doit demeurer une priorité canadienne pour le gouvernement du pays.

Le Canada compte en même temps beaucoup sur l'investissement direct étranger pour s'alimenter en capitaux. Cet investissement joue, comme vous le savez, un rôle critique dans l'économie canadienne, sur les plans tant national que régional. Il crée de l'emploi, apporte de nouvelles technologies et de nouvelles initiatives de R-D et stimule la croissance.

L'an dernier, l'investissement étranger au Canada s'est chiffré à quelque 180 milliards de dollars, une augmentation du double en dix ans. C'est là un facteur clé, car 1 milliard de dollars en nouveaux investissements directs étrangers au Canada crée 45 000 nouveaux emplois sur une période de cinq ans, et nous savons que la création d'emplois est notre première priorité à tous.

Nous ne pouvons cependant pas nous reposer sur nos lauriers. Il ressort d'un récent rapport de KPMG que le Canada est l'un des meilleurs endroits au monde où investir et faire des affaires. Pourtant, notre part de l'investissement mondial, notre part de marché, est passée de 8,7 p. 100 en 1985 à environ 4,3 p. 100 en 1995. Cela signifie qu'en adhérant au bon genre d'accord multilatéral sur l'investissement, le Canada renforcerait son attrait comme destination privilégiée pour l'investissement étranger, tout de suite, mais, ce qui est plus important, pour l'avenir.

En même temps, les Canadiens sont en train de devenir des investisseurs de plus en plus actifs et de plus en plus agressifs à l'étranger. L'investissement par des Canadiens à l'étranger s'est chiffré à 171 milliards de dollars l'an dernier, soit une augmentation de près de 164 p. 100 en dix ans.

• 1545

Cet investissement fait beaucoup de choses en plus de pousser et de promouvoir la présence canadienne à l'étranger: il assure aux compagnies canadiennes l'accès à de nouveaux marchés, il leur permet de croître et de devenir plus compétitives, et il crée de nouveaux emplois ici, partout au pays.

Un AMI qui correspond à nos intérêts en tant que pays assurerait la protection à ces investissements et aux Canadiens moyens qui investissent à l'étranger par le biais de leurs fonds mutuels ou leurs REER.

Il ne faudrait pas non plus oublier qu'en participant à ces négociations, le Canada s'assure de pouvoir participer à façonner l'AMI, ce en vue non seulement servir ses intérêts du point de vue investissement étranger, mais également de refléter les valeurs communes qui nous tiennent à coeur en tant que Canadiens.

Cela m'amène à la troisième question: celle de nos objectifs dans le cadre de ces discussions.

[Français]

En participant à l'AMI, le Canada continue la fière tradition qui en a fait un pionnier de l'élaboration de règles internationales. Compte tenu de l'importance que le commerce international revêt pour notre économie, il est dans l'intérêt du Canada de promouvoir la libéralisation des échanges. Le Canada a été un membre fondateur du GATT et de son successeur, l'Organisation mondiale du commerce.

[Traduction]

Le Canada est mieux servi dans le cadre global établi par l'OMC en matière de commerce de biens et de services. Lorsqu'il y a des règles, nous avons de meilleures chances de prospérer. Nous cherchons maintenant à obtenir un cadre semblable de règles mondiales en matière d'investissement.

Il est important que le comité comprenne que la conclusion d'un accord ne bouleverserait pas les règles actuelles du Canada en matière d'investissement. Les négociateurs canadiens ont reçu pour mandat de simplement transposer dans un AMI les règles et les exemptions que le Canada a obtenues dans le cadre de l'ALENA, notamment: qu'on ne fasse pas de discrimination entre les investisseurs étrangers et nationaux; que l'expropriation de biens se fasse pour des motifs d'intérêt public et de façon juste, et qu'elle soit assortie d'une indemnisation juste; qu'on puisse avoir accès à un mécanisme efficace et impartial de règlement de différends, et que de nombreux secteurs, comme par exemple la culture canadienne, ne soient pas sur la table.

[Français]

Le Canada espère aussi que les négociations aideront à traiter des questions comme la loi Helms-Burton. Le Canada, avec l'appui de l'Europe, a déposé des propositions destinées à contrer les mesures extraterritoriales unilatérales ciblant l'investissement.

[Traduction]

En ce qui concerne les normes en matière d'environnement et de travail, je tiens à ce qu'il soit très clair que le gouvernement n'acceptera jamais un accord qui limite notre capacité de protéger l'environnement et de maintenir des normes élevées en matière de travail si nous jugeons important de le faire. Comme je l'ai mentionné à certains de nos collègues à la Chambre, nous militons également en faveur d'un libellé vigoureux, afin que d'autres pays ne puissent pas abaisser leurs normes pour attirer l'investissement.

À cet égard, le comité sait que l'environnement et le travail sont des domaines de compétence partagée entre les gouvernements fédéral et provinciaux. C'est pourquoi nous consultons à l'heure actuelle les provinces au sujet de ces questions et d'autres encore. Nous travaillons également avec d'autres pays et avec des parties intéressées au Canada, y compris des organisations non gouvernementales, en vue de trouver un équilibre responsable entre les différents points de vue autour de la table afin d'en arriver à la meilleure entente possible.

Je ne cherche pas à m'esquiver, mais à ce stade-ci, étant donné les domaines de compétence partagée et les négociations ou consultations en cours avec les gouvernements provinciaux, il serait prématuré pour moi de préjuger unilatéralement des résultats de ces consultations. Je tiens néanmoins à souligner de nouveau que la très nette préférence du gouvernement serait que les règles soient aussi rigoureuses que possible et aillent aussi loin que possible.

Enfin, je veux souligner que le gouvernement écoutera les points de vue des Canadiens. Depuis mon arrivée au Commerce international, j'ai fait le maximum pour fournir plutôt plus que moins de renseignements au sujet de l'AMI, et pour veiller à ce que toutes les opinions soient entendues et non pas ignorées. Les consultations publiques se sont intensifiées, et cela se poursuivra.

La semaine dernière, le Canada a appuyé la décision de l'OCDE de distribuer une ébauche du texte de travail de l'AMI aux organisations non gouvernementales internationales, qui sont au nombre de plus de 50, qui avaient rencontré différents porte-parole et négociateurs à l'OCDE. J'ai le plaisir, monsieur le président, de déposer auprès de vous ici aujourd'hui ce même texte.

• 1550

Par ailleurs, j'ai communiqué directement avec des Canadiens préoccupés par la question, par exemple le Conseil des Canadiens, l'Association canadienne du droit de l'environnement et le Congrès du travail du Canada. En fait, ces groupes ont déjà rencontré notre équipe de négociation de l'AMI et des réunions futures sont d'ores et déjà prévues.

J'ai également envoyé des trousses d'information sur l'AMI à tous les députés et sénateurs et j'ai fait en sorte que des séances de breffage soient offertes aux critiques de l'opposition en matière de commerce et à tous les partis d'opposition. J'ai fait de même en ce qui concerne les représentants des médias qui s'étaient dit intéressés à obtenir davantage de renseignements au sujet de l'AMI.

Enfin, le comité, monsieur le président, joue maintenant un rôle vital pour veiller à ce que, à ce niveau-ci, le Parlement continue le dialogue avec tous les Canadiens sur l'AMI et fournisse au gouvernement le genre de conseils qui viendront renforcer notre position à la table, à l'égard tant de la défense de nos intérêts nationaux que de l'amélioration, et non pas de l'affaiblissement, de l'AMI.

Je peux vous assurer que le gouvernement du Canada ne signera une entente que si elle est dans l'intérêt national. J'envisage avec plaisir d'entendre vos opinions et de répondre à vos questions afin que nous puissions ensemble faire en sorte que cet accord vienne améliorer la prospérité économique et les perspectives d'avenir de notre pays. Je suis convaincu qu'il s'agit là d'un objectif qui nous tient tous à coeur autour de cette table. Merci.

Le président: Merci, monsieur le ministre. Merci pour ce défi. Je conviens avec vous qu'il y a beaucoup de données qui circulent, qu'il s'agisse de renseignements que vous avez fournis, d'informations qui sont disponibles sur l'Internet, ou de fuites ou autres. Nous passerons tout cela en revue et vous communiquerons nos meilleures recommandations avant Noël.

Nous allons maintenant passer aux questions. Chers collègues, étant donné la nature technique de la question qui nous occupe, je vous demanderai de parler plus lentement et d'essayer de ne pas utiliser de jargon. Nous passons à la télévision. Je vous demande tout simplement de garder cela à l'esprit.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Merci, monsieur le président. J'aimerais tout d'abord souhaiter la bienvenue ici cet après-midi au ministre et à notre négociateur en chef pour l'Accord multilatéral sur l'investissement.

Monsieur le ministre, je suis certainement d'accord avec vous sur certains des objectifs que vous avez esquissés et sur la nécessité d'avoir en matière d'investissement un accord qui s'appuie sur des règles. Comme vous l'avez déjà dit, le Canada est un exportateur de capitaux d'investissement. Nombre de nos entreprises se trouvent au Chili et ailleurs. Nous avons également besoin d'investissement étranger ici au pays.

Je suis en accord avec votre analogie selon laquelle l'investissement et le commerce sont les deux moteurs de la croissance économique, mais je me demande parfois pourquoi vous avez caché cette initiative pendant si longtemps. Il me semble que vous vous êtes attiré pas mal de problèmes du fait que les gens aient mal compris ce qu'était cet accord, et vous auriez pu vous éviter cela s'il y avait eu un débat ouvert et si les Canadiens avaient été consultés plus tôt dans le processus. Les négociations au sujet de cet accord se poursuivent depuis quelque temps déjà. Je crois qu'il y a un certain malentendu quant à ce sur quoi portent ces négociations.

Vous pourriez peut-être aider notre comité à comprendre plus clairement... Si j'ai bien saisi, l'un des principaux éléments de l'accord est la partie concernant les exemptions. Sur votre site web sur l'Internet vous parlez du fait que l'AMI ne s'appliquera pas au secteur canadien des télécommunications. L'on sait que des compagnies comme Téléglobe sont prêtes à faire face directement à la concurrence et ont hâte de voir ce plafond de 47 p. 100 sur l'investissement étranger sensiblement relevé. L'une de mes questions est donc la suivante: si tel est le cas, pourquoi vouloir que cela fasse l'objet d'une exemption?

L'autre question que j'aurais, monsieur le ministre... Si j'ai bien compris, Maude Barlow a une copie des exemptions que le Canada aimerait faire insérer dans l'accord. Qu'elle en ait ou non une copie, vous pourriez peut-être me dire si c'est du domaine public, car je ne l'ai pour ma part pas vu, ce document. Si ces exemptions existent, pourriez-vous les déposer ici aujourd'hui auprès du comité ou bien nous les fournir par la suite afin que nous puissions mieux comprendre de quoi il s'agit? Plus précisément, pourriez-vous nous donner une idée du genre d'exemptions que vous chercheriez à obtenir pour le secteur culturel et nous préciser dans quelle mesure la définition des industries culturelles serait large?

M. Sergio Marchi: Vous posez plusieurs questions, Charlie.

Tout d'abord, en ce qui concerne tout le processus de consultation et d'information... Lorsque je suis arrivé en poste, je pense que j'étais de votre avis, en ce sens que je pense que les négociateurs et que le gouvernement du Canada, en négociant de façon confidentielle avec 28 autres pays et en consultant en même temps les provinces sur de nombreuses questions, ont ressenti l'obligation, bien évidemment, de respecter le processus qui avait été établi aux fins de la consultation avec les provinces et de la négociation avec les 28 autres pays. En même temps, cela ne devrait pas nous empêcher de diffuser autant de renseignements que possible, à condition que cela ne porte pas atteinte au processus que nous nous sommes engagés à suivre. C'est pourquoi j'ai, dans mes remarques liminaires, mentionné plusieurs choses au sujet du fait de fournir plus de renseignements. Je trouve que si on ne le fait pas, nonobstant le processus national et international, si vous laissez certains de ces mythes s'installer, ce sont eux qui définiront le terrain et l'AMI.

• 1555

C'était donc mon choix de diffuser plutôt plus de renseignements que moins, tout en respectant en même temps et le processus à l'OCDE et le processus de nos discussions avec nos homologues provinciaux.

En ce qui concerne la liste des réserves, j'ignore ce dont dispose peut-être Mme Barlow, mais il est du domaine public que la liste que nous avons, et qui est une ébauche, correspond parfaitement à la liste qui se trouve dans le chapitre sur les investissements de l'ALENA. À ce propos, non seulement il a été dit que la liste est notre ligne directrice, mais il s'agit d'un document tout à fait public.

En ce qui concerne les télécommunications, c'est peut-être dû au fait, Charlie, que l'an dernier, nous avons pu, par le biais de l'OMC, négocier une entente au sujet des télécommunications avec l'aide du Canada, ainsi que l'APEC, pour donner le ton. J'imagine que cela étant fait, les gens n'ont pas vraiment envie de rouvrir la discussion là-dessus.

Si le négociateur en chef a quelque chose de plus technique à ajouter relativement à la question des télécommunications, je l'invite à le faire.

M. Bill Dymond (négociateur en chef, Accord multilatéral sur l'investissement): L'entente de l'OMC a découlé des négociations de la ronde de l'Uruguay. Pour que cela fonctionne, il a fallu un groupe de pays beaucoup plus nombreux que les 29 pays de l'OCDE. Avec l'entente conclue en avril dernier, si je me souviens bien, le sentiment autour de la table est qu'il est trop tôt pour rouvrir cela et que le groupe de pays est sans doute trop limité à ce stade-ci.

M. Charlie Penson: Pour enchaîner là-dessus, monsieur le président, les porte-parole de certaines industries m'ont dit craindre que si le Canada établit une exemption pour la culture, comme c'est le cas avec l'ALENA, avec la convergence qui existe au sein de l'industrie des télécommunications, il y aura peut-être un problème du côté de l'investissement potentiel, et même des compagnies qui sont en activité à l'heure actuelle au Canada vont peut-être décider que le Canada n'est pas un bon pari pour elles si cette exemption culturelle est imposée.

Comme vous le savez, des changements rapides sont en train de s'opérer dans tout le domaine des télécommunications. J'aimerais examiner d'un peu plus près avec vous l'envergure de cette exemption culturelle et vous demander si vous songez y inclure les compagnies de télécommunications.

M. Sergio Marchi: Encore une fois, je laisserai le négociateur répondre à certains des aspects plus techniques, mais nous avons dit très clairement, au début des négociations, en 1995—et nous avions donné un mandat très clair à nos négociateurs—que pour ce qui est de reproduire le chapitre en matière d'investissement de l'ALENA comme ligne directrice pour guider nos positions dans le contexte de l'AMI... nous avons dit très clairement que la culture canadienne ne devait pas être sur la table et que nous allions chercher une exemption semblable à celle que nous avons dans le cadre de l'ALENA. Nous estimons qu'il s'agit là d'une position très défendable en ce sens que nous croyons avoir une approche tout à fait unique à la culture et qui justifie une telle position.

Deuxièmement, il n'y a pas que le Canada qui adopte cette position relativement à la culture. En fait, plusieurs de nos amis autour de la table de négociation de l'AMI partagent la vision canadienne de la culture. Il ne s'agit donc pas d'une position uniquement canadienne. C'est une position avec laquelle nous nous sentons à l'aise, et il y a de plus en plus de pays autour de la table qui se rangent de notre avis.

• 1600

Troisièmement, nous pensons que cela est compatible avec une approche manifestement unique à la culture canadienne, tout en allant en même temps dans le sens de l'évolution rapide du secteur des télécommunications dans le monde. Nos compagnies, si vous les regardez—Nortel, par exemple—affichent des résultats formidables partout dans le monde. Au fur et à mesure que leurs marchés commencent à s'ouvrir, je pense que ces compagnies, ainsi que nos marchés, s'ouvrent au monde.

Je ne pense donc pas que les deux concepts soient incompatibles.

M. Charlie Penson: Mais, monsieur le ministre...

Le président: Vous avez une minute.

M. Charlie Penson: ...je ne suis pas de votre avis. Si vous êtes en train de dire que nous allons prendre exactement les mêmes exemptions que celles que nous avons eues en vertu de l'ALENA, il me semble que cela ne tient pas compte de ce dont nous venons à l'instant de discuter relativement au secteur des télécommunications, où les choses bougent très vite.

J'aimerais que vous me disiez si c'est cela qu'entend faire le gouvernement—c'est-à-dire prévoir exactement les mêmes exemptions que celles que nous avons en vertu de l'ALENA—ou bien si vous allez chercher à les réduire quelque peu, à diminuer en quelque sorte leur portée, si vous voulez.

M. Sergio Marchi: Non. Nous pensons que les exemptions prévues dans le cadre de l'ALENA devraient être reproduites dans l'AMI.

Le président: Merci.

Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le ministre, une question qui a été soulevée assez souvent, et que vous avez d'ailleurs abordée dans vos remarques liminaires, est celle de l'incidence qu'aura l'AMI sur le travail et sur les normes relatives à l'environnement.

Dans votre déclaration, vous avez également souligné que vous consultez les ONG dans tous ces dossiers. Plus important encore— et vous l'avez également souligné—étant donné qu'il s'agit de domaines de compétence partagée, vous êtes en train de consulter les provinces.

La question que je vous pose, monsieur le ministre, est la suivante: comment vous y prenez-vous pour consulter les ONG et comment menez-vous très exactement vos consultations avec les provinces?

M. Sergio Marchi: En ce qui concerne les consultations, il s'agit là en fait d'une de ces questions à double tranchant. Lorsque les gens vous parlent de l'environnement et du travail et qu'ils souhaiteraient que vous vous prononciez clairement sur une question, et qu'en même temps on vous reproche gentiment de ne pas avoir consulté suffisamment... c'est comme avoir le beurre et l'argent du beurre, et c'est la fameuse histoire de la quadrature du cercle.

En ce qui concerne les consultations avec les ONG, Bill, notre négociateur en chef, les a rencontrés. Il a des addenda dont il pourrait certainement vous parler et qui concernent non seulement les gouvernements provinciaux et les milieux d'affaires, mais également les ONG.

La semaine dernière, à l'OCDE, plus de 50 ONG internationales ont été invitées à rencontrer non seulement l'OCDE mais des groupes de négociation particuliers. Bill a animé une de ces réunions.

D'autres sont prévues. J'ai pour ma part communiqué avec plusieurs ONG. J'imagine par ailleurs que certaines de ces organisations seront sans doute invitées à comparaître devant le comité.

Nous ne cherchons donc aucunement à prendre nos distances par rapport à ces organisations, ni à les empêcher d'offrir le fruit de leurs réflexions, leurs conseils et leurs critiques constructives sur les positions qu'elles pensent que nous épousons.

Deuxièmement, au niveau provincial, tant pour le travail que pour l'environnement, j'aimerais vous dire également que tous les gouvernements provinciaux appuient le fait que le Canada soit à la table de négociation de l'AMI. Ce n'est pas comme si certaines provinces disaient qu'on ne devrait pas être là et que d'autres disaient le contraire. Toutes les provinces, étant donné le dossier et la nécessité que notre voix soit entendue à la table, conviennent que le Canada y a sa place. Voilà la première chose.

Par ailleurs, nous sommes très engagés avec elles sur les fronts et du travail et de l'environnement. Ces consultations ne sont pas du tout terminées. Étant donné le partage des compétences, étant donné que les discussions se poursuivent, étant donné que certains gouvernements n'ont pas encore clairement finalisé leurs préférences à l'égard du libellé et étant donné que le libellé et que les négociations à Paris continuent d'évoluer, je ne peux pas me prononcer de façon définitive d'un côté ou de l'autre.

Il faut donc que ce cheminement se poursuive. Le processus est toujours en cours. En fait, la réunion la plus récente du négociateur en chef et de son équipe avec les représentants provinciaux a eu lieu le 15 octobre. C'est donc très récent.

Mme Sarmite Bulte: Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le ministre, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue parmi nous. J'ai rédigé quelques questions et commentaires dont je vais vous faire part.

On vous a questionné à quelques reprises en Chambre, surtout sur la question de l'exemption culturelle, sur le travail ainsi que sur l'environnement. J'aimerais que nous puissions préciser certains points.

• 1605

Nous savons tous que le gouvernement canadien n'a pas l'intention que l'AMI s'applique à la culture. C'est un fait, et ça va. À cette fin, les négociateurs doivent toutefois s'entendre sur la rédaction d'une clause d'exception des industries culturelles. Nos préoccupations sont au niveau de cette clause d'exception qui sera incluse dans l'accord.

Lors d'une séance d'information de votre ministère, on nous a informés que pour le gouvernement canadien, le minimum acceptable serait une clause d'exemption de type de celle de l'ALENA. Or, il appert que la clause d'exception de l'ALENA est très controversée, voire inefficace. Les représentants culturels veulent une meilleure protection.

Voici ma première question, monsieur le ministre. Êtes-vous prêt à vous engager envers les industries culturelles à tenir compte de leurs recommandations et à négocier jusqu'au bout une clause d'exception culturelle générale et englobante, plus précise que celle de l'ALENA?

Je reviens à la question que j'ai posée en Chambre hier ou avant-hier. Nous savons qu'il est question d'inclure dans l'accord une clause spécifique visant à décourager ou empêcher la diminution des normes nationales en matière de travail et d'environnement pour attirer des investisseurs dans un pays. Il existe un danger réel que certains pays signataires de l'AMI tentent de modifier à la baisse leurs normes internes de protection d'environnement et du travail.

Voici ma deuxième question. Pouvez-vous nous assurer que les négociateurs canadiens ont reçu ou recevront une consigne claire du gouvernement pour appuyer l'inclusion dans l'accord d'une clause qui dirait à peu près ce qui suit: Les parties contractantes ne doivent pas diminuer ou déroger à des normes de santé, de sécurité, de mesures environnementales ou à leurs normes de travail pour encourager l'établissement d'investisseurs étrangers chez elles. On retrouve cela à la page 49 ou 50 de votre premier document, c'est-à-dire l'alternative 2 qui est offerte aux négociateurs.

Il faudrait de plus prévoir des sanctions en cas de violation de cette règle. C'est bien beau de dire ou d'écrire que les parties contractantes ne doivent pas diminuer leurs normes, mais on devrait prévoir l'inclusion de sanctions au cas où elles le feraient.

Les motifs de crainte les plus répandus dans la population face à cet accord sont au niveau de la diminution des normes sociales et environnementales. Pourquoi le gouvernement canadien ne veut-il pas réconforter la population et s'engager immédiatement à protéger ces normes?

Voici ma troisième question. La semaine dernière, vous avez refusé en Chambre de vous engager à appuyer l'inclusion de normes environnementales et de normes du travail dans l'AMI. Pouvez-vous maintenant nous expliquer vos raisons? Vous n'allez tout de même pas proposer des accords parallèles—ce qui serait assez spécial—sur le travail et l'environnement, car on sait tous que de tels accords parallèles sont de peu d'utilité. Il faut des normes au sein de l'AMI.

Voici ma quatrième et dernière question, monsieur le ministre. Pouvez-vous nous informer, même si vous en avez fait mention brièvement dans votre discours, des démarches entreprises par les négociateurs canadiens pour contrecarrer la loi américaine à portée extraterritoriale Helms-Burton dans ce dossier-là?

En terminant, au cas où vous n'auriez pas le temps de répondre à toutes ces questions, je vous en remets le texte afin que vous puissiez répondre par écrit au comité par la suite.

Je vous remercie, monsieur le ministre.

[Traduction]

M. Sergio Marchi: Merci, Benoît.

En ce qui concerne la première de vos questions, celle concernant la culture, je pense que moi-même et le gouvernement avons été très clairs depuis le tout début. Lorsque nous disons que nous voulons reproduire le chapitre sur l'investissement de l'ALENA, c'est justement cela que nous visons. En effet, l'OCDE a utilisé le modèle de l'ALENA comme ligne directrice.

S'il y a des groupes culturels qui estiment que le chapitre de l'ALENA sur les exemptions, qui est clair, ne suffit pas, je serais tout à fait prêt à entendre leurs idées et leurs suggestions sur ce qui, pour reprendre l'expression que vous avez utilisée, serait «plus complet». Nous avons été très catégoriques à ce sujet. Nous l'avons dit. Le mandat a été donné aux négociateurs, et ceux-ci ont été éminemment clairs là-dessus autour de la table de négociation de l'AMI. En même temps, Bill va rencontrer le Groupe de consultation sectorielle sur le commerce extérieur des industries culturelles le 13 novembre, comme il l'a fait avec d'autres organisations culturelles, pour le rassurer.

Vos deuxième et troisième questions étaient liées, en ce sens que vous avez parlé de normes en matière de travail, d'environnement et de santé, et vous avez parlé d'une clause. Vous avez ensuite parlé d'ententes parallèles visant le travail et l'environnement.

• 1610

Encore une fois, nous avons pris position en faveur d'un libellé plus rigoureux. Je sais que certaines personnes ont reçu copie du procès-verbal de l'une des réunions, au cours de laquelle nos négociateurs ne s'étaient pas prononcés là-dessus. Je pense que ce serait une erreur d'en déduire que les négociateurs canadiens sont indifférents ou que le gouvernement canadien va compromettre ses normes en matière de travail et d'environnement. Ce n'est clairement pas le cas et il est très injuste de tirer de telles conclusions. Dans le cadre des réunions relatives à l'AMI, le Canada n'est certainement pas dans le camp de ceux qui tentent d'affaiblir le libellé des normes ou les normes elles-mêmes. Nous sommes clairement dans le camp de ceux qui cherchent à renforcer le libellé et l'engagement à l'égard du travail et des normes dans le cadre de l'AMI.

En même temps, comme je l'ai déjà dit, nous—c'est-à-dire mon ministère, les ministres et les négociateurs—avons entrepris de vérifier les positions de nos homologues provinciaux. Nous reconnaissons qu'il s'agit de domaines à compétence partagée et que le Canada fonctionne mieux lorsque les provinces fonctionnent à l'unisson. Cela a toujours été à l'avant-scène en ce qui concerne les relations fédérales-provinciales, dans notre premier mandat, et certainement dans celui-ci, notre deuxième.

En ce qui concerne la question d'ententes parallèles, j'appuie le modèle d'ententes corollaires de l'ALENA en matière de travail et d'environnement. En tant qu'ancien ministre de l'Environnement, j'ai bien sûr reçu des instances de personnes qui estimaient que cela aurait pu être renforcé. D'un autre côté, il n'y a aucune autre entente internationale qui soit assortie d'accords parallèles, aucune autre entente qui permette aux organisations qui s'occupent d'environnement et de travail de se mettre ensemble pour faire avancer ces dossiers. Je suis donc très favorable à cela, et je pense que ce sera sans doute davantage la règle que l'exception dans les accords commerciaux futurs, car les gens partout dans le monde cherchent à obtenir plutôt davantage de garanties, que moins.

Pour ce qui est de votre question relative à la loi Helms-Burton, encore une fois, vous savez que lorsque le gouvernement canadien rencontre des porte-parole et des ministres américains, il ne laisse jamais passer l'occasion de répéter son mécontentement à l'égard de cette loi, qui a sans doute fait des petits, et je songe ici à la Lybie, à l'Iran, etc. Nous pensons que même si l'on parle de toute la question de la confiscation de biens, la vision extraterritoriale du monde du G-1 ne cadre pas avec cette idée que le monde doit se synchroniser.

Cela nous encourage que les Européens et que les Américains discutent toujours de la question, et je songe ici à la menace européenne de contester devant l'OMC l'imposition par les Américains de la loi Helms-Burton . Nous espérons—nous sommes réalistes, mais nous nous permettons d'espérer—qu'autour de la table de négociation de l'AMI nous trouverons des alliés qui nous aideront peut-être à utiliser l'AMI pour redresser la situation amenée par la loi Helms-Burton, qui nous ennuie, bien sûr, profondément.

Le président: Monsieur Blaikie.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président.

Je vais commencer par réagir brièvement, d'un point de vue philosophique ou politique, à la déclaration du ministre. Je pense que le ministre a tort de dire que les gens qui critiquent l'AMI ou la mondialisation, le libre-échange, etc., ne sont pas en faveur d'une économie mondiale qui s'appuie sur des règles. La question n'est pas de savoir si nous avons une économie mondiale qui s'appuie sur des règles. La question est celle du genre de règles que nous avons, des intérêts de qui elles visent à protéger, des intérêts de qui sont prioritaires à la table et des intérêts de qui sont en bas de l'ordre du jour de ces négociations internationales.

À ce sujet, j'aimerais qu'il soit absolument clair qu'en tant que critique de la mondialisation, du libre-échange, etc., et maintenant de l'AMI, je ne critique pas l'idée d'une économie mondiale fondée sur des règles; je critique la nature des règles qui ont été mises en place et la nature des négociations qui se poursuivent et dans le cadre desquelles les droits et les besoins des investisseurs sont considérés comme la priorité mondiale par opposition aux droits et aux besoins des gens, des localités et de l'environnement, qui sont jugés être d'une importance secondaire, voire même marginale.

• 1615

Vous avez dit que les exemptions que vous cherchez à obtenir sont celles qui figurent dans l'ALENA. Il serait utile pour le comité d'avoir une description détaillée de ce que... Je ne suis pas certain que ce soit identique. Vous ne cherchez pas à obtenir des exemptions qui soient identiques à celles prévues dans l'ALENA.

On pourrait donc avoir la liste des exemptions spécifiques de pays et des exemptions générales que vous cherchez peut-être à obtenir, avec le détail de la nature des exemptions spécifiques de pays, pour savoir si elles prévoient le statu quo ou le démantèlement.

Je m'excuse d'utiliser tous ces termes techniques, monsieur le président. Néanmoins, ce sont là des choses qu'il nous faut savoir si nous voulons pouvoir nous prononcer de façon intelligente sur la position du gouvernement.

Nous ne sommes pas ici pour discuter de façon abstraite de l'AMI. Je peux faire cela si c'est ce qui est demandé. Mais nous sommes également ici pour conseiller le gouvernement dans le cadre de ces négociations. Pour ce faire, il nous faut avoir une idée assez claire de ce qui est prévu et le détail de ce que demande le gouvernement.

Cela étant dit, monsieur le président, j'aimerais demander encore autre chose au ministre. Je ne sais si c'est la quatrième ou la cinquième fois... mais je lui ai déjà demandé cela à la Chambre et je le lui redemande ici en comité. Je comprends la nature des négociations, mais je comprends également que d'autres gouvernements se sont sentis plus libres de dire s'ils cherchaient—pour employer le langage des négociations commerciales—des formules exhortatives en ce qui concerne les dispositions de l'accord en matière de travail et d'environnement.

À mon sens, il s'agit là de formules exhortatives mais qui ne lient pas les gens. Ce que je veux dire par là, c'est qu'avec de telles formules, la question de déterminer si un tel les a ou non respectées ferait l'objet d'un processus de règlement de différend.

Certains gouvernements à la table de négociation de l'AMI ont dit être en faveur d'un processus de règlement de différends. Ce n'est vraisemblablement pas le cas d'autres gouvernements. Je ne vois pas et je ne comprends pas pourquoi, en dépit des consultations qui sont peut-être en cours avec les provinces, vous ne pouvez pas dire si le gouvernement canadien—soit en consultation avec les provinces, s'il y a achoppement là-dessus, ou à la table de négociation de l'AMI s'il n'y a pas achoppement avec les provinces—veut un processus de règlement de différends en ce qui concerne les normes relatives au travail et à l'environnement ou bien si vous voulez des formules exhortatives.

Je pense que nous méritons une réponse là-dessus. Vous pouvez bien sûr choisir la position que vous voulez. Vous devez néanmoins être prêt à la défendre. Nous, nous serons prêts à exposer notre point de vue. Il nous faut cependant savoir ce que fait véritablement le gouvernement du Canada à cet égard.

Je vous pose donc la question suivante: la position du gouvernement canadien est-elle que les formules relatives aux normes en matière de travail et d'environnement devraient être exhortatives ou bien la position du gouvernement canadien est-elle qu'il faudrait qu'il y ait un processus de règlement de différends qui s'appliquerait à un ensemble de normes obligatoires en matière de travail et d'environnement?

M. Sergio Marchi: Bill, je vais répondre tout d'abord à votre première question, sur l'orientation philosophique. Je n'ai à aucun moment dit que ces voix-là ne devraient pas faire partie du débat. Je pense que je me suis même efforcé dans le texte de dire qu'il faudrait s'assurer que ces voix soient entendues et non pas ignorées.

Ce que j'ai cependant également dit c'est que nous devrions écouter toutes les voix canadiennes, examiner la réalité canadienne et examiner les faits et non pas les mythes. Je pense que les gens ont été nombreux à parler de façon très responsable de l'AMI. D'autres ont tiré dans le noir et ont fait des déclarations qui, bien franchement, ne correspondent pas à la réalité.

Tout ce que j'essayais donc de dire c'était que si nous voulons avoir un bon débat, si nous voulons fournir les meilleurs conseils à nos négociateurs, alors il nous faut davantage de discussions de ce genre et non pas ce type de rhétorique qui rend l'AMI responsable de presque tout, y compris le réchauffement de la planète.

Deuxièmement, en ce qui concerne la liste détaillée d'exemptions, encore une fois, le modèle de base est celui des exemptions que nous avons réussi à obtenir dans le cadre du chapitre de l'ALENA sur l'investissement. Je laisserai au négociateur en chef le soin de passer cela en revue dans le détail.

• 1620

Pour ce qui est des cas de statu quo et de démantèlement, j'ai été très clair dans mes déclarations là-dessus et les membres de l'équipe de négociation ont été très clairs dans le contexte de leur mandat. Notre principe général est que nous n'accepterons pas que le statu quo ou que le démantèlement soit appliqué d'un bout à l'autre.

On l'a accepté dans certains cas, et je songe à Air Canada dans le contexte de l'ALENA. Pendant très longtemps, dans notre pays, la propriété étrangère était limitée à 25 p. 100. Dès qu'Air Canada a été privatisée, il lui a bien sûr fallu une infusion de capitaux, et l'on a pensé que le statu quo en ce qui concerne les 25 p. 100 était faisable et favorable pour qu'Air Canada obtienne davantage de capitaux. Nous avons donc fait une exception dans ce cas-là.

Nous n'avions même pas parlé d'un démantèlement relativement à 25 p. 100. Nous avons tout simplement décidé de geler une tradition à long terme relativement à la propriété étrangère d'Air Canada. Nous nous sommes donc opposés au principe général de l'application de toutes ces exemptions aux cas de statu quo et de démantèlement.

En ce qui concerne la dernière question que vous m'avez posée à la Chambre, et ici encore, je ne voudrais pas donner l'impression de vouloir m'esquiver. Mon point de vue personnel est une chose, et la position du gouvernement canadien vis-à-vis des dix provinces ainsi que des territoires, est une chose qui n'a pas encore abouti à une conclusion.

Les provinces sont en tout cas très loin de se prononcer sur une position finale. Tant que l'on n'a pas reçu leurs positions, j'aimerais respecter la compétence conjointe, partagée, qui est prévue dans notre Constitution relativement au travail et à l'environnement, afin que l'on puisse parler, en bout de ligne, d'une seule et solide voix canadienne.

Bill, auriez-vous quelque chose à dire au sujet des exemptions?

Le président: Monsieur Dymond, étant donné que vous allez être ici demain, vous pourriez peut-être réserver votre réponse pour la réunion de demain.

Bill, il ne vous reste plus qu'une minute et dix secondes.

M. Bill Blaikie: D'accord.

J'aimerais tout simplement dire au ministre... Il nous dit qu'il nous faut nous cantonner aux faits. Ce que je demande c'est quels sont les faits relativement à...

M. Sergio Marchi: M. Dymond vous les donnera, ces faits.

M. Bill Blaikie: D'accord, mais nous aimerions également savoir quels étaient les faits relativement à la position du gouvernement.

Le gouvernement prend position sur toutes sortes d'autres choses dans l'AMI et il n'est pas en train de s'esquiver en ce qui les concerne. Il y a des choses dans les dispositions générales de l'AMI et ailleurs qui préoccupent les provinces. Je songe notamment aux ressources naturelles, aux achats gouvernementaux, à tous... Ce sont des choses qui concernent les provinces, et il n'y a pas la même hésitation.

Bien franchement, j'ai l'impression que vous essayez de vous esquiver, même si vous dites le contraire. Nous méritons de savoir quelle est la position du gouvernement là-dessus.

Vous avez caractérisé les voix. Vous dites qu'il nous faut les écouter, mais, en même temps, vous les affublez de stéréotypes en disant qu'elles sont celles de personnes qui veulent fuir. C'est ce que vous avez dit. Il ne s'agit pas de fuir; il s'agit de savoir ce dont il va être question à la table. Je pense tout simplement que le comité doit savoir de façon précise ce pour quoi le gouvernement va chercher à obtenir des exemptions générales, des réserves spécifiques de pays, etc.

Voilà ce que je voulais dire, et j'ai pensé voir M. Dymond secouer la tête.

Le président: Pourriez-vous boucler rapidement?

M. Bill Blaikie: Ce que cherche à obtenir le gouvernement n'est pas identique à l'ALENA. Par conséquent, l'on ne peut pas se contenter de regarder tout simplement l'ALENA. Il nous faut savoir ce que le gouvernement cherche dans le cadre de ces négociations. Je demanderai au ministre de nous fournir ces renseignements.

Le président: Merci, monsieur Blaikie.

Monsieur le ministre, il vous reste 30 secondes.

M. Sergio Marchi: Je n'attacherais pas trop d'importance au fait que le négociateur secoue la tête pendant que vous posez telle question ou telle autre, mais si vous voulez, monsieur le président, M. Dymond pourra fournir des explications demain, mais il peut encore le faire aujourd'hui.

Bill, vous parlez de stéréotypes, mais je pense qu'il faut être très prudent lorsqu'on emploie ce genre de termes. Je ne voudrais appliquer de stéréotype à personne. S'il en est qui font dans les stéréotypes... l'on entend beaucoup de stéréotypes relativement à l'AMI, mais je pense que tout le monde a le droit d'exprimer son avis. Si j'ai voulu ouvrir le processus, c'est en partie parce que j'aimerais qu'on parle de faits plutôt que de fiction.

Deuxièmement, lorsque vous dites qu'on essaie de s'esquiver, encore une fois, certains pays—très peu, peut-être trois ou quatre sur 29—se sont prononcés. Il se trouve que nous sommes un État fédéré, et certains pays qui n'ont pas le même schéma d'organisation sont bien sûr plus libres car ils prennent les décisions finales tout seuls. Ce n'est pas notre cas à nous.

Le travail et l'environnement sont deux questions au sujet desquelles il n'y a pas encore consensus avec les provinces. Je veux bien sûr leur donner le loisir de bien réfléchir à leurs positions. En ce qui concerne d'autres positions, d'importants progrès ont été faits et nous sommes donc plus libres de nous prononcer sur ces questions.

• 1625

Personne n'essaie de s'esquiver. Nous nous efforçons de respecter le processus de consultation avec les ministres provinciaux de tout le pays, ce qu'on nous reproche bien souvent à la Chambre de ne pas faire. Une fois que les provinces nous auront communiqué leur verdict, nous pourrons bien évidemment faire des déclarations, car nous saurons alors dans quelle direction ira le débat à la table de négociation de l'AMI.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Étant donné les contraintes temporelles qui nous sont imposées, je vais maintenant donner la parole à M. Nault.

M. Robert Nault (Kenora—Rainy River, Lib.): Monsieur le président, avant que je ne commence à interroger le ministre, je voudrais dire que j'ai l'impression que vous aimeriez que nous réservions pour notre réunion de demain avec M. Dymond les questions plus techniques se rapportant aux négociations et à la consultation avec les provinces. À moins que le ministre ne soit prêt à se prononcer sur cela... l'étape où ils en sont compte pour une très grosse partie de cette discussion. D'après la liste, il ne semble pas qu'il soit prévu que l'on invite les provinces à venir nous exposer leur position. Je serais d'ailleurs très étonné si nous parvenions, par les temps qui courent, à obtenir que les dix provinces et les territoires s'entendent avec le gouvernement fédéral sur quoi que ce soit.

Dans ce contexte, pourriez-vous me dire ce que vous utilisez comme majorité numérique ou le seuil que vous jugez suffisant pour pouvoir aller de l'avant avec une position. Si huit des dix provinces sont d'accord sur une position, alors pouvez-vous la présenter? Est-ce sept? Pour que les gens chez eux comprennent, comment faites-vous pour régler ce genre de choses qui sont destinées à la scène internationale? Comme vous le savez, l'on se trouve sans cesse pris dans ces discussions au sujet des limites des compétences et de qui est responsable de quoi dans ce pays, et parce que nous sommes une fédération, je pense qu'il est important que vous expliquiez très clairement pour nous comment vous faites.

M. Sergio Marchi: Je vais peut-être laisser Bill répondre à cette question.

M. Bill Dymond: Merci, monsieur le ministre.

Monsieur le président, je ne voudrais bien sûr pas caractériser la position des différentes provinces, prises séparément. Elles peuvent se prononcer elles-mêmes sur cette question. Nous avons eu une discussion exhaustive là-dessus lors de notre rencontre tenue le 15 octobre à Toronto, mais la toile de fond était que la discussion à Paris était loin d'être terminée. Nous étions encore en plein milieu de cette discussion, qui va d'ailleurs se poursuivre. Je pense que la position des provinces est en partie façonnée par le fait que les positions de nombreux pays autour de la table ne sont pas encore connues, vraisemblablement parce qu'elles n'ont pas encore fixées.

Je préciserai qu'il y a sans doute une province qui est très clairement en faveur d'une solution exécutoire et une province qui y est très clairement opposée. Je dirai également que la majorité de l'opinion, si elle n'est pas carrément opposée, pourrait être caractérisée de peu enthousiaste à l'égard de quoi que ce soit d'obligatoire dans ce domaine et de quoi que ce soit qui irait au-delà de ce qui est dit dans l'ALENA, qui est une demande exhortative ou volontaire en matière de normes.

J'estime cependant que ce serait une erreur de dire que de notre côté, au niveau où j'interviens, toutes les réponses sont rentrées. Je ne les ai pas encore pressées de nous soumettre leur position finale à ce stade-ci. Il s'agit clairement d'une chose qu'il nous faudra faire avant que de conclure ces négociations, et les provinces vont vraisemblablement nous communiquer cela au moment opportun.

M. Robert Nault: L'autre question, monsieur le président, qu'il nous faudrait régler et à laquelle une réponse devrait, je pense, figurer au procès-verbal... Nombre d'entre nous avons, bien sûr, passé de nombreuses nuits à lire l'Accord de libre-échange nord-américain lorsque nous avions du mal à nous endormir. Je l'ai apporté avec moi car on parle, comme Charlie l'a fait tout à l'heure, des exemptions et du fait que Maude Barlow les a et que pour cette raison elle est plus intelligente que le reste d'entre nous. Moi aussi, je les ai, je les ai ici.

J'aimerais savoir si, en ce qui concerne l'exemption, il y a quelque chose de différent dans le cadre de l'AMI comparativement à ce que nous avons eu avec l'ALENA, ou bien si c'est la même chose? Si c'est la même chose, il est très difficile de dire, les voici; si vous voulez les examiner, on peut en parler au comité et on peut régler la question.

Le libellé est-il le même? Les exemptions ont-elles déjà été déposées à Paris? Est-ce de cette façon que vous vous occupez de cela, ou bien y a-t-il un processus différent de celui dont on a laissé entendre qu'il allait s'appliquer aux exemptions? La culture occupe bien sûr une place importante dans cette discussion.

M. Sergio Marchi: Non, il n'y a pas un autre processus. Le processus correspond essentiellement à ce qui est prévu en matière d'exemptions dans le cadre de l'ALENA. Il y a à cette étape-ci autour de la table de négociation de l'AMI un libellé clair mais différent que l'on essaie de resserrer, mais en gros, les exemptions de la liste de l'ALENA sont les mêmes exemptions que celles que nous avons déposées à la table de négociations de l'AMI.

M. Bill Dymond: Tout à fait. L'essentiel des réserves que nous cherchons à obtenir sont les réserves prévues dans l'ALENA.

• 1630

M. Robert Nault: Qu'en est-il du libellé?

M. Bill Dymond: Le libellé sera, bien sûr, différent. Il évoluera au fur et à mesure qu'évoluera le texte, car les réserves que vous prenez sont les réserves contre les obligations qui sont proposées pour vous.

Nous ne connaissons pas encore le libellé final. Nous ne l'aurons qu'à la fin du processus. Nous avons fait ce qu'ont fait tous les pays, c'est-à-dire déposé une ébauche de liste correspondant à certaines hypothèses, sous réserve de changements au fur et à mesure des négociations.

Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, monsieur le ministre, il est peut-être des éléments dans l'AMI qui seront négociés mais qui ne seront pas acceptables au gouvernement du Canada. Nous ferons alors des réserves. Nous prévoirons des exceptions. Nous dirons que ces choses ne s'appliquent pas au Canada. Cela constituerait des exceptions qui ne se trouvent pas dans l'ALENA parce qu'on n'en aurait pas eu besoin dans ce contexte-là.

C'est un tableau en évolution constante. Mais notre repère pour les exceptions, et pour l'essentiel, c'est l'ALENA. Nous tentons de reproduire l'ALENA. S'il y a des éléments de l'AMI qui sont fondamentalement inacceptables aux yeux du gouvernement du Canada, alors la solution évidente sera de déposer l'exception nécessaire.

M. Robert Nault: Monsieur le président, ai-je le temps de poser une petite question rapide?

Le président: Oui.

M. Robert Nault: Je comprends toute cette discussion au sujet des situations exécutoires dans le contexte du travail... et la situation avec les provinces en matière de compétence est mûre pour cela. J'ai un peu plus de difficultés en ce qui concerne l'environnement. Bien franchement, je suis quelque peu surpris par la position de certains pays dans le monde, y compris les États-Unis, où le Président Clinton est en train de dire qu'il veut être plus sévère relativement à l'environnement. Pourquoi n'a-t-on pas une position plus ferme en tant que société canadienne? Si je peux me permettre, monsieur le ministre, j'espère que notre gouvernement va au moins pousser très fort du côté environnemental.

S'il est vrai que certaines des provinces ne veulent pas se ranger de notre côté, je pense que nous avons le droit, en tant que société, de le savoir, car on parle ici de la position d'un État fédéré. Notre position n'est-elle pas qu'il nous faudra déplacer les marqueurs d'ici quelque temps, surtout en ce qui concerne l'environnement? Je vous pose cette question car vous êtes ancien ministre de l'Environnement.

Il me semble que l'on joue la carte des différentes compétences relativement à tout le dossier de l'environnement. Ce n'est pas la même chose que du côté du travail, car les codes et les normes de travail varient d'une partie du pays à une autre. En ce qui concerne l'environnement, nous avons plus ou moins un processus normalisé d'un bout à l'autre du pays.

M. Sergio Marchi: Lorsque Bill a caractérisé nos discussions avec les provinces, c'était relativement et au travail et à l'environnement. Vous avez tout à fait raison. Je pense que lorsqu'une province s'est rangée du côté de règles exécutoires, une province s'y est opposée, et les autres provinces se sont situées quelque part entre les deux et ne nous ont pas communiqué de position finale... c'était relativement et au travail et à l'environnement, avec un raffermissement de ces deux positions relativement au travail, étant donné les codes du travail et la compétence des provinces en la matière.

Il vous faut vous rappeler que lorsque les premiers ministres se sont réunis, l'une des questions au sujet desquelles ils ont dit vouloir assurer une plus grande harmonisation et de meilleurs résultats pour les Canadiens de partout au pays était celle de l'environnement.

Vous avez un cadre à l'intérieur duquel les gouvernements fédéral et provinciaux s'efforcent de faire plus avec moins en tentant de voir quelle partie du puzzle de l'environnement relève de quel palier tout en s'assurant que les morceaux ne tombent pas dans les trous. Au fur et à mesure qu'on avance sur le chemin qui a été tracé, il devient de plus en plus important pour nous de mettre les points sur tous les i avec les gouvernements provinciaux, pour éviter qu'ils ne pensent que nous agissons de façon unilatérale.

Cela étant dit, il est clair que nos négociateurs exercent des pressions pour obtenir un libellé et un engagement plutôt plus forts que plus faibles. Encore une fois, il nous faut tenir compte de la compétence des provinces. Nous vous avons donné la partition, mais il reste encore beaucoup de travail à faire pour renforcer le libellé.

Nous sommes fermes dans notre engagement à l'égard des normes relatives au travail et à l'environnement. Nous tenons par ailleurs à respecter le pouvoir des provinces. J'espère qu'au bout du compte, après moult consultations, la voix canadienne qui se fera entendre sera unie et forte, et non pas faible.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.

Comme vous le savez, notre parti a toujours épousé les principes d'un commerce plus libéralisé et en a toujours reconnu les avantages. Il y a dans l'AMI de nombreuses choses qui sont à notre avis très positives et qui offriront des possibilités aux entreprises canadiennes. Nous avons cependant un certain nombre de réserves. Nous appuyons l'exemption culturelle. Je tiens à ce qu'il n'y ait aucun équivoque à cet égard, car cela nous distingue de certains autres partis en ce que nous sommes très favorables à une exemption culturelle.

• 1635

En ce qui concerne l'ébauche de liste de réserves—aucun d'entre nous ne demande la liste finale, car nous savons que cela n'est pas possible—il nous faut une ébauche de liste. Il faut au comité une ébauche de liste afin que nous puissions l'évaluer et contribuer au processus.

Les Américains ont exprimé, dans le contexte de leurs réserves... la partie de la liste de réserves proposées qui exempterait tous les États et toutes les localités de mesures existantes non conformes dans tous les secteurs régis par l'AMI. Au Canada, les Canadiens sont très préoccupés par les questions qui relèvent de la compétence des provinces et des municipalités. Des exemptions semblables seront-elles prévues pour ces questions?

L'incidence de l'AMI pourrait être particulièrement importante ou dommageable, par exemple, pour les activités de développement économique, fédérales et provinciales. Cela pourrait limiter la capacité de provinces ou de municipalités d'offrir des incitatifs aux compagnies oeuvrant dans ces domaines. A-t-on fait une analyse d'impact des effets de l'AMI sur les programmes fédéraux, provinciaux et municipaux qui existent déjà au Canada?

Nous ne pouvons pas très bien signer une entente si nous ne savons pas quelle incidence celle-ci aura sur nos programmes existants. Cela est très important.

Je me suis posé plusieurs questions. La dernière concerne la participation des États-Unis à l'AMI. Aux États-Unis, de nombreuses réserves ont été exprimées par la Western Governors Association, entre autres. Il y a quelques problèmes aux États-Unis, parce qu'il n'y a aucune garantie que Clinton se verra accorder la procédure accélérée. Si les États-Unis n'appuient pas ou ne signent pas l'AMI au bout du compte, le Canada va-t-il l'appuyer ou le signer?

Voilà quelques-unes de mes questions, et j'aurai peut-être le temps de vous en poser encore une autre. Merci.

M. Sergio Marchi: Merci, Scott. J'apprécie que vous soyez favorable à une stratégie commerciale libéralisée, et j'apprécie également l'appui de votre parti relativement à l'exemption culturelle. Je pense que plus il y a unanimité là-dessus, plus la communauté culturelle et les Canadiens se sentiront rassurés.

Deuxièmement, en ce qui concerne l'ébauche de liste de ce que l'on appelle les réserves, comme Bill et moi-même l'avons déjà dit à maintes reprises, les points de référence pour les réserves se trouvent dans le chapitre de l'ALENA qui en traite. Je proposerai, monsieur le président, que Bill vous remette demain les documents qui sont du domaine public, comme par exemple la liste de ces réserves, et qu'il prenne un peu de temps pour les passer en revue avec vous.

Je ne pense pas qu'il nous faille nous inquiéter tout de suite. Comme je l'ai mentionné, et comme l'a souligné Bill, à l'heure actuelle, le libellé dont il est en ce moment question relativement à ces références autour de la table de négociation de l'AMI, est peut-être différent. C'est la quadrature du cercle. Nous essayons, bien évidemment, de resserrer les choses. Si nous n'y parvenons pas, et si nous avons le sentiment que les formules employées sont néfastes pour nos intérêts, alors nous demanderons des réserves.

Je pense qu'il serait utile pour nous d'examiner une à une les réserves qui se trouvent dans le chapitre sur l'investissement afin que tout le monde autour de la table comprenne bien.

En ce qui concerne votre dernière question, ce que vous dites au sujet de l'exemption des Américains relativement aux États, c'est intéressant.

M. Scott Brison: Excusez-moi de vous interrompre, mais la deuxième question portait sur une analyse d'impact.

M. Sergio Marchi: Oui, j'y viens.

Le texte dit qu'il va y avoir une exemption pour les États. Comme vous vous en souviendrez, et les États et nos provinces faisaient partie du chapitre de l'ALENA, mais en même temps, de nombreuses exemptions relatives aux États et aux provinces ont été insérées.

D'aucuns ont demandé, autour de la table de négociation de l'AMI, que tous les États fédérés veillent à ce que leurs États et provinces participent aux éventuelles ententes découlant de l'AMI et soient tenus de les respecter. Nous n'avons pas accepté cela. Même si toutes les provinces veulent siéger à la table, car elles savent l'importance de l'investissement pour le Canada et pour les régions, nous voulons voir sur quoi débouchera le débat. Si les provinces sont rassurées par le texte de l'AMI, ce sera une chose. Si elles ne le sont pas, nous aussi, nous demanderons une exemption. Voilà pourquoi nous nous sommes opposés à l'inclusion générale des États.

• 1640

Nous n'avons pas encore déposé l'exemption. Nous sommes tout à fait prêts à le faire si, de l'avis des provinces, une exemption devrait être demandée.

En ce qui concerne une étude d'impact, je laisserai le négociateur en chef répondre à votre question. Je ne suis au courant d'aucune analyse d'impact sur les programmes fédéraux-provinciaux, mais je laisserai le négociateur se prononcer là-dessus.

Enfin, pour ce qui est de la procédure accélérée, ma prédiction est que Clinton va l'obtenir. Je pense qu'en bout de ligne, le Congrès jugera bon de lui accorder la procédure accélérée. Je ne voudrais pas spéculer sur le résultat. Nous le connaîtrons vendredi, après le vote de la Chambre. Il s'agira là d'un vote, et il nous faudra également attendre le vote du Sénat, mais ma prédiction est qu'il va obtenir la procédure accélérée.

Quoi qu'il en soit, le Canada est présent à la table de négociation de l'AMI parce qu'il croit qu'il doit participer à la discussion. Le commerce et l'investissement sont importants pour nous, peu importe ce qui se passera à Washington plus tard dans la semaine.

Le président: Monsieur Dymond, vous pourriez peut-être donner une réponse très brève tout de suite, pour y revenir demain.

M. Bill Dymond: Je peux être très bref.

Le président: Chers collègues, aimeriez-vous qu'il poursuive cela demain?

Monsieur Dymond.

M. Scott Brison: J'aurai encore une autre question.

Le président: La parole sera d'abord à M. Dymond.

M. Bill Dymond: Je peux être très bref.

Étant donné que notre position repère est l'ALENA, nous voulons reproduire l'ALENA. Nous voulons que l'AMI soit conforme aux politiques existantes, aux lois existantes, aux pratiques existantes, et nous menons depuis le tout début des travaux de recherche et d'examen avec tous les ministères fédéraux qui s'intéressent aux questions qui sont couvertes par l'AMI, pour être bien certains de ne pas dépasser ce qui est prévu dans l'ALENA. Par conséquent, quel que soit l'impact, celui-ci a déjà été absorbé par l'exécution des obligations prévues dans l'ALENA.

M. Scott Brison: L'on ne cesse de parler de l'ALENA. L'un des avantages de la négociation d'une entente maintenant, c'est-à-dire au bout de quelques années, est que l'on peut repérer les difficultés survenues depuis, ainsi que les possibilités qui sont ressorties. L'AMI va cependant plus loin que la portée du chapitre 11 de l'ALENA sur l'investissement en ce qui concerne les États investisseurs et les possibilités de poursuites par ces derniers.

Trois poursuites ont déjà été engagées en vertu du chapitre 11 contre le gouvernement canadien, dont une mettant en cause la Ethyl Corp. En ce qui concerne cette dernière, l'affaire découle du projet de loi C-29, et vous êtes au courant étant donné que vous étiez à l'époque ministre de l'Environnement.

Avec la croissance exponentielle au niveau de la participation—avec 29 pays participants—, avec l'élargissement de la portée des dispositions en matière de poursuites par des États investisseurs, n'y a-t-il pas un risque énorme pour le Canada que ce genre d'activités se multiplient?

M. Sergio Marchi: J'ai dit dans mon introduction qu'à l'heure actuelle les compagnies étrangères établies au Canada peuvent recourir à nos tribunaux si elles pensent avoir été victimes d'injustice.

En ce qui concerne la Ethyl Corp., il ne serait pas sage pour moi de me prononcer là-dessus. Nous avons néanmoins la conviction, qu'il y ait ou non un AMI, que nos lois, relatives à l'environnement ou au travail, l'emporteront.

Par exemple, il y a deux lois qui n'ont pas été adoptées lors de la dernière législature, mais pour lesquelles des projets de loi vont être déposés de nouveau. Je songe en particulier à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Nous allons chercher à renforcer la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, qu'il y ait ou non un AMI. Nous souhaitons faire adopter une loi canadienne visant à protéger les espèces menacées, qu'il y ait ou non un AMI. Un accord multilatéral sur l'investissement n'aura aucune incidence là-dessus.

Nous ferons en sorte que nos lois soient aussi fortes que le souhaitent le Parlement et les Canadiens, et ces lois seront respectées chez nous et par les pays étrangers. On parle ici de traitement national.

• 1645

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Madame Folco et monsieur Graham, vous disposez chacun de cinq minutes.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Bonjour, monsieur le ministre.

Je voudrais, si vous me le permettez, revenir sur un élément que vous avez soulevé lors de vos premières remarques. Vous disiez que l'accord ne sonnait pas le glas de la souveraineté du Canada. Évidemment, je viens du Québec et je suis très heureuse de voir que nous parlons de souveraineté à un autre niveau. Notre gouvernement a certainement été amené à établir une position claire par rapport à la souveraineté, surtout en ce qui concerne les industries culturelles, mais également d'autres industries.

Cependant, dans ma circonscription, plusieurs commettants m'ont dit qu'ils avaient peur et éprouvaient une certaine inquiétude par rapport à un glissement vers une perte d'autonomie, vers la possibilité que les accords viennent enlever au gouvernement du Canada certains pouvoirs de gestion et aussi certaines possibilités de légiférer.

Est-ce que vous pourriez préciser ce que vous avez l'intention de faire quant à l'accord pour donner suite à cette intention de respecter et de renforcer la souveraineté du Canada?

[Traduction]

M. Sergio Marchi: Merci, Raymonde.

Des préoccupations ont bien sûr été exprimées relativement à l'AMI vis-à-vis de la souveraineté, et la même préoccupation avait été évoquée à l'époque de l'ALENA et de l'ALE. Si l'on regarde toute la marche vers la mondialisation et si l'on discute avec nos commettants, l'on constate toujours une certaine appréhension. Malgré les nombreux avantages de la mondialisation, de l'économie mondiale et du fait que toutes les parties du monde soient aujourd'hui si liées les unes aux autres, il y a toujours eu cette question de savoir si l'on n'était pas trop dépendant des autres. Les économies sont-elles si interreliées que des mesures prises à des milliers de milles de chez nous auront une incidence sur nos bourses et nos économies? Il n'existera jamais de situation parfaite où la mondialisation éliminera toutes les réserves qu'ont les gens.

En même temps, je pense que ces mêmes commettants, lorsqu'on parle du fait que le monde est en train de devenir plus petit, reconnaissent que le Canada doit faire partie de ce monde interrelié, non seulement parce qu'on le veut, mais bien parce qu'il le faut. Si vous regardez la taille de notre économie et de notre pays, et le fait que 40 p. 100 de notre PIB est lié aux exportations, il est clair qu'il nous faut nous améliorer par rapport à l'an dernier.

Dans notre domaine, on n'est jamais meilleur que ne l'était son dernier discours politique, et dans le monde du commerce et de l'investissement, on n'est jamais meilleur que ne l'était sa dernière transaction. On multiplie les transactions, mais dans certaines régions du globe, notre part de marché est en train de rétrécir. Pourquoi? On perd du terrain en faveur de nos concurrents. D'autres pays font mieux, sont plus futés ou plus rapides. D'autres pays offrent peut-être plus d'incitations ou moins. Par conséquent, en même temps que ces Canadiens expriment leurs appréhensions, ils disent qu'il nous faut clairement faire partie de ce monde interrelié, dans leur intérêt et dans celui des générations à venir.

Je pense que la responsabilité non seulement des ministres mais de nous tous est de maximiser à l'intérieur de ce monde les garanties que demandent ces Canadiens. C'est pourquoi il est important non seulement que nous examinions attentivement ces réserves et exemptions qui protègent l'essence de qui nous sommes et de ce que nous sommes en tant que peuple, mais également que nous fassions très clairement ressortir que la souveraineté de nos lois sur notre territoire sera garantie.

Le troisième élément est que l'investissement étranger n'est pas une rue à sens unique; il ne s'agit pas d'inviter au Canada des investissements et du R-D pour créer de l'activité économique et offrir des emplois à vos commettants et aux miens; il s'agit également d'assurer la souveraineté aux investisseurs canadiens qui investissent presque autant à l'étranger que ce que le pays reçoit en investissements directs de l'étranger. Au fur et à mesure que les Canadiens acquièrent de l'assurance quant à leur participation au monde «mondialisé», ils cherchent la souveraineté pour leurs transactions, surtout en cette époque où nous poussons de plus en plus nos petites et moyennes entreprises à investir, que ce soit dans les pays de l'APEC, en Europe ou en Amérique latine.

• 1650

Près des deux tiers des participants au voyage de l'Équipe Canada prévu pour janvier prochain seront des représentants de petites et moyennes entreprises. Nous les encourageons non seulement à faire du commerce mais également à investir dans ces économies comme symbole maximal de leur confiance dans une relation à deux sens, ce qui crée en retour des emplois ici, qu'il s'agisse de Nortel ici dans la région, de Bombardier à Montréal ou de McCain's au Nouveau-Brunswick.

Ces gens-là nous disent par ailleurs qu'ils investiront et feront du commerce tant et aussi longtemps que notre politique en matière de commerce est la bonne, c'est-à-dire qu'elle protège leurs investissements. Ils veulent également la souveraineté lorsqu'ils quittent le pays, et il nous faut leur donner ces garanties. C'est pourquoi l'AMI est selon moi davantage une garantie qu'une menace à l'égard de la souveraineté.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Monsieur Graham, vous disposez de trois minutes.

M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, nombre de nos commettants ont tenu des propos semblables à ceux de Mme Folco. J'aimerais vous féliciter d'avoir au moins soulevé cette question devant le comité suffisamment tôt pour que nous puissions intervenir dans le processus de négociation. Je pense qu'il s'agit à bien des égards d'une première pour le processus des comités. On entend souvent parler de sentiments de frustration parce qu'on nous parle de beaucoup de choses une fois qu'elles ont eu lieu plutôt qu'avant. Je pense qu'il s'agit ici d'une excellente initiative visant à nous donner la possibilité de participer.

Dans le court temps qui me reste, j'aimerais revenir sur la question de la réciprocité des exemptions. Si nous ratifions des exemptions, celles-ci seront-elles réciproques? En d'autres termes, d'autres pays peuvent-ils retourner ces exemptions contre nous, ou bien chaque pays a-t-il ses propres réserves? Voilà ma première question.

Deuxièmement, dans quelle mesure cet accord avance-t-il notre cause aux États-Unis? Les États-Unis sont la plus importante destination d'investissements directs étrangers du Canada que vous ayez évoquée. Cela va-t-il constituer un pas au-delà de l'ALENA? Dans la négative, dans quelle mesure cela est-il important pour nous? Dans l'affirmative, en quoi cela constituerait-il un pas au-delà de l'ALENA? Comment les Américains, avec leurs réserves, vont-ils réussir à nous faire l'impasse avec leurs exclusions et leurs réserves, surtout dans le domaine des achats gouvernementaux où ils rendent très difficile pour des non-Américains de faire concurrence sur leurs marchés?

Troisièmement, M. Brison a soulevé la question des expropriations. Je viens d'examiner le chapitre 4 de l'entente sur le critère d'expropriation. Cela ressemble au critère traditionnel en droit international pour l'expropriation, mais on a soulevé l'affaire Ethyl. Pouvez-vous nous assurer que cela n'accordera pas à des compagnies étrangères au Canada plus de droits que n'aurait un investisseur canadien dans le contexte d'une expropriation et que tout le monde jouera au moins sur un terrain de jeu égal? Il n'est pas question qu'un étranger venant ici jouisse d'une protection supérieure à celle qu'auraient des Canadiens, et la loi sera donc appliquée de façon égale à tout le monde. Il me semble que c'est là la position que vous avez eue jusqu'ici.

Le président: Merci, monsieur Graham.

Monsieur le ministre, très rapidement.

M. Sergio Marchi: Merci, Bill, de cette participation. Le gouvernement appréciera ces conseils.

Monsieur le président, nous avons demandé que cette contribution vienne un petit peu avant Noël car les négociations vont s'intensifier entre janvier et avril prochains. Le délai a été fixé à avril 1998. J'ignore si nous signerons avant ou après cela, mais c'est ce qui est prévu à l'OCDE. Il serait donc bon que les conseils des Canadiens nous soient communiqués par l'intermédiaire du comité afin que nous puissions finaliser le mandat final avant d'aborder l'étape janvier-avril.

Deuxièmement, au fur et à mesure que nous définissons des exemptions et les mettons sur la table, d'autres pays et gouvernements pourront faire de même. Cela fait d'ailleurs partie de la négociation. Tous les autres examineront les exemptions que vous déposez et quelques-uns feront la même chose en retour. D'autres auront des idées très différentes sur ce dont leurs pays devraient être exemptés.

En ce qui concerne les États-Unis, j'ai donné une exemption relative à la participation de leurs États à l'AMI. Encore une fois, et les États et les provinces ont participé à l'ALENA. En même temps, une longue liste d'exemptions s'appliquant et aux États et aux provinces a été déposée. Nous avons dit non à l'inclusion générale des États, advenant que le Canada signe l'AMI, et nous avons réservé le droit de déposer une réserve pour nos provinces, tout comme l'ont fait les Américains pour leurs États.

• 1655

Enfin, pour ce qui est des expropriations, vous avez raison: ce que nous demandons—et c'est là l'un des deux objectifs de notre intérêt à l'égard de l'AMI—est que pour ce qui est des expropriations il y ait traitement national. Il est clair que les compagnies étrangères n'auront pas un avantage par rapport aux compagnies nationales. Ce que nous demandons pour ces compagnies nationales et pour nos investisseurs canadiens à l'étranger c'est un traitement égal: non pas un traitement spécial, mais bien un traitement juste et égal en vertu de la loi.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

M. Penson va poser une dernière question.

M. Charlie Penson: Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, nous savons que vous êtes intervenu en tant que ministre dans ce processus à mi-parcours, mais j'ai toujours quelque difficulté avec l'idée qu'on a laissé cette négociation être mal interprétée faute de renseignements. Ayant parcouru le Hansard depuis 1992, lors du débat sur le libre-échange, et, bien sûr, le chapitre sur l'investissement qui était là à l'époque, soit le chapitre 11, que vous espérez transférer à l'OCDE, je sais que vous étiez très critique à l'égard du gouvernement du jour parce que vous aviez suivi dans les journaux ce qui se passait sur le plan des négociations.

J'aurai deux questions à vous poser. Tout d'abord, qu'allez-vous faire pour apaiser les craintes des gens, surtout en Colombie-Britannique, qu'il y aura des conséquences négatives pour le Canada?

Étant donné ce que vous avez dit en 1992, j'aimerais que vous vous engagiez à tenir le public canadien au courant des négociations qui se dérouleront à partir de maintenant. D'après ce que j'ai compris, vous allez vous rendre à l'OCDE en janvier. Si de quelconques changements sont apportés à votre position, je pense que vous devriez être tenu de les rendre publics.

M. Sergio Marchi: Charlie, il est bien sûr juste de dire que les négociations ont été entreprises en 1995. Il est également juste de dire que ce n'est que tout récemment que ces négociations se sont intensifiées. En d'autres termes, le travail préliminaire pendant la période initiale portait sans doute davantage sur les marges, le dépôt d'ébauches d'entente et l'examen de l'ALENA et d'autres modèles. Ce n'est que tout récemment que l'on a vu le débat arriver au point critique, si vous voulez, et je pense que nous avons encore beaucoup de chemin à faire avant d'en arriver à un consensus sur plusieurs des questions. C'est pourquoi je pense que la plupart des questions en suspens devront être réglées entre janvier et avril. C'est pourquoi je pense que le travail du comité va être important.

Quant à vous faire la promesse que je vais vous tenir au courant de l'évolution de l'AMI, je compte certainement vous tenir au courant et tenir également au courant les critiques du commerce. Si j'ai le sentiment qu'il y aura demi-tour dans le contexte de l'AMI et des négociations, il y aura moyen d'en informer au fur et à mesure le Parlement.

Quant à la question de fournir plus de renseignements plutôt que moins, je pense que si dans les premières étapes on avait eu plus du genre de renseignements que ceux qui ont été fournis récemment, les gens auraient été plus à l'aise et auraient mieux compris quelles étaient les questions sur la table et en même temps quelles étaient celles qui n'étaient pas sur la table.

Mais c'est du passé. Lorsque je suis arrivé, notre intention était de fournir ces renseignements et nous allons continuer sur cette voie par opposition à l'abandonner. Je vais donc faire mon maximum pour vous tenir au courant, tout en respectant, bien sûr, le caractère confidentiel des négociations avec les 28 autres pays et des consultations avec les dix provinces et deux territoires.

Le président: Merci, monsieur le ministre, d'avoir comparu aujourd'hui et d'avoir été franc et ouvert avec nous.

En ce qui concerne la réunion de demain, je me demande si M. Dymond ne pourrait pas apporter avec lui des ébauches de réserves pour les membres du comité. Nous en avons une ici qui est datée du 24 février 1997. S'il existe une liste plus à jour, vous pourriez peut-être apporter cela avec vous demain.

Collègues, nous aurons donc avec nous demain M. Dymond, le négociateur en chef, qui pourra répondre aux questions davantage techniques.

Encore une fois, monsieur le ministre, nous ferons de notre mieux, étant donné les circonstances et les délais qui ont été fixés. Nous envisageons avec plaisir de travailler avec vous sur cette question.

M. Blaikie souhaite faire un rappel au Règlement.

• 1700

M. Bill Blaikie: J'invoque le Règlement. Je pense qu'il serait utile, et j'espère que le ministre sera d'accord avec moi là-dessus, que dans le courant de nos délibérations, nous puissions, si nous jugeons cela utile, réinviter le ministre afin d'approfondir certaines questions avec lui. Il est évident qu'une conversation de dix minutes avec l'un de nous n'est pas grand-chose étant donné l'envergure de l'Accord multilatéral sur l'investissement.

J'ose donc espérer que le ministre serait d'accord pour revenir nous voir.

Le président: Monsieur Blaikie, si cela s'avère nécessaire, le comité en discutera. Nous avons parmi nous son secrétaire parlementaire, un homme de talent, qui est également membre du comité et qui, j'en suis sûr, saura nous faire passer du ministère des renseignements sur la façon dont se déroulent les négociations. Si cela s'avère nécessaire, nous demanderons certainement au ministre de revenir.

Chers collègues, nous allons nous arrêter là pour reprendre demain. La séance est levée.