CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION
COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 30 mars 2000
Le président (M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.)): Bonjour, chers collègues. Le comité reprend son examen du projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne, et nous reprenons l'examen de l'article 2.
Nous accueillons ce matin deux groupes de témoins, le premier étant le Congrès ukrainien canadien et le second, la Coalition des Synagogues concernant le droit relatif aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité, y compris ceux de l'holocauste.
Ce que notre comité voudrait faire, monsieur Czolij, monsieur Boyko et monsieur Doody, c'est vous inviter à nous présenter un exposé d'environ 10 minutes, ce qui laissera environ 20 minutes pour les questions et les réponses.
Je voudrais tout d'abord vous remercier d'être venus nous rencontrer. Comme vous le savez, le projet de loi C-63, qui a précédé le présent projet de loi, a fait l'objet d'une longue étude. Je crois que vous n'avez pas eu l'occasion de vous adresser au comité auparavant, et le comité voulait entendre ceux qui n'avaient pas déjà comparu. Je vous remercie donc d'avoir pris le temps et fait l'effort de venir nous rencontrer, et je suis impatient d'entendre votre exposé.
M. Eugene Czolij (président, Congrès ukrainien canadien): Monsieur le président, membres du comité, je m'appelle Eugene Czolij et je suis le président du Congrès ukrainien canadien. Je suis accompagné ce matin de M. Adrian Boyko, premier vice-président et président du Comité des affaires canadiennes et de M. Peter Doody, du cabinet d'avocats Borden Ladner Gervais. M. Doody nous a fourni des conseils juridiques pour notre exposé d'aujourd'hui.
Le Congrès ukrainien canadien est l'organisme national de coordination de la communauté ukrainienne canadienne. Depuis sa création en 1940, le Congrès joue un rôle actif dans l'élaboration des politiques et des programmes nationaux qui ont un impact non seulement sur les Ukrainiens canadiens, mais également sur la société canadienne en général. Grâce à cette approche proactive, nous avons pu nous assurer que la voix de notre communauté était entendue dans des domaines comme celui du multiculturalisme, de l'immigration, de la justice, des affaires constitutionnelles et des affaires étrangères.
Depuis que le gouvernement du Canada a déposé le projet de loi C-63 au cours de la dernière session de la législature, le Congrès a surveillé les progrès. Le Congrès a recueilli de l'information et des réactions concernant ce projet de loi afin de communiquer de façon efficace le point de vue de notre communauté aux députés et à votre comité.
L'une des premières préoccupations du Congrès au sujet du projet de loi C-63 concernait le paragraphe 16(4) qui aurait introduit le concept de la culpabilité par association. Le Congrès s'opposait à ce concept et se réjouit de constater que ce paragraphe ne figure pas dans le projet de loi C-16.
Une autre disposition qui nous préoccupe est l'article 17. La révocation de la citoyenneté et l'expulsion sont des mesures très graves qui ont une incidence considérable sur une personne et sa famille. Dans certains cas, la perte de la citoyenneté peut mener à une perte de liberté. Par conséquent, l'article 17 doit stipuler que la preuve est établie de façon rigoureuse lors des procédures visant à révoquer la citoyenneté. Par ailleurs, l'article 17 devrait prévoir un délai de prescription semblable à ce qui est stipulé au paragraphe 18(5) du projet de loi, particulièrement si l'établissement de la preuve de la prépondérance des probabilités relativement à une violation de la Loi sur la citoyenneté au Canada est maintenu au paragraphe 17(1). Cela assurerait par ailleurs que le gouvernement ne peut utiliser des procédures de dénaturalisation et d'expulsion contre des citoyens canadiens qui vivent au Canada depuis un grand nombre d'années, même si les employés du gouvernement ont déjà détruit les dossiers d'immigration, conformément à la politique relative à l'élimination des dossiers inutiles après une certaine période.
Par ailleurs, cet article devrait prévoir un droit d'appel pour les décisions rendues par la Section de première instance de la Cour fédérale, afin de s'assurer que les incertitudes dans cet important domaine du droit qui résultent des décisions contradictoires rendues par la Section de première instance puissent être dissipées par les tribunaux d'appel.
• 0915
Par conséquent, nous recommandons au comité d'apporter les
changements suivants à l'article 17: d'abord, biffer les mots «par
prépondérance des probabilités» à l'alinéa 17(1)b) et les remplacer
par les mots «au-delà de tout doute»; deuxièmement, modifier le
paragraphe 17(3) en prévoyant un droit d'appel d'une décision de la
Section de première instance de la Cour fédérale et, ultimement,
une autorisation de la Cour suprême du Canada; troisièmement,
ajouter un paragraphe 17(4) libellé ainsi:
-
Le ministre ne peut établir le rapport mentionné au paragraphe (1)
plus de cinq ans après l'attribution, la conservation ou la
répudiation de la citoyenneté, ou sa réintégration dans celle-ci,
selon le cas.
L'article 18 pose également un problème. Comme les membres du comité le savent, un avis d'intention de demander un décret de révocation aux termes des articles 16 et 17 contre un individu qui est soupçonné d'avoir obtenu la citoyenneté «par fraude ou au moyen d'une fausse déclaration ou de la dissimulation intentionnelle de faits essentiels» accorde à l'accusé le droit d'être entendu devant la Section de première instance de la Cour fédérale.
Un arrêté d'annulation en vertu de l'article 18 contre une personne qui est soupçonnée d'avoir obtenu la citoyenneté «au moyen de l'utilisation d'une fausse identité ou en violation de l'article 28» devrait également donner à l'accusé le droit à une audience impartiale devant la Section de première instance de la Cour fédérale. En effet, un citoyen naturalisé canadien qui vit au Canada depuis presque cinq ans ne devrait pas être obligé de présenter des observations au ministre qui est déjà convaincu que la personne a obtenu la citoyenneté en contravention de la Loi sur la citoyenneté au Canada, afin d'expliquer pourquoi sa citoyenneté ne devrait pas être révoquée après tout. Par ailleurs, et ce qui est très important, la loi ne devrait pas obliger le ministre à être juge et partie dans une même affaire.
Nous avons remarqué que contrairement au projet de loi C-63, le paragraphe 18(4) du projet de loi C-16 accorde à une personne le droit de demander le contrôle judiciaire de l'ordonnance du ministre tel que prévu dans la Loi sur la Cour fédérale. Nous recommandons plutôt que l'article 18 prévoie un renvoi par le ministre à la Section de première instance de la Cour fédérale, tel que stipulé à l'article 17(1).
Par ailleurs, l'article 18 devrait prévoir un droit d'appel à la Cour fédérale, et avec autorisation de la Cour suprême du Canada. L'article devrait par ailleurs stipuler qu'une norme élevée de preuve s'applique lors des procédures d'annulation de la citoyenneté, à savoir une preuve au-delà d'un doute raisonnable.
Monsieur le président, le Congrès voudrait par ailleurs vous proposer des amendements aux paragraphes 22(3) et 27(3) afin de s'assurer qu'un résident permanent canadien qui vit au Canada depuis au moins 1095 jours ait le droit de soumettre à l'examen de nos tribunaux, y compris les cours d'appel, un décret ou une déclaration du gouverneur en conseil interdisant à cette personne d'obtenir la citoyenneté.
Enfin, monsieur le président, nous sommes heureux de constater que le projet de loi C-16 ne contient pas l'exigence que l'on retrouvait à l'alinéa 6(1)d) du projet de loi C-63 selon laquelle le demandeur devait communiquer qu'il ou elle
-
a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et
avantages conférés par la citoyenneté [...] dans l'une des langues
officielles du Canada, sans l'aide d'un interprète.
La citoyenneté est l'un des principes fondamentaux de toute nation. Tout au cours de son histoire, le Canada a ouvert ses portes aux gens du monde entier qui cherchent une société libre et tolérante qui se fonde sur des principes démocratiques. Par conséquent, le Canada est fier d'être le meilleur pays au monde où vivre, travailler et élever une famille. Nous devons par conséquent nous assurer que la loi traitant de la citoyenneté, particulièrement les dispositions législatives proposées par le gouvernement concernant la révocation ou l'annulation de ce droit et de cette responsabilité, reflète également les principes qui sont au coeur de notre régime démocratique.
• 0920
Les propositions que nous vous avons présentées aujourd'hui
tentent de renforcer le projet de loi, d'améliorer la valeur de la
citoyenneté canadienne et de faire en sorte que les valeurs qui
sont au coeur de notre système juridique soient utilisées pour
garantir la justice et l'équité à l'égard de tous les Canadiens.
Je vous remercie de votre attention. Nous sommes impatients de répondre à vos questions.
Le président: Merci, Eugene, pour votre exposé et pour vos recommandations. Je sais que vous ne nous avez pas remis un exemplaire de votre texte. Je me demandais, si vous l'avez lu, si vous seriez prêt à le déposer auprès de notre comité, car je pense que nous voudrons peut-être nous y reporter la semaine prochaine lorsque nous ferons l'étude article par article. Si vous pouvez nous le remettre, nous le ferons photocopier et nous le ferons traduire. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, nous vous en saurions gré.
M. Eugene Czolij: Absolument, je le déposerai.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer aux questions. Nous n'avons que 20 ou 25 minutes à leur consacrer. Nous pourrions peut-être nous organiser de façon à ce que le Parti réformiste puisse choisir une série de questions, les libéraux une autre, et David et Bernard feraient la même chose.
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): En fait, je n'ai pas de questions, mais j'aimerais certainement avoir le texte de l'exposé qui a été présenté pour y jeter un coup d'oeil.
Le président: Très bien. Passons maintenant à Leon.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Bienvenue, messieurs. Je suis très heureux que vous soyez ici, naturellement. Dans ma région du pays, dans le centre de l'Alberta, il y a beaucoup de Canadiens d'origine ukrainienne, et le Congrès ukrainien-canadien est une organisation importante là-bas. Je vous remercie d'être venus nous présenter un exposé.
Il me semble que dans une large mesure, ce que vous nous avez dit aujourd'hui, c'est que vous aimeriez un niveau plus élevé de preuve. Plutôt que de fonder la preuve sur la prépondérance des probabilités, vous voulez un niveau plus élevé de preuve de la part du ministre. Vous voulez davantage d'accès au processus d'appel, et vous voulez que le ministre ne soit pas juge et partie dans une même affaire. C'est un résumé rapide.
Je voudrais que vous me disiez quelle conséquence cela pourrait avoir pour notre système judiciaire. Est-ce que cela pourrait à votre avis engorger le système davantage? Par exemple, ma première question serait la suivante: les propositions que vous nous avez présentées ici aujourd'hui représentent environ combien d'affaires. Est-ce une douzaine, des douzaines, une centaine ou des milliers?
M. Peter K. Doody (conseiller juridique, Congrès ukrainien canadien): Je peux peut-être répondre à cette question. Je me suis occupé de deux affaires de révocation de la citoyenneté à titre d'avocat. Je n'ai pas de statistiques précises, mais je crois qu'environ une douzaine d'affaires ont été présentées au cours des quatre dernières années, et elles portent toutes sur des activités remontent à la Seconde Guerre mondiale. En fait, je pense que dans huit de ces douze affaires, il s'agit de personnes nées en Ukraine.
Pour ce qui est d'engorger les tribunaux, il y a un problème important à l'heure actuelle, en ce sens que sans un appel, les parties qui luttent contre cette tentative de les priver de leur citoyenneté ne connaissent pas la loi d'un point de vue très fondamental, c'est-à-dire si le Canada a ou non le pouvoir même de questionner les Européens qui ont immigré après la guerre au sujet de leurs activités pendant la guerre, et de les exclure du Canada pour cette raison.
Deux juges de la Cour fédérale ont dit que la loi n'autorisait pas cela. Un juge a dit que la loi l'autorisait. Si la personne qui est allée devant le juge qui a dit que la loi l'autorisait était allée devant l'un des deux autres juges, sa citoyenneté n'aurait pas été révoquée. C'était effectivement une loterie judiciaire selon le juge devant lequel elle se retrouvait. Je pense que c'est un problème important. Si on veut que la primauté du droit s'applique, on ne peut pas avoir une différente interprétation de la loi selon le juge qui entend la cause.
• 0925
Pour ce qui est du temps qu'il faudra pour entendre les
appels, je pense que cela permettra en fait de gagner du temps. Je
représente actuellement un homme à qui le gouvernement tente
d'enlever la citoyenneté et si les deux juges qui avaient dit que
la loi ne permettait pas d'exclure les gens du Canada en raison de
ce qu'ils ont fait pendant la guerre ont raison, cette affaire
n'aurait pas lieu, car il tombe pendant cette période. Si cette
affaire va devant la Cour fédérale, elle occupera un juge pendant
environ deux mois. Il faudra qu'il se rende en Ukraine pour
entendre des témoignages et je dirais que cela coûtera environ 2
millions de dollars en frais pour le gouvernement et le citoyen.
S'il y avait un appel et que la décision des deux juges qui ont dit que la loi n'autorisait pas une telle chose était maintenue, cette affaire ne serait pas là. Il n'y a donc pas beaucoup d'affaires et les appels peuvent en fait gagner du temps.
M. Leon Benoit: Je pense qu'il ne faut pas nécessairement laisser cette idée de côté tout simplement parce que cela risque d'occuper les tribunaux.
À votre avis, est-il possible que le projet de loi à l'étude ou ces articles soient contestés sous prétexte qu'ils vont à l'encontre de la Charte des droits ou de l'arrêt Singh ou autre? Croyez-vous possible qu'une contestation du projet de loi à l'étude devant les tribunaux puisse avoir du succès?
M. Peter Doody: Je n'ai pas réfléchi à la question en détail.
Je disais hier soir à ces messieurs que je pense qu'il pourrait y avoir un problème, car les citoyens canadiens ont des droits en vertu de la Charte, et si on peut leur enlever la citoyenneté, alors on peut leur enlever leurs droits.
M. Leon Benoit: Eh bien, la façon dont l'arrêt Singh est interprété—je ne dis pas que c'est ce que dit l'arrêt—on dit que même les gens qui ne sont pas des citoyens ou qui ne sont même pas au Canada ont droit à la pleine protection de la Charte.
M. Peter Doody: C'est exact, et ils ont droit à un procès équitable.
M. Leon Benoit: Oui.
M. Peter Doody: Ce sont des questions qui doivent être examinées.
M. Leon Benoit: C'est en fait une bonne question que je devrais poser aux fonctionnaires du ministère lorsqu'ils seront ici la semaine prochaine pour l'étude article par article.
M. Adrian Boyko (premier vice-président et président, Comité des affaires canadiennes, Congrès ukrainien canadien): Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose, ce que nous avons ici, c'est trois niveaux de citoyenneté. Le premier, c'est lorsqu'on naît au Canada, et ces droits sont alors incontestables. Le Canada est cependant un pays d'immigrants. Le pays a été construit avec l'immigration. De la façon que nous interprétons le projet de loi, si la loi va dans ce sens, dans une quarantaine d'années une personne pourrait être expulsée pour des activités politiques que nous ne considérons pas aujourd'hui comme posant un gros problème. Dans 40 ans, cependant, un gouvernement futur pourrait décider qu'il a un problème avec ce qui se passe dans une région du monde, et rien n'empêchera le gouvernement du Canada de revenir et de dépouiller cette personne de sa citoyenneté.
M. Leon Benoit: C'est ce que je disais. Lorsqu'on regarde ce qui s'est passé dans les Balkans, il est tout à fait possible que parmi les réfugiés qui ont été acceptés, il puisse y avoir des membres qui ont appuyé l'Armée de libération du Kosovo. Et naturellement, aussi longtemps que ce groupe est considéré comme étant du même côté que le Canada, on les voit d'une façon. Dès que cela change, le point de vue pourrait être tout à fait différent. C'est un exemple pratique de la façon dont les choses peuvent changer.
M. Adrian Boyko: Par conséquent, ce que nous recommandons, c'est qu'il y ait une sorte de prescription, car les procédures administratives détruisent les dossiers qui pourraient être pertinents à la capacité d'une personne de rester au Canada. Donc, à un certain moment donné, si on détruit les dossiers et que plus tard le gouvernement entame des poursuites, sur quoi pourrons-nous nous appuyer si ce n'est que de dire: «Il a dit, elle a dit»?
Nous vous recommandons donc vivement d'imposer une sorte de limite afin qu'il y ait une norme de citoyenneté. Le gouvernement pourrait faire enquête sur ces personnes avec tout le poids qu'il a, mais une fois qu'on est citoyen canadien, on le reste.
M. Leon Benoit: Juste une petite question et nous pouvons ensuite continuer. Vous ne dites pas, cependant, juste pour être parfaitement clair, que le ministre ne pourrait pas dans certains cas révoquer la citoyenneté en suivant un processus en bonne et due forme.
M. Adrian Boyko: Pas du tout. Nous croyons qu'il devrait pouvoir le faire, car nous voulons protéger notre système judiciaire au Canada, nous voulons protéger notre citoyenneté et nous voulons protéger le fait que nous sommes un pays multiculturel. Cependant, à un moment donné, tous ceux qui contribuent à notre société doivent être considérés comme des Canadiens s'ils ont demandé ce statut.
M. Peter Doody: J'ajouterais que la période de prescription englobe en fait l'autre question de la prépondérance des probabilités, et à titre d'exemple, je vous renverrai à l'affaire Oberlander. Je n'étais pas son avocat et donc...
M. Oberlander, dont la décision dans cette affaire a été publiée il y a environ trois semaines, est venu au Canada au début des années 1950. Lorsque son procès a eu lieu en 1998, tous les fonctionnaires du gouvernement canadien qui l'avaient interviewé en Europe étaient morts. C'était justement l'élément essentiel: que lui avait-on demandé en Europe? Qu'avait-il répondu? Le gouvernement canadien avait détruit tous les dossiers pertinents.
On s'est retrouvé avec deux témoins vivants qui pouvaient dire ce qu'on lui avait demandé: son épouse et lui-même. Son épouse a témoigné, mais le juge a statué que parce qu'elle n'était pas un témoin indépendant, puisqu'elle était son épouse, il n'allait pas accorder de poids à son témoignage. Il n'a donc tenu compte que de témoignage du M. Oberlander parce que celui-ci avait donné quelques versions contradictoires des événements qui s'étaient déroulés au cours des 55 dernières années, dont une réponse aux agents de la GRC qui étaient entrés chez lui sans préavis pour lui demander ce qu'il faisait il y a 45 ans. Le juge a déclaré ne pas pouvoir accepter le témoignage de M. Oberlander.
Comme la prépondérance des probabilités n'est en fait que ce qui est le plus probable—on soupèse les témoignages et on décide que l'un est plus probable que l'autre—le juge a déclaré que, conformément à la politique, tous les intéressés avaient été interrogés et puisqu'il ne pouvait accorder aucun poids au témoignage de M. Oberlander, il est plus que possible que celui-ci a été interrogé. Par conséquent, à l'âge de 75 ans, ou que sais-je, il risque de perdre sa citoyenneté et par être finalement renvoyé en Ukraine.
La difficulté, lorsque l'on remonte aussi loin en arrière, c'est que ce n'est plus juste. On ne peut plus déterminer raisonnablement ce qui s'est vraiment passé. On tente de décider ce qui s'est vraiment passé il y a 55 ans après la guerre la plus meurtrière qu'on ait jamais vue, à une époque à laquelle nous n'avons pas vécue, lors d'événements que nous n'avons pas vécus, tandis que les seuls documents à l'appui ont été détruits.
D'après nous, à un certain moment, il est trop tard.
M. Leon Benoit: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Steve.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): J'aimerais une précision sur le premier amendement que vous proposez. Que voulez-vous mettre à la place de «la prépondérance des probabilités»?
M. Eugene Czolij: Nous voulons ajouter le critère «au-delà d'un doute raisonnable».
M. Steve Mahoney: Très bien.
Si j'ai bien compris votre témoignage, vous semblez vous inquiéter de ce que la décision soit fondée sur des critères politiques et non sur des critères juridiques. Est-ce bien cela?
M. Eugene Czolij: Comme l'a dit plus tôt M. Boyko, nous ne contestons pas le droit du ministre de prendre ou même de mettre à exécution un décret de révocation de la citoyenneté. Toutefois, à notre avis, un citoyen canadien ne devrait pas perdre ou voir annuler sa citoyenneté sans avoir la possibilité de se présenter devant la cour pour contester un tel décret, y compris la Cour d'appel et même la Cour suprême du Canada.
M. Steve Mahoney: Très bien, si je pose la question, c'est que l'article 28 du projet de loi énumère les conditions juridiques précises qui empêchent une personne de conserver la citoyenneté canadienne. Par exemple, si au moment où vous avez prêté le serment de citoyenneté, vous étiez en libération conditionnelle après avoir été reconnu coupable d'un acte criminel, si vous faisiez l'objet d'une enquête de la GRC ou du SCRS... la liste est longue.
Aucune de ces interdictions, d'après mon interprétation, n'est ce qu'on pourrait appeler subjective en ce sens qu'elle laisse le moindre doute. On fait l'objet ou non d'une enquête par la GRC ou par le SCRS, ou au moment de devenir citoyen, la personne a adopté une fausse identité ou n'a pas divulgué le fait qu'elle était en libération conditionnelle ou faisait l'objet de toute autre procédure juridique.
• 0935
Je considère la chose sous un angle différent. Je n'essaie pas
de juger d'avance mais il me semble que ce genre de situation est
beaucoup plus claire que ce que mentionnait M. Boyko, à savoir
qu'une décision politique dans 55 ans pourrait porter sur ce que
vous faisiez le 12 octobre 2000. Qui s'en souvient? J'ai du mal à
me souvenir de ce que j'ai fait l'autre jour.
Au sujet de votre demande relativement à ces interdictions d'ordre juridique, tout d'abord, reconnaissez-vous que c'est beaucoup plus clair, ou considérez-vous que c'est la même chose que les questions politiques qui vous préoccupent? Si ce genre de questions existent, nous permettons alors à quelqu'un de se prévaloir de la procédure d'appel que les Canadiens critiquent constamment, la qualifiant de trop libérale. Ce n'est pas mon avis, mais c'est ce que nous entendons dire.
Comment empêcher les gens d'être peut-être jugés indûment pour des motifs politiques? Je n'entrevois rien de tel dans la société d'aujourd'hui, mais qui sait quelles seront les attitudes de la société dans 40 ou 50 ans? Qu'est-ce qui fait contrepoids au fait que le ministre a le droit de dire simplement à quelqu'un: «Écoutez, vous étiez accusé d'un acte criminel. Vous faisiez l'objet d'une enquête par le SCRS. Vous ne l'avez pas divulgué lorsque vous avez prêté serment. Je révoque votre citoyenneté et il n'y a pas de droit d'appel, car voilà les faits».
Pouvez-vous me dire s'il doit y avoir ou non un contrepoids?
M. Adrian Boyko: Je suis fermement convaincu qu'il doit y en avoir, et certains existent, comme à l'alinéa 28f): «tant qu'il fait l'objet d'une enquête menée par le ministre de la Justice» comme vous l'avez mentionné, ou par la GRC. Mais quand, à quel moment?
M. Steve Mahoney: Au moment où la personne a prêté le serment de citoyenneté, elle n'a pas divulgué le fait qu'elle faisait l'objet d'une enquête. C'est mon interprétation. Si vous n'êtes pas d'accord, dites-le-moi.
M. Peter Doody: Je ne le pense pas. D'après mon interprétation, il me semble que si quelqu'un devient citoyen, et que quatre ans et demi plus tard, un agent de la GRC décide de lui poser des questions sur des gestes criminels qu'il aurait ou non posés au cours de la Seconde Guerre mondiale, justement l'alinéa 28f), alors le ministre peut, de sa propre initiative, révoquer la citoyenneté de cette personne, sans appel.
M. Steve Mahoney: Je ne veux pas vous contredire, mais je veux m'assurer que nous parlons de la même chose. L'article 28 stipule:
-
[...] nul ne peut se voir attribuer la citoyenneté ni prêter le
serment de citoyenneté:
-
a) [...]
On dit si vous êtes sous le coup d'une ordonnance de probation ou de libération conditionnelle au moment où vous prêtez le serment... Si ce n'est pas clair, il faut peut-être rendre cette disposition plus claire.
Il n'est pas question de devenir citoyen et ensuite, quatre ans plus tard, si vous commettez un acte criminel, de vous punir en révoquant votre citoyenneté. Ce n'est certainement pas l'intention de ce projet de loi ni l'intention de ce gouvernement.
M. Peter Doody: Je ne pense pas que ce soit clair.
M. Steve Mahoney: Vous ne pensez pas que c'est clair?
M. Peter Doody: C'était peut-être l'intention du rédacteur, mais je ne pense pas que ce soit clair.
M. Steve Mahoney: Donc, si nous apportions des précisions à l'article 28 pour dire clairement que la révocation découle du fait que l'on n'a pas dévoilé cette information telle que présentée à l'article 28 ou que l'information était mensongère, le ministre devrait avoir et aurait le droit de révoquer la citoyenneté. Dans ce cas, encore une fois, il ne s'agit pas d'une opinion subjective à savoir si c'était le cas lorsque le serment a été prêté. Il s'agit d'un fait. Voudrait-on toujours à ce moment-là prévoir un long mécanisme d'appel alors que quelqu'un a clairement commis une fraude?
M. Adrian Boyko: L'important c'est qu'il y ait une preuve qu'il y a eu fraude. Si, par exemple, il s'agit d'un criminel de droit commun, d'un voleur de banque, filmé sur bande magnétoscopique, il y a la procédure judiciaire et il peut se prévaloir d'un mécanisme d'appel. Pourtant, la personne qui se trouve au Canada depuis de nombreuses années, y a payé des impôts, que ce soit 8 ou 11 ans—cette personne a payé des impôts depuis qu'elle a obtenu la citoyenneté—et maintenant, parce qu'elle «fait l'objet d'une enquête,» selon l'alinéa 28f), le ministre peut révoquer sa citoyenneté.
M. Steve Mahoney: Je ne vois pas très bien ce que payer des impôts a à voir. C'est la responsabilité de tous ceux qui vivent ici, qu'ils soient citoyens ou non.
M. Adrian Boyko: Non, je le comprends, je ne voulais pas ergoter. La question est la suivante. Vous avez un criminel né au Canada qui est peut-être arrêté ou qui fait l'objet d'une enquête par la GRC et qui est en mesure d'aller jusqu'à la Cour suprême—un voleur à l'étalage ou que sais-je. Pourtant ces dispositions, sans prévoir de mécanisme qui fasse la preuve de la fraude du suspect, vous permettent tout simplement d'annuler sa citoyenneté.
M. Steve Mahoney: Auriez-vous des préoccupations en ce qui concerne l'alinéa 28d) lorsqu'une personne a obtenu sa citoyenneté il y a dix ans et qu'on apprend qu'elle avait été reconnue coupable comme criminel de guerre? Elle a été reconnue coupable. Ce n'est pas une question de preuve ou de doute raisonnable ou de prépondérance des probabilités. C'est un fait. Elle a été reconnue coupable. Est-ce que vous auriez des objections à ce que le ministre puisse tout simplement révoquer la citoyenneté de cette personne sans prévoir de long processus d'appel?
M. Adrian Boyko: Je ne suis pas avocat, mais comme personne...
M. Steve Mahoney: Moi non plus.
M. Adrian Boyko: Je ne pense pas avoir de problème dans ce cas.
M. Peter Doody: Je comprends ce que vous voulez dire. La difficulté vient du fait qu'il y a un mélange, à l'article 18, du genre de choses dont vous parlez. Lorsqu'une personne a été reconnue coupable d'une infraction précise, vous ne pouvez le contester. Mais si vous regardez l'article 18, vous constaterez que l'on peut perdre sa citoyenneté si le ministre est convaincu que l'attribution, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté s'est effectuée au moyen de l'utilisation d'une fausse identité.
Il y a une disposition semblable dans le Code criminel. Si vous achetez des piles chez Canadian Tire en utilisant une fausse identité et que vous êtes accusé de ce crime, vous avez droit à un procès, vous avez droit à des recours pour vous défendre de l'accusation d'avoir utilisé une fausse identité. J'ai défendu certaines de ces affaires. Il y a de nombreuses façons de considérer ces questions et il y a des arguments des deux côtés.
Je pense que c'est un peu différent de...
M. Steve Mahoney: Vous craignez donc que les pouvoirs du ministre puissent être subjectifs et puissent...
M. Peter Doody: Certains pouvoirs.
M. Steve Mahoney: ... relever du ministre en place alors que l'article 28, vous en convenez, est un peu plus clair.
M. Eugene Czolij: Pas dans le cas de l'alinéa 28i) par exemple: «s'il a perdu la qualité de résident permanent»—c'est subjectif.
M. Steve Mahoney: Je n'ai aucune difficulté personnellement à modifier: «la prépondérance des probabilités» pour dire «hors de tout doute raisonnable». Ce que je tente d'éviter c'est de favoriser quelqu'un qui est en fait un criminel condamné, quelqu'un qui a menti pour obtenir sa citoyenneté, je veux que l'affaire soit claire.
Comme je l'ai dit précédemment, on entend constamment des plaintes selon lesquelles le processus d'appel est trop libéral au Canada, qu'il permet aux gens de remettre l'inévitable pendant des années et des années en utilisant le système—et très respectueusement—avec l'aide des avocats qui touchent, comme vous l'avez laissé entendre, 2 millions de dollars.
M. Peter Doody: J'allais dire que, bien sûr, ce sont des avocats du gouvernement.
Des voix: Oh, oh!
M. Steve Mahoney: Cela fait une bonne journée de travail.
Je tiens donc à m'assurer qu'il y a un certain équilibre dans la loi et que nous n'allons pas permettre à des personnes trouvées coupables de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, que ce soit récemment au Kosovo, par exemple, de venir au Canada et d'obtenir leur citoyenneté par des mensonges et de rester ici pendant dix ans en attendant que les avocats aient terminé leur bataille juridique.
M. Peter Doody: Je sais que vous plaisantiez, mais...
M. Steve Mahoney: Je vous taquinais.
M. Peter Doody: C'est bien. Vous avez raison, il s'agit de trouver un certain équilibre. On ne veut pas exagérer dans un sens ou dans l'autre. Je peux vous dire que je représente maintenant un homme de 89 ans qui est au Canada depuis 55 ans et que le gouvernement essaie de lui enlever sa citoyenneté. La seule façon pour lui de lutter contre cette décision, c'est de se ruiner, de ruiner ses quatre enfants et de ruiner aussi ses petits-enfants, ce qui est injuste.
M. Steve Mahoney: Je ne vous demanderai pas de divulguer les détails de votre affaire, mais si, par exemple, cet homme avait reçu un certificat de condamnation de crime de guerre, tant pis pour lui s'il est ici depuis 55 ans ou non, son cas est réglé.
M. Peter Doody: Je suis d'accord.
Le président: Merci de votre exposé, messieurs. Vu la nature du débat et les questions qui ont été posées, certaines de vos suggestions nous donnent certes matière à réflexion. Nous espérons que nous en tiendrons compte au moment de l'étude article par article. Merci beaucoup d'être venus nous présenter vos arguments intéressants et d'avoir pris le temps de nous donner votre avis. Veuillez transmettre nos meilleurs voeux aux Canadiens d'origine ukrainienne. Comme l'a dit Leon, le peuple ukrainien a fait une contribution énorme et merveilleuse au Canada. Veuillez donc transmettre nos meilleurs voeux à votre association et à vos membres. Merci beaucoup.
Nous pourrions peut-être maintenant passer à nos deuxièmes témoins, la Coalition des Synagogues concernant le droit relatif aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité, y compris ceux de l'holocauste.
Je voudrais présenter aux membres du comité M. Kenneth, M. Narvey, chercheur juridique et dirigeant responsable des opérations de la Coalition.
Comme le comité est toujours prêt à permettre aux gens qui le veulent de s'exprimer devant nous, je signale que M. Narvey a en fait présenté un mémoire au comité hier et que je lui ai demandé s'il voulait revenir présenter un mémoire officiel. Il nous en est très reconnaissant et nous sommes donc prêts à l'entendre.
Monsieur Narvey, je voudrais que vous fassiez un exposé d'au moins dix minutes, après quoi nous prendrons une vingtaine de minutes pour les questions et réponses. Nous n'avons pas tellement de temps à cause de certaines questions administratives dont nous devrons nous occuper après vous avoir entendu.
Merci beaucoup d'être venu rencontrer le comité.
M. Kenneth M. Narvey (chercheur juridique et dirigeant responsable des opérations, Coalition des Synagogues concernant le droit relatif aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité y compris ceux de l'holocauste): Merci de m'avoir permis de témoigner. J'installe ma montre pour pouvoir m'en tenir aux dix minutes que vous m'accordez.
Le président: Je vais prendre note du temps. Cela fait partie de mon travail, même si je ne reçois pas plus d'argent pour cela.
M. Steve Mahoney: Au cas où vous ne le sauriez pas, vous êtes assis sur une trappe.
Le président: C'est exact.
M. Kenneth Narvey: Cette gentille dame est en train de vous distribuer des exemplaires de ma lettre à Mme Sirpaul, que j'ai aussi fait distribuer hier.
Comme le président l'a dit, je m'appelle Kenneth Narvey et je suis chercheur juridique et dirigeant responsable des opérations d'une coalition de six synagogues de la région de Montréal dont le titre au long est la Coalition des Synagogues concernant le droit relatif aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité, y compris ceux de l'holocauste. Le nom abrégé du groupe est la Coalition des Synagogues et le nom encore plus bref est la Coalition.
[Français]
Je suis chercheur juridique et dirigeant responsable des opérations pour la Coalition des synagogues concernant le droit relatif aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité y compris ceux de l'holocauste. On traduit actuellement la lettre que je vous adressais avant-hier. Je serai très heureux de répondre à vos questions dans la langue officielle que vous utiliserez.
[Traduction]
À l'origine, c'est-à-dire en mai 1994, la Coalition regroupait cinq synagogues de la région de Montréal et elle en regroupe maintenant six. Nous avons suivi de près toutes les affaires dont M. Doody a parlé et nous avons trois recommandations précises à formuler au sujet de changements qui pourraient améliorer le projet de loi à notre avis. D'ailleurs, je dois dire que nous avons maintenant une quatrième suggestion à vous faire. Ce matin, M. Sabourin, greffier de la Citoyenneté canadienne, m'a signalé une chose qu'il faudra faire pour donner suite à nos recommandations. Je vous donnerai un texte précis des changements que nous proposons en anglais et en français à temps pour votre étude article par article.
Le président: Nous rendrions donc service à M. Sabourin. Nous verrons bien si c'est vrai.
M. Kenneth Narvey: Jusqu'ici, c'est nous qui vous avons rendu service. Si vous avez des objections quelconques à ce que je vais vous dire, n'hésitez pas à m'en parler pendant la période de questions parce que...
Le président: Nous le ferons certainement.
M. Kenneth Narvey: Merci.
La première chose que je voudrais vous signaler, et je vais maintenant changer de lunettes pour pouvoir lire le projet de loi, vu qu'il est imprimé en caractères plutôt petits...
Le président: Si vous pensez que nous devrions imprimer nos publications en caractères plus gros, je suis certain que nous pourrions obtenir le consentement unanime pour le faire.
M. Kenneth Narvey: Tout le monde serait d'accord.
Le président: Et si nous pouvions obtenir que Bell Canada fasse la même chose pour ses bottins et qu'on fasse aussi quelque chose au sujet des journaux, ce serait merveilleux.
M. Kenneth Narvey: C'est bien que nous soyons d'accord. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
Le président: Tant mieux.
M. Kenneth Narvey: À la page 7 du projet de loi, au paragraphe 16(1), la version anglaise stipule que la citoyenneté peut être révoquée si on l'a obtenue par fraude ou par fausse déclaration ou par dissimulation intentionnelle de faits essentiels.
Le mot «intentionnelle» n'avait pas été inclus dans le projet de loi C-63. Il a été remis dans cette mesure-ci et nous sommes tout à fait d'accord là-dessus. Cependant, il y a deux endroits où le mot «knowingly» devrait figurer dans la version anglaise du paragraphe 16(3), mais il n'y est qu'une fois. On a simplement laissé tomber un mot. Il n'y a pas de problème dans la version française.
Voici ce qu'on dit dans la version anglaise:
-
For the purposes of this section, a person is deemed to have
obtained or resumed citizenship by false representation or fraud or
by concealing material circumstances [...]
Le texte devrait dire «knowingly concealing material circumstances». Cela figure à la ligne 19 de la page 7.
-
[...] if the person was admitted to Canada for permanent residence
by false representation or fraud or by knowingly concealing [...]
On voulait mettre le mot «knowingly» deux fois, mais on l'a mis seulement une fois par erreur. Notre première recommandation serait de réinsérer le mot «knowingly».
Le président: Nous demanderons aux avocats la semaine prochaine si on l'a fait intentionnellement ou non. Merci de nous l'avoir signalé.
M. Kenneth Narvey: Il est peu probable qu'on l'ait fait intentionnellement. J'ai hâte de voir si je me trompe.
Le président: On ne sait jamais avec les avocats. C'est pour cela que nous sommes ici.
M. Kenneth Narvey: Un peu plus loin sur la même page, à la ligne 26, l'article 17 commence et il est très semblable à l'article 18 de l'actuelle Loi sur la citoyenneté. Cet article stipule que le ministre peut aviser une personne de l'intention du gouvernement de lui enlever sa citoyenneté et que l'intéressé a trente jours pour en saisir la Cour fédérale. Si l'intéressé en saisit la Section de première instance de la Cour fédérale, le ministre ne peut pas formuler la recommandation au gouverneur en conseil à moins que la Section de première instance de la Cour fédérale n'ait constaté que l'intéressé a effectivement obtenu sa citoyenneté par fraude, et le reste.
Le paragraphe 17(3), à la page suivante, qui commence à la ligne 6, stipule qu'une telle décision
-
[...] de la Section de première instance est définitive et, par
dérogation à toute autre loi fédérale, non susceptible d'appel.
D'autres vous ont signalé qu'ils n'étaient pas d'accord avec cette disposition ce matin. Je peux me faire le porte-parole d'une bonne partie de la communauté juive de Montréal pour vous dire que nous ne sommes pas d'accord non plus. On a comparé cela à quelqu'un qui volerait chez Canadian Tire.
Je vais vous donner un exemple qui a été utilisé à la cour. Le juge Noël a comparé la révocation de la citoyenneté à la révocation d'une police d'assurance. Si j'obtiens une police d'assurance par fraude en ne signalant pas que j'ai un problème cardiaque, ma police peut être révoquée. Cependant, si elle est révoquée après une décision du tribunal, j'ai le droit d'en appeler. Si la compagnie d'assurance perd sa cause, elle peut aussi en appeler.
Il n'y a pas quelque chose de magique au sujet de la citoyenneté qui fait qu'un juge de première instance devient infaillible. On a déjà signalé, je pense, et je vais le répéter maintenant que, dans deux cas, l'affaire Dueck et l'affaire Kisluk, deux très bons juges en sont venus à des conclusions diamétralement opposées quant à la question de savoir si, selon la loi, on pouvait faire des vérifications de sécurité avant juin 1950.
Nous ne disons pas, comme l'a fait le Congrès ukrainien canadien, que l'on devrait avoir le droit d'en appeler à la Cour d'appel fédérale. Nous croyons qu'on devrait cependant avoir le droit de demander l'autorisation d'en appeler à la Cour fédérale d'appel. Si elle constate que vos arguments ne sont pas fondés, elle refusera son autorisation. Si elle constate que vos arguments sont fondés, elle autorisera l'appel et l'on pourra automatiquement demander d'interjeter appel à la Cour suprême du Canada.
• 0955
Nous ne demandons pas des appels interminables. Nous demandons
le droit d'obtenir l'autorisation d'interjeter appel. Cela
s'appliquerait tant au ministre s'il perd sa cause qu'à l'intéressé
lui-même.
Ce n'est pas dans ma lettre, mais je devrais vous signaler que la Cour suprême du Canada a déjà décrété que, si la partie perdante lors d'un litige n'interjette pas appel alors qu'elle pourrait le faire, un tiers peut demander l'autorisation au tribunal d'interjeter appel à la place du perdant, même s'il n'obtient pas toujours cette autorisation.
Cette disposition ne devrait pas s'appliquer uniquement aux affaires futures. Il y a des cas qui viennent d'être jugés, trois où le gouvernement a perdu et trois où l'intéressé a perdu. Dans le nouveau texte que nous proposons, nous disons que l'intéressé et le ministre devraient avoir la possibilité de demander l'autorisation d'en appeler à la Cour fédérale. Je propose un nouveau libellé en anglais et en français à la page 3 de mon mémoire. Le nouveau paragraphe 17(3) stipulerait:
-
(3) La décision de la Section de première instance visée au
paragraphe (1) et toute décision analogue sous l'empire de la
législation antérieure peuvent être portées en appel devant la Cour
d'appel fédérale si cette Cour en donne l'autorisation.
M. Sabourin m'a aussi signalé qu'il faudrait modifier en conséquence non seulement le paragraphe 17(3), mais aussi le paragraphe 17(1). Au lieu de dire que la Cour fédérale doit avoir donné son accord, on devrait donc dire que la Cour fédérale doit avoir donné son accord et que les possibilités d'appel ont été épuisées. Je vous transmettrai un nouveau texte la semaine prochaine.
Le troisième changement que nous voudrions apporter, et je voudrais à cet égard rendre hommage à votre attachée de recherche de la Bibliothèque du Parlement, parce que je ne me serais pas rendu compte du problème si elle ne l'avait pas mentionné dans son résumé, intervient aux pages 21 et 22 du projet de loi. À la page 21, sous la rubrique Règlements, à l'article 43, on prévoit que «Le gouverneur en conseil peut, par règlement...». À la page suivante, à l'alinéa 43g), ligne 28, on peut lire «fixer la procédure à suivre par la Section de première instance de la Cour fédérale pour l'application de l'article 17».
À cet égard, il est utile de savoir quelle est la procédure à l'heure actuelle. Toutes les règles de la Cour fédérale, sauf lorsque d'autres lois le prévoient autrement, sont établies par le comité des règles de la Cour fédérale avec l'approbation du gouverneur en conseil. Ce comité se compose de neuf juges, de la procureure générale elle-même ou de son représentant, et de cinq avocats choisis pour représenter les régions géographiques et les divers sujets. Cet organisme établit la procédure sous réserve de l'approbation du gouverneur en conseil. Selon cette disposition, la procédure serait établie par le gouverneur en conseil seul et nous ne pensons pas que ce soit souhaitable.
En 1998, les nouvelles règles ont amélioré la procédure pour la révocation de la citoyenneté. On a maintenant ce qu'on appelle les dispositions sur les actions. Il s'agit d'une procédure d'actions civiles qui impose une pleine communication de la preuve. L'aspect le plus important de ces règles, c'est que cela oblige le gouvernement à divulguer pleinement non seulement ce qu'il compte utiliser, mais aussi tout ce qu'il sait pour que l'autre partie puisse aussi s'en servir.
Le comité des règles de la Cour fédérale avait invité le public à donner son avis. Le ministère de la Justice réclamait une procédure beaucoup plus sommaire sans pleine communication de la preuve. La Coalition et moi avions recommandé ce que le comité des règles a fini par approuver. Je ne pense pas que ce soit parce que nous l'avions recommandé, mais plutôt parce que le comité jugeait que c'était la bonne façon de procéder. Nous étions nous aussi de cet avis.
Je crains que, si l'on ne supprime pas l'alinéa 43g), au lieu que le gouverneur en conseil fasse quelque chose qu'aura recommandé le comité des règles, il fera une chose qu'aura recommandée le ministère de la Justice qui n'a pas toujours choisi la façon la plus équitable de procéder dans le passé. Nous voulons que justice soit faite, surtout envers ceux qui n'ont peut-être pas agi justement dans le passé.
Voilà donc nos trois recommandations. Merci.
Le président: Merci beaucoup de nous avoir signalé certaines choses et d'avoir formulé vos recommandations. Nous en tiendrons certainement compte lors de l'étude article par article la semaine prochaine.
Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: Merci de votre exposé, monsieur Narvey.
Je commencerai par l'alinéa 43g). Vous avez présenté vos arguments à ce sujet. Vous dites que l'on devrait respecter la procédure établie par le comité des règles de la Cour fédérale ou que c'est ce comité qui devrait établir la procédure dans ce cas-ci. Voulez-vous dire que le comité devrait déterminer la procédure à l'avenir?
M. Kenneth Narvey: Oui. Si cet alinéa est supprimé, c'est le comité qui continuera d'établir la procédure parce que c'est ce que prévoit la Loi sur la Cour fédérale.
M. Leon Benoit: Très bien. Êtes-vous d'accord ou non qu'une autre façon de procéder serait que la procédure soit précisée dans le projet de loi avant qu'il soit adopté?
M. Kenneth Narvey: Je ne pense pas que ce soit nécessaire ou utile. Je ne connais aucune loi qui établisse la procédure d'un tribunal. La plupart des tribunaux et des cours suprêmes établissent leur propre procédure sans demander l'avis de qui que ce soit. L'organisme le mieux placé pour établir la procédure d'une cour est la cour elle-même, un organisme composé de juges de cette cour.
M. Leon Benoit: Pouvez-vous m'expliquer un peu? L'article 43 prévoit que le gouverneur en conseil établit les règlements et l'alinéa 43g) stipule: «fixer la procédure à suivre par la Section de première instance de la Cour fédérale pour l'application de l'article 17». Voulez-vous dire qu'au lieu que ce soit la Section de première instance de la Cour fédérale...
M. Kenneth Narvey: Ce que je veux dire, c'est...
M. Leon Benoit: Qui établirait la procédure selon le libellé actuel?
M. Kenneth Narvey: Selon ce libellé-ci, c'est le gouverneur en conseil.
M. Leon Benoit: Par règlement.
M. Kenneth Narvey: Par règlement, en effet. À mon avis, ce ne devrait pas être fait par règlement. Ce devrait être fait, comme ce l'est maintenant et comme ce le serait si cet article était supprimé, selon les modalités de la Loi sur la Cour fédérale adoptée par le Parlement du Canada, selon lesquelles le comité des règles de la Cour fédérale, composé de telle ou telle façon, établit cette procédure avec l'approbation du gouverneur en conseil. Le comité n'est donc pas tout à fait libre de faire ce qu'il veut, mais le gouverneur en conseil reçoit essentiellement les conseils d'un groupe de juges plutôt que d'un groupe de procureurs.
M. Leon Benoit: Bien. D'après vous, pourquoi a-t-on mis une telle disposition dans le projet de loi? De toute évidence, la ministre et le Cabinet voudraient pouvoir exercer beaucoup de contrôle sur cette procédure et ne veulent pas annoncer leur jeu.
M. Kenneth Narvey: Eh bien, je...
Le président: C'est peut-être un point de vue cynique, mais c'est une façon d'interpréter les choses.
M. Kenneth Narvey: Oui. Je ne veux pas critiquer qui que ce soit, mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose.
J'espère que, lors d'une réunion du Cabinet où l'on examinera les propositions d'amendement au projet de loi, on se rendra compte que le gouverneur en conseil ne devrait pas avoir un tel pouvoir. Le gouverneur en conseil n'est pas un groupe de juges et ne connaît pas les détails techniques de la procédure qui lui permettraient de déterminer si l'on doit avoir 30 ou 60 jours pour déposer un document, quels documents doivent être déposés, si un témoin doit être cité à comparaître, l'intimé ou le répondant, et ainsi de suite. Le Cabinet demanderait fort probablement l'avis du ministère de la Justice qui devrait, dans une telle affaire, jouer le rôle de procureur au lieu d'établir la procédure du tribunal.
M. Leon Benoit: J'ai déjà dit moi-même que le projet de loi laissait au gouverneur en conseil la possibilité de faire trop de choses plus tard par règlement. Vous nous signalez cet article-ci, mais je pense qu'il y en a plusieurs autres. C'est une chose qui m'inquiète et je l'ai déjà signalée.
Avez-vous trouvé d'autres exemples de dispositions trop générales dans ce projet de loi? La façon dont le projet de loi sera appliqué dépend en très grande partie des règlements.
M. Kenneth Narvey: Je partage votre préoccupation. Mais je n'ai pas d'autres inquiétudes précises à ce sujet.
M. Leon Benoit: Très bien. Je voudrais bien vous parler plus tard de certaines des choses qui m'inquiètent.
M. Kenneth Narvey: Volontiers.
M. Leon Benoit: Je voudrais aussi vous poser quelques questions au sujet du paragraphe 17(3), dont vous nous avez parlé vous-même. À votre avis, pourrait-on avec succès contester cet article en invoquant la Charte des droits vu le libellé actuel?
M. Kenneth Narvey: Je pense que l'on pourrait effectivement contester cet article et j'ai parfois pensé que je voudrais moi-même le contester. À mon avis, c'est déraisonnable et injuste. Ce serait à un tribunal de décider si c'est aussi contraire à la Constitution. Ce n'est cependant pas tous les jours qu'on a la chance d'examiner un projet de loi. Si le comité et la ministre conviennent avec moi que cette disposition est déraisonnable et injuste, ce ne sera pas nécessaire de voir si elle est aussi contraire à la Constitution. Le Parlement pourrait la modifier au lieu d'attendre que les tribunaux le fassent.
M. Leon Benoit: Exactement. Merci.
Le président: Merci, Leon.
John.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): J'espère ne pas prendre les 10 minutes au complet.
Je voudrais être certain d'avoir bien compris une chose au sujet du paragraphe 17(3). Je trouve curieux de voir l'expression «par dérogation à toute autre loi fédérale».
M. Kenneth Narvey: L'autre loi fédérale dans ce cas-ci est la Loi sur la Cour fédérale. La Loi sur la Cour fédérale stipule que toute décision de la Section de première instance de la Cour fédérale peut faire l'objet d'un appel à la Cour d'appel fédérale. C'est pourquoi on a les mots «par dérogation».
M. John McKay: Très bien. À votre avis, la seule dérogation serait à cette loi-là?
M. Steve Mahoney: Non.
M. Kenneth Narvey: Il y en a peut-être d'autres dont je ne suis pas au courant, mais j'imagine que c'est de celle-ci qu'il est surtout question.
M. John McKay: À certains égards, même vous qui avez étudié cette question ne savez pas quelles autres lois du Parlement pourraient intervenir.
M. Kenneth Narvey: Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a une multitude de lois et elles ont toutes des défauts. Il y en a peut-être une que je ne connais pas, mais la loi particulière...
M. Steve Mahoney: Il s'agit de la clause dérogatoire.
M. John McKay: Mais on ne peut pas légiférer par dérogation. Cet argument n'est donc pas valable.
Ce que vous proposez comme texte serait «toute décision analogue sous l'empire de la législation antérieure».
M. Kenneth Narvey: Je vais vous expliquer pourquoi. La Cour fédérale est l'organisme qui conseille le ministre depuis environ 1977. Auparavant, quand le ministre voulait déposer un rapport, on désignait une personne ou un tribunal. On pouvait renvoyer l'affaire à la Section de première instance de la cour de l'Ontario. On pouvait la renvoyer à une personne, qui serait un commissaire. On pouvait la renvoyer à un organisme composé de trois personne.
Je me rappelle avoir effectué des recherches il y a quelques années. Un certain M. Sainte Marie de Hull, qui était un juge à la retraite, avait été chargé de s'occuper d'affaires de ce genre. À mon avis, toute personne qui a des arguments défendables et qui peut convaincre la Cour d'appel fédérale qu'il devrait y avoir possibilité d'appel devrait pouvoir l'obtenir. Je voulais qu'on puisse remonter jusqu'en 1920. Il n'y a probablement plus personne qui reste encore en vie et qui a vu sa citoyenneté révoquée en 1920 sur la recommandation d'un commissaire ou d'une Cour provinciale, mais cela s'appliquerait à toutes les situations. Le texte français est plus simple vu qu'on parle simplement d'une décision analogue sous l'empire de la législation antérieure.
M. John McKay: Cela explique aussi votre façon étrange de libeller cet article.
Je voudrais bien comprendre la différence entre la façon dont vous définissez l'autorisation d'interjeter appel et celle des témoins précédents. Si j'ai bien compris, vous voudriez qu'on puisse interjeter appel uniquement si l'on en obtient l'autorisation.
M. Kenneth Narvey: C'est exact.
M. John McKay: Et les témoins précédents jugeaient...
M. Kenneth Narvey: On devrait avoir le droit d'interjeter appel.
M. John McKay: Très bien.
Le président: Andrew.
M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Si vous me le permettez, je vais poursuivre dans la même veine.
Il y a un autre point où vous ne semblez pas entièrement d'accord avec le groupe précédent. Les témoins précédents jugent que l'on doit avoir des preuves sans l'ombre d'un doute raisonnable. Vous dites qu'il faut une prépondérance des probabilités. Je pense qu'il est important de préciser parce qu'il y a aussi l'avis d'Alan Borovoy, qui pense qu'on doit avoir plus qu'une simple prépondérance des probabilités, mais qu'on ne doit pas aller plus loin qu'un doute raisonnable. Il faudrait donc quelque chose entre les deux. Vous n'êtes donc pas d'accord avec les témoins précédents lorsqu'il s'agit du fardeau de la preuve.
M. Kenneth Narvey: Oui. Selon moi, c'est une bonne chose que le projet de loi s'appuie sur une prépondérance des probabilités. Je ne suis pas d'accord avec les témoins précédents qu'on doive aller jusqu'au doute raisonnable.
J'ai lu l'avis de M. Borovoy vu que vous me l'avez aimablement remis hier soir. Je connais et j'aime bien M. Borovoy et je pense que vous devriez l'inviter à comparaître si vous n'étiez pas tellement pressés, mais je ne suis pas d'accord avec lui sur ce point. Dans sa lettre, il ne parle que de deux cas, l'affaire Luitjens, la première du genre, et l'affaire Oberlander, la plus récente. Il ne mentionne pas six autres cas entre les deux, trois où le gouvernement a eu gain de cause et trois où le gouvernement a été perdant.
• 1010
C'est seulement dans la première de ces huit affaires qu'on a
exigé la prépondérance des probabilités. Dans toutes les autres
affaires, dont trois où le gouvernement a perdu et trois où il a
gagné, les juges ont dit que la Cour suprême du Canada avait décidé
qu'il n'y a que deux normes pour la preuve au Canada: la norme
civile, qui se fonde sur la prépondérance des probabilités, et la
norme pénale, qui se fonde sur le doute raisonnable.
Ces affaires ne sont pas des affaires pénales. Ce sont des actions civiles. Cela s'apparente davantage à une cause où l'on déterminerait à qui appartiennent 100 acres ou un million de dollars ou si vous avez obtenu votre police d'assurance en dissimulant intentionnellement certains faits importants. Tant que ce sont des actions au civil et non au criminel, personne ne peut être emprisonné par suite de ces procédures. La norme de preuve appropriée est donc la prépondérance des probabilités. Cela ne veut pas dire qu'on joue à pile ou face. Le juge doit être convaincu qu'une partie ou l'autre a raison. C'est ce qu'on fait pour toutes les actions au civil et je pense que le projet de loi est bien rédigé à cet égard.
M. Andrew Telegdi: L'article 12 du projet de loi parle des droits et des privilèges dont jouissent ceux qui ont choisi d'être Canadiens. Comment concilier cette disposition avec le paragraphe (3) de l'article 17?
M. Kenneth Narvey: J'ai eu l'honneur et le privilège de discuter de cette question avec vous hier soir et permettez-moi de vous rapporter les réflexions que la nuit m'a inspirées.
Il y a plusieurs principes dans la balance. Il y a le principe d'égalité. En revanche, l'idée que la citoyenneté ait été acquise de manière frauduleuse ne nous plaît pas du tout. Il y a une inégalité entre les citoyens naturalisés et les citoyens de naissance qui ne procède pas de la mesquinerie mais d'un simple état de fait. J'ai la bonne fortune d'être né dans ce pays; par conséquent, je ne risque pas de perdre ma citoyenneté pour l'avoir obtenue frauduleusement car il m'est impossible de l'avoir reçue frauduleusement.
Il est malheureux que les millions de citoyens naturalisés parfaitement honnêtes qui, quelque effort d'imagination qu'on fasse, n'ont pas obtenu leur citoyenneté frauduleusement puissent ne pas se sentir tout à fait en sécurité puisque quelqu'un pourra toujours les en accuser faussement. Même s'ils n'en sont pas coupables, la procédure risque de leur faire perdre leur citoyenneté. C'est la raison pour laquelle il est important que la procédure soit juste et, donc, pourvue d'une possibilité d'appel.
Il est fort peu vraisemblable que le gouvernement ouvre une centaine ou un million de procédures contre la vaste majorité des immigrants honnêtes. Il n'a ouvert qu'un tout petit nombre de procédures; il en a gagné certaines et il en a perdu d'autres. Il est possible que certaines qu'il a perdues auraient dû être gagnées et vice versa. Mais il ne faudrait pas non plus proposer une période de prescription de cinq ans comme l'ont fait, je crois, les témoins précédents. D'après moi, il ne devrait pas y avoir de période de prescription. Il ne faudrait pas qu'au bout de cinq ans, la fraude soit prescrite et qu'on devienne un citoyen à part entière comme les autres. Si vous avez obtenu votre citoyenneté frauduleusement, alors cette forme d'inégalité qui ne procède pas de la mesquinerie mais d'une constatation de la réalité devrait vous inquiéter. C'est ce que je pense.
M. Andrew Telegdi: Merci.
M. Steve Mahoney: Monsieur le président, je suis surpris qu'aucun des témoins n'ait cité l'exemple récent dont on a beaucoup parlé, l'autorisation d'appel qui a été accordée à Paul Bernardo.
M. Kenneth Narvey: Je ne sais pas si ce droit d'appel lui a été accordé ou s'il avait le droit de faire appel.
M. Steve Mahoney: Non, sa demande a été rejetée mais il avait le droit de la faire.
M. Kenneth Narvey: Je ne suis pas certain s'il s'agissait d'une autorisation d'appel ou d'un appel. Personnellement, je ne crois pas que le système est infaillible. Bernardo est un personnage horrible, mais même les personnages horribles devraient avoir accès d'une manière ou d'une autre à une procédure d'appel. Ce n'est pas pour M. Bernardo que nous le faisons, c'est pour nous que nous le faisons, pour que notre société soit juste.
Le président: D'accord, Leon, encore une autre question, je vous en prie.
M. Leon Benoit: À ce même sujet, quand vous recommandez que «... une législation antérieure (peuvent) être portées en appel devant la Cour d'appel fédérale, si cette Cour en donne l'autorisation», cette autorisation est-elle généralement accordée par un seul juge? C'est bien cela?
M. Kenneth Narvey: Bonne question. Je crois que la décision doit être prise par trois juges de la Cour fédérale.
M. Leon Benoit: À la Cour fédérale, il faut qu'elle soit prise par plus d'un juge?
M. Kenneth Narvey: Oui, la décision est prise par trois juges tant à la Cour fédérale qu'à la Cour suprême du Canada.
M. Leon Benoit: Dans la plupart des cours que je connais, la décision est prise par un juge et je me suis laissé dire que c'était vraiment au petit bonheur la chance. Il n'y a pas vraiment de règles définies. Un juge l'accordera presque systématiquement alors qu'un autre, pratiquement jamais. Ne craignez-vous pas que cela cause un problème?
M. Kenneth Narvey: Non, je ne le crains pas.
M. Leon Benoit: Si ces décisions étaient prises par trois juges, je pourrais vous comprendre.
M. Kenneth Narvey: Je crois qu'elles sont prises par trois juges.
La seule affaire dont je me sois occupé, c'est l'affaire Rudolph. Quand il a été condamné à l'expulsion, à l'époque il y avait possibilité d'appel devant la Cour fédérale d'appel. Cet appel lui a été accordé, mais il l'a perdu et sa demande d'appel devant la Cour suprême a été rejetée.
M. Leon Benoit: D'accord, merci.
Le président: J'ai une question à vous poser.
Des témoins nous ont proposé une sorte de clause de prescription de cinq ans. Vous n'en avez pas parlé. Cela vous pose un problème? Devrait-il y avoir une clause de prescription de poursuite ou quelque chose de ce genre?
M. Kenneth Narvey: Absolument pas. À mon avis, il ne devrait pas y avoir de prescription. Il n'y a pas de prescription à l'heure actuelle et il ne devrait pas y en avoir.
Le président: Ken, je vous remercie de votre excellent témoignage et d'avoir fait tout ce travail avec le comité hier. C'est avec plaisir que j'ai pu trouver le moyen d'accéder à votre requête et je crois que vous nous avez donné pas mal matière à réflexion. Nous demanderons à M. Sabourin ce qu'il pense de votre suggestion, bien entendu, et nous lui dirons ce que vous avez pensé de la sienne. Quoi qu'il en soit, nous réglerons la question la semaine prochaine. Je vous remercie du temps et des efforts que vous avez consacrés à votre présentation.
M. Kenneth Narvey: Merci, monsieur le président.
J'aimerais simplement ajouter que s'il y en a qui veulent me parler personnellement, me rencontrer ou me téléphoner, vous avez mes coordonnées comme on dit à Montréal. N'hésitez pas à me laisser un message m'indiquant où vous rappeler et à quelle heure ou me demandant si nous pouvons vous rencontrer.
Le président: Merci.
Chers collègues, nous avons quelques questions administratives à régler, des questions de calendrier. Je veux régler la question du Sous-comité du programme et de la procédure du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Vous avez cette motion. Il s'agit de la réunion du jeudi 23 et des décisions qui ont été prises concernant la procédure pour l'étude du projet de loi C-16, procédure que nous avons déjà commencée.
Quelqu'un pourrait-il proposer l'adoption du quatrième rapport, merci?
M. Steve Mahoney: Moi.
M. Leon Benoit: Personnellement, j'aimerais dire quelques mots avant.
Le président: Certainement. Je vous informe que votre collègue ne s'est pas opposé à ce rapport, mais vous faites comme vous voulez.
M. Leon Benoit: M. Anders doit revenir. Il a dit qu'il n'était certainement pas d'accord sur la limite imposée au nombre de témoins. Je vois que le sous-comité—tout au moins les représentants du Parti libéral mais peut-être aussi les représentants d'autres partis—n'est pas très disposés à entendre beaucoup de témoins. En conséquence, j'ai une proposition à vous faire. J'ai quatre témoins de plus ou à peu près que j'aimerais entendre. Ce n'est pas beaucoup.
Le président: Pour commencer, c'est contraire à ce que nous avons approuvé. De plus, votre collègue était présent lors de cette réunion et j'ai offert la possibilité d'ajouter des témoins. Nous avons pris certaines décisions et je juge donc votre demande irrecevable. Il y a sur la table une motion d'adoption du quatrième rapport qui énonce la procédure que nous suivrons. Vous avez tout à fait le droit de ne pas être d'accord.
M. Leon Benoit: J'aimerais proposer une modification du paragraphe concernant les témoins. Il faut que je vérifie ce que vous proposez car je viens tout juste de recevoir copie de ce quatrième rapport. Vous dites que...
Le président: Deux jours soient réservés.
M. Leon Benoit: ... deux jours soient réservés.
Le président: Pour être précis, c'est le numéro 3.
M. Leon Benoit: Je propose à la place que nous réservions un ou deux jours de plus. Étudier leurs mémoires et leurs témoignages précédents dans certains cas, s'il est possible d'organiser cela rapidement, ne nécessitera au pire qu'un jour ou deux de plus, ce qui nous permettra d'entendre les témoins que j'aimerais ajouter à la liste. Compte tenu des modifications apportées, je crois qu'il serait fort utile d'entendre les représentants de la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic qui ont exprimé des préoccupations à propos des questions d'adoption, de temps de résidence et de présence physique. Le Congrès du travail a parlé de problèmes au niveau de la procédure de nomination des commissaires. L'Organization of Professional Immigration Consultants a également émis des réserves sur certaines questions. À propos de...
Le président: Ils ont tous déjà comparu et c'est la raison pour laquelle ils n'ont pas été réinvités.
M. Leon Benoit: Je sais, c'est exact, mais il y a eu des changements.
Le président: Je sais, mais nous en avons eu 46. Pour être franc, vous devriez savoir combien, encore une fois, je n'aime pas du tout revenir sur ce qu'on a déjà fait. Nous avons discuté de toutes ces questions la semaine dernière. Il a été décidé d'inviter tous ceux qui avaient témoigné sur le projet de loi C-63 à nous envoyer un témoignage écrit sur les changements introduits dans le projet de loi C-16 et que nous en tiendrions compte. Non seulement nous verserions de nouveau au compte rendu du projet de loi C-16 leurs témoignages sur le projet de loi C-63 mais encore leurs lettres de commentaires sur le projet de loi C-16 afin de ne pas avoir à réentendre 46 témoins. Tout le monde a été d'accord.
M. Leon Benoit: Je n'en propose que quatre.
Le président: J'ai aussi donné la possibilité à tout le monde d'inviter...
M. Leon Benoit: Quand?
Le président: Je viens de vous le dire, le 23 mars et vous n'étiez pas là.
M. Leon Benoit: Le 23 mars c'est la date à laquelle a été envoyée cette lettre d'invitation à ces groupes pour qu'ils envoient un complément de mémoire?
Le président: Non. C'est la date de réunion du sous-comité. Une fois adoptée...
M. Leon Benoit: Ça, je comprends.
Le président: Écoutez-moi, Leon. Les représentants du Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic ont comparu pendant l'étude du projet de loi C-63.
M. Leon Benoit: Je sais, monsieur le président.
Le président: Encore une fois...
M. Leon Benoit: En échange, je crois que nous devrions les réinviter pour discuter...
Le président: Je suis désolé. Nous avions déjà pris notre décision. Il y a un amendement.
M. Leon Benoit: Monsieur Fontana...
Le président: Non, je vais mettre votre amendement aux voix. Vous voulez d'autres témoins.
M. Leon Benoit: J'aimerais dire deux mots à son sujet.
Le président: Non. Vous l'avez déjà fait. Je le mets aux voix.
M. Leon Benoit: Non. J'aimerais faire d'autres commentaires.
Le président: Je mets l'amendement aux voix.
Tous ceux en faveur de l'amendement?
M. Leon Benoit: J'aimerais un vote par appel nominal.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Parfaitement.
(L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2)
Le président: Merci. Nous passons maintenant au vote sur la motion principale, par appel nominal, je suppose.
M. Leon Benoit: J'aimerais lire ce rapport. Nous venons tout juste de le recevoir. Nous avons besoin d'une ou deux minutes pour le parcourir. Ces documents devraient nous être envoyés à l'avance.
M. Rob Anders: Monsieur le président, de quoi s'agit-il?
M. Leon Benoit: Oui.
Le président: Si vous n'étiez pas parti, vous auriez le rapport du sous-comité...
Voudriez-vous donner à M. Anders une copie de ce qu'il a approuvé la dernière fois?
M. Leon Benoit: Vous avez approuvé un témoin par parti?
M. Rob Anders: Oh, je ne...
Le président: Il n'a peut-être pas été d'accord, mais le comité l'a approuvé.
M. Rob Anders: Monsieur le président, vous me faites peut-être dire ce que je n'ai pas dit.
Le président: Avez-vous des questions concernant ce quatrième rapport?
M. Leon Benoit: Non. J'aimerais avoir du temps pour le lire.
Le président: C'est ce que je vous demande.
David Price.
M. David Price: Est-ce que David Foot vous a répondu?
Le président: Il n'est malheureusement pas libre. Par contre, comme je l'ai déjà dit, une fois que nous en aurons terminé avec le projet de loi C-16, si nous voulons encore entendre M. Foot...
M. John McKay: Il ne va pas nous faire payer ses honoraires habituels, n'est-ce pas?
Le président: Je sais qu'il se fait payer assez cher. Il faudra peut-être négocier. Il y a d'autres démographes que nous pourrions entendre. Je crois que faire ça serait une idée fantastique. Nous pourrons toujours trouver quelqu'un pour nous donner ce genre d'informations, même au ministère ou dans d'autres ministères, quelqu'un qui a déjà fait ce genre d'analyse démographique, à Statistique Canada ou à Santé Canada, etc., car les rapports ne manquent pas.
M. John McKay: Nous voulons un démographe pas cher.
Le président: Très bien. Je mets donc...
M. Leon Benoit: Monsieur le président, je vois que les membres du comité ne sont tout simplement pas disposés à entendre d'autres témoins. Je n'en ai proposé que quatre. Il est évident que je n'essaie pas de bloquer quoi que ce soit.
Le président: Sur les quatre que vous proposez, il y en a déjà trois qui ont comparu, et j'ai dit...
M. Leon Benoit: J'aimerais qu'ils reviennent pour parler de certains des changements...
Le président: Il faudrait alors réinviter les 46 autres qui ont déjà comparu. Nous avons déjà réglé la question.
M. Leon Benoit: Mais, monsieur le président, vous avez dit envisager la possibilité qu'ils nous envoient des commentaires sur les changements. Vous avez dit, je crois, que vous aviez l'intention de leur envoyer une lettre en ce sens ou que vous l'avez déjà fait. Quand l'avez-vous fait? Quand cette lettre a-t-elle été envoyée?
Le président: Nous allons inviter à le faire les groupes qui ont déjà témoigné sur le projet de loi C-63 dès que nous aurons adopté ce quatrième rapport. Nous les informons... En fait, j'ai déjà signé toute une série de lettres hier qui sont prêtes à partir. Une fois que ce quatrième rapport aura été adopté, ces lettres seront envoyées et ceux que cela intéresse pourront agir en conséquence. Nous en avons discuté la semaine dernière.
M. Leon Benoit: Et ils sont censés...
Le président: Ecoutez, si ça ne vous plaît pas, organisez une conférence de presse et dites ce que vous avez sur le coeur.
M. Leon Benoit: [Note de la rédaction: Inaudible]
Le président: Le quatrième rapport, s'il vous plaît.
M. Leon Benoit: Non. J'essaie simplement de dire...
Le président: J'aimerais que la greffière mette aux voix le quatrième rapport. Le débat est clos.
M. Leon Benoit: Qu'est-ce que vous vous échauffez!
Le président: Tous ceux qui sont en faveur du quatrième rapport?
M. Leon Benoit: Non, et j'aimerais, s'il vous plaît, un vote par appel nominal.
(La motion est adoptée par 7 voix contre 2) [Voir procès-verbaux]
Le président: Il y a une autre motion. Il y a une chose que j'aimerais régler qui aurait dû l'être la dernière fois. Elle concerne la motion qui a été proposée... Cela concerne les malheureux événements d'hier, ou d'avant-hier, au Parlement concernant notre document de travail, les options pour un rapport. Certaines des choses dont nous avons discuté en public et certaines de celles qui de toute évidence auraient dû l'être en privé.
Je crois que le comité avait déjà convenu que le compte rendu des réunions à huis clos des 23 et 24 février pendant lesquelles nous avons discuté non pas de l'ébauche du document confidentiel mais du document de travail, ou des options pour un rapport sur la question de la détermination du statut de réfugiés et des immigrants... soit rendu public et que le procès-verbal soit modifié en conséquence. Vous vous souviendrez que non seulement nous avons rendu public le procès-verbal de la réunion du 2 mars, le rendant accessible donc au public afin qu'il sache exactement ce dont nous avons discuté mais qu'également nous avions convenu que nous rendrions publics les procès-verbaux du 23 et du 24. Il faut les regrouper, les traduire et les mettre en forme.
Cela aurait dû résoudre les problèmes de M. Benoit. S'il était resté pendant les réunions pour en discuter, il aurait pu constater que nous étions plus que disposés à ouvrir encore plus la procédure.
J'aimerais que quelqu'un propose cette motion pour que nous puissions la mettre aux voix.
M. Steve Mahoney: Je la propose.
M. John McKay: De quelle motion s'agit-il au juste?
Le président: Que les réunions à huis clos du 23 et du 24 février où nous avons discuté du document de travail préparé pour nous par Margaret, les options pour un rapport... Ce n'était pas l'ébauche de rapport ou le rapport confidentiel avec des recommandations. C'était en fait un résumé de ce que les témoins nous avaient dit et de certaines des questions sur lesquelles il nous fallait nous décider... Nous y avons consacré trois réunions, comme vous le savez, le 23, le 24, et celle du 2 mars, qui a été publique. Souvenez-vous, c'est la réunion que M. Benoit voulait enregistrer de lui-même au cas où nous ne la rendrions pas publique. Nous rendons par cette motion les réunions du 23 et du 24 février également publiques.
M. Leon Benoit: J'invoque le Règlement.
Le président: Oui.
M. Leon Benoit: Le comité n'a-t-il pas approuvé comme procédure qu'une motion doit être déposée avec un préavis de 24 heures avant de pouvoir être examinée?
Le président: Cette motion a été déposée il y a deux ou trois semaines. Malheureusement, nous n'avons jamais pu nous en occuper car nous avions d'autres choses à faire. Je pense donc...
M. Leon Benoit: Cette motion a été...?
M. John McKay: Cette motion est recevable.
M. Leon Benoit: Elle a fait l'objet d'un préavis qui figure au procès-verbal? Ou suffit-il simplement que la greffière en soit avisée?
La greffière du Comité: Il suffit de me l'envoyer.
Le président: Oui.
M. Steve Mahoney: Je tiens simplement à faire remarquer que je trouve assez extraordinaire que M. Benoit suggère un délai alors qu'en fait il s'agit de faire exactement ce qu'il réclamait à cor et à cri, de rendre public le compte rendu de ces réunions. Qu'il essaie maintenant... Cela montre clairement que le seul objectif de M. Benoit est de retarder par tous les moyens la procédure de notre comité.
Pour être franc, je suis plus calme maintenant, mais j'en étais arrivé à un point où j'étais prêt à déposer au comité une motion réclamant la suspension de M. Benoit de notre comité pour ses actions. Il a manifesté un mépris total et un manque de respect total des membres du comité. Le fait qu'il ait fini par s'excuser à la Chambre des communes est la seule raison pour laquelle j'ai personnellement décidé d'en rester là. Je souhaiterais que nous puissions désormais faire notre travail et que le critique du Parti réformiste cesse ce petit jeu d'obstruction systématique. Pour être franc, cela finit par devenir complètement insupportable.
Le président: Je suppose que vous voulez dire par là que vous êtes favorable à cette motion?
Oui, monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: Oui. J'approuve moi aussi cette motion et mon intention n'est pas du tout de retarder son adoption. J'essaie simplement de veiller à ce que la procédure appropriée soit suivie par ce comité, ce qui a toujours été mon objectif depuis le début.
Si le président voulait bien me laisser parler, je dirais que ce qui m'indisposait c'était que la procédure suivie par le comité pour se réunir à huis clos n'était pas la bonne. En plus, bien entendu, le fait que j'avais reçu un exemplaire de la nouvelle loi, que notre comité était censé...
M. Steve Mahoney: Le président de la Chambre vous a jugé coupable. Pourquoi continuez-vous d'essayer à vous défendre contre le fait que...
M. Leon Benoit: Monsieur le président, voudriez-vous rétablir l'ordre...
M. Steve Mahoney: ... vous avez violé les privilèges des membres de la Chambre des communes. Pourquoi ne présentez-vous pas vos excuses aux hommes et aux femmes de ce côté-ci et de ce côté-là pour votre conduite inadmissible...
M. Leon Benoit: Monsieur le président, qui a la parole ici?
M. Steve Mahoney: ... ignorant toutes les règles de la Chambre des communes? Vous avez été jugé coupable. Excusez-vous, Leon.
M. Leon Benoit: Je n'ai pas été jugé coupable. En fait tous les ministres de votre Cabinet ont voté contre votre propre motion. Votre mémoire est très sélective.
Le président: Silence.
M. Leon Benoit: J'aimerais terminer mes commentaires. Si les membres du comité pouvaient se calmer pour m'écouter, je leur en saurais gré.
M. Steve Mahoney: Votons.
M. Leon Benoit: Comme je l'ai dit, j'appuie cette motion parce que je crois que ces choses devraient être examinées en public et je suis heureux de constater que les procès-verbaux et les comptes rendus de ces réunions seront publics. Mais je tiens à préciser que si j'ai décidé de m'adresser aux médias, comme je l'ai expliqué...
Une voix: Arrêtez d'essayer de vous justifier.
M. Leon Benoit: Je n'essaie pas de me justifier.
M. Steve Mahoney: J'invoque le Règlement.
Le président: L'incident est clos. La motion est mise aux voix. Voudriez-vous...
M. Steve Mahoney: Je réclame un vote par appel nominal.
Le président: Monsieur Anders. J'autorise M. Anders à intervenir.
M. Rob Anders: Merci beaucoup, monsieur le président.
À la décharge de mon collègue, je viens tout juste de recevoir cette motion, et je crois que mon collègue essaie simplement de tenir le gouvernement à la même procédure qui se serait appliquée à l'opposition.
Je me souviens que lorsque nous sommes arrivés ici après les dernières élections, le gouvernement a décrété un préavis de 24 heures pour toutes les motions déposées en comité afin d'éviter des surprises de dernière minute, monsieur le président. Et je crois qu'il essayait simplement de s'assurer que tel était bien le cas, c'est-à-dire que le gouvernement respectait ses propres règles.
Monsieur McKay, je ne crois pas que cela soit trop demandé. Vous pouvez lever les sourcils autant que vous le voulez.
Soyons justes. Si tout ceci est arrivé c'est parce que cette procédure de réunion à huis clos posait un problème à l'opposition, et, comme on dit, qui sème le vent récolte la tempête. Il s'agit ni plus ni moins de réparer une erreur.
Le président: Je mets aux voix la motion proposant que les procès-verbaux des réunions du 23 et du 24 soient rendus publics.
(La motion est adoptée)
Le président: Merci beaucoup.
La séance est levée.