CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION
COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 24 novembre 1999
Le président (M. Joe Fontana, (London-Centre-Nord, Lib.)): Collègues, en attendant l'arrivée de la ministre, nous pourrions peut-être traiter du deuxième point à l'ordre du jour, soit l'adoption du deuxième rapport du Sous-comité du programme et de la procédure, afin que cela soit réglé.
Le greffier est en train de distribuer le deuxième rapport du sous-comité. Pour vous rafraîchir la mémoire, la plupart d'entre vous étaient ici pour cela de toute façon. Nous avons déposé un cadre de référence quant aux futurs travaux du comité. Nous avons adopté l'ébauche modifiée du cadre de référence préparé par la recherchiste pour une étude de tous les aspects du processus de détermination du statut de réfugié et de migrants clandestins.
Pour l'étude susmentionnée, l'horaire des réunions sera comme suit. Après les organisations, l'on entendra des individus, et jusqu'ici, il a été confirmé que 12 ou 14 témoins comparaîtront devant nous entre demain et le 9 décembre. Comptent parmi eux: le Solliciteur général du Canada; la GRC; le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés; le Conseil canadien pour les réfugiés; la Fédération maritime du Canada; l'Association de transport aérien du Canada; l'Association du Barreau canadien; l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration; et, à titre individuel, Martin Collacott, Bill Bauer, Barbara Jackman et David Matas. Voilà le contenu du deuxième rapport.
Quelqu'un pourrait-il proposer une motion visant l'adoption du deuxième rapport?
Une voix: J'en propose l'adoption.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Puis-je poser une question, je vous prie?
Le président: Oui, Leon.
M. Leon Benoit: Monsieur le président, l'ordre dans lequel vont comparaître ces personnes et représentants d'organisations a-t-il été fixé?
Le président: Nous avons un calendrier provisoire que nous allons également vous distribuer. Je pense que nous y avons intégré les témoins que vous aviez demandés, ainsi que ceux demandés par M. ...
M. Leon Benoit: Où dans le processus?
Le président: Nous espérons les entendre la semaine prochaine, comme je l'ai dit. Nous souhaitons tout boucler d'ici le 9 décembre. Les témoins que vous vouliez ont été inscrits pour le 1er décembre.
Y a-t-il d'autres questions? Y a-t-il des objections? Dans la négative, tout le monde est-il d'accord pour que l'on adopte le deuxième rapport du sous-comité?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée)
Le président: Merci beaucoup.
Madame la ministre, bienvenue au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
Je suis certain que vous avez une déclaration liminaire à nous faire, mais nous aimerions vous faire savoir au préalable que le comité travaille fort depuis quelques semaines à une étude préliminaire portant sur le processus de détermination du statut de réfugié et sur les migrants clandestins, comme vous le savez très certainement. Je tiens à remercier le ministère de deux réunions au moins tenues jusqu'ici et des très bons documents de fond qui nous ont permis de comprendre pleinement la question. Afin d'être en mesure de vous aider et de vous fournir des conseils quant à ce que nous devrions faire dans le cadre de notre système de détermination du statut de réfugié, nous comptons poursuivre ce travail pendant encore une semaine et demie à deux semaines.
• 1540
D'après ce que j'ai compris, une nouvelle loi sur la
citoyenneté s'en vient, et elle sera en fait déposée demain. Je
pense que cette nouvelle n'étonnera personne. Si c'était censé être
une surprise, je viens de vendre la mèche, mais ça va.
L'honorable Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Je vais rayer cette phrase-là de mon allocution.
Le président: Bien sûr.
Une voix: Maintenant que nous savons d'où proviennent les fuites.
Le président: Le comité ici réunit sera bien sûr accusé de cela. Comme vous le savez, madame la ministre, le comité a fait du très bon travail sur cette loi sur la citoyenneté, alors nous accueillerons avec plaisir tout ce que vous avez à en dire.
Enfin, madame la ministre, en ce qui concerne le rapport sur le rendement qui vient d'être déposé, nous envisageons avec plaisir de savoir ce que vous aurez à en dire.
Je devrais également rappeler que nous avons rencontré le conseil pour les réfugiés relativement au processus de détermination du statut de réfugié. Nous le convoquerons sans doute à nouveau, mais il nous a beaucoup rendu service.
J'ai assez parlé. Permettez-moi de vous souhaitez la bienvenue au comité. Nous envisageons avec plaisir de travailler avec vous au cours des mois et des années à venir, dans le cadre de notre travail collectif visant à nous assurer que la Loi sur la citoyenneté et que la Loi sur l'immigration pays soient les meilleurs et les plus contemporains possibles.
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs.
[Français]
Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui. J'entame avec enthousiasme notre travail ensemble. Je compte sur vous pour me prodiguer des conseils et me faire des recommandations importantes.
[Traduction]
J'aimerais commencer par vous remercier de l'occasion qui m'a été offerte de venir vous rencontrer ici aujourd'hui. Étant donné le programme qui s'annonce, j'ai l'impression que nous allons beaucoup travailler ensemble au cours de la présente session du Parlement, et j'aimerais donc vous parler un peu, dans mes remarques liminaires, de ce qui nous attend.
Avant d'aller plus loin, permettez-moi de vous présenter l'équipe du ministère qui m'accompagne aujourd'hui. Il s'agit de Mme Janice Cochrane, sous-ministre; de Michel Dorais, sous-ministre délégué; ainsi que de M. Georges Tsaï, de Mme Martha Nixon et de M. Greg Fyffe, qui sont sous-ministres adjoints. Est également des nôtres M. Dan Costello, qui est mon adjoint exécutif. Je ferai appel à eux pour répondre à certaines de vos questions techniques ou autres, surtout s'il est question de chiffres.
J'aimerais également souligner autre chose, étant donné que c'est la première occasion que j'ai de comparaître devant vous. Après presque quatre mois, jour pour jour, comme ministre, je tiens à ce que vous sachiez à quel point je suis fière de l'équipe de CIC et impressionnée par son dévouement—son dévouement au Canada et les compétences qu'elle apporte au ministère et à son travail. Je souhaite la remercier publiquement et remercier également ceux qui sont ici et qui offrent leur soutien dans le cadre de cette équipe.
J'aimerais également, monsieur le président, souligner le bon et très important travail de mon secrétaire parlementaire, Andrew Telegdi, qui joue un rôle très important au comité. Je le remercie de son aide au cours des quatre derniers mois.
J'ai l'impression que cela fait plus de quatre mois que j'ai été nommée ministre, et j'ai passé mon temps à écouter les Canadiens et Canadiennes et à me renseigner auprès d'eux au sujet d'un portefeuille important et complexe. La citoyenneté et l'immigration touchent à des valeurs fondamentales pour chacun d'entre nous: des valeurs comme l'accueil et l'appartenance, l'équité et la justice. Ce sont ces valeurs qui ont fait du Canada une des nations les plus respectées dans le monde, et ce sont ces valeurs qui guideront mon approche pour les nombreuses questions problématiques qui nous sont soumises à vous et à moi. Elles constituent pour moi une sorte de norme que je suis fière d'assumer au nom du gouvernement.
J'ai accepté ce portefeuille avec beaucoup de respect pour la contribution que les immigrants et les réfugiés ont apportée et apportent encore à notre pays. Cette contribution, je peux la constater dans ma circonscription de Thornhill, et dans les collectivité un petit peu partout au Canada, aux plans économique, social et culturel. Je l'observe chez les gens mêmes que nous accueillons aujourd'hui qui deviennent de nouveaux citoyens de notre pays.
Les immigrants et les réfugiés ont construit le Canada, et, comme je l'ai dit, ils continueront à le faire. Nous avons besoin de nombreux immigrants dynamiques pour maintenir notre place dans le monde. Nous en avons besoin pour assurer notre croissance démographique, améliorer la qualité de notre main-d'oeuvre et réussir mieux dans le contexte de la mondialisation de l'économie. L'immigration nous permettra de continuer à recruter des cerveaux, ce qui sera extrêmement avantageux pour le Canada.
Comment faire pour que nos programmes d'immigration et de protection des réfugiés répondent encore à nos besoins au début du nouveau millénaire? Permettez-moi de vous présenter certaines de mes priorités.
La première priorité est de poursuivre la révision de la législation concernant l'immigration et la reconnaissance du statut de réfugié. Il est facile de parler de valeurs, mais il est plus difficile de les maintenir lorsque d'énormes pressions sont exercées pour les mettre de côté ou simplement les abandonner.
• 1545
Après l'arrivée l'été dernier de quatre bateaux de migrants
sur les côtes de la Colombie-Britannique, certains voulaient que
nous prenions des mesures draconiennes. Ils voulaient que nous
mettions de côté la Charte des droits et libertés, des décennies de
jurisprudence et certains de nos engagements les plus fondamentaux
au plan international. Ils prétendent que le système ne fonctionne
plus. Eh bien, monsieur le président, comparaissant aujourd'hui
devant le comité, un comité de collègues, je peux vous dire que je
ne pense pas que le système soit cassé. En fait, il fonctionne. Les
bateaux en question ont été interceptés et arraisonnés. Leurs
passagers ont été détenus et ont bénéficié d'une procédure
équitable d'audition. Les passeurs n'arrivent pas à leurs fins.
Pour eux, il s'agit d'une mauvaise affaire.
Les Canadiens sont des gens généreux et justes, mais ils ne veulent pas faire le jeu d'organisations criminelles. Je suis déterminée à empêcher les criminels de tirer profit du commerce d'êtres humains. J'ai la ferme intention de collaborer avec d'autres pays qui vivent le même problème.
Je sais que vous êtes en train d'examiner cette question—comme vous l'avez dit, monsieur le président—et je m'en réjouis. Je lirai avec intérêt les recommandations qui me seront faites au sujet du processus de reconnaissance du statut de réfugié et j'ose croire que ces recommandations rempliront toutes les exigences juridiques fixées par les tribunaux au fil des ans, qu'elles respecteront les valeurs des Canadiens et qu'elles pourront être mises en oeuvre de façon efficace et rentable.
Le deuxième point dont je veux vous parler est celui des niveaux d'immigration. J'ai déjà annoncé un niveau général de 178 000 à 196 000 immigrants pour l'an 2000, et de 22 000 à 29 000 pour les réfugiés. Monsieur le président, il s'agit là des personnes qui se font reconnaître le statut d'immigrant reçu. Le ministère et le gouvernement prendront toutes les mesures possibles pour atteindre ce niveau. Pour ma part, je m'emploierai à attendre l'objectif à long terme du gouvernement en ce qui concerne le niveau d'immigration, soit un nombre annuel équivalent à environ 1 p. 100 de la population canadienne.
Afin de pouvoir atteindre les buts fixés, je vais collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les organismes non gouvernementaux et les Canadiens intéressés, de manière à planifier les niveaux sur plusieurs années. C'est là une tâche qui me tient à coeur, car cela nous permettra de donner au programme d'immigration une orientation claire.
Le troisième point que j'aimerais mentionner est notre travail visant à remplacer l'actuelle Loi sur la citoyenneté. Comme vous l'avez mentionné, j'ai indiqué mon intention de déposer demain en Chambre un projet de loi à cet égard. Tous les membres du comité auront une séance d'information exhaustive sur le nouveau projet de loi lorsque vous en entreprendrez l'examen. Sans vouloir annoncer d'avance ce que contiendra le projet de loi, je puis vous dire que ses dispositions reflètent grandement les valeurs des Canadiens et qu'il s'inspire de l'excellent travail fait par le comité et des commentaires que nous avons entendus au sujet du projet de loi C-63 lors de la dernière session.
Un quatrième et dernier point que je veux mentionner avant de passer à la période des questions est celui de la nécessité d'améliorer le service. La plupart d'entre vous doivent s'occuper de cas d'immigration précis dans le cadre de leur travail de député dans leur circonscription. Vous connaissez les préoccupations que suscitent le service aux clients et, en particulier, les délais pour traiter certains genres de demandes.
Je suis heureuse de pouvoir dire que le ministère fait des progrès à cet égard. Cependant, nous pouvons certainement faire mieux et nous le ferons. Nous examinons à l'heure actuelle d'un oeil très critique nos systèmes et processus, tout en sachant parfaitement bien que cela est essentiel non seulement pour maintenir beaucoup de valeurs qui sont parmi les plus importantes parmi les Canadiens, mais aussi pour maintenir la compétitivité de l'économie canadienne pour le XXIe siècle. Comme l'a dit le premier ministre dans sa réponse au discours du Trône, le Canada sera le pays du monde où il fera bon vivre au XXIe siècle. J'ai déjà dit que cette affirmation était douce à mon oreille, en ma qualité de ministre de l'Immigration.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, madame la ministre.
Nous allons maintenant passer aux questions. À la première ronde, nous aurons M. Benoit, pour dix minutes, suivi de M. Mahoney, de M. Bigras et enfin de M. Anders.
M. Leon Benoit: Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue à la ministre et aux fonctionnaires du ministère de l'Immigration qui l'ont accompagnée.
Je pense que la première étape dans le règlement d'un problème est la reconnaissance que le problème existe. Dans votre déclaration d'aujourd'hui, vous n'avez rien reconnu de tel. Cela me préoccupe grandement, car je pense que les Canadiens savent très bien la difficulté qu'ont eue et le ministre et le ministère face au problème des migrants clandestins cet été. Je pense également qu'il ressort clairement du rapport sur le rendement du ministère que vous n'avez pas réussi à atteindre les objectifs en matière d'immigration que vous vous étiez fixés pour l'an dernier. Savoir quelle est la situation et ne pas reconnaître qu'il existe un grave problème n'augure pas très bien de la résolution des problèmes.
• 1550
Ma première série de questions portera sur les projections que
vous avez faites pour l'an prochain et sur les objectifs que vous
vous êtes fixés. L'an dernier, bien sûr, il vous manquait entre
25 000 et 55 000 personnes, selon le point de vue, pour atteindre
les objectifs fixés. Vous avez déclaré aux médias que votre
objectif pour l'avenir est de 300 000 personnes. Vous avez pour
l'année à venir un objectif de 200 000 à 225 000 personnes. Vous
avez également dit aux journalistes ainsi que dans votre mémoire
que lors de l'établissement d'objectifs, vous consultez les
provinces. Ma question est donc la suivante: les provinces
sont-elles d'accord sur l'objectif de 300 000 personnes que vous
vous êtes fixé? Vous ne déclareriez certainement pas publiquement
un tel objectif sans le consentement des provinces.
L'hon. Elinor Caplan: En fait, les provinces ont été consultées sur le plan pour l'an 2000 et les niveaux que j'ai mentionnés dans ma déclaration, soit entre 200 000 et 225 000 personnes pour l'année à venir. Quant à la ventilation de ce chiffre, comme je l'ai mentionné dans mes remarques liminaires—et je serai maintenant un petit peu plus générale de façon à ce que ce soit bien clair—jusqu'à 200 000 personnes sont censées venir du côté immigration et jusqu'à 25 000 personnes du côté réfugiés. À l'intérieur de ces groupes il y a là encore des ventilations correspondant aux différentes catégories, et nous nous ferons un plaisir de fournir au comité n'importe laquelle de ces ventilations détaillées.
M. Leon Benoit: Madame la ministre, en ce qui concerne l'objectif de 300 000 personnes dont vous avez fait état à plusieurs reprises aux médias, les provinces ont-elles entériné ce chiffre? Dans la négative, pourquoi dites-vous alors qu'il s'agit là de votre objectif?
L'hon. Elinor Caplan: Ce que j'aimerais, si vous permettez, c'est être très claire afin que le député et que tout le comité comprennent le processus et comprennent également très précisément ce que j'ai dit. J'ai déclaré que notre objectif à long terme, conformément à l'engagement énoncé dans le livre rouge de 1993, est 1 p. 100 de la population. Cependant, pour atteindre cet objectif, je me suis engagée à en discuter et à y travailler avec les provinces, les territoires, les organisations non gouvernementales et les Canadiens intéressés aux questions relatives à l'immigration, dans le but d'élaborer un processus de planification pluriannuel en vue de la réalisation de cet objectif à long terme que nous nous sommes fixé. Il est cependant clair que pour l'an 2000 les niveaux annoncés et l'objectif se situent entre 200 000 et 225 000 personnes.
M. Leon Benoit: Toutes les provinces ont-elles approuvé ces chiffres?
L'hon. Elinor Caplan: Oui.
M. Leon Benoit: En ce qui concerne le fait que vous n'ayez pas atteint votre objectif pour l'an dernier et qu'il vous manquait 25 000 à 55 000 personnes, vous avez fait une déclaration, qui a été reprise par les médias, selon laquelle les compressions budgétaires des quelques dernières années auraient amené une situation dans laquelle l'accent aurait davantage été mis sur l'application de la loi que sur la promotion de l'immigration, mais que vous comptez rationaliser les opérations en vue de mettre en place des politiques visant à attirer davantage d'immigrants. Pourriez-vous nous expliquer cela?
L'hon. Elinor Caplan: Je ne pense pas que vous m'ayez citée fidèlement. Si je me souviens bien, je pense avoir dit que pour de très bonnes raisons de politique publique, dans le cadre du processus d'examen des programmes, qui a eu une incidence sur tous les ministères fédéraux, le mandat exécution du ministère a été davantage protégé que ce que nous appelons le volet facilitation ou service aux clients.
Si nous voulons atteindre les niveaux dont il est question, il nous faut maintenant examiner le volet service à la clientèle afin d'être certains de faire les choses plus rapidement, mieux, et de façon plus intelligente. Je peux dire en toute franchise au comité que c'est là tout un défi.
Nous sommes en train d'examiner tout ce que nous faisons, car nous tenons à atteindre ces niveaux. Le ministère m'a assurer que nous faisions tout en notre pouvoir pour réaliser ces niveaux dans l'année à venir.
M. Leon Benoit: Dans ce cas, les compressions budgétaires n'ont rien eu à voir avec le fait que vous n'ayez pas atteint l'objectif fixé. Ce sont d'autres problèmes au ministère qui vous en ont empêché.
L'hon. Elinor Caplan: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Je tiens à être très claire. Je conviens que suite à l'examen des programmes, le volet service à la clientèle du ministère en a subi le contre-coup. Le résultat de cela, ajouté à d'autres facteurs, tels la complexité dans les pays d'origine, l'absence d'infrastructure dans certains de ces pays...
M. Leon Benoit: Mais vous n'avez jamais répondu à ma question sur les compressions budgétaires.
L'hon. Elinor Caplan: Il y a plusieurs facteurs. J'aimerais dire en réponse à mon critique du Parti réformiste que s'il est une chose que j'ai apprise au cours des quatre mois qui se sont écoulés depuis que je suis arrivée au ministère, comme je l'ai mentionné dans mes remarques liminaires, c'est que les questions sont complexes. Il n'existe pas de réponse simple et facile. Il y a des réponses; elles demandent tout simplement quelques minutes de plus. Je me ferai un plaisir de vous fournir certains des chiffres...
M. Leon Benoit: Vous avez donc été mal citée en ce qui concerne les compressions budgétaires.
L'hon. Elinor Caplan: Ce que j'ai dit très clairement est que le ministère a, comme tous les autres ministères, été touché par l'examen des programmes. L'examen des programmes au ministère s'est notamment intéressé au volet service à la clientèle et, dans une plus grande mesure, au volet exécution, et je pense que c'était pour de très bonnes raisons de politique publique.
Le ministère a un double mandat: premièrement, l'encadrement et l'intégration d'immigrants et de réfugiés; deuxièmement, le rôle très important que nous jouons pour veiller à ce que ceux qui sont inadmissibles ne soient pas autorisés à entrer au Canada et à ce que ceux qui ont réussi à venir au Canada mais qui ne sont pas admissibles soient expulsés le plus rapidement possible.
M. Leon Benoit: Je pense en fait qu'il est important que cela soit bien clair. Vous avez eu, comme le font ressortir ces transparences, une augmentation de 70 millions de dollars au niveau du budget de votre ministère en l'espace de deux ans, soit de 1995-1996 à 1997-1998. Vous n'avez certainement pas consacré 70 millions de dollars de plus au volet exécution. En fait, je pense que vous pourriez dire sans risquer de vous tromper que vous n'avez pas consacré un cent de plus à l'exécution. Cela n'explique donc pas pourquoi vous n'avez pas atteint les objectifs. J'aimerais bien que vous nous l'expliquiez. C'est pourquoi nous sommes ici réunis aujourd'hui. Cela fait trois fois que je vous pose cette question, et j'apprécierais une réponse.
L'hon. Elinor Caplan: Je vais m'y essayer une nouvelle fois, afin d'être certaine que vous compreniez. Je vais parler lentement.
Il y a eu plusieurs raisons. Premièrement, il y a eu l'examen des programmes. Deuxièmement, il y a eu d'autres exigences. N'oubliez pas que les niveaux correspondent au nombre de personnes reçues.
Nous avons eu une forte demande du côté des travailleurs temporaires et des visas pour étudiants. Il ne s'agit pas là d'immigrants reçus, mais de personnes dont nous avons besoin dans des secteurs de services très particuliers. Je peux vous dire que nous avons constaté des augmentations très marquées dans le nombre des demandes de visas d'étudiants et de travailleurs temporaires, et cela a eu une incidence sur le ministère.
En ce qui concerne les chiffres que vous avez mentionnés, il y a eu un certain nombre de programmes bien précis qui vont, je l'espère, jouir de votre appui. C'est le cas notamment d'un programme relatif aux crimes de guerre auquel nous avons ajouté des ressources importantes, de l'ordre de 45 millions de dollars.
M. Leon Benoit: Cela est-il très déterminant dans la réalisation de vos quotas?
L'hon. Elinor Caplan: Votre question portait précisément sur les 70 millions de dollars, alors pour répondre à votre question, je vous dis à quoi ont servi ces ressources.
M. Leon Benoit: Je cherche toujours la réponse à la question de savoir pourquoi vous n'avez pas atteint vos objectifs.
L'hon. Elinor Caplan: L'une des raisons est l'établissement de l'unité des crimes de guerre.
Deuxièmement, il y a eu l'initiative relative au bogue de l'an 2000. Je suis heureuse de pouvoir confirmer au comité que CIC est maintenant conforme à 100 p. 100. Lorsque l'heure fatidique sonnera dans à peine un mois et demi, vous n'aurez pas à vous inquiéter de l'un quelconque des programmes ou services du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Enfin, il y a eu les résultats de la négociation de conventions collectives. Cependant, je pense avoir répondu à votre question.
M. Leon Benoit: Madame la ministre, vous n'avez pas répondu à la question.
Puis-je vous poser une courte question?
L'hon. Elinor Caplan: D'accord.
M. Leon Benoit: Avez-vous la moindre idée des raisons pour lesquelles votre ministère n'a pas atteint ses objectifs?
L'hon. Elinor Caplan: Oui.
M. Leon Benoit: Alors pourquoi ne répondez-vous pas à la question?
L'hon. Elinor Caplan: Eh bien, laissez-moi m'y réessayer. Je ferai une dernière tentative.
Le président: La ministre essaie de répondre à la question.
L'hon. Elinor Caplan: Il y a une autre question dont le comité devrait, je pense, être au courant, et c'est le fait que les pays d'origine ont changé. Il arrive que l'infrastructure du pays d'origine soit telle qu'il est très difficile d'obtenir toute la documentation requise en vue d'une immigration au Canada aussi rapidement qu'on le voudrait. C'est ce que nous appelons la complexité des cas. Certains dossiers demandent plus longtemps à traiter, selon le pays d'origine du demandeur et le manque d'infrastructure dans ce pays. Ces facteurs ont eux aussi eu une incidence sur les niveaux.
Cela résulte donc de l'examen des programmes, des exigences dans d'autres secteurs et de la complexité des cas, selon le pays d'origine. Et je peux vous dire...
M. Leon Benoit: Avec une augmentation budgétaire de 70 millions de dollars?
Le président: Vous aurez une autre chance.
L'hon. Elinor Caplan: ... que nous faisons tout ce que nous pouvons et que nous sommes déterminés à faire de notre mieux pour atteindre les niveaux annoncés le 1er novembre 1999.
Le président: Merci, madame la ministre.
La parole sera maintenant à Steve Mahoney.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Merci.
Pour que les choses soient bien claires, le dernier intervenant vous a posé des questions au sujet de l'augmentation du budget de 70 millions de dollars entre 1994 et 1997, je pense. Vous ai-je bien entendue dire que 45 millions de dollars de ce montant ont été consacrés au programme des crimes de guerre?
L'hon. Elinor Caplan: Oui, à l'établissement d'une unité des crimes de guerre.
M. Steve Mahoney: Et le reste est le fait des négociations collectives?
L'hon. Elinor Caplan: Non, il y a également les programmes en prévision du bogue de l'an 2000. Ce sont là les trois principaux postes d'investissement pour l'année écoulée.
M. Steve Mahoney: Rien de tout cela n'avait donc à voir avec les objectifs?
L'hon. Elinor Caplan: Non.
M. Steve Mahoney: Parce que j'ai entendu mon collègue vous poser une question au sujet du budget et s'attendre à une réponse relative aux cibles.
L'hon. Elinor Caplan: C'est vrai.
M. Steve Mahoney: Très bien.
En ce qui concerne la question du trafic d'étrangers en Colombie-Britannique, vous me corrigerez si j'ai tort, mais d'après ce que j'ai compris, près de 600 migrants sont arrivés, que l'on sache, sur quatre bateaux. Comparez cela aux quelque 500 réfugiés par mois qui arrivent, je pense, dans le seul aéroport de Pearson. C'est tout simplement pour vous donner un ordre de grandeur. Je ne suis pas en train d'en minimiser l'importance.
Que pouvons-nous réellement faire vis-à-vis des passeurs? Il me semble que lorsque vous arrêtez l'équipage, vous n'arrêtez pas les gros bonnets. Ces gens-là sont payés pour faire un travail, j'imagine. Je doute fort que les cerveaux derrière tout cela se trouvent à bord de ces bateaux rouillés et pleins de trous. Que peut-on négocier avec le gouvernement chinois en vue de resserrer les choses et de nous attaquer au problème à la source?
L'hon. Elinor Caplan: Il s'agit là d'une question très importante, car il s'agit en fait d'un problème international. Nombre de ces cerveaux du crime organisé, si vous voulez, se trouvent à l'extérieur du Canada.
Je pense qu'il est important de savoir ce qui se passe. Non seulement il y a eu de nombreuses initiatives directement avec le gouvernement chinois, mais il y a également eu des initiatives avec d'autres pays et par l'intermédiaire des Nations Unies.
Permettez-moi de commencer par vous parler des Nations Unies. L'on y oeuvre à l'heure actuelle à l'élaboration d'une convention sur le crime organisé transnational, assortie de protocoles visant les migrants clandestins et le trafic d'étrangers, dans le cas, tout particulièrement, des femmes et des enfants. Ce sont là deux sous-groupes.
D'autre part, le Canada participe aux côtés des autres pays du G-8 à l'élaboration de la Convention des Nations Unies, car tous les pays du G-8 sont confrontés à ce problème. Nous travaillons donc conjointement avec des pays de même philosophie. Par ailleurs, il y a de nombreux problèmes qui sont en fait beaucoup plus graves que d'autres.
Par exemple, d'après ce que j'ai compris, tout juste le mois dernier, l'Australie a vu arriver dix bateaux transportant près de 900 personnes.
L'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres pays du G-8 oeuvrent donc avec nous à l'élaboration de cette convention des Nations Unies. Nous travaillons par ailleurs très étroitement avec le gouvernement chinois et plusieurs initiatives ont été prises en la matière.
Le premier ministre du Canada a soulevé le problème lorsqu'il a rencontré le dirigeant de la République populaire de Chine. Le ministre des Affaires étrangères en a parlé avec son homologue. En avril dernier, une entente a été signée par les deux gouvernements. Lorsque M. Lloyd Axworthy a rencontré son homologue, ils ont entre autres choses parlé de la mise en oeuvre de cette entente.
Par ailleurs, une délégation de parlementaires, menée par le président du Comité des affaires étrangères, a rencontré des représentants du gouvernement chinois et de CIC. M. Fyffe a d'ailleurs fait partie de la délégation qui a travaillé avec le gouvernement chinois. Ils participent eux aussi au processus international d'élaboration de la convention des Nations Unies. Je pense que nous reconnaissons tous la gravité de ce problème.
La dernière chose que j'aimerais dire à ce sujet est que le gouvernement chinois travaille avec nous. Notre ambassadeur en Chine m'a dit que deux bateaux qui se dirigeaient vers le Canada avaient été interceptés avant même qu'ils ne quittent les eaux chinoises. D'après ce que j'ai compris, le gouvernement chinois a en fait jusqu'ici intercepté six bateaux, dont quatre qui avaient pour destination le Canada.
• 1605
Je pense donc que les discussions diplomatiques donnent des
résultats et qu'elles sont très importantes, mais cela ne veut pas
dire que ce problème va être rapidement ni facilement réglé. C'est
pourquoi j'évoque la question des problèmes auxquels se trouve
confrontée l'Australie du fait de sa proximité, et pour d'autres
raisons également.
M. Steve Mahoney: Savons-nous ce que fait l'Australie avec les bateaux lorsqu'ils arrivent? Je vous pose la question car on m'a dit que ce pays en a vu arriver 50 pendant la période au cours de laquelle quatre sont arrivés en eau canadienne. J'ignore si cela est vrai ou non.
L'hon. Elinor Caplan: Cela est en fait vrai. Comme je l'ai dit, le mois dernier, je pense, les Australiens ont vu arriver dix bateaux, avec près de 900 personnes à bord.
Ils ont signé la Convention de Genève, tout comme nous, et je sais qu'ils tiennent, tout comme nous, à ce que les vrais réfugiés au sens de la convention soient protégés. Ils ont une politique qui prévoit, entre autres, la détention. En fait, pour la toute première fois, craignant que les gens ne fuient, le Canada a lui aussi, comme vous le savez, recouru à la détention. En Australie, ils saisissent le bateau. Les gens ont cependant droit à une audience exhaustive, comme c'est le cas dans les autres pays signataires de la Convention de Genève, et c'est le cas, tout particulièrement, au Canada.
La particularité ici—et c'est une chose à laquelle il nous faut réfléchir—est que nous avons toujours supposé que les gens qui arrivaient au Canada et qui y revendiquaient le statut de réfugié voulaient obtenir un statut légal au Canada, afin de s'établir ici et d'obtenir ultérieurement la citoyenneté canadienne. Ce qui est différent dans cette situation est que parce que les gens ne se présentent pas à l'audience, etc., et se cachent, nous avons réussi à justifier la détention obligatoire. Personnellement, je n'aime pas l'idée de la détention et de retirer à une personne sa liberté individuelle—et je pense que personne au Canada n'aime cela. Cependant, nous tenons à ce que nos lois soient respectées et à assurer les Canadiens qu'ils ne vont pas se faire avoir.
L'autre aspect est que les passeurs ont un plan, soit l'exploitation et le trafic des personnes qu'ils amènent au Canada et à d'autres pays. En détenant les gens, on les met en même temps à l'abri des passeurs, qui n'ont ainsi pas accès à leur profit et qui ne sont pas en mesure d'exploiter ces personnes qu'ils ont transportées jusqu'ici. Nous entendons des histoires épouvantables d'exploitation, et je pense que c'est là un problème qui nous préoccupe tous.
M. Steve Mahoney: Certains disent que nous devrions invoquer la clause dérogatoire et retirer les droits qui ont été accordés à tous les réfugiés, ce, sur la base, j'imagine, de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Singh. J'aimerais savoir ce que vous pensez de la Charte des droits dans le contexte des réfugiés, et si vous croyez que l'on devrait utiliser quelque chose comme une clause dérogatoire ou peut-être même contester la décision Singh, ce qui n'a pas été fait à l'époque, pour déterminer si la Charte des droits devrait ou non s'appliquer.
Avez-vous des idées sur ce que nous devrions faire dans le cas qui nous occupe? Êtes-vous au courant de l'expérience de pays comme l'Australie ou les États-Unis, qui n'ont pas, à ma connaissance, de charte qui corresponde à notre Charte des droits?
L'hon. Elinor Caplan: En ce qui concerne la dernière partie de votre question, Martha Nixon va fournir au comité un tableau comparatif international faisant ressortir l'expérience vécue par différents pays. Vous aurez l'occasion de l'examiner.
Quant à la première partie de votre question, je pense que la plupart des Canadiens, mais pas tous, appuient la Charte des droits et libertés et estiment qu'elle est un élément fondamental de la société canadienne. Je pense pour ma part, et c'est également l'avis du gouvernement, que la Charte des droits et libertés devrait s'appliquer à toutes les personnes au Canada, et tout le temps, et pas juste à certaines personnes, une partie du temps. C'est une pente très glissante. Si l'on commence aujourd'hui à retirer des droits, je crains que si l'on se regarde dans la glace, l'on y voie ceux dont les droits seront touchés demain.
M. Steve Mahoney: Songez aux Japonais, pendant la guerre.
L'hon. Elinor Caplan: Eh bien, nous avons des journées très sombres dans notre histoire. Nous nous efforçons de tourner la page, mais si nous ne tirons pas de leçons du passé, alors je pense que nous commettrons une très grave erreur.
Le président: Monsieur Mahoney, il vous reste encore dix secondes pour une question et une réponse.
M. Steve Mahoney: En fait, madame la ministre, je voulais vous interroger au sujet de deux autres questions. Je vais tout simplement jeter sur la table les questions du regroupement familial et des visas pour voyageurs d'affaires, étudiants et touristes. Ce sont ces problèmes-là que je vois dans ma circonscription. J'ai en fait un membre à temps plein de mon personnel qui ne s'occupe que de cela. Je suis certain que vous pouvez comprendre cela dans le contexte d'une ville comme Mississauga.
Auriez-vous des suggestions quant à ce que nous pourrions faire pour améliorer la situation, tant ici qu'à l'étranger?
L'hon. Elinor Caplan: C'est là une question sur laquelle j'espère que le comité se penchera. Avec dix secondes pour répondre...
M. Steve Mahoney: C'était pour la question. Vous, vous pouvez prendre tout l'après-midi.
L'hon. Elinor Caplan: Pour moi, c'est la priorité— c'est-à-dire le service à la clientèle. Les gens attendent trop longtemps. Ils attendent trop longtemps pour venir ici en tant qu'immigrants indépendants. Les entreprises attendent trop longtemps pour faire venir les travailleurs qualifiés dont elles ont besoin. Nous tous, dans nos bureaux de circonscription, entendons la frustration de ceux qui se sont fait refuser un visa de visiteur ou qui disent que le processus est trop long.
Je pense que vous devriez savoir que le ministère a été très ouvert quant à l'examen d'idées créatives et novatrices en vue d'une nouvelle approche en matière de service aux clients. La réaction a été positive.
Monsieur le président, nous aurons peut-être l'occasion d'expliquer certaines de ces idées au comité. Je peux vous dire que nous sommes très ouverts aux bonnes idées. Si quelqu'un a des suggestions à faire, nous serions très heureux de les entendre.
Toujours au sujet de comparaisons internationales, vous avez mentionné que d'autres pays n'ont pas de charte des droits et libertés. J'aimerais que vous sachiez que chaque pays a ses propres lois, règles, etc., mais tous les pays, ou en tout cas la plupart, qui ont signé la Convention de Genève offrent voies de droit régulières et auditions impartiales. Souvent, ce qu'on lit dans les journaux n'est pas un tableau juste de ce qui se passe dans d'autres pays.
M. Steve Mahoney: Vraiment?
L'hon. Elinor Caplan: Je sais que vous trouverez cela difficile à croire.
M. Steve Mahoney: Je suis en état de choc.
L'hon. Elinor Caplan: La comparaison internationale nous donnera l'occasion d'avoir une discussion là-dessus et d'examiner les faits, reconnaissant qu'il y a dans différentes parties du monde des cultures et des valeurs différentes et que les lois qui s'y appliquent sont différentes.
Le président: Comme je l'ai dit, madame la ministre, nous avons déjà entamé ce processus. Des idées? Beaucoup d'idées? Croyez-moi, vous allez en obtenir beaucoup, surtout du comité.
Bernard Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Je remercie Mme la ministre ainsi que ses fonctionnaires de leur présence parmi nous.
Comme vous le savez, le Québec vit une situation démolinguistique assez particulière. Le Conseil de la langue française du Québec proposait, il y a environ deux semaines, de s'attaquer à cette problématique de deux façons: d'une part, par une politique nataliste qui réponde aux besoins, mais aussi par une politique d'immigration qui permette d'accueillir le plus grand nombre possible d'immigrants francophones.
Vous savez aussi que le gouvernement du Québec sélectionne tout près de 60 p. 100 de ses immigrants. Actuellement, le Québec est sur le point d'atteindre ses objectifs en matière d'immigration. En 1999, 12 000 immigrants parlaient français; l'objectif pour l'an 2002 est de 17 000.
Naturellement, pour atteindre cet objectif, il faut des moyens. Étant donné que je suis le nouveau porte-parole en matière d'immigration, je prenais connaissance hier du rapport de rendement. À la page 39 particulièrement, on trouve le détail des paiements de transfert prévus en regard de la subvention, dans l'Accord Canada-Québec, pour promouvoir l'intégration des nouveaux immigrants. J'y ai vu que la prévision pour 1998-1999 avait été de 101 millions de dollars et que la prévision pour 2001-2002 est de 95 millions de dollars. Il y a donc une diminution de tout près de 6 millions de dollars.
Je voudrais savoir, d'une part, si les prévisions pour 2001-2002 sont toujours les mêmes et si, d'autre part, vous avez l'intention, en tant que nouvelle ministre, de continuer dans cette voie de la réduction des subventions accordées dans le cadre de l'Accord Canada-Québec en vue de l'intégration des nouveaux arrivants.
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup. Je regrette, mais je ne parle pas bien le français; je préfère répondre en anglais.
M. Bernard Bigras: Certainement, aucun problème.
[Traduction]
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup.
• 1615
J'ignore si le comité est tout à fait au courant de l'Accord
Canada-Québec. Il a été négocié par le gouvernement précédent. En
vertu de l'Accord Canada-Québec, le gouvernement du Québec fait le
choix des immigrants et le gouvernement du Canada s'occupe des
vérifications de sécurité et d'admissibilité. Cela est assorti
d'une très généreuse formule en matière de budget d'établissement.
Nous avons un expert—en la personne de Michel, le sous-ministre
délégué—et je vais lui demander de répondre à votre question, car
vous avez évoqué un certain nombre de détails bien précis.
[Français]
M. Michel Dorais (sous-ministre délégué, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration Canada): Si je me trompe, je tiens à être corrigé par notre expert financier, mais je crois que la somme de 101 millions de dollars incluait le rattrapage de deux ans par rapport à une augmentation. Donc, ce n'est pas une réduction, mais un rajustement à 95 millions de dollars qui s'est fait sur une période de deux ans. Les 101 millions de dollars incluent le rattrapage sur les deux années.
L'Accord Canada-Québec contient une annexe qui détermine très précisément le rythme d'augmentation des subventions en fonction de toute une série de facteurs.
M. Bernard Bigras: Très bien.
Un autre obstacle à l'entrée d'immigrants francophones, nonobstant le pays dont ils proviennent, est justement le bouchon qui existe actuellement dans de nombreux bureaux à l'étranger. Je pense entre autres à l'ambassade du Canada à Paris. Le Québec a beau se fixer des objectifs clairs en termes d'immigration francophone, il se trouve pris dans un engrenage congestionné.
Ma question est bien simple. Dans la mesure où le Québec se fixe des objectifs quant au nombre d'immigrants francophones, comment estimez-vous qu'il puisse les atteindre si, dans le même temps, les bureaux à l'étranger ne traitent pas les demandes de façon diligente?
[Traduction]
L'hon. Elinor Caplan: C'est une bonne question. Je suis d'ailleurs préoccupée par l'arriéré qu'accusent de nombreux bureaux de délivrance de visas, et j'espère qu'un jour on ne parlera plus d'arriérés mais de listes d'attente. La différence, bien sûr, qu'il s'agisse d'un arriéré ou d'une liste d'attente de personnes désireuses de s'établir au Canada, réside dans l'atteinte de nos objectifs en matière de niveaux.
D'après ce que j'ai compris—et nous cherchons des moyens d'améliorer le service dans tous nos bureaux étrangers—Paris a été en mesure d'aider la province de Québec à atteindre ses objectifs au cours des dernières années. Nous prévoyons que ce sera également le cas cette année. Là où nous avons des problèmes, nous prenons des mesures très énergiques et c'est ce que nous avons fait à Paris. D'après ce que j'ai compris, certains dossiers ont été transférés de Paris à d'autres missions, ce en vue de pouvoir les traiter plus rapidement.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.
La parole sera maintenant à M. Anders, pour cinq minutes.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Ma première question pour la ministre est la suivante: convient-elle qu'il existe un problème avec ceux qui reçoivent illégalement des allocations pendant qu'ils travaillent dans ce pays?
L'hon. Elinor Caplan: Non, je ne suis pas au courant du détail de cela... Pourriez-vous répéter votre question?
M. Rob Anders: Êtes-vous au courant d'un problème du côté des personnes qui reçoivent de l'argent du gouvernement canadien pendant qu'elles travaillent, et qui ne devraient par conséquent pas recevoir de l'argent du gouvernement du fait qu'elles ont un emploi?
L'hon. Elinor Caplan: Si vous connaissez des cas précis de fraude, non seulement je serais heureuse de faire enquête, mais je voudrais beaucoup avoir ces faits et ces chiffres.
M. Rob Anders: Cela est formidable, car je vais justement vous donner des exemples.
L'hon. Elinor Caplan: Bien.
M. Rob Anders: Le Canada a récemment accueilli sur son sol en tant que réfugiés des Kosovars, et une députée à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, Mme Lynn Stephens, a fait des déclarations au sujet d'une auberge dans sa circonscription, la Old Country Inn, qui a été abordée par quelqu'un qui travaillait avec des réfugiés du Kosovo. Je vais vous lire une déclaration faite par Lynn Stephens elle-même:
-
Cependant, pendant l'entrevue, la femme a dit qu'elle
n'envisagerait d'accepter une offre d'emploi que si l'employeur la
rémunérait en argent comptant afin qu'elle puisse continuer de
bénéficier de l'aide gouvernementale sans réduction aucune de son
allocation.
• 1620
Nous avons ici des documents en provenance de son bureau, une
lettre, ainsi que des formulaires donnant le nom de la réfugiée. Je
ne vais pas le citer ici devant le comité, mais soyez assurée que
j'ai sa photo et les renseignements pertinents. Cela a été diffusé
et il y a eu des articles là-dessus dans la presse, alors la
ministre devrait être au courant de ce genre de choses.
La députée à l'assemblée législative dit qu'elle estime que cela est condamnable moralement, légalement et sur le plan de l'éthique. J'aimerais savoir si vous considérez vous aussi que cela est immoral, non éthique et illégal.
L'hon. Elinor Caplan: Bien sûr. Si une personne abuse de notre système, travaille illégalement ou se comporte de façon frauduleuse, cela est condamnable. Mais permettez que je vous dise ceci. Nous avons accueilli plus de 7 000 personnes du Kosovo: 2 000 de ces personnes ont été acceptées dans le cadre du programme de réunification des familles; 5 000 vont devoir décider si elles vont rester au Canada ou retourner dans leur pays. Près du tiers sont déjà reparties et nous prévoyons qu'encore un autre tiers de ces personnes retourneront chez elles. Je m'inquiète toujours lorsque j'entends parler de quelqu'un qui abuse de notre générosité, mais je ne voudrais pas que la réputation de ces 7 000 personnes soit entachée d'accusations de comportement frauduleux ou non éthique.
Si vous connaissez des cas individuels, nous ferons enquête et en traiterons comme il se doit. Je pense cependant qu'il nous faut être très prudent et nous garder d'envoyer un message qui salirait toutes ces personnes que le Canada a, à juste titre, généreusement accueillies.
M. Rob Anders: Une part importante de ce que nous faisons ici relève de choix. Il est question de priorités et de distribution de ressources—ce sur quoi nous choisissons de dépenser de l'argent et la façon dont nous choisissons de corriger les problèmes ou de les ignorer.
La deuxième situation dont je vais vous parler concerne une dame du nom de Sandra McMurray. Elle est très calée en logiciels informatiques. Elle avait quitté la Nouvelle-Zélande et était ici au Canada. Elle allait se faire embaucher par une importante société internationale de courtage. Or, en dépit du fait qu'un emploi l'attendait et que tout était prêt, sa demande d'entrer au pays a été refusée. Par conséquent, au lieu que cette entreprise l'embauche, elle va être à Perth, en Australie. J'ai ici tous les renseignements au sujet de la situation à laquelle elle se trouve confrontée. Comment pouvez-vous justifier la situation de Sandra McMurray, qui s'est vu refuser l'entrée au Canada, alors qu'il y en a d'autres qui enfreignent nos lois et empochent l'argent versé par les contribuables?
L'hon. Elinor Caplan: Monsieur le président, dans la plupart des cas, je commencerais par répondre que les lois en matière de protection de la vie privée sont telles qu'il m'est impossible de répondre à des questions portant sur des dossiers particuliers. Mais dans ce cas-ci, je peux répondre, parce qu'on ne peut pas parler de dossier. La personne en question n'a jamais fait de demande. Elle n'a donc jamais été refusée.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Vos cinq minutes sont écoulées. Merci.
M. Rob Anders: Vous allez manquer les meilleures questions.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): J'en doute. Je pense que je dormirai très bien sans les avoir entendues.
Monsieur Limoges.
L'hon. Elinor Caplan: Monsieur le président, j'aimerais dire encore quelque chose, et c'est que les agents d'immigration doivent faire preuve de discrétion lorsqu'une personne fait une demande. S'ils estiment que la personne s'intégrerait bien au Canada, elles peuvent décider de l'admettre même si elle ne satisfait pas les exigences en matière de points. Bien franchement, j'ai trouvé dommage que cette personne n'ait pas fait de demande, et c'est je pense également la réaction qu'ont eue certains des fonctionnaires lorsque nous avons lu cette histoire.
Ma recommandation serait que non seulement les gens ne croient pas tout ce qu'ils lisent dans les journaux, mais également qu'ils ne suivent pas forcément les conseils que leur donnent leurs avocats.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Leon Benoit: Il y a eu dans le cas dont on parle un important appui.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Puis-je suggérer que vous remettiez la documentation dont vous avez tiré le passage cité, surtout concernant la fraude, à la ministre et au personnel, afin qu'ils puissent faire enquête?
Dans le cas du deuxième point, vous avez déjà obtenu une réponse. La personne en question n'avait pas fait de demande.
M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le président, il me semble que ce que le député a décrit est le cas d'une personne qui avait l'intention de se comporter de façon frauduleuse mais qui à ce moment-là n'avait pas encore agi.
Quoi qu'il en soit, nous avons quelques objectifs très nobles et très ambitieux, comme cela est ressorti des questions posées par les intervenants qui m'ont précédé, et je vous inviterai à nous expliquer davantage comment vous comptez faire pour atteindre ces objectifs à court et à long terme en matière de gain de cerveaux dans ce pays.
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup de me poser la question, car le service aux clients est une priorité, non seulement pour moi, mais également pour le ministère, et nous sommes à l'heure actuelle en train d'envisager un certain nombre de choses.
Étant donné que le passage à l'an 2000 sera bientôt derrière nous—et, comme je l'ai mentionné, le ministère est tout à fait conforme—une part importante de l'énergie et des ressources consacrées aux préparatifs en vue d'éviter un problème avec le bogue de l'an 2000 pourra maintenant être versée aux systèmes de gestion de l'information, à la technologie de l'information et à d'autres systèmes qui, je pense, aideront à améliorer le service.
Le ministère oeuvre également à l'élaboration de normes en matière de service ce dans le cadre de notre nouvelle orientation axée sur les résultats, et les renseignements quant aux meilleures pratiques seront alors diffusés à l'échelle du ministère. Martha est la sous-ministre adjointe responsable de ce domaine, et si vous voulez, elle pourrait prendre quelques minutes pour vous parler davantage dans le détail de certaines des initiatives en matière de service à la clientèle qui sont en cours et qui nous aideront beaucoup, je pense, dans l'atteinte de ces objectifs et niveaux.
Martha.
Mme Martha Nixon (sous-ministre adjointe, Opérations, Citoyenneté et Immigration Canada): Merci beaucoup, madame la ministre.
Nous avons en la matière une approche à deux volets. Premièrement, nous avons nommé comme personne de front en matière de service à la clientèle un agent du service extérieur chevronné. Il a été libéré de ses autres fonctions et s'est vu confier une mission spéciale. Il a réuni autour de lui un petit groupe de travail qui examinera les questions clés en matière d'assurance de la qualité, la façon dont se fait le traitement opérationnel et les mesures à prendre pour veiller à ce que nous communiquions de façon appropriée avec les personnes avec lesquelles nous traitons. Il va déterminer un certain nombre de choses que nous pourrions faire à court terme et il se penchera également sur des initiatives à plus long terme.
Nous avons eu une importante réunion à Brockville avec nos gestionnaires à l'étranger. Nous avons passé deux jours à faire du remue-méninges sur ce qui devrait nous occuper, dans le but, tout particulièrement, d'améliorer notre service à la clientèle, à la lumière de ce que nous savons pouvoir faire et de ce qu'il est logique de faire, par opposition aux grosses initiatives systémiques, comme par exemple les systèmes, dont nous savons que la mise en place demande plus longtemps.
Nous avons élaboré un plan d'action qui a été communiqué à tous nos gestionnaires à l'étranger et nous leur avons donné des objectifs précis à atteindre sur le plan liquidation de l'arriéré et mesures à prendre pour assurer un traitement plus rapide des demandes et la réalisation des niveaux. Nous leur avons, je pense, donné des buts et des objectifs très clairs.
Nous utilisons également nos méthodes habituelles pour tenter d'accélérer le traitement, d'utiliser de façon stratégique nos ressources dites de service temporaire et de réunir des groupes de traitement spéciaux afin de ne pas intervenir avec une seule personne, mais bien avec une équipe, ce qui nous permet de mener à bien toute la gamme des activités de traitement qui s'imposent. Nous dépensons plus d'un million de dollars dans le but d'augmenter notre efficience en matière de traitement et ces ressources seront consacrées aux bureaux qui connaissent le plus de difficultés.
Nous avons également réuni un groupe de praticiens, et nos gens rencontrent régulièrement les experts-conseils, les avocats, et ceux qui traitent avec nos clients pour entendre leurs bonnes idées et travailler avec eux à la résolution des problèmes qui nous occupent.
Nous avons par exemple lancé un certain nombre de projets pilotes visant le traitement du dossier médical des étudiants. Nous oeuvrons aux côtés du SCRS à l'élaboration de meilleures relations afin qu'il soit possible d'effectuer plus rapidement les vérifications de sécurité pour des groupes particuliers, comme celui des pilotes. Nous nous efforçons également de diffuser les meilleures pratiques. Nous avons par exemple des bureaux qui ont constaté que les tests de connaissances linguistiques sont un excellent moyen de sélection d'immigrants intéressants et si nous nous en servons comme outil nous pourrons nous passer d'entrevues et raccourcir les délais de traitement des demandes.
Chaque fois que nous avons de bonnes idées, nous les diffusons à tous les bureaux et nous communiquons régulièrement avec les gens pour parler objectifs, résultats et réussites. Voilà un petit aperçu de ce que nous nous sommes efforcés de faire jusqu'ici.
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup, Martha.
Il y a encore un autre point dont je voulais parler au comité, et il s'agit d'une chose qui ne va sans doute pas se faire à court terme, mais qui est en train d'être envisagée. J'ai entendu, de plusieurs sources, que le centre de traitement à Vegreville fonctionne extrêmement bien. Nous avons entendu beaucoup de commentaires positifs à son sujet en particulier. Il a été suggéré que l'on envisage l'établissement au Canada même d'un centre de traitement des demandes en provenance de l'étranger. C'est là tout un défi, et ce sera chose difficile. Cela ne se ferait pas du jour au lendemain, mais c'est une question à laquelle le comité voudra peut-être réfléchir lorsque son programme le lui permettra. Je crois que ce concept pourrait être une façon d'améliorer le service à l'étranger, et c'est quelque chose que nous examinons à l'interne au ministère.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci. La parole sera maintenant à M. Price.
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Merci, monsieur le président. Pourriez-vous me réinscrire moi aussi sur la liste?
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Bien sûr.
M. David Price: Merci, monsieur le président.
Merci, madame la ministre, d'être venue ici aujourd'hui, ce qui nous offre la possibilité de vous marteler un peu—mais nous vous martèlerons doucement.
Au cours des quelques dernières années, il y a eu deux examens différents visant l'immigration en général et l'élaboration d'une nouvelle loi sur l'immigration. J'aimerais vous poser deux questions là-dessus. Premièrement, combien cela a-t-il coûté à ce jour d'effectuer ces deux examens, et comptez-vous en entreprendre un autre?
L'hon. Elinor Caplan: Je vais répondre d'abord à votre deuxième question, étant donné que je connais la réponse, et les fonctionnaires chercheront la réponse à votre première question, car je n'ai pas sous la main les chiffres quant au coût de cet examen.
Nous nous sommes engagés à élaborer une nouvelle loi en matière d'immigration et de protection des réfugiés. Le livre blanc a été diffusé en janvier dernier. L'on y oeuvre activement, et j'espère que nous aurons l'occasion de nous y pencher ensemble, ici au comité, dans le courant de l'année à venir.
D'après ce qu'on me dit, l'on n'a pas encore trouvé la réponse à votre première question concernant le coût. J'obtiendrai ces données et les déposerai auprès du comité.
M. David Price: Il y a eu deux examens.
L'hon. Elinor Caplan: Nous obtiendrons les coûts des deux examens et nous nous ferons un plaisir de vous les communiquer.
M. David Price: Vous n'avez pas répondu directement à ma question. Allez-vous entreprendre un autre examen, ou bien...?
L'hon. Elinor Caplan: Je ne suis pas certaine de comprendre exactement ce que vous voulez dire par «autre examen». Ce que je fais en ce moment...
M. David Price: Peut-être que je devrais vous demander d'ici combien de temps la nouvelle loi va sortir.
L'hon. Elinor Caplan: C'est une bonne question. Je dirais plutôt plus tôt que plus tard.
M. David Price: Ce n'est pas une bonne réponse.
L'hon. Elinor Caplan: Permettez que je me réessaye. J'ose espérer que l'on verra dans le courant de l'an 2000 une nouvelle loi engagée dans le processus législatif.
M. David Price: Oui, mais cela est très général.
L'hon. Elinor Caplan: Écoutez, je pensais que c'était une très bonne réponse. Permettez que je la reformule. Une nouvelle loi est une priorité pour le gouvernement. Un important travail a été entrepris. Le processus d'examen mené à bien par l'ancien ministre a, je pense, été excellent. Le livre blanc a été largement distribué. En tant que nouveau ministre—je ne suis là que depuis quatre mois—j'ai voulu avoir l'occasion d'en parler avec les gens. Comme vous le savez, le programme a été plutôt chargé. Il y a eu un certain nombre de questions et de dossiers dont nous avons dû nous occuper, mais la nouvelle loi est une priorité pour le gouvernement.
Nous travaillons assidûment et nous espérons avoir une loi qui... Permettez-moi de m'exprimer ainsi: ce n'est pas chaque année que vous avez l'occasion de proposer un important projet de loi. L'ancienne loi a 20 ans. L'on s'accorde pour dire qu'il faut la mettre à jour. Nous sommes à la veille du nouveau millénaire. Nous tenons à veiller à ce que les politiques et la loi soient en place. Il y a un certain nombre de choses qui doivent par ailleurs être examinées sur le plan administration et réglementation. Cependant, cela demeure une priorité. Le sous-ministre me dit que je suis en train de «caplaniser».
M. David Price: Je pense que ce qu'a déclaré très publiquement Mme Robillard est qu'octobre est la date... qu'elle livrerait la marchandise en octobre.
L'hon. Elinor Caplan: Je suis certaine que c'aurait été le cas.
M. David Price: Je comprends. Je comprends parfaitement que vous ayez besoin de temps car c'est un portefeuille entièrement nouveau. Vous êtes là depuis quatre mois maintenant. Je peux comprendre qu'il vous faille encore quelques mois, mais je n'aimerais pas devoir attendre trop longtemps en 2000. Envisagez-vous, comme je l'espère, le printemps ou plus tard? Pouvez-vous nous donner cette assurance?
L'hon. Elinor Caplan: Je ne veux réellement pas vous donner une date précise à ce stade. Mais je peux vous dire qu'il s'agit d'une priorité, que j'y travaille. J'espère que nous pourrons soumettre la nouvelle loi au comité dans les meilleurs délais.
M. David Price: C'est parce que la solution de nombre des problèmes dont nous traitons ici passent par une nouvelle loi.
L'hon. Elinor Caplan: Je le sais, et c'est pourquoi c'est une priorité. Toutefois, je peux vous dire que nous travaillons aussi sur de nombreux éléments au niveau réglementaire et administratif, et nous devons consulter et collaborer avec différents partenaires. C'est une loi importante. Les politiques relatives et à l'immigration et à la protection des réfugiés sont très importantes non seulement pour mon ministère mais aussi pour le gouvernement du Canada. Je ne peux que vous dire qu'il s'agit d'une priorité pour moi personnellement, d'une priorité pour le ministère, et une priorité pour le gouvernement. Dès que je serai prête, le projet de loi sera déposé à la Chambre des communes.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci beaucoup.
L'hon. Elinor Caplan: Mais je suis heureuse d'entendre que vous trouvez cela important, car c'est bien mon avis.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je pense avoir compris que nous n'allons pas obtenir de réponse étoffée sur les changements que vous allez apporter pour améliorer les choses. Mais ce qui est clair, c'est que les Canadiens, en réalité, dépensent plus dans ce domaine et obtiennent moins en retour. Ils dépensent plus cette année qu'il y a deux ans. Ils dépensent plus cette année qu'il y a six ans lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir.
Le fait qu'ils obtiennent moins est démontré par le vérificateur général dans son rapport et dans d'autres études. C'est démontré, je pense, par la manière dont le gouvernement a réagi cet été à l'arrivée des clandestins par bateau, et pendant les six dernières années à l'arrivée d'immigrants illégaux par avion et à nos frontières. C'est démontré aussi, je pense, par notre incapacité à remplir les objectifs d'immigration dans les catégories que nous ciblons le plus, soit les immigrants qui vont très rapidement contribuer à notre économie et à notre société. L'échec à cet égard est patent. Il est démontré par les appels que je reçois à mon bureau de député, ceux que reçoivent tous les députés, émanant de gens qui se plaignent que leur famille soit séparée, maintenue séparée par un ministère en déroute, où il faut deux ou trois ans ou plus pour réunir un mari et sa femme ou un parent et ses enfants. Je trouve cela totalement inacceptable. Il y a manifestement un problème.
J'aimerais soumettre très directement à la ministre deux scénarios et lui demander de choisir qui elle préfère accueillir dans notre pays. Étant donné qu'elle est ministre de l'Immigration, il me paraît normal de lui demander comment elle réagit à ce genre de chose.
Le candidat A se nomme José Jimenez. Profession: ancien prostitué. Casier judiciaire: condamné pour au moins trois délits, ce qui le rend inadmissible au Canada et lui a valu d'être expulsé des États-Unis; en outre, il a été condamné pour attaque à main armée au Canada et fait l'objet d'une ordonnance d'expulsion. Situation de santé: il est séropositif. Situation professionnelle: il vit de l'aide sociale. Et sur le plan de sa personnalité générale, je pense pouvoir dire qu'il n'est pas du genre qu'on aime rencontrer dans une allée sombre.
L'autre personne vit dans ma circonscription. C'est réellement douloureux, mais je demande à la ministre de faire son choix. Cette personne, Hans Heiniger, Suisse, est au Canada depuis deux ans. Il est qualifié comme machiniste et possède des compétences additionnelles en soudure à l'arc, en génie mécanique, en ajustage et il sait faire fonctionner une machine à découper par jet d'eau. Cela ne signifie peut-être pas grand-chose pour la ministre, mais importe beaucoup à Swisco Machining, qui l'a embauché au cours des deux dernières années. Cet homme est en bonne santé, il est sain. Situation professionnelle: il travaille chez Swissco Machining à St. Paul et assure depuis deux ans la formation de Canadiens dans diverses spécialités et est même intéressé à investir dans cette entreprise. Je pense pouvoir dire que, sur le plan de sa personnalité, c'est un très brave homme.
J'aimerais demander à la ministre laquelle de ces deux personnes elle choisirait d'admettre dans notre pays.
L'hon. Elinor Caplan: Je ne vais pas accuser mon critique du Parti réformiste de parler pour la galerie.
M. Leon Benoit: Certes pas.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Si vous le faisiez, je n'interviendrais pas.
L'hon. Elinor Caplan: Je vais répondre à sa question sérieusement.
Le candidat A n'est pas admissible au Canada. Même s'il obtient le statut de réfugié, il est néanmoins inadmissible au Canada. Quiconque a un casier judiciaire... Parlons clairement. Les personnes ayant un casier judiciaire, qui ont commis des délits graves à l'étranger, ne sont pas admissibles au Canada. Et un ressortissant étranger qui commet un crime grave au Canada est inadmissible à séjourner au Canada et est expulsé le plus rapidement possible.
• 1640
Je tiens également à dire ceci: je n'ai aucune sympathie pour
ceux qui commettent des crimes à l'étranger et veulent s'installer
chez nous, et je n'ai aucune sympathie pour les ressortissants
étrangers qui commettent des délits graves au Canada. La politique
et la priorité de ce ministère sont d'expulser aussi rapidement que
possible les personnes inadmissibles au Canada pour cause de
criminalité.
M. Leon Benoit: Lequel des deux choisiriez-vous pour l'autorisation de séjour dans notre pays?
L'hon. Elinor Caplan: Voilà la première priorité. Je pense que la réponse est claire et qu'il est évident que la première personne est inadmissible à séjourner au Canada et doit de ce fait être et sera expulsée aussi rapidement que possible.
Pour ce qui est du deuxième cas, nous avons une procédure de sélection des immigrants et j'encourage quiconque veut s'établir au Canada et remplit les critères d'immigration à présenter une demande. Même s'ils ne remplissent pas les critères à 100 p. 100, les agents d'immigration ont une certaine latitude. Donc, s'ils pensent que cette personne peut s'établir et s'intégrer et contribuer à la société canadienne, ils peuvent donner le statut d'immigrant reçu sur la base des renseignements fournis par la personne présentant la demande.
Je répète que si vous avez un casier judiciaire contenant des condamnations pour délits criminels graves, vous êtes inadmissible. Il y a également un critère d'admissibilité médicale, même si vous remplissez tous les autres critères rigoureux.
M. Leon Benoit: Ayant dit tout cela, madame la ministre, je vous informe que Hans Heiniger s'est vu refuser le maintien dans ce pays...
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Benoit...
M. Leon Benoit: ... et José Jimenez est en fait autorisé à séjourner dans ce pays.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Votre intervention est irrecevable. Je sais que vous vous en moquez, mais essayez quand même de respecter quelques règles de bienséance.
M. Leon Benoit: J'aimerais une réponse à cette question.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Elle n'a pas à répondre à cette question. La question est irrecevable, et vous enfreignez le Règlement.
Nous passons à M. McKay.
L'hon. Elinor Caplan: Monsieur le président, avant de quitter ce sujet, je tiens à signaler à ceux qui pourraient lire ce compte rendu, que quiconque se voit refuser un visa a le droit d'interjeter appel auprès de la Cour fédérale. La personne peut s'adresser à la Cour fédérale, où elle possède toutes les garanties de procédure au Canada. De nombreuses personnes s'en prévalent.
J'aimerais ajouter autre chose.
M. Leon Benoit: Nous nous sommes adressés à votre ministère.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Benoit, pour l'amour du ciel!
L'hon. Elinor Caplan: Le critique a fait deux remarques dans son prologue auxquelles j'aimerais réagir pour la gouverne des membres du comité. Il importe que nous ayons tous des données exactes.
En ce qui concerne le regroupement familial, la politique du gouvernement et celle de CIC est de faire en sorte que les familles soient réunies le plus rapidement possible. De toutes les demandes de regroupement familial, 80 p. 100 sont traitées dans un délai de 11 mois. Ce qu'il a dit est faux. Je tiens à lui faire savoir que dans 80 p. 100 des cas de regroupement familial, les demandes sont traitées et les personnes acceptées en l'espace de 11 mois.
Il a fait une autre remarque sur laquelle j'aimerais donner des précisions. Il n'est illégal pour personne de se présenter à nos points d'entrée, par quelque mode de transport que ce soit—bateau, avion, car, taxi, camion ou à pied. Il n'est pas illégal pour ces personnes de demander le statut de réfugié. C'est le droit de tout un chacun, parce que nous sommes signataires de la Convention de Genève.
Le terme «illégal» s'applique aux personnes qui ont quitté leur pays illégalement, et non pas au moyen de leur entrée au Canada. Les personnes ne sont dans l'illégalité au Canada qu'une fois que nous avons établi qu'elles n'ont pas de statut, c'est-à-dire après avoir suivi la procédure de détermination du statut de réfugié ou une fois que nous avons déterminé qu'elles sont inadmissibles au Canada et n'ont pas de statut chez nous.
Je demande aux membres de manier avec beaucoup de précaution les termes «immigrants illégaux». Ils s'appliquent surtout aux personnes qui ont quitté leur pays illégalement. Quiconque arrive chez nous peut légalement demander asile et protection. En tant que signataire de la Convention de Genève, nous leur garantissons une audition impartiale, de façon à déterminer si elles remplissent ou non les critères d'un réfugié au sens de la convention, et si nous devons leur offrir ou non notre protection.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci beaucoup.
Monsieur McKay, avez-vous quelque chose à projeter?
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): J'ai oublié ma boîte à savon, monsieur le président.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): La mienne est là-bas, sous la chaise.
M. John McKay: Je sais que vous la transportez partout avec vous.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): C'est juste.
M. John McKay: Désolé, tout ce que j'ai c'est une question de fond. Désolé.
• 1645
À la page 19 de votre rapport sur le rendement, si je regarde
la tendance sur trois ans des investisseurs immigrants, il semble
que le Québec ait légèrement accru sa part des investisseurs
immigrants pour la porter à environ 2 000. Dans l'intervalle, le
reste du Canada, comme on a coutume de l'appeler, a vu sa part
diminuer d'à peu près autant.
Le paradoxe, c'est que le Québec reçoit à peu près la moitié des investissements, tout en n'accueillant que 15 p. 100 des immigrants et réfugiés environ. À première vue, quelque chose ne colle pas.
L'auteur du rapport écrit que cette diminution peut être attribuée à l'incertitude engendrée par le remaniement du programme d'immigration des investisseurs et à l'instabilité économique. Et évoque encore le ralentissement économique en Asie. Je rétorque, respectueusement, que ce n'est pas vrai. Ce ne peut pas être vrai au vu des chiffres, tout simplement parce que les chiffres du Québec sont restés stables et ont même légèrement augmenté, alors que ceux pour le reste du pays ont clairement baissé. Ce déclin doit être davantage attribuable à l'interaction du programme entre le Québec et le reste du Canada.
J'aimerais savoir comment vous comptez remédier à cette situation, car elle est intenable.
L'hon. Elinor Caplan: La catégorie des immigrants indépendants et gens d'affaires fait l'objet de plusieurs programmes spécifiques. Celui des investisseurs a fait l'objet d'un certain nombre de changements.
Je vais demander à Greg Fyffe, le sous-ministre adjoint chargé des politiques, de faire d'abord l'historique du programme des investisseurs. Certaines modifications y ont été apportées tout récemment. Je sais qu'un certain nombre de préoccupations avaient été exprimées au fil des ans concernant ce programme, et il sera peut-être utile au comité d'avoir une réponse détaillée.
M. Greg Fyffe (sous-ministre adjoint, Développement des politiques et programmes, Citoyenneté et Immigration Canada): Un certain nombre de problèmes ont été isolés assez rapidement dans le programme des investisseurs, notamment la dichotomie entre ses résultats au Québec et dans le reste du Canada. En particulier, il y avait beaucoup de fraudes et de difficultés avec les divers fonds d'investissement. Le ministère a mené des négociations avec les provinces pendant une période prolongée d'environ deux ans, pour tenter d'élaborer un nouveau programme. Le Québec a toujours été satisfait du sien...
M. John McKay: J'imagine.
M. Greg Fyffe: ... ne serait-ce que par ce qu'il attirait une part disproportionnée des fonds.
Un nouveau programme vient d'être mis sur pied, où le gouvernement fédéral reçoit les fonds pour le compte des provinces et les redistribue. Elles les obtiennent pour une période de cinq ans sans intérêts. Il n'y a plus vraiment de fonds à proprement parler. L'argent est versé au gouvernement fédéral pour le compte des provinces.
Le changement vise en particulier à montrer clairement à ceux qui investissent au Québec que leur destination doit être le Québec. Ils doivent posséder un CSQ du Québec. Nous sommes sur le point de lancer la promotion de ce programme. L'activité de promotion interviendra bientôt.
M. John McKay: C'est donc par ce biais que vous attaquez le problème.
Expliquez-moi-le comme si j'étais un investisseur de Hong Kong. Auparavant, mon avocat me conseillait de placer mon argent au Québec parce que c'est là que j'avais le moins de risque et le meilleur rendement. Que va me conseiller dorénavant mon avocat?
M. Greg Fyffe: Tout dépend de ce que l'investisseur veut faire. Nous espérons pouvoir promouvoir le programme pour les autres provinces à titre d'investissement attrayant. Je pense que l'avantage du programme des investisseurs actuels est que l'investisseur ne touchera certes pas d'intérêt, mais n'aura pas non plus à payer d'autres redevances, comme dans le cas du fonds du Québec. Donc, l'investisseur a une bonne chance de conserver la plus grande partie de cet argent, alors qu'il en perd une bonne partie sous forme de redevances, etc., dans le cas du programme du Québec. Je pense que ce sera un assez bon argument de vente pour le programme du restant du pays.
M. John McKay: Donc, le reste du pays ne versera pas d'intérêts, alors que le Québec paie des intérêts.
M. Greg Fyffe: Non, l'argent sera détenu par ces provinces sans rapporter d'intérêts. Donc, l'investisseur récupérera son capital après cinq ans. Il touchera le même montant que ce qu'il a versé.
M. John McKay: Il récupère son capital, mais sans intérêts.
M. Greg Fyffe: C'est juste.
M. John McKay: Comment cela se compare-t-il avec le programme du Québec?
M. Greg Fyffe: Une bonne part du capital est accaparé par des redevances, etc., dans le cas du Québec, si bien qu'il y a toutes les possibilités que l'investisseur récupère moins que sa mise.
M. John McKay: On lui rendra moins que le capital initial.
M. Greg Fyffe: Oui.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.
[Français]
Monsieur Bigras.
M. Bernard Bigras: Mon intervention ne portera pas sur l'Accord Canada-Québec. C'est important de le mentionner en partant. J'aimerais revenir à un cas que la ministre connaît bien. Mon but n'est pas d'attirer son attention sur un dossier spécifique, mais plutôt sur une pratique du ministère. Je prendrai comme exemple celui de ces deux Marocains qui ont demandé d'être acceptés comme immigrants et qui ont été refusés selon un des critères inclus dans la grille d'Immigration Canada. On leur a refusé la possibilité d'aller s'installer à Saint-Boniface, au Manitoba, en s'appuyant sur le critère «habileté», parce qu'ils ne parlaient pas suffisamment l'anglais. C'est ce qu'ont dit les agents d'immigration qui les ont interviewés.
Le 15 novembre dernier, vous vous étiez engagée, d'une part, à évaluer la situation et, d'autre part, à prendre des mesures si le cas s'avérait exact. Je ne vous demande pas aujourd'hui de nous parler du cas en question, mais de nous dire si, selon votre évaluation, il s'agit d'une pratique courante dans votre ministère et si vous avez pris des mesures pour éviter que la situation ne se reproduise.
[Traduction]
L'hon. Elinor Caplan: Merci beaucoup, j'apprécie la question.
Il importe que les membres sachent que l'évaluation des connaissances de l'anglais et du français, comme critère d'admissibilité au Canada, ne fait pas de distinction. C'est la politique du ministère et celle du gouvernement.
Lorsqu'il se présente un cas particulier, les intéressés ont la possibilité de faire appel auprès de la Cour fédérale ou bien, comme dans le cas que vous avez évoqué, de porter leur dossier à mon attention. Je ne parlerai pas ici de cas individuels, pour des raisons de protection de la vie privée, mais à ma connaissance, la pratique du ministère est de traiter les deux langues sur un pied d'égalité dans les évaluations linguistiques.
Souvent, lorsqu'on effectue une analyse subjective, la décision de l'agent d'immigration peut être influencée par la localité du pays où l'intéressé prévoit de s'établir, ainsi que l'éventualité d'une migration secondaire et les intentions du demandeur. Comme je l'ai dit, je ne parlerai pas de ce cas particulier, sinon pour dire que le ministère, tous les fonctionnaires et agents d'immigration, non seulement savent qu'ils doivent traiter l'anglais et le français sur un pied d'égalité aux fins des examens de langue, mais le font dans la pratique.
C'est la pratique. Je ne dis pas qu'elle est parfaite. Lorsqu'il se pose un problème ou une difficulté dans un cas particulier, il y a des recours pour assurer que la politique est bien appliquée.
[Français]
M. Bernard Bigras: J'ai pris connaissance de vos chiffres les plus récents, ceux de 1998, sur les travailleurs qualifiés selon les connaissances linguistiques. J'ai vu que 74,17 p. 100 des immigrants reçus avaient une connaissance de la langue anglaise; que 10,11 p. 100 des immigrants reçus n'avaient aucune connaissance ni de l'anglais ni du français; que 9,8 p. 100 des immigrants reçus avaient une connaissance de l'anglais et du français; et que seulement 5 p. 100 des immigrants reçus au Canada connaissaient seulement le français.
Il y a tout de même des limites. Je sais que l'agent d'immigration a un pouvoir discrétionnaire, mais ne croyez-vous pas, compte tenu d'une telle situation, qu'il serait plus sain et correct que vous émettiez immédiatement une directive à vos fonctionnaires pour vous assurer qu'une situation comme celle-là ne se reproduise plus?
[Traduction]
L'hon. Elinor Caplan: Premièrement, je répète encore une fois que je ne vais pas faire état de cas particuliers. Je suis assurée que tous les fonctionnaires du ministère connaissent la politique, laquelle veut que les deux langues soient évaluées sur un pied d'égalité.
L'objectif du gouvernement est d'admettre des immigrants parlant l'une ou l'autre des deux langues officielles. Nous cherchons à mettre au point des examens normalisés pour l'anglais et le français. Notre but, à l'heure où nous augmentons nos niveaux d'immigration, est d'encourager des personnes qui parlent nos deux langues officielles, ou l'une ou l'autre, soit l'anglais soit le français, à s'établir au Canada s'ils répondent à nos critères.
• 1655
De temps à autre il peut y avoir une affaire anecdotique ou un
cas particulier qui exige un réexamen, simplement parce que nous
vivons dans un monde imparfait. Parfois, pour différentes raisons,
un jugement est prononcé et, lorsqu'on reconsidère les éléments, on
peut être amené à rendre une décision différente. Mais sur le plan
du principe, la politique du ministère et du gouvernement est que
les deux langues sont évaluées à égalité, les exigences
linguistiques en anglais ou en français sont traitées sur un pied
d'égalité. Nul n'est pénalisé pour défaut de parler les deux
langues; nul n'est pénalisé pour ne parler qu'une langue et pas
l'autre.
Je me suis exprimée très clairement. Le gouvernement s'est exprimé très clairement. Je n'hésite pas à réaffirmer cette position chaque fois que l'occasion se présente.
[Français]
M. Bernard Bigras: Je tiens simplement à faire remarquer à la ministre qu'on a accepté au Canada jusqu'à 10 p. 100 d'immigrants qui ne connaissaient ni l'anglais ni le français, alors qu'on n'en a accepté que 5,8 p. 100 qui parlaient seulement le français.
[Traduction]
Le vice-président (M. Steve Mahoney): D'accord, je pense que le message est passé.
L'hon. Elinor Caplan: Mais une remarque s'impose. L'un des résultats d'études que j'ai trouvé intéressant est que la faculté d'intégration dans la société canadienne est meilleure lorsque l'immigrant connaît l'une des deux langues officielles. Lorsque la personne ne parle aucune des langues, il lui faut un peu plus de temps pour s'intégrer pleinement à notre société et elle rencontre davantage de difficultés.
Mais je répète que, s'agissant de nos deux langues officielles et de l'évaluation linguistique aux fins de l'immigration, la connaissance de l'une ou l'autre des langues est acceptable, et les deux sont traitées sur un pied d'égalité.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.
Monsieur Anders.
M. Rob Anders: Merci beaucoup, monsieur le président.
Mon collègue, M. Benoit, a manqué de temps pour poser ses questions, mais j'aimerais revenir sur cet exemple du prostitué séropositif, José Jimenez. Il a été condamné trois fois aux États-Unis, condamné une fois au Canada pour agression et son expulsion a été suspendue. De ce fait, les contribuables canadiens paient une facture de plusieurs centaines de milliers de dollars pour son traitement, et l'aide sociale en plus. Je tenais à apporter cette précision pour le compte rendu.
L'hon. Elinor Caplan: Pour le compte rendu, monsieur le président, précisons tout de même que c'est la Cour fédérale qui a prononcé le sursis de l'ordonnance d'expulsion. Ce n'était pas la politique de ce gouvernement.
M. Rob Anders: Eh bien, on a beau vouloir se défausser de ses responsabilités, il faut tout de même que quelqu'un soit responsable.
Ma question suivante est celle-ci, monsieur le président. Est-ce que la ministre sait que les Canadiens paient pour des audiences de détermination du statut de réfugié pour des personnes actuellement détenues dans des prisons canadiennes?
L'hon. Elinor Caplan: Pourriez-vous préciser? Je sais que des personnes sont détenues à l'heure actuelle, en application de notre politique, parce que nous craignons qu'elles prennent la fuite.
Il y a trois raisons pour placer des personnes en détention, et certaines de ces détenus ont le droit de faire et ont pu faire une demande de reconnaissance du statut de réfugié, laquelle suit son cours. C'est certainement le cas sur la côte Ouest en ce moment, où nous avons détenu environ 490 personnes de cette manière. Nous demandons aux instances compétentes de maintenir cette détention, car nous craignons que si ces personnes sont relâchées, elles ne se présenteront pas aux audiences.
La réponse est donc oui, il y a en ce moment des personnes qui suivent la procédure de détermination du statut de réfugié et qui se trouvent en détention.
M. Rob Anders: En fait, madame la ministre, c'est pire que ce que vous dites. Je ne parle pas de personnes en détention préventive. Je parle de personnes condamnées pour infraction criminelle ici au Canada et qui purgent leur peine dans nos pénitenciers, et qui comparaissent à des audiences de détermination du statut de réfugié.
L'hon. Elinor Caplan: Je répète que quiconque est reconnu comme réfugié au sens de la convention est néanmoins inadmissible au Canada si la personne a commis un crime grave au Canada ou à l'étranger. S'il s'agit d'un ressortissant étranger au Canada et que nous découvrons, dans le courant de notre enquête de sécurité, qu'il a commis un crime grave à l'étranger, la personne est inadmissible. Même si elle jouit du statut de réfugié au sens de la convention au Canada, elle est expulsée, à titre prioritaire, dans les meilleurs délais.
M. Rob Anders: Madame la ministre, vous dites qu'à un moment donné dans le courant du processus ces personnes se verront déboutées. Vous dites cela, mais nous payons pour appliquer toute la procédure à ces personnes dans nos pénitenciers, à l'heure où nous parlons. Vous avez dit que les personnes ayant commis des délits criminels et des infractions doivent être expulsées. Je considère cela comme une contradiction avec ce que vous avez dit tout à l'heure. J'aimerais savoir pourquoi nous continuons à payer pour ces choses.
L'hon. Elinor Caplan: La meilleure réponse que je puisse vous donner est que ce n'est pas seulement une question de garantie de procédure. Si une personne commet un crime au Canada et est condamnée à une peine de prison, elle purge sa peine dans une prison canadienne, ensuite de quoi elle est expulsée aussi rapidement que possible. C'est la politique tant du système judiciaire que... Et dans la plupart des pays, si vous commettez un crime, vous purgez votre peine avant d'être jeté dehors.
M. Rob Anders: J'ai encore une question sur un sujet différent. John Baird, député à l'assemblée législative de l'Ontario, représentant la circonscription de Nepean, a indiqué que la province paie des sommes considérables pour couvrir les coûts afférents à des parrainages défaillants. Pourquoi une province comme l'Ontario devrait-elle payer des millions et des millions de dollars à cause des erreurs du gouvernement fédéral sur le plan des parrainages? Comment le gouvernement fédéral et le ministre peuvent-ils justifier que ces coûts soient infligés aux contribuables de l'Ontario?
L'hon. Elinor Caplan: Premièrement, je tiens à dire que nous prenons très au sérieux les parrainages. Comme je l'ai déjà dit, il y a ceux qui ne regardent que les défaillances et ceux qui regardent les faits. Le fait est qu'à Toronto le taux de réussite du programme de parrainage, c'est-à-dire de parrains qui s'acquittent de leurs obligations, est de 86 p. 100. Et la moyenne à l'échelle du pays est de 90 p. 100 de conformité avec les obligations du parrainage.
Je dirais aussi au député que nous collaborons non seulement avec la province de l'Ontario, mais avec toutes les autres. La Colombie-Britannique en est une, en particulier, où nous avons réussi à améliorer le taux de réussite. Nous partageons nos informations. La province de l'Ontario, à ma connaissance, ne nous a pas à ce stade demandé de prendre de mesures de contrainte particulières. Il y a un projet pilote en cours à Peel, qui produit de très bons résultats. Comme je l'ai dit, je prends très au sérieux les obligations afférentes au parrainage.
Je signale en outre que les paiements de transfert à la province de l'Ontario, en particulier, puisque c'est celle que vous avez citée, couvrent tous les nouveaux immigrants, tous les nouveaux arrivants, y compris les réfugiés reconnus et les demandeurs du statut de réfugié, qui sont englobés dans la formule de financement per capita, dans le paiement de transfert annuel. Cela vaut pour toutes les provinces, et pas seulement l'Ontario.
Ce qui me paraît déjà un très bon taux, 86 p. 100 à Toronto et 90 p. 100 à l'échelle nationale... Comme je l'ai dit à la Chambre en réponse à une question similaire de mon critique, lorsque j'allais à l'école et que j'avais une note de 86 ou 90, j'étais plutôt fière. Ce n'est pas parfait, il y a possibilité d'améliorer encore les choses et nous collaborons volontiers avec les provinces en ce sens. Mais à ma connaissance, nous n'avons eu aucune demande d'amélioration.
• 1705
J'ajoute encore une chose, à savoir que l'Ontario bénéficie
énormément de la richesse et de la prospérité engendrées par
l'immigration dans ce pays. Plus de la moitié des immigrants
s'installent en Ontario. Si vous visitez l'agglomération de
Toronto—je suis de Thornhill—et notre province, vous ne pouvez
manquer de constater l'énorme activité économique, la richesse et
la prospérité apportées par l'immigration.
Je dirais donc au député d'en face qu'il devrait parler à son ami et collègue, le ministre Baird, et lui rappeler que l'Ontario, tous comptes faits, est bénéficiaire net de l'immigration dans ce pays. Lorsqu'il se pose quelque problème, nous sommes ravis de collaborer avec lui pour améliorer le taux de respect des obligations du parrainage. Mais dans l'ensemble, l'Ontario retire des avantages énormes de l'immigration au Canada.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Je peux vous assurer que si j'avais obtenu une note de 86 ou 90, on m'aurait accusé de tricher—et cela aurait probablement été vrai.
Monsieur Bryden.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Merci, monsieur le président.
Madame la ministre, l'une des petites tragédies auxquelles on assiste souvent dans ma circonscription, et je pense dans les bureaux de circonscription de tous les députés, est celle de ces personnes qui font venir des parents avec un visa de séjour, ces parents se voyant refuser l'entrée parce qu'ils ne peuvent prouver l'existence d'un lien suffisant avec leur pays pour ne pas être tentés de rester au Canada.
Les tragédies sont multiples: il y a des familles qui ne peuvent se revoir, il y a des parents âgés, il y a des filles, il y a toutes sortes de gens. Les situations extrêmement tragiques que l'on rencontre, celles des familles qui se heurtent au refus. Le refus, si j'ai bien compris, est motivé par l'arrêt Singh, autrement dit le fait que s'ils décident de rester, il faudra leur accorder les voies de droit régulières, ce qui coûte cher lorsque les cas sont nombreux.
Si la Cour suprême dans l'arrêt Singh avait statué que, lorsqu'une personne séjourne avec un visa temporaire et reste illégalement—c'est-à-dire rompt le contrat entre le ministre et la personne concrétisé par un visa—c'est-à-dire lorsqu'elle rompt consciemment ce contrat, si la Cour suprême avait statué que c'était là un motif d'expulsion sans autre forme de procès, seriez-vous en faveur de cela?
L'hon. Elinor Caplan: C'est évidemment une question hypothétique, et je ne réponds pas aux questions hypothétiques.
La question des visas de séjour revient souvent et, en tant que députée, je reçois moi aussi de nombreuses demandes d'intervention de la part de mes électeurs. Il vous intéressera peut-être de savoir qu'en 1998, nous avons accordé 560 000 visas de séjour. Et vous savez combien nous avons de pays dont les ressortissants n'ont pas besoin de visas de séjour.
M. John Bryden: Madame la ministre...
L'hon. Elinor Caplan: Laissez-moi finir. Je veux ajouter une chose encore. Le Royaume-Uni envisage un système de cautionnement applicable aux visiteurs dont on craint qu'ils ne repartent pas. Il y a donc diverses possibilités. Il y a ce projet pilote au Royaume-Uni que nous suivons de très près pour en voir les effets.
Je comprend et connais tout ce problème des visas de tourisme et de la possibilité pour des membres de la famille de venir participer à des réunions familiales et des fêtes.
Le taux... J'ai demandé à mes fonctionnaires de vous donner les chiffres pays par pays...
M. John Bryden: Madame la ministre, je ne veux pas vous interrompre, mais je ne dispose que d'un temps limité pour poser mes questions.
L'hon. Elinor Caplan: D'accord, désolée.
M. John Bryden: J'aimerais poursuivre. Je ne veux pas vous emmener sur un terrain hypothétique, et je vais donc vous poser une question très précise. Votre ministère s'est-il jamais demandé si l'arrêt Singh devrait être appliqué à des personnes autres que des réfugiés au sens de la convention—ces derniers revendiquant un droit d'entrée—par opposition aux personnes qui n'ont très clairement pas le droit d'accès? Le ministère a-t-il jamais évalué l'arrêt Singh dans ce contexte?
L'hon. Elinor Caplan: L'arrêt Singh est très clair. Il existe depuis dix ans. Il dit que quiconque arrive au Canada peut présenter une demande de reconnaissance du statut de réfugié. Voilà le résultat de l'arrêt Singh et nous avons depuis accumulé dix années de jurisprudence. Voilà la situation telle qu'elle existe, à ma connaissance.
M. John Bryden: C'est précisément à cela que je veux en venir, madame la ministre: le visiteur qui enfreint les conditions de son visa ne se prétend pas réfugié; il commet un acte illégal—il rompt son contrat. À mon avis, l'arrêt Singh ne s'applique pas du tout à un tel cas.
Je vous pose donc la question ultime. Seriez-vous prêt à demander à la Cour suprême de clarifier l'application de l'arrêt Singh aux personnes qui violent délibérément leur visa et ne repartent pas ou aux personnes qui, comme nous l'avons vu précédemment, refusent ou omettent délibérément de divulguer leur identité dans l'intention de tromper le Canada, ou qui arrivent avec des faux papiers dans l'intention de tromper le Canada? Accepteriez-vous un renvoi à la Cour suprême afin de clarifier l'applicabilité de l'arrêt Singh à ces cas?
L'hon. Elinor Caplan: Il faudrait que j'y réfléchisse.
M. John Bryden: Bien, c'est normal. Je vous remercie.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Cela faisait juste cinq minutes, parfait.
Monsieur Price.
M. David Price: Merci, monsieur le président.
Je vais vous poser une question que j'ai déjà posée en comité, et sur laquelle j'aimerais connaître votre sentiment. La loi a été modifiée en 1988 pour y intégrer la notion de tiers pays sûr. À ma connaissance, depuis lors, nous n'avons jamais dressé une liste de ces pays et il ne semble pas y avoir de négociation en ce sens. Pourtant, d'autres pays commencent à se regrouper pour réfléchir à ce genre de situation. Une conférence de pays européens a eu lieu récemment en Finlande. Vous pourriez peut-être nous en dire quelques mots. Prévoyez-vous de maintenir cette disposition dans la nouvelle loi que vous allez déposer? Envisagez-vous de renoncer à ce mécanisme, puisque nous ne l'utilisons pas, ou bien allons-nous l'utiliser? Pourquoi n'avons-nous pas envoyé ne serait-ce qu'un observateur à la conférence en Finlande?
L'hon. Elinor Caplan: En ce qui concerne le tiers pays sûr, je le précise à l'intention des lecteurs du compte rendu, ce mécanisme exigerait que quiconque veut présenter une demande de statut de réfugié le fasse dans le premier pays signataire de la Convention de Genève où ils en ont la possibilité.
Nous avons eu des discussions prolongées à ce sujet avec les États-Unis, mais ces derniers ont décidé de ne pas aller plus loin.
Il y a à peu près autant de personnes qui transitent par le Canada avant de présenter leur demande aux États-Unis qu'il y en a qui transitent par les États-Unis pour faire leur demande au Canada. C'est donc réellement une voie à deux sens. C'est le genre de situation sur lequel nous devons avoir des discussions bilatérales avec les autres pays.
Nous nous sommes également engagés dans la Convention de Genève à ne jamais renvoyer une personne dans un pays où elle serait en danger.
Je pense que dans le cadre de la refonte de la loi, nous allons devoir réfléchir à toute la question du tiers pays sûr. D'après tout ce que j'ai entendu, ce n'est pas une solution si prometteuse, très franchement.
M. David Price: Je pense que beaucoup de gens ne comprennent pas très bien comment cela fonctionne. Pour vous donner un exemple, un ressortissant de l'Inde arrivant au Canada via les États-Unis, si nous avions un accord de tiers pays sûr avec l'Inde et les États-Unis, pourrait être renvoyé directement en Inde. On ne l'expulserait pas vers les États-Unis. Il semble y avoir là un malentendu. C'est pourquoi d'aucuns sont réticents. Il me semble que ce serait une solution intéressante, qui pourrait atténuer le problème chez nous.
L'hon. Elinor Caplan: J'aimerais demander à Greg, qui connaît mieux la théorie qui sous-tend toute la notion de tiers pays sûr, de nous en dire un peu plus à ce sujet.
M. Greg Fyffe: Monsieur le président, si nous avions un accord de tiers pays sûr avec les États-Unis, cela signifierait que quiconque vient d'un autre pays pour demander le statut de réfugié devrait le faire aux États-Unis, plutôt qu'au Canada. Cela n'implique pas, si la personne vient de l'Inde, par exemple, qu'elle serait renvoyée en Inde, car ce serait refouler quelqu'un vers un pays à l'égard duquel la personne demande le statut de réfugié.
Nous avons eu des négociations assez poussées avec les États-Unis, qui ont finalement dit non. Le sujet reviendra peut-être sur la table. Nous n'avons encore rien signé avec les pays européens, bien que nous ayons eu beaucoup de discussions sur divers accords de coopération avec eux.
M. David Price: Mme Nixon a parlé des retards au niveau de la GRC. La ministre dit que la collaboration avec la GRC et le SCRS a été renforcée et que cela réduira censément les délais. Néanmoins, dans le cas d'une demande de visa de gens d'affaires, le traitement du dossier prend souvent de deux à trois ans, et il semble y avoir un problème sur le plan de la coopération entre la GRC et le SCRS.
L'hon. Elinor Caplan: Bien entendu, la GRC et le SCRS relèvent du Solliciteur général. Nous faisons appel au SCRS pour les vérifications de sécurité. La plupart sont effectuées rapidement. J'ai rencontré les représentants du SCRS et ils m'ont expliqué leurs méthodes et procédures, et nous songeons à mettre en place un échange électronique de données avec le SCRS.
Je dois vous dire que le SCRS a le souci de—je pense que la plupart des Canadiens souhaitent que nous procédions aux vérifications voulues pour assurer que les personnes que nous acceptons dans notre pays ne présentent pas un risque pour la sécurité. Parfois, c'est cela qui retarde le traitement des demandes. C'est pourquoi je cite le chiffre de 80 p. 100 de dossiers traités dans les 11 mois dans le cas des demandes de regroupement familial. Mais lorsqu'il s'agit des autres catégories où il existe des risques pour la sécurité... Je pense que tous les Canadiens tiennent à ce que nous fassions preuve de la diligence voulue pour déceler les personnes à risque.
Nous avons clairement annoncé que le Canada ne deviendra pas un havre pour les criminels de guerre. Nous savons que certains sont parvenus à s'établir chez nous. Il s'agit maintenant de les faire repartir le plus vite possible.
Nous voulons donc faire en sorte d'exclure ceux que nous ne sommes pas prêts à accueillir à bras ouverts chez nous.
Je crois savoir que la GRC comparaîtra devant le comité demain et vous pourrez lui poser des questions sur ses relations avec le SCRS et tout autre sujet de sa compétence.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Benoit, vous avez cinq minutes.
M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président.
Madame la ministre, j'aimerais vous parler un peu du système des réfugiés. Le taux d'acceptation officielle des demandes de reconnaissance du statut de réfugié au Canada est de 44 p. 100. Cela, c'est le taux officiel, mais le fait est que 24 000 personnes demandent le statut de réfugié chaque année au Canada, et seulement 5 000 d'entre eux sont officiellement repartis. Les autres, devons-nous conclure, sont toujours au Canada. Du moins, nul au ministère ou ailleurs n'a connaissance qu'ils ont quitté le pays. Cela donne un taux d'acceptation réel de 79 p. 100.
Pour dire les choses autrement, afin que ce soit parfaitement clair, sur les 24 000 demandes, 11 000 sont agréées—en gros—et 13 000 sont rejetées, et pourtant seuls 5 000 de ces demandeurs sont assurément repartis, comme nous l'ont dit vos fonctionnaires la semaine dernière.
Vous avez dit qu'une note de 86 p. 100 pour l'administration du ministère vous satisfait pleinement. Mais vous n'avez qu'une note de 40 p. 100 s'agissant d'expulser les demandeurs déboutés—ceux qui n'ont pas été acceptés par votre système. Moins de 40 p. 100 d'entre eux sont assurément repartis.
J'aimerais donc avoir votre réaction à cela, madame la ministre, et que vous nous disiez si à vos yeux c'est là un rendement satisfaisant pour votre ministère.
L'hon. Elinor Caplan: Je vous réponds que, sur le plan du renvoi, priorité est donnée aux criminels. Nous consacrons notre énergie prioritairement aux criminels, puis aux réfugiés déboutés.
Les chiffres sont en hausse. Environ 62 p. 100 des expulsions en 1998 concernaient des demandeurs du statut de réfugié déboutés.
Toutefois, lorsque vous parlez du taux d'acceptation, vous devez tenir compte d'un autre facteur. Certes, au niveau de la CISR, il est vrai qu'environ 44 p. 100 des demandeurs du statut de réfugié au Canada sont acceptés. Mais après cette détermination, comme beaucoup d'entre vous le savent, il y a la catégorie des demandeurs déboutés qui peuvent prouver qu'ils courent un danger et demander à rester au Canada pour cette raison. En outre, il y a ceux qui sont autorisés à rester pour des raisons humanitaires. Ensuite, parce que nous sommes signataires de la Convention de Genève, nous n'expulsons pas vers des pays où les personnes seront en danger. Ainsi, certaines personnes sont autorisées à rester bien que faisant l'objet d'une ordonnance d'expulsion parce que nous ne refoulons pas...
M. Leon Benoit: Mais le fait est, madame la ministre, que cela ne change pas du tout les chiffres, car ils sont à peu près inchangés d'une année sur l'autre. Le fait est que nous avons un taux réel d'acceptation au Canada de 79 p. 100, alors que dans d'autres pays il n'est qu'une toute petite fraction de cela. Madame la ministre, 13 000 personnes ont vu leur demande rejetée l'an dernier et seules 5 000 sont reparties. Cela fait moins de 40 p. 100, et ne représente même pas une note de passage, j'en suis sûr, même selon vos critères, madame la ministre.
L'hon. Elinor Caplan: J'aimerais signaler à l'honorable député qu'en fait le nombre des renvois a augmenté pour atteindre l'an dernier le chiffre de 8 450. Nous progressons donc. Nous ne sommes pas parfaits...
M. Leon Benoit: Seuls 5 000 d'entre eux étaient des réfugiés déboutés.
L'hon. Elinor Caplan: J'ai dit que sur le nombre total des personnes renvoyées du Canada, 8 450 étaient des criminels. Les criminels sont notre première priorité, et je pense que le député admettra qu'elle est judicieuse. Ensuite viennent les demandeurs du statut de réfugié déboutés. Je peux lui dire également que certains d'entre eux, qui ont renoncé à leur demande, sont passés dans la clandestinité et ont sans doute quitté le Canada.
M. Leon Benoit: Vous le croyez, mais vous n'en savez rien. Madame la ministre, les chiffres que j'ai cités sont bien exacts.
Je veux vous poser une question directe. Vous avez dit que votre ministère fonctionne très bien, à votre avis. Mais c'est un problème très grave si sur les 13 000 réfugiés déboutés, vous avez perdu la trace de 8 000. Ne pensez-vous pas, madame la ministre, que cela représente un grave problème dont votre ministère est responsable?
L'hon. Elinor Caplan: J'ai dit à l'honorable député que les criminels sont notre première priorité en matière de renvoi—et elle me paraît judicieuse, la deuxième étant les demandeurs du statut de réfugiés déboutés.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.
Monsieur Telegdi.
M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
L'une des choses que négligeait la question précédente est le fait avéré qu'un certain nombre de personnes passent par notre pays en transit et aboutissent à New York. C'était notamment le cas des Chinois de cet été et c'est pourquoi nous les gardons en détention. M. Benoit sait que tel est le cas, il l'a assez dit souvent lui-même. Il y a clairement des gens qui renoncent à leur demande, pas seulement ceux que nous expulsons. Vous devez donc inclure cette statistique dans votre dissertation.
L'hon. Elinor Caplan: Dans quelle catégorie les place-t-on?
M. Leon Benoit: Si vous les gardez en détention, vous savez où ils sont.
M. Andrew Telegdi: Madame la ministre, nous abordons le nouveau millénaire. Depuis six années de suite, le Canada a été jugé le meilleur pays du monde où vivre et cette réussite est certainement le fait des habitants de notre pays. Ce pays a été édifié par les immigrants et, j'ose le dire, nous nous sommes pas mal débrouillés du tout. Aucun système construit par l'homme—ou la femme—n'est parfait, mais je pense que nous avons des raisons de nous vanter.
Je suis heureux que la dynamique soit ce qu'elle est aujourd'hui, car elle fait apparaître que d'aucuns ici voudraient disséminer des mensonges et occulter une partie de notre histoire. Je pense que les Canadiens, dans leur majorité, connaissent bien toute la réalité, mais je pense qu'il serait utile de leur rappeler la réalité de qui nous sommes. J'espère que vous envisagerez, dans vos délibérations, de réserver une partie de votre budget à la dissémination de ce message. Nous sommes pour l'essentiel une nation accueillante, et nous n'aimons pas que l'on dissémine des contre-vérités sur certains groupes particuliers. Cela fait du tort à ces groupes et ne fait rien pour promouvoir le civisme dans notre pays.
• 1725
Il me suffit de regarder la Chambre des communes depuis mon
arrivée. Nous ne sommes que 300 députés, mais nombre d'entre nous
ont été accusés et reconnus coupables de délit criminel. La
perfection n'existe pas, même chez les députés.
La question est donc de savoir si votre ministère pourrait oeuvrer pour disséminer notre histoire? Je pense que les gens ont le droit d'être fiers de leur patrimoine et de la façon dont ce pays a été construit.
L'hon. Elinor Caplan: Je ne pense pas que la majorité des gens sachent qu'à la Chambre des communes siègent aujourd'hui au moins 45 députés qui ne sont pas nés au Canada.
L'une des choses qui me frappe lorsque les gens me racontent leur histoire personnelle, et que je ne cesse de rappeler autour de moi, est qu'à l'exception des Autochtones, tout le monde au Canada a un immigrant ou un réfugié quelque part dans son arbre généalogique. La seule chose qui change, c'est l'ancienneté.
Il y a tant de récits édifiants à faire sur les immigrants et réfugiés qui se sont établis chez nous et ont connu une réussite éclatante et ont contribué à édifier notre pays. Je reconnais qu'il faudrait diffuser ce message de manière beaucoup plus proactive et mieux renseigner le public sur l'importance de l'immigration.
Je plaisante souvent en disant que ma génération ne fait plus d'enfants. Notre taux de naissance est en baisse et ne suffit plus au renouvellement de notre population. Nous sommes un grand pays. Notre population vieillit et si nous voulons rester prospères et assurer notre croissance économique, nous avons besoin d'attirer ici des immigrants possédant les compétences et les talents dont nous avons besoin pour que la prochaine génération jouisse de la même prospérité que la nôtre.
Lorsque j'ai rencontré quelques agents d'immigration à l'aéroport Pearson et leur ai demandé quelle serait leur première priorité, ils m'ont répondu la sensibilisation du public: dites aux gens ce que nous faisons, disséminez notre histoire.
J'ai souvent dit que je suis adepte de la théorie de l'amélioration continue. Nous ne vivons pas dans un monde libre d'erreurs. Nous vivons dans un monde où l'attention se porte sur ce qui marche moins bien. J'aimerais partir de ce qui marche moins bien afin d'en tirer les leçons et de nous améliorer et réellement faire une différence pour l'avenir.
J'aimerais vous faire part de quelques statistiques avant de vous quitter, si je puis disposer de quelques minutes. En 1998, 174 000 immigrants ont reçu le statut de résident permanent au Canada. Nous prévoyons que ce chiffre sera supérieur à 180 000 en 1999. On n'entend jamais la plupart de ces récits. Imaginez combien de temps nous devrions siéger ici pour projeter sur l'écran chacune de ces histoires personnelles positives. Imaginez combien de temps le comité devrait siéger ici pour écouter chacun de ces 180 000 récits.
Sur les 174 000, plus de 75 000 étaient des immigrants économiques qui sont venus construire notre pays. Je vous ai parlé des 560 000 visas de séjour. Nous avons reçu 91 000 étudiants qui sont venus étudier chez nous, pour s'améliorer, pour améliorer notre pays et notre réputation internationale, et qui sont venus avec leurs dollars, car ils paient pour cette éducation. Cela représente un énorme avantage économique.
En outre, nous avons émis 173 000 permis de travail temporaires à des personnes qui viennent travailler ici et qui offrent au Canada leurs compétences et leurs talents sur une base temporaire. Après avoir séjourné chez nous et pu constater notre qualité de vie—et vous avez raison, pendant six années de suite les Nations Unies nous ont classé au premier rang des pays du monde, ce qui n'est pas négligeable—nombre de ces travailleurs temporaires décident de rester au Canada.
Je pense que l'un des défis pour votre comité, au moment de cette refonte de la loi, consiste à nous aider à passer en revue chacun de nos programmes et à déterminer comment nous pouvons le mieux l'adapter aux besoins de ceux qui veulent s'établir chez nous et dont nous avons besoin pour assurer notre avenir au XXIe siècle.
Voilà certaines des bonnes nouvelles. Nous avons une belle histoire à raconter.
L'opposition sait très bien mettre en exergue les quelques défaillances que nous avons, les domaines où nous pouvons nous améliorer, et c'est important. Je ne dis pas le contraire. Nous devons identifier les domaines où nous pouvons nous améliorer. Je la remercie de le faire, car cela nous pousse à rester vigilants. J'aimerais que ses députés posent ces questions de façon un peu plus bienveillante, mais tant pis.
M. Leon Benoit: Vous m'avez mal compris.
Des voix: Oh, oh.
L'hon. Elinor Caplan: Mais, comme je l'ai dit, il y a une histoire très importante à raconter et elle est positive. Le message important est que nous sommes une terre d'immigrants et de refuge. Nous ne devons pas oublier qui nous sommes et d'où nous sommes venus, pour éclairer notre avenir.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Madame la ministre, je tiens à vous remercier d'être venue. Je veux également dire aux députés de l'opposition, en particulier, que j'ai travaillé avec vous pendant cinq ans dans l'opposition, et je sais à quel point vous pouvez être combative.
M. Leon Benoit: Je n'en doute pas.
Des voix: Oh, oh.
Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci d'être venue.
Je serais personnellement intéressé à connaître les résultats de votre réflexion sur la question posée par M. Bryden au sujet d'un réexamen de l'arrêt Singh, si vous voulez bien nous en faire part à un moment donné. Cet arrêt remonte à dix ans. J'en ai moi-même fait état dans mes questions. Je pense que les membres de ce comité, quel que soit leur parti, devraient réfléchir à cela. Je ne connais pas la solution non plus, mais je pense qu'il faudrait y réfléchir.
Je veux vous remercier d'être venue et de votre franchise habituelle, ainsi que de la sincérité avec laquelle vous avez répondu aux questions. Je remercie également vos collaborateurs.
La séance est levée. La prochaine réunion aura lieu demain à 9 heures, salle 308 de l'édifice de l'Est.