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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 2 mai 2000

• 0905

[Traduction]

Le président (M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.)): Bonjour, chers collègues. Comme nous sommes déjà un peu en retard, nous allons commencer.

Conformément à un ordre de renvoi en date du 31 mars 2000, nous examinons le projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada, la Loi sur la concurrence, la Loi sur le Tribunal de la concurrence et la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada et modifiant une autre loi en conséquence.

Nous allons avoir une journée très chargée. Nous siégerons aujourd'hui de 9 heures du matin à 9 heures du soir. Nous allons donc essayer de nous contenter de tours de cinq minutes afin de pouvoir poser le maximum de questions pendant le peu de temps dont dispose chaque témoin.

Notre premier témoin de ce matin est Joe Randell, président et chef de la direction d'Air Nova, Air Ontario et Air BC.

C'est un plaisir que de vous accueillir de nouveau au Comité permanent des transports, monsieur Randell. Nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir. Lorsque vous serez prêt, veuillez nous présenter un exposé d'une durée de cinq à dix minutes afin que nous puissions vous poser des questions.

M. Joe Randell (président et chef de la direction, Air Nova, Air Ontario, Air BC): Merci, monsieur Keyes.

Bonjour.

Je suis accompagné aujourd'hui de Laurel Clark, vice-président d'Air Nova. Laurel a travaillé en collaboration étroite avec moi à l'intégration des transporteurs régionaux d'Air Canada.

Monsieur le président, honorables membres,

[Français]

monsieur le président, honorables membres du comité, j'apprécie cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.

[Traduction]

Je vous remercie de me permettre de comparaître aujourd'hui devant le comité pour faire le point sur les transporteurs régionaux d'Air Canada.

Il y a eu plusieurs développements depuis ma réunion avec vous en novembre. Le 19 janvier, Air Canada a annoncé qu'elle allait procéder au regroupement de ses transporteurs régionaux: AirBC, Air Ontario et Air Nova. J'ai alors été nommé président des Transporteurs régionaux d'Air Canada. Il a aussi été annoncé que la société Lignes aériennes Canadien Régional, ou LACR, allait être intégrée au nouveau transporteur régional issu du regroupement si sa mise en vente, conformément aux promesses faites au Bureau de la concurrence, était infructueuse. Si LACR continue de nous appartenir, il ne serait pas logique de l'exploiter séparément.

La société issue du regroupement, qui comprendra ou non LACR, se concentrera sur les vols sur courtes distances et exploitera une flotte moderne d'avions à turbo propulseurs et de petits jets. Elle sera décentralisée, établie près de sa clientèle, et très présente dans toutes les régions du Canada. Elle aura notamment une base régionale au Canada atlantique, au Québec, en Ontario et dans l'Ouest. Nous avions annoncé plus tôt que le siège social se trouverait à Toronto, mais nous sommes en train de terminer une analyse approfondie du meilleur emplacement pour le siège social. Il n'est pas prévu de modifier les bases d'affectation. Les employés ont reçu notre engagement de n'effectuer ni mise à pied ni transfert imposé pendant deux ans.

Le regroupement prendra plusieurs mois et, pour le moment, nous allons continuer de fonctionner séparément. Nous avons délibérément attendu, avant d'adopter notre structure définitive, de mieux connaître l'avenir de LACR. Nous n'avons pas voulu exclure les employés de LACR au cas où la société ne serait pas vendue. Nous avons élaboré des plans dont la mise en oeuvre a toutefois été retardée parce que la période d'évaluation a été plus longue que prévue.

Le regroupement nous donnera une souplesse d'exploitation accrue pour mieux répondre aux besoins des collectivités que nous desservons. Ces avantages ne seront pas pleinement réalisés tant que l'intégration de l'exploitation et de l'organisation ne sera pas terminée, mais le nouvel horaire d'été laisse certes entrevoir la capacité de la société de focaliser sur les vols sur courtes distances dont ses clients ont besoin.

L'horaire des transporteurs régionaux fait partie intégrante du réseau global; il établit des vols d'apport tout en répondant aux besoins locaux des clients. En mettant notre flotte en commun, nous avons réussi à trouver l'appareil qui correspond parfaitement aux besoins du marché. Nous avons dégagé des appareils utilisés dans l'Ouest, où il y avait énormément de double emploi, pour les réaffecter dans l'Est où la croissance du marché et le départ soudain d'InterCanadien ont amoindri la capacité.

• 0910

Nous avons amélioré le service dans plusieurs marchés et lancé de nouvelles liaisons dans chaque région du pays, y compris de nouveaux vols transfrontières. En voici quelques-uns: Halifax—Stephenville; Goose Bay-Stephenville, Montréal direct jusqu'à St. John's, Charlottetown, Windsor et London; Ottawa—Windsor; Toronto (Pearson)-Detroit, Dayton, Albany, Grand Rapids, Louisville, Akron, Fort Wayne; et dans l'Ouest, Vancouver—Spokane.

Les passagers en correspondance bénéficieront du rôle accru de Toronto comme carrefour pour le Nord-Est, de Vancouver comme carrefour des vols transpacifiques; et de Montréal comme nouvelle plaque tournante. Le regroupement de la plupart des vols régionaux en un même poste de stationnement à Montréal a été avantageux.

Nous avons tenu notre engagement envers les collectivités. Le projet d'offrir un service plus économique aux marchés de Penticton et de Fort Nelson, ainsi que de Sarnia, en Ontario, avec un appareil Beech, a été modifié pour que les vols Dash 8 soient maintenus. Les marchés abandonnés par InterCanadien seront desservis dorénavant par un transporteur régional d'Air Canada ou par un transporteur qui partage nos dénominations. Air Creebec, un partenaire intérieur, a commencé à desservir La Grande et Kuujjuarapik, au Québec, en décembre, et Air Nova a inauguré des vols Dash 8 à Stephenville, à Terre-Neuve, en avril.

Nous avons été heureux de coopérer avec M. Hubbard pour trouver une solution au problème des localités du nord du Nouveau- Brunswick. Notre nouveau partenaire qui partage les dénominations, Air Labrador, inaugurera ces vols pour Charlo et Miramichi le 22 mai.

Les localités et les clients se méfient de plus en plus du changement dans l'industrie de l'aviation. Nous voulons rassurer les collectivités que nous desservons: nous allons continuer de répondre à leurs besoins.

Mais le faire tout en respectant les conventions collectives et les promesses que nous avons faites à nos employés, et en conservant comme point de mire la sécurité et l'intégrité opérationnelle de quatre lignes aériennes distinctes tient de l'exploit. Par exemple, le redéploiement dans l'Est des avions de l'Ouest pourrait sembler fort simple, mais il a fallu nous plier à de nombreuses contraintes, notamment: des problèmes de réglementation nous empêchent de former l'équipage d'un avion avec des employés de différents transporteurs et les appareils, même identiques, doivent rester assignés chacun à un transporteur en particulier. Les promesses de n'imposer aucun transfert et de respecter les conventions collectives empêchent l'établissement de bases temporaires. Les syndicats, les conventions collectives et les règles de travail varient d'un transporteur régional à l'autre. La société LACR est en train d'être évaluée en vue de sa vente, et elle ne doit pas perdre de valeur. Elle doit demeurer indépendante tant que son propriétaire ultime ne sera pas déterminé. Il y a des problèmes de langue pour les équipages de l'Ouest affectés à des vols dans les marchés de l'Est.

Nous avons dû avoir recours à l'affrètement de durée prolongée. C'est notre seul moyen de répondre aux besoins à court terme, mais il nous coûte cher et il nous complique énormément l'exploitation. Huit Dash 8 dont cinq de LACR et trois d'AirBC ont été déployés dans l'est du Canada; le personnel naviguant technique et le personnel de maintenance des lignes aériennes propriétaires se déplacent dans tout le pays. Le personnel naviguant bilingue, basé à Halifax, a été réaffecté aux vols au Québec. Chaque semaine, il y a 1 367 membres d'équipage de conduite qui partent de Vancouver pour aller travailler à St. John's. Ces girations compliquées à court et à moyen terme pour répondre aux besoins des clients ont décuplé nos coûts et accru le stress des employés. Ces coûts supplémentaires n'ont pas été répercutés sur notre clientèle.

Nous faisons de notre mieux pour répondre aux besoins des collectivités et des clients le plus rapidement possible. Bien entendu, il nous sera impossible de satisfaire les souhaits de toutes les localités, mais nous sommes à l'écoute et nous avons entrepris un dialogue constructif à l'échelle du pays.

Malgré l'ampleur de la tâche et la vitesse à laquelle nous l'avons exécutée, notre taux de ponctualité a atteint des sommets en Ontario et dans l'Ouest.

Malheureusement, il n'a pas été aussi bon au Québec et au Canada atlantique. Lorsque InterCanadien a abandonné le marché avant Noël, nous avons hâtivement établi un horaire avec les ressources dont nous disposions. Ça n'a pas été facile, mais nous avons fait de notre mieux dans les circonstances. Maintenant que nous avons eu le temps de planifier un peu, nous avons pris plusieurs initiatives, dont l'adoption d'un nouvel horaire, dont l'effet bénéfique se fait déjà sentir.

Je voudrais aborder avec vous deux questions auxquelles, je l'espère, le comité va réfléchir attentivement.

• 0915

Nous respectons assurément l'esprit et l'objet de la Loi sur les langues officielles et, à Air Nova, le bilinguisme est un critère d'embauche des agents de bord et des pilotes de Beech 1900. Dans l'ouest du Canada, vu la demande inexistante et le nombre infime de candidats bilingues, nos ressources humaines sont surtout unilingues. Nous convenons que les clients doivent être servis dans la langue de leur choix. Toutefois, nous ne croyons pas qu'AirBC et Air Ontario arriveront à se conformer aux exigences de la loi dans les délais proposés sans perturber grandement les employés et les opérations. Comme il n'y a qu'un agent de bord sur certains des vols et que moins de 8 p. 100 des agents de bord de ces compagnies aériennes sont bilingues, nous avons tout un défi à relever. Heureusement, nous recevons très peu de plaintes d'ordre linguistique dans ces marchés.

Nous demandons une prorogation d'un an du délai qui nous a été imparti pour que notre personnel d'Air Ontario et d'Air BC se conforme aux exigences. Nous demandons la même chose pour LACR si elle n'est pas vendue et qu'elle est intégrée aux transporteurs d'Air Canada. Nous avons déjà adapté nos conditions d'embauche en conséquence et nous sommes en train d'établir un plan de formation.

L'autre question qui nous inquiète sérieusement, c'est l'évaluation et la vente de LACR. Nous sommes dans l'impossibilité d'arrêter définitivement les décisions importantes entourant le regroupement, par exemple sur la structure organisationnelle, les effectifs nécessaires, les emplacements ou la flotte, tant que nous ne connaîtrons pas le résultat et les conditions de la vente. Le stress et la tension dus à l'incertitude qui se prolonge se manifestent par la difficulté de garder notre personnel et par un moral à la baisse. Nos employés au Québec travaillent dans un climat d'incertitude depuis juin 1998. Plus d'une année a passé pour les employés d'Air Nova, d'Air BC et d'Air Ontario depuis l'annonce de l'examen d'un regroupement possible. Et le personnel de LACR est de plus en plus démoralisé et frustré de voir la vente de l'entreprise traîner en longueur.

Nous avons hâte de concrétiser notre vision d'un nouveau transporteur régional. Nos employés sont des professionnels extrêmement compétents, déterminés à édifier les meilleures lignes aériennes régionales au monde. Notre réussite sera fonction de notre capacité de répondre à la demande des Canadiens pour des vols de courte distance tout en maintenant notre focalisation sur les collectivités et les régions, laquelle a contribué à notre réussite. Nous faisons aussi vite que possible, en tenant compte des contraintes, pour prendre des décisions provisoires. Nous vous demandons patience et coopération tandis que nous agissons pour actualiser nos véritables possibilités.

Je vous remercie de votre attention. Je répondrai avec plaisir à vos questions.

[Français]

Merci. Il me fera plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Randell.

Bienvenue au comité, madame Clark.

Nous passons maintenant aux questions. Val Meredith, vous avez la parole.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Le président: Nous ferons des tours de cinq minutes, si vous le voulez bien.

Mme Val Meredith: Merci, monsieur Randell. Étant donné que je n'ai que cinq minutes, j'irai droit au but.

Certaines de vos remarques m'inquiètent un peu, du fait que je viens de l'ouest, et plus précisément de la Colombie-Britannique. Vous avez fait dans votre distribution régionale la même erreur que d'autres ont faite avant vous. Il existe désormais cinq régions au Canada et non quatre. La Colombie-Britannique est reconnue comme région à part entière.

Vous avez dit à plusieurs reprises lors de votre exposé que vous avez réaffecté à l'est du Canada des ressources dont vous disposiez dans l'ouest. Nous n'avons jamais eu l'impression de recevoir un excellent service en Colombie-Britannique. D'après ce qu'on me dit, le service aérien au nord de la Colombie-Britannique est pire aujourd'hui que jamais. Le service entre Fort St. John et Prince George a été supprimé. Pour aller de Fort St. John à Prince George, il faut prendre l'avion à Fort St. John jusqu'à Vancouver et ensuite repartir vers le nord pour Prince George. Apparemment, cela s'explique par l'interruption des relations que vous aviez avec Central Mountain Air, de sorte que les passagers désireux de relier fort St. John à Prince George doivent aller jusqu'à Vancouver s'ils veulent se rendre à quelques milles au sud. Ce n'est pas ce que j'appelle une amélioration du service. Je ne vois pas ce qui vous permet de dire que votre service, surtout en Colombie-Britannique, répond à la demande.

Mon autre préoccupation concerne la question linguistique que vous avez soulevée. Quelle est l'exigence, selon vous, relative aux services bilingues dans l'ouest du Canada où, comme vous l'avez dit dans votre allocution, cela ne pose pas de problème? Est-ce à dire que les Canadiens de l'Ouest ne seront plus recrutés par vos compagnies régionales—car, pour être honnête, il n'y a pas le même nombre de candidats bilingues dans cette région que dans le reste du pays?

• 0920

Il y a donc deux choses: Allez-vous améliorer le service que vous offrez dans l'ouest du Canada, et surtout en Colombie- Britannique? Et allez-vous admettre que le besoin de services bilingues n'est pas le même dans toutes les régions du pays et que les Canadiens de l'ouest n'auront plus les mêmes possibilités d'emploi au sein de votre compagnie aérienne?

M. Joe Randell: Je vais répondre à vos questions une après l'autre.

Tout d'abord, pour ce qui est du service dans l'Ouest canadien, certaines des pertes les plus importantes subies avant le regroupement des compagnies aériennes venaient en fait de cette région du pays. AirBC perdait des millions de dollars par an, et le dédoublement de réseaux qui existait dans l'ouest ne pouvait pas être maintenu étant donné les coûts que cela représentait et les pertes subies par la compagnie. C'est l'un des facteurs qui a contribué aux problèmes que connaissait la compagnie aérienne avant la restructuration.

Quant aux niveaux de service, nous avons apporté des changements à certains marchés et ajouté des vols vers les destinations où nous estimions que le service ne répondait pas suffisamment à la demande. Il y en a quelques exemples, et de nouveaux vols vont être offerts à compter de juin. Nous n'avons pas mis fin à nos relations avec Central Mountain, car nous avons toujours un contrat avec cette compagnie.

Je ne connais pas bien les conditions du marché dont vous avez parlé, soit la ligne entre Fort St. John et Prince George, mais je crois savoir que les vols avaient été regroupés en vue de desservir un grand centre et que, à la suite des changements survenus, ils sont de nouveaux séparés. La demande dans ce marché est en fait très faible, d'après ce que je sais, mais je vais vérifier en personne dès demain pour voir quelle est la situation dans ce marché en particulier. C'est la première fois que l'on me signale ce problème.

Nous tenons absolument à porter attention à ce genre de problèmes liés au service et à y remédier en modifiant au besoin nos horaires. Il va sans dire que nous ne considérons absolument pas l'Ouest comme une région moins importante que les autres. C'est un marché très important pour nous et nous voulons offrir le niveau de service qui répond à la demande existant dans ces marchés, en respectant ainsi les engagements qui ont été pris dans le cadre du processus de restructuration.

Pour ce qui est des questions d'ordre linguistique, nous tenons absolument à engager des employés de toutes les régions du pays. Toutefois, il existe des exigences concernant la langue de service auxquelles nous devons nous conformer, notamment du point de vue de la clientèle. En ce qui a trait au service que nous offrons au Québec et dans la région de l'Atlantique, ces normes ont été très bien définies et nous les respectons. Nous devons maintenant prendre connaissance des modalités d'application de la Loi sur les langues officielles et de ses répercussions sur les autres régions du pays. Comme je l'ai déjà dit, nous avons d'importants problèmes de formation au sein de nos effectifs actuels. Nous nous sommes engagés à procéder à cette formation, mais certains de ces employés ne connaissent absolument rien à la deuxième langue officielle, et il nous faudra donc investir lourdement dans cette initiative.

Pour ce qui est de l'embauche de nouveaux employés, nous ferons tout notre possible pour encourager les candidats des diverses régions à avoir une bonne connaissance des deux langues, car il ne serait pas logique pour nous d'engager des gens dans une région du pays et de s'attendre à ce que les gens poursuivent une carrière heureuse en étant tenus de déménager à des milliers de milles de leurs familles.

Nous évoluerons donc dans ce cadre, et nous demandons un peu plus de temps pour être en mesure de nous conformer à la loi.

Le président: Joe Fontana, vous avez la parole.

M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Soyez le bienvenu, Joe, à notre comité, et merci pour la contribution que vous avez apportée à votre dernière comparution, au moment où nous procédions à notre restructuration, ou quand le comité procédait à ses délibérations. Je pense que cela a été très utile.

Je n'ai que cinq minutes, et j'aimerais vous poser différentes questions.

D'abord, pour ce qui est d'un bon siège social, j'espère que vous allez continuer de penser que London est un bon endroit où avoir un siège social, étant donné toutes ses bonnes installations.

Le président: Joe, vous devrez vous en tenir à cinq minutes.

M. Joe Fontana: Étant donné sa position centrale, je pense que cela pourrait être très avantageux étant donné les fuseaux horaires.

Joe, je devrai m'entretenir avec M. Milton de la plupart de mes préoccupations. J'ai toujours été impressionné de voir à quel point les transporteurs régionaux étaient autonomes, comment ils étaient en mesure de répondre aux exigences des clients, dont même Bell a parlé, parce qu'ils sont autonomes: AirBC, Air Nova, Air Ontario, Air Alliance. Et je dirais que de les fusionner tous en une même entité pour maximiser les économies serait tout à fait fantastique. Mais si je comprends bien, ce n'est pas vous qui établissez les horaires, ce n'est pas vous qui fixez les prix non plus; ce n'est pas vous qui établissez les ententes de partage des coûts. Tout cela a été fait par Air Canada pour vous.

• 0925

Je crois aussi savoir qu'en tant qu'entités les transporteurs régionaux d'Air Canada ne relèvent même pas directement du président. Ils relèvent d'un vice-président d'Air Canada chargé de la division commerciale, ce qui à mon sens ne vous donne pas le statut dont vous auriez besoin, surtout si vous devez tenir compte des préoccupations des clients de la plupart des régions du pays, même en Ontario.

Selon quel modèle Air Canada fonctionnera-t-elle eu égard à ces transporteurs régionaux? Je me demande si vous pourriez nous en faire part. Il y a des questions concernant les employés, les pilotes, les aéronefs.

La dernière fois que vous avez comparu, je sais que vous avez parlé du service aux clients. Eh bien, cela veut dire qu'Air Canada vous autorise à avoir des RJ, par exemple. J'aimerais bien comprendre. M. Milton comparaîtra jeudi, et j'aurai bien des questions à lui poser au sujet des rapports qu'entretient Air Canada avec ses transporteurs régionaux. Oublions LACR; il est censé la vendre. Peut-être qu'il tarde à le faire parce qu'il ne veut pas le vendre. Nous le comprenons bien. Mais j'aimerais que vous me disiez si à votre avis, vous allez profiter de tous les avantages commerciaux liés à l'exploitation des transporteurs régionaux d'Air Canada afin de pouvoir bien servir les clients, si c'est d'eux que nous sommes vraiment censés nous préoccuper?

M. Joe Randell: Nous travaillons effectivement en très étroite collaboration avec Air Canada. Nous faisons partie d'Air Canada à titre de filiale détenue en toute propriété par Air Canada. Nous sommes dans un processus de restructuration à mesure qu'Air Canada modifie ses rapports avec la ligne aérienne Canadien.

Pour ce qui est de la question de la structure d'Air Canada, il vaudrait sans doute mieux la poser à M. Milton. Toutefois, j'aimerais parler précisément des questions d'horaires et de tarifs. Nous allons travailler de plus en plus étroitement avec Air Canada et dans le cadre de ce processus nous offrons un apport important, la connaissance du marché et un suivi. Nous travaillons de pair avec Air Canada pour ce qui est de la conception des horaires.

Nous faisons des suggestions en ce qui concerne les tarifs. L'un des objectifs visés et l'un des éléments de la structure que nous envisageons pour le transporteur régional résultant de la fusion consisteront à assurer une importante présence régionale dans chacune des régions afin que nous obtenions cette connaissance et la synergie commerciale complète qui nous est absolument nécessaire pour réussir dans ces régions et mener à bien toutes ces opérations.

Quant à savoir comment tout cela s'intégrera, nous allons évidemment travailler avec Air Canada pour maximiser le réseau et tenir compte de toutes les parties prenantes. Il faudra donc assurer un équilibre eu égard au produit fini.

Le président: Merci, Joe.

Tony Guimond, vous avez la parole.

Une voix: Tony Guimond?

Des voix: Oh, oh!

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur Randell, dès le départ, je veux vous dire que je considère que votre décision de transférer les opérations d'entretien d'Air Alliance de Québec vers Halifax est une mauvaise décision et que les usagers, dont je suis, ont souffert d'une détérioration marquée des services d'Air Nova dans les régions du Québec, particulièrement depuis la déconfiture d'InterCanadien.

Monsieur Randell, on me dit que le taux de ponctualité d'Air Nova pour le mois de janvier, un mois où il n'y a pas eu beaucoup de tempêtes, a été de l'ordre de 24 p. 100. Il n'y a que 24 p. 100 de vos appareils qui sont partis à l'heure en janvier, qui n'était pas un mois de tempêtes, ce qui n'était pas le cas du mois de février.

Monsieur Randell, je vous demanderais de répondre rapidement, parce que j'aurai une autre question. Au deuxième tour, je vais revenir sur les sujets de la langue et de la qualité des services en français au Québec. Je comprends ma collègue de l'Alliance canadienne d'avoir posé certaines questions au sujet de la langue. Je peux vous dire qu'au niveau de la qualité de langue française, et vous avez dû vous en rendre compte, les usagers se plaignent. Des usagers et des employés me disent que la qualité des services en français s'est détériorée.

• 0930

Monsieur Randell, je vais vous demander de me répondre rapidement parce que je vais avoir une autre question à vous poser. Êtes-vous toujours d'avis que votre décision de transférer la base d'entretien des Dash 8 de Québec à Halifax est une bonne décision et que la sécurité est aussi bien assurée qu'auparavant?

M. Joe Randell: Merci, monsieur Guimond.

[Traduction]

Tout d'abord, pour ce qui est de la décision, celle qui a été prise de transférer la maintenance à l'époque, étant donné la taille de l'exploitation au Québec, était la bonne décision. Cela remonte à l'année dernière. Ce qui s'est produit l'automne dernier avec la fermeture d'InterCanadien a soudainement complètement changé la donne pour nous au Québec. Il nous a fallu d'abord réagir à court terme aux exigences qui nous étaient imposées compte tenu des aéronefs que nous avions et des employés que nous avions, si bien que nous avons été mis à très rude épreuve. Nous avons accru l'utilisation de la flotte d'aéronefs. Nous avons intensifié le nombre de vols avec la flotte existante. Sur le coup, pour des raisons de formation et de dotation, nous n'avons pas pu déplacer très rapidement des ressources additionnelles au Québec, mais nous avons fait de notre mieux au cours de l'hiver. En raison de cette utilisation accrue, notre rendement au titre de la ponctualité a diminué. Elle n'était pas ce qu'elle aurait dû être. Je ne pense pas que le niveau soit tombé aussi bas que vous l'avez mentionné; je crois qu'on était plus près de 45 p. 100. Peu importe, ce n'était pas acceptable.

Or, avec ce nouvel horaire, la première chose que nous avons faite au Québec a été d'augmenter la capacité de 62 p. 100, si bien que les choses se sont nettement améliorées au Québec. En conséquence, nous avons dû revoir les décisions que nous avions prises concernant la maintenance au Québec, parce que nous avons maintenant plus d'aéronefs; maintenant les économies d'échelle sont plus logiques.

Nous allons procéder à des vérifications après-vol des Dash 8 au Québec. Nous sommes en train de recruter 8 nouveaux préposés à la maintenance. Nous avons de nouveaux dirigeants à la base. Nous avons un agent de sécurité à temps plein alors qu'il occupait auparavant ce poste à temps partiel. Nous sommes en train de concevoir une vision et un plan d'action. En outre, à Montréal, nous sommes en train d'établir une base de maintenance en ligne où il y aura de 30 à 40 employés.

Nous prenons donc des mesures. Vous avez raison, nos pratiques antérieures ne sont plus acceptables étant donné la nouvelle exploitation au Québec et les exigences du marché.

Pour ce qui est de la langue des services, nous avons pris plusieurs mesures pour nous assurer que les agents de bord qui ne maîtrisaient pas aussi bien le français que nous le croyions soient principalement basés à Halifax. Nous avons changé l'appariement pour que les agents de bord du Québec travaillent essentiellement sur le marché québécois. Nous avons mis en place un programme de formation pour perfectionner les agents de bord. Nous avons un programme d'évaluation auquel nous les soumettons, et nous le renforçons constamment. Dans les quatre premiers mois de l'année, nous avons reçu au total huit plaintes, concernant la langue de travail. C'est le total de plaintes que nous avons reçues au cours des quatre premiers mois de l'année en cours.

M. Michel Guimond: Monsieur Randell, les 23 et 24 novembre 1999, on a procédé à des rencontres de groupes de concertation avec des employés d'Air Nova basés au Québec. Le Groupe Pécus animait les groupes en français. Les groupes visaient à mieux comprendre les questions concernant les employés.

[Français]

Monsieur Randell, j'aimerais avoir vos commentaires sur le commentaire suivant que font vos employés de la maintenance. Ce sont les employés de la maintenance à Québec qui ont fait le commentaire suivant au Groupe Pécus:

[Traduction]

    On leur dit que les appareils ne sont pas en aussi bon état qu'auparavant. Auparavant, on songeait toujours à assurer la maintenance préventive, mais maintenant on ne le peut pas.

[Français]

Pouvez-vous rassurer les passagers qui, comme moi, prennent les vols d'Air Nova 26 semaines par année pour voyager de Québec à Ottawa? Quand vos propres employés disent:

[Traduction]

«les appareils ne sont pas en aussi bon état qu'auparavant»,

[Français]

qu'est-ce que ça veut dire? Pouvez-vous rassurer le passager que je suis, qui a peur en avion?

• 0935

[Traduction]

Une voix: Prenez l'autobus.

Des voix: Oh, oh!

M. Joe Randell: Eh bien, tout d'abord...

Une voix: Prenez le train.

Des voix: Oh, oh!

M. Joe Randell: Je ne dirais jamais cela.

Des voix: Oh, oh!

M. Joe Randell: Tout d'abord, monsieur Guimond, ce rapport que vous avez reçu explique précisément pourquoi nous faisons cela: pour voir s'il y a des problèmes ou des lacunes. Nous avons pris toutes les mesures que nous pouvions prendre pour relever ces problèmes.

Certains des éléments que j'ai mentionnés tout à l'heure en sont une conséquence. Cela y a contribué et les employés s'en sont inquiétés. Je peux vous assurer que la sécurité est notre toute première priorité et que nous prendrons les mesures nécessaires pour veiller à ce que nos avions soient exploités de façon sûre. Ils ne volent pas s'ils sont dangereux et ne satisfont pas aux conditions. C'est un engagement que nous prenons. C'est absolument essentiel et c'est vital pour nous.

Du fait des volumes plus élevés que nous avons au Québec et de certains des problèmes que vous mentionniez tout à l'heure... Nous savons que nous sommes en période d'adaptation. La structure n'est pas finalisée, mais je répète que nous avons connu une longue période d'incertitude. Nous ne savions pas si nous serions vendus séparément ou ensemble, si nous serions conservés ou regroupés. Là encore, pour essayer de nous donner le plus de latitude possible tout en ne négligeant absolument pas la sécurité, nous avons repéré un certain nombre de problèmes que nous avons corrigés et nous continuerons de le faire.

Là encore, ce que je dis entre autres, c'est qu'il est absolument nécessaire que nous avancions dans divers domaines parce que l'incertitude prolongée n'est certainement pas recommandée dans notre secteur.

Le président: Merci, Michel.

Lou Sekora, s'il vous plaît.

M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Merci.

Je suis désolé d'avoir manqué votre discours. Vous dites que vous travaillez en étroite collaboration avec Air Canada. Vous êtes une filiale d'Air Canada, n'est-ce pas?

M. Joe Randell: Oui, en effet.

M. Lou Sekora: C'est donc facile de dire cela, mais je pense que vous êtes obligés de le faire parce qu'il ne semble pas que quiconque d'autre le fasse. J'ai reçu énormément de plaintes. J'attends d'ailleurs impatiemment que M. Milton comparaisse car j'ai beaucoup de choses à lui dire. J'aimerais bien avoir au moins une demi-heure avec lui à moi tout seul, monsieur le président.

M. Joe Fontana: Faites la queue.

M. Lou Sekora: Oui, c'est vrai.

Je suppose que vous travaillez à Penticton et à des endroits semblables?

M. Joe Randell: Oui.

M. Lou Sekora: Bien. Quelqu'un qui avait reçu une plainte du député provincial de Penticton m'a téléphoné un jour il y a six semaines ou deux mois et a déclaré que vous diminuiez les services là-bas sans en discuter avec le maire; sans en discuter avec le député provincial; sans en discuter avec le député fédéral de là- bas, Jim Hart; sans en discuter avec quiconque. C'est totalement négliger la population de cette région.

Je me suis donc adressé au ministre des Transports et à d'autres, et nous avons constaté que vous aviez violé votre propre accord ou l'entente que vous avez et que vous êtes obligés de rétablir le service. Comment peut-on être aussi...? Je suppose que si vous n'aviez pas le monopole, cela ne se serait pas produit. Mais maintenant, vous avez un satané monopole, et je peux vous dire que depuis que vous avez pris le contrôle, vous faites entièrement à votre guise. Vous n'écoutez pas la population.

M. Milton était à la télévision et je ne sais plus si c'était avant ou après le dîner, combien de verres de vin il avait bus ou ce qu'il faisait, mais il a déclaré: «Parlez de n'importe quelle région du Canada. Nous avons tellement de bonnes choses à dire sur n'importe quelle ville au Canada.» Ma foi, excusez-moi, je bous et m'étrangle quand j'entends ce genre de chose parce que ce n'est pas du tout vrai.

Tout, partout en Colombie-Britannique, a été entièrement neutralisé par vous. Les gens se présentent aux aéroports où il y a d'énormes files d'attente, où l'on vend 45 sièges de plus par vol—oui, 45 sièges—vous payez les gens 300 ou 500 $ pour les indemniser. Vous faites tout ce genre de choses idiotes. Je me demande quel bénéfice vous faites sur chaque billet d'avion que vous vendez si vous pouvez vous permettre ce genre de chose. Peut- être pourriez-vous m'expliquer certains points?

• 0940

M. Joe Randell: Monsieur Sekora, tout d'abord, pour les discussions sur le changement de service concernant l'hiver passé et le printemps, nous n'avons pas suivi le processus normal. C'était en effet impossible, étant donné qu'il aurait fallu communiquer avec toutes les localités, tous les maires, tous les députés, etc., et que nous devions réviser l'ensemble du réseau extrêmement rapidement suite aux pertes que nous avions encourues. Les Lignes aériennes Canadien avaient été complètement saignées et connaissaient de gros problèmes dus aux pertes à AirBC. Nous avons agi rapidement et hâtivement et je suis le premier à admettre que nous aurions pu nous y prendre d'une meilleure façon. Nous étions pris par le temps et les circonstances de cette transition étaient plutôt inhabituelles, c'est le moins que l'on puisse dire. Il ne s'agit pas là d'une période normale.

En ce qui concerne Penticton, vous avez raison, nous avons trop diminué la capacité. Nous avons réalisé que nous avions commis une erreur. Nous avons rétabli le Dash 8. Je vous mentionnerai d'autre part tout de suite qu'à partir du 10 juin, on augmentera à nouveau la capacité. Nous allons ajouter un autre vol de Penticton à Vancouver, des vols de Cranbrook à Calgary, Nanaimo à Vancouver et Victoria à Vancouver. Tous ces vols sont ajoutés et sur les six modifications prévues en juin, quatre concerneront la Colombie- Britannique.

Maintenant, pour ce qui est du monopole, une partie du problème des aéroports à l'intérieur de la Colombie-Britannique est venue du trafic que Kelowna a pris à ces autres aéroports. La demande réduite résulte du service de WestJet à Kelowna. Croire que nous avons un monopole à Pentincton, c'est faire erreur. Nous sommes très touchés par les aéroports environnants et nous n'avons pas de monopole à cet aéroport.

Le président: Merci, monsieur Randell.

Bev Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Je voudrais revenir à la question de M. Guimond à propos de la maintenance au Québec. Y a-t- il eu des changements ou des diminutions dans vos pratiques d'entretien préventif dans cette région? Deuxièmement, afin que vous puissiez répondre à tout à la fois, est-il possible d'obtenir une liste de la capacité et, par exemple, de vos horaires en Colombie-Britannique, avant et après la fusion, afin que nous sachions à quoi nous en tenir et que nous voyions si effectivement il y a eu des changements importants?

M. Joe Randell: Tout d'abord, il est possible d'avoir une mesure de capacité d'une année sur l'autre. Cela ne pose pas de problème. C'est disponible et c'est très facile.

Pour ce qui est maintenant de l'entretien, nous avons en fait pris des mesures pour l'améliorer. Récemment encore Air Nova a fait un exposé à une conférence sur l'entretien à Vancouver car cette compagnie est un chef de file lorsqu'il s'agit de considérer les facteurs humains en matière d'entretien et de formation à l'entretien, d'encourager les employés à signaler les problèmes, etc., afin qu'ils soient assurés qu'il n'y aura pas de représailles et que nous puissions en fait obtenir tous les renseignements absolument nécessaires pour nous assurer que nous offrons un service sûr. Donc, en fait de changement, nous travaillons à améliorer le niveau, la qualité, la fiabilité et le confort dans le secteur de l'entretien.

Quelqu'un a posé une question tout à l'heure à propos des surventes. Nos statistiques à cet égard année après année n'ont pas changé et sont bien inférieures à ce que vous trouveriez ailleurs dans ce secteur. Nous avons les faits et les chiffres à l'appui.

Je suis désolé, est-ce que j'ai manqué une question?

Mme Bev Desjarlais: Quand je parlais de capacité, je voulais également une liste des lignes autrefois et aujourd'hui.

M. Joe Randell: Certainement, je peux vous fournir ces renseignements.

Mme Bev Desjarlais: Pouvez-vous nous donner de plus amples détails quant aux mesures que vous prendrez pour régler le problème linguistique dans l'Ouest?

M. Joe Randell: Tout d'abord, nous définirons les marchés où il existe une demande importante à cet égard et, évidemment, cela aura un impact sur les horaires et les affectations des agents de bord, etc. Dans l'ensemble, cependant, nous nous visons un programme de recyclage général; encore une fois, c'est tout un défi que d'essayer d'assurer la formation linguistique de personnes qui ne connaissent absolument pas une langue pour qu'elles soient en mesure d'aider des passagers.

• 0945

Le président: Merci, Bev.

Claude Drouin.

[Français]

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur Randell, madame Clark, merci de votre présentation. J'aimerais faire un commentaire et ensuite poser une question.

Premièrement, au niveau du service bilingue, vous dites qu'il y a un arrimage à faire et que vous voulez un délai d'un an. J'espère que vous n'attendrez pas aussi longtemps pour offrir un service bilingue. Je pense que c'est essentiel au niveau de la sécurité, comme on l'a déjà dit. J'avais déjà donné un exemple ici, au comité. Les gens qui prennent l'avion pour la première fois et qui entendent les explications sur les mesures de sécurité seulement dans l'autre langue pourraient avoir du mal à bien se conduire dans une situation d'urgence. J'espère de tout coeur que vous allez faire des efforts.

Ma question porte sur le service. Votre compagnie est affiliée à Air Canada et dessert les régions. Vous nous avez nommé quelques régions où les services avaient été améliorés. Nous entendons dire que les compagnies régionales qui ne sont pas affiliées à Air Canada ont actuellement de la difficulté à garder les services qu'elles ont. Ma crainte, c'est qu'on profite du monopole pour tenter de tasser ces compagnies qui ne sont pas affiliées à Air Canada, peut-être au détriment du service régional. Je pense qu'on devrait permettre à ces compagnies, qui étaient autrefois indépendantes ou affiliées à Canadien, de continuer à assurer le même service pendant quelques années et par la suite voir s'il n'y aurait pas lieu de faire des négociations en vue d'améliorer les choses. Je pense que le but est de donner le meilleur service possible aux gens. Je ne vois pas comment on va donner un meilleur service à la population en diminuant les compagnies déjà établies. Il y a des emplois en jeu, et il faut en prendre conscience. Ces compagnies sont devenues dépendantes des miettes que vous allez leur laisser au bout de la table. Ce n'est pas normal, et j'aimerais savoir comment vous êtes disposé face à ces compagnies indépendantes.

M. Joe Randell: Merci.

[Traduction]

Tout d'abord, pour ce qui est de la situation linguistique au Québec et dans la région de l'atlantique, nous nous engageons—et nous faisons beaucoup d'efforts à cet égard—à offrir les services dans les deux langues officielles. Quand j'ai mentionné un an un peu plus tôt, je parlais d'Air Ontario, d'AirBC et peut-être de LACR si elle n'est pas vendue.

Pour ce qui est de la sécurité, toutes ces lignes aériennes font les annonces et présentent les instructions de sécurité dans les deux langues officielles en se servant d'enregistrements pour les instructions initiales sur le vol. Ainsi, les annonces en matière de sécurité à l'égard de l'emplacement des portes de secours et les choses de ce genre sont faites dans les deux langues officielles.

Quant aux transporteurs indépendants, nous n'avons absolument pas essayé de les mettre dans le pétrin ou de leur compliquer la vie. En fait, nous avons entamé des discussions avec un certain nombre de transporteurs afin d'établir des façons de collaborer avec eux et évidemment faciliter leur interaction avec nos services. Il y a des transporteurs indépendants dans nombre de régions canadiennes qui nous livrent concurrence et cela ne changera pas, en fait nous aurons de nouveaux concurrents. Il appartient à ces transporteurs de décider s'ils veulent collaborer avec nous. Nous sommes disposés à discuter de la question avec eux s'ils le désirent, car il n'y a aucun sujet que nous ne sommes pas prêts à aborder ou proposition que nous ne sommes pas prêts à étudier.

Il est très difficile de livrer concurrence et de collaborer au même moment. Il y a des exigences que nous avons mentionnées par exemple à l'égard des tarifs communs et du programme Aéroplan, qui seront de toute façon offerts à ces transporteurs. Je crois que l'on a abordé toutes ces questions. Je crois que si les transporteurs ont des problèmes financiers, il importe que l'on ne nous blâme pas toujours pour cette situation et qu'on dise que c'est à cause de nous que ces transporteurs n'ont pas pu avoir un plan d'entreprise viable; après tout, nous ne sommes pas toujours responsables lorsqu'un plan d'entreprise ne fonctionne pas.

• 0950

Le président: Merci, monsieur Guimond.

Monsieur Casey.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): En plus d'être président des transporteurs régionaux d'Air Canada, êtes-vous également responsable des Lignes aériennes Canadien Régional?

M. Joe Randell: Non.

M. Bill Casey: Qui est responsable de ces lignes aériennes?

M. Joe Randell: M. Kim Kapp occupe le poste de président intérimaire des Lignes aériennes Canadien Régional. Il relève des Lignes aériennes Canadien, car LACR ert toujours une filiale de Canadien.

M. Bill Casey: Savez-vous quels sont les problèmes dans les négociations à l'égard de la cession de LACR?

M. Joe Randell: Je ne participe pas à ces négociations. J'ai cru comprendre que les problèmes touchaient l'établissement de la valeur, mais je dois dire que je n'ai pas participé à ces négociations.

M. Bill Casey: Très bien.

Je ne comprends pas vraiment la situation. Il existe un système de lignes aériennes nationales régionales, vous en êtes le président. Allez-vous changer les noms de toutes les filiales ou allez-vous garder les trois ou quatre noms différents?

M. Joe Randell: Cette question est actuellement à l'étude, mais il est fort probable que les noms soient changés.

M. Bill Casey: Nous avons donc un système régional national d'Air Canada et un système national international d'Air Canada qui fonctionneront de façon parallèle? Pourquoi conserver deux systèmes? Pourquoi ne pas simplement avoir Air Canada parce qu'après tout tout relève d'Air Canada?

M. Joe Randell: Partout au monde, habituellement, les services régionaux sont distincts des services nationaux, qu'ils appartiennent aux mêmes lignes aériennes ou pas. Parce que les transporteurs ont dans ces circonstances des mandats bien différents. Les transporteurs régionaux ont de plus petits avions, beaucoup plus de décollages et d'atterrissages, desservent des aéroports plus petits, et des aéroports où les employés s'acquittent de plusieurs tâches plutôt que d'être simplement responsables d'une activité. Tout cela est lié à la taille et à la portée des activités et à la souplesse nécessaire pour être vraiment compétitif dans le secteur des transporteurs régionaux.

De plus, les questions comme les frais généraux, la formation quand il y a intégration de deux groupes d'employés, quand on exploite des avions aussi différents que des 747 et des Beech 1900, tout cela est au point du vue logistique beaucoup plus complexe que l'exploitation d'un transporteur régional distinct.

M. Bill Casey: Est-ce que vous gardez les deux entités bien distinctes surtout pour des raisons de contrôle de la gestion ou plutôt pour le contrôle des coûts?

M. Joe Randell: Pour les deux. Ces efforts sont concentrés sur les marchés régionaux. Nous disons toujours que parfois il est un peu plus chic de parler d'une route de Montréal à Paris que d'une route qui va de Wabush à Goose Bay, mais les gens qui voyagent de Wabush à Goose Bay sont des gens très très importants. En étant là et en nous faisant les défenseurs et les promoteurs des services régionaux et en fournissant ces services, nous nous assurons justement que l'on va faire toujours attention aux services régionaux. C'est très important et du point de vue de la gestion, c'est une autre raison de garder les deux services bien distincts.

Donc ce n'est pas une question de coût ou de gestion, mais plutôt des deux choses combinées.

M. Bill Casey: Oui, c'est logique.

Actuellement, est-ce que LACR fonctionne comme elle l'a toujours fait?

M. Joe Randell: LACR fonctionne toujours comme ligne d'apport du réseau principal, et c'est ce qu'elle faisait pour Canadien. Le rôle n'a pas changé.

M. Bill Casey: J'aimerais poser une dernière question. J'aimerais également signaler que vous avez toujours répondu à mes lettres, et je vous en suis reconnaissant, mais il y a...

M. Joe Randell: Je ne peux pas dire que je suis heureux de recevoir vos lettres.

Des voix: Oh, oh!

M. Bill Casey: Peut-être pas, mais vous y répondez toujours, et je vous en suis reconnaissant. Je ne suis pas nécessairement toujours d'accord avec vos réponses...

Des voix: Oh, oh!

M. Bill Casey: ... mais au moins vous répondez.

Il y a une autre lettre que je vous écrirai. De toute façon, je n'en parlerai pas maintenant.

M. Joe Randell: Ah non!

M. Bill Casey: Laissez-moi vérifier si j'avais d'autres questions à poser. Non, je crois que c'est tout pour l'instant.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, Bill.

Maintenant, pour une question chacun, M. Murray Calder, Mme Val Meredith et puis M. Joe Fontana.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): J'aimerais faire suite aux questions qu'a posées M. Guimond sur la sécurité. Vous avez dit que vous mettiez les flottes en commun, et que vous utiliseriez des avions qui sont maintenant dans l'ouest dans l'est du pays. Clairement, un certain pourcentage de votre flotte est utilisé et un certain pourcentage ne l'est pas puisque des appareils sont soit en réparation ou en période d'entretien.

M. Joe Randell: C'est exact.

M. Murray Calder: Quelle est la moyenne ou la norme pour l'industrie?

M. Joe Randell: En pourcentage?

M. Murray Calder: Oui.

M. Joe Randell: Bien, évidemment chaque avion est entretenu pendant la nuit ou quand le besoin s'en fait sentir; ça, c'est une situation normale. Pour ce qui est des gros travaux d'entretien, où vous devez cesser d'utiliser un avion pendant une longue période pour en assurer l'inspection, pour 25 avions il y en aura un qui n'est pas du tout utilisé parce qu'il fait l'objet d'une inspection ou de réparations ou même d'entretien.

M. Murray Calder: Très bien. Est-ce que cela se rapproche de la moyenne pour l'industrie?

• 0955

M. Joe Randell: Oui, c'est la norme pour l'industrie.

M. Murray Calder: Très bien. Merci.

Le président: Merci, Murray.

Val Meredith.

Mme Val Meredith: J'aimerais en revenir à cette question des exigences stipulées dans la Loi sur les langues officielles, parce que j'avais cru comprendre que la loi stipulait qu'il y avait des lignes directrices établies sur un pourcentage de 5 p. 100—soit 5 p. 100 du marché, 5 p. 100 de la demande, 5 p. 100 de la province, ou 5 p. 100 d'une région désignée. Demandez-vous aux voyageurs quelle langue ils utilisent afin de déterminer si cette demande de 5 p. 100 existe?

M. Joe Randell: Nous procédons actuellement à une étude afin de déterminer si ce niveau de 5 p. 100 existe.

Mme Val Meredith: Lorsque le niveau de 5 p. 100 n'existe pas, lorsque la demande n'atteint pas 5 p. 100 chez les voyageurs, dans la province ou dans une région donnée, jugez-vous que vous devez toujours offrir les services dans les deux langues officielles conformément à la Loi sur les langues officielles?

M. Joe Randell: Techniquement, non.

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Stan Dromisky, pour une seule question. Avez- vous une question?

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Oui, une question.

Je crois qu'il importe que le public sache quelle est votre politique actuelle. Je sais que votre réponse d'aujourd'hui pourrait changer demain, dans un an ou même dans deux ans.

Par le passé, un aéroport important comme Pearson, avec ses profits extraordinaires, subventionnait plusieurs routes non rentables. La même chose se passait au niveau des transporteurs aériens. Si vous avez une route qui n'est pas rentable—en d'autres termes, vous avez un service régional de courte distance qui n'est pas rentable—, cette route ou ce service seront-ils assurés grâce aux profits réalisés sur d'autres routes, ou dira-t-on au public «désolé, cette liaison n'est pas rentable. Il n'y a aucun lien entre les profits réalisés pour les autres routes et le financement de cette route non rentable. Nous mettons fin à ce service.»

M. Joe Randell: Bien, il y a trois types de routes. Il y a celles qui sont rentables, un point c'est tout. Il y a un deuxième type de routes qui, si vous l'étudiez de façon distincte, n'est pas vraiment rentable, mais il est logique de le maintenir si vous tenez compte de son apport aux autres liaisons. Nous avons plusieurs routes de ce genre. Nous avons plusieurs services du genre. En d'autres termes...

M. Stan Dromisky: Il faut absolument que le public comprenne cela.

M. Joe Randell: Oui, mais c'est difficile pour eux de comprendre cela.

Puis il y a un troisième type de sertes qui, même s'il présente un apport important pour les autres, n'est toujours pas rentable; il s'agit d'une route problème parce qu'elle accuse toujours un déficit.

M. Stan Dromisky: La raison pour laquelle je pose cette question, c'est qu'il y a certaines collectivités où les gens se plaignent sans cesse et exigent des services mais ne s'en servent pas lorsqu'ils sont offerts. Très peu de personnes prennent l'avion, pourtant elles exigent d'avoir ce service. Cela présente donc des problèmes à l'échelle nationale. C'est pourquoi je voulais avoir une réponse à ma question, et j'espère que vous saurez mieux communiquer au public les critères utilisés pour les trois catégories de routes que vous venez de me décrire.

M. Joe Randell: On s'imagine toutes sortes de choses qui sont fausses en ce qui a trait aux routes et à leur rentabilité. Il est difficile de faire disparaître ces fausses idées et, à mon avis, c'est là un des défis que doit relever aussi l'ATAC en ce qui a trait à l'éducation des voyageurs.

Le président: Michel, une seule question; Joe, une seule question.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Randell, j'ai ici un rapport qui s'intitule Quebec Involvement et qui est daté le 27 février. Je vous cite des passages de la rubrique Why the Merge Didn't Work:

[Traduction]

    Nous avons réussi à avoir une excellente équipe au Québec. Nous voulons travailler, nous voulons participer, nous voulons que cela soit une réussite, et nous voulons participer à ce succès. Nous voudrions avoir des liens étroits avec Air Nova, mais c'est difficile. Il y a eu un manque de confiance et d'intérêt, et nous nous sentons un peu espionnés.

[Français]

Je pourrais vous en lire 19 pages. Monsieur Randell, je suis avocat de formation. Quand je faisais mon cours de droit, on nous disait de toujours poser des questions dont on connaissait les réponses.

• 1000

Est-ce que quelqu'un a été congédié après la présentation du rapport Quebec Involvement? Est-ce qu'il y a eu des représailles faites à Québec après la présentation du rapport Quebec Involvement?

[Traduction]

M. Joe Randell: Tout d'abord, en ce qui a trait à ce rapport, les commentaires portaient plutôt sur le processus d'intégration.

Air Nova et Air Alliance ont été intégrées en mars 1999. Nous avons entamé le processus d'intégration avec les Lignes aériennes Canadien Régional, et nous en étudions l'impact possible, comme c'est le cas pour Air Ontario et AirBC, depuis janvier. Dans le cadre de ce processus d'intégration, quatre lignes aériennes ont participé aux discussions. Il y avait donc les trois lignes aériennes régionales d'Air Canada, puisqu'on songeait à leur intégration. Dans le cadre de ces discussions, un certain nombre d'équipes ont été mises sur pied pour étudier les divers aspects de cette intégration; diverses équipes comptaient des représentants du Québec.

Dans certaines régions du Québec, on a refusé complètement d'accepter le fait qu'Air Nova et Air Alliance soient intégrées pour ne former qu'un seul transporteur. Si nous avons connu certaines des difficultés auxquelles j'ai fait allusion précédemment, c'est que nous avions deux dirigeants. Dans une activité commerciale où il y a une exploitation et un certificat d'exploitation, il ne saurait y avoir deux dirigeants. Nous avons pris les mesures nécessaires afin de nous assurer qu'on savait parfaitement qui était responsable, qui était aux commandes. Nous avons donc nommé une personne au Québec.

Nous sommes maintenant déménagés et encore une fois, le personnel du Québec participe pleinement à l'intégration. Nous avons jugé cette étape absolument nécessaire et ce n'est pas du tout voulu pour diminuer l'importance du Québec dans l'exploitation. En fait, comme je l'ai dit précédemment, nous augmentons les ressources. Par exemple, les Beech 1900 d'Air Labrador qui seront utilisés de Charlo à Miramichi seront en fait entretenus au Québec aussi.

C'était un problème interne, concernant un désaccord sur la nécessité d'avoir une quatrième compagnie d'aviation qui serait représentée à tous les niveaux du processus d'intégration. À notre avis, Air Nova et Air Alliance avaient été intégrées en une seule entité. Il nous faut fonctionner ainsi, car c'est très important de nous assurer que les choses sont claires concernant la sécurité et la qualité des opérations.

Le président: Joe Fontana, je vous prie.

M. Joe Fontana: Merci, Joe. Je serais plus rassuré si je pensais que c'est vous qui êtes aux commandes des transporteurs régionaux d'Air Canada, car vous comprenez le marché local régional, ce qui est très important, d'après certaines de vos réponses ici aujourd'hui.

L'ennui, c'est que je crois que ce marché est mal desservi parce que, essentiellement, à Air Canada, on vous voit comme étant là pour lui offrir un service plutôt que comme une filiale à part entière, ce qui vous permettrait de faire le nécessaire pour bien servir votre clientèle. Je poserai la question à M. Milton, mais je ne suis pas persuadé que vous êtes vraiment aux commandes. Il y a un vice-président à Air Canada qui est en fait responsable du partage des codes de vol, des réservations, des horaires, de la capacité et de tout le reste. Je sais qu'on vous demande votre avis, mais en dernière analyse, ce sont ceux qui paient la note qui prennent les décisions. Cela me cause problème.

Qui a pris la décision, Pearson ou Air Canada, de placer tous les vols d'Air Ontario à l'aérogare 1 à compter du 7 ou 8 juin, ce qui force essentiellement la majorité de la clientèle qui se rend dans d'autres villes du Canada à emprunter le tunnel ou à prendre la navette ou encore à marcher jusqu'à l'aérogare 2 pour prendre le vol suivant? Cela ne ressemble pas à vos méthodes. Évidemment, cela a donné de bons résultats lorsque Air Ontario s'est installée à l'aérogare 2 qui était essentiellement réservée aux vols nationaux.

Si je comprends bien, l'aérogare 1 va combiner les vols internationaux et les vols d'Air Ontario, ce qui forcera un grand nombre de vos clients... Je peux vous dire que déjà, j'ai entendu de nombreux clients dire que c'est parfaitement ridicule que la plupart des clients d'Air Ontario soient maintenant obligés d'utiliser l'aérogare 1 pour ensuite se frayer un chemin jusqu'à l'aérogare 2 afin de prendre leur vol de correspondance. Qui a pris cette décision, Air Canada ou les responsables de Pearson?

• 1005

M. Joe Randell: Comme Air Ontario... Nous avons participé à l'analyse et nous avons examiné diverses options de regroupement des opérations à Pearson. Je n'ai pas participé à ces discussions. Je sais qu'Air Canada a participé aux discussions avec les représentants de Pearson, avec les représentants du GTAA pour décider comment on s'y prendrait, et le résultat final a donné plusieurs contraintes, je sais. Je ne peux pas dire que c'est sous-optimal. En fait, c'est fort probablement optimal.

En ce qui concerne les clients d'Air Ontario, bien que le poste soit assez distant de l'aérogare T-2, il y aura un tunnel d'accès assez commode pour les correspondances internationales. En fait, pour les clients locaux de Toronto qui se rendent dans des villes ontariennes, l'accès à l'aérogare T-1 pourrait être un peu plus commode que le passage par T-2. Ce n'est pas la solution définitive. La solution définitive, se sera le nouveau terminal dont nous espérons disposer d'ici quelques années. On aura ainsi résolu bien des questions, et les activités régionales constitueront un élément important de cette nouvelle aérogare.

Le président: Monsieur Randell, merci beaucoup d'avoir comparu devant le comité. Nous pourrions certainement vous garder encore pendant une heure, mais malheureusement, nous avons d'autres témoins à entendre. Merci d'être venu.

Les membres du comité auront sans doute des questions à vous poser, quel que soit leur mode de communication, mais si vous voulez bien coopérer avec ceux qui vont vous téléphoner ou vous envoyer un courriel pour obtenir des renseignements dont nous aurons besoin lors de l'étude article par article, nous vous en serions très reconnaissants.

Merci beaucoup, monsieur Randell et madame Clark.

M. Joe Randell: Merci, monsieur Keyes.

Le président: Chers collègues, j'essaye de respecter l'horaire. Certains d'entre vous aimeraient bien qu'on accorde un peu plus de temps à tel témoin et un peu moins à tel autre et sont même prêts à renoncer à certaines questions. Il va donc falloir faire des concessions pour respecter l'horaire aujourd'hui.

Le témoin suivant est Dean Tuggey, gestionnaire des opérations de Régionnair.

Monsieur Tuggey, soyez le bienvenu devant le Comité permanent des transports. Vous avez de cinq à huit minutes pour nous présenter votre exposé, puis nous vous poserons des questions.

M. Dean Tuggey (gestionnaire des opérations, Régionnair): Faute de temps, je ne lirai mon texte qu'en français.

Le président: Pas de problème. Il y a un service d'interprétation.

[Français]

M. Dean Tuggey: Monsieur le président et honorables membres du comité, c'est avec plaisir que j'ai accepté votre invitation de venir exposer notre point de vue sur la restructuration du transport aérien au pays et c'est un privilège également de défendre les intérêts de Régionnair.

Je m'appelle Dean Tuggey et je suis directeur de l'exploitation de Régionnair. Votre comité recherche une solution pratique aux problèmes liés à la restructuration du transport aérien au Canada, et le projet de loi C-26, visant à modifier entre autres la Loi sur les transports au Canada, vous donnera l'occasion de mettre en pratique les solutions que vous avez élaborées.

Je ne vais pas ce matin vous parler de chacun des amendements proposés, mais plutôt tenter de vous brosser un exposé des difficultés de la transition actuelle d'un duopole vers un monopole, des dangers de cette restructuration, car loin de promouvoir une vraie concurrence, elle ne fait que renforcer la prise de contrôle des marchés par Air Canada et ses compagnies affiliées.

Je vous exposerai des faits réels et vécus et je vous dirai les conséquences sérieuses qu'ils ont et peuvent avoir pour l'ensemble de l'industrie en général et pour Régionnair en particulier.

Au préalable, j'aimerais vous présenter un bref tableau de Régionnair Inc., qui a été fondée en 1992 afin de répondre au besoin pressant des localités de la moyenne et basse Côte-Nord d'avoir un service fiable et de qualité, correspondant aux normes de la fin du XXe siècle.

• 1010

Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas cette région, je vous dirai qu'elle se situe à l'est de Sept-Îles et se prolonge jusqu'à Blanc-Sablon. Un certain nombre de villages situés à l'est de Sept-Îles n'étaient desservis que par des avions sur flotteurs en été et sur skis en hiver. Régionnair a construit des pistes à quatre endroits de la côte pour enfin recevoir les avions sur roues de type Twin Otter et offrant un confort plus grand que celui des Beavers et des Otters auxquels était habituée la population. Certains des services étaient offerts en concurrence avec InterCanadien, société qui était subventionnée. D'autres étaient offerts en exclusivité par Régionnair sur la petite côte.

Au cours de ces années, Régionnair a dû faire face à la concurrence d'InterCanadien et d'Aviation Québec Labrador, associée à Air Canada, et a su gagner et maintenir la confiance et l'assiduité de ses clients.

De 1996 à 1999, Régionnair détenait une entente commerciale avec Canadien Régional par le biais d'InterCanadien. Cette entente de partenariat fut modifiée à quelques reprises pour tenir compte des demandes nouvelles et des changements du marché où nous avons remplacé les services d'InterCanadien sur certaines destinations qui ne justifiaient plus un gros avion. Elle permettait aux deux parties de bénéficier d'une présence soutenue dans ces régions éloignées et isolées, et les passagers étaient aussi bénéficiaires puisqu'ils avaient droit à la billetterie CP et à la diversité des produits tarifaires de Canadien. Ces divers produits comprenaient, entre autres, des tarifs à bas prix, des ventes de sièges sporadiques, une présence sur le réseau international de CP et de ses compagnies associées, des points bonis dans le programme Canadien Plus, etc. Cette entente, que l'on pouvait qualifier de bénéfique pour les deux parties, a été abolie en août 1999 à la suite de changements structurels survenus dans la desserte et l'offre d'aéronefs monomoteurs non couverts par l'entente.

Nous avons dû alors nous structurer pour effectuer nous-mêmes un certain nombre d'activités qui étaient autrefois faites par Canadien et nous avons alors perdu l'usage du code CP.

Je peux vous assurer que sans un code reconnu et établi, les vols réguliers en correspondance nécessitent un effort de vente plus soutenu.

Dans notre malchance, nous avons dû doubler d'efforts pour établir une structure indépendante qui commence à donner quelques résultats.

Depuis la disparition d'InterCanadien en novembre dernier, nous avons réussi à mettre sur pied un nouveau service entre Sept-Îles et Montréal via Québec sur la base de deux aller-retour du lundi au vendredi. Nous offrons une structure de prix tout à fait raisonnable et convenable pour le marché.

Là où le bât blesse, c'est lorsqu'Air Nova commence à mettre une capacité excédentaire sur le marché qui dépasse de loin celle qu'InterCanadien offrait. Or, on sait que ces deux compagnies exploitent des vols dont les taux de remplissage frôlent à peine les 40 p. 100 et que cette capacité excédentaire n'est aucunement justifiée par la demande. Pourquoi alors offrir autant de vols? La réponse à cette question tient, à notre avis, au désir d'Air Canada, via Air Nova, de submerger le marché afin de noyer la concurrence. Là où nous avions un vol qui partait avant Air Nova, cette dernière vient d'ajouter un vol avant et après le nôtre, nous plaçant ainsi dans un carcan et rendant notre vol plus marginal.

Cette tactique de contourner et d'envelopper nos vols n'est rien d'autre qu'un moyen détourné de nous faire sortir d'un marché que nous avions commencé à développer. En effet, durant tout le temps où InterCanadien offrait des vols sur cette route, la capacité totale, déjà excédentaire, n'était aucunement justifiée. Même après l'arrêt des vols d'InterCanadien, Air Nova n'a pas remplacé InterCanadien sur une base paritaire. Pourquoi le faire? Pourquoi le faire maintenant quand le marché ne donne aucun signe de croissance? Pourquoi offrir des vols à Baie-Comeau en même temps que nous le matin alors qu'elle ne le faisait point au temps d'InterCanadien? Et comment justifier les contacts avec la ville de Bonaventure pour soudainement vouloir lui offrir un vol après avoir appris que Régionnair était intéressée à le faire?

• 1015

Ce sont tous ces comportements qui nous inquiètent et dont le résultat ultime pourrait nous exclure du marché. Si tel était le cas, nous aurions vraiment senti et vécu le comportement prédateur et abusif d'un transporteur dominant. Cette situation doit être arrêtée avant qu'il ne soit trop tard.

Un autre exemple de comportement abusif tient à la position dominante d'Air Canada et d'Air Nova dans les aéroports. Cette dernière s'accapare de tous les espaces de comptoir sans que cela ne soit justifié par le nombre de passagers ou par le nombre de positions ouvertes sur les vols offerts. Dans cette situation, nous ne recevons aucun appui de la part de Transports Canada, qui est le gestionnaire de ces installations. D'ailleurs, c'était un engagement spécifique d'Air Canada que de se départir de ces espaces de comptoir en surplus.

Nous allons vous distribuer, avec le texte de notre exposé, un certain nombre de lettres d'appui et de confirmation de ce que nous avons mentionné plus tôt. J'ai appris tout à l'heure que les lettres seraient traduites avant de vous être distribuées.

La situation est loin d'être confortable à l'aube de l'intégration complète des services de Canadien ou de l'expansion des services d'Air Nova et de ses associés au Québec, à qui nous livrons une concurrence honnête et indépendante.

En ce qui concerne l'utilisation des points bonis, nous devons mentionner qu'Air Canada a répondu favorablement à notre demande, mais que les modalités d'introduction sont tellement lourdes et anachroniques que nous ne pourrons les offrir à nos passagers que vers la fin du mois d'octobre prochain.

Il n'y a aucune raison technique qui justifie ce délai, si ce n'est que d'avoir à faire notre marque sur le marché avant qu'on nous permette de lutter à armes égales contre eux. Nous avons suggéré plusieurs modalités d'introduction accélérées, mais nous nous heurtons à un ordre du jour qui n'est pas le nôtre et que nous ne contrôlons pas. Pendant ce temps, nos passagers ne peuvent bénéficier de points bonis pour leurs voyages.

Ces conditions sont anticoncurrentielles, nous restreignent dans notre faculté de faire affaire et ne respectent pas les engagements qu'Air Canada a formulés le 21 décembre au directeur de la concurrence.

En conséquence, je vous demanderais, lors de vos amendements au projet de loi C-26, de vous attarder sérieusement à toutes les entraves réelles et nuisibles qui nous empêchent d'offrir un vrai choix aux passagers et d'exercer une vraie concurrence.

Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Tuggey.

Roy Bailey, je vous en prie.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Merci, monsieur, de comparaître devant nous aujourd'hui. Le message que vous nous adressez aujourd'hui correspond bien à ce que le comité craignait depuis le début et c'est évidemment ce qui se passe dans l'ensemble du Canada. Mais pour une raison ou une autre, le milieu des transports aériens semble incapable de formuler ce message.

Brièvement, avez-vous essayé de recourir à la Loi sur la concurrence pour protéger votre situation dans l'immédiat?

M. Dean Tuggey: Non, pas pour l'instant, mais c'est une solution que nous envisageons, car nous sommes une petite compagnie et nous avons l'impression d'être comme David face à Goliath. La concurrence est très rude sur le marché et à défaut d'une aide de ce comité ou de quelqu'un d'autre, nous ne pourrons pas durer bien longtemps.

• 1020

M. Roy Bailey: Estimez-vous que Transports Canada n'a pas répondu à vos attentes? Dans le contexte du projet de loi C-26 dont le comité est saisi, est-ce que vous estimez que vous et votre compagnie...? Vous avez une compagnie, je suppose. Est-ce bien le cas?

M. Dean Tuggey: Je n'en suis pas le propriétaire, mais effectivement, j'ai une compagnie.

M. Roy Bailey: Parfait. J'ai l'impression que dans la situation actuelle, vous ne vous sentez pas en sécurité. Est-ce que je me trompe?

M. Dean Tuggey: Non, pas du tout.

M. Roy Bailey: Dans l'éventualité d'un retrait, si votre compagnie devait renoncer aux affaires... Vous craignez de voir s'instaurer une situation de monopole, qui ne servirait nullement les intérêts de la région que vous desservez.

M. Dean Tuggey: En particulier dans notre région, où nous desservons de très petites localités et comme nous avons un concurrent qui est affilié à Air Nova, nous avons bien des difficultés. Il est aussi difficile de se retrouver tout seuls sans pouvoir relier nos services à ceux d'un gros transporteur, et ce n'est pas ce que nous souhaitons, car cela ne pourrait qu'aggraver les problèmes découlant de la situation de monopole.

M. Roy Bailey: Une dernière question. J'ai entendu plusieurs petites compagnies comme la vôtre dire la même chose. Pourquoi faut-il que vous soyez affiliés à un plus gros transporteur? Une fois que vous connaissez les horaires du gros transporteur, votre petite compagnie pourrait aménager son propre horaire pour le rendre compatible avec celui du gros transporteur, sans pour autant accepter un lien d'affiliation et renoncer à votre indépendance. Cela ne vous semble-t-il pas possible?

M. Dean Tuggey: Eh bien, c'est ce que nous faisons déjà actuellement, mais le problème, quand on n'est pas affilié à une plus grosse compagnie, c'est que l'on perd les passagers en transit, ceux des vols de correspondance, et tout le reste. Voilà où se situe notre plus gros problème, quand on n'est pas affilié à une autre compagnie.

M. Roy Bailey: Est-ce que vous ne pouvez pas conclure d'accord sans aller jusqu'à une affiliation?

M. Dean Tuggey: C'est toujours une possibilité. Nous avons parlé avec Air Canada de la possibilité d'utiliser son système de points, et Air Canada nous a répondu favorablement, mais dans ce genre d'entente, l'élément de temps est primordial, et le système de points ne nous sera accessible avant le mois d'octobre, ou plus tôt.

M. Roy Bailey: Les très grosses compagnies concluent des ententes, et elles ne sont pas pour autant affiliées.

M. Dean Tuggey: C'est vrai.

M. Roy Bailey: Alors pourquoi pas vous? Voilà ma question.

M. Dean Tuggey: Eh bien, nous pouvons le demander à Air Canada.

M. Roy Bailey: Merci, monsieur.

Le président: Merci, Roy.

[Français]

Claude Drouin.

M. Claude Drouin: Monsieur Tuggey, merci de votre présentation. Vous soulevez plusieurs points qui font en sorte que la vie est, pour Régionnair, un peu difficile, sinon presque impossible à envisager à court et à moyen terme. Vous nous parlez d'une capacité excédentaire qui existait, des problèmes qu'Air Canada vous pose en mettant des vols avant et après votre créneau, des comptoirs en surplus, du fait qu'on semble s'accaparer des points bonis et tout cela. Au sujet des comptoirs en surplus, quelle est la réaction de Transports Canada? Vous faites sûrement des plaintes. Je voudrais savoir comment Transports Canada réagit à cet élément.

M. Dean Tuggey: Transports Canada réagit toujours en faveur d'Air Canada. Même quand les espaces de comptoir ne lui ont pas été demandés, ils sont quand même gardés au cas où Air Canada en aurait besoin, ce qui nous pose de gros problèmes au niveau de la visibilité dans les aéroports et au niveau de l'attirance pour notre clientèle.

M. Claude Drouin: Est-ce que vous avez fait des plaintes?

M. Dean Tuggey: On a fait des plaintes auprès de Transports Canada. On a fait des plaintes auprès d'autorités autres que Transports Canada quand Transports Canada n'est pas le gestionnaire. C'est toujours la même réponse: si Air Canada en a besoin, Air Canada va l'avoir; si Air Canada n'en a pas besoin, on va envisager de vous l'offrir.

• 1025

M. Claude Drouin: C'est un peu spécial.

Deuxièmement, vous avez parlé des points bonis. Vous dites que s'il vous faut attendre plusieurs mois avant de mettre ça en application, ce sera très nuisible pour vos clients. Selon vous, quel est le problème exact? Vous dites que ce n'est pas fondé et que c'est facilement réalisable, mais j'aimerais que vous me donniez plus de détails pour que je comprenne mieux la dynamique du problème.

M. Dean Tuggey: Naturellement, il est plus facile de vendre des billets quand on peut offrir au client des points qui vont lui permettre de voyager ultérieurement. Voici où est le problème. On a suggéré à Air Canada plusieurs façons d'accélérer le processus pour nous aider à aller chercher une autre clientèle ou une plus grande clientèle. Chaque fois, on se fait dire la même chose: on n'est pas nécessairement une priorité dans leurs besoins.

M. Claude Drouin: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Merci, Claude.

Michel Guimond.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Tuggey, merci de votre présentation. Mon collègue Claude Drouin a soulevé avec justesse les trois plaintes les plus importantes. Je n'ai qu'un voeu, et c'est que vous puissiez continuer vos opérations le plus longtemps possible pour desservir les régions et assurer une concurrence dans les régions. Si rien ne se fait, à moins que vos actionnaires ne soient multimilliardaires, les services en région que vous offrez pourraient être abandonnés. C'est le commentaire que je voulais vous faire.

Je vais maintenant faire un commentaire à mes collègues membres du comité. Il y a trois semaines, lors du témoignage d'Air Transat, j'avais paraphrasé une chanson du vieux folklore français, «Tout va très bien, madame la marquise», pour dire que les hauts fonctionnaires de Transports Canada, particulièrement Mme Valerie Dufour, directrice de l'aviation civile—c'est à peu près son titre—, nous disaient que tout allait bien. On a une démonstration de la façon dont les choses vont bien! On doit être fier d'entendre aujourd'hui ce témoignage sur la façon dont les choses vont. J'en appelle à mes collègues membres du Comité des transports. Je vais déposer des amendements à ce projet de loi C-26 et je fais appel à leur solidarité. Si tous les membres du comité désirent réellement qu'il y ait de la concurrence dans les régions, je fais appel à eux. Monsieur Tuggey, je vous dis que je vais faire appel à la solidarité des membres du comité. Si les gens réunis autour de cette table veulent une réelle concurrence dans les régions, il va falloir qu'il y ait des amendements, parce que le projet de loi, tel qu'il est libellé, ne marche pas et va faire mourir toutes les compagnies régionales. Il y a d'autres compagnies régionales qui témoigneront aujourd'hui. Le même sort les attend toutes. Je vais déposer des amendements et j'espère que la majorité libérale du comité n'acceptera pas la ligne de parti et les messages donnés par Transports Canada. C'est le commentaire que je voulais faire. Voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Dean Tuggey: Non, si ce n'est que vous remercier. On a besoin de tout l'appui qu'on peut avoir. Dans un marché comme celui-là, c'est difficile d'être seul. On se sent parfois très seuls.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Guimond, de votre intervention passionnée et de la demande que vous présentez à vos collègues.

Monsieur Tuggey, le comité est aux prises avec tous les problèmes qui lui sont soumis, mais je peux vous assurer que selon toute vraisemblance, cette mesure législative va faire l'objet d'amendements, peut-être en grand nombre. Nos membres se laissent parfois emporter par leur enthousiasme et oublient ce qui s'est dit il y a quelques semaines. Peut-être que Michel Guimond... et j'ai beaucoup apprécié son intervention. Il est très au courant et travaille très fort pour ce comité. Lorsque Onex a comparu devant nous, on a envisagé la possibilité que la propriété de Canadien reste distincte de celle d'Air Canada, et je me souviens que M. Guimond a tenu des propos très passionnés concernant Air Canada.

• 1030

Il faut donc parfois prendre un peu de recul et réfléchir collectivement à tout ce qui nous a été dit.

Monsieur Calder, avez-vous une question?

M. Murray Calder: Non.

Le président: Bev Desjarlais, je vous en prie.

Mme Bev Desjarlais: Merci.

Je vais essayer de vous soumettre globalement mes différentes questions.

Vous dénoncez ce qui semble être de la part d'Air Canada, d'Air Nova ou de leurs affiliés des pratiques d'éviction; avez-vous formulé vos inquiétudes par écrit et avez-vous reçu des réponses, que ce soit de l'Office des transports du Canada, du Bureau de la concurrence, de Transports Canada ou de quelqu'un d'autre que vous auriez contacté?

Deuxièmement, tout le système des points de fidélisation est compliqué et que vous ne pourrez le mettre en place avant octobre. J'aimerais savoir exactement pourquoi il est si compliqué et pourquoi il va falloir attendre octobre. Est-ce à cause de ce que font Air Canada, Air Nova et leurs affiliés, ou est-ce parce que c'est difficile à mettre en oeuvre dans votre entreprise?

J'aimerais également avoir des précisions sur la capacité dont vous parlez et sur le fait qu'Air Canada, Air Nova et leurs affiliés ont rajouté des vols ou de la capacité de transport sur des lignes que vous desservez vous-mêmes. Est-ce que vous en avez dressé des listes permettant de faire des comparaisons entre les situations avant et après la fusion?

Est-ce que vous pourriez nous fournir ce genre de renseignement?

M. Dean Tuggey: En ce qui concerne les vols supplémentaires, je n'ai pas ces renseignements ici, mais ils sont disponibles.

Pour vous donner une idée approximative, pour la liaison Sept- Îles-Montréal, par Québec...

Mme Bev Desjarlais: Oui, si c'est possible, je ne veux pas nécessairement les détails d'une route en particulier. Le comité aimerait avoir ces renseignements par écrit pour l'ensemble du réseau, au lieu d'entendre parler aujourd'hui d'une route en particulier, si cela vous convient.

M. Dean Tuggey: J'allais simplement vous donner un exemple.

Dans certains cas, les capacités ont augmenté jusqu'à 150 p. 100. C'est là où cela nous pose un grave problème. Nous sommes une petite entreprise. Nous n'avons pas les moyens d'exercer une concurrence.

Mme Bev Desjarlais: Je comprends tout cela, mais j'aimerais avoir des détails par écrit. J'ai compris votre argument lorsque vous l'avez présenté la première fois, mais j'aimerais avoir les détails afin que nous sachions à quoi nous en tenir en ce qui concerne ce facteur dans son ensemble.

J'aimerais que vous répondiez à mes autres questions.

M. Dean Tuggey: En ce qui concerne les lettres, non, aucune lettre n'a encore été envoyée. Nous tenions à présenter notre point de vue au comité. Une fois cela fait, nous rédigerons des lettres et nous demanderons de l'aide à différents paliers de gouvernement, là où nous pouvons obtenir de l'aide.

Pour ce qui est du système de points, je crois qu'Air Canada est la seule compagnie à pouvoir répondre à cette question. Chaque fois que nous lui demandons d'accélérer le processus, elle nous dit qu'elle ne considère pas qu'il s'agit d'une question prioritaire et met ce dossier de côté.

Mme Bev Desjarlais: Quelle est à votre avis la solution en ce qui concerne cette question de capacité? Est-il nécessaire de réglementer le nombre de transporteurs présents tant que la capacité est d'un certain niveau? A-t-on besoin d'une réglementation quelconque? Quelle est la solution à votre avis?

M. Dean Tuggey: Il ne fait aucun doute qu'il y a suffisamment de place pour plus d'un transporteur. Ce pourrait être bon d'opter pour la réglementation ou au niveau de la concurrence, qui est notre principale préoccupation, d'empêcher les gros transporteurs d'accaparer le marché existant, surtout dans les régions où à long terme ce seront les passagers qui en souffriront les premiers. À long terme, ces passagers finiront par voir le service disparaître.

• 1035

Mme Bev Desjarlais: Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, Bev.

Bill Casey, avez-vous des questions?

M. Bill Casey: Oui.

J'aimerais avoir le point de vue de votre entreprise. Combien d'avions avez-vous, combien d'employés avez-vous et combien d'aéroports desservez-vous?

M. Dean Tuggey: À l'heure actuelle, nous avons cinq avions, 70 employés et nous desservons la totalité de la Basse-Côte Nord, c'est-à-dire environ huit aéroports, puis Sept-Îles, Québec, Montréal, Gaspé et Bonaventure.

M. Bill Casey: D'après ce que vous dites, à l'heure actuelle vous fonctionnez à perte.

M. Dean Tuggey: Oui.

M. Bill Casey: Depuis combien d'années fonctionnez-vous à perte?

M. Dean Tuggey: Ce ne sont pas des années, c'est moins d'un an, environ six à neuf mois.

M. Bill Casey: Auparavant, votre entreprise était-elle rentable?

M. Dean Tuggey: Nous arrivions à nous maintenir à flot.

M. Bill Casey: Qui sont vos actionnaires?

M. Dean Tuggey: Le président, Guy Marcoux, est l'actionnaire principal, mais nous avons des investisseurs partout sur la Basse- Côte Nord. Certains de nos pilotes sont des investisseurs, tout comme les collectivités locales. Nous avons un grand nombre d'investisseurs.

M. Bill Casey: Dans votre mémoire, vous indiquez que Transports Canada, qui est l'instance qui s'occupe de l'administration dans bien des cas, ne vous offre aucun appui. Vous avez parlé des aéroports. Qui assure l'administration dans les autres aéroports? S'agit-il des administrations locales?

M. Dean Tuggey: Les administrations locales, les villes, effectivement.

M. Bill Casey: Possédez-vous des aéroports?

M. Dean Tuggey: Non, nous construisons des pistes d'atterrissage, mais nous ne possédons pas l'aéroport.

M. Bill Casey: Vous avez construit des pistes d'atterrissage mais vous n'êtes pas propriétaire de l'aéroport. Êtes-vous propriétaire des pistes d'atterrissage?

M. Dean Tuggey: Non. L'objectif était d'offrir un meilleur service à la population de ces collectivités qui étaient desservies pendant l'été par des hydravions et par des avions à skis pendant l'hiver, puis, pendant le gel et le dégel, par des motoneiges. Donc nous avons pris l'initiative de construire des pistes d'atterrissage dans quatre de ces collectivités. Nous offrions auparavant le service à l'aide d'un Twin Otter, et maintenant nous l'offrons à l'aide d'un Caravan.

M. Bill Casey: Quel est le plus important amendement que nous pourrions apporter pour vous aider à survivre?

M. Dean Tuggey: Le plus important? Avoir une réglementation quelconque qui nous aiderait—ou peut-être ne devrais-je pas utiliser le mot «aider»...

M. Roy Bailey: Protéger?

M. Dean Tuggey: Oui, protéger. Exactement. Je vous remercie.

Le règlement le plus important serait celui qui nous protégerait ou nous empêcherait d'être étouffés par les grandes entreprises.

M. Bill Casey: Très bien, je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, Bill.

Monsieur Tuggey, il y a quelque chose que je ne comprends pas très bien. On vous a posé deux fois une question et vous avez répondu que vous vouliez en parler au comité. Lorsqu'en août dernier vous avez commencé à constater que la situation se détériorait, pourquoi ne vous êtes-vous pas adressé immédiatement au commissaire à la concurrence?

M. Dean Tuggey: Je dois avouer que je ne faisais pas partie de la compagnie en août dernier. J'étais de l'autre côté de la clôture.

Le président de la compagnie a fait de nombreux appels téléphoniques, mais comme je l'ai dit, aucune lettre n'a été adressée au Bureau de la concurrence, c'est certain. Je tiens à vous assurer que nous ne manquerons pas de le faire.

Le président: Donc, vous devez être réconforté de constater que ce projet de loi offre à votre compagnie la possibilité de s'adresser au commissaire à la concurrence, et que ce projet de loi donnera au commissaire à la concurrence des pouvoirs supplémentaires qui lui permettront d'ordonner à un monopole ou à une compagnie aérienne menaçante de mettre fin immédiatement à ses pratiques déloyales.

M. Dean Tuggey: C'est ce que nous espérons, effectivement.

Le président: Très bien.

Monsieur Tuggey, nous tenons à vous remercier d'avoir comparu devant notre comité. Nous avons trouvé votre exposé intéressant. Si vous pouvez transmettre directement à la greffière de notre comité l'information que Mme Desjarlais a demandée, elle pourra alors la distribuer aux membres du comité. Merci beaucoup.

• 1040

M. Dean Tuggey: Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Chers collègues, nous accueillons nos prochains témoins, des représentants de Lignes aériennes Skyservice Inc., dont M. L. Russell Payson est le président.

Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur Payson, au Comité permanent des transports. Je vous demanderais de bien vouloir présenter les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui. Vous voudrez bien prendre de cinq à huit minutes pour faire votre exposé, après quoi nous passerons directement aux questions.

M. L. Russell Payson (président, Lignes aériennes Skyservice Inc.): Je vous remercie, monsieur le président.

Je suis le président de Skyservice. Je suis accompagné de Richard Look qui est notre gourou à propos de tout ce qui se passe ici à Ottawa. C'est pourquoi je fais souvent appel à lui.

Comme la plupart d'entre vous n'êtes peut-être pas vraiment au courant de ce que nous faisons, j'ai pensé qu'il serait utile de vous décrire brièvement qui nous sommes. Skyservice est une compagnie spécialisée dans deux domaines particuliers du transport aérien, c'est à dire l'exploitation d'avions exécutifs et l'exploitation de services aériens. Notre principale motivation dans ces deux lignes de services a toujours été d'offrir un service de qualité. Tout ce que nous entreprenons ou produisons doit répondre à des critères élevés de qualité.

Pour vous donner un exemple, au cours des dernières semaines, nos services commerciaux—c'est-à-dire les services destinés aux avions exécutifs—ont été classés au quatrième rang de toutes les compagnies nord-américaines et mexicaines qui sont au nombre de 4 000 ou peut-être 5 000 et nous nous sommes classés au premier rang parmi les compagnies canadiennes au cours des cinq dernières années.

Notre système d'ambulances aériennes et d'évacuation médicale a lui aussi été reconnu à travers le monde et se mesure favorablement à celui de compagnies de renommée mondiale telles que Rega Swiss Air Ambulance, etc.

Nos services d'entretien offrent des prestations de qualité à des compagnies aussi méticuleuses et professionnelles que Bombardier et COMAIR, la filiale Delta Airlines pour qui nous assurons l'entretien d'un grand nombre d'avions à réaction régionaux.

Notre compagnie est la plus petite et la moins connue du public parmi les compagnies d'affrètement canadiennes, mais sa renommée n'est plus à faire au niveau de la qualité de ses services. Je tiens à ajouter que nous sommes la première compagnie à avoir eu un airbus A-330 en Amérique du nord, et que nous exploitons cinq airbus A-320, de même qu'un 727.

En matière d'expansion, nous avons été moins audacieux que certains de nos concurrents parce que nous avons préféré prendre moins de risques à cause de la capacité excédentaire qui existe sur le marché. Nous sommes fiers de mentionner que notre compagnie a généré des profits au cours de chaque année au cours de notre création en 1986. Nous avons décidé de ne pas risquer l'avenir de nos employés.

Cependant, avec les récents changements qu'a connu le marché canadien et dans le cadre de la restructuration du transport aérien au pays, nous croyons que des possibilités intéressantes et nouvelles peuvent être créés si les conditions sont bonnes. Afin de créer un environnement propice à une concurrence saine, il faudrait que l'on envisage de nouvelles solutions ingénieuses et créatives pour promouvoir aussi l'émergence d'une concurrence appropriée face à la domination d'un transporteur unique, jouissant d'un monopole presque complet sur certaines destinations, autrement, le statu quo nouvellement établi risque de se perpétuer au détriment des voyageurs.

• 1045

Vu le temps qui m'est alloué, je ne me propose pas de commenter chacun des amendements proposés, si ce n'est pour vous dire que nous appuyons le concept général sous-tendant cet important projet de loi.

Si nous voulons que le Canada s'assure une vraie concurrence dans ses services intérieurs et que la coexistence de transporteurs concurrents et d'Air Canada soit autre chose qu'un voeu pieux, vous vous devez d'apporter des mesures de contrôle qui soient efficaces. Dans notre propos de ce matin, nous voulons vous exhorter à promouvoir la création d'un environnement concurrentiel propice et sain, avec des conditions généreuses qui faciliteraient alors l'émergence de forces concurrentielles capables de rivaliser avec le transporteur dominant. Sans un cadre législatif adéquat, je ne crois pas qu'une concurrence sérieuse et significative puisse se concrétiser à cause des nombreuses barrières à l'entrée qui font partie du décor. Ces conditions propices devraient permettre aux autres transporteurs d'appuyer Air Canada dans sa percée sur les marchés internationaux, là où elle concurrence les transporteurs étrangers, mais elles devraient aussi limiter et circonscrire son potentiel d'infliger des dommages sérieux dans les services intérieurs qu'elle domine largement.

Essayons de faire un peu de prospective et projetons nous quelques années dans l'avenir pour nous demander si le cadre législatif et les règlements que vous allez étudier et proposer permettront de répondre favorablement aux questions suivantes: est- ce que les consommateurs canadiens et les diverses collectivités canadiennes seront bien desservis et auront-ils accès à des prix raisonnables? Est-ce que la nouvelle Air Canada fait partie de ces compagnies qui auront du succès à l'échelle planétaire? A-t-on créé des compagnies canadiennes pour faire concurrence à Air Canada à l'échelle du pays, et ont-elles été couronnées de succès?

Depuis l'acquisition de Canadien par Air Canada, je suis persuadé que plus d'un transporteur a caressé l'idée d'offrir un service intérieur amélioré pour répondre à la quasi-disparition de Canadien sous sa forme antérieure. À noter que jusqu'à présent, on ne s'est pas précipité, les réponses ont été timides à l'exception de quelques services supplémentaires sur certaines destinations intérieures, offerts à prix réduit. Jusqu'à présent, aucune compagnie ne s'est manifestée pour offrir des services complets qui seraient vraiment bénéfiques pour les voyageurs à l'échelle du pays. Pourquoi?

Je crois qu'il existe un certain nombre de transporteurs canadiens qui pourraient être intéressés à offrir des solutions de rechange valides et différentes de celles d'Air Canada, mais aucune de ces compagnies ne veut se suicider économiquement. La domination d'Air Canada et son pouvoir de contrôle sur tous les aspects du transport aérien rendent l'exercice fort aléatoire. Les seules compagnies qui tente actuellement de concurrencer Air Canada ont eu la prudence de s'éloigner de son emprise et de sa main mise sur le marché du plein tarif au Canada.

Comment expliquer la force d'Air Canada? Cette compagnie ne s'est pas faite du jour au lendemain, mais elle a été patiemment bâtie au cours de toutes les années où elle était sous contrôle du gouvernement, soit pendant plus d'un demi-siècle. Sa force est tellement disproportionnée par rapport aux autres entités canadiennes—et je trouve drôle l'analogie que M. Tuggey a faite avec David et Goliath, mais pour ma part, je pense que c'est plutôt la mouche et l'éléphant. Les réserves de capitaux et de fonds de roulement dont dispose Air Canada sont suffisamment élevés pour assurer sa survie, longtemps après que ses concurrents auront cessé d'exister. Ce pouvoir financier, conjugué à tous les autres avantages qu'elle a su s'assurer, qu'il s'agisse de l'emplacement privilégié de ses comptoirs, de ses rampes d'accès ou de ses salons Érables, commodément situés près des passerelles d'embarquement, ou de tous les autres accès aux services de manutention des bagages et services au sol, situés le plus près des points d'entrée et de sortie des passagers, sans compter les créneaux horaires les plus convoités dans les aéroports canadiens, la rendent quasiment intouchable, et ses concurrents pratiquement sans défense.

Air Canada a acquis ou hérité les meilleurs emplacements dans les aéroports canadiens, et vous devez trouver une solution équitable pour que ces emplacements ne deviennent pas l'apanage d'Air Canada. En effet, Air Canada ne doit pas considérer ces emplacements comme étant ses biens propres. Ces emplacements devraient appartenir aux diverses administrations aéroportuaires locales et être mis à la disposition de nouveaux transporteurs désireux d'offrir des services compétitifs. Ensemble, nous devons trouver un moyen de répartir équitablement l'accès à ces emplacements stratégiques dans tous les aéroports canadiens.

• 1050

Si le gouvernement canadien veut protéger les acquis et l'intérêt du public voyageur en lui donnant accès à une concurrence intérieure saine et vigoureuse, il se doit de trouver les moyens appropriés pour que les avantages inhérents dont dispose Air Canada soient aussi disponibles pour tous ses concurrents existants et potentiels.

Même si tous ces accès étaient acquis, l'accès au comptoir, aux portes d'embarquement, au salon, etc. dans les aérogares et dans les halls d'accès, tout nouveau transporteur devra faire face à une organisation qui s'est dotée des meilleurs systèmes de gestion du rendement tarifaire avec des ordinateurs puissants et des modèles de gestion de la charge marchande qui ont fait leur marque. Face à un tel monstre d'organisation, tout nouveau compétiteur se sentirait démuni s'il n'avait pas accès, lui aussi, à certaines des installations mentionnées précédemment.

La vice-présidente (Mme Val Meredith): Monsieur Payson, vous avez pratiquement utilisé toutes vos dix minutes. Voudriez-vous, s'il vous plaît, conclure afin qu'il nous reste du temps pour poser des questions?

M. Russell Payson: Très bien. Je saute le passage consacré au programme de fidélisation Aeroplan.

Au cours des dernières semaines, nous avons commencé à entrapercevoir les véritables intentions d'Air Canada vis-à-vis de la concurrence. Elle s'est fixé comme objectif sinon d'éliminer toute concurrence, tout du moins de la limiter au maximum. La fusion des deux compagnies lui permet désormais de contrôler virtuellement tous les principaux hangars et toutes les installations de formation du pays. Ces mesures que nous considérons comme étant relativement mesquines ne sont pas de bon augure pour les concurrents potentiels et nous croyons qu'elles reflètent l'intention réelle d'Air Canada, qui est de limiter au maximum la concurrence.

Nous avons joint à votre intention des commentaires sur un certain nombre de pratiques déloyales ainsi qu'un certain nombre d'observations sur les promesses faites par Air Canada au commissaire à la concurrence.

Je vous remercie infiniment de nous avoir écoutés.

La vice-présidente (Mme Val Meredith): Merci, monsieur Payson.

Étant donné les circonstances, nous commencerons par le Bloc. Michel, vous avez cinq minutes.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Payson, je vous remercie pour votre présentation. Il y a certains éléments que je trouve très pertinents, particulièrement à l'égard de certains comportements qu'on pourrait qualifier d'anticoncurrentiels, qui défavorisent l'établissement d'une réelle concurrence de la part d'Air Canada.

Je veux aussi vous dire que la question de la formation du personnel a été soulevée par Canada 3000 et Air Transat, qui vivent à peu près les mêmes situations. Je ne veux pas dire que vos commentaires ne sont pas pertinents, mais qu'ils viennent s'ajouter à ce que vos collègues d'autres compagnies on dit au sujet de ce qu'ils vivent dans l'industrie. Il y a la question de la location d'hangars.

Vous avez toutefois fait un commentaire que j'entends pour la première fois. Il s'agit de la question des systèmes de récompense ou de points grands voyageurs. J'aimerais que vous m'expliquiez comment cela pourrait s'articuler. Vous voudriez que ce soit géré par un organisme indépendant d'Air Canada. Vous dites:

    Je vous propose de considérer, dans l'intérêt du public voyageur et pour la préservation d'un système de récompenses qui soit totalement fiable et équitable pour tous les usagers, que ce plan soit géré indépendamment et en dehors de Air Canada.

Il faut comprendre que ces programmes de grands voyageurs sont des programmes de fidélisation. C'est pour encourager la clientèle, mais on sait que les compagnies aériennes développent des services autour de cela; elles offrent des billets gratuits et des salons. Ces salons ne s'appelleraient plus «Feuille d'érable»; ils seraient dans la nouvelle structure.

J'ai de la misère à comprendre cela. Par contre, je suis sensible à cela. Le témoin de Régionnair a mentionné que lorsqu'un ingénieur d'Hydro-Québec veut partir de Baie-Comeau et a le choix de prendre un transporteur affilié à Air Canada qui offre des points ou un petit transporteur concurrent qui n'offre pas de points, il est normal qu'il choisisse le transporteur qui offre des points. Dans une certaine mesure, les députés le font aussi. Je voudrais comprendre comment cela pourrait fonctionner si le système de points était géré à l'extérieur d'Air Canada.

• 1055

M. Russell Payson: Notre crainte est très simple. Il est probable que toutes les personnes qui se trouvent dans cette pièce sont membres d'Aéroplan. Je pense que nous sommes tous exactement pareils. Si vous avez 30 000 points aujourd'hui et que vous êtes capable d'obtenir 5 000 autres points d'Air Canada, cela va vous permettre d'amener votre femme et vos enfants en voyage. Il est certain que vous ferez votre prochain voyage avec Air Canada ou un de ses affiliés. C'est ce que nous voulons faire ressortir aujourd'hui. Quand les deux plans auront été comblés, qui ne sera pas membre de ce plan-là?

M. Tuggey a témoigné. Il semble avoir demandé à Air Canada si sa compagnie pouvait devenir membre. Air Canada va dire oui, mais au bout de six mois, une fois que la compagnie aura crevé. C'est exactement ce que que nous soulevons. Il y a un conflit d'intérêts. Si Aéroplan était une compagnie indépendante, ce serait une tout autre paire de manches, parce qu'Aéroplan serait intéressée à ce que toutes les lignes aériennes du Canada soient membres au lieu d'une seule. Voilà ce que nous voulons soulever au sujet d'Aéroplan.

M. Michel Guimond: Cela répond à ma question. Toutes les grandes alliances dans le monde, comme Star Alliance... Je ne vous dis pas que ce que vous dites n'a pas de sens, mais...

M. Russell Payson: Mais qu'est-ce que cela veut dire?

M. Michel Guimond: En réalité, une alliance comme celle-là et des points, c'est pour... C'est vrai que vous soulevez un point intéressant. Aujourd'hui, tous les voyageurs au Canada sont membres de Canadian Plus ou d'Aéroplan fusionné. Pour ma part, je suis membre du système de Delta Airlines et du système d'Air France, mais c'est vrai que je n'ai pas la possibilité de prendre Air France de Montréal à Vancouver.

M. Russell Payson: Combien des gens ici présents sont membres de Delta ou d'Air France? Vous n'aurez probablement jamais assez de points pour obtenir un voyage d'Air France. Les hommes d'affaires voyagent partout au Canada. On ne parle pas des opérations internationales. On parle de la concurrence à l'intérieur du Canada. Au Canada, 95 p. 100 des voyageurs sont probablement membres d'Aéroplan, alors que seulement 2 p. 100 d'entre eux sont membres d'Air France, de Delta ou d'AAdvantage.

M. Michel Guimond: [Note de la rédaction: Inaudible].

M. Russell Payson: Oui, mais les autres plans n'ont pas d'influence ici maintenant. Même si un transporteur comme le nôtre entrait dans ce marché avec un autre plan, cela n'aurait pas d'importance. Si j'offre Delta ou AAdvantage, qu'est-ce que cela va faire? Rien. Le gars qui voyage de Baie-Comeau à Québec n'est pas intéressé à voyager avec Delta. Il s'intéresse à Aéroplan. Le pouvoir de ce plan est incroyable: il peut changer la décision d'achat de quelqu'un.

[Traduction]

Le président: Merci, Michel.

Stan Dromisky, s'il vous plaît.

M. Stan Dromisky: Merci beaucoup, monsieur le président.

Savez-vous, j'ai trouvé votre exposé fort intéressant. Vous n'y avez pas été par quatre chemins pour identifier les problèmes. Beaucoup de réflexions et de discussions ont dû entrer dans cette proposition que vous faites et les problèmes que vous exposez. Vous avez certainement dû le faire en pensant à un modèle.

Si un de vos concurrents a un ou deux avions qui atterrissent tous les jours à Pearson, disons, sur le plan financier cela correspond à une infrastructure imposante. Je veux parler de toutes les ressources humaines nécessaires—les équipes au sol, l'équipement, les responsables des bagages, les comptoirs, le personnel, les services de renseignements auxquels s'ajoutent toutes sortes d'autres personnes nécessaires pour accueillir les voyageurs. Il n'y a pas beaucoup de compagnies qui doivent offrir tous ces services. J'ai l'impression que vous recommandez... Je n'en suis pas sûr, mais je pense que vous recommandez une sorte de partage.

M. Russell Payson: Non, ce n'est pas ce que je recommande. Je ne crois pas du tout aux subventions gouvernementales ou à des choses de ce genre.

• 1100

M. Stan Dromisky: Non, je ne parle pas de subventions. Je parle de partage avec les compagnies qui ont déjà toute cette infrastructure en place. Dans les plus petits aéroports, cela ne pose probablement pas un aussi grand problème, mais dans les grands aéroports le problème sera énorme.

Recommandez-vous qu'Air Canada partage ses ressources humaines, son équipement, ses installations, etc.?

M. Russell Payson: Non, non. Ce que je dis, c'est que...

Je vais vous donner un exemple. Prenons Dorval. Si vous allez aujourd'hui à Dorval, les comptoirs d'Air Canada sont situés immédiatement à l'entrée de l'aérogare si bien que, dès que vous entrez, les premiers comptoirs que vous voyez sont ceux d'Air Canada. Si c'est le comptoir d'un des concurrents qui vous intéresse—je ne sais pas où se trouve le comptoir d'Air Transat, mais qu'il soit dans T-3 ou ailleurs—il faut que vous vous rendiez à l'autre bout de l'aérogare pour pouvoir vous enregistrer.

Et je parle de liaisons intérieures. Nous voulons concurrencer Air Canada sur les liaisons entre Montréal et Halifax, Montréal et Toronto, Montréal et Ottawa, etc. Je ne parle pas des vols internationaux, simplement des vols intérieurs. Vous êtes le voyageur, vous vous présentez à l'aéroport et comme ça arrive souvent dans la vie, votre femme vous a demandé de ne pas oublier le cadeau de 5 kilos pour les enfants et toutes sortes d'autres choses. Ça ne vous arrive jamais?

Des voix: Oh!

M. Russell Payson: Vous devez vous rendre à la porte d'embarquement et vous avez tous ces bagages à main à traîner avec vous. Vous passez devant toutes les portes d'Air Canada—je vous parie qu'actuellement il y a un kilomètre à parcourir avant d'atteindre une porte qui ne soit pas réservée à Air Canada—et vous devez descendre l'escalier, emprunter le souterrain et, comme d'habitude, le trottoir roulant ne marche pas. Vous devez donc traîner tout ce que vous avez avec vous et remonter l'escalier pour atteindre l'autre côté. La fois suivante, vous vous direz: «Tant pis pour les 100 $ de plus que coûte Air Canada, au moins j'accumulerai des points».

C'est ça que j'essaie de vous dire. Air Canada a les portes les plus accessibles, les comptoirs les plus accessibles, les salons aux meilleurs endroits...

M. Stan Dromisky: Que recommandez-vous?

M. Russell Payson: Par exemple, à Dorval il y a les portes de Canadian qu'Air Canada vient de récupérer. Pourquoi ne pas offrir ces portes à quelqu'un d'autre? La compagnie a récupéré aussi les comptoirs de Canadian qui étaient également très bien placés.

M. Stan Dromisky: Et les installations, les ressources humaines, l'équipement et tout ce qui va avec?

M. Russell Payson: Non, parce qu'il y a conflit d'intérêts. Vous reposer sur un de vos concurrents pour un service quelconque pose inévitablement un risque. Votre concurrent a son propre travail à faire qu'il s'agisse d'entretien ou de services au sol. Je ne demande pas de cadeau à Air Canada. Ce que je vous suggère, ce que je suggère aux membres de votre comité, c'est de dire lorsqu'il y a des problèmes de partage d'accès dans certains aéroports: «Air Canada, désolé, ce n'est plus votre tour, il faut donner une chance à ces autres compagnies et leur donner au moins la possibilité de vous concurrencer».

Nous voulons concurrencer Air Canada et nous sommes tous pratiquement pieds et mains liés pour le faire. C'est la raison pour laquelle je vous dis que les candidats ne manqueraient pas, nous y compris. Nous nous demandons comment surmonter cet obstacle. Trouver le financement n'est pas un problème. Le problème c'est que cette compagnie a absolument tout pour elle. Elle a les employés les mieux formés du pays, tous les systèmes d'exploitation de capacité travaillent pour elle, elle a tous les systèmes de gestion tarifaire nécessaires et elle connaît vos intentions avant que vous ne les connaissiez vous-même. En conséquence, s'attaquer à cette compagnie est une tâche pratiquement insurmontable.

Soyons honnête. Vous entendez tout ce qui se dit. Il y a beaucoup de gens qui seraient prêts à essayer une autre compagnie si on lui donnait les moyens qu'il lui faut. S'il n'y avait pas Aeroplan, elle aurait probablement ses chances, mais cela coûtera quand même beaucoup d'argent. Il y en a certainement parmi nous qui aimeraient tenter leur chance, mais tout le monde évite la confrontation pour éviter les réactions. Et Air Canada ne manque pas de réagir. Selon moi, dans de nombreux cas, Air Canada a agi de manière très prédatrice.

Le président: Merci, Stan.

M. Stan Dromisky: Merci.

Le président: Bev Desjarlais, je vous en prie.

Mme Bev Desjarlais: J'ai une ou deux questions à poser.

Vous venez de dire que vous ne vous attendez pas à ce qu'Air Canada ou une autre compagnie cède une partie de ses installations. Je note qu'à la page 4 de votre exposé vous dites:

    Dernièrement, Canadian Airlines s'est retirée de toutes les ententes et de tous les accords d'utilisation d'installations avec d'autres compagnies aériennes canadiennes y compris Skyservice. Auparavant, Canadian Airlines était disposée à louer une partie de ces installations comme par exemple les hangars, les centres de formation et les services au sol.

Si je vous comprends bien, il n'est pas crucial pour vous que cela se produise; mais entre-temps...

M. Russell Payson: Ce que je dis, c'est que cela démontre l'intention de nuire ou de porter préjudice; voilà tout. C'est la seule raison pour laquelle j'en ai parlé.

Mme Bev Desjarlais: Bien. Vous dites que cela démontre l'intention de nuire ou de porter préjudice, et pourtant vous dites aussi que cela constitue aussi une mauvaise pratique commerciale. Je ne sais trop quoi penser.

Mais j'ai une question au sujet des installations aéroportuaires et la façon dont elles sont réparties. À la suite de son désinvestissement dans les aéroports, le gouvernement a permis aux administrations aéroportuaires locales d'exploiter de façon autonome les aéroports. Le comité a déjà entendu dire que les administrations aéroportuaires locales ont désormais le droit de s'entendre à leur façon avec les compagnies aériennes. Par conséquent, si Air Canada représente un volume suffisamment considérable de vols, les aéroports peuvent conclure une entente avantageuse avec celle-ci pour l'utilisation de certaines installations.

• 1105

D'une part, on a prévu faire profiter les administrations aéroportuaires locales des débouchés d'affaires, mais de votre côté, vous ne semblez pas être d'accord: vous semblez dire que ce dessaisissement devrait être réglementé, ou contrôlé, pour que l'administration aéroportuaire locale n'ait pas les coudées complètement franches.

M. Russell Payson: Ce que nous disons, c'est qu'il devrait y avoir un dessaisissement forcé, unique et ponctuel, de tous ces privilèges, par exemple l'emplacement d'un comptoir ou d'une porte d'embarquement, et ce pour donner à de nouveaux arrivants une chance; en effet, à l'heure qu'il est, si Air Canada représente 85 p. 100 des revenus d'une administration aéroportuaire locale. Cette dernière ne saura pas résister à ses menaces. C'est ça que vous devez comprendre. Il faudrait que quelqu'un puisse décider à Dorval, par exemple, que les portes d'embarquement qui étaient autrefois réservées à Canadien seront offertes à quiconque se présentera et sera disposé à reprendre...

Mme Bev Desjarlais: Vous proposez que cela se fasse une seule fois, de façon ponctuelle, c'est-à-dire maintenant et dans les aéroports qui nous intéressent. Vous n'envisagez pas de permettre aux concurrents de venir s'installer pour offrir un marché concurrentiel, n'est-ce pas? Ce que vous suggérez, c'est uniquement pour maintenant, de façon ponctuelle?

M. Russell Payson: À vrai dire, je vous laisse décider.

Mme Bev Desjarlais: Mais vous comparaissez pour nous suggérer...

M. Russell Payson: Je n'ai pas eu le temps de...

Mme Bev Desjarlais: Vous parlez d'une proposition ponctuelle, unique... Je veux bien comprendre: suggérez-vous que cela se fasse uniquement une seule fois, au début, puis que nous permettions par la suite la concurrence sur ce marché? Ou est-ce plutôt que vous proposez d'agir ainsi de façon permanente?

M. Russell Payson: Disons que cela pourrait se faire de façon ponctuelle, et une seule fois, pour les prochaines années—autrement dit, pour permettre à de nouveaux arrivants de présenter leurs plans. Ce que je vous demande, c'est de nous donner à nous, les autres compagnies aériennes, la possibilité de présenter des plans bien montés. Mais nous devons savoir à quoi nous pouvons nous attendre avant de vous faire des propositions. Si nous savons que nous pouvons espérer avoir des portes d'embarquement ou des créneaux, par exemple—je n'ai pas encore parlé des créneaux—si nous pouvons espérer quelque chose, la situation est toute autre. Par contre, si nous savons dès le départ que nous n'avons aucune chance d'obtenir des créneaux à l'aéroport Pearson, à quoi cela sert-il de faire la moindre proposition que ce soit?

Mme Bev Desjarlais: Une dernière question, au sujet d'Aéroplan. Vous nous avez fait des suggestions au sujet d'Aéroplan et de ce qui devrait arriver à ce programme: comment pouvez-vous parler d'avantage commercial pour une compagnie aérienne donnée, si ce système de points doit être accordé à chaque compagnie aérienne? Je ne vois pas en quoi cela pourrait être un avantage. En fin de compte, ce sont les consommateurs qui y perdraient, car si toutes les compagnies aériennes sont obligées d'accorder des points en fonction des mêmes règles, j'ai l'impression qu'elles pourraient décider d'augmenter le nombre de points nécessaires pour faire tel ou tel trajet. Finalement, cela n'avantagerait en rien les consommateurs. Comment pouvez-vous dire qu'il s'agit d'un avantage commercial?

M. Russell Payson: À l'heure qu'il est, il s'agit d'un avantage non imposable. Autrement dit, il s'agit d'un escompte sur le prix. Et c'est à chaque compagnie aérienne, je crois, de décider si elle veut ou non offrir cet escompte. Je pense, pour ma part, que ces programmes de fidélisation ont eu tant de succès partout dans le monde qu'ils constituent un énorme avantage concurrentiel. Dans le pire des cas, la compagnie aérienne qui n'en offrirait pas serait complètement désavantagée.

Mme Bev Desjarlais: Je suis d'accord, mais je ne vois pas en quoi ce programme deviendrait un avantage concurrentiel pour Air Canada. Pourquoi se donner la peine d'offrir des points si tout le monde le fait? Ne vaudrait-il pas mieux pour toutes les compagnies aériennes de ne pas en offrir, mais d'offrir plutôt des sièges à prix moindre?

M. Russell Payson: Ce ne serait pas avantageux pour Air Canada. Ce que j'essaye de faire, c'est d'établir des règles du jeu équitables pour les autres compagnies aériennes, pas pour Air Canada.

Le président: Monsieur Bailey, vous avez la parole.

M. Roy Bailey: Merci beaucoup.

Je sais que nous allons aborder aujourd'hui la question sous un angle différent, et vous avez, pour votre part, jeté une lumière différente sur la question, une lumière qui nous permet de mieux visualiser le problème. Vous avez parlé de la longue marche à faire dans les aéroports, et c'est tout à fait vrai. Si je vous comprends bien, vous affirmez que le projet de loi rendra la situation à ce point inflexible qu'elle sera coulée dans le béton et qu'aucun autre concurrent, exception faite des quelques compagnies qui sont déjà installées, n'aura la moindre chance.

Soit dit en passant, je lisais dans votre rapport que vous avez déjà un service d'ambulance aérienne. C'est quelque chose qui m'intéresse personnellement. Les provinces vous versent-elles des provisions pour retenir vos services d'ambulance aérienne?

M. Russell Payson: Non.

M. Roy Bailey: Bien. Beaucoup de provinces ont déjà eu, et ont peut-être encore, des services d'ambulance aérienne.

Vous demandez au comité de trouver une façon de... Vous avez dit vous-même qu'en l'absence de règlements, vous ne voyez pas comment il serait possible de garder les portes ouvertes à des concurrents à Dorval ou à Pearson. Autrement dit, en l'absence de règlements de la part du gouvernement, vous vous demandez comment il serait possible à de nouveaux arrivants de se tailler une place?

• 1110

M. Russell Payson: Mon ignorance de la façon dont fonctionne le gouvernement va vous sauter aux yeux. Je ne sais pas comment vous suggérer de faire. J'essaie plutôt de vous exposer le problème que connaît notre secteur de l'industrie aérienne. Mais à vrai dire, je ne sais pas non plus quelle solution vous proposer. Si le gouvernement n'intervient pas, personne n'osera tenter sa chance, parce que la situation sera beaucoup trop désavantageuse.

M. Roy Bailey: Comme nous l'avons déjà expliqué aux autres témoins, et comme nous l'expliquerons sans doute probablement aux autres témoins, plus tard dans la journée, il est certain que le projet de loi fera l'objet d'amendements, et c'est pourquoi notre comité a le devoir de cerner la problématique du mieux possible. J'imagine que tous les partis qui sont ici représentés voudront proposer des amendements.

D'après ce que j'ai compris, il y a quelque chose de très dangereux qui se déroule actuellement au Canada. Non seulement l'oisillon géant n'a-t-il pas encore quitté le nid, mais il se comporte déjà comme un véritable prédateur et avale tout sur son passage. Cela m'inquiète énormément, car la province que je représente connaît déjà une certaine concurrence—concurrence qui pourrait elle aussi être éliminée de diverses façons.

Je vous remercie de nous avoir fait part de votre point de vue qui diffère quelque peu de celui des autres témoins, mais dont nous tiendrons certainement compte dans nos délibérations.

Le président: Val Meredith.

Mme Val Meredith: À l'aéroport de Vancouver, il existe une certaine flexibilité dans l'attribution des portes d'embarquement, en tout cas à l'aérogare internationale. Aucune compagnie aérienne n'est propriétaire des portes puisque celles-ci changent d'un vol à l'autre. Cette flexibilité est-elle possible pour les vols nationaux?

M. Russell Payson: Bien sûr. D'ailleurs, cela se fait déjà, depuis que l'aérogare 3 de Toronto a été réorganisée. Mes propos ne visent donc pas l'aéroport de Toronto, car ce sont d'autres problèmes qui surgissent là-bas. Autrement dit, s'il y a des échanges intercompagnies de passagers vers Air Canada, cela ne fonctionne pas aussi bien à Toronto, pour l'instant. Mais du strict point de vue des portes d'embarquement, je ne pourrais pas étendre mes propos à l'aérogare 3 de Toronto, car il se fait actuellement un partage des portes d'embarquement, de façon probablement assez équitable. Je crois qu'il en va de même pour Vancouver.

Mme Val Meredith: Oui, pour les vols internationaux, mais je ne suis pas sûre que cela se fasse pour les vols nationaux, et c'est pourquoi je vous posais la question. Est-il possible d'appliquer la même règle pour les vols nationaux, étant donné les divers systèmes informatisés et tous les appareils afférents? Tout le monde utilise-t-il le même système informatisé?

M. Russell Payson: Non.

Mme Val Meredith: Bon. Dans ce cas, si certains comptoirs fonctionnent avec tel système informatisé pour une compagnie donnée, ils ne fonctionneront pas nécessairement pour une autre compagnie. Même si l'on parle de vols intérieurs, il n'est peut- être donc pas possible de partager les portes d'embarquement ou est-ce que je me trompe?

M. Russell Payson: Vous m'en demandez beaucoup, car je ne connais pas à fond Vancouver.

Mme Val Meredith: D'accord, mais Vancouver est... Ce que je dis, c'est que chacun de ces aéroports a sa propre configuration; mais j'aimerais savoir si votre compagnie aérienne peut partager la porte d'embarquement—ou le comptoir, pourquoi pas—avec Air Canada ou avec Canada 3000, par exemple? Votre système est-il compatible avec celui des autres compagnies?

M. Russell Payson: Je crois qu'il suffirait d'avoir un câblage distinct et d'installer notre propre système électrique.

Mme Val Meredith: C'est donc possible.

M. Russell Payson: Je le crois. En fait, il suffirait de changer un peu la tuyauterie, mais cela pourrait être fait.

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Ovid Jackson, vous avez la parole.

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): J'ai deux questions à poser à M. Payson.

Êtes-vous en train de nous dire qu'il existe déjà des modèles satisfaisants et qui vous permettraient à vous de tenir le coup devant la concurrence? Les résultats ne sont peut-être pas si reluisants que cela à Dorval, mais je crois que dans bien d'autres aéroports, il y a des créneaux et des comptoirs disponibles. Sont- ils partagés? Comment ferait-on pour s'assurer que chacun a accès à sa juste part? Une coalition serait-elle utile dans ce cas-là?

M. Russell Payson: Je vous donne un exemple: je crois qu'à l'aéroport de Dorval, la compagnie Canadien a déjà eu les portes 8, 9 et 10 qui sont les premières portes à votre droite, le long de l'aile des vols intérieurs à droite. Si l'on transformait ces portes en portes partagées, il me semble que cela permettrait une bien plus grande compétitivité que si tous les autres concurrents devaient se rabattre sur l'aéroport satellite... Je crois que Canadien a été obligé de céder les portes 37, 38 et 39, ou quelque chose comme ça. On me dit que c'est cela. À mon avis, c'est une farce, car pourquoi voudrait-on céder les portes qui sont les plus éloignées plutôt que celles qui sont les plus proches?

• 1115

M. Ovid Jackson: J'ai aussi une question au sujet des systèmes informatiques qui évoluent très rapidement. On commence déjà à donner aux voyageurs leur propre disquette pour qu'ils fassent leurs réservations en direct. C'est parce qu'on cherche à éliminer les intermédiaires. Seulement 10 p. 100 des billets sont vendus de cette façon, car les voyageurs veulent toujours faire affaire à des agents de voyage, à des gens qui ont de l'expérience et à des représentants au sol, de façon à ne pas se faire avoir.

Comment les systèmes informatiques qui sont très évolutifs fonctionneront-ils? Faut-il faire d'autres rajustements, ou est-ce tout simplement que ce domaine évolue au point où les passagers feront leurs propres réservations par l'entremise des grands géants comme Gemini?

M. Russell Payson: Dans le cas des billets automatisés et des cartes d'embarquement, dès lors que vous avez vos propres portes d'embarquement et qu'elles vous appartiennent, vous pouvez commencer à installer vos propres appareils et votre propre système informatique, ce qui vous donne un énorme avantage concurrentiel sur ceux qui n'auraient pas leurs propres portes d'embarquement et qui voudraient tout de même faire face à la concurrence.

Ce n'est qu'un autre moyen pour Air Canada d'avoir un avantage concurrentiel. Soyons francs, il est beaucoup plus facile de passer par elle. Lorsque je suis arrivé l'autre jour, j'étais pressé et j'ai appelé 40 minutes à peine avant le vol. Ma secrétaire a payé par carte de crédit. Je suis arrivé, j'ai produit ma carte, obtenu ma carte d'embarquement et monté dans l'avion. Il y avait une file d'attente de 30 ou 40 personnes et j'aurais très bien pu manquer mon vol.

C'est très avantageux pour Air Canada d'offrir ce service. Si nous réussissions, nous serions bien contents d'offrir le même service. Mais puisque nous n'avons même pas les portes, ce n'est pas possible.

M. Ovid Jackson: C'est bien logique. Merci.

Le président: Merci, Ovid.

Monsieur Payson, merci beaucoup de votre témoignage devant notre comité et d'avoir répondu à nos questions.

Merci, monsieur Look.

Chers collègues, notre prochain témoin est M. Robert Davis, président et directeur général de First Air.

Monsieur Davis, bienvenue au Comité permanent des transports. Nous sommes prêts à entendre votre exposé, de cinq à dix minutes, puis nous vous poserons des questions.

Allez-y quand vous serez prêt, monsieur.

M. Robert Davis (président-directeur général, First Air): Avant de lire le mémoire que j'ai préparé, je vous signale que les trousses qui ont été distribuées contiennent une pièce de 25 cents du millénaire, du mois de novembre. Il ne s'agit pas d'une contribution politique. Cette pièce de monnaie a une histoire particulière.

On y trouve représenté un avion Beaver. Sur l'appareil, on peut lire le nom Bradley, qui est le nom commercial réel de First Air. Cet appareil nous appartient et nous sommes très fiers de ce que la Monnaie royale ait choisi de le faire figurer sur la pièce de monnaie, qui circule à 30 millions d'exemplaires. Nous avons encore cet avion. Il vole encore et transporte encore des passagers.

Si je vous donne cette pièce de monnaie, c'est que je sais que vos réunions ont été ardues pour tous. Bon nombre de témoins sont venus vous donner des conseils et puisque je ne suis pas certain de la grande valeur des miens, j'ai décidé de vous payer au lieu.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Très bien, merci.

Une voix: Voulez-vous un reçu?

M. Robert Davis: Non, ça va.

Monsieur le président, honorables membres du comité, je vous remercie de cette occasion de présenter nos vues au comité sur l'enjeu important que représente le projet de loi visant la restructuration du transport aérien.

Appartenant entièrement aux Inuits du Nunavik, First Air est à la fois la plus grande des compagnies aériennes détenue par un groupe autochtone et le plus gros transporteur nordique. First Air emploie plus de 1 000 personnes, qui vivent et travaillent dans le Nord canadien, et fournit des services essentiels de transport aérien à 26 communautés éloignées, dont la plupart ne sont accessibles que par avion. Dans le Nord, le service aérien n'est pas un luxe, mais bien une nécessité.

• 1120

Vu le territoire qu'exploite First Air, notre attention porte ici sur la protection des intérêts des transporteurs nordiques et de nos actionnaires dans ce processus de restructuration évidemment destiné au sud du pays. Nous soutenons en effet que le projet de loi a été élaboré surtout pour protéger l'intérêt public de l'émergence d'un transporteur dominant par suite de la restructuration. L'intention était sans doute bien fondée, mais le projet de loi soulève des questions complexes et entraîne des impacts inutiles sur chacun des transporteurs aériens du Canada.

Nous ne nous opposons pas à la nouvelle loi, mais nous croyons toutefois que le Nord mérite une considération particulière vu la nature essentielle des services aériens dans toute cette région. Tout d'abord, la nouvelle loi doit assurer le maintien d'un niveau équitable de concurrence, de sorte que le marché se règle sur la demande des consommateurs et la concurrence commerciale et non pas sur la législation.

Le temps ne nous permet pas de soulever ici tous les points dont nous aimerions traiter, mais les grandes questions suivantes ont retenu notre attention.

L'article 66 proposé porte sur les prix excessifs. Les modifications prévues pour l'examen des tarifs compliquent encore davantage un processus déjà subjectif et flou. First Air est l'une des rares compagnies aériennes du Canada ayant été assujettie à un examen par suite de la plainte d'un passager en vertu de la loi existante. La décision rendue nous a été favorable, mais l'expérience nous a clairement démontré qu'en l'absence d'un processus bien défini, de règles sur le caractère confidentiel des renseignements et de critères objectifs de décision, aucune des parties—ni le plaignant, ni l'Office des transports du Canada, ni nous-mêmes—n'était satisfaite du processus.

Nous rappelons que cet exercice futile a été exécuté en vertu de la loi actuelle afin d'examiner le seul type de tarifs passager. On propose maintenant que l'Office non seulement réponde aux plaintes, mais entreprenne aussi sa propre chasse aux sorcières et examine tous les tarifs applicables aux passagers et au fret, cela sans définir le processus, ni même préciser la liste et le format des renseignements à fournir afin de mener un tel examen.

Les transporteurs offrent maintes gammes de tarifs, de soldes et d'allocations de places qui fluctuent au gré du marché. Par conséquent, il faudra instaurer un processus bien plus complexe pour examiner les prix.

Cette complexité accrue entraînera plus d'incertitude pour ce qui concerne bien des exigences au regard de l'établissement des prix, du maintien de la conservation des registres et des réponses aux plaintes. Il incombe à l'Office de fournir, avant l'adoption de la loi, des lignes directrices claires et concises sur la manière dont il entend, dans la pratique, exercer cette vaste gamme de nouveaux pouvoirs.

Nous recommandons que l'article 66 devrait être modifié pour assurer que les critères d'examen demeurent restreints aux tarifs de base. Les pouvoirs attribués à l'Office devraient se limiter à répondre aux plaintes.

Pour ce qui est des tarifs de fret, l'idée d'assujettir les tarifs de fret au processus d'examen, comme le veut l'article 66, est insoutenable. Comment le gouvernement peut-il même envisager que le fisc puisse mener un examen constant ou des comparaisons de nos tarifs de fret alors que 90 p. 100 du volume que nous transportons est unidirectionnel?—pleine cargaison en direction nord, soute vide en direction sud. Nous exploitons quatre appareils combinés qu'on peut transformer en 38 configurations passagers/fret, sans compter qu'un aménagement donné peut être reconfiguré en transit sur une route à multiples arrêts.

Par ailleurs, rien ne prouve l'existence des monopoles des marchés du fret au Canada, et la concurrence demeure farouche sur tous les marchés desservis par plus d'un transporteur.

Nous recommandons que soit rayé de tout le projet de loi tout renvoi à l'examen des tarifs de fret par l'Office.

L'article 64 porte sur la suppression du service. Nous appuyons en général la position présentée par les représentants de notre industrie, soit l'Association du transport aérien du Canada, mais à notre avis, le milieu nordique exige une considération particulière.

La liberté de soutenir la concurrence et de cibler des routes précises, sur une base saisonnière ou autrement, est peut-être bien acceptable dans le sud du pays, où se trouve un marché considérable et où l'on peut stimuler le développement du trafic. À vrai dire, WestJet est passé maître dans l'application d'un tel concept et devrait avoir toute liberté dans ce sens. Les marchés du nord, cependant, sont minces et éloignés. Pour y survivre, il faut trouver le juste équilibre entre la fréquence des vols, le mélange passager-fret, le réseautage, etc.

• 1125

Notre expérience nous enseigne que d'assujettir les petits marchés individuels aux quatre volontés des transporteurs qui n'entendent pas vraiment desservir la région ne stimule pas le développement du trafic, mais divise simplement le trafic existant et déstabilise les marchés, sans que le consommateur n'en tire de bénéfice à long terme. En l'absence de dispositions solides sur la sortie d'un marché, le milieu nordique sera exposé à des niveaux de service peu fiables et incohérents.

Notre recommandation, sur la suppression de service, est que l'article 64 devrait être modifié pour inclure des conditions sévères, applicables exclusivement aux marchés du nord, sur la sortie de marché (ou à l'inverse, l'entrée sur un marché).

Lettre d'engagement sur le service aux petites communautés, en date du 21 décembre 1999: First Air s'oppose fermement, parce qu'elle la considère discriminatoire, à la partie sous-titrée «Service aux petites communautés» de la lettre d'engagement du 21 décembre 1999 que le gouvernement a approuvée et qui a été intégrée dans la nouvelle loi. Cet engagement nomme notre principal concurrent et lui confère la protection de la loi pendant trois ans sous prétexte de servir les petites communautés. Cette mention est inacceptable étant donné que First Air fournit présentement des vols réguliers et à l'année longue à ces petites communautés, avec la seule exception desservie par notre principal concurrent. L'engagement relève davantage du soutien commercial consenti par Air Canada à nos concurrents que de la fourniture de service aux petites communautés.

On peut se demander pourquoi le gouvernement semble indifférent au sort des 26 petites communautés nordiques desservies par First Air et pourquoi il n'a pas envisagé que notre compagnie fasse partie de l'engagement en question, même si le gouvernement savait qu'une entente liait First et Air Canada à cet égard. La situation est trop inconcevable pour être honnête.

Nous sommes en activité dans un marché soumis à la concurrence. First Air n'est pas protégée par la loi, et ne veut pas l'être non plus. Nous voulons par contre soutenir la concurrence sur un terrain égal; nos concurrents et leurs employés ne sauraient invoquer la loi pendant que vous volons à nos propres risques vers les communautés éloignées et dispersées dans tout le Nord, comme nous l'avons fait depuis bien des années. Et pourquoi nos employés, dont un grand nombre sont inuits, devraient-ils travailler sans la protection législative que le gouvernement est disposé à offrir à nos concurrents?

Notre recommandation, au titre des services aux petites communautés, est que la lettre d'engagement doit être modifiée afin d'en retirer tous les transporteurs aériens qui y sont nommés ou de réduire la durée de l'appui commercial consenti à une période plus raisonnable.

Pour conclure, je ne saurais trop insister sur l'importance que prennent des services de transport aérien efficaces et fiables dans le Nord canadien. Si cela vous intéresse, je vous invite à venir y visiter les communautés et à constater personnellement l'impact du transport aérien sur la vie quotidienne des gens. Il faut couvrir un vaste territoire pour servir un marché relativement petit.

Je ne voudrais pas que mes observations vous semblent négatives. Jusqu'à présent, Transports Canada nous a écoutés. Mme Dufour et son équipe nous ont accueillis et se sont montrés prêts à écouter nos doléances. Nous n'avons pas encore de solution à proposer, mais l'écoute est au moins un premier pas dans la bonne direction.

J'espère que vous retiendrez les recommandations que je vous ai présentées, en particulier les commentaires sur le service aux petites communautés. Nous nous sommes engagés à servir ces communautés en développant notre entreprise dans le Nord canadien depuis 53 ans. Je m'en remets à vous pour assurer que la loi nous permette de poursuivre ce développement.

Merci beaucoup. Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup de votre témoignage, monsieur Davis.

Val Meredith.

Mme Val Meredith: Merci, monsieur Davis. Je veux poser mes questions dans la veine de certaines de vos observations.

Vous avez dit qu'une entente liait First Air et Air Canada pour le service à ces collectivités. Est-ce exact?

M. Robert Davis: Nous avons une entente commerciale avec Air Canada. Mais cette entente porte sur l'élaboration conjointe des services. Elle ne nous oblige pas à offrir les services à certaines collectivités.

Mme Val Meredith: D'accord, mais vous offrez actuellement vos services à ces collectivités du Nord, des collectivités éloignées et plus petites du Nord, alors qu'elles ne sont pas desservies par Air Canada. Air Canada offre-t-il ce service par votre intermédiaire?

M. Robert Davis: Oui, sur certains trajets, les services sont conjoints. Cela représente environ de 33 à 50 p. 100 de nos vols. C'est surtout le service par jet qui utilise le code d'Air Canada; pour les autres vols, nous utilisons notre propre code interne.

Mme Val Meredith: D'accord. Je croyais que cette entente avec Air Canada n'existait plus—que vous deviez voler de vos propres ailes.

• 1130

M. Robert Davis: Non. Nous l'avons expliqué au comité lors de notre dernière comparution. C'est un concept très difficile à comprendre.

Notre principal concurrent est, en fait, ce que nous appelons une société aérienne virtuelle. Lignes aériennes Canadien fournit tous les appareils, le personnel, les opérations d'entretien et l'infrastructure pour le service dans le Nord et c'est donc avec cette société que nous sommes en concurrence. Il y a plusieurs années, nous nous sommes ralliés à Air Canada parce que Canadien exploitait le Nord. First Air est un transporteur indépendant qui possède ses propres appareils, son personnel, ses bâtiments, etc. Il y avait donc deux grandes sociétés aériennes au Canada et dans le Nord, et celle du Nord était alliée aux deux transporteurs du Sud. Il ne reste plus maintenant, bien sûr, qu'une seule société dans le Nord. Nous essayons d'avoir des services complets, deux sociétés aériennes dans le Nord alors que les avions seront exploités par Air Canada. Cela crée une situation très difficile.

Mme Val Meredith: Vous avez donc toujours cette entente commerciale avec Air Canada.

M. Robert Davis: Oui, effectivement.

Mme Val Meredith: Il y a donc Canadien, qui est également Air Canada, qui offre des services dans le nord, et aussi vous-mêmes. Ce que vous craignez, c'est de vous trouver évincés, au fur et à mesure que Canadien s'implante aux côtés d'Air Canada dans le nord. Est-ce bien cela?

M. Robert Davis: Effectivement, depuis le départ, tout ce que nous demandons, c'est que tout le monde soit traité de la même façon. Pour ce faire, il ne faudrait pas que notre concurrent puisse louer des appareils d'Air Canada avec équipage. Par exemple, lorsque nous devons nous mesurer à leur pouvoir d'achat en ce qui concerne le carburant ou l'assurance, nous avons beaucoup de mal à suivre. Ils réussissent même à échapper aux dispositions législatives. Par exemple, nous avons été forcés d'installer un kit d'atténuation du bruit dans nos appareils. Comme Canadien a une flotte bien plus importante, il lui suffit de satisfaire aux ratios exigés. Cela leur donne beaucoup d'avantages financiers que nous n'avons pas.

Mme Val Meredith: Mais dans la réalité, vous continuez à considérer Canadien comme une compagnie aérienne séparée. La réalité, c'est que Canadien, ses appareils, son personnel et que ses conditions d'exploitation vont relever d'Air Canada, si ce n'est déjà le cas. Autrement dit, c'est Air Canada qui vous concurrence, en dépit de cet accord que vous avez avec Air Canada.

Maintenant, vous dites que la législation est injuste pour les petits exploitants, en vous séparant maintenant d'Air Canada, et vous dites qu'il n'est pas juste pour les petits transporteurs de réglementer dorénavant le fret, et d'utiliser tous les tarifs, et plus seulement les tarifs standards. Toutefois, si j'ai bien compris, ces règlements ont été adoptés pour favoriser la concurrence d'Air Canada, pour empêcher Air Canada de manipuler les tarifs du transport aérien. Est-ce que vous venez nous dire aujourd'hui que c'est l'inverse qui se produit?

M. Robert Davis: Si First Air s'est livrée à cet exercice, c'est que nous avons des opérations dans le nord, et en particulier une route qui est considérée comme un monopole. N'importe qui peut exploiter une route aérienne n'importe où dans ce pays. Nous sommes la seule compagnie qui accepte le risque commercial que représente cette route. Voilà ce dont il s'agit.

C'est un exercice auquel nous nous sommes livrés, et ça n'a pas fonctionné. Les gens qui se sont plaints considéraient qu'ils n'étaient pas traités de façon équitable. Nous avons obtenu une décision en notre faveur, ce qui était très bien, mais en réalité, comme les clients n'étaient pas contents, ce n'était pas si bien que cela.

Nous voulons que le processus soit clairement défini. Nous voulons savoir quelles informations doivent être fournies. Nous voulons savoir dans quelle mesure les renseignements que nous devons fournir seront confidentiels. On nous demande de fournir toutes sortes d'informations financières que je considère confidentielles. Or, personne n'a jamais déterminé dans quelle mesure cela restait confidentiel. Nous sommes une compagnie privée. Il n'y a aucune raison pour que ce genre de choses soit publié. Nous voulons que le processus soit équitable en ce qui concerne ces informations, et nous voulons savoir quels critères seront appliqués.

Mme Val Meredith: Je crois comprendre que vous aimeriez avoir tout cela avant l'adoption de cette loi. Vous voulez qu'on définisse le processus pour que les gens, et vous entre autres, sachent à quoi s'en tenir avant que la loi ne s'applique.

• 1135

M. Robert Davis: Effectivement, je pense que des directives claires devraient être établies avant la lettre.

Mme Val Meredith: C'est tout, merci monsieur le président.

Le président: Michel Dumont.

[Français]

M. Michel Guimond: J'aimerais simplement faire un petit commentaire. Monsieur Davis, je veux vous féliciter pour votre présentation. Vous avez très bien compris l'exercice que nous faisons présentement. Nous faisons l'étude du projet de loi C-26. La semaine prochaine, nous aurons à adopter des amendements pour améliorer le projet de loi. Je vous félicite pour la qualité de votre présentation. Vous avez soulevé des points qui auraient avantage à être améliorés et des articles qui devraient être amendés. Je veux simplement vous remercier et vous féliciter pour la qualité de votre mémoire et de votre présentation.

[Traduction]

Le président: Merci, Michel

Charles Hubbard, c'est à vous.

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Moi aussi, je vous félicite pour votre mémoire. J'aimerais revenir sur une ou deux choses.

Je regarde votre carte, et je vois que vous desservez beaucoup de collectivités. Pendant nos discussions, nous nous sommes beaucoup inquiétés du niveau de service dans grand nombre de communautés. Dans votre exposé, vous avez parlé de la concurrence. Il y a également un autre facteur en ce qui concerne le choix des meilleures lignes. C'est un sujet que vous abordez également. Vous dites que vous réussissez à maintenir le service dans la vaste région du nord dans laquelle vous opérez actuellement. Est-ce que vous considérez que chaque route est rentable, ou bien est-ce que votre compagnie considère principalement la rentabilité de l'ensemble des opérations?

M. Robert Davis: Nous avons organisé notre compagnie de telle façon que les vols réguliers représentent environ les deux tiers de notre chiffre d'affaires. Nous ne considérons pas les lignes de façon individuelle. Pour nous, c'est le réseau qui compte. Pour nos clients, nous voulons être une ressource unique. Nous ne voulons pas qu'ils aient à traiter avec quatre ou cinq transporteurs différents pour expédier quelque chose entre Toronto et Resolute Bay, par exemple. Quand nous avons commencé comme petite compagnie aérienne qui desservait simplement les collectivités, nous avons constaté que le principal transporteur ne s'intéressait pas suffisamment aux routes desservies par appareils turbo propulsés. À cause de cela, il y avait beaucoup de manutention inutile du fret. Pour cette raison, nous avons essayé d'offrir un service plus complet, de transporter le fret du lieu de départ au lieu d'arrivée.

Toutefois, il y a un autre élément qui nous favorise, le fait que nos activités ne se limitent pas au nord. Nous exploitons ailleurs des appareils nolisés, ce qui est absolument nécessaire, car cela nous apporte des revenus en dollars américains, ce qui nous permet de faire de modestes bénéfices avec nos autres appareils. Nous considérons que c'est absolument nécessaire.

M. Charles Hubbard: Vous considérez votre entreprise comme un réseau, et non pas comme une série de routes individuelles, et c'est une très bonne chose. Mais si nous revenons à la législation et à la philosophie qui prévaut dans ce comité en ce qui concerne la concurrence, est-ce que, pour votre compagnie, le choix des meilleures routes est un problème? Autrement dit, craignez-vous que certaines compagnies ne s'approprient les routes les plus rentables et les desservent avec de gros appareils? Est-ce que cela vous inquiète? Faudrait-il vous en protéger?

M. Robert Davis: Je ne sais pas vraiment quelle est la solution. Si j'ai bien compris, un nouvel examen sera fait plus tard, et nous pourrons alors examiner plus attentivement la situation dans le nord. Cela ne doit pas forcément figurer dans ce projet de loi.

Toutefois, pour l'instant, l'élément clé de ce projet de loi est qu'une compagnie qui n'a même pas de certificat d'exploitation nous souffle les meilleures routes, et pour ce faire, utilise des appareils et des équipages de Canadien. Tous ces gens-là sont fort bien protégés, cela n'est pas normal.

Si quelqu'un veut jouer à la compagnie aérienne, nous sommes prêts à jouer, mais seulement avec des gens qui sont propriétaires de leurs appareils et qui sont prêts à jouer sur un pied d'égalité. Par contre, si ce sont des gens qui peuvent éviter d'installer des kits d'insonorisation moteurs, des gens qui ont le pouvoir d'achat de Canadien, ce qui leur permet de payer 10 p. 100 de ce que nous payons en assurance, nous pensons que cela n'est pas juste. Des gens ont été nommés dans la lettre d'engagement, c'est un comportement qui n'est pas juste, et tout cela sous prétexte de desservir les petites collectivités.

M. Charles Hubbard: D'accord. Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, Charles.

Bev Desjarlais, c'est à vous.

• 1140

Mme Bev Desjarlais: J'aimerais que vous me donniez une précision; vous dites qu'ils n'ont pas de certificat d'exploitation; comment peuvent-ils fonctionner sans un certificat d'exploitation?

M. Robert Davis: L'OTC nous a accordé un permis pour vendre des billets, mais même dans la décision de l'Office, on dit que nous n'avons pas de certificat d'exploitation. Il s'agit de Canadien et de Canadien Régional, je crois, pour certaines lignes. En fait, ils louent des appareils à Canadien avec l'équipage.

Mme Bev Desjarlais: Est-ce que c'est un problème nouveau, ou bien est-ce que cela s'est toujours fait?

M. Robert Davis: Cela existe depuis deux ans.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Autrement dit, ce n'est pas à cause de cette fusion de compagnies. Cela existait déjà.

M. Robert Davis: Non.

Mme Bev Desjarlais: D'accord.

J'ai une question au sujet des informations qu'on vous demande au sujet de vos finances, etc. J'avais cru que ces informations n'étaient pas publiques, qu'on les utilisait pour étudier une demande, mais que ce n'était pas forcément publié. Comment ces informations que vous avez communiquées ont-elles abouti dans le domaine public?

M. Robert Davis: Non, mais à l'époque c'était toute une affaire pour déterminer ce qui était confidentiel et ce qui ne l'était pas. Avant d'envoyer les données financières, nous avons échangé plusieurs lettres pour essayer de savoir ce qui était confidentiel, ce qui ne l'était pas, quelle partie l'était, quelle partie ne l'était pas. Tout cela manque de clarté, et je pense qu'il faudrait le préciser.

Mme Bev Desjarlais: D'accord.

M. Robert Davis: Cela dit, j'ajoute que l'OTC a été très proactif, je ne l'accuse absolument pas.

Mme Bev Desjarlais: Oui. Je voulais simplement m'assurer que cela n'avait pas été rendu public...

M. Robert Davis: Non.

Mme Bev Desjarlais: ... parce que d'ordinaire, je crois que ce genre de choses reste confidentiel.

Quant à savoir si cela a protégé indûment votre concurrent, je ne pense pas que cela ait été l'intention. Je pense qu'on a plutôt voulu protéger les employés et les autres intéressés en prévision de certains événements dans le secteur aérien. Est-ce que Canadien a augmenté ses services? Depuis l'adoption de la loi, ou plutôt depuis la fusion des deux compagnies, est-ce qu'il y a eu des pratiques d'éviction?

M. Robert Davis: Non. En fait, c'est dans un autre domaine que cela a des effets. Ce qui se produit, c'est que nous ne réussissons plus autant à utiliser au maximum notre entente d'exclusivité avec Air Canada. Autrement dit, cette entente ne nous est plus aussi utile que...

Le problème tient en partie au fait que la lettre d'engagement peut être interprétée de beaucoup de façons. D'ailleurs, je vous ai dit que Transports Canada suit ce dossier et essaie de déterminer exactement ce que signifie cette entente. En effet, il y a des gens qui suivent cela de très près, et ce n'est pas terminé. Mais en fin de compte, si les deux compagnies fusionnent, nous pensons qu'il ne serait pas normal de laisser Air Canada exploiter les jets de notre concurrent alors que nous avons une entente commerciale avec elle depuis 10 ans.

Mme Bev Desjarlais: Dans ce cas si Air Canada devient votre concurrent, et si on impose des restrictions à Air Canada ou à une autre compagnie en ce qui concerne l'exploitation de cette compagnie aérienne, il ne vous resterait aucune concurrence.

M. Robert Davis: Non. Ce que nous voulons, c'est qu'elle ait son propre certificat d'exploitation, qu'elle soit à égalité avec First Air, qu'elle emploie ses propres pilotes, ses propres agents d'opérations, son propre système de réservation, toutes ces choses là, bref, qu'elle soit sur un pied d'égalité.

Il faut comprendre qu'à l'époque, c'est avec Canadien International que l'accord avait été signé, et ils n'étaient pas en mesure de négocier. C'est probablement un bon argument, mais cela ne tient pas compte de tous les coûts inhérents à l'exploitation d'une vraie compagnie aérienne.

Tout ce que nous voulons, c'est être sur un pied d'égalité. Nous sommes prêts à affronter la concurrence sans aucune protection législative, mais nous pensons qu'une certaine compagnie ne devrait pas non plus être protégée.

Mme Bev Desjarlais: C'est très bien. Merci.

Le président: Monsieur Dromisky, je vous en prie.

M. Stan Dromisky: Monsieur le président, merci.

Je comprends que cette lettre d'engagement signée le 21 décembre vous préoccupe, je comprends également la raison d'être de cette lettre et tous les événements qui ont conduit à cette date du 21 décembre et à cette lettre. Je comprends fort bien votre position. Comme Canadien, et Canadien Régional également vous concurrençaient à l'époque, si on les laissait continuer comme par le passé et si elles faisaient faillite, vous n'auriez plus de concurrence, et vous deviendriez alors un monopole en desservant exactement les mêmes destinations que vos concurrents avant qu'ils ne fassent faillite. C'est bien votre position à l'heure actuelle?

• 1145

Il est facile de réclamer une uniformisation des règles du jeu, sans tenir compte des raisons qui ont poussé le gouvernement à prendre ces décisions. Vous êtes un homme d'affaires et vous savez bien que tous les hommes d'affaires disent qu'ils croient à la concurrence, à condition de ne pas avoir de concurrence et d'avoir le monopole complet du service ou de la denrée qu'ils vendent. C'est bien certain, mais c'est de l'utopie. Je me demande donc s'il n'y a pas un peu de cela dans votre attitude face à cette lettre d'entente.

M. Robert Davis: Franchement, je ne comprends pas la position du gouvernement sur cette lettre, je suis désolé. Nous avons écrit au ministre le 4 ou 5 octobre, et nous avons comparu devant votre comité. Notre histoire n'a absolument pas changé depuis le premier jour. Puis, en décembre, malgré une lettre adressée au ministre, malgré les rencontres que nous avions eues avec les députés, malgré nos rencontres ici à la Chambre, cette lettre a été signée. Nous vous avions dit que nous desservons 26 localités là-bas, et pourtant vous avez décidé de favoriser nos concurrents, sachant très bien quelle était notre situation.

Par conséquent, désolé, mais je ne suis pas du tout d'accord sur cette lettre. Il aurait fallu réfléchir un peu plus. Je veux bien admettre que cela s'est probablement fait à la hâte, qu'on a voulu le faire avant Noël etc. C'est maintenant le moment de rectifier cela, nous avons le temps de le faire.

Je crois que c'est une question purement théorique de se demander si Canadien aurait fait faillite ou non. Je n'en sais rien. Je veux simplement parler de ce que nous connaissons, de notre situation aujourd'hui. Effectivement, si la compagnie avait fait faillite, notre concurrent n'aurait pas eu de fournisseur pour ses avions. Peut-être en aurait-il trouvé ailleurs; je ne sais pas. Peut-être qu'il ne serait plus là. Mais je ne pense pas qu'on puisse présumer que nous n'aurions pas de concurrence.

Sur certaines des liaisons que nous desservons, comme par exemple Edmonton—Yellowknife, nous estimons que si notre concurrent disparaissait, dès le lendemain nous aurions un autre concurrent. Le volume est suffisant. C'est en plein dans la ville de WestJet et tout ça.

Désolé, je ne suis pas d'accord. Cette lettre a été bâclée à la va-vite, il est temps de rectifier cela.

M. Stan Dromisky: Merci.

Le président: Merci, Stan.

Murray Calder.

M. Murray Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais poursuivre les questions de M. Hubbard à propos du tri sélectif. Vous avez lu le projet de loi C-26 et vous savez sans doute que nous allons donner au Bureau de la concurrence des pouvoirs accrus. Pensez-vous que ces pouvoirs accrus lui permettront de s'opposer fermement à une politique de choix délibéré des seules routes intéressantes?

M. Robert Davis: Nous avons parlé de ce tri sélectif à propos de l'interruption du service dans de petites localités. Je me suis attaqué à ce problème car je sais que ce n'est pas dans l'intérêt du public. Les gens n'aiment pas qu'on réglemente pour empêcher ce genre de choses, mais ce que nous voulons faire, c'est desservir tout un réseau de localités dans l'ensemble de la région. Si quelqu'un peut venir nous concurrencer pendant les meilleurs mois de l'année, pourquoi devrais-je attendre l'hiver où il ne se passe plus rien du tout? Pourtant en plus de cela, on va nous demander... L'autre va pouvoir venir nous couper l'herbe sous le pied durant la meilleure période de l'année, mais moi je vais être obligé de donner un préavis de 120 jours avant de cesser le service, alors que lui pourra se retirer très rapidement.

Je n'ai pas encore réglé ce problème. Nous en avons beaucoup discuté avec Mme Dufour et son équipe, et je crois que ni elle ni nous, ne savons exactement comment on va pouvoir empêcher cela et faire quand même accepter par le public une réglementation quelconque ou un test de détermination de la solidité financière d'un transporteur ou un critère du genre: «Si vous voulez intervenir sur ce marché, vous êtes les bienvenus, mais vous devrez y rester pendant...». Je vois les choses presque de manière opposée: si vous venez sur ce marché, vous devez rester là pendant un an.

M. Murray Calder: Merci.

Le président: Val Meredith.

Mme Val Meredith: Je suis un peu perdue. C'est peut-être que j'ai l'esprit un peu lent. Vous n'arrêtez pas de me dire que Canadien fournit des avions et des services à votre concurrent, mais vous ne m'avez toujours pas dit qui est ce concurrent. Si ce n'est pas Canadien International ou Canadien Régional, qui est-ce?

M. Robert Davis: C'est Canadian North, ou Nordair. Je pense qu'il y a les deux noms. Je crois que la compagnie s'appelle Nordair, et qu'elle utilise le nom de Canadian North.

Mme Val Meredith: Bon, donc c'est Canadian North qui loue ses avions. D'après vous, Canadian North n'a pas de permis d'exploitation.

M. Robert Davis: Je ne crois pas.

Mme Val Meredith: Elle en a un ou elle n'en a pas?

M. Robert Davis: Elle n'en a pas.

• 1150

Mme Val Meredith: Donc, d'après vous, Canadien North n'a pas de permis d'exploitation mais loue des avions à Canadien. D'où viennent ces employés?

M. Robert Davis: Ils viennent tous de Canadien/Air Canada.

Mme Val Meredith: Autrement dit, Canadian North n'est qu'une façade pour les Lignes aériennes Canadien. Donc, votre véritable concurrent, c'est les Lignes aériennes Canadien.

M. Robert Davis: C'est juste.

Mme Val Meredith: Alors pourquoi dites-vous qu'il s'agit d'une location d'appareils de Canadien avec équipage, à Canadian North?

M. Robert Davis: C'est différent. C'est comme une location- bail. Dans le cas d'une location avec équipage...

Nous estimons que Canadian North est une entreprise de commercialisation. Son travail consiste à vendre des billets et à fournir des services de manutention au sol. Les locations avec équipage de Canadian North sont des vols nolisés, même s'ils utilisent un autre terme. Tout le contrôle des opérations, l'avion, l'assurance, l'équipage, l'assurance-maintenance, tout ce qui concerne le fonctionnement de ces avions relève des Lignes aériennes Canadien.

Mme Val Meredith: Mais au fond, c'est cela, la concurrence.

Je reviens aux remarques de M. Dromisky. Vous ne voulez pas avoir de concurrents. En tant que filiale d'Air Canada, vous voulez vous approprier intégralement le marché sans que qui que ce soit puisse vous concurrencer. C'est bien cela?

M. Robert Davis: Pas du tout. Nous ne sommes pas une filiale d'Air Canada. Nous sommes un transporteur indépendant qui a un accord commercial avec Air Canada.

Comment voulez-vous que nous survivions si nous sommes un transporteur indépendant avec toute son infrastructure, son personnel, etc., qui met ses tarifs et ses horaires en commun avec ceux d'Air Canada, alors qu'Air Canada, de son côté, assure l'exploitation, les services informatiques, les réservations, l'enregistrement et tout le reste à notre concurrent? Comment voulez-vous que cela marche?

Les clients de nos concurrents s'enregistrent au comptoir d'Air Canada. Les miens s'enregistrent à mon comptoir. Ce n'est pas juste. Je ne vois pas comment on peut parler, dans ces conditions, de règles du jeu équitables. Notre concurrent s'appuie sur le pouvoir d'achat d'une entreprise qui représente 10 milliards de dollars, alors que nous ne représentons que 180 millions de dollars. Nous allons nous faire lessiver.

Mme Val Meredith: Bon, c'est bien ce que je disais au départ, votre concurrent, c'est la compagnie avec laquelle vous avez une entente commerciale, soit Air Canada, parce que Canadien est maintenant devenu Air Canada. Si Canadian North a une entente commerciale avec Canadien, c'est en fait une entente avec Air Canada.

M. Robert Davis: En cas de fusion, oui.

Mme Val Meredith: Dans le contexte actuel, je pense que vous pouvez compter là-dessus. Vous êtes donc en concurrence avec la compagnie avec laquelle vous avez une entente commerciale. Je crois que c'est surtout là que se pose le problème.

M. Robert Davis: C'est juste.

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Merci, Val.

Nous pouvons encore entendre quelques brèves questions de Roy Bailey.

M. Roy Bailey: Sur la carte au dos de votre brochure, il y a les routes d'Air Inuit. Vous avez un lien avec eux?

M. Robert Davis: Oui. La société Makivik est propriétaire d'Air Inuit et de First Air. Air Inuit emploie environ 200 personnes et a 35 millions de dollars de chiffre d'affaires, et First Air emploie environ 1 000 personnes et a un chiffre d'affaires de 180 millions de dollars.

M. Roy Bailey: Ce qui me plaît également dans ce que vous avez dit, c'est que cette société est propriété à part entière des Inuits du Nord.

M. Robert Davis: Oui.

M. Roy Bailey: Autrement dit, c'est une ligne aérienne qui se passe entièrement de subventions gouvernementales, municipales ou autres.

M. Robert Davis: C'est exact. C'est une entreprise. Nous empruntons à la banque et nous remboursons au taux commercial normal.

M. Roy Bailey: Il n'y a aucun financement gouvernemental?

M. Robert Davis: Non.

Le président: Merci, monsieur Bailey.

Monsieur Davis, notre comité vous remercie beaucoup pour votre exposé.

M. Robert Davis: Merci. Dépensez vos 25c. sagement.

Des voix: Ah, ah!

Le président: Oui, nous allons employer notre argent sagement. Merci beaucoup.

Chers collègues, j'aimerais que notre comité de direction tienne une brève réunion dans la salle d'à côté, derrière moi. La séance reprendra à 12 h 10.

• 1154




• 1217

Le président: Chers collègues, nous souhaitons la bienvenue à Jacques Simard, président d'Air Alma.

Monsieur Simard, soyez le bienvenu au Comité permanent des transports. Nous écouterons avec attention votre exposé, qui durera entre cinq et huit minutes, après quoi nous pourrons vous poser des questions, monsieur. Quand vous serez prêt, allez-y.

[Français]

M. Jacques Simard (président-directeur général, Air Alma): Monsieur le président et honorables membres de ce comité, ma présentation aujourd'hui devant vous est la première et certainement une des plus importantes que j'aie eu à faire pour défendre les intérêts de ma compagnie dans le cadre de la restructuration du transport aérien au pays, qui affecte déjà pas mal de monde.

Je m'appelle Jacques Simard et je suis président-directeur général d'Air Alma. Je suis accompagné de M. David-André Perez, qui répondra aux questions plus pointues.

Vous vous souviendrez peut-être que notre compagnie avait exprimé certaines réserves et souhaits lorsque vous aviez publié votre rapport le 8 décembre dernier.

Votre implication sans relâche pour trouver une solution honorable aux problèmes liés à la restructuration du transport aérien au Canada et certaines solutions pragmatiques que vous y avez apportées font maintenant l'objet de nouvelles audiences depuis le dépôt du projet de loi C-26, qui vise à modifier, entre autres, la Loi sur les transports au Canada.

Il n'est pas de mon propos aujourd'hui de vous entretenir de chacun des amendements proposés, mais de vous exposer les dangers et les conséquences de cette restructuration car, au lieu de promouvoir une saine concurrence, elle ne fait que renforcer la mainmise d'Air Canada et de ses compagnies associées. Je vous présenterai des faits concrets et des conséquences sérieuses pour l'ensemble de l'industrie en général et pour ma compagnie en particulier.

Tout d'abord, j'aimerais vous brosser un bref tableau d'Air Alma Inc., qui a été fondée en 1959, il y a plus de 40 ans, comme un petit transporteur local pour répondre aux besoins de sa communauté et des régions avoisinantes du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Au cours des années qui ont suivi, Air Alma a pris de l'expansion et a lancé un nouveau service vers Montréal en 1979. Cela fait 20 ans que ce service est fourni sans interruption et il répond aux besoins de nos populations, qui peuvent ainsi partir de leur région le matin, vaquer à leurs affaires et revenir le soir.

Au cours de ces années, Air Alma a dû faire face à la concurrence de Québecair et de tous ses successeurs, InterCanadien, Inter, le nouveau InterCanadien en 1991, Air Alliance, Air Nova et Air Montréal, et a su maintenir la confiance de ses clients.

Il y a presque 10 ans, soit en 1990, Air Alma a été un des premiers signataires d'ententes commerciales avec un transporteur majeur, en l'occurrence avec Canadien International (Régional).

• 1220

Cette entente de partenariat a été renouvelée à plusieurs reprises. Elle permettait aux deux parties de bénéficier d'une présence accrue dans les régions qu'elles ne desservaient pas directement, et les passagers étaient aussi les grands bénéficiaires puisqu'ils avaient droit à une billetterie unique, à toute la gamme de produits tarifaires de Canadien tels que: tarifs à bas prix, réseaux internationaux élargis comme oneworld, points de fidélisation, etc. Cette entente, que l'on peut qualifier de modèle, résultait d'une synergie et d'une confiance réciproque.

Cette confiance a été rudement mise à l'épreuve lorsque nous avons essayé, au mois de février dernier, de connaître les intentions de notre partenaire Canadien International (Régional) relativement au renouvellement de l'entente. Nous avons eu plusieurs discussions, et ce n'est que le 21 février que nous avons été avisés officiellement que cette entente ne serait pas renouvelée au-delà du 30 avril 2000. Tout récemment, cette échéance a été reportée au 31 mai 2000. Cette lettre a été copiée aux responsables d'Air Canada et Air Nova, dont nous avions reçu le 9 février une lettre nous indiquant que toutes les ententes commerciales faisaient l'objet d'une revue générale. Nous annexons copie de ces deux lettres à notre présentation de ce jour. Vous remarquerez qu'on parle, dans la réponse de Canadien, de toutes les restrictions quant aux régions que nous pourrions desservir si nous voulions utiliser le code d'Air Canada, le code AC, de l'obligation de discuter avec un autre transporteur affilié et surtout du découpage des routes. Toutes ces conditions sont anticoncurrentielles, à notre avis, et restreignent notre droit de faire des affaires. Surtout, elles ne respectent pas les engagements d'Air Canada formulés le 21 décembre au directeur de la concurrence.

En conséquence, nous vous demandons, lors de vos délibérations sur le projet de loi C-26 que vous étudiez, de vous pencher sérieusement sur toutes les entorses réelles et persistantes qui sont faites au libre droit de faire des affaires.

Votre projet de loi devrait contenir certaines dispositions visant à rétablir le statu quo antérieur à la date du 21 décembre 1999 sous toutes ses formes, que ce soit en termes de nombre de vols offerts aux régions, en termes de capacité offerte ou de fréquences, qui devraient être adaptées aux conditions qui prévalent, ou en termes d'ententes commerciales signées de bonne foi et dont le renouvellement, maintes fois réalisé dans le passé, semble maintenant dépendre de considérations monopolistiques de la part du transporteur dominant. Je ne vois pas d'autres explications à ce non-renouvellement.

Vous devriez indiquer dans votre projet que toutes les conditions qui existaient au moment des engagements d'Air Canada doivent être maintenues pour une période de trois ans ou pour toute autre période raisonnable qui nous permettrait de trouver des solutions de rechange. Cette période de temps pourrait être la même que celle accordée à Air Canada pour intégrer Canadien à son réseau.

En ce qui concerne les paragraphes du projet de loi que vous avez devant vous, nous croyons que certaines dispositions dont le but avoué est de promouvoir une saine concurrence vont, au contraire, la mitiger et la restreindre. Nous appuyons le projet de loi, mais certains articles, auxquels nous faisons référence ci-après, mériteraient d'être revus et corrigés, en particulier les articles 64 et 66.

L'article 64, qui propose d'accroître de 60 à 120 jours la période d'avis nécessaire pour suspendre ou arrêter un service, n'est pas compatible avec les réalités du marché. La prestation d'un nouveau service exige des efforts nombreux et des investissements importants, et nous devrions avoir la liberté de mouvement nécessaire, sans quoi ce serait une reréglementation déguisée.

Les conditions actuelles, qui sont de 60 jours, sont suffisamment contraignantes sans qu'on double le temps. Au lieu de favoriser une concurrence, cette proposition ne ferait que maintenir la dépendance et le monopole sur certaines routes.

L'article 66, quant à lui, propose un nouveau concept de «gamme de prix ou de taux» qui nous ferait fonctionner dans un cadre législatif tout à fait aléatoire et subjectif. De plus, il fournirait à l'Office des transports un veto énorme sur les prestations tarifaires.

• 1225

Sur des avions tels que ceux que nous exploitons, quelle serait la gamme suggérée et pourquoi devait-elle nous être imposée? Exploiter un service aérien sur des tronçons tels que Alma-Montréal, Chibougamau-Montréal ou Bagotville-Montréal, sur lesquels nous offrons néanmoins des tarifs variés, ne peut justifier toute une gamme de prix, quelle qu'elle soit, lorsque l'on connaît les habitudes de voyage des voyageurs de nos régions. Est-ce que cette obligation de gamme tarifaire pourrait se transformer en une exigence de service et demander la prestation de services additionnels? Il ne faut pas oublier que nos services ne sont pas subventionnés et doivent faire leur frais. Nous n'avons pas la possibilité de faire de l'interfinancement. Par conséquent, cette disposition devrait être abolie.

Indépendamment de l'existence d'une entente commerciale, si nous nous en tenons seulement aux engagements d'Air Canada à fournir divers services tels que des taux conjoints, des ententes interlignes, des points Aéroplan, etc., nous croyons que ces services devraient être fournis sur demande et dans des délais raisonnables, contre paiement, bien entendu, d'un taux raisonnable, comme par exemple celui qui est utilisé comme taux interne d'échange entre Air Canada et ses compagnies affiliées. Cette fourniture de services, dans le plus bref délai possible, devrait permettre de fournir un vrai choix aux passagers, en particulier en ce qui concerne les points de fidélisation.

Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Simard, pour cet exposé.

Chers collègues, nous allons passer aux questions. Val Meredith, s'il vous plaît.

Mme Val Meredith: Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Simard, d'avoir témoigné devant le comité.

J'ai écouté votre exposé, et ce que j'ai surtout retenu, c'est que la loi prévoit des contrôles destinés à empêcher un transporteur dominant de pratiquer des prix exorbitants, etc., d'offrir un service puis de disparaître sans préavis, car cela nuit beaucoup à de petites lignes aériennes comme le vôtre. Y a-t-il moyen d'arriver à un compromis qui, sans vous pénaliser, nous permettrait tout de même d'imposer des restrictions au transporteur dominant?

[Français]

M. Jacques Simard: Dans l'intervention que j'ai faite à propos des tarifs, j'ai dit qu'il fallait faire attention à une chose qui pourrait être utilisée par un transporteur dominant pour baisser ou monter les prix et établir une fluctuation, alors qu'un plus petit transporteur a un prix unique qui est fondamentalement basé sur tel coût de fonctionnement à l'heure et tel nombre de passagers par an. Il faut faire attention afin que l'inverse de l'effet désiré ne se produise pas.

Actuellement, Air Canada utilise tous les moyens pour arriver à une chose qu'on ne connaît pas. On sait que le projet de loi va définir des cadres, mais Air Canada semble passer à côté ou utiliser certains éléments pour produire l'effet inverse. Il ne faut pas que les taux soient dictés par un organe gouvernemental. Il faut qu'on soit dans un monde concurrentiel. Le but de l'exercice, si on comprend bien, est qu'il n'y ait pas monopole.

On a une situation particulière au Canada qui est arrivée avec un transporteur. Il faut faire attention. Si on essaie de régler la situation en haut, on risque d'avoir un problème en bas. On donne à un organismes des pouvoirs dont un transporteur dominant pourra se servir au détriment des petits transporteurs.

[Traduction]

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Merci, Val.

Claude Drouin.

[Français]

M. Claude Drouin: Monsieur Simard, monsieur Perez, merci de votre présentation.

• 1230

Monsieur Simard, j'aimerais que vous nous donniez un exemple concret afin que nous puissions bien saisir la problématique. J'ai cru comprendre que vous souhaitiez prolonger de trois ans l'entente que vous avez signée avec les Lignes aériennes Canadien, qui a expiré et que vous devrez renégocier avec Air Canada. Est-ce que dans le cadre des négociations actuelles, on se propose de vous retirer la prestation des services que vous offrez? Je voudrais bien comprendre la problématique.

M. Jacques Simard: Air Alma et son partenaire Canadien avaient conclu une entente qui est venue à échéance il y a deux jours, le 30 avril. Cette entente avait été renouvelée à quelques reprises et nous y avions fait certaines modifications afin de refléter l'évolution du contexte. Nous résumons la situation en disant que nous avons vécu 10 ans de stabilité relative dans ce domaine. Lorsqu'InterCanadien s'est retirée, Canadien International nous avait demandé d'offrir le trajet Bagotville—Montréal, et rien ne nous laissait croire que cette entente ne pourrait être renouvelée. Canadien nous avait demandé d'assumer ce service parce qu'une de ses filiales éprouvait des problèmes et devait cesser d'exploiter ce trajet.

Un changement s'est produit le 21 décembre. Les règles du jeu ont été modifiées et Canadien nous a avisés que nous devrions désormais nous entendre avec Air Canada, ou plus précisément avec un de ses affiliés, ce qui devenait très compliqué.

Sa filiale Air Nova nous a laissé savoir qu'elle désirait que nous fassions certaines choses et que nous n'offrions plus certains trajets en région, ce à quoi s'opposent les gens de nos régions. La définition de «régions» ici, à Ottawa, est quelque peu différente de la nôtre au lac Saint-Jean. Pour vous, ce mot signifie les provinces, tandis que pour nous, il signifie les régions éloignées.

M. Claude Drouin: Pourquoi veulent-ils que vous vous retiriez de ces endroits-là? Veulent-ils être les seuls à offrir ces services?

M. Jacques Simard: Air Nova a déjà des affiliés à qui nous faisons la concurrence. Il nous faut donc régler les problèmes que posent les affiliés et ceux que pose Air Nova. Air Alma veut transiger directement avec Air Canada. Nous sommes d'accord qu'il y ait concurrence dans les régions, mais on doit être conscient du fait qu'il y a un transporteur dominant qui est doté d'infrastructures importantes et qui offre certains services de réservation et des points Aéroplan, dont nous aimerions bénéficier, moyennant évidemment certains frais que nous sommes disposés à débourser. Que ce soit une filiale d'Air Canada qui soit le transporteur dominant ou que ce soit une autre entité qui lui fasse concurrence, ce transporteur va alimenter notre transporteur national qui est Air Canada. C'est à cela que je veux en venir.

M. Claude Drouin: Merci. Vous nous avez aussi parlé d'offrir les mêmes tarifs qu'Air Nova ou les autres affiliés, ce qui me semble une proposition intéressante. Je crois cependant qu'il ne sera pas facile de mettre en oeuvre une telle recommandation en raison des ristournes que certains transporteurs ont prévues. Il serait intéressant que les compagnies indépendantes puissent en bénéficier et continuer à offrir des services dans les régions pour éviter qu'on ne crée des monopoles partout dans les régions et que les niveaux de service ne diminuent. Comment peut-on contrôler cela?

M. Jacques Simard: Normalement, les dispositions qui prévalaient avec Canadien devraient prévaloir pour toutes les filiales. Nous devrions pouvoir offrir les mêmes tarifs pour un même service. Je suppose qu'Air Canada doit avoir prévu la même procédure. Il ne devrait pas être difficile d'établir un juste prix. Nous ne souhaitons pas qu'Air Canada nous subventionne, puisque ce n'est pas son rôle. Elle est devenue une compagnie privée.

M. Claude Drouin: Merci beaucoup. Merci, monsieur le président.

• 1235

[Traduction]

Le président: Merci, Claude.

Michel Guimond.

[Français]

M. Michel Guimond: Je vais y aller rapidement, monsieur Simard. Je ne vous poserai qu'une seule question car je veux céder la parole à mon collègue Stéphan Tremblay, député de Lac-Saint-Jean, afin de lui permettre de vous poser des questions lors de ce premier tour ce cinq minutes.

Je vous remercie de votre présentation. La problématique que vous soulevez est en tous points conforme à ce que l'on a entendu. Je ne veux pas dire que c'est redondant. Cela a vraiment une saveur particulière, parce que vous étiez un affilié de Canadian Airlines depuis plus de 20 ans, depuis 21 ans. Après ce qui s'est passé, si rien ne se passe à court ou à moyen terme, on risque de vous faire sortir du marché. En ce sens-là, votre présentation s'inscrit dans la même veine que les présentations que nous avons eues jusqu'à présent de la part d'Air Transat, de Canada 3000, de Régionnair et de Skyservice. Je vous en remercie.

Vous semblez faire allusion à une entente avec Air Canada. J'aimerais que vous preniez le temps de répondre à ma question après que j'aurai laissé la parole à M. Tremblay. J'aimerais que vous nous expliquiez comment vous verriez une entente avec Air Canada.

Je passe la parole à Stéphan Tremblay.

M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): J'ai deux questions à poser, monsieur le président. Ma première question sera pour M. Perez. J'aimerais que vous nous fassiez part de vos commentaires sur la réglementation déguisée de l'article 64. Si vous en avez le temps, monsieur Simard, j'aimerais que vous nous disiez quels sont les impacts sociaux que pourrait avoir sur ma région l'absence d'une entente d'ici quelques mois. Si demain matin, vous deviez vous trouver sans système de réservations, qu'est-ce que cela représenterait pour votre compagnie et pour ma région?

Merci.

M. David-André Perez (consultant, Civil Aviation Solutions): Premièrement, pour ce qui est de l'article 64, nous prétendons qu'il n'est pas réaliste de repousser le délai de 60 à 120 jours pour les petits transporteurs de troisième niveau. Même si le but de cet article est de protéger les passagers, je crois qu'à long terme, il créera l'effet contraire. Je m'explique.

À la limite, c'est même discriminatoire pour les petits transporteurs aériens. Se retirer d'un marché en 60 jours coûte déjà très cher, et on demande à un transporteur qui n'en a pas les moyens financiers de demeurer 60 jours de plus, ce qui, à toutes fins pratiques, le mettrait complètement à terre, pour ne pas dire en faillite. Pour un gros transporteur, cela ne représente que de petites dépenses. On a établi une règle qui défavorise totalement le petit transporteur, et je dirais qu'à la limite, cela favorise littéralement le gros transporteur qui, lui, en a les moyens. On sait qu'il a les moyens de demeurer 120 jours sur une route.

M. Jacques Simard: Pour répondre à votre question sur l'impact du retrait d'Air Alma pour vos concitoyens de la région, je vous dirai qu'Air Alma opère dans des petits marchés, où les transports sont adaptés aux besoins de notre population. C'est ce que l'on fait sans interruption depuis 20 ans. N'ayant pas accès à une structure comme celle que l'on avait il y a 10 ans, on prédit la fin d'Air Alma dans les semaines qui suivront le 31 décembre. Cela entraînera la perte d'environ 70 emplois et la perte de retombées économiques annuelles de 2 à 3 millions de dollars pour la ville d'Alma. C'est ce qui arrive quand un transporteur décide de ne pas donner accès à une chose. Avant qu'Air Canada ne devienne une société privée, ce sont les citoyens du Canada qui payaient pour Air Canada.

J'aimerais parler d'un modèle qu'on pourrait peut-être étudier, celui de Bell Canada. Quand Bell Canada a été déréglementée, le CRTC l'a obligée à faire en sorte qu'on puisse utiliser les lignes téléphoniques. On parle sensiblement de la même chose. On est en concurrence avec des filiales d'Air Canada et on veut le demeurer. On veut parler à Air Canada afin de trouver une manière de se servir du poteau de téléphone, si on peut dire. La seule chose qu'on demande, c'est qu'on permette la libre entreprise.

• 1240

Cela réglé, on va faire concurrence à Air Nova dans notre région. On est habitués à la concurrence. Ça fait 20 ans qu'on le fait et Air Alma a 40 ans. Il y a des choses qu'on vend ou qu'on fait différemment. Normalement, nos décisions sont prises en région pour nos clients. Cela fait deux options pour les citoyens de nos régions. Air Canada était une société de la Couronne et a acquis de l'expertise et mis au point des systèmes de réservations. Air Alma paie des impôts et, comme citoyen, j'ai le droit de m'en servir au Canada pour donner un service à nos citoyens, en concurrence avec un autre transporteur.

[Traduction]

Le président: Merci.

Bev Desjarlais, s'il vous plaît.

Mme Bev Desjarlais: Je veux m'assurer de bien comprendre ce que l'on semble proposer à l'article 64, monsieur Perez, et vous avez dit qu'il n'est pas possible parfois de continuer à assurer le service pour des raisons financières ou autres. Mais si j'ai bien compris l'article 64, c'est que l'on permet dans une certaine mesure aux compagnies aériennes de quitter une région plus tôt des problèmes particuliers surgissent. Cette latitude existe. Là où intervient la règle des 60 à 120 jours, c'est seulement lorsque ce n'est pas tellement rentable ou si la compagnie veut simplement aller s'installer ailleurs même si le marché est rentable, auquel cas elle doit rester 120 jours.

Donc, d'après ce que j'ai compris, on n'oblige pas une ligne aérienne qui a des difficultés financières à rester.

[Français]

M. David-André Perez: J'aimerais ajouter sur ce point que vous avez raison. Ce qui est beaucoup plus grave, c'est que cette clause découragerait tout nouvel arrivant d'aller concurrencer sur une route à cause de cette règle de retrait, puisque l'investissement pour se retirer est beaucoup plus gros que lorsqu'on s'engage pour 60 jours. Donc, cela découragerait tout nouveau concurrent sur une route.

[Traduction]

Mme Bev Desjarlais: C'est bon à savoir parce que nous avons entendu ce matin un exposé où l'on conseillait de porter cette durée à un an pour éviter qu'une ligne aérienne s'installe au hasard dans une région et s'en aille ensuite, laissant tout le monde en plan. Nous avons certes entendu des opinions opposées à ce sujet.

C'est tout pour l'instant, merci.

Le président: Merci, Bev.

Roy Bailey, s'il vous plaît.

M. Roy Bailey: Il y a un aspect de votre exposé qui est assez intéressant, à la page 2, où vous dites que vous avez pu survivre plus de 40 ans avec une forte concurrence, et avec de tels états de service—à votre actif, pour ainsi dire, vous avez donc fait vos preuves—vous semblez maintenant davantage préoccupé par l'avenir que vous ne l'étiez au cours des 40 dernières années, si je vous ai bien compris.

Ce que vous dites, c'est qu'il y a essentiellement deux choses essentielles que vous aimeriez voir retrancher du projet de loi C- 26. Premièrement, selon vous, la période actuelle de 60 jours est suffisamment restrictive, et deuxièmement, vous croyez qu'on ne devrait imposer aucun plafond aux prix qu'on exige.

Ce à quoi je veux en venir, alors, c'est que vous avez eu 40 ans pour prouver l'inutilité d'un plafond parce que, de toute évidence, c'est vous qui fixez vos propres tarifs. Personne ne vous disait quel prix vous deviez exiger auparavant. Si quelqu'un vous disait: «Écoutez, nous vous obligeons à abaisser votre tarif entre X et Y, et le vol à 300 $ coûtera désormais 150 $», vous ne pourriez pas admettre cela. Est-ce exact?

M. Jacques Simard: Oui.

M. Roy Bailey: Très bien.

M. Jacques Simard: Oui, si le prix est contrôlé par un organisme qui supprime, dans certains marchés, de très petits... Il faut comprendre que nous sommes présents dans de petites localités, et au cours des 20 dernières années, nous avons mis au point un modèle d'exploitation où le prix reste toujours le même ou augmente selon le coût de la vie. C'est une structure très spéciale parce que, vous devez le comprendre, notre volume est très, très restreint. Mais nous nous arrangeons pour fournir aux citoyens de la région un service suffisant, et s'il n'y a pas de concurrence avec Air Nova, par exemple, ces services vont disparaître et ne seront pas offerts par une filière d'Air Canada parce que le marché est trop limité. Cela nous ramènerait donc 20 ans en arrière.

• 1245

M. Roy Bailey: Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bailey.

Monsieur Simard et monsieur Perez, notre comité vous remercie beaucoup pour votre exposé. Nous vous remercions également d'avoir répondu à nos questions aujourd'hui.

Chers collègues, la séance est levée, et nous reprendrons à 15 h 30 aujourd'hui.