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Opinion supplémentaire du Bloc Québécois sur le rapport Sortir de la crise : une étude de l’impact de la COVID-19 sur le secteur du transport aérien
Introduction
Tout d’abord, le Bloc Québécois salue les membres du Comité ainsi que le personnel de la Bibliothèque du Parlement pour le professionnalisme dont ils ont fait preuve et le travail qu’ils ont accompli au cours de cette étude et remercie tous les témoins et citoyens qui ont nourri le débat sur ce qui doit être fait pour permettre au secteur du transport aérien de sortir de la crise.
Cependant, il est de l’avis du Bloc Québécois que le présent rapport a omis certains éléments cruciaux qui auraient permis de bien cerner ce qui doit être fait pour mettre en place un environnement sain pour les consommateurs et les travailleurs du secteur du transport aérien pour sortir de cette longue période trouble.
Les prochaines lignes serviront à exposer ce qui, à notre avis, aurait dû paraître dans le présent rapport en sus de ce qui y figure déjà : premièrement, une demande d’engagement ferme de la part du gouvernement fédéral à travailler avec le gouvernement du Québec et ses municipalités pour mettre en place un service de transport aérien pour les régions du Québec ; deuxièmement, une volonté claire de renforcer les protections en regard des actions anticoncurrentielles de certains joueurs de l’industrie ; et finalement, une considération réelle pour le dossier de la vente d’Air Transat.
De plus, à cette opinion supplémentaire initialement déposée en juin 2021, s’est ajouté une nouvelle section en février 2022, portant sur l’indépendance de l’Office des Transports du Canada. Plusieurs preuves ont ressurgi montrant que cette dernière avait été mise à mal, particulièrement depuis le début de la pandémie.
Travailler avec le Québec, une notion absente de toute considération`
Il est déplorable de constater que le rapport est complètement muet sur la nécessité de travailler en collaboration avec le Québec, particulièrement dans le dossier du transport aérien en région. Alors que les Québécois et Québécoises vivant en région sont ceux qui savent le mieux ce dont ils ont le plus besoin en matière de transport aérien, le présent rapport démontre une fois de plus de façon éclatante la propension des partis fédéralistes au « Ottawa knows best ».
Le gouvernement du Québec et les municipalités ont notamment formé un groupe d’intervention sur la relance des services aériens régionaux du Québec afin d’étudier les problématiques causées par l’abandon des dessertes régionales d’Air Canada et fournir des recommandations. Or, le gouvernement fédéral semble ignorer totalement les actions prises par les gens directement touchés par la crise actuelle et préfère agir, ou ne pas agir dans bien des cas, de façon unilatérale et sur la seule base de ce qu’il juge bon ou pas.
La moindre des choses aurait été de recommander au gouvernement de travailler en collaboration avec le gouvernement du Québec et les municipalités afin de mettre en place des solutions qui répondent vraiment au besoin du milieu. Malheureusement, aucune considération n’a été accordée à cette problématique.
Renforcer la lutte aux actions anticoncurrentielles, une urgence pour les régions du Québec
Au cours des études du Comité, de nombreux témoins provenant du Québec ont souligné les pratiques anticoncurrentielles d’Air Canada dans les régions. Bien que le rapport fasse état de ces préoccupations, notamment de la part de M. Yani Gagnon (Pascan), et M. Serge Larivière (TREQ), aucune recommandation ne s’attaque directement à cet enjeu.
Certes, le Comité a émis le souhait que le gouvernement travaille à la mise en place d’un environnement concurrentiel dans le secteur du transport aérien, mais rappelons qu’avant la pandémie, le gouvernement du Canada avait laissé Air Canada faire la pluie et le beau temps dans les régions du Québec et ce pendant plusieurs années. Pour ne nommer qu’une seule des pratiques anticoncurrentielles d’Air Canada, lorsqu’un compétiteur entre sur le marché, Air Canada « fait du dumping » jusqu’à ce que ledit compétiteur soit forcé de quitter le marché. Une fois le résultat atteint, Air Canada s’empresse de ramener ses prix à un niveau prohibitif pour bien des citoyens en région.
Comme cette situation a perduré pendant plusieurs décennies, il aurait été important que le Comité adopte une recommandation claire visant l’interdiction de telles pratiques. C’est au gouvernement fédéral d’intervenir pour mettre fin à cette situation. L’intervention pourrait s’articuler autour de plusieurs mesures phares comme un renforcement des pouvoirs du Commissaire à la concurrence afin qu’il puisse intervenir rapidement lorsque ce genre de situation se produit ou encore prévoir des conséquences sérieuses pour les transporteurs agissant de la sorte.
Bref, il nous semble évident que le Comité a erré en omettant d’insérer des recommandations à ce sujet dans son rapport. Il s’agit encore une fois d’une situation où la réalité du Québec est ignorée par Ottawa.
Désintérêt des partis fédéralistes pour la vente d’Air Transat
Le libellé de la motion de l’étude se lit comme suit :
« Que, conformément à l’article 108 (2) du Règlement, le Comité entreprenne une vaste étude des effets de la COVID-19 sur le secteur du transport aérien ; qu’au moins huit réunions soient prévues pour cette étude ; que la portée de la vente d’Air Transat sur le secteur soit le premier point examiné dans le cadre de cette étude. »
Malheureusement, cette dernière portion de la motion ne s’est jamais réalisée, les partis fédéralistes présents au Comité ayant préféré éluder la question au maximum. À chaque occasion où le sujet était soulevé au cours des différentes rencontres du Comité, on nous servait une foule d’excuses pour éviter d’aller au fond des choses, pour ne pas discuter du sujet ou ne pas remettre des documents pertinents au Comité. Pourtant, la vente de ce fleuron québécois représentait un enjeu primordial au Québec. Il est donc insensé, à notre avis, que le Comité ne se soit pas penché sérieusement sur la question.
Dans le cadre de cette transaction, des milliers d’emplois, un siège social d’importance ou encore une concurrence présente sur le marché étaient en jeu. Malheureusement, libéraux et conservateurs ont déployé tous leurs efforts pour que le sujet ne soit jamais étudié, préférant protéger le ministre des Transports afin qu’il puisse prendre seul sa décision, sans que nous n’ayons jamais pu prendre connaissance de l’ensemble des informations qu’il avait en sa possession.
Dans notre démocratie, le rôle de l’opposition est d’exiger du gouvernement qu’il rende des comptes sur ses décisions. Ce rôle s’appuie sur un principe de transparence qui est crucial pour la confiance du public envers nos institutions. En refusant d’examiner soigneusement la question dans le cadre de l’étude, le Comité a failli à l’un de ses principaux objectifs : constituer un espace de reddition de compte de la part du gouvernement dans les dossiers qui lui sont confiés.
Devant ce constat, nous ne pouvons qu’être critiques du fonctionnement du gouvernement du Canada où les partis libéral et conservateur ne font que s’échanger le pouvoir sans jamais prendre en considération ce qui compte pour le Québec. Cette situation qui perdure depuis le début de la confédération n’est qu’une raison de plus pour le Québec de sortir du Canada afin de pouvoir s’occuper lui-même de ses intérêts sans avoir à dépendre d’un système politique qui n’existe que pour se perpétuer. Le dossier de la vente d’Air Transat dans cette étude n’est qu’un énième exemple de cette situation.
L’indépendance de l’Office des Transports du Canada, un mirage de moins en moins tenace
Lors de la présente étude du Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités, plusieurs témoins ont fait état de leurs craintes face à l’indépendance de l’Office des Transports du Canada (OTC). M. Gábor Lukács (Droits des voyageurs) l’a notamment présenté ainsi : « La dernière fois que nous avons témoigné devant ce comité, nous avons souligné que l’Office des transports du Canada avait perdu son indépendance et que ses activités de protection des consommateurs avaient été compromises. La pandémie de COVID-19 a confirmé l’ampleur de ces problèmes. »
En ce sens, nous avons tenté, dans le cadre de cette étude, de faire la lumière sur cette situation. C’est pourquoi le comité a adopté à l’initiative du Bloc Québécois la motion suivante :
« Que, conformément à l’article 108 (1) a) du Règlement, un ordre du Comité soit émis demandant que les correspondances échangées entre Transports Canada, incluant le ministre des Transports et l’Office des Transports du Canada concernant l’annulation des billets d’avion et le droit des passagers aériens à un remboursement soient remises au greffier du Comité dans les trente jours (30) suivant l’adoption de la présente motion. »
Des correspondances qui furent remises au comité à la suite de cette motion, certaines furent grandement raturées par Transports Canada (TC) et d’autres furent omises. Il aura fallu une intervention de la part du Bloc Québécois pour que TC remette au comité les documents omis. Encore, TC ratura les documents omis. Déjà, il était inquiétant à ce moment, de voir un ministère cacher de l’information à un comité parlementaire alors que celui-ci y avait pleinement droit. Dans les circonstances, cette préoccupation fut l’objet de la recommandation numéro 21 du présent rapport demandant à l’OTC de montrer patte blanche.
Depuis, les documents « oubliés » par TC ont révélé qu’une rencontre avait existé durant la préparation du message sur les crédits entre le sous-ministre de TC, le président de l’OTC et une personne dont TC avait tenté de cacher l’identité. Il aura fallu une ordonnance d’un juge pour que soit révélée l’identité de cette personne : il ne s’agissait de nulle autre que du chef de cabinet du ministre des Transports de l’époque.
Ainsi, force est de constater, que TC a tout mis en œuvre pour camoufler une très grande proximité entre l’OTC et le politique. Toute cette opération a visiblement été orchestrée pour protéger les apparences d’indépendance de l’OTC alors que celle-ci ne joue plus son rôle de protecteur des passagers aériens. Il est donc plus qu’urgent qu’une enquête de grande ampleur sur l’indépendance de l’OTC soit menée afin de rétablir l’indépendance de cet organisme chargé d’appliquer le Règlement de protection des passagers aériens.
Conclusion
Finalement, le présent rapport aura négligé trois éléments importants dans le cadre de cette étude, témoignant ainsi d’un manque de considération du Canada envers le Québec pour de nombreux enjeux qui lui sont chers. Les intérêts du Québec dans ces dossiers auraient été mieux servis par un Québec indépendant qui n’aurait pas ignoré ces enjeux importants.
Toutefois, nous nous devons de souligner les autres éléments du rapport qui apportent des recommandations qui nous semblent judicieuses, notamment en ce qui a trait au dossier du remboursement des billets d’avion et de l’aide au secteur aérien et aérospatial. Conséquemment, nous souhaitons maintenant voir le gouvernement agir pour permettre au transport aérien de se relever de cette crise et répondre favorablement aux éléments de ce rapport et de cette opinion supplémentaire.
Recommandations du Bloc Québécois
Que le gouvernement du Canada travaille en collaboration avec le gouvernement du Québec afin d’établir les priorités pour un transport aérien régional solide contenant une importante part de concurrence.
Que le gouvernement du Canada intervienne pour empêcher Air Canada et d’autres gros transporteurs d’entreprendre des pratiques qui compromettent la concurrence aérienne en région.
Qu’une enquête indépendante soit mise en place afin de rétablir l’indépendance de l’Office des Transports du Canada.