… depuis des années, voire des dizaines d’années, toute l’étude de la procédure
parlementaire se ramène à la recherche du juste milieu entre le droit de parler aussi longuement qu’il semble
opportun de le faire et le droit du Parlement de prendre des décisions.
Stanley Knowles, député (Winnipeg-Nord-Centre)
(Débats, 20 mai 1965, p. 1530)
L
’un des principes fondamentaux de la
procédure parlementaire est que le débat à la Chambre des
communes doit pouvoir aboutir librement à une décision dans un
délai
raisonnable [1].
Ce qui
peut sembler raisonnable à un parti peut fort bien être injuste aux
yeux d’un autre, mais rares sont les parlementaires qui contestent
l’idée que, à un moment donné, le débat doit
prendre fin [2] .
La
très grande majorité des travaux de la Chambre sont menés
à bien sans qu’il faille recourir à des procédures
spéciales pour limiter le débat ou y mettre fin, mais il existe
des dispositions permettant de le restreindre lorsqu’on estime que, sans
cette intervention, aucune décision ne sera prise, en tout cas pas dans
des délais raisonnables. Malgré le fait que les modifications
apportées au Règlement aient rendu l’obstruction
systématique de la part de l’opposition moins fréquente, une
solide connaissance de la procédure permet encore aux
députés de prolonger considérablement le débat sur
une affaire donnée.
Davantage que ne le prévoient les
règles normales, les règles touchant la limitation du débat
permettent à la Chambre en son entier de se prononcer sur la proposition
qui vise à limiter les délibérations sur une affaire. Une
distinction s’impose toutefois entre la « liberté de
parole » et la possibilité donnée au député de
participer au « débat ». La question de la liberté de
parole du député, privilège parlementaire fondamental, ne
se pose pas dans ce contexte. (Au sens parlementaire, la « liberté de
parole » désigne l’immunité accordée au
député, qui ne peut être poursuivi pour aucun propos tenu
à la Chambre ni dans ses comités, plutôt que
l’idée générale d’une possibilité
illimitée de prendre la parole.) Lorsqu’on lui demande de se
prononcer sur la recevabilité d’une motion tendant à limiter
le débat, le Président n’a pas à juger de
l’importance de l’affaire à l’étude ni du
caractère « raisonnable » de la période consentie pour le
débat, mais uniquement de la recevabilité de la
procédure [3] .
Des Présidents ont statué qu’une motion recevable tendant
à limiter la participation des députés au débat sur
une motion dont la Chambre est saisie ne constitue pas de prime abord une
atteinte au privilège
parlementaire [4] .
À l’époque de la
Confédération, peu de règles permettaient de limiter le
débat, mais, même alors, il était reconnu qu’un
débat sans limites n’était pas possible et qu’il
fallait faire preuve d’une certaine retenue ou trouver quelque arrangement
pour que la Chambre puisse expédier ses travaux avec une
célérité
raisonnable [5] .
Pendant
les 45 premières années de la Confédération, le seul
moyen à la disposition du gouvernement était la question
préalable [6].
Non seulement n’y avait-il aucun autre moyen de mettre fin à un
débat dans des délais raisonnables, mais aucune disposition
formelle ne restreignait la durée des débats, et les interventions
n’étaient aucunement limitées. Les relations concernant les
travaux de la Chambre étaient largement fondées sur un esprit de
fair-play mutuel et les arrangements officieux ou la « clôture par
consentement » régissaient le déroulement des débats.
Pour reprendre les propos du premier ministre Robert Borden :
… à une certaine phase du
débat, lorsque, de l’avis des principaux membres de toute la
députation, la discussion était rendue assez loin, il a
été d’usage de s’entendre et de fixer un jour, et les
députés qui ne pouvaient pas attirer l’attention de monsieur
[le Président] dans le délai prescrit étaient
empêchés de prendre part aux débats par les arrangements des
deux partis et la question était tranchée de cette
manière [7] .
Les premières règles
régissant les travaux de la Chambre réservaient une bonne part des
délibérations aux projets de loi d’intérêt
privé et à d’autres travaux proposés par de simples
députés. Comme le rôle du gouvernement dans
l’économie était modeste, les affaires du gouvernement ne
représentaient qu’une faible partie de la charge de travail de la
Chambre [8] .
Après 1900, l’évolution de la nature des affaires dont la
Chambre était saisie, et notamment le volume croissant des mesures
d’initiative ministérielle, ont provoqué une augmentation
constante de la proportion du temps de la Chambre réservée aux
Ordres émanant du gouvernement. Le temps de la Chambre est devenu une
denrée précieuse, ce qui a donné lieu à des
affrontements partisans parfois féroces. C’est ainsi que
l’opposition a été de plus en plus portée à
faire obstacle à l’adoption des projets de loi du gouvernement en
retardant le débat et en recourant à des tactiques
d’obstruction [9] .
Cette évolution de l’attitude
des parlementaires et de la charge de travail du gouvernement a amené la
Chambre à adopter des règles et des usages qui allaient,
d’une part, faciliter la gestion courante de son
temps [10]
et,
d’autre part, limiter le débat et accélérer le cours
des choses dans les cas jugés importants ou urgents. Le présent
chapitre porte sur ce dernier aspect et explique comment le débat peut
être limité par le recours à la question préalable,
à la clôture et à l’attribution de temps, et au moyen
d’une « motion pour affaire courante » proposée par un
ministre pour passer outre à l’exigence du consentement
unanime [11]
et
d’une motion visant à suspendre l’application de certains
articles du Règlement relativement à une affaire jugée
urgente [12] .
Question préalable
Il arrive que des députés
proposent, au cours du débat sur une motion dont la Chambre est
saisie, « Que cette question
soit maintenant mise aux
voix [13] ».
Cette
motion, appelée couramment la question préalable, peut être
proposée pour les motions de fond pouvant faire l’objet d’un
débat dont la Chambre est saisie. Il existe des restrictions à
l’usage de la question préalable. Celles-ci sont discutées
plus en détail dans le
chapitre 12, « Les étapes du débat ».
Une fois que la question préalable a
été proposée, le débat sur la motion à
l’étude reprend. La question préalable ne met pas
immédiatement fin au débat, mais elle le restreint et
accélère la mise aux voix de deux manières.
Tout d’abord, la question
préalable empêche la présentation d’amendements
à la motion principale et donc tout débat qui aurait pu être
consacré à ces amendements. Si la Chambre se prononce
favorablement sur la question préalable, le Président est tenu de
mettre immédiatement aux voix la motion
principale [14] .
Les
députés qui sont déjà intervenus dans le
débat sur la motion principale ou sur des amendements proposés
antérieurement peuvent de nouveau prendre la parole sur la question
préalable. En ce sens, la question préalable est au mieux un moyen
aux résultats imprévisibles de limiter le débat. Il est
arrivé que la Chambre se prononce en faveur de la question
préalable sans
débat [15] ,
après un bref
débat [16]
ou
après plusieurs jours de
délibérations [17] .
Dans des cas où la question préalable a semblé inutile pour
amener la Chambre à se prononcer sur une motion, une motion tendant
à ajourner le
débat [18]
ou
une motion de
clôture [19]
ont
été proposées pour mettre fin au débat sur la
question préalable. Lorsqu’un vote par appel nominal est
exigé sur la question préalable, le vote peut être
reporté à la demande du whip en chef du gouvernement ou du whip en
chef de
l’Opposition [20] ;
cependant, une fois la question préalable adoptée, le vote par
appel nominal sur la motion principale ne peut être
reporté [21] .
Deuxièmement, la question
préalable peut avoir pour effet de remplacer la motion à
l’étude, car, si le vote est négatif, le Président
est tenu de ne pas mettre la motion principale aux voix à ce
moment. En d’autres termes, si la motion : « Que cette question soit
maintenant mise aux voix » n’est pas adoptée, la motion
à l’étude est rayée du Feuilleton. À
moins que la Chambre n’y revienne un autre jour et que la motion soit
rétablie au
Feuilleton [22] ,
elle ne sera pas débattue à nouveau. Dans les faits, lorsque la
question préalable a reçu une réponse négative, la
motion a été rétablie dans la majorité des cas et
adoptée avec ou sans amendement. Comme moyen de limiter le débat
en faisant en sorte qu’un article soit rayé du Feuilleton,
la question préalable n’a pas eu beaucoup de succès. Depuis
la Confédération, la motion : « Que cette question soit
maintenant mise aux voix » a été rejetée quatre
fois [23] .
Il est
arrivé aussi qu’elle soit retirée avec le consentement
unanime [24] .
Les députés
ministériels et les députés de l’opposition peuvent
poser la question
préalable [25] ,
mais celle-ci est utilisée par certains dans l’espoir
d’accélérer le vote sur la motion principale et par
d’autres dans l’espoir d’empêcher le Président de
mettre une motion ou un projet de loi aux voix maintenant. Bien que la
question préalable puisse être un moyen de forcer la Chambre
à se prononcer sur une motion ou, au contraire, de retarder la
décision, elle a été utilisée, ces dernières
années, presque exclusivement par le gouvernement pour limiter le
débat.
Par le passé, il n’y a rien eu
de prévisible dans le recours à la question préalable. Des
ministres l’ont proposée au sujet de motions émanant de
députés [26]
et de motions et projets de loi émanant du gouvernement. Pour leur part,
des simples députés l’ont proposée au sujet de
motions émanant d’autres
députés [27]
et de motions émanant du
gouvernement [28] .
Peut-être à cause des nombreuses restrictions qui en encadrent
l’usage, la question préalable a été décrite
comme le moyen « le plus inefficace » de limiter le
débat [29] .
Clôture
La clôture est une procédure
qui permet de conclure le débat sur une question donnée par
« une décision majoritaire de la Chambre, même si tous les
députés qui voulaient prendre la parole ne l’ont pas
fait [30] ».
L’article du Règlement portant sur la
clôture [31]
donne au gouvernement le moyen d’empêcher tout nouvel ajournement du
débat sur une question donnée et d’exiger qu’elle soit
mise aux voix à la fin de la séance au cours de laquelle la motion
de clôture a été adoptée. Mis à part des
modifications de forme portant sur l’heure de la fin du
débat [32] ,
la
règle est restée à peu près inchangée depuis
son adoption en 1913.
La clôture peut viser toute affaire
faisant l’objet d’un débat, projets de loi et motions
compris. La règle a été conçue pour
s’appliquer à un comité
plénier [33]
aussi bien qu’à la Chambre, mais non aux travaux des comités
permanents, spéciaux, législatifs ou mixtes de la Chambre. Lorsque
ces comités étudient des projets de loi, la Chambre peut utiliser
la règle relative à l’attribution de
temps [34]
afin
d’imposer une date butoir à l’étape de l’examen
en comité ou pour forcer un comité à présenter
à la Chambre un rapport sur le projet de loi.
Historique
Adoptée à Westminster en 1881
et à la Chambre des représentants de l’Australie en 1905, la
règle relative à la clôture ne l’a été
à la Chambre des communes du Canada qu’en
1913 [35] .
L’idée de la clôture avait été discutée
à quelques reprises, mais la Chambre n’avait jamais
été en mesure d’adopter une règle qui soit
satisfaisante à la fois pour le gouvernement et pour l’opposition.
En 1913, une opposition vigoureuse et bien organisée avait réussi
à retarder l’adoption de mesures législatives du
gouvernement à au moins quatre
occasions [36] .
Des
interventions de cette époque font allusion au fait que, parfois, la
Chambre est incapable de se prononcer sur une question, et, en 1911, au cours
d’un de ces débats prolongés, un député de
l’opposition a parlé de la possibilité de « discussions
sans fin [37] ».
Le
chef de l’Opposition, Robert Borden, qui allait un jour proposer la
nouvelle règle, avait lui-même dit de la règle sur la
clôture qu’il « faudrait bien [s’en]
garder [38] »,
mais
une discussion de près de deux ans sur la politique navale l’a
convaincu de la nécessité de présenter une motion qui
prévoyait, entre autres choses, une règle sur la clôture.
Ces modifications, vigoureusement combattues par l’opposition, ont
été débattues pendant près d’un mois avant
d’être
adoptées [39] .
Le gouvernement a immédiatement mis à l’essai la nouvelle
règle, quelques jours à peine après son adoption, pendant
le débat sur le projet de loi relatif aux forces navales, à
l’étape de l’examen en comité
plénier [40] .
Invoquée neuf fois entre 1913 et
1932, la règle sur la clôture n’a pas été
invoquée, par la suite, pendant 24 ans. En mai et juin 1956, au cours du
débat sur le pipeline, elle a été invoquée à
chacune des étapes du processus
législatif [41] .
Cet épisode largement analysé et commenté a eu des
répercussions durables sur la perception que les députés
peuvent avoir du fonctionnement de la
Chambre [42] .
La règle a fait l’objet
d’examens et de discussions à de nombreuses reprises. En
décembre 1957, le nouveau gouvernement Diefenbaker a fait inscrire au
Feuilleton un avis de motion portant abrogation de la règle sur la
clôture, mais la motion n’a jamais été
débattue [43] .
En juillet 1960, le premier ministre Diefenbaker a formulé le souhait
« que le comité du Règlement de la Chambre étudie
l’opportunité de supprimer le recours à la
clôture [44] ».
Le Comité n’a jamais donné suite. En mars 1962, un autre
comité spécial a été chargé
d’étudier la procédure de la Chambre et plus
particulièrement « d’examiner s’il est souhaitable
d’abroger » la règle relative à la
clôture [45] ;
le
comité n’a pas fait rapport sur la question. Le discours du
Trône prononcé en septembre 1962 indiquait que la Chambre serait
invitée à abolir la clôture, mais cette proposition est
également restée lettre
morte [46] .
Au cours de
la 30e législature (1974-1979), un sous-comité du
Comité permanent de la procédure et de l’organisation a
recommandé dans son rapport sur l’emploi du temps qu’un
nouvel article inspiré de la règle relative à la
clôture des Communes britanniques soit
adopté [47] ,
mais cette proposition n’a jamais été recommandée
à la Chambre. L’abrogation de la règle sur la clôture
est une question qui refait surface
périodiquement [48] .
Avis de clôture
Avant de proposer une motion de
clôture, un ministre doit en avoir donné avis verbalement lors
d’une séance antérieure de la Chambre ou d’un
comité plénier. L’article n’est pas très
précis au sujet du moment où cet avis peut être
donné; aussi existe-t-il des précédents divers.
L’avis de motion de clôture a été donné dans
les circonstances suivantes : lorsque la Chambre n’était saisie
d’aucune autre
question [49] ;
lorsque
la motion visée par la motion de clôture était à
l’étude [50] ;
lorsque la question à l’étude n’avait aucun lien avec
l’avis [51] .
L’avis a été donné dès le premier jour de
débat sur la motion
visée [52]
et
après un ou plusieurs jours de
débat [53] .
Quoi
qu’il en soit, le débat sur l’affaire visée par
l’avis de clôture doit avoir débuté avant que
l’avis ne puisse être
donné [54] .
Rien n’exige que l’avis de
motion soit donné plus d’une fois, mais des ministres ont
donné le même avis à plusieurs séances pour
prévenir toute objection voulant que l’avis n’ait pas
été donné au cours de la séance
précédente [55] .
Par ailleurs, il n’y a pas obligation de proposer la motion même si
avis en a été donné; il y a eu des cas où aucune
suite n’a été donnée à
l’avis [56] .
À une occasion, le gouvernement a donné avis de la motion de
clôture sur quatre projets de loi distincts en même temps : trois
projets à l’étape de la deuxième lecture et un
à l’étape de la troisième
lecture [57] ;
cependant, il a fallu présenter quatre motions de clôture
distinctes, une pour chaque projet de loi.
Motion de clôture
Une fois que l’avis a
été donné de l’intention de proposer une motion de
clôture, la motion peut être proposée au cours d’une
séance subséquente, que ce soit le lendemain ou plus tard. La
motion de clôture doit être proposée par un ministre, et le
débat sur la motion ou le projet de loi visé doit avoir
été ajourné au moins une fois avant que la motion de
clôture ne puisse être
proposée [58] .
Elle doit être proposée immédiatement avant l’appel de
l’Ordre du jour portant reprise du débat sur l’article
visé, soit à la Chambre, soit dans un comité
plénier.
Les motions de clôture ne peuvent
être ni débattues, ni modifiées, et, une fois qu’elles
ont été proposées, le Président de la Chambre ou le
président du comité plénier met immédiatement la
question aux voix : « Que le débat ne soit plus ajourné »
(ou, en comité plénier, « Que le débat ne soit plus
différé »). La durée du débat que le
gouvernement permet sur une mesure avant de proposer la motion de clôture
dépend de facteurs politiques. Il est arrivé que le
Président soit prié de faire usage de son pouvoir
discrétionnaire pour refuser de mettre une motion de clôture aux
voix au motif que la mesure visée n’avait pas encore
été débattue assez longtemps. Invariablement, la
présidence a refusé d’intervenir dans l’application de
l’article, jugeant chaque fois que la présidence n’avait pas
le pouvoir d’intervenir dans le processus lorsque la règle de la
clôture est appliquée
correctement [59] .
Lorsqu’une motion de clôture a
été adoptée, le débat reprend sur la mesure
visée, ce qui donne le plus souvent lieu à une séance qui
se prolonge dans la soirée. Le débat est soumis aux restrictions
imposées par la règle sur la
clôture [60] .
Aucun député (pas même le premier ministre ni le chef de
l’Opposition) ne peut prendre la parole plus d’une fois ni pendant
plus de 20 minutes. Un député qui a participé au
débat sur la motion principale avant l’adoption de la motion de
clôture peut prendre la parole à nouveau si un amendement ou un
sous-amendement est proposé pendant le débat régi par la
motion de clôture, mais un député qui traite de la motion
principale après l’adoption de la motion de clôture ne peut
intervenir dans le débat sur quelque amendement ou sous-amendement
subséquent. Toutes les affaires émanant des députés
qui peuvent avoir été prévues ont lieu au moment qui leur
est normalement réservé.
Toutes les questions nécessaires
pour disposer de l’affaire visée par la motion de clôture
doivent être mises aux voix au plus tard à 23 heures ou le plus
tôt possible après cette heure, une fois que le
député qui a pu obtenir la parole avant 23 heures a terminé
son intervention [61] .
Aucun député ne peut prendre la parole après 23
heures [62] ,
heure
à laquelle le Président de la Chambre ou le président du
comité plénier met aux voix toutes les questions
nécessaires pour disposer de l’affaire visée par la motion
de clôture, y compris tout amendement ou
sous-amendement [63] .
Si un vote par appel nominal est exigé à la Chambre, la sonnerie
se fera entendre pendant au plus 15
minutes [64] .
Si le
débat prend fin avant 23 heures, la sonnerie d’appel au vote par
appel nominal se fait entendre pendant au plus 30
minutes [65] .
Le
libellé de l’article du Règlement établit très
clairement qu’une motion de clôture doit être mise aux voix
« immédiatement ». Un vote par appel nominal, s’il est
demandé, a donc lieu immédiatement, à moins qu’il ne
soit reporté à une date ultérieure avec le consentement
unanime de la Chambre, comme cela s’est fait à
l’occasion [66] ,
ou par accord entre les whips de tous les partis
reconnus [67] .
En comité plénier, il
n’est pas nécessaire que tous les articles du projet de loi aient
été appelés et différés avant que la
clôture ne soit
invoquée [68] .
En outre, après l’adoption de la motion de clôture, un
article est automatiquement à l’étude dès qu’il
a été appelé par la
présidence [69] .
Si l’étude d’un article se termine et que le débat
commence sur l’article suivant, les députés ont 20 autres
minutes pour traiter de cet
article [70] .
L’adoption d’une motion de clôture au cours d’une
séance fait en sorte que l’étape de l’examen en
comité se termine pendant la même
séance [71] .
Attribution de temps
La
règle relative à l’attribution de temps prévoit la possibilité d’attribuer une
période précise à l’étude d’une ou de plusieurs étapes d’un projet de loi
d’intérêt public [72] .
L’expression
« attribution de temps » évoque une idée de gestion du temps plutôt que de
clôture, mais le gouvernement peut se servir d’une motion d’attribution de temps
comme d’une guillotine. En fait, même si le Règlement permet au gouvernement de
négocier avec les partis d’opposition en vue d’adopter un calendrier pour faire
étudier par la Chambre un projet de loi à une ou à plusieurs étapes (y compris
l’étude des amendements apportés par le Sénat) [73] ,
il lui permet
aussi d’imposer au débat des limites de temps strictes [74].
Alors que
l’attribution de temps est devenue le mécanisme le plus largement utilisé pour
limiter le débat, elle demeure en soi un moyen de réunir les partis pour
négocier une répartition acceptable du temps de la Chambre.
Historique
Comme
dans le cas de la clôture, les dispositions sur l’attribution de temps ont vu le
jour au lendemain d’une controverse. Au cours du débat sur le pipeline, en
1956 [75] ,
la clôture
était pour le gouvernement le seul recours pour faire progresser l’étude de ses
mesures législatives. Or, la clôture était alors perçue comme un moyen trop peu
souple, compte tenu des exigences de la démocratie parlementaire moderne, et
comme un outil inadéquat pour diriger les affaires de la Chambre. Tant à la
Chambre que dans les comités, les parlementaires se sont mis à la recherche de
moyens pour allouer le temps de la Chambre à l’étude de mesures législatives
particulières et pour planifier les travaux de la session, ce que les
dispositions sur la clôture ne permettaient pas de faire, car le processus
comprenant l’avis, la présentation de la motion et le vote devait être repris à
chacune des étapes d’un projet de loi donné [76] .
Tout
au long de la période pendant laquelle des gouvernements minoritaires se sont
succédé, dans les années 1960, la Chambre a tenté, mais en vain, d’établir une
procédure qui aurait structuré le temps de la Chambre pour faciliter la conduite
efficace des débats. Les députés étaient conscients que le volume et la
complexité des travaux de la Chambre augmentaient et que des mesures
s’imposaient pour expédier les travaux dans des délais raisonnables [77] .
Tout au long
de ces années, la Chambre a accepté de créer des comités spéciaux chargés
d’étudier la procédure de la Chambre et de proposer des moyens de faciliter
l’étude des mesures d’intérêt public [78] .
Dès
le tout début, les comités ont étudié des mesures qui devaient permettre la
coopération entre les partis. Dans le dixième rapport du Comité spécial de la
procédure et de l’organisation, présenté à la Chambre en 1964, il est fait
mention de la difficulté de parvenir à un accord entre tous les partis sur une
proposition portant sur la question fondamentale de l’attribution de
temps [79] .
Le Comité a
écrit : « Nous continuerons de rechercher comment le Parlement peut utiliser le
temps dont il dispose », mais il n’a pas présenté d’autre rapport sur la
question. Très tôt au cours de la session suivante, le gouvernement a pris
l’initiative en proposant une motion qui, entre autres propositions, traitait de
l’attribution de temps. La motion prévoyait un nouvel article du Règlement qui
établissait un « comité des travaux de la Chambre » composé d’un représentant de
chacun des partis à la Chambre. À la demande d’un ministre, ce comité devait
examiner la possibilité d’attribuer une certaine période à l’étude d’une affaire
ou à une étape de son étude et, s’il parvenait à une entente, présenter une
recommandation dans un rapport présenté à la Chambre dans les trois jours de
séance. Le ministre pouvait alors présenter sans préavis une motion d’adoption
du rapport, motion sur laquelle la Chambre devait se prononcer sans débat ni
amendement. Toutefois, si le Comité des travaux de la Chambre était incapable de
parvenir à un accord unanime ou s’il ne présentait pas son rapport dans un délai
de trois jours, un ministre pouvait, pendant les Affaires courantes, donner avis
que, à la séance suivante, il proposerait une motion attribuant une certaine
période à l’étude de l’affaire ou de l’étape visée [80] .
La
motion a été débattue à la Chambre pendant 12 jours [81],
et, tout au
long du débat, des préoccupations précises se sont exprimées au sujet de la
proposition visant le comité des travaux de la Chambre. La proposition a donc
été retirée de la motion principale et renvoyée à un comité spécial pour plus
ample examen [82] .
Le comité
spécial a recommandé dans son rapport à la Chambre une autre version de la
proposition d’attribution de temps. Le rapport ayant été agréé, un article
provisoire du Règlement, le 15-A, a été adopté [83] .
L’article n’a
été invoqué que trois fois entre 1965 et 1968, mais il est devenu évident que
les partis d’opposition en étaient mécontents, et il y a eu de nombreux rappels
au Règlement au sujet de l’interprétation de certaines de ses dispositions. En
1967, par exemple, le Président a statué qu’un avis verbal suffisait aux fins de
l’application de l’article sur l’attribution de temps et qu’il n’était pas
nécessaire que cet avis soit publié au Feuilleton des
Avis [84] .
Lorsque la 28e législature
a été convoquée, en septembre 1968, la Chambre a décidé que l’article provisoire
15-A du Règlement ne serait plus en vigueur [85] .
Peu après, un
comité spécial de la procédure était mis sur pied [86]
pour étudier,
entre autres choses, la question de l’attribution de temps. Dans son quatrième
rapport, ce comité recommandait une nouvelle règle sur l’attribution de
temps [87] .
Le 20 décembre
1968, la Chambre décidait de renvoyer encore une fois la question au nouveau
Comité permanent de la procédure et de l’organisation pour plus ample
examen [88] .
Les
tensions subsistaient entre gouvernement et opposition au sujet de l’équilibre à
trouver entre un débat prolongé et la limitation du débat que semblaient
permettre les règles provisoires. Ce n’est qu’en 1969 que la Chambre a adopté un
rapport recommandant une mesure d’attribution de temps, précurseur des
dispositions actuelles [89] .
Dans sa forme
la plus simple, le nouvel article prévoyait trois possibilités d’attribution de
temps, allant d’un accord entre tous les partis à une décision unilatérale du
gouvernement, les négociations n’ayant pas permis d’obtenir le soutien de
quelque autre parti. Les députés de l’opposition ont exprimé plus tard leur
mécontentement devant l’interprétation qui était faite de cet article du
Règlement [90] .
Le fait que
des négociations devaient se dérouler entre les partis, ce qui avait pour effet
d’écarter les députés indépendants, a également été soulevé [91] .
En
novembre 1975, le président du Conseil privé a signifié son intention de
soumettre au Comité permanent de la procédure et de l’organisation des
propositions qui touchaient l’attribution de temps [92] .
Le Comité n’a
pas fait rapport à la Chambre, mais il a mis sur pied un sous-comité chargé
d’étudier l’utilisation du temps qui a examiné entre autres choses un nouveau
texte de l’article portant sur l’attribution de temps [93] .
Le
libellé de l’article suscitait toujours des inquiétudes au plan de la procédure.
En décembre 1978, en réponse à un rappel au Règlement, le Président Jerome
statuait qu’il était possible de proposer une motion d’attribution de temps
visant à la fois l’étape du rapport et la troisième lecture, même si la
troisième lecture n’avait pas encore commencé [94] .
Un énoncé de
principes sur la réforme parlementaire déposé par le gouvernement en novembre
1979 signalait l’ambiguïté du libellé de l’article du Règlement et proposait
qu’on le révise [95] .
En mars 1983,
le Président Sauvé confirmait que l’avis de motion d’attribution de temps
pouvait être donné à tout moment au cours de la séance [96] .
En octobre
1983, elle statuait que, une fois la motion d’attribution de temps mise à
l’étude, la Chambre devait passer au vote deux heures après le début des
délibérations et que toutes les motions de remplacement proposées pendant cette
période devaient être tranchées à la fin des deux heures de débat et avant le
vote sur la motion d’attribution de temps [97] .
À
compter de mai 1985, un nouvel usage s’est implanté : les motions d’attribution
de temps étaient présentées et débattues à la suite de l’inscription, par le
gouvernement, d’avis de motions sous la rubrique des Ordres émanant du
gouvernement. Cet avis écrit s’ajoutait à l’avis donné verbalement de
l’intention de proposer une motion de cette nature, pour satisfaire aux
exigences du Règlement. Le Président Bosley a confirmé que c’était là une façon
acceptable de procéder [98] .
En
juin 1987, des modifications étaient adoptées prévoyant que les motions
d’attribution de temps, après avis donné verbalement seulement, seraient
proposées sous la rubrique des « Ordres émanant du gouvernement » plutôt que sous
celle des « Motions », pendant les Affaires courantes, comme le voulait l’usage
jusque-là. Les révisions prévoyaient également que le débat sur l’affaire à
l’étude au moment de la proposition de la motion serait automatiquement
ajourné [99] .
En
août 1988, le Président Fraser a jugé que l’avis verbal devait seulement
signifier l’intention de proposer la motion et non donner le texte même de la
motion. Dans la même décision, le Président a ajouté que l’initiative d’annoncer
un accord (ou l’absence d’accord) sur l’attribution de temps revenait à un
ministre, qui devait être partie à cet accord [100] .
En
1991, après une nouvelle modification du Règlement, la motion d’attribution de
temps proposée sans l’accord de tous les partis a cessé de faire l’objet de
débat ou d’amendements [101] .
Jusque-là,
cette motion pouvait être modifiée et débattue pendant un maximum de deux
heures, après quoi la présidence devait mettre aux voix toutes les questions
nécessaires pour en disposer.
Trois options
La
règle sur l’attribution de temps se subdivise en trois parties distinctes.
Chacune précise les conditions qui s’appliquent à l’attribution de temps,
dépendant du degré de soutien recueilli auprès des représentants des partis
reconnus à la Chambre [102] .
- Accord de tous les partis : La première partie porte sur
les cas où il y a entente entre les représentants de tous les partis reconnus à
la Chambre pour attribuer un certain temps à l’une des étapes de l’étude d’un
projet de loi public, ou à toutes les étapes [103] .
Aucun avis
n’est nécessaire. En proposant la motion, le ministre dit tout d’abord qu’il y a
eu accord [104]
et il précise
ensuite les dispositions de l’accord, indiquant le nombre de jours ou d’heures
de débat ainsi attribués [105] .
Le Président
soumet alors la question à la Chambre, qui se prononce sans débat ni
amendement.
- Accord de la majorité des partis : La deuxième partie
porte sur le cas où il y a accord entre la majorité des représentants des partis
reconnus à la Chambre [106] .
Dans ces
circonstances, comme dans le cas des accords entre tous les partis, le
gouvernement doit être partie à l’accord [107] .
La motion ne
peut viser plus d’une étape du processus législatif. Elle peut toutefois
s’appliquer à la fois à l’étape du rapport et à la troisième lecture, pourvu que
soit respectée la règle exigeant une journée distincte pour le débat à l’étape
de la troisième lecture lorsqu’un projet de loi a été débattu ou modifié à
l’étape du rapport [108] .
Aucun avis
n’est exigé là non plus. Avant de proposer la motion, le ministre déclare que la
majorité des représentants des partis se sont entendus sur une attribution de
temps [109] .
La motion
précise le nombre de jours ou d’heures affectés au débat. Le jour où la motion
est adoptée compte alors comme un jour de séance, si la motion a été proposée et
adoptée au début des Ordres émanant du gouvernement [110] .
- Aucun accord : La troisième partie permet au
gouvernement de proposer unilatéralement une attribution de temps [111] .
Cette fois, il
faut donner verbalement avis de l’intention de proposer la motion [112] .
La motion ne
peut proposer l’attribution de temps que pour une étape du processus législatif,
soit l’étape qui est en cours. Elle peut toutefois porter à la fois sur l’étape
du rapport et la troisième lecture, pourvu que soit respectée la règle exigeant
une journée distincte pour le débat de troisième lecture lorsqu’un projet de loi
a été débattu ou modifié à l’étape du rapport [113] .
La période
attribuée à une étape ne peut être inférieure à un jour de séance.
Avis
Un
avis verbal est exigé lorsque le gouvernement souhaite imposer son propre
échéancier, en l’absence d’accord d’attribution de temps entre les représentants
de la totalité ou de la majorité des partis reconnus [114] .
L’avis ne peut
être donné qu’après que le débat a débuté sur l’étape du projet de loi visé par
la motion d’attribution de temps [115] .
C’est un
ministre qui, de son siège à la Chambre, doit donner cet avis [116] ,
à n’importe
quel moment de la séance [117] ;
la motion
d’attribution de temps peut alors être proposée au cours de toute séance
ultérieure de la Chambre, même plusieurs jours ou semaines plus tard.
L’avis stipule qu’il a été impossible de parvenir à un
accord aux termes des autres dispositions de l’article et que le gouvernement
entend donc proposer une motion d’attribution de temps à l’égard d’une étape
donnée d’un projet de loi particulier [118] .
Il suffit que
l’avis signifie l’intention du gouvernement; il n’a pas à donner le contenu de
la motion à venir [119] .
Une fois
donné, l’avis de motion peut être retiré; de la même manière, l’avis peut être
donné sans qu’une motion soit proposée par la suite.
Motion d’attribution de temps
Le
libellé d’une motion d’attribution de temps doit préciser les conditions de
l’attribution de temps. Dans la plupart des cas, c’est un certain nombre de
jours ou d’heures de séance qui est attribué, mais il est arrivé au moins une
fois qu’une durée établie en fractions d’heure soit attribuée à chaque étape du
projet de loi visé [120] .
Dans tous les
cas, la motion d’attribution de temps doit être proposée par un ministre à la
Chambre, et elle ne peut faire l’objet d’aucun débat ni amendement [121] .
Quand
il y a accord entre les représentants des partis, il a été d’usage que la motion
soit proposée à la rubrique des « Motions », pendant les Affaires courantes.
Lorsque l’appui de la majorité a été obtenu pour l’attribution, ou qu’il n’y a
pas eu accord, la motion est proposée sous les Ordres émanant du gouvernement.
Quelle que soit l’affaire à l’étude, le débat interrompu par la proposition
d’une motion d’attribution de temps est réputé ajourné [122] .
La motion est
mise aux voix aussitôt proposée.
Après
l’adoption de la motion d’attribution de temps, le débat à l’étape ou aux étapes
de l’étude du projet de loi en question est soumis aux limites de temps prévues
par la motion. Le jour où la motion est adoptée peut alors être compté comme un
jour de séance, mais seulement si la motion est proposée et adoptée au début des
Ordres émanant du gouvernement et si l’étude du projet de loi est entamée
immédiatement [123] .
L’étude du
projet de loi peut aussi être entamée à une séance ultérieure de la
Chambre [124] .
Les règles
normales du débat s’appliquent. À l’expiration de la période prévue pour une
étape donnée, la présidence interrompt les délibérations et met aux voix toutes
les questions nécessaires pour disposer du projet de loi à cette étape. Si un
vote par appel nominal est exigé, la sonnerie d’appel convoquant les députés ne
peut durer plus de 15 minutes [125] .
Normalement,
les votes par appel nominal sur les projets de loi soumis à l’attribution de
temps ne sont pas reportés, mais ils peuvent l’être en vertu d’un ordre
spécial [126] ,
par report
automatique du vote conformément aux règles de la Chambre [127] ,
ou par accord
entre les whips de tous les partis reconnus [128] .
Lorsque le
débat se termine avant la fin de la période attribuée et si un vote par appel
nominal est exigé, la sonnerie d’appel retentit pendant un maximum de 30
minutes, et le vote peut être reporté par le whip en chef du gouvernement ou le
whip en chef de l’Opposition [129] .
Il
est arrivé que des objections s’élèvent au sujet des circonstances dans
lesquelles un accord avait été conclu ou de la nature des consultations menées
par le gouvernement. Comme dans le cas de la clôture, la présidence a statué
qu’elle ne possédait aucun pouvoir discrétionnaire lui permettant de refuser de
mettre à l’étude une motion d’attribution de temps si toutes les exigences de la
procédure avaient été respectées [130] .
Le Président a
déclaré que le libellé de la règle ne définissait pas la nature des
consultations que devaient avoir le ministre et les représentants des autres
partis; il a ajouté que la présidence n’avait pas le pouvoir d’établir si des
consultations avaient eu lieu ou non ni de se prononcer sur ce qui constitue une
consultation entre les représentants des partis [131] .
« Motion pour affaire courante » proposée par un ministre
Si, à
un moment quelconque au cours d’une séance de la Chambre, le consentement
unanime est refusé pour la présentation d’une « motion pour affaire courante », un
ministre peut demander à la présidence, pendant les Affaires courantes, de
mettre la motion aux voix [132] .
À ces fins,
l’expression « motion pour affaire courante » désigne les motions qui peuvent
s’imposer pour l’observation du décorum de la Chambre, le maintien de son
autorité, l’administration de ses affaires, l’agencement de ses travaux, la
détermination des pouvoirs de ses comités, l’exactitude de ses archives ou la
fixation des jours où elle tient ses séances ainsi que des heures où elle les
ouvre ou les ajourne [133] .
La motion, qui
ne peut être ni débattue ni modifiée, est immédiatement mise aux voix par le
Président. Si 25 députés ou plus s’opposent à la motion, elle est réputée
retirée [134] ;
sinon, elle
est adoptée [135] .
S’il
a semblé au départ que la gamme des motions auxquelles ce dispositif pouvait
s’appliquer serait limitée, la règle a fini, au fil des ans, par être utilisée
pour prolonger une séance afin que la Chambre siège pendant le week-end [136] ;
pour prolonger
la séance afin d’étudier des initiatives ministérielles [137] ;
pour traiter
d’une motion particulière sous la rubrique des Affaires émanant du
gouvernement [138] ;
pour adopter
un projet de loi du gouvernement à toutes les étapes [139] ;
pour fixer la
durée des interventions au cours d’un débat exploratoire [140] ;
et pour tenter
de révoquer un ordre de la Chambre [141] .
Le
gouvernement peut recourir à cette règle un nombre illimité de fois au cours
d’une même séance.
Adoptée en 1991 [142] ,
cette
procédure a été relativement peu utilisée jusqu’à la 36e législature
(1997- ) [143] .
Avant son
adoption, on soutenait que la nouvelle règle limiterait la capacité des députés
de débattre les motions du gouvernement et permettrait de « faire fi du
consentement unanime [144] ».
Le 9 avril
1991, le Président Fraser, tout en faisant observer que l’éventail des motions
auxquelles la procédure proposée s’appliquerait était très limité, a exprimé
l’idée que le nouvel article du Règlement devait s’interpréter comme un autre
mécanisme, acceptable au plan de la procédure, pour limiter le débat : « Il y a
aussi d’autres ressemblances entre la proposition et l’actuel article 78 du
Règlement, relatif à l’attribution de temps, en ce que les deux font appel à une
approche par échelons, dépendant du degré d’accord possible, pour garantir le
droit de présenter une motion [145] . »
Suspension d’articles du Règlement pour des questions de nature urgente
Lorsque surgit une situation que le gouvernement estime
urgente, un ministre peut proposer que la Chambre suspende l’application de
certains articles du Règlement relatifs aux préavis et aux heures et jours de
séance pour étudier la question [146] .
Ainsi, cette
disposition peut être invoquée pour annuler le préavis de présentation d’un
projet de loi ou de toute autre étape pour laquelle un préavis est normalement
exigé [147] .
En proposant
la motion, le ministre expose les raisons qui rendent la situation urgente et,
une fois que la motion a été appuyée, le Président saisit immédiatement la
Chambre de la question [148] .
Le Président
peut permettre un débat ininterrompu d’au plus une heure [149] .
Les
interventions sont limitées à 10 minutes chacune, et la motion ne peut faire
l’objet d’un amendement, à moins qu’il ne soit proposé par un autre ministre.
Pour mettre la question aux voix, le Président est tenu de demander aux députés
qui s’y opposent de se lever. Si moins de 10 députés le font, la motion est
automatiquement adoptée [150] ;
si 10 ou plus
le font, elle est considérée comme retirée [151] .
L’ordre
découlant de la motion adoptée s’applique uniquement aux délibérations qui y
sont précisées.
Cet
article du Règlement est relativement récent, et il a rarement été invoqué
depuis son adoption en 1968. Les motifs de son adoption remontent à 1964, année
où le premier ministre Pearson a proposé une motion sans préavis en vue de
dépêcher des forces canadiennes de maintien de la paix à Chypre. Même si la
motion semblait recueillir l’assentiment de toute la Chambre, certains députés
ont élevé des objections contre l’absence de préavis, soutenant qu’un préavis de
48 heures s’imposait avant qu’on ne puisse discuter d’une affaire aussi
importante. Faisant observer que le premier ministre avait obtenu la permission
de la Chambre, le vice-président a rejeté ces objections et permis à la Chambre
de passer à l’étude de la motion [152] .
Puis,
en 1966, lorsqu’il a été demandé à la Chambre de se saisir d’urgence de la grève
des contrôleurs de la circulation aérienne, le ministre des Travaux publics a
proposé une procédure permettant au gouvernement de s’attaquer à des affaires
urgentes. Il a donné l’explication suivante : « […] un simple député a le droit
de proposer l’ajournement de la Chambre pour permettre l’étude d’une question
urgente et d’importance publique pressante. […] Mais, anomalie curieuse, le
gouvernement n’est pas habilité par une disposition correspondante à saisir la
Chambre de mesures analogues sans préavis [153] . »
Même si des
députés de l’opposition estimaient qu’il fallait agir, la proposition du
ministre a été retirée [154] .
Lorsque la règle actuelle a été adoptée, deux ans plus
tard, en 1968, il était évident, d’après son libellé, que les événements de 1966
avaient été pris en considération. Le nouveau texte était semblable à celui
proposé en 1966. En proposant l’ajout de cette règle, le Comité spécial de la
procédure a écrit : « […] il semble raisonnable de surseoir à l’obligation
ordinaire de présenter un avis de motion pour mettre une affaire en délibération
[…] lorsque presque tous les députés en reconnaissent la nécessité. Le Comité
estime intolérable qu’une seule voix dissidente puisse frustrer l’espoir de tous
les autres députés [155]
[…] » La règle
est restée inchangée depuis, abstraction faite de modifications mineures
apportées en 1982 concernant la désignation des deux sexes.
Cet
article, conçu pour surseoir aux exigences de préavis et établir les heures et
les jours de séance, a été utilisé pour encadrer le débat d’une manière qui
s’apparente à l’attribution de temps [156] .