Les institutions parlementaires canadiennes prirent forme il y a bien au-delà de deux cents ans. Des lois anglaises adoptées spécialement
pour les colonies du futur Canada en vinrent à prescrire plusieurs procédures de base avec de plus en plus de précision [11] .
Bon nombre de ces dispositions furent plus tard incorporées à la Loi constitutionnelle de 1867, où l’on stipule que le Canada
aura une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni, ce qui était le cas dans chacune des provinces fondatrices avant la
Confédération.
Les articles de la Loi constitutionnelle de 1867 qui remontent à d’anciens documents constitutionnels stipulent qu’à sa
première réunion, la Chambre doit élire un Président [12] ,
qu’elle doit procéder à l’élection d’un autre Président en cas de vacance dans cette charge par suite du
décès ou de la démission du titulaire ou pour une autre raison [13] ,
que le Président présidera à toutes les séances de la Chambre [14] ,
que le quorum sera de 20 députés [15]
et que toute demande en vue de prélever ou de dépenser des fonds doit émaner de la Chambre des communes en plus d’être
recommandée à celle ci par le gouverneur général [16] .
Ces dispositions se trouvent également dans l’Acte d’union, 1840 [17] .
D’autres articles de la Loi constitutionnelle de 1867 ont une origine encore plus lointaine. Les dispositions stipulant que toutes les questions
soulevées à la Chambre doivent être décidées à la majorité simple, le Président ayant un vote prépondérant
en cas d’égalité des voix [18] ,
et que tous les députés doivent, avant de pouvoir occuper leur siège à la Chambre, prêter le serment d’allégeance [19] ,
remontent à la Loi constitutionnelle de 1791 [20] .
Dans certains cas, l’inclusion d’une disposition constitutionnelle fut précédée d’un usage déjà établi.
Par exemple, à partir de 1758, et malgré l’absence d’une disposition constitutionnelle à cet effet, la Chambre d’assemblée
de la Nouvelle-Écosse élut un Président au début d’une nouvelle législature avant de passer à d’autres travaux [21] .
Les assemblées législatives du Haut et du Bas-Canada adoptèrent le même usage pour l’élection d’un Président [22] ;
en outre, leurs règlements comportaient des dispositions sur le quorum avant que l’Acte d’union, 1840, ne vienne fixer légalement le
quorum à 20 députés [23] .
Dans d’autres cas, des difficultés éprouvées lors de travaux antérieurs entraînèrent l’adoption de dispositions
constitutionnelles précises. Par exemple, l’article 47 de la Loi constitutionnelle de 1867, prévoyant l’élection par la Chambre
d’un autre de ses députés pour exercer les fonctions de Président en l’absence de ce dernier, visait à empêcher la
répétition d’une situation s’étant produite à au moins une occasion entre 1840 et 1866, lorsque l’Assemblée de la
Province du Canada avait dû s’ajourner parce que son Président était malade [24] .
Toutefois, la partie de la Loi constitutionnelle de 1867 qui a peut-être le plus d’importance sur le plan de la procédure est celle qui donne
un fondement législatif aux privilèges de la Chambre. La Loi constitutionnelle prévoit en effet que « les privilèges,
immunités et pouvoirs que posséderont et exerceront » la Chambre et ses députés seront « prescrits […] par loi du
Parlement du Canada », sous réserve que ces privilèges, immunités ou pouvoirs ne puissent excéder ceux de la Chambre des communes
britannique et de ses députés [25] .
Ainsi, la Chambre des communes canadienne a acquis, parmi ses privilèges fondamentaux, le droit exclusif de réglementer ses affaires internes et de contrôler
son emploi du temps et ses délibérations.
La Constitution investit donc le Parlement du Canada de la compétence voulue non seulement pour réglementer ses délibérations internes et
établir ses règles de procédure, mais également pour adopter un grand nombre de dispositions législatives importantes du point de vue
de la procédure, dont beaucoup se trouvent dans la Loi sur le Parlement du Canada [26] ,
entre autres : le pouvoir de la Chambre et de ses comités de faire prêter serment à des témoins qui comparaissent soit à la barre de la
Chambre soit devant un comité [27] ;
les procédures à suivre lorsque des députés démissionnent ou lorsque des sièges deviennent vacants pour d’autres raisons [28] ;
les règles sur les conflits d’intérêts applicables aux députés [29] ;
la suppléance du Président lorsque celui-ci doit s’absenter [30] ;
la nomination et la rémunération des secrétaires parlementaires [31] ;
la rémunération des parlementaires [32] ;
l’existence et la gestion de la Bibliothèque du Parlement [33] ;
et la constitution du Bureau de régie interne chargé de régler toutes les questions financières et administratives concernant la Chambre [34] .
Outre la Loi sur le Parlement du Canada, il existe des dizaines d’autres lois qui obligent la Chambre à prendre certaines mesures ou qui régissent
certains aspects de ses délibérations [35] .