Le Règlement est constitué des règles écrites qui régissent les travaux de la Chambre [36].
Étant permanentes, elles ne cessent pas d’être valides à la fin d’une session ou d’une législature;
elles demeurent en vigueur jusqu’à ce que la Chambre elle-même décide de les suspendre, de les modifier ou de les abroger.
À l’heure actuelle, il y a plus de 150 articles du Règlement, chacun constituant un ordre permanent de la Chambre pour la
conduite de ses travaux. Le Règlement traite de différents sujets, entre autres les détails du processus législatif,
le rôle du Président, la nature du calendrier parlementaire ainsi que les règles qui régissent l’activité
des comités et les affaires émanant des députés. Lorsqu’elle adopte officiellement ces règles permanentes,
la Chambre déclare qu’elles font partie du Règlement; la Chambre publie périodiquement ce dernier pour l’usage de
tous les députés.
Lorsque la Chambre des communes se réunit pour la première fois en 1867, les règles qu’elle adopta correspondaient dans
une large mesure à celles de l’Assemblée législative de la Province du Canada, elle-même créée en 1840 [37] .
S’il est vrai que l’Assemblée législative de la Province du Canada obtint son règlement des assemblées du
Haut et du Bas-Canada, créées en 1791, la grande majorité des articles émanaient de la Chambre d’assemblée
du Bas-Canada [38] .
Parmi les nombreux articles adoptés par l’Assemblée du Bas-Canada dans les premières années de son existence,
notamment en 1793 [39] ,
plus de 35 n’ont subi pratiquement aucune modification et sont encore en vigueur aujourd’hui à la Chambre des communes. Une
quarantaine d’autres sont également antérieurs à la Confédération [40] .
Depuis 1867, on a apporté d’innombrables modifications au Règlement [41] .
De nouveaux articles ont été adoptés alors que d’autres ont été modifiés en profondeur ou
supprimés, ce qui a changé, à l’occasion, la numérotation de façon substantielle. En outre, au fil du
temps, on a adapté les interprétations données aux anciennes règles pour tenir compte du contexte moderne [42] .
À l’occasion, l’adoption d’un nouvel article ne fait que codifier un usage de longue date de la Chambre [43]
ou rendre permanent un ordre provisoire, sessionnel ou spécial. À d’autres moments, on a modifié ou ajouté un
article par suite d’un incident ou d’un événement ayant convaincu la Chambre de la nécessité d’éviter
sa répétition [44] .
Compte tenu de l’importance que la Chambre attache à l’examen du Règlement, un débat doit avoir lieu au début
de chaque législature sur la motion suivante : « Que cette Chambre prenne en considération le Règlement et la
procédure de la Chambre et de ses comités [45] ».
En outre, le mandat du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre [46]
comprend « la revue du Règlement ainsi que de la procédure et des pratiques de la Chambre et de ses comités et la
présentation de rapports à ce sujet [47] ».
Le Comité peut présenter des recommandations de modification au Règlement en vertu de son mandat permanent ou d’un ordre
de renvoi précis [48] .
Bien que la Chambre dispose d’un grand nombre de moyens pour revoir le Règlement, il est possible d’ajouter, de modifier ou de
retrancher des articles seulement suite à une décision de sa part, prise par consensus ou par simple vote majoritaire, sur une motion
proposée par n’importe quel député [49] .
À maintes occasions, on a établi un comité spécial chargé de proposer des modifications et de soumettre ses
recommandations à la Chambre. Ces recommandations, présentées à la Chambre sous forme de rapport, ont souvent été
débattues dans le cadre d’une motion d’adoption du rapport. Si la Chambre approuvait le rapport, le Règlement était
immédiatement modifié. Parfois, on a utilisé le contenu du rapport comme point de départ de nouvelles discussions sur
certaines modifications [50] .
Dans d’autres cas, on a modifié le Règlement en adoptant à l’unanimité une motion du gouvernement, une telle
motion pouvant s’apparenter aux recommandations d’un comité de la procédure [51] .
La motion peut également être une initiative gouvernementale préalablement mise en avis et figurant au Feuilleton, à
la rubrique « Affaires émanant du gouvernement » [52] .
Le plus souvent, cependant, les modifications résultent d’un vaste consensus parmi les députés de tous les partis et sont
adoptées rapidement sans débat [53] .
Par contre, depuis 1867, des propositions controversées ont aussi entraîné de longs débats, et le gouvernement a dû
utiliser sa majorité pour modifier le Règlement [54] .
Enfin, il est arrivé que des modifications au Règlement aient été faites par l’adoption d’une motion d’un
député [55]
et par l’adoption d’un rapport présenté par un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes [56] .
Outre le Règlement permanent, la Chambre peut adopter d’autres règles écrites pour des périodes limitées. Entre
autres, les articles provisoires du Règlement sont valides pour une période déterminée qui ne correspond pas à la
durée d’une législature ou d’une session [57] .
Ils peuvent être adoptés à titre expérimental [58] ,
prolongés à titre provisoire, retirés ou transformés en articles permanents.
Les ordres sessionnels sont à caractère temporaire et demeurent en vigueur uniquement pour le reste de la session en cours. Bien entendu,
ils peuvent être renouvelés d’une session à l’autre et certains finissent par devenir des articles du Règlement [59] .
En plus du Règlement, des articles provisoires du Règlement et des ordres sessionnels, qui forment l’ensemble des règles
écrites, la Chambre peut également adopter des ordres spéciaux. Fréquemment utilisés pour la conduite des travaux de
la Chambre, les ordres spéciaux ne modifient pas le Règlement « écrit ». Étant donné qu’ils
concernent habituellement les travaux de la Chambre et sont souvent proposés sans avis, après consultation, on les adopte, fréquemment,
sans débat à l’unanimité. Ils peuvent s’appliquer à une seule occasion ou pour une période dont on
précise la durée [60] .
Certains ordres spéciaux sont devenus, avec le temps, des articles du Règlement [61] .
Enfin, certains articles du Règlement permettent explicitement à la Chambre de suspendre l’application d’autres articles [62] .
Et il arrive fréquemment que la Chambre décide à l’unanimité des députés présents de mettre de
côté ses règles afin d’aborder une affaire d’une façon qui autrement serait incompatible avec le Règlement [63] .
Par exemple, elle procède de la sorte lorsqu’un projet de loi franchit toutes les étapes en une journée, une procédure
qui autrement contreviendrait aux règles établies [64] .
Par ailleurs, la Chambre peut adopter un ordre spécial qui remplace et annule un ordre spécial adopté auparavant [65] .
Le Règlement prévoit également que la Chambre puisse aller de l’avant dans des situations où le consentement unanime a
été refusé, mais où la très grande majorité des députés sont d’accord pour mettre en œuvre
la mesure envisagée [66] .
Dans la hiérarchie de la procédure parlementaire, tout comme les dispositions constitutionnelles l’emportent sur les dispositions
législatives, le droit législatif l’emporte sur le Règlement. Seul le Parlement peut adopter ou modifier des dispositions
législatives; la Chambre des communes peut adopter ses propres règles tant et aussi longtemps qu’elles respectent le droit constitutionnel
et législatif.