La procédure et les usages de la Chambre des communes
Sous la direction de Robert Marleau et Camille Montpetit
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Témoignages

L’étude des questions qui leur sont renvoyées par la Chambre ou qu’ils examinent dans le cadre de leur mandat général amène les comités à solliciter des renseignements et des observations auprès d’un grand nombre de sources. Leurs attachés de recherche et les ministères leur fournissent régulièrement des séances d’information et de la documentation de base. Les comités déploient en outre énormément d’efforts pour recueillir les avis de personnes qui connaissent bien les questions dont ils sont saisis ou qui sont directement intéressées par elles. Cette consultation peut aller d’un groupe relativement restreint d’experts techniques à la population canadienne dans son ensemble.

Les comités recueillent généralement ces renseignements et observations en entendant directement des témoins et en recevant des mémoires. Le pouvoir qui leur est accordé de convoquer des témoins et d’exiger des documents [422]  les autorise non seulement à inviter des personnes à comparaître et des parties intéressées à leur adresser des mémoires, mais aussi à ordonner, par voie de sommation, que des personnes se présentent devant eux ou que certains documents leur soient remis.

Au début d’une étude, un comité peut prendre des mesures pour informer les membres du public de ses activités et solliciter leurs opinions. Il peut se servir à cette fin de communiqués de presse, d’annonces dans les journaux et d’avis publiés sur le réseau de télévision CPAC ou sur le site Web du Parlement [423] .

Témoins

Un comité peut souhaiter entendre les témoignages de particuliers, de représentants de groupes ou de fonctionnaires concernant la question qu’il étudie. Il peut choisir ces témoins de différentes manières. Normalement, ceux-ci sont proposés par ses membres. Le comité peut également inviter des témoins potentiels à manifester leur intérêt à comparaître. Souvent, le choix des témoins est délégué au sous-comité du programme et de la procédure, sous réserve de ratification par le comité dans son ensemble [424] . De plus, les groupes ou particuliers qui sont au courant d’une étude prochaine d’un comité peuvent signaler leur intérêt de comparaître sans y être invités par le comité. Enfin, lorsqu’ils tiennent des séances prenant la forme d’assemblées publiques, les comités réservent souvent une période au cours de laquelle les membres de l’auditoire peuvent poser des questions et formuler de brèves remarques sans avoir pris au préalable de dispositions officielles pour comparaître.

Il appartient au comité dans son ensemble de déterminer quels témoins il entendra. Des considérations pratiques, comme le temps qui leur est attribué pour une étude, limitent le nombre de témoins qu’il pourra accueillir. Tout membre d’un comité peut proposer des témoins, mais c’est le comité qui décide en dernier ressort qui il entendra. Les témoins se voient habituellement rembourser les dépenses raisonnables qu’ils engagent afin de comparaître devant un comité [425] .

Convocation de témoins

Dans la grande majorité des cas, les comités peuvent obtenir les témoignages qu’ils recherchent simplement en invitant des témoins à comparaître devant eux. Toutefois, certains témoins peuvent ne pas consentir à comparaître de leur plein gré. Lorsqu’un témoin potentiel a refusé une invitation à comparaître, un comité peut l’assigner en adoptant une motion à cet effet [426] . Si le témoin n’obtempère pas, le comité peut faire rapport de ce fait à la Chambre, qui prend alors les mesures qu’elle juge appropriées [427] .

Les comités n’ont pas le pouvoir d’assigner des députés ni des sénateurs. Si un député refuse de témoigner à la demande d’un comité, celui-ci peut faire rapport de ce fait à la Chambre, qui décide alors quelle mesure il y a lieu de prendre éventuellement. Les sénateurs peuvent comparaître volontairement devant les comités de la Chambre, mais on ne peut les y obliger. Si un comité désire que l’on demande officiellement à un sénateur de comparaître devant lui, il doit obtenir le consentement de la Chambre. Si celle-ci est d’accord avec le comité, elle envoie au Sénat un message demandant que le sénateur comparaisse devant le comité [428] .

Assermentation des témoins

Tout témoin comparaissant devant un comité peut être tenu de prêter serment ou de faire une affirmation solennelle [429] ; cependant, en temps normal, les témoins n’ont pas à prêter serment. La décision de faire prêter serment aux témoins est entièrement à la discrétion du comité [430] . Un témoin qui refuse de prêter serment pourrait être accusé d’outrage [431] . De même, un témoin, assermenté ou non, qui refuse de répondre à des questions ou qui ne donne pas des réponses véridiques pourrait être accusé d’outrage à la Chambre [432]. De plus, les témoins assermentés qui mentent peuvent être accusés de parjure [433] .

Dépositions

On demande habituellement aux témoins qui comparaissent devant un comité de faire une courte déclaration préliminaire résumant leur point de vue, ou celui de l’organisation qu’ils représentent, sur le sujet qu’étudie le comité. Cette déclaration est suivie d’une période de questions [434]. Tout membre du comité peut poser des questions, et le président peut également participer, à l’occasion, à l’interrogation des témoins [435] . Il peut aussi être permis aux autres députés qui assistent aux séances du comité de poser des questions [436] . Cela dépend en partie du temps que le comité a prévu pour examiner chaque témoin et du nombre de ses membres qui désirent poser des questions. On donne habituellement la priorité à ceux-ci lors de l’interrogation des témoins.

Les témoins qui comparaissent devant un comité jouissent de la même liberté de parole que les parlementaires et de la même protection ontre l’arrestation et la brutalité [437] . À la discrétion du comité, ils peuvent être autorisés à témoigner à huis clos lorsqu’ils traitent d’affaires d’État confidentielles ou de renseignements commerciaux délicats [438] . Dans des circonstances spéciales, il a été permis à des témoins de comparaître anonymement [439] . Le fait de soudoyer un témoin ou de chercher de quelque manière que ce soit à le décourager de témoigner à une séance de comité peut constituer une atteinte au privilège. De même, toute intervention auprès de témoins qui ont déjà présenté leur déposition ou toute menace dirigée contre eux peuvent être traitées par la Chambre comme des atteintes au privilège [440] .

Les témoins qui font une déposition peuvent se faire aider d’un avocat, mais en demandent rarement la permission [441]. Les avocats, lorsqu’ils sont admis, jouent strictement un rôle consultatif; ils ne peuvent poser de questions ni répondre au nom des témoins.

Compte tenu de la protection accordée aux témoins par le Parlement, on s’attend à ce que ceux-ci fassent preuve de jugement et de modération lorsqu’ils présentent leurs opinions aux comités. Le témoignage de ceux qui persistent à faire des remarques jugées inopportunes par un comité peut être rayé du compte rendu [442] .

La nature des questions pouvant être posées aux témoins qui comparaissent devant les comités n’est assujettie à aucune règle précise à part le fait qu’elles doivent se rapporter à la question à l’étude [443] . Les témoins doivent répondre à toutes les questions que leur pose le comité [444] . Un témoin peut élever une objection contre une question posée par un membre du comité. Toutefois, si le comité est d’accord pour que la question soit posée au témoin, celui-ci doit y répondre [445] . On a exhorté les membres à traiter les témoins « avec courtoisie et équité ». Néanmoins, un témoin qui refuse de répondre aux questions peut faire l’objet d’un rapport à la Chambre [446] .

Une attention particulière a été accordée à l’interrogation de fonctionnaires [447] . L’obligation faite aux témoins de répondre à toutes les questions posées par un comité doit être mise en équilibre avec le rôle que jouent les fonctionnaires lorsqu’ils donnent des avis confidentiels à leur ministre. La tradition veut qu’on envisage ce rôle par rapport à la mise en œuvre et à l’exécution de la politique gouvernementale, plutôt qu’à la détermination de celle-ci. En conséquence, on a dispensé les fonctionnaires de commenter les décisions stratégiques prises par le gouvernement. En outre, les comités acceptent ordinairement les raisons données par un fonctionnaire pour refuser de répondre à une question précise ou à une série de questions supposant l’expression d’un avis juridique, pouvant être considérées comme en conflit avec leur responsabilité envers leur ministre, débordant leur domaine de responsabilité, ou pouvant influer sur des opérations commerciales [448] .

Les comités respectent, comme la Chambre, la convention relative aux affaires devant les tribunaux [449]. Cette convention s’applique non seulement aux discussions que tiennent les membres des comités entre eux, mais aussi à l’interrogation des témoins [450] .

Mémoires et autres documents

La plupart des documents demandés par les comités sont fournis volontairement. Il peut s’agir de rapports du gouvernement, de statistiques, de correspondance, de notes et d’ententes de toutes sortes, tout comme de mémoires. Aux fins des comités, on entend par mémoire tout document présentant la position d’un particulier, d’un groupe, d’une organisation ou d’un ministère sur une question particulière. D’ordinaire, les comités peuvent obtenir les documents nécessaires à leurs travaux en en faisant simplement la demande [451] . Lorsqu’un comité se heurte à un refus de fournir un document qu’il juge essentiel à ses travaux, il peut adopter une motion en ordonnant le dépôt [452] . Si les intéressés n’obtempèrent pas à cet ordre, le comité n’a pas le pouvoir de les obliger à déposer le document, mais il peut faire rapport de ce fait à la Chambre et lui demander de prendre les mesures qui s’imposent [453] .

La Chambre n’a fixé aucune limite au pouvoir d’exiger le dépôt de documents et de dossiers, mais il peut ne pas être opportun d’insister pour qu’ils soient déposés dans tous les cas. En 1991, le Comité permanent des privilèges et des élections a fait remarquer ce qui suit :

La Chambre des communes reconnaît qu’elle ne doit pas exiger la production de documents dans tous les cas. Ainsi, des considérations ayant trait à la politique officielle, notamment la sécurité nationale, les relations extérieures et d’autres facteurs, influent sur la décision d’exiger ou non la production de ces documents [454] .

En cas de préoccupations au sujet de la confidentialité de documents, un comité peut accepter que ceux-ci soient déposés lors d’une séance à huis clos [455] . Les transcriptions de séances à huis clos et les autres documents confidentiels des comités doivent être classés en tant que dossiers secrets par les Archives nationales pour une période de 30 ans à compter de la fin de la session au cours de laquelle ils ont été créés. Ces documents restent à la disposition des députés pendant cette période [456] .

Un document présenté à un comité devient sa propriété et fait partie de ses dossiers. Les ministères sont tenus de présenter leurs documents aux comités dans les deux langues officielles. Toute autre personne, y compris les députés, peut présenter des documents écrits dans l’une ou l’autre des langues officielles. Chaque comité doit décider si les documents qui lui ont été présentés dans une seule langue officielle seront distribués à ses membres immédiatement ou seulement une fois qu’ils auront été traduits [457]. Le droit de présenter un document ne comporte cependant pas celui de le voir étudié sur-le-champ.

À l’occasion, un comité juge un document suffisamment important pour le traiter comme une « annexe » ou une « pièce ». On appelle annexe un document que le comité a ordonné de publier en annexe aux Témoignages entendus lors d’une séance particulière [458] . Une pièce est tout document ou article classé comme tel par le comité et fait par conséquent partie de ses dossiers permanents [459] . Les pièces ne sont ni publiées ni distribuées aux membres du comité; elles sont conservées par le greffier aux fins de consultation. Lorsqu’un comité décide de désigner un document comme une annexe ou une pièce, ce fait est consigné à son Procès-verbal. On se sert des annexes et des pièces, entre autres, pour conserver des parties d’un exposé à un comité qui, autrement, ne seraient pas incluses dans les Témoignages. On peut, par exemple, conserver sous forme d’annexes ou de pièces des copies de diapositives ou de tableaux utilisés dans le cadre d’un exposé.

Publications dse Comités

À l’instar de la Chambre, les comités publient un certain nombre de documents à l’usage de leurs membres, de leur personnel et du grand public [460] . À de nombreux égards, ces publications font pendant à celles de la Chambre [461]. Elles procurent un dossier permanent des témoignages reçus, des décisions prises et des résultats des études effectuées. Chaque comité publie des Procès-verbaux, des Témoignages et, de temps à autre, des rapports à la Chambre. Les Procès-verbaux constituent le compte rendu officiel de leur travail et sont établis et signés par le greffier du comité. Ils représentent l’équivalent des Journaux de la Chambre. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de ce qui a été dit au comité, tant par ses membres que par les témoins qui ont comparu devant lui. Les rapports à la Chambre peuvent être de courts documents de moins d’une page ou des ouvrages beaucoup plus volumineux imprimés et reliés séparément. Toutes les publications des comités sont établies dans les deux langues officielles.

Tous les documents publiés par les comités étaient autrefois disponibles sous forme d’imprimés. En 1994, la Chambre a commencé à diffuser ses publications par voie électronique. Auparavant, les comités produisaient un document intitulé Procès-verbaux et témoignages, qui renfermait la matière maintenant fournie séparément dans deux documents, soit le Procès-verbal et les Témoignages. Les rapports à la Chambre qui étaient jugés trop courts pour qu’il vaille la peine de les publier séparément étaient également inclus dans les Procès-verbaux et témoignages. Depuis septembre 1998, les Procès-verbaux et les Témoignages, qui sont des documents distincts, sont seulement disponibles en version électronique. Comme la Chambre distribue désormais ses publications sous forme électronique, on a en grande partie cessé d’imprimer les documents des comités. Ceux-ci sont maintenant disponibles en version électronique sur le site Web du Parlement, Parliamentary Internet Parlementaire [462]. Les comités peuvent tout de même publier les rapports de fond importants sous forme d’imprimés [463] .

Procès-verbaux

Le greffier rédige un Procès-verbal de chacune des séances d’un comité et signe l’original pour en attester l’exactitude et l’authenticité. Le greffier conserve les copies originales de tous les Procès-verbaux et les verse aux archives avec les autres documents du comité à la fin de chaque session. Les délibérations et décisions du comité sont consignées dans ce Procès-verbal à peu près comme la Chambre le fait dans ses Journaux. On y indique également le numéro de la séance [464] , l’heure et le lieu où elle s’est tenue; si elle a eu lieu en public ou à huis clos; qui l’a présidée; quels membres et substituts étaient présents, qu’ils aient assisté à la totalité ou seulement à une partie de la séance. Dans ce dernier cas, si le membre a été remplacé par un substitut pour le reste de la séance, le Procès-verbal indiquera à la fois que ce membre était présent et qu’un autre membre lui a servi de substitut [465] . Le Procès-verbal comprend également le nom des autres députés et sénateurs qui y ont assisté; le nom des membres du personnel présents; le nom des témoins, le cas échéant, accompagné de leur titre et du nom de leurs organisations; les ordres de renvoi abordés; et l’heure de l’ajournement. Le Procès-verbal peut en outre renfermer le texte des décisions rendues par le président du comité touchant l’acceptabilité, sur le plan de la procédure, des motions proposées pendant la séance.

Témoignages

Les Témoignages sont le compte rendu de ce qui a été dit au cours d’une séance de comité; ils correspondent aux Débats de la Chambre des communes. On y consigne non seulement les remarques faites par les membres du comité, mais aussi les paroles des témoins. On publie les Témoignages uniquement dans le cas des séances publiques ou des parties d’une séance tenues en public [466] . Ce document est établi sous forme bilingue suivant un processus qui correspond à la production des Débats de la Chambre à partir des « bleus ». Comme il a été décidé que le pouvoir d’un comité de faire imprimer des documents comprend également celui de décider de ne pas les publier, si un comité juge un témoignage offensant, il peut le faire radier des Témoignages [467] .

Lorsqu’un comité est d’avis que des documents qui lui ont été présentés au cours d’une séance ont une importance suffisante, il peut les faire ajouter aux Témoignages relatifs à cette séance sous forme d’annexe ou les faire consigner à titre de pièce de son Procès-verbal [468] .

Rapports

Les observations et recommandations des comités sont communiquées à la Chambre au moyen de rapports [469]. Ces rapports sont disponibles sous forme électronique et, de temps à autre, on peut aussi obtenir une version imprimée des rapports de fond volumineux. Les rapports sont numérotés consécutivement pour chaque comité durant une session. Outre les observations et recommandations des comités, on y trouve la mention de l’autorité en vertu de laquelle l’étude a été effectuée, un renvoi aux Procès-verbaux pertinents des séances tenues sur le sujet, et la signature du président. Le cas échéant, après la signature du président, les opinions ou recommandations dissidentes ou complémentaires y sont jointes [470] .

Télédiffusion

Les comités sont autorisés à téléviser leurs audiences conformément aux dispositions du Règlement [471] , à l’aide des installations fournies par la Chambre [472]. Autrefois, un comité devait obtenir une permission spéciale de la Chambre pour téléviser ses délibérations. En 1991, la procédure d’obtention du consentement de la Chambre pour utiliser ses installations de télédiffusion a été officialisée dans le Règlement. Une autre modification apportée à celui-ci en 1994 a permis aux comités de téléviser leurs délibérations en utilisant les installations de la Chambre sans devoir solliciter sa permission chaque fois [473] . Lorsqu’un comité désire se servir d’autres installations pour téléviser ses travaux, il doit obtenir une permission spéciale [474] .

La télédiffusion des séances des comités est régie par des lignes directrices établies par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et qui sont très semblables à celles qui s’appliquent à la télédiffusion des travaux de la Chambre [475] . Seule la personne à qui le président a donné la parole apparaît sur l’écran, et il est interdit de filmer les réactions de l’auditoire.

La Chambre met en outre à la disposition des comités des installations pour la radiodiffusion interne de toutes leurs séances publiques. Ces transmissions sont offertes à tous les députés dans leurs bureaux de la Colline du Parlement ainsi qu’à la Tribune de la presse parlementaire.


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