Le privilège parlementaire / Les droits de la Chambre

Vote : allégation de transmission d’informations inexactes afin d’influencer un vote

Débats, p. 9247

Contexte

Durant les Affaires courantes, le 15 juin 2000, John Bryden (Wentworth—Burlington) soulève une question de privilège concernant un document que le ministère de la Justice a distribué aux députés avant la prise du vote par appel nominal le 6 juin 2000 sur le projet de loi C-206, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information et d’autres lois en conséquence. M. Bryden soutient que le document contenait des déclarations attribuées faussement au commissaire à la protection de la vie privée et qui pourraient avoir convaincu des députés de voter contre le projet de loi. Il soutient d’une part que le commissaire à la protection de la vie privée a indiqué qu’il appuyait le projet de loi et, d’autre part, que le commissaire n’avait de toute façon pas fait connaître son opinion à l’égard du projet de loi lorsque le ministère de la Justice a préparé le document qu’il a distribué aux députés. D’autres députés interviennent également. Le vice-président (Peter Milliken) indique qu’il prend l’affaire en délibéré[1].

Résolution

Au début de la séance du 19 octobre 2000, le Président rend sa décision sur cette question de privilège. Il déclare qu’il y a un désaccord sur l’interprétation de la position du commissaire à la protection de la vie privée à laquelle le gouvernement avait accès avant la tenue du vote sur le projet de loi C-206 et qu’il n’appartient pas au Président de se prononcer sur pareilles questions d’interprétation. Il ajoute qu’il est tenu de rendre une décision sur une question de procédure plus restreinte : à savoir, s’il y a eu une tentative délibérée d’induire la Chambre en erreur. Le Président statue qu’à la lumière des déclarations et des documents présentés, il n’existe aucun fondement permettant d’affirmer qu’il y a eu atteinte au privilège de la Chambre.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président : Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de privilège soulevée le 15 juin 2000 par le député d’Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot (John Bryden) relativement à une entrave à un vote à la Chambre.

Note de l’éditeur

La circonscription de Wentworth—Burlington est devenue Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot le 29 juin 2000.

Je tiens à remercier le député d’avoir soulevé cette question ainsi que le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice (John Maloney), le député de Winnipeg-Sud (Reg Alcock)et le leader de l’Opposition à la Chambre pour leur contribution en la matière.

Le député d’Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot a soutenu que le ministère de la Justice avait délibérément induit en erreur les députés sur l’opinion du commissaire à la protection de la vie privée au sujet du projet de loi C-206, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information et d’autres lois en conséquence, en distribuant un document qui disait que le commissaire s’opposait à ce projet de loi.

Il a soutenu que le commissaire avait laissé entendre qu’il appuyait le projet de loi et que, dans tous les cas, il n’avait pas rendu publique son opinion sur celui-ci au moment où le ministère de la Justice rédigeait le document qu’il a distribué aux députés.

Dans son intervention, le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice a précisé que le gouvernement considérait les commentaires contenus dans le document comme une représentation juste et fidèle de la position du commissaire. Il a cité plusieurs faits à l’appui, notamment une rencontre avec les fonctionnaires du Bureau du commissaire à la protection de la vie privée ainsi que le dépôt à la Chambre, le 16 mai dernier, du rapport annuel du commissaire.

J’ai examiné avec soin les documents et les arguments qui m’ont été présentés. La présidence attache une très grande importance à cette question.

Le Président Jerome, dans un cas où un député avait été induit en erreur, a rappelé le principe de procédure en cause, lequel est clairement exprimé dans Erskine May[[2]], comme on peut le lire à la page 126 des Journaux du 9 novembre 1978 :

Commet une atteinte aux privilèges quiconque présente ou fait présenter à l’une ou l’autre Chambre ou à leurs comités des documents forgés, falsifiés ou fabriqués dans l’intention de les tromper.

Il est manifeste qu’il y a un désaccord sur l’interprétation de la position du commissaire à la protection de la vie privée à laquelle le gouvernement avait accès avant la tenue du vote sur le projet de loi C-206. Toutefois, il n’appartient pas au Président de se prononcer sur pareille question d’interprétation. La tâche qui m’incombe est plutôt de rendre une décision sur une question plus restreinte de procédure, à savoir, s’il y a eu une tentative délibérée d’induire la Chambre en erreur. Même si des députés peuvent être en désaccord, parfois profond, sur la façon dont d’autres députés interprètent la situation, il s’agit là d’une question bien différente de celle, beaucoup plus grave, de chercher à savoir si une telle interprétation est délibérément et sciemment fausse. Seules des preuves irréfragables peuvent permettre à la Chambre ou à son Président d’agir dans les cas où l’on a tenté d’induire en erreur les députés.

En l’occurrence, je dois conclure, d’après les déclarations faites à la Chambre et les documents présentés à la présidence pour examen, qu’il n’existe aucun fondement permettant d’affirmer qu’il y a eu atteinte aux privilèges de la Chambre.

Je tiens à remercier le député d’Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot d’avoir porté cette question à l’attention de la Chambre.

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2000-10-19

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[1] Débats, 15 juin 2000, p. 8134-8136.

[2] Journaux, 9 novembre 1978, p. 124.