Les comités / Composition des comités

Statut : droit de voter en comité

Débats, p. 5582-5584

Contexte

Le 17 juin 1994, après les Questions orales, Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley) invoque le Règlement afin de s’objecter au fait que, durant une réunion du Comité permanent des affaires indiennes et du développement du Grand Nord au cours de laquelle le projet de loi C‑33 , Loi sur le règlement des revendications territoriales des premières nations du Yukon, et le projet de loi C‑34, Loi sur l’autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon, ont été débattus, l’honorable Audrey McLaughlin (Yukon) était présente et avait été autorisée à voter même si elle n’est ni membre ni membre associée du Comité. Selon M. Harris, puisque cela allait à l’encontre de l’article 114(2)c) du Règlement, le rapport sur ces deux projets de loi devait être jugé irrecevable et qu’on devrait demander au comité de reprendre l’étude article par article de ces deux projets de loi. Don Boudria (whip en chef du gouvernement) soutient que Mme McLaughlin n’aurait pas dû être autorisée à voter, mais que son vote n’a changé d’aucune façon le résultat puisqu’il y avait une grande marge entre les non et les oui. Le Président prend la question en délibéré[1].

Résolution

Le 20 juin, le Président rend sa décision. Il juge qu’il peut intervenir sur la question parce qu’elle a trait à un droit fondamental de la Chambre de déterminer la composition d’un comité. Il déclare qu’Audrey McLaughlin ne remplit pas les conditions exigées pour être membre associée du Comité en vertu du Règlement et pour agir comme membre du Comité et que les voix exprimées par elle pendant les délibérations sur les projets de loi C‑33 et C‑34 sont nulles. Puisqu’aucun résultat des votes tenus au Comité n’aurait changé par la voix d’un seul député, le Président déclare que les rapports sur les projets de loi sont recevables et que la Chambre peut procéder à l’étude à l’étape du rapport.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis prêt à rendre une décision sur le rappel au Règlement soulevé par le député de Prince George—Bulkley Valley le vendredi 17 juin 1994 au sujet de la désignation de la députée du Yukon comme membre associé du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord pendant l’examen par ce comité des projets de loi C‑33, Loi sur le règlement des revendications territoriales des premières nations du Yukon, et C‑34, Loi sur l’autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon.

Je tiens à remercier les députés de Glengarry—Prescott—Russell (Don Boudria), de Kamloops (Nelson Riis), de Mississauga-Sud (Paul Szabo), de Roberval et de The Battlefords—Meadow Lake (Len Taylor) de leur précieuse contribution à la discussion.

Ainsi qu’on l’a souligné, les Présidents ont toujours hésité à intervenir dans les délibérations des comités de la Chambre.

Cependant, ainsi que le Président Fraser l’a expliqué dans sa décision du 26 mars 1990, rapportée à la page 9756 des Débats, et je cite :

Le Président a souvent informé la Chambre que les incidents et les points de procédure qui interviennent en comité devraient être réglés en comité, à moins que le comité ne fasse d’abord rapport à la Chambre. J’ai toutefois dit à la Chambre que cette pratique n’avait pas un caractère absolu et que, dans des circonstances spéciales très graves, le Président peut devoir se prononcer sur une question intéressant un comité, bien que le comité n’ait pas fait rapport à la Chambre.

Pour ce qui est du sujet qui nous concerne maintenant, je dois conclure qu’il est assez grave pour exiger l’intervention de la présidence parce qu’il a trait à un droit fondamental qui appartient à la Chambre et non à un comité, soit le droit de déterminer la composition d’un comité. De plus, les projets de loi en question ont fait l’objet de rapports à la Chambre par le comité et celle-ci est maintenant saisie des délibérations du comité.

Permettez-moi de commencer par aborder les préoccupations du député de Prince George—Bulkley Valley.

Premièrement, le député invoque [l’article] 114(2)c) du Règlement pour soutenir que, puisque la députée du Yukon n’était pas membre associé du Comité, elle ne pouvait être nommée substitut. Deuxièmement, le député souligne qu’il s’est opposé à l’acceptation de la députée du Yukon comme membre associé, mais que le président du Comité a rejeté son opposition. Troisièmement, le député soutient qu’il y a eu manquement au Règlement et que la réparation de ce manquement ne peut venir du Comité.

Enfin, le député demande à la présidence de prendre certaines mesures. Plus précisément, il demande que les rapports du Comité sur les projets de loi, présentés à la Chambre le vendredi 17 juin 1994, soient déclarés irréguliers et qu’en conséquence, le Comité soit tenu de reprendre l’étude article par article des projets en cause. Soutenant que le président du Comité a sciemment laissé se commettre un manquement aux règles de la Chambre, il a aussi demandé que l’actuel président du Comité démissionne et que quelqu’un d’autre soit choisi pour présider à la nouvelle étude du projet de loi.

Après avoir relu les interventions faites par tous les députés vendredi, de même que le Procès-verbal et le compte rendu des délibérations du Comité, et après avoir consulté les greffiers, je suis convaincu que les difficultés survenues au Comité découlent d’une erreur d’interprétation de l’article 114 du Règlement. L’avis donné au président du Comité concernant la procédure de substitution des membres était incorrect et, malheureusement, le président a agi d’après cet avis. Qu’il me soit aussi permis d’ajouter que la députée du Yukon n’a commis aucune faute à cette occasion.

Bien que selon la tradition de cette Chambre les comités soient maîtres de leurs délibérations, ils ne peuvent instituer de procédure qui dépasse les pouvoirs que la Chambre leur a conférés. Par exemple, un comité doit demander à la Chambre la permission de voyager, puisque les comités n’ont pas, d’office, ce pouvoir. De même, les comités ne peuvent ni déterminer, ni changer leur composition. La Chambre garde ce pouvoir et, dans les circonstances présentes, celui-ci est expressément prévu à l’article 104(4) du Règlement qui dit, et je cite :

(4) Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre dresse aussi, pour chacun des comités permanents et des comités mixtes permanents mentionnés dans le présent article, des listes des noms des membres associés qui sont réputés membres de ce comité pour les fins des articles 108(1)b) et 114(2)a) du Règlement et qui pourront servir de substituts au sein de ce comité conformément à l’article 114(2)b) du Règlement.

Tout rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté en vertu de cet article du Règlement doit être agréé par la Chambre pour que les changements de la liste des membres associés prennent effet. Puisqu’un tel rapport n’a pas été présenté à la Chambre par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, donc qu’un tel rapport n’a pu recevoir l’agrément de la Chambre, le député de Prince George—Bulkley Valley a absolument raison de dire que la députée du Yukon ne remplissait pas les conditions exigées pour être membre associé du Comité en vertu du Règlement et pour agir comme membre du Comité.

En vertu des règles de la Chambre, tous les députés peuvent librement participer aux délibérations des comités selon des paramètres clairement énoncés. L’article 119 du Règlement est ainsi conçu, et je cite :

119. Tout député qui n’est pas membre d’un comité permanent, spécial ou législatif peut, sauf si la Chambre ou le comité en ordonne autrement, prendre part aux délibérations publiques du comité, mais il ne peut ni y voter, ni y proposer une motion, ni faire partie du quorum.

De même, le commentaire 766(1) de la 6e édition de Beauchesne mentionne que les députés de la Chambre qui ne sont pas membres d’un comité peuvent participer à l’interrogation des témoins, et qu’ils le font habituellement à la discrétion du comité et de son président.

Plusieurs députés ont indiqué dans leur intervention que ce n’est pas la présence de la députée du Yukon au comité ou sa participation aux travaux de celui-ci qui était en cause. En réalité, plusieurs députés ont souligné que, puisqu’elle est la seule représentante du Yukon à la Chambre, sa contribution était précieuse. Ce qui est plutôt en cause, comme l’a souligné le député de Prince George—Bulkley Valley, c’est le fait qu’en permettant à la députée du Yukon de voter au Comité, on a enfreint le Règlement de la Chambre.

Les problèmes auxquels les délibérations de ce comité ont donné lieu ont servi à nous faire voir les difficultés que peuvent soulever la compréhension des nouvelles règles sur la désignation de membres associés de comités et sur la façon de choisir les substituts, notamment quand, comme dans le cas présent, la participation active d’un député déterminé aux délibérations d’un comité pourrait être extrêmement utile aux travaux du comité et de la Chambre.

Il y a lieu de louer les membres du Comité d’avoir voulu faire participer la députée du Yukon à leurs délibérations sur des questions qui affectent directement ses électeurs. Cependant, il est du devoir des membres de tous les comités de veiller à ce que les procédures appropriées soient respectées. Cela dit, je dois convenir avec le député de Prince George—Bulkley Valley qu’en permettant à un député qui n’était pas, d’après le Règlement de la Chambre, légitimement membre du Comité, on a de fait enfreint le Règlement.

Je dois donc statuer que les voix exprimées par la députée du Yukon pendant les délibérations sur les projets de loi C‑33 et C‑34 sont nulles puisqu’elle n’avait le droit de participer à aucun des votes.

Le député de Prince George—Bulkley Valley a aussi soutenu que, parce que les délibérations du Comité avaient été irrégulières, les rapports devraient être déclarés irrecevables. Cependant, comme l’a souligné le député de Glengarry—Prescott—Russell, aucun résultat des votes tenus au comité n’aurait changé par la voix d’un seul député. Ayant examiné les procès-verbaux du Comité, je dois être d’accord avec cette conclusion. En conséquence, je ne trouve pas de motif de déclarer les rapports irrecevables et il s’ensuit que la Chambre peut procéder à l’étude à l’étape du rapport de ces projets de loi.

J’espère et je compte que tous ceux qui œuvrent aux comités de la Chambre prendront note de mes commentaires d’aujourd’hui et feront de leur mieux pour éviter qu’un tel incident ne se reproduise.

P0904-f

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1994-06-20

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[1] Débats, 17 juin 1994, p. 5522-5524.