Recueil de décisions du Président John Fraser 1986 - 1994
La procédure financière / Les travaux des subsides
Motion de l'opposition : susceptible de devenir un ordre qui engage le gouvernement; amendement dépassant la portée de la motion
Débats, p. 2811
Contexte
Le 8 juin 1989, suivant l'appel de la motion de l'opposition inscrite au nom de Mme Lynn Hunter (Saanich—les Îles-du-Golfe), l'hon. Jean Charest (ministre d'État (Jeunesse) ministre d'État (Condition physique et Sport amateur) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre) invoque le Règlement pour faire valoir que la motion à l'étude n'est pas conforme à la procédure en ce qu'elle est susceptible de se transformer ipso facto en un ordre qui engage le gouvernement à présenter un projet de loi sur le processus d'évaluation environnementale, à déposer une politique visant à l'élimination sûre des déchets toxiques ou à engager toute autre démarche de ce genre. D'autres députés interviennent également à ce sujet[1]. Le vice-président (M Marcel Danis) prend la question en délibéré et accorde la parole à Mme Hunter pour l'amorce du débat. Plus tard au cours de la séance, l'hon. Charles Caccia (Davenport) propose un amendement à la motion de l'opposition parlant que chaque ministère et organisme du gouvernement examine ses politiques, projets et budgets afin d'en déterminer la contribution à un développement durable, que le gouvernement dépose une stratégie ayant pour objet de réduire d'au moins 20 p. 100 les émissions de dioxyde de carbone d'ici l'an 2005 et que le gouvernement apparie des modifications à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Le vice-président prend l'amendement en délibéré[2]. Vers 17 h 10, le même jour, le vice-président rend une décision sur la recevabilité de l'amendement ainsi que sur la recevabilité de la motion principale. Celle-ci est reproduite intégralement ci-dessous.
Décision de la présidence
Le vice-président (M. Danis) : Le député de Davenport a proposé de présenter un amendement à la motion sur l'environnement que nous avons débattue toute la journée. Je suis prêt à rendre une décision sur la recevabilité de l'amendement.
Après avoir examiné le libellé de l'amendement, la présidence pense que le député essaie d'allonger la motion initiale, d'y ajouter quelque chose.
Je me permets de rappeler aux députés que d'après le commentaire 437(2) de Beauchesne[3], il n'est pas réglementaire de soulever, dans un amendement, de nouvelles questions qui devraient être considérées comme des motions distinctes s'il en a donné avis dans les règles.
Je regrette, mais je dois par conséquent décréter que l'amendement proposé par le député de Davenport est irrecevable.
Passons maintenant à la deuxième décision. Dans la journée, le leader adjoint du gouvernement s'est levé pour s'opposer au libellé de la motion de l'opposition qui a été débattue aujourd'hui, sous prétexte qu'une motion susceptible de devenir un ordre qui engage le gouvernement est antiréglementaire, si elle est adoptée.
Après délibération, je suis prêt à rendre ma décision sur le recours au Règlement. Voici ce que dit le commentaire 412 de la cinquième édition de Beauchesne :
[...] Par ses ordres, la Chambre régit ses comités, ses membres, ses fonctionnaires, la marche de ses propres travaux et les actes de toutes les personnes qu'ils visent; ...
La présidence croit que dans certains cas, la Chambre, en déterminant « l'ordre de ses propres travaux », donne des ordres au gouvernement. Citons par exemple le paragraphe 36(8) du Règlement qui ordonne au Cabinet de répondre aux pétitions, le paragraphe 111(4) qui ordonne au Cabinet d'un ministre de fournir des documents et le paragraphe 123(1) qui précise que le rapport d'un comité sur des décrets-lois, s'il est adopté, devient un ordre de la Chambre au Cabinet.
La présidence a constaté que les parties visées de la motion présentée aujourd'hui exigent la présentation d'un projet de loi et la présentation de documents, mesures que l'on pourrait à la rigueur assimiler aux exemples que je viens de citer. En outre, le 6 mars 1973, le Président Lamoureux et, le 14 novembre 1975, le Président Jerome, ont manifesté une grande répugnance à limiter la liberté de l'opposition de choisir la motion à débattre un jour désigner[4].
Pour ces raisons, j'hésiterais moi aussi à limiter cette liberté, sauf dans un cas flagrant d'irrégularité. Je déclare donc que la motion est recevable.
Avant de terminer, cependant, je tiens à faire savoir à la Chambre que ma décision ne saurait constituer un précédent susceptible d'être invoqué pour justifier toute motion de l'opposition donnant un ordre au gouvernement. La présidence continuera d'examiner individuellement chaque motion présentée à la Chambre en apportant une attention particulière à sa forme et à son contenu et n'hésitera pas à déclarer irrecevable toute motion qu'elle juge irrégulière.
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1989-06-08
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[1] Débats, 8 juin 1989, p. 2756-2759.
[3] Beauchesne, 5e édition, p. 156.
[4] Débats, 6 mars 1973, p. 1944-1945; 14 novembre 1975, p. 9072.