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SINT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 21 mars 2001

• 1530

[Traduction]

Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)): Nous avons le quorum, mais avant de commencer, je voudrais vous soumettre une question d'ordre administratif.

Le 28 mars, nous devions avoir une séance d'une heure. Je voudrais que le comité m'autorise à prolonger cette séance d'une heure supplémentaire pour poursuivre nos travaux sur le bois d'oeuvre résineux. Nous allons recevoir M. Frank Schiller, de la Canadian Lumber Remanufacturers Alliance, qui va nous parler du bois d'oeuvre résineux. Est-ce que le comité consent à prolonger la séance d'une heure?

Le consentement est accordé. C'est parfait.

Nous avons une excellente liste de témoins pour aujourd'hui. Il y en a cinq, et nous avons exactement deux heures. Si le comité y consent, je serai rigoureux dans l'attribution du temps et chacun de nos témoins aura au maximum 10 minutes. Les témoins ne sont d'ailleurs pas obligés d'utiliser intégralement ces 10 minutes.

À la fin des exposés, nous aurons une période de questions et de réponses. Chaque membre du comité aura exactement cinq minutes pour poser des questions et entendre les réponses. Et là encore, je ferai preuve de rigueur dans l'attribution du temps.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Un rappel au Règlement...

Le président: Laissez-moi finir, monsieur Casey.

Nos témoins d'aujourd'hui sont M. Gerry Shannon, consultant principal du cabinet Government Policy Consultants, M. David Emerson, coprésident du Syndicat des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés, M. David Haggard, président, Syndicat canadien des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés, Mme Diana Blenkhorn, PDG du Bureau du bois de sciage des Maritimes, et l'honorable Bob Rae, conseiller juridique du Free Trade Lumber Council.

Soyez tous les bienvenus. Bienvenue, monsieur Rae.

Monsieur Casey, vous invoquez le Règlement.

M. Bill Casey: Oui. Merci beaucoup.

Je voudrais signaler au comité que les notes d'information de la Direction de la recherche parlementaire comportent des erreurs fondamentales et ne sont pas conformes à la réalité. J'aimerais qu'elle recherche reprenne ses travaux.

Il y a quatre provinces canadiennes qui sont régies par l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, quatre par l'Accord des Maritimes et deux par l'Accord de libre-échange. Or, le document ne traite que des provinces régies par l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. Il ne fait même pas état de l'Accord des Maritimes, et les deux autres provinces ne sont même pas mentionnées.

Il comporte des erreurs de faits qui devront être impérativement corrigées. Je voudrais citer celle-ci:

    Aux États-Unis, l'industrie du bois d'oeuvre et les groupes écologiques prétendent que le régime foncier canadien et les pratiques de gestion forestière des gouvernements provinciaux avantagent indûment l'industrie canadienne du bois d'oeuvre.

Le président: Monsieur Casey, vous avez prouvé votre point.

Vous pourriez nous donner votre liste d'erreurs et vous pourriez l'étudier avec les attachés de recherche, de façon à apporter les correctifs nécessaires.

M. Bill Casey: C'est une affirmation trompeuse, qu'il faut corriger. Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup.

Cela étant dit, nous allons donner directement la parole à M. Gerry Shannon.

M. Gerry Shannon (consultant principal, Government Policy Consultants): Merci, monsieur le président.

L'étude du comité sur la question du bois d'oeuvre résineux arrive à point nommé, et je suis très heureux de pouvoir contribuer à vos délibérations dans la limite de mes capacités.

Comme certains d'entre vous le savent peut-être, je m'intéresse depuis longtemps au commerce canado-américain, notamment au dossier du bois d'oeuvre résineux. J'étais sous-ministre du Commerce international lorsque la question a été propulsée à l'avant-scène en 1986, puis par la suite, pendant les négociations canado-américaines sur l'Accord de libre-échange. J'étais négociateur en chef pour le Canada lors du Cycle d'Uruguay à Genève, où l'on a renégocié l'Accord sur les droits compensateurs en cas de subventionnement, qui a fixé les règles de l'OMC applicables dans les cas de ce genre. J'ai consacré une bonne partie de ma carrière aux relations canado-américaines, le plus souvent à Washington.

Comme le temps est mesuré, allons droit au but et posons ce qui constitue, à mon sens, les véritables questions.

Premièrement, pourquoi faut-il maintenant envisager une autre guerre du bois d'oeuvre avec les États-Unis?

Ne nous y trompons pas, le bois d'oeuvre résineux fait l'objet d'un conflit commercial récurrent non pas parce que le Canada subventionne indûment ses exportations vers les États-Unis. Les Américains aiment monter sur leurs grands chevaux et prétendre qu'à cause de la nature injuste des droits de coupe imposés par les provinces, nos producteurs bénéficient automatiquement d'un avantage commercial illégal.

Non, le véritable problème, ce n'est pas le subventionnement injuste, c'est une question de part de marché. En bref, les Américains ne veulent pas que les exportations canadiennes de bois d'oeuvre accaparent plus de 30 p. 100 de leur marché. Si cette limite est dépassée, la hache tombe et les sociétés américaines de bois d'oeuvre recourent au pouvoir considérable dont ils disposent à Washington pour obtenir ce qu'ils veulent d'une façon ou d'une autre, c'est-à-dire une mesure qui ramène les exportations canadiennes à un niveau qui leur semble acceptable ou, en fait, la reconduction du commerce administré dans ce secteur.

• 1535

L'économie n'a pas grand-chose à voir dans ce dossier, pas plus que le subventionnement. Le problème, c'est la part du marché, et les Américains en ont fait leur argument ultime, au fil des années, dans leur dialogue avec les Canadiens, disant que nous devions accepter de voir les Américains se soustraire en permanence à leurs obligations aux termes de l'ALENA.

Dans la situation inverse, si le problème avait concerné la part des Américains sur le marché canadien de l'un de leurs principaux produits d'exportation et que nous nous en étions tenus à un principe voulant que les Américains ne pouvaient en aucun cas occuper plus d'un tiers du marché canadien, on peut présumer que l'ALENA n'aurait jamais été mis en oeuvre. Pourtant, plusieurs années après son entrée en vigueur, on constate que pour la quatrième fois, les Américains réclament la mise en oeuvre d'obstacles au commerce pour limiter les volumes de bois d'oeuvre canadien vendus sur le marché américain, bien que nous partagions une zone de libre-échange que nous avons achetée et payée.

Les Américains s'attendent à obtenir gain de cause. Pourquoi? Premièrement, parce qu'ils ont déjà gagné à deux reprises, si l'on tient compte du dernier résultat. La tendance est évidente. Nous gagnons les batailles, mais ils gagnent la guerre.

En 1986, sous la pression de Washington, nous avons conclu un protocole d'entente qui imposait une taxe aux exportations de résineux, dont le niveau a été fixé à 15 p. 100, c'est-à-dire exactement ce que demandaient les Américains. À l'époque, nous étions fondés de croire qu'un groupe spécial du GATT chargé du dossier pourrait décider en notre faveur, mais comme le GATT ne rendait pas de décision exécutoire, la balance a penché en faveur d'une solution commerciale négociée.

Certains, aujourd'hui, reprennent les mêmes arguments pour préconiser une taxe à l'exportation de façon à obtenir un répit temporaire et à garder les droits versés au Canada. Qu'on ne s'y trompe pas, en imposant une taxe aux exportations de bois d'oeuvre, on a renoncé au principe dans le but de garder l'argent par la récupération de la taxe. C'était une mesure draconienne pour les provinces, car elle donnait aux Américains un droit de regard sur la gestion de nos forêts; c'était une mesure punitive et excessive. Mais cette taxe de 15 p. 100 était peu de chose en comparaison des chiffres dont il faut parler aujourd'hui.

En 1996, après avoir exercé notre droit de mettre un terme au protocole d'entente cinq ans avant la date limite, et après avoir obtenu gain de cause contre les Américains auprès de plusieurs groupes spéciaux de l'ALENA, nous avons, sous la pression des Américains, imposé l'actuel Accord sur le bois d'oeuvre résineux à nos exportateurs. Il en est résulté un régime d'exportations fondé sur des quotas, qui permettait lui aussi aux Américains d'atteindre leur objectif, à savoir la mise en échec du libre-échange dans ce secteur.

Dans les deux cas, ils ont commencé par porter plainte en invoquant le commerce déloyal, mais à chaque fois ils ont renoncé à leur action, car grâce aux pressions directes exercées sur les parties, ils ont obtenu ce qu'ils voulaient.

Deuxièmement, les Américains connaissent bien le Canada. Le marché américain est le marché des exportateurs de résineux, si bien que les sociétés canadiennes et les provinces productrices sont devenues le paratonnerre des plaintes américaines. De leur côté, les sociétés canadiennes hésitaient à déclarer la guerre commerciale aux Américains sur le terrain du bois d'oeuvre résineux, à cause de l'incertitude de l'issue d'une telle guerre et parce qu'aux termes du droit américain, même si les Américains finissaient par succomber à l'OMC et devaient renoncer à l'imposition de droits compensateurs, le montant de ces droits ne serait jamais remboursé. Par ailleurs, ceux qui bénéficiaient d'une solide position à l'exportation au moment de l'imposition de l'accord se voyaient privilégiés par le système de quotas par rapport aux autres, y compris aux nouveaux venus.

Quant aux provinces, elles trouvent dans les droits de coupe une importante source de revenu. Qui plus est, elles ont élaboré leur système d'exploitation à l'interne en fonction de leurs préoccupations, qui étaient d'éviter une formule qui aurait donné aux Américains un droit de regard sur la façon dont nos arbres sont coupés et ce qu'il en coûte.

Troisièmement, et c'est sans doute le plus important, les Américains ont gagné parce que du côté canadien, nous n'avons jamais réussi à faire cause commune pour repousser l'attaque américaine et pour décider de nous-mêmes, à la lumière des conséquences juridiques éventuelles, de la meilleure façon d'agir. Au contraire, telle ou telle province s'est montrée prête à céder devant les Américains ou, comme en 1996, le gouvernement fédéral a lui-même cédé devant certaines provinces et a permis la mise en place de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux.

Pour le gouvernement fédéral et le Parlement, il s'agit de savoir si en dehors de la soumission aux exigences américaines, il existe une autre option viable. Il y en a une, mais ce ne sera pas une partie de plaisir.

Tout d'abord, il est certain qu'à la faveur de l'échéance de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, l'industrie américaine va intenter le 2 avril des poursuites pour obtenir des droits compensateurs. Il se peut également qu'elle lance une action antidumping pour attaquer tous azimuts et pour s'assurer d'obtenir ce qu'elle veut.

• 1540

L'enquête concernant les droits compensateurs va enclencher une procédure où l'on va étudier le subventionnement et le préjudice causé avant toute décision provisoire et avant l'amorce d'imposition d'un droit compensateur. Connaissant les Américains, on sait qu'ils vont profiter de cette période pour accentuer leur pression sur les différents intervenants canadiens afin qu'ils renoncent à leurs droits au titre de l'ALENA et de l'OMC et qu'ils acceptent une entente en vertu de laquelle ce secteur restera pendant plusieurs années soumis non pas au libre-échange, mais au commerce administré. Si les poursuites américaines se soldent par ce résultat, le Canada n'aura d'autre choix que de contester l'imposition d'un droit compensateur.

Le recours ultime des Canadiens sera de porter le différend devant l'Organisation mondiale du commerce où, heureusement, le Canada n'est pas resté inactif en attendant la suite des événements.

J'aimerais mentionner brièvement deux éléments qui devraient susciter aux États-Unis une certaine nervosité quant à la saisine de l'OMC dans ce dossier. Tout d'abord, au cours des négociations commerciales du Cycle d'Uruguay, les négociateurs, à l'exception de ceux des États-Unis, ont convenu que les conséquences économiques du contrôle des exportations ne seraient pas comptées comme des subventions donnant matière à compensation. Lors des dernières poursuites américaines intentées contre le Canada au cours des années 90, les autorités américaines ont considéré que plus de la moitié de la subvention était imputable au contrôle des exportations sur la matière première. Si les Américains persistent à compter cet élément en tant que subvention, leur réglementation ne sera pas conforme aux principes de l'OMC et devra être abrogée.

Évidemment, les Américains rejettent cette interprétation, même si l'Union européenne, le Japon et d'autres, y compris le Secrétariat de négociation du GATT, partagent l'analyse canadienne des travaux du comité de négociation. Les Américains en ont tiré la conclusion opposée dans leur énoncé de mesures administratives qui accompagnait la loi de mise en oeuvre du Cycle d'Uruguay lorsqu'elle a été présentée au congrès.

Les Américains ont allégué que cette modification législative allait empêcher les Canadiens d'obtenir gain de cause lors de contestations ultérieures concernant le bois d'oeuvre devant l'ALENA, puisque cet accord considère uniquement si le pays applique correctement sa législation intérieure. C'est notamment pour cette raison que le Canada a accepté l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux en 1996, mais l'énoncé de mesures administratives n'a pas grand chance de succès à Genève, où l'OMC devrait adopter le point de vue contraire. Comme vous le savez, le Canada a intenté des poursuites contre les États-Unis sur la légitimité d'une compensation correspondant à des mesures de contrôle des exportations pour confirmer le bien-fondé de notre interprétation.

Deuxièmement, le Canada a saisi un autre groupe spécial de l'OMC en affirmant que la pratique américaine consistant à rembourser les droits imposés sur la base d'une décision provisoire serait contraire aux obligations imposées par l'OMC et devrait être dénoncée.

Si nous obtenons gain de cause, ces deux actions seront exécutoires pour les États-Unis. Si les Américains ne s'y plient pas, le Canada sera autorisé à prendre des mesures préjudiciables aux intérêts commerciaux américains de valeur comparable. Il n'est donc pas étonnant que les États-Unis fassent monter les enchères au Canada pour obtenir le commerce administré dans ce conflit et leur attitude ne changera pas tant que le Canada ne leur aura pas signifié son refus catégorique de reprendre le chemin du commerce administré.

La prochaine démarche américaine consistera à établir un lien devant le Congrès entre la procédure accélérée accordée à l'administration américaine pour mener les négociations commerciales internationales et la mise au pas du Canada dans le dossier du bois d'oeuvre.

En définitive, quelle attitude le Canada devrait-il adopter cette fois-ci? Notre gouvernement sollicite actuellement l'appui du gouvernement américain pour la nomination des envoyés spéciaux, dans l'espoir que des personnes de bonne volonté puissent trouver un terrain d'entente pour régler un problème qui a défié plusieurs gouvernements successifs de part et d'autre de la frontière.

Il faut néanmoins se demander à quoi tout cela va servir. Autrement dit, qu'attend-on exactement des envoyés spéciaux?

Tout d'abord, est-on fondé de croire qu'il est possible de dissuader les Américains de lancer leur enquête sur le droit compensateur immédiatement après l'expiration de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux? Dans l'affirmative, il faudrait exploiter cette possibilité mais à dire vrai, il est bien peu vraisemblable, dans les circonstances, que les autorités américaines essaient de dissuader leurs propres sociétés commerciales de se prévaloir des options que leur offre le droit américain.

Deuxièmement, peut-on s'attendre à des concessions américaines, ou faut-il plutôt prévoir que tous les changements devront intervenir du côté canadien?

Troisièmement, une telle procédure donnera-t-elle au Canada le temps de convaincre les États-Unis du bien-fondé de sa position, ou va-t-elle permettre aux Américains d'exercer leur vaste pouvoir sur les intervenants canadiens pour les amener une fois de plus à se soumettre à une formule de commerce administré, ne serait-ce que pour éviter une guerre commerciale ouverte avec la nouvelle administration Bush?

• 1545

Vingt ans, monsieur le président, c'est bien long pour laisser s'envenimer un irritant dans le commerce bilatéral. On aurait pu résoudre le conflit à l'occasion des négociations commerciales canado-américaines du milieu des années 80, mais les Américains ont veillé à ce qu'il ne puisse en être ainsi en stipulant explicitement que le nouvel accord ne pourrait en rien modifier les conditions de l'accord de 1986 sur le bois d'oeuvre résineux.

On aurait pu trouver une solution en 1996 si les parties avaient convenu de s'en remettre au droit, mais le Canada, qui avait remporté les premières escarmouches judiciaires, a préféré s'entendre avec les États-Unis en acceptant de s'imposer unilatéralement une limite quantitative sur ses exportations. Il y aurait encore une solution aujourd'hui, mais à la condition que les joueurs canadiens fassent cause commune sous la bannière du gouvernement fédéral, qu'ils rejettent la taxe sur les exportations ou la reconduction de l'actuel accord fondé sur des quotas, qui constitue une politique commerciale déshonorante et inacceptable dans une zone de libre-échange, et qu'ils exigent une sentence équitable fondée sur le droit international.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Shannon.

Nous allons maintenant entendre M. David Emerson, du Canadian Lumber Trade Council. Vous avez dix minutes.

M. David Emerson (coprésident, Canadian Lumber Trade Alliance): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs.

Je m'appelle David Emerson et je suis PDG de la société Canfor et l'un des trois coprésidents d'un groupe appelé B.C. Lumber Trade Council. Je suis également l'un des trois coprésidents d'un groupe pancanadien—si je peux me permettre d'utiliser prudemment cette expression—appelé Canadian Lumber Trade Alliance.

J'ai l'intention de faire aujourd'hui des commentaires d'ordre assez général, mais je ne voudrais pas donner l'impression que je parle au nom des groupes auxquels je participe, encore que je ne pense pas que nous puissions avoir d'importantes divergences d'opinions sur les propos que je tiendrai aujourd'hui.

Dans moins de deux semaines, l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux viendra à échéance. Tout semble indiquer que nous serons confrontés à la quatrième ronde de litige dans le dossier du bois d'oeuvre résineux depuis 1982. La bataille s'annonce et sera probablement la plus coûteuse et la plus mesquine.

Examinons pendant quelques instants l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, parce qu'il représente à mon avis une entente très injuste pour l'intérêt public. Il constitue un cadre commercial réglementaire interventionniste, fragmenté, fondé sur quotas. Il joue contre le Canada dans la mesure où il permet que le bois d'oeuvre non canadien puisse être exporté aux États-Unis sans restriction.

Cet accord est une source de division au Canada puisque certaines provinces ne sont pas visées par les quotas et que d'autres le sont. Certaines entreprises ont un quota important alors que d'autres n'ont que de tout petits quotas, si elles en ont un.

Voyons ce qui s'est produit depuis l'entrée en vigueur de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. La part non canadienne—c'est-à-dire la part du marché américain qui appartient à un autre pays—a augmenté de plus de 100 p. 100, près de 106 p. 100. Les régions canadiennes exclues des dispositions américaines ont augmenté leur part du marché américain de plus de 130 p. 100. La Colombie-Britannique, la plus grande région productrice de produits forestiers au Canada, a perdu 20 p. 100 de sa part du marché américain, et a connu en fait une baisse substantielle de ses exportations de bois d'oeuvre résineux vers les États-Unis.

Entre 1995 et 1999, 26 des 55 scieries qui ont fermé leurs portes en Amérique du Nord se trouvaient en Colombie-Britannique. Le rendement moyen du capital employé dans l'industrie de la Colombie-Britannique pendant cette période a été de 2,9 p. 100—vous vous seriez mieux tiré d'affaire en achetant des obligations d'épargne du Canada.

Malgré tout cela, nous continuons à entendre des commentaires non fondés par de gens mal informés qui disent que le problème dans le commerce du bois d'oeuvre est le problème de la Colombie-Britannique. Que si la Colombie-Britannique cessait simplement de subventionner ce secteur et d'inonder le marché américain, tout irait très bien.

En fait, nous avons une structure commerciale qui est pire que simplement archaïque. Cette structure pénalise injustement notre industrie, fait disparaître des emplois au Canada, dévalue nos entreprises, engendrant ainsi la vente d'actifs à rabais pour les acheteurs étrangers affamés.

Comment les discours creux des Américains se comparent-ils à la réalité? Il est très difficile de faire la distinction entre les discours creux et la réalité. Mais ce qu'on entend des États-Unis c'est que le bois d'oeuvre du Canada, principalement parce qu'il provient de terres domaniales, est transféré aux compagnies en fonction d'un système de subventions. Cette question a déjà été examinée par des groupes spéciaux qui ont constaté qu'il n'existait aucune subvention, mais l'attitude protectionniste des États-Unis perdure.

• 1550

Le fait est que les producteurs américains s'opposent à ce que la part canadienne dépasse environ le tiers du marché américain. Dès que l'on franchit ce seuil, les Américains passent à l'attaque—voulant prendre des sanctions contre le Canada en ayant recours à des lois qui ont été rédigées justement pour protéger les intérêts des producteurs américains. Serait-ce différent si on changeait d'orientation au Canada, comme le disent certains des membres protectionnistes de l'industrie américaine? C'est fort peu probable. Encore une fois, dès que les seuils prévus pour la part du marché seraient dépassés, de nouvelles méthodes plus sophistiquées seraient employées. Nous avons déjà été témoin de ce genre de situation par le passé.

Que faire? Il faut d'abord se rendre à l'évidence. L'Amérique du Nord est, tout compte fait, une zone environnementale et économique intégrée. Nous ne disposons simplement pas des mécanismes pour bien gérer cette zone. Quant au bois d'oeuvre résineux, je crois que cela veut dire tout d'abord qu'il nous faut négocier un cessez-le-feu immédiatement qui inclurait un cheminement bien défini et bref vers le libre-échange. De plus, il nous faut élaborer un code de principes qui reflètent les impératifs caractérisant une gestion durable et saine du secteur forestier dans un marché compétitif et intégré. Troisièmement, il nous faut créer une commission ou un mécanisme bilatéral responsable des politiques nord-américaines en matière des forêts qui serait chargé de régler les différends de façon objective et juste.

Si l'on ne crée pas un nouveau cadre nord-américain, le règlement des différends dans le conflit du bois d'oeuvre résineux demeurera un voile derrière lequel les forces du protectionnisme continueront à croître et à prospérer.

En conclusion, il existe des solutions qui pourraient aider le Canada et les États-Unis. La tâche ne sera pas facile, mais nous ne pouvons abandonner. Trop de Canadiens dépendent de nos efforts, et il existe une réalité que nous ne saurions éviter; le libre-échange dans le secteur du bois d'oeuvre résineux ne pourra voir le jour sans tenir compte des autres questions bilatérales qui touchent le Canada et les États-Unis.

Merci, monsieur le président. Je serai heureux de répondre aux questions plus tard.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Emerson. Nous entendrons maintenant M. David Haggard, président du Syndicat canadien des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés. Monsieur Haggard, vous disposez de 10 minutes.

M. David Haggard (président, Syndicat canadien des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés. Je m'appelle Dave Haggard et je suis président du Syndicat canadien des travailleurs de l'industrie du bois et leurs alliés, qui représente des travailleurs de toutes les régions du pays qui travaillent dans le secteur du bois massif.

Lorsque l'ALENA a été mis en oeuvre, nous, comme bien d'autres collègues des autres syndicats, disions que nous allions payer très cher pour cet accord. De l'autre côté, mon syndicat dépend beaucoup des échanges commerciaux dans toutes les régions du monde parce que les produits de nos membres, environ 85 p. 100 en fait de leur production, sont exportés; la plus grande partie de ces exportations sont destinées aux États-Unis.

Nous avons commencé à faire face au problème il y a environ deux ans et nous avons commencé alors à nous demander ce que nous pouvions faire. Nous avons parlé à nos homologues américains qui représentent les travailleurs de l'industrie du bois massif et nous leur avons demandé comment nous pouvions éviter une grande bataille à tout bout de champ entre les entreprises américaines et l'industrie canadienne. Nous nous sommes demandé comment, si les membres de l'industrie ne pouvaient pas s'entendre les uns avec les autres dans leur propre pays, ils pourraient apprendre à s'entendre avec leurs homologues d'autres pays, si ce n'est qu'en achetant les autres compagnies.

En fait, cela semble avoir été une option populaire, pourtant les guerres commerciales se poursuivent dans le secteur forestier. Nous croyons, pour être honnêtes, qu'il existe un moyen de mettre fin à ces guerres commerciales. L'Europe a trouvé une solution en créant l'Union européenne, l'eurodollar, et tout ce qui l'accompagne, en constituant un groupe commercial toujours plus important, pour avoir des échanges avec le reste du monde. Serait-il possible de faire la même chose avec le Canada et les États-Unis?

Nous avons collaboré avec le gouvernement fédéral afin de débloquer des montants réservés au développement des marchés, et nous travaillons toujours à ce dossier avec l'industrie au Canada. Nous croyons que ces discussions devraient être élargies pour inclure également l'industrie américaine. Nous sommes d'avis que si nous sommes sur le point d'exporter en Chine, en Inde, en Corée et dans d'autres pays, il n'y aurait pas de problèmes, que ce soit avec le prix ou la quantité de bois expédié dans les autres régions du monde à partir de nos deux pays, si nous pouvions finalement nous entendre. Je ne suis pas convaincu que ce soit possible.

Je continue encore à croire que nous réussirons à surmonter les différences qui existent entre nos deux pays, que nous pourrons participer à un programme de développement des marchés internationaux. Cependant, tout ce que nous semblons faire, c'est maintenant proposer ce nouvel accord de libre-échange dans les Amériques, un accord qui créera à nouveau un grave problème aux États-Unis, si vous y pensez comme il faut. Cet accord pourrait également créer un problème au Canada parce que nous aussi oeuvrons dans le secteur forestier.

Allons-nous nous retrouver dans une situation où les Américains enverront plus de bois vers les États-Unis tout en imposant des restrictions à notre frontière? J'espère que notre gouvernement n'acceptera pas ce genre de situation parce que cela nuirait grandement au Canada.

• 1555

Je crois que nous pouvons régler le problème et qu'il nous faut absolument travailler très fort pour y parvenir. Nous ne croyons pas que le commerce administré est une bonne chose au Canada. Nous croyons qu'il a créé un grave problème pour ceux que je représente en Colombie-Britannique, où nombre de scieries ont dû fermer leurs portes, faute de quotas. Cette situation a créé des inéquités au Canada car ceux qui avaient un quota se sont très bien tirés d'affaire, merci; ceux qui n'avaient aucune restriction se sont encore mieux tirés d'affaire; et ceux qui n'avaient pas de quota ont éprouvé de graves problèmes, de même que leurs employés.

Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait se faire le chef de file pour cette initiative sur le développement des marchés. Nous croyons qu'il faudrait y associer l'industrie de nos deux pays ainsi que les deux groupes syndicaux américain et canadien qui ont démontré qu'ils étaient prêts à participer à ce genre d'initiative. Nous croyons également que si nous ne procédons pas de cette façon, cette lutte se poursuivra jusqu'à la fin de nos jours, et tout cela n'aura fait que nuire à nos deux pays.

On parle de taxes à l'exportation imposées à la frontière. Personnellement, je ne crois pas que ce soit la bonne façon de procéder si nous avons en fait un accord de libre-échange nord-américain. Nous pourrions accepter cette situation pendant une brève période—et par brève période je n'entends pas plus d'un ou deux ans—si c'est la seule façon de surmonter l'obstacle que présentent les discours creux que l'on retrouve dans les médias depuis les deux derniers mois et les menaces que profèrent les Américains quand ils disent avoir l'intention d'agir le 1er avril. Nous pourrions accepter ce genre de solution à court terme si, pendant ce temps, nous négociions une façon d'élaborer et d'adopter une stratégie nord-américaine dans le secteur forestier.

Si nous n'arrivons pas à nous entendre sur la question, je crois que cette guerre se poursuivra jusqu'à la fin des temps. Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Haggard. Nous accueillons maintenant Diana Blenkhorn du Bureau du bois de sciage des Maritimes. Vous disposez de 10 minutes, madame Blenkhorn.

Mme Diana Blenkhorn (présidente, Bureau du bois de sciage des Maritimes): Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens à remercier les membres du comité—et je reconnais nombre de visages—de m'avoir offert cette occasion d'être des vôtres.

Le Bureau du bois de sciage des Maritimes présente depuis 62 ans au nom de l'industrie de bois d'oeuvre résineux au Canada une position commune sur toutes les questions qui la touchent. Le Bureau a été mis sur pied en 1938. Nous sommes donc fort habitués à présenter l'opinion commune de l'industrie dans la région de l'Atlantique.

Je suis venue aujourd'hui vous présenter la position commune de l'industrie dans les quatre provinces de l'Atlantique, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve en ce qui a trait au commerce du bois d'oeuvre résineux avec les États-Unis. Cette position commune reflète non seulement la position des quatre provinces, mais également celle des quatre gouvernements provinciaux. Tout cela a été illustré par une lettre adressée le 28 février au premier ministre, M. Jean Chrétien, et signée par les quatre premiers ministres provinciaux de l'Atlantique.

J'ai été très heureuse d'être invitée à témoigner aujourd'hui parce que ce dossier est une des questions les plus importantes et les plus cruciales à laquelle est confronté le secteur du bois d'oeuvre résineux au Canada, et en fait, dans le Canada atlantique.

Je suis heureuse de cette occasion qui m'est offerte de discuter avec vous de la position de l'industrie dans la région Atlantique, et je serai disposée à répondre à vos questions tout à l'heure.

On a beaucoup discuté au Canada au cours des dernières semaines, et d'ailleurs on l'a fait lors des derniers exposés, de la date d'échéance du 31 mars de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. Mais ce dont on n'a pas vraiment discuté en détail au Canada, c'est qu'il existe en fait deux accords distincts.

Je suis convaincue que vous connaissez bien l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux qui a été signé par le Canada et les États-Unis le 29 mai 1996. Cet accord comporte les éléments sur lesquels s'était entendue l'industrie à l'époque, et impose un quota aux provinces de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec.

Mais le deuxième accord touche également quatre provinces. Il s'agit de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve. Cet accord prévoit le libre-échange du bois d'oeuvre résineux qui provient de ces quatre provinces si les billes proviennent de ces provinces ou de l'État du Maine.

Les lettres échangées qui constituent le deuxième accord, que nous appelons l'Accord des Maritimes, ont également été signées le 29 mai 1996, par le gouvernement fédéral canadien et par le gouvernement américain. Il s'agit du deuxième accord, l'accord dont j'ai l'intention de parler aujourd'hui.

• 1600

L'Accord des Maritimes comporte trois grands éléments: tout d'abord, il fait état des raisons historiques pour lesquelles les provinces de l'Atlantique n'ont jamais été visées par les recours commerciaux antérieurs dans le secteur du bois d'oeuvre résineux.

Je passerai en revue très brièvement cet historique. Dans la décision provisoire de 1986 dans le dossier des droits compensateurs, 92 p. 100 des scieries de l'Atlantique ont été exclues grâce à des exemptions touchant des compagnies précises. Cela veut dire que tout ça a fait l'objet d'un examen et de l'approbation du Département du commerce américain. À tort ou à raison, les autres exportateurs ont payé un droit compensateur de 15 p. 100.

Puis, en 1987, le Canada a imposé une taxe à l'exportation de 15 p. 100, comme prévu dans le protocole d'entente, pour toutes les autres exportations. Un an plus tard, toute la région de l'atlantique a été exclue, et cette taxe de 15 p. 100 a été payée par les autres membres de l'industrie canadienne.

Lorsqu'en 1991, à la demande pressante de la Colombie-Britannique, le Canada a mis fin au protocole d'entente qui imposait la taxe de 15 p. 100 à l'exportation, les États-Unis ont rétorqué en lançant indépendamment une enquête sur les droits compensateurs. Encore une fois, la région de l'atlantique a été exclue. Nous avons cru comprendre que c'était probablement la première fois dans l'histoire des États-Unis qu'une sous-division politique d'un pays était exclue de ce genre de mesure.

Cependant la requête de 1991 en vue de l'imposition de droits compensateurs précisait:

    L'industrie des États-Unis ne soutient pas que des subventions donnant matière à compensation sont accordées aux provinces maritimes. Le bois provenant des Maritimes est vendu sur une base concurrentielle et sur un marché ouvert. De plus, puisque la grande partie du bois coupé dans les Maritimes provient de boisés privés, l'industrie américaine ne juge pas que les provinces maritimes reçoivent des subventions qui pourraient, si ces produits étaient importés, nuire à l'industrie américaine du bois d'oeuvre résineux.

Cet énoncé figurait dans la requête en vue de l'imposition de droits compensateurs; les autres membres de l'industrie canadienne du bois d'oeuvre résineux ont dû payer un droit compensateur de 14,47 p. 100 qui a été par la suite réduit à 6,51 p. 100.

Tout cela montre clairement que la région de l'Atlantique a toujours maintenu le libre-échange même pendant ce conflit.

En 1996, après une année de consultations entre nos deux pays, au cours desquelles nous avons essayé de régler le différend et de mieux comprendre les problèmes entre les deux pays, nous en sommes venus à une entente négociée, celle dont on parle aujourd'hui, l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, et la région de l'atlantique a obtenu l'accord dont j'ai parlé tout à l'heure.

C'est là le premier élément de l'accord.

Le deuxième élément c'est que cet accord fait état de certaines obligations qui visent la région de l'Atlantique. Afin de garantir encore une fois que seul le bois admissible à ce libre-échange avec les États-Unis serait expédié et déclaré provenir des quatre provinces de l'Atlantique, le Bureau du bois de sciage des Maritimes a volontairement rétabli un programme de certificat d'origine. J'ai dit «rétabli» parce que dans l'entente de 1991 à 1994 sur les droits compensateurs, on avait convenu de fournir un certificat d'origine. Nous nous étions occupés de ce programme.

Ainsi, lorsque nous avons conclu l'accord actuel, nous avons convenu de remettre en oeuvre le programme. Le nouveau programme, qui est entré en vigueur le 1er avril 1996, visait à garantir qu'une expédition de bois d'oeuvre soit accompagnée de documents pertinents destinés à assurer que le bois provenait de la région de l'Atlantique et, c'est encore plus important, à établir une base de données sur le volume exporté vers les États-Unis. Des rapports trimestriels sont préparés et présentés au Département du commerce américain par l'entremise de l'ambassade canadienne à Washington. Ces données sont par la suite comparées aux données du Service de douane américain, puis nous rencontrons les représentants américains pour concilier les données.

L'industrie américaine et divers départements américains ont indiqué qu'il s'agit d'un programme modèle. De plus, et c'est encore plus important, cela démontre que nous sommes prêts à faire preuve de diligence pour respecter et protéger le marché américain. À notre connaissance, aucune autre association canadienne n'a lancé pareil programme aussi détaillé. De plus, lorsque le bureau du bois de sciage des Maritimes a été certifié conforme à la règle ISO 9002 en août 1998, afin d'assurer une plus grande crédibilité pour ce programme, le programme de certificat d'origine a été inclus dans la documentation lors de l'enregistrement.

Le dernier volet de ce programme est que les participants doivent tous signer volontairement des contrats exécutoires sur le plan juridique, en vertu desquels ils s'exposent à une sanction de parjure si le programme est détourné de sa fonction.

• 1605

Autre obligation de l'accord que nous avons accepté et que nous maintenons, les politiques forestières de la Couronne ne serviront pas à réduire les frais de l'industrie. La valeur du bois sur pied n'a cessé d'augmenter dans le Canada Atlantique depuis la première exemption en 1986. Ce qui est plus important encore, c'est qu'elle est fondée sur une formule reflétant à la fois le prix de vente du bois d'oeuvre aux États-Unis et le prix de vente des billots provenant des terres privées. Il y a 72 000 propriétaires privés de boisés dans le Canada Atlantique. C'est précisément pour cela qu'on n'a jamais prétendu qu'il y avait des subventions à la production de bois d'oeuvre dans cette région.

Le troisième élément de l'accord distinct, qui couvre les quatre provinces de l'Atlantique, prévoit la protection contre tout contentieux ou recours commercial dans le cas où il y aurait infraction à la grande entente ou suppression de cette entente.

Il faudrait que l'exemption légitime du Canada Atlantique soit maintenue après le 31 mars, et nous souhaitons que cet accord soit renouvelé.

Notre région n'a jamais été accusée d'être subventionnée. Nous avons respecté nos obligations dans le cadre de l'entente et nous continuons de veiller à ce que le bois d'oeuvre déclaré comme provenant du Canada Atlantique respecte ses engagements, comme le prévoit le programme de certificat d'origine.

Tout au long des divers différends commerciaux qui ont opposé le Canada aux États-Unis, les Maritimes ont maintenu le libre-échange avec les États-Unis dans le domaine du bois d'oeuvre. Cela remonte à l'époque du traité Ashburton Webster de 1842 qui, pour autant que je sache, est toujours en vigueur.

L'originalité de notre situation justifie le statut de la région de l'Atlantique. Notre situation est particulièrement originale en ce que nous avons une position parfaitement unifiée des quatre provinces, à laquelle adhèrent tant le gouvernement que l'industrie. Notre originalité s'étend d'ailleurs à d'autres domaines importants.

Dans sa déclaration à ce comité lundi, le ministre Pettigrew a confirmé que 94 p. 100 des terres forestières du Canada étaient propriété publique. Au Canada atlantique, plus de 60 p. 100 des terres forestières productives appartiennent à des intérêts privés, et il y a plus de 72 000 propriétaires de boisés qui gagnent leur vie en gérant de façon responsable ces terres forestières. En conséquence, 74,4 p. 100 du bois d'oeuvre du Canada atlantique vient de terres privées, par opposition à 7 p. 100 dans le reste du Canada.

Notre situation est totalement originale par rapport à celle du reste du Canada. Nous ne critiquons pas le reste du Canada, nous voulons simplement clairement exposer notre cas à votre comité.

Les faits qui militent en faveur d'une protection des expéditions de bois d'oeuvre en provenance du Canada atlantique contre tout recours commercial qui pourrait être intenté par le Canada ou les États-Unis sont toujours aussi valables aujourd'hui qu'en 1986, quand les gouvernements du Canada et des États-Unis les ont reconnus: 74,4 p. 100 de notre bois d'oeuvre vient de terres privées; il n'y a jamais eu d'accusations de subventions à notre égard; la valeur du bois sur pied dans la région reflète le marché; et depuis 14 ans que nous avons le libre-échange avec les États-Unis, on considère toujours que nous avons des pratiques équitables.

La production et les exportations ont fluctué avec la demande du marché. Ce qu'il faut surtout souligner, c'est que ce sont les propriétaires privés de boisés qui sont à l'origine de cette augmentation car en période de prospérité, ils essaient de recueillir les fruits de leur labeur, et en période de ralentissement, ils réduisent rapidement d'eux-mêmes les stocks disponibles. C'est un régime qui fonctionne sur la base du marché.

Compte tenu des arguments détaillés et légitimes que je viens de présenter, le Bureau du bois de sciage des Maritimes, au nom de ses 250 membres et des 72 000 propriétaires de boisés privés, estime qu'il incombe au gouvernement du Canada de veiller à ce qu'il n'y ait pas d'érosion des conditions de libre-échange que nous avons actuellement avec les États-Unis. Nous demandons respectueusement au comité de nous aider à préserver ce statut.

Je vous remercie et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup. Nous allons enfin entendre l'honorable Bob Rae, au nom du Free Trade Lumber Council. Bienvenue au comité, monsieur Rae.

M. Bob Rae (conseiller juridique, Free Trade Lumber Council): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis heureux de pouvoir vous adresser quelques mots.

Le Free Trade Lumber Council est une organisation canadienne représentant plus de 80 compagnies dans cinq provinces. Il a été créé il y a deux ans et demi avec un seul objectif, celui d'établir le libre-échange dans le domaine du bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis. Ce différend ne date pas d'hier. En fait, il remonte aux origines de cette industrie.

• 1610

Il est important que nous le comprenions bien. De toute évidence, cette industrie a des racines profondes partout au Canada. Nous savons tous, vu le travail que nous faisons, que ce secteur cimente véritablement les communautés canadiennes, grandes et petites.

C'est un secteur qui emploie directement 140 000 personnes, sans parler des propriétaires de boisés et des dizaines de milliers de Canadiens dont l'existence et le travail sont directement liés à cette industrie.

Comme d'autres l'ont dit, et je suis heureux de faire partie de ce groupe de témoins aujourd'hui, c'est un secteur qui est directement axé sur le marché américain. Il représente plus de 10 milliards de dollars d'exportations pour le Canada. C'est dire qu'il pèse lourd sur le plan financier.

En écoutant la période des questions aujourd'hui, je me suis rendu compte qu'on n'avait pas posé une seule question sur l'accord commercial, et je me suis dit qu'au moment où nous nous apprêtons à aborder un contentieux extrêmement délicat avec les Américains sur une question qui va toucher les Canadiens d'un océan à l'autre, il me semble que les parlementaires et les gouvernements ont d'excellentes raisons de réfléchir en profondeur aux enjeux importants de cette question.

Le Free Trade Lumber Council a une position tout à fait claire. Je précise que je suis d'accord avec une bonne partie de ce qui a déjà été dit, pas tout, mais une grande partie.

Nous estimons qu'il faut laisser l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux expirer le 31 mars. Je pense que personne mieux que M. Emerson n'a expliqué les raisons pour lesquelles cet accord de contingentement ne peut et ne doit pas être maintenu dans nos politiques. Si on le prolongeait, ce qui à mon avis serait une grave erreur stratégique, il risquerait de devenir un élément permanent de l'économie canadienne.

Je voudrais vous inviter à réfléchir à l'absurdité de la situation dans laquelle nous nous trouverions alors. On aurait des fonctionnaires à Ottawa qui dicteraient aux entreprises de tout le pays leurs quotas et tout le pourquoi et le comment de leurs échanges commerciaux. Comme l'a dit M. Shannon, cela entraverait l'arrivée de nouveaux entrepreneurs dans ce secteur, cela dissuaderait l'innovation et cela entraînerait de graves distorsions du marché. Je n'ai encore entendu personne présenter une défense vraiment sérieuse du régime de contingentement.

Ce que nous disons par conséquent, c'est qu'il faut laisser expirer cet accord, et ne pas le reconduire.

Deuxièmement, nous sommes favorables depuis plusieurs mois et nous continuons d'être favorables à la création d'un poste d'envoyé du Canada sur le bois d'oeuvre, et en fait nous souhaiterions recommander instamment au premier ministre de nommer cet envoyé tout de suite. Nous pensons que ce serait une excellente idée de le faire, car il y a bien assez de travail à faire au Canada pour assurer l'homogénéité de cette industrie, assurer la cohésion des provinces et amener tout un chacun à comprendre l'importance de cette question.

Quelqu'un a dit à un moment donné que c'était une sorte de fioriture diplomatique. Pas du tout. Ce serait au contraire une façon pour le premier ministre et le gouvernement du Canada de montrer qu'ils considèrent cette question comme absolument prioritaire. C'est une question sur laquelle il faut concentrer à plein temps l'attention de plusieurs ministères fédéraux aussi bien que provinciaux. En fait, c'est une question qui mérite notre attention soutenue à tous.

Je suis tout à fait d'accord avec M. Emerson quand il dit que ce n'est pas «le problème de la Colombie-Britannique». Ce n'est pas un problème qui touche simplement la Colombie-Britannique, c'est une question nationale et elle touche toutes les provinces et toutes les régions de notre pays. Ni les solutions, ni les problèmes ne sauraient être confinés à une seule région.

• 1615

Notre troisième position, que je voudrais vous exposer le plus clairement possible, et c'est là probablement que nous avons une certaine divergence tactique comparativement aux autres témoins, c'est qu'il faudrait réagir aux droits compensateurs ou aux mesures anti-dumping au fur et à mesure qu'ils se présenteront. Autrement dit, attendons de voir quels sont les motifs, quels sont les faits allégués pour justifier des droits compensateurs ou des mesures anti-dumping.

Aucun d'entre nous ne se réjouit à la perspective de ce contentieux. Nous savons très bien que c'est un processus qui va être coûteux et va provoquer des difficultés. Commençons par voir les arguments et où ces arguments sont présentés, et réagissons à ce moment-là collectivement—et j'insiste bien sur ce mot «collectivement», car nous devons nous serrer les coudes—sur les questions de fond de ces argumentations.

Élaborons une stratégie nationale commune, en espérant que cela pourra se faire de préférence avec le conseiller spécial qui serait nommé par le premier ministre. N'oublions pas que chacun des autres témoins qui m'ont précédé ici a clairement dit que l'objectif commun était le libre-échange.

Les stratégies pour y parvenir varient, car il n'est pas facile de savoir exactement quel est le meilleur moyen de parvenir à réaliser cet objectif.

J'ajouterai, monsieur le président, que quand le marché est déprimé, comme c'est le cas aujourd'hui où les cours sont bas, où la situation est pénible pour la population—les députés le savent mieux que quiconque—quand les gens en sont à se demander si le marché existera encore demain ou ce qui va se passer, il est évident qu'on s'inquiète. Et aucun d'entre nous ne peut dissiper ces inquiétudes. Force est de reconnaître que le cheminement du contentieux sera pénible.

Je voudrais aussi souligner quelque chose que M. Shannon a dit. Au cours des 20 dernières années, nous avons obtenu une série de règlements qui ne nous ont pas permis de mettre fin définitivement au différend initial. Le Canada devrait se donner pour objectif de sa politique publique de dire à nos amis: cela suffit.

Il s'agit d'un secteur fondamental pour notre pays. Nous sommes des libre-échangistes. Nous respectons les lois du libre-échange. Nous ne subventionnons pas notre industrie. Nous ne suivons en aucun cas des pratiques incorrectes. Nous avons des gouvernements provinciaux qui appliquent des politiques gouvernementales rigoureuses. Nous avons un gouvernement fédéral qui agit en faveur de l'environnement. Nous avons avec les autochtones de tout le pays des discussions qui débouchent sur des négociations.

La politique publique du Canada est transparente. Nous n'avons rien à cacher, rien dont nous devrions avoir honte, et nous sommes déterminés à trouver une solution véritablement complète à ce problème. Le Free Trade Lumber Council va continuer d'oeuvrer dans cette optique.

Cela ne sera pas une partie de plaisir, comme l'a dit M. Shannon, mais nous sommes convaincus qu'en dernière analyse nous l'emporterons car notre argumentation est parfaitement logique. Elle est avantageuse pour les consommateurs et les propriétaires de maison des États-Unis. Nous partageons de nombreux intérêts communs avec les États-Unis. Si l'on réduisait radicalement les exportations canadiennes vers les États-Unis, cela ne ferait que faire monter les prix aux États-Unis, ce qui nuirait aux consommateurs et à l'économie de ce pays, et équivaudrait finalement à une augmentation des impôts.

Ce n'est donc pas ce que nous souhaitons. Ce que nous souhaitons, c'est de continuer à travailler ensemble pour réussir à convaincre les autres de notre point de vue et, si je peux me permettre cette expression, ne pas avoir peur de négocier mais toutefois, comme le disait le président Kennedy, ne pas négocier simplement par peur.

Voilà ce que devrait être notre attitude. Nous devrions être prêts à discuter de la question avec les Américains, mais nous ne devrions certainement pas nous laisser imposer un nouvel accord à court terme qui à notre avis aurait des répercussions très négatives sur les intérêts à long terme de notre économie.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Rae, pour cet excellent exposé.

• 1620

Nous allons maintenant poser des questions à nos témoins. Je vous propose que chacun s'en tienne précisément à cinq minutes, et je serai très ferme sur ce point. Les cinq minutes doivent comprendre la question et la réponse. Si vous avez deux ou trois questions, essayez de les réunir et d'aller droit au but. Nous devrions réussir à faire plusieurs tours de questions si chacun s'en tient au temps imparti.

Je donne maintenant la parole à M. Duncan.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, AC): Je voudrais poser une question à Diana Blenkhorn. Si l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux expire le 31 mars et que l'Accord des Maritimes subit le même sort, les provinces de l'Atlantique font rester dans le régime de libre-échange qu'elles connaissent actuellement. Dans le cadre de l'ALENA, les mécanismes comme les mesures antidumping et les droits compensateurs sont disponibles. N'est-ce pas? Je vois mal pourquoi vous demandez une exemption alors que l'ALENA vous donnera le même résultat.

Mme Diana Blenkhorn: Je voudrais vous soumettre deux arguments. Tout d'abord, l'accord prévoit une protection contre des poursuites. Deuxièmement, le dossier du bois d'oeuvre dans le cadre de l'ALENA montre que cet accord n'a pas donné les résultats escomptés. C'est pourquoi nous avons obtenu l'accord spécifique des Maritimes et pourquoi nous avons été exemptés des autres accords. Nous menons notre lutte depuis plus de 20 ans. Je n'ai pas la même confiance dans ce type de protection.

Notre accord tient compte de notre caractère particulier et nous protège efficacement contre les poursuites.

M. John Duncan: Ne doit-on pas obligatoirement conclure que le Congrès américain n'acceptera jamais de poser unilatéralement les armes en l'absence d'un accord sur le bois d'oeuvre?

Mme Diana Blenkhorn: Ce n'est certainement pas ce que j'en conclus, du moins en ce qui concerne la possibilité d'un accord distinct pour le Canada atlantique. Est-ce de cela que vous voulez parler?

M. John Duncan: Merci. Charlie voudrait poser une question.

M. Charlie Penson (Peace River, AC): Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins de leur présence parmi nous cet après-midi. Je connais certains d'entre eux. Je sais que M. Shannon a connu une longue et remarquable carrière dans ce secteur; quant à M. Emerson, lui et moi avons fréquenté la même école il y a bien longtemps. Je souhaite aussi la bienvenue aux autres témoins.

Je vais me faire l'avocat du diable. Au bout de 20 ans, est-ce que nous ne risquons pas une confrontation du genre de celle d'O.K. Corral? Ne va-t-il pas falloir s'en remettre à quelqu'un—et à mon avis, il faudrait que ce soit un organisme international—pour déterminer s'il y a subventionnement ou non? C'est bien le fond du problème qui se pose depuis 20 ans.

Nous avons essayé toutes sortes de méthodes. Les cinq ans de commerce administré sont révolus. Certains d'entre nous ont dénoncé cette formule il y a cinq ans. À l'époque, nous trouvions inconcevable d'imposer un régime de gestion de l'offre comparable à celui des oeufs et des produits laitiers à une industrie axée sur le marché, et pour moi, c'est aussi inconcevable aujourd'hui. Mais n'est-ce pas là le coeur du problème?

Monsieur Shannon, j'aimerais avoir votre avis. Ne faut-il pas régler le problème une fois pour toutes? Est-ce qu'il y a effectivement subventionnement? S'il y a subventionnement, il va falloir changer de méthodes d'exploitation forestière. S'il n'y a pas subventionnement, comme je le pense, il faut qu'un organisme international l'établisse publiquement. Que pouvez-vous me répondre à cet égard?

M. Gerry Shannon: Si le Canada et les États-Unis parviennent à se mettre d'accord sur la définition du subventionnement, de la subvention donnant droit à compensation et des pratiques préjudiciables, eh bien tant mieux, mais nous savons par expérience que ce n'est pas vraisemblable. Les intérêts commerciaux sont considérables de part et d'autre, et chacun s'accroche solidement à son point de vue.

En définitive, il va falloir s'en remettre à la décision d'une tribune impartiale comme l'ALENA ou plutôt l'Organisation mondiale du commerce. Si nous obtenons gain de cause, comme la décision sera exécutoire, les Américains seront forcés soit de se retirer de l'accord de l'OMC, ce qui me semble peu vraisemblable, soit de s'accommoder de la décision et de modifier leur législation en conséquence.

• 1625

En revanche, si nous perdons, nous subirons les mêmes conséquences. De notre côté, nous devrons prendre les mesures nécessaires pour réaménager nos politiques de façon qu'elles ne puissent être qualifiées de préjudiciables ou de contraires à nos obligations de partenaires commerciaux au sein de l'OMC.

M. Charlie Penson: Monsieur Shannon, le temps nous est compté; me permettez-vous d'intervenir?

M. Gerry Shannon: Oui.

M. Charlie Penson: Certains avancent que les États-Unis ne se conformeront peut-être pas à la décision de l'OMC qui donnerait raison au Canada, à l'image du Brésil dans le domaine de l'aérospatiale. Qu'en pensez-vous? Dans une telle éventualité, si le Canada obtient gain de cause, que risque-t-il, à votre avis, de se produire?

M. Gerry Shannon: En définitive, ce sont les Américains qui ont le plus à perdre s'ils n'acceptent pas la décision de l'OMC. Eux-mêmes sont parfois des gens avisés qui savent voir les choses en perspective. La raison d'être de l'OMC est d'inspiration américaine; cet organisme a été conçu pour définir et mettre en oeuvre un régime de lois et de règlements régissant les échanges.

Il existe effectivement des cas où les États-Unis n'ont pas accepté la défaite dans certains différends avec l'Europe. Mais je pense que tôt ou tard, ils l'accepteront. Tout refus de leur part remettrait en question la viabilité même de l'OMC, et ce serait un grave retour en arrière.

[Français]

Le président: Monsieur Paquette.

M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci pour vos présentations.

D'abord, permettez-moi de vous dire pourquoi il n'y avait peut-être pas de questions aujourd'hui sur le bois d'oeuvre. Jeudi dernier, on a eu toute une journée de débat sur la question et hier soir, on a adopté une motion que j'ai eu l'honneur de présenter pour reconfirmer l'appui de l'ensemble des parlementaires à la position du gouvernement, c'est-à-dire au retour au libre-échange pur et simple et, finalement, pour mettre en garde les Américains contre toute forme de représailles. Tous les partis ont voté en faveur de cette résolution, sauf le NPD, ce qui est un peu étonnant quand on pense aux préoccupations en matière d'emploi qui devraient être les siennes.

Après quand même 10 ans de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, pendant lesquels il a dû y avoir non seulement un accroissement des échanges, comme on le sait, mais aussi une intégration des intérêts américains et canadiens au sein de compagnies, comment se fait-il, monsieur Rae, que cette intégration des intérêts, si elle existe, n'ait pas amené une meilleure compréhension par les Américains de notre système de fixation des prix?

Je suis peut-être un peu en désaccord avec Mme Blenkhorn sur la façon dont elle présente les choses, mais même si nos forêts sont publiques, la détermination des prix tient compte des mécanismes du marché, en particulier dans le cas du Québec, que je connais bien. Alors, comment expliquer qu'il n'y ait pas plus de compréhension du côté américain de nos méthodes de fixation des prix et qu'on parle toujours de subventions parce que nos forêts sont de propriété publique?

M. Bob Rae: Monsieur Paquette, je crois que le problème auquel nous faisons face a été assez clairement exposé par M. Shannon dans sa présentation. La vraie préoccupation des producteurs américains, ce n'est pas nos politiques ou la question de savoir si le terrain est public ou privé. Ce n'est pas là la vraie préoccupation des producteurs américains. Leur vraie préoccupation, c'est que nous avons une part importante du marché et que nous avons quelques avantages concurrentiels: notre industrie est forte, bien gérée et notre façon de produire donne des occasions aux compagnies de faire des investissements nécessaires. On a vu, depuis quelque temps, une augmentation de la productivité de l'industrie partout au pays, dans chacune des provinces. Alors ça, c'est le problème.

Le problème, ce n'est pas une question de savoir si le fait de changer une politique ou une autre va suffire pour dire aux Américains qu'on a changé des politiques et que pour cette raison, ils devraient nous laisser entrer. Si on avait pensé que c'est là le vrai problème, je pense qu'on l'aurait fait il y a quelque temps.

Le problème, c'est que depuis des années, nous avons réussi à établir une présence sur leur marché d'à peu près 30 à 34 p. 100, et lorsque ça augmente, nous voyons la réaction de l'industrie américaine. La préoccupation actuelle de l'industrie américaine est de savoir ce qui va se passer avec les exportations du Canada s'il n'y a pas de quotas et de limites. Est-ce que ça va augmenter?

• 1630

C'est ça, je crois, le problème. Même en dépit de l'intégration de l'industrie, la préoccupation reste. C'est là notre problème et c'est pourquoi nous pensons que oui, il faut discuter avec les Américains, qu'il faut avoir une discussion en profondeur, mais qu'il faut qu'on reconnaisse que nous avons des droits importants en vertu du droit international et que la loi n'est pas là pour punir ceux qui ont réussi à faire les investissements nécessaires. C'est ça, notre problème.

M. Pierre Paquette: Est-ce que je peux poser une autre question très courte?

Le président: Très courte.

M. Pierre Paquette: Je m'adresse à vous, monsieur David Haggard. Vous avez parlé de liens entre les syndicats de l'industrie du bois d'oeuvre et les entreprises des deux côtés de la frontière. Je pense, effectivement, qu'il faut favoriser les d'échanges le plus possible. Est-ce qu'il y a présentement un échange qui se fait entre les syndicats des différentes provinces canadiennes concernant ce bois d'oeuvre? Prenons, par exemple, le cas du Québec, qui est responsable du quart de la production. Est-ce que vous avez des liens avec les syndicats québécois, que ce soit la FTQ ou la CSN?

[Traduction]

M. David Haggard: Nous avons moins de contacts avec les syndicats du Québec, encore que nous soyons en train de réétablir les liens avec eux. Pendant des années, notre syndicat est resté à l'écart du Québec, mais nous reprenons les contacts avec certains camarades syndicalistes de cette province.

J'ai été moi-même en contact avec certaines entreprises du Québec où nous comptons des adhérents. Nos membres sont pour la plupart dans le nord de l'Ontario, évidemment, mais nous en avons aussi au Québec, où nous commençons à nous réétablir. La plupart des syndicats avec lesquels nous traitons représentent le secteur du bois aux États-Unis et non le secteur des pâtes et papiers.

J'ai passé aujourd'hui un certain temps à parler d'un des syndicats qui représente les travailleurs des pâtes et papiers au Québec et dans d'autres provinces du Canada. Disons, pour rester poli, que nous avons encore du travail à faire avec ce syndicat.

Le président: Monsieur Speller, vous avez cinq minutes.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et bienvenue à nos témoins.

Ma question s'adresse à M. Emerson, et elle reprend les commentaires de M. Rae concernant le rôle d'une personne qui pourrait être nommée non seulement pour négocier avec les Américains, mais aussi pour traiter avec notre propre industrie, de façon à former une sorte de front commun.

Compte tenu des commentaires qui évoquent la possibilité d'une taxe à l'exportation et des dissensions entre les groupes d'intérêts canadiens, pensez-vous qu'il soit possible de trouver un terrain d'entente au sein de l'industrie sur une question comme celle-là?

Deuxièmement, monsieur Shannon, quel rôle pourriez-vous confier à cette personne? Pensez-vous qu'elle puisse réussir à s'asseoir avec les Américains pour négocier? La négociation ne risque-t-elle pas de se traduire par une formule de quotas? Peut-on obtenir un règlement sans quota?

M. David Emerson: Je peux peut-être commencer.

Vous avez parlé d'une taxe à l'exportation et je sais que le ministre Pettigrew vous avait peut-être même prévenus que la Colombie-Britannique se présenterait à Ottawa pour faire la promotion d'une taxe à l'exportation. Tout d'abord, je tiens à préciser que ce n'est pas ce que nous avons fait. Nous sommes venus à Ottawa et avons mentionné au ministre Pettigrew et à d'autres que le représentant commercial américain Zoellick avait parlé d'une taxe à l'exportation comme moyen possible d'éviter le contentieux commercial.

Cela me rappelle ce qu'a dit M. Rae au sujet des toutes petites différences entre certaines régions du Canada. Par exemple, en Colombie-Britannique, nous ne sommes pas du tout à l'aise à l'idée d'intenter des poursuites pour ensuite entreprendre des négociations. Nous estimons que les poursuites dans des questions commerciales sont arbitraires, punitives. On pourrait être frappé de droits allant jusqu'à 20 ou 30 p. 100. Oui, il y aura un processus d'arbitrage dont on peut se prévaloir. Je pense que tous ceux qui sont ici dans cette salle savent que cela peut prendre jusqu'à cinq ans. À la fin de cette période, vous risquez d'avoir versé plusieurs milliards en droits compensateurs que vous ne reverrez jamais, même si vous gagnez votre cause. C'est donc le risque auquel on s'expose en entamant des poursuites.

• 1635

Pendant cette même période, il nous faudrait mettre à pied des milliers de travailleurs. J'aimerais donc dire à ceux qui aiment le commerce fondé sur des règles, qui veulent se servir de l'industrie du bois d'oeuvre pour tenter des expériences et voir ce que ça donnera, que c'est une stratégie extrêmement risquée qui pourrait avoir des conséquences terribles pour les travailleurs. Je vous mets donc en garde.

En ce qui concerne le concept de l'envoyé, nous y sommes très favorable. Nous pensons qu'il y a de toute façon du travail à faire pour aider à identifier certaines des principales questions qu'il nous faudra régler de toute façon.

Je dirais que les Américains vont hésiter à donner le moindre pouvoir à une telle personne, mais je ne pense pas que cela nuise. Cela pourrait réduire la tendance à se montrer aussi agressif quand il s'agit d'intenter des poursuites antidumping et d'obtenir des droits compensateurs que nous considérons comme une bombe à neutrons. Franchement, nous ne voulons pas suivre cette voie parce que nous pensons que l'on perd tout pouvoir de négocier lorsqu'on a des droits compensateurs à verser et que l'on doit mettre à pied des travailleurs.

M. Gerry Shannon: Monsieur le président, puis-je répondre à la question de M. Penson?

Le président: Brièvement, oui. Il vous reste 53 secondes.

M. Gerry Shannon: D'abord, si l'on nomme un envoyé, est-ce que les États-Unis accepteraient de ne pas intenter de poursuites pour obtenir des droits compensateurs ou de poursuites antidumping? Voilà la première question que vous avez posée. Je dirais que non pour les raisons que j'ai données au cours de mon exposé.

Deuxièmement, M. Emerson parle des risques d'entreprendre des négociations sans que les options soient claires à l'avenir. Je comprends ce point de vue.

Toutefois, je crains que la procédure consistant à avoir un envoyé spécial prenne aussi beaucoup de temps. Un envoyé spécial pourrait en fait entraîner des retards importants dans le règlement des problèmes de l'industrie. Ce n'est qu'une autre façon de prolonger ce qui est actuellement une entente injuste entre le Canada et les États-Unis.

Troisièmement, je dirais en réponse à cette suggestion que jusqu'à présent je n'ai pas vu la moindre preuve que les Américains songent sérieusement à un envoyé spécial. Il se peut que M. Pettigrew puisse nous donner plus d'informations, mais d'après ce que j'ai pu déterminer, les Américains ne sont pas vraiment très intéressés.

Le président: Madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Merci d'être des nôtres et de nous avoir donné tant d'informations. Je vous en suis reconnaissants.

Je tiens, tout d'abord, à préciser la position du Parti néo-démocrate sur le vote qui a eu lieu l'autre jour. Je pense que les néo-démocrates tout comme Mme Blenkhorn n'ont pas très confiance dans le processus de l'ALENA et par conséquent tenaient à s'assurer que l'on tiendrait compte de l'environnement, d'autant plus qu'il n'en était manifestement pas question dans la motion présentée. Nous avons signifié clairement que si nous acceptons ce que l'on appelle le libre-échange, il faut que ce soit équitable pour tous les intéressés.

Monsieur Emerson, si nous ne vivions pas nécessairement dans une peur constante d'actions en justice et de pertes d'emploi, j'aimerais savoir si vous appuieriez le libre-échange ou si vous le supprimeriez sans y substituer quoi que ce soit d'autre? Faites-vous confiance au processus déjà établi?

M. David Emerson: Nous ne faisons pas confiance au processus actuel parce qu'il a été conçu par des Américains, à l'intention de producteurs américains, de manière à être le plus punitif possible.

Cependant, à dire vrai, on me dit que le Canada fait à peu près la même chose pour contrer la pénétration d'importations au pays. Nous ne faisons donc pas du tout confiance au processus actuel, et nous estimons que dans le secteur du bois d'oeuvre résineux, il devrait exister un mécanisme quelconque nous permettant au départ de régler les différends et d'examiner certains aspects complexes des politiques liées à l'environnement et à la gestion forestière.

• 1640

Récemment, le sénateur Baucus du Montana a accusé le Canada d'être trop laxiste en matière de protection de l'environnement, et ce sans aucune preuve à l'appui. Eh bien, fort de notre expérience, obtenue surtout en Alberta et en Colombie-Britannique, je pense que nous pouvons affirmer que nos mesures de protection de l'environnement sont comparables à celles qui sont en vigueur aux États-Unis. J'irais jusqu'à inviter quiconque aux États-Unis à effectuer une évaluation impartiale et objective de nos pratiques environnementales.

Nous nous y intéressons davantage et sommes tout à fait disposés à accélérer les choses. Cela dit, dès que nous gaspillons des millions de dollars en droits de douane et en actions en justice, cela nous prive des montants à consacrer à l'environnement et à sa gestion.

Mme Bev Desjarlais: Vous n'estimez pas qu'il vaudrait peut-être la peine de prendre le taureau par les cornes et de voir où ce processus peut nous mener, comme le proposait M. Rae, puis de réagir à des droits compensateurs ou des mesures antidumping au fur et à mesure qu'ils se manifesteraient? Je crois savoir que ce serait la première fois que nous permettrions que ce genre de choses se produise dans l'industrie du bois d'oeuvre.

M. David Emerson: Eh bien, tout est affaire de jugement. Or je crois que nous avons consulté certains des meilleurs conseillers juridiques des États-Unis et du Canada. Ces derniers nous disent qu'au mieux, ce sera un coup de dés, qui risque pas mal de se transformer en perte, tout au moins pendant quelques années jusqu'à ce qu'on démêle les choses. Lorsqu'on réfléchit aux conséquences, pour l'emploi et les collectivités, de certains des droits compensateurs, on se rend compte qu'il pourrait y avoir de très, très lourdes pertes.

Ça me préoccupe vraiment parce que les gens disent assez facilement qu'il faut tout simplement que nous nous défendions devant les tribunaux. Cependant lorsque cela entraîne des pertes d'emploi, je vous assure que personne ne va lancer l'idée d'intenter des poursuites. Car il y aura effectivement des pertes d'emploi selon les avis qu'on nous a donnés. Je ne suis pas avocat, mais nous retenons au prix fort les services des meilleurs conseillers juridiques possible.

Mme Bev Desjarlais: Monsieur Rae, ce qui est en jeu ici, est-ce un accord commercial qui n'a pas été conçu pour favoriser l'industrie canadienne?

M. David Emerson: Oui.

M. Bob Rae: Oui, tout à fait, tel est précisément le problème. Je tiens à préciser qu'à mon avis, personne au sein du Free Trade Lumber Council ne pense qu'il faut simplement laisser faire les choses. Ainsi que je le disais, nous sommes plutôt d'avis qu'il faut agir contre les droits compensateurs et les mesures antidumping au fur et à mesure qu'ils se présentent.

Si cela devait se produire le 2 avril, essayons de voir ce qu'ils disent. Laissons les envoyés spéciaux et d'autres spécialistes étudier les solutions de rechange puis décidons de façon rationnelle du moyen le plus susceptible de servir les intérêts des travailleurs canadiens, de l'industrie canadienne, de l'environnement canadien parmi toutes les questions en jeu. C'est tout ce que nous disons.

Notre action doit se fonder sur des faits et de véritables solutions de rechange. Il nous faudra prendre ces décisions, mais de toute façon, je ne pense pas que l'approche canadienne comporte un grand écart. Il y a peut-être des différences tactiques quant au choix du moment et des positions que nous devrions adopter. Cependant, pour l'essentiel, personne ne veut renoncer aux discussions. Personne ne réclame qu'on laisse traîner les choses pendant cinq ans. Tout le monde prévoit qu'il y aura un contentieux. Ne nous affolons pas. Examinons attentivement l'affaire et voyons quelles sont les solutions de rechange, le cas échéant. Si on peut en trouver, tant mieux.

Quoi qu'il en soit, aux yeux du Conseil du Free Trade Lumber Council, le Canada ne devrait pas se laisser duper, ni accepter une autre solution à court terme. Nous sommes en effet passés par toute une série d'accords mal conçus qui devaient résoudre le problème mais qui ne l'ont pas fait.

N'oublions pas que le dernier accord sur le bois d'oeuvre, celui qui arrive à échéance prochainement, a été appuyé par des gens qui nous disaient qu'il s'agissait d'une mesure provisoire, que l'on ferait les modifications qui s'imposent à l'échelle nationale puis qu'on pourrait s'en passer. Or, ce n'est pas ainsi que les choses ont tourné.

Tout ce que je dis, c'est que nous devrions tirer quelques leçons de l'histoire avant de fabriquer de bric et de broc une autre entente expéditive. L'enjeu exige qu'on y mette du temps. Il faudra que nous tenions beaucoup de discussions à l'échelle nationale car les enjeux sont élevés. Enfin, je ne connais personne pour dire qu'il y a là un simple projet juridique et qu'il faut laisser faire les choses et peut-être compter sur l'OMC pour nous sauver au bout de cinq ans. Personne n'émet ce genre d'avis. Certainement pas moi en tant qu'avocat du Free Trade Lumber Council. Je dis tout simplement qu'il faut y aller étape par étape, travailler ensemble et travailler d'arrache-pied pour défendre les intérêts du Canada.

• 1645

Le président: Merci, monsieur Rae.

Monsieur Casey, puis monsieur Comuzzi.

M. Bill Casey: Merci beaucoup.

J'ai une brève question à poser à M. Shannon. Monsieur Shannon, qui représentez-vous? Une industrie ou une province?

M. Gerry Shannon: Monsieur le président, récemment, j'ai été conseiller auprès du ministre des Ressources naturelles de la province de l'Ontario. J'ai cependant précisé auprès de la secrétaire qui m'a invité à témoigner aujourd'hui que je parlais en mon propre nom.

M. Bill Casey: Bien.

J'aimerais tout d'abord dire que deux choses me laissent perplexe dans cet enjeu tellement important pour le Canada. Je ne comprends pas pourquoi le ministère du Commerce n'a pas obtenu de consensus au sein de l'industrie. Quatre provinces sont régies par l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, quatre provinces sont assujetties à l'Accord des maritimes et deux provinces relèvent de l'Accord de libre-échange. Je ne comprends vraiment pas pourquoi on n'a pas réussi à dégager de consensus avant d'entreprendre des négociations avec les États-Unis.

Je sais que vous n'êtes pas en mesure de répondre à cela, mais l'autre chose qui me laisse perplexe, monsieur Emerson, c'est le fait que la Colombie-Britannique s'en prend à la région de l'Atlantique. Il me semble qu'il serait beaucoup plus positif de s'efforcer de travailler en collaboration avec les autres provinces plutôt que de favoriser des divisions et de créer ces... Hier, un article paru dans le National Post vous citait en ces termes:

    [...] l'industrie de la Colombie-Britannique a accusé les provinces de l'Atlantique d'être à la source d'une partie de leurs difficultés et s'en est également prise à la position du Québec [...] M. Emerson a vertement critiqué les Maritimes [...]

... puis plus loin dans le même article, M. Kerr a dit à cette réunion:

    «La vérité, c'est que nous faisons face à des mesures antidumping à cause des Maritimes. Sans l'exemption dont jouissent les provinces maritimes, nous ne subirions pas cela,» [...]

Étrange stratégie lorsque nos concurrents et nos adversaires sont les États-Unis. Les Américains ont dû se frotter les mains à la lecture de cet article. À quoi rime d'attaquer les autres provinces plutôt que d'essayer de travailler avec elles?

M. David Emerson: Je tiens à dire catégoriquement que nous n'attaquons aucune région en particulier. Nous en avons contre quelques ententes spéciales qui divisent le pays. Honnêtement—vous faites un peu de provocation, je ferai donc la même chose—nous avons eu connaissance par le passé d'échanges entre des représentants des provinces de l'Atlantique et le gouvernement du Canada de l'époque, où on laissait entendre que cette région était elle aussi désavantagée en raison du bois d'oeuvre subventionné de la Colombie-Britannique.

Même après avoir entendu les arguments formulés ici aujourd'hui, et que je respecte, on semble supposer que si l'on achète du bois provenant de terres privées, il n'y a pas de subvention et que si l'on en achète de terres domaniales, il y a subvention, et c'est précisément ce que les Américains affirment quand ils nous attaquent.

Toute cette affaire est faussée par une mauvaise communication, chacun ne veillant qu'à ses propres intérêts. Nous tenons simplement à ce qu'on trouve une solution valable pour tout le Canada. Nous ne cherchons pas à nuire à qui que ce soit, mais nous estimons que seule une approche unifiée est la voie à emprunter.

Est-ce que je tiens à ce qu'il y ait un consensus au Canada? Certainement. M. Rae a parlé de la façon de régler le contentieux. Nous ne sommes pas en désaccord avec lui, et de toute façon, nous savons qu'il y en aura un. Tout ce que nous disons, c'est qu'il ne faut pas attendre d'être enfoncés dans les poursuites pour amorcer des discussions; commençons dès maintenant. Franchement, nous aurions dû en entamer il y a longtemps, mais certains facteurs sont intervenus, qui étaient liés aux élections et à d'autres choses.

M. Bill Casey: M. Plecas a témoigné ici il y a à peu près un mois, et il a dit quasiment les mêmes choses. À la tribune de la presse, lui aussi s'en est pris à la région de l'Atlantique.

Je ne plaisante pas—je ne pas comprends pas cette stratégie qui cherche à diviser. À mon avis, le gouvernement fédéral n'a pas réussi à créer un consensus, mais je ne comprends vraiment pas la stratégie adoptée. Vous n'avez pas non plus essayé de résoudre ce problème, mais c'est peut-être impossible.

M. David Emerson: Vous n'y êtes pas du tout. Ce que la région de l'Atlantique veut, c'est être exemptée, bénéficier d'un arrangement particulier dont ne jouissent pas les autres régions du Canada. Comment est-ce que cela peut unir le Canada?

M. Bill Casey: Personne n'a jamais tenté d'unir les parties canadiennes, personne n'a essayé de dégager de consensus. On ne peut arriver à un consensus en s'en prenant violemment...

M. David Emerson: Je crois que vous exagérez.

• 1650

M. Bill Casey: Eh bien, on ne peut obtenir de consensus si on blâme tout le monde. Rien ici n'indique que la Colombie-Britannique a peut-être elle aussi sa part de responsabilité à assumer pour ce problème.

Le président: Votre temps de parole est écoulé. Nous reviendrons à vous. Il vous restait trois secondes, mais elles sont maintenant écoulées.

Monsieur Comuzzi et ensuite monsieur Eyking.

M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, de me laisser participer aux travaux de votre comité. Puisque le temps nous manque, permettez-moi d'entrer dans le vif du sujet.

Ce que j'essaie vraiment de voir, et qui nous a beaucoup préoccupés ces deux derniers jours, est s'il y a vraiment rupture dans la position de négociation du Canada. Que ce soit bon ou mauvais, que les faits soient mal rapportés dans la presse, rien ne fait plus de tort à nos négociations, au moment où le ministre du Commerce international et les négociateurs canadiens sont à la table, que de ne pas présenter un front uni. J'attire votre attention là-dessus car je crois que les comptes rendus journalistiques des dernières 48 heures nous ont nui.

Vous savez à quel point les Américains sont durs en négociations. Nous ne pouvons nous présenter à la table affaiblis. Monsieur Emerson et madame Blenkhorn, j'aimerais donc savoir s'il y a moyen de présenter une position commune semblable à celle évoquée par M. Rae. Il faut que nous le fassions dans le contentieux du bois d'oeuvre au Canada. Est-ce possible? C'est ce que j'aimerais savoir.

Ma deuxième question s'adresse à M. Shannon et à M. Haggard. Puisque nous parlons du bois d'oeuvre, il y a eu des changements importants sur le plan du renouvellement de nos forêts. Le secteur du bois d'oeuvre n'est plus ce qu'il était il y a 20 ans. Aujourd'hui, c'est un élément qui fait partie intégrante de l'industrie forestière et il ne faut pas oublier cela. Quand les Américains visent le secteur du bois d'oeuvre résineux, c'est la plus grosse industrie du Canada qu'ils visent. C'est toute l'industrie forestière qu'ils visent. Je ne vois pas comment l'industrie forestière pourrait continuer si on immobilisait le secteur du bois d'oeuvre. Il fait partie intégrante du processus, mais nous ne réussissons pas à communiquer cette notion. Je vous soumets donc cette question.

Ma troisième question s'adresse à M. Rae. Je sais que pendant les négociations, monsieur Rae, les Américains n'aiment pas qu'on utilise le terme «corrélation». Ce qu'ils veulent, c'est parler du bois d'oeuvre. Ils ne veulent pas qu'on établisse des liens avec d'autres questions, mais on ne saurait ignorer l'interdépendance entre le bois d'oeuvre et l'industrie forestière. C'est un lien naturel. S'ils adoptent vraiment une ligne dure, et selon toute apparence, cela va être le cas, je ne suis pas le seul parmi mes collègues à penser que nous devons considérer l'industrie forestière comme une ressource naturelle.

C'est à vous que j'adresse cette question, monsieur Rae. Je ne vois pas en quoi cela serait différent du gaz naturel, de la production d'électricité, de la conservation de l'eau douce ou de la production de pétrole brut. Tous ces secteurs énergétiques sont comparables à notre secteur forestier et à notre secteur minier. Les forêts sont une ressource naturelle, elles font partie du fondement même de notre pays, et je ne vois pas pourquoi nous permettrions aux Américains de discuter exclusivement du bois d'oeuvre résineux.

Voilà mes trois questions.

Le président: Très bien. Vous avez mis beaucoup de pain sur la planche. Messieurs, mesdames, peut-être pourriez-vous rapidement...

Mme Diana Blenkhorn: Puisque vous m'avez nommée la première, je profiterai de la prérogative des dames. Merci.

Vous avez demandé s'il y avait la moindre possibilité de nous entendre. J'ai répondu à quelqu'un tout à l'heure que, très souvent, l'industrie réussissait à se mettre d'accord sur des questions d'intérêt mutuel. Toutefois, dans ce cas particulier, il y a une différence—et je ne dis pas que puisqu'il s'agit de terres de la Couronne, il y a en quelque sorte subvention. Dans la région de l'Atlantique, 25 p. 100 des terres appartiennent à la Couronne, mais il n'y a pas eu d'allégations contre cette région à cause des propriétaires privés. Si l'on se réfère à l'histoire, l'industrie n'a jamais considéré que la situation était différente dans ces quatre provinces.

• 1655

Si on remonte à 1991, M. Emerson a parlé de certaines observations venues de mon Bureau. En fait, c'est moi qui les ai faites, et je ne m'en excuse pas. Il s'agissait d'observations au sujet de la Colombie-Britannique qui insistait pour mettre fin à un accord prématurément pour régler un problème particulier de pâtes et papiers dans cette province. On voulait que le Canada mette fin au protocole d'entente de 1986, et nos efforts...

M. Joe Comuzzi: Oublions l'histoire, et essayons plutôt de déterminer...

Mme Diana Blenkhorn: Non, mais ce sera très rapide.

M. Joe Comuzzi: Parlons futur.

Mme Diana Blenkhorn: C'est le député qui a mentionné l'histoire, j'essayais simplement de répondre.

M. Joe Comuzzi: Non, tournons-nous vers l'avenir; est-il possible de se mettre d'accord?

Mme Diana Blenkhorn: Est-il possible de se mettre d'accord? Nous sommes d'accord sur presque tout, à l'exception de cette question. À condition de respecter les différences qui existent, il est toujours possible de s'entendre.

Le président: Monsieur Emerson.

M. David Emerson: À mon avis, il devrait être possible de s'entendre. La menace est la même pour tous, mais je pense que nous trouverons le moyen de nous entendre.

J'aimerais seulement revenir à une observation que vous avez faite tout à l'heure. M. Rae doit savoir qu'au cours des deux dernières années, j'ai passé la majeure partie de mon temps à travailler avec mes collègues de la Colombie-Britannique et d'ailleurs au Canada—en particulier au Québec et en Ontario—pour essayer de trouver un terrain d'entente et de parvenir à une position canadienne unie. Je n'aime donc pas beaucoup qu'on montre du doigt la Colombie-Britannique, même si c'est implicite, qu'on prétende que nous sommes le maillon faible, que nous sommes une cause de faiblesse.

M. Joe Comuzzi: Ce n'était pas une critique.

M. David Emerson: Non, je sais que ce n'était pas une critique, mais c'était très clair, et je ne suis pas d'accord, c'est tout. Nous avons fait des efforts considérables, nous allons continuer à travailler très fort, nous ferons tout ce que nous pouvons pour trouver un consensus dans l'industrie. Vous pouvez en être certain.

Le président: Monsieur Rae.

M. Bob Rae: J'aimerais faire une observation en réponse à M. Comuzzi. M'a posé une question au sujet des corrélations.

J'aimerais vous dire pourquoi le Free Trade Lumber Council pense qu'il faudrait d'abord se mettre d'accord sur les faits et sur ce dont nous sommes accusés. Avant de discuter de la façon d'en sortir, voyons d'abord de quoi on nous accuse. Voyons si les Américains... peut-être que les Américains réussiront à nous unir, car ce qu'ils disent n'est pas difficile à comprendre. Mais considérons ce qu'ils disent. Voyons voir si leur discours est toujours le même ou bien si leur requête a changé. Dans tous ces cas, il va falloir voir comment les choses évoluent. Pour cette raison, je considère qu'il faut commencer par les faits.

Quant aux corrélations, monsieur Comuzzi, il est certain que nos liens commerciaux avec les États-Unis sont extrêmement étroits. À mon avis, les Américains ne peuvent pas prétendre en même temps qu'ils aimeraient avoir toute notre électricité et toute notre énergie, mais qu'ils ne veulent rien avoir à voir avec notre bois d'oeuvre. En tout cas, ils ne peuvent pas s'attendre à ce que nous soyons d'accord, ce serait vraiment contradictoire.

Il n'est pas nécessaire d'établir formellement de corrélation, et à mon avis, il n'est pas non plus nécessaire de faire des menaces. Ce n'est certainement pas ce que je conseille, et cela n'a jamais été la position du Free Trade Lumber Council. Notre position, c'est que le commerce se fait dans les deux sens. Il y a d'une part les intérêts canadiens et d'autre part les intérêts américains, et en même temps, tout le monde en Amérique du Nord a intérêt à résoudre ce différend car c'est le seul moyen d'améliorer la productivité, d'accélérer les échanges, et d'offrir aux consommateurs des deux côtés de la frontière de meilleures conditions. Je pense que les consommateurs américains en sont convaincus, et d'un autre côté, les occasions ne manquent pas de rappeler cela aux gens.

Le président: Merci, monsieur Rae.

Monsieur Eyking, vous avez cinq minutes, puis monsieur Lunn.

M. Mark Eyking (Sydney—Victoria, Lib.): Ma question s'adresse à M. Emerson.

D'après ce que j'ai compris, un des gros problèmes, ce sont les droits de coupe. Apparemment, dans la région de l'Atlantique, ces droits ont augmenté. Comment ont-ils évolués en Colombie- Britannique au cours des dix dernières années?

M. David Emerson: Les droits de coupe ont augmenté de façon spectaculaire. En fait, lorsque l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux a remplacé le protocole d'entente qui l'a précédé, on a demandé à la Colombie-Britannique d'augmenter ses droits de coupe d'un montant équivalant à celui de la taxe à l'exportation de 15 p. 100 qu'on était en train de supprimer. Par conséquent, les droits de coupe sont très élevés en Colombie-Britannique et les coûts réglementaires très élevés du Code des pratiques forestières n'ont fait qu'aggraver cette situation. Cet effet commence à disparaître, mais nos droits de coupe continuent à être très élevés.

• 1700

J'ajoute que le gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé qu'il était d'accord pour envisager un changement de la politique. Les décisionnaires de la Colombie-Britannique semblent disposés à changer la situation, mais sans pour autant s'écarter d'un contexte de négociation acceptable pour les Américains. Pour revenir aux observations de M. Shannon et de M. Rae, les Américains prétendent que les droits de coupe et les contrôles à l'exportation des billes sont un problème, mais en fin de compte, j'ai entendu récemment qu'ils ne veulent même pas d'exportation de billes car les producteurs du sud des États-Unis ne veulent pas que les producteurs du Nord puissent acheter nos billes.

Tout le bruit qu'on fait autour des droits de coupe et des exigences de la réglementation sert souvent à justifier les attaques contre notre part du marché. Par conséquent, si on ne négocie pas la part du marché...

M. Mark Eyking: Vous dites que c'est un leurre, et que vos tarifs ont augmenté au cours des dix dernières années.

M. David Emerson: Absolument, et considérablement.

M. Bob Rae: Ils ont augmenté dans tout le pays. Il y a des différences régionales, mais la tendance est constante dans tout le Canada.

Au cours des dix dernières années, l'augmentation des droits de coupe et des revenus tirés de ces droits a été de 100 p. 100 à 125 p. 100 dans toutes les provinces. C'est une tendance généralisée qui touche toutes les provinces. De plus, les provinces à forte production forestière ont apporté des changements considérables à la réglementation depuis la dernière fois où les États-Unis ont réclamé des droits compensatoires.

Le président: Monsieur Eyking, vous avez le temps pour une observation très courte.

M. Mark Eyking: Si cela doit coûter de l'argent aux Américains, si le coût des maisons, le coût de la construction, doit augmenter, pourquoi ne faisons-nous pas de la publicité dans le New York Times et le Washington Post pour expliquer aux gens que le prix du bois d'oeuvre et des matériaux de construction vont augmenter?

M. David Emerson: Je vais répondre.

Si nous n'avons pas fait paraître d'annonces au sujet du bois d'oeuvre, c'est parce que nous cherchons à tirer le plus grand parti possible de nos ressources qui sont très limitées. Nous avons tout de même pris des initiatives dans ce sens.

Le groupe de M. Rae, le Free Trade Lumber Council, a été très actif aux États-Unis pour sensibiliser le public américain aux coûts du protectionnisme. Canfor est le plus gros fournisseur canadien de Home Depot. Hier après-midi, j'ai passé une demi-heure au téléphone avec un de leurs directeurs, qui devait ensuite rencontrer le représentant commercial américain, Zoellick. Ce directeur voulait avoir toutes les munitions possibles pour exercer des pressions sur Zoellick, pour le convaincre de venir négocier et résoudre ce problème au lieu de mettre en place un système de droits punitifs qui menacerait leurs approvisionnements aux dépens des intérêts de leurs clients. Nous nous occupons de cet aspect-là.

Le président: Monsieur Lunn, puis monsieur Valeri.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, AC): Merci.

Je vais poser mes questions rapidement pour vous donner plus de temps pour répondre.

Premièrement, David, vous avez dit que nous devrions faire quelque chose en attendant pour ne pas nous exposer à des droits compensateurs. Je ne me souviens pas de vos paroles exactes, mais j'aimerais savoir si cette démarche est vraiment si dangereuse pour nous? Est-ce que cela affaiblit notre position? Est-ce que cela ne risque pas de devenir un problème?

Je comprends bien le raisonnement, et c'est ma deuxième question, mais combien y a-t-il d'employeurs en Colombie-Britannique? Si on engage des poursuites pour nous faire payer des droits compensateurs, et si nous perdons, quel sera l'impact sur ces employés à court terme?

Ma dernière question pour vous, David, c'est la question des corrélations que vous avez très bien expliquée. Je vous pose la question à vous et à M. Rae: Est-ce que nous pouvons gagner sans mettre en jeu ces liens, si en fin de compte on nous inflige un droit compensateur? Je vais préciser ma pensée dans un instant.

Quand vous parlez de conditions, est-ce que vous pensez à des mesures légales? Évidemment, dans le cadre des accords actuels, nous avons des obligations légales mais il va y en avoir d'autres d'ici peu.

Je sais que le premier ministre Chrétien, le président Bush et le président Fox doivent se rencontrer à Québec pour discuter d'un réseau énergétique nord-américain. Les Américains veulent construire un pipeline pour les 48 États du sud, et ils vont nous demander notre coopération. Est-ce le genre de choses auxquelles vous faites allusion? Pouvons-nous gagner sans invoquer ces arguments-là?

• 1705

Ma question suivante s'adresse à M. Shannon. La propriété de l'industrie forestière au Canada a changé considérablement. C'est ce que m'a dit mon collègue M. Duncan. Weyerhaeuser est maintenant propriétaire de MacMillan Bloedel, tandis que Weldwood appartient à I.P. Pour obtenir un droit compensateur, il faut que 51 p. 100 de l'industrie signe la requête. Ce pourcentage ne risque-t-il pas d'être difficile à atteindre, étant donné le nombre de compagnies canadiennes qui appartiennent à des intérêts américains? Pourrait-on régler tout cela en 20 jours, même s'il faut atteindre un certain pourcentage pour obtenir un droit compensateur, et est-ce que le Canada peut faire pression sur certaines compagnies canadiennes qui appartiennent à des Américains si la société mère signe la requête? Avons-nous des recours contre ces sociétés, dont la société mère signe une requête à leur encontre?

Je sais que l'ALENA comporte des règles du chapitre 11, en vertu desquelles les mêmes droits doivent être reconnus de part et d'autre de la frontière. J'aimerais avoir le point de vue de M. Shannon à ce sujet, s'il vous plaît.

M. David Emerson: Tout d'abord, en ce qui concerne les dangers et les écueils des négociations actuelles, nous réclamons depuis un certain temps que l'on amorce les discussions, et je crois que c'est aussi ce qu'a demandé le Free Trade Lumber Council. Nous avons demandé la nomination des envoyés auxquels M. Rae a fait référence. Nous tenons compte du fait que le gouvernement a changé aux États-Unis, et qu'il y a eu des élections au Canada. Il y a eu aussi des élections provinciales en Colombie-Britannique. On a donc connu une importante période de transition dans les régions clés de l'Amérique du Nord. Nous avons jugé indispensable d'entreprendre des discussions de façon à mieux cerner les problèmes, et à faciliter les choses lorsque les décisionnaires seront prêts à intervenir.

Nous avons toujours considéré que les discussions ou les négociations éventuelles devraient se tenir sans préjudice des actions judiciaires qui ne manqueront pas d'être intentées. Nous n'avons jamais imaginé qu'il serait possible d'éviter les poursuites. En revanche, nous souhaitons que si quelqu'un en venait à lâcher de véritables bombes à neutrons comme la menace de rétroactivité du droit compensateur qui, actuellement, perturbe considérablement le marché du bois d'oeuvre, ou la possibilité d'un droit spécial prévu à l'article 301 à cause d'une vague d'importations massives après l'expiration de l'Accord sur le bois d'oeuvre... Si des discussions étaient en cours, il se pourrait du moins qu'elles nous permettent de limiter les sanctions auxquelles nous sommes exposés.

Sur la question du lien entre le bois d'oeuvre et les autres questions, je pense, comme d'autres en Colombie-Britannique, que la négociation commerciale donnera de meilleurs résultats s'il y a davantage de propositions sur la table, impliquant un plus grand nombre de secteurs et de pays. C'est pourquoi les négociations multilatérales sont parfois une formule très efficace de progresser vers le libre-échange, en particulier pour les plus petits pays. Il peut donc y avoir un lien, mais nous ne tenons pas à préciser lequel. Les liens de ce genre aboutissent rarement, tout simplement parce que si on en reconnaît l'existence et qu'on admet publiquement qu'il faudra faire des compromis, on limite l'appui dont la formule peut bénéficier. C'est une formule qui nous plaît, mais nous préférons la laisser dans l'ombre.

Le président: Bien, nous avons maintenant M. Valeri puis M. Paquette. Nous allons manquer de temps. Je sais, monsieur Shannon, que vous avez un bref commentaire à faire.

M. Gerry Shannon: M. Lunn m'a adressé la question, et j'aimerais y répondre brièvement.

À ma connaissance, les prises de participation dans l'industrie ne devraient pas permettre à ceux qui proposent des mesures antidumping ou des droits compensateurs d'obtenir le soutien dont ils ont besoin au sein de l'industrie. S'ils l'obtiennent, tant mieux pour eux, mais j'en serai surpris.

Quant à ce qu'il faut faire si une société canadienne se désolidarise du point de vue canadien, je crois que c'est au gouvernement et à la société en question d'en décider. Personnellement, je ne suis pas qualifié pour trancher la question. Après tout, chaque société veille à ses propres intérêts et elle est responsable devant les autorités dont elle relève. Je ne pense donc pas que ce soit là une avenue intéressante.

• 1710

Le président: Monsieur Valeri. Il y aura un deuxième tour; nous manquons de temps. Vous pourrez profiter du deuxième tour, et les deux autres personnes pourront s'exprimer lorsque M. Paquette ou quelqu'un d'autre posera une question.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, monsieur le président.

Au niveau fédéral, ce n'est un secret pour personne que nous n'obtiendrons pas gain de cause à moins de faire front commun. C'est un fait acquis. M. Rae l'a dit pendant que j'étais là—et monsieur Rae, vous me corrigerez si je me trompe—la question prendra du temps. Voyons ce que nous pouvons obtenir. Nous voulons une solution à long terme. Procédons étape par étape. Notre argumentation doit être fondée sur du concret, n'est-ce pas? Monsieur Shannon, monsieur Emerson, monsieur Haggard et madame Blenkhorn, quels sont vos points de désaccord, dans le contexte des propos de M. Rae? J'aimerais savoir ce qui vous sépare car je crois que cela devrait nous permettre de mieux saisir l'attitude à adopter.

Ma deuxième question est la suivante: Pourquoi ne désignons-nous pas un porte-parole qui défendrait nos intérêts, ce qui empêcherait les Américains de s'en prendre à différentes personnes dans les différentes régions du pays et, en fait, de diviser les forces canadiennes avant même qu'on commence à négocier?

Le président: C'est sans doute assez pour les cinq minutes. Commençons par M. Haggard, puis nous écouterons M. Rae, Mme Blenkhorn, M. Emerson et M. Shannon.

M. David Haggard: Pour l'essentiel, nous sommes d'accord avec M. Rae et avec le Free Trade Lumber Council au sein de notre syndicat. Ce que nous craignons, c'est que ces négociations entre le Canada et les États-Unis soient encore assimilées à la négociation entre une souris et un éléphant. Pour réussir, nous devrons utiliser tous les outils à notre disposition. À notre syndicat, nous sommes bien placés pour le savoir, puisque nous représentons les pauvres travailleurs lorsque nous négocions avec l'industrie, qui essaie toujours de nous plumer. Mais nous réussissons habituellement à repartir avec un accord juste et équitable.

Ce qu'il faut, c'est réussir à obtenir le libre-échange, et effectivement, il faudra utiliser à cette fin tous nos outils. On n'aborde pas des négociations avec une trousse à outils vide. C'est pourtant un peu l'impression que donne la situation actuelle. Le point de vue unifié au Canada devrait être celui de notre syndicat, qui représente des travailleurs de toutes les régions, à l'exception de certaines parties des Maritimes, où nous travaillons très fort actuellement.

Le président: Monsieur Rae.

M. Bob Rae: La question était adressée à M. Shannon, M. Emerson et Mme Blenkhorn. J'ai déjà donné mon point de vue, que vous avez bien résumé, donc...

M. Tony Valeri: Je voulais savoir sur quoi vous n'êtes pas d'accord.

Le président: Madame Blenkhorn.

Mme Diana Blenkhorn: Nous ne contestons pas le principe du libre-échange. Qui pourrait le contester? Nous avons déjà...

M. Tony Valeri: Sur quoi n'êtes-vous pas d'accord, dans le contexte des propos de M. Rae?

Mme Diana Blenkhorn: Sur la façon de procéder. M. Rae propose que les deux accords... Vous semblez vouloir dire que les deux accords devraient arriver à expiration le 31 mars, c'est-à-dire que l'Accord de l'Atlantique devrait être lié au vôtre, à l'accord général sur le bois d'oeuvre.

M. Bob Rae: Nous estimons que s'il y a libre-échange et que si l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux expire, on n'a pas besoin d'un accord dans les Maritimes puisqu'il y a un libre-échange.

Mme Diana Blenkhorn: Eh bien, nous ne sommes pas d'accord, Bob, parce que même l'accord de libre-échange—l'ALE ou l'ALENA—définit par écrit quelles sont les obligations. Nous disons donc simplement qu'il y a libre-échange, que nous avons un marché équitable, un libre accès au marché, et l'accord établit des obligations mineures comme toute autre entente le ferait. Je ne pense pas que vous en disconviendrez.

Alors, tout ce que nous disons, c'est que nous voulons que notre entente soit renouvelée, et nous n'allons pas faire obstruction ni opposition à la façon dont le reste des provinces agiront. On se rapproche ainsi de la constitution d'un front uni.

J'aimerais également ajouter que si nous optons pour la voie proposée ou que les provinces touchées optent pour cette voie, que nous attendons de voir quelle plainte les Américains vont déposer, il s'écoulera pas mal de jours avant qu'un accord de suspension puisse prendre effet et mette fin à l'affaire, si je me fie aux avis juridiques de consultants très bien rémunérés. Il faut donc y voir dans les 90 premiers jours. Ce n'est peut-être pas dans l'intérêt du pays.

Le président: Monsieur Emerson.

M. David Emerson: Merci, monsieur le président. Nous ne sommes pas vraiment en désaccord avec le Free Trade Lumber Council concernant la position que vous avez présentée. Nous voulons nous en tenir aux faits, et nous voulons voir ce qu'il adviendra du droit compensateur dans une affaire antidumping. Nous pensons que nous n'avons pas à prendre de décision. Nous verrons ce qui arrive peu importe ce que nous faisons. Ce qui nous préoccupe, c'est qu'il y a eu un vaste débat public qui a porté beaucoup de gens à croire que ce pourrait être une façon de marquer des points importants. On n'a pas dévoilé quels seraient les risques véritables pour les prochaines années si ces droits étaient ce que nous prévoyons qu'ils pourraient être—ils pourraient avoir un caractère punitif, être élevés, et nous pensons avoir l'obligation face à nos travailleurs et à nos collectivités d'être très clairs quant à ce qui pourrait se produire. C'est pourquoi nous disons qu'il ne faut pas retarder les négociations mais bien plutôt les accélérer.

• 1715

Nous avons aussi peut-être une légère différence de vues sur la question de savoir si notre pouvoir de négociation est accru quand nous sommes au beau milieu des poursuites, plutôt qu'avant que les choses n'aillent trop loin. Nous ne pensons pas qu'il s'en trouve renforcé, ce en quoi nous divergeons peut-être un peu d'opinion. Mais c'est un aspect mineur, tactique, qui n'a rien de fondamental.

Le président: Monsieur Shannon.

M. Gerry Shannon: Monsieur le président, j'ai appris au fil des ans qu'il est rarement avantageux de ne pas être d'accord avec M. Rae, et en l'occurrence je me réjouis de pouvoir dire que je ne suis pas en désaccord avec lui.

Ce que je demanderais instamment au gouvernement, et en fait à toutes les parties intéressées, c'est de rester bien attentif à ce qui se passe. Comme j'ai tenté de l'exposer clairement dans ma déclaration, ce qui intéresse les États-Unis, c'est leur part du marché, et nous devons réagir de manière à nous assurer que les règles établies en vertu de la loi servent effectivement nos objectifs et nos fins. Elles ont fait l'objet de négociations, elles sont là pour qu'on s'en serve, et nous devrions nous en servir.

Ce qui ne veut pas dire que je serais d'accord pour qu'on se précipite dans une poursuite relative à un droit compensateur. S'il y a un autre moyen de s'en sortir, tant mieux. Mais pour l'instant, je dois dire que je ne vois pas vraiment d'autre possibilité que cette voie, à moins qu'il soit établi clairement qu'en optant pour une mesure comme la désignation d'un émissaire spécial, les États-Unis seront disposés à voir des changements se produire de part et d'autre de la frontière. Alors peut-être pourrons-nous y voir un recours. Autrement, cela relèvera de Genève. Merci.

Le président: Merci. Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri: Je serai bref. Pouvons-nous avoir un porte-parole dans les deux ou trois prochaines semaines, un porte-parole pour le Canada?

M. Bob Rae: C'est pourquoi nous avons prié le gouvernement fédéral, comme vous devez le savoir, de concert avec différentes autres personnes, de faire en sorte que le premier ministre nomme un conseiller spécial. Les gens ici sont assez loquaces. Le Canada est un grand pays, et les gens ont différents points de vue. Alors je ne pense pas que nous parvenions un jour à faire taire les gens, parce que parler nous est naturel. Je demeure quand même confiant.

Ce qu'on verra bientôt, c'est qu'on commencera à se rallier. La position du gouvernement canadien est claire. Le Parlement a établi à l'occasion d'un vote très clair quelle était sa position et quelle était la voie qu'il préférait. Et je pense que cela se traduira dans la politique du gouvernement du Canada, avec un ferme appui de l'industrie. Nous appuyons entièrement ce que fait le ministre et la position qu'il a prise. Je pense que c'est ce qui va se produire. Je crois qu'il y aura en cours de route quelques divergences de vues à l'occasion, que des nuances seront apportées, par exemple. Je me dis, pourquoi pas.

Je dirais certainement, pour m'être beaucoup occupé de négociation dans ma vie—j'ai déjà gagné ma vie de cette façon—qu'il vaut mieux que tout le monde parle d'une même voix. Dans la mesure du possible, plus vite on y arrivera, le mieux cela vaudra pour tout le monde. Je pense qu'en fin de compte c'est ce qui se produira.

Le président: Monsieur Paquette.

[Français]

M. Pierre Paquette: D'abord, j'ai une petite question qui fait un peu suite à celles qu'on a posées. Il y a un argument selon lequel le prix des maisons va augmenter aux États-Unis. C'est un argument qui peut toucher les consommateurs américains, mais c'est comme si on présentait la situation de telle façon qu'on dirait que c'est seulement l'industrie canadienne qui exporte aux États-Unis et qu'il n'y a pas d'importations au Canada de produits forestiers américains. Quel est le montant, actuellement—je ne sais pas qui peut répondre à cela—, des importations canadiennes de produits forestiers? Peut-être, finalement, que la différence n'est pas si importante.

M. Bob Rae: Au Canada, nous importons pour plus de 5 milliards de dollars de produits forestiers des États-Unis et nous en exportons pour plus de 10 milliards de dollars.

M. Pierre Paquette: Donc, il y a un déficit de 5 milliards de dollars, à peu près. Je pense que ce serait important de souligner qu'il y a aussi des échanges qui se font à ce niveau-là.

Pour conclure, dans le sillage de la question posée par M. Valeri, je pense que l'enjeu majeur—et on l'a déjà dit au comité—, c'est la capacité de maintenir le consensus malgré le harcèlement de l'industrie américaine.

• 1720

Je pense que M. Valeri l'a dit: l'industrie a des devoirs à faire. On sent qu'il y a beaucoup de tension au plan régional et c'est bien qu'on puisse l'exprimer pour y travailler. Qu'est-ce que le comité pourrait recommander au gouvernement pour être beaucoup plus proactif qu'il ne l'est présentement et être efficace aussi, être utile, parce qu'il ne peut pas se contenter d'être attentif devant le consensus? Il faut qu'il participe à le fortifier, à le régénérer constamment, d'autant plus que, comme on le sait, il y aura plusieurs mois de tension.

J'adresse ma question à tous nos invités: qu'est-ce que le gouvernement fédéral canadien peut faire pour aider l'industrie à maintenir le consensus nécessaire pour traverser cette crise?

[Traduction]

Le président: Très brièvement, monsieur Rae, puis ensuite nous irons vers la droite.

[Français]

M. Bob Rae: Je dirais que le gouvernement, à mon avis, doit être positif. Il est est en train de le faire. Le ministre, après une consultation importante du gouvernement, a déclaré clairement qu'il n'y a pas un consensus pour continuer avec les quotas. Alors, on attend l'expiration de l'accord existant et c'est la volonté du gouvernement de nommer un envoyé spécial pour s'attaquer à ce problème avec un porte-parole américain. Nous recommandons au ministre de continuer de le faire. Je crois qu'il faut établir avec l'industrie et avec les provinces une approche commune, mais comme je l'ai dit précédemment, c'est ce qui est en train de se faire. Ce n'est pas facile. On est un pays diversifié où il y a des différences, des distinctions entre les politiques provinciales, des problèmes spécifiques dans chaque région du pays. Il faut reconnaître cela, mais à la fin, je crois que ce qui va peut-être nous unir, c'est la menace qui existe. Je suis tout à fait d'accord avec les gens qui disent que ça ne va pas être plaisant, que ça ne va pas être facile. Faisons tout notre possible pour diminuer l'impact de cet assaut américain contre nos positions.

[Traduction]

Le président: Madame Blenkhorn.

Mme Diana Blenkhorn: Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce qu'a dit M. Rae au sujet des tentatives auprès du gouvernement du Canada. Une consultation s'est poursuivie de façon continue au cours des deux dernières années auprès des provinces et de l'industrie. Mais je soulignerai à nouveau que ce qu'il y a eu de très important pour nous, c'est que le gouvernement du Canada a toujours reconnu et respecté cette différence et dans la mesure du possible on a tenté d'agir de même dans le cas d'autres divisions au sein du pays, dans l'espoir d'en arriver à une certaine reconnaissance et à un consensus.

Le président: Très bien. Monsieur Haggard.

M. David Haggard: Je crois que le gouvernement fédéral ne s'y prend pas trop mal pour faciliter l'établissement de la position canadienne. Je crois que le gouvernement fédéral pourrait faire plus pour faciliter la façon dont nous... Car à long terme, nous pouvons continuer de voir se produire tous les cinq ans ce qui se produit maintenant, c'est-à-dire des guerres commerciales dans le secteur du bois d'oeuvre. Si nous ne trouvons pas de solution nord-américaine à une stratégie de commercialisation, nous continuerons de subir ces guerres commerciales, peu importe ce que nous céderons aux Américains ou les efforts que nous déploierons pour nous rendre à leurs exigences en matière de commerce administré. Nous ne pourrons pas y arriver, parce qu'ils continueront de changer les règles. Ils l'ont fait. On l'a vu au cours des 20 dernières années de guerre commerciale que nous avons connues dans le secteur du bois d'oeuvre.

Je pense que le gouvernement devrait jouer un rôle de facilitateur dans ce dossier. Tant que nous ne nous réunirons pas pour discuter de la façon dont nous établissons les stratégies nord-américaines—si je puis m'exprimer ainsi—, pour cesser de cracher dans la soupe des autres, nous continuerons d'avoir ce genre de guerre commerciale. Je pense que la solution, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est de nous donner une stratégie où nous pourrons tous collaborer plutôt que nous combattre les uns les autres.

Le président: Merci, monsieur Haggard.

Monsieur Emerson.

M. David Emerson: Nous sommes tout à fait d'accord avec M. Rae. Nous sommes encouragés de voir que le premier ministre et le Cabinet du premier ministre se sont récemment entretenus de cette question avec le président Bush et M. Zoellick. Nous sommes tout à fait d'accord pour qu'on nomme un représentant auprès du gouvernement du Canada pour traiter de cette question. Nous serions tout à fait d'accord pour qu'on parle d'une même voix, et nous lui accorderions tout notre appui. Bien que la Colombie-Britannique se soit pour ainsi dire montrée un peu provocatrice ces derniers jours, j'estime, à l'instar de beaucoup d'entre nous je crois, qu'il faut parfois d'abord semer la zizanie pour rétablir l'ordre. Nous y arrivons.

Le président: Merci.

Monsieur Shannon.

• 1725

M. Gerry Shannon: Je n'ai rien à ajouter. Merci.

Le président: Il nous reste trois minutes encore pour conclure.

D'abord, je vous remercie beaucoup au nom de mes collègues, qui...

M. Joe Comuzzi: Monsieur le président, pourquoi ne pouvons-nous pas nommer un émissaire? La question vient juste d'être posée—pourquoi pas?

Le président: Vous avez entendu tout le monde appuyer l'idée d'un émissaire. Je n'ai entendu personne s'y opposer. Y a-t-il quelqu'un qui est contre?

M. Tony Valeri: Ce que je disais à M. Comuzzi c'est que tout le monde est favorable à l'idée d'un émissaire. Les États-Unis sont réticents à l'idée d'en nommer un. Comme le disait un porte-parole entendu il y a deux ou trois semaines ou la semaine dernière—pourquoi ne pourrions-nous pas nommer un émissaire?

M. David Emerson: Je crois que nous le pourrions.

Le président: Monsieur Rae.

M. Bob Rae: Je l'ai dit aujourd'hui, aussi clairement que possible je l'espère: nous estimons que c'est possible et qu'on devrait le faire.

M. Gary Lunn: Les États-Unis en ont rejeté l'idée à deux reprises.

M. Tony Valeri: Je sais.

Le président: D'accord. En fait, ce que les témoins nous ont donné à entendre, c'est qu'il y a unanimité sur deux questions—c'est ce que j'ai compris, à moins que je fasse erreur. D'abord, il y a cette idée de parler d'une même voix, d'avoir un porte-parole et, deuxièmement, nous voulions tous le libre-échange. Chacun des représentants l'a indiqué, compte tenu du fait que nous ne voulons pas d'une entente qui dresserait une région du pays contre une autre. Je dirais donc essentiellement que cette tribune nous a aidés à réunir toutes les différentes opinions en une position unifiée. Je pense que notre industrie est beaucoup plus unifiée qu'on veut le reconnaître.

D'après les mémoires, ainsi que les exposés présentés et les réponses données aux questions, je crois que nous avons maintenant un groupe très unifié. J'espère que nous inciterons le gouvernement à faire des représentations auprès des États-Unis pour qu'on nomme un émissaire et que notre gouvernement fasse de même, et que nous allons continuer à travailler en très étroite collaboration avec notre industrie, afin que d'ici là nous conservions cet esprit d'équipe. Nous pouvons espérer qu'en fin de compte nous n'aurons pas à recourir à d'autres moyens pour évoquer d'autres liens, qu'il s'agisse de l'eau, des ressources naturelles ou de tout autre domaine. Je sais que le commerce entre le Canada et les États-Unis dépasse les 300 milliards de dollars, et c'est franchement une peccadille dans l'ensemble du système. Remarquez que c'est une des plus grandes industries au Canada et c'est beaucoup plus important qu'on veut bien le croire.

Nous ne voudrions pas que cette situation perdure. Nous espérons que nos amis et nos alliés vont finir par conclure que le libre-échange est là pour rester, que nous avons bel et bien une entente avec eux, que ce soit par l'intermédiaire de l'Organisation mondiale du commerce ou par l'ALENA, et que nous devons respecter les règles.

Cela dit, au nom des membres du comité, je remercie les représentants de l'industrie et j'ajoute que nous avons eu une séance très instructive. Nous espérons vous revoir pour célébrer la victoire du libre-échange.

La séance est levée.

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