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SINT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 18 octobre 2001

• 1531

[Traduction]

Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)): Nous pouvons peut-être nous mettre en train. Nous avons une journée assez chargée devant nous.

Nous sommes le Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international et nous sommes réunis aujourd'hui pour faire le point de la situation, avec les fonctionnaires compétents, en ce qui concerne le flux des échanges commerciaux.

Sous réserve de votre accord, je me propose d'écouter les exposés des témoins avant de vous donner la parole pour vos questions. Cela vous convient-il?

Nous entendons M. Marc Lortie et M. Jon Allen, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Puis, représentant l'Agence des douanes et du revenu du Canada, nous avons M. Brimble, M. Jones et M. Lefebvre. Plus tard, nous entendrons M. Perrin Beatty, de Manufacturiers et exportateurs canadiens. Nous avons également des représentants de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules ainsi que de l'Alliance canadienne du camionnage.

Je souhaite donc la bienvenue à nos témoins et à nos invités et les invite à nous faire un exposé.

M. Marc Lortie (sous-ministre adjoint (Amériques), ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du sous-comité. Je suis Marc Lortie. Je suis le sous-ministre adjoint responsable des Amériques au ministère de Affaires étrangères et je suis ravi de vous rencontrer cet après-midi.

[Français]

Monsieur le président, les questions de la frontière avec les États-Unis occupent une partie de nos énergies en ce moment, puisqu'il faut s'assurer que cette frontière soit gérée de façon efficace. Les défis auxquels nous faisons face en ce moment ne sont pas minces.

Comme vous le savez, la relation commerciale Canada—États-Unis est la plus grande relation commerciale au monde. Plus de 1,3 milliard de dollars sont échangés chaque jour. Cela représente 85 p. 100 de notre commerce et 25 p. 100 du commerce américain. Nous sommes deux grandes nations commerçantes, et le rôle de la frontière a donc des conséquences immédiates sur l'économie des deux pays.

[Traduction]

Après les attentats du 11 septembre, les organisations responsables de la frontière des deux pays ont déclenché l'état d'alerte maximal. Les deux pays ont réagi avec de nouvelles mesures destinées à prévenir les files d'attente les plus longues. Des ressources additionnelles ont été déployées d'urgence et, par diverses mesures de coopération, l'arriéré a pu être épongé en l'espace de quelques jours.

• 1535

Toutefois, les files d'attente restent encore longues aujourd'hui et les flux de trafic sont toujours ralentis, tant ceux de marchandises que de voyageurs. Cela est dû sans aucun doute à la situation politique, mais c'est aussi un problème économique d'importance immédiate. Mes collègues de l'ADRC vous donneront de plus amples détails à cet égard.

Nous avons ouvert un dialogue avec l'administration américaine immédiatement après le 11 septembre.

[Français]

À cet égard, j'aimerais mentionner que les contacts au niveau politique entre le ministre Manley et son homologue, le secrétaire d'État Powell, ont eu lieu immédiatement. Ils se sont d'ailleurs rencontrés physiquement à Washington le 21 septembre. Ils ont discuté des questions de frontières pour s'assurer que ces questions recevaient l'attention nécessaire au niveau politique.

Le premier ministre a rencontré le président Bush le 24 septembre pour discuter des questions de relations bilatérales, y compris la question des frontières. Les deux ont conclu que la bonne gestion de la frontière par les deux gouvernements était essentielle pour s'assurer que les économies respectives n'allaient pas souffrir d'un état d'alerte plus grand à la frontière.

Enfin, il y a eu une série de visites successives à Washington. Le solliciteur général, M. MacAulay, s'est rendu à Washington pour discuter et avoir des conversations avec l'Attorney General américain, John Ashcroft. Hier, le vice-premier ministre du Canada, l'honorable Herb Gray, était à Washington. Demain, le ministre Collenette se rendra également à Washington.

Donc, au niveau ministériel, il y a eu une série de rencontres actives. Au niveau des fonctionnaires, c'est-à-dire au niveau de nos collègues de Revenu Canada, de l'Immigration et des Transports, il y a également des rencontres avec les représentants du gouvernement, des rencontres qui se suivent, qui sont très régulières et qui ont trait à la question de la frontière.

[Traduction]

Un nouvel acteur dans la gestion de la frontière est arrivé sur la scène aux États-Unis. En effet, le 20 septembre, dans un discours au Congrès, le président Bush a annoncé la création d'un nouveau poste, soit celui de Directeur de la sécurité intérieure. Il a chargé le gouverneur Tom Ridge de Pennsylvanie de ces nouvelles responsabilités.

Le gouverneur Ridge sera également responsable de la gestion de la frontière. Il a pour responsabilité globale de combattre le terrorisme et de mettre en place des mesures antiterroristes aux États-Unis, et il assurera la coordination d'ensemble dans ce domaine du côté américain.

C'est donc un nouveau poste, doté d'un nouveau responsable, du côté américain.

Le ministre Manley s'est tenu régulièrement en contact téléphonique avec le gouverneur Ridge. Ce dernier est entré en fonctions officiellement il y a dix jours et M. Manley prévoit de se rendre prochainement à Washington pour sa première réunion de travail avec le gouverneur Ridge. Nous pensons que cette rencontre aura lieu dès la semaine prochaine.

• 1540

Le Canada et les États-Unis connaissent de longue date l'importance de la frontière pour notre prospérité économique commune. Divers mécanismes ont été mis en place au fil des ans pour permettre aux organismes et à divers ministères gouvernementaux de collaborer et de trouver des façons créatrices et efficaces de rendre la frontière étanche et sûre. Si vous m'accordez quelques secondes, je vais nommer un certain nombre d'organes de coopération. Nous avons l'Accord sur la frontière commune, regroupant les responsables de l'immigration et des douanes; nous avons le groupe Vision de la frontière, auquel participent les agents d'immigration; nous avons le Forum sur le crime transfrontalier Canada-États-Unis, dans le cadre duquel collaborent les services de police et de renseignements; enfin, nous avons le PSCA, le Partenariat stratégique canado-américain, dans le cadre duquel la plupart d'entre nous rencontrons collectivement nos homologues américains, sous la coprésidence du Département d'État aux États-Unis et du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, de notre côté. Ces groupes se rencontrent à intervalles réguliers pour discuter des moyens par lesquels la frontière peut être rendue plus sûre et plus efficiente.

Nous avons à relever de très importants défis sur le plan de la gestion de la frontière. Nous sommes confrontés à des exigences contradictoires, d'une part de sécurité et d'autre part de facilité de passage. Comme vous le savez bien, il y aura des conséquences économiques directes pour nous tous si la frontière ne fonctionne pas sans heurts. C'est pourquoi, à l'heure actuelle, au niveau des fonctionnaires et à mon niveau, nous nous concentrons prioritairement sur les problèmes à la frontière. Nous avons reçu la semaine dernière ici, à Ottawa, un haut représentant du Département d'État pour lancer une série de pourparlers au niveau des fonctionnaires en vue d'assurer le bon fonctionnement de notre frontière.

Nos 23 consulats aux États-Unis, et surtout les trois les plus proches de la frontière, suivent de très près la situation, sur une base quotidienne, tout comme notre très efficace ambassade à Washington. Je vais donc m'arrêter là pour donner la parole à mon collègue de l'ADRC, qui va dresser un tableau de la situation à la frontière en ce moment, avant de répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lortie.

Je vous présente mes excuses. Lorsque j'ai fait les présentations, j'ai donné le nom de Jon Allen, alors que je voulais présenter M. John Morrow, qui remplace M. Allen.

[Français]

M. Denis Lefebvre (sous-commissaire, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Denis Lefebvre et je suis le sous-commissaire de la Direction générale des douanes de l'Agence des douanes et du revenu. Mon collègue M. Brian Brimble, qui est directeur général, m'accompagne, ainsi que M. Brian Jones, pour nous assister à la technologie. Il est directeur à la Direction générale des douanes.

M. Lortie a fait une très bonne introduction générale sur les questions et les défis que nous pose la frontière,

[Traduction]

et je propose de passer directement à l'exposé que mes collègues ont préparé. Il traite de la question des flux de trafic et des délais d'attente à la frontière, en particulier depuis le 11 septembre.

Brian.

M. Brian Brimble (directeur général, Direction de la politique opérationnelle et de la coordination, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada): Merci, Denis.

Bon après-midi à tous.

Je vais vous projeter une série de transparents. Le but de cet exposé, en gros, est d'esquisser le contexte montrant ce qui s'est passé depuis les incidents...

• 1545

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Est-ce qu'on peut avoir le texte qui accompagne les diapositives?

M. Denis Lefebvre: Est-ce que ça va s'il vous est remis après?

Mme Francine Lalonde: Ce serait bien de pouvoir suivre la présentation là-dessus.

Une voix: Tout de suite?

Mme Francine Lalonde: Si vous le voulez.

Le président: Avez-vous assez de copies, premièrement?

M. Denis Lefebvre: Oui.

Le président: Ce serait une bonne idée. Vous pouvez continuer.

M. Denis Lefebvre: Ça va être distribué.

M. Brian Brimble: Merci.

[Traduction]

Comme je l'ai indiqué, nous cherchons à établir le contexte général de ce qui s'est passé depuis le 11 septembre et les incidents à la frontière. Nous voulons informer les membres du comité des volumes de trafic et des délais d'attente actuels à destination du Canada et des États-Unis, tant pour les véhicules commerciaux que les voitures particulières. Nous voulons également passer en revue très rapidement avec vous certaines options et certains efforts entrepris afin de minimiser les délais.

J'aimerais tout d'abord parler très brièvement des mesures prises jusqu'à présent. Comme M. Lortie l'a mentionné, notre réaction à la tragédie du 11 septembre a été immédiate. Nous avons immédiatement pris un certain nombre de mesures pour bloquer les terroristes et les marchandises inadmissibles à notre frontière. Nous avons ainsi déclaré immédiatement l'état d'alerte maximal. Nous avons ordonné à nos douaniers d'intensifier les vérifications d'identité et de poser davantage de questions aux voyageurs. Il en a résulté, bien entendu, un plus grand nombre d'enquêtes et de renvois aux services d'immigration et à d'autres ministères. Parallèlement, nous avons mis en place un centre de commandement au bureau central, afin de superviser les activités 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. De même, nous avons ouvert des centres de commandement d'urgence dans toutes les régions du pays. Nous avons accru les effectifs à tous les bureaux d'entrée, en faisant appel aux heures supplémentaires et aux rappels de personnel, pour garantir la sécurité et faciliter au mieux de nos capacités la circulation des marchandises et des voyageurs.

Pendant la crise immédiate, nous avons traité environ 240 vols déroutés par les États-Unis, ce qui a supposé le contrôle de plus de 35 000 voyageurs. Nous avons offert divers types d'aide aux Douanes américaines, et ce aux niveaux national, régional et local. Nous avons d'excellentes relations de travail avec nos collègues du côté américain de la frontière. M. Lefebvre s'est tenu en contact avec son homologue, tout comme beaucoup d'autres responsables de notre organisation, et ce jusqu'au niveau local soit les postes frontière. Nous avons également créé une page Internet dans laquelle nous publiions les délais d'attente en direction du nord et du sud aux principaux points d'entrée, pour la gouverne des expéditeurs et des voyageurs.

J'aimerais maintenant, si vous le permettez, passer aux données sur le volume. Auparavant, voici un diagramme montrant la ventilation par province des flux de voyageurs. Je précise bien qu'il s'agit là du trafic voyageurs et non des marchandises. Vous remarquerez la part prépondérante de l'Ontario, du Québec et de la Colombie-Britannique. Nous allons donc nous concentrer pour la suite de l'exposé, et pour économiser du temps, sur les principaux postes frontières et trois grands aéroports dans ces régions du pays.

Pour ce qui est des chiffres de trafic, ces diagrammes—j'en ai une série à passer en revue avec vous—indiquent les volumes de voyageurs pour une période de 12 jours.

• 1550

À gauche, vous voyez le nombre de voitures et nous indiquons le volume pour trois périodes. La ligne bleue représente la période du 29 août jusqu'à la tragédie du 11 septembre. Ensuite, la ligne verte représente la période de 12 jours immédiatement consécutive et l'on remarque une baisse très sensible du trafic. La ligne orange représente la période du 24 septembre au 8 octobre, qui indique une certaine reprise.

Pour ce qui est des pointes dans la période du 29 août au 10 septembre, le premier pic représente la longue fin de semaine de la Fête du travail et le deuxième la fin de semaine juste avant les attentats. On constate ensuite une chute radicale après le 11 septembre. Depuis cette date, le trafic de fin de semaine est nettement moins grand, bien que le niveau général ait quelque peu remonté, mais sans les pics de fins de semaine.

Passons à la diapositive suivante. Ce diagramme montre le volume de trafic au pont Ambassador de Windsor. La tendance y est la même et on la retrouve dans la plupart de ces diagrammes, avec un effondrement du trafic après le 11 septembre et une reprise progressive et une stabilisation à un niveau quelque peu inférieur à la norme antérieure. Dans le cas du pont Ambassador, je crois que le volume est inférieur de 10 à 20 p. 100 à ce qu'il était, mais avec une tendance à la reprise.

Pour ce qui est de l'autoroute du Pacifique, là encore la tendance est identique à ce que nous avons déjà vu.

Passant maintenant aux voyageurs aériens, cette diapositive compare les volumes de passagers en septembre de cette année et en septembre 2000. La partie orange représente les chiffres en septembre de cette année et la partie bleue ou noire les chiffres de l'année précédente. Vous pouvez voir que le volume s'est effondré le 11 septembre pour ce qui est du nombre de vols et de passagers. Il a récupéré quelque peu depuis, mais, comme vous le voyez, il reste bien en deçà du niveau d'il y a un an.

Dans le cas de Dorval, on dénombre environ 2 000 passagers de moins qu'il y a un an. À Pearson, la tendance est très comparable. L'écart est probablement de l'ordre de 5 000 voyageurs en moins par jour par rapport à l'année dernière. Même chose à Vancouver, où là aussi le trafic a repris mais à un niveau inférieur d'environ 1 000 voyageurs par jour par rapport à l'année dernière.

En ce qui concerne le trafic commercial, je signale pour commencer qu'environ 70 p. 100 des marchandises échangées entre le Canada et les États-Unis sont transportées par camion. Les deux tiers du camionnage transfrontalier empruntent la frontière ontarienne et nous allons donc nous concentrer sur la situation dans cette province.

Au total, l'Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique reçoivent 90 p. 100 des importations, le chiffre étant d'environ 63 p. 100 rien que pour l'Ontario. Ces provinces fournissent également 88 p. 100 des exportations, la part de l'Ontario étant de 61 p. 100.

• 1555

Le point de passage des marchandises le plus important est le pont Ambassador, l'autoroute du Pacifique et le poste de Lacolle étant eux aussi très fréquentés.

En 1999, 90 p. 100 des importations et 88 p. 100 des exportations ont été traitées dans les provinces de l'Ontario, du Québec et de la Colombie-Britannique, la part ontarienne étant de 63,5 p. 100.

Si l'on regarde les volumes des expéditions commerciales des principaux postes—c'est-à-dire le nombre d'envois individuels—on remarque en fait une augmentation dans la période du 12 au 21 septembre par rapport à la période avant le 11 septembre. Cela est probablement dû à une accumulation de stocks en réponse à la crise.

Les volumes du 1er au 10 octobre sont à peu près au même niveau, et légèrement en baisse par rapport à la même période de 2000. C'est une tendance que l'on retrouve dans tous les grands points d'entrée, à travers tout le pays.

En ce qui concerne les temps d'attente du 26 septembre au 10 octobre, dans le cas de Lacolle, il y a eu des pics de deux heures et une heure d'attente en direction nord. Je signale que nos lectures concernent des périodes de quatre heures, commençant à 6 heures du matin et allant jusqu'à 10 heures du soir.

Comme nous l'indiquons, des temps d'attente de 30 minutes ou moins sont considérés comme normaux, étant donné la nature des formalités à la frontière.

Pour ce qui est du trafic commercial vers le nord, là encore il y a eu de brèves périodes d'attente assez longue, mais ces pics étaient relativement isolés, avec des pointes de 90 et 120 minutes.

En direction du sud, les délais étaient très faibles, avec un maximum d'une heure à des périodes isolées.

Le pont de Windsor, comme je l'ai déjà dit, est le plus gros point d'entrée au Canada. Jusqu'au 10 octobre, les temps d'attente y étaient gérables.

• 1600

S'agissant du trafic commercial en direction nord sur le pont de Windsor, on a enregistré à certaines périodes des délais d'attente atteignant 90 minutes. Le 19 septembre les files d'attente sont restées de 90 minutes pendant une durée prolongée. Plus récemment, on a enregistré des pics périodiques, mais dans l'ensemble la situation était gérable.

Les temps d'attente des voyageurs sur le pont de Windsor, en direction sud vers les États-Unis, ont été considérables, de une heure et demie à deux heures très souvent. Les dates indiquées ici vont jusqu'au 10 octobre, et c'est donc une situation qui perdure à peu près jusqu'à aujourd'hui.

Les délais d'attente sur le pont de Windsor pour le trafic commercial pouvaient eux aussi atteindre 90 minutes, selon l'heure de la journée. Ces données nous ont été transmises par les services d'inspection américains.

Dans le cas de l'autoroute du Pacifique, les voyageurs en direction nord n'ont rencontré que peu de files d'attente dans la période jusqu'au 10 octobre.

Le trafic commercial en direction nord sur l'autoroute du Pacifique connaissait des temps d'attente de 30 à 60 minutes, selon l'heure de la journée et le jour de la semaine.

En direction sud, les délais étaient très importants, très souvent. Il en est encore ainsi à l'heure où nous parlons.

L'attente du trafic commercial en direction sud sur l'autoroute du Pacifique était d'une demi-heure à une heure, selon le jour.

Nous fournirons au comité un jeu complet de ces diagrammes, donnant les chiffres détaillés pour toute la période dont je traite ici.

Parlons maintenant très rapidement des mesures que nous projetons.

Nous restons en état d'alerte maximal et nous avons l'intention de le maintenir aussi longtemps que nécessaire. Nous mettons l'accent sur le risque. Nos efforts visent à faciliter la circulation des marchandises et voyageurs à faible risque, afin de nous concentrer sur ceux à haut risque. Nous adaptons donc notre activité opérationnelle en fonction de cette évaluation de risque mouvante.

Nous attendons les modifications à la législation que va apporter le projet de loi S-23, car nous en avons besoin pour mettre en oeuvre le Plan d'action des douanes. Nous renforçons nos initiatives de protection dans les aéroports et les ports maritimes.

Nous facilitons également, comme je l'ai déjà indiqué, le franchissement de la frontière terrestre du trafic à faible risque. Nous continuons de consulter nos partenaires du secteur privé sur les meilleures façons de concilier la sécurité et la circulation fluide des marchandises.

Nous évaluons également la possibilité d'accélérer certains éléments du Plan d'action des douanes afin de mettre en place aussi rapidement que possible les initiatives destinées à mieux protéger les Canadiens.

Nous mettons en place davantage de matériel de détection de la contrebande, de façon à repérer les personnes et les marchandises à haut risque, et nous déployons 130 agents des douanes supplémentaires dans les aéroports et les ports maritimes.

Comme je l'ai déjà dit, nos efforts sont axés sur la gestion du risque. Nous n'épargnons aucun effort pour accélérer la technologie d'information préalable sur les voyageurs et établir des dossiers de passagers afin de disposer de renseignements sur les voyageurs avant même leur arrivée au Canada, de façon à leur faciliter le passage de la frontière.

• 1605

Nous renforçons notre accès aux bases de données des douanes et de l'immigration en remplaçant le matériel ancien par du nouveau. Nous introduisons le système de gestion du renseignement douanier, une base de données nationale où seront centralisés les renseignements stratégiques.

En outre, nous créons des zones sous contrôle douanier aux points d'entrée afin d'assurer une meilleure sécurité aux Canadiens et aux voyageurs et faciliter les choses aux transporteurs.

Je terminerai avec la dernière diapositive où nous signalons ce que les importateurs et exportateurs peuvent faire en ces temps difficiles pour faciliter les échanges et le passage de la frontière.

Nous invitons tout d'abord les intéressés à se prévaloir de toutes les options de traitement préalable des deux côtés de la frontière canado-américaine. Le SPA, de notre côté, et le PAPS du côté américain, représentent des technologies qui méritent que l'on s'y intéresse.

Nous conseillons aux voyageurs de consulter le site Internet de l'ADRC et d'autres sources de renseignements sur l'Internet afin de déterminer les postes frontières où l'attente est la moins longue et d'écouter les rapports sur la circulation et de puiser des renseignements à toute autre source.

Troisièmement, nous invitons les chauffeurs de camion à être prêts à présenter des pièces d'identité avec photo et une preuve de citoyenneté. Enfin, nous insistons sur la nécessité de disposer d'une documentation sur le chargement aussi complète et précise que possible pour nous permettre de faire notre travail rapidement à la frontière.

J'espère que ces diapositives vous auront donné une idée de la situation à l'heure actuelle et du genre de réflexion qui préside à notre travail aujourd'hui.

Le président: Merci de cet excellent exposé. Je pense que ce serait une bonne idée de donner la parole à mes collègues afin qu'ils posent leurs questions, avant de passer aux témoins suivants.

Nous allons commencer avec M. Duncan et Mme Whelan. Ensuite, nous alternerons d'un côté à l'autre.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que les témoins. Il y a là évidemment beaucoup d'informations à digérer, mais c'est très intéressant.

J'ai quelques questions qui ne portent peut-être pas directement sur la présentation mais qui touchent néanmoins les douanes et la frontière. Pour commencer, avez-vous une idée du nombre de camions ou de véhicules commerciaux franchissant la frontière du nord au sud qui ne font que transiter par les États-Unis avant de revenir au Canada, parce que le réseau routier y est plus commode? Avez-vous un moyen de déterminer ce chiffre?

M. Brian Brimble: Je n'ai pas de données précises sur ce volet particulier des mouvements. J'ai l'impression que cela représente une partie relativement mineure de l'activité.

Brian, pouvez-vous nous en dire plus?

M. Brian Jones (directeur, Division des processus d'importation, Direction de la politique opérationnelle et de la coordination, Agence des douanes et du revenu du Canada): L'estimation que je peux vous donner est qu'environ 10 p. 100 des camions traversent le Canada en transit. C'est une estimation quelque peu subjective, mais les corridors de Buffalo, Windsor et Sarnia sont manifestement des points de transit commodes pour les poids lourds. Donc, environ 10 p. 100 du total sont des camions en transit.

M. John Duncan: La raison pour laquelle je pose la question est que je traversais le Canada en voiture le 11 septembre. C'est la cinquième fois que je fais cela en l'espace de quatre ans et je n'avais jamais vu autant de camions sur la Transcanadienne. J'en ai donc conclu qu'il s'agissait là de camions qui normalement feraient ce que j'ai déjà fait moi-même en voiture, soit passer par les États-Unis pour me rendre en Colombie-Britannique.

Si c'est vrai, cela ouvre évidemment quelques perspectives. Si nous améliorons notre infrastructure, non pas aux postes frontière mais à l'intérieur, on pourrait alléger la congestion aux postes frontière.

• 1610

Je n'ai pas besoin de m'attarder là-dessus, c'est simplement un élément intéressant. Il ressort de nos chiffres qu'il y a déjà beaucoup moins de délais d'attente dans le sens sud-nord que nord-sud et votre plan d'action accentuerait en fait encore cet écart. Pourquoi continuons-nous à faire cela? C'est une question d'optique. Est-ce que nous n'envoyons pas le mauvais signal? Est-ce que nous n'allons pas dans une direction dans laquelle nos partenaires américains ne vont pas nous suivre? Refusent-ils de nous suivre? Si oui, pourquoi tenons-nous tellement à poursuivre dans cette voie?

M. Denis Lefebvre: Je vais tenter de répondre. Le mandat de notre agence, tel que nous le concevons, est d'assurer le meilleur accès au marché américain à nos entreprises. Nous avons dix millions de mouvements transfrontaliers par an et les camions passent la frontière dans les deux sens. Si nos camions effectuent des livraisons au sud, ils vont devoir revenir, et normalement ils sont pleins dans les deux sens. C'est ainsi que les choses se passent.

Il ne s'agit donc pas réellement d'un trafic unidirectionnel mais dans les deux sens. Nous pensons que, dans la mesure où nous pouvons faciliter la circulation à la frontière, garder la frontière aussi ouverte que possible, dans la mesure de nos moyens, nous réglons à hauteur d'au moins 50 p. 100 le problème et évitons que la frontière devienne un facteur sur le plan de l'investissement et à d'autres égards. Évidemment, ce serait bon de régler le problème à 100 p. 100, et nous travaillons très fort avec les organismes américains compétents pour cela, avec des programmes conjoints et d'autres procédures d'harmonisation.

M. John Duncan: J'ai une question à ce sujet. Les douanes américaines perçoivent maintenant une redevance de 5 $ par visite auprès des Canadiens faisant affaires aux États-Unis, et on peut acheter un laissez-passer valable toute l'année pour 100 $US. À ma connaissance, le Canada n'impose pas un droit similaire aux Américains. J'aimerais donc savoir pourquoi cette redevance existe et pourquoi elle est unilatérale?

M. Brian Brimble: Nous n'avons pas de telles redevances au Canada. Je ne sais pas quel est le raisonnement qui prévaut aux États-Unis. Pour notre part, nous estimons que nous fournissons un service aux entreprises. Nous voulons faciliter les échanges commerciaux et, comme M. Lefebvre l'a indiqué, nous n'épargnons aucun effort pour assurer que les marchandises circulent aussi librement que possible.

M. John Duncan: Me dites-vous que si nous voulions imposer une redevance comme celle-ci, il n'y aurait pas d'obstacle aux termes de l'ALÉNA ou de tout autre mécanisme?

M. Brian Brimble: Désolé, je ne peux répondre.

M. Denis Lefebvre: Les Américains ont imposé à un moment donné cette redevance pour couvrir une partie des frais de personnel à la frontière. Je ne suis pas certain que la redevance dont vous parlez s'applique aux Canadiens, mais c'est peut-être le cas.

• 1615

M. John Duncan: Un exemple que je connais est celui d'Eastport, dans l'Idaho. Je ne sais pas dans quelle mesure cette pratique est répandue, mais elle est en vigueur là-bas.

M. Denis Lefebvre: Nous avons pour politique de n'imposer aucun droit de passage à la frontière, qu'il s'agisse d'un mouvement commercial ou de voyageur.

Le président: Madame Whelan.

Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous signale, pour vos interventions futures, que Detroit n'est pas situé au sud de Windsor.

Un titre dans le journal Detroit News du dimanche 14 octobre disait: «Frontière: Sécurité contre commerce». Monsieur Lortie, je pense qu'il faut modifier les choses de façon à ce que la sécurité et le commerce transfrontalier aillent main dans la main, c'est-à-dire ne soient pas perçus comme contradictoires, comme c'est le cas aujourd'hui.

J'aimerais savoir qui est responsable, le cas échéant, du commerce transfrontalier et de ce que j'estime être l'avenir de l'économie canadienne, depuis la création de ce nouveau comité du Cabinet.

M. Marc Lortie: Depuis le 11 septembre, la sécurité est devenue la considération primordiale aux États-Unis, comme nous pouvons le constater chaque jour dans les actualités et dans nos discussions avec les responsables américains, et vous-même aussi dans vos contacts avec les membres du Congrès. La sécurité est devenu le souci majeur.

Je pense que nous sommes parvenus à rassurer les Américains, et nous continuons d'oeuvrer pour convaincre les administrations américaines à tous les niveaux du fait que nous prenons en compte les préoccupations sécuritaires en sus de viser le rétablissement de la facilité de circulation qui existait avant le 11 septembre.

Pour ce qui est du partage des responsabilités, avant le 20 septembre, la responsabilité d'ensemble de la gestion de la frontière aux États-Unis était partagée entre le Département d'État, les Douanes, l'INS et d'autres organismes. Depuis il semble bien, et je le dis sous réserve, que le gouverneur Ridge ait reçu un mandat spécial. De notre côté, la gestion d'ensemble est une responsabilité partagée, mais le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, à ce stade, coordonne l'action des diverses agences et du ministère, sous la présidence du ministre Manley, qui aura prochainement sa première réunion de travail avec le gouverneur Ridge.

Mme Susan Whelan: Pourrais-je formuler une suggestion? Je pense que nous devons nous concentrer sur toute la question du commerce transfrontalier, car j'ai pas mal d'entreprises qui m'appellent et m'écrivent et m'expliquent leur situation, avec tous les détails concernant leurs clients et leurs localisations géographiques. Le fait est que leurs clients ne viennent plus les voir au Canada en ce moment, ce qui signifie qu'ils ne passent pas de commandes, ce qui signifie que ces entreprises vont être inactives. Cela n'arrivera pas nécessairement dans une semaine ou deux, mais nous savons tous que dans le secteur automobile, par exemple, les décisions sont prises sur le long terme.

Lorsque les trois gros constructeurs prennent une décision de long terme, pour une échéance d'un ou deux ans, tous les fournisseurs de pièces automobiles sont touchés. Il importe d'avoir une idée claire de ce qui se passe, en sachant que ces décisions sont prises pour des échéances de 12 mois à deux ans.

J'ai reçu un certain nombre d'appels de petites entreprises inquiètes qui me disent que leurs clients aux États-Unis les préviennent: «Nous ne venons pas au Canada et nous n'achèterons rien à l'avenir chez vous. Lorsque notre contrat viendra à expiration, nous n'allons plus faire affaires avec vous, à cause de la frontière et de l'insécurité à la frontière et de l'incertitude sur le fonctionnement de la frontière».

Que puis-je répondre, par exemple, à l'entreprise de ma circonscription qui emploie 50 personnes et dont 98 p. 100 des clients sont américains? Elle paie deux millions de dollars d'impôt sur le revenu des sociétés, à quoi s'ajoutent les impôts payés par ses employés, soit au total plus de trois ou quatre millions de dollars. Il y a 200 entreprises de ce type dans ma circonscription et plus de 13 000 fournisseurs de pièces automobiles au Canada.

Il faut réellement s'attaquer à ce problème.

• 1620

Certes, je sais bien qu'au début la sécurité l'emportait sur tout le reste. Mais, sauf votre respect, les États-Unis ont conscience que 25 p. 100 de leurs exportations sont à destination du Canada, alors que chez nous 85 p. 100 de notre commerce est à destination des États-Unis, dont 85 p. 100 provient du secteur de l'automobile.

Ces décisions se prennent aujourd'hui même, et il nous faut quelqu'un vers qui nous pouvons nous tourner. Lorsque ce comité du Cabinet se réunira la prochaine fois, vous pourriez peut-être lui proposer de nommer un responsable ou de se concentrer sur ce problème. Encore une fois, il faut inverser le cap, afin que la sécurité et le commerce transfrontalier aillent de pair, et que l'on cesse d'opposer la sécurité au commerce. Il faut changer ces titres dans la presse, car le message qu'ils transmettent est que la frontière ne marche pas, que ce soit vrai ou non. Il faut changer la teneur de ces titres.

Je ne sais pas si vous pouvez me répondre quelque chose.

M. Marc Lortie: En ce qui concerne la frontière, ce que vous dites...effectivement c'est la façon dont nous abordons le problème. Il n'y a pas contradiction entre la sécurité et les échanges commerciaux, avec toutes les conséquences économiques qui en découlent. Il faut travailler là-dessus. C'est bien l'intention des deux parties—je peux vous l'assurer. Lorsque le président et le premier ministre en ont discuté le 24 septembre, cela bien été leur message aux deux administrations, à savoir qu'il faut assurer que le fonctionnement de la frontière ne devienne pas un obstacle à la prospérité économique, de part et d'autre de la frontière. Je pense qu'il est très important de travailler en ce sens.

Mme Susan Whelan: Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais vous devez comprendre que c'est déjà un obstacle en ce moment pour les entreprises.

Lorsque je lis l'article dans le Windsor Star d'aujourd'hui, lorsque je parle au président de la Chambre de commerce, comme je l'ai fait aujourd'hui à Windsor, lorsque je parle aux entreprises qui m'appellent et que j'entends leurs difficultés et les problèmes qu'elles rencontrent...il faut agir beaucoup plus rapidement pour régler ce problème à la frontière.

Voyons d'un peu plus près le fonctionnement de la frontière. Je trouvais déjà que les délais d'attente avant le 11 septembre étaient inacceptables. Nous savons qu'il y avait une campagne de lobbying en cours pour que les Américains mettent en place davantage de douaniers avant le 11 septembre. Cela dit, je ne pense pas que le côté canadien ait été aussi efficient qu'il l'aurait pu, non plus, avant le 11 septembre. Je ne pense donc pas que l'on puisse dire que les délais d'attente avant le 11 septembre, et qui persistent, étaient acceptables, ni qu'ils sont acceptables aujourd'hui, vu la baisse de trafic.

Par exemple, j'ai des statistiques concernant le pont Ambassador montrant que du 11 au 30 septembre 2000, 462 765 voitures ont franchi le pont. Du 11 au 30 septembre 2001, le chiffre a été de 245 543, soit 217 222 voitures de moins. Donc, pendant les 19 jours qui ont suivi le 11 septembre, il y a eu une baisse de 47 p. 100 du trafic franchissant le pont Ambassador. Dans le cas des camions, pendant ces mêmes 19 jours, la baisse totale a été de 20 p. 100, soit 43 977 camions de moins. Ce recul de 20 p. 100 me montre que l'industrie connaît un réel problème.

La question que je me pose, avec toute cette baisse de trafic, est de savoir pourquoi il y a toujours des délais d'attente à l'entrée au Canada? Qu'allons-nous faire pour éviter que ces délais, qui sont déjà inacceptables, augmentent lorsque, comme je l'espère, le trafic reprendra, car il n'a pas encore retrouvé son niveau normal. Nous voulons qu'il retourne à son niveau normal. Je m'inquiète de voir que les délais restent aussi longs aujourd'hui qu'ils l'étaient avant le 11 septembre alors que, comme je viens de vous le dire, il y a 47 p. 100 de voitures et 20 p. 100 de camions en moins. Que va-t-on faire à cet égard?

M. Denis Lefebvre: Je suis en désaccord avec vous et ne considère pas que les délais d'attente à Windsor, au pont Ambassador, soient inacceptables. Il y a eu quelques exceptions et il y en aura toujours. On ne peut pas avoir un niveau de personnel pour faire face aux pires pointes de trafic—c'est impossible. Mais comme vous l'avez vu dans les diagrammes, nous avons déployé des efforts extrêmes pour garder au minimum les délais d'attente depuis le 11 septembre, sauf peut-être les tout premiers jours après les événements. Nous avons augmenté pour cela les effectifs, selon les besoins.

Je ne nie pas que la baisse du trafic nous a aidés en cela mais nous sommes confiants qu'à l'avenir il va remonter. Certaines tendances montrent déjà qu'il remonte lentement. Nous prendrons à l'avenir, comme nous l'avons fait dans le passé, les mesures qui s'imposent pour que les délais d'attente restent à un niveau acceptable.

• 1625

Mme Susan Whelan: Monsieur Lefebvre, vous et moi allons devoir faire le constat de notre désaccord à ce sujet. D'ailleurs, je ne suis pas du tout d'accord avec ce que vous avez dit dans une conversation antérieure, lorsque vous avez comparé les délais d'attente au pont entre Hull et Ottawa aux délais d'attente sur le pont Ambassador. Je pense que les Canadiens seraient ébahis de penser que l'on compare ces deux ponts, lorsqu'on sait qu'un tiers de tout le commerce extérieur canadien passe par le pont Ambassador.

Cela dit, votre site Internet continue toujours de vanter les avantages de CANPASS. Je ne conteste pas que CANPASS était un programme merveilleux, mais je pense que nous devons essayer de revenir à cet objectif, qui était de séparer le trafic à haut risque et celui à faible risque, et les voyageurs et véhicules commerciaux. S'il faut mettre en place une vérification de sécurité renforcée pour rétablir le système CANPASS, alors il ne faut pas hésiter. Si nous pouvions remettre en service CANPASS grâce à une vérification de sécurité renforcée, pour ces Canadiens qui vivent au Canada pendant 18 ou 16 heures de la journée et travaillent aux États-Unis les huit heures restantes—ils vivent chez nous, ils vivent parmi nous, ils sont Canadiens; il se trouve simplement qu'ils travaillent de l'autre côté de la frontière. Je ne vois pas en quoi ils pourraient menacer la sécurité de quiconque, car ils sont Canadiens, ou bien immigrants reçus et sont établis chez nous.

Si l'on pouvait procéder à une vérification de sécurité renforcée, sans attendre, de façon à remettre en service ce programme, alors nous pourrions concentrer nos ressources sur les voyageurs à haut risque, sur ceux dont nous ne sommes pas sûrs, ceux visés par le PSCA. Mais aussi longtemps que l'on continue à mettre dans le même sac les voyageurs à haut risque et à faible risque, vous aurez des délais d'attente inacceptables.

Lorsque je reçois des appels à mon bureau de gens qui se plaignent d'attendre une heure et demie pour pouvoir revenir au Canada, quelque chose ne tourne pas rond. Lorsque je reçois des appels disant que des camions font la queue pendant une heure et demie pour passer la frontière...je ne sais pas combien il vous en coûte lorsque vous arrivez une heure et demie en retard au travail, mais je peux vous le dire, il en coûte à DaimlerChrysler et à Ford 1,5 million de dollars chaque fois qu'ils doivent arrêter leur chaîne de montage pendant une heure.

Au cas où vous ne le sauriez pas, Ford Engine, par exemple, dispose de quatre heures entre le moment où un moteur est assemblé et son arrivée sur une ligne d'assemblage dans une autre usine. Et, dans cet intervalle, il doit être chargé sur un camion et doit traverser la frontière par le pont. Dès que vous avez un délai d'attente à la frontière, toute la production s'arrête et notre économie souffre. Je pense donc qu'aucun délai d'attente n'est acceptable.

Le président: Une dernière réponse, monsieur Lefebvre, avant de passer à Mme Lalonde.

M. Denis Lefebvre: Je dirai juste deux choses.

Premièrement, le fait qu'il y ait un délai sur un pont ne signifie pas nécessairement qu'il est causé par les Douanes. L'exemple du pont d'Ottawa que je vous donnais était pour montrer que n'importe quel pont peut être un goulot d'étranglement lorsque la circulation est intense, et le retard peut être dû au fait qu'il n'y a qu'un seul pont, au lieu de deux.

Une autre chose que je voulais dire...

Le président: Je suis sûr que vous aurez une autre occasion de le faire.

[Français]

Madame Lalonde.

Mme Francine Lalonde: J'ai plusieurs questions et des remarques. Je vais essayer de faire vite parce que c'est une matière extrêmement intéressante. Je signale au président qu'hier, au Comité des affaires étrangères, j'avais souligné que cette étude, quant à moi, devait être faite par le comité, parce qu'elle ne comporte pas que des dimensions commerciales, mais aussi des dimensions proprement d'affaires étrangères. Autrement, je pense qu'il n'y aurait pas eu ces retards. Nous nous reprendrons.

Je parle des objectifs de la présentation. J'aurais aimé avoir la différence dans les volumes de circulation et dans le temps requis pour traverser la frontière avant et après. On ne nous donne des statistiques qu'à partir du 11 septembre. Quelle est la différence? Susan nous a dit que même avant le 11 septembre, le temps d'attente était trop long à Windsor, là où il y a le plus de circulation. J'aurais aimé qu'on nous fournisse des renseignements sur les temps d'attente à la frontière depuis le 11 septembre pour les véhicules commerciaux et les véhicules de tourisme. Ça aussi, j'aurais aimé le savoir, et j'aurais aimé discuter des options et des mesures visant à réduire au maximum tout retard supplémentaire.

Je n'ai pas le sentiment que vous nous avez donné ces options-là et je serais intéressée à les avoir. Il me semble que pour en arriver là, il faut savoir ce qui a provoqué les retards. Qu'est-ce que les douaniers américains cherchaient? Tu as dit «à bas risque, à haut risque». Il est certain que le 11 septembre a fait que les Américains cherchaient aussi bien chez les chauffeurs que dans les chargements et, évidemment, chez les passagers ou les gens qui voyageaient seuls. J'aimerais savoir, succinctement, ce qu'ils cherchaient.

• 1630

Il y a aussi un fait qui a été porté à notre attention. À Lacolle où, selon les statistiques, les choses sont censées aller assez bien, il y a eu plusieurs journées où il y avait des kilomètres de camions qui attendaient, et on a eu plusieurs représentations de la part de commerçants et de diverses associations d'hommes d'affaires.

Enfin—et cela mettra un terme à mon premier tour de questions—, ce qui est surprenant, c'est que les douaniers américains, selon des témoignages reçus, inspectaient non seulement à l'entrée des États-Unis, mais aussi à la sortie, ce qui en dit long sur la confiance qu'ils ont.

J'aimerais avoir quelques explications sur ces divers éléments, et je reviendrai, monsieur le président.

M. Denis Lefebvre: Très rapidement et en gros, vous allez voir les temps d'attente lorsque vous aurez vu toutes les diapositives. Pour ce qui est des voyageurs, de façon générale, il y a en certainement 30 p. 100 de moins depuis le 11 septembre. Pour le camionnage, dans les premiers jours, c'était arrêté, mais depuis le 15 ou le 16 septembre, ça varie selon les ports. C'est peut-être à 90 ou à 95 p. 100 et ça va même quelquefois jusqu'à 100 p. 100. Parfois, c'est un peu moins, en général.

Les Américains étaient dans un état d'alerte extrême. Oui, à un moment donné, ils ont fait des fouilles à l'exportation aussi bien qu'à l'importation, parce que les renseignements qu'ils avaient voulaient qu'ils fassent ces fouilles-là. Alors, ils ont tout simplement exercé leur pouvoir discrétionnaire pour assurer leur sécurité, et on ne peut pas répondre de ce qu'ils ont fait.

Mme Francine Lalonde: Et quelle était la différence de temps entre avant le 11 septembre et après?

M. Denis Lefebvre: Évidemment, il y a eu des perturbations majeures dans la semaine du 11 septembre. Depuis ce temps-là, il y a eu d'autres perturbations, je ne le cacherai pas, mais en gros, on a maintenant des délais acceptables partout au pays, sauf dans le cas d'exceptions incontrôlables.

Mme Francine Lalonde: Quand on regarde l'ensemble des tableaux, on constate à la fin qu'il y a beaucoup de temps d'attente. Il y a eu un sommet tout de suite après le 11 septembre. Il y a ensuite eu une baisse, probablement parce que le volume a été moins gros, mais quand le volume a repris, il y a eu de nouveau des attentes importantes. J'ai regardé plus d'une fois, et c'est l'état de la situation.

M. Denis Lefebvre: Il faut faire attention de distinguer entre les attentes vers le sud et celles vers le nord.

Mme Francine Lalonde: J'ai regardé cela, mais comme on étudie la question de la frontière, on s'intéresse aussi à ce qui fait qu'il y a des attentes vers le sud. C'est pour cette raison que je vous disais que si on veut travailler à régler ces questions, il faut savoir ce qui fait que les douaniers américains ont eu les directives qu'ils ont eues. Autrement, on ne réglera rien. Je pense qu'il est même urgent de savoir ce qu'ils pourraient faire. Je sais qu'au ministère, ils y ont travaillé. C'est pour cela que je m'attendais à voir les options et les mesures qui permettraient de réduire au maximum le temps d'attente dans les deux sens.

M. Denis Lefebvre: Si je peux me le permettre, très rapidement, je vais aussi faire allusion à ce que Mme Whelan a dit plus tôt. À moyen terme et même à court terme, nous croyons que la solution pour réduire les temps d'attente, pour faciliter le passage à la frontière dans les deux sens, c'est que les deux administrations, les deux pays travaillent ensemble à développer des programmes conjoints. Nous avons déjà le programme NEXUS pour les passagers, qui est un projet-pilote que nous avons développé avec les Américains, et nous voulons étendre cela à la grandeur du pays pour que les gens qui sont préapprouvés, qui présentent peu de risques puissent passer très rapidement. Cela dégage la frontière et nous donne le temps de nous occuper des gens qui présentent un risque plus élevé.

• 1635

Nous voulons faire la même chose pour le commerce. Nous faisons le maximum d'efforts, en collaboration avec nos collègues américains, pour faire avancer ces initiatives de façon conjointe afin d'augmenter la protection, la facilitation et le passage à la frontière.

Mme Francine Lalonde: Vous parlez des statistiques aussi bien des voyageurs que des camionneurs et de leurs charges. Est-ce qu'il y a plus de gens que d'habitude auxquels on n'a pas permis de traverser la frontière? Avez-vous des statistiques sur ceux à qui on a refusé de traverser la frontière?

M. Denis Lefebvre: Non, je ne crois pas que nous ayons de statistiques là-dessus. Il y a plus de gens qui sont envoyés au ministère de l'Immigration, mais nous n'avons pas de statistiques sur ce qui arrive à ces gens par la suite.

Mme Francine Lalonde: Cela pourrait être intéressant. Je pense avoir une idée de la réponse, mais j'aimerais que vous me disiez ce que vous avez constaté. Est-ce que les citoyens qui sont manifestement issus de l'immigration ont eu plus de difficulté que les autres?

M. Denis Lefebvre: Nous faisons notre travail à partir des renseignements que nous fournissons à nos douaniers. Ces renseignements ont pour but d'aviser nos douaniers des éléments qui peuvent indiquer que certaines personnes présentent un risque plus élevé que d'autres, et cela peut changer de jour en jour. C'est comme ça qu'on fonctionne.

Mme Francine Lalonde: Est-ce que ces indicateurs sont publics? Est-ce qu'on peut les avoir?

M. Denis Lefebvre: Absolument pas.

Mme Francine Lalonde: Absolument pas.

M. Denis Lefebvre: Absolument pas. On prend toutes les sources de renseignements qui peuvent indiquer qu'il y a des risques. Comme je vous le dis, cela vient de tous les corps qui sont chargés de mettre la loi en oeuvre, que ce soit aux États-Unis, à l'étranger ou au Canada. Un de nos buts principaux est de donner aux douaniers de première ligne—il y en a partout au pays, à toutes les heures du jour—les renseignements dont ils ont besoin pour cibler les personnes qui présentent un risque plus élevé. Cela permet aussi, évidemment, de faciliter le passage des gens qui ne présentent pas un risque élevé.

Mme Francine Lalonde: Quand vous parlez d'«acquérir davantage de matériel de détection de la contrebande afin de repérer les personnes et les marchandises à risque élevé», de quoi parlez-vous?

M. Denis Lefebvre: Comme je vous l'ai dit, nous avons des systèmes qui permettent d'acheminer au douanier de première ligne l'information dont il a besoin pour faire son travail de gestion du risque. Dans les centres postaux et de fret aérien, par exemple, nous avons besoin de plus de technologie pour nous permettre d'examiner aussi discrètement que possible le fret qui arrive, pour nous assurer qu'on n'importe pas au pays des denrées qui peuvent être dangereuses.

Mme Francine Lalonde: Je lis ce que vous avez écrit. Vous parlez d'«acquérir davantage de matériel de détection de la contrebande afin de repérer les personnes et les marchandises à risque élevé».

M. Denis Lefebvre: C'est ça. Nous achetons, par exemple, plus d'appareils à rayons X pour les aéroports, pour passer les bagages des gens là-dedans. Nous achetons plus d'appareils à rayons X pour les centres postaux afin qu'on puisse examiner plus de paquets. Nous achetons aussi des machines Ion Scan. C'est la spectrométrie qui nous permet de détecter des explosifs ou des drogues. Ce sont des choses comme celles-là.

Mme Francine Lalonde: Vous parlez aussi de «mettre en place l'Initiative d'information préalable sur les voyageurs/Dossier du passager pour fournir des renseignements clés sur les voyageurs avant leur arrivée». Qu'est-ce que c'est?

M. Denis Lefebvre: En vertu du projet de loi S-23 qui, nous l'espérons, sera adopté très bientôt, nous allons exiger des compagnies aériennes qu'elles nous envoient, dès qu'un avion quitte un autre pays pour venir vers le Canada, la liste des passagers, avec tous les renseignements sur ces passagers qui peuvent nous aider à gérer le risque, à connaître ceux, parmi les passagers, qui présentent un plus haut risque. Lorsque l'avion arrive, des équipes ont déjà analysé cette information, et ça leur permet de concentrer leurs efforts sur les passagers que nous voulons voir et de laisser passer les autres plus facilement.

• 1640

Mme Francine Lalonde: J'ai travaillé à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Il y a des indicateurs et toutes sortes de renseignements qui circulent sur moi. Vous savez qu'on peut faire des erreurs. Deux personnes peuvent avoir le même nom et la même date de naissance, dans la même ville. Comment une personne pourrait-elle vérifier s'il y a atteinte à ses droits personnels?

M. Denis Lefebvre: Nous avons eu plusieurs consultations avec le commissaire à la vie privée lorsque nous avons élaboré cette disposition législative. Nous sommes en train de travailler aux règlements. Les renseignements que nous demandons sont des renseignements que nous pouvons, de toute façon, demander aux voyageurs lorsqu'ils arrivent au pays. Cependant, lorsque nous les avons à l'avance, nous pouvons à la fois assurer la protection des gens et faciliter leur arrivée, parce que nous avons déjà fait beaucoup de travail d'analyse.

Nous aurons des mesures portant sur la non-rétention de cette information pour nous assurer qu'on ne porte pas atteinte indûment à la vie privée des gens.

Mme Francine Lalonde: Mais chacun aura un dossier.

M. Denis Lefebvre: Ce n'est pas nécessairement de l'information que l'on gardera. Si on nous envoie les noms des 300 passagers qui sont sur l'avion, que nous concluons, avant que l'avion n'arrive, qu'il y a trois passagers que nous voulons intercepter et que des mesures sont prises, nous ne garderons pas nécessairement l'information au sujet des 297 autres qui sont entrés au pays.

Mme Francine Lalonde: Est-ce que les maris jaloux pourront consulter cet indicateur?

[Traduction]

Le président: Monsieur Comartin.

Je voudrais simplement rappeler à mes collègues que nous avons encore trois témoins à entendre et qu'il est presque 17 h 30. Plus vos questions seront concises et mieux cela vaudra. Malheureusement, nous sommes obligés d'imposer des limites de temps pendant nos travaux et je suis désolé de ne pas l'avoir fait dès le début.

Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Merci, monsieur le président.

Permettez-moi de commencer par réitérer la sensibilité de ceux d'entre nous qui venons du sud du pays. En fait, nos circonscriptions sont situées au sud des États-Unis. Je vous propose de modifier vos diagrammes dorénavant afin de montrer le trafic en direction du Canada et celui en direction des États-Unis. Ce genre d'erreur, monsieur Brimble, monsieur Lefebvre... Je regarde ces diagrammes et ils sont tout simplement erronés. Vous tirez ces chiffres des États-Unis.

Je ne sais pas d'où les États-Unis tirent ces données, mais si ce diagramme était exact, les pics sortiraient de la page tous les jours, au moins une fois. Il ne s'est pas écoulé un seul jour depuis le 11 septembre où il n'y a pas eu trois ou quatre heures d'attente sur le pont, à moins de fermeture complète de la frontière. Pas un seul jour.

Je vous recommande donc de revoir vos chiffres, et que quelqu'un les recense du côté canadien. Mme Whelan le sait. Certains jours, la file d'attente atteignait sa circonscription...

Mme Susan Whelan: Belle River.

M. Joe Comartin: Belle River, où j'ai grandi. Cela fait 20 milles, 30 kilomètres, jusqu'à la frontière. Cela n'apparaît pas ici. Cela devrait être répercuté ici; chaque jour, cet espace ici serait rempli. Vos chiffres sont inexacts.

Je peux donc vous dire, monsieur Lefebvre et monsieur Lortie, que si vous établissez vos plans sur la base de ces données, et si vous allez voir les Américains pour leur dire: «Vous devez faire quelque chose, vous devez placer des effectifs et des ressources à ce poste frontière», et s'ils regardent ces chiffres, ils vont vous ignorer. C'est ce que je ferais à leur place. Je vous répondrais: «Les choses n'ont pas l'air si problématiques. Tout va bien.» Mais tout ne va pas bien.

La réalité est que nous avons là un problème économique majeur. Lorsque je regarde cela, je me dis que vous n'en avez pas conscience, parce que vous vous fiez à ces statistiques, qui sont erronées.

Laissez-moi dire un dernier mot sur la validité de ces tableaux. Ils ne montrent pas un autre phénomène que l'on constate, à savoir qu'une bonne partie du trafic voyageurs a été transféré vers le tunnel de Windsor. Donc, là aussi on constate des pics. J'étais à Windsor lundi et mardi de cette semaine. Il y avait des délais d'attente de deux heures pour la traversée du tunnel. C'est dû au fait que les voitures qui empruntaient précédemment le pont—en particulier les voyageurs, les voitures particulières—sont détournées vers le tunnel. Ce n'est pas une décision des autorités, les gens le font de leur propre chef.

Si vous allez faire un tel travail, procurez-vous également ces chiffres-là. Mardi dernier encore, avant mon départ de là-bas, entre 8 heures et 10 heures, il y avait deux heures d'attente au tunnel et un délai similaire au pont. C'est pourquoi je dis que vos chiffres sont tout simplement erronés. Si vous allez dresser vos plans sur cette base, si vous allez négocier avec les Américains sur cette base, vous n'arriverez à rien.

• 1645

Cela étant dit, ma question est de savoir si nous pouvons obtenir de meilleurs renseignements, mais en faisant le travail nous-mêmes, du côté canadien de la frontière? Les chiffres que vous transmettent les Américains ne sont tout simplement pas exacts.

M. Denis Lefebvre: Nous vérifions les chiffres. Les douanes américaines ont un site Internet, tout comme le gouvernement ontarien. Nous vérifions les chiffres auprès de toutes ces sources et tous concordent à peu près.

M. Joe Comartin: Je ne sais pas dans quelle mesure vous allez suivre ma suggestion, mais vous devriez poster quelqu'un à la frontière, car je ne sais pas par quel autre moyen vous pourriez obtenir des renseignements exacts. Si l'Ontario vous communique les mêmes chiffres, je peux vous le dire, ils sont faux.

Permettez-moi de passer à l'autre aspect que je voulais aborder, et ce sera ma dernière question à ce stade, monsieur le président. Il s'agit des ressources déployées du côté américain.

D'après les chiffres dont je dispose—et je suis d'accord avec Mme Whelan, nous ne faisons pas assez, mais au moins nous faisons beaucoup plus que les Américains—nous avons à peu près 225 à 240 employés du côté canadien pour effectuer les contrôles et les inspections et tout le reste, alors que les Américains n'ont environ que le tiers, de l'ordre de 60 à 70 employés. Est-ce que ce chiffre est exact? Si oui, ou même s'il approche de la réalité, avez-vous quelque indication que les Américains vont augmenter les effectifs, comme ils l'ont fait les premiers jours après le 11 septembre, pour faciliter le passage du Canada aux États-Unis?

M. Denis Lefebvre: D'après les discussions que nous avons eues avec nos collègues, ils espèrent que les projets de loi qui ont été déposés au Congrès permettront d'augmenter les effectifs et d'accélérer la circulation.

M. Joe Comartin: Si ces crédits se matérialisent, avons-nous une idée du temps qu'il leur faudra pour former et déployer ces effectifs?

M. Denis Lefebvre: Non.

Le président: Monsieur McNally.

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, PC/RD): Merci, monsieur le président.

Je n'ai guère été consolé par les réponses que nous avons reçues aujourd'hui et je partage nombre des préoccupations exprimées par Mme Whelan et M. Comartin.

Nous devons maîtriser cette situation très rapidement car elle a un effet désastreux sur l'économie de notre pays et nos collectivités. Ma circonscription est à 20 kilomètres de la frontière et nous aussi ressentons l'impact, comme toute la région autour de Vancouver. Il faut trouver un juste milieu entre la sécurité et les échanges commerciaux, comme Mme Whelan l'a mentionné. Comme le commissaire de l'INS l'a annoncé hier, ils veulent avoir un mécanisme de contrôle des entrées et sorties intégré, recensant chaque personne qui entre et sort des États-Unis. Ils vont mettre cela en place et nous avons intérêt à nous y préparer, car cela aura des répercussions énormes sur chacune de nos circonscriptions et sur notre économie.

Je suis inquiet de voir que nous n'avons pas de plan coordonné en place dès maintenant, englobant l'infrastructure routière et les autres installations aux alentours des postes frontière avec les États-Unis.

Rassurez-moi, dites-moi que l'on va mettre en place un système complet, intégré, permettant le partage de l'information entre les États-Unis et le Canada dès que ce sera nécessaire. Ils veulent pouvoir contrôler qui entre aux États-Unis et qui en sort. Réfléchissons-nous à cela? Allons-nous déployer les ressources voulues pour avoir un système intégré? Si nous ne le faisons pas, je pense que Mme Whelan a raison, que beaucoup d'entreprises vont simplement lever le camp et s'installer de l'autre côté de la frontière, sans intention de retour. Si nous n'agissons pas vite, nous aurons des problèmes.

Je vous en prie, donnez-moi l'assurance que nous travaillons à des programmes de coopération concrets, que l'on annoncera des mesures exhaustives très prochainement, assortis d'échéances fermes et rapprochées.

• 1650

M. Marc Lortie: Je peux vous assurer que le gouvernement partage vos préoccupations et que c'est dans cet esprit que nous travaillons en ce moment même avec les autorités américaines. Je vous rappelle la prochaine réunion entre le ministre Manley et le gouverneur Ridge, et la gestion de la frontière y sera abordée, d'autant que du côté américain c'est lui qui exerce la responsabilité globale, du moins sur le plan de la coordination.

De notre côté, que ce soit les services d'immigration, les services douaniers et les services de renseignements, c'est dans cet esprit que nous travaillons actuellement avec les Américains, en vue d'un partage de l'information, afin d'assurer la sécurité des Canadiens et des Américains, de part et d'autre de la frontière, et veiller en même temps qu'il n'y ait pas d'entrave à la libre circulation des marchandises et de barrières à la prospérité des deux côtés de la frontière.

Je peux vous dire, et ce n'est pas à la légère, que s'il est vrai que vos collectivités se trouvent confrontées en première ligne aux conséquences économiques, les conséquences économiques du 11 septembre ne s'arrêtent pas aux zones frontalières; elles se font sentir à travers tout le Canada, du nord au sud, et aussi dans le monde entier.

Nous devons aujourd'hui aussi nous préoccuper des îles des Caraïbes. Nous avons des pays amis dans les Caraïbes dont le revenu provient principalement du tourisme. Or, l'industrie touristique dans les îles est en recul de 65 p. 100. Quelles seront les conséquences sur nos relations avec les Caraïbes?

On peut dire la même chose de l'Amérique du Sud ou de l'Europe occidentale. Les conséquences du 11 septembre, les répercussions, sont très lourdes, et pas seulement dans les zones frontalières, mais partout. L'impact est très dur. C'est pourquoi, je peux vous le dire, nous travaillons sans relâche avec tous les services ministériels pour assurer que la gestion de la frontière n'empire pas les difficultés que tout le monde connaît déjà. Voilà l'esprit dans lequel nous travaillons, et je pense que nous allons y arriver.

J'ai oublié de mentionner deux choses dans mon exposé. Nous avons élaboré, de concert avec le secteur privé canadien—et je crois que vous entendrez des témoins du secteur privé—après une série de réunions avec lui, une stratégie pour ouvrir un dialogue avec le côté américain et prévenir l'invocation de l'article 110, et nous reconstruisons cette coalition avec le secteur privé.

Nous devons faire la même chose avec les provinces. Nous avons mis en marche le processus avec les provinces et nous y travaillons.

Le premier ministre Campbell était en ville il y a 48 heures. Il a rencontré le premier ministre et le ministre Manley et offert la pleine coopération des provinces. De fait, la collaboration entre les provinces et les États américains frontaliers, les gouverneurs et les assemblées législatives, est essentielle, afin de mettre sur pied une vaste coalition du côté américain et obtenir une gestion saine et efficiente de la frontière du côté américain et mettre en place un environnement sûr de part et d'autre à partir duquel on puisse progresser.

Le président: Merci beaucoup. Nous n'avons plus de temps, nous devons passer à nos prochains témoins.

Je vous remercie infiniment d'être venus, au nom du comité. Comme vous l'avez entendu et constaté, il règne une profonde inquiétude au sujet du bien-être de nos collectivités, tant sur le plan commercial que celui de la sécurité. Il faut trouver un équilibre. Ce que vous nous avez dit aujourd'hui est très rassurant et nous espérons que vous reviendrez, selon les besoins, pour faire le point des progrès réalisés.

Nous allons faire une pause d'une minute avant de passer à nos prochains témoins. Merci encore à tous, au nom de tout le monde ici.

• 1654




• 1656

Le président: Nous sommes prêts à commencer. Merci beaucoup.

Je demanderai à mes collègues de bien vouloir s'asseoir. Les témoins suivants sont les Manufacturiers et exportateurs canadiens, représentés par M. Perrin Beatty; l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, dont le porte-parole est M. David Adams; et l'Alliance canadienne du camionnage, qui nous envoie MM. David Bradley et Massimo Bergamini.

M. Perrin Beatty n'est pas un étranger pour la Chambre. Nous vous souhaitons la bienvenue. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir ainsi répondu à l'appel que nous vous avons lancé. Le préavis a été très court, mais nous apprécions beaucoup qu'étant donné l'urgence de la situation vous ayez accepté de venir nous rencontrer et de nous faire une présentation.

Nous allons fonctionner comme précédemment. Nous entendrons les différents témoins, puis nous passerons aux questions. J'ose espérer que nous pourrons terminer avant 17 h 30.

Monsieur Beatty, vous avez la parole.

M. Perrin Beatty (président-directeur général, Manufacturiers et exportateurs canadiens): Monsieur le président, je ne sais trop comment vous aimeriez que nous gérions le temps dont nous disposons ici. J'ai en effet une déclaration. S'il était préférable pour vous que je dépose tout simplement ma déclaration, qu'on la fasse annexer aux procès-verbaux et témoignages et que mon intervention soit un peu plus informelle, je serais très heureux de procéder ainsi, car je suis en train de me demander si tous mes collègues auront l'occasion de...

Le président: Très juste. Les députés sont-ils d'accord pour que nous considérions la déclaration comme faisant partie des procès-verbaux et témoignages?

Des voix: D'accord.

Le président: Formidable. C'est parfait, monsieur Beatty.

M. Perrin Beatty: Je pourrai de cette façon faire une déclaration beaucoup plus courte.

Le président: Excellent.

Merci.

Déclaration de l'honorable Perrin Beatty (président-directeur général, Manufacturiers et exportateurs canadiens (MEC)):

Merci, monsieur le président.

Je suis Perrin Beatty, président-directeur général de Manufacturiers et exportateurs canadiens. Je suis heureux de vous faire part des préoccupations de nos membres concernant les délais d'attente à la frontière canado-américaine. Les membres de MEC fabriquent 75 p. 100 de la production industrielle canadienne et 90 p. 100 de nos exportations, si bien que leurs problèmes revêtent une envergure économique nationale.

[Français]

Les exportations ont contribué presque la moitié du produit intérieur brut du Canada l'an dernier. Quatre-vingt-six p. 100 des exportations canadiennes étaient destinées aux États-Unis, notre plus grand marché. Nous vendons plus de nos produits manufacturés aux États-Unis que nous n'en consommons ici—65 p. 100 de la production manufacturière du Canada est vendue aux États-Unis.

[Traduction]

Les échanges internationaux sont le sang qui irrigue l'économie canadienne. Les principales artères par lesquelles ce sang circule sont les ponts, les autoroutes et les chemins de fer qui traversent notre frontière sud.

La prospérité canadienne est tributaire de notre relation commerciale avec les États-Unis. Cette dernière, à son tour, dépend de la facilité de circulation des marchandises et personnes à travers la frontière canado—américaine.

La frontière est plus qu'une simple ligne sur une carte. Elle constitue le point de rencontre et d'intersection de la souveraineté et des intérêts économiques de deux économies performantes, ouvertes sur l'extérieur. Nous devons veiller à ce qu'elle ne devienne pas plutôt un axe de collision.

À l'ère de la production à flux tendus, les entreprises canadiennes sont tributaires de la circulation sans heurts des avions, trains et camions, ainsi que de la mobilité du personnel qui assure le service après-vente à l'égard des marchandises vendues de par et d'autre de la frontière. Chaque minute de chaque jour, nos deux pays s'échangent pour un million de dollars de marchandises et 200 millions de personnes franchissent notre frontière commune chaque année. De fait, les États-Unis font transiter davantage de marchandises, dans les deux sens, par le pont Ambassador entre Windsor et Detroit qu'ils n'en échangent avec aucun autre pays.

Les retards à la frontière nuisent à la productivité et alourdissent les coûts de production au Canada. Ils pénalisent nos exportations et mettent en danger des milliers d'emplois canadiens. Si la frontière devient une barrière à la circulation des marchandises et des personnes, non seulement va-t-elle étranger nos exportations, mais elle va également ralentir le flux de l'investissement étranger direct au Canada. Sans l'accès facile au marché américain, les sociétés étrangères seront réticentes à s'implanter chez nous.

Il existait déjà des problèmes à la frontière canado-américaine avant le 11 septembre, les camions et voyageurs d'affaires se heurtant fréquemment à des longs délais d'attente inutiles. On estime que les temps d'attente à un seul poste frontière, celui de Fort Érié en Ontario, coûtaient déjà 2,5 millions de dollars par jour aux expéditeurs.

Par l'intermédiaire de son comité permanent des douanes et de l'accès au marché, MEC a été le moteur de l'élaboration du programme d'autocotisation des douanes, le PAD, et de CANPASS. Nos membres ont également isolé un certain nombre de domaines stratégiques exigeant des améliorations. Parmi ces impératifs, citons en particulier:

- la mise en oeuvre immédiate du PAD, de NEXUS et de CANPASS et d'autres programmes de pré-dédouanement afin de réduire au maximum les formalités à la frontière;

- la mise en place de voies spéciales pour les camions dont les papiers sont en règle ou qui ont été prédédouanés;

- l'intégration accrue des inspections et installations douanières canadiennes et américaines;

- un plus grand investissement dans les ressources et l'infrastructure frontalière, notamment en matière d'effectifs et de formation;

- une collaboration plus étroite entre les douanes et les exportateurs, importateurs, courtiers et expéditeurs, afin de simplifier et clarifier les règles et les exigences en matière de documentation; et

- un engagement renouvelé du Canada et des États-Unis à conclure un accord frontalier.

Depuis le 11 septembre, il est devenu encore plus urgent de régler les problèmes à la frontière canado-américaine. Les mesures de sécurité américaines ont ralenti la circulation à la vitesse d'un escargot pendant les jours qui ont suivi les attaques terroristes contre les États-Unis. Ces retards ont été coûteux et ont contraint certaines usines canadiennes à réduire ou à arrêter temporairement la production. Mais surtout, il nous ont donné un aperçu de ce qui nous attend à l'avenir si nous ne prenons pas des mesures efficaces, de concert avec nos voisins américains, pour protéger nos pays contre le terrorisme.

J'ai entendu dire récemment que ces attentats terroristes signifient que la livraison juste à temps est une chose révolue. Rien n'est plus loin de la vérité. Nos clients américains continueront à exiger la livraison juste à temps et ils choisiront comme fournisseurs ceux qui peuvent l'assurer. Il dépendra de notre capacité à résoudre les problèmes frontaliers que ces fournisseurs soient canadiens ou non. Des milliers d'emplois sont dans la balance.

Suite au 11 septembre, notre association a adopté une démarche à trois volets pour s'attaquer aux problèmes frontaliers et faire en sorte que le gouvernement fédéral comprenne l'inquiétude des milieux de l'industrie et des affaires canadiens. Nous avons formé un groupe de travail composé de membres de MCE chargé de piloter notre politique et notre stratégie relativement aux problèmes frontaliers; mis sur pied un groupe de travail conjoint avec nos homologues américains, la National Association of Manufacturers, pour examiner les principaux enjeux; et rassemblé les dirigeants d'associations professionnelles et d'entreprises au sein d'une large coalition traitant de ces questions.

J'aimerais consacrer les dernières minutes de mon exposé aux activités de la Coalition pour une frontière sûre et propice au commerce. Plus de 40 associations et grandes entreprises ont participé à la réunion fondatrice le 3 octobre. Nous pensons qu'une sécurité accrue facilitera les échanges à condition que les mesures prises de part et d'autre de la frontière inspirent confiance. L'objectif devrait être de faciliter la passage des biens et voyageurs légitimes, les ressources étant concentrées sur la répression des activités illégales.

À cette fin, la coalition explore l'idée d'un périmètre de sécurité qui puisse soulager la pression s'exerçant actuellement sur le 49e parallèle. Le but est triple: recommander des façons de renforcer la sécurité et la recherche de renseignements au Canada, ainsi que les contrôles d'immigration et la détermination du statut de réfugié; promouvoir la coopération entre le Canada et les États-Unis et d'autres alliés afin d'empêcher l'entrée des terroristes, migrants clandestins, marchandises de contrebande et illégales dans nos pays; enfin, recommander des mesures immédiates afin de faciliter le passage à la frontière canadienne des biens et personnes à faible risque.

Nous pensons que l'industrie doit prendre l'initiative. L'objectif n'est pas de revenir à la situation frontalière telle qu'elle était à 8 h 30 du matin le 11 septembre, mais plutôt de régler les problèmes qui menaçaient déjà alors notre commerce et sont devenus maintenant urgents.

Les postes frontières les plus importants ne pouvaient déjà faire face au volume de trafic avant le 11 septembre et ce serait folie que de retourner à un système qui était déjà largement défectueux. Le moment est venu de le réparer.

[Français]

La coalition et les Manufacturiers et exportateurs du Canada travailleront de concert avec les gouvernements afin de développer des solutions qui reconnaissent que la sécurité canadienne et l'efficacité de nos frontières sont des questions connexes.

[Traduction]

Les membres de la coalition sont convaincus que le Canada, en tant qu'État souverain, doit prendre l'initiative afin de résoudre le problème de la frontière, au lieu de se contenter de réagir aux événements extérieurs. En agissant avec audace et détermination, le Canada peut démontrer que nous sommes un élément de la solution et non du problème et assurer la sécurité et la prospérité de nos citoyens. Je compte présenter au gouvernement dans un avenir proche les recommandations de la coalition.

Les échanges entre le Canada et les États-Unis contribuent chaque année davantage à la prospérité de nos citoyens, ce qui ne fait que rendre plus urgent l'impératif de procédures douanières plus simples, plus rapides, plus rationnelles et moins coûteuses. Cela était déjà apparent avant le 11 septembre et est devenu encore plus évident depuis.

Le président: Veuillez poursuivre, je vous prie, monsieur Beatty.

M. Perrin Beatty: Monsieur le président, permettez-moi tout d'abord de vous remercier tous et chacun de m'avoir invité à venir vous rencontrer. Je suis ravi d'avoir ainsi l'occasion de comparaître devant vous au nom de nos membres.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les témoignages plus tôt cet après-midi et les questions que vous-même et vos collègues avez posées. J'imagine que si j'avais un seul message pour vous, pour le comité et pour vos délibérations, ce serait le suivant: que notre objectif ne devrait pas être de remettre les choses comme elles étaient à 8 h 30 le 11 septembre. Le système à la frontière ne fonctionnait pas bien à l'époque; la machine peinait. Les choses s'aggravaient au fil du temps et le commerce entre le Canada et les États-Unis augmentait à un taux annuel d'environ 10 p. 100. À un certain nombre de points de passage clés que les députés ont mentionné dans le courant de l'après-midi, on était littéralement en train d'étouffer vu les volumes d'échanges qui se faisaient.

Notre objectif devrait être de corriger certains des problèmes qui existaient bien avant le 11 septembre au lieu de remettre les choses comme avant. Nous pouvons le faire, mais pour réussir, il faudra que notre pays fasse preuve d'imagination et de courage. Cela exigera également la coopération entre les secteurs privé et public et une très étroite collaboration avec nos collègues américains des secteurs public et privé.

Je suis convaincu que nous pourrons réussir. Dans le cadre de la discussion de cet après-midi nous avons entendu parler de compromis entre la sécurité et la liberté de mouvement. Je ne pense pas qu'il s'agisse de choisir ou tout l'un ou tout l'autre: ou nous nous occupons à notre satisfaction et à celle de nos collègues américains du problème sécuritaire, ou nous ne jouissons plus de la liberté de mouvement qui nous est essentielle pour protéger les emplois dans ce pays.

Étant donné l'importance pour notre économie de notre capacité de livrer nos produits sur les marchés, il est absolument impératif que nous agissions, et ce avec courage et mûs par ce sentiment d'urgence, pour apporter les changements nécessaires.

• 1700

Cela exige, monsieur le président, que vous les députés et nous tous soyons prêts à réexaminer ce que signifie la frontière en ce XXIe siècle, comment nous pouvons retirer le maximum d'avantages de notre relation commerciale, qui a été si importante pour les emplois au Canada et la prospérité au cours des dernières années; et comment tirer le meilleur parti de la relation que nous avons bâtie avec les États-Unis. Comme Mme Whelan l'a indiqué plus tôt, quelque 87 p. 100, il me semble, de nos exportations l'an dernier étaient destinées aux États-Unis. Il s'agit là tout simplement d'une base sur laquelle construire.

Nous avons le potentiel de faire beaucoup plus que cela, mais il faut de l'imagination et une vision. Nous ne pouvons pas y aller par petits bouts. Je ne pense pas que nous puissions tout simplement rajuster le tir à la frontière. Je pense que ce qu'il nous faut c'est faire preuve de beaucoup plus d'imagination dans notre façon d'aborder toute la question du mouvement de personnes et de marchandises de part et d'autre de la frontière canado-américaine. Ce qu'il faut c'est que nous jetions un regard neuf sur la façon de veiller à la sécurité de l'Amérique du Nord et de nos citoyens.

J'aimerais traiter très brièvement de cette question, si vous permettez, car je suppose que la préoccupation fondamentale pour nous autres Canadiens est celle de savoir si nous habitons une maison à l'épreuve du feu. Si nous avons des raisons de croire que le Canada ne sera ni une base pour l'organisation d'actes terroristes ni la cible de tels actes, alors peut-être que nous n'avons rien à craindre. Si les attaques lancées le 11 septembre sur Washington et New York avaient eu pour cible Ottawa et Toronto, et si nous sommes convaincus que nous aurions fait beaucoup mieux que les Américains, alors nous n'avons rien à craindre.

Mais si nous croyons que le terrorisme international, de par sa nature même, menace également nos citoyens et exige que nous prenions des mesures pour veiller à ce que nos citoyens soient protégés comme il se doit, alors il est important pour nous, en tant que pays souverain, d'examiner des moyens de veiller à assurer la sécurité de tous nos citoyens beaucoup plus efficacement à l'avenir que par le passé. Sur le front sécurité, donc, il est essentiel que nous progressions.

Sur le front du commerce, en ce qui concerne le maintien d'une frontière ouverte entre le Canada et les États-Unis, il est essentiel que nous progressions. Pour notre pays, qui dépend beaucoup plus du commerce international que tous les autres pays du G-7 et pour qui les États-Unis comptent pour 87 p. 100 des ventes, il est essentiel que nous cherchions à améliorer la situation.

Nous le pouvons. Nous le pouvons en assurant au départ un bien meilleur tri avant même que les gens n'arrivent en Amérique du Nord. S'agissant du terrorisme international, il est infiniment plus efficace, lorsque cela est possible, de nous attaquer au problème à l'étranger que d'essayer de traiter avec ces personnes une fois qu'elles sont arrivées ici. Cela est logique lorsqu'on parle de terrorisme international.

La question de la souveraineté est soulevée de temps à autre. Monsieur le président, c'est un acte de souveraineté pour le gouvernement, au nom des citoyens du pays, de prendre des mesures pour protéger leur sécurité. C'est là la première responsabilité d'un pays souverain. Par définition—et je m'adresse à vous en tant qu'ancien solliciteur général, ancien ministre du Revenu national et ancien ministre de la Défense nationale et des Affaires étrangères—nous n'aurons jamais au Canada suffisamment de ressources pour pouvoir agir seuls pour assurer la sécurité des Canadiens. Nous n'aurons jamais suffisamment de ressources pour infiltrer les cellules terroristes ailleurs dans le monde pour voir si quelqu'un n'est pas en train de monter un coup contre des intérêts canadiens.

La seule façon pour un pays, quel qu'il soit, même un pays doté des ressources dont disposent les États-Unis, de contrer efficacement les menaces de terrorisme international est d'agir conjointement avec des pays qui partagent nos conceptions. C'est ce qu'il faut faire s'agissant d'améliorer la sécurité de l'Amérique du Nord. Nous ne pouvons pas compter sur un filet érigé le long d'une frontière entre le Canada et les États-Unis, longue de plusieurs milliers de kilomètres, et qui peut être traversée à pied, en avion, en bateau, en camion, en autobus, en motoneige, en traîneau à chiens ou à la nage. Cela ne pourra jamais fonctionner ainsi. Il serait bien plus efficace pour nous de chercher tout d'abord des moyens de réduire la taille de la meule de foin dans laquelle nous cherchons l'aiguille du terrorisme qui menace la sécurité de nos citoyens. Deuxièmement, nous serons beaucoup mieux en mesure d'identifier quels risques potentiels existent si nous travaillons conjointement avec d'autres.

L'autre question est bien sûr celle de la frontière elle-même. J'ai été très impressionné par nombre des commentaires qui ont été faits par vos collègues quant aux préoccupations qu'ils ont et aux améliorations qu'ils proposent. J'aimerais dire en guise de préface à mes remarques que je pense que l'Agence canadienne des douanes et du revenu est une agence très progressiste. Elle a plusieurs années lumières d'avance sur ce qu'elle était lorsque j'en étais responsable. Elle a certainement à bien des égards dépassé, et de loin, son équivalent américain pour ce qui est des méthodologies qu'elle a mises en place pour traiter les personnes et les marchandises en déplacement entre le Canada et les États-Unis. Il est cependant important pour nous d'envisager cette question avec un regard neuf.

• 1705

Il nous faut nous éloigner de la frontière pour faire une grosse partie du traitement, afin de ne pas avoir ces énormes entonnoirs que se vident au pont Ambassador, étouffant le trafic qui passe par là, comme c'est le cas à plusieurs autres points frontaliers.

Il nous faut faire en sorte que, lorsque nous affectons nos ressources à la lutte contre les menaces à la sécurité, nous ne les gaspillions pas en nous attardant sur des personnes qui sont tout à fait légitimes, qui traversent la frontière par affaires deux ou trois fois par semaine et qui ne posent absolument aucune menace à qui que ce soit. Si nous pouvions consacrer nos ressources aux secteurs où les risques sont les plus élevés, nous pourrions à la fois assurer une meilleure sécurité et accélérer le passage par la frontière des voyageurs et des marchandises légitimes.

Dans mes notes—que je vais vous laisser, monsieur le président—je fais plusieurs suggestions quant aux moyens d'y parvenir. Je vous soumets néanmoins la requête que voici, dite très simplement. Mon impression de l'ambiance à Washington aujourd'hui, ce qui n'est pas étonnant, est que les politiciens américains sont sous pression pour être perçus comme agissant. Souvent, dans la vie politique, vous marquez plus de points politiques si vous êtes perçus comme agissant que si vous prenez le temps de faire les choses comme il se doit.

Il est beaucoup plus facile pour nous d'aider les Américains à assurer leur sécurité en ayant au départ le bon système qu'en essayant de défaire une mauvaise décision. Si nous constatons que les Américains se concentrent sur la frontière avec le Canada comme moyen de réduire les menaces aux États-Unis, alors les conséquences pour les milieux d'affaires canadiens et la mobilité des gens seront très dommageables.

Il est important pour nous d'être proactifs et de soumettre aux États-Unis des propositions courageuses nous permettant de travailler ensemble pour que la frontière fonctionne de façon beaucoup plus efficace.

Un dernier commentaire—car je ne veux pas empiéter sur le temps de mes collègues—est que j'ai participé la semaine dernière à un débat sur CBC au cours duquel un intervenant qui n'était pas de mon avis a déclaré que la livraison juste à temps n'est plus depuis le 11 septembre. Rien n'est plus loin de la vérité. Ce que nous constatons au fur et à mesure du ralentissement de l'économie est que les entreprises cherchent des moyens de réduire leurs coûts, et la livraison juste à temps est un important outil pour faire cela.

Nos clients américains exigeront la livraison juste à temps et recourront aux fournisseurs capables de la garantir. Ces fournisseurs seront ou au Canada ou aux États-Unis. Il nous revient à nous de déterminer si les entreprises canadiennes pourront ou non continuer de livrer ce marché sur cette base. Pour réussir, il nous faudra faire preuve de courage et d'imagination.

Je termine par ce avec quoi j'ai commencé. L'objectif n'est pas de retourner à ce qui existait le 11 septembre à 8 h 30 du matin. L'objectif est de corriger nombre des graves problèmes qui existaient depuis longtemps et qu'il nous faut absolument éliminer pour assurer à nos citoyens le niveau de prospérité et les possibilités que nous voulons pour eux.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Beatty, pour ces sages paroles.

Nous allons maintenant passer à M. Adams. Nous allons entendre tous les témoins, après quoi nous pourrons revenir sur les différentes interventions et poser des questions.

Monsieur Adams, vous avez la parole.

Déclaration de M. David C. Adams (vice-président des politiques, Association canadienne des constructeurs de véhicules (ACCV)): Merci, monsieur le président, et merci de l'occasion qui m'est ici donnée de comparaître devant vous aujourd'hui.

Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle David Adams. Je suis vice-président des politiques de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules. L'ACCV est l'association industrielle des plus gros constructeurs automobiles du Canada. Comptent parmi nos membres DaimlerChrysler Canada, Ford du Canada, General Motors du Canada, l'International Truck and Engine Corp. et Volvo Canada Limitée.

Les sociétés membres de l'ACCV comptent pour un important volume d'activité économique au Canada. Les Trois Grands constructeurs automobiles ont investi plus de 22 milliards de dollars dans l'économie canadienne au cours de la dernière décennie. Le Canada produit chaque année trois millions de véhicules finis, représentant près de 20 p. 100 de la production totale sous l'ALÉNA. Les activités de montage de véhicules des membres de l'ACCV représentent plus de 43 000 emplois au Canada.

Notre industrie est depuis 1965 rationalisée à l'échelle de l'Amérique du Nord en vertu du Pacte de l'automobile et elle dépend aujourd'hui d'un commerce pleinement intégré. En 1999, les produits automobiles ont compté pour des échanges avec les États-Unis d'une valeur supérieure à 150 milliards de dollars. Cela englobe et les pièces d'automobile et les véhicules finis.

Les processus de fabrication de nos membres s'appuient sur des livraisons juste à temps pour l'apport des pièces dans nos usines de montage au Canada. Les livraisons juste à temps permettent aux entreprises de maintenir de petits inventaires, ce qui réduit le coût du produit fini, économisant de l'argent au consommateur. Nos membres importent la grande majorité des pièces et composantes qui sont assemblées dans la fabrication de véhicules finis. Le commerce automobile à deux sens entre le Canada et les États-Unis représente 300 millions de dollars, soit de 25 p. 100 du commerce quotidien de 1,2 milliard de dollars entre nos deux pays. Près de 90 p. 100 des véhicules produits dans les usines canadiennes sont exportés aux États-Unis en vue d'être vendus aux consommateurs de ce marché.

Cette intégration signifie que notre industrie subit des effets directs découlant des événements du 11 septembre. Dans les jours qui ont suivi la tragédie, la production aux usines automobiles a été bouleversée, des livraisons de pièces ayant été retardées à la frontière canado-américaine. Ce bouleversement a été ressenti des deux côtés de la frontière: des pièces fabriquées au Canada n'arrivaient pas aux États-Unis et des pièces fabriquées aux États-Unis n'arrivaient pas aux usines canadiennes. Ces retards ont également eu une incidence sur la livraison de véhicules finis au réseau de concessionnaires américains.

Nous estimons qu'il est dans l'intérêt de la sécurité nationale et du Canada et des États-Unis de maintenir une solide économie, y compris une facilitation du commerce transfrontalier. Bien que la situation se soit largement stabilisée à la frontière, les bouleversements vécus tout de suite après les tragédies du 11 septembre ont fait ressortir la nécessité d'élaborer une approche stratégique coordonnée pour la gestion de la frontière.

À la frontière canado-américaine, et c'est le cas surtout des points de passage terrestres, il nous faut prendre plusieurs mesures importantes qui faciliteront le flux des marchandises à faible risque et à fort impact économique et qui permettront l'affectation des ressources disponibles aux activités à plus grand risque. Plus précisément, nous croyons qu'il importerait de prendre les mesures qui suivent.

Peu après les tragédies du 11 septembre, des ressources supplémentaires ont été affectées aux points de traversée les plus achalandés, ce pour veiller à la maximisation de l'infrastructure des douanes existante. Nous appuyons l'affectation par les États-Unis de ressources supplémentaires dans le cadre du processus d'octroi de crédits afin de veiller à ce que ces points frontaliers continuent de tourner à leur pleine capacité.

La congestion à la frontière est depuis longtemps un problème. Il nous faut explorer la possibilité d'inspections loin des frontières, afin d'éloigner la congestion des points frontaliers, qui étouffent. Cela est essentiel à la fluidité du commerce légitime et viendra également appuyer la sécurité frontalière.

Nous devrions examiner de quelle façon la technologie des transpondeurs pourrait faciliter le flux harmonieux de trafic commercial à faible risque et à forte valeur ajoutée.

Des initiatives telles le programme d'autoappréciation de l'Agence canadienne des douanes et du revenu du Canada, conçu pour faciliter le flux de marchandises pour les entreprises qui affichent un important trafic transfrontalier, est indiqué des deux côtés de la frontière. L'autoappréciation permet de se prévaloir de privilèges d'autorisation préalable et d'autoappréciation des droits de douane payables en vertu de certaines conditions bien précises. Malheureusement, l'instauration de ce système a été retardée et plusieurs changements y ont été apportés, en faisant un processus inutilement complexe et potentiellement coûteux. Nous continuons de travailler aux côtés de l'ADRC en vue de corriger ces lacunes, afin qu'il soit possible de mettre en oeuvre un processus efficace.

Nous apprécions les efforts continus du gouvernement fédéral en vue de régler ces questions frontalières dans l'intérêt de l'économie nationale et de la sécurité.

En conclusion, monsieur le président, j'aimerais réitérer ce que j'ai déjà mentionné ici aujourd'hui. Nous croyons qu'aujourd'hui plus que jamais le gouvernement fédéral doit faciliter l'établissement d'un environnement favorable à la croissance économique. Cela exige l'établissement d'une politique frontalière canado-américaine qui permette au Canada de maintenir sa place dans une économie nord-américaine intégrée, et un cadre de politique commerciale qui permette à notre industrie de continuer de progresser. Nous nous plaisons à dire que «ce que le Canada conduit conduit le Canada», et nous espérons que le gouvernement du Canada partage notre engagement envers le maintien d'un secteur automobile fort.

Merci encore de nous avons donné l'occasion de comparaître devant le comité aujourd'hui. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions.

Merci.

Le président: Merci.

M. David Adams: J'aimerais ajouter quelques commentaires. J'ai gratté le gros des remarques que je vais faire à bord de l'avion que j'ai pris pour venir ici. Cela reprend en fait beaucoup de ce qu'a dit Perrin.

Je pense que du point de vue de l'industrie automobile—et notre association représente principalement les Trois Grands constructeurs automobiles—ce que le comité doit comprendre est qu'elle fonctionne depuis 1965, avec le Pacte de l'automobile, dans un environnement de libre-échange, comme si la frontière n'existait pas. Toute l'industrie a été intégrée et rationalisée sur une base nord-américaine. Les événements du 11 septembre ont fait ressortir qu'il existe bel et bien une frontière. Cela a créé de graves problèmes pour tous nos membres, en matière de production et de pertes, des deux côtés de la frontière, et en matière de livraison de pièces et au Canada et aux États-Unis.

La question soulevée plus tôt par Mme Whelan de la sécurité versus la facilitation du commerce est importante. Comme vous l'avez dit, je ne pense pas qu'il s'agisse de faire ou tout l'un ou tout l'autre. Je pense que le commerce sera facilité si les gens ont confiance dans la sécurité à la frontière. J'estime que c'est cela qui intéresse les Canadiens à l'heure actuelle.

• 1710

Comment faire pour instaurer la confiance à la frontière? Je pense qu'une des façons de faire est d'assurer une inspection à 100 p. 100 à la frontière.

Ce type d'inspection est-il durable? À mon sens, il est clair que cela ne peut pas être durable à long terme. Que faire pour régler le problème? Je pense qu'il faut se pencher sur toute la question de l'évaluation du risque.

M. Beatty a également évoqué cela dans ses remarques. Quels sont les personnes à haut risque, les camions à haut risque, les avions à haut risque ou autres qui traversent la frontière? Quelles sont les propositions à faible risque? Je pense qu'un environnement à faible risque suppose que l'on sache qui est qui. C'est sur cette base que NEXUS a mis au point le système pour voyageurs. Nous savons clairement quelles sont ces personnes qui vont et viennent en passant par la frontière—et le Canada et les États-Unis savent qui elles sont. C'est le même genre de système qui est envisagé dans le cadre du plan d'autocotisation des douanes qui va être mis en place. Nous avons vécu quelques problèmes, mais, grâce au système, nous savons qui est le transporteur, qui est l'importateur et qui est le conducteur. Voilà qui établit un environnement à faible risque. Je pense que ce sont là des exemples de choses que nous pouvons faire, de mécanismes automatisés que nous pouvons mettre en place pour faciliter le commerce transfrontalier.

Une approche moins interventionniste pour le commerce transfrontalier, quels que soient les systèmes automatisés en place, ne va cependant pas nous donner grand-chose si les camions ne parviennent pas à la frontière. Comme M. Beatty l'a souligné tout à l'heure, les goulots d'étranglement le long de la frontière n'ont pas commencé le 11 septembre; il y en avait bien avant. Les événements du 11 septembre ont tout simplement servi de loupe, grossissant les problèmes qui existaient déjà depuis longtemps. Je suis certain que David vous entretiendra de ces problèmes le long de la frontière, tels que les vit l'industrie du camionnage.

Comment faire, donc, avec la congestion le long de la frontière? Ce qu'il nous faut envisager, et Perrin en a parlé tout à l'heure, c'est éloigner autant d'activités que possible de la frontière. Si l'on a besoin de renseignements, si du travail de traitement intensif doit être effectué, s'il y a des camionneurs qui n'ont pas tous les papiers requis, s'il y avait moyen d'éloigner un maximum de choses de la frontière, il serait alors possible de faire en sorte que tout ce qui arrive à la frontière la traverse bel et bien. Je pense que cela doit également déboucher sur une discussion à plus long terme sur la question de savoir si nous avons en place l'infrastructure appropriée. Avons-nous à la frontière non seulement les ressources humaines nécessaires pour assurer le flux du trafic, mais également l'infrastructure physique, les ponts, etc., qui sont nécessaires pour absorber ce trafic?

Je pense que et les ressources humaines et l'infrastructure physique sont des questions à long terme qui doivent être examinées, car même si nous obtenons les nouveaux inspecteurs des douanes et ainsi de suite, il y a toute la question de la formation. Combien de temps faut-il pour former un agent des douanes? Ce sont donc là, à mon sens, des questions à moyen ou long terme.

Il est, je pense, clair qu'avec l'augmentation de 160 p. 100 de notre commerce entre 1989 et 1999 et l'augmentation annuelle prévue de 10 p. 100, ce problème ne va pas être facile à résoudre et exigera la réflexion créative dont M. Beatty a parlé tout à l'heure.

Je sais qu'il y a un certain nombre de prototypes, de projets pilotes et autres que l'Agence canadienne des douanes et du revenu est en train d'examiner. Nombre d'entre eux ont du mérite, et je pense qu'il nous faut les examiner et voir si certains ne pourraient pas être appliqués sur une plus grande échelle ailleurs au pays. En dehors de cela, comme cela a, je pense, été évoqué aujourd'hui par plusieurs autour de la table, il existe un besoin criant: celui d'une approche coordonnée, commune et intégrée face à ces problèmes.

Ce ne sera pas le fait du secteur privé seul, ni du secteur public seul. Je pense qu'il faudrait un système dans le cadre duquel les secteurs privé et public puissent travailler ensemble à la résolution de ces problèmes. Je crois qu'il nous faut être très prudents, mais il importe de nous engager et d'examiner activement ces questions, car si nous n'examinons pas activement ces questions, en tant que Canadiens, alors les décisions pourraient très bien être prises ailleurs sans qu'on y participe, et je ne pense pas que ce soit là un chemin que nous voulions emprunter.

Je vais m'arrêter là et céder la parole à David.

Le président: Merci, monsieur Adams.

Monsieur Bradley.

M. David Bradley (président-directeur général, Alliance canadienne du camionnage): Merci beaucoup. Je vais essayer de trouver quelque chose d'utile à dire après ces deux excellents exposés.

• 1715

Je conviendrai que les seules choses qui ont changé depuis le 11 septembre sont que les risques sont maintenant beaucoup plus grands, que l'urgence est de beaucoup supérieure à ce qu'elle était et que la nécessité d'une solide approche bilatérale canado-américaine est aujourd'hui plus essentielle que jamais. Cela ne me rassure guère, et je ne vois certainement aucun bon côté aux événements du 11 septembre, mais les gens sont néanmoins aujourd'hui au courant de l'existence d'une frontière et du fait que le tiers de notre produit national brut la traverse. Un camion traverse la frontière canado-américaine toutes les deux secondes et demie, et il est prévu que cela soit multiplié par deux. C'est ce que nous voulons, ce afin de maintenir notre niveau de vie et notre prospérité économique dans les années à venir, et nous avons donc tout un travail à faire.

L'une des approches à laquelle j'aimerais consacrer un peu de temps et sur laquelle on ne s'est pas beaucoup attardé dans le cadre de cette discussion est la question d'une stratégie de périmètre. Cela nous a consternés ces dernières semaines d'entendre des gens du gouvernement décrire cette stratégie comme étant simpliste et une recette pour que Washington refasse toutes nos lois. Nous trouvons cela tout à fait fâcheux et maladroit. Nous trouvons également cela ironique étant donné que l'une des premières personnes sinon la première personne importante en Amérique du Nord à avancer cette thèse a été Raymond Chrétien, lorsqu'il était notre ambassadeur aux États-Unis. C'est sans doute lui qui a été le combattant le plus féroce et le plus infatigable que nous ayons eu pour des questions comme l'article 110 de la loi sur l'immigration illégale.

Il me semble que, pour quelque raison, parce que nous continuons de nous embourber dans des discussions portant sur non seulement l'efficience économique et la sécurité mais également la souveraineté, cette idée ait été pour l'heure reléguée à la poubelle politique. Quoi faire? Bien franchement, en tant que camionneurs qui sommes pris dans ces files d'attente à longueur de journée aux postes de frontière, nous pensons que vous avez tout à fait raison et que le temps que l'on peut passer à la frontière est très différent du temps que l'on pourrait passer dans des cours de triage et dans d'autres endroits à 20 milles de la frontière. Il nous faut maintenant dépasser la sémantique et trouver quelque chose qui fonctionne et, encore une fois, la seule chose qui va fonctionner, c'est une approche bilatérale.

J'ai été frappé par certains des points soulignés lors de la discussion antérieure avec certains des fonctionnaires. Je suis d'accord avec Perrin lorsqu'il dit que Douanes Canada, en embrassant l'automatisation, en cherchant des moyens de faciliter et d'automatiser le flux à la frontière de personnes et de biens à faible risque, a été plusieurs années-lumière en avance sur le U.S. Customs Service. Mais je continue de croire que nous travaillons ici dans un vide. Nous allons continuer de faciliter l'entrée au Canada d'exportations américaines, nous l'espérons, ce qui est une bonne chose, car il faut qu'il y ait un équilibre par rapport à nos camions mais, encore une fois, une très grosse partie de notre économie dépend des exportations. Où sont les discussions aux niveaux les plus élevés de l'administration au Congrès et qui devraient être en cours?

J'ai entendu les observations de M. Lortie et j'ai participé à certaines des rencontres auxquelles il a assisté et, bien franchement, je n'ai pas vu de plan et je n'ai pas vu de coordination. Peut-être que c'est juste moi, mais je pense qu'il nous faut urgemment voir des mesures prises.

Les initiatives et les annonces faites hier par le commissaire au Service d'immigration et de naturalisation des États-Unis sont parlantes. Mon interprétation de ce qui a été rapporté aujourd'hui dans le Globe and Mail—et je pense que vous avez fait un commentaire en ce sens madame Whelan—est qu'on prévoit un retour à l'article 110 d'ici deux à quatre ans. Cela a peut-être été l'une des plus grosses luttes diplomatiques dans lesquelles le pays se soit lancé, et à peine un an après la négociation d'un genre d'entente, tout recommence. Je pense donc qu'il nous faudra nous attaquer bruyamment à ces questions.

Voici certaines mesures que nous recommanderions. Premièrement, nous pensons qu'il conviendrait de créer un nouveau poste, celui de ministre responsable de la sécurité et de l'efficience. La responsabilité à l'égard de la frontière relève aujourd'hui de quatre ou cinq organismes différents et en dépit de tous leurs efforts de coordination, bien franchement, je trouve que l'approche est trop diffuse étant donné les circonstances auxquelles nous nous trouvons confrontés. Il nous faut un responsable, quelqu'un qui puisse lancer une approche interministérielle, intergouvernementale et transjuridictionnelle, une personne qui puisse servir de paratonnerre pour traiter non seulement avec les différents segments de la société canadienne mais également avec l'administration au Congrès américain.

• 1720

Il nous faut, conjointement avec les autorités américaines, élaborer un plan détaillé de gestion de la crise à la frontière. La crise n'est pas passée. Chaque jour, le FBI fait de nouvelles annonces sur ce qui pourrait arriver. La frontière est toujours en situation d'alerte maximale, mais sommes-nous mieux préparés que nous l'étions le 10 septembre, si quelque chose devait se produire à nouveau?

Nous n'avons toujours pas de plan de gestion de crise pour ce qui est du triage des camions, de l'établissement de priorités pour certains types de trafic, de système d'autorisation de traverser les frontières terrestres, et autres choses dont nous aurions besoin. Ces mécanismes n'existent pas ou bien, s'ils existent, on n'en a pas encore discuté avec nous, et étant donné que ce sont nos camions qui transportent 70 p. 100 du commerce du Canada avec les États-Unis, j'aurais pensé que c'est ce qu'il aurait fallu faire. Il nous faut donc un plan de gestion de crise pour tout de suite et pour l'avenir.

Il nous faut un engagement clair des États-Unis à l'égard des discussions bilatérales dont j'ai parlé. Il est vrai, et je l'ai entendu dire, que nous ne savons pas vraiment ce que veulent les Américains, car ils ne nous l'ont pas encore dit. C'est vrai, et je suis certain que leurs attentions ont été concentrées ailleurs. Il nous faut les faire s'asseoir à la table; il nous faut un engagement clair afin que nous puissions nous rencontrer en face à face à un niveau suffisamment élevé pour pouvoir donner suite avec certaines de ces mesures.

Dans ce même contexte, pour donner le coup d'envoi qui est, selon nous, nécessaire, nous exhorterions également le premier ministre à monter une mission commerciale d'Équipe Canada à Washington, et ce au plus vite, et il conviendrait que nous nous concentrions sur le Congrès. Je pense, et c'est ce qu'on me dit, que notre gouvernement entretient de bons rapports avec l'administration. Je suis certain que c'est le cas, mais je pense que la pression viendra autant du Congrès que de l'administration, et ma crainte est qu'à moins que nous ne commencions à nous occuper de ces questions, il y aura des irritants non seulement côté douanes mais également côté immigration et transports—je songe à la sécurité des transports et à d'autres choses du genre. Nous en avons vu quelques indications au cours des dernières semaines avec les discussions qu'il y a eu au sujet de l'octroi de licences pour le transport de produits dangereux, du contrôle des chauffeurs de camion, etc.

Je vais m'arrêter là. Ce sont certainement ces questions qui sont les plus importantes pour notre économie à l'heure actuelle. Je pense moi aussi que la livraison juste à temps est toujours. C'est la livraison juste à temps qui a amené la relance après 1980. Cela sert très bien le secteur manufacturier. Cela a pris une forme nouvelle dans le secteur du détail. On parle alors de «réaction rapide». Aujourd'hui, il y a non seulement le service sensible au temps ou juste à temps, mais également le service à délai critique. Ces choses ne vont pas disparaître.

Pour que le Canada continue d'être l'un des rayons dans la plaque tournante du système logistique continental, il lui faudra une frontière efficiente, libre et ouverte aux personnes et aux marchandises à faible risque.

Merci beaucoup.

Le président: Merci.

Nous disposons de cinq minutes exactement. Je vais donner une minute à chacun, pour des questions précises. Oubliez les préambules.

Monsieur Duncan.

M. John Duncan: Vous savez que je suis toujours bref.

Je pense que ce que vous avez dit cadre très bien avec ce que d'autres nous ont déclaré. Cela cadre également très bien avec les propos récemment tenus par Paul Tellier. Je pense que le public canadien est déjà là; il est à bien des égards en avance par rapport au gouvernement.

Le gouvernement a envoyé des messages contradictoires sur le périmètre de sécurité, ce qui nous a relégués derrière. Vous avez parlé d'être proactif. Je pense plutôt que nous traînons de l'arrière. Il nous faut aller au-devant des questions et nous pourrons alors obtenir que le Congrès américain se range à nos côtés. C'est le seul moyen d'y parvenir. J'apprécie donc tout ce que vous avez dit, car vous êtes sur la bonne voie. C'est ainsi que nous allons bénéficier à l'économie nord-américaine, car les deux pays ont besoin de ces échanges commerciaux.

Je n'ai pas de question, juste ce commentaire.

Le président: Formidable.

Madame Whelan, vous avez une minute.

• 1725

Mme Susan Whelan: J'aimerais tout simplement dire que je ne pense pas que le gouvernement soit si à côté que cela. Il nous faudrait abandonner ce terme «périmètre», car cela signifie différentes choses pour différentes personnes. Si nous parlons d'une sécurité améliorée à nos points d'entrée au Canada et si nous séparons les déplacements à faible risque et les déplacements à risque élevé, alors je pense que le fédéral est bien engagé sur cette voie, d'après les conversations que j'ai eues et les rencontres tenues avec le groupe canado-américain dont je fais partie ainsi qu'avec les Affaires étrangères.

Si nous nous concentrons sur les points d'entrée au Canada, sur les moyens à mettre en oeuvre pour y améliorer la sécurité et sur la façon de faire pour séparer les voyageurs à faible risque et les voyageurs à risque élevé, alors nous nous retrouverons en bout de ligne avec cette frontière perméable que nous souhaitons entre le Canada et les États-Unis. Nous nous retrouverons avec cette vision canado-américaine coordonnée en ce qui concerne les voyageurs à risque élevé.

Je ne pense vraiment pas que l'écart entre nous soit si grand, monsieur Bradley, mais il nous reste à abattre beaucoup de travail pour réaliser notre objectif. Je pense moi aussi que nous ne voulons pas revenir à la situation qui existait à 8 h 30 le 11 septembre. Ce que nous voulons, en fait, c'est retourner en arrière et améliorer les choses.

L'article 110, aux États-Unis, est une chose contre laquelle j'ai lutté très fort et que je ne voudrais pas voir adoptée. Le gouvernement et les milieux d'affaires doivent essayer de se retrouver, comme nous l'avons dit tout à l'heure, pour trouver une solution.

J'envisage avec plaisir de lire vos suggestions, messieurs Beatty et Adams, et de lire l'exposé de chacun. Je pense qu'il y a des solutions à trouver et je crois que le gouvernement le reconnaît, mais si nous voulons jouer avec les mots, cela ne débouchera pas. Il nous faut nous attarder sur leur sens.

Le terme signifie différentes choses pour différentes personnes. J'ai eu des conversations avec cinq gens d'affaires de ma circonscription, et chacun d'eux comprend autre chose. Ce que cela signifie pour moi c'est une sécurité améliorée à nos points d'entrée au Canada—les principaux aéroports, les principaux ports maritimes et les points frontaliers—et séparer les voyageurs à faible risque des voyageurs à risque élevé. C'est là le but et c'est par là qu'il faut passer.

Vous pourriez peut-être tout simplement réagir à ce que je viens de dire.

M. David Bradley: Nous sommes d'accord avec vous, absolument. C'est pourquoi je dis que l'on a assez parlé sémantique. En fait, si vous regardez le plan de Douanes Canada, celui-ci vise également nos frontières externes. Je partage donc votre point de vue.

[Français]

Le président: Madame Lalonde

Mme Francine Lalonde: Il y a des mesures à prendre assez rapidement, qui sont déjà dessinées pour ce qui est des exportations commerciales, mais il est évident qu'il faut qu'il y ait des discussions avec les Américains afin que ça devienne fluide. Mais je pense que les mesures qui concernent le contenu du périmètre, les mesures qui touchent à l'immigration... En tant que députée, je peux vous dire que je reçois beaucoup d'appels téléphoniques dans mon comté concernant des problèmes. Il y a des gens qui sont aux États-Unis et qui ne peuvent pas entrer au Canada. Pourtant, ils sont aux États-Unis. Ils ont eu un visa de 60 pays pour aller aux États-Unis, mais ils ne peuvent pas entrer au Canada. C'est la moitié des problèmes qu'on a.

Ce n'est pas un one way, cette histoire. Je pense qu'il faut prendre le temps de préciser que chaque pays peut garder ses politiques d'immigration, mais on a besoin d'un échange d'information et peut-être de l'harmonisation d'un certains nombres de mesures.

On dit qu'il faut qu'il y ait de la confiance et de la sécurité. Il faut aussi que la liberté demeure et soit préservée. On pourrait avoir des emplois et de l'argent, mais perdre le pays dans lequel on aime vivre.

[Traduction]

Le président: Merci, madame Lalonde.

Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

Permettez-moi de vous remercier, au nom de nous tous, d'être venus. Je pense que vous avez fait de très bonnes remarques, dont je dois dire que je les avais déjà entendues. Il me faut dire à M. Bradley que j'étais et suis encore de ceux qui sont très préoccupés par certaines des versions de ce périmètre nord-américain. J'étais très préoccupé par cela, tout proche que j'étais de la frontière, à côté de ce qui était autrefois la capitale du meurtre des États-Unis. De ce point de vue-là, la dernière chose que je souhaitais était une frontière ouverte.

Les points que vous avez soulevés sont, on en conviendra tous, très valides. Ce que vous avez dit, monsieur Beatty, au sujet du fait que notre service des douanes soit très en avance par rapport au Département des douanes américain est très bien connu.

Madame Whelan, quatre ou cinq des autres législateurs fédéraux...et j'ai rencontré les législateurs fédéraux du côté américain deux ou trois semaines avant le 11 septembre... Deux sujets qui ont surgi... Il n'y avait pas d'ordre du jour pour la réunion. Il a été question de l'environnement, parce que nous étions tous de la région des Grands Lacs, et il y a eu la question des problèmes à la frontière.

• 1730

Les législateurs venaient tous du Michigan. Il était clair—et c'est là le message que j'aimerais vous livrer—que si nous voulons convaincre les Américains, si nous voulons qu'ils viennent à la table pour y travailler sérieusement, alors il faudra que les milieux d'affaires de leur côté de la frontière soient avec nous. Vous tous pouvez jouer un rôle important pour les encourager à envisager les choses de cette façon.

J'ai été très heureux du travail que j'ai vu la chambre de commerce de Detroit faire, conjointement avec la chambre de commerce de Windsor. Ces gens-là ont fait un certain nombre de très bonnes suggestions. J'imagine qu'elles se trouvent reflétées dans vos mémoires. Il faut vraiment que les milieux d'affaires du côté canadien discutent avec les milieux d'affaires du côté américain, de telle sorte que lorsque nous aurons l'attention de Washington, ils entendront les choses de cette perspective. À l'heure actuelle, il est clair, d'après ce que nous ont dit les législateurs américains, que le problème est loin d'avoir été identifié comme étant une grosse priorité à Washington.

M. David Bradley: Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais je pense qu'il faudrait qu'il y ait une certaine coordination à cet égard également. Nous parlons tous avec nos homologues américains chaque jour, mais il y a sûrement des stratégies et des renseignements à partager. Tout cela se fait dans un vide.

Je peux également vous dire que du point de vue de nombre des gens d'affaires des États-Unis avec qui j'ai discuté au cours des dernières semaines, il vous faut comprendre que tout cela est examiné à travers les lunettes de la sécurité. Il y a très peu de place pour la dissension. La décision d'affaires pourrait très bien être, ce afin de maintenir leur chaîne d'approvisionnement, d'investir ailleurs qu'au Canada si la frontière demeure un problème.

Je ne suis pas convaincu que les milieux d'affaires américains et que les politiciens américains soient aussi préoccupés par cela que nous nous devrions l'être ici au Canada. Nous continuerons de travailler. Il est formidable de voir les deux chambres, dans le cas que vous avez évoqué, travailler ensemble, mais nous avons un travail énorme à faire pour les sensibiliser à la situation.

J'ai également beaucoup travaillé au cours des dernières années avec les législateurs du Michigan. Lors de mes premières visites à Lansing, au Michigan—et c'était pour parler de la taxe d'affaires unique du Michigan—j'ai été abasourdi par l'absence de connaissance du fait que 50 p. 100 des exportations du Michigan sont destinées à l'Ontario. Les gens n'étaient pas au courant. Je suis donc très heureux qu'ils commencent à se mettre à la page.

Le président: Nous avons presque terminé. J'aimerais que M. McNally ait l'occasion de poser une question, après quoi il nous faudra boucler.

M. Perrin Beatty: Monsieur le président, pourriez-vous m'accorder une minute?

Le président: Oui, nous voulions justement revenir à vous, monsieur Beatty, pour la conclusion.

M. Perrin Beatty: Un point très important a été soulevé. Permettez que je sois très clair: vous trouverez que les gens d'affaires sont là pour travailler main dans la main avec le gouvernement pour porter aux États-Unis le message que le Canada fait partie de la solution et non pas du problème.

Les MEC ont créé un comité mixte avec notre pendant américain, la National Association of Manufacturers, le but étant de travailler ensemble avec nos gouvernements respectifs en vue de trouver une solution au problème. Je pense que vous constaterez que toutes les associations professionnelles auront pour approche de travailler très étroitement avec le gouvernement et nos homologues américains.

À la fin du mois en cours je dois aller à Washington pour la réunion de l'exécutif de la NAM. Elle a invité à y assister plusieurs représentants de niveau membres du Cabinet du gouvernement américain. J'y apporterai le même message. Mais il serait très utile pour nous d'être certains d'être bien armés.

Je suis d'accord avec Mme Whelan lorsqu'elle dit que si l'on élimine la rhétorique, il y a beaucoup de consensus quant à l'approche à adopter face à cette question. Le problème est que lorsque quelqu'un s'attaque au concept de périmètre et l'écarte comme étant simpliste ou infaisable, nos amis au sud de la frontière pensent que nous rejetons l'idée de collaborer avec eux.

Si quelqu'un avait une meilleure expression que «concept de périmètre» en matière de sécurité, je serais porté à l'adopter. Mais, bon sang, que l'on s'entende sur une stratégie intégrée et que l'on prenne des mesures. Qu'on accroche cela dans la fenêtre. Qu'on fasse progresser le programme au Canada. Au lieu de réagir à ce que font les Américains, nous devrions nous rendre à Washington pour y réunir les secteurs public et privé et leur dire: «Nous avons ici des propositions qui corrigeraient le problème. Nous faisons partie de la solution».

Le président: Monsieur McNally.

M. Grant McNally: Merci, monsieur le président.

Merci de vos exposés. Je suis en faveur de la direction que vous avez empruntée. Clairement, si nous pouvons avoir un système intégré de défense aérienne nord-américaine, alors nous pouvons avoir un système frontalier intégré qui tienne compte en même temps du commerce et de la sécurité. C'est peut-être là un modèle que nous pourrions utiliser avec nos homologues américains et avec ceux qui rejettent l'idée d'avoir un tel système ici au Canada, un système qui nous protège tout autant que celui-là, un système intégré qui assure le même genre de protection, mais pour notre économie et pour l'accès aux marchés.

• 1735

Auriez-vous des statistiques sur les dollars qui seraient perdus chaque jour, sur ce que coûte chaque heure d'attente supplémentaire aux frontières? Je sais que certains chiffres ont été fournis plus tôt. Cela figure peut-être dans votre documentation.

M. David Bradley: Si l'on se limite aux seuls coûts de transport sans, donc, compter l'incidence sur les personnes représentées par Perrin et David, chaque heure de délai dans le système ajoute un million de dollars canadiens aux coûts de transport. Mais ces coûts seraient éclipsés par l'incidence économique de fermetures d'usines, de suppressions de quarts de travail et autres choses du genre.

Le président: J'aimerais, sur cette note enlevante, vous remercier au nom du comité.

Si vous pouviez nous laisser le texte de votre exposé en particulier, cela nous serait très utile.

J'aimerais poser une question à M. Beatty au sujet d'un comité de travail—chez vous, chez M. Adams, chez M. Bradley. Avez-vous un comité de travail fonctionnel d'un genre ou d'un autre?

M. Perrin Beatty: En effet. Il y a quelques semaines, nous avons convoqué une réunion d'une quarantaine d'entreprises et d'associations professionnelles. Nous nous sommes retrouvés à Ottawa et avons formé une Coalition pour une frontière sûre et propice au commerce. L'objet était de créer un groupe du secteur privé qui travaillerait très étroitement avec le gouvernement, non seulement en vue de lui soumettre des propositions cohérentes sur des améliorations possibles, mais également pour oeuvrer à ses côtés en vue de livrer aux États-Unis le message que le Canada fait partie de la solution.

La réponse, donc, est oui. Nous allons soumettre des propositions précises au gouvernement sur la façon dont nous verrions le système fonctionner.

Le président: Quand cela se ferait-il? M'appuyant sur votre expérience passée, j'aurais tendance à croire que vous avez sans doute déjà le gros de la recommandation qui va sortir du groupe. Ou bien pensez-vous qu'il y aura d'autres recommandations encore?

M. Perrin Beatty: Je ne pense pas qu'il y aura grand-chose qui vous étonnera. Vous aurez relevé énormément de ressemblances entre les différents exposés qui vous ont été faits cet après-midi.

Je pense que pour nous tous du secteur privé qui nous débattons avec cette question, notre point de départ est que le commerce et la sécurité ne sont pas à des pôles opposés. Vous n'aurez pas de commerce sans sécurité, alors il vous faut améliorer les deux choses. Pour y parvenir, il nous faut également nous éloigner de la frontière canado-américaine et investir davantage de ressources dans les points d'accès à l'Amérique du Nord. Il nous faut agir conjointement.

Nous serons plus précis dans le détail de la façon dont cela pourrait être fait, mais je ne pense pas que la direction dans laquelle nous allons étonnera l'un quelconque d'entre vous.

Le président: Cela correspondra assez bien à ce que nous avons entendu ici.

Enfin, nous avons parmi nous M. Brimble, le directeur responsable des opérations. J'imagine que la question à poser est celle de savoir s'il y a eu des rencontres formelles entre votre groupe et les gens du revenu et de la taxe d'accise.

M. Perrin Beatty: Oui. Lorsque nous avons tenu notre réunion à Ottawa, nous avons travaillé très étroitement avec M. Lortie, qui préside un comité interministériel de niveau SMA. Il nous a beaucoup aidés en mettant à notre disposition des hauts fonctionnaires des douanes et de la taxe d'accise, du MAECI, de Transports Canada et du ministère du Solliciteur général. Il y a donc eu une très bonne collaboration de ce côté-là. Nous sommes certainement très ouverts à l'idée de travailler avec eux, par exemple en leur fournissant des renseignements et en essayant de faire passer le message.

Notre requête aux députés est la suivante: il est important, lorsqu'on parle tout particulièrement à nos clients américains, de faire très clairement ressortir que nous sommes déterminés à être de bons fournisseurs fiables. Il est important qu'ils sachent qu'ils peuvent compter sur le Canada.

Je pense que nous tous savons qu'à l'heure actuelle les décisions d'investissement sont prises sur la base de la question de savoir si, en supposant que je construise une usine à tel ou tel endroit sur votre territoire, je pourrai fournir mes clients américains. Un message très clair que nous tous, que nous soyons du secteur public ou du secteur privé, devons envoyer est que les Canadiens sont là pour faire affaire et que nous livrons dans les temps.

Le président: Enfin, les recommandations que certains d'entre vous ont déposées auprès de nous ont-elles été transmises à des personnes comme M. Brimble, ainsi qu'à d'autres fonctionnaires?

• 1740

M. Massimo Bergamini (vice-président, Affaires publiques, Alliance canadienne du camionnage): Les recommandations que nous avons faites ont certainement été remises et aux fonctionnaires et au bureau du premier ministre.

Le président: Nous allons bien évidemment soumettre un rapport sur ces questions au Parlement. S'agissant de ce que le Parlement pourrait faire, si nous disions, par exemple, que nous voulions créer un groupe de travail qui deviendrait le groupe coordonnant les activités, auquel participeraient vos trois organisations—revenu et taxe d'accise, transports et autres organismes—cela vous serait-il utile? Est-ce là quelque chose qui ferait avancer nos affaires?

M. Perrin Beatty: Pardonnez-moi, mais je n'ai pas très bien suivi.

Le président: Le groupe de travail réunissant votre groupe ainsi que des représentants du gouvernement existe-t-il à l'heure actuelle de façon formelle ou seulement informelle, n'ayant eu qu'une seule réunion, un point c'est tout?

M. Perrin Beatty: Nous sommes sans cesse en contact les uns avec les autres. Chacune de nos organisations a été en contact avec divers ministères gouvernementaux pertinents. Je ne pense donc pas qu'il faille que vous... Je pense que vous pourriez certainement nous encourager à poursuivre cela, mais je peux vous garantir que cette question est absolument vitale pour nos membres et que nos associations communiquent régulièrement avec le gouvernement.

Le président: Le problème n'est donc pas de communiquer ou de travailler avec le gouvernement; le problème est de franchir l'étape suivante, de faire en sorte que ce soit une priorité au niveau national et de traiter avec les Américains.

M. Massimo Bergamini: Monsieur le président, je pense que vous avez tout à fait raison. Je crois que la composante commerce, que la composante efficience à la frontière, doivent devenir une priorité sur un pied d'égalité avec la composante sécurité.

Nous avons entendu les intervenants précédents qui parlaient de l'élément sécurité, ce que nous comprenons, mais je pense qu'il nous faut élever l'efficience au même niveau. Il faut que cela devienne une priorité du gouvernement. Il nous faut traiter de ces questions au niveau bilatéral, binational.

Je pense que le groupe de travail que vous suggérez serait bien indiqué s'il existait du côté américain un groupe équivalent, qui accepterait de travailler dans un contexte binational.

Le président: Est-ce là votre opinion aussi, monsieur Beatty?

M. Perrin Beatty: Je pense que tout ce qui pourrait favoriser la collaboration entre le Canada et les États-Unis à ce chapitre sera bien accueilli. Je suppose que de notre côté, ce qui doit être fait en premier c'est l'adoption d'une approche intégrée.

J'ai trouvé encourageant qu'on ait demandé au ministre Manley de présider le comité du Cabinet, mais ce dont nous avons besoin c'est d'une proposition intégrée cohérente du gouvernement du Canada—c'est-à-dire, voici comment nous nous proposons de nous occuper de la frontière canado-américaine sur le plan sécurité, sur le plan facilitation du commerce à divers niveaux—et qui soit le moteur du programme du gouvernement au plus haut niveau.

La difficulté est que toutes les idées qui flottent existent depuis longtemps. Le rapport de décembre dernier du PSCA était un excellent rapport aux deux gouvernements. Il y a beaucoup d'idées sur la table. La difficulté a toujours été d'engager les gens aux paliers politiques les plus élevés pour que cela débouche. Vous obtenez des choses comme des installations douanières partagées, où le problème est que les toilettes sont du côté canadien et les Américains portent des armes à feu. Nous avons des discussions pour essayer de trouver une solution.

Les Canadiens n'ont plus de patience pour ce genre de chose. Leur message est «Corrigez le problème». Au niveau politique, le message que vous devez donner aux fonctionnaires à tous les niveaux est «Corrigez le problème».

Le président: Merci beaucoup.

Je pense que nous allons nous arrêter là.

Monsieur Duncan, vous avez un bref commentaire à faire.

M. John Duncan: Oui. La meilleure partie de la réunion a sans doute été le tout dernier bout, avec ce dont vous avez discuté ici. Cela a été formidable.

Quelque part dans l'un des exposés, il a été question d'établir une équivalence pour ce qui est des communications avec les États-Unis. Je ne sais trop si vous parliez d'avoir l'équivalent d'un Tom Ridge ou bien d'une intervention à un autre niveau.

C'est peut-être vous qui en avez parlé, Perrin, dans votre exposé. Ai-je mal compris?

M. Perrin Beatty: Je pense que c'était peut-être...

M. Massimo Bergamini: C'est nous. C'était notre recommandation que l'on crée un poste de ministre responsable de l'efficience et de la sécurité à la frontière. Ce ministre assurerait le contrôle général, serait redevable au Parlement et assurerait un certain leadership, une certaine orientation, une certaine direction.

Il y a en jeu ici des intérêts concurrentiels—des intérêts concurrentiels politiques. Nous pensons dans ce contexte que cela offrirait l'avantage de surmonter certains des problèmes administratifs qui persistent et d'envoyer à nos amis américains le signale que nous sommes sérieux et que c'est pour nous une priorité. Et il serait un interlocuteur pour le gouvernement du Canada sur cette sérieuse question.

• 1745

M. John Duncan: Oui, monsieur Bradley.

M. David Bradley: Je ne voudrais pas donner trop de poids à cela, mais d'après ce que nous avons compris, ni le ministre du Commerce international ni le ministre de l'Industrie ne siègent au comité que préside le ministre Manley. Cela nous préoccupe.

Le président: Très bien.

J'aimerais vous poser une question. Si nous voulions le nom d'une personne à contacter, quelle serait cette personne? Serait-ce M. Beatty, M. Adams ou M. Bradley? M. Beatty pourrait-il être le joueur d'avant-front pour la communication, ou bien devrions-nous continuer de communiquer avec vous trois collectivement?

M. Perrin Beatty: Eh bien, il faudrait que ce soit plus que seulement avec nous trois. Il y a plusieurs douzaines d'associations de gens d'affaires qui ont tous de profondes convictions au sujet de cette question et qui travaillent tous ensemble.

Le président: Monsieur Beatty, avez-vous une liste que vous pourriez remettre au comité, en prévision d'une autre réunion encore que nous tiendrons probablement, ou peut-être même deux?

M. Perrin Beatty: Je me ferai un plaisir de vous fournir une liste, mais je vous encouragerais également à traiter individuellement avec chacune des associations. La coalition a pour objet de fournir un guichet unique et de veiller à la cohésion, mais chacune de ces associations a des compétences propres. Je ne pourrais jamais espérer faire le travail que fait l'association du camionnage ou l'association des constructeurs automobiles, alors allez-y, aux deux niveaux.

Le président: Formidable.

M. David Adams: Je pense, monsieur le président, qu'un autre aspect du problème est que lorsque tout est arrivé, un certain nombre d'associations industrielles ont eu de graves inquiétudes quant à la frontière, et nous tous courrions, je pense, pour rencontrer différents intervenants gouvernementaux. Je pense qu'à ce stade-ci beaucoup de gens souffrent de «réunionite».

Comment allons-nous faire cela? Comment allons-nous organiser tout cela? Allons-nous véritablement prendre des mesures au lieu de tout simplement nous réunir et entendre des mises à jour? Cela dépend de tout le monde aujourd'hui.

M. Perrin Beatty: Je pense, monsieur le président, m'inspirant de mon autre vie, que vous connaissez sans doute M. Mark Boudreau, qui joue en vérité le rôle de secrétaire auprès de la coalition et qui s'occupe également des efforts des MEC. S'il peut être pour vous une personne-ressource utile, travaillant avec vous pour vous faire parvenir renseignements ou aide, nous le mettrons à votre disposition.

Le président: Le recherchiste ou le greffier du comité pourrait peut-être en parler avec vous.

Nous allons tenir une autre réunion la semaine prochaine, je suppose, à laquelle nous inviterons encore...

Monsieur Duncan.

M. John Duncan: Ce devait être ma dernière question.

Vous tous avez un message semblable. Pourriez-vous recommander au comité un autre secteur qu'il serait utile que nous rencontrions, qui pourrait faire la lumière sur un domaine que nous avons peut-être oublié? Je songe notamment aux personnes qui font le travail concret aux postes frontaliers. À votre avis, serait-il utile que le comité les rencontre? Apprendrions-nous ou non quelque chose d'utile?

M. Perrin Beatty: La difficulté est de trouver des personnes qui aient des commentaires utiles à contribuer. Une autre possibilité serait l'industrie du tourisme—y compris les transporteurs eux-mêmes—qui souffre beaucoup de la situation.

Le plus grand défi à l'heure actuelle est qu'avec la masse de renseignements qui existent, il faut vous demander comment faire, comment en traiter, comment en faire un rapport cohérent et comment faire pour foncer. La vraie urgence, c'est le temps qui file. On ne manque pas de personnes qui ne demandent qu'à faire une contribution, mais je pense que nous tous dirions que le premier impératif, à ce stade, c'est d'agir.

Le président: Excellente remarque.

Là-dessus, au nom du comité et de la Chambre des communes, je vous remercie beaucoup de vos excellentes présentations. Nous allons faire un rapport, le plus rapidement possible, j'espère. Nous n'allons pas traîner. Nous allons tenir une ou deux réunions la semaine prochaine et le rapport devrait être déposé au Parlement au plus tard dans deux semaines.

Merci.

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