FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des pêches et des océans
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 27 septembre 2005
¸ | 1400 |
Le président suppléant (M. Scott Simms (Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor)) |
¸ | 1405 |
M. Douglas Sweetland (Panel de pêcheurs côtiers) |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. George Feltham (Panel de pêcheurs côtiers) |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Pearce Burry (Panel de pêcheurs côtiers) |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
¸ | 1420 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
M. Gerald Keddy (South Shore—St. Margaret's, PCC) |
M. Douglas Sweetland |
¸ | 1425 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Hedley Butler (Panel de pêcheurs côtiers) |
¸ | 1435 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Albert Johnson (Panel de pêcheurs côtiers) |
¸ | 1440 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. George Feltham |
¸ | 1445 |
¸ | 1450 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Pearce Burry |
¸ | 1455 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Gerald Keddy |
¹ | 1500 |
M. George Feltham |
M. Gerald Keddy |
¹ | 1505 |
M. Hedley Butler |
M. Douglas Sweetland |
M. Gerald Keddy |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Gerald Keddy |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Raynald Blais (Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, BQ) |
¹ | 1510 |
M. Douglas Sweetland |
M. Raynald Blais |
M. Douglas Sweetland |
¹ | 1515 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. George Feltham |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. George Feltham |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
¹ | 1520 |
M. Douglas Sweetland |
M. George Feltham |
M. Douglas Sweetland |
M. Peter Stoffer |
M. Douglas Sweetland |
M. Peter Stoffer |
M. Douglas Sweetland |
M. Hedley Butler |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Hedley Butler |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Albert Johnson |
M. George Feltham |
¹ | 1525 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.) |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Hedley Butler |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Albert Johnson |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Albert Johnson |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Albert Johnson |
L'hon. Shawn Murphy |
M. George Feltham |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Pearce Burry |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Hedley Butler |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Hedley Butler |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Hedley Butler |
M. George Feltham |
¹ | 1530 |
L'hon. Shawn Murphy |
M. George Feltham |
L'hon. Shawn Murphy |
M. George Feltham |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
M. Hedley Butler |
¹ | 1535 |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
L'hon. Shawn Murphy |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Loyola Hearn (St. John's-Sud—Mount Pearl, PCC) |
M. Douglas Sweetland |
M. Loyola Hearn |
M. Douglas Sweetland |
M. Loyola Hearn |
M. Douglas Sweetland |
M. Loyola Hearn |
M. Douglas Sweetland |
M. Loyola Hearn |
¹ | 1540 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Loyola Hearn |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Loyola Hearn |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Raynald Blais |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Albert Johnson |
M. Hedley Butler |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
¹ | 1545 |
M. George Feltham |
M. Raynald Blais |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
M. Pearce Burry |
¹ | 1550 |
M. Peter Stoffer |
M. George Feltham |
M. Peter Stoffer |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Bill Matthews (Random—Burin—St. George's, Lib.) |
M. Douglas Sweetland |
M. Peter Stoffer |
M. Douglas Sweetland |
M. Peter Stoffer |
M. Douglas Sweetland |
M. Peter Stoffer |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Bill Matthews |
M. Hedley Butler |
M. Bill Matthews |
M. Hedley Butler |
M. Bill Matthews |
M. Hedley Butler |
M. Bill Matthews |
M. Hedley Butler |
M. Albert Johnson |
¹ | 1555 |
M. Bill Matthews |
M. Douglas Sweetland |
M. Bill Matthews |
M. Douglas Sweetland |
M. Bill Matthews |
M. Douglas Sweetland |
M. Bill Matthews |
M. Hedley Butler |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Bill Matthews |
M. George Feltham |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. George Feltham |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Loyola Hearn |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
º | 1600 |
M. Loyola Hearn |
M. Gerald Keddy |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Randy Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission, PCC) |
M. Douglas Sweetland |
M. Bill Matthews |
M. Douglas Sweetland |
º | 1605 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Raynald Blais |
M. George Feltham |
M. Hedley Butler |
M. Raynald Blais |
º | 1610 |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Douglas Sweetland |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Peter Stoffer |
M. George Feltham |
º | 1615 |
M. Hedley Butler |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Albert Johnson |
º | 1620 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Loyola Hearn |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Albert Johnson |
M. Loyola Hearn |
M. Albert Johnson |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
º | 1625 |
M. Glen Little (à titre personnel) |
º | 1630 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Glen Little |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Gerald Keddy |
º | 1635 |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
M. Raynald Blais |
Le président suppléant (M. Scott Simms) |
CANADA
Comité permanent des pêches et des océans |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 27 septembre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¸ (1400)
[Traduction]
Le président suppléant (M. Scott Simms (Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor)): Je déclare ouverte cette séance de cet après-midi. Nous allons tout de suite aller de l'avant avec l'ordre du jour prévu. Encore une fois, le Comité permanent des pêches et des océans poursuit, conformément à l'article 108(2) du Règlement, son étude de la morue du Nord, y compris les événements menant à l'effondrement de la pêcherie et l'impossibilité des stocks de se renouveler depuis le moratoire.
Nous accueillons comme témoins un panel de pêcheurs côtiers représentant la région de Bonavista—pas seulement Bonavista, mais tout le secteur. Merci à vous tous d'être venus.
Nous avons prévu 10 minutes par intervenant. Allez-vous chacun nous entretenir pendant 10 minutes?
Doug, allez-vous nous parler pendant 10 minutes?
¸ (1405)
M. Douglas Sweetland (Panel de pêcheurs côtiers): Cela pourrait prendre 8, 10 ou 15 minutes.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Eh bien, vous n'allez pas dépasser 10 minutes.
M. Douglas Sweetland: Je remplirai chacune des 10 minutes.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Albert? Très bien.
George?
M. George Feltham (Panel de pêcheurs côtiers): Peut-être 10 minutes.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Pearce?
M. Pearce Burry (Panel de pêcheurs côtiers): Tout dépend des renseignements.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Je vois.
Eh bien, nous verrons bien au fur et à mesure, mais chacun d'entre vous a quelque chose à nous dire et vous savez donc le temps que nous avons prévu pour ce faire.
Nous passerons par la suite aux questions. Nous débuterons avec une ronde avec, à tour de rôle, les Conservateurs, le Bloc Québécois, le NPD et, bien sûr, le parti au pouvoir également.
Et étant donné qu'il nous faut offrir l'interprétation vers le français, cela aiderait beaucoup nos interprètes que vous parliez à un rythme raisonnable de façon à leur permettre de vous suivre.
Cela étant dit, le Comité est heureux d'accueillir devant lui aujourd'hui M.Douglas Sweetland, Hedley Butler, Albert Johnson, George Feltham et Pearce Burry.
Nous allons commencer par vous, Doug.
M. Douglas Sweetland: Merci, monsieur le président.
Je vais commencer par vous lire le texte de mon mémoire. J'entrecouperai ma lecture d'autres renseignements puisés dans mes notes d'allocution.
Pendant de nombreuses années avant l'effondrement des stocks de morue du Nord en 1992, les seules personnes qui avaient la moindre idée de leur disparition imminente étaient les pêcheurs côtiers. Les politiciens, les scientifiques au MPO et les bureaucrates n'ont jamais eu la moindre idée que les stocks étaient en difficulté jusqu'à ce qu'il soit presque trop tard pour y faire quoi que ce soit.
Tout a commencé avec les flottes de chalutiers étrangers assaillant les stocks à l'année longue du début des années 1960 jusqu'au milieu des années 1970 et en fait jusqu'à l'imposition de la limite des 200 milles en 1977.
Cela fait 28 ans que je pêche à temps plein. Avant cela, j'étais pêcheur à temps partiel. J'ai conduit un camion de bière pendant dix ans pour mon père et je faisais des voyages hebdomadaires jusqu'à St. John's. Lorsqu'on partait de nuit, depuis le moment, le long de la péninsule de Bonavista, où l'on apercevait l'océan, tout ce que l'on voyait c'étaient des lumières. Les navires étrangers et canadiens s'approchaient jusqu'à trois milles de la côte. Plus on avançait vers Bonavista... Je ne sais pas, vous ne connaissez peut-être pas cela, car vous n'y êtes allés qu'une fois, mais, monsieur Simms, vous devez connaître cela.
Lorsque vous passez devant le poste de police, en haut de la côte, en quittant la région de Catalina en direction de Melrose, sur les hauteurs, ce qui s'étendait autour de vous depuis la route en descendant ressemblait à une ville, tout cela à à peine quatre ou cinq milles de la rive. Et c'était tout le temps, été comme hiver.
Après l'imposition de la limite des 200 milles en 1977, donc, les stocks ont commencé à se reconstituer. Puis le MPO a commencé à accorder des quotas de plus en plus importants aux flottes étrangères et canadiennes. C'est ainsi que l'on a recommancé à pêcher la morue dans ces zones de fraie tout au long de l'hiver, ce qui a été sa condamnation à mort. De grosses entreprises canadiennes de produits de la mer ont eu toute la marge voulue pour construire des chalutiers plus gros et à coque renforcée, conçus pour naviguer dans les glaces, avec des fonds fédéraux pour la plupart fournis par le MEER, l'ancien ministère de l'Expansion économique régionale.
Le ministère des Affaires étrangères avait plus son mot à dire sur la gestion, ou plutôt la mauvaise gestion, de la morue du Nord que le MPO. Il utilisait ce stock comme caisse noire pour apaiser les pays étrangers en vue d'initiatives commerciales et d'investissements dans le centre du Canada. Notre morue du Nord n'a eu aucune chance une fois contrôlée par les politiciens et les bureaucrates du centre du pays, et j'ajouterai qu'il n'a pas fallu pour cela attendre bien longtemps après notre adhésion à la Confédération. Il ne leur a pas fallu longtemps pour voir que le centre du pays pourrait bénéficier de cette ressource qu'était la morue du Nord ainsi que de tous les poissons de fond en général.
L'effondrement de ce stock n'a pas été amené par la seule surpêche. Il y a eu d'autres causes, principalement environnementales. L'effondrement final, en 1992, a vu les chalutiers arrêter de pêcher, les poissons étant devenus trop petits et trop rares pour que l'activité demeure viable. La limite nord du territoire de la morue se déplaçait chaque année plus vers le Sud. En fait, en 1991, la dernière année de pêche côtière ouverte, il y a eu très peu de morue au nord de Bonavista Bay; c'est de cette zone côtière que je parle. À peine trois ou quatre années au préalable, la morue avait été présente bien plus haut le long de la côte du Labrador. En fait, ce matin, je pense que quelqu'un a évoqué la quantité énorme de morues dans la région de Black Tickle. Je pense que c'était en 1998 ou 1989. Je n'en suis pas certain.
Cette retraite vers le sud est venue aggraver la destruction, car la morue s'est ainsi retrouvée dans les eaux du nez et de la queue des Grands Bancs où les navires étrangers étaient libres de décimer les stocks restants. Ces navires étaient donc présents à l'époque et n'étaient assujettis à aucun contrôle à l'extérieur de la limite des 200 milles.
La reconstitution des stocks a été beaucoup plus lente qu'on n'aurait jamais pu imaginer. L'actuelle biomasse, bien que faible, est beaucoup plus importante que celle estimée par les chercheurs du MPO. Les pêcheurs côtiers constatent une plus grande abondance de morue qu'avant le moratoire. L'estimation du MPO de la biomasse totale de morue du Nord est d'entre 50 000 et 60 000 tonnes. Ma propre estimation est de 150 000 à 200 000 tonnes. Je serais le premier à dire que mon estimation n'est qu'un jugement approximatif. Les chercheurs parlent de 50 000 à 60 000. Ce n'est qu'une conjecture.
Comme je le disais, cela fait 28 ans que je pêche, et je voulais vous donner des exemples correspondant à 1991, notre dernière année de pêche avant le moratoire : le 29 juillet 1991 : 14 filets, une nuit de pêche, 10 morues, 40 livres; le 31 juillet 1991 : 14 filets, deux nuits de pêche, sept morues, 25 livres; le 31 août 1991 : 14 filets, trois nuits de pêche, 15 poissons, 70 livres.
Tout au long des années 1980, il a été presque impossible de prendre une morue de jour dans un filet maillant; je parle ici de la pêche côtière. Mais depuis l'ouverture de la pêche repère de la morue en 1998, les filets de morue lancés à l'eau de jour produisent beaucoup de poissons—beaucoup de morue.
Par exemple, la dernière année que cette pêcherie a été ouverte pour nous, cette petite pêche repère, le 8 août 2002, avec un filet, avec des mailles de 6 ½ pouces, pendant deux heures de pêche de mi-journée, ils ont pris 241 livres de morue; le 9 août 2002, avec un filet, et cinq heures de pêche vers le milieu de la journée, ils ont pris 460 livres; et le 14 août 2002, avec un filet, des mailles de 6 ½ pouces et un effort de 20 heures—en d'autres termes avec une plage de nuit—ils ont pris 862 livres de morue. Il est impossible de lancer un filet où que ce soit, et pas seulement dans la région de Bonavista—Bonavista Bay, Trinity Bay, Conception Bay, Notre Dame Bay—sans prendre d'importantes quantités de morue.
Avant le moratoire, je n'avais jamais pris une seule morue dans un filet de lompe, qui a des mailles de 10 ½ pouces—la taille de maille minimum. S'il arrivait à quelqu'un de prendre une morue dans un de ces filets, les pêcheurs en parlaient pendant des jours entiers—c'était extraordinaire. En 1995, on a commencé à voir de plus en plus de morues dans les filets de lompe, et cela atteint aujourd'hui des proportions telles que cela menace d'amener la fermeture de cette pêcherie à cause des trop grandes prises accessoires de morues—qui, d'après les chercheurs, n'existent pas, ou presque pas, à les entendre.
Je vais vous donner l'exemple que voici. Je pense que c'était l'hiver dernier—je ne suis plus trop certain car j'avance en âge, j'ai 55 ans, et l'on ne sait jamais quand la maladie d'Alzheimer est peut-être en train d'entrer dans le tableau. J'ai écouté un soir l'entrevue d'un biologiste de la vie marine—qui n'était pas un spécialiste de la morue ou quoi que ce soit du genre—qui a déclaré que le volume total de morue pour la zone 2J3KL était de 10 000 tonnes. Quelques jours plus tard, notre actuel ministre des Pêches et Océans, M. Regan, a participé à l'émission et il a évoqué ces 10 000 tonnes disant que c'était tout ce qui restait de la morue du Nord. C'est comme l'aveugle qui conduit l'aveugle, d'après ce que je constate. Il ne se fait pas suffisamment de comptages réels en zone côtière pour justifier la rédaction d'un rapport sur l'état des stocks de morue. Je ne sais pas—le mot frustration n'est pas suffisamment fort pour décrire ce que je ressens.
Nous avons d'après moi d'importants stocks côtiers dans les baies de Bonavista, Trinity et Notre Dame qui augmentent chaque année. Les pêcheurs côtiers ne peuvent pêcher aucune espèce au filet sans se retrouver avec d'importantes pêches accessoires. L'an dernier, lors d'une pêche de trois semaines de plie rouge, on a débarqué des prises accessoires de morue de 400 tonnes. Cette année, la pêche à la plie rouge a été ramenée à deux semaines. Cette pêche a donné lieu à des prises accessoires de morue du Nord de 1 000 tonnes. Cela est d'après moi un signe très positif de reconstitution des stocks—plus de poissons répartis dans un plus grand territoire.
Selon moi, le rétablissement du stock est surtout entravé par les phoques. Les phoques ont peut-être joué un petit rôle dans la destruction de cette ressource, mais ils sont le principal obstacle à son rétablissement. Il y a environ six millions de phoques du Groënland qui se nourrissent de poisson, la morue comptant pour 3 p. 100 de leur régime alimentaire. J'ajouterais que ces 3 p. 100 sont une estimation scientifique, établie sur la seule base des quantités de poisson relevées dans l'estomac des phoques examinés. Les chercheurs ne tiennent pas compte de ce que nous appelons le « belly feeding », où les phoques se contentent d'arracher la cavité ventrale de la morue et de prendre le foie et l'intestin—les parties molles.
Il faut ajouter à cela encore 1,5 à 2 millions de phoques à crête, qui sont plus gros et qui peuvent plonger plus profondément que les phoques du Groënland. Ces phoques à crête sont d'après moi la principale raison pour laquelle les morues des zones côtières ne survivent pas au-delà de l'âge de cinq ans.
Depuis au moins six ans, la quantité estimée de morue consommée par les phoques du Groënland a été de 37 000 tonnes par an. Ce sont là les chiffres fournis par les chercheurs du MPO. Il y a au moins 1,5 à 2 millions de phoques à crête qui mangent quant à eux encore 12 000 à 13 000 tonnes de morue, pour un grand total de 50 000 tonnes par an.
Si vous acceptez les estimations de la biomasse totale de morue pour les six dernières années fournies par le MPO, estimations qui ont été constantes à environ 50 000 tonnes, comment diable se fait-il que 30 000 tonnes aient été consommées par les phoques et qu'il nous reste encore 50 000 tonnes? Le simple gros bon sens vous amène à conclure que ces estimations scientifiques sont parfaitement fausses.
Voilà qui met fin à cet exposé, mais j'aimerais vous dire quelques mots encore.
Me reste-t-il quelques minutes?
¸ (1420)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Oui, mais avant que vous ne poursuiviez, Doug, je m'excuse de vous interrompre, mais au lieu d'avoir 10 minutes par intervenant—et j'espère que ceci conviendra au comité—j'ai alloué une période totale de... Eh bien, cela tourne maintenant autour de 38 minutes, à partager entre les témoins. Certains d'entre vous ne voudront peut-être pas utiliser les 10 minutes; Doug souhaite clairement disposer de plus de 10 minutes. Cette façon de procéder convient-elle à tout le monde? Très bien.
Alors poursuivez, Doug.
M. Douglas Sweetland: Je sais que vous n'avez rien du tout à voir avec l'inscription de la morue sur la liste des espèces en péril, mais il me faut vous en entretenir pendant une minute ou deux.
Pour commencer, il y a la façon dont les choses ont été amenées. Jeff Hutchings, un membre du Comité sur la situation des espèces en péril du Canada ou COSEPAC, a été embauché par le COSEPAC, ce qui constitue dès le départ un conflit d'intérêt. Puis, tout de suite au début du moratoire, il préconisait l'inscription de la morue sur la liste des espèces en péril. Pour commencer, on n'aurait jamais dû choisir ce type-là.
M. Gerald Keddy (South Shore—St. Margaret's, PCC): Excusez-moi, mais pourriez-vous répéter le nom de la personne?
M. Douglas Sweetland: Jeff Hutchings.
Je peux vous dire que si la morue est classée espèce en péril, je pense que cela va déboucher sur une agitation sociale comme on n'en aura jamais encore vue à Terre-Neuve, car il faut, pour commencer, voir à quel point la morue fait partie de notre culture. C'est la seule façon pour moi de vous décrire cela. Lorsque quelqu'un parle de poisson à Terre-Neuve, il ne parle pas de crabe. Il ne parle pas de homard. Si quelqu'un vous demande si vous pêchez, c'est, non, je ramasse du crabe ou je ramasse du homard, mais lorsque vous pêchez, vous pêchez la morue.
J'ai siégé à un panel envoyé par le conseil, et constitué pour la plupart de membres du conseil, pour rencontrer le ministre à Gander fin avril, je pense, en vue d'essayer d'obtenir une petite pêcherie côtière pour Bonavista et Trinity Bay. Peut-être que cela aurait représenté quelque 4 000 ou 5 000 livres par embarcation. La principale raison donnée par le ministre était, si j'ai bien compris, que s'il nous accordait de la morue à pêcher, comment allait-il expliquer cela aux étrangers, à la communauté européenne? Voilà, en gros, ce que j'ai retiré de cette rencontre.
Il a écouté les renseignements que nous lui fournissions, nos explications quant à l'abondance de la morue dans cette zone. En fait, à Bonavista et Trinity Bay, la morue, en ce qui nous concerne, est tout aussi abondante que lorsque John Cabot y a débarqué, voire plus encore. Lorsqu'y vient le capelan, les morues viennent se rouler sur les plages pour essayer d'en attraper. Pendant les années où il y avait beaucoup de morue, avant le moratoire, l'on ne voyait jamais cela. Mais je ne sais pas si c'est la surabondance de morue dans cette zone qui en est l'explication. Ces poissons ne sont pas affamés. Ils ont l'air d'être en bonne santé et ils sont en effet gros.
Il me faut vous parler d'autre chose aussi, soit l'indépendance des pêcheurs. Ce monsieur assis ici, M. Keddy, a mentionné quelque chose ce matin au sujet des boîtes noires pour tout le monde. Eh bien, je peux vous dire que je n'en veux pas de boîte noire sur mon bateau. Si vous allez lancer cela, si vous travaillez à pas plus de 20 milles de la côte, tous les bateaux de moins de 35 pieds devraient être exonérés de l'obligation d'être équipés de boîtes noires. Cela représente encore 2 000 $ par an de frais supplémentaires.
En ce qui concerne les petits pêcheurs sur petites embarcations, les seuls mots qui leur viennent à l'esprit pour exprimer leur situation sont qu'ils sont en train de se faire « financièrement crucifiés » par le gouvernement fédéral.
Et il n'y a pas que les Pêches. Le ministère des Transports vient tout juste de pondre une liste de règles aussi longue que le bras.
J'ai une petite embarcation de 31 pieds. Je vous parie qu'au mieux je pourrais m'en tirer pour 10 000 $ avec tout le matériel supplémentaire qu'exige la nouvelle réglementation. Comment vais-je pouvoir faire cela, alors que le revenu brut que me procurent mes prises l'été est de 30 000 $? Expliquez-moi cela, si vous le pouvez.
Une autre chose est l'érosion de l'indépendance. Vous n'allez plus être autorisé à travailler sur votre embarcation. Vous n'êtes plus autorisé à faire de soudure à bord. Vous n'êtes plus autorisé à mettre de la fibre de verre sur votre bateau. Vous n'êtes plus autorisé à faire quoi que ce soit.
Cela faisait partie de notre culture. Vous construisez votre propre bateau et vous réparez votre propre bateau, car c'est ce qui vous a permis de continuer de pêcher en zone côtière.
Il y a encore beaucoup de choses que je pourrais dire, mais je vais m'arrêter là.
Merci beaucoup.
¸ (1425)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, Doug.
Nous allons maintenant passer à Hedley.
N'oubliez cependant pas qu'il nous reste environ 30 minutes à partager entre vous quatre. Il faut que cela roule.
Allez-y, Hedley.
M. Hedley Butler (Panel de pêcheurs côtiers): J'aimerais commencer par vous souhaitez à tous la bienvenue ici aujourd'hui.
Je m'appelle Hedley Butler.
Depuis 500 ans... nous avons commencé avec la morue. Doug a parlé de poisson et de hareng. À Bonavista, c'est la morue.
Je regarde autour de la table et je me demande combien d'entre nous savons à quoi ressemble une morue. J'ai siégé à d'autres panels. Lorsqu'on y parlait de crabe et de pots à crabe, les gens ne savaient même pas à quoi cela ressemblait. Mais j'espère que tout le monde ici sait à quoi ressemble une morue.
Nous avons commencé à développer un marché de poisson frais en 1939, créant des emplois, utilisant d'autres espèces comme le saumon, le calmar, le hareng, le maquereau et le turbot et nous avons même ici dans cette usine conditionné des baies.
Le 2 juin 1992, le gouvernement a fermé notre pêche pour une période qui devait durer cinq ans. Rappelez-vous ces cinq ans. Lorsque John Crosbie a fermé notre pêche du saumon, cela ne devait durer que cinq ans et les choses ont suivi leur train.
Cela faisait des années que les pêcheurs disaient au gouvernement que les poissons devenaient plus petits et que les stocks déclinaient. Grâce aux nouvelles technologies, les pêcheurs pouvaient pêcher l'hiver dans les zones de fraie. La nouvelle technologie permet aujourd'hui à nos pêcheurs d'aller en zone de fraie.
Les pêcheurs côtiers, utilisant de plus petites embarcations, devaient attendre que les poissons leur viennent à eux. Si les poissons ne se rapprochaient pas de la côte, pour quelque raison... les pêcheurs ont vécu de mauvais étés par le passé. Nous avons toujours eu de mauvais étés. Il y a eu un été dont mon père me parle aujourd'hui. Il est âgé de 88 ans. C'était l'été à Indian Bay. Il lui fallait quitter Bonavista et se rendre à Indian Bay.
Lorsque le gouvernement a annoncé le moratoire, certains pêcheurs avaient déclaré que c'était fini pour eux, puis le crabe est venu à la place. De nombreux pêcheurs ont mieux gagné leur vie à cause du prix du crabe sur le marché. Ces derniers temps, les prix ont reculé de beaucoup et les pêcheurs vivent de nouveau une période difficile.
Avec l'abondance de la morue dans les baies de Bonavista et Trinity, nous ne comprenons pas pourquoi il n'y a pas un quota pour la pêche avec ligne et hameçons. Dans certaines zones, les pêcheurs chevronnés nous parlent de crabe trouvé dans l'estomac de morues. Si la morue revient, comme on le constate en ce moment, alors c'est la pêcherie du crabe qui va être en déclin. C'est ce que nous constatons aujourd'hui car la morue est en train de manger le crabe. Nous en trouvons dans le ventre des morues.
Le 9 novembre 2004, la ville de Bonavista, avec le président, M. Scott Simms, a tenu une discussion en table ronde. Y étaient également présents Bruce Adkins, un représentant du département des sciences du MPO; Roger Fitzgerald, député provincial; Dave Decker, représentant de la FFAW; Harvey Jarvis, représentant de la pêche indicatrice; Ray Andrews, représentant de la FPI; et Todd Williams, adjoint spécial au ministre des Pêches et des Océans pour l'Atlantique.
Y représentaient les intérêts locaux plusieurs pêcheurs et travailleurs d'usine chevronnés. Dans le courant de la discussion, M. Adkins a déclaré que l'abondance de morue dans les baies de Bonavista et Trinity était irréfutable.
La FPI, le plus gros acheteur de morue, a dit qu'elle préférerait voir une pêche avec ligne et hameçons d'août à octobre. Cela résulterait en une plus longue saison de travail pour les employés.
M. Jarvis a déclaré que la pêche indicatrice pour les stocks de Bonavista et de Trinity Bay indiquait des niveaux identiques ou supérieurs aux niveaux des années antérieures.
Nous autres pêcheurs, qui pêchons des espèces autres que la morue, comme par exemple la lompe, pour ses oeufs, la plie rouge et le turbot, trouvons que les prises accessoires sont nettement supérieures aux quotas de prises accessoires acceptables. Résultat : le MPO nous ferme à cause des énormes prises accessoires. Nous prenons en moyenne entre 800 et 1 200 livres de morue dans un seul filet maillant, et la taille des mailles varie entre 6,5 et 7 pouces—et il s'agit de prises accessoires.
Vous avez tous entendu la chanson « Oh, there's lots of fish in Bonavist' harbour » (oh, il y a beaucoup de poissons dans le port de Bonavist). Eh bien, nous avons vécu cela en juillet 2004. À l'époque, la morue remplissait l'arrière-port jusqu'au quai de l'usine. Nous avons constaté que pendant la période de frai du capelan, les morues viennent se rouler sur la plage avec les petits capelans.
Les agents des pêches se sont déjà arraché le genou de leur pantalon en essayant d'attraper des contrevenants pêchant la morue depuis les rochers pour avoir quelque chose à mettre dans leur assiette. Est-ce qu'ils s'acharnent autant sur les Grands Bancs pour arraisonner les navires étrangers qui surpêchent? À l'heure actuelle, la morue est pour les pêcheurs plus une nuisance qu'un atout.
À mon avis, les pêcheurs comme moi sont considérés comme des criminels avant même que l'on ne se lance sur l'eau, car on nous interdit de rentrer les prises accessoires et on nous interdit de les jeter par-dessus bord. Alors qu'est-ce qu'on en fait? Nous sommes considérés comme des criminels avant même de partir en mer.
Il y a trois ans, Bonavista a été choisie pour une pêche indicatrice de la morue. Nous avons perdu cela depuis du fait de compressions budgétaires. Les pêcheurs disent que nous avons perdu cette pêche non pas à cause de compressions budgétaires mais à cause des quantités de poisson débarquées.
Dans les années 1980, nous autres pêcheurs avions parlé au gouvernement des problèmes auxquels était confrontée notre pêcherie. Mais le gouvernement n'a pas agi avant 1992. Il était alors presque trop tard déjà. Aujourd'hui, nous disons au gouvernement que le poisson est abondant. Combien de temps lui faudra-t-il pour agir cette fois-ci?
Nous ne sommes pas ici pour détruire notre gagne-pain, la pêche. Nous essayons d'aider nos collectivités à survivre, comme cela a été dit ce matin. Nous voulons faire quelque chose pour que nos gens ne soient pas obligés d'aller ailleurs au Canada pour travailler.
Nous croyons que les méthodes de conservation sont la clé au maintien d'une pêcherie saine. Un exemple serait que nous avons réduit notre nombre de filets. À une époque, je pêchais avec 150 filets au large de Cape Bonavista. Lorsque nous avons eu notre dernière pêche de 7 000 livres, on nous a ramené à 6 000 livres, et nous avons pris ce poisson en l'espace de deux jours—7 000 livres de poissons en deux ou trois jours, avec six filets. Et le gouvernement nous dit qu'il n'y a plus de poissons? Je ne sais pas qui il y a à Ottawa.
Pendant notre discussion en table ronde, nous avions décidé de communiquer avec des collectivités, des politiciens et la FAA, c'est-à-dire le syndicat, pour obtenir du soutien en faveur de la réouverture du quota de morue pour les baies de Bonavista et Trinité. Nos efforts nous ont valu un appui énorme.
En mars 2004, lors d'une réunion à Gander, et Doug en a déjà parlé—Doug Sweetland était avec moi—des représentants de la municipalité de Bonavista, des pêcheurs et moi-même avons rencontré l'honorable Geoff Regan, ministre fédéral des Pêches et des Océans, pour tenter d'arracher un quota de morue pour les baies de Bonavista et Trinité. Nous avons soumis à M. Regan des lettres d'appui en provenance des collectivités, des politiciens et du syndicat. Nous avons souligné la nécessité qu'il y ait un quota de morue. Il nous a répondu avec une question—que Doug vient de vous livrer : « Comment pourrions-nous ouvrir une pêche à la morue le long de la côte nord-est tout en essayant en même temps de stopper la surpêche sur le nez et la queue des Grands Bancs? » Son problème était de savoir comment expliquer cela à l'OPANO. Voilà ce qu'il nous a dit.
Nous autres pêcheurs nous demandons, s'il y avait un Saint-Pierre et Miquelon—et je n'ai rien contre ces gens-là—dans nos baies, aurions-nous une pêche à la morue? En 1992, ils nous ont repris nos quotas de saumon, mais Saint-Pierre et Miquelon continue encore aujourd'hui de pêcher le saumon.
Il nous faut enlever la politique fédérale du secteur des pêches. Les politiques en matière de surpêche étrangère, l'exploitation pétrolière, la politique et l'OPANO ne devraient jouer aucun rôle dans la prise de décisions quant à l'avenir des communautés côtières. Nous nous efforçons de survivre ici et cela fait plus de 500 ans que nous sommes ici et que nous survivons. À une époque, le long de cette côte, si vous étiez venu à Bonavista dans les années 1930 et 1940, vous n'auriez vu que des étendoirs, des claies et des gens qui salaient le poisson—hommes, femmes et enfants—qui étendaient le poisson sur les claies de séchage. L'on ne voit plus cela de nos jours, mais c'est ce que nous voulons. Nous ne voulons pas retourner au commerce du poisson salé. Ils nous disent que le marché n'est pas bon en ce moment pour la morue, mais il y a un bon marché pour la morue salée-séchée, et nous pouvons la traiter dans notre usine.
Terre-Neuve est la province canadienne la plus riche en ressources, et j'espère que vous autres qui venez du Québec et du Nouveau-Brunswick et d'ailleurs vous en souviendrez. Nous possédons les plus riches ressources au Canada. Or, les gens qui essaient de gagner leur vie ici sont les plus pauvres. Par le passé, le gouvernement fédéral a troqué nos ressources et mal géré nos pêcheries. Les collectivités côtières et leurs habitants ont souffert à cause de cela. Personne d'autre n'a souffert. N'ont souffert que les gens qui sont ici.
Il y a une ou deux choses encore.
Il y a par exemple le COSEPAC. Nous n'avons rien à voir avec lui pour la simple raison que s'ils adoptent ce qui est proposé en vertu de la LEP, alors les pêcheurs côtiers de Terre-Neuve et du Labrador seront condamnés. Nous ne serons plus autorisés à pêcher la lompe pour ses oeufs. Nous ne serons plus autorisés à pêcher nos homards. Ils nous fermeront boutique, parce que la morue sera une espèce en péril.
En ce qui concerne les phoques, l'on en dénombre à l'heure actuelle 6,2 millions. Un chercheur m'a dit un jour que chaque phoque consomme en moyenne huit livres de morue. Alors faites le calcul. Vous n'avez pas besoin de moi pour le faire à votre place.
En conclusion, merci de m'avoir donné l'occasion de contribuer ma voix aux délibérations du comité. Que Dieu vous bénisse.
Et j'ai quelque chose ici. C'est tiré du rapport sur la pêche indicatrice. Cette pêche n'est plus à Bonavista, mais en 2004, chaque filet prenait une moyenne de 90 livres, et en 2005, cette année, cela est passé à 102 livres. Cela est tiré du rapport sur la pêche indicatrice.
¸ (1435)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, Hedley. Nous n'avons pour le moment pas de photocopieuse, mais dès que nous serons en mesure de le faire nous ferons distribuer à chaque membre ce que Hedley a à la main et le graphique qu'il a. Alors je vous demande d'être patients.
Albert, aimeriez-vous nous dire quelques mots?
M. Albert Johnson (Panel de pêcheurs côtiers): Merci.
Je m'appelle Albert Johnson. Je suis pêcheur et cela fait environ 40 ans que je pêche le poisson de fond le long de la côte est de Terre-Neuve. Je pêche également le crabe dans ces eaux depuis le milieu des années 1980.
J'aimerais tout d'abord remercier le comité de m'avoir invité à venir l'entretenir brièvement aujourd'hui de questions touchant l'industrie des pêches, du point de vue particulier d'un pêcheur.
Il est notoirement connu aujourd'hui que pendant plusieurs années avant le moratoire, le ministère des Pêches et des Océans avait ignoré les avis et conseils des pêcheurs au sujet de l'état catastrophique des stocks de poisson et du déclin de la morue. À mon avis, le MPO court aujourd'hui très sérieusement le risque de répéter son erreur passée en ignorant les conseils et les histoires des pêcheurs quant à l'importante présence renouvelée de la morue dans nos eaux.
Pendant toutes mes années de pêche je n'ai jamais vu la morue aussi abondante en eaux côtières qu'au cours des trois ou quatre dernières années. La pêche indicatrice, qui est administrée par la FFAW, qui est notre syndicat, est pratiquée autour de l'île depuis plusieurs années et elle montre des niveaux de prise inconnus il y a quelques années—par exemple, 1 000 livres pour un seul filet maillant. Un filet maillant c'est 50 brasses de filet, à une profondeur de seulement une brasse et demie.
En dépit de toutes ces informations, le MPO a fermé les yeux sur tous les signes positifs de cette reprise. Pourquoi? Personnellement, je pense que le MPO est toujours en petit peu en état de choc par suite de ce qui est arrivé en 1992 et il veut donc voir des preuves écrasantes plutôt que tout simplement raisonnables qu'une relance est bel et bien amorcée avant d'agir.
Une partie du problème est qu'il semble qu'on ne soit pas en train de faire le travail scientifique nécessaire pour justifier la position adoptée par le MPO. Il dit qu'il n'y a pas de poisson au large des côtes, mais il n'a pas expliqué aux pêcheurs quelles preuves scientifiques ou quelles études il possède pour le prouver. Il n'a pas non plus expliqué le lien ou la relation entre la présence ou l'absence de morue en zone côtière et en haute mer.
Voici que 13 années se sont écoulées depuis l'imposition du moratoire et nous ne comprenons toujours pas certains aspects fondamentaux de cette pêche. Je me demande parfois si le MPO n'a pas quelque motif caché qui le pousse à faire ce qu'il fait : principalement, utiliser cette crise de la ressource pour réduire le nombre de pêcheurs actifs dans l'industrie. C'est là de la pure spéculation de ma part, mais compte tenu des preuves du rétablissement des stocks, pour quelle autre raison le MPO tiendrait-il tant à ne pas augmenter les quotas pour la pêche côtière?
J'aimerais dire encore quelque chose au sujet du rétablissement des stocks. Au cours des deux derniers mois, de nombreux pêcheurs, moi compris, avons participé à la prise d'un quota de turbot dans la zone 3LNO. Cette pêche expérimentale s'est faite dans des eaux se trouvant à entre 25 et 200 milles de la côte, à des profondeurs supérieures à 160 brasses et avec une couverture à 100 p. 100 par des observateurs. Pendant cette pêche, des quantités conséquentes de morue de tailles différentes ont été prises. Si mon souvenir est exact, dans les années 1970 et 1980, l'on n'a jamais pris de morue à de telles profondeurs. Que cela signifie-t-il? Le MPO a-t-il quelque réponse?
Je tiens à remercier de nouveau le comité de m'avoir permis de lui adresser ces quelques mots, et s'il y en a parmi vous qui ont des questions, je me ferai un plaisir d'y répondre. Respectueusement soumis, Albert Johnson.
¸ (1440)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, Albert. Nous vous en sommes reconnaissants.
George.
M. George Feltham: Oui. Bonjour. Je tiens bien sûr à vous remercier de l'occasion qui m'a été donnée de comparaître ici devant vous aujourd'hui. Il va être très difficile de ne pas répéter certaines des choses qui vous ont déjà été exposées.
Une chose que j'aimerais néanmoins souligner est que je crois—et je pense que c'est le cas d'un grand nombre des pêcheurs du coin—que l'une des principales causes de l'effondrement des stocks de morue du Nord a été la science. La science a joué un rôle énorme dans les années 1970 et 1980. Elle a grossièrement surestimé la biomasse. Cette estimation a en tout temps été maintenue du côté supérieur de la fourchette, ce pour satisfaire l'avidité des grosses entreprises—des multinationales comme la FPI et la National Sea. Il n'y a aucun doute là-dessus. L'on n'a même pas écouté le propriétaire-exploitant indépendant.
Je suis en train de réorganiser un petit peu mes notes ici car je voudrais sauter par-dessus certaines des choses dont d'autres ont déjà parlé, alors je demande votre indulgence.
J'aimerais revenir sur ce qu'a dit M. Sweetland au sujet du poisson et de la science dans les baies. Le poisson est là. Pouvons-nous le quantifier? Oh, non, car toutes les données recueillies pendant les années antérieures l'ont été par la flotte mobile au large des côtes. Nous n'avons donc aucun moyen de quantifier les stocks de poissons dans la baie ni le long des côtes car dans les années 70 et 80 ce que nous faisions était égal au gouvernement et aux chercheurs tant et aussi longtemps que l'appétit des grosses entreprises était satisfait. C'est tout ce qui les intéressait.
Vous savez, en fait—et avant de traiter de cela, il me faudrait peut-être demander où d'autre au Canada un stock est-il géré depuis la pointe du Labrador jusqu'à l'extrémité sud de la presqu'île d'Avalon? Mon Dieu, nous avons un stock 3Ps qui englobe Placentia Bay et Fortune Bay. C'est une zone large de quoi, 100 milles? C'est à peu près cela, et cela s'étend jusqu'à la limite des 200 milles.
Nous avons un autre stock, le 3Pn. Nous avons le 4R. Toutes ces petites sections sont en train d'être gérées. Pour ce qui est du 2J3KL, nous avons un stock qui est géré sur des milliers de milles. C'est là son aire de distribution géographique. La science d'aujourd'hui est enfin en train d'accepter qu'il existe des stocks propres aux baies, des stocks côtiers.
Dans le cadre de la dernière évaluation que j'ai eu le privilège d'examiner, ils ont dit que la croissance en zone côtière était de 40 p. 100. Une croissance de 40 p. 100 pour les stocks côtiers par opposition à 2 p. 100 pour les stocks au large des côtes. Or, c'est là la réponse à la question de M. Sweetland. C'est là la réponse que le ministre peut donner à la pêcherie. C'est là la raison pour laquelle il nous faut examiner les différents composants. C'est ce pourquoi nous avons au départ décimé le stock. La science ne s'est pas penchée sur les différents composants. Elle ne s'est pas penchée sur les composants à Hamilton Bank, à Funk Island Bank, sur le nord des Grands Bancs et en zone côtière. Qu'ont-ils fait? Dès l'épuisement des stocks de Funk Island Bank ou du nord des Grands Bancs, ils ont transféré des quotas pour la FPI et la National Sea un peu plus vers le sud; ils ont doublé leur quota et l'ont déplacé d'une zone à une autre. C'est là l'une des principales causes du désastre avec la morue du nord.
Nous continuons encore aujourd'hui de lutter. Nous nous battons encore aujourd'hui, comme l'ont dit M. Sweetland et les autres qui sont intervenus avant moi. Nous luttons pour leur faire reconnaître que nous avons de la morue en zone côtière.
Il y a des gens qui se disent peut-être dans un coin de leur tête : « Est-il possible qu'il y ait jamais autant de morue en zone côtière que le prétendent tous ces gars? Ils exagèrent ». Mais ils n'exagèrent pas, pas du tout. Je suis également pêcheur de homard et certains jours les 200 pièges à homard ont contenu 200 livres de morue.
Où est le gouvernement? Je pense que cet article dans le journal ici résume assez bien la situation. Même notre propre ministre des Pêches provincial est en train de dire « Nous avons du sang sur nos mains; il nous faut présenter une image telle que nous serons en mesure de régler ce problème de surpêche étrangère ». Eh bien, cela m'est complètement égal quelle image je vais devoir projeter; je ne vais pas baisser les bras et laisser mourir nos collectivités. La première chose qu'il nous faut faire c'est éduquer nos politiciens au sujet de la pêcherie. Qu'ils passent du temps sur place—et je dis cela sauf tout le respect que j'ai pour les politiciens.
J'ai reçu plusieurs appels l'autre jour au sujet d'un article sur la pêche au capelan. Elle devrait être fermée. Je n'ai jamais lu l'article, alors je ne peux pas le critiquer, mais il a été écrit par un politicien. Or, cette pêche du capelan représente des milliers d'emplois et d'heures-personnes dans cette province. Le politicien qui a fait ce commentaire, sait-il que les pêcheurs ne recueillent que 1 p. 100 de la biomasse? Voilà ce qu'ils prennent. Les phoques, eux, prennent 910 000 tonnes métriques par an. Voilà ce que nous dit le ministère de votre gouvernement. Alors il nous faut être prudents s'agissant de décider de ce qui doit être dit, car nos collectivités ne vont pas survivre.
J'ai eu l'occasion d'assister à une réunion l'autre jour et les gens ont dit, eh bien, la morue sur la côte Est et la côte Nord-Est, cela ne représente qu'un emploi—car tout est fermé depuis quelques années. Il s'agit du Comité du COSEPAC. Un emploi—alors ce n'est pas très important. Allez dire cela au gars qui a des revenus bruts de 20 000 $ ou 25 000 $ pour maintenir son navire, et demandez-lui ce que les prises accessoires de morue ont représenté cette année pour lui, pour son entreprise, pour sa famille et pour sa collectivité. Allez le lui dire, à lui.
La chose qu'il ne nous faut pas perdre de vue est que lorsque nous perdons une pêcherie, il y a un effet en cascade—et personne ne s'occupe de cet effet en cascade. Je sais que dans le secteur où je pêche, une fois la morue partie, il y a une transfusion immédiate du côté de la pêche au homard, et tout d'un coup il y a de plus en plus de gens qui pêchent pendant toute la saison et non plus pendant une partie seulement.
Il me faut parler de la question du COSEPAC, car je ne peux pas croire que nos politiciens à Ottawa laisseraient cette espèce se faire inscrire sur la liste en vertu de la Loi sur les espèces en péril—sans parler de ce qui se passe maintenant. Elle ne devrait même pas s'y trouver; nous ne devrions pas être ici aujourd'hui en train d'en discuter. Nos politiciens nous ont laissé tomber, ils nous ont laissé tomber en grand, car vous allez fermé jusqu'à la toute dernière pêcherie de l'île. Voilà ce qui va se passer si vous laissez faire cela. J'ai peur, car j'ai peur que le gouvernement et que nos politiciens autorisent l'inscription de la morue des côtes Est et Nord-Est sur la liste des espèces en péril comme sacrifie pour maintenir ouverte une pêcherie sur les côtes Sud et Ouest, pour se placer quelque part au milieu et essayer de satisfaire tout le monde. Mais cela ne suffit pas. Cela est insuffisant.
La pêche côtière ici a sa place, elle va garder sa place et nous allons nous battre pour l'y maintenir. Je balaie la pièce des yeux et je vois combien de pêcheurs il y a ici aujourd'hui. Je peux comprendre. Je rentre chez moi après certaines de ces séances auxquelles je prends la parole et je me dis, bon sang, tu as vraiment livré ton message aujourd'hui et cela va changer les choses; puis la semaine suivante je vois dans le journal un article pondu par un politicien ou un autre et qui détruit tout ce que j'ai essayé de faire. Peut-être qu'il a obtenu ses informations auprès d'une personne qui n'est même pas active dans la pêcherie concernée, ou qui n'y a pas investi 100 000 $ ou 150 000 $.
C'est facile. C'est facile pour moi de me tenir devant vous et de vous critiquer en tant que politiciens. Je n'ai jamais été à votre place.
¸ (1445)
C'est également facile, en tant que politicien, de vous tenir là et de faire des remarques autour de la pêcherie, parce que vous n'avez jamais été de ce côté-là non plus. L'une des choses que nous avons pour promouvoir la pêcherie, si nous voulons survivre, c'est l'intendance conjointe.
Vous parlez du COSEPAC. Les Américains sont allés en Iraq et ils n'ont pas encore réussi à déloger tous ceux qu'ils voulaient, alors qu'ils sont pourtant munis de la meilleure technologie et des meilleures armes qui existent. Vous inscrivez la morue sur la liste des espèces en péril, et quelqu'un en a parlé tout à l'heure dans le contexte de l'exécution de la loi. Il n'y a pas au Canada des outils d'exécution suffisants pour que personne dans cette province ne prenne de morue si celle-ci est inscrite sur la liste des espèces en péril, parce que cela va être perçu comme une pêche tracassière. C'est ainsi que cela va être perçu. Cela va vous empêcher de gagner votre vie. Si vous mettez tout cela ensemble, nous avons une croissance de 40 p. 100 en zone côtière. C'est ce que dit votre science.
Il nous faut établir une intendance conjointe. Avons-nous des exemples? Oui, nous en avons, ici même à Bonavista Bay, des exemples de rôles qui ont été assumés. Le projet du homard de Eastport Peninsula, l'intendance partagée et le fait d'y jouer un rôle. Comment changer les gens? Les gens doivent avoir le sentiment d'en faire partie; ils doivent avoir le sentiment qu'ils font des choses pour eux-mêmes. C'est là la première condition.
L'autre exemple est la pêche au crabe à Bonavista Bay. Les comités ont géré le crabe à un point tel que, oui, les stocks sont en baisse ailleurs, mais à Bonavista Bay, ils semblent être bien portants. Donnez-nous le droit de gérer ou de cogérer nos stocks de morue en zone côtière. Donnez-nous ce droit de les gérer. Nous ne pourrions pas faire pire que le gouvernement ou que ce que d'autres gestionnaires ont fait par le passé. Mais au moins nous saurions pour qui nous le faisons, pour quelle raison nous le faisons, parce que c'est pour nous-mêmes, pour nos collectivités et pour l'avenir de nos enfants. Voilà pourquoi nous le faisons. C'est ainsi qu'il sera possible d'instaurer l'esprit d'intendance nécessaire pour bâtir pour l'avenir et la croissance future.
Merci.
¸ (1450)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Feltham. Bravo.
Monsieur Burry.
M. Pearce Burry: J'ai supprimé certaines des choses dont j'allais vous entretenir car d'autres en ont déjà parlé.
Je vais commencer par vous dire que j'ai eu l'occasion de me trouver en la présence d'un chercheur professionnel spécialisé dans les habitudes de fraie de la morue en 1986; c'était avec la NIFA, l'association des pêcheurs côtiers. Nous avions été convoqués à une audience à la Cour fédérale à St. John's. Nous avons répondu aux questions des avocats, de la Cour et du gouvernement, et le gouvernement a jugé qu'il n'existait pas suffisamment de preuves en ce qui concerne notre pêcherie. C'est ainsi que nous autres pêcheurs avions de nouveau tort. Mais en 1992, le gouvernement a eu raison, avec les mêmes renseignements que ceux que nous lui avions donnés en 1986.
J'ai un petit conseil pour M. Arthur May. S'agissant de pêche vivrière, nous autres les Terre-Neuviens avons tous les droits du monde. En 1949, lorsque nous nous sommes joints à la Confédération, on nous a accordé ce droit, qui devait être inaliénable. C'était le droit de mettre du poisson sur la table. De mettre un oiseau marin sur la table, de mettre de la viande de phoque sur la table chez nous, car c'est là le régime alimentaire de base du Terre-Neuvien. Joseph R. Smallwood, notre premier ministre à l'époque, avait dit que cela ne devait jamais nous être enlevé.
En 1985 ou 1986, la Norvège a eu un problème avec sa pêcherie. Ils prenaient trop de capelan, environ 800 tonnes métriques. Ils ont réduit leurs prises totales admissibles et en 1988-1989 ils ont eu une pêche expérimentale, avec ligne et hameçons, une pêche à la traîne appâtée, et la chose avait été bien gardée; cela a donné de très bons résultats. Leur pêcherie est revenue. Y en a-t-il un quelconque parmi ces politiciens au gouvernement fédéral qui se soit renseigné pour savoir ce qu'a fait la Norvège pour récupérer cette pêcherie? Je me demande si l'on possède des données sur le temps qu'il a fallu pour que cette pêcherie redevienne durable.
Le long de la côte Est, nous avons beaucoup de poisson, mais il semble que le gouvernement ne veuille pas écouter ou croire ce que nous avons à dire. Il y a environ trois ans, quelque 500 000 livres de poissons ont été pêchés au carrelet ou au gaffeau à Smith Sound, parce que l'eau avait gelé, comme l'ont dit les chercheurs. Personne sauf les pêcheurs ne sait vraiment ce qu'il y a autour d'ici et ils commencent à en avoir assez d'en parler. Il faudrait que quelqu'un vienne ici pendant la saison du capelan pour voir ce que les vieux n'ont encore jamais vu de leur vie.
Il est temps que le gouvernement terre-neuvien reprenne la pêcherie, et si vous attendez de rebâtir la pêcherie et les stocks côtiers sur le dos de nos pêcheurs, alors je vous dirais que nous ne devrions pas avoir à souffrir pour la pêche hauturière. Si le COSEPAC cherche à établir un parc marin international dans la baie de Bonavista, alors notre activité de pêche dans cette baie sera finie. Je peux vous dire tout de suite qu'il n'y aura jamais de parc international dans la baie de Bonavista. Il en a été question dans les années 1980, et ils continuent de revenir à la charge.
Voilà tout ce que j'avais à vous dire.
¸ (1455)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Burry.
M'adressant maintenant au comité, qu'il suffise de dire qu'on nous en a servie une platée.
Nous allons maintenant passer aux questions. Comme je l'ai déjà expliqué, ce sont les Conservateurs qui poseront la première question de l'opposition, après quoi il y aura le Bloc Québécois et les Néo-démocrates, et enfin le parti au pouvoir.
M. Keddy va commencer, et il dispose de dix minutes.
M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, d'être venus comparaître devant le comité. Cette séance a, je pense, été très instructive, ouverte et franche.
La première chose, c'est la façon dont fonctionne le système et le fait que cela fait dix ans—et tout le monde à Ottawa, qu'il s'agisse d'un membre d'un parti d'opposition ou d'un député membre du parti au pouvoir, mérite, cela est clair, de payer certains des pots cassés du fait des difficultés vécues par la pêcherie. En même temps, il est beaucoup plus difficile pour un député de l'opposition que pour le gouvernement de changer une politique gouvernementale. Il vous faut le savoir. Je ne suis pas ici en train de demander une exemption politique; je dis simplement les choses comme elles sont.
L'idée que la morue puisse être inscrite sur la liste des espèces en péril ou celle de créer un parc marin dans la baie de Bonavista sont tout simplement inacceptables, et elles doivent être inacceptables à tout le monde.
Par le passé, le comité des pêches a toujours réussi à travailler en tant que groupe uni. Je n'essaie pas de défendre la politique gouvernementale, mais je dirais, en tant que membre actuel et passé de ce comité, que la plupart du temps nous en sommes arrivés à des recommandations plutôt bonnes. Elles n'ont pas toujours été suivies par le ministre des Pêches, alors il y a donc là certaines difficultés et certains décalages.
D'après ce que je vous entends dire, vous qui pêchez, je m'attendrais à ce qu'il y ait un appui du comité. Je ne peux pas me prononcer pour lui, mais je suis certain que nous aurons plus tard d'excellentes discussions au sujet de la pêche côtière et de Bonavista Bay. Cela ne m'ennuie pas de vous le dire. Alors ne croyez pas que vos idées ou que vos paroles soient tombées dans l'oreille de sourds, car ce n'est tout simplement pas le cas.
Cela étant dit, je crois qu'il existe toujours sur le terrain un certain nombre de complications. Il y a la relation prédateur-proie de la morue et du phoque. Et vous savez que l'écoute n'est pas très favorable. Même si nous avons dû beaucoup tordre le bras de certains de nos collègues, le comité a fini par se prononcer en faveur du maintien de la chasse au phoque sélective. Le comité a appuyé cela, et je m'attends à ce qu'il continue de le faire.
Toute la question de ce qui est arrivé dans la pêcherie relativement à l'OPANO n'a rien à voir—et vous avez parfaitement raison de dire que cela ne devrait rien à voir—avec la pêche côtière. Notre pêche côtière n'a rien à voir avec ce qui se passe au large de la limite des 200 milles. Que le ministre ou que tout ministre laisse croire que nos pratiques de pêche côtière—la pêche avec ligne et hameçons, la pêche au filet ou la pêche aux trappes—a quoi que ce soit à voir avec la surpêche étrangère est tout simplement faux.
Nous pouvons facilement défendre notre pêche côtière. Cela n'a jamais posé problème. Le problème n'a jamais été là et ce n'est jamais là-dessus, d'après mon souvenir en tout cas, qu'ont été fondées les décisions de l'OPANO. J'essaie simplement d'établir certains paramètres.
J'aimerais m'adresser maintenant un instant à M. Sweetland pour parler de la boîte noire. Je sais bien que les pêcheurs côtiers, surtout les pêcheurs à la ligne avec hameçons, n'ont pas les moyens de payer plus cher leurs permis de pêche ni d'acheter la technologie de la boîte noire. J'y voyais plutôt le moyen de surveiller notre flotte de chalutiers. S'il nous fallait concéder cela afin d'être en mesure de surveiller les flottes étrangères, alors, personnellement, je serais près à le concéder. Cela voudrait peut-être dire qu'il nous faudrait aider nos pêcheurs à installer les boîtes noires.
Et la science n'est pas toute mauvaise. Vous autres faites partie de la communauté scientifique. Vous êtes la base, les cueilleurs de données sur lesquelles comptent les chercheurs. Il faut qu'il y ait une certaine collaboration et une certaine volonté de travailler ensemble.
Moi-même et mes collègues ici n'avons pas la réponse à ce qui se passe dans la pêcherie, mais je pense que nous sommes d'accord sur un certain nombre de choses. Nous sommes d'accord en ce qui concerne les phoques. Nous sommes d'accord en ce qui concerne la surpêche étrangère, nous sommes d'accord en ce qui concerne la flotte de chalutiers et la surpêche, surtout de la part des chalutiers, ce tout au long des années 1980 et au début des années 1990.
Messieurs, nous ne pointons ici personne du doigt. Nous disons simplement que cela est arrivé. Notre tâche est de veiller à ce que cela ne se reproduise plus jamais; c'est en tout cas ce que nous souhaitons.
En ce qui concerne la discussion au sujet des prises accessoires en zone côtière, j'aimerais que vous me donniez des chiffres réalistes quant à ce que vous croyez que la pêche côtière dans les baies de Bonavista et de Trinité pourrait absorber.
¹ (1500)
M. George Feltham: Monsieur le président, pour répondre à cette question, d'après ce que me disent les pêcheurs sur le terrain, je ne pense pas que quiconque s'attende aux niveaux qu'ils ont eu par la passé. Je veux dire par là que nous avions 115 000 tonnes métriques. Si nous prenons la science et si nous prenons les pêcheurs, je ne pense pas que quiconque puisse brandir le chiffre magique.
S'il est une chose qui est claire c'est que les pêcheurs veulent avoir accès à ce poisson. Ils veulent le prendre mais dans le cadre d'une approche très prudente, et ils veulent progresser, année après année.
Disons que le chiffre de départ est de 3 000 ou de 5 000 tonnes métriques. Vous bâtissez là-dessus au fil du temps en veillant à avoir quelque chose à transmettre à nos enfants, aux générations futures et à nos collectivités.
M. Gerald Keddy: Quelqu'un d'autre?
¹ (1505)
M. Hedley Butler: J'aimerais réagir. Lorsque nous avons rencontré le ministre Regan à Gander—Doug était là avec moi, et nous avions la même chose dans certaines de nos notes—nous lui avions dit que nous voulions un projet pilote. Pourquoi ne pas lancer un projet pilote? Je vous ai dit dans mon exposé que nous utilisions autrefois 150 filets et que nous sommes ensuite passés à six filets. Qu'on lance un projet pilote. Nous ne voulons pas détruire le poisson. Donnez-nous nos 7 000 livres de poisson que nous avions toujours par entreprise, et lancez un projet pilote.
Vous m'avez également entendu dire dans ma présentation que l'usine ici a besoin d'une pêche avec ligne et hameçons. Nous sommes prêts à faire cela. Qui de mieux que les gens qui vivent sur l'eau et qui sont des pêcheurs? Nous avons des observateurs à bord des navires. Nous avons des contrôleurs sur le quai. Nous faisons tout ce qui est possible. Donnez-nous un projet pilote pour un an, et vous pourrez ensuite voir les résultats : avons-nous détruit des stocks?
Il y a quelques années, 3 millions de poissons en provenance de nos filets sont passés par ce quai en moins de deux semaines. C'est toujours ce que je leur ai demandé. Donnez-nous nos 7 000 livres de morue, laissez-nous faire un projet pilote et voyez ensuite à la fin de l'année, une fois la saison terminée, ce que nous avons détruit ou si nous avons infligé le moindre dommage aux stocks de morue. C'est tout ce que nous demandons. Nous ne voulons aucunement détruire les stocks.
M. Douglas Sweetland: Vous avez parlé de collaboration entre pêcheurs et chercheurs. Sur la base de ce que j'ai vu, cela ne fonctionne pas. Dès le premier jour du moratoire, j'ai offert d'aider les chercheurs. Ils pouvaient venir à bord de mon navire avec moi. J'étais prêt à les emmener avec moi, à leur montrer où se trouvait la morue pour qu'ils en voient la quantité. Ils ne voulaient pas qu'on leur en parle. Tout ce que moi je fais est anecdotique; si le chercheur le fait, à supposer qu'il le fasse une fois, alors c'est parole d'évangile. Cela ne fonctionne pas. Et j'ai offert d'aider avec plus que juste la morue.
Tout ce que j'ai comme niveau d'études c'est la 11e année. Je ne peux pas être mis dans la même catégorie qu'une personne qui a un doctorat en science ou autre. Mais c'est ainsi qu'ils voient les choses. C'est ainsi que moi je les vois. Cela ne veut pas dire que mon intelligence ou que ma connaissance de la pêcherie sont inférieures aux leurs. Le gros de ce qu'ils savent provient d'une page dans un livre, tandis que les connaissances que moi je possède correspondent à ce que j'ai vu dans ma vie de pêcheur.
M. Gerald Keddy: La difficulté est la suivante, monsieur Sweetland. La raison pour laquelle je dis qu'il nous faut davantage de coopération—et beaucoup de coopération, bien franchement—entre nos pêcheurs et nos chercheurs est qu'au bout du compte, le gouvernement, à tort ou à raison, va écouter la science.
Je connais beaucoup de pêcheurs. Je représente une circonscription de pêcheurs. Je connais plusieurs chercheurs spécialisés dans la pêche. La majorité de ces chercheurs se sont vu fournir les meilleurs renseignements possibles lors du fléchissement de la pêcherie. Le gouvernement, les maîtres politiques du jour, ont pris des décisions sur la base de politiques. Les chercheurs, eux, ne prennent pas leurs décisions sur la base de politiques.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Keddy.
M. Gerald Keddy: Je ne suis pas en train de défendre la science, mais il est jusqu'à un certain point important de comprendre qui prend la décision au bout du compte.
Je vous avais dit qu'il me couperait la parole.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Je le fais avec tout l'amour que j'ai dans le coeur.
[Français]
Monsieur Blais, vous avez sept minutes à votre disposition.
M. Raynald Blais (Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, BQ): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'être présents. Je vous remercie également de votre patience, d'une certaine façon. Je représente le comté de Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, un comté où, historiquement, il y a eu beaucoup plus de pêche qu'il y en a maintenant. C'est une région qui vit également de tourisme.
Je ne sais pas lequel d'entre vous, M. Sweetland ou quelqu'un d'autre, pourrait me donner davantage d'information. Quoi qu'il en soit, j'aimerais savoir si vous pensez que la situation a évolué.
Depuis le moratoire, est-ce que les gens du ministère des Pêches et des Océans vous écoutent davantage? En fin de compte, on a appris que vous aviez probablement raison sur toute la ligne relativement à ce que vous vivez. Vous écoute-t-on davantage parce qu'on a pris conscience que ce que vous faites, finalement, permet d'avoir une meilleure indication de ce qui se passe en mer? Est-ce qu'on vous écoute davantage au fil des ans? Ou, au contraire, avez-vous l'impression, comme vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur Sweetland, qu'on vous regarde de haut et qu'on oublie facilement que ce que vous faites tous les jours fait de vous véritablement de bons témoins de ce qui se passe en mer?
¹ (1510)
[Traduction]
M. Douglas Sweetland: Je vais répondre à cela—à une partie en tout cas.
Je n'ai pas le sentiment d'avoir été écouté, et je m'occupe de ce dossier depuis avant le moratoire. J'étais représentant syndical avant le moratoire, au niveau local. Dans le cadre de toutes mes réunions et de tout le reste, la seule chose positive que j'aie vue est venue au cours des 12 derniers mois. Nous avons l'automne dernier ici à Bonavista eu une discussion en table ronde entre les pêcheurs, le MPO, l'entreprise et le ministère des Pêches provincial. Je pense qu'à cette occasion on nous a écoutés, mais de façon générale nous sommes complètement ignorés, surtout par les scientifiques. C'est ainsi que je vois les choses.
[Français]
M. Raynald Blais: Néanmoins, j'imagine que ce ne serait pas nécessairement très compliqué ni très difficile d'améliorer la situation. Il suffirait d'avoir de la bonne volonté, possiblement de la part des scientifiques.
Toutefois, à part la table ronde à laquelle vous avez eu l'occasion de participer récemment, qu'est-ce qui pourrait vous donner un peu plus d'espoir qu'on vous écoute? Quel genre de signes attendez-vous de la part du ministère des Pêches et des Océans ou des scientifiques?
[Traduction]
M. Douglas Sweetland: Le signe que j'attends du MPO devra venir d'en haut, et c'est que la classification comme espèce en péril soit rejetée. C'est le principal, à mon avis. Le moins que j'attendais de cette table ronde l'an dernier était que l'on nous accorde une petite pêche côtière, une pêche à la ligne, car c'est ce que nous avions proposé. Il ne s'agissait que de 4 000 à 5 000 livres par bateau; c'est tout ce que nous demandions, et ce n'est pas beaucoup de poisson.
Il ne faut pas oublier qu'à la dernière réunion du CCRH, début 2003, lorsqu'on nous a fermés, ils recommandaient une pêche à la morue du Nord de 1 500 tonnes. Ce pouvait être une prise accessoire, mais il y avait au moins une possibilité de pêche. Cette année-là, il n'y a pas eu de prise—peut-être 100 tonnes dans la pêche indicatrice, mais rien d'autre en 2003. En 2004, on a pris environ 500 tonnes : 400 tonnes de prise accessoire et 100 tonnes pour la pêche indicatrice. L'an dernier, il y en a eu un peu, car 1 000 tonnes ont été prises rien que comme prise accessoire de la pêche à la plie rouge—vous voyez ce que je veux dire, n'est-ce pas? Mais je dis que nous parlons de 3 000 à 4 000 tonnes, si nous avions une petite pêche côtière restreinte à la ligne.
Un autre facteur de cette question d'espèce en péril... l'une des principales dispositions de la Loi sur les espèces en péril, c'est que—et je paraphrase—la morue ne doit pas nécessairement être placée sur la liste des espèces menacées si le ministre cherche activement à enrayer le déclin. Doux Jésus, cette pêche est fermée depuis 1992, hormis ces petites pêches repères. Vous voyez ce que je veux dire? Depuis tout ce temps, il n'y a pas eu de prises de morue, pendant 13 ans. Au cours des trois dernières années, on n'a pratiquement rien pêché. Alors, est-ce que le ministre ne fait rien, ou bien est-ce qu'il fait quelque chose en nous empêchant de pêcher? S'il fait quelque chose, il n'est pas obligé de classer l'espèce, car il fait déjà ce que la loi impose.
Cela nous a été expliqué l'an dernier à une autre réunion—car je vais à beaucoup de réunions à Bonavista, avec des fonctionnaires du MPO. Cela nous a été dit par hasard, le fait que le ministre peut refuser le classement s'il cherche déjà activement à enrayer le déclin. Il n'a rien besoin de faire de plus. Donc, en ce sens, je me dis que l'on peut refuser.
¹ (1515)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Aviez-vous une courte réponse à donner, monsieur Feltham?
M. George Feltham: Oui. Je fais simplement remarquer que le ministre a réagi très vite quand on a parlé d'inscrire le saumon de la côte Ouest sur la liste des espèces en danger. Or, ici il traîne des pieds. C'est l'une des raisons qui font que les gens ici se méfient.
J'aimerais faire plusieurs autres remarques.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Désolé, je dois vous arrêter, mais c'est le tour de M. Stoffer.
Monsieur Stoffer, pouvez-vous attendre?
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Oui, laissez-le terminer.
Le président suppléant (M. Scott Simms): D'accord, continuez.
M. George Feltham: Je voulais ajouter une autre chose encore, concernant la quantité de biomasse près des côtes.
Ils avaient un programme de marquage et les scientifiques ont eu cette idée.
Je pense que les scientifiques commencent à écouter, car ce n'est que depuis cette année qu'ils admettent la différence entre le large et le littoral. Ce n'est que cette année qu'ils ont séparé l'augmentation de la prise côtière et la prise au large, mais nous avons des programmes de marquage et ils se sont demandés si le poisson côtier n'irait pas peupler le large. Or, il n'y a absolument aucune indication, donnée par le programme de marquage, d'un mouvement du littoral vers le large. Cela représente beaucoup de munitions que le ministre peut utiliser.
L'autre chose dont j'aimerais parler, c'est que lorsque vous êtes autour d'une table ronde et que l'on parle de pêche à la ligne... une pêche, ce que nous appelons une pêche, c'est une pêche qui utilise les engins habituels de cette localité, car si vous passez de l'une à l'autre, il y a certainement une différence dans les engins et un conflit entre les engins. Il n'y a absolument aucune raison de ne pas avoir une pêche, comme l'a dit mon prédécesseur, de 4 000, 5 000 ou 7 000 livres par personne, mais ce serait une pêche utilisant le type d'engins couramment utilisés localement.
Merci.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Stoffer, d'avoir permis à M. Feltham de terminer. Vous avez maintenant vos cinq minutes.
M. Peter Stoffer: Merci beaucoup.
J'ai plusieurs questions à poser. Peut-être pourriez-vous en prendre note, car je sais que le temps me sera compté.
Premièrement, lorsque nous avons rédigé notre rapport sur la côte Est il y a des années de cela, nous avions un paragraphe sur les filets fantômes. Pourriez-vous me dire quel effet les filets fantômes ont aujourd'hui sur la pêche et est-ce que Terre-Neuve ou le gouvernement fédéral font quelque chose pour récupérer ces filets?
Monsieur Sweetland, vous avez expliqué que vous ne pouvez débarquer le poisson et vous ne pouvez le garder, je parle là de la prise accessoire. Pouvez-vous nous dire franchement ce que vous faites de ce poisson?
Nous savons ce qui se passe dans la baie de Fundy. Beaucoup de poissons sont rejetés à la mer. Le Fonds mondial pour la nature a écrit dans un rapport que des tonnes et des tonnes de morue pêchée par les navires hauturiers comme prise accessoire sont jetées à la mer. Est-ce que cela se passe également dans la pêche côtière?
George, vous avez dit que votre ministre des Pêches provincial—Trevor Taylor, je suppose—a déclaré que vous avez du sang sur les mains. Pourriez-vous nous expliquer un peu ce que cela signifie?
Par ailleurs, nous étions ici avec le CCRH il y a un an ou deux et on y parlait de ce qu'ils appelaient des zones d'exclusion des phoques mais sans jamais réellement expliquer comment cela fonctionnerait. Comment tenir les phoques à l'écart de, mettons, Smith Sound, ou quelque chose du genre?
Est-ce que vous pourriez nous expliquer un peu comment vous voyez une zone d'exclusion des phoques. Si une partie du secteur 2J3KL, par exemple, était identifiée comme aire de reproduction ou nourricerie de la morue, faudrait-il autoriser une activité quelconque, exploitation de pétrole et de gaz ou même pêche, dans cette nourricerie? Ne serait-ce pas là le lieu idéal—et je parle aussi naïvement que je puis, pour avoir une zone marine protégée afin de protéger la nourricerie des stocks?
Enfin, monsieur Sweetland, vous avez dit que le MPO dit que son estimation de biomasse est de 50 à 60 tonnes. Vous l'estimez à plus du double, d'après le contenu des filets, selon vos propres constatations, et vous demandez 4 000 à 5 000 tonnes de morue, je crois. Il semble assez raisonnable, même avec les estimations du MPO, que l'on vous autorise à faire une pêche pilote à la ligne pour déterminer la taille du stock. Mais le MPO semble opposer un refus. Ma dernière question est donc celle-ci : Pourquoi pensez-vous que le MPO refuse? Quelle est votre réaction instinctive quant aux raisons de cela?
¹ (1520)
M. Douglas Sweetland: Nous ne répondrons pas à toutes ces questions dans l'ordre, monsieur le président.
Voulez-vous commencer, George?
M. George Feltham: Eh bien, je serai très bref. Le sang sur nos mains—je suppose qu'il se rend compte que cela change. Il y a des choses que nous pouvons faire dans nos propres zones pour rendre cette chasse plus responsable, plus présentable aux yeux de l'étranger.
Pour ce qui est des enjeux de pêche, peu m'importe quelle technologie vous utilisez : ce n'est pas la technologie qui détruit le poisson, ce sont les gens. Ce n'est pas l'arme à feu qui tue, c'est la personne qui la tient. À moins d'avoir une attitude responsable et des méthodes de pêche responsables,... si vous voyez une personne jeter sa ligne par-dessus bord parce qu'il n'a pas la force de la rentrer... ou lorsqu'une personne laisse un filet maillant dans l'eau pendant deux ou trois jours, c'est là où vous causez des problèmes au poisson. C'est donc l'individu. Il faut donc que les pêcheurs agissent de façon responsable et manient leur engins de façon responsable.
Pour ce qui est de l'autre question, vous pouvez voir que je suis perdu. Je donne la parole à quelqu'un d'autre.
M. Douglas Sweetland: Pour ce qui est du rejet en mer de morue, personnellement je n'ai jamais pris de morue que je ne pouvais débarquer. Il y a toujours des prises accessoires que l'on peut... Le seul problème maintenant, c'est que nous ne sommes même pas autorisés par les règlements du MPO à relâcher le poisson vivant.
M. Peter Stoffer: Monsieur Sweetland, rectifiez si je me trompe, mais vous avez dit que vous n'étiez pas autorisé à le ramener.
M. Douglas Sweetland: J'ai dit cela.
M. Peter Stoffer: Vous ne pouvez le ramener. Alors qu'en faites-vous?
M. Douglas Sweetland: Je ne tue pas de poisson. Nous ne sommes pas autorisés non plus à le rejeter. Nous n'avons pas eu de problème avec cela—pas moi, personnellement.
M. Hedley Butler: Eh bien, le règlement dit que nous ne sommes pas autorisés à rejeter et nous ne sommes pas autorisés à ramener. De toute façon, nous tentons notre chance et nous le ramenons. Des pêcheurs ont été verbalisés. Ils avaient des observateurs à bord. Ils ont pris la morue vivante et l'ont remise à l'eau, et on les a verbalisés pour cela.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Stoffer. Merci, monsieur Butler.
M. Hedley Butler: Une autre chose sur les filets fantômes—
Le président suppléant (M. Scott Simms): Une seconde.
Il veut dire quelque chose. Nous avons une répartition du temps ici, messieurs. L'autorisez-vous?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Scott Simms): D'accord, poursuivez.
M. Albert Johnson: Je me dis juste que les gens sont peut-être intéressés par les filets fantômes. À mon avis, on dramatise. Je ne pense pas que les filets fantômes créent de problème du tout, car nous avons récupéré des filets qui étaient au fond depuis moins d'un an et ils ne contenaient absolument rien. Ce qui se passe, c'est qu'ils finissent par couler au fond et ne prennent plus de poissons. Nous l'avons prouvé, nous en avons la preuve. Je pense donc que les médias et différentes organisations dramatisent à l'excès la question des filets fantômes. Voilà ce que j'en pense.
M. George Feltham: Je serai bref.
L'an dernier, ils ont lancé un programme sur la péninsule nord pour récupérer les filets fantômes. Ils n'ont pratiquement rien ramené. Ils n'ont pas trouvé là haut de filets fantômes.
L'une des raisons du problème des filets fantômes, si vous remontez aux années 70, était le programme de remplacement des engins que le gouvernement avait mis en place à l'époque; je crois que c'était sous Roméo LeBlanc. Ils ont donc introduit ce programme de remplacement, et il en coûtait moins cher aux pêcheurs de couper leurs filets et d'en réclamer le remboursement au gouvernement. C'était très courant alors.
Non seulement cela, monsieur, mais même encore en 1985, 1986, 1987, j'avais 120 ou 130 filets pour pêcher la morue, ramenant de 5 000 à 6 000 livres. Aujourd'hui, avec quoi est-ce que je pêche? Six filets?
Allons donc, soyez réalistes, les gars. J'ai perdu deux filets maillants en 26 années de pêche; voilà ce que j'ai perdu. Un pêcheur responsable ne perd pas ses filets, à moins d'une bizzarerie comme lorsque des dragueurs accrochent nos filets. À par cela, au cours des dernières années, nous n'avons pas eu de problème avec les dragueurs—c'est plus ou moins une excuse pour dire du mal de certains engins.
¹ (1525)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Feltham.
Mon chargé de recherche aimerait un éclaircissement, monsieur Sweetland. Vous avez dit avoir proposé... Avez-vous dit 4 000 ou 5 000 livres par pêcheur ou bien était-ce 4 000 ou 5 000 tonnes pour la pêcherie?
M. Douglas Sweetland: C'était 4 000 ou 5 000 livres par bateau, par pêcheur.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci. Je voulais juste vérifier.
Monsieur Murphy.
L'hon. Shawn Murphy (Charlottetown, Lib.): Pour mettre tout cela en perspective, j'aimerais une réponse de chacun d'entre vous.
Je sais que vous l'avez fait de manière périphérique, mais pourriez-vous nous indiquer chacun quelles espèces vous pêchez en ce moment? Vous êtes tous pêcheurs. Nous savons que ce n'est pas de la morue.
Monsieur Sweetland, vous pêchez le crabe, n'est-ce pas?
M. Douglas Sweetland: Oui.
L'hon. Shawn Murphy: Et quel est votre quota?
M. Douglas Sweetland: C'est 13 500.
L'hon. Shawn Murphy: Et c'est la seule pêche que vous pratiquez en ce moment?
M. Douglas Sweetland: Je pêche également le homard et j'ai ajouté le crabe-araignée, la lompe et le maquereau.
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Butler.
M. Hedley Butler: Je pêche le crabe—13 500 livres—et le homard, et je pêche un peu de plie rouge et de lompe. J'ai une licence de maquereau, une licence de hareng et j'ai aussi une licence de saumon que je n'ai pas le droit d'utiliser.
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Johnson.
M. Albert Johnson: Oui, je pêche le crabe et le turbot cette année. J'ai une prise de crabe de 105 000 livres.
L'hon. Shawn Murphy: Combien?
M. Albert Johnson: C'est 105 000.
L'hon. Shawn Murphy: 105 000 livres?
M. Albert Johnson: Livres, oui. Et je pêche le turbot.
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Feltham.
M. George Feltham: Je pêche le crabe—12 300. Je pêche le capelan, la plie rouge, le hareng, le homard—toutes les espèces qu'on m'autorise.
L'hon. Shawn Murphy: Monsieur Burry.
M. Pearce Burry: Je suis retraité.
L'hon. Shawn Murphy: Une chose qui n'a pas été mise en lumière ici, c'est que lorsqu'on regarde les statistiques des 15 dernières années—et je ne sais pas s'il y a la moindre corrélation—lorsque les stocks de poisson ont chuté, comme on l'a vu au début des années 80, mais cela a probablement commencé dans les années 70, on a vu une augmentation de la quantité de crustacés, principalement de crabe, de crabe des neiges, de crevettes et de homard. Toutes ces espèces se portent bien. Non seulement les prises ont-elles augmenté, mais les TAC ont été accrus et les prix aussi ont grimpé, sauf cette année pour le crabe.
Est-ce que vous, les pêcheurs qui sortez tous les jours, voyez une corrélation, à savoir que lorsque le nombre de poissons diminue, celui des crustacés augmente et si jamais la morue revenait, on verrait baisser la quantité de crevettes, de crabe des neiges et de homard? Avez-vous un avis là-dessus?
M. Hedley Butler: Dans ma présentation, monsieur—et je crois que vous n'étiez pas là, c'était avant votre arrivée. J'ai répondu à votre question dans ma présentation, disant qu'une fois que l'on voit la pêche au crabe diminuer, le poisson—
L'hon. Shawn Murphy: Je vous ai entendu le dire, mais c'était un peu vague...
M. Hedley Butler: On le constate. Nous prenons de grosses morues. La taille des mailles est incroyable : nous utilisons des mailles de six et demi à dix et demi de pouces, comme Doug l'a dit. Et dans les gros poissons que nous attrapons, notamment de morue du Nord, nous trouvons des crabes femelles—des crabes femelles—
L'hon. Shawn Murphy: Dans ces grosses morues?
M. Hedley Butler: Dans les grosses morues, jusqu'à six et sept dans les estomacs. Cela va faire baisser l'abondance du crabe.
M. George Feltham: Cela a été assez manifeste ces dernières années, ce que vous dites, sans aucun doute. Il semble que le crabe suive une pente descendante. La crevette est toujours abondante. Dans le cas du poisson, les problèmes environnementaux qui ont existé dans le milieu des années 90 ont certainement causé beaucoup de problèmes—des problèmes de croissance chez le capelan, des problèmes de croissance chez le hareng, et une rareté du maquereau.
Cette année, nous voyons le capelan retrouver sa taille normale et nous le voyons revenir frayer sur les plages. Beaucoup de gens pensaient que parce que le capelan ne se montrait pas sur les plages, il n'y en avait pas. Il y en avait toujours, mais il se tenait en eau plus profonde. Il était même plutôt abondant.
Nous voyons le maquereau revenir cette année sur le littoral Est et Nord-Est, ce qui est encore un bon indicateur du retour du poisson.
Nous voyons de la morue. Hedley a mentionné les grosses morues, mais il n'y a pas que les grosses. On a reproché aux pêcheurs cette année d'utiliser des filets maillants de cinq pouces et demi pour la plie rouge. Mais vous savez, cela s'est avéré utile. Non seulement a-t-on vu les grosses morues dont parle Hedley, mais le pêcheur qui prenait accessoirement de la morue avec ses mailles de cinq pouces et demi a prouvé qu'il y avait aussi une abondance d'autres classes d'âge. Ici, nous avions de filets de six et demi, six et cinq et demi. Ensuite, il y avait le programme de pêche indicatrice qui utilisait des mailles de trois et demi, qui ont montré l'existence de classes d'âge différentes.
Donc oui, je crois que le poisson est de retour. Je crois qu'il y a de l'avenir dans cette pêche. Je crois qu'il y a un avenir pour nos collectivités. Mais nous devons vous amener, vous et les scientifiques, à y croire également. Nous devons combler ce fossé de communications pour survivre dans nos collectivités.
¹ (1530)
L'hon. Shawn Murphy: Vous avez parlé de la nécessité d'une pêche commerciale limitée, surtout ici à Bonavista. Une autre revendication, dont vous n'avez pas parlé, est celle de la population générale de Terre-Neuve qui demande l'ouverture à tout le monde de la pêche alimentaire.
Est-ce que vous, comme groupe, y êtes favorable?
M. George Feltham: Si c'est une pêche récréative, oui. Quand on parle de pêche alimentaire, si une personne veut pêcher pour se nourrir, il lui en coûterait beaucoup moins cher de s'approvisionner au supermarché que de faire de la pêche alimentaire ou récréative.
J'ai toujours dit, et je le répète aujourd'hui, que je suis en faveur d'une pêche commerciale d'abord et d'une pêche récréative ensuite. Je ne vais pas rester les bras croisés—et beaucoup d'autres pêcheurs me disent la même chose—et assister à une pêche récréative sans pêche commerciale. La part de chacun devra être négociée par les parties concernées.
L'hon. Shawn Murphy: Nous avons peut-être un malentendu sur les termes, car votre classification de pêche récréative et de pêche alimentaire est différente de la mienne. La pêche alimentaire, si j'ai bien compris, signifie que tout un chacun qui veut s'acheter un permis peut aller pêcher pour sa propre consommation. Voilà mon interprétation. Je crois savoir que l'on a accordé des permis il y a deux ou trois ans, au nombre de 90 000, et qu'il y a eu une pêche alimentaire. Je sais que beaucoup n'ont pas utilisé leur permis et que beaucoup sont sortis et n'ont pas pris de morue, et je n'ai aucune idée du nombre de tonnes de morue que l'on a pu attraper ainsi.
Êtes-vous en faveur de la pêche alimentaire?
M. George Feltham: Il me semble avoir dit très clairement que je suis pour... Je ne pense pas qu'il existe de pêche alimentaire. C'est de la pêche récréative. Appelez-la comme vous voulez, c'est de la pêche récréative. Je suis en faveur d'une pêche commerciale d'abord, puis d'une pêche récréative. Oui, je suis pour.
Le problème, comme beaucoup de gens l'ont dit plus tôt... Je veux dire, on parle de restrictions et d'étiquettes et tout ce genre de choses dans la pêche récréative, mais grand Dieu, regardez ce que le pêcheur professionnel doit subir. Dès qu'il y a possibilité d'abus, on ne peut pas ouvrir les vannes sans exercer un certain contrôle, dans les deux secteurs.
L'hon. Shawn Murphy: Je suis d'accord avec vous.
Vous avez tous une longue expérience et j'aimerais savoir ce que vous avez vu—mettons ces dix dernières années—au niveau de la pêche illégale, des prises non déclarées ou des prises vendues sous le manteau. Je sais que dans certaines régions c'est omniprésent et dans d'autre cela n'existe pas. Qu'en est-il ici, à Bonavista?
M. Douglas Sweetland: Je dirais que c'est très peu.
M. Hedley Butler: Oui, je suis d'accord avec Doug. Ce n'est pas un gros problème ici.
Mais comme je l'ai dit dans ma présentation, vous avez des garde-pêche qui courent à quatre pattes après les gamins sur les rochers et qui se font des trous aux pantalons. Je pense qu'ils ont mieux à faire que cela. Ce n'est qu'un gamin avec une loche et il le verbalise.
¹ (1535)
M. Douglas Sweetland: Il y a pas mal de braconnage de la part de ce que j'appelle des braconniers professionnels.
L'hon. Shawn Murphy: C'est de la pêche illégale, à mon sens. C'est du braconnage.
M. Douglas Sweetland: Oui, c'est ce que je veux dire, mais ce ne sont pas les pêcheurs.
L'hon. Shawn Murphy: Ce ne sont pas des pêcheurs professionnels.
M. Douglas Sweetland: Non, aucun d'eux ne fait cela. Vous voyez ce que je veux dire, n'est-ce pas?
Mais il y a des gens qui le font, ici à Terre-Neuve, c'est sûr.
L'hon. Shawn Murphy: Ils braconnent?
M. Douglas Sweetland: Oui. Vous en avez quelques-uns dans chaque localité qui gagnent plus que moi en pêchant, pour vous dire la vérité, et ils ne se font pas prendre.
Le président suppléant (M. Scott Simms): La parole est à M. Hearn, pour cinq minutes.
M. Loyola Hearn (St. John's-Sud—Mount Pearl, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.
Encore une fois, je veux remercier les témoins d'être venus nous rencontrer.
J'ai plusieurs questions découlant de leurs présentations.
Mais avant de le faire, je devrais peut-être essayer de les rassurer encore une fois, comme nous l'avons fait ce matin, et leur dire que beaucoup des membres du comité ont fait le tour du quartier, comme nous disons. Je siège à ce comité depuis quatre ans, d'autres membres étaient déjà là alors et certains y sont depuis des années, comme M. Keddy, M. Stoffer et M. Matthews. Au sujet de tous les problèmes que nous entendons, lorsqu'on parle de morue ou d'autres espèces, ils connaissent très bien tout cela. Ce n'est pas comme s'ils entendaient cela pour la première fois.
Suite aux rapports que nous avons présentés, certainement sur la surpêche, la garde côtière et d'autres, le gouvernement a pris des mesures, car nos rapports vont à la Chambre plutôt que d'aller dormir sur les étagères d'un ministre. Ils sont présentés publiquement à la Chambre et le gouvernement doit y répondre à la Chambre. Cela nous donne l'occasion d'exiger des comptes des ministres.
Pour ce qui est maintenant de mes questions, vous avez mentionné, monsieur Sweetland, les nouveaux règlements du ministère des Transports, qui vous coûtent cher. J'ai entendu parler de la boîte noire et des coûts qu'ils ont essayé de vous infliger l'an dernier, à court préavis. Certains d'entre nous sont intervenus rapidement pour arrêter et retarder cela.
En ce qui concerne le ministère des Transports, vous avez dit que le coût pour les petits navires pourrait augmenter de 10 000 $. Pourriez-vous nous donner une idée de ce dont vous parlez?
M. Douglas Sweetland: Oui. Il s'agit des radeaux de sauvetage, des combinaisons de survie, des tests de stabilité pour chaque bateau de pêche commerciale, même s'il ne fait que 15 pieds de long. C'est même trop stupide pour que j'en parle. Voyez-vous ce que je veux dire?
Il n'y a pas là le moindre grain de bon sens. On a jeté le bon sens par la fenêtre.
M. Loyola Hearn: Connaissez-vous la raison de cela? Nous avons eu plusieurs cas dans cette province de chavirements. Dans un cas, c'était dû à une instabilité, mais dans l'autre cas on ne sait pas encore.
Cela donne du poids aux arguments de ceux qui réclament 10 ou 15 pieds de plus, dans la classe des moins de 45 pieds et celle de 45 à 65 pieds en particulier. On leur dit qu'ils peuvent maintenant sortir à 150 milles au large, mais ils ne peuvent pas allonger leur navire, ils ne peuvent qu'agrandir en hauteur.
Je regardais certains de ces bateaux à l'heure du déjeuner. On dirait de vraies baignoires dans l'océan, n'est-ce pas? C'est dangereux.
Mais c'est comme avec tout le reste. Ensuite ils exagèrent dans l'autre sens. Le pendule est maintenant à l'autre extrême. Je suis d'accord avec vous, c'est fou. Nous allons soulever ce problème.
M. Douglas Sweetland: Pourrais-je dire encore une chose là-dessus?
M. Loyola Hearn: Oui, certainement.
M. Douglas Sweetland: Il y aura toujours des gens qui vont se noyer, en pêchant ou en sortant en mer; ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent et changer tous les règlements qu'ils veulent.
M. Loyola Hearn: Cela a toujours existé.
M. Douglas Sweetland: J'ai vu l'hiver dernier une émission sur la Garde côtière américaine, qui est dotée de bateaux qui se redressent d'eux-mêmes, mais même alors il y aura des noyades.
C'est tout ce que j'ai à dire. Vous pouvez faire ce que vous voulez, mais il faut faire preuve de bon sens dans les règles appliquées aux pêcheurs.
Ils demandent maintenant des tests de compétence, quelque chose du genre, pour toutes les embarcations de moins de 35 pieds. Autrement dit, je vais devoir aller à l'Institut de marine. J'emploierai le mot « imbécile ». Un imbécile quelconque viendra m'apprendre en cinq jours ce que je n'ai pas appris en 35 à 40 années passées sur l'eau. Je devais devoir payer 700 $ ou 800 $ pour cela.
Je m'arrête là.
M. Loyola Hearn: Eh bien, comme vous dites, c'est quelqu'un qui n'a probablement jamais mis les pieds sur un bateau qui va enseigner à une personne qui y a passé sa vie, et son père et son grand-père avant lui. C'est comme au 200 rue Kent, où vous avez 1 200 fonctionnaires qui travaillent, qui prétendent vous dire s'il y a ici assez de poisson à pêcher pour vous. Voilà à quoi on arrive.
J'ai un commentaire rapide pour M. Butler. Vous avez parlé des permis de saumon et cela est révélateur encore une fois de ce qui se passe dans le ministère. Lorsqu'ils ont fermé cette pêcherie, à l'époque—elle devait être rouverte au bout de cinq ans—quelques-uns ont conservé leurs permis, ils étaient 81, je crois, dans la province.
Après 13 ans, rien ne s'est passé. Nous avons donc fait une tentative l'an dernier, avons rencontré des gens au Cabinet du ministre, avons expliqué qu'ils n'étaient que quelques-uns et demandé ce que nous pouvions faire. Ils nous ont dit : « Allez leur parler et donnez-nous les options ». Nous leur avons donné deux options : racheter les permis ou autoriser la pêche. Et l'autorisation pouvait être assortie d'un nombre limité d'étiquettes, juste pour voir si le poisson est de retour. Le permis aurait pu être utilisé à titre récréatif ou avec un filet de 100 brasses, peu importe. Il y avait différentes options.
Nous les avons soumises au ministre et ils ont tout rejeté en bloc; ils n'allaient pas y toucher du tout. Et cela, c'était après nous avoir demandé de définir les options pour eux.
Quoi qu'il en soit, quelqu'un d'autre y reviendra.
Une autre—
¹ (1540)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Monsieur Hearn, il faut conclure. Est-ce un commentaire?
M. Loyola Hearn: Oui. Je voulais juste aborder le COSEPAC, car il n'a pas été mentionné.
Le président suppléant (M. Scott Simms): D'accord, quelques secondes seulement, je vous prie.
M. Loyola Hearn: Soit dit en passant, cela n'a pas été évoqué à la Chambre du tout. Cela a été décidé par le Ministère sans nous avoir consultés du tout, sans possibilité de questions, sans possibilité de donner un avis, à moins que le rapport ne passe par la Chambre. Nous avons saisi le ministre, mais ce n'est pas une question sur laquelle vous, ou Bill, ou moi ou n'importe qui avons eu la possibilité de dire le moindre mot. Et cela fait peur lorsque les choses se passent ainsi.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci.
[Français]
Monsieur Blais, vous disposez de cinq minutes.
M. Raynald Blais: Merci, monsieur le président.
Actuellement, il est question de réviser la Loi sur les pêches. J'imagine que nous allons nous pencher là-dessus bientôt. Un des éléments qui m'intéressent en particulier concerne le pouvoir discrétionnaire du ministre. Peu importe le ministre et peu importe la couleur du gouvernement, ce dernier à le pouvoir de « scraper » la pêche pour des considérations d'ordre purement politique.
Quelles seraient vos recommandations à ce sujet? Devrait-on diminuer le pouvoir discrétionnaire du ministre afin qu'il n'ait pas la possibilité d'exercer son pouvoir discrétionnaire sur 90 p. 100 ou 100 p. 100 de la ressource? Devrait-on restreindre son pouvoir de sorte qu'il puisse intervenir, mais pas comme il peut le faire actuellement?
[Traduction]
Le président suppléant (M. Scott Simms): Puis-je vous rappeler avant de commencer, messieurs, d'essayer de parler le plus lentement possible.
M. Albert Johnson: Si je peux donner mon opinion personnelle, je ne pense pas qu'un homme seul puisse avoir ce pouvoir—c'est exclu. Je pense qu'il faudrait qu'un groupe de personnes décide, et non pas un homme seul. Voilà mon opinion.
M. Hedley Butler: Je suis tout à fait d'accord avec Albert. Cela fait un bon moment que j'y réfléchis, moi aussi. Je vais à des réunions de comité et on constitue un groupe de travail. Comme je l'ai dit au début, je suis allé à une réunion sur le crabe. Nous avons même dû expliquer aux gens à quoi ressemble un casier à crabe et ce que nous utilisons comme appât. Et pourtant, ces gens-là prennent des décisions qui déterminent notre vie, et je ne trouve pas cela juste.
Si une décision doit être prise, je pense que le ministre des Pêches devrait placer au moins quelques pêcheurs ou travailleurs d'usine ou autres dans ce comité, des gens qui savent de quoi ils parlent. Cela ne me sert pas à grand-chose d'aller dans les Prairies comme agriculteur. Je n'y connais rien. Je sais comment planter des pommes de terre ici à Bonavista, mais aller travailler dans une ferme, je ne le pourrais pas. C'est pourquoi il faudrait des gens comme nous autour de la table, des gens d'expérience, pour les renseigner et le ministre devrait s'asseoir avec nous.
Merci beaucoup.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci.
Monsieur Fletham, souhaitez-vous répondre à cela?
¹ (1545)
M. George Feltham: Oui. C'est certainement un souci. Mais bien sûr, tout ministre détient beaucoup de pouvoir, quel que soit son ministère. C'est là où est le pouvoir.
Je suis d'accord avec Albert. Comment dire cela? Lorsque vous êtes pêcheur et qu'un homme peut à lui seul prendre une décision qui efface votre gagne-pain de toute votre vie—26 années de pêche, 40 années de pêche—c'est difficile à accepter.
Je suis donc d'accord avec Albert.
[Français]
M. Raynald Blais: Je pourrais ajouter que le ministre de la Défense nationale n'a pas la possibilité de faire la guerre comme il le veut. Quel que soit le pays dans lequel on se retrouve, il ne faudrait pas que quelqu'un ait ce pouvoir entre les mains, peu importe le ministère, comme vous l'avez mentionné plus tôt. Le ministère des Pêches et des Océans ne devra pas agir autrement. D'autres pays nous ont tracé la voie à cet égard. Cela permet d'éviter que des décisions d'ordre politique interfèrent et aillent à l'encontre de la logique ou du bon sens.
Merci beaucoup.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Blais.
[Traduction]
Monsieur Stoffer, cinq minutes.
M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, encore une fois, monsieur le président.
Pour en revenir à quelques questions que j'ai abordées plus tôt, le CCRH a rencontré notre comité il y a un ou deux ans et a parlé de zones d'exclusion du phoque, mais sans jamais nous expliquer réellement comment cela fonctionnerait. Je me demandais si vous pourriez nous dire comment cela pourrait fonctionner, une zone d'exclusion du phoque.
Par ailleurs, par rapport à tout ce qui a été dit tout à l'heure sur le MPO et les 50 à 60 tonnes et votre estimation double du volume de la biomasse, et comment vous vous heurtez toujours au refus d'une pêcherie pilote ou expérimentale ou du maintien d'une pêche indicatrice, quelle est votre impression instinctive sur les raisons pour lesquelles le MPO vous fait cela?
Et monsieur Burry, vous avez l'air d'être à 30 ans encore de la retraite. Pourriez-vous me dire qui sera la prochaine génération de pêcheurs dans la région de Bonavista et ici, car le Council of Canadian Fish Harvesters nous a dit être très inquiet pour la relève des capitaines et pêcheurs. Il ne semble pas que la jeune génération soit intéressée ou ait la capacité financière de se lancer dans la pêche. Je me demande simplement, monsieur—et je fais appel à votre expérience—si j'étais un jeune de 22 ans, pourquoi deviendrais-je pêcheur?
M. Pearce Burry: Actuellement, je n'y réfléchirais même pas deux fois.
Dans mon cas, mon fils ne me succédera pas. Il est trop vieux pour commencer, ou presque. Il est dans la quarantaine, alors vous voyez mon âge. Je suis à la retraite, mais je n'envisagerais même pas de me faire pêcheur en ce moment, à moins que beaucoup de changements n'interviennent.
Vous êtes accablé de règlement. Chaque fois que quelque chose arrive, vous recevez une enveloppe dans le courrier qui vous dit que telle ou telle chose a changé, que vous ne pouvez plus faire ceci, vous ne pouvez pas faire cela. Vous êtes sur votre bateau et un garde-pêche vous aborde, pistolet à la ceinture, saute dans votre bateau sans demander permission, comme s'il était chez lui. On se croirait dans le Far West. Nous sommes des citoyens respectueux de la loi.
Les pêcheurs sortent en mer pour essayer de gagner leur vie. Si un garde-pêche veut me voir, il n'a qu'à attendre que j'arrive à quai et il pourra alors me parler. Je suis obligé de débarquer dans mon port d'attache, comme tous les autres. À mes yeux, c'est insensé qu'ils nous abordent en mer, avec leur sirène et leur radar et tout ce que vous voudrez et nous arrêtent. Me voilà, en train de rentrer du poisson, et tout d'un coup, boum, le poisson est parti. Je suis obligé d'attendre encore deux ou trois heures avant de revoir un poisson, à cause de ce que les garde-pêche me font, ou la GRC, lorsqu'ils viennent fouiner chez nous.
S'il s'agit de matériel de sécurité, tout un chacun sait qu'il faut l'avoir. On n'a pas besoin de nous le dire. Il n'est pas nécessaire de le vérifier. Lorsque le navire revient à quai, s'il n'a pas le matériel, qu'on le verbalise. Il n'ont pas besoin d'aller nous vérifier en mer; je suis bien obligé de rentrer. Si j'ai un bateau de 20 pieds, 28 pieds ou 30 pieds, je ne peux aller nulle part ailleurs. Je n'ai pas le droit de débarquer mon poisson ailleurs que dans mon port d'attache.
¹ (1550)
M. Peter Stoffer: George, comment voyez-vous une zone d'exclusion du phoque?
M. George Feltham: La seule que j'ai vue qui avait l'air de fonctionner était à Smith Sound. En gros, si vous avez une agrégation de poisson dans un secteur confiné, le fait de tuer ou effrayer ces phoques est forcément utile. Est-ce que cela va les éliminer tous? Je ne sais pas. Hormis cela, je ne vois pas comment on pourrait faire fonctionner une zone d'exclusion du phoque.
L'autre question que je voudrais... Et vos propos et ceux de M. Hearn tout à l'heure sont reliés. Vous avez parlé des pêches et M. Hearn parlait des restrictions sur la taille des navires. Je serais certainement intéressé de savoir quelles recommandations sont faites à ce sujet, ou si votre comité a eu des pourparlers concernant la politique sur les propriétaires-exploitants individuels et la manière dont ils comptent l'appliquer, car il est trop facile de dire qu'il faut enlever les barrières. J'aimerais savoir ce que le comité serait prêt à recommander, lorsqu'il parle de l'avenir de Terre-Neuve, sur le plan des accords de fiducie pour obliger le ministre à faire quelque chose.
M. Peter Stoffer: Monsieur Sweetland—
Le président suppléant (M. Scott Simms): Désolé, monsieur Stoffer, mais vos cinq minutes sont écoulées. Je regrette.
M. Peter Stoffer: Pour moi, mais pas pour lui.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Que dites-vous?
M. Peter Stoffer: Il allait répondre et expliquer pourquoi il pense que le MPO lui fait cela.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Écoutez, je vais demander à M. Matthews. Il avait peut-être l'intention de poser exactement la même question. C'est une possibilité.
M. Peter Stoffer: Allez-y.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci.
Monsieur Matthiews.
M. Bill Matthews (Random—Burin—St. George's, Lib.): Souhaitez-vous répondre à la question?
M. Douglas Sweetland: Parce qu'ils ont peur des pays étrangers; c'est la seule raison.
M. Peter Stoffer: Pouvez-vous expliquer cela? Comme Gerald l'a dit, qu'est-ce que vos 4 000 ou 5 000 tonnes de poisson à Bonavista ont à voir avec les eaux au-delà des 200 milles?
M. Douglas Sweetland: Je pense qu'il vaudrait mieux poser la question au ministre plutôt qu'à moi.
M. Peter Stoffer: Nous le ferons.
M. Douglas Sweetland: D'après ce que je peux voir, c'est la seule raison. C'est ce que l'on nous avait expliqué à la réunion de l'an dernier, celle de Gander, et c'est la seule raison qu'il a donnée. Je ne sais pas qui a mis cela sur le tapis ce matin. Je crois que c'était le maire. J'étais présent à cette même table ronde où Bruce Adkins, qui était à l'époque chef de la Direction scientifique pour le Canada atlantique, se trouvait. Il était d'accord avec nous tous et il a même dit que si l'on allait ouvrir la pêche, il fallait le faire à Notre Dame Bay, plus Bonavista Bay et Trinity Bay.
M. Peter Stoffer: Est-ce que c'est par écrit?
M. Douglas Sweetland: Bien sûr que non.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Monsieur Matthiews, souhaitiez-vous la parole?
M. Bill Matthews: J'ai quelques questions rapides, si vous le permettez.
L'un de vous, messieurs, a parlé d'une croissance de 40 p. 100 de la biomasse côtière, je crois, dans votre exposé. Quelqu'un a bien parlé d'une augmentation de 40 p. 100 de la biomasse dans les eaux côtières?
M. Hedley Butler: Je crois que c'était George.
M. Bill Matthews: Et d'où tenez-vous ce chiffre? Comment est-on arrivé à ce chiffre de 40 p. 100 d'augmentation?
M. Hedley Butler: Cela vient des scientifiques qui travaillent là-dessus. Comme je l'ai dit, j'ai ici un graphique qui montre—
M. Bill Matthews: Donc vous acceptez ce chiffre, voilà ce que je veux savoir.
M. Hedley Butler: Oui.
M. Bill Matthews: Très bien.
Ensuite, l'un de vous, dans sa présentation, a demandé quelle preuve on a qu'il n'y a pas de poisson en haute mer? Je crois que quelqu'un a posé cette question.
Je ne veux pas vous mettre de mots dans la bouche, mais il me semble que vous dites là réellement que le MPO ne fait pas assez de travail scientifique en haute mer pour pouvoir tirer cette conclusion. Est-ce là votre argument? Quelqu'un voudrait-il nous donner ses opinions à ce sujet? Je sais que vous vous intéressez aux eaux côtières, mais puisque vous êtes sur l'eau, vous devez bien avoir une idée—
M. Hedley Butler: Je peux en parler, car je connais un pêcheur qui pêchait le turbot au large, à 50 milles, et on l'a fermé parce qu'il prenait trop de morue en prise accessoire. C'est parlant, non?
M. Albert Johnson: J'aimerais dire un mot à ce sujet. J'ai pêché le turbot cette année et, comme je l'ai dit dans ma présentation, nous pêchons à plus de 160 brasses. Nous avons pris la totalité du quota du turbot rien que pendant la pêche expérimentale, ce qui est inouï. Le quota était de 1,367 tonnes, je crois. La raison de la pêche expérimentale était que le Ministère a reçu beaucoup de plaintes de gens qui pêchaient le crabe. Et la prise accessoire avec le crabe était réellement en baisse. Elle était tout juste supérieure à 2 p. 100, de fait.
Nous avons trouvé de la morue à des profondeurs que l'on ne voyait pas depuis des années. Pour attraper de la morue au large, habituellement on descendait—sauf à certaines époques de l'année—au-delà des hauts fonds. On déployait les filets à 115 brasses et on descendait jusqu'à 140 ou 145; mais à ces profondeurs on ne prenait jamais de morue, sauf à certaines époques de l'année, au printemps et à la fin de l'automne.
Je crois réellement, c'est ma conviction personnelle, comme je l'ai dit dans ma présentation, que le but du MPO est de réduire le nombre de pêcheurs en n'ouvrant pas la pêche. Le long des côtes, partout il y a des signes de reprise, tout le monde le sait. Ce qu'ils font, c'est qu'ils cherchent à réduire le nombre des pêcheurs. Il y a trop de pêcheurs. C'est un des moyens qu'ils ont, car lorsque certains politiciens essayaient d'obtenir un quota de crabe pour la pêche côtière, ils demandaient en privé le total. Le syndicat s'est battu pour cela et ils ont fini par céder en disant d'accord, à condition qu'on vous limite à un quota. Ils voudraient qu'il n'y ait pas de quota pour le crabe. Les petits navires côtiers seraient de l'histoire ancienne aujourd'hui s'il n'y avait pas eu le crabe.
Voilà ce que j'en pense. Merci.
¹ (1555)
M. Bill Matthews: J'ai une dernière question.
Il y a eu beaucoup de controverse au sujet de la pêche de la plie rouge cette année—du moins sur les ondes—je pense que certains voyaient là réellement un moyen de prendre un peu de morue sans qu'il y ait de pêche officielle à la morue. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Quelle a été votre réaction et comment les choses se sont-elles passées?
J'ai l'impression que l'on a pris pas mal de morue lors de la pêche à la plie rouge. J'aimerais connaître vos impressions car, comme je l'ai dit, il y a eu une vive controverse sur les ondes dans la province. J'aimerais juste savoir si vous avez participé à cette pêche, ce que vous avez constaté et comment elle s'est déroulée.
M. Douglas Sweetland: J'y ai participé. Je pêchais déjà la plie rouge avant le moratoire et j'ai continué tout au long.
Cette année je n'ai pas pris beaucoup de plie rouge, seulement environ 3 000 livres. J'ai pris aussi 800 livres, je crois, de morue. Il est très difficile de pêcher la plie rouge sans retrouver aussi de la morue dans nos filets. C'était une très mauvaise année pour la plie rouge à cause des conditions aquatiques, de l'eau, tout le reste. C'était une très mauvaise saison.
M. Bill Matthews: Combien de morue étiez-vous autorisé à prendre?
M. Douglas Sweetland: Deux mille livres, pour arrondir. Je crois que c'était 1 600 livres ou 1 660 livres.
M. Bill Matthews: Dites-vous donc que la plupart n'ont pas pris cette quantité, ou plutôt que la plupart l'ont atteinte?
M. Douglas Sweetland: Oh, beaucoup de gens l'ont atteinte.
Un témoin: J'ai pris mon quota.
M. Douglas Sweetland: Oui. Demandez-leur combien de plie rouge ils ont pris.
M. Bill Matthews: Oui, mais des gens pensent que c'était juste une façon de vous permettre de pêcher la morue sans le dire. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais ces accusations ont été lancées. Ce serait une façon détournée.
M. Hedley Butler: Monsieur Matthiews, j'ai lancé mes filets de plie rouge et je n'ai jamais attrapé la moindre plie rouge, mais j'ai attrapé 1 600 livres de morue.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Je vais devoir vous arrêter là, monsieur Matthiews.
M. Bill Matthews: C'est pourquoi j'ai posé la question.
M. George Feltham: J'aimerais faire une remarque là-dessus, si je peux.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Allez-y.
M. George Feltham: Il se trouve que 430 000 tonnes métriques de plie rouge ont été prises. Il y a eu aussi une petite quantité de morue, je ne me souviens plus du chiffre exact, mais je crois que c'était 1,3 million de livres de morue débarquée.
Lorsqu'on parle des gens à faible revenu, peu importe que ce soit 433 000 livres de morue. Pour eux, chaque dollar compte. Ce qu'il faut faire... s'il y a assez de morue pour débarquer 1,3 million de livres de morue en deux semaines, en utilisant six filets, trois filets ou quatre filets, que faut-il conclure sur la quantité de morue qui existe? Que faut-il en conclure?
Le président suppléant (M. Scott Simms): Nous avons commencé en retard et nous avons encore du temps pour un tour de questions de cinq minutes chacun. Cela convient-il à tout le monde?
M. Matthiews et M. Stoffer sont d'accord, alors allons-y.
Nous avons également un monsieur qui va nous faire un exposé additionnel, car nous avons du temps. M. Glen Little, qui est conseiller municipal ici à Bonavista, nous fera une courte présentation. Ce sera suivi par un tour de questions.
Je vais commencer de ce côté-ci, avec M. Hearn.
M. Loyola Hearn: Je poserai à chacun une courte question, d'une minute environ.
Le président suppléant (M. Scott Simms): D'accord. Vous avez cinq minutes, et vous pouvez les répartir comme vous voulez.
º (1600)
M. Loyola Hearn: M. Feltham a mentionné l'accord de fiducie avec les propriétaires-exploitants. C'est un gros enjeu et il a été évoqué ici. M. Stoffer en a parlé également. Nous avons reçu ici Earl McCurdy et c'est un gros problème pour le syndicat. Tout ce sujet fait partie de la problématique d'ensemble. Cela remonte à l'arrangement intervenu, je suppose, au moment des rachats de licence. Vous étiez tous ensemble dans le...
J'ai moi-même pêché pendant 15 ou 20 ans—casiers, filets maillants, le tout. Pour la pêche au casier, nous étions cinq dans l'équipage, et le capitaine avait deux parts à cause du bateau, etc. Nous partagions tous à égalité. Or, aujourd'hui, le seul qui pourrait obtenir un permis serait le capitaine parce qu'il est le propriétaire de l'entreprise.
Beaucoup de gens se font évincer, et trois et quatre compagnies dans cette province détiennent la moitié des licences. Cela a un effet très néfaste pour la pêche.
Il faut mettre de l'ordre là-dedans. J'ai l'impression que c'est un sujet auquel nous allons nous attaquer très prochainement, et je serais intéressé de savoir ce que vous en pensez.
M. Gerald Keddy: J'ai juste une remarque. J'ai été intéressé par ce que vous avez dit sur les pêcheurs qui pêchaient à 50 milles au large sans réellement cibler la morue, mais qui se sont vus interdire de pêcher parce qu'ils prenaient trop de morue.
Dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, cette pêcherie 4X qui descend jusqu'au Banc George, ils ont le même problème cette année, même s'il ne s'agit pas de morue du Nord. Les gars qui pêchent la goberge—la goberge et la morue forment des bancs communs—ne peuvent prendre leur quota de goberge parce qu'ils attrapent trop de morue. Le problème n'existe pas qu'à Terre-Neuve.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Randy.
M. Randy Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission, PCC): Merci.
Permettez-moi de vous remercier tous de vos présentations.
Je suis le membre le plus récent de ce comité et un politicien qui a besoin de se familiariser avec le sujet et j'apprécie l'occasion. J'ai donc juste une remarque et une courte question.
Pour ce qui est de l'inscription sur la liste des espèces en péril, le COSEPAC formule sa recommandation, si je saisis bien, au ministre de l'Environnement. Ensuite les deux—le ministre de l'Environnement et le ministre des Pêches et océans—en discutent.
Ce qui s'est passé sur la côte Ouest, avec cette sous-espèce de saumon rouge, est que le ministre des Pêches a dû accepter quelques techniques de gestion plutôt strictes, faute de quoi elle aurait été classée comme menacée. Ce n'était pas une solution merveilleuse non plus, car si vous avez suivi un peu les choses, vous savez qu'il y a eu des pêcheurs commerciaux assis sur la rive qui ont dû regarder passer quelque 8 millions de saumons rouges pour que 200 de ces autres saumons rouges du lac Cultus puissent atteindre leur frayère. C'était pas mal frustrant pour eux, vous en conviendrez.
J'entends parler de 4 000, 5 000 ou 7 000 livres. Vous présentez des arguments très convaincants pour une pêcherie côtière pilote, et nous en prenons bonne note. Mais si c'était 5 000 livres chaque, par exemple, combien cela représente-t-il financièrement? Je ne connais pas le prix. Combien cela vous rapporterait-il?
M. Douglas Sweetland: Le prix n'est pas excellent cette année, mais ce serait d'un grand secours, surtout pour moi. Nous sommes deux : mon fils pêche avec moi. Ma femme pêche également le crabe au filet. Cette année, pour la première fois depuis sept ou huit ans, j'ai été admissible à l'assurance-emploi, mais pas au niveau le plus élevé. C'est la première fois pour moi.
Cette année, la saison a été retardée à cause du conflit provincial autour du crabe, ce qui n'a pourtant pas fait augmenter le prix. Nous avons commencé à la mi-mai avec le crabe, le homard, la lompe, la plie rouge—et je viens de commencer le crabe-araignée et le maquereau. Cela ne m'aidera même pas à dépasser le plafond de l'a.—e., ce qui signifie que mon brut n'atteint pas 14 000 $.
M. Bill Matthews: Combien?
M. Douglas Sweetland: Ce n'est pas terrible, 14 000 $ pour un capitaine. Il faut avoir 14 000 $ car 25 p. 100 sont automatiquement retranchés. Je n'ai pas cela.
J'aimerais dire juste un petit mot sur un sujet abordé ce matin, le rapport Kirby.
º (1605)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Tout le monde est-il d'accord?
Une voix: Allez-y.
M. Douglas Sweetland: Lors des audiences de Kirby... J'ai assisté à l'une d'elles. Je crois que c'était à Gander. On nous a dit en gros, nous les pêcheurs côtiers -- il y avait aussi des pêcheurs hauturiers -- que si nous ne prenions pas le poisson dont les quotas allaient être augmenté au cours des trois ou quatre prochaines années—je crois que le rapport est sorti en 1982, et c'était donc en 1981—que la différence entre notre prise et le quota serait donnée aux étrangers.
Il faut dire, à la défense de Kirby, que son rapport était fondé principalement sur les données scientifiques, qui ne valaient pas le papier sur lequel elles étaient écrites. Voilà donc une façon de voir le rapport Kirby. Merci.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Sweetland.
Monsieur Blais, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
[Français]
M. Raynald Blais: Merci, monsieur le président.
Parlez-nous un peu plus de ce que vous savez sur les avantages de la pêche à la palangre par rapport à la pêche au filet maillant, et particulièrement du fait que ce serait plus intéressant pour les ressources, entre autres.
[Traduction]
M. George Feltham: L'un des sujets qui a toujours été chaudement débattu sur l'île... beaucoup dépend de l'endroit où vous pêchez, du type de fond que vous avez et du type d'engin qui est utilisé. La région de Bonavista, en particulier, a toujours été réputée pour ses palangres et ses hameçons, car nous sommes là en eau peu profonde, et il y a des haut-fonds. Beaucoup d'autres régions de l'île n'ont pas cela. Ce sont des falaises abruptes, il n'y a pas d'endroit pour pêcher ou alors pas de haut-fonds pour poser des palangres.
Les problèmes avec les deux types d'engin... tout dépend du pêcheur. L'inconvénient des filets maillants est que, oui, parfois on prend des espèces non ciblées et, oui, parfois si le temps est mauvais, vous vous retrouvez avec du poisson invendable. Mais lorsque les filets sont remontés régulièrement, le type d'engin n'est pas un problème. Il faut pêcher de façon responsable. Avec la palangre, si vous la déposez le soir et que vous ne pouvez la récupérer le lendemain, je suppose qu'elle continue de pêcher, mais le poisson que vous remontez est bon à jeter lui aussi.
La taille du poisson que vous attrapez dépend du secteur. Si vous vendez à une usine, la taille du marché est habituellement de 18 pouces et plus. Mais si vous pêchez dans un secteur donné, à certains moments vous prendrez du poisson de 16 ou 17 pouces. Qu'advient-il de ce poisson? Lui aussi est rejeté.
Dans certains des programmes de pêche expérimentale, on a eu un nombre aussi important de rejets de poisson pris à la palangre dans certaines zones et à certains moments—je souligne que c'est des prises à la palangre—qu'avec les filets maillants, pour des raisons de taille.
Donc, c'est une question d'utilisation responsable des engins et tout dépend du pêcheur. Tout revient à cela. À mes yeux, il n'y a pas de différence.
M. Hedley Butler: J'aimerais dire juste un mot à ce sujet. Lorsque nous avons eu notre table ronde, l'usine qui nous achète la morue a dit préférer du poisson pris à la ligne, et comme George l'a dit, Bonavista est réputée pour sa pêche à la palangre. Dans le temps, il n'y avait rien d'autre. Lorsque les filets maillants sont apparus, certains les ont utilisés, mais le gars nous a dit que le meilleur poisson était celui pêché en août et octobre, à la ligne à main ou à la palangre, car il donnait le meilleur rendement et était de la meilleure qualité. Donc, si nous devons vendre à cette usine, il nous faudra la meilleure qualité afin d'obtenir le meilleur prix pour le produit.
[Français]
M. Raynald Blais: Merci.
J'aimerais maintenant parler d'une espèce qui n'est pas en voie de disparition: le phoque. Je crois que c'est M. Sweetland qui parlait plus tôt du phoque à capuchon, qui pêche et qui a un impact beaucoup plus important qu'on aurait pu le croire, du moins en comparaison avec le phoque du Groenland. J'aimerais que vous précisiez ce que vous disiez sur le phoque à capuchon.
º (1610)
[Traduction]
M. Douglas Sweetland: Le phoque à capuchon n'est pratiquement pas chassé. On peut le chasser, mais uniquement les sujets adultes. Vous n'avez pas le droit de tuer les jeunes, contrairement au phoque du Groënland. Or, les jeunes sont les seuls dont la chasse est économiquement viable. Il n'y a pas de marché pour les vieux phoques à capuchon. Pour les jeunes il y aurait un excellent marché, comme pour le phoque du Groënland, mais le MPO n'autorise pas la chasse des jeunes.
Comme je l'ai dit dans mon exposé, ils plongent plus profond, ils sont plus gros et attrapent plus de morue. À mon avis, cela explique ce que l'on voit sur le banc de Hamilton, au large du Labrador. C'est l'une des raison pour lesquelles cette espèce se multiplie beaucoup plus vite que les phoques du Groënland. Il y en a moins—je le sais—mais la population n'est absolument pas contrôlée. Ils mangent tout ce qui passe.
Je dis cela comme pêcheur et aussi comme chasseur. Nous chassons les oiseaux de mer en novembre—le guillemot ou la marmette, appelez-les comme vous voudrez. Avant le moratoire, on nevoyait jamais de phoque en novembre, lorsque nous avons commencé à chasser la marmette, mais depuis 10 ou 11 ans, les phoques arrivent plus tôt à l'automne et repartent plus tard en été. C'est particulièrement vrai des phoques à capuchon.
Partout où ils débarquent à l'automne... La dernière année où on a pêché, c'était en 2002, et nous avons pêché du milieu jusqu'à la fin octobre, car si vous pêchez à la ligne à main, plus vous attendez et meilleure est la qualité et plus gros est le poisson que vous attrapez. Nous avons donc attendu jusque tard dans l'automne, du milieu à la fin octobre, pour pêcher.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Monsieur Sweetland, voulez-vous conclure très rapidement, s'il vous plaît.
M. Douglas Sweetland: Oui.
Quoi qu'il en soit, partout où nous allions, du milieu jusqu'à la fin octobre, les morues étaient chassées des hauts fonds côtiers par les phoques, car la morue arrivait très tôt.
Cette année—et nous sommes toujours en septembre—je vois déjà des phoques à capuchon aux alentours. On ne voyait jamais cela il y a 20 ans.
Le président suppléant (M. Scott Simms): D'accord, je vous remercie.
Monsieur Stoffer, vous avez cinq minutes.
M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président.
M. Hearn vient de me chuchoter une question très intéressante qui n'a pas encore été posée, et je vais donc le faire pour lui : Quel est l'effet des prix de l'énergie et du carburant sur vos revenus? De toute évidence, avec la hausse du prix du diesel et de l'essence et tout le reste, plus tout l'équipement dont vous avez besoin et le coût du camionnage pour l'amener, ce doit être exorbitant. Vous devez évidemment absorber ces coûts. Pouvez-vous nous donner une idée de ce que cela représente pour vous?
Monsieur Butler, vous dites que, à votre avis, le MPO cherche plus ou moins à liquider le pêcheur professionnel indépendant. Beaucoup de gens sur la côte Ouest pensent exactement la même chose, surtout depuis le plan Mifflin, comme on l'appelle, de 1996. On rencontre donc des opinions similaires à ce sujet à travers le pays.
Mon autre question porte sur la pêche indicatrice, dont vous avez parlé. Est-ce que le MPO reste partisan de la pêche indicatrice? Met-il à votre disposition des ressources et une main-d'oeuvre adéquate pour cela?
Vu les changements que vous souhaitez et vu la façon dont le MPO a géré les choses ces dernières années, faites-vous confiance au ministère des Pêches et Océans pour réaliser les changements requis afin que vous puissiez gagner votre vie?
Merci.
M. George Feltham: En ce qui concerne le coût, cela ne fait aucun doute. On parle de nous imposer des boîtes noires et tout le reste—la boîte noire étant introduite dans la flotte à temps plein et l'importante flotte complémentaire. Ces boîtes coûtent aujourd'hui de 5 000 $ à 6 000 $. Je pensait à l'époque qu'elles remplaceraient en partie les observateurs et que ces derniers coûteraient donc moins. Mais on a vu que l'an dernier la couverture par les observateurs a augmenté de 300 p. 100. Le carburant a presque doublé et il y a les frais de contrôle à quai. Le gouvernement fait pression sur tous les ports et on est obligé de payer de plus en plus aux autorités portuaires. Lorsque le prix du crabe était de 2,50 $ la livre, c'était tolérable, mais aujourd'hui à 1,20 $ ou 1,30 $, et avec le coût du carburant, si rien ne change, vous allez voir des faillites, cela ne fait aucun doute.
Je suis totalement convaincu que le gouvernement aimerait voir moins de pêcheurs, car la pêche serait plus facile à gérer avec moins de pêcheurs. Cela va semer le chaos dans les collectivités de cette province.
º (1615)
M. Hedley Butler: Parlant de pêche indicatrice, il y a quelques années j'en ai effectuée une à Bonavista. Comme je l'ai dit dans mon exposé, il y a eu des coupures. Le MPO a dit qu'il n'y avait pas assez d'argent, qu'il fallait faire quelques coupures. Mais ce que les pêcheurs n'ont pas compris, c'est pourquoi couper Bonavista? Les deux dernières années où j'y avais pêché, il y avait là le meilleur taux de prise de toute l'île. Et c'est ce secteur là qui a été coupé. Les pêcheurs disaient que ce n'était pas à cause des diminutions de crédits au MPO, mais qu'ils ne voulaient pas que l'on parle de la quantité de poisson que l'on rencontrait là. Nous pouvions poser six filets, mais je n'en ai jamais utilisé plus de quatre, et nous descendions même jusqu'à deux à cause de l'abondance du poisson dans ces filets. Cela ne fait aucun doute, la pêche indicatrice donne de bons résultats, mais les bons résultats ne servent à rien si le ministre des Pêches et Océans les ignore. Autant avoir des filets vides, et c'est cela qui nous inquiète.
Je ne sais pas où d'autre aller. Comme je l'ai dit, nous allons à des réunions, avec vous, avec le syndicat et avec le ministre des Pêches. C'est comme se taper la tête contre le mur, il n'en sort jamais rien. La pêche est dans notre sang, je suppose, car nous sommes quelques-uns à continuer à nous battre, en dépit de tout. Mais c'est très frustrant.
Je siège au conseil municipal ici, à Bonavista, et chaque automne la salle du conseil est remplie de travailleurs d'usine. Ils viennent tous se plaindre car ils n'ont pas assez d'heures pour être admissibles à l'a.-e. Et pourtant, l'eau est remplie de poissons devant chez nous. Ils viennent jusqu'au bord, on peut les attraper depuis le rivage, mais on n'a pas le droit. C'est très frustrant.
Je ne sais pas ce que vous même vivez, mais nous sommes en première ligne, nous sommes sur le front. Nous en avons assez de voir les gens s'exiler en Alberta ou à Toronto, tombant dans ce que nous appelons le gouffre du pêcheur. Mais c'est ce qui se passe. Il est temps que quelqu'un résiste. Nous cherchons à résister, mais personne n'écoute et vous devez absolument faire en sorte que l'on nous écoute. Nous ne voulons rien détruire, nous voulons simplement gagner notre vie ici, comme nos pères avant nous, et continuer à pêcher. Mes deux enfants sont partis.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, Hedley. J'apprécie vos propos.
Poursuivez, monsieur.
M. Albert Johnson: J'aimerais réitérer ce que ce monsieur a dit au sujet des dépenses. À ma connaissance, nous sommes la seule industrie au monde qui paie pour sa propre surveillance. Nous payons toutes sortes de redevances pour les observateurs, les contrôleurs à quai et les calibreurs. Nous achetons notre licence et nous la payons très cher. Nous achetons notre boîte noire et devons en plus payer la location.
Il faut faire activer la petite boîte noire, et cela coûte cher. Ensuite, il faut la désactiver à l'automne. Nous payons un taux mensuel de 100 $. Au début, il faut l'acheter, et elle coûte entre 4 000 $ et 5 000 $, cela devient ridicule. Maintenant le carburant a crevé le plafond. Le coût de l'assurance a crevé le plafond aussi.
Nous gagnons de l'argent, mais il n'y a presque plus de profit net, surtout avec la baisse du prix du crabe. Il n'y a que le turbot... Je parlais à Catalina avec quelques propriétaires de gros bateaux qui espéraient pouvoir faire encore quelques sorties pour le turbot afin de pouvoir payer leurs traites. Ils sont acculés. Ils pêchent la crevette, mais il n'y a pas d'argent là-dedans. Ils sortent, brûlent pour 7 000 $ ou 8 000 $ de carburant. Il n'y a pas là d'argent à gagner.
Cela devient un peu ridicule. Je crois que nous sommes la seule industrie au monde à payer pour sa propre surveillance. Nous payons pour tout et le MPO ne cesse de passer d'un extrême à l'autre.
C'est tout ce que j'avais à dire.
º (1620)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Johnson. Bonne remarque.
Je crois que c'est tout pour nous.
Je veux—un instant.
M. Loyola Hearn: Suite à ce que disait M. Johnson sur le fait que les pêcheurs ne gagnent pas d'argent, j'entends dire que pratiquement personne dans le secteur de la crevette cuite et pelée, dont beaucoup d'usines commencent à dépendre, ne fait du profit. Ils gardent les usines ouvertes uniquement à cause du crabe, mais ce n'est pas payant. Entendez-vous la même chose? Si c'est vrai, c'est très grave.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Ce n'est pas en rapport avec la morue du Nord, mais allez-y quand même. C'est une question valide.
M. Albert Johnson: Parlez-vous des transformateurs ou des pêcheurs?
M. Loyola Hearn: Non, je parle des transformateurs. Ils ne gagnent rien sur la crevette cuite et pelée.
M. Albert Johnson: Je ne suis pas d'accord avec vous, car je me souviens être allé à l'inauguration, il y a quelques années, de l'usine de crevette à Port Union. Je me souviens que Vic Young y était alors. Il disait qu'il venait de dépenser 12 millions de dollars pour cette usine, et ils espéraient récupérer l'investissement en cinq ans. Je sais qu'ils gagnent de l'argent. Je sais que les transformateurs gagnent de l'argent; bien sûr qu'ils gagnent de l'argent.
Je parlais, moi, des pêcheurs, car cette pêche est très coûteuse. La pêche à la crevette est très coûteuse. Je pense que les transformateurs gagnent de l'argent, oui.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci, monsieur Johnson.
Je tiens à vous remercier tous infiniment. Mais avant que vous nous quittiez, j'aimerais que vous acceptiez nos applaudissements.
Monsieur Sweetland, vous avez parlé tout à l'heure de votre éducation. Vous disiez que vous ne vous placeriez pas au même rang qu'un titulaire de doctorat. Monsieur, je crois parler au nom de beaucoup d'entre nous en disant que vous le valez certainement, vu tout ce que vous nous avez dit aujourd'hui—et cela vaut pour les autres aussi.
Les connaissances contribuées aujourd'hui montreront à tous ceux qui auraient dû être là aussi que votre niveau de connaissances—votre expérience—dépasse de loin votre propre port. Vous nous avez mieux fait connaître l'industrie. Vous avez parlé du rapport Kirby. Vous avez parlé de la situation internationale et de l'OPAN et chaque fois—je crois que c'est la troisième fois, Hedley et Doug, que nous discutons de cette façon—je suis étonné par tout ce que j'en retire et toujours étonné par votre connaissance intime de l'industrie. À mon humble avis, en tant que président, votre message devrait être écouté dans des forums beaucoup plus grands.
Merci encore d'avoir pris le temps de venir nous parler. Cela a été une expérience pédagogique incroyable et je pense que cela portera fruit. Merci encore.
Avant que vous partiez, sachez que nous allons entendre encore un exposé de cinq minutes et j'espère que vous pourrez rester pour l'entendre. Merci, messieurs.
À ce stade, j'aimerais inviter Glen Little à venir nous faire une courte présentation.
Je vais suspendre la séance pour deux minutes. À tout de suite.
º (1600)
º (1619)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Nous allons maintenant entendre la dernière présentation. J'invite tous les membres à prendre place.
Il nous reste un peu de temps et j'ai jugé bon d'inviter une personne dont j'ai beaucoup entendu parler au cours de mes voyages ici à titre de député. Je pense que ce qu'il a à dire, et la façon dont il le dit, sont remarquables et j'ai pensé l'inviter pour qu'il nous raconte son histoire et nous explique un peu ce qui se passe ici, dans cette localité. Glen Little est conseiller municipal ici, à Bonavista, et je suis sûr que beaucoup de ses collègues, les élus locaux, partagent ses opinions.
Nous allons donc écouter cette présentation, et Glen, le dernier mot de la journée vous appartient. Vous avez cet honneur. Vous avez la parole, monsieur.
º (1625)
M. Glen Little (à titre personnel): Merci beaucoup, monsieur le président, de ces aimables paroles. J'espère que les citoyens de Bonavista seront du même avis ce soir.
Je tiens à remercier le comité, monsieur le président, d'être venu dans la ville historique de Bonavista pour écouter les préoccupations concernant la pêche et tout ce qui l'entoure.
La pêcherie comporte un certain nombre d'aspects très complexes, à mon avis. Je ne suis pas pêcheur et je ne travaille pas dans l'usine de poisson, mais je suis un élu et je siège au comité des pêches du conseil municipal. Je m'intéresse de près à la pêche car, après tout, elle est le moteur de l'économie rurale à Terre-Neuve et Labrador. Sans une pêcherie viable, nous cesserons d'exister. Nous ne voulons pas disparaître et il importe que nous ayons une pêcherie viable à l'avenir.
J'ai écouté les pêcheurs qui se sont exprimés aujourd'hui et j'ai écouté plus tôt les travailleurs d'usine. Ils ont fait valoir d'excellents arguments, au nom de la population rurale de Terre-Neuve et Labrador, sur les sujets abordés aujourd'hui, en particulier l'ouverture d'une pêche commerciale et d'une pêche alimentaire. Je crois qu'ils ont donné des raisons légitimes d'avoir une pêcherie commerciale axée sur la conservation. Ce n'est pas là un groupe de gens avides. Ils demandent une pêche commerciale limitée fondée sur l'état des stocks de morue à Conception Bay, Trinity Bay, Bonavista Bay et Notre Dame Bay et ils ont exprimé les arguments en faveur de manière professionnelle.
J'aimerais faire une déclaration ici, aujourd'hui, concernant le professionnalisme et la question de savoir qui connaît le mieux l'industrie. Ce ne sont pas les politiciens autour de cette table. Ce ne sont pas les politiciens à St. John's. Ce ne sont pas les politiciens au conseil municipal. Ce sont ceux qui travaillent sur l'eau, les pêcheurs, et ceux qui travaillent dans l'usine. Je crois qu'on les a ignorés dans le passé et j'espère, que par l'intermédiaire de ce comité et de ses rapports futurs, les préoccupations exprimées ici seront entendues.
J'espère qu'il y aura à l'avenir une pêche suffisamment viable pour remettre les gens au travail, car notre conseil a dû frapper à la porte des politiciens pour demander la charité, et la charité n'est certainement pas ce que nous souhaitons. Nous sommes des gens qui travaillons très dur. Nous l'avons prouvé par le passé et nous allons le prouver à l'avenir, mais nous avons besoin que l'on écoute les pêcheurs, ceux qui connaissent la situation, ceux qui gagnent leur vie sur l'eau. Jusqu'à présent, on les a ignorés.
Comme le conseiller Butler l'a dit plus tôt, chaque jour des jeunes partent s'exiler. Ils ne devraient pas avoir à le faire, car il existe une industrie ici, dans les régions rurales de Terre-Neuve et Labrador, et c'est la pêche. Elle peut faire vivre les gens, assurer les semaines d'emploi pour être admissible à l'assurance-chômage et ils peuvent gagner bien leur vie, comme par le passé.
Les scientifiques du MPO ne connaissent pas la pêche aussi bien que les pêcheurs. Le gouvernement fédéral a coupé les crédits à ce ministère et engendré un problème. Vous avez entendu aujourd'hui toutes les explications et j'espère que votre comité, et en particulier le ministre des Pêches fédéral, va écouter ce qui a été dit aujourd'hui, car nous sommes une espèce en voie de disparition dans le Terre-Neuve et Labrador rural. Il est triste de savoir que la ressource est là, à nos pieds, et n'est pas exploitée alors qu'il faudrait l'utiliser au maximum.
Les sociétés, les grandes sociétés, à mon avis, ne recherchent qu'une chose : les profits. Elles sont animées par l'appât du gain. Si on les laisse faire, on ne verra plus que des chalutiers-usine. Ceux que vous avez vus aujourd'hui sortent pêcher avec des petits bateaux et ramènent du travail aux travailleurs d'usine. Cela disparaîtra si le gouvernement laisse faire les grosses sociétés qui ne travaillent qu'avec des chalutiers-usine. C'est un aspect sur lequel j'aimerais voir le comité se pencher.
Nous avons besoin de travail pour la population rurale de Terre-Neuve et Labrador. Nous ne voulons pas avoir à mendier des programmes et de l'assistance au gouvernement fédéral. Nous voulons travailler et gagner notre vie ici, comme il se doit et comme nous le faisions dans le passé. Voilà ce que nous demandons. Nous ne voulons pas des programmes, ou de ce que j'appelle les miettes que l'on nous jetait dans le passé; nous voulons travailler pour gagner notre vie. Je crois que ce n'est pas trop demander, sachant qu'il y a dans la mer devant chez nous une ressource abondante. Cela a été prouvé—amplement prouvé—par les pêcheurs eux-mêmes.
Je veux remercier nos députés de transmettre nos préoccupations. Je crois que vous avez fait un excellent travail à cet égard, monsieur Simms, et vous avez certainement travaillé très fort avec notre conseil municipal. Notre conseil municipal de Bonavista soutient à 100 p. 100 les pêcheurs. Nous avons contribué de près à organiser la réunion du comité et la discussion en table ronde qui s'est déroulée.
Je peux vous dire que le conseil municipal de Bonavista va continuer à se battre; nous n'allons pas renoncer. Vous ne serez plus là, mais nous oui et nous allons continuer à nous battre. Nous allons faire en sorte que la pêche à la morue rouvre car la ressource est là, dans nos eaux. Et nous veillerons à ce que la conservation soit le facteur déterminant lorsque ce sera le cas.
Merci beaucoup de votre temps.
Des voix: Bravo, bravo!
º (1630)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Eh bien, voilà ce que j'appelle terminer la journée sur un point d'exclamation, n'est-ce pas?
Glen, merci infiniment. Je ne pourrais mieux résumer cette journée que vous ne l'avez fait. Vous avez également mis le doigt sur un autre aspect important, soit que nous nous sommes remplis la tête, comme politiciens, mais nous nous sommes remplis aussi le coeur.
Merci beaucoup.
M. Glen Little: Merci.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Et bonne chance.
Je vais demander à tout le monde de rester un instant car nous allons prendre quelques photos en action, comme nous disons, des photos qui nous montrent en train de travailler.
Je tiens à remercier toute l'assistance. Merci infiniment d'être venus et de faire preuve de tant d'intérêt. Nous apprécions. Bien entendu, nous voulons également remercier le Lions Club de Bonavista qui nous a fourni l'installation et a contribué des heures de bénévolat. Merci beaucoup, M. George Clements, ainsi que Lewis et Bill Fifield.
Merci encore à tous et merci d'être venus à Bonavista.
Monsieur Keddy, vous souhaitez dire quelque chose?
M. Gerald Keddy: Monsieur le président, il faudrait faire savoir aux dames et messieurs ici que toutes nos réunions sont du domaine public. Vous pouvez visiter le site Internet fédéral et lire les délibérations du comité et voir ce que vos députés ont à dire, ce que nous avons tous à dire. Vous pourriez trouver cela intéressant.
º (1635)
Le président suppléant (M. Scott Simms): Oui. Bonne remarque. Merci.
Y a-t-il d'autres commentaires rapides?
Mr. Blais.
[Français]
M. Raynald Blais: Je m'adresse aux gens qui sont venus nous rencontrer aujourd'hui et qui nous ont communiqué des informations. Je suis de la région de la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, une région qui ressemble beaucoup à la vôtre. Ce que j'ai entendu ce matin et cet après-midi m'a permis de me sentir un peu chez moi, car je l'aurais sûrement entendu dans mon comté. Lorsque vous aurez l'occasion, membres du comité, de venir dans la région Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, vous entendrez probablement à peu près le même discours. En ce sens, je crois que ce que vous avez dit reflète très bien ce que vous vivez. J'en retiens — et nous devons le retenir — que vous voulez être traités avec respect et dignité, que vous voulez non seulement survivre dans votre communauté, mais y prospérer, et qu'il faut donc travailler davantage au développement. Je suis entièrement d'accord, et je serai votre allié dans le combat que nous aurons à mener au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
Merci.
Le président suppléant (M. Scott Simms): Merci beaucoup, monsieur Blais. C'est très bien, et je suis d'accord.
[Traduction]
Merci encore à vous tous d'être venus vous joindre à nous.
Nous tiendrons les mêmes audiences demain, sur le même sujet, à Port Blandford et nous serons à St. John's jeudi et vendredi.
La séance est levée.