Passer au contenu
;

FINA Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.


CHAPITRE 3 : UN PROCESSUS BUDGÉTAIRE PRUDENT

UN MODÈLE BUDGÉTAIRE QUI PORTE FRUIT

1. Budgétisation prudente

Le gouvernement fédéral a élaboré un modèle budgétaire qui s'est avéré extrêmement utile pour rétablir notre situation financière. Ce modèle a joué un rôle crucial dans les récentes réductions du déficit fédéral. La crédibilité accrue du gouvernement aux yeux des marchés financiers, du milieu des affaires et des Canadiens est importante pour lui permettre de signaler ses intentions au secteur privé. Plus important encore, une politique fiscale crédible et prudente facilite l'exercice d'un contrôle sur les taux d'intérêt, qui à son tour aide le gouvernement à rembourser la dette et à réduire les impôts. L'adoption d'une telle politique profite aussi directement aux familles canadiennes parce qu'elle réduit les coûts d'accession à la propriété et les frais de financement associés à l'achat d'autres biens durables.

Les hypothèses économiques prudentes utilisées dans les budgets antérieurs ont été établies de la façon suivante. Avant la publication du budget et la préparation de la Mise à jour économique et financière, on a sondé des prévisionnistes du secteur privé pour connaître leurs attentes quant à la conjoncture économique future. Ces dernières années, cet échantillon était composé de 15 à 21 répondants. Les hypothèses prudentes utilisées par le gouvernement ajoutent 80 points de base aux prévisions moyennes du secteur privé concernant les taux d'intérêt à court terme et 50 points de base aux prévisions moyennes du secteur privé concernant les taux d'intérêt à long terme. Le Comité avait recommandé dans son premier rapport de consultation que le facteur de prudence se situe entre 50 et 100 points de base. Par le passé, le gouvernement s'est servi d'un facteur de prudence aussi bas que 50 points de base pour les taux d'intérêt à court terme.

Cette pratique a eu deux conséquences importantes. Elle a fait augmenter les coûts du service de la dette calculés par le gouvernement et, en conséquence, les estimations formulées quant à la taille du déficit budgétaire - par exemple, une augmentation de 100 points de base des taux d'intérêt réduit l'excédent budgétaire d'un milliard de dollars la première année. L'hypothèse de taux d'intérêt élevés modifie également à la baisse les estimations du gouvernement quant à la croissance économique, et l'amène à évaluer ses recettes à la baisse et ses dépenses à la hausse. Le budget de 1998 renfermait des hypothèses prudentes concernant l'augmentation du PIB nominal, qui était inférieur de 60 points de base à la moyenne prévue par le secteur privé pour 1998 (4,1 p. 100 par rapport à 4,7 p. 100) et de 100 points de base pour 1999 (3,9 p. 100 par rapport à 4,9 p. 100). L'analyse de sensibilité contenue dans ce budget montre qu'une diminution d'un centième de point du taux de croissance nominal réduirait le surplus de 1,3 milliard de dollars. Pour la deuxième année de l'horizon de planification du gouvernement, ces hypothèses prudentes réduiraient le montant de l'excédent évalué par le gouvernement d'environ 1,5 milliard de dollars.

1.1 Réserve pour éventualités

Le deuxième élément d'une budgétisation prudente réside dans l'inclusion explicite d'une réserve pour éventualités. Initialement, le gouvernement s'est servi d'une réserve pour éventualités de 2,5 milliards de dollars pour la première année de son horizon de planification de deux ans et d'une réserve de 3 milliards de dollars pour la deuxième année. Le montant de réserve plus élevé était justifié en raison de la plus grande incertitude que comporte le fait de planifier pour plus loin dans l'avenir. Maintenant, on se sert d'une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars pour les deux années de la période de planification.

Une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars protège contre les effets de la première année d'une augmentation de 300 points de bases des taux d'intérêt ou d'une diminution de 2,3 centième de point de l'augmentation du PIB nominal. Ensemble, les hypothèses économiques prudentes et la réserve pour éventualités offrent un coussin de sécurité contre le déficit de 4 milliards de dollars pour la première année de l'horizon budgétaire et de 4,7 milliards de dollars pour la deuxième année.

Le gouvernement ne permet pas que la réserve pour éventualités soit utilisée pour financer des dépenses de programme. Si elle n'est pas utilisée, elle servira à réduire la dette nette du gouvernement du Canada. La totalité de la réserve pour éventualités applicable à 1997-1998 a servi à la réduction de la dette.

Le Comité est d'avis que la pratique de la budgétisation prudente devrait être maintenue - elle est essentielle tant pour réduire la dette que pour réduire le déficit. Qui plus est, bon nombre des risques économiques, financiers et politiques qui existaient il y a quelques années seront encore présents dans l'avenir. La tourmente économique et financière qui agite une bonne partie du monde est un exemple de ce genre de risque. Elle prend naissance à l'extérieur du Canada et échappe à notre contrôle.

Au cours des quelques années où le Comité a tenu des consultations prébudgétaires, on nous a répété à maintes reprises que les gouvernements devaient faire preuve de prudence au moment d'établir leurs budgets. Bien sûr, la prudence est toujours de mise. L'inflation demeure sous contrôle dans la plupart des pays, ce qui diminue d'autant les possibilités de récession déclenchées par une politique monétaire. Mais les perspectives économiques à court terme se sont détériorées au Canada cette année et les prévisions économiques sont devenues plus sombres à mesure que l'année avançait. Bien sûr, l'incertitude politique demeure toujours un facteur à prendre en considération.

L'élimination du déficit ne réduit en rien l'importance de la prudence. Si les déficits fédéraux ont contribué aux risques économiques par le passé, ils ne sont seulement qu'une partie de l'équation. Nous avons encore des gouvernements lourdement endettés et tant que cet endettement ne diminuera pas sensiblement, le secteur public continuera d'être une source de risque financier potentiel. Même si le gouvernement fédéral a fait en sorte que sa structure d'endettement soit plus manoeuvrable, l'ampleur de l'endettement et la lourdeur du service de la dette font en sorte qu'une large part des dépenses gouvernementales continuent d'échapper à son contrôle direct.

Les risques que comporte l'établissement du budget n'ont pas disparu ni même diminué sensiblement. Les pratiques récentes ont bien servi les Canadiens et devraient être maintenues. Comme le gouvernement a augmenté l'échéance de l'encours de sa dette moyenne, nous croyons que l'an prochain il devrait être en mesure d'accroître le facteur de prudence en ce qui a trait aux taux d'intérêt à plus long terme lorsque les circonstances le justifient, comme il l'a fait avec les taux d'intérêt à court terme. Le Comité se réjouit de voir que le gouvernement a suivi ses conseils.

Le Comité formule donc les recommandations suivantes :

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue d'utiliser des hypothèses économiques prudentes dans la formulation du budget.

Le Comité recommande que les hypothèses concernant les taux d'intérêt à court et à long termes continuent d'être 50 à 100 points de base supérieurs à la moyenne du secteur privé. Le ministre devrait modifier le facteur de prudence à mesure que les circonstances le justifient.

Le Comité recommande que le gouvernement continue de recourir à une réserve pour éventualités, qui devrait être établie à 3 milliards de dollars par année. Comme c'est le cas à l'heure actuelle, la réserve pour éventualités ne devrait pas servir à financer ni à augmenter des dépenses de programme ou des réductions d'impôt.

2. Objectifs budgétaires

Le remplacement des projections quinquennales par des objectifs mobiles de deux ans est une autre des innovations du gouvernement en matière de budgétisation. Les prévisions quinquennales ont été abandonnées à cause de l'inaptitude du gouvernement à prévoir aussi loin dans l'avenir avec précision. Les résultats se sont souvent avérés si inexacts que tout le processus des projections à long terme a perdu toute crédibilité. Les objectifs mobiles de deux ans sont par contre d'une telle immédiateté que les données économiques sur lesquelles ils se fondent sont beaucoup plus exactes, de sorte que seuls des événements extraordinaires pourraient excuser l'incapacité de les atteindre. Cette pratique empêche également le gouvernement de remettre à plus tard dans la période de planification les mesures qui s'imposent. Comme le ministre des Finances l'a déclaré à plusieurs reprises, ces objectifs fournissent au public des normes au moyen desquelles il peut tenir le gouvernement comptable.

Les récents événements démontrent clairement l'avantage d'un horizon de planification de deux ans. Sur une période de neuf mois, les prévisionnistes du secteur privé ont révisé à la baisse de 60 et 70 points de base respectivement, leurs estimations concernant la croissance prévue pour 1998 et 1999. Parce qu'elles sont prudentes, les prévisions économiques du ministre s'avèrent plus exactes que celles du secteur privé.

Le Comité croit que cette pratique a bien servi les Canadiens et qu'elle doit être maintenue.

Le Comité formule donc la recommandation suivante :

Le Comité recommande au gouvernement de continuer à utiliser un horizon de planification de deux ans dans la conduite de sa politique budgétaire.

Le gouvernement ne s'est pas contenté d'adopter un horizon de planification de deux ans, cependant. Il fixe des objectifs auxquels il est tenu et qui deviennent des repères en fonction desquels sa politique budgétaire est jugée. Cette pratique améliore la transparence de sa politique et l'oblige à rendre compte de ses actions. Le fait qu'il a dépassé tous les ans ses objectifs de réduction du déficit lui vaut une mesure de crédibilité qui lui a fait défaut par le passé.

Ayant constaté la valeur des objectifs de réduction du déficit pour rétablir l'équilibre budgétaire, le Comité souhaite qu'on continue de s'en servir dans le nouveau contexte financier. Reste à savoir ce que devrait être ses nouveaux objectifs.

L'an dernier, le Comité a recommandé que le gouvernement se fixe pour objectif d'équilibrer le budget à compter de 1998-1999, en se servant d'hypothèses économiques prudentes et d'une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars. Nous avons aussi recommandé que la partie inutilisée de la réserve pour éventualités serve à réduire la dette.

Le Comité croit que la mise en oeuvre de cette recommandation devrait être le chemin le plus court vers la stabilisation de la dette. Selon la Mise à jour économique et financière de 1998, le ratio de la dette au PIB devrait descendre à 55 p. 100 en l'an 2002-2003, si la croissance annuelle de notre PIB nominal atteint 4 p. 100 et si nous équilibrons notre budget chaque année. Avec une croissance annuelle de 3,5 p. 100, le ratio tomberait à 57 p. 100. Ces taux de croissance ne sont pas déraisonnables, malgré la faiblesse actuelle des prévisions de croissance. Les ratios de la dette au PIB seraient inférieurs d'environ 1,5 centième de point, si le gouvernement parvenait à réduire la dette chaque année de 3 milliards de dollars. Cette stratégie ferait en sorte que le ratio de la dette au PIB se situerait au centre de la plage de réduction recommandée par le Comité l'an dernier.

Le Comité recommande au gouvernement de prendre des mesures pour accélérer la tendance à la baisse du ratio de la dette nette au PIB et de ne pas miser exclusivement sur la croissance de l'économie. La partie inutilisée de la réserve pour éventualités devrait être employée à réduire la dette.

Ces recommandations aideraient à garantir que le gouvernement n'aie plus de budgets déficitaires. Le recours à une réserve pour éventualités oblige le gouvernement à viser à dégager un surplus sous-jacent de 3 milliards de dollars par année. Sauf imprévus, la dette nette devrait continuer de diminuer d'au moins 3 milliards de dollars par année.

La réduction du déficit et l'équilibre budgétaire se prêtent à des objectifs à court terme. La réduction du ratio de la dette au PIB relève du long terme.

Nous notons que, en 1985-1986, la dette nette s'élevait à environ 50 p. 100 du PIB et qu'elle a augmenté constamment pendant 10 ans pour atteindre un pic de 72 p. 100. C'est durant cette période que les effets néfastes des excès financiers se sont fait le plus sentir.

Le Comité recommande au gouvernement fédéral d'établir un objectif à long terme de réduction du ratio de la dette au PIB à un niveau soutenable.

Le Comité recommande au gouvernement fédéral de se fixer pour objectif provisoire de ramener le ratio de la dette au PIB à l'intérieur d'une fourchette de 50 à 60 p. 100 durant son mandat courant.

B. GESTION PRUDENTE ET PROMOTION DE LA PRODUCTIVITÉ

Le gouvernement fédéral sera bientôt dans une position financière qui lui permettra de donner suite aux préoccupations essentielles des Canadiens en matière de fiscalité, de soins de santé, d'éducation et de compétitivité.

Le Comité tient à préciser que même si nous nous attendons à ce que le gouvernement aie des ressources à dépenser dans un proche avenir, celles-ci doivent être utilisées avec soin dans le but d'atteindre des résultats mesurables et à l'intérieur d'un cadre de responsabilisation. L'excédent budgétaire ne doit pas être un prétexte à dépenser davantage d'argent. Les nouvelles ressources, qu'elles soient investies dans de nouveaux programmes ou dans la refonte des programmes existants, devraient être assujetties à une certaine forme de lignes directrices concernant le rendement. Ces lignes directrices préciseraient les objectifs du programme et la façon dont ses résultats seront mesurés. Si le programme échoue et ne peut être amélioré, il faudra y mettre fin.

Des garanties devront toutefois être mises en place avant de lancer un nouveau programme. L'Examen des programmes offre une telle garantie et le Comité est d'avis que toutes les nouvelles initiatives devront être rigoureusement soumises à l'épreuve de l'Examen des programmes.

Ainsi, toute nouvelle initiative doit démontrer qu'elle est dans l'intérêt public parce qu'elle règle un problème évident. S'il y a un problème, est-ce le gouvernement qui est le mieux placé pour le résoudre ou s'il vaudrait mieux laisser au secteur privé ou bénévole le soin de le régler? Si le problème relève du gouvernement, est-ce le gouvernement fédéral qui est le mieux placé pour intervenir? Et dans l'affirmative, quelle est la façon la plus efficace de mettre en oeuvre le programme? Bien entendu, tout nouveau programme doit être financièrement viable. Même s'il l'est, nous ne devons pas présumer que c'est une raison suffisante pour justifier la création d'un nouveau programme.

Le Comité tient à souligner que cet Examen ne sera pas un exercice de constitution de fiefs, mais donnera lieu plutôt à la mise en oeuvre d'un nouvel ensemble de freins et contrepoids pour garantir aux contribuables canadiens une saine gestion des deniers publics lorsqu'il est question de nouveaux programmes.

Le Comité souhaite pousser plus loin la notion d'Examen des programmes. Nous voulons l'inscrire dans le cadre d'une stratégie globale de croissance accrue de la productivité dans l'économie canadienne. Ce pacte de productivité s'appliquerait à toutes les activités et initiatives gouvernementales, aux impôts, aux dépenses et à la réglementation.

Le Comité recommande que toute nouvelle initiative de dépense soit évaluée à la lumière des principes rigoureux et détaillés d'Examen des programmes et que les résultats de cet examen soient publiés au moment de l'annonce d'un nouveau programme.

Le Comité recommande qu'une stratégie globale d'accroissement de la productivité soit mise en oeuvre par le gouvernement et qu'un engagement en matière de productivité soit établi et serve de critère pour évaluer la pertinence de toutes les initiatives fédérales.