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HRPD Rapport du Comité

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[ Vue d'ensemble ] [ La situation canadienne ] [ L'aide aux étudiants et le gouvernement fédéral ]
[
Un sujet de préoccupation ] [ Dettes personnelles ] [ L'évaluation des besoins et les limites de prêts ]
[
Information et harmonisation ] [ Pour lutter contre l'abandon scolaire ]
[
Fonds de dotation des bourses d'étude du millénaire ] [ L'épargne-étude ]


GARANTIR L’ACCÈS :
L’AIDE AUX ÉTUDIANTS DU NIVEAU POSTSECONDAIRE

  

A. Vue d’ensemble

À l’aube d’un nouveau siècle, les Canadiens doivent se munir des outils qui leur permettront de tirer profit des possibilités offertes par une société technologique. Or, le plus important parmi ces outils a probablement trait au capital humain et aux connaissances, deux éléments essentiels en tant que forces motrices de la croissance et facteurs d’amélioration de la qualité de vie. Les pays qui, en se développant, parviennent à bien manier ces deux «atouts» connaissent un taux de croissance élevé et des augmentations marquées de leur productivité. De même, les individus les mieux pourvus au niveau des connaissances et du capital humain sont plus susceptibles de réussir financièrement et d’avoir une vie satisfaisante.(1)

C’est la reconnaissance du rôle stratégique que jouent les connaissances qui sous-tend les efforts visant à stimuler l’éducation et la formation. L’éducation, particulièrement au niveau postsecondaire, est essentielle à la production des connaissances déterminantes pour la recherche et le développement, le transfert technologique et l’application de la technologie. De récentes études ont également fait valoir que le succès dépend aussi de mesures permanentes conçues pour aider les gens à faire la transition entre l’école et le lieu de travail.

 

B. La situation canadienne

On ne peut mettre en doute la volonté des Canadiens et de leurs gouvernants à tous les paliers de développer et d’accroître le capital humain du pays grâce au système d’éducation postsecondaire. Les dépenses annuelles directes du Canada pour l’éducation postsecondaire ont dépassé 16 milliards de dollars (les dépenses publiques interviennent pour 12 milliards ou 75 p. 100). Les étudiants eux-mêmes apportent une contribution de plus de 2 milliards de dollars. (2) Plus d’un million et demi d’étudiants sont inscrits dans les collèges et les universités. Selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le Canada est au haut des diverses échelles mesurant les dépenses d’enseignement, la participation et l’obtention de diplômes. Seuls les États-Unis ont une plus grande proportion de gens âgés de 18 à 21 ans qui sont inscrits à l’université, et le Canada est le premier parmi les pays de l’OCDE pour ce qui est des jeunes qui obtiennent un baccalauréat ou l’équivalent.

Tout en respectant la compétence provinciale en matière d’éducation au Canada, le gouvernement fédéral a reconnu que l’amélioration des connaissances et du capital humain s’impose pour le développement économique, social et culturel du pays, et c’est pourquoi il appuie l’éducation postsecondaire de même que la recherche et le développement des connaissances à ce niveau. Par ailleurs, du point de vue humain, le gouvernement fédéral a également pris des engagements quant à l’équité et à l’excellence des efforts qu’il consacre à aider les Canadiens qualifiés et motivés à accéder à l’éducation postsecondaire.

L’appui fédéral direct et indirect à l’éducation postsecondaire a dépassé les 8 milliards de dollars en 1995-1996. Cette année-là, les provinces ont reçu un soutien fédéral indirect d’environ 6,3 milliards par l’entremise de transferts et de diverses mesures fiscales. Des programmes fédéraux directs fournissent aux étudiants de l’aide financière et des fonds pour la recherche universitaire.

En ce moment, plusieurs ministères fédéraux appuient l’éducation postsecondaire — Industrie Canada, Affaires indiennes et Nord canadien, Patrimoine canadien —, mais c’est Développement des ressources humaines Canada qui a pris le premier rôle. D’ailleurs, le mandat du Ministère justifie un tel intérêt :

  • contribuer, avec les provinces, au développement des ressources humaines essentielles à l’évolution économique et sociale;
  • agir comme plaque tournante nationale pour l’identification des nouveaux enjeux et besoins à caractère national en matière d’apprentissage;
  • faire connaître internationalement l’opinion du Canada, dans le cadre des Nations Unies et de l’Organisation de coopération et de développement économiques;
  • promouvoir l’accès à l’éducation postsecondaire et aux possibilités d’apprentissage dans toutes les provinces par l’entremise du Programme canadien de prêts aux étudiants.

 

C. L’aide aux étudiants et le gouvernement fédéral 

Développement des ressources humaines Canada est en fait responsable du principal programme fédéral qui facilite l’accès à l’éducation postsecondaire. Depuis 1964, le Programme canadien de prêts aux étudiants (PCPE) aide les Canadiens — ceux qui se qualifient et qui ont des difficultés financières — à poursuivre leurs études postsecondaires et à obtenir un grade, un diplôme ou un certificat. Ces prêts sont censés s’ajouter aux ressources que les étudiants tirent de l’emploi et des bourses d’études de même que de la contribution de leur famille. (Les parents doivent assumer le coût de l’éducation de leurs enfants jusqu’à leur indépendance). Le prêt fédéral couvre 60 p. 100 des besoins évalués de chaque étudiant à temps plein, jusqu’à une limite hebdomadaire de 165 $. 

Toutefois, l’application du PCPE se fait de concert avec les provinces et les institutions financières. Les gouvernements provinciaux s’occupent de l’administration initiale des prêts du PCPE, déterminent les besoins de l’étudiant et son admissibilité et gère l’aide provinciale aux étudiants.(3) Le Québec et les Territoires du Nord-Ouest se sont retirés du PCPE et reçoivent des paiements de remplacement pour administrer leurs propres programmes, mais les autres provinces décident comment et dans quelle mesure elles fourniront aux étudiants une aide financière au-delà des prêts du PCPE.(4) Chaque année, un étudiant peut demander un prêt et, lorsqu’il reçoit le certificat d’admissibilité, il le fait convertir par une institution de crédit qui participe au programme. Depuis 1995, le principe du partage du risque avec les prêteurs a eu pour effet de transférer aux institutions financières participantes les futurs risques concernant les prêts non remboursés. Pendant que l’étudiant est aux études à temps complet, il reçoit une subvention couvrant l’intérêt de l’emprunt. Le gouvernement rembourse cet argent à l’institution financière qui a prêté à l’étudiant au nom du PCPE. Les étudiants à temps partiel, quant à eux, ne doivent payer que les intérêts de leurs emprunts pendant qu’ils fréquentent l’école, devenant responsables du principal seulement à l’obtention de leur diplôme. 

Le gouvernement fédéral reconnaît par ailleurs que certains étudiants éprouvent des besoins supplémentaires que ne peuvent satisfaire les actuels programmes de prêts. C’est pourquoi il se charge du coût complet de trois programmes de subventions pour initiatives spéciales à l’intention des étudiants qui doivent assumer des dépenses additionnelles en vue de poursuivre leurs études (étudiants handicapés, étudiants à temps partiel très nécessiteux et étudiantes inscrites à certains programmes de doctorat). 

Le PCPE a fourni, en 1995-1996, 1,5 milliard de dollars à plus de 365 000 étudiants. Les dépenses législatives pour le programme sont évaluées à 616 millions pour 1997-1998 et le coût estimatif du Programme de subventions pour initiatives spéciales ajoutera 34,7 millions. Depuis son instauration en 1964 jusqu’à la fin de l’exercice 1996, le PCPE a consenti 12,1 milliards de dollars en prêts à 2,7 millions d’étudiants à temps plein.

 

D. Un sujet de préoccupation 

Depuis l’adoption, en 1995, d’un Programme canadien de prêts aux étudiants remanié, ceux qui s’intéressent à l’éducation postsecondaire manifestent de plus en plus d’inquiétude concernant le niveau croissant de la dette étudiante. Ce problème a été partiellement abordé par diverses mesures adoptées au cours des deux dernières années. Ainsi, en février 1997, le budget fédéral a étendu de 18 à 30 mois la période durant laquelle les emprunteurs peuvent différer leurs paiements. Ce même budget prévoyait aussi que le gouvernement fédéral s’engagerait à examiner de nouvelles options de remboursement plus souples et davantage liées aux revenus des personnes. Dans son allocution en réponse au discours du Trône, en septembre 1997, le premier ministre a annoncé un nouveau Fonds de dotation des bourses d’études du millénaire. 

Parce que le Comité sait que ces deux dernières mesures sont actuellement à l’étude et seront probablement abordées dans le budget de 1998, il a décidé de tenir, le 27 novembre 1997, une table ronde sur l’aide aux étudiants du niveau postsecondaire. Pour ce faire, il a rassemblé les principaux intervenants — étudiants, professeurs d’université, porte-parole des universités, des collèges communautaires, des maisons d’enseignement privées, administrateurs d’aide financière, responsables d’institutions financières, représentants fédéraux et provinciaux. 

Tous ont exprimé la même opinion : que la dette étudiante, particulièrement le niveau d’endettement à la fin des études, constitue leur première priorité. Ils ont convenu que les mesures de réduction de la dette, en fonction du revenu, devaient prendre de l’expansion et fournir un allégement échelonné des intérêts. Parallèlement, nos témoins ont exprimé une grande réticence pour ce qui est de porter au-delà de 15 ans la période de remboursement des prêts étudiants. Leur seconde priorité — un ensemble de subventions initiales — ferait en sorte que la dette ne devienne pas un fardeau. Les participants ont discuté avec nous d’un train de mesures, allant d’une nouvelle subvention pour les étudiants ayant des personnes à charge à une subvention qui serait offerte durant la première et la deuxième année d’études. À leur avis, ces dispositions auraient pour effet de retenir ceux qui ont déjà commencé leurs études et élimineraient les éléments dissuasifs pour ceux qui craignent d’accumuler une trop grande dette durant leurs années postsecondaires. Ils ont en outre identifié une série de mesures fiscales qui, de leur point de vue, privilégieraient l’épargne. Ils ont cité le besoin de meilleurs échanges entre les gouvernements, les universités, les administrateurs d’aide financière, les étudiants et leur famille. Enfin, ils ont souligné que le système de prêts aux étudiants était devenu très compliqué, les étudiants devant présenter une demande chaque année, gérer deux prêts différents (provinciaux et fédéraux), puis consolider leurs prêts une fois quittée l’institution postsecondaire. 

L’autre grand élément de consensus a été le rejet par nos témoins d’un plan strict de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu. Les participants ont exprimé de profondes réserves concernant la durée de la période de remboursement que comporte ce genre de plan. En effet, pour le remboursement en fonction du revenu, la période visée est habituellement de 20 ou 25 ans et, durant toutes ces années, l’intérêt couru sur le prêt étudiant devient partie intégrante du capital et ajoute, de ce fait, au fardeau de la dette.

Notre table ronde nous a confirmé que les principes ayant mené à l’établissement du système canadien des prêts étudiants sont aussi valables aujourd’hui qu’ils l’étaient en 1964, à l’adoption du programme. L’aide aux étudiants est et doit rester un programme permettant à tous les Canadiens qualifiés de surmonter les obstacles financiers à l’éducation postsecondaire qu’ils risquent de rencontrer bien malgré eux. 

Le Comité recommande ce qui suit : 

1.

Le gouvernement du Canada devrait veiller, de concert avec les partenaires provinciaux du Programme canadien de prêts aux étudiants, à garantir que les principes d’accessibilité, de justice et de prévisibilité régissent tout changement ou réforme éventuels de tous les régimes – y compris les prêts canadiens aux étudiants – qui assurent une aide financière aux étudiants désireux de faire des études postsecondaires.

 Au niveau fédéral, nous ne pouvons transformer ces principes en une bonne politique gouvernementale que si nous disposons des données appropriées concernant le fonctionnement du programme d’aide aux étudiants. Malheureusement, il ne semble pas que ce soit le cas. Les journaux fourmillent de statistiques sur le fardeau croissant de la dette des étudiants qui fréquentent nos institutions postsecondaires. Les experts lancent, à tort ou à raison, des chiffres sur les taux d’impayés et sur les faillites d’étudiants. Le Comité, pour sa part, a demandé à maintes reprises des données fermes sur la nature de la dette étudiante, les défauts de paiement et les faillites. Nous constatons que les tendances identifiées par Statistique Canada et par les administrateurs d’aide financière des universités et des collèges ne correspondent pas entièrement aux statistiques que nous a remises le ministère du Développement des ressources humaines. Même si nous convenons de la gravité de l’endettement des étudiants, nos efforts pour trouver des solutions appropriées sont compliqués par la diversité des messages. Le Comité recommande par conséquent ce qui suit : 

2.

Le ministère du Développement des ressources humaines, de concert avec les participants provinciaux et les établissements de prêt, devrait:

  1. revoir ses pratiques de collecte de données à l’égard du Programme canadien de prêts aux étudiants; 
  2. préparer un rapport annuel global sur l’application du Programme; 
  3. garantir, dans le rapport, que le Programme fait l’objet des vérifications voulues; 
  4. faire porter le premier rapport annuel sur l’exercice 1996-1997 et le publier en 1998.

 Dans le reste du rapport, nous exposerons nos opinions sur la façon d’aborder les problèmes à court et à long terme liés à la dette étudiante.

 

E. Dettes personnelles 

Lors de notre table ronde sur l’aide aux étudiants, tous les participants -- étudiants, administrateurs financiers, représentants des provinces, établissements d’enseignement postsecondaire et prêteurs -- s’entendaient sur une chose : l’urgence de remédier aux niveaux élevés d’endettement et aux risques de non-remboursement qui en découlent. 

Les travaux de recherche actuels révèlent que les diplômés traversent, à la fin de leurs études, une période de transition critique de trois à cinq ans pendant laquelle ils tentent de percer sur le marché du travail et doivent, pour y parvenir, relever de gros défis. Les programmes actuels de prêts d’étudiants reconnaissent, dans une certaine mesure, que certains diplômés pourraient avoir besoin d’aide pendant cette période critique en leur offrant la possibilité de demander jusqu’à concurrence de 30 mois d’exemption d’intérêts durant les cinq premières années de remboursement.(5) Cela leur permet de différer les remboursements pendant que le gouvernement fédéral verse les intérêts aux créanciers. Plusieurs provinces offrent également aux diplômés un programme de réduction de dettes.

Malgré le succès partiel de ces mesures d’aide aux étudiants criblés de dettes, les participants à la table ronde ont proposé divers changements pour mieux leur venir en aide. La plupart des intervenants souhaitaient des changements susceptibles de rendre les programmes d’exemption d’intérêts plus souples. Ils ont aussi plaidé en faveur de réductions ou de remises de dette pour ceux qui, plus de cinq ans après la fin de leurs études, demeurent incapables de rembourser leurs prêts d’étudiants. Les intervenants étaient unanimes à dire que, dans l’un ou l’autre cas, il faudrait tenir compte des revenus de la personne ou de sa capacité de remboursement ainsi que du montant global des prêts étudiants. 

Bon nombre des intervenants s’en sont pris, lors de la table ronde, à la rigidité du programme actuel d’exemption d’intérêts. Ils le comparaient à un «interrupteur marche-arrêt», en ce sens qu’un étudiant obtient soit une exemption totale pendant 30 mois, soit rien du tout. Le régime actuel voit tout en noir et blanc, alors que la réalité à laquelle la plupart des emprunteurs font face est plutôt grise. 

Nous l’avons entendu, par exemple, d’un représentant de l’Association nationale des collèges carrières, organisme regroupant des établissements privés qui offrent une formation professionnelle à environ 150 000 étudiants dans 400 établissements partout au pays. Sans être bien connu ou compris dans le contexte de l’enseignement postsecondaire, ce secteur répond aux besoins bien précis d’un segment de la société depuis plus de 130 ans. Bon nombre des étudiants qu’on y trouve ont des besoins additionnels. Cela étant, il est guère étonnant que ces étudiants présentent plus de risques et composent un groupe pour lequel il faudrait assouplir les conditions d’exemption d’intérêts et de réduction de la dette dans le cadre du Programme canadien de prêts aux étudiants. Autrement dit, les étudiants qui fréquentent ces collèges de formation professionnelle semblent former un groupe pour lequel des interventions souples et bien ciblées produiraient des résultats tout à fait positifs. 

Même si cela peut avantager certains de ceux qui fréquentent des établissements d’enseignement privés, il est probable que dans chaque type d’établissement d’enseignement postsecondaire des étudiants manifesteront le désir, ou la nécessité, de réduire leurs paiements. D’autres auront peut-être besoin de plus des 30 mois actuels d’exemption d’intérêts. On nous a répété maintes fois que des modalités de remboursement plus souples et des exemptions ciblées aideraient grandement les étudiants à faire face à leurs dettes. Le Comité recommande donc ce qui suit : 

3.

Le gouvernement du Canada devrait mettre en œuvre une version plus souple et plus progressive de son actuel programme d’exemption d’intérêts pendant la période critique de transition de trois à cinq ans qui suit la fin des études postsecondaires en tenant compte du niveau d’endettement de l’étudiant et de sa capacité à rembourser.

 Plusieurs provinces offrent actuellement aux étudiants une certaine forme de réduction/remise de dette à la fin de leurs études. Les diplômés ne sont cependant pas tous admissibles à ce genre d’aide et le niveau de réduction de la dette varie d’une province à l’autre. Dans certains cas, des diplômés qui n’auraient pas besoin de réduction peuvent l’obtenir en vertu des régimes provinciaux actuels. Selon les commentaires entendus à la table ronde, certaines provinces, et notamment l’Ontario, consacrent des sommes croissantes aux programmes de réduction de la dette à mesure que l’endettement des étudiants augmente. 

Les participants à la table ronde jugeaient le caractère disparate de ces mesures incompatible avec les principes de justice et d’équité que nous tenons pour importants dans l’enseignement postsecondaire. Le Comité s’est fait dire que ces principes seraient mieux garantis par un programme de réduction de la dette bien ciblé et fondé sur les besoins du nombre restreint d’étudiants qui font état de difficultés notables à respecter leurs créances après la période de transition de cinq ans. Le Comité recommande donc ce qui suit : 

4.

Le gouvernement du Canada devrait s’employer à mettre au point, avec les partenaires provinciaux du Programme canadien de prêts aux étudiants, un programme fédéral-provincial de réduction de la dette des étudiants qui sont incapables de rembourser leurs prêts. Le niveau de réduction de la dette de chaque étudiant en difficulté devrait tenir compte à la fois de leur capacité de rembourser et de leur niveau d’endettement.

L’une des suggestions faites au cours de notre Table-ronde consistait à rendre l’intérêt sur les prêts aux étudiants déductible d’impôt, une idée qui pourrait en fait avoir du bon. Sur le plan fiscal, cela reviendrait à accorder à l’intérêt sur le capital emprunté pour financer un investissement dans le capital humain le même traitement fiscal qu’au capital emprunté pour financer des améliorations à une entreprise. Nous trouvons l’idée intéressante, mais le Comité ne croit pas que nous ayons suffisamment d’information sur ce que coûterait un tel changement ni sur ses conséquences éventuelles. Nous faisons par conséquent la recommandation suivante: 

5.

Le gouvernement du Canada devrait voir ce qui lui coûterait le fait de rendre l’intérêt sur les prêts aux étudiants déductible d’impôt et faire un rapport sur la faisabilité de cette proposition.

 

F. L’évaluation des besoins et les limites de prêts 

Au fil des ans, le coût des études postsecondaires a augmenté sensiblement. Entre 1986 et 1996, selon un article de 1997 dans Tendances sociales canadiennes, une publication de Statistique Canada, les frais de scolarité ont augmenté à 240 points de base(6) et le coût de la vie pour les étudiants d’un peu moins de 40 p. 100. Les étudiants consacreraient environ un tiers de leur argent aux frais de scolarité et le reste aux frais de subsistance. Bien que ces hausses aient été partiellement compensées par le relèvement des limites de prêts du PCPE, les étudiants n’en ont guère profité du fait que les provinces ont remplacé les bourses par des prêts. Cette transformation a fait augmenter le coût des études de premier cycle et gonfler la dette que les étudiants doivent rembourser à la fin de leurs études. 

Plusieurs de ceux qui sont intervenus lors de notre table ronde ont dit au Comité que la formule de calcul du plafond des prêts du PCPE n’est pas assez généreuse. Ils soutiennent que le PCPE a été conçu à l’origine pour répondre à des besoins non satisfaits et que l’«évaluation des besoins» détermine largement les prêts que les étudiants reçoivent. Bien que les limites de prêt du PCPE aient été relevées en 1994-1995 et indexées sur l’indice des prix à la consommation moins 3 p. 100, ils croient que cette formule ne reflète pas l’évolution réelle du coût de la vie ou des frais de scolarité. C’est pourquoi ils préconisent un examen des limites du PCPE. Comme cet argument a un poids considérable à nos yeux, le Comité recommande ce qui suit : 

6.

Le plafond des prêts du PCPE devrait être examiné. Cet examen devrait rétablir le plafond des prêts en tenant compte de l’évolution des frais d’apprentissage.  

Le montant qu’un étudiant peut emprunter aux niveaux fédéral et provincial dépend, on l’a vu, d’une évaluation complexe des besoins. Entre autres choses, cette évaluation tient compte du revenu que l’étudiant qui poursuit des études à plein temps tire du travail à temps partiel pendant l’année scolaire. Suivant les règlements actuels, si l’étudiant gagne plus de 600 $, son prêt diminue de 80 p. 100 de ce qu’il gagne en sus. Ainsi, l’étudiant qui gagne 2 000 $ pendant l’année scolaire (ou environ 100 $ par semaine) voit son prêt étudiant amputé de 1 120 $. Les groupes d’étudiants nous ont dit que ce plafonnement du revenu et cette récupération exercent un effet dissuasif important sur ceux qui souhaitent contribuer au coût de leurs études. 

Le processus d’évaluation des besoins prend également en compte ce que l’étudiant reçoit sous forme de bourses et de subventions. Nous estimons qu’il faut encourager les étudiants à obtenir des bourses pour payer leurs frais d’études d’autant plus que c’est une bonne façon de les pousser à rechercher l’excellence. À la lumière de ces préoccupations, le Comité recommande ce qui suit : 

7.

L’évaluation des besoins aux fins des prêts aux étudiants ne devrait pas pénaliser les étudiants dont les besoins sont grands ou dont la performance scolaire est exceptionnelle. Il faudrait donc permettre à l’étudiant :

  1. de gagner au moins 1 500 $ pendant l’année scolaire et ramener la réduction de son prêt à 40 p. 100 de ce qu’il gagne en sus; 
  2. d’accepter une bourse ou une subvention d’au moins 1 500 $.

Les participants à notre table ronde ont applaudi à la décision que le gouvernement fédéral vient de prendre d’employer 60 millions de dollars à répondre aux besoins particuliers des étudiants qui ont des personnes à charge. Comme les subventions pour initiatives spéciales (SIS), cette subvention augmenterait les prêts aux étudiants pour un groupe qui a un besoin supplémentaire. De toute évidence, les étudiants qui ont des enfants ont besoin de plus d’argent. Comme ils comptent pour près de 20 p. 100 de tous les bénéficiaires du PCPE dont les besoins sont supérieurs aux limites existantes, on se réjouit de l’augmentation du soutien qui leur est accordé. 

Le Comité croit qu’il faut accorder l’aide financière en fonction du besoin. Nous craignons cependant que, si l’on divise entre plusieurs catégories l’argent destiné à ceux qui ont des frais supplémentaires à supporter, des gens qui sont réellement dans le besoin ne tombent à travers les mailles du système. Nous croyons qu’une bonne politique gouvernementale ne doit pas créer de barrières ou de catégories artificielles avec les chevauchements administratifs qui en résultent. Nous estimons donc qu’il convient d’examiner avec soin toute la notion de subventions différenciées pour initiatives spéciales. 

Nous faisons donc la recommandation suivante:

8.

Le gouvernement du Canada devrait, de concert avec les participants provinciaux au Programme canadien de prêts aux étudiants :

  1. faire en toute priorité un examen exhaustif du processus de vérification des besoins des étudiants demandant un prêt canadien aux étudiants; 
  2. regarder entre autres les problèmes suivants:

    1. les besoins supplémentaires des étudiants ayant des enfants handicapés;
    2. l’opportunité d’assouplir, aux fins de l’octroi des prêts et subventions, les exigences relatives à la charge de travail scolaire des étudiants qui ont prouvé qu’ils ont besoin d’aide;
    3. l’opportunité de prolonger les délais pour les étudiants qui ont à leur charge des personnes ayant des besoins particuliers;
    4. la pratique consistant à réduire les prestations de bien-être social de la famille d’un étudiant recevant une subvention d’un montant égal à celui de la subvention; 

  1. terminer cet examen d’ici juin 1998.

 Comme nous sommes cependant en faveur de l’aide financière aux étudiants qui ont des personnes à charge, le Comité recommande ce qui suit : 

9.

Les deux parents étudiants d’un ménage devraient pouvoir bénéficier de toute aide financière supplémentaire dans le cadre des subventions pour initiatives spéciales.

 Même si l’Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire n’a pas pu participer à notre table ronde, elle nous a communiqué d’utiles suggestions. Comme elle, nous reconnaissons que les personnes handicapées doivent pouvoir bénéficier d’un bon programme national d’aide aux étudiants et du soutien des provinces compte tenu des frais que leur occasionne leur invalidité et du temps supplémentaire dont ils peuvent avoir besoin pour terminer leurs études. L’Association souligne que le Programme canadien de prêts aux étudiants, le programme de remplacement du Programme sur la réadaptation des personnes handicapées et les subventions pour initiatives spéciales des étudiants handicapés doivent tous tenir compte des besoins particuliers et des frais associés à l’invalidité au titre, entre autres, des aides techniques, des preneurs de notes et des soins auxiliaires. Comme le fait remarquer l’association, le Groupe de travail fédéral sur les personnes handicapées a recommandé que les subventions pour initiatives spéciales des étudiants handicapés ne soient pas traitées comme un revenu imposable. Le Comité recommande donc ce qui suit : 

10.

Le gouvernement du Canada devrait collaborer avec les provinces afin que le programme de remplacement du Programme sur la réadaptation des personnes handicapées offre un soutien aux personnes handicapées qui poursuivent des études ou une formation postsecondaires et qu’il continue de les aider à payer les frais liés à l’invalidité qui ne sont pas couverts par d’autres programmes.

 Le Comité recommande également ce qui suit : 

11.

Les ministères du Développement des ressources humaines et des Finances devraient réexaminer le traitement fiscal des subventions pour initiatives spéciales en vue de ne plus infliger de pénalités fiscales aux étudiants qui ont des frais supplémentaires inévitables à payer.

 

G. Information et harmonisation 

Le Comité a constaté pendant la table ronde qu’on s’entendait généralement pour trouver le processus du PCPE extrêmement complexe à cause, en partie du moins, des façons compliquées dont le PCPE doit s’arrimer aux programmes de prêts provinciaux. En fait, un représentant des établissements de prêt a décrit le PCPE comme le programme de prêts à la consommation le plus compliqué qui soit. Par contre, force est de reconnaître que les clients du programme comptent parmi les citoyens qui ont le moins d’expérience de l’endettement, du crédit et du remboursement de prêts. 

Par ailleurs, nous savons qu’un certain nombre d’étudiants admissibles omettent de présenter une demande de prêt et qu’un plus grand nombre encore de ceux qui entrent au collège ou à l’université ne sont pas au courant de ce qu’ils peuvent obtenir par l’entremise du service de prêts et bourses de leur établissement ou de groupes communautaires. Comme il s’agit là d’un problème de communication de l’information aux étudiants et à leurs familles, le Comité recommande ce qui suit : 

12.

Le gouvernement du Canada devrait collaborer avec les participants provinciaux au Programme canadien de prêts aux étudiants ainsi que les établissements d’enseignement et de prêt pour:

  1. produire une trousse d’information concise et rédigée en termes simples à comprendre sur toutes les formes d’aide aux étudiants; cette trousse devrait contenir tout ce qu’il faut savoir sur le Programme canadien de prêts aux étudiants, les subventions pour initiatives spéciales, les bourses d’études du millénaire et d’autres programmes, et être prête d’ici septembre 1998; 
  2. encourager les établissements d’enseignement postsecondaire à mettre au point une trousse semblable sur les bourses et stages offerts à leurs étudiants;
  3. remettre cette documentation à tous ceux et celles qui demandent à être admis à un établissement d’enseignement postsecondaire canadien;
  4. encourager les écoles secondaires, universités, collèges d’enseignement préuniversitaire et collèges d’enseignement professionnel à mettre sur pied des programmes expliquant à fond toutes les facettes du régime canadien de prêts aux étudiants.

 Afin de simplifier le PCPE et les programmes de prêts provinciaux, de nombreux intervenants ont réclamé leur harmonisation. L’harmonisation simplifierait la paperasserie ainsi que l’administration et le remboursement dans le cas des étudiants qui, après avoir obtenu leur diplôme, sont tenus de consolider leurs prêts fédéraux et provinciaux aux fins du remboursement. À l’heure actuelle, les prêts fédéraux et provinciaux sont assujettis à des règlements différents et les étudiants ignorent souvent leurs responsabilités relatives aux uns et aux autres. Les intervenants nous ont dit que, si les étudiants n’avaient, après l’obtention de leur diplôme, qu’un prêt à rembourser en respectant un même ensemble de règlements, beaucoup de problèmes disparaîtraient. Le Comité recommande ce qui suit : 

13.

Le gouvernement du Canada devrait engager avec les partenaires provinciaux du Programme canadien des prêts aux étudiants, les établissements d’enseignement postsecondaire et les prêteurs des discussions en vue d’harmoniser et de simplifier la paperasserie des prêts aux étudiants de manière que chaque étudiant n’ait qu’un accord de remboursement de prêt qui combine toutes les formes d’aide dont il a bénéficié pendant ses études. Ce document final, mis à leur disposition, serait la base sur laquelle les étudiants et les diplômés négocieraient les conditions de remboursement.

 

H. Pour lutter contre l’abandon scolaire 

Une étude récente de la Commission de l’enseignement supérieur des provinces Maritimes révèle que le coût des études postsecondaires influe de plus en plus sur la décision des jeunes issus notamment de familles à revenu faible ou modeste de poursuivre leurs études. Mise à part la nécessité immédiate de trouver l’argent pour payer des frais de scolarité et des frais de subsistance en hausse, ces jeunes hésitent davantage à s’endetter lourdement pour payer leurs études. En revanche, les jeunes comme leurs parents reconnaissent de plus en plus qu’une éducation postsecondaire est devenue ni plus ni moins une condition essentielle à l’obtention d’un emploi porteur d’avenir ainsi qu’à la croissance et à la sécurité personnelles et financières. 

Il ressort d’un récent rapport du Government Accounting Office des États-Unis(7) que les étudiants à revenu faible ou modeste sont plus susceptibles d’abandonner leurs études dans la première ou la deuxième année à cause de l’augmentation de leur dette et de l’insécurité financière. Les étudiants qui abandonnent leurs études postsecondaires dans les deux premières années comptent parmi ceux qui sont le plus susceptibles de ne pas rembourser leurs prêts en partie parce que leurs chances d’obtenir un emploi stable sont plus minces. Afin de remédier à ce problème, les participants à notre table ronde ont vigoureusement prôné la création d’un programme de subventions destiné aux étudiants des première et deuxième années. Le Comité recommande ce qui suit : 

14.

Le gouvernement du Canada devrait mettre en place un système de subventions qui soutiendrait les étudiants d’établissements d’enseignement postsecondaire au cours de leurs première et deuxième années. Il faudrait accorder ces subventions en fonction d’une formule qui tient compte à la fois du besoin et de la performance scolaire des candidats.

 

I. Fonds de dotation des bourses d’études du millénaire 

Les participants à notre table ronde ont manifesté un grand intérêt pour le Fonds de dotation des bourses d’études du millénaire dont le gouvernement a récemment annoncé la création en vue «de réduire les obstacles aux études postsecondaires et de préparer les jeunes Canadiens à l’économie de l’information du prochain siècle». Ils ont ajouté cependant qu’ils appuieraient le Fonds dans la mesure où seraient apportées des réponses satisfaisantes à des questions relatives à sa conception, à son orientation, à son intention et à sa portée. Dans l’attente des détails de ce programme, nous faisons la recommandation suivante : 

15.

Le gouvernement du Canada devrait concevoir le Fonds de dotation des bourses d’études du millénaire de manière qu’il complète les programmes fédéraux et provinciaux de prêts, de subventions et de bourses.

 

J. L’épargne-études 

Les études postsecondaires coûtent cher aux étudiants, aux familles et à tous les niveaux de gouvernement. On a donc tout intérêt à encourager les gens à épargner en vue des études. Même si les Régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) au même titre que les Régimes enregistrés d’épargne-retraites (REER) ne sont pas une option viable pour tous les parents ou les étudiants, nombreux sont les intervenants qui souhaitent que soient assouplies les conditions auxquelles on peut retirer de l’argent de REER existants en vue de payer des études postsecondaires. 

Le Comité s’intéresse également à la proposition formulée par le Comité des finances dans son récent rapport intitulé Maintenir l’équilibre. Il s’agit d’un régime de crédit différé pour les REEE qui assurerait aux étudiants bénéficiaires une subvention fédérale équivalente à un pourcentage des cotisations totales aux REEE. Nous jugeons cette proposition supérieure à la proposition portant de permettre un report d’impôt sur les REEE parce que l’argent va aux étudiants pendant qu’ils sont aux études plutôt qu’aux parents. Par conséquent, notre Comité appuie la recommandation du Comité des finances voulant que le gouvernement établisse un régime de crédit différé pour les REEE qui assurerait aux étudiants bénéficiaires une subvention fédérale équivalente à un pourcentage des cotisations totales aux REEE. Cette subvention serait payée en versements égaux dans chaque année d’un programme postsecondaire agréé. 

Le Comité recommande en outre ce qui suit : 

16.

Il faudrait permettre aux étudiants de retirer de l’argent d’un Régime enregistré d’épargne-retraite en franchise d’impôt afin de payer leurs études postsecondaires et établir un calendrier précis de remboursement ou de réinvestissement, en s’inspirant des lignes directrices relatives au retrait de fonds accumulés dans les Régimes enregistrés d’épargne-retraite aux fins du Régime d’accession à la propriété.