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CIMM Rapport du Comité

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PROTECTION DES RÉFUGIÉS ET SÉCURITÉ DES FRONTIÈRES :
TROUVER UN JUSTE MILIEU

INTRODUCTION

 

À l’été de 1999, l’arrivée sur les côtes de la Colombie-Britannique de quatre bateaux qui transportaient 599 migrants a braqué l’attention sur les lois du Canada relatives à l’immigration et aux réfugiés. Les migrants, surtout des Chinois, dont un certain nombre d'adolescents, arrivaient dans des conditions vraiment horribles à bord de navires qui prenaient l’eau. Aucun n’avait de papiers et la plupart ont demandé le statut de réfugié au moment de leur arrestation.

Le Canada n’a pas été le seul pays à connaître cette situation. Au cours des deux dernières années, les États-Unis ont intercepté 20 navires transportant plus de 1 200 personnes. Et entre juillet et octobre 1999, l’Australie a vu 28 bateaux mouiller ses côtes, avec plus de 900 passagers à leur bord. Ce phénomène est de toute évidence d’envergure internationale. Il est clair qu’une partie des solutions au problème des arrivées irrégulières de grands nombres de migrants devra venir des pays eux-mêmes, mais certains aspects du mouvement des migrants devront trouver un règlement multilatéral et international, processus qui a d’ailleurs déjà commencé.

Lorsque les bateaux de migrants sont arrivés au Canada, la population a été déconcertée, comme d’ailleurs de nombreux parlementaires. Le débat suscité a ressemblé à celui qu’avait provoqué au milieu des années 1980 l’arrivée de deux autres bateaux (dont les passagers ne venaient pas de Chine) sur la côte est. Mais la situation était très différente cette fois, car on avait appris que les migrants avaient payé ou auraient à payer d’énormes sommes pour leur voyage (entre 30 000 $ et 40 000 $US ou plus), et il semblait qu’ils devaient leur passage à des trafiquants qui auraient contrôlé tous les aspects de leur vie jusqu’à ce qu’ils aient remboursé leurs dettes. Par ailleurs, nombre d’entre eux avaient apparemment choisi comme destination finale les États-Unis, en particulier la ville de New York, plutôt que le Canada.

Les arrivées par bateau sont survenues alors que le remaniement de la Loi sur l’immigration était déjà très avancé. Il avait commencé en 1997 par la nomination d’un comité de trois personnes chargé d’examiner tous les aspects du droit, des politiques et des pratiques en matière d’immigration. Après avoir beaucoup consulté, le comité a publié son rapport en janvier 1998. La ministre de l’époque a continué de consulter le public et, en janvier 1999, elle a diffusé un document de travail qui a encore contribué à la démarche. Ainsi, bien que l’arrivée des quatre bateaux de migrants ait mis sur la sellette les systèmes d’immigration et de reconnaissance des réfugiés du Canada, la démarche d’examen et de réforme avait été entreprise bien avant l’été de 1999.

On a accéléré le traitement des demandes de statut de réfugié présentées par les passagers de ces quatre bateaux et la plupart ont été entendues. Quelques-unes ont été acceptées et de nombreuses décisions ont été prises en délibéré. Quelques personnes ont été renvoyées en Chine, mais la plupart sont toujours détenues en Colombie-Britannique. Si les questions entourant l’arrivée des migrants continuent de susciter le débat, le traitement ordonné des demandes de statut de réfugié dans les mois qui ont suivi a quelque peu calmé les esprits.

ÉTUDE DU COMITÉ

 

C’est dans ce contexte que le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes a décidé d’étudier le système de reconnaissance du statut de réfugié et la sécurité des frontières du Canada. Notre objectif est de concourir à la réforme amorcée en examinant de façon impartiale certaines grandes questions avant que le gouvernement n’arrête la teneur du projet de loi sur l’immigration qui sera bientôt présenté au Parlement. Le présent rapport constitue notre deuxième contribution; en juin 1998, nous avions présenté une étude d’ensemble sur la détention et le renvoi dans laquelle nous commentions la façon dont le sujet avait été traité dans Au-delà des chiffres.

Le Comité souhaite d’abord dissiper l'idée fausse qu’a pu provoquer le fait qu’il étudie en même temps le système de reconnaissance du statut de réfugié et le contrôle frontalier. Il est tout à fait injustifié d’insinuer que tous les migrants qui demandent le statut de réfugié doivent être qualifiés d’« illégaux ». Les demandeurs nous arrivent parfois de façon irrégulière, mais la fuite vers la liberté est souvent périlleuse et rapide, et elle peut exiger que tous les moyens disponibles pour se mettre en sécurité soient utilisés. Une fois arrivés ici, les demandeurs ont certaines garanties juridiques, et le Canada a des devoirs correspondants. Au cours des ans, le Canada a offert sa protection à de nombreux réfugiés véritables et nous sommes fermement convaincus qu’il doit continuer à le faire.

Cela dit, il serait naïf de maintenir que le processus concernant les réfugiés n'est pas exploité par ceux qui présentent des demandes non fondées dans le but de rester au pays ou, comme c'est le cas plus récemment, de gagner du temps avant d'entrer aux États-Unis. Le problème — et le défi — est de départager rapidement les demandeurs de bonne foi de ceux qui cherchent à profiter d’un système généralement reconnu comme l’un des meilleurs du monde. En vérité, il est souvent difficile de les distinguer. Dans bien des cas, les deux groupes sont munis de documents frauduleux, ils ont recours à des passeurs de réfugiés clandestins et racontent des histoires analogues. Il revient à la Section du statut de réfugié de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié de distinguer le vrai du faux et de juger si les demandes qui ont de la valeur sont suffisamment convaincantes pour faire de leur auteur un « réfugié » au sens très strict que lui donne notre droit et qui est presque le même que celui de la Convention relative au statut des réfugiés. Dans la première partie du rapport, nous nous concentrerons sur le travail de la Commission ainsi que sur le traitement des demandeurs, afin de suggérer des façons de renforcer, de rationaliser et d’accélérer le processus. Nous nous pencherons ensuite sur les moyens de sécuriser nos frontières de façon à dissuader les individus indésirables et à mieux accueillir ceux qui sont les bienvenus.

LE SYSTÈME DE RECONNAISSANCE DU STATUT DE RÉFUGIÉ

 

Le droit canadien prescrit un processus pour toutes les personnes qui arrivent au pays et demandent d’être protégées parce qu’elles craignent d’être persécutées pour des raisons précises si elles sont retournées dans leur pays d’origine. La loi s’applique quel que soit le mode d’arrivée, que les arrivants aient ou non des documents de voyage ou d’identité et quel que soit leur pays d’origine. À moins d’être exclus du processus pour des raisons de criminalité, de sécurité ou autres, les demandeurs ont droit à une audience devant deux décideurs de la Section du statut de réfugié de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. La personne que la Commission juge ne pas être un réfugié au sens de la Convention a le droit de demander l'autorisation pour un recours en révision à la Cour fédérale, Section de première intance. La disposition visant l’autorisation est rigoureuse, et peu de demandeurs l’obtiennent. Ils peuvent aussi interjeter appel devant la Division d'appel de la Cour fédérale, mais seulement si le juge du tribunal inférieur certifie que la cause soulève une question grave de portée générale.

Détention

Contrairement aux Chinois récemment arrivés par bateau, la plupart des demandeurs du statut de réfugié ne sont normalement pas détenus. La Loi sur l’immigration énumère trois motifs de détention (garde) :

la personne risque de se dérober aux audiences ou aux procédures;

son identité n’est pas connue;

elle constitue une menace pour la sécurité publique.

Il semble que la plupart des demandeurs chinois arrivés par bateau aient été détenus pour les deux premiers motifs et principalement, après quelques jours, pour le premier. Pourquoi ces migrants en particulier? Le fait qu’ils soient arrivés et de façon organisée signalait la possibilité d’un passage de réfugiés clandestins. Lorsque la plupart des demandeurs venus par le premier bateau ont disparu après avoir été mis en liberté, avec comme destination probable les États-Unis, on a craint davantage que la plupart des demandeurs ne s’enfuient. De plus, on a su qu’il y avait déjà un très fort taux de désistement à Vancouver des demandeurs venus de Chine.

Le Comité croit que le gouvernement a eu raison de détenir la plupart de ces migrants arrivés par bateau et qu’il y avait suffisamment d’indices de passage de réfugiés clandestins. Nous prenons acte de la distinction faite par certains témoins entre les passeurs de réfugiés clandestins et les trafiquants. Ces derniers font la traite d’êtres humains pour leur propre profit. Ils ne veulent pas simplement aider des gens à passer une frontière, ce dont ont besoin beaucoup de réfugiés véritables. Leur but est plutôt d’extorquer à leurs victimes des sommes exorbitantes, les condamnant ainsi à des périodes d’asservissement souvent longues où elles doivent travailler dans des ateliers clandestins, dans des restaurants ou comme prostitué(e)s.

Même sans changer les règles de détention, lorsqu’on soupçonne le passage de réfugiés clandestins il faudrait supposer que les migrants risquent de prendre la fuite et donc qu’il est légal de les détenir s’ils sont appréhendés au Canada. L’application rigoureuse de la mise en détention dans ces situations répond à un autre objectif important, celui de communiquer un message aux migrants et aux trafiquants. Pour les migrants, la détention à l’arrivée contrecarre les visées économiques qu’ils comptaient réaliser soit au Canada soit aux États-Unis et les empêche de se prévaloir du système de reconnaissance du statut de réfugié dans le seul but d’entrer au Canada. On espère ainsi dissuader les futurs migrants d’entreprendre un voyage, souvent futile, qui met leur vie en danger.

Pour les trafiquants, la détention de leur cargaison humaine annule l’intérêt financier de l’entreprise. Sans les salaires gagnés par les migrants, le trafic n’est plus profitable. Ainsi, lorsque les circonstances laissent croire à un passage de réfugiés clandestins, la détention sert bien les fins de l’immigration, tout en étant à l’avantage des migrants eux-mêmes, dont on peut supposer que la plupart n’ont pas pris la pleine mesure de ce qui les attendait quand ils ont décidé de faire le voyage.

Pour que la détention serve à décourager le passage de réfugiés clandestins, il faut que le message atteigne les intéressés. Il conviendrait de mettre sur pied un programme de communication le plus étendu possible pour informer les éventuels trafiquants et migrants des dangers et des conséquences de leurs activités. Ce programme devrait utiliser des vidéos d’information dans les langues appropriées. Nous le recommandons, même sachant qu’il pourrait rencontrer d’importantes difficultés dans des pays comme la Chine. Il faudrait néanmoins en faire l’essai. Même si le programme n’a qu’un succès mitigé, le fait de détenir systématiquement les migrants pris dans des opérations de passage de réfugiés clandestins devrait garantir que le message se rende aux trafiquants. L’usage que font ceux-ci des techniques de communication avancées et leurs contacts des deux côtés de l’océan leur permettent de savoir exactement ce qui se passe.

Le Comité considère qu’un autre groupe devrait être mis en détention de façon systématique. Les agents de Citoyenneté et Immigration Canada nous ont informés que quelque 8 % des personnes qui demandent le statut de réfugié sont sans papiers et refusent de collaborer. « Refuser de collaborer » veut dire que, en plus d’arriver sans documents de voyage ni pièces d’identité (ce qui est souvent le cas des demandeurs), les personnes refusent de répondre aux questions d’usage que leur posent les agents d’immigration à l’arrivée, même de dire à bord de quel avion elles sont arrivées et de quel pays elles viennent. Or, on sait que même des personnes gravement traumatisées devraient pouvoir répondre à ces questions simples.

Il s’agit donc de personnes dont nous ne savons rien. Non pas parce qu’elles ne peuvent rien nous dire, mais parce qu’elles ne le veulent pas. Dans ces circonstances, le Canada a le droit et le devoir de ne pas les mettre en liberté jusqu’à ce que nous sachions qui elles sont et que nous soyons sûrs qu’elles ne constituent pas une menace pour la société. La loi actuelle renferme une disposition qui permet de détenir une personne incapable d’établir son identité à la satisfaction d’un agent d’immigration; toutefois, on l’a peu invoquée, sauf cet été. Dans son rapport de juin 1998, le Comité a indiqué que le fait de permettre à des gens dont nous ne savons rien de rester en liberté jusqu’à ce que leur demande soit entendue sape la confiance du public. Il a donc recommandé d’exercer le pouvoir de détention existant jusqu’à ce que l’identité de la personne soit établie, et réitère aujourd’hui cette recommandation.

Si l’on recourt plus fréquemment à la détention, il est très important de trouver ou d’aménager des installations adéquates. Il ne faut pas présumer que les migrants sont des criminels ou présentent des risques pour la sécurité et les mettre en prison. Il faut éviter de les détenir dans des locaux improvisés ou inadéquats. Les installations de détention devraient être situées à des endroits où les demandeurs peuvent avoir accès à des avocats, à des organisations communautaires et à des traducteurs.

Le Comité recommande :

1. que soient détenus jusqu’à ce que leur cas soit réglé les demandeurs du statut de réfugié dont l’arrivée semble être le fait d’un passage de réfugiés clandestins organisé, de crainte qu’ils ne s’enfuient.

2. qu’on fasse savoir sur une grande échelle dans les pays d’origine des migrants, notamment au moyen de vidéos d’information, que les migrants dont la venue est le fait d’un passage de réfugiés clandestins seront très probablement détenus dès leur arrestation au Canada.

3. que soient détenus les demandeurs du statut de réfugié qui refusent de collaborer en déclarant leur identité.

4. que soient trouvées ou aménagées des installations de détention qui conviennent à la situation des migrants.

Considérations initiales relatives à une demande de statut de réfugié

Lorsque des personnes qui ne sont pas admissibles au Canada (c’est le cas de bon nombre de demandeurs du statut de réfugié) se présentent à un point d’entrée, on les dirige vers un agent d’immigration. Si elles demandent le statut de réfugié, un agent principal est mandaté pour décider si leur demande peut ou non être acheminée à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Les personnes qui ont déjà obtenu le statut de réfugié dans un autre pays, celles qui représentent une menace pour le Canada en raison de leurs activités criminelles ou celles qui sont des terroristes, des espions, etc., ne sont pas admissibles. Il semblerait toutefois que les vérifications nécessaires ne soient souvent effectuées que bien plus tard, de sorte que des personnes qui auraient dû à juste titre être exclues du processus dès le départ voient leur demande suivre son cours.

Le Comité appuie la proposition formulée dans le document de travail publié par le gouvernement l’an dernier, à savoir que les vérifications judiciaires et les contrôles de sécurité devraient être effectués au tout début du processus. C’est gaspiller les ressources de la Commission que d’examiner des demandes irrecevables. Il est aussi très coûteux en termes de ressources, compliqué sur le plan juridique et préjudiciable à la confiance du public d’essayer a posteriori d’expulser des personnes qui n’auraient jamais dû franchir toutes les étapes du système. Moins nous mettons de temps à repérer les personnes dont les demandes pour obtenir le statut de réfugié ou celui d’immigrant reçu sont irrecevables, plus le système y gagne en efficacité.

Nous ne prétendons toutefois pas que le renvoi à la Commission doive être retardé jusqu’à ce que toutes les vérifications soient terminées. Si les vérifications judiciaires et les contrôles de sécurité révèlent plus tard des renseignements défavorables, le demandeur devrait, à ce moment-là, être déclaré non admissible et le processus interrompu.

Le Comité recommande :

5. que soient entrepris les vérifications judiciaires et les contrôles de sécurité dès qu’une personne présente une demande de statut de réfugié.

Le Comité a conclu que certaines autres mesures devraient être prises au moment même où une personne demande pour la première fois le statut de réfugié. Premièrement, il faudrait prendre les empreintes digitales et faire des photographies. Deuxièmement, à cause du nombre élevé de demandeurs à certains endroits, on en est venu à simplement remettre aux demandeurs les documents à remplir et à les laisser aller sans leur faire subir d’entrevue approfondie. Or le vérificateur général du Canada recommandait au Parlement dans son rapport de 1997, à propos du traitement des demandes de statut de réfugié, que les renseignements pertinents à chaque demande soient recueillis d’abord au point d’entrée puis transmis à la Commission. Nous souscrivons à cette recommandation.

Les témoins entendus par le Comité ne partagent pas tous cet avis. L’un de ceux qui sont favorables à cette recommandation a fait valoir que les demandeurs étaient plus susceptibles de fournir des réponses véridiques au moment de leur arrivée que plus tard, une fois qu’ils ont eu le temps de réfléchir et, peut-être se faire conseiller. Un autre témoin a souligné qu’à leur arrivée, par contre, les réfugiés de bonne foi peuvent être très craintifs face aux autorités en raison de leurs expériences passées. Cela peut les inciter à cacher la vérité, en totalité ou en partie, de crainte d’être immédiatement renvoyés chez eux. Les femmes peuvent être très réticentes à parler de certains types de persécution dont elles ont été victimes; d’autres peuvent ne pas être conscients de la pertinence de certains aspects particuliers de leur histoire aux fins de l’étude de leur demande. Bref, il y a bien des raisons pour lesquelles les demandeurs du statut de réfugié peuvent ne pas être très volubiles lors de l’entrevue initiale.

Malgré tout, le Comité estime que les agents d’immigration aux points d’entrée devraient prendre le temps de poser aux intéressés des questions générales sur leur demande, l’itinéraire qu’ils ont emprunté pour venir au Canada et d’autres sujets pertinents. Nous croyons qu’il faudrait uniformiser ces entrevues de façon qu’elles puissent être réalisées rapidement. Il n’est pas nécessaire d’obtenir tous les détails à ce moment, simplement les grandes lignes de chaque cas. Il est très important que les entrevues se fassent avec doigté; elles ne doivent en aucun cas prendre l’allure d’un interrogatoire. De plus, pour atténuer les craintes que peuvent avoir les demandeurs, il faudrait leur préciser qu’ils ne risquent pas d’être renvoyés chez eux sur-le-champ. Il faudrait aussi leur faire prendre conscience de l’importance de répondre honnêtement et le mieux possible à toutes les questions à ce moment. Il importe en effet que les demandeurs sachent que le fait de ne pas dire la vérité ou de ne pas collaborer avec les autorités au point d’entrée risque de leur être préjudiciable au moment de l’étude de leur demande par la Commission.

Le Comité recommande :

6. que soient prises les empreintes digitales et les photographies des demandeurs du statut de réfugié au premier point de contact avec les agents d’immigration.

7. que les agents d’immigration aux points d’entrée interrogent les demandeurs du statut de réfugié pour connaître le but général de leur demande, l’itinéraire qu’ils ont emprunté pour venir au Canada et d’autres renseignements pertinents.

8. que les demandeurs du statut de réfugié soient interrogés aux points d’entrée avec doigté et compassion, compte tenu du traumatisme qu’ils ont pu subir.

9. qu’il soit précisé aux demandeurs qu’il est important de répondre honnêtement et le mieux possible à toutes les questions qui leur sont posées au point d’entrée et que le fait de ne pas dire la vérité ou de ne pas collaborer avec les autorités risque de leur être préjudiciable au moment de l’étude de leur demande par la Commission.

L’entrevue initiale devrait avoir un troisième but important. Étant donné que l’agent d’immigration doit s’enquérir des motifs généraux de la demande, il sera parfois en mesure de faire une première évaluation. Le Comité estime que les agents d’immigration devraient alors identifier pour la Commission les demandes qui entrent dans l’une ou l’autre des deux catégories décrites ci-dessous.

D’abord, certaines demandes semblent, à première vue du moins, tout à fait valables. Il faudrait les identifier pour qu’elles soient traitées en accéléré par la Commission, processus dont il sera question plus loin. De plus, le Comité croit que le gouvernement pourrait aller encore plus loin pour repérer dès le départ les demandes qui ont du mérite. Notre système fonctionne de telle façon que les membres de la Section du statut de réfugié sont les seuls habilités à accueillir les demandes de statut de réfugié. Même si le manque de ressources ne permet peut-être pas d’affecter en permanence des membres aux points d’entrée les plus sollicités, il faudrait songer à mettre en place un système en vertu duquel des membres désignés seraient disponibles sur appel. Ainsi, dès qu’un agent d’immigration jugerait qu’un cas a du mérite, il pourrait faire appel à un membre de la Section du statut de réfugié, qui serait alors en mesure d’interroger le demandeur et, peut-être, de faire droit à sa revendication sur-le-champ, sous réserve qu’il réponde aux critères d’admissibilité.

L’autre catégorie de demandes que les agents d’immigration devraient repérer à cette première étape du processus se situe à l’autre extrémité du spectre, c’est-à-dire les demandes qui soulèvent des allégations de persécution dans des pays d’où il ne provient normalement pas de réfugiés. Si le repérage précoce des demandes qui ont du mérite vise à conserver les ressources de la Commission et à reconnaître les réfugiés de bonne foi le plus rapidement possible, le repérage des demandeurs venant de pays d’où il ne provient normalement pas de réfugiés sert à des fins de dissuasion. En effet, si les demandeurs de mauvaise foi savent que leur demande sera traitée en priorité et que leur séjour au pays risque d’être bref, ils devraient être beaucoup moins tentés d’utiliser le système pour des raisons économiques.

Le Comité recommande :

10. que les agents d’immigration aux points d’entrée identifient deux catégories de demandes à traiter en priorité par la Commission :

les demandes qui semblent avoir du mérite;

les demandes qui soulèvent des allégations de persécution dans des pays d’où il ne provient normalement pas de réfugiés.

11. que le gouvernement envisage la possibilité de recourir sur appel à des membres de la Section du statut de réfugié lorsque des agents d’immigration repèrent des cas qui ont du mérite au moment des entrevues au point d’entrée.

Le Comité a déjà parlé de la responsabilité qui incombe aux agents principaux de déterminer si un demandeur peut ou non revendiquer le statut de réfugié. En plus des exclusions liées aux activités criminelles et à la sécurité, il y a d’autres aspects plus terre à terre dont il faut tenir compte, par exemple, si le demandeur a ou non obtenu le statut de réfugié dans un autre pays (et, par conséquent, n’a pas besoin de la protection du Canada), s’il peut ou non renouveler sa demande, etc. L’entrevue initiale devrait aussi servir à établir ces faits objectifs concernant l’admissibilité et ainsi permettre le transfert immédiat du dossier à la Commission, plutôt que de procéder comme cela se fait actuellement à certains endroits, c’est-à-dire attendre que le demandeur ait rempli les formulaires nécessaires et les ait renvoyés aux autorités. Il importe que Citoyenneté et Immigration Canada achemine les demandes à la Commission le plus rapidement possible de façon à remédier à certains des retards actuels. Autre avantage, les réfugiés légitimes n’auraient pas à attendre aussi longtemps pour voir leur demande accueillie et commencer leur nouvelle vie.

Le Comité recommande :

12. que l’agent principal au point d’entrée vérifie les faits objectifs concernant l’admissibilité au moment de l’entrevue initiale afin d’accélérer le transfert du dossier à la Commission.

Le Comité a conclu que certains aspects des critères d’admissibilité devraient être modifiés. À l’heure actuelle, un demandeur débouté qui a passé plus de 90 jours hors du pays peut revenir au Canada et présenter une nouvelle demande. On retourne ainsi à la case départ, et le manège peut, en théorie du moins, se poursuivre indéfiniment. Même si les demandes répétées ne représentent pas un pourcentage important du total des demandes, on nous a dit que leur nombre allait croissant. Nous recommandons de prolonger à un an la période d’attente avant le renouvellement d’une demande et de modifier la procédure. Plutôt que d’accorder au demandeur une audience en bonne et due forme devant la Commission, nous souscrivons à la proposition de Citoyenneté et Immigration Canada qui préconise, dans un cas semblable, de procéder uniquement à un examen préalable au renvoi. On pourrait ainsi vérifier s’il y a de nouveaux éléments de preuve concernant la revendication ou si la situation dans le pays d’origine du demandeur a évolué. Dans la négative, celui-ci serait renvoyé.

L’objection à cette recommandation est que le système permet difficilement de déceler les erreurs, de sorte que le renouvellement des demandes est essentiel pour pallier cette lacune. L’existence d’un tel recours serait en effet indispensable si l’on n’instaurait pas le mécanisme d’appel dont il est question plus loin. Grâce à ce mécanisme, nous pensons que le traitement des demandes répétées selon une procédure sommaire serait un moyen raisonnable de conserver les ressources et de décourager certains demandeurs de recourir à la stratégie de la porte tournante comme ils le font actuellement.

Nous sommes également d’accord avec le gouvernement pour dire qu’il faudrait élargir les critères d’admissibilité de façon à exclure les personnes pour lesquelles on a des motifs raisonnables de croire qu'elle font partie du crime organisé. Parce que les ramifications du « crime organisé » peuvent être vastes, les mesures de protection actuelles doivent demeurer en vigueur, à savoir que pour être exclu du processus de détermination du statut de réfugié, il faut que le demandeur soit déclaré être un danger pour le public au Canada ou qu’il soit décidé qu’il n’est pas dans l’intérêt public d’entendre sa demande.

Il existe un important critère d’admissibilité qui fait partie de la Loi depuis son adoption en 1989, mais qui n’a jamais été appliqué. Il s’agit de la « règle du tiers pays sûr » qui exclut du processus de détermination du statut de réfugié les demandeurs qui sont passés par un pays répondant à l’exigence principale de la Convention relative au statut des réfugiés, en vertu de laquelle aucun réfugié n’est renvoyé dans un pays où il craint d’être persécuté pour des raisons précises. En théorie, les réfugiés doivent chercher à obtenir la protection dont ils ont besoin lorsqu’ils le peuvent, plutôt que de choisir l’endroit où ils veulent aller ou celui où ils pensent avoir les meilleures chances d’être acceptés.

La plupart des observateurs avertis ont toujours reconnu que pour que les dispositions relatives au renvoi dans un tiers pays sûr puissent fonctionner, elles doivent être assorties d’ententes bilatérales ou multilatérales concernant le renvoi des demandeurs. Autrement, ceux-ci risquent de se voir « ballottés » d’un pays à l’autre sans qu’aucun ne soit prêt à prendre la responsabilité de se prononcer sur leur demande, d’où la nécessité de conclure des ententes pour mettre fin à ce va-et-vient et faire respecter la Convention.

Au fil des ans, le Canada a tenté de négocier des ententes avec d’autres pays et est venu à un cheveu d’en conclure une avec les États-Unis il y a plusieurs années. Le Comité estime que le gouvernement devrait poursuivre ses efforts activement en ce sens chaque fois que c’est possible, et que la disposition relative au tiers pays sûr devrait être laissée dans la Loi dans l’espoir qu’elle puisse un jour être mise en application. De plus, nous pensons que Citoyenneté et Immigration Canada devrait rendre compte de tout progrès en la matière à la Chambre des communes et au Comité.

Le Comité souhaite aborder un dernier point avant de passer à l’audience sur le statut de réfugié elle-même. À l’heure actuelle, il n’y a pas de limite de temps pour présenter une demande de statut de réfugié. Quoique la plupart des demandeurs font part de leurs intentions dès leur arrivée, rien ne les empêche de revendiquer le statut de réfugié à n’importe quel moment. Ainsi, les personnes qui, pour une raison ou pour une autre, ont maille à partir avec le régime d’application de la Loi sur l’immigration, notamment à cause de leurs antécédents criminels ou pour des raisons de sécurité, même celles qui sont au pays depuis plusieurs années, peuvent présenter une demande à n’importe quel moment avant de faire l’objet d’une mesure de renvoi. Nous ne voyons aucune raison de laisser cette situation perdurer.

Le Comité reconnaît qu’il existe des raisons légitimes pour expliquer qu’une personne tarde à revendiquer le statut de réfugié. Ces raisons doivent être admises. Toutefois, nous sommes d’accord avec le gouvernement pour dire que ce délai ne devrait généralement pas dépasser 30 jours après l’arrivée.

 

 

Le Comité recommande :

13. que la période d’attente avant le renouvellement d’une demande de statut de réfugié soit prolongée à un an.

14. que les demandeurs qui renouvellent leur demande fassent l’objet d’un examen préalable au renvoi, plutôt que d’avoir droit à une audience en bonne et due forme devant la Commission. Cet examen servirait à déterminer s’il y a de nouveaux éléments de preuve concernant la revendication et si la situation dans le pays d’origine du demandeur a évolué. Dans la négative, celui-ci serait renvoyé.

15. que soient élargis les critères permettant de décider si une personne peut ou non présenter une demande de statut de réfugié, de façon à exclure toutes celles pour lesquelles on a des motifs raisonnables de croire qu'elles font partie du crime organisé.

16. que la disposition relative au renvoi dans un tiers pays sûr, bien qu’elle n’ait pas été mise en application jusqu’ici, demeure dans la Loi, et que le gouvernement poursuive activement ses efforts en vue de conclure des ententes bilatérales et multilatérales concernant le renvoi dans un tiers pays sûr.

17. que le gouvernement rende compte annuellement des progrès faits et de toutes les ententes conclues concernant le renvoi dans un tiers pays sûr à la Chambre des communes et au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration.

18. que toutes les demandes de statut de réfugié soient présentées dans les 30 jours suivant l’arrivée au Canada. Une exception à cet égard devrait toutefois être prévue lorsque la situation du demandeur l’exige.

L’audience

La Section du statut de réfugié a comme objectif de rendre, aussi rapidement que possible, des décisions équitables et bien fondées sur les demandes de statut de réfugié. Les procédures d’audience devraient être conçues pour atteindre cet objectif avec le moins de ressources possibles. Pour cette raison, le Comité désire reprendre une proposition formulée par le gouvernement en 1995, à savoir faire passer de deux membres à un seul le tribunal administratif de la Section.

Cette mesure permettrait d’accomplir plusieurs choses. La Commission pourrait, bien sûr, entendre plus de causes, pour autant qu’elle dispose d’employés supplémentaires, par exemple des agents chargés des revendications. L’ordonnancement des demandes et des ajournements s’en trouverait également de beaucoup simplifié. La Commission devrait toutefois avoir le pouvoir de constituer un tribunal de trois membres pour entendre les causes types ou les causes particulièrement difficiles.

La proposition de constituer des tribunaux d’un membre avait à l’origine suscité de vives critiques de la part des défenseurs des réfugiés. À leur avis, bien des membres de la Section étaient incapables de rendre seuls un jugement de cette importance et de le motiver par écrit. Ils ont aussi fait valoir que, sans un mécanisme d’appel adéquat, il était très difficile de corriger une mauvaise décision de première instance. Le Comité est convaincu que, ces deux problèmes résolus, le tribunal à un membre serait une solution viable. Or la qualité des membres nommés s’est sensiblement améliorée ces dernières années, et les mesures décrites ci-dessous permettraient de poursuivre sur cette voie.

Le Comité estime surtout qu’il est temps d’adopter un véritable mécanisme d’appel concernant les décisions sur le statut de réfugié. Depuis des années, les commentateurs et défenseurs des réfugiés dénoncent avec véhémence l’absence d’un tel mécanisme et l’obligation de porter les cas refusés devant la Cour fédérale, moyennant autorisation. Une structure d’appel interne à la Commission servirait à un certain nombre de fins. Elle constituerait un filet de sécurité pour les demandeurs déboutés : les erreurs évidentes pourraient être corrigées assez rapidement sans judiciarisation, et le nombre de cas portés devant la Cour fédérale diminuerait d’autant. Elle favoriserait également l’uniformité décisionnelle. La Commission connaît le problème de l’incohérence des décisions d’une région à l’autre et d’un cas à l’autre malgré la similitude des situations, et elle essaie depuis quelque temps de le résoudre au moyen de diverses mesures. Un comité de révision de grande qualité renforcerait de beaucoup ces mesures. Pour que le mécanisme d'appel soit efficace, seuls les membres les plus expérimentés devraient être choisis pour y participer.

Le Comité recommande :

19. que la Section du statut de réfugié forme des tribunaux d’un seul membre, en ayant l’option de constituer un tribunal de trois membres pour entendre les causes types ou les causes particulièrement difficiles.

20. que la Commission dispose d’une structure d’appel interne pour les demandeurs déboutés, dont seuls ses membres les plus expérimentés font partie.

L’une des raisons pour lesquelles le processus de reconnaissance du statut de réfugié est à ce point compliqué réside dans le nombre d’étapes que comporte l’évaluation des risques. Déterminer si les demandeurs sont des réfugiés au sens de la Convention, c’est évaluer les risques de persécution auxquels ils s’exposeraient s’ils devaient retourner dans leur pays d’origine. Les demandeurs déboutés peuvent réclamer de Citoyenneté et Immigration Canada un autre examen des risques qui, comme l’a précisé en 1997 le vérificateur général, porte habituellement sur les faits qui étaient en cause à l’audience. En outre, tous les individus susceptibles d’être renvoyés ont le droit de porter à l’attention du gouvernement certains risques de nature humanitaire.

Dans son rapport de 1998, le Comité a recommandé que toutes les décisions ayant trait aux risques courus par une personne incombent à la Section du statut de réfugié. C’est là que se trouvent les spécialistes, ceux qui ont entendu les témoignages oraux. La nouvelle procédure d’appel favoriserait l’uniformité dans ce domaine également.

Le Comité recommande :

21. que toutes les décisions ayant trait aux risques courus par une personne incombent à la Section du statut de réfugié.

Le Comité a recommandé plus haut d’utiliser d’une façon plus productive les agents au point d’entrée. Il a notamment proposé la tenue d’une entrevue normalisée, portant non seulement sur l’information personnelle relative au demandeur, mais aussi sur des renseignements généraux concernant la revendication. Il a recommandé de cibler dès le départ les demandes qui semblent bien fondées de façon que les agents chargés de la revendication (ACR) à la Section du statut de réfugié puissent plus rapidement signaler celles qui devraient passer par le processus accéléré. Ce processus comporte une révision et une évaluation de la demande par un ACR. Lorsqu’une demande est jugée bien fondée, l’ACR transmet le dossier à un membre qui, s’il est d’accord, accepte la revendication sans audience.

Il y avait auparavant plus d’audiences accélérées (en ce moment, environ 10 % seulement des demandes sont soumises à ce processus). La Commission devrait chercher à hausser ce pourcentage, pour autant que l’intégrité du mécanisme décisionnel soit préservée. Le recours accru au processus accéléré permettrait à la Commission d’économiser des ressources substantielles. Pour les réfugiés de bonne foi, le processus offre un règlement rapide de leur cas et devrait faciliter leur adaptation à la vie au Canada.

Le Comité recommande :

22. que la Section du statut de réfugié s’efforce d’accroître le pourcentage des demandes soumises au processus accéléré.

Le Comité a en outre recommandé l’identification précoce des demandes qui mettent en cause des allégations de persécution dans des pays qui ne sont pas habituellement sources de réfugiés. Non seulement l’audience en bonne et due forme s’impose-t-elle dans ces circonstances, mais elle devrait aussi se tenir le plus vite possible. Une issue expéditive, assortie d’un renvoi rapide des demandeurs déboutés, montrerait clairement qu’il n’est pas avantageux de présenter une revendication pour rester au pays. Avec le temps, ce genre de demandes devraient diminuer, économisant des ressources et libérant le processus de reconnaissance du statut de réfugié au profit de ceux qui en ont réellement besoin.

Dans son document de travail, Citoyenneté et Immigration Canada a proposé d’éliminer certaines restrictions sur l’habilitation du gouvernement à participer aux audiences de la Commission. En ce moment, le représentant du ministre peut témoigner dans tous les cas, mais ne peut participer davantage sans la permission des membres chargés de la cause. Seules les situations où sont invoquées les clauses d’exclusion de la Convention justifient l’application des droits complets de présenter des preuves, de questionner le demandeur ou tout témoin et de faire des représentations.

Le Comité en est venu à la conclusion que ces restrictions sont quelque peu artificielles et devraient disparaître. Le gouvernement devrait avoir le droit de participer pleinement aux audiences qu’il juge importantes. Les membres de la Section du statut de réfugié conservant le contrôle total de l’audience, la nature de cette dernière ne devrait pas être modifiée en profondeur par l’extension des droits de participation actuels. Cela étant dit, le Comité recommande au gouvernement de prendre une part plus active que par le passé dans le choix des causes exigeant son intervention.

Dans la même veine, le Comité souscrit à la recommandation contenue dans le document de travail du gouvernement selon laquelle le Ministre devrait être habilité, sans avoir à obtenir la permission du président de la Commission, à intenter des procédures pour faire annuler une décision reconnaissant qu’une personne est un réfugié au sens de la Convention. Ce genre de cause comporte des allégations voulant que la détermination ait été obtenue par des moyens frauduleux ou par une représentation erronée, la suppression ou la dissimulation de faits importants. De tels cas doivent être entendus par un tribunal de trois personnes, ce qui constitue une garantie suffisante aux yeux du Comité. Comme plus haut, le Comité recommande que Citoyenneté et Immigration Canada soit davantage à l’affût des causes justifiant la procédure d’annulation.

Le Comité recommande :

23. que soient éliminées les restrictions actuelles à la participation du représentant du Ministre aux audiences sur le statut de réfugié et que le gouvernement prenne une part plus active que par le passé dans le choix des causes exigeant son intervention, tout en préservant l’indépendance de la Commission.

24. que le Ministre soit habilité à intenter des procédures pour faire annuler une décision déclarant une personne réfugié au sens de la Convention, sans avoir à demander d’abord la permission du président de la Commission. Citoyenneté et Immigration Canada devrait être davantage à l’affût des cas où la procédure d’annulation serait justifiée.

Enfin, le Comité aimerait commenter la qualité de l’information fournie aux commissaires. La reconnaissance du statut de réfugié exige des données solides, concrètes et récentes concernant les conditions qui règnent dans les pays en cause. Ces données sont fournies par la Division des recherches de la Commission, qui est très respectée. D’après l’un des témoins, toutefois, on pourrait avoir davantage recours aux compétences du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international à l’étranger pour la communication directe de renseignements à la Commission. Nos missions à l’étranger devraient s’efforcer de fournir des données opportunes et pertinentes sur la situation des différents pays et, au besoin, sur des cas individuels.

Le Comité recommande :

25. que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international soit encouragé à fournir, directement à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, des données opportunes et pertinentes sur la situation des différents pays et sur des cas individuels.

Autres questions touchant le système de détermination du statut de réfugié

Depuis la création de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, il y a 11 ans, de nombreux commentateurs ont exprimé des préoccupations sur le choix des commissaires, leur formation et leur aptitude à assumer les lourdes responsabilités de leur poste. Au fil des ans, le processus de sélection s’est amélioré, et ce, grâce à la mise sur pied du Comité consultatif ministériel qui évalue toute nomination et reconduction, à de meilleurs programmes de formation pour les nouveaux membres et à l’utilisation d’appréciations du rendement.

Certains témoins restent quand même convaincus que le processus a encore besoin d’améliorations. Lorsque des décisions touchent la sécurité des gens et même leur vie, les décideurs doivent être de très haut calibre. Et ce sera d’autant plus nécessaire si la précédente recommandation de former des tribunaux d’un seul membre est acceptée. Chaque commissaire devra être qualifié pour présider une audience. Il devra être capable de comprendre et de soupeser les preuves, d’appliquer aux faits des connaissances tirées de sources extérieures et d’en arriver à une décision équitable. Outre ces compétences procédurales et analytiques, les membres doivent se montrer sensibles et ouverts aux différences culturelles, surtout à celles qui engendrent des malentendus lorsqu’une personne essaie de communiquer avec des représentants d’une autre culture. Par conséquent, la Commission doit continuer de cibler et d’améliorer la formation et le perfectionnement de ses membres.

Les nouveaux commissaires mettent beaucoup de temps, parfois une année complète, à se former et à acquérir l’expérience nécessaire pour devenir des décideurs pleinement fonctionnels. Ce n’est probablement que durant la seconde année de leur mandat que la Commission et les membres eux-mêmes peuvent savoir s’ils y sont parvenus. Il serait donc avisé de nommer les commissaires pour un mandat initial relativement court, disons de deux ans. À ceux qui ont fait leurs preuves dans ce laps de temps, il convient de donner des mandats plus longs qui donne une stabilité à la Commission.

Le Comité recommande :

26. que les nominations à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié soient fondées sur le mérite, de sorte que tous ses membres soient du plus fort calibre.

27. que la Commission de l’immigration et du statut de réfugié continue de cibler et d'améliorer la formation et le perfectionnement de ses membres.

28. que les nominations initiales à la Commission soient d’une durée relativement courte, mais que le mandat des membres retenus soit reconduit pour une plus longue période.

À la suite d’une audience de la Section du statut de réfugié (ou d’une décision, si le processus accéléré est mis en œuvre), un demandeur est soit reconnu réfugié au sens de la Convention, soit refusé. Comme il en a été question ci-dessus, un demandeur débouté a plusieurs options, mais la plupart des individus dans cette situation sont susceptibles d’être renvoyés du Canada. Et c’est souvent à ce moment-là que le processus fait défaut. Les revendicateurs qui ne sont pas en détention (la vaste majorité, en temps normal) négligeront souvent de se présenter devant les responsables de l’immigration pour discuter des plans de renvoi, ou alors ils ne respecteront pas leurs engagements après s'être présentés. Le Canada n’a aucun moyen de savoir où se trouvent exactement bon nombre des demandeurs déboutés ou s’ils ont effectivement quitté le pays.

Le Comité a reçu plusieurs suggestions sur les moyens que pourrait prendre le gouvernement pour renvoyer du Canada davantage de demandeurs refusés comme réfugiés, et il pourrait très bien y avoir d’autres possibilités. Par exemple, les revendicateurs pourraient devoir comparaître en personne pour entendre la décision finale. Les responsables de l’immigration pourraient alors procéder de la façon dictée par la situation, c’est-à-dire tenir une réunion, exiger une garantie pour inciter au respect des procédures de renvoi ou, dans certains cas, ordonner la détention jusqu’au renvoi. Il faudrait, pour ce faire, reconnaître l’indépendance de la Commission à l’égard du gouvernement, et toute procédure concrète devrait se dérouler dans des locaux distincts. Quel que soit le mécanisme choisi, toutefois, l’aspect important à se rappeler est que, pour l’instant, trop de demandeurs déboutés peuvent passer entre les mailles du filet en « disparaissant » lorsqu’ils se rendent compte que leur séjour au Canada tire peut-être à sa fin.

Le Comité recommande :

29. que Citoyenneté et Immigration Canada resserre ses procédures à la suite du rejet d’une demande de statut de réfugié, afin d’augmenter les chances que le demandeur soit effectivement renvoyé.

SÉCURITÉ DES FRONTIÈRES

Questions touchant les documents d’immigration

La protection de la frontière du Canada commence souvent à des milliers de milles d’ici. Les compagnies de transport ont l’obligation légale de voir à ce que les passagers qu’elles font entrer au Canada aient en main les documents voulus. Le Canada collabore avec les compagnies aériennes en renseignant leurs employés sur les exigences de la loi canadienne et en leur expliquant comment repérer les faux documents ou les documents altérés.

Un témoin de l’industrie du transport aérien a déclaré que certains passagers dont on examine les documents de près s’en offusquent. Il a recommandé que le gouvernement conçoive un dépliant multilingue pour expliquer que les compagnies aériennes sont des intermédiaires entre le gouvernement et les voyageurs lorsqu’il s’agit de faire respecter les exigences de la loi canadienne concernant les documents de voyage. Le gouvernement et l’industrie pourraient peut-être travailler en collaboration à ce projet.

Afin d’améliorer la vérification des documents, plus de 20 agents de contrôle de l’immigration (ACI) canadiens sont en poste à l’étranger pour aider les autorités locales à intercepter les personnes non munies des documents voulus et à les empêcher de s’envoler pour le Canada. En 1998, environ 6 300 de ces personnes ont été interceptées. De toute évidence, ce programme fonctionne bien, et il devrait être élargi. Des représentants de l’industrie du transport aérien ont même suggéré que dans les endroits où il n’y a pas d’ACI, on mette sur pied une ligne de dépannage pour que le personnel puisse consulter un ACI et profiter de son expertise.

Par ailleurs, nous savons que de nombreux défenseurs des réfugiés estiment que les activités d’interception ne devraient pas avoir pour effet d’enlever à quelqu’un sa chance de trouver asile. À cela, le gouvernement répond que les représentants de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) renvoient au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés ou à une mission canadienne à l’étranger les passagers interceptés qui disent craindre d’être persécutés. Un témoin qui connaît bien le programme des ACI a toutefois affirmé qu’on ne semble pas toujours donner ces renseignements aux personnes à qui l’on interdit de monter à bord d’un avion. Par conséquent, le gouvernement devrait demander à ses ACI à l’étranger de renseigner systématiquement sur ce point tous les passagers interceptés; il devrait également voir à ce que les agents des compagnies aériennes reçoivent les mêmes instructions dans les endroits où il n’y a pas d’ACI.

Dans son rapport de 1998, le Comité a recommandé que Citoyenneté et Immigration Canada envisage la possibilité d’instaurer, en collaboration avec les transporteurs aériens, un système visant à balayer les documents de voyage des personnes qui se rendent au Canada à bord de vols ayant posé des problèmes de contrôle dans le passé. On pourrait ainsi établir avec certitude le nom de la compagnie aérienne empruntée, le point d’embarquement et l’identité déclarée à l’embarquement. Une meilleure connaissance des documents pourrait aussi aider le Canada à suivre les habitudes des réseaux de contrefaçon de documents. Le gouvernement a fait savoir au Comité qu’il étudie sérieusement cette idée. Le Comité exhorte le Ministère à aller de l’avant pour identifier les outils informatiques appropriés et lancer le projet pilote qui s’impose.

D’autres mesures peuvent être prises pour décourager les voyageurs qui entrent au Canada munis de faux documents ou de documents altérés, ou encore sans papiers du tout. Tout d’abord, il faut noter que tous les passagers qui prennent l’avion pour le Canada doivent détenir des documents de voyage. Ceux qui arrivent sans documents au premier point d’inspection au Canada doivent donc s’en être débarrassé d’une manière ou d’une autre après leur départ. Les agents d’immigration qui ont effectué des contrôles de certains vols d’arrivée aux principaux aéroports ont apparemment réussi à empêcher la chose dans un certain nombre de cas. Légalement, ces personnes ont quand même le droit de revendiquer le statut de réfugié, mais leurs documents peuvent fournir des renseignements supplémentaires. Même s’ils sont complètement faux, en les confisquant, on les retire de la circulation et l’on prévient leur réutilisation. Le Comité est donc en faveur de l’élargissement des contrôles aux points de débarquement dans le cas des vols qui ont posé problème dans le passé.

Il faut de l’expertise et de la ténacité pour essayer de contrecarrer ceux dont le métier consiste à falsifier ou à altérer des documents. Le gouvernement doit sans cesse adopter de nouveaux éléments de sécurité pour déjouer les faussaires, qui parviennent souvent malgré tout à leurs fins. Il réussit souvent mais pas toujours.

Il semblerait que certains documents canadiens soient plus sécuritaires que d’autres. Un représentant de l’industrie du transport aérien a trouvé des défauts à la carte de résident permanent IMM 1000. En effet, elle ne porte aucune photo permettant d’identifier la personne et ne fait appel à aucune technique biométrique moderne ni à des méthodes de validation de pointe. Elle se prête donc bien à une utilisation à des fins non autorisées et à la reproduction frauduleuse. Selon l’industrie, nous avons la technologie qu’il faut pour remplacer la carte, mais le ministère n’a pas les ressources pour le faire. Dans le budget de février 2000, Citoyenneté et Immigration Canada s’est vu attribuer des fonds additionnels à consacrer à l’exécution de la loi. Le Comité recommande donc qu’il donne priorité au remplacement de la carte de résident permanent IMM 1000.

Le Comité recommande :

30. que le gouvernement et l’industrie du transport aérien envisagent la possibilité de concevoir un dépliant multilingue expliquant aux passagers que les compagnies aériennes sont des intermédiaires entre le gouvernement et les voyageurs lorsqu’il s’agit de faire respecter les exigences de la loi canadienne concernant les documents de voyage.

31. que soit augmenté le nombre d’agents de contrôle de l’immigration (ACI) canadiens à l’étranger pour intercepter les passagers non munis des documents voulus avant qu’ils s’envolent à destination du Canada. On devrait envisager la possibilité d’établir des liens entre les endroits qui disposent d’un ACI et ceux qui n’en ont pas, par exemple en mettant sur pied une ligne de dépannage.

32. que les passagers qui sont interceptés avant leur arrivée au Canada soient renvoyés aux missions canadiennes ou au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

33. que Citoyenneté et Immigration Canada donne priorité à la poursuite de la recherche en vue de trouver des techniques pour balayer les documents de voyage des personnes qui arrivent au Canada à bord de vols qui ont présenté des problèmes de contrôle dans le passé. Un projet pilote devrait être lancé le plus tôt possible.

34. que Citoyenneté et Immigration Canada étende la pratique des contrôles de documents aux passagers qui arrivent à bord de vols ayant posé des problèmes dans le passé.

35. que Citoyenneté et Immigration Canada poursuive ses efforts en vue d’améliorer les éléments de sécurité de tous ses documents officiels, et donne priorité au remplacement de la carte de résident permanent IMM 1000.

Dépister les trafiquants et les passeurs de personnes

Bon nombre des mesures que nous avons déjà recommandées dans le présent rapport visent à ce que les trafiquants et les passeurs de personnes aient moins de succès, fassent moins d’argent et, par conséquent, diminuent leurs activités. Dans la présente section, nous parlons de mesures supplémentaires qui touchent plus directement ces activités. Nous recommandons, entre autres, d’accroître les sanctions et les autres conséquences pour les personnes condamnées, et de créer deux nouvelles infractions.

Comme nous l’avons signalé plus haut, les sanctions prévues pour les personnes qui organisent l’entrée de voyageurs non munis des documents requis sont sévères : elles s’exposent en effet à une amende de 500 000 $ et/ou à une peine d’emprisonnement de 10 ans lorsqu’il s’agit de groupes de 10 personnes ou plus. Nous sommes d’accord avec le gouvernement pour dire qu’il y a une lacune dans les dispositions concernant les sanctions. En effet, les véhicules utilisés pour commettre ces infractions peuvent maintenant être saisis, mais la Loi ne prévoit pas la confiscation d’autres biens achetés au moyen du produit de ces activités illégales. Comme bon nombre de passeurs ont leur base au Canada ou ont des relations canadiennes, et comme nous savons qu’il s’agit d’un commerce très lucratif, le Comité estime qu’il serait sensé qu’on s’attaque au produit de ces crimes. Il croit aussi que l’argent ainsi recouvré devrait être remis à Citoyenneté et Immigration Canada pour accroître ses ressources en vue de l’exécution de la Loi.

Le Comité est également d’avis que les personnes dont on a des motifs raisonnables de croire qu’elles sont coupables de telles infractions ne devraient pas être admissibles au Canada si elles sont à l’étranger, ou devraient être déportées du Canada si elles s’y trouvent déjà.

Nous l’avons dit, les sanctions prévues pour les personnes qui organisent l’entrée de voyageurs non munis des documents requis sont lourdes. Cependant, une fois au Canada, ces voyageurs sont souvent transportés à travers le pays, vers une destination ailleurs au Canada, ou aux États-Unis. De l’avis du Comité, pour combattre efficacement le trafic, cette activité devrait aussi être illégale, même si le transport s’effectue entièrement au Canada.

En dernier lieu, le Comité appuie la recommandation selon laquelle on devrait considérer comme une nouvelle infraction à l’immigration le fait d’aider quelqu’un d’autre à entrer au Canada d’une façon frauduleuse ou sur la foi d’une représentation erronée. Il existe déjà une infraction qui consiste à conseiller à quelqu’un de faire une fausse déclaration en rapport avec une demande de statut de réfugié, mais aucune disposition relative à la fraude ou à la représentation erronée touchant d’autres questions.

Dans un ordre d’idées connexes, il arrive souvent que des Canadiens parrainent un parent de l’étranger qui vient en visite au Canada. De temps en temps, ces visiteurs présentent une demande de statut de réfugié. Le Comité recommande, lorsque la personne s’avère ne pas être un véritable visiteur, d’attribuer une part de la responsabilité au parrain. Par exemple, si le demandeur a besoin d’aide sociale pendant le traitement de sa demande, le parrain pourrait être tenu de rembourser le gouvernement.

Le Comité recommande :

/36. que la disposition concernant le produit d’une infraction soit étendue au produit d’infractions contre les règles d’immigration dans le cas de l’organisation de l’entrée au Canada de personnes non munies des documents requis. Le produit confisqué devrait être remis à Citoyenneté et Immigration Canada pour accroître ses ressources en vue de l’exécution de la loi.

37. que les personnes déclarées coupables d’infractions relatives à l’organisation de l’entrée au Canada de personnes non munies des documents requis ne soient pas admissibles au Canada si elles sont à l’étranger, ou soient déportées du Canada si elles s’y trouvent déjà.

38. que soit créée une nouvelle infraction, dans le Code criminel et dans la Loi sur l’immigration pour durement sanctionner ceux qui collaborent au trafic d’êtres humains en territoire canadien.

39. que soit créée une nouvelle infraction dans le cas des personnes qui aident quelqu’un à venir au Canada par des moyens frauduleux ou une représentation erronée.

40. que soient prises des mesures pour tenir financièrement responsables les personnes au Canada qui parrainent des visiteurs qui s’avèrent plus tard ne pas être de véritables visiteurs.

Préoccupations des compagnies de transport

Le Comité a entendu les témoignages de représentants des secteurs du transport maritime et du transport aérien de l’industrie du transport. Bon nombre de leurs préoccupations durent depuis des années; nous en avions en effet déjà parlé dans notre rapport de 1998. Il a également été souvent question de leurs problèmes dans nos discussions avec Citoyenneté et Immigration Canada. Après un bref examen, le Comité ne se sent pas apte à commenter les détails des propositions qui nous ont été présentées par ces représentants. Nous concluons cependant, comme en 1998, que Citoyenneté et Immigration Canada et l’industrie doivent s’efforcer davantage de résoudre les problèmes qui existent. Par exemple, nous sommes d’accord avec les personnes qui ont déclaré qu’il était injuste et inacceptable de présenter aux transporteurs des factures extrêmement élevées pour couvrir les coûts du renvoi des personnes non admissibles bien des années après leur arrivée au Canada.

Le Comité recommande :

41. que Citoyenneté et Immigration Canada collabore avec l’industrie du transport pour résoudre les plaintes de longue date de cette dernière, en particulier celles touchant les retards dus à des processus gouvernementaux qui échappent au contrôle de l’industrie.

Coopération internationale

Presque tous les experts qui se sont penchés sur les problèmes du trafic d’êtres humains et le mouvement irrégulier de migrants sont d’avis que leur résolution exige une coopération à l’échelle internationale. Selon les Nations Unies, jusqu’à 4 millions de personnes traverseraient clandestinement les frontières nationales chaque année, activité qui pourrait rapporter environ 10 milliards de dollars par an.

Le Canada joue un rôle actif dans l’élaboration des protocoles contre l’introduction clandestine de migrants et le trafic de personnes, en particulier des femmes et des enfants, protocoles qui doivent accompagner le projet de Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. La Convention et ses protocoles devraient être d’une aide précieuse dans la lutte contre le trafic d’êtres humains.

Le Canada et les États-Unis font des progrès pour ce qui est de l’initiative « Gestion des frontières », lancée en 1997. Il s’agit d’un projet conjoint de Citoyenneté et Immigration Canada, de l’Immigration and Naturalization Service des États-Unis et du Département d’État américain en vue d’améliorer la sécurité dans toute la région. Les domaines de collaboration comprennent l’échange d’information et de technologie, l’interception à l’étranger, l’échange de renseignements de sécurité, la coordination des visas et l’étude des défis que posent les frontières internationales, notamment le passage de clandestins. Nous avons vu l’été dernier à quel point la coopération et la coordination entre les patrouilles aériennes et la police en mer sur les côtes canadiennes peuvent être importantes.

Dans son rapport de 1998, le Comité a proposé une méthode de lutte contre le trafic et le passage de clandestins : que le gouvernement canadien incite les autres pays à faire une infraction criminelle de l’organisation ou de la conspiration en vue de l’organisation de l’entrée illégale de personnes dans un autre pays. Nous réitérons cette recommandation aujourd’hui.

Au début du présent rapport, le Comité a recommandé que le gouvernement mette sur pied un programme de communication le plus vaste possible dans les pays qui ont posé problème dans le passé, afin d’informer les trafiquants éventuels et leurs clients des dangers et des conséquences de leurs activités. Il y a toutefois un autre côté à cette médaille. Lorsque la migration en provenance d’un pays donné est le fait d’abus contre les droits de la personne, le Canada devrait faire tout en son pouvoir pour encourager ce pays à mieux respecter les droits humains. La migration s’explique à la fois par des « facteurs de départ » et par des « facteurs d’attraction »; or travailler à éliminer les facteurs de départ, c’est-à-dire ceux qui poussent les gens à quitter leur pays d’origine, ne peut avoir que des effets bénéfiques pour toutes les parties intéressées.

Le Comité recommande :

42. que le Canada continue d’accorder la plus grande importance à la lutte conjointe avec d’autres pays contre le trafic d’êtres humains et qu’il exhorte les autres pays à reconnaître ce trafic comme un crime contre l’humanité devant être traité comme un crime international.

43. que le Canada continue d’accorder une importance particulière à sa collaboration avec les États-Unis sur la question des frontières, notamment la surveillance commune de nos côtes pour empêcher l’arrivée non autorisée dans chacun de nos pays de navires transportant des migrants.

44. que le gouvernement incite les autres pays à faire une infraction criminelle de l’organisation ou de la conspiration en vue de l’organisation de l’entrée illégale de personnes dans un autre pays.

45. Lorsque la migration est le fait d’abus contre les droits de la personne dans un pays particulier, que le Canada fasse tout en son pouvoir pour encourager ce pays à améliorer son dossier en matière de respect des droits humains.

CONCLUSION

 

Le Comité se rend bien compte de la complexité et de la difficulté des problèmes que pose la sécurité des frontières à une époque où les gens se déplacent d’un continent à l’autre tous les jours. Les défis sont également d’envergure internationale. Les technologies qui révolutionnent les communications gouvernementales et les éléments de sécurité des documents finissent par se retrouver dans l’arsenal des trafiquants et des passeurs. Il est essentiel que les pays coopèrent entre eux, mais cette coopération peut être longue à s’établir et est souvent imparfaite. Entre-temps, les personnes et les organisations criminelles qui veulent contrevenir à la loi trouvent souvent rapidement le moyen d’échapper aux contrôles et d’arriver à leurs fins.

Par ailleurs, il est capital que les personnes qui craignent d’être persécutées dans leur pays d’origine continuent de pouvoir trouver un asile sûr. Bien qu’elles soient importantes, les activités d’interception doivent tenir compte de la nécessité d’être aux aguets pour déceler les réfugiés authentiques. Lorsqu’il s’agit de rationaliser le système de détermination du statut de réfugié, il faut toujours trouver un juste équilibre entre la rapidité de traitement et l’équité.

Le Comité reconnaît ces complexités et n’a pas été en mesure de recommander de solutions magiques ni de « remèdes miracles ». Le processus d’amélioration de la sécurité de nos frontières et de perfectionnement de notre système de reconnaissance du statut de réfugié continuera d’évoluer au fil des ans. Le Comité espère que son rapport contribuera à cette évolution.

Le Comité reconnaît qu’un certain nombre des modifications qu’il recommande d’apporter à la Loi et aux politiques exigeront l’allocation de ressources supplémentaires. En effet, il faudra nécessairement accroître les ressources de Citoyenneté et Immigration Canada, mais aussi celles des partenaires qui collaborent à l’administration du programme d’immigration et de protection des réfugiés, en particulier le Service canadien du renseignement de sécurité et la GRC. Leurs fonctions de collecte de renseignements de sécurité sont essentielles au programme, mais elles sont largement tributaires d’une technologie de pointe. Nous recommandons donc que le gouvernement du Canada fasse le nécessaire pour que ces organismes puissent moderniser leurs installations technologiques afin de faire obstacle à ceux qui font le trafic d’êtres humains et de garantir la sûreté et la sécurité du Canada et des Canadiens.

Le Comité recommande :

46. que le gouvernement du Canada augmente les ressources de Citoyenneté et Immigration Canada, du Service canadien du renseignement de sécurité et de la GRC pour qu’ils puissent faire obstacle à ceux qui font le trafic d’êtres humains et garantir la sûreté et la sécurité du Canada et des Canadiens.