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INST Rapport du Comité

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CHAPITRE 3 : LE SYSTÈME CANADIEN D'INNOVATION

Provenance et circulation des connaissances

            Le Comité s’en est jusqu’ici tenu à une définition simple de « système d’innovation » et en a fait mention au passage lorsqu’il a été question du contexte national et local — dans ce dernier cas, on parle plus formellement de grappe sectorielle par région géographique. Le souci de clarté exige cependant de la part du Comité un peu plus de précision et il est maintenant temps, en fait, d’étoffer un peu cette ébauche de définition.

Figure 3.1

Éléments économiques d’une grappe d’innovation
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            Le Comité ne s’écartera pas de la définition de l’expression « système d’innovation » donnée par les spécialistes qui ont comparu devant lui. Le système canadien d’innovation — expression utilisée à la fois pour décrire nos institutions de S. et T. et leurs différents liens — crée, diffuse et exploite les connaissances qui alimentent la productivité de l’économie, laquelle permet, à son tour, à la société de prospérer. Pour fonctionner efficacement et pour atteindre ces objectifs sociaux, ce système est tributaire des forces complémentaires de trois secteurs clés : le secteur privé, les universités et autres institutions sans but lucratif et les gouvernements. Chacun de ces secteurs a un rôle unique à jouer dans le système, mais celui du gouvernement fédéral est double puisqu’il s’est plus tard attribué une responsabilité d’exécutant et de facilitateur de la recherche. Il s’acquitte de ces rôles en faisant lui-même de la recherche grâce à ses capacités et installations intra-muros, de même qu’en finançant la recherche extra-muros et en favorisant l’établissement de partenariats entre les divers secteurs qui font de la recherche. À ce titre, les systèmes d’innovation ont une orientation essentiellement nationale parce que ce sont des institutions nationales qui les financent et leur fournissent l’équipement dont ils ont besoin, mais leur organisation et leur mise en œuvre sont en grande partie locales. Notre système national d’innovation comprend donc un certain nombre de grappes sectorielles géographiquement concentrées qui se consacrent à l’innovation. Ces grappes comportent plusieurs éléments économiques (voir la figure 3.1).

Figure 3.2
Système canadien d’innovation
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            On a remis au Comité une série de représentations schématiques détaillées du système canadien d’innovation et de ses différents éléments constituants et liens. Bien que ce projet personnel de M. Thomas Brzustowski a été décrit comme étant encore « à l’état d’ébauche », il est déjà suffisamment étoffé et précis pour illustrer les aspects importants du système canadien d’innovation pour les besoins du Comité. Grâce aux modifications que le Comité y a apportées, le non-initié devrait également trouver utiles et passablement explicites les trois figures suivantes.

            Dans la figure 3.2, qui est une version légèrement modifiée par rapport à celle présentée au Comité, le système canadien d’innovation est situé dans un contexte caractérisé par la présence de cinq flux de connaissances. Ces sources intègrent les connaissances différemment et apportent des contributions distinctes à la société canadienne et au monde. La taille des flèches est censée être représentative de l’ampleur relative des flux provenant des différentes sources de connaissances en 2001, même si les pourcentages ne sont pas exacts (et fournissent plutôt une indication de l’importance relative des entrées et des sorties liées à chaque source, lorsque cette information existe). Les cinq flux de connaissances sont : 1) les connaissances consignées, 2) les connaissances tacites des migrants, 3) les connaissances tacites inhérentes à l’investissement étranger direct (surtout par les entreprises multinationales), 4) les innovations et 5) les produits de base. Les deux derniers flux de connaissances se trouvent dans les produits et services qui, de façon générale, se distinguent par leur accessibilité relative auprès de différentes sources et par les principaux mécanismes d’établissement des prix qu’ils font intervenir, à savoir celui qui consiste à décider des prix dans le cas des innovations, et celui qui consiste à suivre les cours mondiaux dans le cas des produits de base.

            Le premier flux de nouvelles connaissances, à savoir les connaissances consignées dans des ouvrages, des revues spécialisées, des manuels, etc., découle de la recherche effectuée par des résidents canadiens. Environ 4 % de ces connaissances émanent de nos universités, des laboratoires gouvernementaux et de l’industrie canadienne, c’est donc dire que la part du lion, c’est-à-dire environ 96 % des nouvelles connaissances, est le résultat de travaux de recherche originaux menés ailleurs dans le monde. Dans ce contexte, la recherche s’entend de tout travail de recherche original et exclut par conséquent les connaissances acquises par un étudiant dans le cadre de ses recherches en bibliothèque.

            Bien que l’on soutienne généralement que ces connaissances sont un bien public au sens original du terme — leur utilisation ne donne lieu à aucune rivalité, de sorte que le fait que quelqu’un s’en serve n’empêche pas quelqu’un d’autre de s’en servir aussi — il doit y avoir un bassin préexistant de connaissances pour qu’un nouvel ajout soit de quelque utilité.

Ce qu’il y a d’intéressant au sujet des connaissances, évidemment, c’est que s’il y a une source de nouvelles connaissances, le fait de s’en servir n’empêche pas les autres d’en faire autant. […] Mais pour tirer profit de ces connaissances, il faut les comprendre. Autrement, elles ne servent à rien. Elles ne sont pas accessibles. [Thomas Brzustowski; 4, 9:15]

            La compréhension de base des nouvelles connaissances n’est qu’un élément de la valeur qu’on leur prête. Il faut en outre une solide infrastructure d’innovation pour pouvoir les mettre à l’œuvre :

 

[…] Le savoir est une ressource planétaire. Évidemment, il est très important de s’assurer que nous avons une infrastructure d’innovation solide au Canada, mais il importe également de se pencher sur la capacité des entreprises canadiennes d’avoir accès au savoir, aux compétences et aux technologies de toutes les régions du monde. [Jayson Myers; 13, 9:35]

            Il y a aussi deux sources de connaissances tacites : celle inhérente aux investissements directs des entreprises multinationales en provenance et à destination de l’étranger, et celle incarnée par les gens. Dans le cas de la première source, les connaissances sont intégrées aux machines et à l’équipement, aux plans d’aménagement de l’entreprise et à la structure organisationnelle d’une entreprise multinationale ou d’une société canadienne qui octroie des permis, des franchises ou des sous-contrats à des sociétés étrangères ou qui conclut des ventes ou des alliances avec elles. Le Canada a toujours été un importateur net d’investissements étrangers directs (IED), mais depuis 1997, il est devenu un exportateur net d’investissement direct (si l’on en juge par les flux et non par les stocks). Voici en quels termes un spécialiste a décrit cette deuxième source de connaissances tacites :

Il y a aussi des flux de […] connaissances «tacites», c’est-à-dire les connaissances que les gens ont entre les mains et dans la tête, et qu’ils apportent avec eux, que ce soit quand ils immigrent au Canada ou quand ils émigrent à l’extérieur du pays. [Thomas Brzustowski; 4, 9:10]

            Il est largement admis que le Canada reçoit des flots nets de migrants depuis bien avant la Confédération, mais ce qui n’est pas toujours reconnu, c’est que les connaissances qu’apportent avec eux ces immigrants-émigrants ont toujours avantagé le Canada. Comme en font foi les années de scolarité et les diplômes des immigrants-émigrants, il entre chaque année au Canada plus de savoir qu’il n’en sort. Le soi-disant « exode des cerveaux » est décidément moins marqué que l’« apport de cerveaux », bien qu’il faille se montrer prudent au moment d’interpréter les données officielles puisque les systèmes d’éducation et la qualité des diplômes décernés ne sont pas équivalents partout dans le monde. De plus, selon les organismes d’accréditation professionnelle, ce ne sont pas tous les immigrants très scolarisés qui réussissent à décrocher un emploi au Canada dans leur domaine de spécialisation, d’où l’apparition d’un nouveau phénomène appelé le « gaspillage des cerveaux ».

Il y a un autre flux de personnes hautement qualifiées […]. Il s’agit des gens qui arrivent ici et qui ne sont pas autorisés, à cause de restrictions diverses, à exercer leur profession dans notre pays. Il y a peut-être un exode des cerveaux, mais aussi un gaspillage de cerveaux. Il est là. [Thomas Brzustowski; 4, 9:15]

            Enfin, les produits et services intègrent des connaissances. Ils peuvent se diviser en produits de base et en innovations. Les produits de base sont définis comme les produits et services qui sont largement accessibles auprès d’un grand nombre de sources selon des modalités semblables (c.-à-d. fonctionnalité et qualité passablement équivalentes). Par conséquent, leurs producteurs sont des vendeurs au prix du marché sur les marchés concurrentiels (et parfois des quasi-vendeurs au prix du marché dans les marchés réglementés que sont ceux du téléphone, de la câblodistribution, du transport ferroviaire, du transport aérien, des banques, des assurances, des produits et services de location, etc.). Les innovations sont définies comme des produits et services qui ne sont pas des produits de base. Elles sont accessibles auprès d’un nombre limité de sources, souvent selon des modalités différentes. Par exemple, les services de vidéoconférence sont une innovation récente, mais les magnétoscopes, qui étaient considérés comme des innovations dans les années 1980, n’en sont plus. Un nouveau vêtement mode est une innovation même si, paradoxalement, il peut être en partie une imitation d’un vêtement porté par une génération antérieure. Un annuaire téléphonique, bien que la plupart des gens le considèrent habituellement comme un produit de base dans la mesure où son contenu se périme après un certain temps (à l’exception des parties mises à jour), lorsqu’il devient accessible pour la première fois sur Internet est aussi une innovation. Le temps porte donc ombrage à la nouveauté de la plupart des innovations et les transforme en produits de base, et il en va de même de la nouveauté des connaissances qui y sont intégrées.

Le triangle de recherche gouvernement-université-industrie

            Passant du général au particulier, la figure 3.3 décrit l’entrelacement des importants flux qui forment le triangle de recherche gouvernement-université-industrie (les flux sont représentés par des flèches dont les couleurs correspondent à celles utilisées dans les figures 3.2 et 3.4. Dans ce cas-ci, le bleu représente les connaissances consignées et le mauve, les investissements). Si l’on se penche d’abord sur la recherche gouvernementale, on constate qu’une partie de cette activité est menée à contrat pour trouver des solutions à des problèmes précis définis par la société commanditaire. La recherche universitaire participe aussi à cette activité, parfois grâce à une subvention gouvernementale. Il y a aussi un flux de découvertes et d’inventions émanant des laboratoires de recherche gouvernementaux et universitaires, qui profitent à l’industrie, avec les possibilités éventuelles ou réelles d’acquisition de propriété intellectuelle qu’elles offrent. L’aide à la R. et D. prend souvent la forme de connaissances et de soutien financier, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (p. ex. le PARI — Programme d’aide à la recherche industrielle).

 

Figure 3.3
Le triangle de recherché gouvernement-université-industrie
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            La recherche universitaire est parfois soutenue par l’industrie « en argent » et « en nature », ce qui comprend souvent le savoir-faire privatif détenu par l’industrie. La recherche gouvernementale est aussi utile à des fins de normalisation et d’homologation, souvent pour régler des questions touchant, par exemple, l’approbation des médicaments, la sécurité automobile, les codes du bâtiment, l’étiquetage « écologique », etc. Enfin, il y a aussi un échange actif de connaissances entre les chercheurs gouvernementaux et les chercheurs universitaires, dont les objectifs et les installations sont souvent complémentaires.

Le système canadien d’innovation dans le domaine des sciences naturelles et du génie

            Bien que très complexe, le triangle de recherche gouvernement-université-industrie ne rend pas totalement compte du système canadien d’innovation; beaucoup d’autres éléments interviennent et considérablement plus de détails sont nécessaires pour pleinement mesurer la complexité et le raffinement des institutions engagées dans l’innovation et de leurs rapports. En fait, le système canadien d’innovation compte de nombreux participants dynamiques qui interviennent dans l’innovation de diverses façons. Par exemple, au niveau fédéral, il y a les conseils et les laboratoires de recherche, les conseils subventionnaires, les centres d’excellence et les nombreuses directions ministérielles responsables des politiques et des programmes. Les gouvernements provinciaux, les universités, les services de recherche en milieu hospitalier et les autres instituts de recherche subventionnés par l’État sont eux aussi des éléments importants du système. Bon nombre de grandes entreprises font aussi de la R. et D., en particulier dans les secteurs des télécommunications, des produits pharmaceutiques, de l’aérospatiale, de l’énergie, des minéraux et des produits forestiers. Comme l’a indiqué le secrétaire d’État du Canada pour les sciences et la technologie :

Nous disposons d’excellentes universités, et les conseils subventionnaires fédéraux sont à l’œuvre pour soutenir nos jeunes chercheurs à travers le pays. La Fondation canadienne pour l’innovation leur donne actuellement accès à des équipements de pointe très intéressants. […] Par le biais de programmes tels que celui des Réseaux de Centres d’excellence, les conseils se sont aussi distingués en favorisant l’établissement de partenariats durables et productifs entre les milieux universitaires et le secteur privé. [L’honorable Gilbert Normand; 9, 9:10-9:15]

            À la figure 3.4, le Comité essaie de mieux rendre compte de ce système pour ce qui touche les disciplines scientifiques et le génie (le choix des couleurs pour les flèches demeure le même que dans les figures 3.2 et 3.3; les intervenants et les organisations du système sont représentés par des ovales, tandis que les activités d’innovation précises sont représentées par des rectangles); il y a évidemment d’autres institutions et liens d’innovation à l’extérieur de ces disciplines. De même, il convient de rappeler que le système illustré ici n’est pas exhaustif; certains exécutants de R. et D., liens et rapports, même à l’intérieur des deux disciplines susmentionnées, demeurent flous ou ne sont pas complètement pris en compte.

Figure 3.4
Recherche universitaire dans les domaines des sciences et du génie
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            Bien que largement financées par les provinces et, en deuxième lieu, par les étudiants eux-mêmes, les universités disposent de laboratoires de recherche et financent directement et indirectement la recherche fondamentale et thématique. Les contributions du gouvernement fédéral faites par l’intermédiaire de la Fondation canadienne pour l’innovation pour financer l’infrastructure et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG) pour soutenir financièrement les étudiants et les équipes de recherche qui font de la recherche fondamentale et thématique ou de la recherche appliquée, jouent également un rôle clé. Le Comité se reporte à cet égard à la distinction faite par un témoin entre ces deux types d’activités de recherche :

La recherche fondamentale permet de faire des découvertes sur la nature […] et sur notre place dans la nature. La recherche thématique, articulée autour de projets, vise quant à elle à résoudre des problèmes, qui sont soumis très souvent par l’industrie, mais parfois aussi par les gouvernements, et qu’il est impossible de solutionner avec les connaissances que nous avons déjà. Il faut donc créer des connaissances pour résoudre ces problèmes. C’est très différent de la recherche fondamentale. [Thomas Brzustowski; 4, 9:25]

Les motivations à l’origine de ces activités diffèrent parfois aussi :

Une grande partie de la recherche se pratique en dehors de tout objectif commercial. De fait, je dirais même que la recherche fondamentale se fait sans aucun objectif commercial. Les travaux de recherche dans tous les secteurs de l’environnement appartiennent à cette catégorie, la recherche portant sur les risques naturels qui permet de gérer ces risques pour la population, des secteurs entiers de la recherche n’ont absolument aucun objectif commercial. [Thomas Brzustowski; 4, 10:05]

L’essentiel des connaissances consignées découlent de la recherche fondamentale, bien que la recherche thématique en soit elle aussi une source :

Les connaissances consignées, la contribution aux 4 % venant du Canada, découlent dans une large mesure de la recherche fondamentale, mais pas uniquement. Certaines viennent aussi de la recherche thématique. Certaines retournent aux entreprises qui ont commandité cette recherche, puisqu’elles leur permettent de résoudre leurs problèmes. Il peut s’agir de rapports, de brevets ou de logiciels, mais il y a aussi, d’un autre côté […], des découvertes ou des inventions qui présentent le potentiel nécessaire pour devenir des innovations, pour être commercialisées comme nouveaux produits sur le marché. La proportion n’est pas grande. Ces produits passent par les premières étapes de la commercialisation dans les universités, après quoi ils peuvent être fabriqués sous licence par une entreprise établie ou servir de point de départ au démarrage d’une nouvelle entreprise. C’est ensuite que viennent les flux d’innovations. [Thomas Brzustowski; 4, 9:30]

            Parfois, les entreprises qui font ou achètent de la R. et D. partagent aussi les coûts directs d’un projet de recherche précis mené dans des laboratoires universitaires; dans ce cas, elles soumettent les problèmes et l’équipe de recherche propose les solutions, les deux étant classés comme des connaissances. Ces connaissances consignées (une fois qu’elles sont reconnues et démontrées) peuvent mener à la création d’un produit ou d’un service visé par des droits de propriété intellectuelle et à l’amorce du processus de commercialisation, qui est en grande partie financé par l’entreprise privée. Parallèlement, de la même façon qu’il importe de connaître la place d’une entreprise dans le système canadien d’innovation, il est aussi essentiel de comprendre ses mécanismes d’innovation.

Nous avons constaté que l’innovation dépend à la fois de connaissances produites à l’interne et de connaissances acquises à l’extérieur. Les processus d’innovation sont alimentés par des sources multiples, certaines internes et d’autres externes. Les idées de produits et de procédés nouveaux et améliorés naissent de transactions commerciales avec des clients et fournisseurs, avec des entreprises connexes ou indépendantes, et avec d’autres sources externes. Les idées concernant de nouvelles possibilités commerciales sont saisies – et adaptées à l’avantage de l’entreprise – par ses cadres dirigeants, son service de recherche et sa division de mise en marché et de génie. Vous voyez que l’innovation dépend de plusieurs intervenants. [John Baldwin; 13, 9:15]

            Ces mécanismes d’innovation ne sont toutefois pas les mêmes d’une entreprise à l’autre. On a recensé trois catégories ou types de systèmes d’innovation utilisés par l’industrie :

Il existe effectivement trois grappes de types d’entreprises qui combinent des liens externes avec des capacités internes. Les deux premiers groupes dépendent de la R. et D. L’un d’entre eux développe des réseaux avec des partenaires commerciaux, quant à l’autre, il dépend plus fortement de ses ressources internes et développe la capacité d’intégrer des sources de connaissances extérieures en combinant les capacités internes de R. et D. aux retombées des connaissances extérieures provenant d’instituts de recherche. Toutefois, il existe une troisième grappe qui vaut son pesant d’or pour le Canada, et c’est une solution de rechange au modèle classique de R. et D. Il s’agit du type d’entreprises qui mettent l’accent sur les capacités de génie et leur savoir-faire en matière de production à l’interne et combinent ces compétences aux retombées des connaissances des universités. En effet, il semble que les universités soient un maillon important de la chaîne d’innovation, tout particulièrement lorsque vient le temps de soutenir la recherche appliquée. En résumé, la production de savoir reliée à l’innovation fait beaucoup appel, mais pas exclusivement, à la R. et D. [John Baldwin; 13, 9:15]

            L’aboutissement de ces mécanismes réside habituellement dans les contributions des entreprises de R. et D. et des entreprises émergentes, qui sont précisément celles qui lancent sur le marché de nouvelles méthodes de production et de nouveaux produits ou services. Ces rapports entre les entreprises de R. et D. et les entreprises émergentes sont souvent délicats, puisqu’ils sont présentés comme une solution organisationnelle à certaines frictions internes au sein de l’entreprise, parfois entre la division de la production et celle responsable des ventes :

[L]a nouvelle entreprise amorce le processus de commercialisation […] et peut lancer sur le marché des innovations qui auront du succès. Mais il y a une nouvelle façon de faire les choses. […] Il arrive souvent qu’une entreprise, parfois c’est la même qui s’était associée à la recherche, achète la nouvelle entreprise et la technologie qu’elle a mise au point. […] pour contourner ses propres frictions internes. Il s’agit d’innovations destructrices plutôt que constructives. […] Vous pouvez essayer de vous mettre à la place d’une entreprise pour comprendre comment les choses se passent. Le vice-président aux ventes peut dire par exemple : « Nous ne pouvons pas développer ce produit. Mes vendeurs devraient alors aller voir les clients, à qui nous avons toujours affirmé que nous avions le meilleur produit au monde, et leur dire que ce produit arrive maintenant en deuxième place parce que nous en avons un autre, encore meilleur, qui s’en vient. Nous ne pouvons pas faire ça. Nous faisons déjà des profits avec notre produit. Nous avons investi de l’argent. C’est ce que les clients veulent, alors, pourquoi devrions-nous développer ce nouveau produit? ». Donc, l’entreprise confie le dossier à une entreprise dérivée. Mais une fois que le produit est prêt pour le marché, elle peut l’acheter et dire : « Nous venons d’élargir notre gamme de produits. » [Thomas Brzustowski; 4, 9:40]

Dans tous les cas, les innovations émanant de ces entreprises créent une nouvelle activité économique à valeur ajoutée. Ce ne sont toutefois pas toutes les innovations qui deviennent des produits de série ou qui ont du succès sur le marché. Les échecs sont nombreux.

[M]ais il y a des produits qui ne se rendent jamais sur le marché ou qui n’y connaissent aucun succès. De plus, il arrive très souvent que les entreprises n’essaient même pas de mettre en marché un produit dont elles ont la propriété intellectuelle. Peut-être parce que le produit en question n’est pas conforme à leur stratégie, qu’il coûterait trop cher à commercialiser ou qu’il est trop différent de leurs principales gammes de produits. C’est alors qu’elles créent une nouvelle entreprise. Cela ne se produit pas toujours au début du processus de commercialisation, mais parfois en cours de route. Il arrive aussi qu’un produit soit développé, puis mis de côté pour des raisons stratégiques : « Nous ne pouvons pas lancer ce produit parce qu’il ferait concurrence à notre principal produit, qui rapporte beaucoup. Tant que nos concurrents n’arriveront pas avec quelque chose de similaire, nous allons tous simplement garder ce produit en réserve. » [Thomas Brzustowski; 4, 9:40]

            Les innovations qui ont du succès créent une nouvelle activité économique à valeur rajoutée, qui procure à l’entreprise innovatrice un rendement sur son investissement et génère des taxes pour les gouvernements fédéral et provinciaux qui peuvent même avoir participé au départ à l’initiation de la R. et D. Un grand nombre d’emplois très spécialisés et très rémunérateurs sont créés en cours de route. Si les gouvernements font preuve de sagesse et de minutie à l’égard des activités de recherche qu’ils mènent ou aident à financer, qu’ils investissent de façon sélective et judicieuse dans l’« infrastructure d’innovation » de façon à réduire au minimum les obstacles systémiques, le système canadien d’innovation devrait fonctionner efficacement de façon que la recherche fondamentale et thématique procure de généreuses retombées. En conséquence, le Comité recommande :

3. Que le gouvernement du Canada adopte des politiques en matière de sciences et de technologie qui soient de nature à renforcer les éléments du système canadien d’innovation et à améliorer les liens entre eux.