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INST Rapport du Comité

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CHAPITRE 6: L'OPTIMISATION DES RESSOURCES DANS LES PROGRAMMES FÉDÉRAUX DE SOUTIEN DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

            Le gouvernement fédéral s’est donné un rôle double dans le secteur des sciences et de la technologie : il est à la fois exécutant et facilitateur de la recherche. Dans ce contexte, il effectue des travaux de recherche dans ses propres installations et, par ailleurs, il finance des travaux de recherche extra-muros et favorise l’établissement de partenariats entre les divers secteurs qui effectuent de la recherche, et ce, au moyen de plusieurs mécanismes. Le gouvernement s’est donné pour politique de financer la R. et D. privée parce qu’autrement il n’y aurait pas suffisamment d’investissements dans l’innovation du fait que les retombées d’une invention ne profitent pas exclusivement à l’inventeur ou à celui qui a exécuté la R. et D. En outre, il est fort utile qu’un organisme public se charge de diffuser de l’information et des conseils sur l’état courant des connaissances techniques et sur ce qui est du domaine du possible, information que même les grandes entreprises les mieux nanties trouveraient trop long et trop difficile de se procurer elles-mêmes. Ainsi, par ses programmes, le gouvernement rémunère les exécutants de R. et D., contribue à la diffusion des produits et technologies issus de ces travaux et finance les programmes en question en taxant ceux qui profitent des retombées non exclusives des inventions, ou de ces produits et technologies.

            Le Comité n’a rien contre cette politique. Au contraire, il est tout à fait d’accord pour que le gouvernement fédéral offre aide financière, expertise commerciale et conseils et assistance techniques à ceux qui effectuent de la R. et D. et à ceux qui en utilisent les résultats. Le Comité va donc se concentrer surtout sur la manière dont cette politique est traduite dans des programmes, et étudiera la conception de ceux-ci, pour en vérifier l’efficacité et les modalités de reddition de comptes. Il cherche par là à vérifier si les programmes en question constituent un bon investissement pour les contribuables. Le Comité se penchera spécifiquement sur les programmes de soutien de la R. et D. : le Programme d’aide à la recherche industrielle (PARI), le programme Partenariat technologique Canada (PTC) et le crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental.

Programme d’aide à la recherche industrielle (PARI)

            L’idée de base du PARI est simple : aider les PME à transformer les bonnes idées en produits et services commercialement viables. Avec des dépenses annuelles d’environ 135 millions de dollars, le PARI essaie de se faire le catalyseur de l’innovation technologique dans les PME, dans l’esprit de ce qu’il fait depuis déjà une cinquantaine d’années. Administré par le Conseil national de recherches du Canada, le programme se spécialise dans les technologies et la gestion de l’innovation, et son action comprend trois volets : 1) conseils techniques, 2) facilitation de réseaux et 3) financement partagé d’innovations. Les responsables du PARI décrivent en ces termes leurs activités :

Le PARI favorise l'innovation progressive et l'acquisition de connaissances tacites par les PME. Il favorise la capacité et la réalisation de quantité d'expérimentations et de transferts technologiques, qui ne seraient sinon pas possibles compte tenu des risques que cela représente pour les PME. Il favorise la transmission de l'information entre bien des types d'utilisateurs et de producteurs et il semble qu'on utilise beaucoup ces mécanismes. Il s'agit des réseaux que le PARI a permis de créer. Le PARI augmente le niveau de compétence technique des entreprises et leur aptitude à obtenir leurs propres résultats de R. et D., ainsi qu'à utiliser les résultats obtenus par d'autres […] [Margot Montgomery, Centre national de recherches du Canada; 20, 11:20]

            Le PARI compte 262 conseillers en technologie industrielle (CTI), tous des scientifiques et des ingénieurs, disséminés dans plus de 90 villes du Canada où ils servent plus de 12 000 PME annuellement. En 1999-2000, le PARI a offert pour 89 millions de dollars d’aide financière à 3 359 PME à l’égard de 4 343 projets d’innovation.

            Le PARI a fait l’objet d’examens approfondis ces dernières années du point de vue de l’efficacité et de l’efficience, avec en général de bons résultats. Le Comité n’a pas de raison de contester ces évaluations et cite d’ailleurs les résultats de la plus récente à la pièce 6.1. L’analyse institutionnelle ou structurelle de M. Lipsey reflète bien la façon dont le Comité envisage l’évaluation des programmes de R. et D.

Pièce 6.1
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            On dit souvent du PARI qu’il est l’exception à la règle voulant que les programmes publics soient le plus souvent « suradministrés », car il est dirigé un peu comme le serait une entreprise, ce qui semble faire l’affaire de ses clients. Ce succès a cependant des inconvénients, comme l’a signalé le vérificateur général. Le PARI ne recueille pas suffisamment d’information sur les projets financés et sur leurs résultats, ni sur les raisons pour lesquelles l’aide gouvernementale est nécessaire. En conséquence, le Comité recommande :

8. Que le gouvernement du Canada améliore la publication des résultats des projets soutenus par le Programme d’aide à la recherche industrielle sans pour autant changer la façon « commerciale » dont le programme est administré.

            Dans le contexte de la très faible productivité des PME canadiennes, de l’accroissement de la demande de produits et de services innovateurs et de la promesse du gouvernement de doubler le financement des activités de R. et D., la diffusion des technologies et des connaissances techniques revêt une importance croissante. En effet, comme le Comité estime que le PARI est un des programmes les plus efficaces de l’arsenal fédéral d’outils d’intervention dans le secteur des sciences et de la technologie, il recommande :

9. Que le gouvernement du Canada double immédiatement le financement affecté au Programme d’aide à la recherche industrielle afin d’en permettre l’expansion.

Partenariat technologique Canada (PTC)

            Établi en tant qu’organisme de service spécial, Partenariat technologique Canada est un fonds d’investissement (budget annuel de 350 millions de dollars) au moyen duquel le gouvernement fédéral offre aux entreprises des contributions remboursables pour financer de la recherche dans des domaines d’importance stratégique du point de vue économique. En s’associant à des entreprises de recherche et en modifiant la courbe de trésorerie des entreprises dans le temps (voir pièce 6.2), PTC encourage l’investissement privé pour veiller au maintien et à la croissance de la base technologique de l'industrie canadienne et de ses capacités à cet égard. Les porte-parole de PTC soulignent ce qui suit :

Il convient de préciser que tous les investissements que nous faisons sont remboursables et que les bénéfices sont partagés. Nous voulons obtenir un retour sur nos investissements. [Jeffrey Parker, Partenariat technologique Canada; 20, 11:05]

            PTC a recours à divers instruments financiers (redevances, remboursements fixes, bons de souscription, etc.) pour raccourcir la période de remboursement, réduire son exposition au risque et libérer le budget de R. et D. d’une entreprise de recherche partenaire. Sur le plan de son impact financier :

Les flux d'investissement permettent d'aider les entreprises à accéder plus rapidement au marché, ce qui favorise donc l'accélération du processus d'expansion et de développement de ses activités. Nous sommes remboursés en bout de course, quand le produit ou la technologie connaît un succès commercial. [Jeffrey Parker; 20, 11:05]

Pièce 6.2
Théorie financière de Partenariat technologique Canada
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            Selon les modalités courantes, la part de PTC des coûts admissibles d’un projet ne doit pas dépasser 33 %. Les projets doivent appartenir à un secteur d’activité admissible : aérospatiale et défense, technologies environnementales et habilitantes (procédés de fabrication et de transformation de pointe, matériaux de pointe, biotechnologies et certaines technologies de l’information). Une contrainte additionnelle est actuellement remise en question :

[U]n tiers des dépenses du PTC est ciblé sur les technologies habilitantes et environnementales et deux tiers sur l'aérospatiale et la défense. […] nous sommes en train d'examiner le mandat du PTC et […] nous allons décider, à partir de là, s'il est souhaitable ou approprié de maintenir la répartition des fonds à raison de deux tiers un tiers. Nous verrons aussi s'il convient ou non d'élargir le PTC à d'autres technologies ou secteurs […] [Jeffrey Parker; 11:05-11:10]

 

            Le programme PTC est encore jeune, mais il a néanmoins subi avec succès les vérifications du vérificateur général quant à la diligence avec laquelle on respecte les principes de l’optimisation des ressources dans le financement des projets. Le vérificateur ne signale que des problèmes mineurs à ce chapitre. Le Comité pense cependant qu’on pourrait accroître l’efficacité du programme sans frais pour le contribuable en faisant disparaître les contraintes à première vue assez arbitraires quant à la distribution du financement. Personne n’a pu fournir au Comité une explication satisfaisante quant à la raison d’être de cette distribution « un tiers, deux tiers ». Il serait bien plus logique de distribuer les investissements librement entre les secteurs et les technologies de pointe admissibles, ce qui permettrait d’optimiser le portefeuille d’investissements. En conséquence, le Comité recommande :

10. Que le gouvernement du Canada augmente sensiblement le montant des crédits octroyés au programme Partenariat technologique Canada pour en permettre l’expansion et élimine la règle voulant que le tiers des investissements du programme Partenariat technologique Canada soient destinés aux technologies environnementales et aux technologies habilitantes et les deux tiers au secteur de la défense et de l’aérospatiale.

Crédits d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental

            Le gouvernement fédéral administre le programme de crédits d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental par l’intermédiaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC). Ce programme offre aux particuliers, aux personnes morales et aux sociétés de personnes une déduction fiscale pouvant représenter jusqu’à 100 % dépenses courantes admissibles en recherche scientifique et développement expérimental et des dépenses en capital admissibles. Les entreprises admissibles peuvent se prévaloir de la déduction à l’égard de l’impôt qu’elles ont à payer, et les particuliers et les PME peuvent avoir droit à un remboursement en espèces.

Toutes les dépenses de R. et D. sont déductibles dans l’année et nous offrons aux grandes sociétés un crédit d’impôt de 20 %. Pour chaque tranche de dépenses de R. et D. de 100 elles bénéficient d’une réduction d’impôt de 20 $. Les petites entreprises reçoivent un crédit de 35 % calculé sur la première tranche de 2 millions de dollars de dépenses de R. et D. Ce montant est en fait remboursable.
[Paul Berg-Dick, Finances Canada; 20, 11:00]

            Ce programme est depuis longtemps considéré comme l’un des plus généreux de cette catégorie dans le monde entier (voir la figure 6.1). Par conséquent, chaque année, 11 000 entreprises, en majorité des PME, réclament pour 1,4 milliard de dollars de crédits d’impôts dans le cadre de ce programme, crédits qui d’ailleurs s’ajoutent à des programmes provinciaux de crédits d’impôt. Le ministère des Finances a conclu que le programme avait un impact très favorable ; on constate en effet que chaque investissement d’un dollar du gouvernement fédéral suscite en contrepartie un investissement de 1,38 $ en R. et D. de la part des entreprises.

            Le programme suscite quand même certaines critiques : les entreprises, et surtout les PME, se plaignent principalement du temps excessif qu’il faut pour déterminer l’admissibilité des projets, défaut qu’a d’ailleurs souligné le vérificateur général :

En 2000, nous avons rapporté les résultats de notre vérification de l’administration,                  Figure 6.1
par le gouvernement, du programmech18fig3-f.gif (27963 bytes) d’encouragements fiscaux pour la recherche
scientifique et le développement  expérimental. Nous avons cherché à établir si la direction […] avait établi des lignes directrices claires pour aider les demandeurs et le personnel, s’il existait des procédures pour gérer le risque que présentent les demandes non admissibles et si les demandes étaient traitées de façon efficiente et efficace et si les contribuables sont traités uniformément. Nous avons constaté que les choses laissaient à désirer sur tous ces plans […]
[Richard Flageole, vérificateur général du Canada; 20, 10:55]

            On a dit au Comité que le problème était si grave que certaines PME, excédées, avaient simplement renoncé à présenter une demande. S’il est impossible de quantifier la perte de R. et D. qui en résulte pour le Canada, un témoin en particulier a mentionné des chiffres étonnants :

Nous avons étudié le nombre de clients du PARI qui bénéficient de crédits d’impôt et les chiffres sont déplorables. La proportion tourne autour de 48 ou 50 % […] Nous travaillons avec une équipe de l’ADRC pour essayer de rapprocher les processus utilisés pour le PARI et pour le crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental de telle manière que les PME dont la demande de financement aux termes du PARI est agréée soient automatiquement conformes aux exigences du crédit pour la recherche scientifique et le développement expérimental. [Margot Montgomery; 20, 12:00]

            Le Comité estime que le crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental est un stimulant suffisant et qu’il constitue en fait une contribution généreuse à la R. et D. privée. Il n’y a rien à changer au chapitre de l’aide elle-même. Cependant, bien que l’ADRC travaille dur pour corriger les problèmes administratifs et que nous soyons conscients du fait que le régime fiscal du Canada est très complexe au niveau des définitions de la R. et D., nous estimons que le rapprochement des conditions d’admissibilité du PARI et du crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental constituerait une solution raisonnable à certains aspects des problèmes administratifs. En conséquence, le Comité recommande :

11. Que le gouvernement du Canada fasse accélérer les travaux du Conseil national de recherches du Canada et de l’Agence des douanes et du revenu du Canada en vue d’harmoniser les critères d’admissibilité des dépenses de R. et D. qu’ils emploient et qu’il modifie les règlements fiscaux pertinents de manière que les dépenses admissibles de recherche et de développement aux termes du Programme d’aide à la recherche industrielle soient automatiquement admissibles aux termes du programme de crédits d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental.