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HEAL Rapport du Comité

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Opinion dissidente de l’Alliance canadienne

présenté par Rob Merrifield, porte-parole principal pour la santé
Carol Skelton, porte-parole pour la santé

Betty Hinton, porte-parole pour la santé

INTRODUCTION

L’épidémie de VIH/sida continue d’avoir des effets dévastateurs sur la santé et la vie de milliers de Canadiens. La situation est d’autant plus troublante que le VIH/sida est parfaitement évitable. Dans notre rapport minoritaire, nous insistons sur la nécessité de doter la Stratégie canadienne sur le VIH/sida (SCVS) d’un important volet de prévention. L’Alliance canadienne estime que les gouvernements, les autorités sanitaires et les organisations locales doivent faire un effort plus ciblé, concerté et soutenu pour prévenir la transmission du VIH. Nous sommes convaincus que cette orientation rapportera gros en amélioration de la santé humaine, en vies épargnées et en réduction des dépenses de santé.

FINANCEMENT

L’Alliance canadienne est d’accord pour qu’on augmente les crédits consacrés à la Stratégie canadienne sur le VIH/sida compte tenu de la gravité persistante de l’épidémie, du nombre croissant de Canadiens qui vivent avec le VIH/sida et du fait que le financement annuel de la SCVS est inchangé depuis plusieurs années.

Cependant, là où le Comité recommande de porter le budget de la Stratégie à 100 millions de dollars par an, nous estimons que 85 millions de dollars par an suffiraient, pour les raisons suivantes.

D’abord, plusieurs témoins concernés ont spécifiquement réclamé que l’on double le financement annuel de la Stratégie pour le porter de 42,2 millions à 85 millions de dollars par an. Une augmentation supérieure ne serait sûrement pas mal accueillie, mais le gouvernement fédéral doit prendre en considération les besoins financiers associés aux autres priorités du secteur de la santé et des autres secteurs.

Ensuite, certains des segments de population vulnérables pour lesquels le Comité recommande un financement spécifique (par exemple 5 millions de dollars pour les Premières Nations et les Inuits et 5 millions de dollars pour les détenus) représentent des priorités de dépenses déjà comprises dans la Stratégie. Ainsi, selon les priorités de dépenses déjà établies, le fait de porter le budget de la SCVS à 85 millions de dollars doublerait les fonds destinés à ces groupes (5,2 millions de dollars pour les Premières Nations et les Inuits).

Enfin, il faut admettre que le succès de la lutte contre le VIH/sida n’est pas seulement affaire de sous. Les États-Unis, qui dépensent pourtant bien plus que le Canada au titre du VIH/sida (12 $ par habitant contre 1,40 $ par habitant) affichent néanmoins un taux de prévalence du VIH 94 % plus élevé que celui que l’on observe au Canada. Par contre, l’Australie dépense moins que le Canada (1,25 $ par habitant) et enregistre pourtant un taux de prévalence inférieur de 60 % à celui du Canada. D’après le Conseil ministériel sur le VIH/sida, «  [i]l est évident que les dépenses ne définissent pas à elles seules la réussite d’un pays sur le plan de la prévention de la propagation du VIH/sida 1  ». Ces constatations montrent que, au-delà des questions d’argent, il faut se doter de stratégies de prévention hâtives, efficaces et contrôlées de près.

Recommandation :

Que le financement de la Stratégie canadienne sur le VIH/sida soit porté à 85 millions de dollars par an.

PRÉVENTION

L’Alliance canadienne estime que la Stratégie canadienne renouvelée sur le VIH/sida doit être axée sur un important volet de prévention. De nombreux observateurs ont fait remarquer que le VIH/sida est une maladie mortelle à 100 % mais aussi évitable à 100 %. 

La Stratégie canadienne sur le VIH/sida présente une grave lacune dans la mesure où elle ne comporte pas de plan clair et coordonné de prévention du VIH. En conséquence, nous recommandons l’élaboration d’un plan stratégique de prévention du VIH similaire à celui qui a été adopté par les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis en janvier 20012. Ce plan doit être associé à des objectifs clairs et mesurables et faire l’objet de mesures régulières de contrôle et de mise à jour pour en assurer l’efficacité.

Nous souscrivons à la recommandation du Comité d’établir, dans le cadre de la SCVS, des objectifs quinquennaux mesurables de réduction du nombre annuel d’infections au VIH. Nous notons que le Conseil consultatif national sur le VHI/sida a conclu à l’existence de lacunes dans la Stratégie à ce chapitre : «  La Stratégie est associée à une vision ainsi qu’à des buts et à des orientations stratégiques; de plus, elle englobe un large éventail d’activités. Toutefois, elle ne dispose pas d’objectifs clairs, précis et quantifiables3.  »

L’Alliance canadienne estime que la recommandation du Comité doit aller plus loin. Nous recommandons de ramener de 4 000 à 2 000 d’ici cinq ans le nombre annuel des nouveaux cas d’infection au VIH déclarés. (Le plan stratégique des CDC prévoit un objectif similaire.) Une telle réduction permettrait d’épargner 10 000 vies et d’éviter au système de santé des centaines de millions de dollars de dépenses.

Les programmes financés par la voie du plan stratégique de prévention du VIH devraient en comporter certains qui prônent le modèle de prévention en trois volets qui s’est avéré très efficace en Afrique et est adopté ailleurs : abstinence pour les adolescents non mariés; fidélité pour les couples; et usage du condom par les personnes qui s’adonnent à des comportements très risqués. Cette formule diffuse un message clair et uniforme, et cible des groupes précis.

Recommandations :

Que la Stratégie canadienne sur le VIH/sida comporte un plan stratégique quinquennal de prévention du VIH/sida. Ce plan doit comprendre des objectifs clairs et mesurables, de même qu’un processus de reddition de comptes et un programme d’évaluations régulières.

Que le plan stratégique de prévention du VIH ait pour objectif de ramener de 4 000 à 2 000 d’ici cinq ans le nombre annuel de nouveaux cas d’infection au VIH signalés.

Que le plan stratégique de prévention du VIH alloue des fonds à des programmes prônant le modèle Abstinence, Fidélité, Condom (en cas de nécessité).

Le Service correctionnel du Canada et la réduction des préjudices

L’Alliance canadienne est contre la recommandation 4d) du Comité qui appelle le Service correctionnel du Canada (SCC) à offrir des stratégies de réduction des préjudices pour la prévention du VIH/sida parmi les utilisateurs de drogues injectables dans les établissements correctionnels. Ces stratégies aboutiraient à l’institution, dans nos prisons fédérales, de programmes d’échange de seringues incompatibles avec la politique officielle actuelle de tolérance zéro du SCC à l’égard des drogues illégales. Ce serait aussi une admission d’échec devant la montée inquiétante de la consommation de drogues parmi les détenus.

Des programmes d’échange de seringues contribueraient à augmenter la consommation de drogues parmi les détenus, ce qui ferait grimper les taux de VIH/sida, d’hépatite et d’autres infections. En outre, l’augmentation du nombre des seringues dans les prisons exposerait les gardiens de prison à un plus grand risque de blessure ou d’intimidation. Nous estimons que le Service correctionnel du Canada doit maintenir sa politique de tolérance zéro à l’égard des drogues illégales.

Recommandation :

Que le Service correctionnel du Canada continue d’appliquer une politique de tolérance zéro à l’égard des drogues illégales. Les prisons fédérales ne doivent pas se doter de mesures de réduction des préjudices, comme des programmes d’échange de seringues, pour prévenir la transmission du VIH/sida parmi les détenus.


1Voir Faire le point : évaluation de la pertinence de l’investissement du gouvernement du Canada dans la Stratégie canadienne sur le VIH/sida, Conseil ministériel sur le VIH/sida (2001), p. 25.
2HIV Prevention Strategic Plan Through 2005, Centers for Disease Control and Prevention, janvier 2001.
3Voir Faire le point, p. 36.