Les témoins ont exprimé au
Comité leurs points de vue sur le principal mécanisme assorti d’aide fiscale
par lequel de nombreux Canadiens épargnent volontairement en vue de leur
retraite — REER — ainsi que sur les nouveaux mécanismes qui pourraient être mis
en place pour encourager l’épargne-retraite volontaire. Quand les mesures sont
volontaires, les Canadiens prennent souvent eux-mêmes les décisions de
placement, et les décisions sont habituellement meilleures lorsque la littératie
financière est élevée. Les témoins se sont également exprimés sur ce sujet.
Graphique 3 : Cotisations totales et nombre de participants aux régimes
enregistrés d’épargne-retraite, par catégorie de revenu, pour l’année
d’imposition 2008 (%)
Source : Agence du revenu du Canada, Statistiques
sur le revenu 2010 — Année d’imposition 2008, http://www.cra-arc.gc.ca/gncy/stts/gb08/sfp/ntrm/pdf/table2-fra.pdf.
Mme Tina Di Vito,
de BMO Groupe financier, a déclaré au Comité qu’en 2005, les Canadiens
épargnaient 1,2 % de leur revenu personnel et que ce taux était monté à
4,8 % en 2008. Elle a cependant ajouté que les Canadiens vivent plus
longtemps et sont en meilleure santé, ce qui les oblige à épargner davantage
pour maintenir ce qu’elle décrit comme une longue vie active à la retraite. Mme Di
Vito a également indiqué qu’environ 38 % des Canadiens participent à un
régime de retraite professionnel, parfois dans un régime à cotisations
déterminées qui impose un fardeau relativement plus lourd aux épargnants,
puisqu’il faut s’assurer que le montant épargné est suffisant et qu’il faut
gérer les placements; que les coûts des soins aux parents augmentent
rapidement, ce qui oblige à épargner davantage pour répondre à ses propres
besoins et à ceux de ses parents; les ménages dirigés par des baby-boomers sont
plus endettés que les générations précédentes, leur ratio d’endettement
atteignant un record d’environ 145 %; et que les attentes des retraités au
sujet de leur niveau de vie seront probablement plus élevées que celles des
générations précédentes, ce qui oblige aussi à épargner davantage pour la
retraite.
Mme Di Vito
appuyait également une majoration du plafond des cotisations aux REER et se
demandait si le plafond annuel actuel est raisonnable dans les circonstances.
Elle a fait observer que, lorsque les placements dans les REER ont un rendement
inférieur à ce qui est prévu, il est impossible de cotiser davantage pour financer
la retraite au niveau souhaité. À son avis, le plafond actuel favorise aussi
les ménages, car un couple de travailleurs où les deux conjoints gagnent
75 000 $ chacun, soit un revenu total de 150 000 $, peut
cotiser 27 000 $ dans ses REER, et un célibataire qui gagne
150 000 $ ne peut cotiser que 22 000 $. Elle a préconisé un
plafond de cotisation semblable à celui des régimes de retraite à prestations
déterminées.
M. Ian Lee, de
l’Université Carleton, qui a témoigné à titre personnel, considérait problématiques
les plafonds annuels de cotisation à l’épargne-retraite, et il a recommandé de
niveler les règles du jeu dans les pensions en établissant des règles communes
sur les pensions et en remplaçant le plafond de cotisation annuel par un
plafond cumulatif, comme 1 million de dollars. De même, souhaitant appuyer
l’équité, M. Scott Perkin, de l’Association canadienne des administrateurs
de régimes de retraite, et M. Leslie Herr, de l’Empire Vie, ont
demandé l’adoption d’un plafond de cotisation à vie afin d’assurer une plus
grande parité entre ceux qui épargnent exclusivement dans les REER et les
participants à des régimes de retraite professionnels. M. Terry Campbell,
de l’Association des banquiers canadiens, a fait remarquer que, bien qu’il soit
possible de reporter les droits à cotisation aux REER inutilisés, ces droits
sont liés au revenu d’emploi; quand on est jeune, la possibilité de cotiser est
moins grande. De l’avis de Mme Di Vito, la possibilité de
reporter les droits à cotisation inutilisés équivaut à un plafond de cotisation
à vie.
Le plafond de cotisation
annuel aux REER se fonde sur le revenu gagné. M. Dean Connor, de
l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes, recommandait
d’élargir la définition de « revenu gagné » afin d’inclure des
sources de revenu comme les redevances et les bénéfices d’une entreprise
active. Selon lui, cet élargissement profiterait aux travailleurs autonomes.
Graphique 4 : Salariés ayant des
droits de cotisation inutilisés à un régime
enregistré d’épargne-retraite (%) et droits de cotisation inutilisés moyens au titre
des régimes enregistrés d’épargne-retraite, par palier de revenu, 2006
Source : Mémoire du ministère des
Finances au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce,
31 mars 2010.
M. Lee a évoqué le
compromis entre l’épargne-retraite et d’autres achats, et plus particulièrement
l’achat d’une maison. À son avis, le plus important actif de nombreux
Canadiens, c’est leur maison, plutôt que l’épargne-retraite. Mais selon Mme Di Vito,
les Canadiens hésitent à quitter leur maison quand ils sont vieux. En
outre, l’avoir propre réalisé en réduisant la taille du domicile est souvent
moins élevé que prévu.
Quelques témoins qui se sont
exprimés sur les REER ont également parlé des fonds enregistrés de revenu de
retraite (FERR), étant donné que les cotisations aux REER doivent cesser à
71 ans, et que les cotisations et les revenus accumulés doivent servir à
acheter des rentes viagères ou être converties en FERR. Ainsi, tout en
reconnaissant que les Canadiens vivent et épargnent plus longtemps et en
appuyant, implicitement, la fin de la pratique selon laquelle les cotisations
aux REER doivent cesser à 71 ans, Mme Di Vito préconisait
également une souplesse accrue, qui permettrait aux Canadiens de choisir quand
ils veulent commencer à effectuer des retraits dans leurs REER.
D’après Mme Di
Vito, il faudrait aussi assouplir les taux des retraits minimaux obligatoires
dans les FERR. Ainsi, elle a soutenu que les taux de retrait imposés
actuellement peuvent vider les FERR trop rapidement et elle a recommandé une
réduction du taux de retrait des fonds, ce qui prolongera la durée de vie d’un
FERR. Elle a indiqué que des taux de retrait de 4 % ou 5 % pourraient
être plus appropriés.
M. Campbell,
M. Herr et M. Connor appuyaient un relèvement de l’âge de la
conversion et ils ont mentionné une hausse de 71 à 73 ans, afin de
permettre à ceux qui travaillent encore de continuer à épargner .
Les témoins se sont
également exprimés sur diverses autres questions relatives au REER. Par
exemple, Mme Di Vito a indiqué que les cotisations aux REER
devraient être imposées à titre de revenu d’emploi reporté, mais que le revenu
tiré des placements dans les REER devait être imposé à un taux équivalent au
taux d’imposition qui aurait été appliqué si les placements avaient été détenus
hors d’un régime d’épargne-retraite. Par exemple, le revenu de placement serait
imposé en tant que dividendes et de gains en capital, avec traitement fiscal
préférentiel, plutôt que comme revenu d’intérêt. À son avis, la perte du statut
fiscal privilégié dans le cas des revenus sous forme de dividendes et de gains
en capital dans un REER influe sur le comportement d’investissement et peut
inciter les gens à détenir des titres à intérêt, même lorsque les taux
d’intérêt sont relativement bas.
Mme Di Vito
a indiqué également que les soldes dans les REER ou les FERR au décès des
cotisants devraient pouvoir être transférés, en franchise d’impôt, à un REER ou
un FERR d’un enfant. À son avis, ce transfert s’ajouterait à tous les droits
inutilisés de cotisation à un REER. Elle recommandait également un examen de la
modification de la Loi de l’impôt sur le revenu apportée en 1995 et qui
a mis fin à la possibilité de transférer une indemnité de départ dans un REER,
en franchise d’impôt.
Ni M. Connor, ni
M. John Farrell, d’Employeurs des transports et communications de régie
fédérale (ETCOF), n’appuyaient des hausses des prestations de la SV ou du SRG.
Ils n’appuyaient pas non plus des hausses des prestations du RPC ou du RRQ. Ils
préconisaient plutôt tous les deux une certaine forme de cotisations
déterminées supplémentaires et volontaires au RPC. Mais M. Ian Markham,
d’ETCOF, a prévenu qu’un RPC supplémentaire volontaire détournerait des sommes
qui, autrement, seraient dirigées vers des cotisations aux REER. Mais, comme
les REER sont habituellement des placements à coût relativement élevé, un
supplément volontaire au RPC pourrait théoriquement être administré à un ratio
de dépense plus bas.
M. Ambachtsheer, du
Rotman International Centre for Pension Management, qui a témoigné à titre
personnel, était d’avis que les Canadiens n’épargnent pas volontairement assez
pour la retraite et qu’ils ne le feront probablement pas. Par conséquent, il
faut une intervention des pouvoirs publics. Cependant , il ne favorisait pas
une hausse des cotisations obligatoires. Il a renvoyé à sa proposition, examinée
dans le rapport de 2008 publié par l’Institut C.D. Howe et intitulé The
Canada Supplementary Pension Plan, qui décrivait une proposition de régime
supplémentaire de retraite du Canada volontaire et à cotisations déterminées. Selon
cette proposition, les Canadiens adhéreraient automatiquement à ce régime, à
des taux de cotisation prédéterminés et la retraite visée équivaudrait à un
taux de remplacement du revenu de 60 %. La proposition prévoyait un droit
de refus, quelques choix de rentes et la possibilité de transférer des actifs
de REER dans le compte d’épargne-retraite personnel du régime supplémentaire.
M. Connor comptait
parmi les témoins qui se sont exprimés sur la nécessité de la littératie
financière. Ainsi, il a affirmé que l’éducation pourrait améliorer les
habitudes d’épargne-retraite des Canadiens et il a suggéré d’améliorer les
communications sur l’importance de l’épargne-retraite, surtout à l’intention
des jeunes Canadiens, qui peuvent établir des stratégies pour toute une vie
susceptibles de leur assurer la sécurité financière à l’avenir.
M. Campbell sentait le besoin d’accroître la littératie financière
relative à l’épargne et à la planification de la retraite, tandis que
M. Markham a affirmé que de nombreux Canadiens ne comprennent pas comment
investir dans leurs REER, ce qui fait qu’ils ont tendance à investir dans des
instruments qui coûtent assez cher et à prendre de mauvaises décisions. M. Herr
a souligné que les consommateurs canadiens doivent avoir accès rapidement à des
renseignements exacts et clairs qui répondront à leurs besoins en planification
financière. Enfin, M. Ambachtsheer, a soutenu que le Canadien moyen ne
connaît pas très bien la théorie des placements.