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CIIT Rapport du Comité

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OPINION COMPLÉMENTAIRE

NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE DU CANADA

INTRODUCTION

Le NPD remercie les membres, le personnel et les analystes du Comité, ainsi que les témoins qui ont participé à l’étude sur un éventuel accord de libre‑échange avec le Mercosur.

Le NPD est favorable à l’établissement de relations commerciales équitables et progressistes avec des partenaires de premier plan du continent afin d’ouvrir des débouchés pour les exportateurs canadiens, ce qui crée des emplois et stimule la croissance économique au bénéfice des collectivités et des travailleurs canadiens. La position des néo‑démocrates a toujours été très claire : tous les échanges commerciaux internationaux doivent être justes, équilibrés et dans l’intérêt des industries canadiennes et de notre environnement; ils doivent respecter les Autochtones et tous les travailleurs, correspondre à nos valeurs fondamentales en matière de justice sociale, d’égalité et de dignité universelle et être conformes à nos obligations internationales.

Au cours de la présente étude, le NPD a entendu de nombreux témoins dire qu’une entente commerciale avec les pays du Mercosur n’est pas une initiative nécessaire, et que les négociateurs et les fonctionnaires d’Affaires mondiales auraient intérêt à se concentrer sur des négociations commerciales plus urgentes et sur des débouchés mondiaux avec des partenaires commerciaux plus solides.

Joseph Galimberti, président de l’Association canadienne des producteurs d’acier, a déclaré ceci : « [D]ans le cadre des négociations du Mercosur[,] le Canada n’exporte pratiquement pas d’acier primaire et très peu de produits contenant de l’acier dans les pays du Mercosur. Cette situation ne changera probablement pas dans le contexte d’un accord de libre-échange. Nous ne nous attendons pas à une augmentation notable et en fait, nous aimerions souligner que des mesures antidumping du Tribunal canadien du commerce extérieur visent actuellement certains pays du Mercosur en ce qui concerne l’importation des tôles d’acier au carbone laminées à chaud, des tôles en acier allié, des bandes en acier et des plaques d’acier.

Nous aimerions également souligner qu’un accord avec le Mercosur pourrait potentiellement contribuer grandement à l’érosion de la part du marché des utilisateurs d’acier au Canada, surtout ceux dans le secteur de la fabrication automobile et dans le secteur de la production d’énergie, de tuyaux et de tubes.

[…] Je ne crois pas que le Mercosur offrira des occasions d’exportation pour l’acier canadien. Par exemple, le transport est trop coûteux. Pour soutenir la concurrence, il faudrait offrir un produit de piètre qualité, ce que l’industrie canadienne, selon moi, refuse de faire juste pour compenser les coûts de transport. À ce moment-là, il faut faire concurrence sur le volume, et ce n’est pas ce que nous faisons ici. »

Claire Citeau, directrice générale de l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, a déclaré : « L’ACCA représente les 90 % d’agriculteurs qui dépendent du commerce, ainsi que les producteurs, les transformateurs et les exportateurs de produits agroalimentaires qui veulent qu’on stimule la croissance économique en améliorant et en rendant plus concurrentiel l’accès aux marchés internationaux. […] Comme je l’ai mentionné auparavant devant ce comité, le commerce est un de nos principaux moteurs économiques, étant donné que les exportations génèrent 60 % de la valeur du secteur. Plus de la moitié de tout ce que nous produisons est exportée, soit la moitié de notre bœuf, 65 % de nos fèves de soya, 75 % de notre blé, 70 % de notre porc, 90 % de notre colza et 95 % de nos légumineuses. En outre, 40 % de nos produits transformés sont exportés. […] En conséquence, nous croyons qu’un accord de libre-échange avec le Mercosur — à la lumière d’autres accords de libre-échange en cours ou en voie de renégociation, ou de nouveaux accords qui, selon nous, donnent d’importantes perspectives pour accroître le commerce — n’offre pas de potentiel de croissance des exportations suffisant pour justifier l’allocation des ressources nécessaires afin de négocier un accord avec cette région. »

Quant à Paul Lansbergen, président du Conseil canadien des pêches, il a dit : « [U]n accord de libre-échange avec le Mercosur pourrait offrir des possibilités au secteur des pêches, mais ce n’est pas très prioritaire pour nous en ce moment ».

Les néo‑démocrates comprennent qu’il est important d’établir des relations commerciales avec des partenaires progressistes du monde entier, et il estime que des accords commerciaux progressistes peuvent contribuer au mieux‑être de tous. Pour ce faire, il faut toutefois que l’accord commercial soit transparent, inclusif et tourné vers l’avenir. Il doit tenir compte d’enjeux importants comme l’inégalité du revenu, la souveraineté, le changement climatique et les droits de la personne. Nous devons saisir toutes les occasions qui s’offrent à nous de changer notre manière de négocier et de considérer les principaux accords commerciaux afin que l’amélioration du sort de tous les Canadiens devienne leur objectif premier.

CONSULTATIONS ET TRANSPARENCE DE LA PART DU GOUVERNEMENT

Selon le NPD, le gouvernement du Canada ne peut pas sérieusement prétendre qu’il fait preuve de transparence s’il ne renseigne pas les Canadiens sur l’objet des négociations. Le gouvernement doit donc lever le voile sur le secret qui entoure les négociations commerciales.

Pour le moment, le gouvernement n’est plus officiellement tenu de solliciter la participation du public dans le cadre des accords commerciaux et le gouvernement actuel négocie en bonne partie derrière des portes closes, sans guère de transparence ni de participation du public, comme l’a fait le gouvernement précédent.

On ne peut pas considérer le travail effectué par le Comité du commerce international comme une consultation gouvernementale, car il s’agit d’un travail indépendant auquel contribuent tous les partis, ni comme le substitut d’un processus de consultation complet et efficace.

Il est très préoccupant de constater l’incapacité persistante du gouvernement à respecter ses engagements à l’égard de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) en ce qui concerne les accords commerciaux. L’article 19 établit très clairement que le Canada doit obtenir le consentement préalable des peuples autochtones, donné librement et connaissance de cause, avant d’adopter des mesures qui les touchent. Il est incontestable que l’accord de libre‑échange avec le Mercosur s’inscrit dans cette catégorie.

Le NPD croit que les peuples autochtones doivent être représentés en bonne et due forme à la table de négociation si le Canada veut respecter ses obligations à leur égard, conformément à la Déclaration.

Lors des prochaines négociations, le gouvernement devrait consulter de manière constructive et approfondie des députés de tous les partis qui sont représentatifs de la population canadienne, afin de sonder des Canadiens de tous les secteurs, de toutes les régions et de tous les milieux. Les résultats de ces consultations devraient être rendus publics.

La transparence, quant à elle, est tout aussi importante pour les parties concernées. Dans le contexte particulier des échanges commerciaux avec le Mercosur, Angelo DiCaro, représentant d’Unifor, a critiqué les démarches entreprises jusqu’ici par le gouvernement lorsqu’il a déclaré : « [U]n mandat clair en vue de mener ces négociations fait défaut. Je présume que nos divers négociateurs en chef, l’équipe de négociation et le gouvernement fédéral ont un plan concernant certaines de leurs positions fermes, certains secteurs importants auxquels ils souhaitent avoir accès dans le marché et certaines dispositions d’ordre social qu’ils veulent faire avancer. Cependant, ce n’est pas du tout évident de savoir ce qu’il en est, contrairement à d’autres pays comme l’Union européenne et les États-Unis à certains égards. »

M. DiCaro a aussi manifesté son inquiétude au sujet de la transparence dans les accords commerciaux en général : « Nous recommandons aussi sans cesse d’avoir un processus plus transparent et d’expliquer clairement ce que nous essayons d’accomplir avec cela. De mon point de vue de membre de la société civile, je crois qu’il serait utile de le savoir et je crois aussi que cela se veut, d’une certaine manière, une stratégie plus adéquate, parce que cela envoie un message à nos partenaires de négociation : le Canada a des positions fermes très définies. Comme dans le cas de l’ALENA, il se pourrait que beaucoup de Canadiens et d’organisations canadiennes se rangent de votre côté. Par conséquent, je crois que c’est quelque chose que nous voulons voir plus souvent, mais rien n’indique que cela arrivera dans le cas du Mercosur, et c’est l’esprit qui sous-tend mon commentaire. »

Le NPD continuera de réclamer des améliorations dans toutes les prochaines négociations entreprises par le gouvernement.

L’AVENIR DES ACCORDS COMMERCIAUX

De l’avis des néo‑démocrates, le Canada a ouvert à maintes reprises des débouchés commerciaux dans d’autres pays dans le cadre de nombreux accords, mais nos exportations vers ces partenaires, loin d’augmenter, ont plutôt connu un déclin. Selon les données les plus récentes de Statistique Canada, au cours des neuf mois qui ont suivi l’entrée en vigueur de l’Accord économique et commercial global (AECG) avec l’Union européenne, le déficit sur marchandises du Canada à l’égard de l’Union européenne a fait un bond de 46 % par rapport à la même période l’année précédente, avant l’entrée en vigueur provisoire de l’Accord. Voici ce qu’a déclaré le représentant d’Unifor, M. DiCaro : « [L]'accès au marché et la multiplication des ouvertures sont une chose, mais cela constitue-t-il un avantage démontrable pour le Canada? Ces avantages permettront-ils de faire oublier ces autres aspects des accords commerciaux qui se sont révélés très contrariants pour le Canada? Je parle ici de tout ce qui concerne les privilèges spéciaux accordés aux investisseurs et du fait de nous emprisonner dans des imbroglios réglementaires, et d’autres choses de cette nature. »

M. DiCaro a ajouté que le Canada doit effectuer des évaluations indépendantes et complètes de l’incidence. Le NPD est d’accord avec lui et estime que tous les accords commerciaux doivent faire l’objet d’analyses complètes du point de vue de l’économie, de l’emploi et du genre, et que ces analyses doivent être rendues publiques.

À l’avenir, il ne faut plus que les accords commerciaux soient négociés d’une manière qui fait pencher la balance des forces dans l’économie en faveur des sociétés, au détriment des gouvernements et des travailleurs. Les néo‑démocrates sont préoccupés par le fait que les accords commerciaux accordent sans cesse des droits exécutoires aux investisseurs, ce qui limite les pouvoirs des gouvernements actuels et futurs et ceux des citoyens qui les élisent. C’est ce qui s’est passé lors de la négociation de l’ALENA et de la renégociation de l’AEUMC. Il faut éviter d’éroder les règlements et les dispositions sur la sécurité qui visent les aliments, le bétail et les produits chimiques.

Le gouvernement actuel parle de conclure des accords commerciaux progressistes, mais aucune véritable mesure socialement responsable n’a été prise dans aucun des accords négociés récemment. Il faut adopter une approche radicalement différente de celle qui a été adoptée dans le passé vis‑à‑vis des accords commerciaux. Un malaise social et des doutes grandissants entourent les droits des travailleurs, notre environnement, la situation des femmes et celle des Autochtones, et le fait qu’on ne leur accorde pas la même importance qu’aux droits des sociétés à la rentabilité. Créer des dispositions socialement responsables plus contraignantes et exécutoires est le premier pas à franchir et il faut qu’un grand nombre de conditions sociales liées au commerce soient respectées avant la signature de tout accord commercial. Comme l’a dit M. DiCaro au Comité : « C’est bien d’avoir des aspirations, mais il faut passer à l’action à cet égard. Je crois qu’il est essentiel que nous commencions à traiter le caractère exécutoire de ces conditions sociales sur le même pied que les dispositions sur l’accès au marché. »

LA MAIN‑D’ŒUVRE

Il faut redéfinir les priorités et les objectifs actuels de toutes les ententes commerciales, y compris ceux d’un accord potentiel avec le Mercosur, afin d’assurer la primauté des droits des travailleurs.

À l’heure actuelle, comme l’a fait remarquer Angella MacEwen, économiste principale au Congrès du travail du Canada (CTC), en parlant de l’étude sur un accord potentiel entre le Canada et l’alliance du Pacifique effectuée par le Comité permanent du commerce international : « Il n’est jamais arrivé que le chapitre sur le travail d’un accord de libre-échange entraîne des changements concrets pour les travailleurs de l’autre pays. Nous avons d’autres mécanismes — par l’intermédiaire de l’OIT, par exemple — pour faire des choses comparables à ce que nous faisons actuellement en Colombie, avec les mêmes résultats que cet accord de libre-échange, mais l’ALE a permis à des entreprises canadiennes d’exploiter les travailleurs de l’endroit. »

Lors de la négociation des prochains accords commerciaux, il faut tirer des leçons des accords précédents, tenir compte de leurs limites et considérer la main‑d’œuvre de manière différente. Il faut inclure un chapitre complet sur le travail dans le corps du texte de l’accord pour assurer le caractère exécutoire des règlements sur le travail et prévoir des sanctions et des normes pour les trois pays.

Le NPD croit que, pour renforcer les droits et les normes du travail dans les accords commerciaux, il faut inclure dans ces derniers un chapitre exécutoire complet sur le travail, qui exige que tous les États membres signent et ratifient les huit conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail (OIT), adhèrent à l’agenda sur le travail décent de l’Organisation, puis signent et ratifient la convention no 81 de l’organisme, qui concerne l’inspection du travail. Le chapitre doit aussi prévoir la création d’un secrétariat du travail indépendant ayant le pouvoir de superviser le processus de règlement des différends en cas de violation des droits des travailleurs, car il n’existe actuellement aucun mécanisme adéquat pour lutter contre les nombreuses violations de ces droits.

Le NPD partage l’avis du CTC, qui considère que le gouvernement du Canada doit « envisager l’idée d’une diligence raisonnable pour les entreprises et les organismes de financement canadiens […] et songer à un cadre de négociation transnationale pour permettre aux syndicats de représenter les travailleurs dans bien des pays ». Selon le NPD, les négociations commerciales, y compris celles avec les pays du Mercosur, doivent s’appuyer sur le principe voulant que personne ne soit désavantagé. Il ne faut pas que les travailleurs continuent d’être un détail ajouté à la dernière minute dans les accords commerciaux.

LE SECTEUR MANUFACTURIER

Le NPD croit que l’intégration et la libéralisation des échanges commerciaux ont avantagé les partenaires des sociétés, mais pas les travailleurs ni les petites et moyennes entreprises du secteur manufacturier.

Le gouvernement canadien doit protéger les emplois du secteur manufacturier et du secteur de l’automobile, prendre des mesures à l’égard de la répartition inéquitable de la richesse et mettre en œuvre une stratégie nationale pour le secteur de l’automobile et le secteur manufacturier afin d’assurer le dynamisme de ces secteurs.

Mark Nantais, président de l’Association canadienne des constructeurs de véhicules, a été clair au cours de son témoignage : « [L]orsque nous [c’est‑à‑dire le Canada] signons des accords qui prévoient de nouvelles mesures incitatives totalisant des centaines de millions de dollars pour des constructeurs automobiles qui ne produisent aucun véhicule ici ou qui ne créent aucun emploi dans le secteur manufacturier canadien, il devient moins intéressant pour nos constructeurs de continuer à produire ici et à créer des emplois ici. C’est notre politique. Malgré toutes les bonnes intentions et tous les efforts, c’est ce que le Canada est en train de faire avec le PTPGP. Comme le PTPGP, l’accord commercial avec le Mercosur représente une occasion d’augmenter les exportations de véhicules canadiens, mais il représente aussi d’importants enjeux en matière d’accès aux marchés, en ce sens qu’il permettra l’application de mesures protectionnistes dans chacun de ces pays. »

LES MÉCANISMES DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS

Pour le NPD, les dispositions sur le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), qui privilégient les entreprises au détriment de l’intérêt public, n’ont pas leur place dans les accords commerciaux. Ces dispositions permettent aux investisseurs étrangers de contourner le système des tribunaux nationaux, ce qui mine la souveraineté de notre pays. Les tribunaux d’arbitrage, qui n’ont pas à rendre de comptes, peuvent alors ordonner aux gouvernements de dédommager les investisseurs qui se disent lésés par les politiques ou les règlements publics du pays.

Scott Sinclair, chercheur principal au Centre canadien de politiques alternatives, a exprimé certaines inquiétudes au sujet du Mercosur : « Les possibilités d’adopter un tel modèle dans le contexte d’un accord de libre-échange Canada-Mercosur sont, au mieux, limitées. Dans leurs négociations commerciales externes, les pays du Mercosur, en particulier le Brésil, ont toujours hésité à adhérer aux engagements dits "OMC-plus" sur la propriété intellectuelle, le commerce et les services, les investissements et les dispositions sur la coopération en matière de réglementation qui ont posé des problèmes dans bon nombre de récents accords de libre-échange bilatéraux du Canada.

Cela laisse place à un modèle de traité sur le commerce qui est plus progressiste ou, du moins, qui est moins intrusif. Si des pourparlers ont lieu, nous recommandons fortement que tout accord de libre-échange Canada-Mercosur n’inclue pas de mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États. Actuellement, le Brésil et le Canada n’ont pas d’accord sur la protection des investissements étrangers. En fait, le Brésil n’a ratifié aucun traité sur la protection des investissements qui inclut des mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États. Le Canada devrait également saisir l’occasion de retirer les mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États des accords sur la protection des investissements étrangers qu’il a conclus avec l’Argentine et l’Uruguay. »

M. Sinclair a aussi fait remarquer que c’est sur les processus d’évaluation environnementale que l’effet des dispositions de RDIE est le plus fâcheux. En parlant du secteur minier en particulier, il a dit : « Je tiens également à dire que certaines entreprises canadiennes, en particulier dans le secteur minier, ont utilisé le RDIE à l’étranger d’une manière qui nuit selon moi à la réputation du Canada. Il y a eu trois affaires récentes contre la Colombie, qui visaient à réserver un site naturel important qui fournit pourtant une grande partie de l’eau du pays. Trois entreprises enregistrées au Canada ont contesté en vertu de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie, ce que nous avions prédit. »

Il est important de mentionner que le Brésil a indiqué qu’il ne signerait pas d’accord commercial contenant des dispositions de RDIE.

LES PROTECTIONS ENVIRONNEMENTALES, L’ÉNERGIE ET L’EAU

Scott Sinclair a ajouté ceci : « Le revers de la médaille de l’approche prudente du Brésil, c’est qu’il s’est aussi opposé à inclure des normes environnementales et des normes du travail contraignantes dans des accords commerciaux. Cela pose un problème, étant donné que le gouvernement fédéral a récemment décidé d’adopter un programme commercial progressiste. Pour qu’un accord commercial soit progressiste, il doit au moins inclure des normes du travail solides et entièrement exécutoires. Il doit également inclure des obligations pour veiller à ce que chaque pays applique des normes environnementales élevées sur son territoire tout en respectant ses obligations contractées en vertu d’accords environnementaux multilatéraux. Il sera vraisemblablement difficile d’obtenir ces deux conditions préalables à un accord commercial progressiste dans le cadre d’un accord de libre-échange avec le Mercosur. »

Selon le NPD, tout chapitre ou disposition portant sur l’environnement doit être enchâssé dans le texte principal d’un accord afin d’être contraignant et pleinement exécutoire. De plus, toutes les dispositions doivent être conformes aux obligations internationales déjà établies du Canada en matière d’environnement, notamment celles comprises dans l’Accord de Paris qui a été conclu le 12 décembre 2015. La protection contre les conséquences désastreuses du changement climatique et la dégradation continue de notre environnement doivent être au premier plan des préoccupations.

Par ailleurs, le NPD s’oppose à toute disposition régressive sur la proportionnalité dans le secteur de l’environnement et à toute tentative, dans un accord, de faire de l’eau un bien négociable ou commercialisable et non un droit de la personne.

L’ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES

Le NPD a été déçu que le Comité décide de n’inclure qu’une vague déclaration sur l’égalité entre les sexes dans ses recommandations au lien d’y énoncer clairement toute l’importance d’un chapitre portant sur ce sujet.

Le NPD réclame l’intégration de la notion d’égalité entre les sexes d’un bout à l’autre des accords commerciaux. Il ne faut pas confiner le sujet à un seul chapitre, car il n’est pas limité aux difficultés auxquelles font face les femmes entrepreneures et propriétaires d’entreprises. De plus, les droits du travail doivent s’attaquer aux injustices à l’endroit des femmes comme la disparité salariale, le travail des enfants et les mauvaises conditions de travail. Le NPD croit qu’un accord qui se veut vraiment progressiste en matière d’égalité entre les genres doit aborder les inégalités systémiques qui visent toutes les femmes. Selon le NPD, il faut appliquer à tous les accords commerciaux une analyse comparative entre les sexes et une évaluation des répercussions sur le genre.

LES DROITS DES AUTOCHTONES

Le NPD estime que le gouvernement doit se conformer à l’article 19 de la Déclaration des Nations Unies et obtenir le consentement préalable des peuples autochtones – donné librement et en connaissance de cause, avant d’adopter des mesures qui peuvent les toucher.

Pam Palmater, professeure agrégée et titulaire de la Chaire de gouvernance autochtone à l’Université Ryerson, a fait remarquer qu’il faut tenir compte des droits des autochtones d’un bout à l’autre d’un accord commercial, et pas seulement dans un chapitre. Elle a aussi signalé que, dans l’ensemble des pays du Mercosur, de nombreux Autochtones ont été victimes de violence de la part de multinationales qui se livrent à des activités commerciales.

Mme Palmater a également indiqué que le Canada a été fondé sur une relation commerciale étroite entre les peuples autochtones et les premiers colons et, bien que les traités commerciaux aient été reconnus par la Cour suprême du Canada et soient protégés par la Constitution, les peuples autochtones ne sont pas considérés comme des partenaires égaux dans notre compétence partagée. Il est inacceptable que ce partenariat ne soit pas reconnu.

Il est très préoccupant de constater l’incapacité persistante du gouvernement à respecter ses engagements à l’égard de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) en ce qui concerne les accords commerciaux. Le NPD croit que les peuples autochtones doivent être représentés en bonne et due forme à la table de négociation si le Canada veut respecter ses obligations à leur égard, conformément à la Déclaration.

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE, DROITS NUMÉRIQUES ET DROITS EN MATIÈRE DE PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS

On s’inquiète de plus en plus de l’état de préparation du gouvernement canadien quant à la défense et à la promotion des intérêts du Canada en ce qui concerne la propriété intellectuelle (PI), les droits numériques et les droits en matière de protection des renseignements personnels. Le Comité a entendu des témoins exprimer des préoccupations au sujet d’éventuels changements majeurs aux droits de PI liés au droit d’auteur, aux brevets et aux marques de commerce inclus dans d’autres accords commerciaux, qui pourraient avantager injustement les grandes sociétés au détriment des consommateurs ou des innovateurs canadiens.

La politique canadienne en matière de droit d’auteur ne doit pas être sacrifiée au nom du libre‑échange. Le maintien d’une politique du droit d’auteur équilibrée et judicieuse est particulièrement important étant donné le lien fondamental entre la loi sur le droit d’auteur et la capacité de s’exprimer librement en ligne, notamment : par l’échange de connaissances, de recherches et d’art; par la participation au débat public et politique; par la contribution au patrimoine culturel; par l’inspiration et l’exploitation de la créativité. Le NPD insiste sur le fait que le système d’avis et avis est un régime efficace qui permet d’atteindre des objectifs en matière de violation du droit d’auteur, tout en atténuant (bien que pas complètement) les préjudices associés à l’avis et retrait. Elliot Anderson, de l’Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, a déclaré que « [l]’ACTRA estime qu’il est temps d’adopter une nouvelle approche de la culture et des accords commerciaux. Elle devrait reposer non pas sur une exemption négative, mais sur un engagement positif à promouvoir la diversité des expressions culturelles, la collaboration culturelle et les échanges. »

Le gouvernement canadien doit rejeter toute mesure qui propose de prolonger la durée du droit d’auteur au‑delà de 50 ans après le décès de l’auteur, comme c’est le cas actuellement, sachant que la durée du droit d’auteur au Canada respecte déjà amplement les traités internationaux en la matière.

Le prix des médicaments au Canada étant déjà, à une exception près, le plus élevé au monde, le gouvernement doit résister à la prolongation de la durée des brevets, qui entraînerait une hausse encore plus substantielle du prix des médicaments, et faire en sorte qu’un accord commercial avec le Mercosur, ou tout autre partenaire, n’empêche pas la création d’un régime national d’assurance-médicaments au Canada.

Le NPD considère que le Canada doit continuer d’exclure la culture des accords commerciaux, comme il le fait depuis longtemps. La politique culturelle doit être établie à l’échelle nationale, par le gouvernement canadien. Il ne faut pas que les accords commerciaux puissent limiter notre souveraineté ni dicter notre politique culturelle.

LA GESTION DE L’OFFRE

Le gouvernement doit protéger la gestion de l’offre contre les tentatives récentes des États‑Unis de la démanteler. On garantira ainsi aux Canadiens l’accès à des aliments de grande qualité produits localement, tout en appuyant les petites fermes familiales et les localités rurales. Le secteur des produits soumis à la gestion de l’offre génère 310 000 emplois et sa contribution à l’économie canadienne s’élève à plus de 26 milliards de dollars.

Il ne faut pas continuer d’affaiblir la gestion de l’offre dans les accords commerciaux, comme cela a été le cas dans l’AECG, dans le PTPGP et dans le cadre de l’AEUMC. L’accès au marché ne doit pas être élargi davantage dans un éventuel accord avec le Mercosur.

RECOMMANDATIONS DU NPD

  • 1. Que le gouvernement du Canada veille à ce que des mesures de sauvegarde soient mises en place pour protéger les secteurs de l’acier et de l’aluminium contre les partenaires internationaux qui inondent le marché canadien de produits de qualité médiocre.
  • 2. Que le gouvernement du Canada fasse preuve d’une plus grande transparence pendant les négociations commerciales en consultant directement les Canadiens et qu’il tienne les parlementaires régulièrement informés pendant tous les cycles de négociations.
  • 3. Que le gouvernement du Canada protège la possibilité, pour les différents ordres de gouvernement, d’adopter des politiques destinées à étendre les services publics ou à renationaliser des secteurs privatisés sans s’exposer à des poursuites.
  • 4. Que le gouvernement du Canada s’engage à inclure dans tous les accords commerciaux des mesures rigoureuses et exécutoires relatives à la monnaie.
  • 5. Qu’avant de conclure ou de signer tout autre accord commercial, le gouvernement du Canada commande une étude indépendante sur les coûts et les avantages de l’accord et une évaluation de l’emploi, qu’il veille à ce que l’analyse comparative entre les sexes soit appliquée et qu’une évaluation des répercussions sur le genre soit effectuée.
  • 6. Que le gouvernement du Canada veille à ce qu’aucun autre accord commercial ne comprenne de dispositions sur l’arbitrage des différends entre investisseurs et États.
  • 7. Que le gouvernement du Canada divulgue rapidement les hausses éventuelles estimées du coût des médicaments d’ordonnance pour les provinces et les territoires ainsi que pour les particuliers et les employeurs canadiens à la suite des modifications proposées par un accord commercial négocié aux lois sur les brevets d’une part, et les détails de la compensation financière à verser aux provinces, territoires, particuliers et employeurs d’autre part.
  • 8. Que le gouvernement du Canada, dans le cadre de toutes les négociations entourant de futurs accords commerciaux et d’investissement, défende les droits de propriété intellectuelle qui profitent aux consommateurs et aux innovateurs canadiens et s’engage à conserver le régime actuel de droit d’auteur du Canada, plus précisément : a) un engagement à l’équilibre, par une approche authentiquement canadienne; b) l’avis et avis; c) l’actuelle durée du droit d’auteur (c.‑à‑d. rejeter toute mesure proposant d’en prolonger la durée.)
  • 9. Veiller à ce que toute disposition concernant la localisation des données préserve la capacité du Canada à mettre en place un droit national substantiel protégeant les données personnelles et le droit à la vie privée des Canadiens.
  • 10. Conserver le solide régime de neutralité de l’Internet au Canada et rejeter toute tentative d’affaiblissement de cette neutralité au pays
  • 11. Que le gouvernement du Canada négocie des dispositions environnementales qui renforcent l’application des normes et des objectifs fixés dans le cadre de nos obligations internationales, notamment les obligations qui ont été convenues dans l’Accord de Paris conclu en 2015.
  • 12. Que le gouvernement du Canada évite d’adopter toute disposition qui exposerait l’eau à l’exportation et à la privatisation.
  • 13. Que le gouvernement du Canada cherche à établir des normes de travail rigoureuses et exécutoires dans le présent accord commercial et dans tous ceux qui le suivront. Le gouvernement doit chercher à inclure un chapitre sur le travail qui exigerait la ratification et l’application des huit conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail, ainsi que l’adhésion à l’agenda pour le travail décent de l’OIT. Le gouvernement doit aussi veiller à la création d’un secrétariat du travail indépendant qui aurait le pouvoir de superviser le processus de règlement des différends en cas de violation des droits des travailleurs et d’imposer des sanctions aux contrevenants.
  • 14. Que le gouvernement du Canada collabore avec tous ses partenaires internationaux pour veiller, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, à ce que les droits des peuples autochtones soient respectés. De plus, avant d’accepter toute disposition d’un accord commercial qui pourrait avoir un effet sur les peuples autochtones, le gouvernement doit obtenir le consentement préalable et inconditionnel – donné librement et en connaissance de cause – des peuples en question.
  • 15. Que le gouvernement du Canada protège la souveraineté alimentaire, les mécanismes de production et la gestion de l’offre, les moyens de subsistance en milieu rural et le droit de connaître le contenu des aliments et l’endroit où ceux‑ci sont produits.
  • 16. Que le gouvernement du Canada renforce la Loi sur investissement Canada afin de protéger les emplois canadiens et de faire en sorte que les prises de contrôle d’entreprises canadiennes par des intérêts étrangers procurent un avantage net au Canada.