Passer au contenu

NDDN Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Opinion complémentaire du Nouveau Parti démocratique

Au nom du Nouveau Parti démocratique, nous tenons d’abord à remercier ceux et celles qui ont participé à la production de ce rapport, en particulier les membres des Forces armées canadiennes. Merci également aux membres des milieux universitaire, communautaire et politique qui ont éclairé le Comité permanent de la défense nationale par leur expérience. Nous tenons aussi à remercier les analystes de la Bibliothèque du Parlement, le greffier du Comité et les interprètes pour leur travail.

L’étude englobe les témoignages entendus au cours d’une douzaine de réunions et lus dans plusieurs mémoires écrits à propos des éléments de la sécurité dans l’Arctique. Au Nouveau Parti démocratique, nous sommes reconnaissants des témoignages de tous les participants et nous souhaitons que les recommandations du Comité traduisent l’ensemble des points de vue entendus.

Changement climatique

Le Comité a adopté une motion pour étudier « la menace de la Russie pour l’Arctique canadien; la menace de la Chine pour l’Arctique canadien; la sécurité de l’archipel arctique canadien; la sécurité du passage du Nord-Ouest et la modernisation du NORAD ». Le Nouveau Parti démocratique craint que les recommandations formulées dans le rapport s’éloignent de ce mandat tout en abordant très peu, voire pas du tout, les témoignages sur la menace la plus imminente pour l’Arctique : le changement climatique.

M. P. Whitney Lackenbauer a rappelé au Comité qu’il faut faire la distinction « entre les menaces qui traversent ou survolent l’Arctique et celles qui visent l’Arctique ou qui s’y trouvent ». Dans ses recommandations, le Comité insiste trop sur les menaces pour l’Amérique du Nord passant par l’Arctique, au détriment des menaces pour l’Arctique même.

Le réchauffement de l’océan Arctique est jusqu’à sept fois plus rapide que la moyenne mondiale. Les Nations Unies estiment que d’ici 2050, jusqu’à 70 % des infrastructures de l’Arctique seront menacées par la disparition du pergélisol. Il s’agit d’une menace directe pour les Forces armées canadiennes et les populations de l’Arctique.

Cette menace pour la sécurité de l’Arctique a été abordée de long en large au cours des réunions du Comité : le chef d’état-major de la défense, le général Wayne Eyre a parlé de la difficulté de faire en sorte que « l’infrastructure soit durable et résistante au vu des circonstances changeantes liées aux changements climatiques ». Le commandant du renseignement, le major-général Michael Wright, a expliqué que, oui, la Russie et la Chine représentent une menace, mais qu’il existe « une troisième menace à l’Arctique : le changement climatique ».

Avec le changement climatique, nous avons déjà vu le nombre de voyages dans les eaux arctiques canadiennes tripler au cours des trois dernières décennies. La fonte des glaces ouvre de nouvelles voies maritimes, ce qui entraînera une augmentation des activités de pêche, de transport, de tourisme et de recherche dans la région. En outre, la disparition du pergélisol accroît la viabilité de l’accès aux immenses réserves de pétrole, de gaz naturel et de minéraux précieux de l’Arctique.

L’Arctique sera donc confronté à de nouvelles menaces auxquelles il faudra faire face. Nous devrons améliorer la connaissance du domaine pour la souveraineté de l’Arctique. Nous aurons besoin de capacités de recherche et de sauvetage accrues, car les nouvelles activités dans la région sont confrontées à des catastrophes de plus en plus imprévisibles causées par le changement climatique. L’augmentation des populations de poissons et l’accès à de nouvelles voies de transport nécessiteront un renforcement des services de police navale pour lutter contre les activités illégales.

Les témoignages entendus au Comité étaient ancrés dans le contexte de cette activité accrue causée par le changement climatique, c’est pourquoi le Nouveau Parti démocratique est profondément déçu par l’absence de politique climatique dans le rapport. Le Nouveau Parti démocratique a essayé de faire pression pour que le changement climatique soit considéré comme une menace existentielle pour la sécurité de l’Arctique, mais malheureusement le Comité s’y est opposé.

Dans ce contexte, il est essentiel que les peuples autochtones et les populations de l’Arctique soient au cœur de notre stratégie de sécurité dans l’Arctique : qu’il s’agisse de l’impact désastreux du changement climatique sur l’Arctique ou de l’augmentation de l’activité dans cette région, les peuples autochtones et les populations de l’Arctique seront aux premières lignes et les premiers à intervenir. Toutes les dépenses gouvernementales consacrées à la sécurité de l’Arctique doivent tenir compte de cette réalité. Dans le cadre de la sécurité de l’Arctique, nous devons veiller à ce que les investissements dans le Nord aident les habitants du Nord à accéder à des logements sûrs, à de l’eau potable, à des aliments frais et à des soins de santé.

Le Nouveau Parti démocratique est préoccupé par le fait que ce rapport perpétue une tradition de plusieurs décennies selon laquelle la politique de défense laisse de côté les populations de l’Arctique. Il est facile de tomber dans l’escalade des appels à la militarisation de l’Arctique, mais cela n’a rien à voir avec ce que le Comité a entendu de la part des témoins. La meilleure politique de sécurité dans l’Arctique consiste à investir dans les populations de l’Arctique.

Rangers canadiens

L’un des messages clairs entendus par le Comité est la nécessité d’investir dans les Rangers canadiens pour répondre aux menaces qui pèsent sur l’Arctique. Le général Wayne Eyre qualifie les Rangers canadiens comme étant « un outil très important pour accroître notre connaissance de la situation ». M. Calvin Pedersen, Ranger canadien de quatrième génération, nous a parlé de son travail de surveillance de la circulation des navires dans le passage du Nord-Ouest. De plus, M. Peter Kikkert a expliqué que les Rangers canadiens fournissent une capacité opérationnelle importante et unique, puisqu’ils sont « souvent mobilisés à titre de premiers intervenants pour fournir de l’aide à leurs communautés et à leurs régions ».

Les Rangers canadiens sont essentiels pour répondre aux besoins de sécurité liés à l’impact du changement climatique et à l’augmentation de l’activité économique dans l’Arctique. M. Peter Kikkert nous a aussi expliqué que « les Rangers portent beaucoup de chapeaux, alors ils se portent souvent volontaires pour des équipes de recherche et sauvetage sur le terrain dans leurs communautés. Ils sont souvent membres des unités auxiliaires de la Garde côtière qui effectuent des opérations de recherche en mer. […] La formation donnée aux Rangers n’est pas toujours mise à profit dans des rôles officiels, mais elle sert souvent à renforcer le système de recherche et sauvetage sur une base volontaire. »

Les investissements dans les Rangers canadiens permettront d’accroître notre connaissance du domaine, d’augmenter la capacité opérationnelle des FAC et de renforcer la capacité de recherche et de sauvetage.

Les néo-démocrates soutiennent fermement les recommandations 21 à 25 et espèrent que le gouvernement y donnera suite rapidement.

Les Rangers ont été maltraités par les gouvernements successifs qui attendent d’eux qu’ils continuent à servir tout en étant sous-rémunérés pour l’utilisation de l’équipement, par un processus de remboursement lent et inadéquat pour l’équipement endommagé, et par un manque de financement pour les soutiens administratifs. Comme le besoin de Rangers canadiens augmente, nous devons agir immédiatement pour résoudre ces problèmes.

En plus de la table ronde permanente sur la recherche et le sauvetage dans l’Arctique prescrite dans la recommandation 46, le Comité a reçu un mémoire intitulé L’Inuit Nunangat a besoin d’un programme d’agents de sécurité publique communautaire, d’abord publié comme article dans la revue Options politiques, corédigé par les témoins Calvin Pedersen, Peter Kikkert et P. Whitney Lackenbauer. Les néo-démocrates soutiennent cette approche visant à renforcer la résilience des populations.

Investissements dans l’infrastructure dans l’Arctique

Le Nouveau Parti démocratique appuie fortement les recommandations 13, et souhaite que le libellé des recommandations aille plus loin pour obliger le gouvernement à donner la priorité aux investissements qui servent les peuples autochtones et les populations de l’Arctique. Maintenant que les attentes à l’égard des populations de l’Arctique ne cessent de croître, le passé de négligence et de préjudice du Canada doit être réconcilié avec des investissements significatifs. En donnant la priorité à la modernisation du NORAD et aux lacunes en matière d’infrastructures dans l’Arctique, nous pouvons répondre à de nombreux besoins communs.

Le général Wayne Eyre a dit au Comité : « [N]ous devons miser sur des solutions gagnant-gagnant. Investir dans la sécurité dans le Nord signifie qu’il faut non seulement viser la sécurité de l’ensemble du pays, mais surtout la sécurité dans le Nord. Par ailleurs, il faut rechercher des avantages économiques et des possibilités d’emploi pour les collectivités du Grand Nord et ouvrir d’autres possibilités comme sur le plan des communications. »

Par ailleurs, nous avons entendu le président et chef de la direction de Nunasi Corporation, Clint Davis, qui a précisé que les « Inuits y vivent depuis 5 000 ans, et notre présence ininterrompue étaye la souveraineté que le Canada peut revendiquer dans l’Arctique. […] [L]es priorités fédérales en matière de réconciliation et de sécurité nationale peuvent s’appuyer mutuellement dans l’Arctique. […] [L]es objectifs de sécurité dans l’Arctique ne peuvent être réalisés que grâce à des investissements bien planifiés dans l’infrastructure locale ».

Selon les néo-démocrates, le gouvernement doit utiliser les fonds alloués à la modernisation du NORAD pour combler les lacunes en matière d’infrastructures et de services dans l’Arctique. Nous devons accorder une plus grande attention à la crise de l’eau, à la crise du logement et à la crise des soins de santé dans les populations de l’Arctique; toutes ces crises constituent une menace pour la sécurité de l’Arctique.

Défense antimissile balistique et désarmement

Enfin, le Nouveau Parti démocratique rejette fermement la recommandation 3. Après avoir entendu les témoignages recueillis tout au long de cette étude, les néo-démocrates estiment qu’il est temps de mettre définitivement de côté la question du système de défense antimissile balistique. Voici un bref recueil de témoignages d’experts sur les systèmes de défense antimissile balistique :

Le général Wayne Eyre : « [J]e crois que les politiques en matière de défense antimissile balistique sont de moins en moins pertinentes. »

Jonathan Quinn, directeur général, Politique de défense continentale : « Bien que la politique canadienne en matière de défense antimissile balistique n’ait pas changé, le Canada a toujours joué un rôle important dans l’alerte contre les attaques de toutes les mesures aérospatiales. Nous continuerons de jouer ce rôle ».

Jody Thomas, conseillère en sécurité nationale et au renseignement, Bureau du Conseil privé : « Il est important d’avoir une vue d’ensemble de la menace que représentent les missiles et avoir une idée claire de la réaction appropriée pour l’Amérique du Nord, plutôt que de nous concentrer uniquement sur la défense antimissile balistique. ».

Lgén (à la retraite) Alain J. Parent : « Le système de défense antimissile balistique est un système américain seulement. Il n’a pas été conçu pour combattre la Russie ou la Chine. Il a été conçu principalement pour contrer la menace terroriste de la Corée du Nord. »

M. Adam Lajeunesse : « [L]a sécurité dans l’Arctique et la défense sont des enjeux très importants et nous devons y consacrer d’importants investissements, mais il faut bien comprendre la nature exacte de la menace. Ce que j’ai fait valoir, c’est qu’il n’y a pas, et qu’il n’y aura probablement pas, de menace posée par une grande puissance en Arctique. […] Je dis que le fait de mettre en place dans l’Arctique des systèmes de défense contre la Russie ou la Chine serait un gaspillage d’argent et une utilisation inefficace de nos ressources. Ce serait simplement une utilisation inefficace de ressources très limitées. »

Si la décision du premier ministre Paul Martin de ne pas adhérer au système de défense antimissile balistique continue de déranger les voix belliqueuses, les néo-démocrates ont compris à l’époque et comprennent aujourd’hui que l’adhésion au système de défense antimissile balistique des États-Unis est une erreur.

Tout d’abord, le système américain de défense contre les missiles balistiques a été explicitement conçu pour contrer la Corée du Nord, pays qui ne faisait pas partie de cette étude. Il est inapproprié et décevant que le Comité ait choisi d’intégrer cette conversation dans l’étude tout en refusant de discuter de manière adéquate du changement climatique.

Deuxièmement, les néo-démocrates ne croient pas que les coups de sabre dans l’Arctique avec des systèmes de défense contre les missiles balistiques ne feront rien d’autre qu’aggraver les tensions.

Enfin, les néo-démocrates croient aux principes du désarmement. Il y a plus de 50 ans, l’Union soviétique et les États-Unis ont conclu le traité sur les missiles antibalistiques afin de limiter le nombre de systèmes de missiles antibalistiques. Ce traité a été largement considéré comme nécessaire pour ralentir le développement rapide de têtes de missiles balistiques intercontinentaux à capacité nucléaire, car il supprimait la nécessité pour les superpuissances militaires de réagir contre les capacités défensives de l’autre partie.

Le retrait américain du traité sur les missiles antibalistiques en 2002 était une erreur. Nous avons assisté au développement rapide de missiles de croisière et de missiles hypersoniques qui sont utilisés dans l’invasion illégale de l’Ukraine par Poutine. Les néo-démocrates estiment que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour ralentir le développement de la nouvelle technologie des missiles, nous opposer à l’accumulation d’armes nucléaires et soutenir activement les efforts internationaux visant à promouvoir le désarmement nucléaire.