L’homme de la rue,
désorienté et impuissant devant le fatras de milliers de lois et
de règlements qui l’oppressent et restreignent de plus en plus sa
liberté, son droit à ses propres décisions, se trouverait
sans défense s’il n’avait pas un Parlement fort, actif et
vigoureux, comme il doit l’être.
G.W. Baldwin, député (Peace River)
(Débats, 10 décembre 1968, p. 3791)
L
’étude et l’adoption de
mesures législatives sont souvent considérées comme la
principale fonction du Parlement. Il n’est donc pas étonnant que le
processus législatif occupe la majeure partie de son
temps [1] .
Mais en quoi
consiste le processus législatif? Certains l’ont défini
comme une série d’actions qui aboutissent à la proclamation
d’une loi. Les étapes parlementaires, qui forment l’objet de
ce chapitre, sont les derniers chaînons d’un processus beaucoup plus
long qui commence par la proposition, la formulation et la rédaction
d’un projet de loi, habituellement par des organismes
extraparlementaires.
Au Parlement du Canada, comme dans toutes
les assemblées législatives qui s’inspirent du modèle
britannique, le mode d’adoption des lois est bien défini. Un projet
de loi doit franchir diverses étapes bien précises à la
Chambre des communes et au Sénat avant d’avoir force de loi. Dans
le jargon parlementaire, ces étapes forment ce qu’on appelle le
processus législatif. En adoptant un projet de loi, la Chambre des
communes et le Sénat demandent à la Couronne de proclamer que ce
texte énonce la loi du pays. Une fois que la sanction royale lui est
donnée, le projet de loi change de nature et devient un texte
législatif. Comme le processus par lequel une proposition
législative devient d’abord un projet de loi, puis une loi, se
déroule au Parlement, il s’ensuit que le résultat — le
texte législatif — est souvent appelé « loi du
Parlement » [2] .
Le processus commence traditionnellement
par le dépôt d’un projet de loi dans l’une ou
l’autre chambre et se termine par la cérémonie de la
sanction royale qui réunit les trois composantes du Parlement, à
savoir la Couronne, le Sénat et la Chambre des communes. Le processus est
complexe, mais la validation d’une loi vient de l’approbation du
même texte par les trois composantes du Parlement.
Ce chapitre examinera les étapes
qu’un projet de loi d’intérêt public doit franchir
avant de devenir loi. Les projets de loi d’intérêt
privé franchissent essentiellement les mêmes étapes, mais
ils doivent reposer sur une pétition et sont assujettis à
certaines règles
spéciales [3].
Historique
Grande-Bretagne
L’origine du processus
législatif remonte à l’ère médiévale.
Dans les premiers temps de la formation du Parlement britannique, les
requêtes des Communes en matière de législation
étaient adressées au roi sous la forme de
pétitions [4] .
Lorsque le roi convoquait le Parlement pour obtenir des crédits, les
Communes lui transmettaient alors, par écrit ou de vive voix, les
pétitions pour lesquelles, en retour, elles souhaitaient obtenir son
assentiment. Les pétitions accueillies favorablement par le
roi [5]
étaient
ensuite rédigées par ses conseillers sous forme de
statuts [6]
consignés dans un registre (le Statute Roll). Ces statuts devaient
exprimer le libellé de la pétition et la réponse du roi,
mais il arrivait souvent que le roi et ses conseillers prennent
l’initiative de modifier le libellé de la pétition de
façon substantielle et, dans certains cas, ne respectent pas la
réponse
donnée [7] .
Une étape importante du processus
fut franchie en 1414 lorsque les Communes demandèrent à Henri V
(1413-1422) d’être considérées « autant comme
partie consentante que comme pétitionnaires » et demandèrent
également que leurs pétitions, lorsque formulées sous forme
de statut, ne soient plus modifiées sans leur
consentement [8] .
Quelques années plus tard, sous le règne d’Henri VI
(1422-1461; 1470-1471), les Communes réussirent à faire instaurer
la pratique voulant que leurs requêtes en matière de
législation soient présentées au roi sous la forme de
projets de loi et elles obtinrent du roi l’assurance que ceux-ci ne
seraient pas modifiés sans leur
consentement [9] .
L’évolution du rôle des
Communes dans le processus législatif a aussi été
marquée par les changements qui furent apportés à la
formule d’édiction des statuts. Depuis le début du
règne d’Edouard III (1327-1377), les mots « à la demande
des Communes » étaient utilisés comme formule
d’édiction. Sous le règne d’Henri VI, les mots
« par autorité du Parlement » firent leur apparation dans les
textes de loi, consacrant ainsi l’influence grandissante des Communes dans
le processus
législatif [10] .
À partir du moment où il fut
admis que les statuts devaient refléter fidèlement les
requêtes des Communes en matière de législation, il devint
nécessaire d’établir des règles de procédure
devant guider la présentation et l’adoption des projets de loi.
À la fin du règne d’Elizabeth I (1558-1603), la pratique des
trois lectures, sans débat à l’étape de la
première lecture, et du renvoi du projet de loi à un comité
après la deuxième lecture, était déjà bien
établie [11] .
Canada
Avant la Confédération
Dans les années
précédant la Confédération, les assemblées
des colonies canadiennes s’appuyaient sur les traditions parlementaires
britanniques pour la conduite de leurs délibérations. Les
assemblées législatives du Haut et du Bas-Canada qui furent
instituées par l’ Acte constitutionnel de 1791
s’inspirèrent de la procédure parlementaire
britannique [12] .
Le
processus législatif de l’Assemblée du Haut-Canada
n’était cependant pas aussi élaboré que celui de
l’Assemblée du Bas-Canada qui avait, dès 1792, adopté
un plus grand nombre de règles de procédure pour l’adoption
de ses projets de
loi [13] .
Le premier code de procédure
canadien, qui parut en mars 1793 sous le titre Règles et
règlements de la Chambre d’Assemblée du
Bas-Canada [14],
prévoyait des dispositions devant régir autant la
présentation que l’adoption des projets de loi de cette
assemblée. À cette époque, on confiait souvent à des
comités le soin d’élaborer un projet de
loi [15] .
Tout projet
de loi devait être présenté par voie de motion, recevoir
trois lectures dans les deux
langues [16]
et ne
pouvait faire l’objet d’amendements ni être renvoyé
à un comité avant d’avoir subi l’étape de la
deuxième
lecture [17].
Tout
projet de loi devait également avoir été imprimé
avant la deuxième lecture. Après avoir été
adoptés par l’Assemblée, les projets de loi étaient
transmis au Conseil législatif pour recevoir l’assentiment des
membres du Conseil et, éventuellement, la sanction
royale [18] .
Lors de l’union du Haut et du
Bas-Canada en 1840, les législateurs durent s’entendre sur une
même procédure. La plupart des règles adoptées
à ce moment-là furent celles qui étaient en vigueur
à l’Assemblée du
Bas-Canada [19] .
La
procédure relative à l’adoption des projets de loi
d’intérêt public demeura essentiellement la
même [20] .
On
adopta cependant plusieurs dispositions pour traiter des projets de loi
d’intérêt
privé [21] .
Depuis la Confédération
Lorsque la Chambre des communes du Canada
s’est réunie la première fois, le 6 novembre 1867, elle
entreprit ses travaux sous le régime des règlements de
l’Assemblée législative de la Province du Canada, lesquels
comprenaient déjà des dispositions relatives aux
délibérations sur les projets de loi. Le 20 décembre 1867,
elle entérinait le rapport d’un comité spécial qui
avait été chargé d’aider le Président à
établir des règles de procédure pour la Chambre. Le seul
changement important qui fut alors apporté aux règles de
l’ancienne Assemblée législative du Canada visait
principalement le processus d’examen des projets de loi
d’intérêt
privé [22] .
Conséquemment, les articles qui figuraient dans le Règlement de
l’ancienne Assemblée législative du Canada, sous la rubrique
« Délibérations sur les
Bills » [23] ,
furent reproduits intégralement dans la première édition du
Règlement de la Chambre des communes.
Quelques-unes des règles relatives
au processus législatif en vigueur à la
Confédération le sont encore de nos jours. On peut citer notamment
les articles du Règlement visant à interdire la
présentation de projets de loi en blanc ou dans une forme
incomplète, et ceux qui stipulent que tout projet de loi doit être
soumis à trois lectures en des jours différents, être
imprimé dans les deux langues officielles et être certifié
par le Greffier de la Chambre à chacune des
lectures [24] .
Depuis 1867, les règles de
procédure qui régissent le processus législatif ont fait
l’objet de nombreuses modifications visant à faciliter
l’examen des projets de loi d’intérêt public, à
élargir le rôle des comités et à permettre une plus
grande participation des députés. Par exemple, jusqu’en
1913, un député devait solliciter l’autorisation de la
Chambre s’il souhaitait présenter un projet de loi. Cette motion
pouvait faire l’objet d’un débat et
d’amendements [25] .
En avril 1913, la Chambre décida que les motions d’autorisation
n’étaient plus sujettes à débat ni à
amendements [26] .
De
plus, en 1955, elle ajouta à son Règlement une autre disposition
afin de préciser la pratique voulant que le député qui
proposait une telle motion soit autorisé à donner une brève
description du projet de
loi [27] .
En 1991, la
Chambre modifia à nouveau le Règlement pour faire en sorte que les
motions d’autorisation soient réputées adoptées sans
débat ni amendement ni mise aux
voix [28] .
Certaines règles de procédure
furent également modifiées afin de permettre à la Chambre
d’expédier ses affaires. De la Confédération
jusqu’en 1927, il n’y avait pratiquement aucune limite de temps pour
la durée des discours des députés. Les débats sur
les projets de loi pouvaient parfois s’étendre sur plusieurs
jours [29] .
En 1927, la
Chambre adopta une règle qui imposait une limite aux discours de la
majorité des
députés [30] .
Cette règle fondamentale fut maintenue sans modification jusqu’en
1982, année où la Chambre incorpora au processus législatif
des dispositions spécifiques devant régir la durée des
discours et la période des questions et
observations [31] .
Au fil des ans, divers comités
spéciaux se sont penchés sur les règles de procédure
devant régir le processus
législatif [32] .
En 1968, la Chambre confiait au Comité spécial de la
procédure et de l’organisation de la Chambre le soin de
réviser en profondeur le processus
législatif [33] .
Dans son troisième rapport, le Comité recommanda des changements
tendant à supprimer les pratiques
désuètes [34] ,
à donner davantage aux députés l’occasion de prendre
part de façon significative à l’étude et à la
mise en forme des projets de loi, et à définir les étapes
décisives de l’adoption d’un projet de
loi [35] .
Parmi les
principales dispositions qui furent alors adoptées, on compte notamment
le renvoi aux comités permanents ou spéciaux des projets de loi
autres que ceux fondés sur des motions de subsides et de voies et moyens,
le rétablissement de l’étape du rapport comme stade de
délibérations dans le processus législatif et, lors de
l’étude menée à cette étape, la
réduction de la durée maximale de la majorité des discours
ainsi que l’autorisation accordée au Président de choisir et
de regrouper les
amendements [36] .
Au début des années 1980, des
comités spéciaux ayant comme mandat d’examiner la
procédure de la Chambre se sont de nouveau penchés sur le double
enjeu de l’accélération et de l’approfondissement de
l’examen des projets de loi et de l’élargissement du mandat
des comités. En mars 1983, une étude recommandait la
création de comiés législatifs qui seraient chargés
d’examiner à fond les projets de
loi [37] .
Bien que les
recommandations émanant de cette étude n’aient pas
été adoptées, le Comité spécial sur la
réforme de la Chambre proposa, en 1984, une recommandation visant la
création de comités législatifs et recommanda de plus que
les projets de loi fondés sur des motions de voies et moyens soient
également renvoyés à des comités législatifs.
Ce comité fit valoir que l’étude de projets de loi
complexes, en petits comités constitués d’un groupe de
députés spécialisés, était
préférable à leur examen en comité
plénier [38] .
Ces deux recommandations furent intégrées aux modifications que
l’on apporta au Règlement le 27 juin
1985 [39] .
Quelques années plus tard, en avril
1991, la Chambre apporta des changements substantiels à son
Règlement dans le but notamment de permettre l’adoption automatique
des motions de dépôt et de première lecture des projets de
loi, de renvoyer, sur proposition d’un ministre après consultation,
un projet de loi à un comité permanent ou spécial
plutôt qu’à un comité législatif,
d’exiger un délai de deux jours de séance plutôt que
de 48 heures entre le moment où il a été fait rapport
d’un projet de loi et celui du début de l’étude
à l’étape du rapport, et d’exiger un préavis
écrit de 24 heures pour toute motion relative à des amendements
apportés à un projet de loi par le
Sénat [40] .
Au début de la 35e
législature en 1994, le Règlement fut à nouveau
modifié pour apporter une plus grande souplesse au processus
législatif [41] .
On y ajouta de nouvelles dispositions relatives à
l’élaboration et au dépôt de projets de loi par des
comités et on offrit l’option de déférer les projets
de loi à des comités permanents, spéciaux, ou
législatifs. L’obligation de déférer à un
comité plénier tout projet de loi fondé sur une motion de
subsides était cependant maintenue. Par ailleurs, il devenait possible
pour un ministre de proposer le renvoi d’un projet de loi
d’initiative ministérielle à un comité avant la
deuxième lecture.
Bien que la Chambre soit revenue depuis
à la pratique antérieure qui consistait à renvoyer
l’examen de projets de loi uniquement à des comités
permanents ou spéciaux, les dispositions relatives au renvoi des projets
de loi à des comités législatifs n’ont pas
été modifiées. Elles sont toujours en vigueur, mais
n’ont jamais été utilisées depuis les changements au
Règlement en 1994.
Types de projets de loi
Il existe deux principales
catégories de projets de loi, les projets de loi
d’intérêt public et les projets de loi
d’intérêt privé. Alors que les projets de loi
d’intérêt public portent sur des questions
d’intérêt
national [42] ,
les
projets de loi d’intérêt privé visent à
accorder des pouvoirs, des droits spéciaux ou des dérogations
à une ou plusieurs personnes, y compris à des personnes
morales [43] .
Projets de loi d’intérêt public
Les projets de loi
d’intérêt public peuvent être d’origine
ministérielle; on les désigne alors comme étant des
« projets de loi émanant du gouvernement » ou des « projets
de loi d’initiative ministérielle ». Ils peuvent
également émaner de simples députés; on dit alors
que ce sont des « projets de loi émanant des
députés » ou des « projets de loi d’initiative
parlementaire ».
Projets de loi d’initiative ministérielle
Le projet de loi d’initiative
ministérielle est un texte que le gouvernement soumet au Parlement en vue
d’être approuvé et possiblement modifié avant de
devenir loi. Il porte sur une question d’intérêt public et
peut inclure des dispositions d’ordre financier.
Projets de loi d’initiative parlementaire
Le projet de loi d’initiative
parlementaire est un texte qui est soumis au Parlement par un
député qui n’est pas ministre en vue d’être
approuvé (et possiblement modifié) avant de devenir loi. La
plupart des projets de loi de ce type émanent de la Chambre des communes,
mais un certain nombre d’entre eux sont transmis aux Communes par le
Sénat.
L’étude des projets de loi
d’initiative parlementaire ne peut avoir lieu que pendant l’heure
réservée aux « Affaires émanant des
députés » [44].
Avant
qu’un tel projet de loi puisse être étudié par la
Chambre, il doit avoir été choisi à la suite d’un
tirage au sort comme le prévoit le
Règlement [45] .
Au moins deux semaines doivent s’écouler entre la première
et la deuxième lecture de ce type de projet de
loi [46] .
Projets de loi d’intérêt privé
Le projet de loi
d’intérêt privé a pour but de soustraire une personne
ou un groupe de personnes, y compris une personne morale, à
l’application d’une
loi [47] .
Il ne peut
pas être présenté par un ministre et doit être
fondé sur une pétition qui aura été signée
par les intéressés. La distinction entre un projet de loi
d’intérêt public et un projet de loi
d’intérêt privé est principalement basée sur
l’objet du projet de loi.
La plupart des projets de loi
d’intérêt privé sont présentés au
Sénat, mais peuvent aussi, bien que ce soit plus rare, être
déposés à la Chambre des communes. Une fois devant la
Chambre, ils sont alors traités dans le cadre des affaires émanant
des députés puisqu’ils sont proposés par des
députés qui n’occupent pas de fonctions
ministérielles. Même si les projets de loi
d’intérêt privé doivent franchir les étapes
communes aux mesures législatives, d’autres étapes
précèdent leur
dépôt [48].
Les projets de loi qui semblent être
à la fois d’intérêt public et
d’intérêt privé sont désignés comme
étant des projets de loi hybrides ou « projets de loi mixtes ».
Bien que l’usage parlementaire britannique accepte ce genre de projet de
loi, il n’en est pas ainsi au Parlement
canadien [49] .
La
procédure parlementaire canadienne exige en effet que tous les projets de
loi soient classés dans la catégorie des projets de loi
d’intérêt public ou dans celle des projets de loi
d’intérêt
privé [50] .
Lorsque se trouvent réunies dans un même projet de loi des
considérations d’intérêt public et
d’intérêt privé, ce projet de loi est alors
traité comme un projet de loi d’intérêt
public [51] .
Forme de projet de loi
L’adoption d’une loi par le
Parlement est l’aboutissement d’un long processus qui commence par
la proposition, la formulation et la rédaction d’un projet de loi.
La rédaction d’un projet de loi, en particulier, est l’une
des étapes les plus importantes du processus. Les décideurs et les
rédacteurs doivent alors prendre en considération certaines
contraintes qui, si non respectées, peuvent avoir des conséquences
sur l’interprétation et l’application de la loi et sur le bon
déroulement du processus législatif.
Cadre de l’intervention législative
La Constitution du Canada fournit un
certain nombre des règles qui définissent le cadre de
l’intervention législative et imposent au gouvernement et au
Parlement des
limites [52] .
La
dualité juridique, qui constitue l’une des
spécificités du Canada, pourra avoir des répercussions
différentes sur l’application d’une loi
fédérale et son interprétation selon que l’on vise un
territoire qui est régi par la common law ou par le droit
civil [53].
Les projets de loi doivent être
adoptés, publiés et imprimés simultanément en
français et en anglais. Suivant l’article 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867, ceux-ci doivent être établis dans
les deux langues dans l’ensemble du processus législatif, y compris
à l’étape de la première
lecture [54] .
L’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1982 stipule en outre
que les deux versions des lois ont également force de
loi.
Rédaction des projets de loi
Projets de loi d’initiative ministérielle
La production d’une mesure
ministérielle s’amorce lorsque le gouvernement décide de
transformer une initiative politique en proposition
législative [55] .
Le ministère de la Justice rédige alors un avant-projet de loi
selon les instructions du Conseil des
ministres [56] .
Le
ministre de la Justice est tenu d’examiner tous les projets de loi
d’initiative ministérielle et d’en vérifier la
compatibilité avec la Déclaration canadienne des droits et
la Charte canadienne des droits et
libertés [57] .
Lorsque la rédaction du projet de
loi dans les deux langues officielles est terminée, celui-ci doit
être approuvé par le Cabinet avant son dépôt au
Parlement. Le leader du gouvernement aux Communes est responsable de
l’examen du projet de loi et de la recommandation quant à son
dépôt au Parlement. Généralement, il demande au
Cabinet de lui déléguer cette
tâche [58] .
Projets de loi d’initiative parlementaire
Les
députés qui ne font pas partie du Cabinet peuvent présenter des projets de loi
qui seront étudiés dans le cadre des affaires émanant des députés. Les députés
ont accès aux services législatifs, placés sous l’autorité du Président de la
Chambre, pour la rédaction de leurs projets de loi. Avant qu’un projet de loi
soit déposé à la Chambre, les services législatifs de la Chambre des communes en
vérifient la forme et la conformité aux conventions législatives et
parlementaires [59].
Projets de loi d’intérêt privé
Parrainé par un simple député, le projet de loi d’intérêt
privé repose sur une pétition qui doit, dans un premier temps, avoir fait
l’objet d’un rapport favorable par l’examinateur des pétitions ou par le Comité
permanent de la procédure et des affaires de la Chambre [60] .
Bien que la
forme de ce type de projet de loi soit identique à celle du projet de loi
d’intérêt public, le projet de loi d’intérêt privé doit cependant comporter un
préambule, ce qui n’est pas obligatoire pour le projet de loi d’intérêt
public [61] .
Le Règlement
de la Chambre prévoit également certaines règles de rédaction qui visent en
particulier les projets de loi ayant pour objet une loi de constitution en
corporation et ceux portant modification ou abrogation de lois
existantes [62] .
Rédaction par un comité
Un
comité peut se voir confier le mandat d’élaborer et de déposer un projet de
loi [63] .
Un comité peut
aussi être créé à cette fin précise. La motion tendant à l’élaboration d’un
projet de loi par un comité peut être proposée par un ministre ou par un simple
député. Le comité qui aura été chargé d’élaborer un projet de loi devra
recommander, dans son rapport à la Chambre, les principes, l’étendue et les
dispositions générales du projet de loi et, s’il le juge à propos, son
libellé [64] .
Si la Chambre
adopte le rapport du comité, la motion d’adoption constituera l’ordre de dépôt
du projet de loi fondé sur ce rapport.
Autres caractéristiques de rédaction
Les
projets de loi peuvent aussi, selon le but visé par la mesure législative,
revêtir d’autres caractéristiques de rédaction.
- Textes nouveaux : Projets de loi résultant d’une décision politique ou, dans
certains cas, de traités, de conventions, d’accords, de l’acceptation de
recommandations figurant dans un rapport de groupe de travail ou de commission
royale d’enquête, de l’exécution de mesures administratives ou de situations
d’urgence [65] .
- Textes portant refonte : Projets de loi résultant de l’application d’une
disposition de réexamen d’une loi (certaines lois stipulent qu’elles doivent
être révisées après un certain temps) ou de l’évolution de la conjoncture
économique ou sociale [66] .
- Textes modificatifs de lois en vigueur : Projets de loi visant à modifier des
lois en vigueur. Les modifications peuvent être de fond ou simplement de nature
formelle ou administrative.
- Projets de lois correctives : Une initiative ayant pour but d’éliminer dans les
lois en vigueur les anomalies, les contradictions, les archaïsmes ou erreurs
qu’elles peuvent contenir et de leur apporter certaines modifications
mineures [67] .
- Projets de loi de voies et moyens : Une initiative fondée sur des motions de
voies et moyens et ayant pour objet l’imposition d’une nouvelle taxe ou d’un
nouvel impôt, le maintien d’une taxe ou d’un impôt qui expire, l’augmentation
d’une taxe ou d’un impôt existant ou l’élargissement du champ d’application
d’une taxe ou d’un impôt. Ces projets de loi sont alors régis par des
dispositions spécifiques du Règlement [68] .
Seul un
ministre peut présenter un projet de loi de voies et moyens [69] .
- Projets de loi de crédits : Une initiative présentée à la Chambre suite à
l’adoption du Budget des dépenses principal ou supplémentaire ou de crédits
provisoires. Ces projets de loi sont aussi régis par des dispositions
spécifiques du Règlement [70] .
Seul un
ministre peut présenter un projet de loi de crédits.
- Projets de loi portant pouvoir d’emprunt : Une initiative visant à autoriser
l’émission d’emprunts lorsque les recettes de l’État n’arrivent pas à couvrir
les dépenses du gouvernement [71] .
- Projet de loi fictif : Un projet de loi fictif ou pro forma est présenté par le premier ministre au début de chaque session. Il
vise à affirmer le droit de la Chambre de délibérer et de légiférer quels que
soient les motifs de convocation énoncés dans le discours du Trône. Intitulé Loi concernant la prestation des serments d’office, il
porte le numéro C-1 et n’est pas imprimé. Il reçoit une première lecture, mais
ne fait pas l’objet d’une deuxième lecture [72] .
- Avant-projet de loi : Ce terme est utilisé pour désigner l’ébauche d’un projet de
loi qui n’a pas encore été déposé dans l’une ou l’autre chambre. À l’occasion,
il arrive que l’ébauche d’un projet de loi d’initiative ministérielle soit
soumise à un comité pour étude. L’étape de la première lecture n’ayant pas
encore eu lieu, le comité peut ainsi en étudier les dispositions législatives,
sans être restreint par les règles du processus législatif, et recommander les
changements qui devraient y être apportés. Le gouvernement pourra ainsi tenir
compte du rapport du comité lorsqu’il finalisera l’ébauche du projet de
loi.
- Projets de loi omnibus : Malgré l’utilisation fréquente de l’expression, il
n’existe pas de définition précise d’un projet de loi omnibus, aussi appelé
« projet de loi composite ». En général, un projet de loi omnibus vise à modifier,
à abroger ou à adopter plus d’une loi et il se caractérise par diverses parties
indépendantes, mais ayant néanmoins un lien entre elles [73] .
Tout en
cherchant à créer ou à modifier plusieurs lois disparates, le projet de loi
omnibus a cependant « un seul principe de base et un seul objet fondamental qui
justifie toutes les mesures envisagées et qui rend le projet de loi intelligible
à des fins parlementaires » [74] .
Une des
raisons invoquées pour déposer un projet de loi omnibus consiste à vouloir
regrouper dans un même projet de loi toutes les modifications législatives
découlant de l’adoption d’une politique afin de faciliter le débat
parlementaire [75] .
L’utilisation des projets de loi omnibus est propre au
Canada. Le Parlement britannique adopte de tels projets de loi, mais sa pratique
législative est différente, notamment en raison d’un contrôle beaucoup plus
rigoureux qui est exercé sur la durée des débats. Au Parlement australien, la
pratique semble contraire (la procédure permet de regrouper les projets de loi
connexes aux fins du débat et de la mise aux voix) [76] .
On ne
sait exactement à quelle époque les premiers projets de loi omnibus ont fait
leur apparition, mais comme en témoigne le dépôt d’un projet de loi d’intérêt
privé visant à confirmer deux accords ferroviaires distincts, l’usage semble
remonter à 1888 [77] .
Plusieurs
projets de loi omnibus ont été déposés et adoptés sans que leur forme soulève,
de la part des députés, la moindre objection sur le plan de la
procédure [78] .
Il
est en effet tout à fait admissible, sur le plan de la procédure, qu’un projet
de loi modifie, abroge ou édicte plusieurs lois à condition d’en donner le
préavis requis, de l’assortir de la recommandation royale (au besoin) et de
respecter la forme exigée [79] .
Pour ce qui
est, toutefois, d’amener la présidence à diviser un projet de loi simplement
parce qu’il est complexe ou de caractère composite, nombre de précédents
permettent de conclure que la pratique canadienne n’autorise rien de
tel [80] .
Refusant les raisons invoquées par le gouvernement, les
députés ont souvent maintenu que certains projets de loi omnibus n’étaient pas
recevables. Ils ont souvent invoqué leur « ancien privilège » de voter séparément
sur chacune des propositions que présente une question complexe. Cependant, les
Présidents de la Chambre ont précisé que leur pouvoir de diviser les questions
complexes ne devait viser que les motions de fond, et non pas les motions ayant
trait à la progression des projets de loi [81] .
Les députés
font parfois valoir, pour en réclamer la division, que les projets de loi
omnibus renferment plus d’un principe [82] .
À l’occasion,
les députés soutiennent aussi que le titre long d’un projet de loi omnibus
devrait faire mention de toutes les lois qu’il tend à modifier. Sur ce point, la
présidence a jugé qu’il n’était pas nécessaire qu’il en soit ainsi [83] .
Des
motions portant division de projets de loi omnibus ont parfois été proposées en
comité. Les présidents de comité ont jugé irrecevables les motions visant à
diviser un projet de loi. À moins d’avoir reçu une instruction de la Chambre, un
comité n’est autorisé qu’à faire rapport du projet de loi avec ou sans
amendement [84] .
Les présidents
de comité ont aussi rejeté des motions visant à permettre à un comité de
présenter deux rapports sur un même projet de loi, chacun devant porter sur des
sujets distincts, ce qui aurait eu pour effet de diviser le projet de
loi [85] .
Toutefois, les
présidents ont jugé recevables les motions visant à permettre à un comité de
demander à la Chambre une instruction l’autorisant à diviser un projet de
loi [86] .
Malgré son refus à diviser les projets de loi omnibus, la
présidence a exprimé de profondes inquiétudes quant au droit des députés de bien
se faire entendre [87] .
Aussi a-t-elle
parfois senti le besoin de leur suggérer les recours dont ils disposent pour
parer au dilemme créé par le fait de devoir approuver en même temps plusieurs
dispositions législatives [88] .
Il
n’est jamais arrivé que la présidence ait décidé qu’un projet de loi devait être
divisé en raison de sa complexité. Trois cas présentent cependant un intérêt
particulier. En 1981, durant l’étude du projet de loi C-54 visant à modifier la
Loi de l’impôt sur le revenu et à renouveler le
pouvoir d’emprunt, le Président Sauvé a ordonné que la partie 1 du projet de
loi, relative au pouvoir d’emprunt, soit radiée, parce que le préavis requis
faisait défaut [89] .
Plus tard au
cours de la même session, un autre projet de loi modificatif qui englobait à la
fois des questions fiscales et le pouvoir d’emprunt fut déposé (le projet de loi
C-93). Devant l’insistance de l’opposition, le gouvernement décida de retirer le
projet de loi le 7 mai 1982 et présenta deux mesures législatives distinctes le
10 mai 1982 [90] .
La division du projet de loi omnibus fut le
résultat, dans ce cas-ci, du processus politique et non pas du recours à la
procédure. Le cas le plus notable est celui du projet de loi C-94 sur la
sécurité énergétique. Le 2 mars 1982, suite à un rappel au Règlement qui avait
été soulevé la veille pour que la présidence procède à la division du projet de
loi, le Président Sauvé déclara qu’il n’existait aucun précédent lui permettant
de diviser le projet de loi [91] .
C’est à ce moment que se produisit l’épisode des
« cloches » qui poussa par la suite le gouvernement à proposer, et la Chambre à
adopter, une motion portant division du projet de loi en huit mesures
législatives distinctes [92] .
La division du projet de loi omnibus fut le
résultat, encore une fois, de l’interaction politique.
Blancs et forme incomplète
Depuis la Confédération, la présidence a établi que la
présentation de projets de loi comprenant des passages en blanc ou dans une
forme incomplète est manifestement contraire au Règlement [93] .
Un projet de
loi en blanc ou dans une forme incomplète est un projet de loi qui n’a qu’un
titre ou dont la rédaction n’est pas terminée [94] .
Bien que cette
disposition mette l’accent sur les erreurs relevées au moment de la
présentation, des députés ont porté ces défauts ou ces anomalies à l’attention
de la présidence à diverses étapes de l’étude des projets de loi. Le Président a
déjà donné instruction d’annuler l’ordre de deuxième lecture de certains projets
de loi après avoir découvert qu’on ne leur avait pas donné leur forme finale et
qu’ils n’étaient donc pas prêts à être présentés [95] .
À
l’occasion, certains projets de loi comportent des dispositions qui font
référence à des mesures législatives n’ayant pas encore été adoptées. En avril
1970, des députés ont soutenu qu’un projet de loi devait être considéré comme
incomplet et ne devait pas être étudié parce qu’il incorporait des dispositions
relatives à deux propositions de loi qui n’avaient pas encore été adoptées. Bien
que le Président Lamoureux ait jugé le projet de loi conforme, il a précisé que
cette question pourrait être à nouveau soulevée à l’étape de la troisième
lecture si, à cette étape, la Chambre était appelée à entériner un texte qui
dépendait de l’adoption d’autres mesures législatives [96] .
Impression et réimpression des projets de loi
Après
que le projet de loi a subi l’étape du dépôt et de la première lecture, il est
imprimé dans les heures qui suivent et distribué aux députés. Tout projet de loi
doit être imprimé dans les deux lngues officielles [97] .
Le projet de
loi sera réimprimé après l’étape de l’examen en comité, si celui-ci a fait
l’objet d’amendements et que le comité en a ordonné la réimpression. Il servira
alors de document de travail à l’usage de la Chambre à l’étape du rapport. Après
adoption à l’étape de la troisième lecture, il sera réimprimé à l’intention du
Sénat, tel qu’adopté par la Chambre dans sa forme finale. Enfin, il sera
réimprimé sous forme de loi après avoir reçu la sanction royale. Il paraîtra
ensuite dans la Gazette du Canada et, à la fin de
l’année, dans le Recueil des lois annuelles [98].
Changements rédactionnels
Dans
le passé, la présidence a clairement établi que lorsque la Chambre est saisie
d’un projet de loi, celui-ci devient sa propriété et ne peut subir de
modifications importantes, à moins qu’elles ne soient faites par la Chambre
elle-même. Seuls les « simples changements de rédaction » sont autorisés [99] .
Au moyen d’une
rectification au projet de loi, le Président [100]
peut faire
corriger toute erreur d’impression ou faute de copiste évidente, à n’importe
quelle étape de l’étude du projet de loi [101] .
Par contre,
aucun changement de fond ne peut être apporté au libellé qu’avait un projet de
loi au moment de sa présentation ou lorsqu’un comité en a fait rapport, sauf au
moyen d’un amendement adopté par la Chambre [102] .
Structure des projets de loi
Divers éléments composent le projet de loi. Certains sont
essentiels ou fondamentaux, comme le titre; d’autres sont facultatifs, comme le
préambule. Voici une description des divers éléments constitutifs d’un projet de
loi :
Numéro
Lorsqu’un projet de loi est déposé à la Chambre au cours
d’une session, un numéro lui est attribué afin d’en faciliter la référence et la
classification [103] .
Les projets de
loi d’initiative ministérielle sont numérotés consécutivement de C-2 à
C-200 [104]. Les projets de
loi d’initiative parlementaire sont, pour leur part, numérotés consécutivement
de C-201 à C-1000. Bien qu’ils émanent rarement de la Chambre, les projets de
loi d’intérêt privé sont numérotés à partir de C-1001. Afin de pouvoir
différencier les projets de loi déposés dans l’une ou l’autre des deux chambres
du Parlement, le numéro attribué aux projets de loi présentés au Sénat commence
par un « S » plutôt que par un « C ». Ceux-ci sont numérotés consécutivement à
partir de S-1, qu’ils soient d’initiative ministérielle, d’initiative
parlementaire ou d’intérêt privé, et ne sont pas renumérotés ou réimprimés
lorsqu’ils sont transmis aux Communes.
Titre
Le
titre est un élément essentiel du projet de loi. Un projet de loi peut comporter
deux titres : un titre intégral et un titre abrégé [105] .
Le titre
intégral apparaît à la fois sur la page couverture du projet de loi, sous le
numéro attribué au projet de loi, et au haut de la première page du document. Il
expose en termes généraux l’objet du projet de loi et doit en refléter
correctement le contenu. Le titre abrégé est surtout utilisé aux fins de
citation et ne couvre pas nécessairement tous les aspects du projet de
loi [106] .
L’article
premier du projet de loi énonce habituellement le titre abrégé (sauf dans le cas
des projets de loi modifiant d’autres lois qui ne comportent pas de titre
abrégé).
Préambule
Le
projet de loi comporte parfois un préambule qui expose les buts visés et les
motifs de la présentation du projet de loi [107] .
Le préambule
figure entre le titre long et la formule d’édiction.
Formule d’édiction
Partie essentielle du projet de loi, la formule d’édiction
indique sous quelle autorité la loi est établie. Elle consiste en un bref
paragraphe qui suit le titre intégral et précède les dispositions du projet de
loi : « Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre
des communes du Canada, édicte : ». En cas de
préambule, le formule d’édiction s’y rattache [108] .
Article
Élément fondamental du projet de loi, l’article se
subdivise parfois en paragraphes, puis en alinéas et même en
sous-alinéas [109]. Un projet de
loi peut ou non comporter des parties, des sections ou des sous-sections, mais
la numérotation des articles sera continue d’un bout à l’autre du texte.
L’article ne devrait comporter qu’une seule idée, laquelle sera le plus souvent
exprimée par une seule phrase. Plusieurs idées voisines seront quant à elles
regroupées en autant de paragraphes sous un même article [110] .
Disposition interprétative
Un
projet de loi comprend parfois des définitions ou des règles
interprétatives [111] .
Celles-ci
donnent la définition légale des termes clés utilisés dans le texte, et leur
application, et figurent souvent parmi les premiers articles d’un projet de loi.
Rien n’exige cependant que le texte comporte des dispositions
interprétatives.
Disposition d’entrée en vigueur
Une
disposition d’entrée en vigueur peut préciser à la fin du projet de loi quand
celui-ci ou certaines de ses dispositions entreront en vigueur. Il arrive
parfois qu’une mesure soit adoptée par les deux chambres du Parlement, reçoive
la sanction royale, et n’entre pas immédiatement en vigueur si le texte précise
qu’elle n’entrera en vigueur qu’à une date donnée (autre que la date de la
sanction royale) ou à une date fixée par décret. Sinon, le projet de loi entre
en vigueur le jour de sa sanction.
Annexes
Un
projet de loi peut comporter des annexes qui apportent des précisions
essentielles à certaines dispositions du projet de loi. Il existe deux types
d’annexes [112] :
celles qui
comprennent des éléments ne pouvant être transposés sous forme d’articles comme,
par exemple, les tableaux, les graphiques, les listes, les cartes
géographiques [113] ,
et celles qui
renferment le libellé d’un accord qui relève des prérogatives de la Couronne
comme, par exemple, les traités et les conventions [114] .
Notes explicatives
Lorsqu’un projet de loi vise à modifier une loi existante,
les rédacteurs insèrent des notes qui servent à expliquer les modifications
apportées par le projet de loi. Ces notes fournissent entre autres le texte
original des dispositions visées par le projet de loi. Elles sont considérées
comme ne faisant pas partie du projet de loi et disparaissent après la première
impression du projet de loi [115] .
Sommaire
Le
sommaire est un résumé général du contenu du projet de loi. Il consiste en « un
résumé clair, factuel et impartial de l’objet du projet de loi et de ses
principales dispositions [116] »
et vise à
améliorer la compréhension du texte. Il ne fait pas partie du texte mais figure
séparément au début du projet de loi. Une fois que le projet de loi aura été
adopté, il figurera également sur une page précédant le texte de loi [117] .
Notes marginales
Les
notes marginales consistent en une courte explication inscrite dans la marge du
projet de loi. Elles ne font pas partie du projet de loi, n’y figurant qu’à
titre de repère ou d’information [118] .
Soulignements et traits verticaux
Dans
un projet de loi modifiant une loi en vigueur, le nouveau texte est signalé par
un soulignement, lorsqu’il s’agit de longs passages, ou au moyen d’un trait
vertical (dans la marge à gauche des nouveaux articles, paragraphes ou alinéas).
Lors de la réimpression d’un projet de loi qui a fait l’objet de modifications
en comité, seuls les ajouts apportés depuis la dernière impression sont signalés
de cette façon.
Rubriques
Pour
faciliter la tâche du lecteur, les rédacteurs législatifs insèrent des rubriques
ici et là dans le texte. Ces rubriques ne sont toutefois pas considérées comme
faisant partie du projet de loi et ne sauraient donc faire l’objet
d’amendements [119] .
Table des matières
Les
rédacteurs législatifs ajoutent parfois, au début ou à la fin d’un projet de
loi, une table des matières qui n’est pas considérée comme faisant partie du
projet de loi.
Recommandation royale
Les
projets de loi qui entraînent la dépense de deniers publics requièrent une
recommandation royale [120] .
Celle-ci est
donnée par le gouverneur général. Elle est généralement communiquée à la Chambre
avant le dépôt du projet de loi et doit être publiée dans le Feuilleton des Avis et dans le projet de loi ou annexée
à celui-ci [121] .
Elle ne fait
pas partie du projet de loi, mais y figure séparément au début [122] .
Après la
première lecture du projet de loi, elle est reproduite dans les Journaux. La recommandation royale ne peut être obtenue
que par le gouvernement.
Étapes du processus législatif
Un
projet de loi franchit toutes les étapes du processus législatif par « une longue
série de motions normalisées » sur lesquelles la Chambre doit se prononcer
favorablement avant que le projet de loi puisse devenir loi [123] .
C’est sur ces
motions, et non pas sur le projet de loi, que portent les décisions et les
débats de la Chambre. Ces étapes « constituent un processus simple et logique où
chaque étape transcende la précédente, de sorte que même si les principales
motions — que le projet de loi soit lu une première (une deuxième ou une
troisième) fois — sont semblables en apparence, et semblent répétitives, leurs
sens diffèrent grandement [124] ».
D’autre part,
la Chambre ne se prononce définitivement en faveur du projet de loi qu’à la
dernière étape, lorsqu’elle décide de laisser le projet de loi sortir de son
enceinte [125] .
Le
Règlement de la Chambre exige que tout projet de loi fasse l’objet de trois
lectures, en des jours différents, avant d’être adopté [126] .
La coutume qui
consiste à soumettre tout projet de loi à trois lectures distinctes découle
d’une ancienne pratique parlementaire qui trouve ses origines au
Royaume-Uni [127] .
À l’époque où
la technologie ne permettait pas encore de reproduire les documents en grand
nombre et à peu de frais, les projets de loi étaient présentés sous forme
manuscrite, et donc en un seul exemplaire. Afin que les députés puissent prendre
connaissance de leur contenu, le Greffier leur faisait lecture du texte. La
« lecture » d’un projet de loi était donc prise au sens littéral [128] .
De
nos jours, le texte d’un projet de loi n’est plus lu, mais la forme d’une
lecture est encore conservée. Lorsque le Président déclare que la motion portant
première lecture a été adoptée, un greffier au Bureau se lève et prononce les
mots « Première lecture du
projet de loi », indiquant ainsi que l’ordre de la Chambre a été respecté. Le
même scénario est répété lorsque la Chambre ordonne la deuxième puis la
troisième lecture du projet de loi.
Une
attestation de lecture doit être apposée à tout projet de loi à chacune des
trois lectures, au moment de son adoption. Le Greffier de la Chambre assume la
responsabilité d’attester chacune des lectures et d’indiquer la date d’adoption
des projets de loi [129] .
Tout au long
des étapes de son étude, le projet de loi demeure sous la garde du Greffier.
Aucune modification de fond n’y est permise sans l’autorisation expresse de la
Chambre ou d’un comité, toute modification prenant alors la forme d’un
amendement. Les originaux des projets de loi portant les attestations prescrites
font partie des archives de la Chambre [130] .
Tous
les projets de loi doivent franchir les mêmes étapes du processus législatif,
mais pas nécessairement en suivant tous le même cheminement. Depuis que la
Chambre a adopté de nouvelles règles visant à assouplir son processus
législatif [131] ,
il existe
maintenant trois voies que le législateur peut emprunter pour faire adopter un
projet de loi (voir la figure 16.1) :
- Un
ministre ou un simple député, après en avoir donné avis, dépose un projet de loi
qui reçoit immédiatement la première lecture. Le projet de loi fait ensuite
l’objet d’un débat de portée générale à l’étape de la deuxième lecture. Par la
suite, il est renvoyé à un comité pour une étude article par article.
- Un
ministre ou un simple député peut proposer qu’un comité soit chargé de
l’élaboration du projet de loi. Celui-ci sera alors déposé par le comité et
franchira l’étape de la deuxième lecture sans débat ni amendement.
- Un
ministre peut proposer qu’un projet de loi soit renvoyé à un comité aux fins
d’examen avant la deuxième lecture.
Quelle que soit la voie que le législateur décidera
d’emprunter, le projet de loi devra ensuite passer par l’étape du rapport, être
lu une troisième fois et transmis au Sénat aux fins d’adoption avant de recevoir
la sanction royale. Au début d’une nouvelle session, un projet de loi d’intérêt
public, s’il s’agit du même projet de loi que celui déposé au cours de la
session précédente, peut être rétabli à l’étape où il était rendu au moment de
la prorogation. Cette procédure est possible soit par l’adoption d’une motion à
cet effet [132] ,
soit, dans le
cas d’un projet de loi d’initiative parlementaire, par une nouvelle disposition
du Règlement adoptée en 1998 [133] .
En
cas d’urgence et de circonstances extraordinaires, et si la Chambre en décide
ainsi, un projet de loi peut, le même jour, faire l’objet de deux ou trois
lectures ou encore franchir deux étapes ou plus [134] .
Cette
disposition du Règlement ne fait référence qu’aux étapes de lecture [135] .
C’est à la
Chambre elle-même, et non à la présidence, de déterminer s’il y a urgence en la
matière [136] .
Voici
donc les étapes qu’un projet de loi est appelé à franchir lorsqu’il est déposé à
la Chambre des communes :
- Avis de présentation et inscription au Feuilleton;
- Élaboration d’un projet de loi par un comité (le cas échéant);
- Dépôt et première lecture;
- Renvoi à un comité avant la deuxième lecture (le cas échéant);
- Deuxième lecture et renvoi à un comité;
- Examen en comité;
- Étape du rapport;
- Troisième lecture (et adoption);
- Étude et adoption par le Sénat;
- Adoption par les Communes des amendements du Sénat (le cas échéant);
- Sanction royale;
- Entrée en vigueur.
Un
projet de loi présenté au Sénat doit franchir essentiellement les mêmes étapes,
sauf que la mesure est d’abord étudiée au Sénat puis à la Chambre des
communes [137] .
La plupart des
projets de loi peuvent être présentés dans l’une ou l’autre chambre, à
l’exception de ceux qui entraînent des dépenses ou qui touchent les impôts.
Ceux-ci doivent alors être impérativement présentés à la Chambre des
communes.
Avis de présentation et inscription au Feuilleton
La
présentation de tout projet de loi d’intérêt public doit être annoncée au moyen
d’un avis de 48 heures [138] .
L’avis de
présentation est une condition préalable du processus législatif. Une fois
présenté, le projet de loi ne requiert aucun autre avis aux autres étapes de son
étude (à l’exception des motions d’amendement lors de l’étape du rapport). Les
projets de loi d’intérêt privé sont assujettis, en matière d’avis, à des
exigences qui leur sont propres [139].
Un
simple député ou un ministre qui a l’intention de présenter un projet de loi à
la Chambre des communes doit d’abord en donner avis au Greffier de la Chambre
avant 18 heures (14 heures le vendredi) [140] .
Le titre du
projet de loi qui doit être présenté est alors inscrit au Feuilleton des Avis. Le surlendemain, le titre
apparaîtra au Feuilleton selon l’ordre de réception
des avis, pour présentation éventuelle à la Chambre. Ainsi, l’avis de 48 heures
exigé par le Règlement aura été donné. Le titre du projet de loi restera inscrit
ainsi au Feuilleton jusqu’au jour où le simple
député ou le ministre décidera de déposer son projet de loi.
Les
projets de loi qui entraînent des dépenses publiques et les projets de loi de
voies et moyens ont des dispositions spéciales relatives à leur présentation.
Celles-ci sont décrites au
chapitre 18, « Les procédures financières ».
Élaboration d’un projet de loi par un Comité
Le
Règlement prévoit qu’une motion tendant à l’élaboration d’un projet de loi par
un comité [141]
peut être
proposée par un ministre [142]
ou par un
simple député [143] .
Cependant, les
procédures à suivre pour chaque initiative ne sont pas tout à fait les
mêmes.
Un
ministre qui souhaite charger un comité de produire et de déposer un projet de
loi doit donner un préavis de 48 heures de la motion qu’il entend proposer à
cette fin [144] .
Une fois ce
délai écoulé, la motion sera inscrite au Feuilleton
sous les Ordres émanant du gouvernement. Lorsqu’elle sera appelée par le
gouvernement, elle pourra faire l’objet d’un débat d’au plus 90 minutes, après
quoi le Président interrompra les délibérations et mettra aux voix toute
question nécessaire pour en disposer [145] .
Si un
simple député souhaite charger un comité de produire et de déposer un projet de
loi, il doit donner un préavis d’au moins deux semaines de la motion qu’il
entend proposer [146] .
Une fois ce
délai écoulé, la motion sera inscrite au Feuilleton
sous les « Affaires émanant des députés ». Par la suite, elle sera visée par
toutes les règles gouvernant les affaires émanant des députés (c’est-à-dire
qu’elle sera soumise à la procédure du tirage au sort, devra être choisie comme
affaire pouvant faire l’objet d’un vote et sera étudiée pendant l’heure réservée
aux Affaires émanant des députés [147] ).
L’adoption par la Chambre d’un rapport d’un comité chargé
d’élaborer et de déposer un projet de loi constitue un ordre de déposer le
projet de loi [148] .
Si, au moment
de présenter la motion portant première lecture du projet de loi, le ministre ou
le député déclare que le projet de loi est fondé sur le rapport du comité, le
projet de loi franchira plus tard l’étape de la deuxième lecture sans débat ni
amendement. L’étude en deuxième lecture d’un projet de loi d’initiative
ministérielle ne pourra commencer avant le troisième jour de séance suivant la
première lecture [149] .
Une période
d’au moins deux semaines devra s’écouler entre la première et la deuxième
lecture d’un projet de loi d’initiative parlementaire [150] .
Après sa
deuxième lecture, le projet de loi franchira ensuite les autres étapes communes
aux mesures législatives d’intérêt public.
Dépôt et première lecture
La
première véritable étape du processus législatif est le dépôt du projet de loi à
la Chambre et sa première lecture. Lorsque la période d’avis est écoulée et que
le député ou le ministre est prêt à déposer son projet de loi, il manifeste à la
présidence son intention de procéder durant les Affaires courantes à l’appel de
la rubrique « Dépôt de projets de loi émanant du gouvernement » ou de la rubrique
« Dépôt de projets de loi émanant des députés », selon le cas. L’autorisation de
déposer un projet de loi est accordée automatiquement, et la motion est réputée
adoptée sans débat ni amendement ni mise aux voix [151] .
Le ministre ne
fournit habituellement aucune explication lorsqu’il demande l’autorisation de
déposer un projet de loi, mais il lui est loisible de le faire [152] .
Par contre, le
simple député fournit habituellement une brève explication du projet de loi
qu’il présente à la Chambre [153] .
Le
but de la première lecture est de permettre la présentation du projet de loi,
puis son impression et sa distribution à tous les députés. C’est à ce moment-là
qu’un numéro spécifique lui est attribué. L’adoption de la motion de première
lecture signifie simplement que la Chambre accepte que le projet de loi soit
présenté sans s’engager davantage, si ce n’est qu’elle permet que le texte soit
porté à la connaissance du Parlement et du public [154] .
Aucune
discussion ne peut avoir lieu à cette étape. Dès que l’autorisation de dépôt du
projet de loi a été accordée, le Président propose à la Chambre la motion
portant : « Que ce projet de loi soit maintenant lu une première fois et imprimé ».
Cette motion est réputée adoptée sans débat ni amendement ni mise aux
voix [155] .
Le Président
demande ensuite : « Quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la deuxième fois? »,
et répond : « À la prochaine séance de la Chambre ». Cette demande n’est en fait
qu’une simple formalité qui permet d’inscrire le projet de loi au Feuilleton sous la rubrique des « Ordres émanant du
gouvernement » ou sous celle des « Affaires émanant des députés » [156] .
Les
projets de loi qui émanent du Sénat sont déjà imprimés lorsqu’ils sont transmis
à la Chambre des communes. Conséquemment, cela permet de passer outre à la
demande d’autorisation de dépôt du projet de loi. La motion de première lecture
est réputée adoptée sans débat ni amendement ni mise aux voix [157] .
Les projets de
loi du Sénat franchissent ensuite les mêmes étapes que ceux de la Chambre des
communes.
Renvoi à un Comité avant la deuxième lecture
Traditionnellement, lorsque la Chambre procède à la
deuxième lecture d’un projet de loi, elle est alors appelée à se prononcer sur
le principe du projet de loi. L’adoption du principe à cette étape du processus
législatif a cependant pour effet de limiter la portée des amendements qui
pourront être apportés lors de l’examen en comité et de l’étape du rapport.
Voulant offrir une plus grande flexibilité aux législateurs, la Chambre a donc
instauré, lorsqu’elle a modifié son Règlement en 1994 [158] ,
une nouvelle
procédure qui permet à un ministre de proposer le renvoi d’un projet de loi
d’initiative ministérielle à un comité avant la deuxième lecture [159] .
Les
législateurs peuvent ainsi examiner le principe d’un projet de loi avant l’étape
de la deuxième lecture et proposer des amendements visant à en modifier la
portée [160] .
Cette
procédure s’applique également aux projets de loi fondés sur des motions de
voies et moyens [161] .
À
l’appel de l’ordre du jour portant deuxième lecture d’un projet de loi émanant
du gouvernement, un ministre peut [162] ,
après en avoir
avisé les représentants des partis de l’opposition, présenter une motion tendant
au renvoi immédiat du projet de loi à un comité avant la deuxième lecture. Le
Règlement ne précise pas de quelle façon les représentants des partis de
l’opposition doivent en être avisés. Cependant, la pratique qui a été suivie
depuis 1994 veut qu’un ministre en informe la Chambre au moment du dépôt et de
la première lecture du projet de loi. La motion de renvoi immédiat à un comité
ne peut faire l’objet d’aucun amendement et le débat est limité à trois heures.
Au bout des trois heures, ou lorsque plus aucun député ne se lève pour prendre
la parole, le Président met la question aux voix [163] .
Si la motion
est adoptée, le projet de loi est renvoyé à un comité permanent, spécial ou
législatif aux fins d’examen.
En
général, dans son étude article par article du projet de loi, le comité se
conforme aux mêmes règles et procédures qui régissent l’étude des projets de loi
en comité après la deuxième lecture [164].
Il peut
entendre des témoins et recevoir des mémoires. La portée des amendements dont la
mesure peut faire l’objet est toutefois beaucoup plus vaste étant donné que
l’étude en comité n’est pas restreinte au principe du projet de loi, celui-ci
n’ayant pas encore été approuvé par la Chambre. À la fin de son étude, le comité
fait rapport du projet de loi à la Chambre, avec ou sans amendement. L’étude de
la mesure à l’étape du rapport ne peut commencer avant le troisième jour de
séance suivant la présentation du rapport [165] .
Lorsque le comité fait rapport du projet de loi à la
Chambre, l’étape suivante est essentiellement la conjugaison de l’étape du
rapport et de la deuxième lecture. À cette étape, les députés peuvent proposer
des amendements après en avoir donné avis par écrit deux jours de séance avant
que le projet de loi ne soit appelé [166] .
Lorsque
l’étude à l’étape du rapport est terminée, une motion portant « Que le projet de
loi, avec ses modifications, soit agréé à l’étape du rapport et lu une deuxième
fois » ou « Que le projet de loi soit agréé à l’étape du rapport et lu une
deuxième fois » est mise aux voix immédiatement et la Chambre en dispose sans
débat ni amendement [167] .
Une fois
adopté à l’étape du rapport et lu une deuxième fois, le projet de loi est
inscrit en vue de la troisième lecture et de son adoption à la séance suivante
de la Chambre.
Deuxième lecture et renvoi à un Comité
L’étape de la deuxième lecture fournit aux législateurs
l’occasion de tenir une discussion générale sur le principe [168]
du projet de
loi. Le Règlement de la Chambre ne prévoit aucune disposition spécifique à ce
sujet, mais la tradition et la pratique veulent que le débat sur la portée
générale d’un projet de loi ait lieu à cette étape du processus
législatif [169] .
Conséquemment,
le débat doit porter sur le principe du projet de loi et non sur les
dispositions particulières de celui-ci [170] .
L’importance que l’on doit accorder à cette étape du
processus législatif a évolué au cours des ans. Traditionnellement, on
considérait que la deuxième lecture constituait l’étape la plus importante du
processus législatif [171] .
En 1968, le
Comité spécial de la procédure de la Chambre, après avoir examiné les étapes du
processus, déclarait dans son rapport que l’importance de l’étape de la deuxième
lecture avait été exagérée dans le passé et que, dans le procédé d’adoption d’un
projet de loi, l’étape décisive devait s’inscrire après l’étape de l’examen en
comité [172] .
Selon le
Comité, l’adoption de la motion de deuxième lecture signifie simplement que la
Chambre a amorcé l’étude du projet de loi et que, sans s’engager à l’adopter en
définitive, elle en autorise le renvoi à un comité qui l’étudiera en
détail [173] .
La
deuxième lecture d’un projet de loi et le renvoi à un comité sont proposés dans
la même motion. La motion précise à quel comité (permanent, spécial, législatif)
le projet de loi est renvoyé [174] .
Le Règlement
exige aussi, dans des cas précis, qu’un projet de loi soit renvoyé à un comité
plénier [175] .
Le
débat en deuxième lecture commence lorsque, à l’appel de l’ordre du jour portant
deuxième lecture du projet de loi, le ministre ou député, selon le cas, se lève
et propose « Que le projet de loi soit maintenant lu une deuxième fois et
renvoyé au Comité »
Le
Règlement prévoit des dispositions concernant la durée des interventions pendant
le débat [176] .
Il n’y a pas
de limite de temps pour le Premier ministre et le chef de l’Opposition
officielle. Cependant, aucun autre député ne doit parler pendant plus de 40
minutes s’il est le premier, le deuxième ou le troisième député à prendre la
parole. De plus, durant les cinq heures de débat qui suivent les trois premiers
députés, aucun député ne peut parler pendant plus de 20 minutes et une période
n’excédant pas 10 minutes est ensuite réservée pour les questions et
observations. S’il n’y a pas de questions ou d’observations ou si la période de
temps n’a pas été entièrement utilisée, un autre député peut alors prendre la
parole. Les questions et observations doivent avoir trait au discours du
député [177] .
Après les cinq
heures de débat, tout autre député peut prendre la parole pendant au plus 10
minutes, mais aucune période n’est réservée pour les questions et observations.
Le whip d’un parti peut, à n’importe quel moment du débat, indiquer à la
présidence qu’une ou plusieurs des périodes d’intervention d’une durée de 20 ou
10 minutes, allouées aux membres de son parti, seront partagées en deux [178] .
La coutume
veut que le droit de réplique accordé à tout député qui propose une motion de
fond soit également accordé au député qui propose une motion portant deuxième
lecture d’un projet de loi. Dans le cas des projets de loi émanant du
gouvernement, un secrétaire parlementaire ne peut exercer ce droit au nom du
ministre qu’avec le consentement unanime de la Chambre [179] .
Le
Règlement de la Chambre offre au gouvernement un mécanisme qui permet de limiter
la durée du débat à l’étape de la deuxième lecture, ainsi qu’aux autres étapes
du processus législatif, par des motions d’attribution de temps [180] .
Elles
permettent au gouvernement d’établir un échéancier pour l’étude d’un projet de
loi d’intérêt public [181].
De plus, le
gouvernement dispose d’un autre mécanisme, que l’on appelle « la clôture », pour
forcer la Chambre à rendre une décision [182] .
Cependant,
cette dernière procédure est rarement utilisée dans le cas des projets de
loi [183] .
À la
fin du débat, le Président met aux voix la motion « Que le projet de loi soit
maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité ». Il demande à la Chambre
si elle est prête à se prononcer et s’il lui plaît d’adopter la motion. La tenue
d’un vote par appel nominal peut être exigée [184] .
Le rejet d’une
motion de deuxième lecture entraîne l’abandon du projet de loi; on estime en
effet que la Chambre n’en est plus saisie, et aucune date n’est fixée pour la
reprise de son étude [185] .
Une fois la
motion adoptée, le projet de loi est renvoyé au comité concerné.
Amendements à la motion de lecture
Un
projet de loi d’intérêt public, qui n’a pas été renvoyé à un comité avant sa
deuxième lecture, ne peut faire l’objet d’un amendement avant d’avoir franchi
l’étape de la deuxième lecture et avoir été renvoyé à un comité [186] .
La motion
portant deuxième lecture d’un projet de loi peut cependant faire l’objet d’un
amendement [187] .
Seuls trois
types d’amendement peuvent toutefois être présentés, et ceux-ci le sont sans
préavis : le renvoi à trois mois ou à six mois; l’amendement motivé; et le renvoi
de l’objet du projet de loi à un comité.
L’amendement de renvoi
Le
renvoi est une motion d’amendement qui peut être proposée à la motion de lecture
d’un projet de loi. Il a pour effet d’empêcher qu’un projet de loi soit lu
maintenant une deuxième fois, et d’en différer la lecture à trois mois ou à six
mois [188] .
S’il est
adopté, il entraîne l’abandon du projet de loi pour la durée de la session en
cours. S’il ne l’est pas, cette procédure a néanmoins comme résultat de
prolonger le débat et de permettre aux députés d’intervenir une seconde
fois.
L’amendement de renvoi trouve ses origines dans l’usage
britannique. Cette procédure est apparue au cours du dix-huitième siècle
lorsqu’elle permit à la Chambre des communes de remettre à plus tard la reprise
de l’étude d’un projet de loi. Il fut par la suite admis que l’adoption d’un tel
amendement par la Chambre équivalait au rejet du projet de loi, puisque
l’échéance du renvoi était délibérément fixée à une date postérieure à la fin de
la session. Normalement, si la session se poursuivait au-delà de la date du
renvoi, le projet de loi n’était pas réinscrit au Feuilleton [189] .
Ce
sont donc les circonstances historiques qui ont fixé à trois mois ou à six mois
la période du renvoi. Il y a une centaine d’années, les sessions duraient
rarement plus de six mois. On proposait donc un renvoi à six mois lorsqu’on se
trouvait en début de session, et un renvoi à trois mois lorsque la session en
était à ses dernières semaines. De nos jours, les sessions de la Chambre des
communes du Canada sont plus longues, mais leur durée n’est ni régulière ni
fixée d’avance.
Une
analyse des amendements de renvoi qui ont été présentés à la Chambre des
communes depuis la Confédération révèle que les cas d’utilisation de cette
procédure se regroupent en deux périodes distinctes. La première s’étend de 1867
aux environs de 1920 et la seconde, de 1920 à nos jours.
Le
premier amendement de renvoi aurait été proposé le 28 novembre 1867 [190] .
Au cours de
cette première période, ce fut le gouvernement, et non l’opposition, qui utilisa
le plus souvent le renvoi [191].
Comme la
Chambre n’avait que peu de temps à consacrer aux affaires du gouvernement
pendant les courtes sessions de cette époque, le gouvernement se sentait parfois
obligé de disposer d’un grand nombre de projets de loi de députés par la
procédure du renvoi afin d’avoir plus de temps à consacrer à ses propres mesures
législatives.
Depuis 1920, la période réservée aux affaires émanant du
gouvernement occupe la plus grande partie du temps des travaux de la Chambre et,
progressivement, l’amendement de renvoi a été presque exclusivement utilisé par
l’opposition. L’examen de plusieurs précédents indique très clairement que des
motions de deuxième et de troisième lecture ont fait l’objet d’un amendement de
renvoi à des époques où il y avait de fortes tensions entre les partis. Ces
amendements ont rarement été adoptés : sur la centaine de cas qui ont été
consignés dans les Journaux, il n’y en a que quatre qui ont abouti. Et il
s’agissait alors, pour chacun d’entre eux, d’un renvoi qui avait été proposé par
le gouvernement et qui visait à faire échouer un projet de loi émanant d’un
député.
L’amendement de renvoi doit répondre à certains critères
pour être jugé recevable. Le renvoi à plusieurs mois doit viser à neutraliser le
mot « maintenant » dans la motion de lecture. Il doit ainsi modifier la motion de
lecture en supprimant tous les mots après le mot « Que » et en les remplaçant par
la proposition suivante : « le projet de loi (numéro et titre) ne soit pas lu pour
la deuxième fois maintenant, mais qu’il soit lu une deuxième fois dans trois
mois (ou six mois) à compter d’aujourd’hui ». L’amendement de renvoi n’exige pas
d’avis, est soumis à débat et ne peut être modifié [192] .
Lorsqu’un amendement de renvoi est rejeté, le débat se
poursuit sur la motion principale; il est cependant interdit de proposer plus
d’un amendement de renvoi à la même motion de lecture [193] .
L’adoption
d’un amendement de renvoi (que ce soit à trois mois ou à six mois) équivaut à un
renvoi de l’étude du projet de loi pour une durée indéfinie [194] .
Par
conséquent, celui-ci est rayé du Feuilleton et ne
peut plus être présenté de nouveau, même à l’issue de la période de
renvoi [195] .
Le projet de
loi est ainsi rejeté de façon indirecte. Il n’est plus possible d’invoquer l’ordre de nouveau, car une telle mesure serait jugée
contraire à la décision de la Chambre. Il est arrivé
que des députés aient essayé de faire appliquer le renvoi à une
résolution [196] ou de l’inclure
dans le texte d’un amendement motivé [197] ,
mais ces
tentatives ont été jugées irrecevables.
L’amendement motivé
L’amendement motivé, autre type d’amendement pouvant être
proposé à l’étape de la deuxième lecture d’un projet de loi, permet à un député
d’exprimer les raisons pour lesquelles il s’oppose à la deuxième lecture d’un
projet de loi, en présentant à la Chambre une autre proposition pertinente pour
remplacer la question initiale [198] .
Présenté sous
forme de motion, l’amendement motivé porte suppression de tous les mots dans la
motion principale suivant le mot « Que » et leur remplacement par d’autres
mots.
Il
est difficile de déterminer avec exactitude quand un amendement motivé a été
pour la première fois proposé à la Chambre; on croit cependant que le premier
aurait été présenté en 1882 [199] .
Une analyse
des amendements motivés qui ont été proposés depuis la Confédération montre
qu’une première période, qui va à peu près de 1882 à 1930, est remarquable pour
la latitude qui était alors accordée dans la formulation des amendements
motivés. À cette époque, les députés ne se préoccupaient pas trop de débattre de
la recevabilité des amendements motivés et la présidence n’intervenait que
rarement. Au début des années 1930, on commença à demander régulièrement aux
Présidents de statuer sur la recevabilité des amendements motivés et durant
cette seconde période, qui dura jusqu’au milieu des années 1960, un certain
nombre de précédents furent établis. À partir des années 1970, il devint de plus
en plus difficile pour les députés de proposer des amendements motivés
acceptables sur le plan de la procédure [200] .
La présidence
est donc maintenant en mesure de se reporter à un plus grand nombre de
précédents canadiens pour déterminer si un amendement motivé est recevable ou
non.
Le
Règlement de la Chambre des communes ne prévoit aucune disposition sur les
amendements motivés [201] .
Cependant, des
règles de procédure, que des précédents ont établies au fil des ans, en
régissent autant la forme que la teneur. De nos jours, l’amendement motivé prend généralement la forme d’une demande à la
Chambre de refuser de procéder à la deuxième lecture d’un projet de loi pour un
motif précis [202] .
Seulement deux
grandes catégories de raisons sont maintenant invoquées :
- L’amendement motivé peut constituer une déclaration de principe qui va à
l’encontre ou s’écarte des principes, des objectifs ou des dispositions du
projet de loi; ou
- L’amendement motivé peut exprimer une opinion quant aux circonstances se
rattachant à la présentation ou à l’étude du projet de loi ou à toute autre
initiative s’opposant au progrès de l’étude du projet de loi.
Pour
être recevable, un amendement motivé doit respecter les règles
suivantes :
- Il
doit être pertinent et se rapporter strictement au projet de loi à
l’étude [203] .
Un amendement
motivé n’est pas pertinent si, par exemple, il se rattache à un autre projet de
loi [204] ,
vise à scinder
le projet de loi [205] ,
propose le
retrait du projet de loi et son remplacement par un autre [206] ,
se rattache à
la loi existante plutôt qu’au projet de loi [207] ,
dépasse la
portée du projet de loi [208] ,
comporte une
dépense d’argent ou propose des changements dépassant la portée de la
recommandation royale [209] ;
- Il
ne doit pas être un rejet pur et simple du principe du projet de loi. La
procédure à suivre lorsqu’un député n’est pas d’accord avec le principe d’un
projet de loi et veut le rejeter est tout simplement de voter contre la motion
principale portant deuxième lecture du projet de loi [210] ;
- Il
ne doit pas porter sur des dispositions précises du projet de loi [211] ,
si ce qui est
recherché peut être accompli au moyen d’amendements qui pourraient être
présentés lors de l’étude en comité [212] ;
- Il
ne doit pas poser une condition à l’adoption de la motion portant deuxième
lecture du projet de loi [213] .
Un
amendement motivé qui n’est qu’une déclaration d’opposition à certaines parties
du projet de loi est irrecevable [214] .
Par ailleurs,
un amendement motivé ne doit pas obligatoirement contester le principe d’un
projet de loi pour être jugé recevable. La contestation du principe du projet de
loi n’est qu’une des conditions possibles à la recevabilité d’un amendement
motivé [215] .
Lorsqu’un amendement motivé est jugé recevable, la Chambre
doit se prononcer à son sujet. À ce jour, il n’est jamais arrivé que la Chambre
se soit déclarée en faveur d’un amendement motivé. Si tel était le cas, cela
signifierait à coup sûr la fin des délibérations sur le projet de loi et la
Chambre devrait renoncer à en reprendre ultérieurement l’étude en deuxième
lecture [216] .
L’ordre
relatif au projet de loi disparaîtrait du Feuilleton.
Renvoi de l’objet d’un projet de loi à un comité
Au
cours du débat sur la motion de deuxième lecture, un député peut proposer un
amendement visant à renvoyer l’objet d’un projet de loi à un comité pour qu’il
en discute et en fasse rapport à la Chambre. Ce type d’amendement remplace tous
les mots après le mot « Que » par des mots qui proposent que le projet de loi ne
soit pas lu maintenant une deuxième fois, que l’ordre de deuxième lecture soit
révoqué, le projet de loi retiré du Feuilleton et
que seul l’objet du projet de loi soit renvoyé à un comité [217] .
Certaines conditions doivent cependant être remplies pour
permettre la présentation de ce type d’amendement. Premièrement, l’objet du
projet de loi ne peut pas être renvoyé à divers comités [218]
ou à un
organisme inexistant [219] .
Deuxièmement,
un amendement qui vise à poser une condition à l’adoption de la motion de
lecture d’un projet de loi est irrecevable [220] .
Troisièmement,
les dispositions mêmes du projet de loi ne peuvent pas être renvoyées à un
comité, ce qui équivaudrait à transmettre à un comité une instruction portant
étude de certaines dispositions d’un projet de loi avant même que le projet de
loi ait franchi les étapes de la deuxième lecture et du renvoi à un
comité [221] .
Motions d’instruction
Une
fois qu’un projet de loi a été renvoyé à un comité, la Chambre peut donner une
instruction à ce comité au moyen d’une motion l’habilitant à faire ce qu’il ne
pourrait pas faire autrement, comme, par exemple, examiner une partie d’un
projet de loi et en faire rapport séparément [222] ,
examiner
certaines questions en particulier [223] ,
diviser une
mesure en plusieurs projets de loi [224] ,
regrouper
plusieurs projets de loi en un seul [225] ,
élargir ou
rétrécir la portée ou l’application d’un projet de loi [226] .
Par ailleurs,
un comité peut, s’il le souhaite, solliciter une instruction de la
Chambre [227] .
La
Chambre peut donner des instructions à un comité plénier ou à n’importe lequel
de ses comités. Il est permis de proposer, pour le même projet de loi, plus
d’une instruction à un comité, mais chaque motion doit cependant être proposée
séparément [228] .
Les motions
d’instruction relatives aux projets de loi ne sont pas impératives mais
facultatives [229] .
Il appartient
en effet au comité de décider s’il exercera ou non les pouvoirs que lui confère
la Chambre [230] .
Les
motions d’instruction émanent d’une pratique britannique qui s’est développée au
cours de la seconde moitié du dix-neuvième siècle. Elles ont été incorporées aux
usages de la Chambre des communes canadienne, bien qu’on n’y ait eu recours
qu’en de rares occasions. Presque tous les précédents sur les instructions
relatives aux projets de loi se situent à une époque où les projets de loi
étaient renvoyés à un comité plénier après la deuxième lecture. Au moment du
débat sur la motion « Que le Président quitte le fauteuil maintenant », il était
alors possible pour un député de proposer un amendement dont le but était de
donner une instruction au comité. De nos jours, lorsqu’un projet de loi est
renvoyé à un comité plénier [231] ,
la Chambre
précise ses instructions, le cas échéant, au moyen d’un ordre spécial [232] .
Les
motions d’instruction ne sont pas recevables comme amendement à la motion de
deuxième lecture d’un projet de loi et ne peuvent être proposées tant que la
Chambre est toujours saisie du projet de loi à l’étude [233] .
Elles peuvent
être proposées immédiatement après la motion de deuxième lecture lorsqu’elle
porte renvoi à un comité plénier [234] .
Aucun avis
n’est alors exigé. Présentée à cette étape du processus législatif, la motion
d’instruction ne peut cependant faire l’objet d’un débat ou
d’amendements [235] .
Une
motion d’instruction peut également être proposée sous forme de motion
indépendante [236] .
Un avis de 48
heures est alors exigé [237]
et la motion,
lorsque soumise à la Chambre, peut faire l’objet d’un débat et
d’amendements [238] .
Le débat sur
une motion d’instruction doit porter sur l’objet de l’instruction et non sur le
contenu du projet de loi. [239] .
Une motion
d’instruction indépendante peut être proposée même une fois qu’un comité a
commencé son étude du projet de loi [240] .
Une
telle motion, qu’elle ait été soumise en avis par un ministre ou un député, peut
être inscrite au Feuilleton sous la rubrique
« Motions (Affaires courantes) » [241] .
Autrement,
elle est placée sous les Affaires émanant du gouvernement, si elle est soumise
par un ministre, ou sous les Affaires émanant des députés, si elle est soumise
par un simple député. Lorsqu’elle est appelée durant la période quotidienne
consacrée aux « Affaires courantes », la motion d’instruction est alors traitée
comme une motion de fond indépendante, même si elle ne prend son sens que par
rapport au projet de loi dont le comité est saisi. Si le débat sur la motion est
ajourné ou interrompu avant la fin de la séance, la motion est reportée à la
rubrique des Ordres émanant du gouvernement et le moment de la reprise
ultérieure du débat est laissé au gré du gouvernement [242] .
Plusieurs raisons peuvent amener la présidence à juger
irrecevable une motion d’instruction. On ne peut se servir d’une motion
d’instruction pour traiter dans un projet de loi d’une affaire qui pourrait
constituer une mesure distincte ou pour chercher à s’immiscer dans les travaux
d’un comité dont le rapport n’a pas encore été présenté [243] .
Est aussi
irrecevable une motion d’instruction qui n’est pas présentée dans la forme
voulue ou qui n’est pas libellée de façon à ce que le comité comprenne
clairement ce que la Chambre désire [244] .
Une motion
d’instruction est irrecevable si elle ne se rapporte pas au contenu du projet de
loi, si elle déborde la portée du projet de loi, en y insérant, par exemple, un
principe qui lui est étranger ou en proposant de modifier des lois qui n’ont
rien à voir avec celui-ci, si elle n’est pas suffisamment précise, ou si elle
tente de supprimer une partie du projet de loi [245] .
Enfin, elle
est irrecevable si elle tente d’accorder à un comité des pouvoirs qu’il a
déjà [246] ,
si elle
autorise un comité à scinder un projet de loi qui ne s’y prête pas [247]
ou si elle
étend les prérogatives financières de la Couronne sans la recommandation royale
requise [248] .
Consentement royal
Repris des pratiques britanniques, le consentement royal (à
ne pas confondre avec la sanction royale ou la recommandation royale) fait
partie des règles et des usages tacites de la Chambre des communes du Canada.
Toute mesure législative qui touche les prérogatives, les revenus héréditaires,
les biens ou les intérêts de la Couronne exige le consentement royal,
c’est-à-dire le consentement du gouverneur général en sa qualité de représentant
du Souverain [249] .
Ce
consentement est donc nécessaire pour reporter, aliéner ou céderdes droits de propriété de la Couronne, ou pour
renoncer à l’une de ses prérogatives [250] .
C’est ainsi
qu’il a été exigé pour des projets de loi relatifs à des chemins de fer sur
lesquels la Couronne avait un droit de servitude [251] ,
à des droits
de propriété de la Couronne (sur les parcs nationaux et les réserves
indiennes [252] ),
à la
saisie-arrêt et à la distraction de pensions [253]
et à des
modifications à la Loi sur l’administration
financière [254] .
Le
consentement royal n’est cependant pas requis lorsque le projet de loi vise des
biens que la Couronne détient pour ses sujets [255] .
Le fait que la
Couronne accepte de donner son consentement ne signifie toutefois pas qu’elle
approuve la teneur du projet de loi, mais simplement qu’elle accepte d’enlever
un obstacle à sa progression afin que les deux chambres puissent l’examiner et
demander, en fin de compte, la sanction royale [256] .
Bien
que le consentement royal soit souvent donné à l’étape de la deuxième lecture
d’un projet de loi [257] ,
il peut être
signifié à n’importe quelle étape précédant son adoption définitive [258] .
Il peut
prendre la forme d’un message spécial [259] ,
mais est
habituellement transmis par un ministre [260]
qui se lève à
la Chambre et déclare que : « Son Excellence le(la) gouverneur(e) général(e) a été
informé(e) de la teneur de ce projet de loi et consent, dans la mesure où les
prérogatives de Sa Majesté sont touchées, à ce que le Parlement étudie le projet
de loi et fasse à cet égard ce qu’il juge approprié ». À défaut de consentement
préalable, le Président refusera de mettre la motion d’adoption de troisième
lecture aux voix [261] .
Si, par
mégarde, un projet de loi exigeant le consentement royal devait franchir toutes
les étapes à la Chambre sans l’avoir obtenu, les délibérations pertinentes
seraient déclarées nulles et non avenues [262] .
Examen en Comité
À
l’étape de l’examen en comité, les députés étudient en détail les articles du
projet de loi. C’est lors de cette étude qu’ils peuvent pour la première fois
proposer des modifications au texte du projet de loi. C’est aussi à cette étape
que des témoins peuvent être invités à présenter leur point de vue et à
comparaître devant le comité pour répondre aux questions des députés. Un projet
de loi est renvoyé pour étude à un comité permanent, spécial ou
législatif [263] ,
normalement après avoir franchi l’étape de la deuxième lecture à la
Chambre, mais aussi parfois avant de l’avoir
franchie [264] .
À l’occasion,
des projets de loi sont déférés à un comité plénier. Tout projet de loi fondé
sur une motion des subsides est obligatoirement renvoyé à un comité
plénier [265] .
De même, du
consentement unanime de la Chambre, un projet de loi de nature urgente ou un
projet de loi qui ne suscite pas de controverse peut être déféré à un comité
plénier [266],
le plus
souvent après avoir franchi plus d’une étape du processus législatif au cours
d’une même séance [267] .
Enfin, la
Chambre peut décider, par l’adoption d’un ordre spécial, de renvoyer un projet
de loi à un comité plénier [268] .
Mandat du comité
Le
projet de loi qui est déféré à un comité constitue l’ordre de renvoi du comité.
Le mandat du comité consiste uniquement à examiner le projet de loi et à en
faire rapport à la Chambre, avec ou sans amendement [269] .
Si le projet
de loi a déjà été lu une deuxième fois, le comité est lié par la décision de la
Chambre et ne peut apporter au projet de loi des modifications qui en
contredisent le principe [270] .
Évidemment, il
n’en est pas ainsi lorsque le comité est saisi d’un projet de loi qui n’a pas
encore reçu la deuxième lecture [271] .
Durant l’étude d’un projet de loi, un comité peut recevoir
certaines précisions de la Chambre quant à son ordre de renvoi. Les
« instructions » de la Chambre peuvent avoir pour effet d’élargir le mandat du
comité en lui donnant des pouvoirs additionnels [272].
Un
comité peut être saisi d’un nouveau renvoi de la Chambre pour étudier un projet
de loi dont il a déjà fait rapport. Le renvoi est normalement proposé sous forme
d’amendement à la motion portant troisième lecture du projet de loi. La Chambre
peut renvoyer de nouveau un projet de loi à un comité afin de le modifier ou de
revoir certains articles; elle peut renvoyer le projet de loi plusieurs fois et
elle peut le faire avec ou sans limitation. Dans ce dernier cas, le projet de
loi tout entier peut être réexaminé. Dans le cas d’un renvoi avec limitation, le
comité ne peut examiner que les articles ou les amendements qui lui sont
renvoyés [273] .
Rôle du comité dans l’étude d’un projet de loi
Le
rôle du comité à cette étape du processus législatif consiste à examiner le
projet de loi article par article et, si nécessaire, mot par mot, et d’en
approuver le libellé ou de le modifier pour donner suite aux intentions du
comité [274] .
Le
comité a le pouvoir de modifier les dispositions du projet de loi à un point tel
que lorsqu’il en est fait rapport à la Chambre, il peut être à toutes fins
pratiques complètement différent de ce qu’il était avant que le comité en ait
été saisi [275] .
Par exemple,
le comité peut, s’il en décide ainsi, rejeter un ou plusieurs articles du projet
de loi (si bien qu’il ne reste plus rien du texte de ce projet de loi) et en
faire rapport à la Chambre avec amendements; il peut également rejeter tous les
articles du projet de loi et les remplacer par d’autres dans la mesure où ils
respectent les règles relatives à la recevabilité [276] .
Durée des interventions
Tout
membre d’un comité peut prendre la parole aussi souvent qu’il le désire et
parler aussi longtemps qu’il le souhaite, sous réserve de la pratique que le
comité adopte à ce sujet [277] .
Il arrive
souvent qu’un comité adopte des motions pour gouverner ses travaux, comme des
motions visant à réglementer la durée des interventions, à établir l’ordre des
interventions des membres du comité (habituellement selon l’affiliation
politique) et à imposer des délais régissant la présentation de certains types
de motions ou d’amendements [278].
De même, la
durée des interventions peut être assujettie aux contraintes imposées par un
ordre de la Chambre [279]
ou par le
Règlement dans le cas d’un projet de loi d’intérêt public émanant d’un
député [280] .
Un
comité peut aussi limiter lui-même le temps qu’il entend consacrer à l’étude
d’un projet de loi en adoptant une motion à cet effet. Une telle motion peut
faire l’objet d’un débat et d’amendements. Il arrive qu’un comité adopte
l’équivalent d’une motion d’attribution de temps, c’est-à-dire que le temps
accordé pour l’examen de chaque article est déterminé par motion [281] ,
ou encore que
l’étude d’un projet de loi prend fin à une heure ou à une date fixées par les
termes d’une motion [282] .
Audition de témoins
Un
comité saisi d’un projet de loi choisit normalement de tenir des audiences
publiques [283] .
Le comité
directeur du comité, appelé le sous-comité du programme et de la procédure, peut
discuter d’un calendrier de séances et d’une liste des témoins que les membres
souhaitent inviter à comparaître et peut présenter ses recommandations au comité
entier sous forme de rapport. Le comité devra ensuite adopter le rapport, après
l’avoir modifié, s’il le juge nécessaire. Le comité peut décider de se prévaloir
des services des attachés de recherche de la Bibliothèque du Parlement [284],
ou d’embaucher
tout autre spécialiste qu’il considère nécessaire pour l’appuyer dans son
travail [285] .
Avant
de procéder à l’examen du projet de loi article par article, le président du
comité met en délibération l’article 1 (ou l’article 2, si l’article 1 vise le
titre abrégé [286] )
afin de
permettre aux membres du comité de tenir une discussion d’ordre général et
d’interroger des témoins, s’il y a lieu. La pratique veut que le premier témoin
à comparaître devant le comité soit, selon le cas, le parrain du projet de loi
ou le ministre qui en est responsable (ou son secrétaire parlementaire).
D’autres témoins peuvent ensuite être invités à se prononcer sur le projet de
loi. Ils peuvent être des particuliers, des experts ou des représentants
d’organisations qui seraient touchées par la mesure législative. À ce stade, la
discussion est très libre et porte à la fois sur le principe général et les
détails du projet de loi. Plus tard, lorsque le comité entreprendra l’étude du
projet de loi article par article, le ministre responsable, ou son secrétaire
parlementaire, pourra revenir devant le comité [287] .
Les
fonctionnaires du ministère se rendent aussi disponibles durant cette phase afin
de fournir des explications sur certains aspects complexes ou techniques de la
mesure législative [288].
Il
est arrivé, dans le passé, que des comités aient étudié plus d’un projet de loi
au cours d’une même séance afin de profiter de la présence d’un ministre et de
témoins pour les interroger à cette occasion [289] .
Il s’agissait
alors de projets de loi qui avaient des points communs de sorte qu’il était
pratique d’entreprendre leur étude simultanément. Les projets de loi ont
cependant été examinés séparément à l’étape de l’étude article par
article [290] .
Il est
également arrivé qu’un comité ait étudié en même temps un projet de loi qui lui
avait été déféré ainsi que la teneur d’un autre projet de loi [291] .
Étude article par article
L’audition des témoins terminée, le comité procède à
l’étude article par article du projet de loi. C’est au cours de cette phase que
les membres du comité peuvent proposer des modifications au projet de
loi.
Ordre d’examen des éléments constitutifs du projet de loi
À
moins que le comité en décide autrement, l’étude article par article du projet
de loi se fait dans l’ordre suivant :
- Articles;
- Articles réservés (le cas échéant);
- Annexes;
- Article 1 (titre abrégé);
- Préambule (le cas échéant);
- Titre.
Les
éléments constitutifs d’un projet de loi doivent être étudiés selon un ordre
prescrit : l’étude du préambule, si le projet de loi en comporte un, est reportée
à la fin de l’examen article par article [292] ;
celle de
l’article 1, si celui-ci ne vise que le titre abrégé, est également reportée;
les autres articles et les annexes sont étudiés dans l’ordre dans lequel ils
figurent sur la version imprimée du projet de loi [293] .
Les nouveaux
articles et les nouvelles annexes sont mis en discussion suivant l’ordre dans
lequel ils apparaîtraient dans le projet de loi. Bien que certains ouvrages en
matière de procédure parlementaire préconisent un ordre différent pour leur
examen [294] ,
de fait les
comités ont adopté depuis plusieurs années la pratique d’aborder l’examen des
nouveaux articles et des nouvelles annexes de la même manière que les
propositions d’amendements aux articles, c’est-à-dire dans l’ordre où ils
paraîtraient dans le projet de loi. Les comités jugent que cette pratique
facilite l’étude article par article. Ils l’ont suivie à tel point qu’elle est
maintenant solidement établie dans les usages de la Chambre des
communes [295] .
Une fois qu’il
a disposé de tous les articles et annexes, le comité revient à l’étude de
l’article 1 (si celui-ci a été reporté), du préambule et, enfin, du
titre [296] .
Articles mis en délibération
Chaque article du projet de loi constitue une question
distincte et doit être étudié séparément. Le président du comité appelle
successivement chaque article par son numéro et, après débat et si aucun
amendement n’est proposé, met l’article aux voix. Si un amendement est proposé,
le président donne la parole au député qui fait lecture de son amendement. Une
nouvelle question est ainsi mise en délibération et un nouveau débat s’engage.
Une fois la discussion terminée, le président met aux voix l’amendement visant à
modifier l’article, puis l’article lui-même, tel que modifié (le cas échéant).
Une fois l’article adopté, celui-ci ne peut être remis en discussion, sauf du
consentement unanime [297] .
Le
comité peut, sur adoption d’une motion à cet effet, procéder à la division d’un
article dans le but de débattre des parties de l’article ou de les mettre aux
voix séparément [298] .
Articles réservés
Le
comité peut décider, par voie de motion, de reporter l’examen d’un article à
condition que l’article en question n’ait pas déjà fait l’objet d’une
proposition d’amendement qui aurait été adoptée ou rejetée par le
comité [299] .
Si, par
contre, la proposition d’amendement a été retirée, l’étude de l’article peut
être reportée. Dans la pratique cependant, les comités décident souvent, du
consentement unanime, de reporter l’examen d’un article même si un amendement y
a déjà été proposé. Le comité peut aussi différer l’examen d’une partie du
projet de loi ou, en bloc, d’une série d’articles qui se suivent. Toutefois, une
motion qui propose de reporter une partie d’un article ou de reporter,
jusqu’après l’examen des articles secondaires, l’examen d’un article d’un projet
de loi qui ne comporte qu’un seul article principal est irrecevable [300] .
Le
débat sur une motion qui propose de reporter l’examen d’un article doit se
limiter à la seule question du report et non s’étendre aux dispositions du
projet de loi ou de l’article visé. À moins que la motion de report en dispose
autrement, un article dont l’examen aura été différé sera étudié après que tous
les autres articles du projet de loi auront été examinés [301] .
Amendements
Proposé lors du débat sur un article, l’amendement vise
soit à modifier le texte de l’article en discussion de telle manière qu’il
paraisse plus acceptable, soit à proposer au comité un nouveau texte.
L’amendement doit absolument se rattacher à l’article qu’il cherche à
modifier [302]
et donc viser
un seul des articles du projet de loi et non deux ou plusieurs à la
fois [303] .
Toutefois, le
président peut, pour des raisons d’ordre pratique, autoriser que la discussion
porte à la fois sur plusieurs autres amendements qui sont reliés entre eux et
qui concernent différents aspects de l’amendement dont le comité est
saisi [304] .
Le
sous-amendement a pour objet de modifier un amendement dans le but de le rendre
plus précis. Le sous-amendement doit se rapporter à l’amendement; il ne doit pas
en élargir la portée en soulevant une question qui lui est étrangère [305] .
Le comité ne
peut être saisi que de deux amendements à la fois, c’est-à-dire un amendement à
l’article et un sous-amendement à l’amendement. Une fois proposé, un amendement
ne peut être retiré qu’à la demande du député qui le propose et du consentement
unanime des membres du comité [306] .
Seul
un membre du comité ou son substitut dûment désigné [307]
a le droit de
proposer une modification au projet de loi ou de voter sur une telle
proposition [308] .
Le président
du comité, comme le Président de la Chambre, ne propose pas de motion et ne vote
qu’en cas d’égalité des voix [309] .
Il est
généralement admis qu’en cas d’égalité des voix, un président de comité devrait
se prononcer de façon à permettre la poursuite de la discussion. Le président de
comité n’est pas obligé de donner les motifs de son vote prépondérant ni de
l’expliquer [310] .
Lorsqu’un
comité est saisi d’un projet de loi d’intérêt privé cependant, le président vote
sur toute question et dispose même d’un vote prépondérant en cas d’égalité des
voix [311] .
Des
services de rédaction législative sont disponibles pour les membres du comité
qui souhaitent proposer des modifications au projet de loi. Chaque proposition
d’amendement doit être présentée par écrit au président du comité et peut être
proposée dans l’une ou l’autre des deux langues officielles. Contrairement aux
règles qui s’appliquent aux motions présentées à la Chambre, il n’est pas
nécessaire qu’une motion proposée en comité soit appuyée [312] .
Bien
que le député qui entend faire des propositions d’amendement au projet de loi
n’ait pas à en donner avis, l’usage veut qu’il les communique au président et au
greffier du comité afin d’en assurer la traduction, la compilation et la
diffusion aux autres membres du comité [313] .
Prévenu à
l’avance, le président du comité pourra par conséquent veiller à ce qu’une
proposition d’amendement soit abordée au bon endroit durant l’étude du projet de
loi. Dans le but de voir au déroulement ordonné de l’étude article par article,
un comité peut adopter une motion dictant une heure de tombée pour la réception
des propositions d’amendement [314] .
Ordre de prise en considération des amendements
Trois
types d’amendements peuvent être proposés lors de l’étude de chaque article du
projet de loi [315] :
- L’amendement visant à retrancher certains mots en les remplaçant par d’autres
mots;
- L’amendement visant à retrancher un ou plusieurs mots; ou
- L’amendement visant à insérer ou à ajouter d’autres mots, ou à ajouter un nouvel
article ou une nouvelle annexe au projet de loi.
Le
président du comité met en délibération les propositions d’amendement selon
l’ordre dans lequel ils apparaîtraient dans le projet de loi. Cependant, dans le
cas où plus d’une proposition d’amendement viserait le même article,
l’amendement qui a pour effet de substituer certains mots à d’autres aura
préséance sur l’amendement qui vise à la suppression de certains mots. Le
président peut décider qu’un amendement n’est pas présenté au bon endroit ou
qu’il y aurait lieu de le présenter sous forme d’un nouvel article [316] .
Les
amendements doivent être proposés dans un ordre qui suit le texte à modifier. Si
une partie d’un article a déjà été modifiée par le comité, un député ne peut
proposer un amendement visant à modifier une partie antérieure à la partie
modifiée [317] .
Recevabilité des amendements
Les
amendements et les sous-amendements qui sont proposés en comité doivent se
conformer à certaines règles de recevabilité. Il incombe au président du comité
de décider de leur recevabilité. Un amendement doit d’abord être proposé par le
député avant que le président rende une décision sur sa recevabilité; celui-ci
n’a pas à se prononcer sur une proposition hypothétique. Lorsque le président
doit rendre une décision sur la recevabilité d’un amendement, il s’appuie sur
des règles de procédure que des précédents ont établies au fil des ans et sur
les autorités en matière de procédure et de pratique parlementaires.
Contrairement à la Chambre où les décisions du Président
sont sans appel [318] ,
la décision
d’un président de comité peut faire l’objet d’un appel au comité par voie de
motion [319] .
Par contre, ni
la décision du président du comité ni la motion d’appel ne peuvent faire l’objet
d’un débat. La décision du président ne peut être renversée qu’à la majorité des
voix. Par conséquent, s’il y a égalité des voix lors d’un vote sur une motion
demandant que la décision du président soit maintenue, sa décision est
maintenue [320] .
Si,
au cours du débat, le président constate qu’une proposition d’amendement dont on
a accepté la présentation (mais qui n’a pas encore fait l’objet d’une décision)
est irrégulière, il en informe le comité et arrête l’étude de la proposition par
le comité [321] .
• Règles
Les
règles concernant la recevabilité des amendements sont essentiellement les
mêmes, que ce soit pour un projet de loi renvoyé à un comité avant ou après la
deuxième lecture, ou étudié à l’étape du rapport [322].
Toutefois, les
règles qui traitent du principe ou de la portée d’un projet de loi ne
s’appliquent pas lorsqu’un projet de loi n’a pas encore franchi l’étape de la
deuxième lecture, étant donné que le principe du projet de loi n’a pas été au
préalable entériné par la Chambre.
Les
règles qui gouvernent la recevabilité des amendements proposés aux articles d’un
projet de loi peuvent être regroupées en fonction des caractéristiques et des
éléments suivants :
Principe et portée : Un amendement à un projet de loi
renvoyé à un comité après la deuxième lecture est
irrecevable s’il en dépasse la portée et le principe [323] .
(Cette règle
ne s’applique pas à un projet de loi renvoyé à un comité avant la deuxième lecture, étant donné que le principe
du projet de loi n’a pas encore été entériné par la Chambre.) De même, un
amendement qui équivaut à une simple négation du projet de loi ou en contredit
le principe tel qu’adopté en deuxième lecture [324]
est
irrecevable.
Pertinence : Tout amendement à un projet de loi doit
nécessairement être pertinent, c’est-à-dire toujours avoir rapport à l’objet du
projet de loi ou de l’article à l’étude. En ce qui concerne un projet de loi
renvoyé à un comité après la deuxième lecture, un
amendement est irrecevable s’il vise à modifier un texte législatif dont le
comité n’est pas saisi [325]
ou s’il
vise à modifier un article de la loi existante qui n’est pas précisément visé
par un article du projet de loi [326] .
Un tel
amendement serait par ailleurs recevable dans le cas d’un projet de loi renvoyé
à un comité avant la deuxième lecture, en autant
qu’il soit toujours pertinent. En effet, dans ce cas, le principe et la portée
du projet de loi ne sont pas encore définis, ce qui en permet une étude plus
vaste.
Cohérence : Les décisions du comité à l’égard d’un
projet de loi doivent être cohérentes; elles doivent être compatibles avec les
décisions prises antérieurement par le comité. Un amendement est donc
irrecevable s’il va à l’encontre ou s’écarte des dispositions du projet de loi
adoptées jusque-là par le comité, s’il contredit une décision que le comité a
rendue au sujet d’un amendement antérieur [327] ,
s’il s’inspire
d’amendements déjà rejetés [328]
ou s’il en
dépend [329] .
Prérogative de la Couronne en matière financière : Un
amendement ne doit pas empiéter sur la prérogative de la Couronne en matière
financière. Un amendement est donc irrecevable s’il entraîne une imputation sur
le Trésor [330] ,
s’il étend
l’objet ou le but de la recommandation royale ou s’il en assouplit les
conditions et les réserves [331] .
Est également
irrecevable un amendement qui dépasse la portée de la motion des voies et moyens
sur laquelle est fondé un projet de loi, de même qu’un amendement qui impose à
la population une nouvelle charge fiscale [332]
qui n’a
pas été sanctionnée au préalable par l’adoption d’une motion des voies et moyens
ou qui n’est pas englobée dans les termes d’une motion des voies et moyens déjà
adoptée [333] .
Forme : Un amendement est irrecevable s’il ne vise qu’à
supprimer un article, puisqu’il suffit dans ce cas de voter contre l’adoption de
l’article en question [334] .
Un amendement
est aussi irrecevable s’il est présenté au mauvais endroit du projet de loi,
s’il est présenté au comité dans un esprit de dérision, ou s’il est vague ou
futile [335] .
De même, un
amendement est irrecevable s’il se rapporte à des amendements ou à des annexes
qui devront être présentés par la suite, s’il est incompréhensible sans eux, ou
s’il est incomplet pour d’autres motifs [336] .
Enfin, un
amendement qui rend inintelligible ou grammaticalement incorrect l’article qu’il
vise à modifier est également irrecevable [337] .
Disposition interprétative : La disposition
interprétative d’un projet de loi n’est pas l’endroit pour proposer une
modification de fond au projet de loi [338] .
De plus, un
amendement à la disposition interprétative d’un projet de loi qui a été renvoyé
à un comité après la deuxième lecture doit toujours
se rapporter au projet de loi, sans en dépasser la portée et sans en contredire
le principe. Cette dernière règle ne s’applique pas à un projet de loi qui a été
renvoyé à un comité avant la deuxième
lecture [339] .
Notes marginales et en-têtes : Parce qu’elles ne font
pas partie du texte de loi, les notes marginales rattachées à chacune des
dispositions d’un projet de loi ne peuvent faire l’objet d’amendements, ni les
en-têtes des diverses parties d’un projet de loi [340] .
Disposition d’entrée en vigueur : Un amendement qui vise
à modifier l’article concernant l’entrée en vigueur d’un projet de loi en la
faisant dépendre d’une condition est irrecevable [341] .
Ce type
d’amendement dépasse en effet la portée du projet de loi en tentant d’y apporter
un élément nouveau.
Annexes : Un amendement peut généralement être proposé à
une annexe et il est également possible de proposer de nouvelles
annexes [342] .
Cependant, on
fait exception dans le cas d’un projet de loi dont l’objet est de ratifier un
accord (soit un traité ou une convention) qui relève des prérogatives de la
Couronne. Si l’annexe d’un tel projet de loi renferme le libellé de l’accord,
elle ne peut alors faire l’objet d’amendements. Il est toutefois permis de
proposer des amendements aux articles du projet de loi, en autant qu’ils ne
touchent pas au libellé de l’accord en annexe et même s’ils ont comme effet de
neutraliser la portée législative de l’accord ou de ses parties [343] .
Préambule : Dans le cas d’un projet de loi renvoyé à un
comité après la deuxième lecture, un amendement de
fond au préambule n’est recevable que s’il est rendu nécessaire par l’adoption
de modifications au projet de loi [344] .
De plus, un
amendement au préambule est recevable lorsqu’il s’agit de rendre le texte plus
précis ou d’en uniformiser les versions française et anglaise [345] .
Si le projet
de loi ne contient pas de préambule, il n’est pas possible au comité d’en
ajouter un [346] .
Dans le cas
d’un projet de loi renvoyé à un comité avant la
deuxième lecture, un préambule, s’il n’en existe pas déjà un, peut être présenté
dans la mesure où la proposition est pertinente au projet de loi; par surcroît,
sont recevables des amendements de fond à un préambule existant [347] .
La formule d’édiction : La formule d’édiction n’est pas
soumise à l’approbation du comité ou de la Chambre et ne peut donc faire l’objet
de débat ou d’amendements [348] .
Le titre : L’étude du titre intégral est reportée à la
fin de l’examen du projet de loi [349] .
Le titre ne
peut être modifié que si les amendements apportés au projet de loi le
justifient [350] .
Tout
changement apporté à un titre par un comité sera effectué au moment où la
Chambre adoptera le projet de loi à l’étape du rapport [351] .
Mise aux voix des amendements
Lorsque le comité est saisi d’une proposition d’amendement
et d’un sous-amendement, le président du comité met d’abord aux voix le
sous-amendement. S’il est rejeté, l’amendement est ensuite mis aux voix; si le
sous-amendement est adopté, l’amendement, tel que modifié, est alors mis aux
voix. Le comité peut parfois, du consentement unanime, faire en sorte qu’un
groupe d’amendements soit mis aux voix comme si chacun d’eux avait été proposé
et avait fait l’objet d’un vote séparé [352] .
Adoption du projet de loi
Une
fois que le comité a terminé son étude article par article, le projet de loi
dans son ensemble, avec ou sans modification, est soumis à l’approbation du
comité.
Autorisation de faire rapport à la Chambre
Après
l’adoption du projet de loi, le président demande au comité l’autorisation d’en
faire rapport à la Chambre. La formule d’usage est la suivante : « Dois-je faire
rapport du projet de loi (tel que modifié) à la Chambre? ». Si le comité
acquiesce, le président doit faire rapport du projet de loi à la Chambre dans
les plus brefs délais. En revanche, un comité qui n’accepte pas de faire rapport
immédiatement devra le faire plus tard.
Réimpression du projet de loi
Si le
nombre de modifications apportées par le comité le justifie, le comité ordonne
généralement la réimpression du projet de loi à l’intention des députés qui
auront à le consulter à l’étape du rapport [353] .
Rapport à la Chambre
Le
comité doit s’en tenir à l’ordre de renvoi que constitue le projet de loi et
faire rapport du projet de loi à la Chambre, avec ou sans modification [354] .
Il ne peut
faire rapport que du projet de loi et, par conséquent, ne peut inclure dans son
rapport des recommandations de fond [355] .
À plusieurs
occasions à la Chambre, le Président a déclaré irrecevable un rapport qui
contenait des recommandations [356]
ou une motion
portant adoption d’un tel rapport [357] .
En 1973, le
Président Lamoureux déclarait « […] qu’il n’y a pas d’autorité qu’on puisse
invoquer pour soutenir qu’étudiant un [projet de loi] un comité de la Chambre
peut lui faire rapport d’autre chose que le [projet de loi] lui-même [358] ».
Par
ailleurs, en vertu du mandat permanent que lui confère le Règlement, rien
n’empêche un comité permanent, après avoir fait rapport d’un projet de loi, de
présenter un autre rapport dans lequel il expose ses recommandations de fond à
l’égard du même projet de loi [359] .
Obligation de faire rapport
Tout
comité doit faire rapport à la Chambre du projet de loi et des amendements qui y
sont apportés [360]
et la Chambre
doit recevoir tout projet de loi dont un comité aura fait rapport, qu’il ait été
modifié ou non [361] .
Un comité
n’est cependant pas habilité à soumettre à la Chambre deux rapports sur un seul
projet de loi, ce qui aurait pour effet de diviser le projet de loi [362] .
Un comité peut
rejeter tous les articles, le titre et le projet de loi même. Le comité fait
alors rapport du projet de loi avec amendements bien qu’il n’en reste que le
numéro [363] .
Par
ailleurs, à moins qu’un ordre de la Chambre [364]
ou une
disposition du Règlement [365]
n’impose au
comité une date limite pour faire rapport du projet de loi à la Chambre, il
appartient au comité de déterminer à quel moment en faire rapport [366] .
La Chambre
conserve tout de même le droit de modifier les termes de l’ordre de renvoi d’un
projet de loi à un comité. Si un ministre ou un député estime qu’un comité
chargé de l’examen d’un projet de loi fait fi de l’autorité de la Chambre en
refusant de faire l’examen du projet de loi ou d’en faire rapport à la Chambre,
il peut choisir de porter le fait à l’attention de la Chambre et proposer
d’imposer une limite de temps au comité. Ceci peut se faire en donnant avis
d’une motion tendant à exiger du comité qu’il fasse rapport au plus tard à une
date donnée. Cet avis peut être inscrit, le cas échéant, sous les « Ordres
émanant du gouvernement » ou les « Affaires émanant des députés ». La présidence
pourrait aussi accepter qu’un tel avis de motion soit inscrit sous la rubrique
« Motions » et que la motion soit débattue au cours des Affaires courantes, à
condition qu’elle porte strictement sur les termes de l’ordre de renvoi du
projet de loi au comité et ne constitue pas une tentative d’ingérence dans les
délibérations du comité. Ainsi, la Chambre aurait l’occasion de décider si le
projet de loi doit demeurer au comité ou faire l’objet d’un rapport [367] .
• Projet de loi d’intérêt public émanant d’un député
Tout
comité saisi d’un projet de loi d’intérêt public émanant d’un député est tenu,
dans un délai de 60 jours de séance à partir de la date du renvoi en comité,
soit de faire rapport à la Chambre du projet de loi avec ou sans amendement,
soit de présenter à la Chambre un rapport dans lequel il recommande de ne pas
poursuivre l’étude du projet de loi [368]
ou dans lequel
il demande une seule prolongation de 30 jours de séance pour l’examiner, tout en
y déclarant ses raisons. Si aucun projet de loi ni rapport n’est présenté au
plus tard à la fin des 60 jours de séance ou de la prolongation de 30 jours de
séance si elle a été approuvée par la Chambre, le projet de loi est réputé avoir
fait l’objet d’un rapport sans amendement [369] .
• Abandon de l’étude du projet de loi
Il
est arrivé à quelques reprises qu’un comité présente un rapport à la Chambre
soit pour recommander que l’étude d’un projet de loi soit abandonnée [370]
ou soit tout
simplement pour informer la Chambre du fait que le comité avait convenu d’en
abandonner l’étude [371] .
De même, à
l’occasion, un comité décide de ne plus poursuivre l’étude d’un projet de loi
sans en faire rapport à la Chambre [372] .
En de
pareilles circonstances, la décision finale quant au sort à accorder à un projet
de loi appartient à la Chambre dans son ensemble et non seulement au comité dont
la fonction est d’exécuter le mandat qu’il a reçu de la Chambre et d’en faire
rapport. Seule la Chambre a le pouvoir d’empêcher l’adoption d’un projet de loi
ou d’en ordonner le retrait [373] .
Tout en
rappelant à la Chambre qu’il n’incombe pas à la présidence de se mêler de
questions internes touchant un comité, le Président Fraser a bien précisé que
rien n’empêchait tout député ou ministre, par l’entremise d’une motion, de faire
intervenir la Chambre pour qu’elle exerce son autorité en ordonnant au comité de
reprendre effectivement ses travaux et de faire rapport à la Chambre [374] .
Rapport contenant des amendements irrecevables
Étant
donné qu’un comité peut en appeler de la décision de son président [375]
et la
renverser, il se peut qu’un comité fasse rapport d’un projet de loi auquel ont
été apportés des amendements déclarés initialement irrecevables par le
président. L’admissibilité de ces amendements, ainsi que de tous autres
amendements apportés par un comité, peut donc faire l’objet d’une contestation
sur le plan de la procédure au moment où la Chambre reprend l’étude du projet de
loi à l’étape du rapport [376] .
La
recevabilité des amendements est alors examinée par le Président de la Chambre,
qu’il soit invité à le faire à la suite d’un rappel au Règlement [377]
ou qu’il le
fasse de sa propre initiative [378] .
Dans
une décision rendue en 1992, le Président Fraser a déclaré : « Lorsqu’un projet de
loi est renvoyé à un comité permanent ou législatif de la Chambre, ce comité est
autorisé uniquement à adopter, à modifier ou à rejeter les dispositions qui se
trouvent dans le projet de loi et à faire rapport du projet de loi à la Chambre
avec ou sans proposition d’amendement. Dans ses travaux, le comité doit
respecter un certain nombre de contraintes. Il ne peut empiéter sur la
prérogative financière de la Couronne, il ne peut aller au-delà de la portée du
projet de loi adopté à l’étape de la deuxième lecture, et il ne peut toucher à
la loi originale en y apportant des amendements qui ne sont pas envisagés dans
le projet, aussi tentant que cela puisse être [379] .
»
Présentation du rapport
Le
rapport du comité qui a complété l’examen d’un projet de loi est présenté à la
Chambre par le président du comité [380] ,
pendant les
Affaires courantes, à l’appel de la rubrique « Présentation de rapports de
comités » [381] .
Aucun débat ne
peut avoir lieu à ce moment-là.
Étape du rapport
Après
qu’un projet de loi a été examiné en comité, il fait l’objet d’une étude par la
Chambre. C’est à cette étape, appelée l’étape du rapport, que les députés,
particulièrement ceux qui n’étaient pas membres du comité, qui veulent apporter
des modifications au texte du projet de loi tel que présenté par le cmité
peuvent proposer des motions d’amendement après en avoir donné avis par écrit.
Ces motions font alors l’objet d’un débat.
Historique
Déjà,
à la Confédération, le Règlement de la Chambre exposait la marche à suivre pour
l’étude des projets de loi en comité et la présentation des rapports à la
Chambre. Même si les projets de loi pouvaient être déférés à un comité permanent
ou spécial, ils devaient ensuite faire l’objet d’un examen par un comité
plénier [382] .
Les
amendements apportés en comité devaient être communiqués à la Chambre qui les
recevait immédiatement. De plus, les règles prévoyaient que les projets de loi,
s’ils faisaient l’objet de rapports avec amendements par un comité plénier,
pouvaient faire l’objet d’un débat et d’amendements avant que la Chambre en
ordonne la troisième lecture. Si les projets de loi n’avaient pas fait l’objet
de modifications lors de l’étude en comité plénier, la troisième lecture était
aussitôt fixée à un moment déterminé par la Chambre.
Au
fil des ans, on constata que les amendements n’étaient proposés qu’en comité et
que, lorsque présentés à la Chambre, une motion portant adoption de ceux-ci
était présentée et mise aux voix immédiatement [383] .
Ce constat
amena la Chambre, en 1955, à modifier son règlement pour refléter la pratique
établie. On convint que les amendements devaient être présentés à la Chambre et
que la motion tendant à les approuver devait être décidée immédiatement avant
qu’une troisième lecture soit ordonnée pour la prochaine séance de la
Chambre [384] .
Ces
modifications au Règlement eurent pour effet d’éliminer ce qui pouvait alors
constituer l’étape du rapport. En 1968, la Chambre effectua une révision en
profondeur de son processus législatif. Dorénavant, tous les projets de loi,
sauf ceux fondés sur des motions de subsides ou de voies et moyens, seraient
renvoyés à des comités permanents ou spéciaux et ne feraient plus l’objet d’un
réexamen par un comité plénier. De plus, la Chambre rétablit l’étape du rapport
et accorda au Président le pouvoir de choisir et de regrouper les amendements.
Elle adopta aussi des dispositions relatives à la présentation des avis
d’amendements et à la durée des discours à cette étape du processus
législatif [385] .
En
recommandant le rétablissement de l’étape du rapport, le Comité spécial sur la
procédure de 1968 jugea cette étape essentielle si l’on voulait permettre à tous
les députés, et non seulement aux membres du comité, de se prononcer sur les
projets de loi à l’étude et, s’il y a lieu, d’y proposer des amendements. Dans
l’esprit du Comité, cette étape ne devait toutefois pas constituer une reprise
de l’étape de l’examen en comité. Contrairement à l’étape de l’examen en comité
où le projet de loi est étudié article par article, à l’étape du rapport, il ne
doit y avoir débat que lorsque préavis a été donné que des amendements seront
présentés, et le débat doit porter uniquement sur les amendements
proposés.
Depuis 1968, les dispositions relatives à l’étape du
rapport ont été légèrement modifiées. La Chambre a apporté des changements à la
durée des interventions [386]
et précisé le
but de l’étape du rapport et les critères devant guider le Président dans le
choix et le regroupement des motions d’amendement [387] .
D’autres
changements ont également été apportés, en 1994, pour tenir compte de la
nouvelle procédure qui permet à un ministre de proposer le renvoi d’un projet de
loi d’initiative ministérielle à un comité avant la deuxième lecture [388] .
Avis de modification
Pour
qu’une motion portant modification d’un projet de loi [389]
puisse être
examinée à l’étape du rapport, il faut en donner avis, par écrit [390] ,
au moins un
jour de séance avant le début de l’étude à l’étape du rapport s’il s’agit d’un
projet de loi renvoyé à un comité après la deuxième lecture [391] ,
et deux jours
de séance s’il s’agit d’un projet de loi renvoyé à un comité avant la deuxième
lecture [392] .
Les avis
doivent être reçus par le Greffier avant 18 heures du lundi au jeudi et avant 14
heures le vendredi afin de paraître dans le Feuilleton
des Avis du jour de séance suivant [393] .
Lorsque la
Chambre est en période d’ajournement, l’heure de tombée pour les avis est 18
heures le jeudi précédant la reprise des travaux de la Chambre [394] .
Aucun avis ne
peut être déposé le jour du début de l’étude du projet de loi à cette étape, ni
les jours suivants [395] .
Modification relative à la forme
Le
Règlement prévoit une exception aux exigences en matière de préavis. Un ministre
peut proposer un amendement sans avis si cet amendement ne vise que la forme
d’un projet de loi du gouvernement [396] .
Dans un tel
cas, le débat doit porter uniquement sur l’amendement. Le but de cette règle est
de faire en sorte qu’il soit plus facile d’apporter à un projet de loi les
modifications rendues nécessaires par l’adoption d’autres modifications. Il
appartient alors à la présidence de déterminer si l’amendement n’est que la
simple conséquence de l’adoption d’un autre amendement ou s’il tend à changer le
sens du projet de loi.
Avis de recommandation royale
Dans
le cas d’une modification à caractère financier qui requiert une recommandation
royale [397], le Règlement
stipule qu’il faut donner avis de la recommandation royale au plus tard le jour
de séance précédant celui où doit commencer l’étude à l’étape du rapport. Cet
avis doit paraître au Feuilleton des Avis,
accompagné de la modification visée [398] .
Recevabilité des motions d’amendement
Il
revient au Président de décider quels amendements seront étudiés à l’étape du
rapport. Le Président n’a pas à décider si l’objet ou le fond de l’amendement
mérite une discussion. Il lui incombe seulement de décider si, dans le cadre des
règles de procédure s’appliquant à la recevabilité des amendements présentés à
l’étape du rapport, l’amendement proposé est recevable [399] .
À
l’étape du rapport, le projet de loi est examiné dans son ensemble et non pas
article par article comme c’est le cas lors de l’examen en comité. Sauf
indication contraire, les règles relatives à la recevabilité des amendements
présentés à l’étape de l’examen en comité s’appliquent également aux motions
d’amendement proposées à l’étape du rapport. [400]
Par ailleurs,
certaines règles sont propres à l’étape du rapport. Ainsi, depuis l’entrée en
vigueur en 1968 des règles relatives à l’étape du rapport, une motion
d’amendement visant à biffer un article d’un projet de loi a toujours été jugée
recevable par la présidence, même si cette motion tendait à modifier ou à aller
à l’encontre du principe du projet de loi tel qu’adopté en deuxième
lecture [401] ;
une motion
d’amendement qui vise plusieurs articles du projet de loi n’est pas
recevable [402] .
À
l’étape du rapport, le Président a donc déclaré irrecevable une motion
d’amendement qui empiétait sur la prérogative de la Couronne en matière
financière [403] ;
qui visait à
modifier un accord relevant des prérogatives de la Couronne [404] ;
et qui visait
à modifier le titre intégral sans que des changements importants justifiant une
telle modification aient été apportés au contenu du projet de loi [405] .
Ont
également été jugées irrecevables des motions d’amendement à un projet de loi
qui avait été renvoyé à un comité après la deuxième
lecture, alors que ces mêmes motions d’amendement auraient été recevables si le
projet de loi avait été renvoyé à un comité avant la
deuxième lecture. Par exemple, le Président a déclaré irrecevable une motion
d’amendement qui dépassait la portée du projet de loi ou de l’article
visé [406] ;
qui était
contraire au principe du projet de loi adopté en deuxième lecture [407] ;
qui proposait,
au moyen d’un changement à la disposition interprétative, une modification de
fond qui dépassait la portée du projet de loi [408] ;
qui tendait à
modifier une loi non visée par le projet de loi [409] ;
qui visait à
modifier non pas un article du projet de loi qui modifiait une loi existante
mais plutôt un article de la loi même [410] ;
et qui
équivalait à une simple négation du projet de loi [411] .
La
présidence a également déclaré que, l’étape du rapport n’étant pas une étape de
lecture, il n’est donc pas permis de présenter des motions d’amendement sous la
forme d’amendements motivés, ce qui est strictement réservé aux étapes des
deuxième et troisième lectures d’un projet de loi [412] .
Puisque les motions d’amendement à l’étape du rapport
peuvent faire l’objet d’un débat, elles font partie de la catégorie des motions
de fond susceptibles de faire l’objet d’un amendement et d’un
sous-amendement [413] .
Un amendement
à une motion d’amendement à l’étape du rapport doit strictement se rapporter à
cette motion [414]
et le débat qui
s’ensuit doit se limiter à l’amendement même. Un amendement qui visait le même
objectif qu’une autre motion à l’étape du rapport a été jugé irrecevable, parce
qu’il était, en réalité, une nouvelle motion de fond dont avis préalable aurait
dû être donné avant le début de l’étape du rapport [415] .
Pouvoir du Président de choisir les modifications
En
1968, le Comité spécial de la procédure, craignant que des députés profitent de
l’étape du rapport pour proposer des amendements similaires, sans grande
importance ou de nature dilatoire [416] ,
recommanda
dans son rapport l’adoption d’une règle habilitant le Président « à déterminer et
à fusionner les amendements dont il aurait été donné avis » [417] .
Une telle
règle fut alors adoptée [418] .
En
1985, le Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes (Comité
McGrath) déplora le fait que les « Présidents qui se sont succédés à la Chambre
depuis 1968 ne se sont jamais prévalus de leur pouvoir de choisir les
amendements, même s’ils ont exercé le pouvoir de les regrouper en vertu du
Règlement [419] ».
Le Comité
recommanda spécifiquement que le Président exerce le pouvoir de choisir les
motions d’amendement à l’étape du rapport. En 1986, la Chambre décida d’ajouter
une note en ce sens à l’article du Règlement en question [420] .
En
vertu du Règlement, le Président a donc le pouvoir de combiner ou de choisir les
motions d’amendement proposées à l’étape du rapport [421] .
Depuis les
années 1970, le processus de sélection et de regroupement des motions
d’amendement a évolué. Dans les premières années d’application de cette nouvelle
règle, le Président Lamoureux consultait régulièrement la Chambre avant de
rendre une décision finale sur la recevabilité et le regroupement des
amendements [422] .
Au fil des
ans, les Présidents en vinrent toutefois à consulter la Chambre seulement
lorsqu’ils éprouvaient des difficultés à se prononcer sur la recevabilité d’un
amendement. Comme le Président Fraser l’a expliqué dans une décision, la
présidence applique un processus d’examen dans le cadre duquel les motions
d’amendement font l’objet de discussions, parfois très approfondies, entre le
député qui en est l’auteur et le personnel du Greffier [423] .
Jusqu’en 1994,
toutes les motions d’amendement proposées par les députés figuraient au Feuilleton des Avis, même celles qui étaient jugées
irrecevables. En juin 1994, le Règlement fut modifié pour faire en sorte que
seules les motions ayant été jugées recevables par la présidence soient publiées
au Feuilleton des Avis [424] .
Lorsqu’une motion est jugée irrecevable, on informe
le député par lettre des raisons ayant motivé cette décision.
Normalement, le Président ne choisit pas une motion
d’amendement déjà déclarée irrecevable en comité, sauf si elle y a été rejetée
parce qu’elle exigeait la recommandation royale [425] .
De plus, le
Président ne devrait choisir que les motions d’amendement qui n’ont pas été ou
n’ont pu être présentées en comité [426] .
Il ne choisit
une motion déjà rejetée en comité que s’il juge qu’elle a une importance telle
qu’elle mérite d’être examinée de nouveau à l’étape du rapport [427] .
Enfin, il
regroupe aux fins du débat les motions qui ont le même objet et qui sont
interreliées. En agissant ainsi, il tient compte de la possibilité pour les
députés intéressés de pouvoir se faire entendre durant le débat sur une autre
motion.
Par
ailleurs, le Président peut, s’il le juge à propos, demander à un député qui a
donné un avis de modification de fournir suffisamment d’explications pour lui
permettre de porter un jugement sur l’objet de l’amendement. Lorsqu’un
amendement choisi a été présenté par plus d’un député, le Président désigne,
après consultation, quel député le proposera (normalement, celui qui aura donné
avis de la motion en premier) [428] .
La
décision que rend le Président sur le regroupement des motions d’amendement à
l’étape du rapport est composée de deux volets : le regroupement aux fins du
débat et le regroupement pour les mises aux voix.
Aux
fins du débat, les motions d’amendement sont regroupées en fonction de deux
critères : le contenu et l’endroit d’insertion dans le projet de loi. Les motions
sont regroupées selon le contenu si elles peuvent faire l’objet d’un même débat,
si elles produisent une fois adoptées le même effet à des endroits différents du
projet de loi ou si elles visent la même disposition ou des dispositions
semblables du projet de loi. Les motions d’amendement sont regroupées selon
l’endroit d’insertion dans le projet de loi lorsqu’elles visent la même ligne
(ou les mêmes lignes). Ces motions d’amendement feront alors partie d’un même
schéma de mise aux voix.
Lorsqu’il choisit et combine les motions d’amendement, le
Président décide également de leur regroupement pour leur mise aux voix,
c’est-à-dire qu’il détermine l’ordre dans lequel ces motions seront mises aux
voix et les conséquences d’un vote sur les autres. Le schéma de mise aux voix a
pour objet d’éviter que la Chambre ne doive se prononcer deux fois sur la même
question.
Le
Président rend sa décision sur le regroupement des motions d’amendement après
qu’il est donné lecture de l’ordre relatif à l’étude à l’étape du rapport du
projet de loi. Il informe la Chambre des motions d’amendement qu’il a choisies
et regroupées pour débat ainsi que des modalités de leur mise aux voix [429]
et, le cas
échéant, des motions d’amendements qui n’ont pas été choisies en indiquant les
raisons [430] .
Débat
À
l’appel de l’Ordre du jour portant étude à l’étape du rapport d’un projet de
loi, la Chambre aborde alors l’étude de toute modification dont on a donné avis,
chacune pouvant faire l’objet d’un débat et de modifications [431] .
Il n’y a
cependant pas de débat si aucun avis de modification n’a été donné à l’étape du
rapport [432] .
L’étape du rapport d’un projet de loi qui a déjà franchi
l’étape de la deuxième lecture ne peut commencer avant le deuxième jour de
séance suivant la présentation du rapport du comité [433] .
Celle d’un
projet de loi qui n’a pas encore franchi l’étape de la deuxième lecture ne doit
pas commencer avant le troisième jour de séance suivant la présentation du
rapport [434] .
Le nombre
minimum de jours de séance devant s’écouler entre la présentation du rapport du
comité et le débat à l’étape du rapport doit être strictement observé [435] .
Après
avoir rendu sa décision sur le regroupement des motions aux fins du débat, la
présidence donne lecture des motions du premier groupe (ou de la motion de ce
groupe s’il n’y en a qu’une). Les modifications proposées et appuyées sont ainsi
mises en discussion. Une fois proposée, une motion ne peut être retirée que du
consentement unanime [436] .
En
l’absence du député qui a soumis l’avis, une motion d’amendement ne peut être
mise en délibération que si elle est proposée par un autre député avec le
consentement unanime de la Chambre [437] .
Lorsqu’une
motion d’amendement est mise en avis par le gouvernement, elle peut, en
l’absence du ministre responsable, être proposée par tout autre
ministre.
Au
cours du débat à cette étape, aucun député ne peut prendre la parole plus d’une
fois ou plus de 10 minutes au sujet d’une modification ou groupe de
modifications [438] .
Contrairement
aux étapes de la deuxième lecture et de la troisième lecture, les discours des
députés ne sont pas suivis d’une période de questions et observations [439] .
Bien entendu,
les délibérations à l’étape du rapport sont assujetties aux règles générales du
débat, telle la règle de la pertinence [440] .
Report des votes par appel nominal
Lorsqu’un vote par appel nominal est demandé sur une motion
d’amendement pendant l’étude à l’étape du rapport d’un projet de loi, le
Président peut attendre qu’on ait débattu de quelques-uns ou de tous les
amendements proposés au projet de loi avant de convoquer les députés pour tenir
le vote. La pratique veut que le Président diffère tous les votes par appel
nominal qui sont demandés jusqu’à la fin de l’étude à l’étape du rapport. On
remet ainsi de séance en séance un ou plusieurs votes par appel nominal [441] .
Lorsqu’il y a
un nombre exceptionnel d’amendements à étudier à l’étape du rapport, le
Président peut, après consultation des représentants des partis, ordonner que
les votes par appel nominal différés aient lieu avant que tous les amendements
aient été étudiés [442] .
Adoption à l’étape du rapport
L’étape du rapport d’un projet de loi qui n’a pas encore
franchi l’étape de la deuxième lecture fait partie intégrante de l’étape de la
deuxième lecture du projet de loi [443] .
Ainsi, à la
fin de l’étape du rapport, une motion portant « Que le projet de loi, avec ses
modifications, soit agréé à l’étape du rapport et lu une deuxième fois » ou « Que
le projet de loi soit agréé à l’étape du rapport et lu une deuxième fois » est
proposée, puis mise aux voix immédiatement et la Chambre en dispose sans débat
ni amendement [444] .
À la
fin de l’étape du rapport d’un projet de loi qui a déjà franchi l’étape de la
deuxième lecture, la motion d’adoption à l’étape du rapport est également mise
aux voix immédiatement, sans débat ni amendement. Le libellé de la motion
d’adoption varie selon que le projet de loi original a été modifié ou non, et
selon l’étape à laquelle les amendements ont été apportés. Si, par exemple, un
projet de loi n’est modifié ni en comité ni à l’étape du rapport, la motion est
alors la suivante : « Que le projet de loi soit agréé à l’étape du rapport ». Si un
projet de loi a toutefois été modifié en comité, mais non à l’étape du rapport,
la motion se lira alors comme suit : « Que le projet de loi, tel que modifié, soit
agréé à l’étape du rapport ». Lorsque le projet de loi est modifié à l’étape du
rapport, mais non en comité, la motion est la suivante : « Que le projet de loi
soit agréé à l’étape du rapport, avec amendements ». Enfin, si le projet de loi
est modifié en comité et à l’étape du rapport, on présente la motion suivante :
« Que le projet de loi, tel que modifié, soit agréé à l’étape du rapport, avec
d’autres amendements ».
Si
aucune motion d’amendement n’est proposée à l’étape du rapport d’un projet de
loi qui a été lu une deuxième fois, il ne peut y avoir de débat et l’étude à
l’étape du rapport ne devient qu’une simple formalité précédant la troisième
lecture [445] .
Un projet de
loi qui a fait l’objet d’un rapport d’un comité plénier, avec ou sans
amendement, ne peut faire l’objet d’un débat ni être modifié à l’étape du
rapport [446] .
La Chambre
doit en disposer à l’étape du rapport dès sa réception du comité
plénier [447] .
Troisième lecture (et adoption)
La
troisième lecture est la dernière étape qu’un projet de loi doit franchir à la
Chambre des communes. C’est à ce moment-là que les législateurs doivent décider
si le projet de loi doit être adopté et devenir éventuellement une loi. Bien
qu’elle soit souvent considérée comme une simple formalité, la troisième lecture
n’en constitue pas moins une étape décisive du processus législatif. Dans le cas
d’un projet de loi fort controversé, elle peut en effet fournir aux législateurs
l’occasion de tenir un grand débat [448] .
La
troisième lecture et l’adoption d’un projet de loi sont formulées dans la même
motion. Elles peuvent avoir lieu à la même séance que l’étape du rapport si
aucune modification n’a été proposée à cette étape ou si le projet de loi a fait
l’objet d’un rapport, avec ou sans amendement, par un comité plénier [449] .
Lorsqu’un
projet de loi a fait l’objet d’un débat à l’étape du rapport, il ne peut être
présenté en vue de la troisième lecture et de son adoption finale avant la
prochaine séance de la Chambre [450] .
De même,
lorsqu’un projet de loi a été examiné par un comité avant la deuxième lecture et
qu’il a ensuite franchi les étapes combinées du rapport et de la deuxième
lecture, la troisième lecture ne peut se tenir qu’à la prochaine séance de la
Chambre [451] .
Le
débat en troisième lecture commence lorsque, à l’appel de l’ordre du jour
portant troisième lecture et adoption du projet de loi, le ministre ou le
député, selon le cas, propose « Que le projet de loi soit
maintenant lu une troisième fois et adopté [452] ».
Les règles
relatives à la durée des interventions pendant le débat sont les mêmes que
celles qui régissent la durée des discours et des questions et observations à
l’étape de la deuxième lecture [453] .
Le
débat à cette étape du processus législatif est centré sur la forme finale du
projet de loi. Les amendements recevables à cette étape sont tout à fait
semblables à ceux qui étaient recevables à l’étape de la deuxième
lecture [454] .
Il est donc
permis de proposer le renvoi du projet de loi à trois ou six mois [455] ,
de même que
proposer des amendements motivés [456] .
Ceux-ci
doivent cependant, à l’étape de la troisième lecture, se rapporter strictement
au projet de loi et ne pas aller à l’encontre de son principe tel qu’adopté en
deuxième lecture [457] .
L’amendement visant, à l’étape de la deuxième lecture, à
renvoyer l’objet d’un projet de loi à un comité devient, à l’étape de la
troisième lecture, un amendement de renvoi du projet de loi à un comité en le
chargeant de réexaminer certains articles pour une raison précise [458] .
Le but d’un
tel amendement est notamment de permettre au comité d’ajouter un nouvel article,
de réexaminer un article précis du projet de loi ou de réexaminer des
amendements antérieurs [459] .
Un amendement
visant à renvoyer un projet de loi à un comité ne doit pas cependant constituer
une instruction impérative [460] .
De plus, un
amendement à la motion de troisième lecture visant à renvoyer le projet de loi à
un comité autre que celui qui l’a déjà examiné a été jugé irrecevable par la
présidence [461] .
Si
l’amendement portant renvoi au comité est adopté, le comité ne peut se pencher
que sur la partie du projet de loi précisée dans l’ordre de renvoi.
Une
fois que la motion de troisième lecture a été adoptée, le Greffier de la Chambre
en atteste le fait au bas de la copie originale du projet de loi et y indique la
date [462] .
Le projet de
loi est ensuite transmis au Sénat pour approbation. Le rejet d’une motion de
troisième lecture entraîne l’abandon du projet de loi [463] .
Étude et adoption par le Sénat
Une
fois que la Chambre des communes a adopté un projet de loi, un message est
adressé au Sénat pour lui demander de bien vouloir adopter à son tour le même
projet de loi [464] .
Lorsqu’il
étudie un projet de loi, le Sénat suit un processus législatif très semblable à
celui de la Chambre des communes. Dès qu’il adopte un projet de loi, le Sénat en
informe la Chambre des communes par voie de message.
Comme
la plupart des projets de loi d’initiative ministérielle naissent à la Chambre
des communes, il arrive parfois que l’on demande au Sénat d’accélérer son
processus d’examen. Le Règlement du Sénat prévoit une procédure, l’étude
préalable, qui consiste à renvoyer à un comité permanent l’objet d’un projet de
loi qui a été présenté à la Chambre des communes mais qui n’a pas encore franchi
l’étape de la première lecture au Sénat [465] .
Le Sénat peut
ainsi examiner le projet de loi et arrêter son opinion avant même qu’il soit
transmis par la Chambre des communes. Sur réception du projet de loi, le Sénat
est alors en mesure de l’adopter ou de le modifier en très peu de
temps.
Adoption par les Communes des amendements du Sénat (le cas échéant)
Lorsque le Sénat adopte un projet de loi sans amendement,
un message est adressé à la Chambre des communes pour l’en informer [466]
et la sanction
royale est habituellement accordée peu de temps après ou dans les jours qui
suivent. Le projet de loi lui-même n’est renvoyé à la Chambre que s’il s’agit
d’un projet de loi de crédits [467] .
Cependant,
lorsqu’il apporte des amendements au projet de loi, le Sénat en fait part à la
Chambre dans le message qu’il lui adresse [468] ,
et il lui
renvoie le projet de loi. Le Sénat transmet parfois à la Chambre des messages
qui contiennent des observations ou des recommandations du comité sénatorial qui
a examiné le projet de loi [469] .
Les messages
du Sénat sont inscrits dans les Journaux dès leur réception par la
Chambre.
Lorsque la Chambre reçoit du Sénat des amendements à un
projet de loi, ceux-ci sont alors soumis à la Chambre pour étude. Il
n’appartient pas au Président de la Chambre des communes de juger de la
recevabilité, sur le plan de la procédure, des travaux menés au Sénat et des
amendements qu’il apporte aux projets de loi [470] .
C’est plutôt à
la Chambre même qu’il revient de décider si elle accepte ou rejette les
amendements proposés par le Sénat, tout en invoquant, si elle le désire, les
raisons qui motivent un rejet ou une modification. Une motion pour l’étape de
l’étude des amendements du Sénat requiert un préavis écrit de 24 heures [471] .
Au moyen de
cette motion, le parrain du projet de loi propose alors à la Chambre que les
amendements apportés par le Sénat soient adoptés [472] ,
modifiés ou
rejetés [473] .
Dans la même
motion, certains amendements du Sénat peuvent être rejetés, tandis que d’autres
peuvent être adoptés et d’autres modifiés. La motion doit porter exclusivement
sur les amendements du Sénat et non pas sur d’autres dispositions du projet de
loi qui ne sont pas visées par les amendements. La Chambre peut vouloir rejeter
les amendements du Sénat pour diverses raisons, notamment parce qu’elle juge
qu’ils vont à l’encontre du principe du projet de loi [474]
ou qu’ils
empiètent sur les prérogatives de la Couronne et de la Chambre des communes en
matière financière [475] .
La
motion figurera au Feuilleton des Avis sous la
rubrique « Motions relatives aux amendements du Sénat à des projets de loi ».
L’étude de la motion aura lieu pendant les Ordres émanant du gouvernement, s’il
s’agit d’un projet de li d’initiative ministérielle, ou pendant la période des
Affaires émanant des députés, s’il s’agit d’un projet de loi d’initiative
parlementaire.
Le
Sénat apporte assez souvent des amendements aux projets de loi et la Chambre se
montre habituellement tout a fait disposée à les accepter puisque les
modifications consistent généralement à corriger des erreurs de rédaction ou à
apporter des améliorations administratives [476] .
Lorsqu’un
débat s’engage sur des amendements du Sénat, les intervenants doivent s’en tenir
aux amendements à l’étude et ne peuvent traiter d’autres aspects du projet de
loi, ni de l’ensemble du projet de loi [477] .
La motion
portant sur les amendements du Sénat peut elle-même, au cours du débat, faire
l’objet d’amendements et de sous-amendements [478] .
À l’exception
du premier ministre et du chef de l’Opposition, aucun député ne peut parler
pendant plus de 20 minutes [479] .
Après chaque
intervention de 20 minutes, une période n’excédant pas 10 minutes est réservée
aux questions et observations. Des motions d’attribution de temps [480]
et de
clôture [481]
peuvent être
proposées par le gouvernement pour limiter le débat ou y mettre fin.
Lorsque la Chambre accepte les amendements du Sénat, un
message est adressé au Sénat en conséquence et le projet de loi lui est renvoyé
en attendant de recevoir la sanction royale. Si la Chambre modifie ou rejette
les amendements du Sénat, elle en informe le Sénat également par voie de
message. Le Sénat peut alors réexaminer ses amendements à la lumière du message
de la Chambre. Il peut décider soit d’accepter la décision de la Chambre, soit
de la refuser en insistant pour maintenir ses amendements, soit encore de
modifier ce que la Chambre a proposé. Peu importe la décision du Sénat, il
transmet un autre message à la Chambre pour l’en informer. Cette communication
entre les deux chambres se continue jusqu’au moment où, finalement, elles
arrivent à s’entendre sur un même texte. S’il s’avère impossible d’arriver à une
entente par l’échange de messages, la chambre qui est saisie de la mesure peut
alors demander la tenue d’une conférence.
Conférence entre les chambres
Lorsque survient un désaccord entre la Chambre des communes
et le Sénat sur les amendements devant être apportés à un projet de loi, deux
manières de procéder peuvent être suivies : on peut communiquer le désaccord au
moyen d’un message (il s’agit normalement du premier recours), ou tenter de le
résoudre en tenant une conférence. Bien que cette pratique soit tombée en
désuétude [482] ,
une conférence
peut être demandée par l’une des deux chambres dans les cas suivants : pour
communiquer une résolution ou une adresse que l’une des chambres souhaite faire
approuver par l’autre chambre; pour discuter des privilèges du Parlement; pour
discuter de toute question justifiant le recours à cette procédure; pour obtenir
ou communiquer des renseignements qui ont servi de base à l’adoption d’un projet
de loi; pour exposer ses motifs de refuser des amendements ou pour nsister sur
des amendements apportés à un projet de loi [483] .
L’une
ou l’autre des deux chambres peut demander la tenue d’une conférence, en autant
qu’elle est alors saisie du projet de loi à l’étude ou de toute autre affaire
devant faire l’objet de la conférence [484] .
Le Règlement
de la Chambre stipule que la Chambre est tenue de préparer et d’adopter un
exposé des motifs qu’elle entend faire valoir, avant que le message demandant la
tenue d’une conférence soit envoyé au Sénat [485] .
Les modalités
visant le consentement à la tenue de conférences et leur préparation, de même
que le déroulement des délibérations lors des conférences, ne sont toutefois pas
régies par le Règlement mais par les coutumes et la tradition [486] .
Jusqu’en 1906, le processus relatif à la tenue des
conférences était assez lourd. Le rôle des représentants à la conférence se
bornait à lire l’exposé des motifs aux représentants de l’autre chambre. Aucune
discussion ne pouvait s’ensuivre. En octobre 1903, trois conférences, dont une
seule constituait une conférence libre, furent tenues pour résoudre un différend
sur des amendements que le Sénat voulait apporter à un projet de loi de la
Chambre [487] .
On trouva le
processus si lourd que de nouvelles règles furent incorporées au Règlement en
1906 [488] ,
suite à
l’adoption l’année précédente d’une résolution conjointe des deux
chambres [489] .
Cette
modification au Règlement visait à rendre « libres » [490]
les conférences
en vue de faciliter la conclusion d’une entente. Les représentants (appelés
« délégués », « mandataires » ou « gérants ») pouvaient ainsi avoir la liberté de
parler et de négocier comme ils le jugeaient bon [491] .
Même
si les deux chambres se transmettent de nombreux messages, elles sont rarement
entrées en conférence. Aucune conférence n’a eu lieu depuis 1947 et l’on en
relève uniquement seize depuis 1903 [492] .
De ce nombre,
on en compte treize depuis l’entrée en vigueur, en 1906, des dispositions
relatives à la tenue des conférences libres [493] .
Ces
conférences « libres » ont toutes été tenues à la demande de la Chambre des
communes et toutes avaient pour objet de régler des différends sur des projets
de loi.
Au
fil des ans, l’échange de messages et la comparution de ministres devant les
comités de la Chambre et du Sénat ont considérablement réduit la nécessité de
recourir à cette procédure [494] .
Toutefois, si
les deux chambres devaient se trouver dans une impasse en raison d’un désaccord
sur des amendements devant être apportés à un projet de loi, un député,
habituellement celui qui est responsable du projet de loi, pourrait proposer
qu’un message soit envoyé au Sénat pour lui demander de participer à une
conférence libre sur l’amendement ou les amendements litigieux [495] .
Une fois le
message adopté et transmis au Sénat, celui-ci transmettrait à son tour un
message à la Chambre pour lui faire part de sa réponse. Si le Sénat acceptait de
participer à la conférence, un message serait aussi envoyé à la Chambre des
communes pour l’informer du moment et de l’endroit choisis pour la conférence
ainsi que des noms des sénateurs (appelés « représentants ») qui agiraient au nom
du Sénat. Une motion semblable serait présentée à la Chambre des communes pour
désigner les représentants de celle-ci (qui inclut habituellement le responsable
du projet de loi) [496]
et ordonner
qu’un message à ce sujet soit transmis au Sénat.
Au
moment convenu, les représentants se rencontreraient pour tenter de sortir les
deux chambres de l’impasse. Les comptes rendus montrent qu’advenant le cas où la
Chambre siégerait au moment choisi pour la conférence, le Président se lèverait
et annoncerait que le moment est venu de tenir la conférence, et le Greffier
donnerait les noms des représentants qui se rendraient alors au Sénat [497].
Une fois les
représentants de la Chambre arrivés au Sénat, le Président du Sénat annoncerait
les noms des représentants du Sénat et ceux-ci quitteraient la salle du Sénat.
Étant donné qu’aucun rapport ou procès-verbal officiel n’a été préparé sur ces
conférences, on dispose de peu de renseignements sur la façon dont ont été
tenues les conférences libres dans le passé et sur les autres personnes qui y
ont assisté en plus des représentants des deux chambres.
La
conférence libre consiste à discuter jusqu’à ce qu’une entente soit conclue,
mais trois issues sont possibles : la conférence est un échec; on parvient à un
compromis; la Chambre accepte les amendements du Sénat ou, selon le cas, le
Sénat accepte les amendements de la Chambre. Si la conférence se révèle un
échec, l’affaire est close et le projet de loi reste simplement au Feuilleton où il expirera à la fin de la
session [498] .
Pendant ce
temps, il n’est pas possible de déposer à la Chambre un nouveau projet de loi se
rapportant au même sujet et renfermant des dispositions analogues. Si l’on
parvient à un compromis, l’un des représentants de la Chambre présente aux
députés un rapport sur la conférence et propose l’adoption du rapport et l’envoi
au Sénat d’un message l’en informant. Enfin, si la Chambre décide de ne pas
insister pour faire approuver ses amendements, elle adopte les amendements du
Sénat et envoie un message à celui-ci pour l’en aviser.
Sanction royale
La
sanction royale fait intervenir les trois éléments constitutifs du Parlement (la
Couronne, le Sénat et la Chambre des communes). Partie intégrante du processus
législatif, elle constitue l’étape que doit franchir un projet de loi avant de
devenir officiellement une loi du Parlement. Une version du projet de loi,
identique à celle adoptée par les deux chambres, est alors approuvée par un
représentant de la Couronne pour recevoir « l’achèvement et la perfection d’une
loi » [499] .
Cette
procédure, essentiellement cérémonielle, se déroule en présence des députés et
des sénateurs, les députés ayant été convoqués par l’huissier du bâton noir du
Sénat à se rendre au Sénat pour assister à la cérémonie de la sanction
royale.
L’origine de la sanction royale remonte à l’époque d’Henri
VI (1422-1461; 1470-1471) [500] .
L’habitude fut
prise sous le règne de ce roi d’introduire dans les deux chambres des projets de
loi sous forme de statuts complets, et non plus sous la forme de pétitions comme
c’était le cas depuis les premiers temps de la constitution du Parlement
britannique. La sanction royale fut octroyée par le souverain en personne
jusqu’en 1541, année où, pour épargner au roi Henri VIII l’indignité de devoir
octroyer la sanction royale au projet de loi portant exécution de son épouse,
Katharine Howard, la tâche fut confiée pour le première fois à une commission
royale [501] .
La nomination
de lords commissaires chargés d’octroyer la sanction royale au nom du souverain
est par la suite devenue pratique courante. La dernière fois que le monarque a
en personne octroyé la sanction royale en Grande-Bretagne remonte au 12 août
1854, sous la reine Victoria [502] .
En 1967, le
Parlement britannique a adopté le Royal Assent Act
qui permet depuis qu’un projet puisse recevoir force de loi sur simple
notification de la sanction royale par les Présidents respectifs des deux
chambres [503] .
Cette
procédure élimine donc la nécessité de devoir tenir une cérémonie [504] .
À la
Chambre des communes canadienne, la cérémonie de la sanction royale a parfois
fait l’objet de critiques [505] ,
mais le
Parlement est cependant demeuré fidèle aux conventions de la sanction royale
dont les règles découlent directement de celles qui étaient en vigueur en
Grande-Bretagne à l’époque de la Confédération [506] .
Ni le
Règlement de la Chambre ni la Loi constitutionnelle
ne font cependant mention de la manière précise selon laquelle cette procédure
doit se dérouler. Initialement, la pratique voulait que la sanction royale soit
réservée à la fin d’une session parlementaire, au moment où le gouverneur
général était présent pour la prorogation du Parlement. Cette pratique est
graduellement disparue avec le temps, la sanction royale étant de nos jours
octroyée à des projets de loi n’importe quand au cours d’une session [507] .
De plus,
pendant un ajournement de la Chambre, le Président peut, à la demande du
gouvernement, faire connaître par avis que la Chambre se réunira plus tôt que
prévu pour l’octroi de la sanction royale; étant convoquée à « cette seule fin »,
la Chambre ne peut alors aborder aucune autre affaire [508] .
Lorsque la Chambre siège et que des projets de loi doivent
recevoir la sanction royale, la Chambre peut suspendre ses travaux jusqu’à une
certaine heure [509] ,
jusqu’à
nouvelle convocation du Président [510]
ou jusqu’à ce
que la sonnerie d’appel se fasse entendre [511] .
À défaut
d’arrangements spéciaux pour continuer la séance, les travaux sont interrompus à
l’heure normale de l’ajournement et la Chambre s’ajourne jusqu’au prochain jour
de séance [512] .
S’il arrive
que le moment de la cérémonie soit prévu en même temps que d’autres points à
l’ordre du jour, une décision doit être prise pour savoir quelle affaire aura
alors préséance [513] .
Au
Parlement canadien, c’est habituellement le gouverneur général qui proclame en
personne la sanction royale dans le cas des lois de grande importance et
lorsqu’il y a prorogation du Parlement. En d’autres temps, elle est proclamée
par un suppléant : le juge en chef de la Cour suprême du Canada ou un des autres
juges de la Cour suprême.
La cérémonie
Dès
qu’un projet de loi a été adopté par les deux chambres du Parlement et qu’il est
prêt à recevoir la sanction royale, on en imprime une copie spéciale sur papier
parchemin. Le Greffier de la Chambre et le Greffier du Sénat y apposent leur
signature au dos. La résidence du gouverneur général informe ensuite le
Président de la Chambre que le gouverneur général ou son suppléant se rendra au
Sénat pour donner la sanction royale à des projets de loi. Le Président de la
Chambre transmet ensuite le message aux députés [514] .
À
l’heure dite, l’huissier du bâton noir du Sénat informe la Chambre que le
gouverneur général ou son suppléant lui demande de se rendre au Sénat. Avant de
pénétrer dans l’enceinte des Communes, il frappe trois coups à la porte [515] .
Les
délibérations en cours, le cas échéant, sont interrompues par le
Président [516] .
Le quorum
n’est pas requis pour recevoir le message de l’huissier du bâton noir [517] .
Le sergent
d’armes annonce au Président et à la Chambre que le messager du Sénat désire
entrer. Le Président répond : « Faites entrer le messager », après quoi les portes
sont ouvertes pour laisser entrer l’huissier du bâton noir. La Chambre ne
pouvant pas toujours faire en sorte que le programme de ses travaux coïncide
avec le moment de la sanction royale, elle doit parfois faire attendre le
messager. Cette situation a engendré bien des discussions au sujet de l’emploi
du temps de la Chambre, notamment concernant l’à-propos de passer à d’autres
travaux pendant que la Chambre attendait le messager du Sénat [518] .
Une
fois entré et après avoir salué trois fois, l’huissier du bâton noir se présente
au Bureau et avise le Président que le gouverneur général ou son suppléant
désire que la Chambre se rende immédiatement au Sénat [519] .
Il conduit
ensuite la Chambre au Sénat, suivi, dans l’ordre, du sergent d’armes qui porte
la masse, du Président, du Greffier et de ses adjoints, de même que des
députés.
Pendant que le Président et les députés s’assemblent à la
barre du Sénat, l’huissier du bâton noir se dirige vers l’extrémité de la salle
du Sénat. Il s’incline devant le gouverneur général ou son suppléant et dit : « À l’ordre! » Sur ce, le Président de la Chambre lève son
chapeau et s’incline pour saluer le gouverneur général (ou son suppléant). Un
greffier au Bureau du Sénat lit ensuite, en anglais et en français, le titre des
projets de loi qui doivent recevoir la sanction royale, à l’exception des
projets de loi de crédits. Le Greffier du Sénat exhibe les projets de loi et
déclare : « Au nom de Sa Majesté, Son Excellence le(la) Gouverneur(e) général(e)
(l’honorable Gouverneur général suppléant) sanctionne ces projets de
loi ».
Si un
projet de loi de crédits doit être sanctionné, le Président de la Chambre des
communes l’aura apporté avec lui dans la salle du Sénat et lira, dans les deux
langues officielles, un message demandant qu’il reçoive la sanction royale, en
utilisant la formule suivante :
Qu’il plaise à Votre Excellence (Honneur [520]) :
les Communes du Canada ont voté certains subsides
nécessaires pour permettre au Gouvernement de faire face aux dépenses publiques.
Au nom des Communes, je présente à Votre Excellence (Honneur) le projet de loi
suivant : (titre), Que je prie humblement Votre Excellence (Honneur) de
sanctionner.
Un
greffier au Bureau du Sénat se rendra à la barre où le Président de la Chambre
des communes lui remettra le projet de loi de crédits, puis il retournera au
Bureau. Après avoir donné lecture dans les deux langues officielles du titre du
projet de loi de crédits, le Greffier du Sénat prononcera la formule de la
sanction royale dans les termes suivants :
Au nom de Sa Majesté, Son Excellence le(la) Gouverneur(e)
général(e) (l’honorable Gouverneur général suppléant) remercie ses loyaux
sujets, accepte leur bienveillance et sanctionne ce projet de loi.
Le
représentant de la Couronne donne son consentement à l’adoption de tous les
projets de loi en faisant un signe de la tête. C’est par ce geste que la
sanction royale est officiellement octroyée et c’est à partir de ce moment que
les projets de loi ont force de loi, à moins qu’il soit fait mention d’une autre
date pour leur entrée en vigueur [521].
L’huissier du
bâton noir se tourne ensuite pour faire face à la sortie du Sénat, marquant
ainsi la fin de la cérémonie. Le Président de la Chambre lève son chapeau,
s’incline pour saluer le représentant de la Couronne, et se retire avec les
députés à la Chambre des communes.
Une
fois de retour à la Chambre, le Président prend place au fauteuil et informe les
députés que le gouverneur général a eu la bienveillance, au nom de Sa Majesté,
d’octroyer la sanction royale à certains projets de loi. La Chambre reprend ses
travaux qui avaient été interrompus, ou s’ajourne si l’heure de l’ajournement
est déjà passée. La cérémonie ne dure normalement pas plus de 20
minutes [522] .
Un
projet de loi ne peut pas recevoir la sanction royale s’il n’a pas franchi dans
les deux chambres toutes les étapes du processus législatif. Un projet de loi
peut cependant subir les trois lectures et recevoir la sanction royale au cours
de la même séance [523] .
La Loi constitutionnelle de 1867 traite, sans en préciser
la procédure à suivre, des circonstances dans lesquelles la sanction royale peut
être désavouée ou refusée [524] .
Entrée en vigueur
Il
faut faire une distinction entre la date d’adoption d’une mesure législative par
le Parlement et son entrée en vigueur. Les dispositions relatives à l’entrée en
vigueur des lois sont régies par la Loi
d’interprétation [525] .
Un projet de loi devient loi après avoir été adopté
par les deux chambres sous la même forme, mais la loi entre en vigueur soit au
moment de recevoir la sanction royale si aucune disposition de la loi n’en
précise la date d’entrée en vigueur [526] ,
soit à une
autre date, telle que prévue dans la loi. L’entrée en vigueur peut se faire
ainsi à une ou plusieurs dates précisées par la loi elle-même ou fixées par
décret émis par le gouverneur en conseil.