Recueil de décisions du Président John Fraser 1986 - 1994
Le débat d’urgence / Motion d’ajournement – le débat d’urgence
Permission refusée; demandes réitérées; Président indique que les circonstances peuvent changer; question d'importance, ne nécessite pas forcément la tenue d'un débat d'urgence
Débats, p. 9266, 9346-9347, 9368, 9421-9422, 9498
Contexte
Le 24 septembre 1987, M. Steven Langdon (Essex-Windsor) prend la parole conformément à l'article 29 du Règlement afin de demander la permission de proposer l'ajournement de la Chambre pour discuter de la suspension des négociations concernant l'Accord canada-américain de libre-échange. L 'hon. Lloyd Axworthy (Winnipeg-Fort Garry), ayant déjà donné avis de son intention de soulever la même question, prend ensuite la parole afin d'appuyer la demande présentée par M. Langdon[1]. Au cours des six jours de séance suivants[2], les deux députés tentent d'obtenir la permission de tenir un débat d'urgence sur cette question, et les députés d'Oshawa (l'hon. Edward Broadbent) et d'Ottawa—Vanier (M. Jean-Robert Gauthier) se joignent à eux pour poursuivre le même objectif  chaque fois, le Président écoute attentivement les arguments présentés et les examine à la lumière des circonstances en évolution constante. Les décisions rendues à ce sujet sont reproduites ci-dessous.
DÉCISIONS DE LA PRÉSIDENCE
M. le Président: Je tiens à remercier les députés d'Essex-Windsor et de Winnipeg-Fort Garry d'avoir porté cette question à l'attention de la présidence hier et d'avoir formulé leurs observations ce matin.
Comme les députés le savent, le Comité chargé de la réforme parlementaire a insisté pour préciser que les Présidents ne devraient pas donner les raisons de leurs décisions à l'égard des demandes qui leur sont présentées. Je pourrais ajouter que cela ne signifie en rien que le Président n'a pas ses raisons. Naturellement, ce n'est pas par pur caprice qu'il prend ces décisions.
J'ai étudié cette question en profondeur et je suis d'accord avec les deux députés pour dire qu'elle est extrêmement importante. À l'heure actuelle, je ne suis pas disposé à ordonner la tenue d'un débat d'urgence, mais il est possible que je sois prêt à le faire à une date ultérieure. Selon moi, il est juste de dire que je serais peut-être mieux placé pour étudier la question à nouveau, après les travaux d'aujourd'hui.
M. le Président: Je tiens à remercier le député d'Oshawa et le député de Winnipeg-Fort Garry d'avoir soulevé encore aujourd'hui une question importante. Je crois qu'il n'y a aucun doute quant à l'importance de cette affaire, non seulement aux yeux des députés et du gouvernement, mais également bien sûr aux yeux du grand public.
J'ai dit hier, et je cite :
J'ai étudié cette question en profondeur et je suis d'accord avec les deux députés pour dire qu'elle est extrêmement importante. À l'heure actuelle, je ne suis pas disposé à ordonner la tenue d'un débat d'urgence, mais il est possible que je sois prêt à le faire à une date ultérieure. Selon moi, il est juste de dire que je serais peut-être mieux placé pour étudier la question à nouveau, après les travaux d'aujourd'hui.
Par la suite, en réponse à un recours au Règlement soulevé par le député de Winnipeg-Fort Garry qui demandait des précisions sur mes observations antérieures, j'ai dit ceci :
Les instances du député sont, bien entendu, importantes. J'ai déclaré plus tôt qu'à ce moment-là, la présidence n'était pas disposée à ordonner la tenue d'un débat d'urgence aujourd'hui. Je pense avoir signalé clairement aux représentants des deux partis de l'opposition que cela n'exclut nullement l'acceptation d'autres demandes en ce sens à une date ultérieure. Si le député ou certains de ses collègues veulent présenter d'autres demandes, la présidence les étudiera, bien entendu.
J'ai de nouveau étudié sérieusement les demandes qui ont été présentées par l'Opposition officielle et par le Nouveau Parti démocratique, et je dois maintenir ma position d'hier, c'est-à-dire que je ne suis pas disposé pour le moment à ordonner la tenue d'un débat d'urgence.
Il s'agit d'une question qui évolue en permanence et, comme je l'ai dit hier, de nouveaux événements pourraient m'inciter à adopter une position différente à une date ultérieure.
J'espère que tous les députés se rendront compte, de même que le grand public qui nous regarde et suit le débat, qu'une question peut être d'une très grande importance sans pour autant que la présidence juge nécessairement opportun qu'on en discute dans le cadre d'un débat d'urgence.
Je vois que le vice-premier ministre (l'hon. Don Mazankowski) est présent, de même que le chef du Nouveau Parti démocratique et [les] chefs de file de l'Opposition officielle. Je voudrais leur dire à tous qu'il y a d'autres moyens de faire en sorte de tenir un débat sur cette question. Je suggère qu'ils pourraient peut-être se consulter à ce sujet.
Encore une fois, ma décision d'aujourd'hui ne devrait pas être interprétée comme voulant dire que cette question précise ne pourrait pas faire l'objet d'un débat d'urgence à une date ultérieure.
M. le Président: Comme le député l'a signalé, c'est la troisième journée d'affilée que les députés cherchent à tenir un débat d'urgence sur les pourparlers commerciaux. Je tiens à préciser que la semaine dernière, les deux partis de l'opposition ont présenté des demandes en ce sens. Ce matin, seule l'Opposition officielle a réclamé un débat, mais je pense pouvoir affirmer que les députés néo-démocrates restent sur leur position et que si je devais accepter la tenue d'un débat d'urgence, ils accueilleraient ma décision avec plaisir.
Cependant, comme je l'ai précisé la semaine dernière, malgré la très grande importance de cette question chose sur laquelle tous les députés, quelle que soit leur position, s'entendent-la présidence ne croit pas à ce stade-ci qu'un débat d'urgence s'impose.
Vendredi dernier, j'ai invité le vice-premier ministre et les leaders parlementaires à discuter de cette question entre eux le plus tôt possible, afin de prendre des dispositions pour la tenue d'un autre type de débat dans cette enceinte. Je réitère cette invitation car, je le répète, la question est importante.
Je comprends parfaitement que le député de Winnipeg-Fort Garry ou certains de ses collègues soumettent le cas à la présidence. Cependant, en l'occurrence, la présidence considère qu'il s'agit là d'une question qui revêt une très grande importance mais non d'une question qui justifie un débat d'urgence, même si la distinction est parfois difficile à faire.
Je répète au député de Winnipeg-Fort Garry que c'est là ma position aujourd'hui. Par contre, des événements pourraient fort bien m'amener à changer d’avis. [… ]
M. le Président : Pour la gouverne de tous les députés et des gens qui nous regardent et nous écoutent, je souligne à nouveau qu'une question peut revêtir une très grande importance sans justifier pour autant, selon la présidence, la tenue d'un débat d'urgence.
La population devrait savoir que l'Opposition officielle et le Nouveau Parti démocratique ont présenté une série de demandes chaque jour, afin d'obtenir la tenue d'un débat d’urgence. La présidence a rejeté toutes ces demandes, mais elle a précisé, à chaque fois, que la question revêt une très grande importance.
En général, le Président n'est pas censé justifier ses décisions, et je m'en abstiens, donc même si les députés savent que les paroles de la présidence reflètent probablement sa pensée. Je voudrais être en mesure de pouvoir dire la même chose de tous les députés.
Les intéressés me proposent ce matin de reporter ma décision sur ces demandes jusqu'à cet après-midi, afin de voir ce qui pourrait se passer plus tard aujourd’hui. Selon moi, il serait préférable, en toute déférence, que je rejette les demandes à ce stade-ci. Je le répète, cela n'empêche en rien un député de présenter une autre demande à un autre moment.
Je tiens à apporter une précision que je crois utile. On a laissé entendre que le Président était disposé à réexaminer les décisions de la présidence au sujet d'un débat d'urgence, chaque jour. Je voudrais préciser que le Président ne revient pas sur les décisions passées. Il examine les demandes au fur et à mesure qu'elles sont présentées. Selon moi, c'est la procédure à suivre.
Je voudrais signaler à nouveau qu'une question peut fort bien être très importante et ne pas justifier, selon le Président, la tenue d'un débat d'urgence. Je peux vous garantir que le Président juge cette question importante. Nous verrons bien ce qui va se passer en l’occurrence.
Je voudrais faire remarquer aux députés que la semaine dernière, j'ai laissé entendre que le gouvernement, l'Opposition officielle et le Nouveau Parti démocratique pourraient discuter, afin de trouver une autre façon de tenir un débat. II ne m'incombe pas de dire aux députés ce à quoi ils pourraient parvenir grâce à des discussions. Cependant, cette possibilité doit être envisagée.
Quoi qu'il en soit, c'est là ma décision pour ce matin. Je remercie les députés d'avoir porté cette question à mon attention. Je voudrais également remercier les deux représentants de l'opposition de faire preuve de patience et d'accepter de bonne grâce les décisions du Président au sujet de cette question.
M. le Président : Je tiens à faire une mise au point que j'aurais dû faire il y a déjà de nombreux mois. La présidence ne saurait être convaincue qu'il existe une situation d'urgence par le seul nombre de personnes debout. […]
Le député sait probablement que la présidence, et tous les députés, j'en suis convaincu, prennent très au sérieux sa demande de débat d'urgence sur les négociations commerciales. La demande doit être présentée directement. Le député comprendra comme je l'ai expliqué que le Règlement ne donne ni l'autorisation ni le droit au gouvernement de répondre, aussi, doit-il être très bref et ne pas tenter de susciter la discussion. Que le député sache que la présidence comprend très bien sa position. [...]
[...] J'ai compris l'argument du député et, encore une fois, je ne suis pas disposé aujourd'hui à accorder la tenue d'un débat spécial ce soir.
Cela n'empêche pas, je le répète, le député ou quelqu'un d'autre de revenir à la charge une autre fois. Pour l'instant, pour des raisons qui me sont propres et, comme je l'ai mentionné hier, qu'il ne m'est pas nécessaire de justifier, il n'y aura pas de débat d'urgence aujourd'hui. Cela ne signifie toutefois pas qu'il n'y en aura pas plus tard.
Le jeudi 1er octobre:
M. le Président: Je remercie le député d'Ottawa—Vanier d'avoir porté cette affaire à l'attention de la présidence. Comme je l'ai déjà dit plusieurs fois ces derniers jours, la présidence considère cette affaire comme extrêmement importante. Jusqu'à maintenant, toutefois, la présidence n'a pas jugé bon d'autoriser la tenue d'un débat d'urgence.
Je répète au député que cela n'empêche pas que la présidence en décide autrement à un autre moment. Pour l'instant, toutefois, la présidence n'a pas l'intention d'autoriser la tenue ce soir d'un débat d'urgence. Je répète que la présidence sait qu'il s'agit là d'une affaire importante.
M. le Président: Je remercie l'honorable député d'Ottawa—Vanier de son intervention. Comme je l'ai dit les jours précédents, c'est naturellement un sujet qui est très important, mais selon les circonstances qui existent aujourd'hui, la présidence n'est pas disposée à admettre qu'il est urgent de tenir un débat cet après-midi.
Je sais que l'honorable député comprend bien que la décision de la présidence n'est pas une décision qui oublie l'importance du sujet, mais peut-être encore lundi ou un autre jour, peut-être y aura-t-il une occasion où il sera approprié d'avoir un débat. Mais aujourd'hui, ce n'est pas approprié, de l'avis de la présidence.
Post-scriptum
Le lundi 5 octobre 1987, le très hon. Brian Mulroney, Premier ministre du Canada, prend la parole à l'étape des « Déclarations de ministres » des affaires courantes afin d'informer la Chambre qu'un accord de principe a été conclu en vue de la signature d'un Accord global de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, et afin de déposer un document décrivant les éléments de cet Accord[3].
Plus tard au cours de la journée, M. Broadbent et M Axworthy prennent de nouveau la parole pour tenter d'obtenir la tenue d'un débat d'urgence sur l'accord de principe, mais leur requête est également rejetée.
F0811-f
33-2
1987-09-24
1987-09-25
1987-09-28
1987-09-29
1987-09-30
1987-10-01
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[1] Débats, 24 septembre 1987, p. 9265-9266.
[2] Débats, 25 septembre 1987, p. 9346-9347; 28 septembre 1987, p. 9368; 29 septembre 1987, p. 9421; 30 septembre 1987, p. 9497-9498; 1er octobre 1987, p. 9522; 2 octobre 1987, p. 9608.
[3] Débats, 5 octobre 1987, p. 9641-9642.