Chapitre 12Les étapes du débat
Les avis de motion
Pour pouvoir soumettre une proposition de fond à la Chambre, un avis de motion doit habituellement être transmis. Cette procédure vise à prévenir les députés et la Chambre afin qu’ils ne soient pas appelés à se pencher sur une question à l’improviste130.
Dans la plupart des cas, les avis de motion doivent être soumis par écrit et sont publiés dans le Feuilleton des avis131. Habituellement, les avis de motion écrits publiés dans le Feuilleton des avis visent des motions de fond, c’est-à-dire des motions autonomes qui ne dépendent pas d’une autre question à l’étude à la Chambre. D’autres dispositions du Règlement prévoient des cas où l’on peut donner un avis de motion de vive voix (accompagné d’un texte écrit) durant une séance132. D’autres types de motions n’exigent aucun avis133.
Selon le type de motion et la personne qui la présente, le délai de préavis peut varier d’une heure à une semaine134. Il est également possible de présenter plus d’un avis sur le même sujet (sauf pour les Affaires émanant des députés135), mais une fois qu’une des motions est présentée et que la Chambre s’est prononcée, on ne peut plus discuter des autres motions ou se prononcer sur celles-ci136.
Avis écrit
Un avis écrit est exigé pour la plupart des motions de fond et des affaires, dont les suivantes :
- les motions demandant la permission de présenter un projet de loi émanant du gouvernement ou d’un député137 ;
- les motions d’amendement de projets de loi à l’étape du rapport138 ;
- les motions concernant des amendements du Sénat à des projets de loi139 ;
- les motions à étudier durant la période réservée aux Affaires émanant du gouvernement140 ;
- les motions portant création d’un comité141 ;
- les motions d’affaire courante habilitant un comité à se déplacer142 ;
- les motions portant adoption de rapports de comités ;
- les résolutions abrogeant un règlement ou un autre texte réglementaire présentées à la Chambre sous forme de rapports du Comité mixte permanent d’examen de la réglementation143 ;
- les motions d’instruction à un comité144 ;
- les motions de l’opposition présentées lors des jours réservés aux travaux des subsides145 ;
- les avis d’opposition à un poste du Budget des dépenses146 ;
- les motions portant adoption des crédits provisoires, d’un Budget principal ou supplémentaire des dépenses, ou les motions visant à rétablir un poste du budget147 ;
- les affaires à étudier durant la période réservée aux Affaires émanant des députés148 ;
- les questions inscrites au Feuilleton149 ;
- les avis de motion portant production de documents150 ;
- les motions concernant la conduite des députés, des présidents de séance de la Chambre, des juges ou du gouverneur général151 ;
- les motions pour une résolution ou une adresse152.
Lorsque la Chambre siège, un député désirant transmettre un avis doit le déposer à la Chambre (c’est-à-dire le présenter à un greffier au Bureau dans l’enceinte de la Chambre) ou le remettre au Greffier (c’est-à-dire le soumettre à la Direction des journaux) avant 18 heures du lundi au jeudi ou avant 14 heures le vendredi pour que son avis soit considéré comme reçu ce jour de séance-là ; l’affaire paraîtra alors dans le Feuilleton des avis (qui est annexé au Feuilleton) de la séance suivante153. Les avis pour la première séance prévue de la Chambre suivant une période d’ajournement peuvent être remis au Greffier à n’importe quel moment avant 18 heures le jeudi précédant la séance en question. Ces avis sont ensuite publiés dans le Feuilleton et Feuilleton des avis du jour où la Chambre reprend ses séances154. Si le délai quotidien pour la transmission de l’avis n’est pas respecté, l’avis devient valable à la séance suivante.
Les députés doivent signer les avis écrits qu’ils soumettent pour inclusion dans le Feuilleton des avis afin d’empêcher l’utilisation non autorisée de leur nom et de certifier leurs intentions. Un avis transmis par télécopieur ou courrier électronique sera considéré comme un signe des intentions du député, mais il devra être suivi de l’avis officiel portant la signature originale du député, et ce, avant l’expiration du délai, afin de pouvoir être inclus dans le Feuilleton des avis155. Depuis 2005, les députés peuvent également satisfaire à l’exigence de fournir un avis écrit en le soumettant par voie électronique au moyen du système d’avis électroniques, qui comporte des procédures de sécurité pour valider l’authenticité de l’avis156.
Au besoin, le personnel de la procédure relevant du Greffier de la Chambre communiquera avec le député concerné si des modifications doivent être apportées au texte de la motion afin de le rendre conforme aux règles et usages de la Chambre157. Le Président a rarement eu à intervenir158. Un avis de motion jugé recevable est placé sous la rubrique appropriée du Feuilleton des avis. Lorsque plusieurs avis sont soumis pour la même rubrique, ils sont placés dans le Feuilleton des avis dans l’ordre où ils sont reçus. Dans le cas d’avis de motions identiques portant amendement d’un projet de loi à l’étape du rapport, seul le premier reçu est publié159.
Il est depuis longtemps permis à un député de donner avis d’une motion et de demander qu’il soit frappé d’embargo — c’est-à-dire que le parlementaire donne instruction aux greffiers au Bureau de ne fournir aucun renseignement sur le contenu de la motion jusqu’au délai fixé pour le dépôt des avis pour le jour concerné, ou jusqu’à la publication de l’avis dans le Feuilleton et Feuilleton des avis. En 1990, après qu’un embargo eut été demandé concernant l’avis d’une motion votable devant être débattue et tranchée lors d’un jour réservé aux travaux des subsides tombant un vendredi, une objection a été soulevée parce que cet embargo avait pour effet de réduire le délai de préavis de 48 heures exigé dans les circonstances160. Dans sa décision, le Président Fraser a conclu que les exigences en matière de préavis avaient été dans ce cas-là respectées, qu’un embargo pouvait avoir de sérieuses conséquences, mais que la décision revenait au parrain de la motion et que la présidence et les greffiers au Bureau se devaient de suivre l’usage habituel161. Cet usage a été de nouveau confirmé par le Président Milliken en 2005 dans une décision portant sur des circonstances semblables162.
Des députés ont déjà invoqué le Règlement au sujet de la recevabilité des motions inscrites au Feuilleton des avis ; parfois, la présidence a refusé de se prononcer tant que les motions n’avaient pas été réellement soumises à la Chambre (c’est-à-dire mises en délibération)163, et, à d’autres moments, elle a rendu une décision avant que la motion ne soit présentée à la Chambre164.
Retrait d’un avis
Tant que la Chambre n’est pas saisie d’une motion ou que la motion n’est pas placée à l’ordre de priorité, elle demeure un avis de motion que le parrain peut retirer sans demander le consentement de la Chambre165. Pour ce faire, le député demande par écrit que le Greffier retire l’avis ou il se lève à la Chambre pour le retirer oralement166. L’affaire est alors rayée du Feuilleton des avis ou du Feuilleton. Autrement, dans certaines circonstances, si le parrain refuse de présenter la motion lorsqu’elle est mise en délibération, elle est rayée du Feuilleton167. Des avis ont également été rayés du Feuilleton et Feuilleton des avis à la demande du Président, à la suite du décès ou de la démission de leur parrain168.
On juge que la Chambre est saisie d’une motion ou d’un avis de motion dans les conditions suivantes :
- une fois qu’une motion a été présentée169 ;
- une fois qu’une motion émanant d’un député a été placée à l’ordre de priorité après un tirage au sort pour établir ou compléter l’ordre de priorité170 ;
- une fois qu’est inscrit à l’Ordre du jour un avis d’une motion du gouvernement171 ou un avis d’une motion des voies et moyens172.
La motion ou l’avis de motion ne peut alors être rayé du Feuilleton sans le consentement de la Chambre. Le député ou le ministre qui parraine l’affaire doit demander son retrait et la Chambre doit donner son consentement unanime avant qu’on puisse la retirer173.
Modification d’un avis
Il est permis de modifier un avis de motion inscrit au Feuilleton des avis si les changements visent uniquement la forme et non le fond ou la portée de l’avis original174. Pour modifier le fond d’un avis, il faut (s’il y a absence de consentement unanime) le remplacer par un nouvel avis, qui est alors assujetti aux exigences habituelles en matière de préavis175.
Avis oral
Certaines affaires n’exigent pas d’avis écrit de 48 heures ; il suffit qu’un avis oral soit fourni durant une séance de la Chambre. Ainsi, un avis oral d’au moins 24 heures est requis pour autoriser un ministre à présenter une motion de clôture176, ou une motion d’attribution de temps lorsque les partis ne sont pas parvenus à s’entendre177. Un ministre peut également proposer la tenue d’un débat exploratoire à la condition qu’il ait présenté une motion au moins 48 heures avant le début du débat178.
Aucun avis exigé
En règle générale, aucun avis n’est exigé pour les motions qui découlent d’une affaire déjà à l’étude à la Chambre (ce qu’on appelle les motions « subsidiaires »). D’autres motions n’exigent pas non plus d’avis en raison des usages de la Chambre ou en vertu d’une disposition précise du Règlement. En voici des exemples :
- les motions traitant de la progression d’un projet de loi après sa présentation179 ;
- les motions de renvoi (d’une question à un comité plénier ou à un autre comité) ;
- les motions concernant la question préalable180 ;
- les motions d’ajournement de la Chambre181 ;
- les motions d’ajournement du débat ;
- les motions portant qu’un autre député « soit maintenant entendu182 » ;
- les motions proposant de passer à l’Ordre du jour183 ;
- les motions d’amendement d’une question déjà soumise à la Chambre ;
- les motions de renvoi d’une question à une date spécifique184 ;
- les motions proposant de passer à une autre affaire ;
- les motions d’attribution de temps pour l’étude d’un projet de loi lorsqu’il y a entente avec tous les représentants des partis ou avec la majorité d’entre eux185 ;
- les motions nécessaires pour fixer les jours de séance et les heures d’ouverture186 ou d’ajournement de la Chambre ;
- les motions visant à prolonger une séance187 ;
- les motions du gouvernement visant à suspendre les règles régissant les avis et les heures de séance en vue de l’étude d’une question de nature urgente188 ;
- les motions du gouvernement concernant des affaires courantes pour lesquelles le consentement unanime exigé a été refusé189 ;
- les motions concernant les questions de privilège jugées fondées de prime abord190 ;
- les motions visant à corriger les comptes rendus de la Chambre ;
- les motions traditionnellement expédiées par la Chambre le jour d’ouverture d’une session191 ;
- les motions de sélection d’un Vice-président de la Chambre et vice-président des comités pléniers, d’un vice-président adjoint de la Chambre et vice-président des comités pléniers et d’un vice-président adjoint de la Chambre et vice-président adjoint des comités pléniers192 ;
- les motions nécessaires à l’observation du décorum de la Chambre.
Publication d’un Feuilleton et Feuilleton des avis spécial
Avant le début d’une session ou lorsque la Chambre s’est ajournée, le gouvernement peut souhaiter que les députés, lorsqu’ils reprendront leurs travaux parlementaires, se penchent immédiatement sur une ou des questions pour lesquelles un avis aura déjà été transmis. Dans ces circonstances, le gouvernement communique ses intentions au Président, qui fera alors publier un Feuilleton et Feuilleton des avis spécial qui contiendra des avis des mesures que le gouvernement entend faire étudier immédiatement par la Chambre193. Le Président s’assure également que ce Feuilleton et Feuilleton des avis spécial est distribué à tous les députés au moins 48 heures avant le début de la séance. Un tel Feuilleton et Feuilleton des avis spécial a été publié et distribué plus d’une vingtaine de fois194.
Délais de préavis spécifiques
Le délai de préavis (c’est-à-dire la période de temps qui doit s’écouler avant que l’affaire ne puisse être étudiée par la Chambre) varie selon le type de motion. La plupart des avis paraissent dans le Feuilleton des avis, mais certains peuvent être transmis au Président par écrit ou fournis à la Chambre oralement (accompagnés d’un texte écrit). Dans la plupart des cas, un délai de préavis de 48 heures est exigé195, mais ce délai peut varier d’une heure à une semaine.
Avis de quarante-huit heures
Dans les faits, le préavis de 48 heures ne constitue pas exactement une période de 48 heures consécutives, mais signifie plutôt une première publication de l’avis dans le Feuilleton des avis et son transfert le lendemain dans le Feuilleton. Ainsi, un député peut donner avis d’une affaire à 18 heures un mardi et pouvoir présenter sa motion dès 10 heures le jeudi (l’avis ayant paru dans le Feuilleton des avis le mercredi et dans le Feuilleton le jeudi)196. De plus, un député donnant avis d’une motion un vendredi avant 14 heures peut proposer la motion à la Chambre le lundi suivant, puisque le délai de préavis minimal (48 heures) s’est écoulé au cours de la fin de semaine197.
L’exigence du préavis de 48 heures s’applique aux motions visant la présentation d’un projet de loi d’intérêt public, d’une résolution ou d’une adresse, la création d’un comité ou l’inscription d’une question au Feuilleton198.
Voici d’autres affaires nécessitant un avis écrit de 48 heures :
- les réunions visant à élire les présidents de comités199 ;
- les réunions de comités convoquées en vertu de l’article 106(4) du Règlement ;
- les avis d’opposition à tout poste du Budget des dépenses durant la période des subsides se terminant le 23 juin200 ;
- les motions d’amendement présentées à l’étape du rapport d’un projet de loi n’ayant pas encore franchi la deuxième lecture201 ;
- les motions portant adoption d’un rapport de comité ;
- les résolutions visant à abroger un règlement ou un texte réglementaire présentées à la Chambre sous forme de rapports du Comité mixte permanent d’examen de la réglementation202 ;
- les motions portant adoption des crédits provisoires, du Budget principal des dépenses et des Budgets supplémentaires, ou les motions visant à rétablir un poste du budget203 ;
- les motions de l’opposition présentées lors des jours réservés aux travaux des subsides204 ;
- les échanges de positions sur l’ordre de priorité (Affaires émanant des députés)205 ;
- les avis de motions portant production de documents206 ;
- les réunions convoquées par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour étudier une mesure disciplinaire, conformément à l’article 29(4) du Code de conduite.
Avis de vingt-quatre heures
Certaines affaires exigent un préavis de 24 heures. Comme pour les avis de 48 heures, il ne s’agit pas d’un délai réel de 24 heures. Pour les avis écrits, ce délai de 24 heures signifie simplement qu’une motion peut être proposée une fois qu’elle a paru à la fois dans le Feuilleton des avis et dans le Feuilleton (le texte de la motion paraît simultanément dans ces deux publications). Ainsi, si la motion est déposée à 18 heures le lundi, elle peut être mise en délibération à 10 heures le mardi. Pour les avis oraux (accompagnés d’un texte écrit), s’ils sont déposés à n’importe quel moment durant une séance de la Chambre, la motion peut être étudiée lors de la séance suivante.
Un avis écrit de 24 heures est exigé pour :
- les motions concernant des amendements à un projet de loi apportés par le Sénat207 ;
- les motions d’amendement à un projet de loi présentées à l’étape du rapport, après la deuxième lecture208 ;
- les avis d’opposition à un poste du Budget des dépenses, sauf pour les avis présentés durant la période des subsides se terminant le 23 juin209 ;
- l’affaire incluse dans l’ordre de priorité qui doit être étudiée durant l’heure réservée aux Affaires émanant des députés210 ;
- les Affaires émanant des députés qui ont été reportées en vertu de l’article 30(7) du Règlement ;
- les réunions d’un comité étudiant un projet de loi d’intérêt privé présenté au Sénat en premier211.
Un avis oral (accompagné d’un texte écrit) de 24 heures est exigé pour :
- les motions de clôture212 ;
- les motions d’attribution de temps pour l’étude d’un projet de loi lorsque les représentants des partis ne parviennent pas à s’entendre213.
Avis d’une heure
Les députés doivent fournir un avis écrit d’au moins une heure au Président dans deux situations, c’est-à-dire lorsqu’ils souhaitent :
- soulever au cours d’une séance une question de privilège concernant une affaire qui ne découle pas des délibérations de la Chambre214 ;
- demander la permission de présenter une motion d’ajournement de la Chambre afin de débattre « d’une affaire déterminée et importante dont l’étude s’impose d’urgence » (demande d’un débat d’urgence215).
Avis d’une semaine
Un avis écrit d’une semaine est exigé pour la réunion d’un comité étudiant un projet de loi d’intérêt privé présenté en premier à la Chambre des communes216.
Règles ayant des effets semblables à l’avis
Bien qu’il ne s’agisse pas d’exigences de préavis, certaines règles de procédure ont des effets semblables aux exigences de préavis en ce que l’étude d’une affaire ne peut commencer avant un certain intervalle ou un certain délai suivant la présentation à la Chambre d’un rapport ou la survenue d’un autre événement à la Chambre. Par exemple :
- l’étape du rapport d’un projet de loi renvoyé à un comité permanent, spécial ou législatif avant la deuxième lecture ne peut pas commencer avant le troisième jour de séance suivant la présentation à la Chambre du rapport de ce comité217 ;
- l’étape du rapport d’un projet de loi renvoyé à un comité permanent, spécial ou législatif après la deuxième lecture ne peut pas commencer avant le deuxième jour de séance suivant la présentation à la Chambre du rapport de ce comité218 ;
- il doit s’écouler 10 jours de séance entre la première et la deuxième heure de débat sur les projets de loi émanant des députés à l’étape de la deuxième lecture ou sur les motions émanant des députés dont on n’a pas encore disposé219 ;
- un débat exploratoire ne peut avoir lieu moins de 48 heures suivant l’adoption de la motion qui en ordonne la tenue220.