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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 7 décembre 1995

.1530

[Traduction]

Le président: Messieurs, la séance est ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi 108(2), nous faisons l'étude du Rapport de la Commission spéciale sur la restructuration des réserves.

À l'approche de la fin de nos audiences, j'ai le plaisir d'accueillir aujourd'hui nos représentants de la région de l'Atlantique. Nous entendrons le lieutenant-colonel Mackay, du Conseil consultatif sur le Royal Newfoundland Regiment, et le colonel Fearon Currie, commandant du district du Nouveau-Brunswick - Île-du-Prince-Édouard.

Messieurs, je vous prierais de présenter vos exposés. Nous ferons ensuite un tour de table pour des questions et des observations. Vous avez la parole.

Colonel P. Fearon Currie (commandant, district du Nouveau-Brunswick - Île-du- Prince-Édouard): Monsieur le président, madame et messieurs les membres du comité, bon après-midi. Je suis le colonel Fearon Currie et je suis le commandant du District du Nouveau-Brunswick - Île-du-Prince-Édouard, qui a ses quartiers généraux à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Je vis à Saint John, où je suis chef de service au New Brunswick Community College.

Je suis ravi d'être ici aujourd'hui pour vous parler de ce rapport qui est très important et a une très grande portée. J'ai l'intention de présenter oralement, dans le temps qui m'est imparti, le point de vue de notre district sur les recommandations clés qui nous touchent. J'ai aussi rédigé des notes sur la plupart des recommandations. Je crois que vous en avez des copies entre les mains.

Pour préparer cet exposé, j'ai obtenu la contribution de mes huit commandants. Tous mes propos se situent donc généralement dans la perspective du district et ont quelques implications pour l'ensemble du Secteur de l'Atlantique de la Force terrestre.

En gros, nous trouvons que le rapport constitue un portrait juste et honnête des réserves, telles qu'elles existent actuellement. Nous sommes conscients que des changements sont nécessaires et essentiels pour assurer l'efficience maximale des ressources affectées aux réserves. Le rapport est bien écrit, bien documenté et représentatif de toutes les parties intéressées dans les Forces armées canadiennes.

Cela dit, quelques recommandations nous inquiètent un peu, surtout dans le secteur de l'Atlantique. Si nous vivions dans un monde utopique, ces 41 recommandations seraient approuvées et les réserves resteraient au service. Mais ce n'est pas le cas, je crois. Le travail le plus difficile reste encore à venir; il s'agit de mettre en oeuvre l'ensemble ou une partie de ces recommandations. Une question théorique pourrait être: quel sera le résultat final?

J'aimerais maintenant mettre l'accent sur certaines recommandations qui, de l'avis de notre district, méritent qu'on s'y attarde.

Au sujet de la recommandation 6, à la page 33, nous n'avons pas d'objection réelle à l'élimination des districts et à ce qu'ils soient remplacés par des groupes-brigade. Toutefois, mon district et le SAFT se trouvent dans une position particulière par rapport aux autres SFT. Dans le secteur de l'Atlantique, nous n'avons pas de brigade régulière pour nous aider au niveau de l'instruction et du soutien. Le Centre de l'instruction au combat de Gagetown ne peut remplir ce rôle. Nous demandons donc au comité de considérer d'autres solutions pour tenir compte de notre situation particulière.

Nous voulons faire quelques observations auxquelles nous sommes parvenus collectivement dans notre district. Nous devrions maintenir au moins dix cadres de la force régulière dans chaque unité. Ce minimum est crucial si nous mettons sur pied un groupe-brigade et ne tenons pas compte des fonctions quotidiennes de soutien administratif et d'instruction nécessaires pour l'instruction des unités.

Un autre aspect à souligner est que l'opération Enhancement a décidé que tous ses crédits iraient aux trois brigades de la force régulière et rien du tout au SAFT. L'armée devrait revenir sur cette décision et affecter certains de ces crédits au renforcement du SAFT, en fonction du nombre minimum de cadres de la Force régulière que je viens d'indiquer. Il faut faire preuve d'une certaine souplesse pour que le SAFT en profite lui aussi, parce qu'une grande partie de ces crédits proviendront directement des unités de notre secteur.

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Troisièmement, si le comité se reporte à la figure 1 de la page 29, nous faisons les observations suivantes au sujet de la taille relative de nos unités: le SAFT en a 173, le SQFT 183, le SCFT 128 et le SOFT 101. Ces chiffres sont tirés du rapport. Nos observations portent sur la nécessité de maintenir une présence géographique dans le secteur de l'Atlantique. Deux groupes-brigade serviraient peut-être mieux l'objectif énoncé dans le rapport au sujet de cette présence. Nous vous renvoyons à la recommandation 8 g), qui met l'accent sur la présence géographique.

Le président: Messieurs, je vous interromps un instant. L'un de nos membres libéraux de l'Ontario est très indisposé par le mot «footprint» en anglais. Il croit que cela désigne «quelque chose qui est resté». Je vous le signale simplement.

M. O'Reilly (Victoria - Haliburton): Monsieur le président, je vous remercie de signaler au moins une de mes opinions.

Je suis désolé d'intervenir, mais pour moi le terme employé désigne ce qui reste quand on s'en va. Je préfère le mot «présence». Je vais le changer dans le rapport, si je le peux. Il y a une empreinte militaire dans ma circonscription - il n'y a aucun militaire chez nous. Mais il n'y a pas de présence non plus.

Merci, monsieur le président.

Le président: Vous pouvez poursuivre, colonel Currie. Il a fait sa marque au comité, mais il n'a pas laissé d'empreinte.

M. O'Reilly: Pas d'empreintes.

Col Currie: Nous estimons que la recommandation 8, à la page 35, est la recommandation clé du rapport et nous appuyons entièrement les idées qui y sont exposées. Un aspect crucial de cette recommandation est que le commandant de secteur ait la responsabilité et le pouvoir de concevoir son groupe-brigade et ses quartiers généraux divisionnaires à l'intérieur des lignes directrices imposées par le commandant du CFT.

La recommandation 9, à la page 37, porte sur la DTA, la Dotation totale de l'Armée. C'est l'une des recommandations les plus controversées du rapport. En principe, nous sommes d'accord avec la DTA, parce que nous comprenons la réalité budgétaire du financement actuel. Encore une fois, le commandement du SAFT doit recevoir des directives qui lui permettent de parvenir au résultat final escompté tout en demeurant fidèle au préambule de la recommandation.

Toute réduction de l'effectif imputable à la mise en oeuvre de la DTA devrait perturber le moins possible l'unité et ses soldats. Un programme d'indemnités de départ doit être envisagé sérieusement, non seulement pour les réductions de la DTA mais aussi pour l'ensemble des réservistes. De plus, un surplus doit être prévu dans la DTA, pour la raison évidente que les citoyens-soldats ont un autre emploi à plein temps qui limite l'instruction dans la réserve et que quelqu'un d'autre doit prendre leur relève.

La DTA correspond définitivement au minimum auquel les réserves devraient être ramenées. Si on réduit davantage, il ne restera plus personne. La DTA doit être mise en oeuvre rapidement et être bien planifiée.

La première partie de la recommandation 10, à la page 38, a soulevé toutes sortes de réactions, des plus radicales aux plus songées. La diminution de 25 p. 100 dans l'ensemble du pays est un compromis canadien typique: si l'un d'entre nous souffre, nous souffrons tous. C'est parfois acceptable, mais dans ce cas-ci on ne peut trouver de solides arguments dans le rapport proprement dit pour justifier une réduction inférieure à 25 p. 100 dans mon district et dans les provinces de l'Atlantique. Pour n'en donner que quelques-uns, l'effectif du SAFT représente 86 p. 100 de l'effectif d'un autre SFT, qui a deux brigades et une brigade de la force régulière. Le nombre moyen de soldats par unité du SAFT vient au deuxième rang en importance parmi les quatre SFT. Avec ses 21 unités, une réduction de 25 p. 100 du SAFT a de plus fortes répercussions sur la présence géographique dans les quatre provinces de l'Atlantique que dans les autres SFT.

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Par exemple, la distance, par la route, entre Campbellton, au Nouveau-Brunswick, et Stephenville, à Terre-Neuve, est la même qu'entre Kamloops et Winnipeg, et deux des quatre provinces sont des îles. La portée du contrôle dans ce cas s'applique non seulement aux personnes, mais aussi au temps et à l'espace.

Nous proposons donc qu'une réduction nationale de 25 p. 100 des réserves soit confiée au commandant du CFT, qui pourra ensuite négocier avec les quatre commandants des SFT. Nous croyons qu'une réduction de 25 p. 100 serait dévastatrice pour les réserves de l'armée dans les provinces de l'Atlantique, si nous voulons tenter de maintenir la présence géographique souhaitée dans le rapport.

En conclusion, voilà en gros une partie de mes observations sur le rapport. J'ai d'autres observations sur la plupart des recommandations. Je pense que vous les avez entre les mains et j'espère que vous les trouverez utiles dans vos délibérations.

L'autre aspect que je veux souligner touche aux «deux cultures» décrites dans le rapport. Quand j'ai lu le rapport la première fois - et je l'ai lu à maintes reprises - je me suis rendu compte que c'était la première fois en 21 ans que je voyais l'expression «deux cultures», alors je ne suis pas trop au courant de cet aspect.

Il faut se rappeler qu'un réserviste qui reçoit de 36 à 40 jours d'instruction par année ne peut pas faire des miracles. Il incombe donc à la force régulière de s'assurer que l'instruction des réservistes porte fruit. La clé c'est l'instruction. Je dois avouer que les «deux cultures» ne sont pas très évidentes dans mon district ni dans le SAFT.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, colonel Currie.

Lieutenant-colonel Mackay.

Lieutenant-colonel Barry Mackay (président, Conseil consultatif sur le Royal Newfoundland Regiment): Monsieur le président, messieurs les membres du comité, je suis le lieutenant-colonel Barry Mackay et je suis président du Conseil consultatif sur le Royal Newfoundland Regiment et commandant adjoint du district de Terre-Neuve.

Je suis fier d'être appelé réserviste et je suis réserviste depuis 1959. Dans la vraie vie, je suis directeur de l'informatique au conseil exécutif du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador. Je suis également très fier d'être lié à l'un des rares régiments du Canada qui peut célébrer son200e anniversaire cette année.

J'aimerais faire quelques observations de vive voix et vous remettre des exemplaires du mémoire de trois pages. J'ai discuté de notre exposé avec le commandant du district de Terre-Neuve, avec le commandant du 1er Bataillon du Royal Newfoundland Regiment, et avec l'exécutif de notre conseil consultatif.

Nous félicitons les commissaires d'avoir accompli leur tâche dans des délais très limités et de manière énergique et approfondie. Bien que les audiences n'aient pas attiré l'attention publique autant que nous l'aurions aimé au niveau local, les réservistes sont très au courant de l'importance de la commission.

Il me semble juste d'affirmer que les réservistes ont l'impression que leur cause a été entendue d'une oreille sympathique par les commissaires, qui avaient les compétences et les attitudes nécessaires, et que les commissaires ont mis les réservistes au défi d'analyser, de peser et de considérer avec soin la nature des questions concernant l'état actuel de la milice.

J'ai entendu plusieurs témoins ayant comparu devant la commission déclarer que les questions posées par les commissaires n'étaient pas du tout celles auxquelles ils s'attendaient et qu'ils ont dû y répondre avec soin, ce qui est bien.

Nous nous réjouissons d'un grand nombre des recommandations de la commission et particulièrement des suggestions concernant les moyens de mieux intégrer les réserves et la force régulière ainsi que les lignes directrices pour déterminer l'efficience des unités de réserve, le budget de la réserve, ainsi que la rémunération et les avantages sociaux des réservistes. Beaucoup de ces suggestions sont logiques et conformes à la politique de la force totale, et pour de nombreux réservistes elles semblent avoir été reportées beaucoup trop longtemps.

L'essentiel de notre mémoire pourrait se résumer comme suit: ne jetez pas le bébé avec l'eau du bain.

Nous appuyons les recommandations de la commission concernant la restructuration et la redistribution des quartiers généraux de district. C'est un besoin évident dans les deux cas pour les réservistes qui considèrent avec sérieux le rôle des réserves et le besoin d'accroître leur efficacité dans la conjoncture budgétaire actuelle.

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Mais quand l'armée a répondu aux recommandations de la commission, nous pensons que la commission n'a pas accordé assez de poids à certaines variations régionales importantes. Bien que la commission ait demandé que certains aspects soient discrétionnaires - par exemple, le nombre d'unités que devraient comprendre les brigades d'instruction ou des lignes directrices seulement en vue de décider quelles unités sont efficaces - la commission aurait pu décider de la même façon de recommander que les réductions des effectifs soient déterminées à l'échelle régionale, peut-être en fonction de la présence et d'autres mesures semblables de l'efficacité.

De même, on pourrait soutenir que, tout comme les régions diffèrent d'un océan à l'autre, les districts diffèrent eux aussi. Autrement dit, il y a peu de latitude dans les recommandations de la commission pour l'application de solutions adaptées aux circonstances particulières.

Quelles sont ces circonstances particulières? Il y a des facteurs géographiques évidents, auxquels le colonel Currie a fait allusion, qui font qu'il faut tenir compte du temps et de la distance. Il y a aussi le facteur des points de départ différents selon les secteurs. Ainsi, dans le secteur de l'Atlantique, des efforts spéciaux ont déjà été déployés pour redistribuer les quartiers généraux et pour réduire le ratio élevé des officiers par rapport aux soldats.

Dans notre mémoire, nous présentons des faits et des chiffres sur cette question, afin qu'on examine notre argument que ce qui convient à l'un ne convient pas nécessairement à l'autre. Cela ne veut pas dire que des exceptions devraient s'appliquer à certains secteurs dans la mise en oeuvre des réductions d'effectifs. Ce que cela veut dire, ou voudrait dire, c'est que l'armée devrait peut-être élaborer des lignes directrices régionales en fonction de la taille des quartiers généraux par rapport aux troupes et que ces lignes directrices pourraient être suivies pour déterminer l'ampleur des réductions dans le secteur. Autrement dit, ne pénalisons pas un secteur qui a déjà fait ses devoirs et qui a réduit le personnel de ses quartiers généraux pour devenir plus efficient.

De même, nous demandons qu'on réfléchisse sérieusement ayant de décider comment les quartiers généraux d'instruction des groupes-brigade maintiendront l'efficacité de l'instruction malgré des obstacles somme l'eau et la distance. Il peut être tentant d'imposer une structure comme des quartiers généraux de groupes-brigade parce que c'est militairement logique et d'éliminer les vestiges des quartiers généraux de district, mais cela comporte des risques. Nous demandons que ces risques soient évalués en profondeur avant de prendre des décisions finales - d'où l'allusion au bébé et à l'eau du bain.

Notre mémoire ne traite pas de deux autres aspects qui me tiennent personnellement beaucoup à coeur. Les relations entre la force régulière et les réserves ont toujours été, d'après mon expérience, délicates et sensibles. Je me réjouis des recommandations de la commission en vue de combler le fossé entre ces deux mondes, chacun d'eux ayant ses propres attentes et ses propres attitudes.

La recommandation selon laquelle les réserves devraient fournir des sections et des pelotons aux missions de la force régulière m'a intrigué. J'ai vu une compagnie de réservistes de l'Atlantique travailler avec le 2e RCR à Chypre, et j'ai entendu des rapports sur l'expérience du 2e PPCLI en Bosnie. La recommandation de la commission pose un problème. Si une unité de la milice peut rassembler tous les éléments nécessaires pour former une sous-unité, elle laissera probablement son groupe arrière dans un état tel à la garnison qu'une instruction efficace sera menacée. Je l'ai déjà vu.

Je propose la solution que le 2e RCR a essayée à Chypre. Si un peloton de la réserve est envoyé, son lieutenant ou son second doit provenir de la réserve, mais pas nécessairement du même régiment. Mais cette expérience n'a jamais été répétée - encore que, à mon avis, elle ait été assez réussie - , de sorte que je ne sais pas si on a considéré que c'était un échec ou si une autre occasion ne s'est jamais présentée par la suite.

Enfin, en ce qui concerne le service et la solde, ces aspects me paraissent simples. Un réserviste sert à temps partiel ou à plein temps. S'il sert à plein temps, il a droit à toute la solde parce qu'il s'agit d'un service à plein temps.

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Les classes A, B, BA et C ont toujours semé la confusion dans mon esprit et m'ont toujours frustré. La cause de ma confusion est évidente: il y a tant de classes. Je suis frustré parce qu'il est discriminatoire qu'un réserviste de classe BA fasse un travail comparable à plein temps et ne soit pas rémunéré au même taux qu'un collègue de la force régulière. Ces classes de rémunération devraient être simplifiées et rendues plus équitables. Aux quartiers généraux, ils favorisent encore le service de classe BA, parce qu'ils peuvent obtenir de la main-d'oeuvre à meilleur marché.

Je conclus en disant que si les membres de la force régulière étaient rémunérés selon le SISPR, à l'essai dans le secteur de l'Atlantique depuis trois ans, ce système aurait été rejeté et repensé il y a bien longtemps. Je ne blâmerais pas les contribuables qui demanderaient la tête du gestionnaire de projet. Le nombre de fonctions exécutives créées par ce système devrait le confirmer. Je vous prie d'appuyer la commission et de préconiser vous aussi des mesures correctives immédiates et efficaces. Ne continuons pas à pénaliser nos soldats.

Je vous remercie de votre temps.

Le président: Merci beaucoup, lieutenant-colonel Mackay. Avant de passer aux questions, je voudrais rappeler aux autres membres du comité qui sont arrivés un peu tard que nous siégerons quelques minutes après la fin des témoignages pour décider ce que nous ferons par la suite.

Nous entendrons d'abord M. Leroux.

[Français]

M. Leroux (Shefford): Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue ici aujourd'hui. Hier, trois commandants de bataillon de la réserve sont venus nous rencontrer pour nous dire qu'il serait important que les budgets de la réserve soient gérés par l'état-major du district concerné. Cela voudrait dire que tous les budgets seraient gérés sur place.

J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Est-ce que vous seriez satisfaits si on recommandait la décentralisation des budgets afin que vous puissiez les gérer sur place?

[Traduction]

Lt-col. Mackay: Il est question de budgets et je crois que vous demandez si nous sommes d'accord pour que le district ait le budget et le distribue. C'est ce que nous faisons actuellement. J'ai actuellement un budget pour mes huit unités et nous le distribuons en conséquence.

Est-ce que ce sera encore le cas à l'avenir? Je ne le sais pas et je ne crois pas que mon opinion à ce sujet ait quelque importance dans le cadre de ce rapport.

[Français]

M. Leroux: Vous dites que vous gérez les budgets sur place. Est-ce vous qui émettez les chèques dans votre secteur? Hier, les gens nous disaient que l'émission des chèques n'était pas décentralisée et qu'il serait intéressant qu'elle le soit. Vous me dites le contraire.

[Traduction]

Lt-col. Mackay: Par le passé, les unités avaient l'habitude de payer leurs soldats directement. Au début de ma carrière, la solde était payée environ trois fois par année, et les soldats étaient payés en espèces. Mais les unités ne géraient pas leur propre budget à l'époque. La situation a donc changé en ce sens que les unités - dans notre secteur tout au moins - ont reçu des montants à administrer, mais le processus de paiement ne relève plus d'elles. Il y a donc eu un virage de presque 180 degrés.

À cause des problèmes que pose le SISPR, certaines unités versent actuellement la solde en espèces, tant que la situation n'aura pas été corrigée. Au niveau de l'unité, les budgets ont été délégués à certains commandants d'unité et la plupart des unités du secteur de l'Atlantique, à ma connaissance, ont délégué les budgets, depuis les quartiers généraux de secteur jusqu'au district. Le commandant de district décide comment répartir le budget du district et comment chaque unité l'administre. Les décisions se fondent sur l'effectif réel, les besoins d'instruction et le rôle que chaque unité doit jouer.

.1555

[Français]

M. Leroux: Vous savez que le gouvernement du Canada et le Canada tout entier subissent actuellement beaucoup de pressions afin qu'ils diminuent leurs dépenses. Évidemment, tout le monde doit payer sa quote-part et tout le monde s'entend là-dessus.

Certains témoins se sont dits préoccupés par la disparition des unités de la milice dans les régions rurales. Dans votre région, s'il y a des unités qui disparaissent... On sait en effet que la réserve joue un rôle important auprès de la population, et peut-être davantage au Canada anglais. La tradition est peut-être plus ancrée dans ce domaine au Canada anglais.

S'il y a des unités de milice qui disparaissent, quel en sera, selon vous, l'impact sur les populations des provinces maritimes?

[Traduction]

Col Currie: Premièrement, en ce qui concerne la perte d'unités, je pense que nous devons attendre la publication du rapport final. Je ne veux pas présumer des décisions que prendra mon commandant de secteur au sujet des unités qui resteront. Elles resteront peut-être toutes. Certaines pourraient disparaître. Nous ne le savons pas encore. Par conséquent, lorsque le rapport aura franchi toutes les étapes, nous verrons ce qui en ressortira.

Nous connaissons très bien la répartition ville-campagne dans le secteur de l'Atlantique. Saint John, Moncton, Halifax, Sydney, Charlottetown et St. John's sont les centres urbains. Je pense - et c'est une opinion personnelle - que nous ne pouvons pas concentrer tous nos réservistes dans ces régions. Je suis donc convaincu que le commandant de secteur maintiendra une représentation rurale des réservistes dans le secteur de l'Atlantique.

C'est un peu plus difficile, parce que nous avons deux îles - même si l'une d'entre elles sera reliée avec nous d'ici quelques années. Mais je pense qu'il y aura une présence dans les régions rurales.

[Français]

M. Leroux: La Commission spéciale affirme que les réservistes veulent une loi pour la protection de l'emploi. Mais certains témoins, dont des réservistes, disent qu'on n'en a pas besoin. Qu'en pensent les gens de votre région, surtout les employeurs? Est-ce bien reçu? Est-ce qu'il y a des problèmes et, s'il y en a, pourriez-vous nous les exposer tout de suite?

[Traduction]

Lt-col. Mackay: Monsieur le président, je favorise personnellement une telle loi depuis un certain temps. Par ailleurs, j'ai parlé au fil des années avec les membres du CLFC, le Conseil de liaison, qui se soucie tout particulièrement de l'incidence éventuelle de cette loi. Ils estiment, comme vous le savez probablement, que cette loi empêcherait les employeurs d'embaucher des réservistes.

Un employeur pourrait juger que, s'il y a deux candidats pour un poste et que l'un d'eux peut partir à n'importe quel moment, ou s'il était forcé de renoncer à l'un de ces employés pour que ce dernier aille servir quelque part, il vaut probablement mieux choisir l'autre candidat. Il y aurait donc une certaine discrimination contre le réserviste au moment de l'embauche.

Je pense personnellement que le CLFC exagère la situation, pour deux raisons. Premièrement, je pense que la commission elle-même soutient qu'il n'y a pas beaucoup de réservistes dans la population active de toutes façons, que les répercussions ne seront pas très importantes sur les employeurs, et qu'elles seraient probablement minimes sur les employeurs dont les effectifs sont élevés. Mais les facteurs régionaux entrent en jeu une fois de plus. D'après ce que je peux voir, il n'y a pas beaucoup d'employeurs de la région de l'Atlantique ayant des effectifs élevés. Les petites entreprises constituent une forte proportion de notre secteur privé, de sorte que les répercussions du départ des réservistes pourraient être plus grandes dans certaines régions que dans d'autres. La loi pourrait avoir des incidences différentes selon les régions.

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En résumé, j'aimerais que la loi soit adoptée, à condition qu'elle ne soit pas punitive, qu'elle offre des encouragements pour inciter un employeur à embaucher des réservistes. Jusqu'ici, le CLFC s'est fondé sur l'hypothèse que, si les employeurs connaissaient la haute qualité d'employés que constituent les réservistes, ils seraient plus enclins à en embaucher. Mais je pense qu'il faut d'autres encouragements, d'autres mesures incitatives. Si ces encouragements existaient, alors je pense que le processus et la loi pourraient venir à bout de la résistance que prévoit le CLFC. Il me semble important que les employeurs sentent que c'est une bonne chose d'embaucher des réservistes, mais pas qu'ils le font parce qu'ils sont obligés. C'est une distinction importante.

Col Currie: Monsieur le président, puis-je intervenir? Quand le Nouveau-Brunswick a organisé une journée des réserves en octobre, le Nouveau-Brunswick a été la première province à reconnaître les fonctionnaires, en ce sens qu'elle a adopté une loi permettant aux fonctionnaires de prendre des congés de travail pour participer à l'instruction des réservistes, tant que c'est avantageux pour les deux parties. Il y a donc une loi officielle au Nouveau-Brunswick, et j'espère que des situations de ce genre se répandront au pays. Pour les raisons évoquées par Barry Mackay, je préférerais que ce genre d'effort collectif se fasse par l'entremise du CLFC plutôt que par des lois. Je l'ai mentionné dans mon exposé et je pense que nous devons faire très attention à cette question.

M. Leroux: Merci beaucoup, messieurs.

Le président: Monsieur Richardson.

M. Richardson (Perth - Wellington - Waterloo): J'aimerais souhaiter la bienvenue aux membres du secteur de l'Atlantique.

J'ai apprécié votre exposé. J'aimerais revenir sur ce qui s'approche le plus de ce que nous faisons de bien, c'est-à-dire la réserve navale. Elle possède les effectifs nécessaires et s'est dotée de programmes. Comme les autres, elle semble éprouver certaines difficultés, mais elle a une tâche, elle a l'équipement, elle reçoit l'instruction nécessaires. La seule variable, c'est au bas de l'échelle. On se demande toujours s'il y a assez de viande dans le saucisson. Pour être franc, je n'aime pas employer cette expression, mais on l'emploie souvent dans le service. Quoi qu'il en soit, le moral semble élevé. Je ne pense pas avoir rencontré de membre de la réserve navale qui n'était pas heureux de servir dans cette réserve. J'entends très peu de plaintes à son sujet.

Pourquoi les deux autres forces ne peuvent-elles pas élaborer de plan qui prévoit le personnel - autrement dit, le recrutement - l'instruction pour être à la hauteur de la tâche et l'équipement avec lequel s'entraîner? Cela paraît si simple en apparence, mais il semble aussi tellement difficile pour la réserve de la force terrestre et la réserve aérienne d'être aussi cohésives. Avez-vous une opinion à ce sujet?

Col Currie: Je pourrais faire quelques commentaires, messieurs. Je ne peux répondre précisément à la question parce que je ne connais pas bien la réserve navale. J'ai servi six ans dans les cadets de la marine, mais cela ne fait pas de moi un expert.

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La marine d'aujourd'hui a de nouvelles frégates. Le premier navire de défense côtière a été mis à l'eau. Il y a un petit - et quand je dis «petit», je parle du nombre - groupe dans la réserve navale. Ils ont de nouveaux manèges militaires. À Saint John, il y en a un de 18 millions de dollars. Ils ont donc certainement beaucoup de puissance en surface et probablement sous l'eau également.

Le président: Nous l'espérons.

Col Currie: La réserve de l'armée, par contre, est beaucoup plus grande, plus complexe du point de vue du commandement et du contrôle. Ils ont deux quartiers généraux, MARLANT et MARPAC, tandis que nous avons quatre secteurs de la force terrestre. Et nous n'avons certainement pas de rôles, de tâches ni de missions définis. Quand je pose des questions, on me répond toujours: «Augmentez la force régulière». C'est tout ce que je peux dire.

M. Richardson: Dans la même veine, durant des années l'idée des quatre étapes du renforcement a été répandue dans le cadre de la doctrine de l'armée, mais elle n'a certainement jamais été aussi codifiée que depuis deux ans. L'augmentation a toujours fait partie des aspects abordés. Une partie de cette augmentation ne voulait pas dire aller directement à la guerre, parce que des techniciens formés étaient retirés des bases, parce que c'était ce qui allait leur manquer et qu'on les ramènerait dans la force opérationnelle, et que les réservistes arriveraient sur ces bases et prendraient la relève en appliquant les compétences acquises dans la vie civile.

La doctrine de l'armée ne semble pas aussi limpide que celle de la marine. Je ne sais pas comment remédier à la situation. Par ailleurs, il faut comprendre aux échelons les plus bas en quoi consiste la marine, en quoi consiste l'armée. J'espère qu'on pourra régler cette question. Cela contribuerait à clarifier le rôle des réserves.

Cela dit, j'aimerais entendre votre opinion sur quelques aspects que j'évoquerai très brièvement. Qu'est-ce qui fonctionne dans les réserves actuellement? Pensez-vous que la commission a dégagé les aspects positifs? Sinon, qu'est-ce qui lui a échappé?

Lt-col. Mackay: Ce qui fonctionne dans la milice aujourd'hui? Ce qui me réjouit le plus, c'est l'attitude des soldats qui s'enrôlent dans la milice. Ils sont tout aussi déterminés et enthousiastes - même plus - que lorsque j'ai commencé ma carrière. L'intérêt, l'engagement, la motivation sont tous là. Mais je ne pense pas que nous réussissons très bien à profiter au maximum de ces atouts, pour être franc.

La commission a frappé juste. Nous avons besoin d'une meilleure organisation, nous avons besoin de meilleures procédures budgétaires, nous avons besoin d'un meilleur commandement et d'un meilleur contrôle et nous avons besoin d'une meilleure définition des missions et de meilleures conditions de travail ou de service. La commission a fait un excellent travail. Je suis content des recommandations qu'elle a faites à ce sujet. Je ne peux qu'entrevoir des améliorations. Je ne crois pas que la commission ait fait de recommandations avec lesquelles je ne suis pas d'accord.

Mais beaucoup d'aspects de la milice fonctionnent déjà bien. Je ne crois pas qu'elle soit en difficulté. L'état de la milice n'est pas aussi faible ni déficient qu'on l'a peut-être décrit dans certains secteurs ou dans certains milieux. J'en suis fermement convaincu.

Col Currie: Je partage l'avis du Lt-col. Mackay. Je suis d'accord en principe avec les41 recommandations. Ils ont fait un excellent travail.

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En discutant avec beaucoup de gens de mon rang et de rangs inférieurs, ce que j'ai fait avant de venir ici, je me suis aperçu qu'ils croient que tout cela sera accepté, pour parler carrément. Tous les avantages prévus pour les réservistes remonteraient grandement le moral des réservistes. Donnez-leur des missions, des rôles, des tâches, et cela ferait monter les présences et baisser l'attrition des réserves. Cela contribuerait grandement à faire disparaître ces «deux cultures» chez les réservistes.

Augmentez l'instruction des réserves, pour que le caporal de la réserve ait la même instruction que le caporal de l'armée régulière. À l'heure actuelle, mon district a vérifié l'instruction du personnel, et les réservistes reçoivent - règle générale, mais ne me citez pas là-dessus - environ les deux tiers de l'instruction d'un régulier. Les normes sont identiques, les objectifs de rendement sont identiques, mais ils ne reçoivent pas le même temps d'instruction; ils n'atteignent pas le même nombre d'objectifs de rendement.

Si nous tenions compte de cet aspect, nous ferions disparaître la mentalité de «Je suis un soldat professionnel et tu es un guerrier du dimanche». Nous devons nous débarrasser de cette attitude.

M. Richardson: C'est une bonne observation. Une partie du personnel reçoit une formation de leadership au niveau de membres du rang et d'autres, au niveau d'officier. S'ils ne sont pas considérés comme des égaux, on a l'impression qu'ils ne sont pas à la hauteur; autrement dit, on peut les regarder avec condescendance.

Le président: Monsieur Hart.

M. Hart (Okanagan - Similkameen - Merritt): Bienvenue, lieutenant-colonel Mackay et colonel Currie. C'est bon de vous voir ici aujourd'hui. Beaucoup de pression s'exerce sur vous - je veux que vous le sachiez - parce que c'est le dernier jour où nous entendons des témoins. Vous avez donc le champ libre. Vous avez la chance de laisser une forte impression sur le comité.

J'ai quelques questions, d'abord au sujet du recrutement au niveau de l'unité. Estimez-vous que le système de recrutement actuel contribue à maintenir le corps ou avez-vous du mal à recruter?

Col Currie: Nous nous regardons toujours pour voir qui va répondre. Je vais essayer.

J'ai rencontré dimanche dernier le recruteur en chef pour le district du Nouveau-Brunswick - Île-du-Prince-Édouard. Nous allons examiner quelques aspects.

Règle générale, depuis que le recrutement pour la force totale est entré en vigueur, nous avons constaté une hausse de la qualité des soldats que nous recrutons au niveau de l'unité. Certains secteurs de recrutement pourraient être améliorés.

M. Hart: Par exemple?

Col Currie: La vérification de fiabilité, par exemple. Là encore, j'emploie le terme «arme à deux tranchants». Nous devons nous assurer que les personnes que nous recrutons ont effectivement le droit de devenir membre des Forces armées canadiennes. C'est le but de la vérification de fiabilité. Mais, comme on le recommande dans le rapport - et je suis tout à fait d'accord - on peut les enrôler conditionnellement pendant que s'effectuent les vérifications de fiabilité et, si quelque chose les empêche de devenir membres des Forces armées, ils ont signé un document qui les lient devant la loi.

M. Hart: Vous voulez qu'ils se retrouvent au manège militaire le plus rapidement possible.

Col Currie: C'est exact. On a raconté tant d'histoires par le passé au sujet de soldats qui ont demandé à devenir membres d'une unité et qui ont dû attendre jusqu'à quatre mois. Ils trouvent ailleurs du travail à plein temps ou à temps partiel, ou ce qu'ils cherchaient, et nous les perdons.

La moyenne actuellement dans mon district est de quatre à six semaines, je dirais. Ce n'est pas mal, comparativement à ce que c'était par le passé. Il m'a fallu huit mois avant de m'enrôler.

.1615

M. Hart: Avez-vous quelque chose à ajouter?

Lt-col. Mackay: Oui, quelques brefs commentaires de plus. Je crois que le système de recrutement actuel réussit bien à fournir des réservistes d'aussi grande qualité que les réguliers. Les normes sont équitables. Elles sont identiques.

Cela veut dire qu'il y aura des retombées positives pour les réservistes, parce que, le jour où ils voudront aller en Bosnie ou prendre du service dans la force régulière, il n'y aura plus les délais que nous avons connus par le passé quand la force régulière prétendait que ces réservistes avaient été recrutés en fonction de normes inférieures à celles des réguliers et qu'elle doutait des compétences des réservistes. Ils pouvaient vérifier les compétences des réservistes et s'apercevoir que les normes n'étaient pas satisfaites et refuser à certaines personnes d'aller servir outre-mer.

Ils ont réglé le problème des normes en enrôlant les réservistes dans les mêmes centres de recrutement que les réguliers. Le seul problème, c'est qu'ils ne recrutent plus de réguliers, alors ils n'ont rien d'autre à faire de toutes façons.

M. Hart: L'autre problème que nous avons entendu est que les unités locales pouvaient envoyer plus de monde au manège militaire, mais que des limites ont été imposées dans les divers secteurs, de sorte qu'elles ne peuvent atteindre les effectifs nécessaires. Avez-vous des problèmes dans votre secteur?

Col Currie: C'est une question de budgets. C'est tout ce que je peux dire, monsieur Hart.

M. Hart: Avez-vous ce problème?

Col Currie: Pas dans mon district.

Lt-col. Mackay: Nous avons plus de recrues qu'il n'en faut.

M. Hart: En ce qui concerne la solde, il semble y avoir beaucoup de problèmes au sujet de la solde des réservistes. Je crois que le précédent gouvernement conservateur s'est penché sur cette question et consacré environ 4 millions de dollars à l'étude du problème. Il y a eu un programme de mise en oeuvre et ils ont dépensé encore et nous n'avons toujours pas un système de la solde des réservistes à la hauteur. Quel est le problème?

Lt-col. Mackay: Je suis un professionnel en informatique, c'est donc un sujet qui m'intéresse personnellement.

Col Currie: Allez-y.

Lt-col. Mackay: Mais je dois me rappeler que je porte aussi un uniforme. Nous avons toutefois décidé plus tôt de nous exprimer assez librement.

M. Hart: Je l'espère bien.

Lt-col. Mackay: Voilà. Je ne pense pas que le système a été bien conçu au départ. En tant que système informatique, il y a quelques lacunes de base en ce qui concerne la technologie employée, les communications et la façon dont il a été conçu par rapport aux centres de la solde, à la salle d'exercices et au système central à Ottawa. Il y a beaucoup de communications entre tous ces divers sous-systèmes et trop d'erreurs sont commises lors de la transmission.

Cela dit, il y a eu également au départ des problèmes concernant les opérateurs du système. Ils n'étaient pas bien formés. Nous avons dû déployer des efforts spéciaux pour que tous les opérateurs soient mieux formés, mais je dois souligner que, encore maintenant, quand les soldats vont suivre leur formation de commis à l'administration, ils n'en reçoivent aucune au sujet du SISPR. Ils reçoivent encore une formation concernant l'ancien système RDS.

M. Cannis (Scarborough-Centre): Le SISPR, c'est le logiciel que vous utilisez?

Lt-col. Mackay: Le SISPR est un système intérimaire de la solde à l'essai dans le secteur de l'Atlantique. Il servira un jour à payer tous les réservistes, à ce qu'on nous dit.

M. Hart: Pourquoi ne peuvent-ils pas simplement utiliser le même système que dans la force régulière?

Col Currie: Nous avons posé cette question.

M. Hart: Je ne sais pas. Cela paraît simple. Il y a un système de la solde pour la force régulière...

Col Currie: Oui. Je suis désolé.

M. Hart: ...qui prévoit le versement automatique de la solde du personnel en service dans les banques. Ce système est en place. Les réguliers sont payés ainsi mais nos réservistes attendent des mois et des semaines. La solde est toujours en retard et n'est jamais exacte.

Col Currie: C'est pire que cela. Le secteur de l'Atlantique, le SAFT, a été choisi comme secteur pilote pour mettre à l'essai le SISPR. C'est devenu très démoralisant pour nos soldats. Les dossiers de personnes mal payées ou non payées rempliraient deux ou trois boîtes.

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Je conviens avec vous que si le gouvernement du Canada peut payer ses soldats de la force régulière, il est certainement capable de payer ses soldats à temps partiel. Je travaille dans un collège communautaire. Nous avons des employés à temps partiel et à plein temps, et ils sont tous payés le même jour.

Lt-col. Mackay: Une partie du problème, monsieur Hart, c'est que le SISPR est plus qu'un système de la solde. C'est un système de gestion des ressources humaines, et un grand nombre de données du système se rapportent aux compétences, à l'instruction et à d'autres questions relatives au personnel. Ce ne sont pas des questions se rapportant directement à la solde. En ce sens, le système est mal équilibré.

L'autre aspect du problème, c'est qu'il est plus simple dans la force régulière de payer un soldat qui reçoit un salaire que quelqu'un qui vient telle fin de semaine, ou tel jeudi soir ou à des périodes peu fréquentes pour des durées différentes. C'est donc un peu plus complexe.

M. Hart: En ce qui concerne la rentabilité de la réserve, personne ne sait vraiment si elle est efficiente ou pas, mais nous avons entendu dans des témoignages que 5 p. 100 du budget consacré à la rémunération permet de payer 20 p. 100 des réservistes qui sont allés dans l'ex-Yougoslavie et ont servi au sein de la FORPRONU. Cela me semble assez rentable.

Que pensez-vous de la recommandation concernant la réduction de 25 p. 100?

Col Currie: Je n'ai pas vraiment de données pour le confirmer ni pour faire des remarques que vous pourriez trouver utiles. Je suis désolé, je ne peux tout simplement pas répondre à cette question.

Lt-col. Mackay: Je ne suis pas emballé. J'ai vu la milice se rétrécir comme une peau de chagrin au fil des années. Quand je me suis enrôlé dans la milice, un grand nombre des réservistes étaient des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale; ils étaient très nombreux. C'était une organisation unique. Elle l'est encore, mais elle a changé complètement. C'est un monde différent, et nous devons faire mieux avec moins. Nous le reconnaissons tous, mais cela fait encore mal de voir les compressions. Nous devons apprendre à vivre avec ces contraintes.

M. Hart: Il me semble cependant que nous devrions probablement essayer de trouver des moyens d'être efficients dans d'autres domaines. La commission exprime cet avis aux pages 78 et 79, quand elle signale que son mandat était trop limité. Elle indique aussi que l'examen des réserves n'était qu'une seule tranche d'un pain beaucoup plus gros et coûteux et que nous devrions peut-être avoir une vision plus globale de l'ensemble du système, y compris la force régulière.

Lt-col. Mackay: Je serais d'accord avec cette recommandation. Il y a certainement beaucoup plus en jeu que les réserves. Ce qui se passe dans les réserves est déterminé en grande partie par les politiques touchant la force régulière, telles que les normes de l'instruction et les tâches confiées à la force régulière.

Je ne suis pas d'accord avec l'idée que nous devrions séparer le monde des réserves de celui de la force régulière. Certains membres du comité ont mentionné que cette opinion a été exprimée par d'autres. Je ne suis pas du tout d'accord avec cette théorie.

M. Hart: Pour que cela fonctionne, le soldat à temps partiel et le soldat à plein temps devraient être considérés comme des partenaires, n'est-ce pas? Autrement dit, l'un n'est pas inférieur à l'autre. Ils font tous les deux partie de la politique de défense nationale du pays et doivent agir comme des partenaires. C'est ce qu'il me semble, tout au moins.

.1625

Une chose que je sais à propos de l'armée, et de la milice en particulier, c'est que les gens ne s'y enrôlent pas vraiment pour l'argent. On peut donc parler de la rémunération et régler ce problème, mais les gens s'enrôlent en réalité pour servir le pays. Ce sont des gens différents: ils sont patriotiques; ils veulent porter l'uniforme. Ils veulent faire partie du tissu du pays. Ils en sont très fiers.

Vous inquiétez-vous d'aspects comme les médailles de service? Vous n'avez pas le droit de porter des décorations des Forces armées canadiennes tant que vous n'avez pas douze années de service, or il y a dans la milice des réservistes qui ont donné bénévolement beaucoup de leur temps et qui ne sont jamais payés pour toutes ces heures de bénévolat. Seriez-vous d'accord pour qu'il y ait une espèce de médaille de service à l'intention des miliciens? Cela ne fait pas partie des recommandations.

Lt-col. Mackay: Je ne suis pas au courant que des réservistes font du bénévolat. D'ailleurs, c'est interdit. Ce l'était jusqu'à tout récemment, en tous cas. Les officiers supérieurs ont eux aussi l'habitude de consacrer beaucoup de temps à des activités qui ne sont pas rémunérées, mais cela fait partie du travail.

Je suis tout à fait d'accord avec vous que les réservistes ne servent pas seulement pour la solde. Ils ne sont pas là pour la solde, mais s'ils ne sont pas payés correctement, c'est très démoralisant. Ce n'est pas une attraction en soi, mais cela peut faire mal si ce n'est pas fait correctement. C'est l'héritage, la tradition, le sentiment de faire partie de quelque chose qui attire le respect du monde entier envers le Canada. Je pense que beaucoup de jeunes veulent en faire partie pendant un certain temps.

Pour considérer votre question sous un angle différent, il serait peut-être bon de songer à une médaille de service accordée à des conditions différentes que pour les CD. Peut-être qu'un réserviste serait admissible à des conditions différentes que pour un régulier.

M. Hart: On pourrait tenir compte des états de service, par exemple.

Lt-col. Mackay: Ce pourrait être quelque chose du genre. Je n'y avais pas vraiment pensé, mais il y a matière à réflexion.

M. Hart: Ma dernière question est...

Le président: Soyez bref.

M. Hart: D'accord, mais c'est ma question la plus importante.

On nous a déclaré hier que nous enverrions des troupes en Bosnie. D'après les chiffres que je vous ai donnés, je me demande si 20 p. 100 du personnel de la FORPRONU provenait des réserves. De plus, en quoi cette annonce touche-t-elle votre secteur, vos unités, votre personnel? Pensez-vous que vous enverrez de vos membres en Bosnie?

Col Currie: Je commencerai à répondre.

Je l'ai appris hier soir par le bulletin de nouvelles, probablement comme un grand nombre de Canadiens. Je crois comprendre que cela ne touchera pas beaucoup mon district. Et ma femme est très contente que cela ne touche pas mon fils, qui est à Petawawa. D'après ce que j'ai entendu aux nouvelles, je ne pense pas personnellement que bien des troupes proviendront de mon district.

Lt-col. Mackay: Compte tenu du nombre de soldats en cause, la force régulière est probablement en mesure de répondre à la demande. Il s'agit d'une mission d'un an seulement, alors qu'auparavant il y avait un roulement tous les six mois pour une durée indéterminée. Mais cela reste à voir, c'est certain.

M. Hart: Cela reste à voir. C'est vrai.

Merci beaucoup, messieurs.

Le président: Monsieur Mifflin.

M. Mifflin (Bonavista - Trinity - Conception): Monsieur le président, je veux souhaiter la bienvenue à nos deux témoins d'aujourd'hui et les remercier beaucoup de leur exposé. C'est toujours gratifiant quand les derniers témoins nous apportent des renseignements nouveaux. Cela rend notre tâche plus intéressante et plus stimulante.

J'ai été particulièrement frappé par votre avertissement ou plutôt votre conseil - peu importe comment vous l'appelez - de ne pas répartir le fardeau également entre les quatre milices, parce que cela ne tiendrait pas compte du ménage que vous avez déjà effectué chez vous. Je comprends, par exemple, qu'il y a actuellement beaucoup plus de soldats qui se battent, de fantassins, dans le secteur de l'Atlantique que dans le secteur de l'Ouest. L'écart est d'une centaine environ.

.1630

Lt-col. Mackay: C'est toujours difficile de faire des comparaisons entre les secteurs.

M. Mifflin: C'est moi qui fait la comparaison, alors vous n'avez pas à vous inquiéter.

J'ai posé cette question il y a une semaine environ. J'essayais de savoir combien il y avait de soldats dans les quartiers généraux. Je m'attendais à un écart négatif dans le secteur de l'Atlantique, parce que deux provinces sont des îles et que, dans ce secteur, nous sommes dispersés un peu partout dans la région. Je crois comprendre que c'est pire dans l'Ouest, à cause de l'étendue des Prairies.

C'est peut-être une question injuste. Mais je crois comprendre qu'il y a au moins un nombre égal de fantassins, même si le secteur de l'Ouest est nettement plus vaste, puisqu'il compte environ1 000 personnes de plus, n'est-ce pas?

Col Currie: Pas vraiment, amiral. Le SAFT représente environ 86 p. 100 de l'effectif du SOFT. Mais notre moyenne par unité est plus élevée.

M. Mifflin: La moyenne par unité est plus élevée.

Col Currie: Oui monsieur. L'étendue géographique est à peu près la même.

M. Mifflin: Naviguons dans des eaux moins troubles. Je ne vous ai pas entendus vous plaindre de la taille et de l'effectif et de la recommandation que le plafond de rémunération soit abaissé à14 500, et je ne vous donnerai pas l'occasion de le faire. Étant donné que vous ne vous êtes pas plaints, je suppose que vous êtes d'accord avec les chiffres. Alors, pensez-vous que le secteur de l'Atlantique est traité équitablement avec une brigade quand les trois autres secteurs en ont deux?

Col Currie: Non, je ne le pense pas, amiral.

M. Mifflin: Pouvez-vous nous donner des explications? Je vous donne une chance. Allez-y. Aidez-moi.

Col Currie: Premièrement, je ne crois pas que ce soit un comportement digne d'un officier de vanter notre secteur aux dépens des autres.

M. Mifflin: Oubliez les autres secteurs. Tout le monde le fait, je ne vois pas pourquoi vous devriez agir différemment.

M. Richardson: Je veux vous signaler que Fred l'a vanté.

Col Currie: Je dois faire très attention...

M. Leroux: Il veut s'enrôler dans l'armée.

M. Mifflin: Il est déjà dans l'armée.

M. Leroux: Sans blague!

M. Mifflin: Je suis politicien.

Col Currie: Je pense que si les membres du comité faisaient quelques calculs - je dois être très prudent - ils constateraient que le SAFT en réalité... Je ne devrais pas dire «encore». Nous sommes, avec une brigade de réserve... Aux yeux de certaines personnes, de certains soldats, de certains officiers, on dirait qu'on frappe sur nous.

J'ai ici des mémoires qui m'ont été présentés et qui proposent de très bonnes solutions. Certaines d'entre elles sont très ciblées et je ne les présenterais pas ici. Mais elles sont très sensées.

M. Mifflin: Mais où établiriez-vous les quartiers généraux de la brigade?

Col Currie: Je ne peux répondre à cette question, amiral. C'est une décision qui incombe au commandant du SAFT.

M. Mifflin: Pourriez-vous avoir un quartier général de brigade? Je suppose que le même problème se pose en Ontario, en un sens, et l'Ouest a... J'entre peut-être un peu trop dans les détails.

Col Currie: Oui.

M. Mifflin: Je suis désolé. Si vous voulez finir d'exprimer votre pensée, j'aimerais explorer d'autres sujets.

Col Currie: Il faut se rappeler, et j'espère que le comité s'en rappelle, qu'il y a le centre de l'instruction au combat - il figure dans l'organigramme - et une milice ou une brigade de réserve de l'armée, alors que dans les autres secteurs, il y a une brigade de la force régulière et deux brigades de milice. Rappelez-vous ce que j'ai dit au début, que le centre de l'instruction au combat ne peut mettre sur pied une brigade - il ne peut mettre sur pied un groupe de combat - parce qu'il est un centre d'instruction. C'est le centre d'excellence pour l'artillerie, l'infanterie, etc. L'école de génie militaire des Forces canadiennes s'en vient à Gagetown. On ne lui demande pas de faire ce que doivent faire les 1re, 2e et 5e brigades.

.1635

En ce sens, après tout ce que j'ai dit en réponse à votre observation, je suis d'accord avec vous.

M. Mifflin: Oublions la recommandation 41 sur la législation et parlons de toutes les autres. C'est presque une question désespérée, parce que vous êtes les derniers témoins et que je veux que ce soit bien clair dans ma tête. Si nous vous disions aujourd'hui que nous allons recommander au Parlement de donner suite à toutes ces recommandations, cela vous empêcherait-il de dormir?

Col Currie: Probablement.

M. Mifflin: Quels aspects troubleraient votre sommeil?

Col Currie: La recommandation 41.

M. Mifflin: Je l'ai exclue.

Col Currie: Désolé. Si l'on exclut la recommandation 41, je ne perdrais pas le sommeil.

M. Mifflin: Et vous, Barry?

Lt-col. Mackay: Si l'on exclut la législation, est-ce que je perdrais le sommeil?

M. Mifflin: Oui.

Lt-col. Mackay: L'objection que j'ai présentée aujourd'hui me rend mal à l'aise.

M. Mifflin: À propos du traitement égal pour tout le monde?

Lt-col. Mackay: Je pense que le secteur de l'Atlantique a très bien prévu quelles pressions s'exerceront sur les militaires d'ici un an ou deux, qu'il a conçu un bon plan et s'est bien préparé pour faire face aux difficultés qui s'annoncent. Après tous ces efforts, on nous impose les mêmes pourcentages que les autres secteurs, qui n'ont pas fait cette planification et cette préparation. Cela m'inquiète.

Dans le secteur de l'Atlantique, je pense que le taux de présence des soldats en pourcentage de l'effectif total nous place dans une situation particulière. En août, lors du stage annuel d'instruction collective, il y avait environ 1 600 soldats à Gagetown. C'est un peu moins que l'an dernier, mais par rapport aux autres secteurs, c'est remarquable. En Ontario, il n'y a eu que 1 600 ou 1 700 soldats environ par rapport à tout leur effectif éventuel. Je ne sais pas pourquoi, mais je le signale simplement. Dans le SAFT, je crois que les chiffres pour le stage annuel étaient inférieurs à 2 000.

M. O'Reilly: Et le SISPR pose problème.

Lt-col. Mackay: Il y a quelque chose d'inhabituel entre les différents secteurs. Je ne sais pas quoi exactement, parce que je ne connais pas assez bien les autres secteurs, mais je sais que cela va bien chez nous, dans le secteur de l'Atlantique, et c'est bien.

Col Currie: Amiral, j'aimerais en quelque sorte annuler ma première réponse, parce qu'en rouge ici, la recommandation 10(1) en est une dont j'ai déjà traité et à laquelle nous devrions réfléchir à nouveau, je crois.

M. Mifflin: Ces deux aspects vous inquiètent? Vous inquiétez-vous de la réduction généralisée ou des chiffres totaux, ou des deux?

Col Currie: Je m'inquiète des deux, que ce soit une réduction de 25 p. 100 de l'effectif ou de25 p. 100 de la rémunération. Deuxièmement, faut-il vraiment une réduction de 25 p. 100 dans chaque secteur?

M. Mifflin: Oui. Je pense que vous avez exprimé votre objection avec beaucoup d'élégance.

Col Currie: Je voulais insister là-dessus.

M. Mifflin: Je voudrais traiter maintenant de la législation. C'est une question de jugement. Vous avez apporté des facteurs nouveaux, et je pense que vous avez démontré qu'après tout vous vous occupez de 23 000 personnes sur une population active de 13,5 millions de personnes. Ce n'est pas un très gros saucisson.

Certains ont soutenu que, règle générale, les gens qui s'enrôlent dans les Forces canadiennes, que ce soit comme réservistes ou comme réguliers, ont juste un peu plus d'instruction, de moyens financiers, d'ambition et de qualités personnelles que les autres. Je ne sais pas si l'argument est trompeur ou non. Je préférerais qu'il n'en soit rien, mais je ne sais pas si l'argument résisterait à l'analyse. Je l'ai entendu et je pense qu'on aurait du mal à le démontrer.

.1640

Je dois vous avouer que j'ai toujours cru qu'une législation quelconque était essentielle à la réalisation du concept de la force totale. D'ailleurs, il y a six ou sept ans, la plupart des réservistes à qui j'en parlais étaient nettement en faveur d'une telle loi. Mais maintenant qu'il existe un comité parlementaire depuis 18 mois, depuis le comité mixte spécial à vrai dire, nous étions sur le point d'en faire notre recommandation, jusqu'à ce que nous constations une objection persistante... Puis, quand nous l'avons vue dans le rapport de la commission, nous avons pensé qu'on en avait discuté et que la question avait été réglée.

Nous constatons que ce n'est pas mieux actuellement. D'ailleurs, je trouve personnellement qu'il y a probablement plus de résistance actuellement que quand nous étudiions la question au sein du comité mixte spécial.

Je ne vais pas régler la question ici avec les témoins, parce que...

Le président: Un instant, monsieur Mifflin. L'une des choses qui sont ressorties une fois de plus aujourd'hui, cependant, avec les colonels honoraires est que s'il y a un encouragement pour l'employeur, la question mériterait peut-être qu'on l'examine.

M. Mifflin: C'est une observation juste, monsieur le président. D'ailleurs, l'argument qu'ils ont fait valoir avant de lever la main pour dire qu'ils seraient d'accord se fondait sur l'hypothèse que, non seulement on adopterait une loi, mais aussi qu'on donnerait des encouragements à l'employeur. Je pense que cela changerait la situation.

Mais je dois vous avouer qu'à mon avis, le Parti réformiste et Paul Martin auraient des difficultés - de sérieuses difficultés - politiquement, s'ils prenaient quelque mesure que ce soit de nature à alléger le fardeau fiscal des contribuables. Le climat n'est pas mûr pour qu'un comité fasse cette recommandation. Cela ne veut pas dire que nous ne la ferons pas, mais que nous devrons être très prudents à ce sujet.

Mais que penseriez-vous de...? Vous y avez fait allusion ou vous avez déclaré que nous pouvons donner l'exemple au gouvernement canadien en d'abord que tous les employés, tous les fonctionnaires, etc., puis invoquer l'application de la loi à leur égard, un peu comme l'a fait le Nouveau-Brunswick. C'est peut-être la façon de procéder.

Que penseriez-vous d'une certaine forme de législation, applicable à la fonction publique ou à d'autres, selon le cas? Nous pourrions peut-être commencer et voir comment elle fonctionne, sans éliminer le Conseil de liaison des Forces canadiennes, parce que je crois personnellement - peut-être parce que c'est un sujet auquel je me suis intéressé de près en tant que ministre par intérim de temps à autre - que le travail qu'ils font est fantastique. Même s'ils ne recrutent plus d'autres réservistes, il n'en demeure pas moins qu'ils sont ouverts vers l'extérieur et vont chercher les John Murphy du monde - l'ancien compagnon d'armes d'Elsie Wayne à St. John's, qui est une force magnétique considérable mais qui ne s'est jamais enrôlé dans l'armée... Il est tellement emballé qu'il n'arrête pas de téléphoner. Je pense que c'est un excellent aspect.

Alors même si nous recommandions une certaine forme de législation, que penseriez-vous si nous demandions de conserver le Conseil de liaison des Forces canadiennes? Ou êtes-vous aussi enthousiastes que moi à leur sujet? J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

Col Currie: En ce qui concerne la législation, je ne ferai pas de commentaires, parce que cela dépasse mon mandat. Mais en ce qui concerne le Conseil de liaison des Forces canadiennes, je pense qu'il devrait demeurer. J'aimerais qu'il participe plus directement au niveau de l'unité. Par exemple, amiral, vous pourriez venir rendre visite au commandant du 3e Régiment d'artillerie de campagne à St. John, et il pourrait, en compagnie de quelques autres, vous faire visiter certaines grandes entreprises de la ville et vous faire rencontrer les bonnes personnes, les dirigeants de ces entreprises. Je ne parle pas de café et de beignes. Je parle de réunions pour discuter des faits.

J'aimerais qu'on agisse ainsi plutôt que d'adopter une loi qui oblige une entreprise à laisser Jean Untel aller s'entraîner durant trois semaines. J'ai vraiment l'impression que cela ne fonctionnera pas. Quand vous parlez aux soldats de 18, 19 ou 20 ans, ils s'entendent peut-être tous pour dire qu'ils aimeraient une loi. Mais je ne crois pas qu'ils se rendent compte de l'incidence d'une telle loi, tandis que leurs aînés, comme moi, voient peut-être aussi des aspects négatifs. Voilà pourquoi j'ai affirmé que nous devrions être très prudents. Mais j'aime le Conseil de liaison des Forces canadiennes, essentiellement parce que je viens du Nouveau-Brunswick et que j'ai vu ce qu'il a fait. Je suis un fonctionnaire et c'est pourquoi j'ai pu venir ici aujourd'hui.

.1645

M. Mifflin: C'est un bon argument.

Avant de quitter, monsieur le président, je veux assurer aux deux témoins que, pour ma part, j'approuverai ces recommandations à deux conditions. Premièrement, sont-elles en accord avec le concept de la force totale? Deuxièmement, amélioreront-elles les réserves et la milice? Ce seront les conditions à remplir. Il y en aura peut-être d'autres. Ce seront les deux principales.

Il me paraît juste d'affirmer que vous avez une oreille sympathique au comité. Je pense que vous pouvez être assurés que notre objectif n'est pas simplement de nous débarrasser de ce rapport et de le donner à quelqu'un d'autre comme une patate chaude. Nous voulons le mettre en perspective afin de lui donner un fini politique à l'intention du ministre. Tous les partis participent à ces travaux et je pense qu'il est important de vous faire savoir que c'est ainsi que nous travaillons à notre comité, à mon avis.

Merci.

Le président: Monsieur O'Reilly.

M. O'Reilly: Merci, messieurs, pour un mémoire très approfondi et qui, une fois de plus, donne beaucoup de matière à réflexion au comité. En lisant le rapport et en considérant les 41 recommandations, nous revenons toujours à ces 41 recommandations et aux changements que nous pouvons y apporter pour les améliorer ou les rejeter.

Certaines personnes nous ont conseillé de tout jeter à la poubelle et d'autres nous ont déclaré que si des changements étaient apportés à certains aspects, le rapport serait acceptable.

Je veux rectifier quelques points. M. Hart a indiqué que la rémunération n'était pas très importante, et tout le monde a acquiescé. Je peux vous assurer, à titre d'ancien cadet et d'ancien réserviste qui était adolescent à l'époque, que la rémunération était très importante. Entendre que des gens ne sont toujours pas payés de nos jours... À l'époque, je pensais que c'était tout simplement de la bêtise. Maintenant, je pense que c'est de la stupidité pure et simple. Ils ne paient pas les gens. Je ne suis pas d'accord. Je pense que j'ai quitté la réserve parce que nous n'étions pas payés et même si j'ai gravi les divers échelons quand j'étais adolescent et si j'ai fait partie de toutes les équipes d'artillerie, etc., on aimait être payé, parce que cela déterminait si nous allions nous entraîner le samedi soir ou non. Je ne suis donc pas d'accord.

Vous avez remarqué également que j'exprime mon désaccord, chaque fois que quelqu'un vient ici et parle d'«empreinte». Je sais que c'est un terme militaire et j'en connais le sens, mais je le répète, pour moi une empreinte dans le sable veut dire que quelqu'un est parti, alors je vais essayer de remplacer ce mot par «présence» et m'assurer que notre présence dans les communautés se continuera.

J'ai donc probablement quatre sujets précis. Un qui me vient à l'esprit chaque fois c'est le coût de la Défense nationale aux quartiers généraux nationaux et comment on s'y prend pour réduire ces coûts et les ramener à des niveaux comparables à ceux du reste de l'unité. Quand à un défilé il y a plus d'officiers dans la tribune que de soldats à défiler, je sais qu'il y a un problème. Ce n'est pas difficile à comprendre.

De plus, le rapport n'a pas tenu compte de l'aspect médical dans les coûts et dans les modèles employés, et je m'inquiète - encore qu'ils soient mentionnés en passant - quand je constate qu'aucune des recommandations n'indique qu'on en a tenu compte.

Je ne suis pas du tout d'accord non plus avec l'argument que c'est un autre coup pour le Canada rural parce qu'il me semble que la présence rurale de l'armée sera bientôt inexistante si nous continuons d'aller dans les villes. Je pense aussi que quand on prend des décisions monétaires plutôt que des décisions concernant le nombre de personnes, dans l'industrie on définit habituellement le travail, puis on trouve les gens pour le faire et on établit ensuite un budget pour répondre aux besoins et s'il n'y a pas d'argent, on redéfinit le rôle. Je pense que nous procédons un peu à l'envers. C'est comme une espèce de roue que nous essayons de réinventer.

Voilà les quatre aspects précis qui me dérangent, en plus de la présence et de l'empreinte. La rémunération me dérange. Je le répète, je pense que ce problème doit être réglé.

.1650

Passer de neuf à sept groupes-brigades entraînera, à mon avis, la disparition de la participation dans le Canada rural et aussi l'élimination d'un certain nombre de corps de cadets.

J'ai donc des difficultés bien précises avec certains aspects du rapport. Si vous voulez me donner votre avis à ce sujet, vous pouvez me donner votre opinion commune ou l'un ou l'autre peut prendre la parole.

Col Currie: Quelle est la question précise, monsieur O'Reilly?

M. O'Reilly: En réalité, il y en a quatre. Vous avez parlé de la perte rurale, j'en suis conscient.

Est-ce que l'absence d'une composante médicale dans le rapport n'inquiète que moi? On n'en tient pas compte dans le rapport, et je me demande comment un rapport peut passer sous silence un aspect important. C'est un poste de dépenses important et c'est un élément qui, selon moi, aurait dû être pris en considération.

Col Currie: C'est l'une des onze fonctions de combat. Le SAFT a un élément médical. Nous avons une compagnie médicale et une compagnie dentaire. Je ne peux parler au nom de la commission. Je ne sais pas pourquoi il n'en est pas question. Je ne peux répondre à cette question.

Barry peut peut-être apporter des précisions sur cet aspect.

Lt-col. Mackay: J'ai cru comprendre que c'était surtout une erreur par omission plutôt qu'un oubli volontaire. J'attribue des paroles à la commission, mais j'ai cru comprendre qu'elle avait l'intention de parler de l'aspect médical dans le rapport, mais qu'elle a oublié de le faire.

Mais il y a assurément des éléments médicaux et dentaires dans la force terrestre et nous ne prévoyons pas de réductions dans ces domaines, en particulier si une structure de brigades est en place. C'est évidemment l'un des services de soutien qui fait partie intégrante d'une structure de brigades. Tous les officiers ont reçu une formation sur la nature des éléments d'une brigade et cet aspect fait partie des structures organiques. Je ne crois pas que l'omission dans le rapport aura des effets à long terme.

Col Currie: Je pense que le général MacDonald a répondu à cette question quand il a comparu devant vous.

M. O'Reilly: Non, il a invoqué le cinquième amendement.

Col Currie: Cela n'existe pas au Canada.

M. O'Reilly: Non, mais il y a un équivalent.

Le président: Dans la même veine, monsieur O'Reilly, cette question a été soulevée par quelques personnes ce matin à la séance avec les colonels honoraires. L'officier d'Edmonton, le colonel Munn, qui travaille dans le secteur médical, s'inquiétait de l'absence d'installations. Il estime que le problème se poserait si une mobilisation ou d'autres fonctions s'imposaient. Cela existe donc déjà. Comme vous le déclarez, vous l'avez, mais pour eux, cela ne semble pas aussi important qu'ils le voudraient.

M. O'Reilly: Je pense que vous avez traité de la perte de la présence rurale.

Je crois que la plupart de mes questions ont déjà été posées par d'autres membres. Je sais que Mme Wayne est prête à intervenir et à nous donner un point de vue de la côte Est, alors je m'arrête ici.

Mme Wayne (Saint John): J'espère qu'un jour, colonel Currie et lieutenant-colonel Mackay, vous reviendrez nous voir tous les deux sans votre uniforme et que vous serez libres de vous exprimer. Alors, nous entendrons vraiment ce que vous pensez de ce rapport, parce que je sens à quel point vous hésitez avant de répondre.

Les colonels honoraires nous ont informés qu'il y a un problème à cause de la paperasserie et à cause du fait que, lorsque le personnel administratif de la réserve a fini de rédiger tous les rapports nécessaires - ils affirment qu'il y en a environ 48, parfois 50 - il ne reste plus autant de temps qu'avant pour s'entraîner. Avez-vous constaté ce problème?

Lt-col. Mackay: Assurément. J'ai été commandant durant sept ans, pas d'affilée, et je me plaignais amèrement du fait que je ne pouvais pas sortir avec mes soldats assez souvent, parce que je devais faire le gratte-papier au bureau. Il y a une quantité énorme de documents à remplir. Il ne semble pas y avoir d'amélioration en vue. J'essaie d'être très franc et de ne pas hésiter une seconde.

.1655

Mme Wayne: Non.

Lt-col. Mackay: Une chose qui pourrait aider, si la paperasserie ne diminue pas, ce serait d'avoir plus d'aide pour pouvoir suffire à la tâche. Cette aide devra venir de nos amis qui travaillent à plein temps, parce que ceux qui le font à temps partiel n'y arrivent pas. Ils devraient s'entraîner avec leurs troupes, pas gratter du papier. Ce travail incombe aux commis et aux employés à plein temps qui travaillent du lundi au vendredi.

Mme Wayne: C'est l'un des aspects qui nous inquiétait ce matin. Compte tenu des nouvelles compressions en vue, je ne suis pas certaine que vos souhaits seront réalisés. Vous ne pouvez certainement pas vous permettre de consacrer encore plus de temps à la paperasse; c'est une situation qui nous a été expliquée aujourd'hui.

Je dois ajouter, colonel Currie, que lors du déjeuner avec le groupe de l'Atlantique - les colonels honoraires - ces derniers nous ont déclaré avoir besoin de deux brigades dans leur secteur. Ils ont insisté là-dessus. Le lieutenant-colonel Mackay estime peut-être qu'il en faut davantage, mais il y a au moins un besoin pour deux brigades, pas seulement une.

J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet. Je crois que vous en avez peut-être parlé lorsque le contre-amiral Mifflin vous a interrogés.

Col Currie: Je ne veux pas déclarer que je connais la réponse à cette question et vous affirmer qu'à mon avis nous devrions avoir deux ou vingt brigades dans le secteur de l'Atlantique. Au fond, ce que j'essaie de vous dire, c'est que nous devrions tous considérer le secteur de l'Atlantique dans une perspective un peu différente, à cause de certains facteurs que je vous ai décrits dans mon mémoire. Autrement dit, pas de brigade de la force régulière, et le fait que le Centre de l'instruction au combat ne peut faire le travail d'une brigade, nous nous retrouvons donc avec une brigade de réserve dans la milice ou la réserve de l'armée.

Je ne peux pas vraiment dire si cela me paraît suffisant ou non, madame Wayne. Quand j'aurai enlevé mon uniforme et que je vous verrai à Sait John, je vous le dirai.

Mme Wayne: D'accord.

Lt-col. Mackay: Puis-je faire un commentaire à ce sujet, moi aussi?

Le rapport semble mettre l'accent surtout sur les besoins des phases un et deux du plan de mobilisation. Je pense que les besoins projetés de l'armée, selon la commission, reposaient principalement sur les phases un et deux.

Mme Wayne: C'est exact.

Lt-col. Mackay: Les propos des colonels honoraires portaient probablement sur ce qui se passe dans les phases trois et quatre. Nous n'avons pas d'unités de relève qui peuvent intégrer le personnel supplémentaire requis et se mettre au travail. La structure n'existe tout simplement pas. Mais j'attribue peut-être encore des paroles aux autres.

Mme Wayne: Non, c'est ce qu'ils ont exprimé. Vraiment.

Lt-col. Mackay: C'est ainsi que j'interprète leurs propos. La réponse est peut-être que nous n'avons pas encore de projection très claire sur ce qui arrivera dans les phases trois et quatre. Un plan de mobilisation fait cruellement défaut. Je pense que le colonel Currie l'a indiqué clairement dans son mémoire, et je suis tout à fait d'accord avec lui.

Nous en revenons peut-être à la conciliation du besoin d'accroître les unités rurales et du rapport de la commission. S'il existait une structure que nous pouvions utiliser dans les régions rurales ou ailleurs pour mobiliser en fonction des phases trois et quatre - autrement dit, maintenir des unités ou des structures d'unités sans nécessairement les doter en entier avec des effectifs nombreux - alors nous aurions peut-être une solution. Mais il y a beaucoup de points d'interrogation, parce que les budgets sont limités. Nous ne pouvons voir clairement que ce qui arrivera dans les phases un et deux.

Je ne sais pas si je me suis exprimé très clairement.

Mme Wayne: Je comprends ce que vous dites.

.1700

Je dirai à mon collègue M. O'Reilly que je m'inquiète de la possibilité que disparaisse la milice, non seulement dans les régions rurales mais aussi dans les régions urbaines, en particulier dans notre secteur, à cause des coupures. Je l'ai déclaré ce matin et je le répète maintenant: elles jouent un rôle important dans la société. Elles enseignent aux jeunes notamment le respect et le sens des responsabilités. Je suis certaine que c'est là que vous l'avez appris vous aussi.

Je vais me renseigner...

Une voix: [Inaudible - rédacteur].

Mme Wayne: Il a quitté. Il l'avait mais il l'a perdu.

Je l'ai vu; c'est là et vous êtes nécessaires. J'espère qu'un jour, nous verrons que nous avons besoin que vous soyez encore plus nombreux, pas moins nombreux.

Je dirai au colonel Currie que la politique du Nouveau-Brunswick ne s'applique pas au niveau local, seulement au niveau provincial et s'il y a des employés fédéraux.

J'ai quelques inquiétudes - je les ai déjà exprimées - au sujet de cet aspect et de l'exigence que les employeurs accordent tant de semaines ou de jours de congé. Jusqu'ici, beaucoup d'employeurs l'ont fait quand ils ont examiné le type de personnes qu'ils embauchaient lorsque le candidat était réserviste. Quand il y a une loi et que deux candidats qualifiés se présentent, il faudra faire attention: ils choisiront probablement l'autre pour cette raison. Ce n'est pas juste, il faut donc plus ou moins surveiller ce qui se passe.

J'ai reçu un monsieur à mon bureau récemment. Il avait attendu son chèque durant huit mois. Il m'a dit que son propriétaire lui courait après, qu'il était marié, qu'il n'avait pas un sou et ne savait pas quoi faire. Le problème existe donc encore. C'est un grand problème. S'ils doivent se présenter au manège militaire et qu'on leur promet un chèque, ils devraient recevoir ce chèque.

M. Bertrand (Pontiac - Gatineau - Labelle): On a répondu à l'une de mes questions.

Colonel Currie, vous avez déclaré dans votre mémoire que chaque fois que vous avez demandé à vos supérieurs quelle était la tâche de la milice, ils vous ont répondu que le travail d'un réserviste consistait à grossir les effectifs réguliers. Est-ce ce qu'on vous a dit?

Col Currie: J'ai répondu oralement à cette question; ce n'est pas dans le mémoire.

J'ai déclaré que, au fil de ma carrière comme réserviste, quand je posais la question, quand j'étais jeune lieutenant - je n'ai jamais été un lieutenant jeune, mais quand j'étais plus jeune - ils me répondaient que notre rôle consistait à grossir la force régulière. Je ne parlais pas nécessairement du contexte actuel.

M. Bertrand: Supposons pour un instant que vous êtes CEMD et que vous devez vous asseoir un matin et définir les tâches très précises de la milice. Quelles seraient ces tâches? Je suis convaincu que vous avez des idées là-dessus.

Col Currie: J'ai des idées, mais en toute sincérité, je ne peux supposer être en mesure de répondre pour mon commandant de secteur ni pour le commandant du CFT ni pour l'échelle de commandement.

M. Bertrand: Je ne demande pas l'opinion de ces gens; je demande la vôtre. Que ferait la milice, selon vous?

Col Currie: Le commandant doit leur donner un rôle; il doit leur confier une mission précise; une tâche - rôle, mission et tâches. Cela doit descendre le long de l'échelle de commandement. Cela ne se construit pas du bas vers le haut. Selon le niveau opérationnel... Le rapport indique sept facteurs qui déterminent les rôles et les missions.

Du haut vers le bas, une unité qui est une bonne unité, qui défile bien et qui va sur le champ de bataille et répond aux normes des tâches de combat collectives de la même façon ou d'une façon acceptable, peut se voir confier un rôle et une tâche. Mais cela doit venir des échelons supérieurs.

.1705

Je ne crois pas avoir répondu à votre question, mais j'ai brodé autour.

M. Bertrand: Qu'arrive-t-il en cas de désastre naturel? La milice pourrait-elle jouer un rôle?

Col Currie: Permettez-moi une précision, avant que nous ne nous écartions du sujet. Je ne sais pas si vous vous rappelez du milieu et de la fin des années 60.

M. Bertrand: J'étais jeune, mais je m'en souviens.

Col Currie: J'étais canonnier et ils ont retiré toutes les armes des mains des réservistes et nous ont donné des échelles et des cordes pour la défense civile. Nous avions l'habitude de les appeler les échelles et les serpents. Je ne veux pas revenir à cette époque-là.

Je pense qu'il y a un rôle viable pour les réserves, et si les désastres naturels deviennent l'un de ces rôles, mais pas un rôle propre aux réserves, je peux l'accepter. Mais je ne voudrais pas dire que dans le district du Nouveau-Brunswick - Île-du-Prince-Édouard, il y a tant d'unités dont une affectée à la lutte contre les inondations dans la vallée du fleuve Saint-Jean ou quelque chose du genre. Je ne suis pas d'accord. Je pense que les rôles devraient être globaux, de sorte qu'en cas de désastre naturel, par exemple, les réservistes seraient traités sur un pied d'égalité avec les réguliers et que tous ceux qui seraient libres à ce moment-là se mettraient au travail.

M. Bertrand: Merci beaucoup. C'est tout.

Le président: Monsieur Cannis.

M. Cannis: Je vous prie d'excuser mon retard, messieurs, mais j'ai écouté avec grand intérêt, étant un nouveau venu au sein du comité. C'est un domaine tout à fait nouveau pour moi également.

Cet examen semble viser surtout à réduire les budgets, mais il y a aussi un aspect humain auquel je sais que certains de mes collègues ont fait allusion, l'aspect communautaire et l'aspect soutien, dans bien des secteurs. Je ne pense donc pas que ce soit uniquement une question de sous. Nous devons parfois nous pencher sur la structure à laquelle vous avez fait allusion, pour perfectionner le système.

J'aimerais revenir sur le SISPR, parce que des témoins précédents, dont un monsieur dont je ne me souviens plus du nom, ont indiqué qu'il y a une batterie d'ordinateurs inutilisés. Ce système est-il exploité à l'externe? A-t-il été sous-traité? Quelqu'un met-il au point ce système de la solde?

Au lieu de réduire les effectifs, on peut parfois examiner d'autres postes de dépense et déterminer ce qui fonctionne bien. Comme l'a indiqué ma collègue à l'autre bout de la table, pourquoi ces gens doivent-ils attendre huit mois? Ce n'est rien de nouveau je suppose. D'après des témoins précédents, cela dure depuis assez longtemps.

Colonel Mackay, durant cette période, qui contrôle la solde? Y a-t-il un bureau de service central à Ottawa? Je ne sais pas.

Lt-col. Mackay: Le SISPR est en transition actuellement; il est corrigé. Il est difficile de dire où il en est exactement actuellement parce qu'il a été révisé par rapport à sa version du mois dernier.

Je dirai d'abord que le système n'a pas été conçu par la Défense nationale. Il a été acheté à l'externe. À ma connaissance, la Défense nationale a conclu un marché avec des experts-conseils du secteur privé, qui devaient concevoir, mettre au point, installer et gérer le système.

M. Cannis: Il n'y avait pas de compétences à l'interne pour concevoir un système de la solde ou en acheter un et l'adapter aux besoins et aux exigences de la Défense nationale?

Lt-col. Mackay: Je suis certain que nous avons les compétences nécessaires.

M. Cannis: Je crois comprendre que vous venez du secteur de l'informatique. Nous pouvons nous entendre tous les deux sur le fait que la sous-traitance peut devenir très onéreuse.

Lt-col. Mackay: Je suppose que le contrat n'a pas été bien géré ou n'a pas été bien rédigé. Je crois comprendre que l'entrepreneur a menacé à un moment donné de poursuivre la Couronne et que la situation était tendue.

.1710

M. Cannis: La Couronne ne peut-elle pas revenir en arrière et déclarer qu'elle reconnaît avoir signé un contrat, mais que le système livré ne fonctionne pas bien?

Lt-col. Mackay: Il y a eu un différend au sujet du contrat. C'est tout ce que je peux dire. Je n'ai rien eu à voir avec ce dossier. Mais je sais qu'à quelques reprises l'an dernier, divers commandants, dont le commandant de secteur, ont déclaré que si le système n'était pas à la hauteur ou ne satisfaisait pas aux critères dans tel délai, ils s'en débarrasseraient.

M. Cannis: Nous revenons donc à la case de départ. Entre temps, ces gens ont encore des difficultés financières ou attendent leur chèque pour payer le loyer et nourrir leur famille.

Col Currie: Premièrement, je précise que je ne connais pas les experts-conseils, mais je crois qu'ils ont été changés depuis le début... Un nouveau cabinet a été embauché pour prendre la relève du premier.

Le SISPR a été conçu au départ comme un système de la solde. Des ajouts ont été demandés à l'expert-conseil. Ils ont commencé par s'occuper du personnel, puis on leur a demandé si le système pouvait faire ceci et cela. Il est simplement devenu un monstre.

Chaque commandant de mon district - je parle pour mon district - peut obtenir la solde d'un soldat en une journée si le SISPR a des problèmes de digestion. C'est arrivé le 15 de ce mois.

M. Cannis: La maladie du club soda?

Col Currie: Une de mes huit unités n'a pas été payée le 15. On s'est rendu à Gagetown. Les gens là-bas sont très aimables maintenant qu'ils connaissent les problèmes du SISPR. Ils préparent 150 chèques, qui reviennent le soir même, et les soldats sont payés.

M. Cannis: Nous avons entendu d'autres témoins déclarer que s'il y avait un budget affecté à des fins particulières... Nous ne pouvons évidemment pas en déterminer l'ampleur, parce qu'il n'y a jamais eu d'évaluation du budget affecté à la réserve. Mais s'il y avait un tel budget, pouvez-vous envisager...?

Monsieur Mackay, vous avez évoqué la paperasserie; vous n'avez pas le temps de sortir pour participer aux exercices. On parle actuellement de bureaux automatisés, sans papier. S'il les systèmes existent, si nous essayions d'enseigner non seulement le respect, la discipline et l'instruction, mais aussi certaines de ces compétences pour qu'ils puissent les appliquer dans leur travail, ne serait-ce pas un avantage?

Si nous nous souvenons des conflits précédents, il y a des gens qui vont sur le champ de bataille et du personnel de soutien qui reste à l'arrière. Ils avaient l'habitude de se servir de machines à écrire. Il y a une fonction pour tout le monde. Ce n'est peut-être pas aussi flamboyant qu'être dehors, une arme entre les mains, mais... Ne pourriez-vous pas vous servir de certains de ces ordinateurs qui, semble-t-il, restent à rien faire - si c'est bien le cas, monsieur le président, je n'en sais rien - et former votre personnel pour qu'il vous aide à venir à bout de la paperasse et à créer ce bureau automatisé, ce qui le rendra beaucoup plus efficient et plus efficace et vous permettra de sortir avec vos troupes, de les diriger, plutôt que ces ordinateurs restent dans des entrepôts? Et si les budgets le permettaient, en théorie, ne pourriez-vous pas mettre sur pied un système de la solde indépendant, un système de la solde spécialisé, qui éliminerait les problèmes que n'ont cessé de nous décrire les divers témoins qui ont comparu devant nous?

Lt-col. Mackay: Le problème de la paperasserie n'est pas vraiment lié au manque de technologie. La technologie est un outil, après tout. Le problème, à mon avis, est lié aux méthodes administratives vers lesquelles la paperasserie est censée mener ou dont ou elle est censée s'occuper. Autrement dit, on exige que le système fasse ceci ou cela, et il en résulte de la paperasserie.

Il est donc question en réalité de revoir certaines pratiques administratives des militaires et leur façon de procéder, pourquoi elles se font, rationaliser une grande partie de cette paperasserie. Il y a probablement de 40 à 50 catégories de documents différents exigés même au niveau de l'unité de réserve. Il faut rationaliser cette façon de procéder. Il faut des consultants en systèmes, ou même des consultants militaires, pour repenser notre façon de travailler.

Franchement, nous n'avons jamais le temps. Nous sommes trop occupés à nous demander si nous trouverons suffisamment de recrues, si elles obtiennent les armes et les véhicules dont elles ont besoin, si elles obtiennent les uniformes nécessaires. Il y a trop d'autres problèmes pressants. Je sais qu'on dirait que nous donnons l'impression de ne pas nous soucier de ces questions, mais elles ont toujours été au bas de la liste des priorités. Nous devrions peut-être changer cette façon de voir.

.1715

M. Cannis: Je pense que nous pourrions peut-être prendre un peu de recul pour l'améliorer. Je ne dis pas que vous n'êtes pas efficients, comprenez-moi bien, mais je pense que vous seriez en mesure de consacrer à vos troupes le temps d'instruction que vous souhaitez si ardemment leur donner. Je pense que les systèmes existent de nos jours, que l'automatisation est une réalité. Je pense que nous ajouterions une nouvelle corde à l'arc des réservistes, qui pourraient ensuite s'en servir dans la vie privée et apporter une autre contribution à la collectivité.

Je pense qu'on peut restructurer ou comprimer les dépenses. Puisque vous oeuvrez dans le secteur des systèmes ou de l'informatique, vous savez comment nous pouvons faire des économies et comment nous pouvons exploiter au maximum l'information et les systèmes mis à notre disposition actuellement. D'après divers témoignages, je pense qu'il y a une grande - j'exprime un point de vue personnel - tradition, beaucoup d'histoire. Si nous prenons simplement le bistouri et commençons à tout couper pour satisfaire certaines personnes, je pense que c'est la pire façon de procéder.

Le président: Monsieur Speller, vous avez le temps de poser une brève question.

M. Speller (Haldimand - Norfolk): Merci, monsieur le président. Je sais que vous voulez passer à autre chose, et je veux remercier le colonel et le lieutenant-colonel d'être venus témoigner.

Contrairement à la région de M. O'Reilly, il y a encore une milice dans la mienne, le 56e Régiment d'artillerie de campagne, et je veux qu'il reste chez nous. Je me demande comment vous entrevoyez la répartition dans les régions rurales et dans le secteur de l'Atlantique. M. O'Reilly a déclaré que vous avez déjà répondu à cette question, mais je suis désolé, je n'ai pas entendu la réponse. Comment entrevoyez-vous la répartition au pays? Pensez-vous que ces unités de réserve se retrouveront dans les villes?

J'ai lu le rapport. J'ai vu les catégories et comment on décidera qui restera et qui disparaîtra. Après avoir lu le rapport, il me semble que nous nous retrouverons avec toutes sortes de réserves dans les villes, mais pas dans les régions rurales. Comment entrevoyez-vous la répartition dans les Maritimes?

Col Currie: Je peux vous dire que nous allons travailler du bas vers le haut. Dans le SAFT, notre commandant de secteur a amorcé le processus. Durant la semaine du 24 novembre, nous nous sommes rencontrés à Halifax et avons commencé à y travailler. Je ne crois pas que le commandant du CFT - c'est une opinion personnelle - dictera aux commandants de secteur quelles unités disparaîtront et quelles unités seront fusionnées - peu importe les suites du rapport.

Je pense qu'une certaine latitude - en fait, j'espère qu'il y aura beaucoup de latitude - sera accordée au commandant de secteur, pour qu'il puisse mettre sur pied sa ou ses brigades. Ces facteurs seront pris en considération, ainsi que d'autres facteurs propres au secteur de l'Ouest, de l'Ontario, du Québec, et de l'Atlantique, évidemment.

Pour répondre à votre question, je ne peux entrer dans les détails. Ce serait injuste de le faire, parce que je n'ai pas de vision d'ensemble.

Lt-col. Mackay: Je pense qu'il importe de souligner que j'aimerais recommander que les unités soient conservées en fonction de l'ordre de bataille, si c'est possible. Ce qui peut changer, c'est le nombre d'organisations des quartiers généraux et d'organisations administratives qui supervisent ou contrôlent ces unités. Il peut y avoir des fusions, et des personnes qui occupent des fonctions différentes dans un bataillon mixte, par exemple. Cela réglerait un grand nombre des problèmes concernant l'héritage et les traditions, car l'identification au régiment serait maintenue dans la collectivité, ce qui maintiendrait les liens avec la collectivité.

L'efficacité peut cependant découler d'une réduction du haut de la structure plutôt que du bas. C'est ce que voulait dire le colonel Currie, à mon avis, lorsqu'il a déclaré que nous nous attaquons à ce problème à partir du bas. Nous essaierons de maintenir les unités et leur identité, mais nous réduirons peut-être la hiérarchie à laquelle elles appartiennent. Surtout si nous voulons réaliser la DTA, la Dotation totale de l'Armée, il sera difficile de maintenir les unités au sein de la structure actuelle des commandants, des commandants adjoints, des adjudants, et de tous les autres membres du personnel administratif des quartiers généraux de bataillon que nous avons actuellement.

.1720

Le président: Merci, colonel Currie et lieutenant-colonel Mackay. Ce fut sans aucun doute un après-midi très enrichissant pour nous. Comme nous l'avons indiqué, vous êtes les derniers témoins officiels à comparaître devant le comité sur ce sujet. Nous devons maintenant prendre des décisions d'ici peu sur les recommandations que contiendra notre rapport. Merci beaucoup. Joyeuses Fêtes.

Chers membres du comité, si nous pouvons rester quelques minutes après que ces messieurs auront quitté pour parler de nos travaux futurs, la séance sera levée.

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