[Enregistrement électronique]
Le jeudi 4 mai 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Le Comité des finances poursuit son examen du projet de loi C-76, avec Harvey Weiner, secrétaire général adjoint, Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, et Marie Pierce, directrice générale de l'Association canadienne des commissions conseils scolaires.
Merci à vous deux d'avoir accepté d'être des nôtres. Nous sommes impatients d'entendre vos exposés.
[Français]
M. Harvey Weiner (secrétaire général adjoint, Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants): La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants est le porte-parole national de la profession enseignante pour promouvoir la qualité de l'éducation, la situation des membres de la profession et l'égalité des chances au moyen de l'éducation publique. La FCEE coordonne et facilite la mise en commun d'idées, de connaissances et de compétences parmi les 13 organisations provinciales et territoriales qui lui sont affiliées et qui regroupent au total plus de 240 000 enseignantes et enseignants. Marie va présenter l'ACCS.
[Traduction]
Mme Marie Pierce (directrice générale de l'Association canadienne des commissions et conseils scolaires): L'Association canadienne des commissions et conseils scolaires est le porte-parole national des conseils et commissions scolaires ainsi que des commissaires d'écoles et des conseillers scolaires. À ce titre, nous représentons le palier d'administration local. L'ACCS est constituée de 10 associations provinciales et territoriales de conseils ou commissions scolaires, représentant plus de 5 000 commissaires et conseillers scolaires qui administrent au delà de 500 commissions et conseils scolaires servant plus de trois millions d'élèves de l'élémentaire et du secondaire.
L'ACCS encourage l'excellence dans le domaine de l'éducation, assure le leadership dans l'étude des dossiers ayant une incidence nationale et favorise le respect des principes qui sous-tendent l'autonomie locale en éducation.
Tout comme la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, nous limiterons nos observations aux préoccupations que suscitent pour nous le projet de transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, annoncé dans le budget fédéral de 1995 et décrit dans le projet de loi C-76.
Le témoignage des conseils scolaires et des enseignants devant le Comité permanent des finances concernant ce projet de transfert est le prolongement naturel des activités que nous avons menées et des préoccupations que nous avons ressenties par rapport à l'ensemble du processus de réforme de la sécurité sociale. Nos deux associations ont présenté des mémoires et des exposés au sujet de la réforme de la sécurité sociale, en particulier du point de vue de ses répercussions sur les enfants et les jeunes auprès desquels nous travaillons dans nos maisons d'enseignement.
Nous possédons des examplaires des mémoires de nos deux associations concernant ce processus de réforme et nous nous ferons un plaisir de vous les remettre à la fin de notre exposé.
En ce qui concerne le processus de réforme, notre attention a d'abord été axée sur l'équité et l'accessibilité des programmes sociaux grâce à l'élaboration de normes nationales explicites pour encourager les gouvernements provinciaux à faire preuve de polyvalence et à élaborer des solutions novatrices de nature à répondre aux besoins locaux.
En particulier, il y a sept aspects que nous désirons mettre en relief et je demanderai à M. Harvey Weiner de dire quelques mots à ce sujet.
M. Weiner: Merci, monsieur le président. Je me permettrai de faire ressortir très brièvement les questions qui nous préoccupent et nous serions manifestement très heureux de pouvoir entamer une discussion avec vous et d'essayer de répondre au meilleur de notre connaissance aux questions que vous pourriez désirer nous poser.
Le premier aspect que je veux souligner est la nécessité que nous percevons d'engager un vaste un débat sur les répercussions de ce transfert et sur l'incidence qu'il aura sur la réalité quotidienne des personnes qu'il touchera. Par conséquent, nous appuyons fortement l'élargissement de ces audiences afin de donner aux Canadiens de toutes les régions du pays l'occasion de faire entendre leur point de vue.
En ce qui concerne la question des normes nationales, nos deux organismes croient fermement que les gouvernments provinciaux et le gouvernment fédéral doivent en venir à une entente à propos de certaines normes de base ou de certains principes fondamentaux - peu importe la façon dont on les désigne - de nature à garantir véritablement à tous les Canadiens, quelle que soit la région qu'ils habitent dans notre grand pays, la possibilité d'accès aux services sociaux et aux services de santé qui feront l'objet de ce transfert, en toute honnêteté et équité, pour reprendre les termes de Marie. Il ne faut pas conclure pour autant que nous ne reconnaissons pas la nécessité d'une certaine souplesse à l'échelle provinciale ou à l'échelle locale pour ce qui est du mode de prestation des services, mais nous sommes d'avis que cette souplesse doit respecter les paramètres des normes ou des principes en question qui garantiront à tous les Canadiens de toutes les régions du pays l'accès aux services.
Si j'ai parlé assez longuement de l'aspect de l'équité, c'est que nous redoutons que, couplé à la réduction du financement associée à ce transfert, il ne cause un préjudice véritable à bien des gens. Comme il s'agit bien sûr de personnes qui ont besoin d'aide et qui ne se situent pas nécessairement au dernier échelon de l'échelle économique, elles risquent d'être exclues et nous nous retrouverons devant un élargissement du fossé qui sépare les nantis et les démunis. Voilà un autre argument qui milite en faveur de l'adoption de normes nationales.
À notre avis, la responsabilisation est un autre aspect crucial auquel il vaut la peine de s'arrêter. Nous avons beaucoup de peine à saisir de quelle façon on va assurer la responsabilisation dans un système qui aboutira vraisemblablement à la réduction soutenue des crédits fédéraux alloués aux fins énoncées dans le projet de transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.
En ce qui concerne la stabilisation économique - nous nous permettons de souligner que nous sommes convaincus que les membres du comité sont bien au fait de cette question - en vertu du Régime d'assistance publique du Canada, les transferts fédéraux ont réellement fait fonction de stabilisateurs économiques semi-automatiques dans le passé. Cette fonction est donc appelée à disparaître car, quel que soit l'état de l'économie dans l'avenir, les transferts, comme le laissent voir les prévisions, diminueront vraisemblablement.
Pour ce qui a trait à la réduction du déficit, - je précise que nos deux organismes reconnaissent la nécessité de réduire le déficit - nous craignons vivement que le genre d'analyses et d'évaluations que l'on a faites de la contribution du TCSPS à la réduction du déficit n'aient pas été étudiées avec la rigueur et le soin voulus, et qu'il importe d'examiner divers facteurs de façon plus détaillée. Autrement dit, nous ne sommes pas véritablement persuadés que ce changement d'orientation va donner lieu à une réduction du déficit; il se peut fort bien qu'il n'en résulte rien d'autre qu'un transfert du fardeau de diverses manières. Les Canadiens moyens et, en particulier, ceux dont la situation financière est inférieure à la moyenne, paieront plus cher en fin de compte. Impôts ou décaissements immédiats, on en revient toujours au revenu disponible. La véritable question, je crois, pour les Canadiens, en particulier les moins bien nantis, porte sur la valeur du revenu disponible sur lequel ils pourront compter pour s'assurer que les services de base dont ils auront besoin seront offerts.
Enfin, dernière question mais non la moindre de ce tour d'horizon, la pauvreté chez les enfants nous préoccupe au plus haut point, nous qui oeuvrons dans le secteur de l'enseignement. Or, il existe à n'en pas douter des études remarquables indiquant que la pauvreté gêne la capacité et la spontanéité d'apprentissage des enfants et compromet en fin de compte leur réussite scolaire.
Nous sommes tous bien conscients que le gouvernement au pouvoir a indiqué dans le cadre de l'examen de la politique sociale que la pauvreté chez les enfants est une question prioritaire et fondamentale. Cependant, nous constatons certaines contradictions criantes entre cet énoncé et la façon dont on traitera les besoins des enfants dans des situations de ce genre.
Les recommandations que nous présentons au comité se trouvent à la page 5 du mémoire. En premier lieu, nous recommandons que la possibilité soit accordée à un plus grand nombre de Canadiens de faire entendre leur point de vue et de se faire entendre dans chaque région du pays.
En deuxième lieu, nous recommandons qu'une étude d'impact soit effectuée à propos des effets éventuels du TCSPS sur les autres dépenses du gouvernement et sur les recettes fiscales éventuelles. Nous sommes persuadés qu'il y a peut-être de nombreuses conséquences insoupçonnées de ce transfert par blocs qui n'ont pas été intégralement examinées.
En troisième lieu, nous recommandons que le gouvernement fédéral conserve la responsabilité primordiale relativement à la sécurité du revenu des familles ayant des enfants à charge, tout comme il le fait pour les personnes âgées.
Marie présentera les deux dernières recommandations.
Mme Pierce: À la lumière des observations que nous avons formulées au sujet du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, nous recommandons que les dispositions ayant trait au transfert soient retirées dès maintenant du projet de loi C-76.
Enfin, nous recommandons également que l'on présente un nouveau projet de loi sur les dispositions relatives au transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, une fois que sera intervenue une entente négociée entre le gouvernement fédéral et les provinces, afin d'établir des normes nationales à l'égard de tous les programmes de santé et d'aide sociale.
Nous serons maintenant heureux de répondre à vos questions au sujet de notre mémoire.
Le président: Vous n'avez pas fait mention du déficit. Est-ce que cela vous pose un problème?
M. Weiner: Oui, effectivement. Nous avons bel et bien abordé la question du déficit et nous nous sommes demandé si...
Le président: Avez-vous d'autres façons à suggérer pour régler la question? Pensez-vous que si nous ne touchons pas aux paiements et que nous renégociions les paiements entièrement nouveaux en les assujettissant à des normes nationales, cela aura une incidence positive sur le déficit et nous permettra de ne réduire d'aucune façon les paiements de transfert?
M. Weiner: Nous sommes incontestablement d'avis que le gouvernement fédéral n'a pas réussi à présenter de bons arguments pour prouver que ces mesures vont véritablement réduire le déficit dans une proportion équivalente à l'incidence qu'elles auront sur les Canadiens. C'est de revenu disponible dont il est question ici et je crois que c'est ce qui préoccupe les Canadiens. Combien d'argent...
Le président: Non. Ce n'est pas la question que je vous ai posée. Je parle du déficit fédéral. Si vous croyez que les Canadiens ne sont pas d'accord avec notre mesure de réduction du déficit, c'est votre droit, mais...
M. Weiner: Nous ne désapprouvons pas les efforts de réduction du déficit. Ce sont les moyens que l'on entend utiliser pour y arriver que nous avons peine à accepter.
Le président: Croyez-vous qu'il y a des compressions que nous pourrions effectuer dans d'autres secteurs ou des impôts que nous pourrions augmenter?
M. Weiner: Oui.
Le président: Quels sont les impôts que nous pourrions augmenter?
M. Weiner: Nous sommes incontestablement d'avis qu'il a été prouvé et soutenu par de nombreuses personnes que les particuliers sont surimposés.
Le président: Puis-je vous demander quels sont les impôts que nous pourrions augmenter?
M. Weiner: Les impôts sur le revenu des particuliers. Cela nous permettrait de songer à d'autres services et de les offrir avec plus d'efficience.
Le président: Lesquels?
M. Weiner: Mais quand nous parlons de services de base dont les Canadiens ont besoin....
Le président: Non, je veux que vous me disiez quels sont les impôts que nous pouvons augmenter. Nous pouvons augmenter les impôts des particuliers.
M. Weiner: Sans l'ombre d'un doute, les impôts des particuliers peuvent être augmentés.
Le président: Merci.
[Français]
M. Loubier (Saint-Hyacinthe - Bagot): Merci, monsieur le président. Monsieur Weiner, madame Pierce, j'ai bien aimé vos recommandations 4 et 5. Si j'avais à faire un amendement à ce projet de loi, j'introduirais ces deux recommandations qui visent à supprimer la partie concernant le transfert social canadien afin d'ééliminer toute ambiguïté qui aurait pu survenir depuis le dépôt de ce projet de loi.
J'irais à votre cinquième recommandation en demandant que les provinces et le gouvernement fédéral s'assoient d'abord ensemble pour en arriver à une entente, à un consensus, et que, si on a à redéfinir le transfert social au titre du RAPC d'éducation postsecondaire et de la santé, on le fasse en concertation et non pas de façon imposée, comme le suggère le projet de loi.
J'ai une question à vous poser. Vous parliez tout à l'heure de la nécessité de normes nationales. Votre principale raison était que s'il y a des normes nationales uniquement au niveau de la santé et non pas au niveau des autres transferts effectués par le gouvernement fédéral dans le cadre du nouveau transfert social canadien, cela réduirait les budgets attribués aux autres programmes sociaux. Dans votre esprit, les normes nationales ne concernent que l'obligation d'utiliser les deniers publics transférés par le fédéral aux fins pour lesquelles ils ont été débloqués?
M. Weiner: Oui, vous avez raison. On veut s'assurer qu'il y a des services de base dans chacun de ces secteurs qui sont couverts par le transfert et que cela ne varie pas parce que la loi actuelle dit qu'on ne peut pas empêcher quelqu'un de déménager d'une province à une autre, d'avoir les bénéfices qu'une province offre. Il n'est pas nécessaire d'établir une résidence pour six mois, pour un an, ou quelque chose du genre. Alors, on a effectivement peur que les services commencent à diminuer.
Il y aura peut-être des personnes qui vont déménager à cause de bénéfices plus grands dans une province que dans une autre, ce qui va mettre d'autres pressions sur ces provinces qui vont réduire et réduire. C'est un escalier qui va en bas. On ne veut pas avoir une société comme celle qu'on peut voir aux États-Unis où il y a une très grande différence entre les riches et les pauvres et où il n'y a même pas de services de base. Il y a des démunis qui sont dans la rue et qui n'ont accès à aucun service. Nous commençons graduellement à voir des choses comme cela, même dans notre société, et nous pensons que nous n'avons pas réfléchi suffisamment sur les effets potentiels de ce transfert. Nous ne sommes pas convaincus que cela va réduire le déficit. Nous pensons, au contraire, que cela coûtera aussi cher, sinon plus cher.
M. Loubier: Monsieur, c'est une norme nationale. D'après ce que je comprends des normes nationales, c'est l'obligation d'utilisation des deniers publics fédéraux aux fins pour lesquelles ils ont été débloqués, mais il y a d'autres choses qui se rajoutent à cela. Dans les normes et les principes directeurs nationaux tels qu'énoncés, on parle aussi de moduler les programmes, les programmes de sécurité du revenu d'une province à l'autre, par exemple, pour qu'ils soient comparables en termes de bénéfices ou de mécanismes d'attribution de ces bénéfices.
Vous êtes d'accord que les normes ne visent pas uniquement l'obligation d'utilisation des deniers? Dans ce cas-là, vous êtes resté muet sur l'éducation postsecondaire. Êtes-vous aussi favorable à ce qu'il y ait des normes ou des principes directeurs nationaux qui moduleraient l'ensemble du système d'éducation postsecondaire à la grandeur du Canada, y compris au Québec, et qui feraient en sorte que, d'une province à l'autre, on ait les mêmes programmes, les mêmes normes ou qu'on dirige d'Ottawa les programmes d'éducation postsecondaire des provinces?
M. Weiner: C'est une question très difficile parce que cela a aussi des implications constitutionnelles, sachant qu'actuellement il n'y a pas de normes dans ces secteurs. Si je parle au nom de mon organisation, nous ne serons pas contre le fait qu'il y ait des normes qui règlent ce qui se passe dans l'éducation postsecondaire, mais pas au point d'empêcher chaque province de dépenser ou de faire des choses qui lui sont particulières.
M. Loubier: Êtes-vous d'accord, monsieur Weiner, que l'esprit du projet de loi, jusqu'à ce qu'on y apporte des amendements, est un peu provocant parce qu'il dit aux provinces que si elles ne suivent pas les normes nationales, déterminées on ne sait comment - on ne donne pas d'obligation d'entente unanime entre les provinces et le fédéral - , on coupera dans les deniers fédéraux, on coupera les transferts fédéraux? Ne convenez-vous pas que c'est la mauvaise façon d'améliorer les relations entre le gouvernement fédéral et les provinces?
M. Weiner: Nous voulons effectivement qu'il y ait une entente qui implique les provinces et le fédéral et que celle-ci contienne certaines obligations nationales qui devront être respectées par les provinces.
M. Loubier: Des ententes à l'unanimité, un droit de veto pour les provinces en regard de l'éducation, par exemple.
M. Weiner: Comme je l'ai mentionné, notre position est plus nuancée sur l'éducation, mais pas dans les autres secteurs. Notre position sur l'éducation est beaucoup plus nuancée en raison des dispositions constitutionnelles.
M. Loubier: Merci.
Le président: Merci, monsieur Loubier.
[Traduction]
Qui sera le porte-parole du Parti réformiste aujourd'hui? Monsieur Grubel.
M. Grubel (Capilano - Howe Sound): De toute évidence, l'essentiel de votre exposé a pour objet les normes nationales, mais je me permettrai de les aborder sous un angle différent. Permettez-moi de relever le passage où vous avez dit que par conséquent, les provinces et les territoires auraient la latitude voulue pour fournir les programmes sociaux de leur choix. J'aimerais modifier légèrement cette affirmation.
En réalité, les gouvernements provinciaux et territoriaux, les créatures de parlements dûment et démocratiquement élus, seraient par conséquent libres de faire ce qu'ils veulent. Vous déplorez cet état de choses. Certains diraient que, de fait, il est à peu près temps que la main de fer d'une élite intellectuelle et bureaucratique bien installée dans sa tour d'ivoire à Ottawa soit dépouillée un peu de ses pouvoirs et qu'en réalité, la suppression de ces normes constitue un geste en faveur de la démocratie et de la liberté, qui serait très chaleureusement accueilli.
M. Weiner: À cette intervention, je répondrai ce qui suit: nous avons affaire à un pays, pas simplement à 10 provinces et à deux territoires. Il existe un pays qu'on appelle le Canada, au sein duquel nous nous sommes efforcés d'établir l'équilibre le plus juste possible entre les droits de la collectivité et les droits des particuliers. Or, les droits dont il est question dans la perspective du TCSPS sont, de l'avis de nos membres, des droits collectifs. Tout citoyen du Canada a droit à des services de santé convenables, à une aide sociale et à de bons services éducatifs. Or, il s'agit là de services qui doivent être garantis par le gouvernement.
M. Grubel: D'où viennent ces droits et pourquoi ces services devraient-ils être garantis par le gouvernement? Où que cela est-il écrit?
M. Weiner: Où est-ce que cela est écrit? C'est une tradition que nous avons conservée, une réalité que nous respectons, d'après moi, depuis des générations et que nos membres et nous-mêmes craignons d'être sur le point de perdre. Nous craignons d'être engagés sur un terrain glissant qui va nous amener au point où nous n'aurons plus un pays unique, mais 10 ou 12 pays.
M. Grubel: Essayez-vous de me dire qu'avant l'adoption de ces principes, il n'y avait pas de Canada, pas de pays? Essayez-vous de me faire croire que les autres pays du monde, la Suisse par exemple, qui n'ont pas de normes nationales, ne peuvent pas être considérés comme des pays? La Suisse n'est-elle pas un pays?
M. Weiner: Non, ce n'est pas du tout ce que je veux dire et je crois savoir que les pays ont eu une évolution et un développement distincts. Mais je crois savoir également que le Canada est un pays qui a mérité les hommages de la communauté mondiale pour les principes et les normes de base qu'il a établis en faveur des plus démunis de la société. Or, j'ai l'impression que nous commençons graduellement à perdre de vue ces principes et ces normes, et cette perspective préoccupe nos membres au plus haut point. Nous voulons trouver des moyens de préserver l'essence même de la sollicitude avec laquelle le Canada s'occupe des plus mal lotis de la société.
M. Grubel: Je m'excuse, mais n'appartient-il pas aux contribuables qui paient la note de décider de la façon dont on devrait s'occuper des moins bien nantis? Il n'est pas question de ne pas nous occuper des plus démunis. Nous demandons seulement le droit pour les citoyens de la Colombie-Britannique de décider de leur propre chef de la façon de le faire. Essayez-vous de me dire que les citoyens de la Colombie-Britannique ne s'occupent pas des pauvres, que le gouvernement dûment élu de la province ne s'occupe pas des pauvres et des riches d'après les critères de rectitude que lui dicte sa propre sensibilité; que la Colombie-Britannique a besoin de vos conseils pour savoir comment agir et qu'elle a besoin de se faire dicter sa ligne de conduite par le despote fédéral?
Mme Pierce: Ce n'est pas ce que nous disons. Je pense que ce que nous essayons de faire, c'est d'établir un juste équilibre entre les dispositions fédérales et provinciales concernant l'administration des programmes. Je pense que la raison pour laquelle nous menons un débat aussi musclé tient à l'aspect d'équité et de justice à l'échelle du pays. Nous voulons faire en sorte que tout Canadien, peu importe qu'il habite la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick ou Terre-Neuve, conserve l'assurance qu'il existe des normes ou des lignes directrices nationales sous le régime desquelles les programmes de sécurité sociale seront administrés et que nous aurons un accès équitable à ces programmes.
De fait, nous essayons de faire valoir que sous le régime de ces lignes directrices nationales, de ces principes nationaux et de ces normes nationales, appelez-les comme vous le voulez, les provinces auront la latitude de concevoir des programmes adaptés à leurs besoins. Cependant, en l'absence de lignes directrices ou de normes nationales, je crois que nous ne garantissons pas l'équité et la justice dans l'administration des programmes.
Donc, nous n'accusons pas la Colombie-Britannique de refuser de prendre soin de ses citoyens en toute humanité - au contraire, nous pensons qu'elle s'en occupera - mais j'estime qu'il nous faut assurer des paramètres nationaux, pour garantir l'équité et la justice.
M. Grubel: Vous ne faites que répéter ce qui a déja été dit. Le fait est que nous avons déjà les paiements de péréquation pour permettre, dans toute la mesure du possible, à chaque région, pauvre ou non, de le faire. Le dossier en litige est une question très fondamentale pour le Canada: il s'agit de déterminer si c'est l'influence écrasante de l'élite - celle que vous représentez - qui doit dicter aux régions éloignées du pays la façon dont elles doivent dépenser leur argent. Pourquoi ne peut-on pas leur faire confiance en tout esprit démocratique et croire qu'elles sauront prendre les décisions les plus judicieuses pour leurs citoyens.
M. Weiner: La conclusion logique de votre raisonnement, c'est que le Canada ne devrait pas exister.
M. Grubel: C'est faux.
M. Weiner: Oui.
M. Grubel: Est-ce qu'il n'y avait pas de Canada avant 1960?
M. Weiner: Y a-t-il une élite qui vous a élu à la Chambre des communes? Les députés qui ont été élus au Parlement fédéral sont-ils au service d'une élite ou au service de la population du Canada tout entière? De quoi le gouvernement du Canada est-il responsable? De quoi le gouvernement du Canada devrait-il s'occuper? Voilà les questions que nous nous posons.
Il me semble que dans ces domaines-là, les réalités dont nous discutons à présent, le gouvernement intervient depuis toujours et veille à ce que les Canadiens, quelle que soit la région qu'ils habitent, puissent compter sur ce genre d'équité et de justice. C'est là l'objet de notre débat, et non pas le droit de chaque citoyen de la Colombie-Britannique de prendre des décisions chez lui. Cependant, il y a un juste équilibre à préserver et nous sommes persuadés que le gouvernement fédéral a un rôle très important à jouer pour réaliser cet équilibre.
M. Grubel: Une dernière question.
Il est vrai que la tradition existe depuis au moins 25 ans. Cependant, mes commettants soutiennent que le moment est venu de réexaminer la tradition en question. Je vous livre actuellement l'opinion adverse et je tiens à ce qu'elle soit consignée.
M. Weiner: Je comprends qu'on puisse être d'opinion contraire et nous reconnaissons le droit à la dissidence, mais puisqu'on parle de commettants - ma situation financière et la vôtre - le fait est que ma voix est beaucoup plus facilement entendue que celle de bien des Canadiens, et je suis certain qu'il en est de même pour vous. Ce sont ces voix qui doivent elles aussi se faire entendre parce que, dans bien des cas, elles n'ont pas les moyens financiers ou les moyens financiers considérables que nous possédons vous et moi pour avoir accès à ces services d'autres manières. Vous et moi pouvons nous permettre ce luxe.
M. Grubel: Tous les quatre ans, ces personnes ont la possibilité de faire entendre leur voix de la façon la plus radicale qui soit et de faire sauter les élus qui ne leur reviennent pas.
Le président: C'est à contrecoeur que j'interromps votre discussion, car c'est probablement le débat le plus animé que nous ayons eu depuis un bon moment.
M. Weiner: Bravo. J'en suis ravi.
Le président: Avez-vous objection à ce que je passe à autre chose?
M. Grubel: Absolument pas.
Le président: Merci, monsieur Grubel.
Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Merci, monsieur le président, et merci aux deux intervenants d'avoir accepté d'être des nôtres ce matin. De fait, il y a de l'ambiance.
Je passerai à la troisième recommandation, à la page 5. Bien des gens sont d'avis que nous avons englouti des capitaux considérables dans l'étude du phénomène de la pauvreté enfantine et que nous n'avons pas véritablement réglé le problème. Dans les cas dont je suis entièrement au courant, car je viens de l'administration municipale de la Nouvelle-Écosse, plus il y a d'argent offert, plus augmente l'exploitation, dans certains cas, plus s'accroît la gravité de la malnutrition chez les enfants, moins la famille prend à coeur l'éducation des enfants et moins elle a de possibilités de se tirer du bourbier de la pauvreté.
Certains sont d'avis que l'argent n'est pas la clef du problème. Vous laissez entendre qu'on devrait peut-être assurer un revenu garanti aux personnes ayant des petits enfants, comme on le fait dans le cas des aînés. J'aimerais qu'on discute de ce point un peu plus longuement. Si vous instauriez effectivement un régime de revenu garanti ou des garanties de la sorte à l'échelle du pays, y aurait-il des possibilités que le problème se règle?
M. Weiner: Vous poussez peut-être trop loin l'interprétation de nos avancés. Certes, nous reconnaissons nous aussi que l'argent n'est pas la clef du problème. Ce qu'il nous faut au Canada pour bien attaquer la question de la pauvreté enfantine, c'est l'adoption d'une approche globale intégrée touchant tous les aspects liés au phénomène de la pauvreté. Ainsi, il se peut fort bien qu'en élaborant un processus de ce genre et en le mettant à l'exécution à l'échelle d'une collectivité - et il me semble que c'est à ce niveau que cela va commencer à se concrétiser - nous puissions effectivement nous attaquer avec plus d'efficacité à ces problèmes. Telle est notre conviction à la Fédération, et je suis persuadé que c'est également la conviction des membres de l'ACCS.
Mais pour y arriver, nous revenons à la question des normes. On a pris l'engagement à l'échelle du pays, en adoptant des normes nationales, d'assurer aux personnes en situation de pauvreté, dont le revenu est inférieur à un certain niveau, l'accès à la gamme de services dont elles ont incontestablement besoin pour se tirer de ce mauvais pas et pour mieux élever leurs enfants.
Mme Brushett: N'avez-vous pas l'impression - encore là, le facteur temps entre en jeu - que cette possibilité peut se concrétiser; que les conseillers municipaux et les députés provinciaux élus au suffrage du peuple nous garantissent le processus et que les commissaires d'école également élus par le peuple constituent toute une brochette de personnes très soucieuses des besoins de la collectivité et capables, pour peu qu'elles soient plus intimement liées au programme, de répondre à ces besoins.
M. Weiner: Nous ne pouvons pas appliquer à l'échelle du pays... À mon avis, il nous faut instaurer des principes et des paramètres généraux qui permettront à ce projet de se concrétiser. Il n'est pas nécessaire que nous prescrivions dans les détails la façon dont il faudra procéder dans chaque collectivité. Mais si nous laissons les choses poursuivre leur cours et si on a l'impression que le gouvernement fédéral se contente de refiler ses problèmes aux administrations provinciales et municipales, cela ne se concrétisera pas à une échelle aussi importante que vous et moi le souhaiterions. Cet équilibre est donc indispensable, à notre avis.
La présence de paramètres, de lignes directrices ou de normes n'obligera pas nécessairement tout le monde à procéder de la même façon, mais elle laissera voir incontestablement qu'il y a engagement de la part du gouvernement fédéral à garantir aux provinces et aux municipalités les fonds suffisants pour leur permettre de s'acquitter des tâches que nous aimerions, vous et moi, les voir assumer.
Mme Brushett: Merci.
Le président suppléant (M. St. Denis): Si vous n'avez pas d'autres questions, je poserai la mienne, étant donné que le président a dû s'absenter quelques instants.
En ce qui concerne les normes nationales, j'ai pris connaissance dernièrement d'un sondage d'opinion - et je regrette de ne pas être autorisé à mentionner le nom de la maison de sondage, mais je peux attester qu'il s'agissait d'une entreprise bien cotée - qui indiquait que près de 88 p. 100 des Canadiens étaient en faveur de l'adoption de normes nationales dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Je considère que le budget de Paul Martin est un premier pas dans le processus d'habilitation des provinces dans les domaines de la santé, de l'enseignement postsecondaire et de l'assistance sociale et dans le processus d'habilitation accru des particuliers, même dans un contexte de raréfaction des ressources.
Vous m'apprenez que l'on est disposé à envisager l'adoption de certaines normes nationales pertinentes et je me réjouis de vos propos éloquents à l'appui de ce projet. Auriez-vous quelques exemples à présenter pour les illustrer? Y a-t-il une norme nationale que l'on pourra adopter dans les domaine de l'alphabétisation et de l'initiative au calcul? S'agit-il là de mesures satisfaisantes pour un pays comme le nôtre ou existe-t-il d'autres projets en perspective? À mon avis, cette question se situe au coeur même de la grande question de l'habilitation des provinces.
M. Weiner: Pour ce qui est de la mobilité des étudiants, c'est-à-dire leur capacité de passer d'un collège à l'autre et d'une université à l'autre, dans des régions différentes du pays, on pourrait envisager plusieurs moyens de faciliter cette démarche de manière à éviter les embêtements que les intéressés éprouvent dans certains cas lorsque la reconnaissance par une université des crédits obtenus dans une université d'une province différente devient un calvaire pour l'étudiant et pour l'établissement, en raison des exigences différentes des deux maisons d'enseignement.
Il y a donc des aspects que nous sommes prêts à examiner. Je ne peux pas affirmer pour le moment que c'est telle ou telle chose qui pourra être faite sans trop occasionner d'embarras, bien qu'en tant que Québécois, je comprenne parfaitement la perspective que la province de Québec a toujours eue à ce propos, peu importe qu'elle soit dirigée par le Parti québécois ou par le Parti libéral. Il s'agit là d'une question délicate qui n'a jamais été associée à une réalité de la sorte. Comme vous l'avez souligné, la plupart des Canadiens et, à mon avis, des Québécois, en sont très heureux et souhaitent vivement qu'un projet de la sorte se concrétise. C'est une réalité à l'égard de laquelle nous sommes réceptifs, que nous aimerions examiner à sa juste valeur et qu'à notre avis, nous pourrions étudier au moins sous quelques aspects.
Le président suppléant (M. St. Denis): Une brève question supplémentaire, monsieur Loubier.
[Français]
M. Loubier: M. Grubel et moi ne sommes pas sur la même longueur d'onde là-dessus. Vous venez de nous donner une clé. Vous dites que ces normes dans le secteur d'éducation n'existent pas encore. Pourtant, tout le monde connaît, dans son entourage, des gens qui ont étudié au Québec et qui sont allés ensuite étudier à l'université Queen's ou ailleurs, même à l'université de la Colombie-Britannique, sans problèmes puisque les normes, probablement de par la loi du marché - c'est la seule chose qui va me rapprocher de M. Grubel - se sont établies d'elles-mêmes. C'est la même chose dans l'autre sens aussi. On connaît tous, dans notre entourage, des étudiants au niveau collégial ou universitaire du Canada qui étudient à l'université McGill, à l'Université de Montréal ou à l'Université du Québec et qui avaient un background qui était conforme à ce que les universités québécoises attendaient. Pourquoi est-ce qu'il y a aujourd'hui nécessité d'avoir des normes nationales alors qu'on n'en a pas eu besoin par le passé et qu'on s'en porte peut-être beaucoup mieux ainsi?
[Traduction]
M. Grubel: Il y a des gens qui mettent du temps à comprendre.
[Français]
M. Weiner: Cela se peut. Je sais que Mme Pierce veut faire des commentaires à ce sujet. On sait qu'on peut perfectionner certaines choses qui existent actuellement. La plupart du temps, quand il y a des problèmes, on peut les régler. Mais il arrive aussi qu'on ne le puisse pas. Pour moi, cela n'empêche pas qu'on puisse se réunir pour discuter des véritables problèmes, graves ou mineurs. Comment est-ce qu'on peut s'organiser? Est-ce qu'il faut une norme pour telle ou telle chose? Peut-être que non, mais pour certaines autres choses, c'est peut-être nécessaire. On est ouverts à cela.
On sait que la volonté de la grande majorité des Canadiennes et des Canadiens a été exprimée, et on est là pour examiner cela. Je pense que les Québécois veulent que leurs enfants aient accès, s'ils veulent aller ailleurs, aux programmes de l'Université Queen's, comme vous l'avez dit, de l'UBC ou de n'importe quelle autre université. Pourquoi ne pas aborder cela de manière à régler certains de ces problèmes? Peut-être qu'il ne s'agira pas d'une norme, mais plutôt d'un principe. Il faut au moins examiner cela.
[Traduction]
Le président suppléant (M. St. Denis): Madame Pierce, avez-vous une observation-éclair à formuler?
Mme Pierce: Permettez-moi de faire une seule observation à ce propos. Si certains étudiants n'éprouvent aucune difficulté à changer de province, un grand nombre d'entre eux en éprouvent. On a indiqué en toute netteté, je crois, la nécessité d'examiner intégralement la question de la transférabilité des crédits et de la capacité d'avoir accès à l'enseignement au niveau postsecondaire, de même qu'au niveau secondaire, qui suscite pour nous beaucoup d'inquiétude.
Notre organisme représente des commissaires d'école, des conseillers scolaires qui ont souvent de la difficulté à faire valoir la façon locale d'aborder les questions. Certes, nous prônons très fortement la nécessité de l'élaboration et de la mise à exécution de solutions à l'échelle locale, mais nous reconnaissons également la nécessité de concevoir des approches et des lignes directrices nationales. Nous en revenons donc encore une fois à l'aspect de l'équité et de la justice, malgré toutes les discussions que la question a soulevées.
Le président suppléant (M. St. Denis): Sur ce, je vous remercie l'un et l'autre de vos interventions. Vous avez fourni une contribution appréciable au débat et nous vous en remercions.
Nos prochains témoins représentent l'Association des hôpitaux du Canada: M. Laurent Isabelle et Mme Carol Clemenhagen.
Bienvenue monsieur Isabelle et madame Clemenhagen. Mme Clemenhagen a comparu devant le Comité des finances à l'occasion de l'étude d'une couple de dossiers, notamment les consultations prébudgétaires de l'automne dernier et les consultations sur la TPS, il y a un an environ.
Lequel de vous deux dirigera la discussion?
M. Laurent Isabelle (vice-président et membre du Conseil d'administration de l'Association des hôpitaux du Canada): Moi.
Le président suppléant (M. St. Denis): M. Isabelle, vous avez la parole
M. Isabelle: Merci. Permettez-moi d'abord de présenter brièvement notre organisme. L'Association des hôpitaux du Canada est une fédération constituée de 11 associations provinciales et territoriales d'établissements de santé qui représentent environ 1 000 établissements et organismes de santé du pays.
L'AHC se considère et est reconnue comme porte-parole des milieux de la santé du Canada.
Notre mission en tant qu'association n'est rien d'autre que de mettre en valeur la prestation des services de santé au Canada, en élaborant des politiques, en s'en faisant le défenseur et en assurant le leadership en la matière et, bien entendu, en offrant les services de l'Association.
Si vous désirez de plus amples renseignements sur l'Association, sa mission et les services qu'elle offre, nous nous ferons un plaisir de vous les fournir.
Voici maintenant mon exposé.
[Français]
L'Association des hôpitaux du Canada applaudit la décision de reconnaître l'importance de la visibilité de la «santé» dans le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, ou le transfert social canadien tel qu'appelé dans le document initial.
Néanmoins, à l'occasion de l'exécution du projet de loi C-76, la Loi d'exécution du budget 1995, l'Association des hôpitaux du Canada prie instamment le gouvernement fédéral:
a) d'établir un seuil minimal de financement garanti et des transferts égaux par habitant au titre de la santé, dont la formule prévoira un mécanisme approprié de croissance qui sera introduit dès que les signes d'une relance économique durable seront confirmés et que le Canada aura assaini sa situation financière;
b) - évidemment, vous vous attendez à ce que l'association vous le demande, mais je vais le faire - de s'engager à affecter des transferts de fonds fédéraux stables, adéquats et prévisibles spécifiquement pour la santé, dont le montant ne saurait être inférieur - nous le souhaitons - à celui des transferts actuels au titre de la santé, qui totalisent près de sept milliards de dollars;
c) de promouvoir une réforme de la santé visant à préserver les éléments valides de notre système et à modifier ce qui doit l'être dans le meilleur intérêt des consommateurs et des contribuables.
La communauté des services de santé ne cherche pas à accroître ses budgets. Au contraire, notre secteur s'attache non seulement à oeuvrer dans les limites des fonds réduits disponibles pour la santé, mais est proactif dans la poursuite des réductions de coûts et d'accroissement de l'efficacité tout en assurant la qualité des services.
J'aimerais vous donner, à titre d'exemples, deux considérations. L'Association des hôpitaux de l'Ontario sait qu'actuellement, il y a 53 projets d'intégration d'hôpitaux qui sont en marche en Ontario. Ces 53 projets d'intégration comprennent, dans certains cas, des changements de mission d'hôpitaux et même la fermeture d'hôpitaux. Alors, 53 projets de transformation d'hôpitaux en Ontario sur un total de 200 hôpitaux, ce n'est pas à ridiculiser. C'est un exemple provincial.
J'ai aussi un exemple local. Dans Ottawa-Carleton, il y a 10 hôpitaux à l'heure actuelle. Le Conseil régional de la santé est en train d'étudier une restructuration et récemment, dans le cadre de mon travail à la présidence d'un comité des présidents des conseils d'administration des 10 hôpitaux d'Ottawa-Carleton, j'ai eu l'occasion de présenter un projet où on passerait de 10 hôpitaux à quatre à Ottawa. Ce sont deux exemples, monsieur, pour illustrer que nous sommes, je pense, proactifs dans le domaine.
L'Association des hôpitaux du Canada croit que le gouvernement fédéral favorisera le renouveau du système de santé s'il:
- confirme qu'il liera des transferts stables et adéquats, affectés à la santé en particulier, aux principes nationaux convenus qui régissent les programmes publics d'assurance-santé et qui sont la clef de voûte du système canadien de santé dont la réputation d'excellence est mondiale;
- admet que le débat sur la portion des points d'impôt prise pour référence en tant que contribution fédérale à la santé est un débat stérile et ne fait qu'étayer la perception d'un désintéressement et d'un retrait graduel du gouvernement fédéral du champ de la santé (les points d'impôt sont considérés comme des revenus provinciaux perçus par les provinces);
- clarifie la définition du terme «médicalement nécessaire» comme point de départ du processus dynamique visant à déterminer l'éventail des services de base assurés par l'État et, par conséquent, le ratio approprié des dépenses de santé publiques et privées au sein du système canadien de santé;
- invite le Forum national sur la santé, présidé par le premier ministre, à concentrer son travail sur les thèmes du financement et de l'imputabilité et à jouer un rôle catalyseur propre à susciter sur le terrain des initiatives de compression de coûts dans les domaines les plus onéreux; et
- finalement, invite les consommateurs, l'Association des hôpitaux du Canada et les organisations de santé soeurs à participer à tout processus de négociation fédéral-provincial visant à préciser les principes et les objectifs sous-jacents au transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.
Même s'ils ne se rapportent pas directement au projet de loi C-76, l'Association des hôpitaux du Canada invite le gouvernement fédéral à donner toute considération aux éléments suivants qui ont un impact financier considérable sur les établissements et les organismes de santé du Canada et qui sont donc pertinents à la mise en application du budget. Ici, j'ai deux points principaux:
a) confirmer l'exclusion des spécimens diagnostiques et des déchets biomédicaux des exigences de la Loi sur les produits dangereux. Si cette exclusion n'est pas faisable sur le plan législatif, qu'on mette alors à effet le projet de loi C-62, Loi sur l'efficacité de la réglementation, et qu'on accepte la proposition de l'Association des hôpitaux du Canada visant à recourir à cette loi innovatrice pour supprimer le fardeau réglementaire inutilement onéreux du Système d'information sur les matières dangereuses utilisées au travail - l'acronyme est SIMDUT - sur les spécimens diagnostiques et les déchets biomédicaux en milieu de santé. La pratique sûre des précautions universelles actuelles en matière de produits sanguins et de liquides organiques, mise en oeuvre dans les milieux de travail, dépasse d'ores et déjà les objectifs de sécurité visés par le SIMDUT et constitue une manière plus efficace d'atteindre ses objectifs réglementaires; et
b) réduire le plus possible le fardeau fiscal pesant sur les organismes de santé en vertu de la TV nationale. Cela comporte un engagement vis-à-vis des hôpitaux, et un engagement parallèle vis-à-vis des administrations de services de santé à but non lucratif, que ces organismes de bienfaisance n'auront pas à supporter - de par le remplacement de la TPS, qui est la taxe sur les produits et services, elle aussi nationale - un fardeau fiscal plus lourd que sous les régimes fiscaux antérieurs. Si une taxe de valeur ajoutée nationale vise à simplifier l'administration fiscale, alors les instances régionales de santé, les hôpitaux et les établissements et organismes de soins de longue durée à but non lucratif devraient bénéficier d'un statut d'exemption. Ainsi, ces organismes ne prélèveraient pas de taxes sur la vente de produits et services mais pourraient, en ce qui a trait à leurs achats, réclamer les crédits de taxe sur les intrants. C'est un mot étrange, mais le voilà. Cela aurait pour effet de supprimer l'actuel fardeau administratif inhérent à la TPS, de simplifier les procédures de conformité et, compte tenu du fait que les organismes de services de santé sont essentiellement isolés des chaînes de mercatique et de production, de n'engendrer aucune distorsion dans le nouveau schéma fiscal. Si une structure de remises était prévue dans le cadre de la TVA nationale, les autorités régionales, les hôpitaux et les établissements de soins de longue durée et les organismes de santé à but non lucratif devraient se voir accorder une telle remise, non inférieure à 86 p. 100. Avant d'introduire une quelconque modification de nature fiscale, il conviendrait d'analyser de manière approfondie son impact potentiel, y compris les coûts de transition, de concert avec l'Association des hôpitaux du Canada agissant au nom des autorités régionales, des hôpitaux, des centres de soins de longue durée et des organismes de santé à but non lucratif affiliés à la fédération de l'Association des hôpitaux du Canada afin de s'assurer que le fardeau financier et administratif ne sera pas accru au travers des changements proposés.
Les conséquences du budget fédéral de 1995 sur les consommateurs de services de santé sont significatives, aussi bien à l'égard de la confiance du public dans l'engagement fédéral envers l'assurance-santé qu'à celui de l'impact cumulé des coupures de 29 milliards de dollars déjà appliquées aux transferts effectués au titre de la santé, (cela entre 1986-1987, et 1995-1996) et des réductions additionnelles de 7 milliards de dollars projetées pour 1996-1997 et 1997-1998. Moins signifie en effet moins: délais plus longs, effectifs plus réduits et diminution des services aux collectivités. Des milliards de dollars en ressources ne peuvent être soustraits du système de soins de santé financé par les fonds publics sans porter au bord de l'éclatement la «cocotte-minute» - un pressure cooker en anglais. L'intérêt exprimé par certains gouvernements provinciaux et analystes des politiques de la santé en faveur de la prospection d'initiatives assumées par le secteur privé, vraisemblablement dans le but de soulager la pression qui s'exerce sur le système public, est le résultat direct des coupures fédérales cumulatives dans les transferts consentis au titre de la santé.
Le gouvernement fédéral ne doit pas abdiquer son rôle absolument essentiel de soutien. Son engagement visant à assurer une présence forte dans la satisfaction des besoins de santé doit être réitéré sans ambiguïté, puis expliqué et discuté au cours d'un débat public ouvert afin que tous les Canadiens et Canadiennes comprennent et appuient le rôle du gouvernement fédéral en faveur de la santé, y compris les efforts déployés pour améliorer la coordination de la politique fiscale et de la politique de santé.
Là-dessus, monsieur le président, je vous remercie.
[Traduction]
Le président suppléant (M. St. Denis): Nous passerons maintenant aux questions. Monsieur Loubier, êtes-vous prêt à commencer?
[Français]
M. Loubier: Oui. Merci, monsieur Isabelle et madame Clemenhagen. Bonjour.
Monsieur Isabelle et madame Clemenhagen, l'essentiel de votre mémoire, c'est de passer le message suivant au gouvernement fédéral. Au cours des dernières années, le système de santé a fait l'objet de coupures assez drastiques. Vous parlez même de 27 milliards de dollars de 1984 à 1995, et de 7 milliards de dollars au cours des deux prochaines années. On demande - et je pense que les Québécois et les Canadiens le demandent aussi - d'être sécurisés là-dessus.
Le système de santé est quelque chose d'essentiel. Je vous dirais que c'est un des biens publics les plus précieux si on se fie aux sondages. À ce moment-là, pourquoi ne pas avoir suggéré que la contribution fédérale aux soins de santé se fasse uniquement par l'entremise de points d'impôt qu'on donnerait aux provinces? Cette façon de procéder rendrait plus sécuritaire la stabilité du financement, ou l'assurerait, en tout cas. Une fois que c'est donné, ou une fois que c'est acquis, le gouvernement fédéral ne peut plus l'enlever. Il ne peut plus faire ce qu'il a fait sous les conservateurs et ce qui se perpétue avec les libéraux, c'est-à-dire de sabrer impunément dans un système qui est parmi les plus efficaces au monde. Je pense qu'il faut le dire.
Si on compare avec les États-Unis... M. Grubel aime beaucoup les comparaisons avec les États-Unis. Aux États-Unis, on paye une fois et demie plus pour les soins de santé qu'ici au Canada.
J'attends vos commentaires là-dessus.
M. Isabelle: Je vais demander à Mme Clemenhagen de répondre.
Mme Carol Clemenhagen (présidente, Association des hôpitaux du Canada): C'est un point très intéressant, mais l'Association des hôpitaux du Canada voit peut-être l'autre côté de la médaille en mettant davantage l'accent sur la nécessité de sauvegarder les transferts en espèces du gouvernement fédéral au niveau provincial pour faire un lien réaliste et pratique entre les normes nationales et les principes négociés avec les provinces et imposés par le gouvernement fédéral. De l'avis de notre association, il faut avoir ce lien-là pour que la population puisse être assurée de la réalité de ces normes. Sans le transfert en espèces ou en argent comptant, on considère qu'on ne peut pas vraiment promouvoir et sauvegarder ces normes nationales qui semblent être bien appréciées par la population.
M. Loubier: Vous êtes en train de me dire que la cohésion nationale est tellement grande d'un océan à l'autre que, sans transferts pécuniaires ou sans transferts en argent du gouvernement fédéral, on ne peut pas en arriver à des consensus nationaux sur la santé ou sur d'autres sujets. Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de me dire? Est-ce que vous me dites qu'il faut absolument un transfert en espèces, puisque sans transfert en espèces, le gouvernement fédéral ne pourrait pas menacer les provinces qui ne veulent pas appliquer les normes nationales ou les principes directeurs? C'est grave. Si on fait fonctionner une fédération de cette façon-là et si on en est rendus là, il est peut-être temps qu'elle change.
Mme Clemenhagen: je crois qu'il existe un consensus au point de vue des valeurs et principes qu'on peut avoir comme peuple canadien et comme peuple québécois aussi. Le consensus moral est tout à fait clair. On ne discute pas de ce consensus-là. On discute du bon fonctionnement d'un système très compliqué qui est basé sur des transferts et qui fonctionne en termes d'incitatifs. Le gouvernement fédéral, avec les transferts pécuniaires, a organisé un système d'incitatifs, un système qui est sur le point de devenir un système de désincitatifs.
On considère qu'il faut garder ce système d'incitatifs. Ça fonctionne très bien. Il nous a permis de bâtir un système de santé qui fonctionne très bien pour la population. Ces systèmes fonctionnent sur une base financière. C'est clair. C'est la réalité. Mais ça n'empêche pas qu'un consensus moral puisse exister aussi.
M. Loubier: Madame Clemenhagen, le consensus est là; il est indéniable. Le système de soins de santé est parmi les meilleurs au monde. C'est un bon système de santé. On y tient comme à la prunelle de nos yeux. C'est clair, et on ne remet pas cela en question.
Vous avez énoncé des chiffres très révélateurs, tout à l'heure. Vous avez dit que depuis 1984, on a coupé 27 milliards de dollars, plus 7 autres milliards de dollars. C'est 34 milliards de dollars qu'on a coupés dans les transferts en espèces pour les soins de santé, à partir d'Ottawa. Si la tendance se maintient - pour se servir d'une expression qu'on connaît bien - , dans les prochaines années, si on regarde les finances publiques, le réflexe de tout gouvernement fédéral sera de couper encore dans les transferts en espèces, alors que si vous arrivez à enlever ces transferts en espèces et à les transformer en points d'impôts donnés provinces, vous réglez votre problème de sécurité.
Pour la question des normes nationales, c'est une autre question. Remarquez bien que je ne vous l'ai pas posée. Il y a peut-être d'autres façons de procéder. Mais en ce qui a trait à la sécurité et à la stabilité des transferts, il y aurait peut-être lieu d'explorer cette voie qu'on a proposée au gouvernement fédéral, il y a à peu près 15 mois. Autrement dit, l'un n'exclut pas l'autre, mais l'un sécurise le financement.
Mme Clemenhagen: C'est vrai.
M. Loubier: Merci.
Mme Clemenhagen: Merci.
[Traduction]
Le président: La parole est à vous, monsieur Grubel.
M. Grubel: Merci, monsieur le président.
Vous avez présenté un argument qui n'est pas entièrement imprévisible, sauf votre respect, et qui ne saurait donc nous être d'une grande utilité. Tous ceux qui défilent devant le comité disent: «Épargnez-nous». Ce dont nous avons besoin, c'est qu'on nous indique où faire des compressions et comment les effectuer. Personne n'ignore, vous non plus je l'espère, que les coûts de nos services de santé s'accroissent trop vite depuis trop longtemps et que le régime actuel ne saurait durer. Vous avez pris connaissance des projections indiquant qu'au rythme de progression actuel, le coût des soins de santé accaparera la totalité du revenu national avant que le XXIe siècle soit très avancé. Cela ne peut pas continuer. Je suis très déçu que vous n'ayez même pas exprimé une seule suggestion sur les moyens de freiner la croissance du coût des soins de santé.
M. Isabelle: Nous avons suggéré le plafonnement.
M. Grubel: Qu'est-ce que cela veut dire?
M. Isabelle: Cela signifie qu'il n'y aurait pas d'autres compressions, et nous présumons qu'une fois l'économie canadienne remise sur ses rails, il n'y aurait pas d'augmentation des affectations actuelles. Autrement dit, il n'y aurait pas d'autres dépenses engagées au titre de la santé que celles qui sont engagées en 1995. Nous avons suggéré le plafonnement comme solution.
À notre avis, l'idée serait nouvelle, parce qu'on ne l'a jamais fait depuis que le Canada existe.
M. Grubel: Si vous me permettez une réflexion, cela revient à dire «nous allons être gentils; nous allons vous demander un peu moins». Votre démarche n'est rien de plus que cela. J'aimerais voir intervenir des changements systémiques qui reconnaîtraient que le système actuel est menacé parce que, si généreux soit-il pour les consommateurs et si apprécié soit-il des idéologues de la gauche, il ne peut pas continuer.
Il a passé son temps à m'attaquer, je lui rends la monnaie de sa pièce.
Soyons réalistes, ça ne peut pas durer. Prenons, par exemple, les économistes de la santé. Chaque fois que la question est soulevée, la première mesure que mes électeurs désirent voir instaurée est l'application de frais d'utilisation, si l'on peut s'exprimer ainsi. Je considérerais cela de la même façon que les franchises et les co-assureurs. Il y a des moyens originaux de veiller à éliminer toutes les iniquités pour les démunis.
Que peut-on reprocher à des approches de la sorte? Pourquoi ne pas vous en inspirer plutôt que de vous contenter constamment de dire que vous êtes prêts à accepter des compressions de x p. 100, si nous maintenons le financement, ce qui ne nous est d'aucune utilité?
Mme Clemenhagen: Monsieur le président, je tiens à exprimer mon opposition à certaines des observations formulées. À mon avis, après avoir subi des compressions de 29 milliards de dollars au cours des dix dernières années, jumelées aux compressions de sept milliards de dollars en perpective, j'ai l'impression que le secteur des soins de santé fait plus que sa part dans l'effort de réduction du déficit du pays.
En ce qui a trait à l'incapacité d'endiguer l'escalade des coûts, je crois qu'il est temps de laisser de côté ce lieu commun. Il était peut-être bien fondé et utile à un moment donné, mais maintenant, tous les leviers de sécurité dans le secteur des soins de santé ont été dûment enclenchés et nous constatons que les coûts du secteur hospitalier n'augmentent pas et qu'ils n'échappent certainement pas à toute surveillance.
Je crois que cela est important...vous faites une remarque très pertinente en insistant sur la nécessité de ne pas perdre le contrôle des coûts et, de fait, nous devons nous appliquer très assidument à faire en sorte que les coûts ne s'emballent pas pour devenir incontrôlables.
De nombreux économistes - et vous en êtes parfaitement au courant, étant vous-même économiste - , expliquent que si les coûts des soins de santé ont semblé s'emballer au cours de la décennie 1980, c'est en raison de la piètre performance de notre économie en général et non pas nécessairement en raison des coûts proprement dit du système de soins de santé. Vous faites observer, et votre observation est juste, que les coûts des soins de santé ont suivi une courbe inflationniste supérieure au taux normal de l'inflation. Les soins de santé sont coûteux. C'est un secteur à forte utilisation de la technologie. Notre population est vieillissante. En outre, comme Canadiens, nous comptons bénéficier d'un grand nombre de services. C'est cela qui fait grimper les coûts. C'est pour cela que nous payons des impôts. C'est pourquoi nous voulons un régime fédéral et porvincial interrelié qui contribue effectivement à protéger ce système et non pas à lui injecter plus d'argent.
Le représentant de notre conseil d'administration l'a indiqué en toute netteté: nous ne demandons pas plus d'argent. En tant que praticiens et exécutants, nous sonnons l'alarme en faisant remarquer qu'il y a une limite à la contribution que l'on peut demander au secteur des services de santé pour réduire du déficit. Or, nous avons déjà dépassé cette limite, ayant déjà subi des compressions de 29 milliards de dollars et nous apprêtant à en subir de nouvelles de 7 milliards de dollars.
M. Grubel: Je me sens obligé d'intervenir à propos de cette question. Quelle est la proportion du revenu national affectée aux soins médicaux?
Mme Clemenhagen: On me dit qu'en 1991, cette proportion était de l'ordre de 10 p. 100.
Les nouvelles données de Santé Canada n'ont pas encore été publiées. Selon les bruits qui courent, cette proportion a effectivement été ramenée aux environs de 9 p. 100.
M. Grubel: Cette chute est attribuable à la croissance économique.
Mme Clemenhagen: Non. Elle est attribuable aux fermetures de lits et aux compressions qu'ont subies les services de soins de santé - et la croissance économique, j'en suis persuadée, a joué un rôle de ce point de vue. Le secteur des soins de santé a fait sa part.
M. Grubel: Nous avons eu un taux de croissance sans précédent de 4,5 p. 100, ce qui réduit automatiquement l'ordre de grandeur. Je ferai remarquer...
Mme Clemenhagen: De nombreux hôpitaux ont subi des compressions: on a fermé des lits. L'argent est retourné dans les coffres des gouvernements provinciaux.
M. Grubel: Je m'excuse, mais c'est là un point de vue très étroit. Vous ne pouvez pas juger de la quantité de fonds alloués aux soins de santé en vous fondant uniquement sur le fait que quelques hôpitaux ont dû être fermés ou que vos crédits ont été réduits. Le problème auquel le Canada se trouve confronté est que la proportion du revenu national accaparée par les soins de santé n'a cessé de s'accroître et qu'elle a atteint les 10 p. 100.
Même le premier ministre, que personne ne peut accuser de ne pas avoir le domaine à coeur, a dit que la croissance doit s'arrêter. Nous devons comme minimum ramener la proportion à un point de pourcentage de moins du PIB. C'est là, je pense, que vous avez intérêt à nous présenter des suggestions sur les moyens d'y parvenir sans nuire aux caractéristiques fondamentales du régime, sans insister pour obtenir davantage ni pour maintenir le financement au même niveau.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je pense que j'ai pris assez de temps. Nous n'ignorons pas, je crois...
Le président suppléant (M. St. Denis): Je constate que vous avez de la suite dans les idées.
Mme Brushett: Permettez-moi de relever l'observation selon laquelle les coûts des soins de santé n'ont pas augmenté. Ils ont peut-être plafonné au cours des toutes dernières années, mais à mon avis, ils se sont accrus considérablement. On pourrait attribuer cette croissance en partie au fait que nous avons dépassé des paramètres, c'est-à-dire les cinq pilliers sur lesquels repose la Loi canadienne sur la santé... En Nouvelle-Écosse, par exemple, nous avons intégré les soins dentaires aux soins de santé. Tout enfant de moins de 16 ans a droit à la gratuité intégrale des soins dentaires en vertu de la Loi canadienne sur la santé.
Nous avons fait un fourre-tout de la notion de soins de santé de bonne qualité et satisfaisants. En Ontario, les soins de santé comprennent les services psychologiques et la chirurgie esthétique. On constate, d'une province à l'autre, des différences fondamentales qui ont été le fait d'innovations politiques ou de revendications des consommateurs. Il s'est créé un écart considérable et nous avons assisté à une montée en flèche de la demande concernant tous les services de soins de santé susceptibles d'être mis en marché par les professionnels de ce domaine. Je pense que nous sommes allés assez loin.
Si nous confions aux provinces le soin de décider à la lumière des paramètres, ce qui constitue des services de santé de base nécessaires, fondamentaux et excellents, ne croyez-vous pas qu'il s'agit là d'une solution un peu plus judicieuse que de laisser tout le monde tâtonner dans toutes les directions?
Mme Clemenhagen: Oui. De fait, l'une de nos recommandations vise à nous permettre de nous attaquer à ce processus redoutable que constitue la définition de l'expression «soins médicalement nécessaires». Vous avez raison, la notion de soins de santé n'a pas de limites naturelles. En tant que société, nous pouvons sans cesse trouver des services plus utiles et, sans doute, jusqu'à un certain point, plus avantageux que nous pouvons nous offrir. Le problème est de savoir où tirer la ligne. Au-delà d'un certain point, nous risquons de canaliser l'économie entière vers la prestation de services de santé et de services sociaux.
Mme Brushett: C'est très vrai.
Mme Clemenhagen: Cela ne serait pas très logique.
La définition de la notion de services médicalement nécessaires qui permettra de déterminer en dernière analyse quels sont les services qu'il conviendra d'assurer publiquement, sera un travail de titan. L'idée ne manque pas d'intérêt et nous devrions y parvenir. Il faudra nous y mettre avec beaucoup de soin. Il faudra que les professionnels de la santé, les consommateurs et les bailleurs de fonds consentent à conjuguer leurs efforts pour dégager un consensus miraculeux sur la façon de définir ces avantages essentiels et veiller à ne pas bloquer l'accès à un service susceptible d'améliorer effectivement la santé de la population.
Mme Brushett: Selon l'une de vos observations, la Loi sur l'efficacité de la réglementation, le projet de loi C-62, serait à votre avis, plus avantageuse que la Loi sur les produits dangereux pour ce qui est du transport des liquides organiques et des bio-matériaux. Je me demande quelles sont les perspectives d'économies ou de gains d'efficience que cette loi vous permet d'envisager pour les hôpitaux du pays tout entier.
Mme Clemenhagen: Il s'agit d'une question de fardeau de la réglementation. Le système d'information sur les matières dangereuses auquel il est projeté de soumettre les prélèvements pour diagnostic et les déchets bio-médicaux, exigerait que des étiquettes individuelles soient apposées sur chaque contenant de prélèvements pour diagnostic utilisé au pays. On compte environ 200 millions de ces objets à l'échelle des établissements de soins de santé du pays.
Du point de vue de l'accroissement des frais de main-d'oeuvre, le fardeau sera astronomique. Les soins de santé...
Mme Brushett: Puis-je vous interrompre un instant? Cette mesure est-elle envisagée pour le transport interprovincial et international des soi-disant prélèvements biologiques ou à l'intérieur...
Mme Clemenhagen: À l'intérieur même du milieu hospitalier et entre les hôpitaux. Elle comporte donc un fardeau gigantesque...
Mme Brushett: Des répercussions sur la main-d'oeuvre.
Mme Clemenhagen: Sur la conception du travail.
Comme vous le savez, dans les milieux de la santé, il existe déjà des pratiques de sécurité professionnelle habituellement désignées précautions universelles, qui visent à diminuer des risques d'exposition au matériel et aux liquides biologiques comportant des risques d'infection. Ces pratiques sont bien implantées dans les milieux de la santé du pays tout entier. À notre avis, elles sont plus efficaces que la réglementation qui oblige à apposer une étiquette autocollante à chaque tube de prélèvement sanguin à l'intérieur du milieu hospitalier.
Mme Brushett: Avez-vous fait cette recommandation aux instances compétentes?
Mme Clemenhagen: Nous l'avons faite à de multiples reprises. Ce sont les ministères du Travail des provinces et le Secrétariat de la situation de la femme de Santé Canada qui sont les organismes de réglementation.
Que font les organismes de réglementation? Ils réglementent. Il est très difficile de leur suggérer des moyens susceptibles de leur permettre d'atteindre les objectifs de la réglementation en évitant l'étroite perspective de la réglementation. L'ACH songe donc à proposer que la Loi sur l'efficacité de la réglementation soit appliquée dans le domaine qui nous occupe. Nous avons bon espoir de trouver des moyens d'atteindre les objectifs visés en matière de sécurité et d'hygiène et d'éviter le fardeau financier que cette réglementation risque d'imposer aux milieux de la santé.
Mme Brushett: Monsieur le président, je me permets d'ajouter que si l'ACH a besoin d'aide, je suis au courant de ce qu'il en coûte pour transporter les déchets biologiques dangereux.
Mme Clemenhagen: Merci beaucoup, je vous en suis très reconnaissante.
Le président suppléant (M. St. Denis): Merci, madame Brushett.
M. Peterson (Willowdale): Je m'excuse. Ce renseignement a pu m'échapper. Croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait définir de façon unilatérale ce qui constitue un service médicalement nécessaire?
Mme Clemenhagen: Absolument pas. Ce processus de définition nécessite vraiment...
M. Peterson: Beaucoup de consultations.
Mme Clemenhagen: ...beaucoup de consultations. Je dirais que c'est aux provinces que revient le premier rôle de ce point de vue. Le gouvernement fédéral doit intervenir. Les milieux de la santé, ainsi que les consommateurs, doivent trouver des moyens de participer au processus.
M. Peterson: Par conséquent, tout service médicalement nécessaire devrait être de compétence publique. Le reste pourrait être privatisé.
Mme Clemenhagen: Oui.
M. Peterson: Merci.
Le président suppléant (M. St. Denis): Merci à nos deux témoins. Comme toujours l'association a apporté une précieuse contribution à la discussion.
Nous ferons maintenant une courte pause. Nos prochains témoins, qui comparaîtront à 11 heures, représentent la Fédération du travail de l'Ontario.
PAUSE
Le président: Pouvons-nous reprendre no travaux? Nous poursuivons nos audiences sur le projet de loi C-76. Nous accueillons maintenant les représentants de la Fédération du travail de l'Ontario, Gordon F. Wilson, président, Ken Signdretti, vice-président exécutif, et Duncan MacDonald, coordonnateur des programmes. Messieurs, nous attendons votre exposé avec impatience. Merci d'être des nôtres.
M. Gordon F. Wilson (président, Fédération du travail de l'Ontario): Merci, monsieur Peterson. Nous sommes heureux d'être parmi vous. Je peux me dispenser de nous présenter, vous l'avez déjà fait. Je crains cependant qu'il y ait eu une légère méprise et qu'on ait cru que les membres de notre comité parleraient de transport des grains de l'Ouest. Notre exposé a une portée plus générale. Si cela vous apparaît acceptable, permettez-nous de poursuivre.
Le président: Bonté divine! Nous pensions que vous comparaissiez pour traiter de la Convention du Nid-de-Corbeau. Peut-être pourriez-vous revenir la semaine prochaine.
M. Wilson: Certainement. Merci de me l'offrir. Je serai heureux de partager votre chambre d'ici là.
Le président: C'est la réponse que j'attendais de vous, Gordon, sauf que j'aurais cru que vous ne l'auriez pas exprimée en public.
M. Wilson: Et de façon officielle en plus.
Je ferai quelques observations extraites d'un document écrit et je laisserai, je l'espère, quelque temps pour échanger avec les membres du comité.
Au nom de la Fédération du travail de l'Ontario, je tiens à vous remercier tous de l'occasion que vous nous accordez de présenter au Comité permanent des finances de la Chambre des communes nos points de vue sur le projet de loi C-76, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 1995.
Je crois comprendre, monsieur le président, que vous avez en main des exemplaires de notre mémoire. Mes observations seront extraites de ce document, sans toutefois qu'on les y retrouve mot pour mot.
Les 650 000 membres de la Fédération du travail de l'Ontario appartiennent à plus d'une cinquantaine de syndicats et constituent la plus grosse fédération du travail du Canada. Nos membres résident et travaillent dans toutes les régions de l'Ontario, de Kenora à Cornwall et de Moosonee à Windsor, et ils oeuvrent dans tous les secteurs de l'économie.
Une partie de notre tâche est de veiller à faire entendre les préoccupations des travailleurs ontariens dans ce débat. Persuadés qu'il est possible de le faire sans esprit de clocher, nous essayons également de bien comprendre et d'appuyer des projets positifs présentés dans une perspective nationale plus vaste. La FTO appuie le mémoire qui sera présenté devant le Comité des finances par le Congrès du travail du Canada, le CTC.
Nous sommes également d'accord de façon générale avec les représentants de quelques autres organismes ouvriers et sociaux qui ont eu l'occasion de comparaître devant le Comité des finances. Nous sommes extrêmement déçus que le comité n'ait pas jugé bon et nécessaire d'accorder aux Canadiens, en organisant de vastes audiences à l'échelle du pays, la possibilité de faire entendre leurs points de vue au sujet d'un projet aussi lourd de conséquences pour leur réalité quotidienne que celui qui est annoncé dans ce budget fédéral.
Dans la perspective de la position qui a été adoptée par le comité, le rôle de chacun des députés devient encore plus important. Nous espérons que par principe, les députés se prononceront avec véhémence contre ce que nous reconnaissons comme les répercussions néfastes de ce budget fédéral et les inconvénients qu'il aura pour leurs électeurs et pour notre pays.
En tant que Canadiens, nous trouvons dans ce budget fédéral un grand nombre de projets qui nous insécurisent. Cependant, nos observations se limiteront à un certain nombre de thèmes. Nous retiendrons les principes qui sous-tendent le budget, l'approche adoptée dans le domaine de la compression des dépenses et de la réduction des programmes sociaux en particulier, le projet de transferts unique - le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux - et l'assurance-chômage. Nous retiendrons également les importantes répercussions du budget fédéral sur les citoyens de l'Ontario, ainsi que les solutions de rechange viables dont le ministre des Finances a choisi de ne pas tenir compte dans le cadre de l'élaboration de son budget.
Nous sommes d'accord avec l'opinion exprimée dans la déclaration du 14 octobre 1994, publiée dans le document Paying for Canada: Perspectives on Public Finance and National Programs qui a été rédigé conjointement par le Child Poverty Action Group, Citizens for Public Justice et le Social Planning Council de la communauté urbaine de Toronto, et je cite:
- Le véritable débat au pays a pour objet la responsabilité publique, le rôle du secteur public en ce
qui a trait à l'orientation à imprimer au développement économique. Il s'agit d'un débat sur le
genre de sécurité sociale que nous désirons et sur le genre d'économie que vous souhaitons.
Ce programme d'action cherche à amoindrir, dans toute la mesure du possible, le rôle du gouvernement fédéral, affaiblissant du même coup la volonté d'élaborer des normes de service nationales applicables à l'ensemble du pays. En outre, dans toute la mesure du possible, il cherche à refiler des responsabilités à d'autres paliers d'administration sans toutefois que ces transferts ne s'accompagnent des ressources voulues.
La mise en oeuvre de ce programme d'action n'entraîne pas nécessairement la disparition subite des programmes. Au contraire, c'est progressivement que la protection offerte par les programmes visés et la qualité des programmes font l'objet de compressions de plus en plus marquées. Or, comme tout le monde le sait, ce n'est que dans les provinces dont le revenu est élevé, les provinces «bien nanties», que les programmes offrent une excellente protection.
Les auteurs de ce programme d'action espèrent voir s'estomper l'important appui politique dont bénéficient les programmes visés, au fur et à mesure qu'augmentera le nombre de Canadiens qui jugeront que nos programmes actuels ne répondent plus à leurs besoins. Ainsi, il devient de plus en plus facile d'examiner ces programmes et de les assujettir au programme d'austérité visant à régler le déficit. Il devient plus difficile de mettre en oeuvre de nouveaux programmes nationaux, en raison de la nécessité de limiter les dépenses pour régler le déficit.
Ce programme d'action a également comme autre caractéristique l'extériorisation de la dette, au fur et à mesure que s'accroît la proportion de la dette financée à l'extérieur du pays. De plus en plus, les politiques visent à plaire aux créanciers. Si ces derniers ne sont pas satisfaits, ils vont perdre confiance dans le Canada. Il y a communauté de points de vue entre les créanciers de l'étranger et le monde des affaires du Canada.
Cette situation sert bien les intérêts politiques des intervenants du monde des affaires qui peuvent en profiter pour forcer le gouvernement à se préoccuper non pas des soucis de la population canadienne, mais uniquement de la dette et du déficit.
On peut en trouver la preuve dans le numéro d'avril 1995 de Monitor, publication du Centre canadien de recherches en politiques de rechange, qui explique de façon détaillée l'effort déployé pour favoriser délibérément la stagnation économique afin d'annuler les gains sociaux importuns. Il semble que l'expression «gains sociaux importuns» englobe la consolidation des syndicats, la montée des salaires, la croissance du secteur public, l'amélioration des programmes sociaux, le plein emploi et une croissance économique plus forte qu'au cours des trois dernières décennies. Ces points sont illustrés dans les tableaux ci-après présentés dans Monitor.
Je tiens à signaler au comité - il s'agit d'un détail intéressant, mais je ne saurais dire à quel page du mémoire il se trouve - que si l'on compare ce qui s'est passé pendant deux périodes, soit entre 1950 et 1980, d'une part...
Le président: Il se trouve au bas de la page 5.
M. Wilson: ...et la période allant de 1981 à 1994, l'on se rend compte que les taux réels d'intérêt à court terme pendant la période allant de 1950 à 1980, ont été de 1,1 p. 100 et que de 1981 à 1994, ils ont grimpé à 6,1 p. 100. À la même époque, l'intérêt réel de la dette fédérale est passé de 3,9 p. 100 à 7,7 p. 100; le taux de chômage est passé de 5,3 p. 100 à 9,8 p. 100; le taux de croissance économique a été ramené de plus de la moitié, de 5 p. 100 à 2,4 p. 100 et la variation annuelle du taux de rémunération réelle et de répartition du revenu entre les habitants de toutes les régions du pays a été ramenée de 2,4 p. 100 à -0,8 p. 100. Mais je crois que la statistique la plus révélatrice est la proportion du PIB représentée par les biens d'équipement, qui est passée de 11 p. 100 à 13,8 p. 100, presque 14 p. 100.
Ce budget fédéral vise à ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici 1996-1997. Au moyen d'une série de mesures, il annonce des compressions de dépenses de 4,1 milliards de dollars en 1995-1996, de 9,3 milliards de dollars en 1996-1997 et de 11,9 milliards de dollars en 1997-1998. Jumelées à de petites augmentations des impôts, ces compressions des dépenses permettent au gouvernement d'atteindre les objectifs de réduction du déficit qu'il s'est fixés pour l'an prochain et pour l'exercice 1996-1997.
Dans un article publié le 4 mars 1995, le journal The Toronto Star signalait que le ministre des Affaires intergouvernementales, M. Marcel Massé, se félicitait du fait que le budget fédéral allait réduire les dépenses de programmes du gouvernement pour se consacrer uniquement à payer les intérêts de la dette, une première en 45 ans.
Un énoncé de principes approuvé à l'occasion de l'assemblée de 1994 du Congrès du travail du Canada était à juste titre intitulé «Dans l'intérêt public: prestation de services publics de qualité». Cet énoncé explique la pensée actuelle du monde du travail à propos de cette importante question et, si vous me le permettez, j'emprunterai la citation suivante au document:
- La prestation de services publics par les autorités publiques est le moyen le plus efficace, juste et
responsable de répondre aux droits qu'ont tous les citoyens et citoyennes à des services vitaux
pour leur sécurité économique, sociale et politique.
En outre, les personnes qui préconisent le licenciement des travailleurs du secteur public négligent souvent un autre aspect de la question. Ces travailleurs sont également des contribuables et des consommateurs qui contribuent, en dépensant leur chèque de paye, à l'essor de leur collectivité. La perte de ces chèques de paye aura des conséquences économiques graves pour un grand nombre de municipalités de l'Ontario et du Canada, dont les plus évidentes se manifesteront ici dans la région de la capitale nationale.
Les programmes sociaux sont visés d'une multitude de façons dans le budget fédéral. Par exemple, le budget a annoncé des modifications qui seront apportées à l'assurance-chômage. Or, l'examen des résultats de la réforme antérieure donne un bon exemple de ce à quoi nous pouvons nous attendre. Jusqu'à environ 1990, moment où l'on a commencé à ressentir les effets de la première série de compressions, plus de 85 p. 100 des chômeurs étaient bénéficiaires de l'AC. Or, selon le premier ministre de l'Ontario, cette proportion a chuté à 40 p. 100 dans le cas des chômeurs de cette province, et rien ne nous autorise à contester les conclusions de ces travaux de recherche. Selon les statistiques que nous possédons pour l'ensemble du Canada, 53 p. 100 des travailleurs en chômage ont touché des prestations d'assurance-chômage.
La perspective qui augure le plus mal, à notre avis, dans le budget fédéral est qu'à compter de 1996-1997, un transfert unique, le Transfert canadien en matière de santé et de programes sociaux, remplacera le financement des programmes établis, les transferts au titre de la santé et de l'éducation postsecondaire ainsi que le Régime d'assistance publique du Canada, le RAPC. La formule du transfert unique va stimuler l'épuisement des réserves au fur et à mesure que s'intensifieront les tensions exercées sur les provinces pour les amener à comprimer leurs programmes sociaux sous prétexte d'innovation et de la recherche d'un avantage concurrentiel dans le contexte créé par les accords de libre-échange, sans compter que le déficit semble le seul problème à retenir l'attention.
Dans l'ensemble de l'Ontario, nous avons subi au cours des dernières années, dans la foulée des accords de libre-échange, des pertes d'emploi massives et une importante perturbation sociale qui ont été suivies par une grave récession. C'est ce qu'indiquent les observations exprimées par le ministre des Finances de l'Ontario dans le budget qu'il a présenté en mai 1994:
- La récession de 1992 a eu de graves conséquences sur l'emploi. L'Ontario a subi près de 70 p.
100 de toutes les pertes d'emplois relevées à l'échelle du Canada. Les recettes du gouvernement
de l'Ontario ont été gravement touchées par la récession, ayant chuté de plus de 2 milliards de
dollars en 1991-1992, et l'on prévoit que les recettes fiscales demeureront au niveau auquel
elles se situaient en 1990-1991, jusqu'à l'exercice 1995-1996. En conséquence, le nombre de
cas d'assistés sociaux s'est accru et les coûts se sont élevés de 40 p. 100 au cours des deux
exercices se terminant en 1991-1992.
Le budget fédéral de 1995 poursuit sur la lancée de cette tradition d'injustices. La valeur globale des pertes que l'Ontario aura subies après les compressions annoncées ou reconfirmées dans le budget fédéral de 1995 sera de 3,6 milliards de dollars, soit 1,4 milliard de dollars en 1996-1997 et 2,2 milliards de dollars en 1997-1998. Les compressions de dépenses pourraient coûter à l'Ontario près de 90 000 emplois d'ici 1997.
Les détails de ce qui constitue la part équitable de l'Ontario dans ces compressions pourront être élaborés entre les deux paliers de gouvernement. Les députés de l'Ontario - j'en vois d'ailleurs cinq qui siègent au comité - en particulier ceux qui sont membres du Parti libéral, se feront sans doute un devoir d'intervenir pour veiller à ce que leur province et leurs électeurs aient droit à leur juste part. Le processus est également valable pour les autres provinces et les autres territoires.
La présentation d'un budget fournit à un gouvernement l'occasion de dévoiler sa philosophie, ses priorités et sa stratégie de mise en oeuvre. La FTO désapprouve à la fois les principes qui sous-tendent ce budget fédéral et les mesures qui y sont proposées. Nous sommes d'avis qu'il existe des solutions de rechange dont la mise en oeuvre servirait mieux les intérêts de la population canadienne dans l'immédiat et dans l'avenir.
En février 1995, la FTO, en collaboration avec la Coalition ontarienne pour la justice sociale, a publié un document de consultation intéressant, intitulé «Unfair Shares: Corporation and Taxation in Canada», lequel traite d'un important secteur de l'économie canadienne - le monde des affaires - qui est fortement en faveur de l'orientation du budget.
Monsieur Peterson, avant la fin de cette séance, je vous laisserai une copie du document. Je ne l'ai pas autographié, mais je le ferai si vous le désirez.
Le président: Merci, je vous en serais reconnaissant. J'en prendrais un également pour mon épouse.
M. Wilson: Je parcourerai Ottawa en entier pour en trouver un exemplaire.
Pendant la période qui a précédé la présentation du budget, la FTO, ainsi qu'un grand nombre de particuliers et d'organismes de toutes les régions du Canada, ont participé avec le Centre canadien de recherches sur les politiques de rechange à l'élaboration d'un budget fédéral fictif pour 1995. La démarche n'avait pas pour objet d'élaborer une liste de voeux pieux, mais elle visait au contraire à atteindre l'objectif que le ministre des Finances s'était fixé de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB au plus tard en 1996-1997. La différence cruciale se situait au niveau des principes qui sous-tendaient le processus d'élaboration du budget fictif.
La FTO désapprouve l'orientation stratégique qui ressort de ce budget et du projet de loi C-76 et nos préoccupations sont axées sur plusieurs points. Le gouvernement fédéral doit faire preuve d'un engagement résolu et considérer la création d'emplois et la conservation des emplois comme des mesures d'une importance cruciale. Nous sommes en faveur d'une stratégie canadienne du plein emploi assortie d'objectifs explicites en matière de création d'emplois et de réduction du chômage. Demandez aux chômeurs de notre province - et ils se comptent par milliers - ils vous diront que rien ne se fait pour alléger le chômage. Vous en trouverez des millions, comme je viens de le dire pour l'attester.
Le gouvernement fédéral doit être fortement sensibilisé à l'importance que revêtent les programmes sociaux dans la réalité quotidienne des Canadiens et de leur collectivité. La réforme des programmes sociaux doit viser à adapter les programmes aux besoins des Canadiens. Toute démarche de réforme doit être universelle et permettre aux Canadiens d'intervenir véritablement à toutes les étapes du processus.
Le gouvernement fédéral actuel s'est montré trop peu intéressé à chercher d'autres solutions que les compressions pour régler le déficit. Par exemple, le gouvernement fédéral est plus enclin à cibler les bénéficiaires des programmes sociaux qu'à diminuer les taux d'intérêt réels, à augmenter les revenus en mettant en oeuvre une stratégie de plein emploi et des réformes du régime fiscal fondées sur l'équité. Il faut que le gouvernement élabore et mette en oeuvre une politique visant à donner aux Canadiens un contrôle accru sur leur dette actuelle. Il faudra à cette fin rapatrier la dette à l'intérieur de nos frontières. Ainsi, nous pourrons être maîtres de la situation plus que nous ne le pouvons à l'heure actuelle. Autrement dit, c'est à la Banque du Canada qu'on devrait demander d'être mandataire des Canadiens et non pas au monde des investisseurs.
Nous sommes persuadés qu'une partie du programme d'action politique a eu pour objet de punir l'Ontario. Cela est l'aboutissement à la fois de politiques partisanes et du refus du gouvernement fédéral de reconnaître l'incidence néfaste des accords de libre-échange et d'une grave récession sur les Canadiens demeurant en Ontario. C'est étonnant, si l'on tient compte du grand nombre de députés de la Chambre provenant de circonscriptions ontariennes. L'Ontario, comme toutes les autres provinces, mérite qu'on lui donne la chance de jouer un rôle intégral, et elle a droit à sa juste part des ressources pour régler les problèmes auxquels ses concitoyens sont confrontés. La FTO est bien déterminée à continuer de travailler en étroite collaboration avec les autres organismes et les particuliers ayant en commun cette vision du genre de société et d'économie que nous désirons pour notre pays et notre province.
En terminant, permettez-moi de remercier le Comité permanent des finances et ses membres de la possibilité qu'ils nous ont donnée de faire part de nos points de vue sur le projet de loi C-76. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.
Le président: Merci, monsieur Wilson. Avez-vous laissé entendre que le gouvernement précédent de l'Ontario avait de meilleures relations de travail avec le gouvernement fédéral?
M. Wilson: Il faudrait le demander au gouvernement précédent, si vous pouvez trouver ses députés. Si mes renseignements sont bons, ils sont dispersés aux quatre vents.
[Français]
M. Loubier: C'est décourageant, lorsque la seule alternative en Ontario, c'est le Parti libéral. Il y a un gros problème.
Monsieur Wilson, monsieur MacDonald et monsieur Signdretti, vous voyez entre quelles mains vous êtes avec les libéraux, au niveau fédéral.
Qu'est-ce que cela sera bientôt au niveau provincial? Ce sera terrible, s'il faut qu'ils soient là aussi. Je n'aimerais pas être à votre place, être pris avec des libéraux à Ottawa et à Queen's Park, vous aurez des problèmes plus tard.
Le président: ... [Inaudible - Éditeur]...
M. Loubier: Bienvenue au Comité des finances. J'ai une seule question à vous poser. Lorsque le gouvernement libéral a été élu - il y a environ 17 mois - il avait fait la promesse de s'occuper de l'emploi. On parlait de «jobs, jobs, jobs» et on s'est aperçu que, depuis un mois environ, le gouvernement fédéral n'en parle plus et du Livre Rouge non plus.
D'après vous, est-ce que l'actuel gouvernement a respecté ses engagements au niveau social, au niveau de la création d'emplois? S'il y a lieu, est-ce que vous suggéreriez à ce gouvernement de rectifier son tir parce qu'il a trop tendance à se coller aux réformistes, qui le harcèlent jour après jour pour qu'il coupe davantage dans les programmes sociaux et dans les programmes de création d'emploi? Il l'a fait lors du dernier budget, il a coupé 200 millions de dollars dans le programme d'infrastructure fédéral, le seul programme d'emploi qu'il avait mis sur pied.
[Traduction]
M. Wilson: Je ferai d'abord observer qu'il est réconfortant de constater que la politique partisane est bien vivante à Ottawa et qu'elle s'y porte bien.
Une voix: Comme il se doit.
M. Wilson: Comme il se doit.
Je reconnais qu'il n'y a pas beaucoup de signes - sauf dans de rares cas isolés - de création d'emplois en Ontario. En focalisant ses efforts sur la question de la dette et en essayant de faire de la dette la question primordiale dont il faut s'occuper, dans la perspective d'une vague promesse qu'une fois la dette réglée, l'activité économique sera suffisante pour permettre aux gens de trouver du travail, le gouvernement est tombé dans le piège qui a été la pierre d'achoppement de presque tous les autres gouvernements des pays industrialisés de l'hémisphère occidental.
Je me contenterai de présenter deux observations rapides, si vous me le permettez.
Ici, à propos de cet aspect de la question, nous devrons amorcer un débat national sérieux pour déterminer si oui ou non, il y aura suffisamment de travail pour tous ceux qui désirent travailler. Dans la perspective de l'utilisation de la technologie, tous les PDG de l'Ontario avec lesquels je me suis entretenu, peu importe qu'ils appartiennent au secteur primaire ou au secteur secondaire, m'ont affirmé qu'ils prévoient accroître leur production en employant moins de travailleurs l'an prochain, l'année suivante et ultérieurement, au fur et à mesure que s'accroîtra l'utilisation de la technologie.
En deuxième lieu, je ne crois pas que nous puissions obtenir des emplois tant que nous n'aurons pas secoué le joug des investisseurs, c'est-à-dire la société Moody's et autres semblables, aspect dont nous avons essayé de faire l'un des principaux points de notre exposé. Chaque fois que ces investisseurs décident de manipuler les taux d'intérêt au pays en évaluant la valeur d'une économie ou d'une entreprise, nous constatons qu'on va chercher de plus en plus d'argent chez les contribuables à faible et à moyen revenu pour payer ces investisseurs. C'est l'équivalent d'une hausse des taux d'intérêt.
J'admets donc carrément que le gouvernement fera face à des obstacles graves dans sa volonté de régler la question de la création d'emplois tant qu'il n'aura pas déterminé la façon de rapatrier la partie de notre dette nationale financée par des investisseurs de l'étranger. Tant que le gouvernement ne sera pas prêt à régler cette question...
Mme Stewart (Brant): Cela paraît bien sur un compte rendu.
M. Wilson: Oui, mais ce n'en est pas moins vrai.
Tant que le gouvernement ne sera pas prêt à régler cette question, volonté qui, de toute évidence, lui manque pour le moment, et tant qu'il sera prêt à sacrifier nos intérêts sur l'autel des investisseurs, comme il le fait actuellement, il n'y aura pas de création d'emplois valable au Canada.
Permettez-moi de vous présenter cette observation qui, à mon avis, fera ressortir véritablement la nécessité pour le gouvernement du Canada de régler la question de ce point de vue. Il n'y a pas de pays industrialisé de l'hémisphère occidental où le gouvernement prétend ne pas avoir d'argent. Tout le monde est fauché. Tout le monde soutient qu'il doive effectuer des compressions aux programmes sociaux et aux dépenses qui servent les intérêts de la population.
Je pourrais comprendre ce phénomène, tout comme mes collègues, s'il s'agissait seulement d'environ deux ou trois pays dans le monde. Comme on le sait, le capital se change de mains. Cependant, si tout le monde est fauché, la question à se poser est celle-ci: «Qui donc a l'argent en main?» Une fois que nous aurons déterminé qui possède l'argent, et nous savons tous de qui il s'agit, quelles mesures le gouvernement sera-t-il prêt à prendre pour régler la question?
Aujourd'hui, je n'ai véritablement rien constaté qui me prouve que vous êtes prêts à régler la question.
L'ensemble de la philosophie adoptée pour régler le déficit du Canada en comprimant les programmes sociaux... Si vous réduisez toutes les dépenses engagées au titre des programmes sociaux au Canada, ce qui constitue environ 2 p. 100 de notre déficit, vous ne réduirez que de façon marginale la valeur du déficit du Canada qui va continuer de s'accroître à un niveau beaucoup plus considérable que les compressions effectuées.
Les compressions n'apportent aucune saudite solution aux problèmes; excusez-moi, je me suis laissé emporter, Jim, je m'excuse. Les compressions ne sont pas une solution aux problèmes du déficit du Canada.
[Français]
M. Loubier: Monsieur Wilson, j'ai premièrement une remarque à vous faire. Ce n'est pas en éliminant Moody's que nous réglerons les problèmes. La dette fédérale est là, elle est à 548 milliards de dollars à l'heure actuelle. Si nous ajoutons celle des provinces, nous sommes à tout près de 800 milliards de dollars.
Il y a un véritable problème financier des gouvernements au Canada, en particulier du gouvernement fédéral. N'oubliez jamais que 40 p. 100 de la dette sont financés à l'extérieur. Comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, nous éprouvons un sérieux problème de manque de contrôle sur une partie des titres canadiens.
Cela dit, si le gouvernement canadien et les gouvernements des provinces veulent trouver une source de financement ailleurs que sur les marchés domestiques - parce que l'épargne est insuffisante - à un moment donné, il faut en arriver à assainir les finances publiques. Même si on se débarrassait de Moody's, un autre le remplacerait et conseillerait les investisseurs étrangers sur la solvabilité du Canada ou sur les risques inhérents à détenir des titres canadiens.
Par contre, ce n'est pas en coupant à gauche et à droite, en s'attaquant presque exclusivement aux programmes sociaux et à la caisse d'assurance-chômage - à laquelle le gouvernement fédéral ne contribue plus - qu'on va régler le problème.
Au contraire, si nous prenons les projections du dernier Budget de M. Martin, nous arriverons dans quatre ans à une dette fédérale qui va avoisiner les 780 milliards de dollars. Nous n'avons donc rien réglé avec cela, mais on a fait mal en tripotant.
Convenez-vous d'accord avec l'Opposition officielle que tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas une véritable réforme de la fiscalité canadienne, on ne s'en sortira pas? Et nous ne sommes pas les seuls à le dire à l'heure actuelle, il y a plusieurs fiscalistes qui le disent, le Congrès du travail du Canada l'a dit, l'Ontario Federation of Labour - comme vous l'avez souligné quelque peu ce matin - le réclame. Tant qu'on n'aura pas une réforme de la fiscalité, on ne réglera pas le problème. Il y a des trous dans cette fiscalité et il y a un manque de volonté politique pour arriver à la réformer. Je vous dirais surtout qu'il y a, parmi les hauts fonctionnaires, des gens qui ne se mêlent pas de leurs affaires et qui se croient dotés de pouvoirs indûs.
Le sous-ministre aux Finances, M. Dodge, suggérait avant-hier au gouvernement... imaginez, un sous-ministre en titre qui suggère au gouvernement fédéral de couper dans les impôts et dans les taxes des gens à hauts revenus, ceux qui gagnent 200 000$ par année.
Alors, tant et aussi longtemps que nous aurons ce genre de conseillers et l'oreille attentive d'un ministre des Finances ou du gouvernement libéral pour réformer la fiscalité, on va se retrouver avec le même problème dans 10 ans que celui qu'on vit à l'heure actuelle.
La réforme de la fiscalité, allant dans le sens contraire de ce que soulevait M. Dodge il y a deux jours, est-ce que, selon vous, c'est une voie de solution pour en arriver à colmater les brèches de la fiscalité, redresser les finances publiques et protéger, justement, les transferts fédéraux dans les programmes sociaux, les transferts effectués auprès des provinces?
[Traduction]
M. Wilson: Il reste à voir si une réforme de la fiscalité conçue de façon à épargner les travailleurs touchant les revenus les moins élevés, a des chances de donner les résultats escomptés. Le fait est que lorsqu'on réduit les impôts des contribuables appartenant aux groupes touchant les revenus supérieurs, cela ne donne aucun résultat dans le domaine de la création d'emplois.
Ce qui nous inquiète vraiment, c'est qu'il semble que nous nous attaquions aux plus faibles et aux plus vulnérables. Comme je l'ai indiqué, pas plus de 40 p. 100 des chômeurs de ma province ont actuellement accès aux prestations d'assurance-chômage. Nous avons connu une période récession terrible, dont une bonne partie a été précipitée par la restructuration de l'industrie qui a fait suite à l'Accord de libre-échange.
Vous parlez de réforme fiscale et je voudrais ajouter réforme fiscale et monétaire, car c'est bien de cela dont nous avons besoin.
Si vous me permettez de renchérir, nos statistiques nous indiquent qu'aux environs de 1974, les banques à charte étaient tenues, pour être autorisées à mener des activités au Canada, de déposer à la Banque du Canada environ 20 p. 100 de leurs actifs. Les banques ont réussi à manoeuvrer assez habilement pour ramener ce niveau aujourd'hui à environ 6 p. 100. Il nous semble que la Banque du Canada règle continuellement sa façon d'agir en fonction des exigences du monde des investisseurs.
Je me permets de donner cet exemple. Si la Banque du Canada exigeait encore que le niveau d'investissement soit de 20 p. 100... Nous avons estimé qu'au cours de l'année, une tranche d'environ 85 milliards de dollars du déficit du Canada viendra à échéance, si nos renseignements sont bons. S'il est vrai que 40 p. 100 de cette somme sont financés par des investisseurs étrangers, la Banque du Canada pourrait intervenir à l'aide de ces dépôts et contribuer à garantir cette tranche de la dette qui est actuellement financée par des investisseurs de l'étranger.
Une autre avenue, plutôt que...
Le président: À titre de précision, cela signifie-t-il que les 40 p. 100 de notre dette qui sont...
M. Wilson: C'est un chiffre général, Jim.
Le président: ...c'est approximatif, ce qui est bien - la dette détenue à l'étranger pourrait tout simplement être rachetée par la Banque du Canada?
M. Wilson: Pourquoi la Banque ne pourrait racheter la part du lion de cette dette et chercher à racheter le reste...? Toutes sortes de voies s'offrent à nous...
Le président: Donc, la Banque ne ferait qu'émettre des devises ou de l'argent pour monétiser cette dette?
M. Wilson: La Banque accaparerait cette dette.
Le président: C'est bien, mais la Banque devrait émettre de l'argent pour ce faire. Je suppose qu'elle devrait imprimer de l'argent pour ce faire.
M. Wilson: Pourquoi? La Banque détient des dépôts disponibles dans le système bancaire. Elle utiliserait ces dépôts. Si la Banque du Canada n'est pas sûre dans ce pays, qui l'est? Il se peut bien qu'Allan Taylor soit nerveux à ce sujet, mais je ne le suis pas.
Le président: Je voulais tout simplement savoir ce que vous disiez.
M. Wilson: Je suis aussi stupéfié par la réduction proposée des impôts au seuil de 200 000$ pour les contribuables à revenu supérieur... le reste d'entre nous en profiteront... Je suppose que d'un point de vue personnel aussi bien que du point de vue de l'organisation, je suis assez contrarié par le fait que les Canadiens continuent à payer une taxe sur les opérations commerciales. Chaque fois que je vais chez Canadian Tire et que j'achète un article, je paie une taxe sur les produits et services, qui est effectivement une taxe sur les opérations commerciales. Mais, je ne sais trop comment, les gens qui achètent et vendent des devises et les gens qui achètent et vendent des actions, qui sont des produits, ne sont aucunement tenus de payer une taxe.
Je suis un peu vexé lorsque je constate que mon voisin qui va chez Canadian Tire pour y acheter des clous doit payer une taxe, tandis que Conrad Black, pour n'utiliser qu'un exemple - et Conrad n'est pas le seul à être coupable - peut acheter des actions et ne pas payer le moindre sou aux Canadiens. C'est quand même une opération commerciale.
Selon nos estimations, le gouvernement fédéral, si la taxe s'appliquait trois dixièmes de 1 p. 100 au cours du présent exercice, 1995, obtiendrait des recettes d'environ 85 milliards de dollars.
Je sais bien que nous ne pouvons tous les attraper. Il faudrait viser à assurer un certain degré d'honnêteté ou, certes, mettre en place un système de surveillance, mais des signes montrent clairement qu'il serait possible d'assurer le suivi. L'application d'une taxe sur les opérations d'achat-vente de devises décourageraient les gens qui essaient de manipuler notre taux de change. Aussi, il est facile de mettre en place une taxe sur les opérations commerciales en ce qui concerne les opérations d'achat-vente d'actions. Cette taxe comporte certaines lacunes, mais personne ne s'est efforcé de les corriger.
J'aimerais vous dire que les gens que je représente estiment qu'ils paient beaucoup trop d'impôts. J'estime qu'ils ne sont pas bien différents des autres Canadiens. Une partie de leur exaspération est attribuable au fait qu'ils voient tous les jours des gens dans notre société qui ne paient pas leurs impôts.
M. Duncan MacDonald (coordonnateur des programmes, Fédération du travail de l'Ontario): Suite à ce que vous avez dit, j'ai deux points à soulever. Le premier, c'est que certains partis politiques ne font pas toujours ce qu'ils ont dit qu'ils feraient lorsqu'ils sont élus.
Je crois que c'est un problème pour l'ensemble du système, parce que, en tant que Canadiens, nous devrions nous attendre à ce que tout parti politique qui dit avant l'élection qu'il fera quelque chose et qui montre comment il le fera essaiera de tenir sa promesse dans la mesure du possible.
Selon moi, le problème que nous constatons à tous les paliers de gouvernement est un genre d'aliénation croissante ou de cynisme... les gens disant qu'il importe peu qui est élu, parce qu'ils ne tiendront pas leurs promesses. Je crois que c'est un véritable danger pour la démocratie, et je crois que c'est un véritable danger pour tout parti politique, peu importe la compétence.
L'autre point et qu'il est important selon moi de soulever est que les gens réalisent que les déficits et la dette posent des problèmes, mais ils veulent que le budget et les mesures que prend le gouvernement soient équitables.
Prenons tout simplement le budget... Je pense à ma propre expérience. À Pâques, j'ai préparé la déclaration de revenu de ma mère. Elle est âgée de 84 ans. Elle a été infirmière pendant 50 ans. Elle fait de petits dons à l'église. Elle possède sa propre maison. Parce qu'elle a vécu la dépression, elle place un peu d'argent à la banque pour les jours difficiles. En fin de compte, elle a payé de l'impôt.
Nous avons publié ce document Unfair Shares. Page après page, on constate que des sociétés rentables ont payé bien peu d'impôt. Si vous demandez à ces sociétés si elles font quelque chose d'illégal, elles vous répondront probablement que le système leur permet de le faire. C'est là le problème, c'est un problème d'injustice.
Je crois que le système est vraiment détraqué lorsqu'une femme de 84 ans doit payer des impôts et que des sociétés rentables au Canada ne paient pas d'impôts. Il existe peut-être une solution miracle, il se peut que ce problème puisse être réglé très rapidement; le problème est peut-être plus compliqué - mais ce n'est qu'un cas parmi d'autres du genre d'injustice dont nous parlent nos membres. Et tout le monde est prêt à supporter sa part du fardeau, mais lorsque les gens commencent à percevoir que ce sont eux qui supportent la plus large part du fardeau et que d'autres semblent s'en sortir, cela cause des problèmes, qui se traduisent par une désaffection croissante. C'est mauvais pour l'ensemble du système.
Le président: Je vous remercie monsieur Loubier.
David Walker, s'il vous plaît.
M. Walker (Winnipeg-Nord-Centre): Tout d'abord, je vous remercie de votre présence. Bon nombre des points que vous avez soulevés au sujet de la Banque du Canada et de la façon dont elle traite les dettes extérieures sont des questions très importantes. Elles sont largement discutées. Nous en avons discuté lors des consultations prébudgétaires et par la suite aussi.
M. Thiessen sera ici demain matin. Nous essaierons de profiter de l'occasion pour lui demander pourquoi la Banque est en désaccord avec certaines de ces analyses et d'enregistrer ses propos de sorte que vous puissiez voir vos questions transformées de cette façon, et ainsi de suite.
M. Wilson: Vous n'accepteriez pas que certains représentants du public fassent partie du comité pour la séance de la matinée, n'est-ce pas?
M. Walker: Si vous vous asseoyiez derrière nous, vous pourriez nous refiler vos questions et nous les poserons.
Le président: Si vous acceptez de rester avec moi ce soir, vous pourriez venir demain matin, Gordon.
Des voix: Oh, oh!
M. Walker: Au sujet des impôts des sociétés, nous avons constaté à partir de la fin des années 80 et du début des années 90 des déplacements importants vers le revenu familial moyen. Je crois que quelqu'un devrait faire preuve vraiment d'abnégation pour dire que cela n'a pas entraîné une grande anxiété chez les Canadiens de constater que les sociétés ne payaient pas leur juste part d'impôt. Je crois que nous avons au moins commencé de régler le problème.
Je ne suis pas sûr de quelle année sont tirées vos données, mais nous avons établi l'impôt sur le capital... Nous avons établi un impôt minimum pour les grandes sociétés. En fin de compte, on constate que beaucoup de petites sociétés qui, probablement pour un certain nombre de raisons comptables, comme vous le dites, échappent au fisc. Mais en ce qui concerne les grandes sociétés, l'impôt sur le capital agit effectivement comme un impôt minimum.
Lorsque nous verrons les données de 1994-1995, j'espère que vous commencerez à voir certains changements à cet égard. Nous avons constaté jusqu'à présent cette année que l'augmentation de la rentabilité des sociétés s'accompagnera d'une hausse des impôts que paieront les sociétés. J'espère que les Canadiens commenceront à constater un déplacement du fardeau vers les sociétés plutôt que vers le revenu familial.
Comme je l'ai dit, je ne commencerai pas à prétendre qu'il ne s'agit pas là d'un problème; c'est un problème bien réel. J'espère que vous commencerez à constater un certain changement, important pour vos membres.
M. Wilson: J'aimerais souligner, monsieur Walker, que les bénéfices des sociétés canadiennes ont affiché une tendance à la hausse au cours des deux dernières années, et nous n'avons pas remarqué de sociétés qui ont offert aux gens l'occasion de partager ces augmentations. C'est contraire, selon moi à l'autre facteur qui motive les chefs d'entreprise lorsque vous les entendez parler de la nécessité d'éliminer de leur équation de compétitivité les coûts des charges sociales et d'autres coûts qui se sont rattachés aux programmes sociaux. C'est le même argument que l'on entend dans le cadre de la politique publique, que l'on entend plus précisément au sujet de questions autour de la table de négociation, par exeemple.
Donc, ce processus se poursuit, à moins que quelqu'un n'intervienne. Nous avons toujours prétendu que c'est le gouvernement qui doit intervenir. Le gouvernement doit être le niveleur, peu importe son allégeance politique. Il doit agir au nom de ses commettants.
Nous savons que nous avons à faire dans notre pays à une ligne de tendance. Notre pays collectivement - nous tous ici présents - est un mouvement vers le même type de société qui s'était établi au sud de la frontière. Je ne veux pas dire que nous l'avons dit en 1986, en 1987 et en 1988, mais nous l'avons dit. J'aimerais rappeler que je l'ai dit à plusieurs Libéraux lors des discussions au sujet de l'Accord commercial. Aujourd'hui, les États-Unis affichent le plus important écart entre les riches et les pauvres depuis les années 30. Nous allons dans la même direction. La ligne de tendance que nous observons au Canada est exactement semblable à celle que l'on observe aux États-Unis. Elle n'est pas encore aussi prononcée qu'aux États-Unis, mais elle est néanmoins la même.
J'aimerais soulever un autre point pendant que j'ai devant moi l'étude de Moody's. J'estime que les gens sont enclins à penser que les aspects économiques ne sont influencés que par les forces du marché. Je ne crois pas. Qui sont donc les abonnés des publications de Moody's? Ce sont des investisseurs recherchant une analyse d'une société ou d'un pays, et nous savons ce qui se produit, dans ce pays lorsqu'ils décident de manigancer. Chaque fois qu'ils font augmenter de 1 p. 100 les taux d'intérêt qu'ils exigent, alors que d'autres préparent le terrain avant que cette demande soit faite, cela nous coûte 2,5 milliards de dollars.
Par contre, un autre point se rattache à cette question, comme nous le savons aussi, chaque fois que nous pouvons remettre les gens sur le marché du travail et réduire les taux de chômage dans ce pays de 1 p. 100, cela représente 1,7 milliard de dollars. Donc, sur le plan du déficit, une simple augmentation de 1 p. 100 d'une part et une diminution d'autre part représentent plus de quatre milliards de dollars. Nous parlons de beaucoup de programmes sociaux.
Mais nous nous sommes placés nous-mêmes dans ce pétrin, et c'est pourquoi nous estimons qu'il est si important pour la survie de ce pays de continuer de nous démarquer sensiblement des États-Unis, et c'est de cette façon dont nous abordons la question de la dette extérieure. Si nous ne pouvons régler ce problème d'endettement, tout le reste est de la poudre aux yeux, parce nous nous retrouverons inévitablement dans la même situation qu'au sud de la frontière.
J'aimerais soulever un autre point. J'en ai parlé à l'un des ministres du gouvernement que j'ai eu la chance de rencontrer plus tôt cette semaine à Toronto. Nous remarquons dans notre ville, comme je l'ai remarqué dans d'autres régions de la province, que les gens deviennent assez menaçants. Ils estiment que le gouvernement abuse d'eux. Ils estiment qu'ils sont trop imposés, et ils estiment qu'ils ont perdu leurs droits. Ils estiment qu'ils ne font pas partie du processus.
Ils regardent autour d'eux et voient que d'autres se portent bien, merci beaucoup, et la plupart des gens se font démolir, et se demandent ce qui se passe vraiment? Qu'est-ce qui ne va pas dans ce pays? Auparavant, nous argumentions au sujet de l'importance de notre pays et, maintenant nous constatons cette fuite importante de capitaux, qui exerce d'énormes pressions sur les programmes si essentiels pour les Canadiens, non seulement en période de difficultés mais en période de prospérité. C'est un problème auquel devra s'attaquer le gouvernement.
M. Ken Signdretti (vice-président exécutif, Fédération du travail de l'Ontario): J'aimerais faire un commentaire, monsieur Peterson. Je me rappelle qu'un si grand nombre d'entre nous, du mouvement syndical, étions sur la Colline il y a un ou deux ans - je crois que nous étions 100 000 - et alors que vous vous promeniez sur la Colline juste avant l'élection de 1993, bon nombre de gens étaient rassurés du fait qu'il allait y avoir un changement et que le gouvernement libéral serait élu. Ils parlaient du Livre rouge et de ce qu'ils feraient sur le plan de la création d'emplois.
Le désenchantement que l'on constate maintenant est attribuable au fait que vous ne faites que poursuivre, monsieur Walker, les politiques du gouvernement précédent. De fait, vous avez l'occasion...parce que fondamentalement vous avez un parti d'opposition d'accord avec vous, mais vous n'allez pas assez loin. Je n'exclus pas le Bloc québécois, mais je parle du Parti réformiste. C'est fondamentalement ce qui s'est vraiment produit.
Compte tenu de ce qui s'est produit, je félicite le Parti libéral pour son travail de relations publiques auprès des Canadiens pour leur vendre ces promesses. Je pense souvent que M. Martin s'est probablement dit qu'il aurait dû aller jusqu'au bout, parce que s'il l'avait fait...eh bien, où nous en serions maintenant?
J'aimerais donner suite aux propos de Gordon. Nous devons réellement examiner ce qui se passe dans notre système, lorsqu'un courtier de 28 ans peut acculer à la faillite une institution financière vieille de 200 ans. Ce n'est vraiment pas bon, et c'est là une partie du problème sur lequel nous devons nous pencher. Il ne s'agit pas simplement d'un problème monétaire; c'est aussi un problème moral. Je crois que nous devons examiner ce genre de choses, parce que notre situation se détériore vraiment très gravement...
Je ne veux vraiment pas de ce qui se produit aux États-Unis. Vraiment pas. Nous nous définissons comme une société plus généreuse et plus gentille, mais j'ai bien peur que les choses changent de façon très draconnienne maintenant.
M. Grubel: J'aimerais donner mon opinion au sujet d'un point qui peut vous intéresser beaucoup. L'indice de l'offre d'emploi vient tout juste d'être publié. Il a chuté de 2 p. 100.
J'aimerais rectifier certains de vos propos. L'accent mis sur les portefeuilles étrangers de titres de créance est réellement un faux-fuyant. Le problème c'est que tous les investisseurs - se sont des Canadiens qui savent beaucoup mieux ce qui se passe - ont déjà sorti de l'argent du pays, comme vous l'avez laissé entendre, et des conseillers en placements me disent qu'ils reçoivent tous les jours des appels téléphoniques de ce genre: le moment est-il venu de sortir mon argent?
Donc, en nous isolant du reste du monde, nous ne résoudrons pas ce problème, à moins que nous soyons prêt à obliger tout le monde à garder son argent au Canada. Selon moi, nous ferions face à beaucoup de résistance, surtout de la part de vos membres dont les caisses de retraite sont en jeu. Cela m'inquiète vraiment.
Je soulèverai une autre question au sujet de l'impôt des sociétés. M. Peterson s'est présenté aux élections en promettant qu'il corrigerait les lacunes que vous avez mentionnées, il a créé une commission d'experts qui n'était pas nécessairement de gens de droite. Cette commission a conclu qu'il y avait bien peu de chose à faire à ce sujet parce que bon nombre des sociétés qui ne paient pas d'impôt à un palier sont des sociétés de portefeuille qui ont payé leurs impôts à un autre palier. Je me demande pourquoi cela ne s'est pas produit.
Enfin, une question rapide. À la page 5 - et cela est peut-être injuste - on souligne qu'il y a eu une augmentation de la part du capital dans le PIB. J'en suis très surpris. Je remarque que l'on définit le capital comme les bénéfices après impôt des sociétés ainsi que le revenu d'intérêts et de placements. Si le capital inclut les intérêts payés par les gouvernements au Canada, il ne faut pas être surpris que sa part est augmentée, mais quel rapport cela a-t-il avec la part des sociétés dans le revenu national... Je ne comprends pas.
M. Wilson: Ce n'est pas le cas.
M. Grubel: Vous voulez dire que 90 p. 100 de la dette du gouvernement sont détenus par des caisses de retraite?
M. Wilson: Non.
M. Grubel: Qui détient la dette des sociétés? Qui détient les intérêts, les caisses de retraite et autre genre de fonds fiduciaires appartenant à votre propre syndicat?
M. Wilson: Vous avez mentionné les pensions, mais vous allez un peu loin ici. Cela me pose beaucoup de problèmes. Lorsque vous dites M. Peterson, ne parlez-vous pas de M. Rae?
M. Grubel: M. Rae, je m'excuse.
Le président: C'est agréable d'avoir ce genre de confusion dans ce pays.
M. Wilson: C'est bien d'être au courant lorsque vous siégez à un comité fédéral, de sorte que vous pouvez comprendre la question aussi.
Le président: Avez-vous réalisé que David Peterson a été acquitté d'avoir donné une fessée à son enfant en public à London (Ontario), la semaine dernière?
Des voix: Oh, oh!
M. Wilson: Je suis d'accord avec vous. Un certain nombre de caisses de retraite des syndicats ont effectué des investissements à l'extérieur du pays. C'est un problème que vous pouvez aider à régler, monsieur Grubel, à titre de député fédéral de la Chambre des communes, en diminuant le pourcentage des fonds des caisses de retraite en particulier qui peut être investis à l'extérieur du pays, plutôt que de l'augmenter, comme l'a fait le gouvernement précédent.
Pour ce qui est de dire que tous les Canadiens doivent détenir leur investissement, bien entendu non, bien qu'il soit curieux de souligner que les contrôles de change sont des leviers intéressants que peuvent appliquer les gouvernements en guerre. Même si nous ne sommes pas en guerre avec un autre pays, nous sommes certes confrontés à une sorte différente de lutte sociale au pays, et quelqu'un pourrait élargir cette définition un peu pour l'adapter à la situation.
M. Grubel: Selon vous, quel pourcentage serait-il bon de financer...
M. Wilson: Je n'argumenterai pas avec vous au sujet des détails. Je parle de grandes orientations stratégiques, qui ne sont pas évidentes à ce moment-ci. J'essaie de répondre à votre question. Je crois évidemment que la dette extérieure a des effets importants sur notre capacité de faire face à la situation des entrées et des sorties de capitaux.
Vous ne cessez de hocher la tête en signe de dénégation, mais lorsque vous tenez compte du revenu accaparé par ce gouvernement par le biais des recettes fiscales actuellement et des coûts d'administration de ce gouvernement - ces programmes sociaux et ces services - ces coûts sont inférieurs aux recettes obtenues. Donc, il y a quelque part une sortie énorme de capitaux. Lorsque vous mesurez dans quel secteur se produisent ces sorties de capitaux, on constate que beaucoup de capitaux sont redistribués au Canada, mais c'est là une forme de concentration de la richesse qui entraîne de grandes disparités et d'énormes tensions sociales dans le système.
Deuxièmement, vous exagérez. Ruth Getter a affirmé qu'il y avait 500 milliards de capitaux dans le monde qu'aucun gouvernement ne peut réglementer.
M. Grubel: 5 billions de dollars.
M. Wilson: Je vois que vous connaissez vos chiffres encore mieux que moi. C'est peut-être parce que je m'attaque parfois aux banques. Je n'ai pas aussi confiance en elles que vous.
Si on parle bien de 5 billions de dollars, d'où vient cet argent? Il vient de presque tous les pays industrialisés occidentaux du monde. Nous en payons maintenant le prix. C'est le point que j'ai déjà soulevé. Tout le monde dit qu'il n'a pas d'argent. Donc, cet argent doit venir de quelque part, et vous venez tout juste de nous dire où il est allé. Donc, où est le problème? Il est là. Maintenant, vous devez régler ce problème si vous voulez redresser votre situation. Donc, vous devez vous pencher sur ce problème.
Je ne sais comment le dire autrement. Si ce gouvernement ne consacrait pas un cent de plus aux programmes sociaux, les investisseurs demanderaient quand même à accroître leur part du capital disponible au gouvernement par le biais des recettes fiscales. Le problème s'atténuerait aucunement, et vous vous endetteriez encore davantage. Lorsque les investisseurs ont tout votre argent que vous leur devez encore, que ferez vous à moment-là? Que répondez-vous?
M. Grubel: Je n'accepte pas votre raisonnement.
M. Wilson: Je n'ai jamais encore vu un investisseur remettre de l'argent à un gouvernement.
M. Grubel: Le problème au Canada à l'heure actuelle c'est que les taux d'intérêts sont trop élevés. Ils sont trop élevés parce que les capitaux, aussi bien au Canada qu'aux États-Unis, sont prêts à se déplacer...
M. Signdretti: Mais les programmes sociaux ne sont pas la cause des taux d'intérêts élevés...
M. Grubel: Un argument à la fois.
Le problème c'est que nous vivons dans un monde où les marchés financiers sont intégrés. À moins que vous ne soyez prêt à vous retirer à vous replier sur vous-mêmes, comme l'Union soviétique et la Chine ont essayé de le faire, vous n'avez d'autre choix que de faire partie des marchés financiers mondiaux. Le Japon est un important détenteur d'actifs étrangers nets. Il est soumis à la même discipline que nous. Il est pertubé par ces 5 milliards de dollars tout le temps. Vous ne pouvez résoudre ce problème.
M. Wilson: Je ne suis pas d'accord avec votre raisonnement. Vous essayez de relier...
Le président: Je vois qu'il n'y a pas de réponse facile à ce débat.
M. Wilson: La formation du capital aux nationalités. Il n'y a aucun lien entre la loyauté envers les capitaux et les pays - aucunement.
M. Grubel: Je suis pleinement d'accord.
Le président: Comme toujours, nous laisserons en terminant la parole à nos invités et au président.
Je proposerais que Gordie reste avec Herb ce soir et qu'ils poursuivent ce débat.
M. Wilson: Ce serait une longue nuit pour l'un d'entre nous.
Le président: Je sais qu'un seul en sortirait vivant.
J'aimerais dire, et il se peut que cela ne vous fasse pas plaisir, que les membres de ma famille ont travaillé avec M. Wilson par le passé et, à titre d'anecdote, il a la réputation d'être un chef syndical extrêmement dur et efficace, qui envisage la situation dans son ensemble.
M. Wilson: Venez à ma convention, j'aurais besoin de beaucoup d'aide.
Le président: C'est toujours un plaisir de vous rencontrer. Je vous remercie beaucoup de votre présence.
M. Wilson: Merci, M. Peterson.
Le président: Nos prochains témoins représentent la Société canadienne du SIDA, Russell Armstrong et Gregory Williams. Je vous remercie beaucoup d'avoir accepté notre invitation. Nous avons bien hâte d'entendre votre présentation.
M. Russell Armstrong (gestionnaire, Programmes nationaux, Société canadienne du SIDA): Bonjour tout le monde, et merci de l'occasion que vous nous offrez de comparaître devant le Comité. Je m'appelle Russell Armstrong et je représente la Société canadienne du SIDA, du président du conseil d'administration, Brian Huskins jusqu'à mon directeur exécutif David Garmaise.
Mon collègue, Greg Williams, m'accompagne, et nous sommes ici ce matin pour vous dire quelques mots au sujet de la Société canadienne du SIDA et des gens que nous représentons et vous présentez dans leur optique, certaines réflexions sur les aspects du projet de loi C-76 qui touchent très profondément nos membres.
Nous venons tout juste de vous distribuer nos notes. Je m'excuse qu'elles ne soient qu'en anglais. C'est un oubli de notre part.
La Société canadienne du SIDA regroupe à l'heure actuelle, à l'échelle nationale, 104 organisations communautaires. Ces organisations sont en première ligne de la prestation des services de santé aux gens qui ont contracté le VIH et le SIDA à la grandeur du pays. Selon les estimations dont nous disposons actuellement, nous comptons au Canada plus de 40 000 personnes porteuses du VIH et une proportion moins grande a effectivement contracté le syndrome que l'on appelle le SIDA, la forme la plus grave d'infection au VIH.
La diversité des services qu'offrent ces organisations communautaires est assez importante. Comme le mentionne nos documents, ces services englobent le soutien psychologique, l'éducation au sujet des actes de transmission du VIH/SIDA, le parrainage juridique, des conseils au sujet de traitement et des services d'assistance en ce qui concerne l'accès au traitement.
Facteur encore plus important, en ce qui concerne la question que nous examinons aujourd'hui, ces organisations offrent aussi ce que nous appelons un «système parallèle de sécurité sociale». Cela signifie que bon nombre de ces organisations ont des fonds d'urgence qui leur permettent fondamentalement de consentir des sommes aux personnes qui ont contracté le VIH afin de leur permettre d'assumer les coûts extraordinaires de leur maladie, comme les médicaments et, de plus en plus, les coûts des aliments et du logement par exemple qui, lorsque vous les réunissez aux coûts des médicaments, etc, sont hors de la portée financière de bon nombre de personnes qui ont contracté cette maladie.
Nous sommes ici ce matin pour vous faire part de la longue expérience de ces organisations auprès de cette clientèle, et vous la présentez en perspective des changements proposés au financement des soins de santé et de la sécurité sociale au Canada. Comme nous vous le soulignerons, nous pensons, évidemment, que les gens que nous représentons sont des partenaires importants dans le cadre de l'examen des changements proposés. Nous avons beaucoup d'expérience, et nous pensons qu'il faudrait en tirer parti et en tenir compte dans le cadre de l'examen des orientations de la politique sociale au Canada.
M. Gregory Williams (directeur de projet, Projet de sécurité du revenu, Société canadienne du SIDA): Je gère le programme de sécurité du revenu de la Société canadienne du SIDA. Au cours de la dernière année, je me suis penché sur les répercussions du revenu sur les soins de santé que reçoivent les gens qui ont contracté le VIH et le SIDA. La société effectue des travaux à ce sujet depuis plus de deux ans.
Dans le cadre des recherches que nous avons effectuées au cours de la dernière année, nous avons constaté que l'expérience souvent anecdotique des gens qui ont contracté le VIH et le SIDA a été appuyée par des recherches effectuées dans la collectivité en général et par des chercheurs qui se sont penchés plus particulièrement sur le VIH et le SIDA.
La santé d'une personne dépend beaucoup plus que du régime de santé. Par exemple, il a été démontré que la prospérité d'un pays et son degré d'équité du revenu sont reliés à la santé et au bien-être de sa population. Les variations du revenu peuvent être reliées à des variations de la santé aussi bien dans la population en général que parmi des groupes de personnes malades en particulier.
Par exemple, une analyse détaillée des données administratives portant sur 500 000 cotisants au régime de pensions du Canada a démontré qu'il existait un rapport positif entre le fait d'avoir un revenu après la retraite plus élevé et la diminution des taux de mortalité. Nous savons aussi qu'il existe une association positive entre le revenu des taux de survie chez bon nombre de personnes atteintes du cancer. Parmi les gens infectés du VIH au Canada, nous avons appris que les patients dont le revenu est inférieur au moment du diagnostic perdent du poids plus rapidement et que leur maladie progresse plus rapidement.
Le revenu est le lien dans tous ces scénarios. Pour les gens qui ont contracté le VIH et le SIDA, le niveau du revenu est une mesure de leur capacité d'acheter des médicaments, d'avoir accès à un logement convenable et d'acheter des aliments adéquats. Une analyse des évaluations des besoins tirée des données sur l'utilisation des programmes d'aide financière administrés par les organisations dont a parlé M. Armstrong révèle que le besoin de ces trois éléments fondamentaux n'est pas satisfait.
L'existence même de ces programmes est une mesure de l'insuffisance des services sociaux offerts aux gens qui ont contracté le VIH et le SIDA. Ils sont fonction du besoin. Les programmes publics de sécurité du revenu et les programmes privés d'aide financière administrés par les organisations communautaires ne répondent pas non plus adéquatement aux besoins qui existent actuellement.
L'infection par le VIH a des répercussions profondément néfastes pour de nombreuses personnes et leurs familles. On a qualifié ces répercussions de «dérive». Les rapports qui existent entre la progression de la maladie une glissade vers la pauvreté extrême ont été détaillés par plusieurs études réalisées au Canada, en plus des témoignages quotidiens de gens qui ont contracté le VIH et le SIDA et qui ont besoin des services offerts par les organisations membres de la Société canadienne du SIDA.
Ces conclusions sont étayées par une expérience semblable aux États-Unis et des études semblables qui y ont été réalisées.
Ces phénomènes s'accompagnent d'un accroissement des taux d'infection parmi une population déjà pauvre et marginalisée. Par exemple, nous savons que les hommes gais infectés récemment ont tendance à être plus jeunes, plus pauvres et moins bien instruits que les séronégatifs. Au Québec, les femmes porteuses du VIH qui donnent naissance à des enfants résident dans des zones postales où le revenu est inférieur à la moyenne provinciale.
Les effets débilitants du VIH empêchent les personnes de continuer à vivre indépendamment et à subvenir financièrement à leurs propres et à ceux de leurs familles. Parallèlement, les effets débilitants complexes du VIH entraînent des coûts supplémentaires et un fardeau financier additionnel.
Même si les gens qui ont contracté le VIH/SIDA vivent plus longtemps après le diagnostic que c'était le cas au début de l'épidémie, ils deviennent aussi plus pauvres. En conséquence, les besoins en soins et en soutien des gens qui ont contracté le VIH/SIDA dépassent les soins palliatifs aigus au stade terminal. Ces gens ont maintenant besoin à long terme de services médicaux sophistiqués en plus d'une gamme de services sociaux spécialisés.
Des insuffisances du soutien du revenu de base et des services de santé et des services sociaux plus spécialisés, comme l'assurance intégrale du traitement des thérapies signifient tout simplement que ces gens seront moins en santé, que leur maladie progressera plus rapidement et qu'ils mourront plus rapidement.
J'aimerais ici souligner - ce n'est pas dans mon mémoire - que cette situation comporte aussi une dimension de rentabilité. Par exemple, nous avons démontré qu'au Canada, et encore une fois nous sommes appuyés par les recherches réalisées aux États-Unis, que les gens qui ont contracté le VIH/SIDA qui n'ont pas de logement stable utilisent beaucoup plus souvent les installations de soins aigus que ceux qui ont un logement stable. Donc, si vous pensez à ce qu'il en coûte au Canada pour loger décemment une personne, afin de lui donner accès aux soins dont elle a besoin, et que vous comparez ce chiffre aux 800 à 900$ par jour qu'il en coûte pour soigner une personne infectée au VIH, dans le cas de la plupart des autres infections aigues, dans un hôpital canadien, il est définitivement rentable d'assurer un environnement socio-économique stable aux personnes qui ont contracté le VIH/SIDA.
Sur le plan social encore, les économistes ont remarqué que la mortalité attribuable au SIDA a déjà eu des répercussions importantes sur la production future de richesses de ce pays.
Dans le projet de loi, sous la rubrique «Objectifs, principes et normes», on remarque que le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux semble refléter le lien qui existe entre les facteurs socio-économiques et la richesse de la personne et de la population en général. Cependant, le projet de loi C-76 ne prévoit pas les mécanismes législatifs nécessaires pour soutenir l'utilisation innovatrice des ressources du Canada de manière à ce que les rapports qui existent entre la politique sociale et les programmes sociaux et la santé soient respectés. L'intégration des recettes du Régime d'assistance publique du Canada et du financement des programmes établis, sans normes et lignes directrices appropriées au titre des dépenses sociales comparables à celles de la Loi canadienne sur la santé, mine le système de sécurité sociale du Canada et, partant, aussi la santé du pays de ses citoyens.
Selon l'expérience de la Société canadienne du SIDA, il faut assurer une marge de manoeuvre dans la conception et la prestation des programmes de santé et des programmes sociaux. Nous nous réjouissons de l'annonce faite récemment par le ministre Axworthy de changements stratégiques aux dispositions de l'assurance-invalidité et du Régime de pensions du Canada, qui offrent une nouvelle marge de manoeuvre, compte tenu des besoins des Canadiens qui ont des handicaps cycliques et dégénératifs, comme la sclérose en plaques et le VIH/SIDA. Dans ce cas, une telle innovation est à la fois humaine et rentable.
Comme la plupart d'entre vous le savez, les changements représentent réellement des stratégies supplémentaires, mais ils ont pour effet de faire en sorte que les personnes handicapées puissent s'en sortir plus facilement et retourner sur le marché du travail si elles en sont capables. Si vous examinez certaines des statistiques disponibles au sujet des personnes handicapées au Canada, vous constaterez que ces statistiques reflètent beaucoup plus la réalité de l'invalidité au Canada que certaines de nos anciennes notions, qualifiées par des termes comme «handicapé permanent».
Même si nous sommes en faveur de la nécessité d'innover, notre expérience nous enseigne aussi qu'il est nécessaire d'établir des normes au titre des services de santé et des services sociaux ainsi que des moyens de les faire appliquer. Nous croyons qu'un assouplissement est possible à l'intérieur d'un cadre de normes de droits fondamentaux auxquels chaque citoyen canadien peut s'attendre, peu importe où il réside.
En fait, les personnes qui ont contracté le VIH/SIDA doivent avoir la garantie que leur accès à des services de santé non assurés à un logement approprié et à des aliments convenables ne sera pas gêné par des obstacles financiers ou des obstacles juridictionnels entre les provinces et entre les gouvernements provinciaux et fédéral. La solution de rechange consiste à condamner les gens à la pauvreté, à la maladie et au décès précoce.
Pour ce qui est de l'application, si le gouvernement fédéral continue sa pratique actuelle de n'indexer que partiellement les transferts pécuniaires en vertu du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, ces transferts pécuniaires aux provinces disparaîtront. Dans ce scénario, il serait difficile de faire appliquer des normes.
Même si le Régime d'assistance publique du Canada offrait bien peu de normes fermes, il encourageait les provinces à investir dans des programmes dans certains secteurs-clés comme les services de santé non assurés et des programmes de soutien non reliés au revenu en faveur des personnes handicapées entre autres, qui sont plus précisément nommées dans la législation sur le RAPC.
La définition de «services de santé» dans le Régime d'assistance publique du Canada, modifiée en 1984, s'entendait des services médicaux, chirurgicaux, obstétricaux, optiques, dentaires et infirmiers, y compris les médicaments, pansements, appareils de prothèse et tous autres articles ou services de santé nécessaires pour que soient fournis les services ainsi spécifiés communément associés à ces services. Sont exclus de la présente définition les services de santé assurés, au sens de la Loi canadienne sur la santé, ainsi que tous autres services réglementaires de soins hospitaliers. Ces genres de soutien existent au Canada à divers degrés en raison des encouragements qu'offre le partage des coûts.
Le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, sous sa forme actuelle, n'offre aucun encouragement du genre. Les personnes handicapées à la grandeur du pays comptent fortement sur des programmes de soutien du revenu et des soutiens non liés au revenu, des médicaments, des soins à domicile, des prothèses, etc., dont l'existence n'est plus appuyée par le leadership du gouvernement fédéral.
Une autre condition importante du Régime d'assistance publique du Canada était la disposition obligeant les provinces à offrir un système d'appel aux Canadiens essayant d'avoir accès à de l'assistance sociale. Selon l'expérience de nos organisations, le droit d'en appeler des décisions est essentiel.
À titre d'exemple, des handicaps cycliques et dégénératifs, comme le VIH et le SIDA, s'opposent souvent aux critères d'invalidité utilisés dans le cadre des programmes provinciaux de soutien du revenu dont les coûts étaient auparavant partagés dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada. Le système d'appel s'est souvent avéré judicieux pour les personnes ayant contracté le VIH et le SIDA, parce qu'il leur permet d'éduquer les décideurs au sujet d'un état de santé complexe et souvent mal compris.
Même si le Régime d'assistance publique du Canada offrait certains encouragements, il ne prévoyait pas de normes adéquates pour la prestation de services, comme les services de santé non assurés. Il en résulte une grande disparité en ce qui concerne la qualité et l'intégralité de ces programmes à la grandeur du pays. Par exemple, le coût des thérapies dans le cas du VIH/SIDA n'est pas complètement assuré dans le cadre des programmes provinciaux d'assurance-maladie et de bien-être, et de grandes variations qui existent d'une province à l'autre.
L'absence d'intégralité d'une telle assurance-médicaments ruine la santé des personnes qui ont contracté le VIH et le SIDA et des personnes qui ont d'autres handicaps. Elle nuit aussi à l'objectif principal avoué de la politique canadienne en matière de santé: protéger, favoriser et rétablir le bien-être physique et mental des résidants canadiens et faciliter l'accès raisonnable à des services de santé sans obstacles financiers ou autres. Cet objectif est tiré de la Loi canadienne sur la santé.
Il ne sera pas possible de respecter cet objectif, qui éclaire au sujet des normes de la Loi canadienne sur la santé, sans normes parallèles et appropriées en ce qui concerne la prestation des services sociaux.
La seule norme ferme en ce qui concerne l'assistance sociale prévue dans le projet de loi C-76, c'est-à-dire que les gouvernements provinciaux ne peuvent exiger de durée minimale de résidence au titre de l'assistance sociale, est nécessaire. En soi, cependant, elle ne suffit pas. L'engagement pris dans le projet de loi C-76 est vague, à savoir que «le ministre du Développement et des ressources humaines invite ls représentants de toutes les provinces à se consulter et à travailler ensemble en vue d'élaborer, par accord mutuel, un ensemble de principes et d'objectifs communs qui pourraient caractériser le transfert».
Premièrement, les principes et les objectifs sont importants, mais ils doivent être appuyés par des normes. Deuxièmement, la description du processus de consultation et des résultats escomptés est trop vague. À remarquer que ce sont là des principes et des objectifs qui pourraient caractériser le transfert canadien en matière de santé et des programmes sociaux. L'engagement n'impose rien qui tienne compte de la nécessité et de l'urgence d'établir un cadre juste pour la répartition des ressources au titre des programmes sociaux.
Troisièmement, le ministre représentant... le gouvernement fédéral et les provinces ne constituent que deux des trois parties qui doivent officiellement participer à ce processus, et s'y engager, si l'on veut établir des principes et des objectifs utiles et des normes appropriées. La troisième partie, ce sont les Canadiens et les organisations qu'ils représentent: les églises, les organisations bénévoles dans le secteur de la santé, les organisations représentant les personnes handicapées, etc.
De concert avec de nombreux autres Canadiens, la Société canadienne du SIDA a participé à la revue de la sécurité sociale récemment abandonnée.
Un nouvel engagement de compléter sérieusement ce processus serait un moyen de capitaliser sur un investissement important déjà réalisé par le gouvernement et les Canadiens dans l'ensemble, qui sont bien déterminés à amener notre système de sécurité sociale au 21e siècle.
Terminons, j'aimerais discuter de certaines options qui n'ont pas été envisagées dans ce projet de loi. Par exemple, le crédit d'impôt actuel pour personnes handicapées n'est pas remboursable; il n'a donc aucune valeur pour les Canadiens handicapés les plus pauvres, y compris les personnes ayant contracté le VIH et le SIDA, qui n'ont pas de revenu imposable. Nous prions le gouvernement d'envisager la possibilité de rembourser intégralement ce crédit d'impôt afin de compenser les coûts extraordinaires associés au VIH et au SIDA. On a calculé que le coût total du remboursement de ce crédit d'impôt en 1994 aurait été légèrement inférieur à 100 millions de dollars.
Il faudrait aussi connaître les couples de même sexe aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu, de manière à ce que les crédits d'impôt puissent être transférés à un conjoint et à un prestataire de soins au besoin. Pour mieux comprendre ces questions de manière à ce que nous puissions aider le ministre des Finances à ce sujet, la Société canadienne du SIDA prépare un examen de la Loi de l'impôt sur le revenu dans le cadre de son projet de sécurité du revenu. Si cela vous convient, nous serions heureux de vous présenter ce document.
M. Armstrong: Pourquoi avons-nous comparu devant vous aujourd'hui. Fondamentalement, je crois que nous sommes ici pour représenter du mieux possible...c'est presque une supplication, nous vous demandons comment se feront entendre les personnes que nous représentons, qui, selon nous, sont des personnes vulnérables dans ce processus de changements très fondamentaux.
Vous pouvez comprendre, d'après nos propos aujourd'hui, que nous ne nous opposons pas à la nécessité d'assurer une plus grande marge de manoeuvre au renouvellement, à la rentabilité, lorsque nous discutons des changements au système de transfert et des effets qu'ils peuvent avoir sur la politique en matière de santé et la politique sociale. Mais nous nous inquiétons, à ce moment-ci, du fait qu'il n'y a pas de cadre stable. Par exemple, nous ne disposons pas d'un ensemble commun de droits ou de besoins fondamentaux auxquels, selon nous, tous les Canadiens, peu importe où ils résident, devraient avoir accès.
L'un des plus importants éléments de ce processus qui nous inquiète, c'est que nous avons par le passé laissé la question du VIH/SIDA entre les mains des politiciens, surtout au niveau provincial, et que les résultats ont été très différents selon les régions du pays. Nous voulons tous que ce processus nous donne l'assurance que peu importe où les gens résident, peu importe leur régime provincial, nous avons tous un ensemble commun d'attentes et de résultats.
Il se peut que vous vous demandiez pourquoi il faudrait faire un cas spécial du VIH/SIDA? Quels sont les enjeux? Nous avons trop souvent entendu dire que nous ne pouvons nous permettre des choses; nous pouvons nous permettre des changements, nous pouvons nous permettre des améliorations. Je pense que nous n'envisageons qu'une partie de l'équation financière. Dans nos notes, vous constaterez que nous faisons mention d'une étude réalisée par un économiste canadien, Robin Hanvelt, du Centre d'excellence de la Colombie-Britannique, qui donne des estimations des cotes futures de production associées aux taux actuels de mortalité attribuable au VIH/SIDA. Il estime ces pertes à 2,11 milliards de dollars américains. Les répercussions sont évidentes si nous ne répondons pas aux besoins de ces gens minutieusement et ne pensons pas minutieusement à ce que nous faisons.
Enfin, nous vous faisons part d'une citation de l'Institut canadien des recherches avancées qui nous lance un avertissement dans le cadre de ce processus. Les pays qui ne comprennent pas les facteurs déterminants de la croissance économique et les rapports qu'entretient l'économie avec la santé et le bien-être de leur population deviendront probablement des sociétés en déclin.
Comme nous l'avons dit, je crois que c'est probablement la réponse la plus directe à l'argument voulant que l'on ne puisse se permettre des choses. Évidemment, l'enjeu est très important. C'est ce que nous essayons de vous faire valoir.
[Français]
Mme Lalonde (Mercier): Merci beaucoup pour votre présentation. Votre citation de la fin me rappelle une présentation extrêmement intéressante que nous avons eue par le docteur Prichard à Toronto pour le Comité sur le développement des ressources humaines.
Vous avez fait une présentation vraiment concluante sur les rapports entre la santé générale et l'économie, et le Comité permanent des finances devrait l'entendre.
J'ai une courte remarque à faire. Votre présentation a été excellente et instructive. Je ne suis pas critique en matière de santé, mais je suis extrêmement préoccupée par le sujet dont vous avez parlé.
En ce qui concerne le SIDA, vous avez insisté sur l'absence de normes spécifiques. Vous avez insisté davantage là-dessus plutôt que sur la diminution très importante de ressources, notamment pour les provinces les plus pauvres, à laquelle on peut s'attendre, non pas pour cette année, mais à partir de 1997-1998, et une partie de l'année prochaine, dûe à l'effet combiné du plafond et de la coupure du gouvernement.
D'une façon générale, nous, au Québec, on ne veut pas de normes nationales. C'est-à-dire qu'on en veut, mais on diffère sur quelle nation on devrait les imposer. Je sais, pour avoir traversé le Canada avec le Comité du développement des ressources humaines, que cette demande de normes nationales strong national standards est quelque chose qui était extrêmement général et répandu.
Premièrement, ne trouvez-vous pas que ce qui est plus dramatique dans le projet de loi C-76, ce sont les coupures importantes que les provinces vont surtout devoir faire à l'aide sociale, compte tenu qu'il y a quand même le maintien des normes de base dans la santé? Mais ces coupes de l'aide sociale risquent d'augmenter les cas et la gravité des symptômes de diminution de l'immunité, de même que de SIDA.
[Traduction]
M. Williams: J'ai préparé la présentation et c'est une chose à laquelle j'ai bien réfléchi.
Les compressions sont importantes. Mes commentaires au sujet des répercussions sur le plan de la rentabilité de ne pas assurer de logement stable et des effets sur le système de soins actifs, appuient selon moi, vos commentaires selon lesquels les coupes sombres dans les services sociaux se traduiront par des augmentation des coûts dans d'autres secteurs. Ce qui, dans la plupart des cas, n'a aucun sens sur le plan financier.
Nous nous inquiétons au sujet des coupures qui seront effectivement effectuées. Nous avons mentionné que nous nous inquiétions au sujet de l'inflation partielle des transferts pécuniaires aux provinces, mesure qui érode graduellement les transferts pécuniaires.
Je crois que je parle en mon nom et en celui de Russell lorsque je dis que, en même temps, nous sommes conscients du fait que nous travaillons à l'intérieur de limites financières, ce qui exige une réponse créative. Je crois que la raison pour laquelle j'ai choisi de mettre l'accent sur les normes à l'intérieur du cadre est que s'il doit y avoir innovation, elle devrait s'effectuer dans un cadre à l'intérieur duquel on a déjà tenu compte de certains besoins ou droits fondamentaux.
Il me semble que nous avons tendance à toujours faire une dichotomie. D'une part, il y a des normes et, d'autre part il y a la marge de manoeuvre. Il n'est pas nécessaire qu'il n'y ait pas de rapport entre les deux. Selon moi, nous devons établir un cadre qui favorise la souplesse et l'innovation, particulièrement en ce qui concerne la prestation des services, et qui nous permette de mieux utiliser les ressources dont nous disposons.
Nous n'avons pas préparé de critique détaillée des chiffres du budget en partie parce que, pour être honnête, cela ne relève pas de notre domaine de compétence et que d'autres groupes, comme l'Organisation nationale anti-pauvreté et l'Institut Caledon de politique sociale de Montréal, le font très bien et que nous appuyons leur travail dans un bon nombre de domaines. J'ose espérer que cela aide. Cela reflète mon choix, qui est de mettre l'accent sur les normes plutôt que sur les chiffres.
[Français]
Mme Lalonde: Vous avez sans doute entendu notre commentaire général, le mien en tout cas, que je voudrais ajouter ici par rapport à ce projet de loi C-76. Le gouvernement y tient un double langage.
Je l'ai appelé le budget à deux faces, malgré les amendements que M. Martin a annoncés mardi. Dans un geste assez spectaculaire, avant de nous dénoncer pour notre non-sens, il a été obligé d'annoncer lui-même des amendements d'une façon que je ne juge pas vraiment parlementaire, quelle que soit la brièveté de mon expérience parlementaire.
Dans ce projet de loi, il y a à la fois l'expression d'une volonté de flexibilité, et à la fois la possibilité d'un accroissement des normes, auquel le Québec s'oppose fortement, d'abord en soi, et aussi à cause de la diminution extrêmement importante du financement.
D'un certain point de vue, ceux qui lisent attentivement les textes des critiques des deux côtés pourraient dire que la remarque vaut aussi pour le gouvernement.
De toutes manières, une raison de protester, que nous avons tous, est la diminution importante du financement. Celle-ci va se traduire en coûts sociaux plus importants. Et ces coûts sociaux, ce sont les provinces qui auront l'air de les assumer, mais, en réalité, c'est tout le Québec et la société canadienne qui les assumeront.
Le président: J'ai l'impression qu'il ne s'agit pas d'une question.
Mme Lalonde: Ils peuvent faire des commentaires sur mon commentaire. Ils le font très bien.
Le président: Oui, en effet.
M. Armstrong: C'est très bien dit. Merci.
Le président: Merci, madame Lalonde.
[Traduction]
Mme Stewart: J'aimerais remercier messieurs Armstrong et Williams d'avoir soulevé la question de la sécurité du revenu, particulièrement au nom des personnes atteintes du VIH/SIDA, mais de façon plus générale au nom des Canadiens handicapés. Essentiellement, le message que vous livrez au nom de vos membres est que cette question peut être élargie très efficacement, je pense.
J'ai moi aussi été nthousiasmée lorsque le ministre a apporté ces changements au fonctionnement de l'assurance-invalidité du RPC, parce que ces changements ont d'importantes répercussions sur bien des gens. Je crois savoir que nos sous-estimations de l'ampleur des comptes du RPC résultaient en fait d'une augmentation marquée des pensions d'invalidité versées aux Canadiens, ce qui était extrêmement malheureux, mais cela attire notre attention, encore une fois, sur l'importance de la présentation que vous avez faite aujourd'hui.
Je suis particulièrement intéressée... vous parlez d'invalidité et à la page 4 de votre mémoire de la nécessité de faire preuve d'innovation et de souplesse. Je m'interroge, alors que nous parlons des résultats obtenus grâce à la structure actuelle et de la façon dont les paiements de transfert sont effectués, et de leur lacune, au sujet de l'incapacité des provinces d'être aussi innovatrices et créatives qu'elles devraient parfois l'être, de l'incapacité d'avoir réellement des normes nationales malgré nos meilleurs contrôles.... Compte tenu de ce changement, monsieur Williams, alors que vous parlez de dichotomie entre les normes nationales et la souplesse - et nous nous embourbons à ce sujet et j'en conviens, je le déplore - et de la nécessité d'établir un cadre, je me demande en fait si ce projet de loi nous donne l'occasion d'établir un cadre très efficace et très efficient qui assurera aux provinces une certaine marge de manoeuvre, alors qu'elles sont responsables et maintenant redevables, pour qu'elles puissent établir des programmes étroitement liés entre eux en ce qui concerne la santé, la nécessité de l'assistance, le logement, et d'autres éléments de manière plus créative que le permettraient des lignes directrices strictes et indicatives.
Certes - et je crois que Mme Lalonde en conviendrait - certaines des présentations que vous avez faites au Comité du développement des ressources humaines indiquaient que les provinces se sentaient impuissantes et qu'elles ne pouvaient agir. Je sais qu'au Québec des programmes auraient pu être mis en oeuvre.
Je suis aussi intéressé d'entendre dire par ma collègue Mme Lalonde qu'elle est en faveur de l'établissement de normes nationales. Cela me donne espoir. Si nous accordons la marge de manoeuvre aux provinces - et si le Québec et les Bloquistes disent qu'ils sont intéressés à l'établissement de normes nationales, assorties peut-être de la marge de manoeuvre voulue pour travailler dans le contexte et les limites de la province, ils sont encore prêts à faire partie de la fédération canadienne et à élaborer des normes nationales. Nous pouvons peut-être espérer pour l'avenir que le gouvernement fédéral peut jouer un ròle important, différent de celui qu'il a joué par le passé, un rôle directeur, pour nous mener vers la prochaine génération de besoins sur le plan des services sociaux et de l'assistance sociale pour les Canadiens.
M. Williams: Je vous répondrai et il se peut ensuite que M. Armstrong veuille ajouter quelques commentaires.
Je conviens que le régime d'assistance publique du Canada empêche, dans un certain sens, l'innovation, mais non pas en raison des normes qui y figurent. Le Régime d'assistance publique du Canada ne comporte effectivement que très peu de normes et elles portent sur des points comme l'évaluation en fonction des besoins. Je réalise qu'un problème économique et éthique controversé se rattache à l'évaluation des besoins comparativement à l'évaluation du revenu, mais l'évaluation des besoins était une norme; le droit d'appel était une norme. La paralysie était attribuable au fait que le RAPC permettait au gouvernement fédéral d'effectuer de la planication et d'établir des programmes sur le plan social en raison de sa volonté de dépenser dans certains secteurs. Le RAPC identifie explicitement les éléments précis des programmes sociaux dont il partagera les coûts. Le fait d'avoir été en position de bailleur de fonds et de celui qui essaie de respecter les critères de financement crée des problèmes. Selon moi, c'est un modèle à éviter. C'est là qu'entre en jeu la marge de manoeuvre dans le cadre de l'établissement des programmes.
Les normes portent encore sur des éléments comme le droit d'appel, la question de savoir si nous aurons encore un système reposant sur les besoins, et l'exigence concernant le lieu de résidence, une norme importante et, jusqu'à présent, la seule norme prévue dans ce projet de loi. Il faut se pencher sur ces normes. Le projet de loi mentionne des principes et des objectifs.
Quant aux principes et aux objectifs, la Loi canadienne sur la santé est un modèle. Si vous examinez la Loi canadienne sur la santé, vous constaterez que les principes et les objectifs s'y trouvent, et je les ai cités dans ma présentation. Les normes d'intégralité, d'universalité et de transférabilité ne sont que les moyens ou les mécanismes qui peuvent nous permettre d'imposer des conditions qui maintiennent ces normes.
Je n'ai jamais dit qu'il serait facile d'en arriver à un consensus au sujet ds normes nationales en ce qui concerne les programmes sociaux. Mais nous aimerions que le gouvernement fédéral s'engage à diriger ce processus, ce qui dépasse l'engagement prévu dans ce projet de loi. Pour être honnête, je ne crois pas que la situation des personnes handicapées, dans l'ensemble, s'améliore. Il se peut que leur situation s'améliore auprès de leurs gouvernements provinciaux, mais il se peut qu'elle ne s'améliore pas. Ce gouvernement avec la Loi sur l'invalidité, avant qu'elle soit remplacée par le Régime d'assistance publique du Canada, s'est portée à la défense de ces citoyens handicapés. Comme la plupart d'entre nous, je travaille avec 10 gouvernements provinciaux et 2 gouvernements territoriaux, et je ne veux pas que les personnes handicapées dépendent entièrement du gouvernement provincial pour assurer la protection de leurs droits fondamentaux en tant que citoyens canadiens.
M. Fewchuk (Selkirk - Red River): [Inaudible - Éditeur]
M. Williams: Le rôle du gouvernement provincial est de faciliter la prestation des services essentiels. Pourquoi avons-nous une union socio-économique si nous ne pouvons nous entendre sur les objectifs et les principes?
[Français]
Mme Lalonde: Je voulais simplement faire remarquer que madame n'avait pas très bien interprété mes propos. Je suis en faveur de normes nationales, mais j'ai toujours été pour qu'au Québec, ce soit le Québec qui dispose de ses propres normes.
J'ai dit aussi, j'en ai témoigné, je l'ai dit, je l'ai entendu et je l'ai écrit, que j'ai bien compris que dans le reste of Canada, on veut des normes.
Si madame, de son côté, est d'accord pour reconnaître que le Québec est un peuple et une nation, oui, nous pourrions avancer.
[Traduction]
M. Walker: J'ai une question très brève à poser au sujet du rôle du gouvernement fédéral. Dans le cadre de ses politiques, cherchez-vous à équilibrer les intérêts entre les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral? Est-ce de cela que vous vous inquiétez, que les provinces n'aient personne qui les surveillent et qu'elles feront des erreurs? Qu'attendez-vous du gouvernement fédéral à cet égard, en termes réels? Vous ne rendez pas de services; vous les financez. Donc la question qu'il faut se poser, dans quelles conditions sont-ils financés?
M. Williams: J'en suis conscient, mais je crois qu'à titre de gardien de la fiducie publique vous entretenez des rapports directs avec les citoyens qui paient les impôts qui servent à financer ces services, et j'estime que c'est la responsabilité du gouvernement fédéral d'articuler le cadre à l'intérieur duquel ces ressources seraient dépensées.
Mme Stewart: Articuler ou...?
M. Williams: Dans ce cas, compte tenu du cadre législatif qu'on nous a founi, je crois que le rôle du gouvernement fédéral est de diriger les consultations avec les provinces et d'autres organisations. Que ces consultations permettent ou non de reprendre l'examen de la sécurité sociale est une question de logistique et aussi, je crois, de rentabilité, compte tenu des ressources déjà investies. Mais le principal élément que nous recherchons, pour nos membres, c'est le leadership à ce moment-ci.
M. Walker: Je ne cherche pas la bagarre. Cette question de leadership m'intéresse beaucoup.
Il y a des choses que nous faisons très facilement et très bien. Nous pouvons modifier le régime de pensions du Canada et améliorer la pension d'invalidité - modifier les critères de cette pension et nous assurer qu'elle soit convenablement financée. Nous pouvons utiliser le régime fiscal pour assurer les services de garde d'enfants, mais nous ne pouvons offrir de services de garde d'enfants. Voyez-vous ce que je veux dire?
Alors que nous essayons de trouver une définition, les provinces à certains égards dans la plupart des cas, offrent elles-mêmes des services publics très sophistiqués. La situation ne ressemble en rien à celle des années 1930 alors que vous étiez confrontés... L'Alberta et les provinces de l'Ouest étaient presque en faillite, il n'existait presque pas d'organisations matures.
Je me demande si nous ne devrions pas être prêts à dire que ces organisations ont atteint un stade où elles peuvent s'occuper de ces choses et que c'est ce que nous pouvons faire. Nous maîtrisons bien le régime fiscal. Nous ne pouvons offrir certains de ces services directs, il nous en coûte beaucoup...
Une voix: [Inaudible - Éditeur]
M. Walker: Comme je l'ai dit, il ne s'agit que d'un point théorique.
Donc, je ne dis pas que les provinces ne sont pas capables d'établir des programmes sociaux sophistiqués. Notre organisation estime - et nous sommes l'organisation nationale et nos membres nous ont fait part de leurs commentaires - que la fédération est une union économique, et nos membres estiment qu'ils ont encore besoin... Appelez cela la protection des droits fondamentaux offerts par le gouvernement fédéral et la législation fédérale. C'est un rapport entre le gouvernement fédéral et ses citoyens.
C'est ce que permettait le RAPC, grâce à l'évaluation des besoins. Il y avait un rapport direct entre le gouvernement fédéral et les citoyens canadiens. Ce projet de loi - le cadre, sous sa forme actuelle - ne le prévoit pas.
Je prends certains risques ici. Je ne prends pas d'engagement au nom de l'organisation que je représente, parce que je ne suis pas un représentant élu.
M'étant penché sur des questions comme le crédit d'impôt pour personne handicapée ayant examiné la Loi de l'impôt sur le revenu, je crois qu'il est logique à ce moment-ci pour notre organisation et d'autres organisations comme la nôtre d'entamer des discussions avec le gouvernement fédéral au sujet des solutions de rechange concernant ces rapports avec les Canadiens, par exemple l'utilisation de crédit d'impôt direct en faveur des particuliers de sorte qu'ils puissent acheter - je m'excuse de mon idéologie - les services ou les soutiens dont ils ont besoin.
Pour être honnête, je crois qu'il faudrait davantage que de rendre le crédit d'impôt pour personne handicapée remboursable; ce crédit représente 800$ par année pour les Canadiens les plus pauvres. Mais je crois, après avoir examiné la Loi sur l'impôt sur le revenu et l'avoir utilisé, qu'il y a quelque chose à faire, et je conviens que c'est de votre compétence.
Nous sommes très heureux de la réponse du ministre Axworthy, et des changements qui ont été apportés au régime de pensions du Canada. Ils sont très emballants, ils sont très positifs et, pour répondre à la députée du Québec, ils tiennent compte de bien des façons de la pratique suivie au Québec au cours des dernières années dans certains cas. Donc, il y a de l'harmonisation.
Mais j'admets que s'il y a un problème, nous sommes disposés à chercher des solutions créatrices pour le régler.
M. Campbell (St. Paul's): Le président m'a demandé de vous remercier au nom des membres du comité. Vous avez soulevé certains points très intéressants, des arguments très convaincants et avez fait une présentation très impressionnante, exprimant certaines idées et nous laissant devant certaines questions sur lesquelles, je sais, certains d'entre nous se pencheront assez longuement, particulièrement au sujet de la nature de l'union économique et sociale, comme vous l'avez décrite.
À titre de membre de longue date de la Fondation canadienne sur la recherche sur le SIDA, je suis particulièrement intéressé à entendre vos commentaires au sujet des coûts économiques associés au VIH et au SIDA. C'est un argument qui, au fil des ans, est mieux compris, et je vous félicite de l'avoir soulevé encore une fois aujourd'hui.
Enfin, j'aimerais dire, monsieur le président, que je me réjouis que l'analyse fiscale que vous avez proposée soit en cours. Je ne le savais pas. Je crois que c'est une excellente idée et j'ai bien hâte d'en prendre connaissance. Je vous remercie beaucoup de votre présence aujourd'hui.
M. Williams: Merci de nous avons invités.
Le président: Mise à part votre excellente présentation, je crois que nous avons aussi profité de votre présence, parce que vous nous avez mieux fait connaître le SIDA, vous nous avez fait prendre conscience que c'est une maladie qui peut frapper tout le monde. Je vous remercie donc beaucoup de nous avoir fait réfléchir à ce sujet.
Les prochains témoins sont des représentants du Syndicat national des cultivateurs, Wendy Manson et Peter Dowling. Bienvenue.
Mme Wendy Manson (Comité des transports, Syndicat national des cultivateurs (Saskatchewan)): Merci.
Le président: Y a-t-il des mesures dans notre budget que vous aimez?
M. Peter Dowling (coordonnateur de la région 3, Syndicat national des cultivateurs (Ontario)): Il se pourrait que nous en aimions quelques-unes. Les sommes consacrées à la formation pourraient constituer un avantage.
Mme Manson: Je viens de la Saskatchewan et je dois vous dire que depuis l'automne dernier j'ai consacré beaucoup de temps à la LTGO, donc je ne répondrai peut-être pas à cette question pour l'instant.
Le président: Bien, nous avons bien hâte d'entendre votre présentation. Veuillez procéder, s'il vous plaît.
Mme Manson: Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de parler de l'un des plus importants budgets de l'histoire de l'agriculture.
Le Syndicat national des cultivateurs est une organisation directe bénévole de familles agricoles participant à l'élaboration, sans partisanerie, de politiques économiques et sociales qui soutiendront et maintiendront la famille agricole, unité fondamentale de production alimentaire au Canada.
On admet généralement que le budget fédéral de 1995 aura des répercussions sans précédent sur le secteur agricole canadien. Dans cette présentation, nous ferons valoir que le budget rendra les agriculteurs moins concurrentiels sur les marchés internationaux et que, à long terme, il fera augmenter le déficit.
Je n'ai pas l'intention de lire ma présentation...
Le président: Bien.
Mme Manson: ...mais cela semblait la meilleure façon de vous dire ce que nous faisons.
Nous voulons aujourd'hui vous parler des questions touchant le transport dans l'Est et dans l'Ouest, en portant une attention toute particulière à la LTGO. Nous voulons consacrer un peu de temps à la subvention laitière et moins au financement de la recherche et à l'inspection des animaux.
J'aimerais vous faire remarquer que vous trouverez dans le mémoire, à la page 11, un résumé de nos recommandations. Après cela, vous trouverez certaines modifications proposées, et certaines brèves notes au sujet du contrôle et de la propriété des chemins de fer.
Lorsque la LTGO a été éliminée, on a donné certaines raisons, de façon générale, et nous les détaillons ici. L'élimination de la loi visait à se conformer à des règles commerciales afin d'établir un système moins coûteux et plus efficient, apparemment grâce à la déréglementation, afin d'éliminer la discrimination de tarifs contre la diversification et la valeur ajoutée, et pour réduire les dépenses. J'aimerais reprendre ces points l'un après l'autre. Nous avons des chiffres, mais je n'ai pas l'intention de les utiliser. Je parlerai de façon plus générale.
Pour ce qui est de la question des règles commerciales, nous avions pensé pendant un certain temps qu'il serait possible de tout simplement ajouter les déplacements intérieurs vers la Colombie-Britannique et Churchill dans la LGTO et que cela résoudrait le problème commercial. Le ministre nous a dit qu'il avait obtenu un avis juridique et que cela n'était pas approprié, et nous aimerions en prendre connaissance.
Selon nous, les infrastructures ne sont pas développées et la LGTO peut être utilisée pour le faire. Nous voudrions également rappeler aux membres du gouvernement que le Livre rouge mettait l'action sur les infrastructures.
La LGTO tenait compte du coût qu'entraînait les grandes distances jusqu'aux ports, et j'aimerais rappeler à ce comité que vous pouvez être plus loin d'un port ailleurs dans le monde si vous produisez des céréales en Saskatchewan. Ça ne se peut pas. Nous avons conçu un système qui nous assure une certaine équité pour nous rendre vers les ports sans influer sur le prix que nous exigeons à destination, et nous sommes d'avis que c'est le mieux que nous puissions faire.
Mais j'aimerais parler quelques instants des réalités commerciales. Examinons ce que font les Américains. Ils élargissent leur programme de subventions aux entreprises. En 1994, des crédits de 800 millions de dollars étaient affectés à ce programme qui les portent à 959 millions de dollars en 1996, et c'est là le maximum permis. Et ils consacrent des sommes aux chemins de fer et aux ports. Par exemple, ils consacrent 1,4 milliard de dollars à la revalorisation des ports de la côte ouest. L'Union européenne a déclaré qu'elle a l'intention de porter au maximum les subventions permises, et j'ai les chiffres. D'après les rapports de l'OCDE, vous voyez clairement que c'est ce qu'elle fait. Ces transferts d'impôt aux agriculteurs sont à la hausse. Au Canada, nous sommes bien inférieurs à notre limite.
Nous faisons des recommandations dans ce document, mais à cet égard, nous recommandons que le gouvernement fédéral procède à une analyse comparative des systèmes de transport et de commercialisation des États-Unis et de l'Union européenne, et qu'ils pensent ensuite à ce que nous faisons dans le secteur des transports.
La deuxième raison avancée pour éliminer la LTGO était que nous obtiendrons un meilleur système grâce à la déréglementation ou que nous obtiendrions un système plus efficient et moins coûteux. Nous pourrions comparer notre système à un système déréglementé, comme celui des États-Unis. Leurs tarifs marchandise sont beaucoup plus élevés.
Le président: Plus du double qu'ils le seront dans le cadre de notre système révisé.
Mme Manson: L'une des inconnues, ce sont les résultats de notre système d'après l'an 2000.
Le président: Selon le Syndicat du blé des Prairies, environ 24$ ou 25$ la tonne, soit 54$ US.
Mme Manson: Oui. En l'an 2000, alors que nous n'aurons pas de tarif maximum et que les effets de la déréglementation se feront vraiment sentir, nous avons certaines raisons de croire que nous ne saurons pas quels seront nos tarifs.
Le président: Il est très difficile de prévoir l'avenir.
Mme Manson: Oui.
Le président: Surtout mon avenir politique.
Mme Manson: Le système américain... Après avoir comparé nos tarifs, je peux dire que les systèmes sont différents. Nous avons un système ordonné de commercialisation, ce qu'ils n'ont pas. Nos systèmes comportent certains éléments différents. Mais nous pouvons aussi dire que notre système comporte des éléments qui le compliquent en raison de certaines des choses que nous devons faire ici. En conséquence, la durée de rotation de nos wagons se compare à la leur et notre système fonctionne à pleine capacité dans les ports, ce que n'a pas à faire leur système. À l'intérieur de leur réseau, ils ont plus de place d'entreposage que nous.
Si vous examinez la situation au Montana, où le système est déréglementé, ils ont peu de lignes secondaires, voire même pas du tout, et tous les endroits où ils chargent les wagons peuvent accueillir environ 52 wagons, donc c'est un système très consolidé.
Si vous revenez à la question de la fixation des prix, ils ont un système déjà consolidé et beaucoup plus coûteux que le nôtre. En fait, leur système ne fonctionne pas à pleine capacité.
Si vous examinez la question de la déréglementation des tarifs marchandises, l'un des points qui nous préoccupent est que les chemins de fer n'ont aucune raison de répercuter une économie à des expéditeurs captifs. Ils ont des raisons d'améliorer leur résultat. Ils feront ce qui vient naturellement pour une entreprise, et nous nous attendrions à ce qu'ils le fassent. Si aucun tarif maximum n'est établi, ils exigeront tout simplement de nous les tarifs qu'ils veulent. Le problème, c'est que nous sommes des expéditeurs captifs, donc ils peuvent obtenir de vous tout ce qu'ils veulent.
La LTGO prévoyait la réalisation d'un examen des méthodes d'établissement des coûts, qui encore une fois était un moyen de rendre le système plus équitable, parce qu'il comparait les tarifs qu'on nous demande à une formule d'établissement des coûts et que le prix pouvait augmenter ou diminuer. Le prix pouvait diminuer s'ils accroissaient leurs efficiences, mais il pouvait augmenter en raison de l'inflation. Donc, il existait un rapport entre leur coût et nos prix.
Les garanties d'exécution que ne comporte pas la LTN et que prévoyait la LTGO ont obligé les chemins de fer à réagir. Il nous semble que particulièrement alors que nous avons des tarifs maximums jusqu'en l'an 2000 - et nous sommes en faveur de l'imposition de tarifs maximums - vous vous trouvez dans une situation où, si vous n'avez pas de garantie d'exécution ils transporteront les céréales et il y a un tarif maximum qui contrôle les tarifs qu'ils peuvent exiger, ils peuvent tout simplement affecter leurs wagons de transport des céréales à d'autres usages. Donc, il se peut que nous subissions des pénuries importantes, et cela nous préoccupe, parce que notre système n'a pas de wagons de trop.
En raison de l'effet combiné de facteurs que je viens de mentionner, nous aimerions faire une série de recommandations. Je ne vous les lirai pas, mais ce sont les recommandations 2 à 5. Elles visent essentiellement à nous donner l'occasion de saisir les avantages résultant de tout gain d'efficience, à nous protéger des expéditeurs captifs, et à obliger les chemins à transporter convenablement nos céréales.
L'attribution des wagons est une question compliquée, mais elle s'inscrit bien dans le système canadien de transport de commercialisation - j'ai déjà dit que le système américain était différent. Cela se fait au Canada d'une certaine façon, cela fonctionne très bien.
Ce sont des tiers. L'attribution est faite par des tiers, dans ce que nous appelons un système livraison-vente. Elle coordonne la capacité des chemins de fer et les ventes, et elle permet de réaliser des gains d'efficience grâce à une simple coordination de ces facteurs complexes.
J'essaie de vous décrire un système qui produit étrangement le résultat qu'il exporte - il offre à son client un volume important de céréales venant de nombreux endroits. Tant que nous ne pourrons placer les terres agricoles près d'un tronçon principal, cela nous semble être la clé du problème.
Étrangement, certains ont critiqué le système d'attribution des wagons. Le système actuel permet l'utilisation des wagons de producteurs. Les wagons de producteurs sont le moyen qu'ont trouvé les agriculteurs de mettre un frein parfois au pouvoir monopolistique des chemins de fer. Nous soupçonnons beaucoup que dans le cadre d'un système d'attribution de wagons en fonction du marché, le propriétaire des wagons de producteurs devienne un petit intervenant.
Le deuxième point au sujet du système d'attribution des wagons qui nous préoccupent, et il est important de s'en rappeler parce que nous examinons cette question, est qu'en fait, réagit rapidement au pouvoir ou à la part de marché des expéditeurs. Il réagit. Il réagit à - et cela a été critiqué. Il a réagi face à quelqu'un qui avait une plus grande part de marché et dont la part des wagons le réflétait.
Donc, nous recommandons que le système soit maintenu. Un système d'attribution en fonction du marché nous préoccupe sérieusement.
Nous aimerions parler brièvement de la propriété des wagons de l'État. Il nous semble qu'elle a nettement fait diminuer les pénuries parfois et que deuxièmement, si vous avez un système de marché, elle réduirait la possibilité des intervenants de créer des pénuries. J'aimerais cependant souligner qu'il est incompatible d'avoir un système d'attribution des wagons et ensuite de conserver les wagons de l'État parce que vous pourrez atténuer les forces du marché. Nous recommandons donc de ne pas établir de système de marché; maintenons le statu quo. Certes, c'est le rôle que jouent les wagons de l'État, et nous sommes d'avis que ces wagons doivent demeurer dans la flotte.
J'aimerais parler maintenant des embranchements dans le cadre, encore une fois, de l'équation de l'efficience. Il faut ici se rappeler de quelques chiffres. Les Canadiens ont versé 891 millions de dollars pour revaloriser ces lignes secondaires. Si vous vous débarrassez de toutes les lignes secondaires, vous pourriez économiser environ 10 p. 100. C'est là l'une des conséquences où il est difficile d'établir des modèles de coût - il y a ici certains chiffres - mais les volumes inférieurs qui résulteraient de l'élimination des embranchements peuvent effectivement accroître les coûts fixes dans le système. Ce système est conçu pour répartir les coûts en fonction du volume, et lorsqu'il y a baisse du volume, il fait augmenter les coûts.
J'aimerais prendre quelques instants pour vous dire où je demeure. Je demeure sur une ferme près d'une petite ville, qui compte environ 150 agriculteurs.
Le président: Quelle ville?
Mme Manson: Dinsmore en Saskatchewan.
J'estime que ces chiffres sont intéressants pour les gens qui ne vivent pas dans l'Ouest. Dans cette collectivité, nous produisons 2,5 millions de boisseaux de blé, de blé dur, d'orge, de canola et de lentilles. Notre production se situe dans la moyenne de la province. C'est-à-dire environ 68 000 tonnes et nous utilisons 750 wagons par année. Nous demeurons près d'un embranchement qui se situe dans la moyenne, bien qu'il se situe probablement un peu au-dessus de la moyenne, mais c'est de volume dont nous parlons - plus de deux wagons par jour dans une petite ville qui compte peut-être 150 agriculteurs. Dans cette collectivité, la perte de revenu se chiffre à 1,3 million de dollars par année.
Nous nous inquiétons vraiment de la disparition de ces lignes secondaires. Nous ne savons pas ce qui se produira et nous ne savons pas quelles seraient les solutions de rechange. Nous discutons des tronçons courts, mais nous sommes d'avis que les paramètres sont très étroits. Nous avons effectué des investissements. Nous sommes vraiment étonnés.
Nous prions le gouvernement de ne pas abandonner ces embranchements tant qu'il n'aura pas fait la preuve que les coûts pour les agriculteurs, les collectivités rurales et l'ensemble du réseau de transport seront inférieures au coût du maintien des embranchements. Nous savons qu'il s'agit là d'une équation complexe. Nous le savons. Mais pensez aux chiffres que je vous ai fournis; c'est vraiment incroyable.
Nous aimerions faire une comparaison entre la LTN et la LTGO. La LTGO reposait sur les coûts, elle prévoyait l'imposition des tarifs en fonction de la distance parcourue, et elle assurait aux producteurs une transparence de prix sur nos coûts. La LTN permet la conclusion de marchés confidentiels, donc même si nous devenons des consommateurs astucieux en ce qui concerne les tarifs marchandises, tout demeurera secret de toute façon. Cela nous préoccupe, que le nouveau système ne prévoit pas ce genre de transparence.
Deuxièmement, la LTGO permettait aux producteurs d'avoir leur mot à dire. Du point de vue de notre organisation, il était extrêmement utile que nous ayons l'occasion d'être considérés comme des intervenants et de participer aux discussions techniques. Dans le cadre de la LTN, nous n'aurons pas cette occasion. Nous recommandons qu'un mécanisme soit établi en vue d'assurer la participation véritable des producteurs, parce que c'est là la clé.
J'aimerais maintenant passer à la question de la diversification et à l'effet de la LTGO sur la diversification. Quelques notes seulement. En Saskatchewan et en Alberta, les gouvernements provinciaux administraient un programme qui compensait supposément les coûts qu'entraînait la LTGO. Il permettait à ceux qui consommeraient ce produit, plutôt que d'être livré, et ne pas subir de désavantage sur le plan des coûts. Ces programmes ont tous les deux pris fin. Mais il nous semble que ces programmes donnaient de légers avantages.
Si vous examinez les chiffres, vous constaterez aussi qu'il y a eu diversification dans l'ensemble des provinces de l'Ouest. Il y a eu diversification, et nous le constatons dans notre collectivité. Je la vois réellement...et je sais que quiconque a visité l'Ouest sait que les gens parlent de diversification et s'y attachent. Mais il faut placer la diversification dans son contexte, et l'un des principaux éléments est que la culture du canola, par exemple, exige des rotations. L'environnement limite ce que nous pouvons faire.
Je vous ferais aussi remarquer qu'avec la perte de la LTGO, l'industrie de la désydratation de la luzerne sera en difficulté. Cela fait partie de la rotation, et l'élimination de cette loi en soi diminue la diversification. Donc, il y a des problèmes.
J'aimerais aussi souligner une autre anomalie dans le cadre de la discussion au sujet de la diversification. La région du nord-est de la Saskatchewan est grandement diversifiée. Son sol s'y prête. Malheureusement, elle est située loin du tronçon principal, plus loin que nous. Cette région a de bonnes chances de perdre ses embranchements et elle ne dispose que très peu d'options en matière de transport en raison de sa situation géographique. Nous voulons seulement souligner que ce scénario compromet effectivement la capacité de production de l'une des régions les plus diversifiées de la province. C'est une conséquence imprévue intéressante, je suppose.
Passons maintenant aux répercussions sur le déficit. Je vous ai déjà dit combien il en coûtera aux agriculteurs de ma collectivité, et nous disposons de certains chiffres qui montrent que parfois ils peuvent équivaloir au revenu agricole net de la Saskatchewan, par exemple.
Dans le rapport que nous avons présenté au groupe sur la diversification de l'économie de l'Ouest, nous avons démontré que le détournement possible de céréales vers les États-Unis pourrait entraîner la perte de 2 200 emplois dans les industries ferroviaires et portuaires. Je vous ferais remarquer que lorsque les plafonds seront éliminés sur nos tarifs marchandises d'ici l'an 2000 et que nos tarifs augmenteront lentement, et je crois qu'ils augmenteront, le système américain de transport sera plus concurrentiel sur le plan des coûts et il se peut donc, en fait, que nous constations que l'évolution va dans ce sens.
J'assistais ce matin à la séance sur les prévisions, et je sais que le ministre a souligné que la qualité est un élément important qui assure la vente des produits canadiens. Nous nous inquiétons beaucoup au sujet de ce genre de détournement vers le sud. Nous sommes très contents du système canadien, dans le cadre duquel un produit canadien est chargé sur un navire à partir d'un port canadien. Cela signifie beaucoup pour nous. Nous estimons que cela a de l'importance dans le cadre de notre plan de commercialisation.
Le ministre a fait remarquer ce matin que le secteur agricole canadien passe par une période de changements sans précédent, et nous en convenons. Nous pensons que le système agricole canadien passe par une période de restructruration et nous ne pensons pas que c'est ce que vous voulez faire, compte tenu de ce que vous avez dit que vous vouliez faire.
En 1897, l'imposition du tarif du Nid-de-Corbeau constituait effectivement un achat d'infrastructures. Il s'agissait de développement économique et il garantissait ou encadrait des taux abordables et, en conséquence, il atténuait le pouvoir monopolistique des chemins de fer. Ce sont des objectifs qu'il faut atteindre dans le cadre de toute compensation. Ces choses importent-elles encore?
Nous recommandons de plus que le gouvernement étudie des options en matière d'infrastructure avant que des changements irréversibles soient apportés, comme l'achat par les producteurs du CN ou la propriété publique du balast, que nous examinions minutieusement certaines options pour déterminer ce que nous avons l'intention de faire, que les résultats seront ceux que nous avons escomptés.
J'aimerais discuter très brièvement de la question de l'aide au transport des céréales fourragères et de la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces Maritimes et de la Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la Région atlantique. Nous avons certaines notes à ce sujet et vous pourrez en prendre connaissance, mais je désire vous présenter certains arguments au sujet du tarif de fret des provendes. Ce sont de petites sommes, il nous semble; c'est un petit programme. Mais il fait ressortir encore une fois la question du développement de l'économie canadienne, selon nous.
Nous estimons qu'il s'agissait d'un développement régional symbiotique, et lorsque vous constatez d'où venaient les céréales fourragères, des provinces centrales et des Prairies pour être acheminées vers les provinces de l'Est... Donc nous vendons le produit l'intérieur du Canada à des Canadiens qui ajoutent une valeur en produisant du bétail... Nous nous préoccupons encore une fois de ce qui se produira lorsque ces programmes seront éliminés et que des pressions s'exerceront immédiatement. Nous aurons des surplus de céréales fourragères dans un endroit et d'énormes pressions s'exerceront sur nous pour que nous en achetions aux États-Unis et d'autres endroits, et le système s'effondrera.
Quant à la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces maritimes et à la Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la région Atlantique, il nous semble qu'il est nécessaire d'encourager le commerce intérieur et c'était là l'objectif de ces lois. Nous sommes d'avis qu'il y a lieu d'examiner attentivement la question. Nous voulons savoir si les solutions de rechange auront les effets escomptés.
Dans nos modifications proposées, nous recommandons simplement de maintenir ces programmes tant que les répercussions pour les agriculteurs, l'industrie agricole et la compétitivité de notre industrie d'exportation n'auront pas été pleinement évalués et que des programmes appropriés de transition n'auront pas été mis en place. Nous voulons que la question soit examinée plus en profondeur.
Je passe la parole maintenant à Peter. Il vous parlera des subventions à la production laitière, du financement de la recherche et de l'inspection des aliments, et ensuite je vous reviendrai.
M. Dowling: Wendy vous a parlé de ce que nous appelons les céréales et les trains. C'est toute sa vie et moi, je passe sept jours par semaine à traire les vaches.
En ce qui concerne la subvention à la production laitière, nous nous inquiétons car lorsque la subvention sera éliminée, le coût de cette subvention risque d'être refilé aux consommateurs. La véritable préoccupation, c'est que le gouvernement s'est engagé à assurer la gestion de l'offre, ce qui comprend le coût de la production. Nous sommes confondus par le langage que le gouvernement utilise pour définir la gestion de l'offre. Nous constatons dans le document de travail qu'il parle de commercialisation ordonnée. Pour nous, agriculteurs, cela signifie un système de commercialisation comme celui de la Commission canadienne du blé ou de la Commission ontarienne de commercialisation du porc, un système à guichet unique qui n'englobe pas les autres piliers inclus dans la gestion de l'offre. Lorsque nous parlons de la production laitière, nous parlons de la gestion de l'offre. Lorsque nous parlons de la volaille, nous parlons de la gestion de l'offre, plutôt que de parler de commercialisation ordonnée.
Lorsque vous commencez à parler de commercialisation ordonnée, vous commencez à affaiblir la définition de la gestion de l'offre. Cette définition comprend-t-elle toujours le coût de la production? Nous avons constaté que le groupe de travail sur la commercialisation ordonnée qui a tenu des audiences au cours de la dernière année parlait de rendement raisonnable plutôt que de coût de la production. Des rendements raisonnables englobent-ils le coût de la production ou un peu moins?
Dans le document de travail, les termes «système de gestion de l'offre» sont utilisés dans un sens historique plutôt que dans le sens que nous aimerions voir maintenu pour l'avenir prévisible.
Un autre point qui nous préoccupe, c'est que ces changements budgétaires parlent de compétitivité internationale et de marché mondial. Je crois qu'à l'échelle internationale, les pays qui produisent des produits laitiers considèrent cette production comme une industrie nationale, en règle générale, et qu'ils ne veulent pas que d'autres effectuent du dumping de leurs produits dans une industrie nationale et qu'ils ne veulent pas effectuer de dumping de leurs produits dans d'autres pays. Aussi, nos coûts de production sont tels qu'il y a très peu de marchés d'exportation dans lesquels nous pouvons nous permettre de participer. Donc, dans quelle mesure pourrons-nous être concurrentiels sur les marchés mondiaux?
Je suppose que si cette subvention à la consommation comme nous l'appelons dans les milieux agricoles, est éliminée et que le coût de la production n'est pas répercuté sur les consommateurs, nous en ferons les frais en bout de ligne. Si le coût est répercuté, nous en paierons une partie aussi. Si vous connaissez la courbe de l'offre et de la demande, vous savez que si le prix augmente, la demande diminue, et donc que notre marché pourrait être réduit.
Pour ce qui est de la recherche, nous nous inquiétons principalement du fait que lorsque les fonds publics servent à réaliser des recherches, ils devraient se refléter dans le coût des produits de la recherche par exemple, les semences. Pour ce qui est du développement de variétés de semences, compte tenu des certificats d'obtention végétale, nous constatons une augmentation de 10 ou 15 p. 100 du coût des semences que nous achetons, par exemple. Si ces recherches sont financées grâce à des fonds publics, cela devrait se refléter dans notre production, et nous recommandons que les progrès de la recherche demeurent dans le domaine public.
Nous nous inquiétons aussi du nombre d'emplois, et de l'expertise que nous perdrons lorsque 900 postes seront éliminés à la Direction de la recherche d'Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Dans le domaine de l'inspection des aliments, lorsque nous commençons à payer des frais pour exporter nos produits, n'érigeons-nous pas nous-mêmes des barrières commeciales en augmentant nos coûts d'exportation? Les pertes d'emplois à la Direction de l'inspection pourraient se traduire par une diminution de nos gains d'efficience sur le plan de la livraison en raison des retards dans les ports et de la fermeture d'usines de conditionnement. La privatisation des services d'inspection pourrait compromettre notre réputation et, comme monsieur Goodale l'a souligné ce matin, nos normes d'inspection sont les meilleures au monde. Donc, nous ne sommes pas prêts à voir nos normes compromises.
Pour permettre la période des questions, nous conclurons notre présentation.
Mme Manson: En terminant, j'aimerais dire que nous sentons à ce moment-ci que nous nous désarmons unilatéralement, et ce n'est pas ce que nous devrions faire. Nous devrions encore réfléchir à la question, et nous sommes très heureux d'en avoir eu l'occasion. Je vous remercie.
Le président: Nous vous remercions beaucoup. Il nous reste sept minutes pour les questions.
[Français]
Mme Lalonde: Merci.
Merci beaucoup de votre présentation. J'aimerais être une spécialiste dans ce domaine, car j'ai trouvé cela très intéressant.
Vous avez bien exposé les problèmes de l'Ouest. Vous comprenez que, pour les producteurs agricoles de l'Est, cette proposition du budget est extrêmement inquiétante parce qu'elle ramène les craintes qu'il y avait avant les accords du Nid-de-Corbeau; c'est-à-dire que des subventions dans l'Ouest pourraient faire en sorte qu'il pourrait y avoir une compétition injuste des agriculteurs de l'Est. Est-ce que vous avez remarqué cela aussi?
[Traduction]
Mme Manson: Une concurrence déloyale...?
[Français]
Mme Lalonde: Comme les accords du Nid-de-Corbeau ont été remplacés par une subvention de 1,6 milliard de dollars et que cette subvention n'est pas du tout partagée avec les fermiers de l'Est, les fermiers, les éleveurs de volaille, de porc, etc., ceux-ci craignent qu'il puisse y avoir une compétition injuste.
[Traduction]
Mme Manson: Pour ce qui de la possibilité de diversification qu'offre cette subvention de 1,6 milliard de dollars, elle est versée aux propriétaires fonciers, donc elle a des effets à contre-courant. Nous sommes aussi d'avis qu'il s'agit d'une somme très faible, donc ses répercussions dans ce sens seront négligeables.
En ce qui concerne les éleveurs de bétail - j'ai déjà soulevé ce point et je n'ai pas l'intention de faire d'autres commentaires. Des différences existent entre les provinces. Il se peut que le secteur de l'élevage du bétail au Manitoba prenne de l'expansion, mais nous sommes en général d'avis que cette subvention n'aura pas de grandes répercussions.
Je voudrais vous faire remarquer, par exemple, que le nouveau président de la Cattlemen's Association est d'avis que la subvention n'aura aucune répercussion. Donc, nous ne pensons pas qu'elle fera une grande différence.
Notre diversification se déroule harmonieusement depuis un certain temps; d'autres facteurs entrent en ligne de compte. Cela répond-t-il à votre question?
[Français]
Mme Lalonde: Pour vous, le plus important, c'est toute l'autre argumentation. Vous avez bien fait ressortir votre point et je vous remercie.
Le président: Merci, madame Lalonde.
Mme Lalonde: Je dois partir, je m'excuse.
Le président: Merci d'être venue. À cet après-midi.
[Traduction]
Monsieur Pillitteri, aviez-vous quelque chose à ajouter? Monsieur Fewchuk?
M. Pillitteri (Niagara Falls): Je l'ai déjà fait, monsieur le président. J'assistais à la réunion du Comité sur l'agriculture ce matin lorsque vous avez fait votre présentation au ministre.
M. Fewchuk: Je partage certaines de vos craintes au sujet des chemins de fer. Je me demande parfois ce que nous faisons. Pourquoi vendons-nous le CN? Si les embranchements nous coûtent de l'argent, débarrassons-nous en. Merci.
Mme Brushett: Un propriétaire de courts tronçons s'est présenté devant nous il y a quelques jours...
Mme Manson: Thomas Payne?
Mme Brushett: Oui, certains courts tronçons ont été vendus dans l'Est. Mais dans ce commentaire au sujet du transport des céréales, plus particulièrement dans les provinces de l'Ouest, il a fait remarquer que le CN n'était pas vraiment efficace, et que les exploitants de courts tronçons peuvent peut-être assurer l'efficience de ces collectivités rurales si nous apportons quelques ajustements au tarif marchandise. J'aimerais obtenir votre point de vue.
Mme Manson: La discussion au sujet des courts tronçons est très intéressante. Je parle régulièrement à Paul Beingessner, l'autre propriétaire de courts tronçons dans l'Ouest canadien. Il est intéressant de constater que la LTGO permettait l'établissement de courtes lignes. Elle nous donnait une possibilité, et nous en avions très peu. Les propriétaires de courts tronçons vous diront que la nouvelle situation ne leur plaît pas du tout. Vous devriez en premier lieu vous demander si vous ne leur avez pas enlevé toute leurs possibilités en déréglementant le secteur.
Aussi, un court tronçon n'est pas viable si nous devons acheter l'embranchement, de 40 000$ à 80 000$ le mille, et c'est dans ce but que nous avons investi 891 millions de dollars, donc il y a véritablement un problème. Vous devez ensuite établir certaines règles, parce qu'il s'agit essentiellement de concurrence entre un petit et un gros entrepreneur, et que cela posera des problèmes, à moins que le petit exploitant ait un ami important et qu'il y ait certaines règles. Donc, il faudrait établir certaines mesures réglementaires touchant les courts tronçons.
Je crois qu'il est juste de dire qu'en tant qu'organisation, le syndicat des cultivateurs, a examiné cette question et nous estimons que le protocole ou les paramètres relatifs aux courts tronçons sont assez étroits. Il existe bien peu de cas où bon nombre des embranchements qui ont été abandonnés ne seraient pas considérés comme des courts tronçons.
Le président: Merci Mme Brushett.
J'aimerais vous remercier du rapport très exhaustif que vous nous avons présenté, et il est toujours éclairant et intéressant pour nous d'entendre vos commentaires, car la plupart d'entre nous ne sont pas des experts de l'agriculture.
Votre rapport ainsi que ceux des autres groupes agricoles qui ont comparu devant nous fait vraiment ressortir qu'aucun agriculteur des Prairies n'est emballé par l'élimination de la subvention aux transports, que l'on ne croit pas vraiment qu'il y aura une véritable concurrence entre les deux compagnies ferroviaires, et que le gouvernement devrait continuer à jouer un rôle dans ce domaine.
Au nom de nous tous, j'aimerais vous remercier beaucoup de votre présentation très ferme, vigoureuse et éloquente.
Mme Manson: Merci de nous avoir accueillis.
Le président: Nous ajournerons jusqu'à 15h30, alors que nous nous retrouverons dans cette même pièce.