[Enregistrement électronique]
Le mardi 19 septembre 1995
[Traduction]
Le greffier du Comité: La séance est ouverte.
Honorables députés, nous avons le quorum.
[Français]
En conformité des paragraphes 106(1) et (2) du Règlement, le choix d'un président est le premier sujet à l'ordre du jour. Je suis prête à recevoir les motions à cet effet.
[Traduction]
M. Fewchuk (Selkirk - Red River): Je propose que Jim Peterson soit nommé président du comité.
Le greffier: Y a-t-il d'autres motions?
M. Silye (Calgary-Centre): Avons-nous besoin d'un co-motionnaire?
Le greffier: Non, pas au comité.
La motion est adoptée
Le greffier: M. Jim Peterson est le président.
Des voix: Bravo!
Le président: Chers collègues, je vous remercie de la confiance que vous me manifestez et je suis impatient de collaborer avec vous au cours de la prochaine année.
Le sujet suivant à l'ordre du jour est l'élection d'un vice-président.
[Français]
M. Discepola (Vaudreuil): Je propose la candidature de M. Barry Campbell.
Le président: Tout le monde est d'accord?
La motion est adoptée
[Traduction]
Le président: Félicitations, monsieur Campbell. Vous avez été élu vice-président.
Des voix: Bravo!
[Français]
M. Brien (Témiscamingue): J'aimerais proposer que mon collègue, le brillant et vaillant député de Saint-Hyacinthe - Bagot, soit maintenu dans sa fonction de vice-président du Comité.
Le président: Tout le monde est d'accord?
La motion est adoptée
Le président: Je vous félicite, monsieur Loubier.
[Traduction]
Je crois que nous pouvons maintenant aborder nos travaux courants.
Chers collègues, je vous souhaite une bonne rentrée. Aujourd'hui, nous allons commencer par notre ordre de renvoi.
M. Silye: Monsieur le président, pourquoi le Parti réformiste ne peut-il proposer un candidat à la vice-présidence? Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir un vote ici pour le deuxième vice-président?
Le président: Je peux me tromper, monsieur Silye, mais je crois savoir que le Règlement précise qu'il doit y avoir un président et deux vice-présidents.
M. Silye: C'était exact. Je comprends cela mais ce que je comprends aussi c'est que d'après le Règlement, il s'agit aussi de postes électifs. Comment peut-il avoir une élection si nous n'avons même pas le droit de...? Nous ne sommes pas contre que le président et le vice-président émanent des rangs ministériels, nous pensons que cela est juste. Mais pour ce qui est de l'Opposition, pourquoi ne pouvons-nous pas avoir une élection au sein de l'Opposition? Peut-être que certains députés libéraux choisiraient de voter autrement.
Le président: Qu'est-ce que vous proposez? Présentez-vous une motion?
M. Silye: En ma qualité de whip l'année dernière j'ai fait la tournée des comités et j'ai constaté que chaque comité procédait différemment pour élire le président et les vice-présidents, ces derniers en particulier. Je pense qu'une fois qu'ils ont choisi leur président, les députés sont libres de procéder comme bon leur semble.
J'aimerais qu'on puisse choisir comme vice-président du comité un député du Bloc ou un député du Parti réformiste.
Je propose que les membres d'en face présentent un candidat et que nous fassions de même. Je propose la candidature de M. Grubel au poste de second vice-président de ce comité. On a déjà proposé la candidature de M. Loubier à ce poste. Les membres du Comité pourront donc voter pour la personne qu'ils voudraient comme second vice-président. À mon avis, c'est une façon démocratique de procéder, et c'est équitable. Nous accepterions la personne élue à titre de second vice-président. Si nous réglons la question maintenant, nous n'aurons plus à nous en préoccuper pendant le reste de l'année.
Sinon, je me plaindrai à la Chambre des communes.
Le président: Je ne sais pas ce que le Règlement prévoit à cet effet, parce que nous avons déjà élu les deux vice-présidents, mais...
M. Silye: Mais je m'oppose pas à la façon dont le vote s'est déroulé, parce qu'on ne nous a pas donné l'occasion de nous prononcer.
Le président: Je vois. Afin de respecter votre point de vue, il me ferait plaisir de tenir un vote sur la position de second vice-président, qui sera constesté par M. Grubel et M. Loubier.
M. Silye: D'accord.
Le président: Qui est en faveur de M. Loubier? Contre?
M. Loubier a été élu second vice-président.
Merci beaucoup pour votre suggestion, monsieur Silye.
M. Silye: Merci, monsieur le président.
Le président: Nous allons maintenant entamer nos audiences prébudgétaires. Notre premier témoin est Don Drummond, sous-ministre adjoint, direction de la politique fiscale et de l'analyse économique, ministère des Finances. Soyez le bienvenu, monsieur Drummond.
Monsieur Loubier.
[Français]
M. Loubier (Saint-Hyacinthe - Bagot): Monsieur le président, je vous félicite pour votre élection. J'aimerais profiter de cette occasion pour déposer auprès des membres du Comité une motion dont je vous demanderais de disposer immédiatement puisque cette motion servira de point de départ pour les consultations prébudgétaires. Je peux vous la lire, monsieur le président.
Je propose que les membres du Comité des finances demandent que le ministre des Finances comparaisse devant le Comité pour expliquer, dès les prochains jours, les orientations qu'il entend privilégier dans le cadre de la prochaine consultation prébudgétaire.
Monsieur le président, j'aimerais donc que les membres du Comité puissent en disposer et, si vous le permettez, j'expliquerai le sens de ma motion avant une décision de votre part.
Le président: Certainement.
M. Loubier: Vous acceptez donc qu'on en dispose aujourd'hui.
Le président: Oui.
M. Loubier: La motion va dans le sens suivant. L'année dernière, les 17 et 18 octobre, si ma mémoire est bonne, le ministre des Finances a lancé officiellement les consultations prébudgétaires. Il devait d'abord et avant tout faire état de la situation et aussi nous donner certaines balises, en tant que membres du Comité des finances, sur la façon dont on devait orienter les consultations prébudgétaires. On aurait ainsi profité de l'occasion pour faire un retour en arrière et voir l'état des finances publiques et l'évolution de ces finances et de l'économie en général au cours de la dernière année. Cette année, si on en croit diverses sources dont la vôtre, monsieur le président, qui avez déclaré au Hill Times que vous ne feriez pas comparaître le ministre des Finances avant la tenue du référendum québécois, si on s'en tient à ce qu'on nous a dit au bureau du ministre des Finances, à savoir que le ministre ne comparaîtra pas avant le 1er ou le 4 novembre, et si on se fie à ce qu'on nous répond au bureau du greffier, le ministre ne lancerait pas la consultation prébudgétaire comme il l'a fait l'an passé. Et si je m'en tiens à l'interprétation que vous faites de l'absence du ministre des Finances et à l'article du Hill Times, je pense que vous ne voulez pas donner à l'Opposition officielle une tribune qui lui permettrait de gagner des points dans le débat référendaire. Je vous réponds, comme je l'ai demandé aujourd'hui au ministre des Finances, que nous voulons de vraies réponses. Nous voulons parler des vraies affaires et des vrais problèmes. Si le ministre des Finances a honte de son bilan de l'année dernière, qui consiste, entre autres, à n'avoir obtenu que 0 p. 100 de croissance économique et à n'avoir connu, depuis novembre 1994, aucune croissance de l'emploi au Canada, s'il a peur d'affronter son bilan, c'est une autre affaire. Mais il faudrait qu'on nous donne d'autres raisons que celles que vous avez invoquées. De toute façon, monsieur le président, je considère qu'il est très important que nous ayons, au Comité, des réponses du ministre à nos nombreuses questions et que le ministre nous donne, comme l'année dernière, la direction qu'il entend donner à la consultation prébudgétaire.
Il doit nous dire quelles sont ses priorités, ce qu'il entend faire des fonds de pension, ce qu'il entend faire des régimes de pension des personnes du troisième âge au Canada et pourquoi il préfère attendre après le référendum québécois pour donner ce genre de réponse.
Qu'est-ce qu'il entend faire des programmes sociaux qu'il a déjà comprimés amplement depuis deux ans, depuis qu'il est ministre des Finances? Quels sont ses futurs plans de coupures au niveau des programmes sociaux? Quels sont ses plans au niveau de la politique de prêts aux étudiants?
J'aurais aimé qu'on pose ces questions au ministre des Finances et qu'on fasse un retour en arrière sur ses réalisations qui, à notre avis, sont très minces depuis un an. C'est un peu dans ce sens-là que je dépose cette motion, sachant que votre gouvernement est très sensible à la création d'emplois et à la croissance économique, puisque qu'on voit partout des en-têtes sur des publications où on parle de jobs and economic growth.
Je demanderais donc au ministre des Finances, et c'est le sens de la motion, qu'il comparaisse devant nous et qu'il réponde à nos questions s'il a le courage de ses convictions. S'il veut parler des vraies affaires, comme le premier ministre l'a suggéré hier, c'est-à-dire la création d'emplois, la croissance économique et la lutte contre la pauvreté, qu'il le fasse avant qu'on lance les consultations prébudgétaires.
Je n'ai rien contre le sous-ministre adjoint aux Finances, monsieur le président, mais il y a des décisions qui seront prises au cours des prochaines semaines. Il y a des orientations qui seront données à la consultation prébudgétaire et je pense que c'est la responsabilité du ministre que de venir répondre à nos questions. Il est imputable au peuple. Les gens l'ont nommé là. Qu'il assume ses responsabilités et qu'il cesse de se défiler comme il le fait depuis un bon bout de temps en lançant de petites capsules à gauche et à droite et en se sauvant pour ne pas entendre la réponse.
Alors, c'est le sens de ma motion. J'espère que les membres du Comité des finances souhaitent autant que nous, de l'Opposition officielle, qu'on ait des réponses aux vraies questions qu'on doit poser à un ministre des Finances qui n'a pas livré la marchandise depuis deux ans.
[Traduction]
M. Walker (Winnipeg-Nord-Centre): Je serais également bref.
Nous sommes très heureux de pouvoir redémarrer le processus de consultation à temps. L'année dernière, nous avons tous appris, le ministre et nous-mêmes comment il fallait s'y prendre pour que les consultations se déroulent adéquatement. Vous vous rappelez sans doute que l'an passé le premier jour d'audience a eu lieu le 27 septembre; nous avons entendu des fonctionnaires - dont un est ici aujourd'hui - et cette année, le processus commence environ dix jours plus tôt que l'an passé. Je suis donc très heureux que nous ayons pu faire comparaître les fonctionnaires à temps devant le comité afin de commencer les consultations immédiatement.
À l'instar de M. Loubier, je crois que tous les députés siégeant à ce comité veulent discuter de questions très importantes y compris la création d'emplois et la croissance économique, et entendre les points de vue de diverses personnes. Je le répète c'est la raison pour laquelle nous commençons dès aujourd'hui.
Évidemment le ministre joue un rôle important dans ce processus, et l'an passé, on a pris beaucoup de temps pour s'assurer que la perspective du gouvernement était comprise non seulement par le comité mais également par les Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Comme le ministre l'a indiqué à la Chambre aujourd'hui, il est convaincu - et je partage sa conviction - que les Canadiens comprennent le cadre financier que nous devons respecter et que son travail est devenu plus précis qu'il ne l'était il y a un an. Par conséquent, le travail du comité est lui aussi plus précis.
Il nous incombe de nous mettre à l'oeuvre. Le ministre comparaîtra, comme il l'a fait l'an passé, mais je crois qu'il serait d'avis qu'on a perdu un temps précieux l'an passé en attendant, pendant près de cinq semaines, jusqu'après l'Action de Grâces, que le ministre comparaisse devant le comité, alors qu'aucun témoin n'a été entendu pendant cette période.
Les groupes d'intérêt du pays comprennent davantage ce dont nous nous attendons d'eux, ainsi que la structure de nos débats - je ne parle pas seulement des témoins qui viennent devant le comité, mais également des tables rondes.
Monsieur le président, le ministre va comparaître et nous avisera de ses intentions. L'an passé, il nous a donné un avis de quelques semaines. Je suis certain que la même chose se passera cette année, et ce, lorsque le gouvernement se sentira prêt à réagir à certains sujets qui ont été soulevés par le comité et à répondre à nos questions.
M. Loubier nous a donné une liste qui représente un bon point de départ. Nous avons également d'autres questions. Le ministre va évidemment comparaître et contribuera à cette consultation pré-budgétaire.
[Français]
Le président: Monsieur Brien, vous aimeriez dire quelque chose?
M. Brien: Monsieur le président, je veux m'exprimer parce que j'ai participé l'an passé à tout le processus. C'est la troisième fois qu'on fait une consultation assez importante et les gens, à un moment donné, vont vouloir avoir des résultats.
La première fois qu'on a consulté, c'était sur la TPS. Je vous rappelle en passant qu'on ne l'a toujours pas modifiée et qu'on ne sait pas ce qui va arriver. Bref, on avait travaillé assez longtemps là-dessus et on avait fait le tour du Canada.
L'an passé, on a fait des consultations prébudgétaires. On a fait des recommandations, mais les gens ne sont pas sûrs d'avoir réellement de l'influence. Cette année encore, on commence un autre processus de consultation et le ministre ne vient même pas en donner les orientations.
Le ministre était venu l'an dernier. Vous vous rappelez sans doute les écrans de télévision. C'était le grand spectacle. Pour commencer, il avait parlé de ses prévisions sur trois ans et de ses scénarios. Le temps file, mais on ne connaît toujours pas son objectif. Où veut-il aller après son déficit de 3 p. 100 du produit intérieur brut dont on a souvent entendu parler?
Que feront les gens? Où s'en va-t-on? Quel objectif vise-t-on? Personne ne le sait. Tout ce qu'on entend, ce sont des choses générales comme l'amélioration des finances publiques et la création d'emplois. On n'a pas de balises précises et on ne sait pas sur quoi on va consulter. On ne sait pas sur quels sujets le ministre fera des recommandations plus pointues, plus importantes et, en bout de ligne, on pourrait perdre beaucoup de temps dans cette consultation.
L'an passé, le ministre nous avait même suggéré des questions à poser aux gens qui viendraient devant nous, mais cette année, on part de rien. On dit: Voici notre cadre. Les gens qui vont être là vont nous dire: Moi, je viens vous parler des finances publiques en général parce que le ministre a dit qu'il consultait; donc, je viens vous dire ce qui, selon moi, est bon ou pas bon. Il pourrait y avoir une participation beaucoup plus significative des gens s'ils sentaient qu'on allait dans un sens concret.
À mon avis, cela doit commencer par le ministre, qui viendrait ici nous exprimer son point de vue, l'état de la situation actuelle, ce à quoi il s'attend et là où il y a des zones d'influence possibles. Si on ne commence pas par là, on perd notre temps, on fait du surplace et on va devoir faire beaucoup d'ajustements en ce qui a trait à la participation. On sera bientôt au mois de novembre et on n'aura plus beaucoup de temps parce que les décisions doivent se prendre vers la fin de novembre. Donc, il y a là un important problème de coordination.
Le but de la motion est de faire comparaître le ministre rapidement. Je ne vous demande pas de le faire comparaître dans 15 minutes, mais dans les prochains jours. J'espère que les députés libéraux du Comité - vous avez tous ce pouvoir-là - voteront de manière à ce qu'on puisse demander au ministre de comparaître. Vous avez le pouvoir de faire ça. Vous n'avez pas besoin de lui demander sa permission. Je suis sûr qu'il ne vous en voudra pas si vous votez avec nous sur cette motion-là.
[Traduction]
Le président: Monsieur Campbell.
M. Campbell (St. Paul's): Merci, monsieur le président. Nous avons tous hâte de voir le ministre comparaître à nouveau devant nous, mais il me semble prématuré de l'inviter aujourd'hui ou même pendant les quelques prochains jours. Tout comme mes collègues, j'en suis sûr, j'ai bien hâte d'entendre ce qu'ont à dire les fonctionnaires aujourd'hui parce qu'il y a énormément de renseignements de fond dont nous avons besoin pour profiter au maximum de la comparution du ministre. Il me semble que nous perdrions notre temps, et le ministre aussi, s'il devait lui-même nous communiquer des détails dont nous entretiendrons ses fonctionnaires aujourd'hui. Il nous faut bien nous préparer pour profiter du temps que nous et le ministre avons à notre disposition pour en tirer le maximum.
J'espère que les fonctionnaires ne m'en voudront pas, mais j'ai pris sur moi de feuilleter les documents qu'ils nous ont remis et il s'y trouve énormément de renseignements utiles. Cela donnera le ton à nos débats futurs qui se dérouleront en temps et lieu. Cela ne nous gêne pas dans notre travail. Au contraire, cela nous y plonge immédiatement.
Je propose que nos travaux se déroulent comme prévu, monsieur le président et que nous plongions immédiatement dans notre travail. Nous avons beaucoup à faire.
Le président: Merci, monsieur Campbell. Madame Stewart.
Mme Stewart (Brant): Merci, monsieur le président. C'est intéressant: Le député nous parle de l'historique des consultations et oublie que l'an dernier les gens du ministère des Finances avaient préparé le terrain et, à ce moment-là, nous avions trouvé que c'était tout à fait approprié.
J'aimerais souligner autre chose: À mon avis, notre comité n'agit pas seulement en fonction des ordres du ministre des Finances. Nous sommes un comité de la Chambre des communes et, grâce à ces consultations, nous prodiguons des conseils au ministre. Nous écoutons les Canadiens. Si nous décrétons tout simplement que nous choisissons telle ou telle structure, les Canadiens ne nous écouteront pas. Ils veulent que nous transmettions au ministre leur sentiment et leur pensée et, très franchement, c'est tout à fait approprié. Le ministre comparaîtra à titre de témoin. Il nous fera connaître la position qu'il compte adopter et quels résultats il pense avoir obtenus à la lumière des deux derniers budgets. Mais nous sommes le comité. Nous entreprenons des consultations pour fournir des renseignements au ministre. Dans cette perspective, je crois que notre stratégie et notre orientation sont appropriées.
Le président: Merci, madame Stewart. Monsieur Loubier.
[Français]
M. Loubier: Monsieur le président, j'aimerais faire une petite intervention parce que je n'insisterai pas là-dessus.
Je vais vous dire une chose. L'année dernière - qu'on arrête de se raconter des blagues - , l'enclenchement du processus de consultation s'est fait les 17 et 18 octobre. Le ministre des Finances a comparu; il a fait état de la situation économique et des finances publiques et il a donné des balises pour qu'on fasse des consultations au cours des semaines suivantes.
Cette année, le ministre - et vous le dites vous-même, monsieur Peterson, dans une déclaration que vous faites aux journalistes - ne sera pas là avant le référendum parce que vous ne voulez pas qu'on parle des vraies affaires ici. Vous ne voulez pas qu'on fasse un retour en arrière sur le bilan de ce ministre, sur la croissance économique et sur la création d'emplois. Vous ne voulez pas qu'il nous indique la direction qu'il entend suivre en ce qui a trait à la gestion des finances publiques et à la conception du prochain budget. Je trouve cela très dommage.
Contrairement à ce que le secrétaire parlementaire, M. Walker, disait tout à l'heure, si les gens savent où s'en va le ministre, si les gens connaissent les balises que le ministre nous a données l'année dernière, pourquoi veut-on les consulter? Pourquoi fait-on une consultation s'ils connaissent ce que le ministre veut et la direction dans laquelle il nous entraîne dans la gestion des finances publiques? Posez-vous la question. Ne prenez pas les gens pour des cruches. Si vous savez déjà où vous allez, pourquoi consultez-vous?
Deuxièmement, on a élu des gens responsables. Je n'ai rien contre le sous-ministre adjoint, comme je vous le disais tout à l'heure. Je n'ai rien contre lui, mais il n'est redevable à personne. On continue dans une direction où il faut prendre des décisions très dures pour reprendre le contrôle de la gestion des finances publiques et le sous-ministre adjoint vient nous imposer la direction à suivre pour la consultation prébudgétaire.
L'année passée, on a commencé par rencontrer le ministre des Finances qui nous a indiqué où il voulait aller et qui nous a guidés dans cette consultation. Il nous a même suggéré trois questions à poser aux gens qui comparaissaient. Ne nous prenez pas pour des cruches.
[Traduction]
Le président: M. Loubier, si vous voulez bien consulter le compte-rendu du comité de l'an dernier, vous verrez que nous avons entrepris les consultations pré-budgétaires le 27 septembre 1994 avec messieurs DeVries et Robert Henry, du ministère des Finances. Ce n'est pas pendant la première semaine ou le 11 octobre que le ministre a comparu devant nous; c'est le 17 et le 18. Donc, nous ne changeons rien à la procédure de l'an dernier. En réalité nous ne faisons que respecter cette procédure.
Pouvons-nous passer au vote? Tous ceux qui sont en faveur de la motion?
[Français]
M. Loubier: Une seconde! J'ai certains droits en tant que parlementaire. La motion est là.
Le président: Vous avez le droit de faire n'importe quoi.
M. Loubier: Une seconde! Vous avez un peu déformé la réalité.
L'année dernière, on a eu des réunions techniques avec les hauts fonctionnaires. Le lancement officiel des consultations prébudgétaires a été fait avec la comparution-spectacle, le one-man show du ministre des Finances. C'est là que s'est fait le véritable lancement et cela nous a permis de débuter la consultation prébudgétaire.
Aujourd'hui, vous dites vous-même, comme président du Comité des finances, qu'il ne comparaîtra ni le 16, ni le 17, ni le 18 octobre cette année, mais après le référendum québécois. Est-ce que vous niez vos déclarations, monsieur le président?
Le président: Non, je ne les nie pas.
M. Loubier: Vous ne niez pas vos déclarations. Le ministre des Finances a dit aujourd'hui que si les membres du Comité des finances décident qu'il doit comparaître et décident du moment où il pourrait comparaître, il va se plier à cela. Il l'a dit dans un scrum.
Je vois que vous regardez votre montre, mais ça ne me dérange pas. Quel mal y a-t-il à ce que les membres du Comité des finances demandent au ministre des Finances de comparaître ici, d'expliquer les écarts entre les objectifs qu'il avait l'année dernière et ce qu'on obtient aujourd'hui? Il n'y a pas eu de création d'emplois et l'économie a connu une croissance zéro. Il faut qu'il vienne expliquer ces choses-là et répondre à nos questions sur ses intentions et sur ses idées pour le prochain Budget. C'est tout ce que je vous demande, monsieur le président.
On peut s'obstiner sur des virgules, mais l'année dernière, le processus a commencé par des déclarations du principal responsable politique des finances, qui est le ministre des Finances, et je ne vois pas pourquoi ce serait différent cette année, pour des raisons autres que celles que vous avancez. Peut-être le ministre ne veut-il pas qu'on parle des vraies affaires ici. Peut-être a-t-il peur qu'on parle un petit peu trop de l'avenir politique et constitutionnel du Québec, mais je vous rappellerai que cet avenir est aussi lié au vôtre. Cela, ce sont les vraies affaires.
[Traduction]
Le président: Monsieur Harper, bienvenue à notre comité.
M. Harper (Calgary-Ouest): Merci, monsieur le président. Je serai bref.
Il semble y avoir des changements au niveau de la bureaucratie. D'après les journaux, le ministre a dit qu'il n'entendait pas s'imposer au comité et il paraîtrait maintenant que les membres libéraux du comité nous disent qu'ils ne veulent pas s'imposer au ministre des Finances. Donc, pour quelque raison que ce soit, ni lui ni le gouvernement ne veulent de sa présence ici.
Il me semble tout à fait raisonnable d'inviter le ministre des Finances à nous faire part de son cadre budgétaire à l'occasion des consultations.
C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons été convoqués ici. C'est l'un des problèmes urgents, nous dit le gouvernement, que les Canadiens veulent voir régler. C'est pourquoi j'appuie la motion.
[Français]
M. Loubier: Je demande un vote par appel nominal sur la motion, monsieur le président.
[Traduction]
La motion est rejetée
Le président: Entreprenons-donc ici au comité des finances l'important débat prébudgétaire de sorte qu'après avoir consulté toutes les couches de la population, nous pourrons recommander au ministre des Finances le contenu du budget de février prochain.
C'est une tâche que nous avons accomplie l'an dernier, avec succès je crois, puisque nos consultations ont abouti à des recommandations dont 90 p. 100 au moins ont été acceptées par le ministre. Si nous y mettons autant de vigueur cette année, je sais que nous aurons une influence tout aussi grande en cette période difficile.
Pour donner le coup d'envoi à nos consultations, nous allons maintenant entendre messieurs Peter DeVries et Don Drummond du ministère des Finances.
Je vous souhaite la bienvenue, messieurs. Je vous remercie d'être venus. Allez-vous nous faire un exposé avant que nous ne passions aux questions?
M. Don Drummond (sous-ministre adjoint, direction de la politique fiscale et de l'analyse économique, ministère des Finances): Oui, monsieur le président. Tout le monde a reçu une copie du texte, j'espère. Cela porte le titre «Structure et évolution des dépenses et recettes fédérales».
Je m'en remets à vous, monsieur le président et mesdames et messieurs, les membres du comité. Préférez-vous que je fasse mon exposé sans interruptions ou que je réponde aux questions au fur et à mesure.
Le président: Procédez donc rapidement de cette façon.
M. Drummond: Entendu.
L'an dernier, l'un des principaux documents de base dont vous vous êtes servis lors de vos délibérations est ce que l'on a appelé le Livre gris, une sorte de cliché des dépenses et des recettes fédérales. Il s'agissait bien en effet d'un cliché. Il y était surtout question des dépenses et des recettes pour 1994 et 1995. Par la suite, bien sûr, le budget de février 95 est venu changer non seulement la taille des dépenses mais aussi de fond en comble leur structure.
J'aimerais donc à nouveau commenter la toile de fond de vos délibérations, c'est-à-dire l'évolution de la structure et des dépenses fédérales. J'ai pensé que vous jugeriez également à propos d'examiner les perspectives à long terme et non seulement les trois prochaines années.
Rappelons d'abord les objectifs du budget de 1995 - déficit de 32,7 milliards de dollars pour 1995-1996 et 24,3 milliards de dollars en 1996-1997, ce qui équivaut dans le deuxième cas à 3 p. 100 de notre produit intérieur brut - et certaines des caractéristiques de ce budget.
Le premier trait distinctif de ce budget a rapport à tous ceux qui l'ont précédé dans notre histoire, c'est qu'il prévoyait pour la première fois une baisse des dépenses au titre des programmes. Plusieurs budgets antérieurs prévoyaient des compressions mais, dans les faits, ils ne faisaient que ralentir le rythme de progression des dépenses. Pour la première fois en 1995, c'est la taille des dépenses qui a diminué et cela a eu beaucoup de conséquences, comme vous le verrez dans un instant quand je décrirai chaque catégorie de dépenses.
La diminution n'a pas été la même partout, comme vous le savez. On a fait l'examen des programmes et, conformément aux diverses priorités, certains d'entre eux ont été touchés davantage que d'autres.
Le budget comportait également les paramètres et les principes des réformes à venir des principaux programmes législatifs, y compris les prestations de vieillesse et l'assurance-chômage. Il se distinguait aussi par le fait qu'il ne comportait aucune hausse des taux d'imposition des particuliers et des sociétés.
À la page 4, vous pouvez suivre l'évolution du déficit fédéral en fonction des objectifs fixés. Je ne m'attarderai qu'aux dernières années.
Le déficit de 1993 représentait environ 6 p. 100 du PIB. L'objectif s'est donc aligné sur un fléchissement régulier pour atteindre 3 p. 100 en 1996-1997. La réduction est donc approximativement de 1 point de pourcentage du PIB par année.
Au Canada, comme vous le savez, le problème ce n'est pas uniquement le manque à gagner budgétaire, autrement dit, le déficit puisque nous sommes aux prises avec une lourde dette accumulée. C'est pourquoi il faut examiner également l'endettement.
Si on atteint l'objectif d'un déficit de 3 p. 100 du PIB en 1996-1997, on arrivera à réduire, de peu certes, le ratio de la dette par rapport au PIB. On parviendra à peu près à une stabilisation en 1995-1996 puis on entamera un fléchissement.
Surtout étant donné que nous nous tournons de plus en plus vers les marchés financiers internationaux, il faut voir qu'elle est la situation comparative de nos finances par rapport à celle des autres pays. C'est ce que je vais faire maintenant.
Ce qui vient un peu compliqué les choses, c'est qu'un certain nombre de pays se servent d'indicateurs différents des nôtres. Au Canada, nous insistons surtout sur le déficit budgétaire. Ailleurs, notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni, on se sert d'un concept équivalent à nos besoins financiers, qui sont moins importants que notre déficit mais, parce qu'il englobe l'excédent actuel de la caisse de retraite des fonctionnaires, l'équivalent de notre objectif de déficit de 3 p. 100, si nous mesurions le déficit comme le font les États-Unis, celui-ci serait de 1,7 p. 100.
Si nous calculions comme les Américains, nous serions actuellement sur la voie d'un déficit de 1,7 p. 100 plutôt que de 3 p. 100. Si vous examinez le budget de toutes les économies du G-7 l'année dernière, vous constaterez que c'est, d'assez loin, l'objectif le plus bas de tous ces pays.
C'est donc dire que sur le plan du déficit ou des besoins financiers, par rapport aux autres pays, notre situation financière s'améliore relativement vite.
Les choses ne vont pas aussi rapidement sur le plan de la lutte contre la dette, cependant, parce que nous sommes aux prises avec une forte dette accumulée. J'ai montré à la page 7 comment notre ratio dette-PIB se situe par rapport aux autres pays. Pour éviter tout problème de comptabilité, je me suis servi que du ratio canadien dette-PIB, que j'ai fixé à 100, et j'ai établi les comparaisons avec les autres pays. Vous constaterez que nous sommes de loin au dessus de la moyenne du G-7; de fait, au dessus de chacune des économies du G-7 à l'exception de l'Italie, dont le ratio est beaucoup plus élevé que le nôtre.
Je vais en rester là pour ce qui est du déficit et de la dette et je vais plutôt passer à l'évolution et à la composition des dépenses de programmes. Je parlerai surtout des dépenses de programmes puisque c'est sans doute ce sur quoi porteront vos délibérations puisqu'il y a très peu de marge de manoeuvre en ce qui concerne les frais de la dette publique. C'est ce que nous devons à cause de nos engagements antérieurs. Je vais me contenter de vous les situer.
Il fut une époque où parler de dépenses de programmes englobait la totalité des dépenses budgétaires. Hélas, ce n'est plus le cas. Il y a 20 ans, 90 p. 100 des dépenses publiques étaient consacrées aux programmes et 10 p. 100 à peine à l'intérêt sur la dette. Ces proportions ont beaucoup changé et aujourd'hui 70 p. 100 de nos dépenses sont consacrées aux programmes et 30 p. 100 au remboursement de l'intérêt sur la dette publique. C'est de ces 70 p. 100 que je vais parler maintenant.
Avant de parler du Canada, voyons d'abord où nous nous situons par rapport à d'autres pays. Deux choses sont intéressantes dans ce tableau. Premièrement, nos niveaux de dépenses sont relativement élevés par rapport à la moyenne du G-7 si vous examinez l'ensemble des dépenses; c'est-à-dire, les dépenses de programmes plus les frais de la dette publique. Si vous examinez la couche inférieure, vous verrez que le niveau est relativement élevé encore une fois à l'exception de l'Italie, à cause des intérêts élevés de la dette publique.
Nos dépenses de programmes ne sont pas disproportionnées par rapport à la moyenne du G-7. Ce qui compte beaucoup, lorsque l'on fait des comparaisons entre pays, c'est où nous nous situons par rapport aux États-Unis. Ce pays est après tout notre voisin et notre concurrent le plus proche. Vous constaterez que nos dépenses de programmes sont un peu plus élevées mais, comme je le montre dans le tableau suivant, dans une grande mesure cela s'explique par une plus grande participation du secteur public dans le domaine de la santé et de l'éducation. Nos dépenses publiques dans ces deux secteurs, par rapport aux États-Unis, sont légèrement supérieures à 3 p. 100 du PIB.
Je passe à la page 13. J'aurais dû préciser que ces chiffres comparatifs englobent tout le secteur public, à savoir le gouvernement fédéral et les provinces. Puisque les compétences entre le gouvernement central et les autres administrations sont réparties autrement dans d'autres pays, il aurait été trompeur de faire la comparaison uniquement en se servant des dépenses d'un seul gouvernement.
Je vais maintenant passer aux dépenses fédérales de programmes. On constate une évolution à long terme des dépenses fédérales de programmes par rapport à la taille de l'économie. Vous pouvez constater que nous avons atteint un sommet au milieu des années 1970.
Je vais vous d'abord vous donner une précision parce que c'est quelque chose qui va revenir plus tard. En 1977-1978, le gouvernement fédéral a considérablement modifié les transferts aux provinces. En effet, il a accordé des points d'impôt supplémentaires aux provinces et, en contrepartie, a réduit ses dépenses de programmes. C'est pourquoi sur plusieurs de ses tableaux vous verrez un changement de cap en 1977-1978. Par ailleurs, vous constaterez que la part des dépenses fédérales par rapport à la taille de l'économie a atteint son sommet au milieu des années 1970 puis au milieu des années 1980 et n'a cessé de baisser de façon très nette depuis.
Si vous regardez l'extrême droite du tableau, vous constaterez qu'en 1996-1997 l'intervention du gouvernement fédéral par rapport à la taille de l'économie va revenir à ce qu'elle était dans les années 1950, il y a 45 ans environ.
Les dépenses fédérales de programmes seront aussi moins importantes au Canada qu'aux États-Unis, comme on le voit à la page 14: 16,2 p. 100 par rapport à 17,2 p. 100. Encore une fois, sur le plan international, l'objectif des besoins financiers fixés à 1,7 p. 100 est le plus bas. Nous sommes aussi dans une situation unique en son genre puisque nous sommes le seul pays à prévoir une baisse absolue de ces dépenses de programmes. Je ne parle plus ici uniquement de la baisse par rapport à la taille de l'économie mais d'une baisse en chiffres absolus, puisqu'elles passeront de 120 milliards de dollars à environ 108 milliards.
On peut également aborder les dépenses de programmes sous un autre angle. Je viens de les décrire par rapport au PIB. D'aucuns soutiendront qu'il n'est pas toujours nécessaire que l'expansion du gouvernement fédéral suive celle de l'économie. Si on examine ce que dépense le gouvernement fédéral par habitant - je parle ici en dollars constants ou réels, c'est-à-dire hors inflation - on relève une tendance à la hausse des dépenses fédérales jusqu'au milieu des années 1980. Ces dépenses ont elles aussi baissé rapidement, surtout à la suite de trois budgets successifs qui les ont fixé sur une courbe fléchissante très accusée.
Je passerai maintenant à la composition des dépenses de programmes. Il existe en fait trois catégories de dépenses. Il y a les transferts aux particuliers, aux autres administrations, surtout les provinces, et ce que j'appelle pour l'instant l'ensemble des dépenses ministérielles. Dans un instant j'examinerai chacune de ces catégories plus en détail.
On relève une certain tendance intéressante. En effet, le gros des dépenses de programmes se fait de plus en plus au moyen de transferts aux particuliers. Cela a été relativement stable puis suivi d'une faible hausse des transferts aux autres administrations au cours des dix dernières années et d'une baisse relativement importante par rapport à l'ensemble des dépenses ministérielles.
Je vais maintenant dire quelques mots à propos des principaux transferts aux particuliers, composés de prestations de vieillesse et d'assurance-chômage ainsi que de certains mécanismes d'aide intégrée au régime fiscal et qui profitent aux particuliers.
Je vais commencer par les prestations aux personnes âgées, ce qui est le plus gros morceau. Cela comprend évidemment la sécurité de la vieillesse, le supplément de revenu garanti, l'allocation au conjoint ainsi que le crédit en raison de l'âge et le crédit au revenu de pensions, sous forme fiscale, ce qui fait un total de 22,3 milliards de dollars. Dans le régime de revenu de pensions, évidemment, il faut compter avec les stimulants que l'État offre aux particuliers pour qu'ils épargnent en vue de leur retraite. Vous voyez ici les montants, qui sont l'addition de la déduction des contributions au régime de retraite et la non-imposition du revenu de pension qui s'accumulent dans ces régimes moins le revenu tiré des régimes au moment où ils sont supprimés.
J'ai dit il y a un instant que la proportion des dépenses du gouvernement affectée aux particuliers est en train de grossir surtout à cause de l'augmentation des prestations de vieillesse. Si vous vous reportez à la page 19, vous verrez qu'au milieu des années 1960, la sécurité de la vieillesse représentait 1,6 p. 100 du PIB. Elles ont monté de 1 point de pourcentage pour passer à 2,6 p. 100 en suivant une augmentation assez régulière.
Si l'on examine la chose sous un autre angle, à savoir quelle proportion des ressources du gouvernement fédéral est consacrée aux prestations de la vieillesse, on s'aperçoit que là aussi il y a eu une importante tendance à la haute. Au milieu des années 1960, 13 p. 100 des dépenses de programmes étaient affectées aux prestations de sécurité de la vieillesse alors que ce pourcentage s'établit maintenant à 20 p. 100. Vous savez aussi sans doute que, vu les projections démographiques, cette tendance se maintiendra.
Sans vouloir m'étendre sur les détails, j'aimerais signaler quelques facteurs importants dans le cas des prestations de la vieillesse. Je pense à la répartition entre les tranches de revenu.
Évidemment ces prestations sont imposables et un taux d'impôt particulier s'applique aux revenus supérieurs à 53 000 dollars à peu près. Les revenus supérieurs à 53 000 sont imposés de telle sorte que la récupération fiscale de la prestation de vieillesse est totale une fois atteint le chiffre de 84 000 dollars. Cela rapporte 400 millions de dollars au gouvernement fédéral. On pense souvent que c'est davantage, mais c'est environ 400 millions.
En examinant la répartition des allocations de vieillesse vous constaterez que 40 p. 100 des 20 milliards dont je parlais vont à des gens qui reçoivent le supplément de revenu garanti, soit dans le cas d'un célibataire, une personne gagnant moins de 16 000$ et, à un couple dont le revenu est inférieur à 26 000$. Soixante-dix p. 100 des allocations de vieillesse sont versées à des ménages dont le revenu maximum est de 30 000$.
Les prestations d'assurance-chômage constituent l'autre élément principal de transferts aux personnes. Là encore vous constaterez que jusqu'à tout récemment il y avait une tendance assez marquée à la hausse liée, sans aucun doute, à la libéralisation du programme au début des années 1970, mais liée également à l'augmentation du taux de chômage que nous avons constatée depuis les années 1960. Vous pouvez également constater, à l'extrémité de la courbe, une baisse assez prononcée dont j'analyserais les causes dans quelques instants.
En procédant comme je l'ai fait pour les allocations aux personnes âgées vous constaterez également qu'une partie plus importante des ressources du gouvernement fédéral a été consacrée à l'assurance-chômage. Je vous avais fait remarquer la chute finale de la courbe et je vais vous expliquer pourquoi les prestations d'assurance-chômage sont en voie de diminution: c'est dû en partie à l'assainissement de l'économie, mais en partie seulement, la raison plus fondamentale étant une série, entamée en décembre 1992, de réformes successives aux prestations de l'assurance-chômage. Une autre mesure a été prise à cet effet dans le budget de février 1994. Vous vous rappelez sans doute qu'un train ultérieur de réformes à l'assurance-chômage avait été annoncé dans le budget de février 1995. Ces réformes s'ajouteront aux effets de la reprise de l'économie, de sorte que nous constaterons une diminution des prestations versées au titre de l'assurance-chômage.
En matière de fiscalité, le soutien le plus important est le crédit d'impôt-enfant. Si je m'y attache en particulier, c'est qu'à bien des égards il est semblable à un programme de dépenses axé sur l'aide aux familles avec enfants, qui n'ont qu'un faible revenu. Mais il y a également le crédit d'impôt pour couples, le crédit de ristournes de la TPS pour les gens à faibles revenus et un autre crédit dont je ne parlerai pas davantage, car le comité l'a longuement examiné l'an dernier, la franchise d'impôt des indemnités d'accidents du travail et des prestations des régimes privés d'assurance-maladie.
Il convient donc, pour se faire une juste idée de l'ensemble de l'aide du gouvernement aux particuliers, de tenir également compte de la fiscalité.
Je vais maintenant passer aux transferts à d'autres niveaux du gouvernement, qui comportent trois programmes principaux: la péréquation, le programme appelé autrefois financement des programmes établis, et le Régime d'assistance publique du Canada. Il y a eu une refonte de ces trois programmes dans le Transfert au titre de la santé et des programmes sociaux et dans les transferts aux territoires.
Les transferts à d'autres niveaux de gouvernement comprennent deux éléments distincts: une subvention en espèces et un transfert de points d'impôt. L'ensemble est appelé droits à prestations, et vous constaterez que jusqu'à ces dernières années ces droits constituaient, de façon relativement constante, environ 5 p. 100 de l'économie. Cela ne veut pas dire pour autant qu'ils n'aient pas augmenté, bien au contraire. Leur augmentation est parallèle à la croissance de l'économie, à un taux nominal. Avec les mesures mises en place dans le budget ces dépenses s'amenuiseront tant pour les droits aux prestations que pour les droits en espèces.
Quant au contenu de cette enveloppe, vous constaterez que le Transfert canadien au titre de la santé et des programmes sociaux, qui regroupe les deux transferts précédents s'élèvent au total à 29,4 milliards de dollars comportant 17,3 milliards de dollars en espèces et 12,1 milliards de dollars en transferts de points d'impôt.
Les versements de péréquation, destinés actuellement à sept provinces, s'élèvent à 8,5 milliards de dollars et les transferts aux territoires à 1,2 milliard de dollars, de sorte que la participation totale du gouvernement fédéral aux transferts à d'autres niveaux de gouvernement établis à 39,1 milliards de dollars, les transferts en espèces s'élevant à eux seuls à 27 milliards de dollars. C'est là une part considérable d'environ 120 milliards de dollars de dépenses au titre des programmes.
À la page 27 j'ai exposé les effets principaux du budget en matière de droits à prestations, qui ont passé de 29 milliards de dollars en 1993-1994 à 25,1 milliards de dollars en 1997-1998, avec une baisse correspondante des versements en espèces. Le gouvernement manifestait, depuis le dernier budget, son intention de stabiliser à l'avenir les transferts en espèces.
Les versements de péréquation, tout en étant évalués selon une formule assez complexe, ont tendance à augmenter en fonction de la taille nominale de l'économie. C'est ainsi que le prévoyait le budget. Il y a renouvellement tous les cinq ans, le dernier renouvellement prenant effet en 1994-1995 et étant ainsi projeté pour plusieurs années à venir.
J'ai un peu sauté les étapes en disant que le renouvellement du financement des territoires prenait effet à date du 1er avril, mais une entente va être signée sous peu aux fins de le renouveler sur la base d'une réduction des droits à prestations à dater de 1996-1997.
Je vais maintenant considérer dans leur ensemble le reste des dépenses de programmes: ce que j'appelle ici dépenses globales du ministère représentent le total des dépenses de programmes moins les transferts aux particuliers. C'est ce que dépenseraient autrement qu'en transferts directs le ministère des Finances, le ministère des Ressources humaines et tous les autres.
Vous constaterez ici une tendance à la baisse assez marquée par rapport à la taille de l'économie. Il y a eu une remontée assez brusque, de 9 à 10 p. 100, du milieu des années 1960 au milieu des années 1980, mais depuis nous constatons une retombée assez brutale qui ne fera que se confirmer à la suite des mesures prises dans le budget 1995.
Vous constaterez, en comparant le volume des dépenses de programmes, qu'au milieu des années 1960 les ministères dépensaient environ 65 p. 100 de toutes les dépenses de programmes, 35 p. 100 seulement étant consacrées aux versements de transferts. Cette proportion a beaucoup changé, les ministères ne représentant qu'un peu plus de 40 p. 100 des dépenses totales alors que plus de 60 p. 100 vont aux transferts.
À la page 31 j'ai regroupé les ministères par champ d'influence sur l'économie et sur la société, afin de vous présenter l'ensemble plutôt que de m'attarder sur les détails. Je vous y ai présenté les tendances des diverses dépenses à trois moments dans le temps, et vous constaterez que c'est dans le secteur des ressources naturelles que l'évolution est la plus remarquable.
Ce tableau vous présente les pourcentages des dépenses ministérielles, le total des colonnes étant de 100 p. 100. C'est ainsi qu'en 1984-1985 les dépenses des ressources naturelles comportaient 18,9 p. 100 de l'ensemble des dépenses de programmes; c'était là, bien entendu, la dernière année complète du programme national d'énergie, et ces dépenses ont été ramenées à 7,9 p. 100, mais dès 1994-1995 elles avaient baissé et le budget prévoit encore une tendance à la baisse.
Dans les transports des changements considérables sont intervenus en matière de participation du gouvernement qui, de plus en plus, va se contenter d'assurer la réglementation au lieu d'assurer directement les transports. La contribution ne représente guère plus d'un tiers de ce qu'elle était il y a encore dix ans.
De 1984 à 1994 l'industrie et les régions absorbaient une part grandissante du budget ministériel, mais là également le budget y a mis le hola et les prévisions sont à la baisse.
Vous constaterez que les dépenses en programmes sociaux ont assez considérablement augmenté; celles-ci recouvrent des ministères tels que la Santé, les Ressources humaines, les Affaires indiennes et du Nord et la Société canadienne d'hypothèque et de logement.
Il n'y a pas de grands changements pour Patrimoine et Culture; la Justice et les systèmes pénitentiaires ont une tendance assez marquée à l'augmentation, de même que les Affaires étrangères et le Commerce international, mais cette tendance est endiguée grâce aux mesures du budget 1995; la proportion des dépenses du ministère de la Défense augmente légèrement de même que les services généraux du gouvernement, mais là encore contenues par le budget de 1995.
La page 32 vous permet de voir les choses sous un angle légèrement différent: j'ai examiné les réductions du pourcentage dans les dépenses de programme de 1994-1995 à 1997-1998. J'ai constaté, pour votre gouverne, que la moyenne est établie à un peu moins de 20 p. 100. Vous constaterez donc que par rapport à la moyenne les diminutions les plus considérables proviennent des ressources naturelles, des transports et de l'industrie et les coupures relativement plus légères dans le domaine de la Justice et des programmes sociaux.
Je voudrais maintenant vous présenter les variations des dépenses des ministères fédéraux, que vous trouverez à la page 33. Vous constaterez que je les ai classés par ordre croissant de réductions, de 1994-1995 à 1997-1998. Un seul cas se distingue de tous les autres, à savoir le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, le seul pour lequel les dépenses augmenteront au cours des trois années qui suivront le budget de février 1995. Dans tous les autres ministères il y aura une compression du budget, et j'insiste sur le fait que ceci n'est pas relatif à l'ensemble des dépenses, ni à la taille de l'économie: c'est une compression du niveau des dépenses en dollars réels.
Cette compression sera certainement considérable pour le ministère de l'Industrie et des organismes régionaux, car cette réduction s'élèvera, sur trois ans, à 70 p. 100 des budgets.
Vous trouverez, à la page 34, les sommes en dollars réels que représentent les réductions figurant sur cet histogramme, une information qui est en réalité la même que celle de la page 33.
Je voudrais rapidement passer en revue chacun de ces domaines en signalant certaines des principales évolutions, et je commencerai par les ministères liés à l'économie.
La principale caractéristique du budget, à mon avis, c'est une réduction considérable des subventions aux entreprises, l'un des thèmes majeurs du budget. Dans les trois années qui séparent 1994-1995 et 1997-1998 le subventions aux entreprises seront réduites de 60 p. 100. Vous constaterez ces réductions à la page 36, à commencer par les subventions et contributions aux entreprises qui représentaient 3,8 milliards de dollars en 1995 et qui ont été ramenées à 1,5 milliard de dollars en 1997-1998.
Ces réductions seront considérables dans tous les domaines, et dans certains plus que d'autres, comme par exemple les transports où les subventions sont quasiment éliminées et où le gouvernement, au lieu d'assurer les transports, se contentera d'en assurer la réglementation.
L'énergie, là encore, a presque été ramenée à zéro, car très peu subsistera avec la fin des subventions à Hibernia.
C'est l'agriculture qui bénéficie surtout de ce qui reste, et qui représente environ 60 p. 100 du total, qui vont, pour l'essentiel, aux programmes du filet de sécurité et des subventions laitières.
C'est par la structure fiscale que passe l'aide du gouvernement fédéral pour le développement de l'économie, à l'instar de ce que je mentionnais à propos des transferts aux particuliers. J'ai signalé certaines des principales dépenses fiscales, la plus considérable étant certainement le taux fiscal des petites entreprises d'après lequel, pour la première tranche de 200 000$ de revenu, ramène le taux fiscal de 28 p. 100 à 12 p. 100. Je ne vais pas passer en revue les autres avantages fiscaux, vous constaterez qu'il y en a plusieurs autres au bas de la page, qui constituent plutôt un report d'impôts, en ce sens que le paiement se fera ultérieurement.
Dans les ministères des programmes sociaux, le budget le plus considérable, et le seul qui est en augmentation, est celui des dépenses pour les autochtones. Vous constaterez, si vous avez l'occasion d'examiner les tableaux, que le niveau des dépenses du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien était de 3,7 milliards de dollars en 1994-1995 mais que, si nous examinons le chiffre total de l'aide aux autochtones celle-ci s'élève à un peu plus de 5 milliards, car il y a également la participation d'autres ministères.
Bien que ces dépenses soient en augmentation, cette augmentation a été ralentie par le budget: elle s'établissait à environ 8 p. 100 par an au cours de la dernière décennie et au cours des trois prochaines années elle a été fixée respectivement à 6 p. 100, 3 p. 100 et 3 p. 100.
La SCHL vient au second rang, dans ce domaine, en matière de budget qui a passé de 2,1 milliards à environ 1,9 milliards de dollars.
Il faut toutefois faire preuve de circonspection dans l'interprétation du budget de la SCHL: en apparence il s'agit d'un gros budget, mais je voudrais vous faire remarquer que 98 p. 100 de celui-ci consiste en subventions sur des hypothèques liées au programme actuel de logements publics. Avec les niveaux de budget qui ont été établis, en particulier avec la diminution du budget, aucune nouvelle dépense n'est engagée, dans la pratique, pour le logement social.
Vous n'ignorez sans doute pas qu'avec la structure ancienne de la SCHL tout engagement dans le logement public s'accompagnait de subventions étalée sur 30 années. Nous arrivons à la fin de ces programmes, qui ne seront pas renouvelés, ce qui fera baisser le budget mais les programmes actuels doivent d'abord venir à expiration.
Vous constaterez que les programmes des Anciens combattants sont également en baisse légère, tendance qui s'accentuera au fur et à mesure qu'augmentera l'âge de ceux-ci.
Vient ensuite le ministère des Ressources humaines, qui administre le programme d'assurance-chômage ainsi que divers autres programmes, comme celui de la Stratégie de planification de l'emploi.
Le ministère de la Défense représente presque un quart de toutes ces dépenses ministérielles. Lui aussi subira une réduction assez considérable par rapport à l'ensemble de l'économie; son budget diminue constamment depuis la fin des années 1980 et cette tendance ne fera que s'accentuer.
De même l'aide internationale, qui représentait 0,4 p. 100 du PIB dans la seconde moitié des années 1980, devrait s'établir à 0,3 p. 100, ce qui est toujours encore au-dessus de la moyenne des économies des G-7.
Quant aux services gouvernementaux, qui semblent représenter une somme assez considérable... Je voudrais consacrer quelques instants à vous montrer en quoi ils consistent. Leur budget a passé de près de 5 milliards à 4 milliards, le gros de cette somme allant à Revenu Canada, avec un budget de près de 2 milliards de dollars. C'est une somme considérable par rapport aux autres budgets, mais je vous fais remarquer que c'est le ministère qui perçoit 133 milliards de dollars de recettes pour nous et qui accomplit donc une fonction essentielle.
Travaux publics Canada a un budget de 1,9 milliard de dollars qui va passer à 1,5 milliard de dollars, compression facilitée par les coupures dans d'autres domaines, car environ 60 p. 100 de son budget est consacré à la gestion de biens fonciers soit, autrement dit, aux besoins de logement du gouvernement fédéral. Avec les coupures effectuées dans les autres ministères ces besoins vont nécessairement diminuer.
Je conclurai en abordant la question des recettes. La page 44 vous présente les recettes budgétaires totales du gouvernement fédéral par rapport à la taille de l'économie mais, là encore, je voudrais vous mettre en garde. Il convient en effet de garder présent à l'esprit que là encore il y a eu, en 1977-1978, un transfert supplémentaire de points d'impôt aux provinces; il y a ensuite une légère augmentation du ratio au revenu à PIB et il y a là un effet cyclique, mais cela représente plus ou moins 16 à 17 p. 100 du PIB.
La page 45 présente la composition des recettes budgétaires: Je vais commencer par la courbe du haut. Vous constaterez une légère tendance à l'augmentation, certainement jusqu'à tout récemment, dans la composition des recettes provenant des particuliers. Les recettes provenant des taxes de vente présentent, par rapport aux autres recettes une courbe assez uniforme depuis 15 ans.
L'impôt sur le revenu des sociétés marque une tendance à la baisse et je vais dans un instant vous expliquer comment cela s'est produit. Les recettes non-fiscales ont, elles aussi, peu évoluées.
J'aimerais là apporter une précision, car l'examen de ce genre de graphique a donné lieu à un malentendu - je l'ai constaté à plusieurs reprises - à savoir que le gouvernement tire de plus en plus ses recettes de l'impôt sur le revenu des particuliers, qu'il augmente, en mettant de moins en moins à contribution les sociétés.
Si vous examinez le tableau suivant, vous verrez les choses sous un angle complètement différent. S'il est vrai que l'impôt sur le revenu des sociétés est prélevé sur les bénéfices des entreprises, il n'est pas prélevé sur le PIB. L'impôt sur le revenu des particuliers est prélevé sur le revenu personnel, non sur l'ensemble du PIB. Si vous examinez maintenant l'impôt sur le revenu des sociétés par rapport aux bénéfices, avant imposition, du revenu des sociétés, qui est l'assiette fiscale de cet impôt, vous constaterez qu'il y a eu récemment une légère augmentation, intervenue surtout vers la fin des années 1980, avec l'introduction de certaines mesures fiscales telles que l'impôt sur les grandes sociétés.
Vous constaterez qu'en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des particuliers il y a eu une légère augmentation par rapport au début des années 1980, mais que depuis sept ans, la courbe est relativement stable par rapport à l'impôt sur le revenu des particuliers. Il n'y a donc pas eu, en un sens, d'augmentation dans l'imposition réelle dans ce domaine.
En conclusion je vais faire une comparaison au plan international, comparaison portant sur l'ensemble du secteur gouvernemental, qui englobe également les provinces et les municipalités.
Vous constaterez que notre fardeau fiscal est légèrement au-dessus de la moyenne des économies des sept pays industrialisés, mais qu'il est en dessous de certains pays européens comme l'Italie, l'Allemagne et la France. Notre moyenne est légèrement au-dessus de celle des États-Unis mais là encore nous devons prendre en compte le fait que nous avons environ 3 points du pourcentage du PIB comme contribution aux régimes de santé et d'éducation, qui doivent évidemment être financés et ce, comme vous pouvez le constater ici, par un fardeau fiscal légèrement plus élevé.
Comment se présente la composition des recettes fiscales? Pour vous faciliter la lecture de ce tableau et vous éviter de déchiffrer toutes les cases du bas... La partie en noir représente l'impôt sur le revenu des particuliers, puis viennent les cotisations de sécurité sociale, qui sont, pour l'essentiel des impôts sur la masse salariale, dans notre cas l'assurance-chômage et le Régime de pensions du Canada. Il y a ensuite l'impôt du revenu des sociétés, puis les impôts indirects, qui comprennent les impôts fonciers.
Telle est notre position par rapport aux économies du G-7? Notre situation est très semblable, en ce sens que nous dépendons de l'impôt sur le revenu des particuliers, mais beaucoup moins des cotisations de sécurité sociale. Notre total en impôts indirects est du même ordre que le leur y compris les impôts fonciers mais là une petite rectification s'impose. Si vous examinez la ligne en dessous, vous constaterez que nous dépendons relativement peu des impôts indirects, mais beaucoup des impôts fonciers.
Si j'insiste là-dessus c'est parce qu'il en est beaucoup question dans les discussions sur notre régime fiscal, où il est souvent question, pour le Canada, de prélever un impôt sur les successions. Les pays qui prélèvent ce genre d'impôt tirent pour l'essentiel, leurs recettes de la propriété foncière. Comme le montre le tableau si je fais apparaître l'impôt foncier, nous avons déjà une lourde imposition des propriétés foncières, non de la part du gouvernement fédéral, mais de celle des gouvernements provinciaux.
Ceci met fin à mon exposé, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie du tour d'horizon que vous venez de faire de notre économie.
[Français]
Monsieur Loubier, aimeriez-vous commencer à poser les questions ou si ce sera M. Laurin?
M. Loubier: Ce sera M. Laurin.
Le président: Avant que vous ne commenciez, j'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les députés qui sont de retour au Comité et à M. Loubier, ancien membre du Comité. Vous, monsieur Laurin, n'étiez pas membre permanent du comité.
[Traduction]
Nous souhaitons également la bienvenue à M. Grubel.
Monsieur Silye vous vous êtes particulièrement distingué aux comités pendant plusieurs mois, et nous vous souhaitons la bienvenue pour votre retour parmi nous.
M. Harper, vous remplacez M. Speaker dont la participation au comité a été fort appréciée, et nous lui souhaitons le même succès dans sa nouvelle fonction. Bienvenue à tous.
Je vois que tous les députés libéraux sont de retour, ce dont je suis fort reconnaissant car c'est un groupe remarquable.
[Français]
Monsieur Laurin.
M. Laurin (Joliette): Monsieur le président, compte tenu du fait que je n'ai qu'une seule courte question à poser, le reste de mon temps pourra être utilisé par mon collègue, M. Loubier, si vous le permettez.
Le président: Certainement.
M. Laurin: Je vous en remercie.
Monsieur le sous-ministre, aux pages 17 et 18, on considère l'assurance-chômage comme un transfert aux particuliers comptabilisé dans les revenus de retraite. L'assurance-chômage n'est-elle pas une ressource payée par l'employeur et l'employé? Comment se fait-il que le gouvernement l'intègre dans ses revenus de transferts et de retraite? Pourquoi est-ce intégré dans la comptabilité gouvernementale, compte tenu du fait qu'il n'y a pas de contribution du gouvernement?
M. Drummond: Depuis 1986, le programme d'assurance-chômage est inclus dans les comptes du gouvernement du Canada. Avant 1986, c'était une variable dans le Budget. Maintenant, les revenus sont inclus dans les revenus budgétaires, comme je le démontre ici, à la fin, et les dépenses du programme sont incluses dans les dépenses du gouvernement. Il est vrai que le programme est payé par les employés et les employeurs.
M. Laurin: Étant donné que la caisse d'assurance-chômage n'est plus déficitaire et compte même un surplus de 4 ou 5 milliards de dollars, ne croyez-vous pas que le fait de l'intégrer dans les comptes fausse la comptabilité gouvernementale et donne à croire, à tort, que le déficit est moins élevé qu'il ne l'est en réalité?
M. Drummond: Présentement, le compte est presque dans une situation d'équilibre. On inscrivait un déficit de 6 milliards de dollars à la fin de 1993. Vous avez parlé d'un surplus de 4 à 5 milliards de dollars. On n'en est pas encore là. Peut-être y serons-nous dans deux ans, mais nous n'y sommes pas présentement. Nous avons simplement une situation d'équilibre en ce moment.
La raison pour laquelle c'est inclus dans le déficit, c'est que lorsqu'il y a un déficit dans le compte, le gouvernement prête de l'argent au compte. Lorsqu'il y a un surplus, le gouvernement emprunte de l'argent du compte. Cela affecte les besoins financiers du gouvernement.
M. Laurin: Merci.
M. Loubier: Quand je regarde la composition des recettes budgétaires du gouvernement fédéral, il y a quelque chose qui me saute aux yeux dans un ou deux graphiques: c'est la part des entreprises dans l'assiette fiscale fédérale. Dans le tableau de la page 45, on dit que l'impôt sur le revenu des particuliers correspond à plus de 9 p. 100 du PIB, alors que les entreprises contribuent de 1 à 1,5 p. 100 du PIB. Ça me saute aux yeux. Je regarde aussi les taux de taxation effectifs des entreprises. À la page 46, vous vous arrêtez à 1992-1993 et je me demande pourquoi. Le taux effectif était d'environ 23 p. 100 en 1993. Je me demande si aujourd'hui il ne serait pas d'environ 20 p. 100 ou peut-être même inférieur à 20 p. 100.
J'aurais aimé que le ministre soit ici aujourd'hui, parce que je ne vois dans le document aucune préoccupation quant à cette fiscalité des entreprises qui est dénoncée partout. On a l'impression que les entreprises ne font pas leur part, qu'elles ne font pas leur contribution normale à l'assiette fiscale fédérale.
Jusqu'à 1987, votre ministère publiait des données fort intéressantes, mais vous avez cessé de les publier depuis ce temps-là. Ça fait deux ans qu'on vous demande de les publier à nouveau. On vous a demandé les statistiques que vous avez publiées jusqu'à 1987 sur les sociétés rentables qui ne paient pas d'impôt annuellement.
En 1987, pour vous rafraîchir la mémoire sur vos propres données, il y avait 27 milliards de dollars de bénéfices générés par les entreprises canadiennes qui échappaient à l'impôt. Pour les années subséquentes, on ne le sait pas parce que vous avez arrêté de publier ces données-là.
De plus, dans votre exposé, il ne transparaît aucune intention de régler les échappatoires fiscales pour les entreprises. Encore une fois, j'aurais aimé que le ministre des Finances soit là pour nous dire qu'on devrait peut-être examiner ça ici. Par exemple, ça fait deux ans qu'on parle des paradis fiscaux. Il y a bien des gens qui sont fatigués d'en entendre parler, mais on continue d'en parler parce que ce n'est pas réglé.
Il y a des données assez impressionnantes qui proviennent d'une étude qui vient d'être publiée par Michel Bernard, Léo-Paul Lauzon et Martin Poirier. On dit, par exemple, on parlant des paradis fiscaux, que l'archipel des Bermudes compte 60 000 habitants, mais qu'il y a 9 500 compagnies sur ce territoire, dont 1 300 oeuvrent dans le domaine de l'assurance, ce qui fait dire aux auteurs que ce sont les gens qui sont le plus assurés au monde per capita. Aux Caïmans, il y a 30 000 habitants et 28 000 sociétés. Pourtant, nous continuons à avoir des accords de réciprocité au niveau de la fiscalité, alors que ces pays ont des taux d'imposition des entreprises d'environ 2 p. 100.
Je pose ma question aux sous-ministre adjoint, mais j'aurais aimé la poser à quelqu'un qui est responsable devant les électeurs canadiens. Est-ce que le ministère des Finances a l'intention d'analyser rapidement ce qu'on peut faire pour réaliser une plus grande équité dans la répartition de l'assiette fiscale fédérale entre les entreprises d'une part et les contribuables qu'on égorge tous les ans par des hausses directes ou indirectes d'impôt d'autre part, y compris la ponction que le gouvernement fédéral fait dans la caisse de l'assurance-chômage? Est-ce que vous avez des plans à cet égard? Est-ce que vous pouvez sensibiliser votre ministre, si jamais vous le voyez, parce que nous, nous ne le voyons plus, à la réalité d'un déséquilibre ou d'une iniquité entre la taxation des entreprises et celle des particuliers et l'existence de tels paradis fiscaux?
M. Drummond: Je vais commencer par la ligne des revenus du secteur des sociétés où figure le total, c'est-à-dire la page 48. On pourrait dire que les revenus des sociétés au Canada sont très importants pour le G-7 et pour les États-Unis. C'est aussi un point très important pour nous. On a toujours de la difficulté quand le taux moyen d'imposition des sociétés au Canada est beaucoup plus élevé qu'aux États-Unis, parce qu'il y a plusieurs sociétés qui ont la possibilité de compter leurs profits aux États-Unis et leurs pertes au Canada. Si on laisse une telle situation se développer, on perd des revenus. Chaque fois qu'il y a une réforme des taux d'imposition, on fait bien attention de garder une équivalence entre les taux d'imposition des sociétés du Canada et ceux des sociétés des États-Unis.
Concernant la question des taux effectifs des sociétés en comparaison avec le secteur des particuliers, on peut dire, selon la page 46, que le taux est plus élevé pour le secteur des sociétés que pour celui des particuliers.
Une des raisons pour lesquelles il est difficile d'interpréter les graphiques relatifs aux sociétés et de déterminer si une société ne paie pas d'impôt, c'est qu'une société peut faire un profit une certaine année, mais si cette société a déjà subi des pertes pendant une période de cinq ans, elle bénéficie de la souplesse nécessaire pour appliquer les pertes d'une certaine année contre les profits d'une autre année.
Il est bien possible qu'une société puisse réaliser un profit et ne pas payer d'impôt une certaine année, et ne pas payer d'impôt pour certaines autres années non plus, 15 ans plus tard. C'est pour cela qu'il est très difficile d'interpréter ces données.
M. Loubier: Vous donnez des indices d'interprétation. Est-ce normal que de grandes banques canadiennes paient des impôts indirects, mais ne paient pas d'impôt sur leurs profits? Est-ce normal qu'avec des profits de tout près de 5 milliards de dollars, les grandes banques canadiennes ne paient pas d'impôt minimal de société? Est-ce normal qu'on fasse des recoupements, que toutes ces grandes banques canadiennes aient des filiales à l'étranger dans des endroits comme les Antilles?
J'ai ici une statistique intéressante. La Banque Scotia, la CIBC, la Banque Toronto-Dominion, la Banque de Montréal, la Banque royale et la Banque nationale ont, dans les Antilles, 57 filiales sur 119 au total en dehors du Canada, exception faite des États-Unis. Est-ce qu'il n'y aurait pas là une voie à explorer ou si on va continuer à laisser des situations comme celle-là perdurer? Il me semble que ce serait une bonne voie à suivre.
L'impôt minimum des sociétés, y avez-vous pensé? Je veux bien croire qu'il y a des entreprises qui, à un moment donné, à cause du cycle de production de leurs produits ou de leurs services, peuvent faire des pertes la première année et même la deuxième année, mais la troisième année, les profits peuvent commencer à entrer.
Il est anormal de voir des situations comme celle des grandes banques canadiennes, que je viens de vous décrire, et celle qui fait en sorte que, depuis 1987, vous ne publiez plus de données sur les bénéfices qui sont extirpés du fisc canadien, qui ne sont pas assujettis à l'impôt fédéral.
Je pense que les gens sont en droit de s'attendre à quelque chose. Il est vrai que vous ne devez pas rendre compte au peuple, et j'aurais aimé voir ici le ministre des Finances pour qu'il me dise ce qu'il entend faire à cet égard, mais je vous pose quand même la question. Vu tous les paradis fiscaux dont bénéficient même les grandes banques canadiennes, avec 57 succursales dans les Antilles sur 119 à l'extérieur du Canada et des États-Unis, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager d'explorer la possibilité que les sociétés contribuent davantage aux coffres fédéraux, à l'amélioration et à l'assainissement des finances publiques fédérales? Ne pourrait-on pas aussi envisager un impôt minimum des entreprises pour éviter les scandales qu'on constate année après année, mais qu'on ne peut plus calculer parce que vous avez cessé depuis 10 ans de publier ces données?
M. Drummond: Quand je parlais des graphiques de la page 47, je disais que le rapport entre les impôts et les profits a beaucoup augmenté à la fin des années 1980, et je disais que c'était parce que le gouvernement avait imposé une taxe spéciale sur les grandes entreprises.
La taxe sur les grandes entreprises est payée par les banques dans la plupart des cas. De la façon dont la taxe fonctionne, c'est presque comme un impôt minimum.
Si on prend les impôts payés par les banques et les taxes payées par les grandes entreprises, on se rend compte que les entreprises paient presque toutes le même taux moyen.
[Traduction]
M. Grubel (Capilano - Howe Sound): Merci, monsieur Drummond, pour cet excellent exposé.
J'aimerais passer à la page 13, qui porte sur les dépenses fédérales de programmes. L'une des grandes critiques formulées au sujet du manque de rapidité de la diminution des dépenses est que lorsqu'on donne ces chiffres en pourcentage du PIB, deux éléments changent simultanément. L'un est la valeur monétaire des dépenses et l'autre est la croissance du PIB à la base. Nous avons donc le numérateur et le dénominateur de cette proportion qui changent. Par conséquent, nous ne savons pas vraiment dans quelle mesure cette diminution est le résultat de la réduction des dépenses par rapport à la croissance du PIB. C'est évidemment la raison pour laquelle il y a déjà longtemps des économistes ont élaboré le concept des dépenses corrigées des variations cycliques et de l'équilibre du budget.
Avez-vous tenté de faire le calcul pour montrer dans quel sens à évolué la tendance des dépenses corrigées des variations publiques en pourcentage du PIB?
M. Drummond: Je peux vous parler des dépenses corrigées des variations cycliques, mais il me semble que le point le plus important, comme vous l'avez mentionné, est le niveau des dépenses. Vous avez tout à fait raison: il pourrait être trompeur d'examiner la baisse des dépenses fédérales de programmes par rapport au PIB, mais, comme je l'ai dit, le budget fédéral de 1995 était unique en ce sens qu'il est le seul qui ait jamais imposé une tendance à la baisse dans le niveau des dépenses de programmes. Dans le budget, on évaluait les dépenses de programmes de 1994-1995 à 120,9 milliards de dollars, et elles baisseront à 114 milliards de dollars en 1995-1996 et à 107,9 milliards de dollars en 1996-1997. Nous n'avons pas donné dans le budget le total des dépenses de programmes pour 1997-1998, mais nous avons donné tout de même le total des dépenses ministérielles, où l'on peut voir une autre diminution en 1997 et en 1998. Vous pouvez donc voir que ces dépenses baisseront normalement en 1996-1997, ainsi qu'en 1997-1998. Sur cette période de quatre ans, les dépenses de programmes - pas par rapport au PIB, mais leur niveau - baisseront d'environ 14 p. 100.
Comme vous l'avez dit au sujet des dépenses corrigées des variations cycliques, étant donné que nous avons donné au ministère un budget fixe pour cette période, essentiellement, le seul programme dont les dépenses sont corrigées des variations cycliques est celui des prestations d'assurance-chômage.
Si vous regardez à la page 85 du budget, vous verrez qu'une partie assez peu importante de la diminution totale des dépenses de programmes provient des prestations d'assurance-chômage. La plus grande partie de la diminution des prestations d'assurance-chômage résulte de réformes apportées dans la structure du programme. Par conséquent, il n'est certainement pas question qu'une reprise cyclique de l'économie puisse influencer grandement les dépenses de programmes. C'est une politique très délibérée qui a fait changer ce niveau de dépenses à la baisse.
M. Grubel: Je comprends ce que vous me dites, mais d'après ma propre évaluation, j'ai félicité le ministre pour le courage dont il a fait preuve en diminuant les dépenses en termes absolus. Je le répète: C'était un acte courageux de sa part, en particulier pour quelqu'un du Parti libéral et du gouvernement libéral.
Cependant, il y a des questions...
Le président: S'agit-il d'une condamnation assortie de faibles louanges, monsieur Grubel, ou est-ce un compliment?
M. Grubel: Toutefois, certains estiment que cette réduction n'est pas assez rapide puisque l'on ne vise que 3 p. 100 du PIB. Même si on maintient ces compressions de dépenses, si l'on passe d'une période de croissance économique à une période de récession, la même situation risque de se reproduire. D'après ce tableau, entre 1976 et 1977, nous avons eu des diminutions semblables puis, avec la récession, le pourcentage est remonté.
C'est la raison pour laquelle je vous demanderai, dans votre prochain exposé, de nous présenter les dépenses de programmes en pourcentage du PIB corrigées des variations cycliques afin que nous comprenions mieux cette crainte qu'ont tellement de gens - que nous sachions si elle est justifiée - que bien que le rapport entre les dépenses et le PIB ait diminué, ce progrès puisse être éliminé dès la prochaine récession et qu'ainsi nous nous retrouvions exactement dans la même situation dans laquelle nous nous trouvions durant toutes ces périodes qui sont indiquées ici.
M. Drummond: Je répondrai simplement une chose. Il ne faudrait pas compter double en essayant de comprendre les fluctuations cycliques. D'une part nous sommes partis de ce que nous estimons être des suppositions économiques prudentes. Nous avons utilisé des moyennes du secteur privé et les avons délibérément rendu plus pessimistes.
Il est intéressant de voir ce que cela a donné jusqu'ici. Comme vous le savez probablement, la croissance jusqu'ici cette année n'a pas été aussi rapide que nous l'avions prévue dans le budget. Par contre, les taux d'intérêt sont bien en deça de ce que nous avions projeté. Donc, il est évident que dans l'ensemble, nos suppositions étaient prudentes.
Deuxièmement, dans cet objectif de déficit de 3 p. 100 pour 1996-1997, on inclut 3 milliards de dollars que nous avons en réserve pour éventualités et qui, s'ils ne sont pas nécessaires ne seront pas utilisés. Si on en avait besoin pour l'expansion économique, cela pourrait combiner à la fois un manque à gagner de 1 p. 100 dans les recettes et une augmentation de 1 p. 100 des dépenses de programmes, qui viendraient s'ajouter aux chiffres présentés dans le budget. Il y a donc déjà intrinsèquement dans ces suppositions un certain degré de pessimisme ou du prudence au cas où la situation économique serait moins favorable que nous ne l'avions projetée dans le budget.
M. Grubel: Je répète néanmoins que tout cela est très joli, que le ministre des Finances parle de tout cela, qu'il serait intéressant, à mon avis, de voir dans quelle mesure nous pouvons nous attendre à une répétition de ces périodes où les dépenses chutent par rapport au PIB comme dans ces graphiques. Dans quelle mesure peut-on s'attendre à ce que ceci se répète dès la prochaine récession? C'est la question que je pose afin que nous soyons mieux à même de mesurer la réduction réelle des dépenses.
Le président: M. Grubel, c'est supposer qu'il y aura une récession, ce qui veut dire que vous posez une question hypothétique, et comme vous le savez, nous ne répondons jamais à ce genre de questions. Cela dit...
Madame Brushett.
Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Merci, monsieur le président.
J'aimerais également vous remercier de votre exposé très intéressant et très utile.
À la page 48, il est question de la composition des recettes fiscales et l'on constate que pour l'impôt sur le revenu des particuliers, le Canada est le pays du monde où cet impôt est le plus élevé, alors que dans des pays comme le Japon, ils n'en paient presque pas, quelque chose comme 5 p. 100 comparé à nos 40 p. 100 et plus. C'est assez extraordinaire. Je me demande si, avec votre expérience, vous avez jamais suggéré au ministère, par l'intermédiaire des différents ministres qui se sont succédés, qu'en changeant cette psychologie et en réduisant l'impôt sur le revenu des particuliers... Ces recettes pourraient être maintenues sous une autre forme, si bien qu'elles reviendraient tout de même au trésor public. Les gens auraient plus d'argent à mettre dans l'économie plutôt qu'en payant des impôts personnels directs. Avez-vous essayé ce genre de psychologie inversée ou y avez-vous jamais pensé au cours de votre carrière?
M. Drummond: Tout d'abord, permettez-moi de préciser l'interprétation du tableau de la page 48. Malheureusement, la distinction entre l'impôt sur le revenu des particuliers et les contributions de sécurité sociale n'est pas visible dans ce magma noir en bas des colonnes.
Ce que vous voyez en noir est à la fois l'impôt sur le revenu des particuliers et les contributions à la sécurité sociale. Le total, qui, dans un certain sens, est le fardeau fiscal total des particuliers, n'est pas le plus élevé du monde. En fait, il est inférieur à la moyenne des pays du G-7.
L'impôt sur le revenu des particuliers est un peu plus élevé que celui de la plupart des autres pays mais nous sommes bien deça des autres pour ce qui est des charges sociales. Notre assurance-chômage et notre Régime de pensions du Canada représentent, ensemble, la contribution la plus faible parmi le G-7. Je ne pense pas donc que l'on puisse dire que nous avons le plus gros fardeau fiscal pour les particuliers.
Maintenant, vous demandez ce que serait le résultat d'une diminution de l'impôt sur le revenu des particuliers pour l'économie et les finances du pays et je puis vous dire que l'on y a évidemment déjà réfléchi. On l'a même déjà essayé. Je vais vous donner deux exemples.
Il y a d'une part eu la ronde Kennedy dans les années 1960. Une diminution massive de l'impôt sur le revenu des particuliers devait être l'instrument de la croissance et rapporter des dividendes énormes qui permettraient de résoudre les problèmes de déficit. En fait, c'est là qu'ont commencé les problèmes de déficit aux États-Unis.
La deuxième tentative fut faite dans le premier budget Reagan en 1983. Il a accordé une réduction massive de l'impôt sur le revenu des particuliers en vue de créer une telle croissance de telle sorte que les problèmes financiers disparaîtraient à tout jamais. Cela a probablement contribué à une explosion de la croissance aux États-Unis en 1983 et 1984 mais vous vous souviendrez qu'à la fin, lorsque le résultat de toutes ces mesures a été calculé, les États-Unis accusaient le plus gros déficit de leur histoire. Tout bien considéré, on peut conclure qu'ils ne s'en sont jamais remis.
Il ne fait probablement aucun doute qu'à court terme, cela stimule un peu la consommation mais il est évident qu'aucun pays et que le Canada n'a jamais réussi à tirer davantage de recettes d'un tel manque à gagner.
Cela devient probablement de plus en plus vrai au fur et à mesure que les investisseurs, non seulement dans le monde entier mais également au Canada, se préoccupent davantage de notre déficit et de notre endettement. Quelle serait leur réaction si le gouvernement, connaissant ces problèmes de déficit et d'endettement décidait de diminuer ses recettes?
Mme Brushett: Une petite question complémentaire. Lorsque nous parlons de notre dette internationale - et soyons bref - et je fais encore appel à votre expérience, nous voyons que les intérêts que nous devons payer augmentent alors que nous prenons toutes ces mesures pour réduire les déficits et les dettes. Avez-vous des recommandations à faire sur la façon de rapatrier cette dette et de juguler ainsi l'augmentation des paiements d'intérêts à plus court terme?
M. Drummond: Malheureusement, je ne connais pas de remède simple à ce problème. Il y a probablement diverses choses que le gouvernement fédéral pourrait essayer pour obtenir une plus large part de l'épargne nationale mais le problème fondamental que rencontre le Canada est que la demande nette d'épargne est supérieure à l'épargne des Canadiens. Qu'il s'agisse de la dette de l'État fédéral, de celle des sociétés ou des particuliers, à nous tous, nous voulons dépenser plus que nous épargnons tous ensemble. Il y a donc quelqu'un qui est obligé d'aller emprunter sur les marchés internationaux.
Le gouvernement fédéral le fait en partie. Les sociétés aussi. En général, les particuliers ne le font pas. Toutefois, tant que demeurera ce déséquilibre fondamental entre notre épargne et nos investissements, quelqu'un va devoir aller puiser dans l'épargne d'un autre pays.
La seule solution à ce problème, en fait, est d'inverser la situation afin que l'État fédéral et les provinces ne soient pas obligés d'emprunter autant. Ce n'est pas une solution rêvée ou sans douleur, évidemment, il faudra probablement un certain temps avant que cela ne prenne réellement effet, mais c'est littéralement tout ce que l'on peut faire.
M. St. Denis (Algoma): Merci, messieurs, de cet excellent exposé.
À la page 12, où l'on compare les dépenses de programmes, nous avons la comparaison évidente entre le Canada et les États-Unis puisque nous sommes voisins. Le total des dépenses de programmes est au Canada de 39,4 p. 100 du PIB alors qu'il est aux États-Unis de 33,2 p. 100. Vous dites que cela est dû au fait que nous avons une proportion de dépenses plus élevée au palier fédéral, au titre de la santé et de l'éducation.
Avez-vous calculé ce que serait le pourcentage des dépenses de programmes comparativement si l'on pouvait tenir compte des dépenses que fait un Américain typique au titre de la santé et de l'éducation en contribuant à des régimes privés ou, à l'inverse, en soustrayant dans le cas canadien ce montant supplémentaire afin que la comparaison soit plus juste?
On dit souvent que la comparaison avec les États-Unis n'est pas favorable pour ce qui est des taux d'imposition, etc., mais j'estime personnellement que c'est en fait un avantage caché pour le contribuable canadien que ces régimes financés par le Trésor public.
M. Drummond: Je pourrais me contenter de traduire cela littéralement en disant que si au Canada nous n'avions que la part fédérale des dépenses de santé et d'éducation qu'il y a aux États-Unis, la différence entre 39 et 33 p. 100 serait réduite environ de moitié.
Si vous poussiez la chose un peu plus loin et supposiez que nous ayons le type de régime américain, entièrement financé par le secteur privé, et que cela nous coûtait autant que coûte ce régime américain, la différence serait presque éliminée.
Autrement dit, j'estime que la différence ne vient pas seulement du fait que nos régimes soient davantage financés par le Trésor public mais aussi que notre santé, en particulier, coûte considérablement moins cher qu'aux États-Unis. C'est probablement parce qu'il s'agit d'un régime public.
Cela représente donc plus ou moins la différence.
Comme vous l'avez indiqué, voilà qui change certainement la façon dont on considère cela dans le fardeau fiscal des particuliers. Ici, dans un sens, vous payez ce régime par vos impôts indirects et votre impôt sur le revenu des particuliers. Là-bas, on paye directement un régime d'assurance privé.
Cela représente une grosse différence pour l'impôt des sociétés et les charges des entreprises. Par exemple, si l'on considère les coûts de santé liés à la construction d'une automobile, au Canada, ils représentent environ un cinquième de ce qu'ils représentent aux États-Unis. Cela se retrouve donc dans beaucoup de statistiques que nous examinons lorsque nous établissons des comparaisons entre le Canada et les États-Unis.
M. Discepola: Monsieur Drummond, une des expériences personnelles les plus frustrantes que j'ai connues remonte à l'année dernière. J'essayais d'analyser chaque secteur des dépenses de programmes et de voir comment en tant que comité, nous pouvions trouver un million de dollars ici, dix là et faire des recommandations au ministre des Finances pour constater que pendant que nous préparions notre rapport et que le ministre des Finances préparait son budget, les taux d'intérêt avaient monté et éliminé les efforts multipliés par dix déployés par ce comité.
Pourriez-vous nous donner un aperçu général, tant du point de vue des dépenses de programmes que de celui des projections de recettes, de l'écart entre nos prévisions de l'année dernière et les projections réelles jusqu'à la fin de l'année.
M. Drummond: Évidemment, je ne puis répondre que partiellement pour 1994-1995. Les livres ne sont pas fermés mais cela ne devrait pas tarder. Les statistiques officielles devraient donc sortir au cours du mois d'octobre. Le résultat final semblerait correspondre au budget. Il ne semble pas probable que les chiffres dépassent du tout le budget mais ce ne devrait pas être une grande surprise parce qu'évidemment le budget est sorti à la fin février et que l'exercice était presque terminé.
Ce qui serait probablement plus intéressant c'est ce qu'annonce 1995-1996 et je ne peux évidemment vous répondre que partiellement car nous n'avons les résultats financiers que jusqu'au mois de juillet. Nous les avons publiés l'année dernière et ils semblent indiquer que le déficit et les besoins financiers atteindront les niveaux qui correspondront de très près aux prévisions que nous avions faites dans le budget. La composition de ces différents chiffres varie un petit peu, ce qui ne devrait pas trop surprendre étant donné ce qui arrive à l'économie.
Nous établissons nos prévisions en utilisant les prévisions moyennes du secteur privé et en les rendant délibérément un peu plus pessimistes. Nous prévoyons une croissance de 3,8 p. 100 de l'économie réelle pour cette année mais étant donné les chiffres de la première moitié de l'année, il apparaît clairement que nous n'atteindrons pas une croissance aussi forte. Par contre, nous avons pris les prévisions moyennes du secteur privé pour les taux d'intérêt et nous y avons ajouté 0,5 p. 100, ce qui nous a donné un taux d'intérêt moyen prévu pour cette année de 8,7 p. 100 pour des bons du Trésor à court terme. Alors que je me préparais à venir ici, nous en étions à environ 6,6 p. 100 et nous sommes passés à moins de 6,5 p. 100 pendant plusieurs mois. De même, nous sommes bien en deçà des suppositions budgétaires pour nos taux d'intérêt gouvernementaux à long terme.
Le résultat semble donc être plus ou moins que le taux de croissance plus faible est compensé par des taux d'intérêt nettement inférieurs. Donc, là encore, d'après les chiffres que nous avons - et ce n'est évidemment pas du tout pas complet - pour les quatre premiers mois de l'année, nous ne devrions pas finalement dépasser le budget prévu.
M. Discepola: Pour paraphraser le ministre des Finances, quoiqu'il arrive, nous atteindrons notre objectif de 3 p. 100 du PIB pour le déficit.
M. Drummond: En effet.
M. Discepola: Si nous n'avons pas touché aux 3 milliards que nous avons en réserve, le ministre des Finances, ou votre ministère se propose-t-il de recommander au ministre, d'utiliser automatiquement ce montant pour réduire le déficit?
M. Drummond: Je crois que le ministre a dit très clairement que si ce montant n'était pas nécessaire pour certaines éventualités imprévues sur le plan économique ou financier, ce montant servira à résorber le déficit et ainsi la dette. Il n'est absolument pas question de changer d'avis et d'utiliser cela pour un programme de dépenses.
M. Discepola: Très bien. Merci.
M. Harper: Je n'aurai qu'une question, qui fait suite à celle de M. Grubel.
J'aimerais attirer votre attention sur la page 29. Voilà, exprimées en pourcentage du PIB, les dépenses ministérielles totales. Donc, comme vous le dites, nous avons exclu les principaux programmes de transfert aux provinces et aux particuliers. Ce qui reste correspond donc plus ou moins à ce qu'il en coûte au gouvernement fédéral en biens et services. C'est bien cela?
M. Drummond: À vrai dire, ce sera beaucoup plus vaste que cela. Par exemple, cela inclura tous les programmes de formation pour le Développement des ressources humaines, les subventions postales et quelques autres éléments.
M. Harper: Je vois. Le total en 1997-1998 est d'un peu plus de 42 milliards de dollars et, de cette somme, seuls 20 milliards de dollars représenteraient ce que vous qualifiez de «biens et services», n'est-ce pas? Cela signifie que les paiements de transfert, les subventions et les contributions représentent plus de la moitié de ce total.
Ce chiffre, comme l'a fait remarquer M. Grubel, ce tableau, devrait être rajusté suivant les cycles. Si on le faisait, d'après ces chiffres uniquement, on constaterait qu'à partir des années soixante jusqu'à assez récemment, les dépenses s'élevaient de façon assez constante à 90 p. 100 du PIB. On remarque que ce pourcentage a commencé à baisser et on prévoit qu'il chutera dans les années quatre-vingt-dix.
Je me demande comment interpréter cela, comment cerner ce phénomène. Cette baisse relative des dépenses ministérielles par rapport à la taille de l'économie signifie-t-elle que le gouvernement est moins présent, qu'il réduit ses services, ses activités, dans le secteur du transport par exemple, ou cela témoigne-t-il d'une plus grande efficacité dans les services dispensés et les programmes offerts par le gouvernement? Est-ce là le reflet de dépenses d'immobilisations inférieures ou reportées? Quelle interprétation précise peut-on donner à cette tendance?
M. Drummond: Tout d'abord, je voudrais revenir à la question de M. Grubel. Je ne pense pas qu'il voulait dire qu'il faille faire un rajustement des tableaux d'une façon cyclique. Ce genre de rajustements se fait quand il s'agit de programmes statutaires, où les modalités de paiement sont prévues dans les dispositions d'une loi - par exemple un chômeur touche tant - ce qui signifie qu'en cas d'augmentation du chômage, les paiements sont forcément plus élevés.
Les budgets des ministères sont fixes. C'est gravé dans la pierre. On a dit au ministère de l'Agriculture qu'en 1997-1998, il pourrait compter sur un budget de 1,628 milliard de dollars. S'il survient un problème quelconque dans le secteur agricole, si le ministère veut embaucher davantage, tant pis. Il faudra qu'il s'arrange, qu'il fasse des rajustements. Son budget est de 1,628 milliard de dollars. Il n'est donc pas nécessaire de faire des rajustements cycliques.
Cela revient...
M. Harper: À défaut de faire ce genre de rajustement, puisque le PIB fluctue, il y aura une fluctuation cyclique dans ce pourcentage car on suppose qu'en théorie les dépenses faites à même le budget ministériel le sont à long terme.
De toute façon, je pense que le rajustement tiendrait compte de la plupart des conséquences de la fluctuation et qu'on constaterait une tendance à la baisse à l'avenir. Je me demande comment interpréter cela.
M. Drummond: Pour répondre à vos questions, vous trouverez sans doute plus intéressant de consulter les chiffres absolus. Si vous prenez ce total, vous constaterez en pourcentage du PIB... En 1994-1995, c'est 52 milliards de dollars. Ensuite, en 1997-1998, cela passe à 42 milliards de dollars. Sur une période de trois ans, il y a une baisse de 10 milliards de dollars.
Comment cela s'explique-t-il? Comme je l'ai dit dans mon exposé, les principales coupures budgétaires ont porté sur les subventions aux entreprises. Cela explique une grande partie de cette baisse.
Je suis convaincu que tous les ministères, et cela inclut le mien également, tirent une partie de l'argent épargné de ce qu'on appelle une amélioration de l'efficacité. Comme dans n'importe quelle société privée, quand l'argent se fait rare, on trouve un moyen quelconque pour s'en tirer. On voyage moins, ou on cherche des façons de faire qui soient plus efficaces. Quand l'argent abonde, on n'est pas toujours aussi motivés pour cela. Si l'argent se fait rare, on s'y met.
Bien entendu, cette réduction de 10 milliards de dollars ne provient pas uniquement d'une amélioration de l'efficacité. On a réellement sabré dans les programmes. Je l'ai dit, ce sont surtout les subventions aux entreprises qui ont été réduites. Par ailleurs, la réduction des effectifs compte pour une grande part de ces réductions. Comme vous le savez, il y aura 45 000 fonctionnaires de moins, sur un total de 200 000. Cela représente donc une réduction énorme en pourcentage.
On peut toujours faire des économies grâce à une plus grande efficacité, mais il est indéniable qu'il y aura une réduction de programmes. Il faudra également une réduction de services, mais c'est vraiment la seule façon pour nous de nous tirer du mauvais pas où nous a conduit notre endettement.
Le président: Monsieur Campbell, vous avez la parole.
M. Campbell: Mme Brushett a posé une question concernant l'impôt sur le revenu des particuliers que l'on pourrait réduire éventuellement et cela m'amène à me demander si vous avez envisagé d'autres scénarios qui feraient jouer diverses composantes du côté recettes de l'équation. Avez-vous envisagé quelles seraient les conséquences si l'on augmentait un côté et non l'autre? Avez-vous préparé des modèles et envisagé de procéder autrement, par exemple de toucher aux impôts des sociétés?
M. Drummond: Je ne vais pas m'appuyer sur le seul travail que nous avons effectué. Il est entendu que si l'on se reporte à tout le travail fait par les économistes, vous découvrirez que c'est un petit peu contraire à ce à quoi on s'attendait...on a tendance à croire que si l'on veut réduire les impôts, c'est du côté des impôts des sociétés qu'il faut regarder. Il est vrai que cela pourrait être logique dans le contexte canadien puisqu'un grand nombre de sociétés sont implantées aux États-Unis et au Canada, et dans d'autres pays de plus en plus, et on se dit que si on leur offre un régime fiscal attrayant au Canada, elles s'installeront ici, elles investiront ici. Ainsi, on obtient passablement d'appui en procédant ainsi.
M. Campbell: Ainsi, comme les théories vaudou the l'ère Reagan, ce que l'on a appelé «l'effet de ruissellement», n'ont pas donné de résultat, vous pensez qu'une augmentation de l'impôt des sociétés pourrait donner un résultat contraire à ce que l'on a tendance à croire en règle générale, n'est-ce pas?
M. Drummond: Comme je l'ai dit, chaque fois qu'il s'est agit de faire une réforme de l'impôt sur le revenu des sociétés, nous nous sommes toujours bien gardés... Prenez la réforme de l'impôt sur le revenu de 1988. On a toujours pour souci de veiller à ce que les taux d'imposition des sociétés au Canada ne soient pas tellement différents de ce qu'ils sont aux États-Unis, surtout dans les États du Nord, mais de plus en plus on ne se soucie plus particulièrement des États du Nord mais de tous les autres car les sociétés ont fait la preuve qu'elles sont très mobiles.
Si donc ces taux sont disparates, deux choses se produisent. Dans le premier cas, et c'est ce qui fait le moins de tort, les sociétés modifient leur comptabilité. Elles déclarent leur profit aux États-Unis, leur perte ici. Ce qui fait plus de dégât, c'est quand elles décident de ne pas rester ici ou du moins quand elles décident de ne pas investir ici et de ne pas développer leurs unités de production ici.
Les taux d'imposition dans l'ensemble peuvent concurrencer ceux des États-Unis. Ce n'est pas vrai dans le cas de toutes les tailles d'entreprises ni dans tous les secteurs. Nous pouvons concurrencer les États-Unis. Nos taux sont légèrement plus élevés, mais cela ne risque pas d'engendrer une réaction telle que les sociétés voudraient quitter notre territoire. Il faut donc être très prudent avant de décider de bouleverser cet équilibre.
Le président: Monsieur Silye, vous avez la parole.
M. Silye: Merci, monsieur le président.
À la page 42, vous donnez le détail du budget des services généraux du gouvernement, notamment Revenu Canada avec, en 1994-1995, 2,2 milliards de dollars - j'arrondis - budget qui passerait en 1997-1998, à 1,977 milliard de dollars. Si j'ai bien compris, Revenu Canada englobe Douanes et Accise. Avez-vous la ventilation des effectifs et des budgets pour Douanes et Accise, d'une part, et Revenu et Impôt, d'autre part? Il y aurait au total 44 000 employés, dont un certain nombre travailleraient pour Revenu et Impôt au coût de...et quant au reste, il en coûterait tant.
M. Drummond: Non je n'ai pas cette ventilation. J'ajouterais que si je ne l'ai pas, c'est un peu à cause de la façon dont l'examen des programmes a été mené. Par le passé, non seulement on disait aux ministères ce qu'allait être leur budget et comment on allait le modifier mais on leur disait comment presque chaque élément de ce budget allait être modifié. Cette année, l'examen des programmes a permis de dire à Revenu Canada que le ministère obtiendrait 1,977 milliard de dollars. On s'est dit que le ministère était le mieux placé pour répartir ce budget.
Au fur et à mesure que nous connaîtrons le plan opérationnel des ministères, on verra comment se fera la répartition mais, excusez-moi, je ne peux pas vous en dire plus long pour l'instant.
M. Silye: Est-ce que je pourrais obtenir un exemplaire de cela? Est-il possible de savoir où en sont les choses actuellement? Je ne veux pas dire tout de suite mais...
M. Drummond: Je vais voir si c'est disponible. Il est entendu que pour 1997-1998...je ne sais pas s'il existe quelque chose.
M. Silye: Savez-vous combien Revenu Canada Impôt a d'employés sur un effectif total de 44 000 personnes?
M. Drummond: Oui, ça c'est connu.
M. Silye: C'est cela que je veux savoir.
M. Drummond: Le budget principal de 1995-1996 contient très certainement ces renseignements pour Revenu Canada comme pour les autres ministères.
M. Silye: Est-ce que la ventilation est faite?
M. Drummond: Oui, et vous trouverez une ventilation même par direction au sein du ministère.
M. Silye: Le tableau qui se trouve à la page 34 ne comprend pas...il est intitulé «Montant des dépenses» et il donne la liste de certains ministères, de certains programmes mais on n'y retrouve pas Revenu Canada.
M. Drummond: C'est cela. J'ai dû faire des regroupements pour que les données tiennent en une page. Voilà pourquoi quand on passe à la page 42, on trouve les services généraux du gouvernement ventilés, avec des chiffres pour Revenu Canada. Page 34, vous trouvez dans la première colonne les services généraux du gouvernement auxquels correspond un montant de 4,967 milliards de dollars, et c'est le même total que vous retrouvez à la page 42. Dans le tableau de cette page-là, on constate que Revenu Canada a un budget de 2,207 milliards de dollars sur ces 4,967 milliards de dollars.
M. Silye: À propos du déficit, vous avez dit avec emphase qu'il se portait bien du point de vue du pourcentage du PIB qu'il représente. Tout est lié au PIB et à sa performance. Je reconnais que le déficit diminue. Les dépenses du programme en dollars réels diminuent. Je le reconnais et je m'en réjouis. L'endettement toutefois continue d'augmenter et le coût du service de la dette augmente à un rythme plus rapide que les réductions que l'on apporte annuellement. Selon moi, le ministère des Finances est en difficulté.
Le ministre des Finances présente des cycles renouvelables de deux ans et son objectif est 3 p. 100 du PIB. Je suis un homme d'affaires et, à mon avis, cet objectif est trop faible. J'ai l'impression que le Comité doit faire de sérieux efforts pour trouver des moyens soit pour augmenter les recettes du gouvernement, soit pour réduire ses dépenses davantage et plus rapidement qu'on ne le fait actuellement.
Le problème ne cesse de s'accroître la dette de grossir. Les taux d'intérêts fluctuent de façon imprévisible, et c'est comme si nous nagions debout. Nous ne savons pas combien de temps nous allons tenir. La fatigue pourra nous gagner un jour ou l'autre et nous risquons de nous noyer. Je crains que le pays ne se noie dans cette énorme dette qui ne cesse de grossir.
N'a-t-on pas l'impression que cet objectif de 3 p. 100 du PIB est trop faible et que, pour encourager l'investissement et augmenter les recettes du gouvernement, un budget totalement équilibré avec un échéancier de 3, 4, 5 ans... Une date butoir à partir de laquelle ce gouvernement, comme tous les gouvernements provinciaux du pays le font, présentera un budget équilibré? Ma question porte sur l'objectif faible, et je voudrais savoir ce que pense le ministère des Finances de l'idée d'un budget équilibré.
Le président: Si vous le souhaitez, vous êtes libre de contredire le ministre.
M. Drummond: J'en tiendrais compte. Cela m'a traversé l'esprit quand je réfléchissais à une réponse possible.
Mon opinion personnelle là-dessus importe peu et je pense qu'il appartient davantage aux membres du Comité de discuter de cette question. J'ajouterai cependant qu'en tant que fonctionnaire qui a l'expérience de la préparation d'un budget, j'ai pu constater qu'il est beaucoup plus facile de fixer un objectif ambitieux que de présenter une orientation précise qui permette d'atteindre cet objectif. Il est important d'assortir tout objectif de mesures concrètes permettant de le réaliser.
M. Silye: Pensez-vous que l'objectif de 3 p. 100 du PIB est trop faible?
M. Drummond: Je ne pense pas qu'il m'appartienne de donner mon opinion là-dessus.
M. Silye: Diriez-vous que le ministère des Finances n'a pas reçu la consigne de viser l'équilibre du budget?
M. Drummond: Je pourrais vous renvoyer à certains documents du gouvernement, notamment le Livre rouge, et les budgets de février 1994 et de février 1995. À mon avis, il y est très clair que le gouvernement a pour objectif un budget équilibré et qu'un déficit représentant 3 p. 100 du PIB ne constitue qu'un objectif intérimaire.
[Français]
M. Loubier: J'aimerais revenir aux recettes fiscales et aux évitements fiscaux. Au mois de juillet, la revue CA Magazine, qui est la revue des comptables agréés canadiens, publiait un article sur les stratégies légales d'évitement fiscal. On pouvait lire dans l'article:
- Nous privilégions en général des territoires qui, comme les îles Caïmans, sont des colonies
britanniques plutôt que des États indépendants. Par exemple, il n'y a aucun impôt local aux îles
Caïmans. Les produits de placements, les redevances et les gains de capital sont exempts de tout
impôt.
- Il y a présentement plus de 28 000 sociétés constituées aux îles Caïmans, chiffre qui augmente à
un rythme d'environ 4 000 nouvelles sociétés chaque année.
- La quasi-totalité des grandes sociétés multinationales canadiennes ont recours à des sociétés
domiciliées à l'étranger dans le cadre de leur stratégie de gestion fiscale.
- Je vous rappelle que c'est tiré de la revue des comptables agréés canadiens.
- Par exemple, la Barbade constitue un endroit propice pour mettre en oeuvre une stratégie
d'entreprise internationale exploitée activement, car la convention fiscale entre le Canada et la
Barbade permet que le revenu d'une entreprise exploitée activement, gagné et imposé à un taux
réduit (un maximum de 2,5 p. 100) à la Barbade, soit reçu à titre de dividendes libres d'impôt
par une société canadienne.
- Au printemps dernier, le budget fédéral a permis d'introduire des dispositions qui ont éliminé
certaines des économies d'impôt dont pouvaient bénéficier les entreprises canadiennes, mais il
en reste encore beaucoup.
Je reviens à ma question de départ. Si les finances publiques sont dans une situation catastrophique et si on a perdu le contrôle sur l'endettement cumulatif du gouvernement fédéral, si on cherche des façons de faire de l'argent quelque part, ne serait-il pas possible d'éviter ce que nous expriment si nettement les comptables agréés dans leur magazine, c'est-à-dire éliminer les évitements fiscaux rendus possibles grâce aux conventions fiscales qui ont été signées entre le Canada et des pays comme les îles Caïmans ou la Barbade? Ne trouvez-vous pas odieux qu'on permette aux entreprises de prendre de telles dispositions alors que vous demandez à l'ensemble des contribuables canadiens de se serrer la ceinture?
[Traduction]
M. Drummond: Je réponds à cela qu'il s'agit ici d'un objectif de réduction du déficit plus ambitieux: il est plus facile d'énoncer l'objectif ici que d'imaginer les détails qui permettront de réaliser cet objectif. Chose certaine, l'objectif consiste ici à réduire au minimum les évitements fiscaux. Comment y parvenir, avec le système complexe d'imposition de l'entreprise que nous avons, est moins évident. Je me contenterai de dire que nous serons heureux de recevoir les conseils que le comité et vous-même pourrez nous donner sur cette question.
[Français]
M. Loubier: Monsieur le président, c'est un article des comptables agréés canadiens qui suggère aux investisseurs d'aller investir aux îles Caïmans et à la Barbade pour ne pas payer un cent d'impôt. De plus, la fiscalité canadienne permet cet évitement fiscal.
Vous nous demandez de faire des suggestions. Vous devriez plutôt serrer la vis à cet égard. Les conventions fiscales qui ont été signées avec 16 pays considérés comme des paradis fiscaux tels que les îles Caïmans et la Barbade doivent être révisées par vous-même, parce que j'ai l'impression que le ministre n'est pas là pour le faire. Si le ministre ne le fait pas, ne venez pas me demander de faire des suggestions à ce sujet. Les comptables agréés vous en font de façon indirecte en vous disant que de nombreuses entreprises bénéficient d'abris fiscaux considérables en faisant affaire dans de tels pays.
Je voudrais vous suggérer de téléphoner au comptable agréé auteur de l'article, M. Elphinstone, et de lui demander d'où il tient ses renseignements. Demandez-lui aussi de vous faire des suggestions quant à la façon d'annuler les conventions fiscales que nous avons signées avec ces paradis fiscaux et dont bénéficient les entreprises. Il est insensé que certaines entreprises fassent leur devoir corporatif, tandis que d'autres ne le font pas. Et ce sont souvent de grandes entreprises qui bénéficient des paradis fiscaux dont je viens de parler. Ne me répondez pas des niaiseries.
[Traduction]
M. Drummond: Vous avez cité plusieurs éléments de cet article. Vous avez dit, entre autres, que le budget fédéral prévoyait en effet des mesures concernant les paradis fiscaux. Comme je l'ai dit, si le comité peut faire d'autres suggestions qui rejoignent les mesures que nous avons déjà prises - car nous prenons des mesures - elles seront les bienvenues.
Le président: Me permettrez-vous d'ajouter que...
[Français]
que je serais très content d'entendre des experts qui pourraient suggérer au Comité des solutions au problème des abus fiscaux et des paradis fiscaux. Notre devoir est de trouver des experts qui pourraient nous aider.
M. Loubier: Il y a l'Ordre des comptables agréés du Québec.
Le président: J'ai l'impression que votre premier témoin pourrait nous aider.
M. Loubier: Absolument!
[Traduction]
Le président: Monsieur Grubel, s'il vous plaît.
M. Grubel: Je sais que nous avons du pain sur la planche. Je veux seulement reprendre la question de M. Campbell et la retourner.
Vous dites que si notre taux d'imposition était plus élevé qu'aux États-Unis, notre assiette fiscale s'en trouverait rétrécie; elle se déplacerait vers les États-Unis. L'État perdrait donc des recettes. L'inverse serait-il également vrai? Si notre taux d'imposition des entreprises était inférieur au taux américain, le Canada attirerait-il des investissements en masse, et cela aurait-il pour effet d'augmenter les recettes émanant des entreprises?
M. Drummond: Il y a une question de seuil ici. Si le taux d'imposition des entreprises est nettement désavantageux, il est sûr que personne n'ira chez vous. S'il est avantageux dans la mesure où il est beaucoup plus bas...
J'ignore s'il y a un point discrétionnaire. Je crois, pour ma part, qu'il y a un point discrétionnaire tel qu'on décourage l'investissement si le taux d'imposition d'une entreprise est trop élevé. Mais je ne suis pas sûr qu'on attire plus d'investissements avec un taux d'imposition plus bas.
Encore-là, pour ce qui est de savoir si un taux d'imposition plus bas nous vaudrait des recettes additionnelles, je l'ignore. Encore là, il faut situer cette mesure dans le contexte voulu, et étant donné l'ampleur de notre dette, il faut se demander s'il ne vaut pas mieux attendre d'avoir redressé les finances publiques avant d'envisager de nouveaux allégements fiscaux.
Le président: Merci, monsieur Grubel. Bel effort.
M. Silye: J'aimerais savoir ce que le ministère des Finances pense de... Vous avez employé le mot... Je crois que vous avez dit «complexe» ou «compliqué», ou un mot de ce genre, au sujet de l'imposition des entreprises. Je préférerais un mot plus fort. Croyez-vous qu'on peut rendre le système plus juste, qu'on peut le simplifier et le rendre plus juste pour ce qui concerne les niveaux de revenu, tout en maintenant les recettes fiscales, ou la structure du système actuel est-elle suffisante?
Vous savez qu'on parle beaucoup d'un impôt uniforme. À ce niveau, le ministère des Finances a-t-il un modèle qui permettrait d'entrevoir l'effet qu'aurait un système différent et une assiette fiscale différente?
M. Drummond: Je suis tout d'abord au regret de vous dire que je dois corriger quelque peu les prémisses de votre question parce que je n'ai pas dit que le système d'imposition de l'entreprise était complexe. Ce que j'ai dit, c'est que nos structures d'entreprise sont complexes. Les entreprises elles-mêmes sont complexes, et non la fiscalité.
Je voulais dire par là que nous ne faisons plus affaire avec des entreprises canadiennes. Elles sont toujours au Canada et elles ne font affaire qu'au Canada. Presque toutes les entreprises avec lesquelles nous faisons affaire, et certainement nos grandes entreprises, font affaire au Canada, aux États-Unis, et de plus en plus dans d'autres pays, et la marge de manoeuvre dont elles disposent pour comptabiliser leurs profits et pertes est beaucoup plus grande qu'elle n'était il y a dix ou vingt ans. Le système d'imposition des entreprises doit tenir compte de cela.
Je n'ai pas voulu laisser entendre que notre système d'imposition de l'entreprise était compliqué.
Pour ce qui est de l'impôt uniforme, la première question que vous avez posée, ce qui préoccupe tous ceux qui se sont penchés sur la question, c'est comment combiner un impôt uniforme avec la volonté d'avoir ce que nous avons déjà au Canada, c'est-à-dire un système d'impôt assez progressif. Il faut bien voir ce qui existe aux États-Unis, mais la situation là-bas est tout à fait différente. Aux États-Unis, le système d'impôt est beaucoup moins progressif qu'au Canada.
Par définition, l'impôt uniforme égalise beaucoup le fardeau fiscal. Je vais vous en donner un exemple.
Seulement 1 p. 100 des déclarants au Canada gagnent 100 000 dollars par année, mais ces personnes sont imposées sur 10 p. 100 de tous les revenus imposables et elles paient 18 p. 100 de tout l'impôt. C'est donc un système fiscal très progressif. Avez l'impôt uniforme, on perd cela, et la première chose qui arrive, c'est qu'on commence à introduire des mesures secondaires qui rétablissent cette progressivité. Tout dépend jusqu'où on va, mais on a tout de suite tendance à revenir à un système qui n'est pas bien différent de celui que nous avons déjà.
M. Harper: Je ne peux pas résister à la tentation de poser une question qui fait suite à celle que vient de poser M. Grubel.
Si je vous comprends bien, vous lui avez dit que si notre taux d'imposition des entreprises était plus élevé qu'aux États-Unis, les entreprises canadiennes seraient tentées d'immigrer vers le sud, mais les investisseurs ne seraient pas nécessairement tentés d'immigrer vers le nord si notre taux d'imposition de l'entreprise était plus bas. Si vous croyez qu'on peut persuader les investisseurs d'immigrer vers le sud parce que le taux d'imposition des entreprises est plus bas aux États-Unis mais qu'on ne peut les persuader d'immigrer vers le nord si notre taux d'imposition des entreprises était plus bas, alors qu'est-ce qui fait que notre pays est si peu tentant pour les investisseurs?
Le président: Sans entrer dans le débat constitutionnel.
M. Drummond: La fin de votre question est le début de ma réponse. Ce qui me frappe, c'est que nous avons un certain nombre d'objectifs fiscaux, et l'un d'entre eux est sûrement l'abaissement de la fiscalité, mais il subsiste un petit problème épineux que nous n'avons pas encore réussi à résoudre, à savoir la dette nationale. Si vous voulez savoir ce qui inhibe l'investissement étranger, je vais vous le dire, c'est la dette nationale.
On a fait beaucoup de chemin de ce côté, pas seulement au niveau fédéral mais aussi au niveau provincial.
C'est bien beau d'imaginer toutes sortes de réductions d'impôt, mais il faut en priorité s'attaquer au déficit. Ça, c'est un problème réel, et non imaginaire. Si on peut réduire le déficit et équilibrer le budget comme vous dites, on peut alors songer à des réductions d'impôt. Mais je pense qu'on est encore loin de ça.
Le président: Au cours des audiences précédentes, des témoins ont dit qu'il fallait modifier les dispositions régissant l'impôt sur le capital. Vous dites que nos dépenses fiscales sont énormes parce que notre fiscalité épargne certains gains. D'autres ont dit que nos dispositions régissant l'impôt sur le capital comptent parmi les plus punitives du monde, que c'est pire qu'aux États-Unis.
Je ne crois pas que nous devrions nous pencher sur ce problème particulier au cours de nos audiences précédant le budget, mais j'imagine que l'imposition des gains en capital exerce une influence considérable sur l'investissement et l'épargne. Disposez-vous d'études dans ces domaines qui pourraient nous aider?
M. Drummond: Tout d'abord, une observation générale sur les dépenses fiscales. Nous avons publié un livre sur cette question, et je crois qu'on essaie de dire dans ce livre qu'il faut être extrêmement prudent dans l'interprétation de telles dispositions parce que le risque d'erreur est très grand.
Le chiffre qui représente les gains en capital est strictement le résultat d'un calcul très mécanique. Nous incluons dans les recettes les trois quarts des gains en capital, et on dit seulement que si 100 p. 100 de ces gains étaient imposés, on obtiendrait des recettes supplémentaires. Mais il y a une façon beaucoup plus indiquée, et beaucoup plus complexe, de considérer la question.
Au Canada, nous imposons aussi les gains en capital nominal. Si vous possédez un bien pendant plus de 20 ans, il est évident que l'inflation aidant - de toute évidence, l'inflation est moindre aujourd'hui qu'auparavant - en 20 ans, il y a beaucoup d'inflation, et votre gain ne pourrait en grande partie que représenter l'inflation. Vous ne vous en portez pas mieux, mais vous êtes imposé pour le plein montant. Dans un sens, l'inclusion partielle des gains en capital est largement fonction de la révision liée à l'inflation.
On ne peut donc tout simplement pas dire: «Ah, voici des recettes supplémentaires que nous devrions avoir.» Je pense qu'il faut y voir beaucoup plus une question structurelle. Ce qui ne veut pas nécessairement dire que les gains en capital sont privilégiés.
Le président: Je suis heureux de vous l'entendre dire parce que si seulement les trois quarts des gains en capital sont inclus dans le revenu, dans le cas que vous dites, il se peut que la valeur de ce bien triple ou quadruple en 20 ans, donc la personne est beaucoup plus pauvre même avec notre taux d'imposition plus bas. Une telle mesure peut-être très spoliatrice.
Certains experts, dont Neil Brooks, qui est un très bon ami de M. Loubier, nous ont dit qu'il fallait inclure tous les biens, mais pleinement indexés sur l'inflation, ce qui fait que, dans la plupart des cas, pour les biens qu'on possède pendant longtemps, on réduirait l'impôt sur les gains en capital.
[Français]
M. Loubier: Je n'ai pas dit cela, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Avez-vous sur ces questions des études qui nous aiderait? Avez-vous examiné cette question?
M. Drummond: Je verrai, monsieur le président.
Le président: Si vous avez des études, nous pourrons peut-être en rediscuter avec vous.
M. Drummond: Bien sûr.
Le président: Y a-t-il d'autres observations?
Je tiens à dire ceci, monsieur Drummond. C'était un excellent exposé. Il y avait là amplement matière à réflexion. D'après l'intérêt que vous avez suscité, je constate que tous mes collègues sont d'accord avec moi. J'ai la certitude que le comité aura encore besoin de vous, et j'espère que vous accepterez de nous faire profiter de votre sagesse.
Au nom de tous mes collègues, je vous remercie.
La séance est levée.