[Enregistrement électronique]
Le vendredi 1er décembre 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Le Comité permanent des finances poursuit ses audiences prébudgétaires. Nous sommes très heureux de nous trouver ici, à Vancouver, pour notre deuxième tour de table.
Nous accueillons cet après-midi M. Charles Campbell; Julian Albanese, de la Capilano Students Union; Peter Robinson, de Community Based Full Employment; Sherrill Gullickson, de la Downtown Granville Tenants Association; John Les, de la Fédération canadienne des municipalités; Kirk Lawrie, de la Chambre de commerce de Richmond; Bernie Yung, de Savoy Management; Richard Mulcaster, Chris Richardson et Bruce Buchanan, de la Vancouver Foundation; M. Fred Pawluk, qui témoignera à titre personnel; le Dr Hardwick, doyen associé, recherche et planification, à la Faculté de médecine de l'université de Colombie-Britannique et le Dr Bernard Bressler, professeur et chef du Département d'anatomie.
Bon, je me suis mélangé les pinceaux, j'ai oublié M. Sulmona, directeur de la planification stratégique de la Vancouver International Airport Authority. Ai-je mal prononcé un nom ou ai-je oublié quelqu'un?
Merci de vous être rendus à notre invitation. Nous allons commencer par une synthèse de trois minutes par personne durant laquelle vous aurez l'occasion de nous faire part de vos préoccupations ou de vos conseils. Vous aurez la possibilité de conclure plus tard, et si vous n'avez pas eu le temps de nous exposer pleinement votre point de vue quand nous en arriverons à la période des questions, je vous garantis que nous vous le donnerons à ce moment-là.
Nous pourrions peut-être commencer par vous, M. Sulmona, pour une synthèse de trois minutes.
M. L.G. Sulmona (directeur, Planification stratégique, Vancouver International Airport Authority): Bonjour. Nous nous proposons de transmettre au comité des commentaires plus officiels par écrit, au nom de notre président David Emerson, qui n'a malheureusement pu être des nôtres aujourd'hui.
Je ne traiterai ici que deux ou trois aspects très techniques après quoi je me mettrai à la disposition des membres du comité pour répondre à leurs questions. Comme je le disais, nous vous répondrons par écrit.
La Vancouver International Airport Authority est d'avis qu'à l'heure où l'économie canadienne dépend de plus en plus du commerce international, les mesures fiscales et les procédures administratives applicables à l'exportation de biens et de services nuisent à la compétitivité des exportateurs et des exploitants canadiens. Il existe plusieurs cas de figure bien précis où les taxes, appliquées soit aux services d'exportation, soit aux marchandises en transit, ont un effet négatif sur la compétitivité des biens canadiens.
Commençons, très brièvement, par le problème de la TPS appliquée au tarif aérien transfrontalier. Le concept «ciels ouverts» a donné lieu, cette année, à une importante augmentation des mouvements transfrontaliers, partout au Canada. L'industrie estime qu'il existe un décalage tarifaire systématique entre aéroports américains et aéroports canadiens situés près de la frontière. Les vols au départ de Seattle et à destination de villes américaines continuent d'être moins chers qu'au départ de Vancouver, surtout à cause de la différence entre les taxes canadiennes et les taxes américaines.
Récemment, plusieurs transporteurs américains - surtout ceux offrant des services aériens d'affrètement au départ de Bellingham, petite ville frontalière américaine - , ont fait, chez nous, la promotion de vols à destination de plusieurs villes américaines, en précisant que leurs tarifs ne sont pas visés par la TPS. La situation est identique en ce qui concerne Toronto et Buffalo, ainsi que Montréal et Burlington.
L'autre problème tient au fait que le calcul de la TPS englobe la taxe sur le transport aérien, raison pour laquelle les transporteurs aériens sont encore plus désavantagés que les autres. À Vancouver, nous vivons une situation toute particulière à cause de notre proximité de la frontière avec les États-Unis. En outre, comme dans le cas des voyages transfrontaliers, la TPS est uniquement appliquée aux tarifs aériens et non à ceux d'autres modes de transport, nous sommes économiquement pénalisés.
Par exemple, tous les étés, nous accueillons un grand nombre d'Américains qui viennent prendre des bateaux de croisière à destination de l'Alaska. Dans le passé, la plupart d'entre eux transitaient par Seattle et certains le font encore. Les passagers désireux de relier Seattle à Vancouver par autobus, ce que font près de la moitié d'entre eux, ne paient pas de TPS pour ce trajet, contrairement à ceux qui décident de voyager par avion. La discrimination est évidente.
Le transport aérien qui, de tous les modes de transport de passagers en provenance de l'étranger, est celui qui présente la meilleure valeur ajoutée, est d'autant plus pénalisé par la TPS.
J'ai deux autres remarques à faire au sujet des mouvements de marchandises au Canada. Vancouver, mais aussi Toronto, Montréal, Halifax et d'autres villes canadiennes sont des centres de distribution vers les États-Unis. Deux ou trois dispositions relatives à la TPS ont des effets négatifs dans ce cas également.
La TPS est appliquée sur les marchandises en transit, autrement dit sur celles qui arrivent de l'étranger et qui sont destinées aux États-Unis ou à d'autres pays. La TPS est remboursée quand le produit est réexpédié. Certes, elle n'est pas effectivement payée sur ces marchandises, mais le fardeau financier et administratif imposé aux exploitants, mais aussi au gouvernement du Canada, est très lourd.
On nous a notamment demandés comment le gouvernement pourrait rationaliser ses méthodes. Eh bien, si l'on exonérait de TPS toutes les marchandises en transit, nous pourrions être plus concurrentiels, tout en réduisant les frais de transaction pour le gouvernement du Canada. Nous sommes convaincus que ce serait là une façon, pour le gouvernement, de réaliser ses objectifs de réduction du déficit.
Par ailleurs, il y a la Loi sur les mesures spéciales d'importation, la LMSI, qui renferme des dispositions très semblables à celles de la TPS relativement aux marchandises en transit. La LMSI, qui permet de prélever des droits compensateurs et des frais d'antidumping, est appliquée de la même façon que la TPS: les droits sont d'abord prélevés, puis ils seront remboursés une fois que les marchandises ont été réexportées. Là encore, il serait possible de rationaliser cette procédure administrative.
Voilà ce que j'avais à dire. Nous vous ferons parvenir d'autres commentaires par écrit, de même que les réponses à vos questions portant sur nos politiques. Mais je suis tout à fait disposé à répondre à vos éventuelles questions sur la Vancouver International Airport Authority ainsi que sur nos activités.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Sulmona.
De la Capilano Students Union, nous accueillons à présent Jason Lee et M. Julian Albanese.
M. Julian Albanese (Capilano Students Union): En fait, c'est moi qui vais prendre la parole. Je m'appelle Julian Albanese et je suis étudiant.
La Capilano Students Union tient à remercier le président, l'honorable Jim Peterson, les membres du comité, ainsi que nos coparticipants, de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole sur cette très grave question qu'est la réduction du déficit national.
Ce projet de réduction du déficit et d'endiguement de la dette nationale nous contraint à réviser nos priorités et nos valeurs nationales. Le comité est déjà au fait de la cruelle réalité économique à laquelle nous sommes maintenant confrontés: il faut réduire le déficit, rembourser la dette, réduire les dépenses gouvernementales, décentraliser le gouvernement et que sais-je encore.
L'économiste en chef adjoint de la Banque de Montréal, Rick Egelton, est venu vous déclarer, il y a trois semaines, que si nous ratons le virage économique, si nous progressons trop lentement, nous allons être sévèrement réprimandés par les marchés financiers. «Vous coupez, ou alors...», vous a-t-il dit.
Ou alors quoi, monsieur le président? Aujourd'hui, en Colombie-Britannique, 46 000 jeunes de 19 à 24 ans vivent de l'aide sociale et 13 000 autres sont à l'assurance-chômage. Environ 20 p. 100 de mes camarades n'ont pas d'emploi lucratif et n'ont aucun espoir d'en obtenir un. Et pourtant, mardi, la Banque de Montréal a annoncé des profits records de 986 millions de dollars, dans une année où elle a congédié 1 400 employés. Nous sommes en période de croissance économique sans création d'emplois. Que peut-on faire de plus pour punir les jeunes canadiens? Rien! Voilà la réalité dure et crue que connaît notre jeunesse.
Mais laissons de côté pour un instant cette nouvelle réalité économique pour ne tenir compte que des bons vieux principes, simples. Si le gouvernement fédéral s'est fixé pour priorité de réduire aveuglément le déficit, le Canada deviendra un pays sans éducation, un pays où l'on aura faim, un pays de sans abri, un pays où de multiples emplois auront disparu et où nous vivrons dans la pauvreté. Mais le Canada, c'est nous! Avant, nous avions une société juste et nous voulons restaurer cette société.
Bien que la question d'aujourd'hui porte sur la réduction des dépenses - et nous sommes prêts à vous dire où vous pourriez effectuer de telles réductions - une chose est claire: vous ne devez pas réduire les Transferts canadiens en matière de santé et de programmes sociaux. En fait, nous recommandons même le maintien des TCSPS au niveau de 29,7 milliards de dollars, parce que si l'on combattait le déficit en réduisant les budgets consacrés aux programmes de soins de santé, aux programmes sociaux et à l'éducation, on se trouverait à imposer aux Canadiens un lourd tribut dont ils pourraient ne jamais parvenir à se remettre.
Les dépenses sociales illustrent pleinement ce que grandir et vivre au Canada veulent dire. Le Canada est évocateur de mots comme compassion et participation, et les Canadiens ne doivent pas devenir les dégâts accessoires de la guerre menée contre le déficit.
Cela étant dit, parlons à présent de la question plus vaste qui nous est soumise. Nous recommandons au gouvernement d'adopter trois stratégies fondamentales afin d'enrayer le déficit. D'abord, il doit favoriser la création d'emplois en améliorant l'accès à l'enseignement et en promulguant des activités économiques viables qui ménageraient une place importante à la recherche et au développement ainsi qu'à la haute technologie. L'avantage à long terme que présente la création d'emplois, c'est qu'elle réduit la dépendance des programmes sociaux.
Deuxièmement, il convient de modifier la politique monétaire canadienne pour infléchir les taux d'intérêt et stimuler l'activité économique.
Troisièmement, il faut réduire l'écart entre le fardeau fiscal des particuliers et celui des sociétés. Au cours des récessions précédentes, les Canadiens ont accepté que leur salaire soit bloqué, à l'avantage de leurs employeurs, et ils ont supporté une fiscalisation plus lourde pour aider les plus désavantagés d'entre nous. Et voilà que le gouvernement fédéral est de nouveau étranglé par les marchés financiers. Mais il est injuste, à l'heure où les sociétés réalisent des profits de plus de 21 p. 100 et où leur taux d'imposition est inférieur à 7 p. 100, de se décharger, une fois de plus, sur les Canadiennes et les Canadiens.
Que va nous révéler ce budget en matière de priorités et de valeurs pour le Canada? Doit-on croire dans les agences d'appréciation d'obligations, comme Moody, ou dans le Canada? Doit-on croire en la concurrence avec la main-d'oeuvre enfantine étrangère, sous-produit de la mondialisation de l'économie, ou au Canada? Doit-on croire en un Canada uni et universel? La réponse est oui, il faut croire au Canada.
On a dit aux membres du comité que la dette du Canada est inacceptable, mais ce n'est le cas. Ce qui est inacceptable, c'est l'érosion de l'universalité des soins de santé ainsi que la disparition de programmes sociaux viables et d'un enseignement post-secondaire accessible sur tous les plans.
Mais alors, que dire de la réduction de 4 milliards de dollars que l'on se propose d'effectuer aux TCSPS? Eh bien non, vous ne pouvez pas arracher ce qui constitue le coeur du Canada, pas même un petit peu.
Le président: Merci, monsieur Albanese.
De la Downtown Granville Tenants Association, à présent: Mme Sherrill Gullickson.
Mme Sherrill Gullickson (directrice générale, Downtown Granville Tenants Association): Merci très sincèrement de nous avoir donné l'occasion de venir exprimer nos préoccupations et de vous présenter les problèmes qui minent notre travail, travail dont l'objet est de mettre un terme à la clochardise et d'éradiquer la pauvreté au Canada. Nous souhaitons que le Canada continue de prêcher en faveur de la paix et d'un niveau de qualité de vie élevé dans le monde entier, et nous voulons qu'il demeure un territoire uni dont tous les habitants peuvent se réaliser et tendre vers l'excellence.
La Downtown Granville Tenants Association est un organisme sans but lucratif ayant pour mission essentielle de veiller à ce que les résidents du sud du centre-ville de Vancouver ne soient pas relogés à cause d'un réaménagement du secteur. Nous apportons une aide de première ligne à tous ceux et à toutes celles qui éprouvent de la difficulté à faire respecter leurs droits civiques. Par exemple, nous les aidons dans les cas de règlement de différends entre propriétaires et locataires, d'accès aux procédures et aux règlements administratifs, aux services de santé, etc.
Nous constituons une première étape en matière de renseignements et de services d'aiguillage pour les résidents du secteur. Ces personnes sont parmi les plus pauvres du Canada; elles ont besoin de services de protection et elles doivent aussi avoir la possibilité d'occuper des logements adéquats et abordables, de recevoir tout l'éventail de soins médicaux d'un seul et même organisme, de bénéficier d'une formation susceptible d'assurer leur réemploi et, plus important encore, de réclamer l'égalité qui leur revient de plein droit dans le deuxième pays le plus riche du monde.
On nous a demandés de répondre à trois questions lors de cette audience et c'est ce que je fais dans l'ordre dans lequel elles nous ont été posées.
D'abord, quel objectif faut-il adopter pour réduire le déficit et de quelle façon pourra-t-on le réaliser dans les meilleures conditions? Chaque semaine, dans le cadre de mon travail, je côtois de plus en plus de Canadiennes et de Canadiens sans défense, vulnérables, affamés et sans abri. Ce sont des jeunes, des personnes d'âge moyen et des personnes âgées. Ce sont des hommes, des femmes et des enfants. Il s'agit rarement de criminels, d'inadaptés, de personnes dangereuses ou méchantes. Très souvent, il s'agit de gens qui souffrent, qui sont handicapés, qui sont atteints de maladies mentales ou qui n'ont simplement pas les compétences en demande qui leur permettraient de trouver un emploi, même si certains d'entre eux sont diplômés d'université. J'ai affaire avec ceux qui constituent la pauvreté systémique.
Même si notre association oeuvre essentiellement auprès de personnes qui n'ont que peu voire aucune possibilité d'améliorer leur situation, nous comprenons les notions de profit, de réduction de la dette, de reddition de comptes - pas uniquement en ce qui concerne les programmes et les budgets gouvernementaux, mais aussi pour ce qui est de la fiscalité; nous comprenons aussi la notion de services responsables et de qualité, que des organismes administratifs et autres offrent aux Canadiens, grâce à des subventions, etc.
Nous nous rendons bien compte que l'argent des subventions destinées aux pauvres se perd dans les dédales administratifs. Malheureusement, toutes ces questions ne sont pas populaires dans les médias et il est facile de reprocher aux pauvres de ne pas essayer plus fort.
Dans sa préface du sommaire des documents de discussion du gouvernement du Canada, publié en septembre 1994 sous le titre La sécurité sociale dans le Canada de demain, M. Axworthy écrit: «De toute évidence, nos priorités économiques et sociales sont indissociables» et il rajoute «Le statu quo ne suffit plus à la situation».
Ces remarques sont tout à fait appropriées et elles me donnent à penser que nous ne sommes pas prêts de renoncer à tout, au nom de la modernisation et de la refonte de nos modus operandi en vue de réduire nos coûts sociaux.
Nous sommes le deuxième plus riche pays du monde. Derrière cela, je vois les chiffres qui parlent. Ça veut dire que tant que nous ne pouvons garantir à toutes les Canadiennes et à tous les Canadiens un revenu suffisant ainsi que de véritables programmes universels de sécurité sociale, d'éducation et d'emploi, nous devrons faire passer le déficit au second plan.
Je n'ai pas inscrit dans mon plan d'action que le Canada doit être le plus riche pays du monde. Ce que je veux, c'est simplement habiter dans le meilleur pays du monde. Je vous demande d'essayer d'abord de régler notre problème de déficit humain. La menace que la technologie fait planer sur nous, à l'aube du deuxième millénaire, est telle que tout employé court le risque de perdre son emploi, de subir des revers économiques et de ne plus disposer d'aucun filet de sécurité qui lui aurait évité, à lui et à ses enfants, de tomber trop bas.
Afin de réduire le déficit, j'invite le Comité permanent des finances à recommander très fortement une chose: il faut exiger que les sociétés devant 5 millions de dollars ou plus en impôts différés règlent les sommes dues, et que ces sommes soient directement appliquées à la réduction du déficit. Si, en vue de parvenir à réduire le déficit, nous devons priver les pauvres du Canada de nourriture, de logements adéquats abordables, de soins de santé, de soutien du revenu, d'éducation et d'emploi, il est tout à fait normal que nous demandions à nos mégasociétés de payer ne serait-ce que leur dû, établi d'après leurs chiffres d'affaires et leurs bénéfices réels.
Si l'on se fonde sur les données de 1990 à 1993, qui n'englobent pas tout, il s'agirait de 100 milliards de dollars. Depuis cette époque, nous nous sommes enfoncés plus profondément encore dans la récession, ce qui veut dire que le montant d'impôts différés est encore plus élevé. Je vais vous donner plusieurs exemples.
En 1992, Alcan Aluminium a différé 995 milliards de dollars américains en impôt. En 1992, B.C. Tel en a différé 302... Excusez-moi, il ne s'agit pas de milliards mais de millions... 302,4 millions de dollars. Et puis il y a tous les autres. J'ai tous ces chiffres avec moi, je vous les donnerai plus tard.
Le président: Je ne veux pas vous interrompre, vous aurez la possibilité d'y revenir plus tard.
Mme Gullickson: Parfait, je vous remercie.
Le président: Peut-être pourriez-vous limiter vos remarques liminaires aux principaux aspects que vous voulez que nous prenions en compte.
Mme Gullickson: J'attire votre attention sur la deuxième question qui est très trompeuse et qui nous enferme dans un cercle vicieux. Nos grandes entreprises ne se contentent pas de différer leurs impôts, elles font la promotion du libre-service bancaire, des stations libre-service, des buffets froids, des paiements par téléphone, etc. On nous incite à utiliser toutes ces méthodes modernes, pratiques, alors que ceux et celles qui occupaient avant ces emplois de premier échelon se retrouvent à l'aide sociale.
Nous n'économisons rien en achetant à Costco, à Wal-Mart ou dans les stations libre-service, parce qu'il y a les coûts cachés que représente le maintien au bien-être social des responsables de jeunes familles qui, avant, avaient un emploi. Je ne dénigre pas les principes de rentabilité et de bonnes pratiques commerciales, mais il n'est ni bon ni raisonnable que nos gouvernements, fédéral et provinciaux, aient à assumer toute la charge du bien-être social pendant que les riches s'enrichissent davantage; et cela, je ne peux le tolérer.
Peut-être que les responsables gouvernementaux adopteront envers les sociétés qui, de tout temps ont été impunément irresponsables, la même intransigeance que pour la réforme du régime d'assistance sociale. Je recommande la suppression de tous les allégements fiscaux accordés au titre des programmes de création d'emplois et de croissance économique, sauf dans le cas des programmes donnant effectivement lieu à l'embauche de Canadiens, et ce, tant que le déficit n'aura pas été entièrement jugulé.
Le gouvernement fédéral est axé sur certains aspects bien particuliers, comme le dédoublement des services, la concurrence loyale, la notion d'autorité raisonnable, la privatisation, la sélection naturelle et la mise en oeuvre de programmes traduisant les besoins et les désirs des Canadiennes et des Canadiens. J'estime qu'il est temps d'aller plus loin et d'adopter des mesures qui bénéficieront uniquement aux entreprises consciencieuses et socialement responsables, offrant des emplois durables, des stages de formation réalistes et des programmes de perfectionnement.
Le gouvernement du Canada et les sociétés qui forment notre base économique doivent veiller à ce que les employés canadiens prospèrent en même temps que leurs employeurs. Si tel était le cas, les gens ne se trouveraient pas exclus du marché du travail à cause de changements touchant à leur description d'emploi ou à leurs compétences monnayables.
Le président: Je me demande pour combien de temps encore vous en aurez. J'espérais que tout le monde s'en tiendrait à des remarques liminaires de trois minutes.
Mme Gullickson: Très bien, je vais m'arrêter là.
Le président: Nous vous redonnerons l'occasion d'y revenir. Je vous remercie.
M. Peter Robinson (Community Based Full Employment): Je vous demande de m'interrompre dès que vous le déciderez. Sinon, je me propose de lire mon mémoire. J'ai aimé les présentations de Julian et de Sherrill qui m'ont précédé. La mienne abonde dans le même sens.
Nous avons tous, vivace en nous, le désir de faire quelque chose d'important pour le peuple du Canada. Pour l'heure, le peuple du Canada aspire à la stabilité, et vous conviendrez peut-être avec moi qu'il la mérite.
La torpeur associée aux enjeux économiques que sont l'inflation, le déficit et la dette, constitue une grande source d'instabilité. Pour sortir de cette torpeur, il est nécessaire de réorienter l'économie canadienne. Nous devons donc articuler cette réorientation tout en demeurant responsables au plan économique.
Dans la présentation que nous avons faite au comité l'année dernière, nous avons insisté sur la nécessité d'effectuer des changements structurels. À l'époque, la situation économique paraissait instable pour les Canadiens. Mais voilà que cette situation économique de l'année dernière nous semble à présent stable. L'impression d'instabilité n'a fait que s'accentuer et nous espérons que, grâce au travail que vous avez entrepris, les Canadiennes et les Canadiens ressentiront une plus grande stabilité dans un an d'ici.
Les points de vue sur notre situation actuelle varient. Community Based Full Employment accorde la priorité à l'instauration d'une économie saine par le biais d'un recours au crédit plutôt qu'à des programmes à perte, en vue de maximaliser la capacité de travail des Canadiens. Notre mémoire traite de la situation sous cet angle.
Définitions pour un retour à la réalité. Dans les discussions que nous avons eues sur le thème de l'économie canadienne, nous avons déformé et limité le sens des mots. Je vais vous en donner quelques exemples.
«Réduction du déficit» signifie à présent réduction des dépenses ou augmentation des impôts. Cette définition n'englobe pas la notion d'instauration d'une économie saine. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, Graham Towers, Gouverneur de la Banque du Canada, est parvenu à créer une économie saine et à réduire le fardeau de la dette nationale et des dettes provinciales.
«Réforme des programmes sociaux» signifie à présent réduction des programmes associés au filet de sécurité sociale. Il n'est pas question de déterminer la meilleure façon d'aider les gens à se remettre sur pied après avoir trébuché.
Le mot «décentralisation» a perdu tout son sens. Le budget de l'année dernière a représenté une étape importante dans le sens de la décentralisation. À cause des réductions du financement fédéral, les provinces sont à présent responsables des programmes sociaux. La disparition de 45 000 postes de fonctionnaire affaiblit le gouvernement fédéral. Après nous être nous même blessés, nous continuons à parler de la nécessité de maintenir un gouvernement central fort.
«Chômage», «sous-emploi», «aide sociale» et «pauvreté» concernent des personnes qui éprouvent des difficultés méritées. Les définitions qui y sont appliquées n'ont plus rien à voir ni avec les adultes ni avec les enfants; on oublie les Doug, John, Kira, Chris et Maxine.
Toutes ces données statistiques nous indiquent que les gouvernements sont en train de créer une société dysfonctionnelle. Ce qu'il faut faire, c'est admettre le déni de réalité qui a donné lieu à la déformation et à la réduction du sens donné à ces définitions, et redonner leur plein sens aux mots employés dans les discussions sur l'économie.
Nous sommes en train de vivre la Troisième guerre mondiale. C'est la guerre entre les riches et les pauvres, une guerre qui redouble d'intensité. Le Canada ressemble à un champ de bataille avec, d'un côté, les groupes d'intérêt particulier et, de l'autre, la population.
Le nombre et le droit de vote sont garants de victoire pour le peuple mais, grâce à leurs ressources importantes et à l'appui des gouvernements, les groupes d'intérêt particulier croient qu'ils peuvent sortir vainqueurs. Lors de la dernière élection générale, le peuple du Canada a complètement décimé le parti gouvernemental qui avait accordé la priorité aux intérêts particuliers. Il a préféré voter pour un gouvernement qui lui avait promis des emplois et une économie saine.
Mais voilà que les groupes d'intérêt particuliers ont repris la main haute. Le spectacle de ce combat dégoûte de nombreux Canadiens. Ils sont nombreux en effet à se désintéresser de la politique. Mais s'ils ne participent pas pleinement et s'ils ne font pas pleinement bénéficier le Canada de leurs compétences, la réduction du déficit et le règlement de la dette seront impossibles.
La poursuite de cette guerre ne peut qu'aboutir à l'effondrement complet de l'économie canadienne ou à l'élimination d'un autre grand parti politique, ou aux deux. On dit que ce sont les groupes d'intérêt particulier qui financent l'activité politique et que le peuple, lui, vote. La sagesse veut que l'on trouve une réponse valable pour tout le monde.
Le président: Merci, monsieur Robinson. Permettez-moi simplement...
M. Robinson: Puisque j'ai fait la comparaison avec la Deuxième guerre mondiale, je dirais qu'il est à présent question de trouver la voie du milieu qui nous conduira à la paix. Et cette voie vers la paix, d'aucuns parviennent à la trouver dans de nombreuses situations très délicates, ailleurs dans le monde. La stabilité exige que l'on ne permette pas aux groupes d'intérêt particulier de prendre le dessus sur le peuple du Canada.
Le président: Merci, monsieur Robinson. Nous vous redonnerons la parole et vous aurez de nouveau l'occasion de nous parler de vos aspirations.
À présent c'est au tour de M. Fred Pawluk.
M. Fred Pawluk (présentation à titre personnel): Merci, monsieur le président et merci également à mes coparticipants.
Je m'exprime ici en mon nom et je voudrais vous faire part de mes observations, celles d'une personne inspirée par le désir de voir notre situation économique s'améliorer. J'aimerais également formuler plusieurs recommandations à votre comité des finances sur la façon de relancer l'économie.
Je crois savoir que Statistique Canada ventile ainsi notre dette totale: la dette fédérale accumulée est due, pour moitié, aux intérêts accumulés, pour 44 p. 100 aux recettes non perçues et aux impôts différés et pour 6 p. 100 aux programmes sociaux.
Eh bien, monsieur le président, nous sommes en présence d'une crise de crédibilité, et pour plusieurs raisons que je vais vous énoncer.
Premièrement, M. Martin, notre ministre des Finances, et le gouvernement en place n'ont pas respecté les promesses énoncées dans le Livre rouge.
Les grandes entreprises ont perdu leur crédibilité pour avoir exercé une influence démesurée dans les prises de décisions gouvernementales. D'ailleurs, si ces décisions et ce genre d'influence avaient été bénéfiques dans le passé, nous n'en serions pas là aujourd'hui.
L'insistance que la Banque du Canada accorde à la maîtrise de l'inflation et à des taux d'intérêt élevés est préjudiciable à l'économie canadienne.
La désindustrialisation du Canada est due aux politiques que nous avons toujours menées. En fait, des 24 nations membres de l'OCDE, nous sommes celle qui s'est la plus désindustrialisée au cours des 10 dernières années, à l'exception de la Turquie.
Il est nécessaire de répondre aux besoins des Canadiennes et des Canadiens, notamment de ceux qui sont employés par les PME et qui vivent, résident, dépensent et investissent ici, au Canada.
Je vais vous recommander les réformes exhaustives qu'il convient d'effectuer. Je dirais que le Canada, petite puissance économique, doit adopter une attitude positive que j'assimilerais à celle d'une petite locomotive, pouffant le long de son chemin de fer: «Je crois que je peux, je crois que je peux, je crois que je peux». Disons-nous que nous pouvons, encore et toujours, et nous y arriverons. Je ne suis absolument pas intimidé par la mondialisation des marchés ni par ceux qui spéculent sur l'argent.
Les aspects de la réforme que je recommande concernent, tout d'abord, la politique monétaire de la Banque du Canada. C'est à nous, gouvernement et contribuables du Canada de déterminer les politiques de la Banque du Canada, et pas l'inverse. Donc, nous devrions disposer d'une politique spécifiquement canadienne sur le plan des taux d'intérêt, afin de parvenir à stimuler notre économie.
Deuxièmement, la Loi sur les banques permet à nos banques à charte de prêter jusqu'à 20 fois les sommes qu'elles ont en épargne. Et ce phénomène a pris de l'ampleur au fil des ans, à cause d'ententes de faveur conclues par le secteur bancaire pour influencer le gouvernement fédéral.
Les banques sont autorisées à imprimer de l'argent, monsieur le président. La Banque du Canada devrait disposer du même droit et elle devrait l'exercer à la place des banques à charte. Ainsi, on parviendrait à compenser les choses sans aggraver l'inflation et sans en créer.
Nous devrions supprimer l'échappatoire fiscale contenue dans la Loi de l'impôt sur le revenu, qui permet aux sociétés transnationales de déclarer leurs bénéfices à l'étranger; nous devrions examiner les méthodes de fixation de prix de cession pour que ceux-ci ne donnent pas lieu à une augmentation des coûts pour les entreprises exploitées au Canada.
Pour ce qui est de la Loi de l'impôt sur le revenu, on m'a dit que, pour chaque dollar qu'il en coûte pour effectuer une vérification, nous récupérons 21 $. Nous devons travailler dans ce sens. N'oubliez pas que chaque règlement, chaque règle, chaque décision prise par le Comité permanent des finances n'est bonne que dans la mesure où elle est appliquée. Si le gouvernement fédéral ne veut pas se doter des moyens nécessaires pour appliquer ses politiques, vous n'obtiendrez jamais aucun résultat, peu importe la politique que vous mettrez en oeuvre.
Afin d'empêcher que deux ou trois experts financiers ne paralysent notre économie, ou celle d'un autre pays, il faut mettre en oeuvre la taxe Tobin sur les spéculations internationales au taux de 0,50 p. 100.
On ne s'est pas intéressé, contrairement à ce qui était indiqué dans le Livre rouge, à la question des fiducies familiales. Nous sommes la seule nation industrialisée n'imposant pas de droits successoraux.
J'en ai presque terminé.
Pour ce qui est de la taxe de 0,25 p. 100 sur les transactions financières, on a dit...
Le président: Parfait, nous le comprenons.
M. Pawluk: ...à propos du remplacement de la TPS et de la TVP, qu'elle pourrait permettre de rapporter 6 milliards de dollars de plus au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux. Il faut redonner au contrôleur général du Canada, dont les pouvoirs ont été considérablement réduits il y a quelques années, les pouvoirs voulus pour empêcher que les rats ne quittent le navire. Il faudrait que son service soit beaucoup plus puissant pour qu'il dénonce les gaspillages d'argent. Il faut aussi éliminer la possibilité de déduire les contributions financières aux partis politiques.
Le président: Parfait, qu'est-ce qu'il y a ensuite? Vous pourriez simplement nous en donner la liste, puisque nous savons ce que cela signifie dans chaque cas.
M. Pawluk: J'en ai terminé, il me reste simplement à conclure.
Le président: Bien.
M. Pawluk: Monsieur le président, il convient de mettre en oeuvre de nouvelles idées en matière de réforme des politiques économique et monétaire.
Le président: Très bien, monsieur Pawluk. Je vous remercie.
Nous allons à présent entendre la Vancouver Foundation, représentée par M. Richardson, M. Mulcaster et M. Buchanan. Je crois comprendre que c'est le président, M. Buchanan, qui va parler.
M. Bruce Buchanan (président, Vancouver Foundation): Merci. Je m'appelle Bruce Buchanan et je suis président du conseil de la Vancouver Foundation. Le président et les membres du conseil de la Vancouver Foundation sont tous des bénévoles.
La Vancouver Foundation est une fondation locale et, en tant que telle, elle reçoit et détient des fonds de dotation de particuliers, directement ou par l'intermédiaire d'organismes à but non lucratif. Tous ces donateurs croient en l'avenir du Canada.
La Vancouver Foundation a été établie il y a cinquante ans. Avec le temps, nous avons accumulé des investissements qui dépassent à présent les 400 millions de dollars. Plus de la moitié de ce montant est investi dans des titres de divers ordres de gouvernement. Le reste est essentiellement investi dans des valeurs mobilières d'entreprises canadiennes.
Nous sommes maintenant la plus importante fondation au Canada et la quatrième plus grande fondation locale en Amérique du Nord. Je crois que nous pouvons en donner tout le crédit à la clairvoyance de ceux qui l'ont mise sur pied il y a cinquante ans.
Même si la ville de Vancouver apparaît dans le nom de la fondation, les revenus d'investissement sont répartis, chaque année, entre divers organismes sans but lucratif, partout en Colombie-Britannique, organismes qui représentent des domaines d'intérêt variés.
Monsieur le président, je vais à présent demander à Richard Mulcaster, le président de la fondation, de vous décrire le travail de celle-ci et de vous faire part de certaines remarques à la suite des questions posées par le comité permanent.
M. Richard Mulcaster (président et directeur général, Vancouver Foundation): Merci. Comme vient de le dire le président du conseil, la Vancouver Foundation est une fondation locale, qui administre différents types de fonds au nom de la collectivité. Elle administre des fonds de dotation d'organismes particuliers comme les universités, les organisations sans but lucratif désireuses de disposer d'une caisse que nous administrons pour elles. Ces fonds en fiducie leur permettent d'acquérir l'autonomie nécessaire pour ne plus dépendre des campagnes de financement ni des subventions gouvernementales.
La Vancouver Foundation gère ses propres fonds discrétionnaires grâce auxquels elle consent des subventions aux organismes sans but lucratif.
Les fondations sont, en grande partie, accordées selon un processus qui dépend de la participation de la collectivité, de l'avis de comités consultatifs. Quand il est question de financer des projets et des programmes un peu partout en Colombie-Britannique, nous faisons intervenir un grand nombre de personnes, de différents secteurs d'activités.
Pour vous donner une idée de notre envergure, de notre carrure, nous vous avons fait remettre notre rapport annuel, qui décrit les divers domaines d'intérêt dans lesquels nous sommes actifs ainsi que les subventions variées que nous avons accordées l'année dernière.
Sachez que nous nous intéressons essentiellement aux arts et à la culture, à la santé et au bien-être social, à l'enseignement, aux jeunes, aux enfants et à la famille, à l'environnement et à la recherche médicale.
Le processus de financement que nous appliquons pour aider les organismes locaux, les groupes sans but lucratif, à s'acquitter de leur travail, repose souvent sur des alliances que nous concluons avec d'autres fournisseurs de fonds. Nous pratiquons le cofinancement avec les trois ordres de gouvernement, le fédéral, le provincial et le municipal, dans le cadre de leurs programmes de subvention. Il arrive, parfois, que nous financions l'élaboration d'un projet et que nous incitions ensuite le gouvernement à y participer, et il arrive aussi que nous financions simplement, au côté de ces gouvernements.
Nous encourageons aussi les autres fondations, familiales et corporatives, à répondre aux besoins de la collectivité.
Nous travaillons bien sûr avec des organismes caritatifs, comme Centraide, qui est d'ailleurs le seul à financer les frais de fonctionnement; pour notre part, nous préférons faire du financement de projets.
Ces alliances, fort bien établies, sont essentielles si l'on veut répondre aux besoins du secteur sans but lucratif. Elles confèrent un maximum de moyens aux groupes communautaires désireux d'obtenir des fonds: l'argent attire l'argent. Elles favorisent une plus grande diversité d'idées, de projets, d'initiatives.
En outre, nos programmes s'accompagnent d'un certain contrôle de la qualité grâce à l'évaluation des initiatives et des projets locaux.
Nous redoutons, dès lors, un affaiblissement des alliances dont je viens de vous parler. C'est ce qui arrive quand un des partenaires ne peut plus ou ne veut plus offrir le même appui qu'avant. C'est ce qui arrive avec le gouvernement à cause de sa politique de rigueur.
Cela nous inquiète, car si le gouvernement réduit son niveau de dépense, les autres partenaires devront payer plus.
Notre mouvement des fondations locales représente l'une des formes de philanthropie, au Canada et aux États-Unis, qui connaît actuellement la plus grande croissance. Nous comptons environ 70 fondations locales. De nombreuses personnes dans cette salle, venant d'autres parties du Canada, ont déjà entendu parler des fondations locales desservant leurs régions. Il faut que celles-ci prennent de l'expansion, et rapidement, parce qu'elles sont une partie de la réponse aux besoins de la collectivité. La constitution d'une capacité locale est essentielle au Canada d'aujourd'hui et de demain.
Quant aux questions qui nous ont été posées pour la séance d'aujourd'hui, nous savons qu'il faut, sans tarder, s'attaquer à la réduction du déficit. C'est ce qui est prévu et les collectivités se préparent à cette éventualité.
Nous comprenons fort bien qu'il convient d'accroître notre capacité en ce qui a trait à l'environnement, à l'emploi et à la croissance économique. Mais c'est précisément ce que font les fondations locales grâce à leurs ressources humaines et financières.
Le président: Je n'aime pas interrompre les gens, mais si vous n'êtes pas parvenu à nous faire part de toutes vos recommandations, nous pourrions sans doute vous redonner la parole plus tard.
M. Mulcaster: Bien sûr.
Le président: Merci beaucoup.
De l'université de Colombie-Britannique, le Dr Bressler et le Dr Hardwick.
M. Bernard H. Bressler (chef et professeur, Département d'anatomie, Université de Colombie-Britannique): Nous vous avons préparé un mémoire que nous avons laissé à la porte. J'ai essayé d'en extraire certaines parties, pour que David et moi-même puissions vous communiquer notre message en nous en inspirant.
Je vais vous en lire certains passages.
Partout dans le monde, les gouvernements sont les plus importants fournisseurs de fonds de la recherche fondamentale de tout type, notamment dans les sciences physiques, les sciences sociales et les sciences de la vie. À cet égard, le Canada ne fait absolument pas exception.
Ces dépenses ont pour objet de conférer un mode de vie de grande qualité à nos compatriotes et de nous aider à demeurer concurrentiels sur les marchés internationaux.
Le rendement des investissements publics dans la science fondamentale est énorme. Le principal investisseur, le peuple canadien, en est également le bénéficiaire. Et celui-ci le comprend bien, comme en témoigne un récent éditorial publié dans le Globe and Mail, que nous avons joint à notre mémoire.
Nous exhortons le gouvernement en place à adopter des politiques axées sur l'avenir et qui ne se veulent pas simplement des solutions miracles destinées à régler la crise actuelle. Voyons où nous en sommes de la situation au Canada. De 1979 à 1989, les dépenses brutes en recherche et développement ont diminué de 1,36 p. 100 qu'elles étaient en 1984, à 1,29 p. 100 en 1989. En 1994, elles n'étaient encore que de 1,54 p. 100. Si l'on compare avec ce que font d'autres pays, où l'on considère comme minimum un niveau de dépenses de 2 p. 100, il faut savoir que l'Allemagne dépense près de 3 p. 100, le Japon près de 3 p. 100 et la France, le Royaume Uni... et même des pays comme la Finlande, la Suède et la Corée du Sud, dépensent plus de 2 p. 100 en recherche et en développement.
Par comparaison à ce que font nos partenaires de l'OCDE, en 1991 nos dépenses brutes en recherche et en développement, exprimées par rapport à notre PIB, nous classaient au quatorzième rang sur 24 pays, et nous avons considérablement moins dépensé que la plupart des pays du G-7. Plus récemment, les pays aux économies émergentes de la Ceinture du Pacifique, comme la Corée, Singapour et Taïwan, se sont fixé, pour leurs dépenses en recherche et en développement, des objectifs de 2,5 p. 100 de leur produit intérieur brut.
Notre mémoire renferme plus de détails à ce sujet.
Le Canada doit reconnaître l'importance de la recherche et supprimer la menace qui plane sur les efforts qu'il déploie à ce chapitre. Nous ne devons pas oublier que, depuis la Seconde guerre mondiale, nous avons mis sur pied, comme d'autres pays, un système très au point visant à faire progresser la recherche scientifique dans les universités, les écoles de médecine, les laboratoires privés, les centres de recherche indépendants et les laboratoires d'État. Au Canada, le secteur privé a également contribué à l'effort de R et D, mais pas dans la mesure où il l'aurait pu, et je pense que c'est là le bât blesse.
Dans le cas de nos universités et collèges, la recherche dépend entièrement de ce que font nos chercheurs et de l'examen scrupuleux du bien-fondé des recherches, d'après une évaluation des publications scientifiques et autres réalisations. La recherche présente l'avantage d'établir un lien avec l'enseignement et la formation d'un personnel hautement qualifié. Mais je pense que nos collègues de Capilano y ont fait allusion. Ces deux questions sont indissociables... si nous voulons nous doter d'une politique qui demeurera valable bien après le début du XXIe siècle.
S'ils veulent que nous demeurions concurrentiels à l'échelle internationale, les gouvernements doivent être conscients des coûts d'infrastructure qu'exige la conduite de la recherche et la formation de jeunes. Si nous réduisons les budgets des conseils subventionnaires et les infrastructures servant à la recherche dans les universités et les collèges, nous nous trouverons, selon nous, à nous priver d'un remède tout à fait réaliste susceptible de fournir une solution saine, stable et durable à nos problèmes d'ordre économique. Nous craignons que vous ne coupiez ainsi le tuyau qui nous permet d'alimenter notre secteur industriel avec les personnes idoines, que vous ne priviez les entreprises qui germent grâce à nos institutions des ressources qu'il leur faut, ressources que nous formons.
Je vais m'arrêter ici pour permettre à David de formuler quelques remarques au sujet du système de santé.
Cela fait 3 minutes 34 secondes.
Le président: Et vous êtes à bout de souffle. J'ai été heureux de vous entendre dire ce que vous nous avez dit.
Dr David F. Hardwick (Université de Colombie-Britannique): Cinq points très rapides. D'abord, je tiens à remercier le comité de nous avoir donné la possibilité de présenter... et également de prendre note du fait que la réduction du financement de la recherche médicale, l'année dernière, a été inférieure à celle effectuée dans les autres secteurs de recherche... et nous vous en remercions. Cela profite à l'université ainsi qu'aux étudiants, aux chercheurs et à l'économie en général. Ce fut une décision sage qu'il convient de reconduire cette année.
Premièrement, il faut se préparer pour l'avenir tout en économisant aujourd'hui. Regardez de très près ce qui est dit dans le Rapport du Conseil consultatif national des sciences et de la technologie, le CCNST. Il est très équilibré et, selon nous, très bien fait. Nous recommandons que le gouvernement envisage de créer un comité du Cabinet chargé des sciences et de la technologie, qui serait chargé de favoriser la réalisation des objectifs énoncés par le Dr Bressler.
Deuxièmement, nous devons nous ranger du côté des gagnants. Personne ne parie sur les perdants. Si vous devez appuyer la recherche, comme nous nous attendons à ce que vous le fassiez; il faut que celle-ci soit soumise à un examen rigoureux par les pairs, que ce soit par le gouvernement à l'interne ou par des organismes externes, appartenant à l'industrie ou au milieu universitaire. Pour l'instant, il n'y a pas d'uniformité et il faut changer les choses pour s'assurer que les règles du jeu sont équitables.
Il faut encourager le partenariat. Le Dr Bressler en a parlé à propos de l'industrie pharmaceutique et d'autres industries, parce que le partenariat est particulièrement important pour la recherche médicale. Ce secteur connaît une très forte croissance, la plus rapide en fait du domaine de la santé, qui va se poursuivre. Nous nous devons de nous intéresser de plus près à ce segment, pour nous assurer que nous bénéficions pleinement des progrès réalisés, tout comme on le fait dans la grande démocratie voisine que sont les États-Unis.
Il faut encourager la recherche dirigée, mais aussi faciliter la recherche personnelle. L'un des grands inconvénients qu'il y a de ne financer que la recherche dirigée tient au fait qu'on finit par avoir tendance à éclipser les chercheurs créatifs, novateurs, travaillant à titre personnel. C'est là le meilleur moyen de disséminer une équipe de chercheurs. Au bout du compte, on perd ce qui fait l'âme de la recherche.
Je recommanderais, en dernier lieu, que l'on dote le ministère de la Santé des moyens nécessaires pour lui permettre d'intervenir financièrement. Ce ministère va transférer une grande partie de ses activités aux ministères provinciaux, à cause des réductions budgétaires. Cela semble inévitable. Dès lors, il ne sera pas en mesure d'exercer son autorité structurelle par le truchement du financement qu'il accorde. Donc, il lui faut pouvoir exercer une autre forme d'autorité pour imposer, d'une certaine façon, le respect nécessaire au maintien de l'universalité de notre régime de soins de santé.
On pourra y parvenir en se fixant des objectifs et en adoptant des critères et des normes d'évaluation de la technologie à l'échelon national. Ainsi, la pression publique pourra s'exercer sur les différents gouvernements, car vous ne disposerez plus ni des fonds ni de l'autorité structurelle nécessaire pour ce faire.
Je serais très heureux de réagir à vos commentaires sur l'un des ces aspects et de vous faire part d'autres suggestions gratuites, si nous en avons le temps plus tard.
Le président: Vous en aurez certainement le temps. Comme tout le monde, c'est une promesse politique.
Des voix: Ah, Ah!
Le président: Kirk Lawrie, à présent, de la Chambre de commerce de Richmond.
M. Kirk Lawrie (Chambre de commerce de Richmond): Monsieur le président, au nom de la Chambre de commerce, je vous remercie de nous donner l'occasion de prendre la parole devant ce comité. À cause du peu de temps dont je dispose pour répondre à vos trois questions, je serai bref. J'espère pouvoir vous donner plus tard les renseignements complémentaires dont vous pourriez avoir besoin.
Pour ce qui est des questions que vous nous avez posées, nous sommes évidemment convaincus que l'objectif ne doit pas être de réduire le déficit, mais bel et bien de l'éliminer et d'enchaîner par une réduction annuelle de la dette jusqu'au moment où nous aurons regagné la maîtrise de notre destinée fiscale. Nous estimons qu'on pourrait y parvenir en combinant une augmentation des recettes, une diminution des dépenses, la vente d'actifs non indispensables et l'assouplissement de la réglementation.
Par exemple, pour augmenter les recettes par le biais d'une augmentation de l'assiette fiscale, nous croyons qu'il faut simplifier la Loi de l'impôt sur le revenu et les règlements en découlant, et réduire le taux d'imposition effectif au point où l'évitement fiscal et l'économie souterraine ne paraîtront plus aussi intéressants. Si l'on s'y prend correctement, on parviendra à hausser les recettes totales et à abaisser le taux d'imposition moyen, tout en réduisant très nettement les coûts improductifs que représentent la formulation, l'administration et l'application de lois pouvant être complexes.
Pour ce qui est de la diminution des dépenses, et étant donné l'ampleur du problème auquel nous sommes confrontés, l'heure n'est pas aux demi-mesures. Celles-ci ne feraient que retarder l'échéance inévitable de notre débâcle financière. Il faut examiner chaque poste de dépenses du gouvernement fédéral, non pas à la façon innocente caractéristique du droit pénal britannique, où le prévenu est innocent jusqu'à preuve de sa culpabilité...
Des voix: Ah, ah!
M. Lawrie: ...mais à la façon française, où c'est la culpabilité qui est établie jusqu'à preuve du contraire.
Pour ce qui est de la liquidation d'actifs, nous pensons que le Canada devrait, sans tarder, recenser tous ceux qui ne sont pas indispensables pour les vendre, et destiner le produit de cette vente au remboursement de la dette.
S'agissant de la réglementation, et afin que nous puissions devenir plus concurrentiels à l'échelle internationale - précisons d'ailleurs que nos marchés intérieurs font partie intégrante des marchés mondiaux - il faut abattre les obstacles que pose une réglementation excessive. Comme dans le cas de la simplification de la fiscalité, le retrait de ces charges reviendrait à alléger le fardeau qui pèse sur les entreprises saines et légitimes; celles-ci pourraient dès lors contribuer un maximum au bien-être du Canada.
Enfin, au sujet des emplois et de la croissance, nous devons nous concentrer sur la production et sur la productivité et non sur la création d'emplois. Grâce à une réforme fiscale utile et à la réduction des taux d'intérêt effectifs qui en découlera, les employeurs seront incités à prendre de l'expansion, d'autant plus qu'ils n'auront pas à composer avec une réglementation excessive. Un programme de création d'emplois qui ne tiendrait pas compte de la production et la productivité ne nous permettrait pas d'améliorer notre compétitivité à l'échelle internationale. En revanche, les réformes fiscales et réglementaires nous le permettraient.
Pour ce qui est de la restructuration, nous croyons que le gouvernement devrait se départir de toutes les entreprises et de tous les services pouvant être offerts de façon efficace par le secteur privé. Il faut éliminer tous les encouragements régionaux et sectoriels.
Enfin, les activités gouvernementales devraient être déléguées au palier le plus efficace et le plus rentable.
Pour résumer, je dirais que nous avons une dette fédérale qui est déjà inacceptable et qui continue d'augmenter à cause de nos déficits annuels. Le simple service de la dette a nécessité une augmentation des impôts à un niveau favorisant l'immigration de nos cerveaux les plus brillants, décourageant particuliers et entreprises à prendre de l'expansion et encourageant l'évasion fiscale ainsi que l'économie souterraine.
Et nous nous retrouvons dans une impasse. Il n'est pas possible d'augmenter les impôts pour réduire le déficit, parce qu'on aggraverait le problème.
D'un autre côté, nous courons le risque qu'une province représentant 25 p. 100 de notre population décide de se séparer du reste du Canada. Cette menace amène la communauté financière internationale à se demander dans quelle mesure nous pourrons assumer le service de la dette actuel ou futur, ce qui ne fait qu'accroître les pressions à la hausse sur les taux d'intérêt.
Nous devons nous dégager de notre mentalité d'assistés sociaux et faire face aux réalités de la productivité et de la responsabilisation personnelle. Cela exige, certes, l'exercice d'un pouvoir courageux et spécifique, mais nous croyons que la grande majorité des Canadiennes et des Canadiens approuveront une telle démarche et qu'en fait ils l'accueilleront avec enthousiasme.
M. Charles Campbell (présentation à titre personnel): J'estime que c'est pour moi un privilège de faire partie de ce groupe, surtout à titre personnel.
Après avoir passé 35 ans dans l'industrie minière, où l'efficacité est essentielle à la survie, je suis devenu membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, en 1973, à laquelle j'ai siégé pendant dix ans, dont huit en tant que vice-président.
Dans l'industrie minière, j'ai notamment été directeur de la mine de Bralorne, en Colombie-Britannique, l'une des plus vieilles mines de la province. La route qui mène à Bralorne ne va pas plus loin et, quand je me suis retrouvé là-bas, j'ai dû simplement m'acquitter du travail habituel d'un directeur de mine. Je ne pouvais pas soupçonner à quel point cette mine était mal exploitée et était inefficace. En faisant ce qui m'a semblé évident, dans la troisième année de mon mandat, notre productivité, exprimée en tonne remontée par homme-poste, a augmenté de 32 p. 100 à 33 p. 100.
Quand je suis rentré à la Commission d'immigration et du statut de réfugié, j'ai constaté le même problème, mais là, je n'avais pas la possibilité de le corriger. Je travaillais sous la direction de deux présidents, extrêmement compétents dans leur domaine, mais qui n'avaient absolument aucune idée de la façon de gérer une telle organisation. Le plus tragique, c'est qu'il n'y avait aucun fonctionnaire vers qui ils auraient pu se tourner. J'ai l'impression que, dans un tel cas de figure, la fonction publique devrait faire office d'organisme de gestion pour aider ceux et celles qui sont parfaitement compétents dans leur travail mais qui doivent, ce faisant, assumer des responsabilités qui les dépassent.
Je vais vous donner un simple exemple de ce qui s'est produit. En ma qualité d'officier président du tribunal, j'avais affaire avec des requérants qui demandaient sans cesse des ajournements. On les leur accordait sans poser de questions. Mais cela nous coûtait cher en temps perdu. Et même si ce n'était pas mon travail - parce que je ne m'occupais pas du secrétariat, je présidais simplement le tribunal - j'ai demandé au commis aux horaires de ne plus simplement convoquer les requérants à des audiences, mais de convenir systématiquement avec eux de rendez-vous. Dès lors, je n'ai plus accordé d'ajournement que lorsque c'était justifié.
Dans la période de neuf mois qui a précédé mon départ de la commission, le nombre de cas entendus par le personnel de soutien de la région de l'Ouest, base de calcul qui me semble raisonnable, est passé à 23,4. À Toronto, il était de 12,5 et à Montréal, de 7,3. Nous avons conclu qu'il était possible de doubler, voire de tripler la productivité. À Toronto et à Montréal les choses n'ont jamais changé et après mon départ, à Vancouver, elles sont revenues comme elles étaient auparavant.
En 1990 et 1991, la Commission de réforme du droit a étudié le fonctionnement de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Elle a effectué un gros travail et a produit un rapport d'environ 160 pages. Un chapitre était principalement consacré aux impérities et aux abus - débuts de séances tardifs, à 10 h 15 et à 14 h 30 - et au problème de l'ajournement des audiences. Ce rapport, pour des raisons que je n'ai pas à commenter ici, n'a jamais été publié. Mais il a été réécrit. Sa version révisée n'a pas été terminée avant mars ou avril 1992. Malheureusement, dans son budget de 1992, le ministre des Finances a annoncé la suppression de la Commission de réforme du droit, qui n'avait dès lors plus le pouvoir de publier. Tout ce travail a donc été perdu et pourtant, il y avait des choses valables.
J'ai retrouvé cette phrase dans l'ébauche finale:
- Une fois que le dossier d'enquête était ouvert, le nombre des cas ajournés venait s'ajouter à liste
des demandes dans chaque région, et le problème était aggravé par des débuts de séances tardifs.
- J'estime que, pour régler ce genre de problème, il faut mettre sur pied des groupes internes de
conseil en gestion. Si c'est ce qu'on avait fait et si l'on avait agi correctement, on aurait pu
économiser des milliards de dollars. J'en suis intimement convaincu.
Le président: Monsieur Campbell, je fais face à un véritable dilemme: soit je vous interromps, soit je permets que M. Les commence plus tard.
M. Campbell: J'ai juste deux ou trois autres choses à ajouter pour l'instant, et j'en aurai d'autres à dire plus tard.
Entre autres fonctions, un tel organisme de conseil de gestion pourrait être appelé à examiner minutieusement les budgets ministériels. Je crois comprendre que ce n'est pas ce qui se fait actuellement. Des ministres ont la liberté d'administrer leur ministère comme ils le veulent et leurs budgets ne sont soumis ni à l'approbation du ministre des Finances, ni à celle du Conseil du Trésor. Je m'en suis étonné quand une personne très haute placée m'en a informé, mais peut-être allez-vous la contredire. Il est possible que cela explique l'augmentation du budget de l'Immigration qui est passé de 311 millions de dollars à 555 millions de dollars, soit 78 p. 100 de plus au cours des quatre dernières années où la réduction du déficit était pourtant à l'ordre du jour. Voilà un ministère où nous pourrions économiser des milliards de dollars.
Cela m'amène à la question de l'immigration et j'ai beaucoup à dire à ce sujet, mais c'est une autre question. J'en ai aussi beaucoup à dire au sujet des pensions et, d'après ce que je vois ici, je pense être le mieux placé pour pouvoir en parler.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Campbell.
Et enfin, nous accueillons John Les de la Fédération canadienne des municipalités.
M. John Les (président, Fédération canadienne des municipalités): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis très heureux de me trouver ici aujourd'hui. Je sais que vous avez rencontré d'autres membres du conseil de la Fédération canadienne des municipalités, à Ottawa, et plus particulièrement celle qui m'a précédé, Mary Lawrence-Mawhinney, de Lunenburg.
Vous nous avez soumis trois questions particulières que je vais aborder à divers degrés.
Tout d'abord, pour ce qui est des objectifs de réduction du déficit, je suis d'accord avec certains intervenants précédents pour dire que celui-ci devrait être fixé à zéro. J'appartiens à un ordre du gouvernement qui applique habituellement cette méthode. En fait, nous sommes contraints par la loi d'équilibrer nos budgets chaque année. Nous pourrions difficilement dire à notre ordre de gouvernement qu'il est tout à fait normal de se livrer à un financement par impasse budgétaire.
On peut affirmer, je pense, que grâce à la méthode de budgétisation équilibrée, les municipalités connaissent, dans l'ensemble, une situation financière raisonnablement bonne. Certaines, à Terre-Neuve, font exception, mais elles sont aux prises avec des problèmes particuliers à cause de leur économie primaire qui est en difficulté.
Pour ce qui est des mesures budgétaires susceptibles de créer des emplois, je crois que tout le monde reconnaîtra que le programme qui a été mis en place il y a maintenant deux ans par ce gouvernement peu après son élection en 1992, le programme d'infrastructure, a donné d'excellents résultats.
C'est la Fédération canadienne des municipalités qui en avait d'abord émis l'idée dans les années quatre-vingts en tant qu'instrument qui serait tout à fait valable non seulement pour créer des emplois et stimuler la croissance, mais aussi pour remettre les Canadiens au travail. Et en effet, le programme de 6 milliards de dollars financé par le gouvernement fédéral en collaboration avec les gouvernements provinciaux et municipaux, a permis de créer quelque 100 000 emplois au cours des deux dernières années.
Partout au Canada, on a reconnu que ce programme a donné d'excellents résultats notamment sur le plan de l'amélioration de l'infrastructure, ce qui aura pour effet de stimuler les investissements dans les collectivités. Quand les routes sont défoncées, qu'on doit fermer les ponts parce qu'ils n'ont pas été entretenus et que les réseaux d'égout et d'aqueduc ne fonctionnent pas, il est bien sûr difficile d'attirer les investissements dans une collectivité. Ce programme d'infrastructure est un bon début pour stimuler le genre d'investissement dont nous avons besoin dans nos collectivités et nous sommes certains que, ce faisant, nous pourrons créer plus d'emplois encore partout au Canada.
Plus récemment, nous avons eu des entretiens avec les gens de Ressources naturelles Canada au sujet d'un programme de rénovation des infrastructures et des édifices municipaux, partout au pays, afin d'économiser en coûts d'énergie et de réduire les émissions dans l'environnement. Selon une étude que nous avons effectuée, si nous adoptions un tel programme, nous pourrions créer 90 000 autres emplois au Canada. La remise en état de ces infrastructures exige bien sûr beaucoup de travail ainsi que la mobilisation d'une importante main-d'oeuvre et nous espérons, à l'issue de nos entretiens avec le ministère fédéral des Ressources, obtenir un financement modeste, un petit capital de départ, d'environ 1,5 million de dollars pour pouvoir lancer ce programme.
Quant à votre troisième question, je retiendrai de la dernière partie de l'énoncé, celle traitant de la délégation, à d'autres ordres de gouvernement, des activités du fédéral. Nous reconnaissons qu'il serait tout à fait logique de déléguer certaines de ces activités à d'autres ordres de gouvernement, surtout au gouvernement municipal, qui nous concerne directement. Cependant, le fédéral doit se montrer prudent dans la façon dont ce transfert de pouvoirs est effectué.
On est en train de transférer la responsabilité de l'exploitation des aéroports, des havres et des ports partout au pays. Dans de nombreuses collectivités, on estime que cette décision pourrait avoir des effets bénéfiques. Cependant, l'avenir économique de quelques collectivités pourrait être menacé par ce genre de transfert et il faudra donc faire preuve de prudence. Le gouvernement fédéral ne peut s'en servir de véhicule pour augmenter ses recettes qui se retrouveraient à Ottawa et qui ne profiteraient pas aux collectivités concernées.
Nous avons récemment rencontré le ministre des Transports à ce sujet et nous devrions avoir d'autres consultations avec le ministère dans l'avenir.
Nous ne devons pas perdre de vue, non plus, que la délégation de responsabilités par le gouvernement fédéral à un autre ordre de gouvernement ne doit pas équivaloir à un simple transfert de responsabilités. Les fonds doivent suivre. En règle générale, les gouvernements municipaux ne peuvent compter que sur les impôts fonciers et, dans la mesure où cette assiette fiscale est de plus en plus sollicitée, nous exposons les Canadiens, et nous rendons de plus en plus difficile l'accession à la propriété. Or, l'accession à la propriété est, ou du moins devrait être un objectif national.
Le quatrième aspect dont je veux parler est celui de la réorganisation de la taxe sur les produits et services. Nous avons rencontré le ministre des Finances à ce propos. Récemment, le Premier ministre a réitéré l'engagement de son gouvernement de modifier certains aspects de la taxe sur les produits et services dans son prochain budget.
Comme vous le savez sans doute, monsieur le président, les municipalités bénéficient actuellement d'un remboursement de 57,14 p. 100 de la TPS qu'elles versent. Cette disposition a été adoptée par le gouvernement précédent pour que la mise en oeuvre de la TPS n'ait pas de conséquences financières.
Comme le gouvernement vient d'exprimer son désir de modifier les modalités d'application de la TPS, nous craignons maintenant de perdre ce remboursement.
Le président: Je ne pense pas que vous ayez à craindre quoi que ce soit.
M. Les: C'est bon de vous l'entendre dire.
Et pourtant, on parle encore d'harmoniser la TPS et les TVP. Nous attirons votre attention sur ce qui se passe au Québec où l'on a effectivement harmonisé les deux taxes et où l'on a prévu, en plus, le remboursement de la taxe de vente provinciale pour tenir compte de l'élargissement de l'assiette fiscale. Nous applaudirions l'adoption d'une solution aussi raisonnable.
Le président: Je pense que nous en convenons.
M. Les: Bien.
Voilà les principaux aspects dont je voulais parler, monsieur le président. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Les et bonne chance dans vos nouvelles fonctions de président.
Monsieur Yung, j'allais vous oublier. Excusez-moi.
M. Bernie Yung (Savoy Management): C'est très bien. Je suis le dernier arrivé. En fait, je n'ai rien préparé de particulier pour mon intervention, mais en ma qualité de propriétaire de petite entreprise, j'estime qu'il est certaines choses que le gouvernement fédéral ferait bien d'améliorer.
Comme tout le monde peut le constater, je suis immigrant; je suis arrivé au Canada, de Hong Kong, en 1975. À l'époque, Hong Kong et les pays de la Ceinture du Pacifique en général n'étaient ni aussi prospères ni aussi économiquement forts que le Canada. Mais quelques vingt ans plus tard, quand le Canadien que je suis devenu jette un coup d'oeil sur le pays d'où il vient, il se rend compte que le niveau de vie au Canada s'est détérioré par rapport à ce qu'il était il y a vingt ans, à son arrivée ici. En revanche, dans les pays de la Ceinture du Pacifique, même dans les plus petits d'entre eux, tout le monde se rend bien compte que la croissance de ces vingt années a été nettement supérieure à celle que nous avons eue au Canada.
Je ne sais si c'est à cause du gouvernement ou des fonctionnaires, ou que sais-je encore, mais les effets sont évidents et nous pouvons nous rendre compte de nous même que les choses ne vont pas bien. Donc, d'après ce que je vois, il faut faire quelque chose ou changer quelque chose.
D'autres personnes ont parlé un peu de leur expérience personnelle, de leur milieu ou de leurs préoccupations, mais j'aimerais ajouter certaines choses.
Moi qui suis propriétaire de petite entreprise, j'ai trouvé extrêmement difficile de survivre et, surtout, de lancer mon entreprise au Canada. Quand on est dans l'exportation, par exemple, il n'y a pas de place pour les petites entreprises.
Pour commencer, les banques ne vous accordent pas de financement et ne vous donnent pas de prêt à la petite entreprise. Et puis, c'est tellement difficile, qu'on ne peut pas tout faire soi-même. Je ne sais pas si le gouvernement compte s'attaquer aux aspects dont certains ont parlé plus tôt; par exemple, si les banques réalisent des profits aussi gigantesques, pourquoi ne pourraient-elles pas en réinjecter une partie dans la société pour aider la petite entreprise sous forme de prêts? Il faut aider ceux qui en ont besoin et peut-être que les taux d'intérêt diminueront.
Ce serait là une des meilleures façons de favoriser la croissance au Canada. On parle de création d'emplois. Mais si l'on n'a pas d'argent pour lancer une entreprise, comment peut-on créer des emplois?
Nous regorgeons de jeunes diplômés d'université, parfaitement qualifiés, mais qui ne parviennent pas à trouver d'emplois. Alors, oubliez la formation professionnelle. Vous parlez sans cesse de formation professionnelle, mais vous ne leur donnez pas la possibilité de travailler. Où est la création d'emplois dans tout cela? Tout commence par l'argent, mais d'où cet argent peut-il venir? C'est peut-être par là, je pense, que le gouvernement doit commencer.
L'autre chose, c'est la TPS. Elle est une nuisance pour les gens d'affaire. Les dédoublements à ce niveau sont inimaginables. C'est un gaspillage d'effort et c'est totalement improductif. On passe un temps fou à remplir les formules de demande de remboursement de la TPS, et tout ça pour rien. C'est une vrai barbe!
Voilà pourquoi autant de petites entreprises se retrouvent dans l'économie souterraine. Bien sûr, ce phénomène va porter tort au gouvernement. Nous le savons, mais comment l'enrayer? Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas quelque chose de positif pour l'arrêter? Mais d'une certaine façon, ce phénomène rendra plus facile soit la réduction du déficit, soit la création d'emplois.
Je crois que tout découle de l'initiative personnelle, mais il faut avoir de l'argent pour lancer une entreprise. Le gouvernement l'utilise là où il ne le devrait pas. Nous ne blâmons pas le gouvernement en place. Il est possible que ses prédécesseurs aient déjà porté un tort beaucoup trop grand à l'économie, et c'est maintenant à nous d'essuyer les pots cassés. Et bien sûr, le gouvernement en place n'est là que depuis deux ans. D'après ce que j'ai pu constater, je dirais qu'il est sur la bonne voie, mais il peut et doit faire encore beaucoup.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Yung.
On me dit que nous avons parmi nous l'honorable Ray Chan.
Ray, seriez-vous assez bon pour vous joindre à nous, à la table? Nous avons besoin de votre aide. Nous sommes ravis de l'appui que vous venez nous accorder.
L'honorable Raymond Chan (Secrétaire d'État (Asie-Pacifique)): Voulez-vous que je réponde à quelques-unes des questions les plus délicates?
Le président: Eh oui, c'est pour cela que nous sommes tellement ravis de compter un ministre parmi nous. Si vous avez quoi que ce soit à reprocher au gouvernement, adressez-vous directement à lui. Mais si vous avez des compliments à transmettre, alors sachez que le comité sera heureux de les accepter.
Merci beaucoup de votre exposé. Excusez-moi d'avoir dû vous interrompre, mais je vous promets que vous disposerez de tout le temps dont vous aurez besoin plus tard.
[Français]
Il est maintenant temps de passer à la période de questions.
[Traduction]
Avant cela, je tiens à vous présenter les députés présents: M. Herb Grubel, de la Colombie-Britannique; M. Pierre Brien,
[Français]
qui vient du Québec;
[Traduction]
Ron Fewchuk, du Manitoba; David Walker, du Manitoba; l'honorable Ray Chan, de Vancouver; et Brent St. Denis, du Nord de l'Ontario.
[Français]
Nous nous tournons maintenant vers vous, monsieur Brien, dans l'attente de vos questions.
M. Brien (Témiscamingue): Monsieur le président, je veux d'abord vous rappeler un point. Vous aviez demandé à votre ministre de faire quelque chose à propos de la TPS; on en a entendu parler à deux reprises. J'espère que vous n'oubliez pas que vous aviez promis de la modifier avant deux ans. La date approche; on l'a même dépassée.
Ma question s'adresse à M. Campbell qui n'avait pas terminé. Vous étiez sur le point de parler, quand vous vous êtes arrêté après trois minutes, du Régime de pensions du Canada.
Vous aviez des idées sur le sujet, soit à propos des modifications qu'on pourrait y apporter, soit sur des changements qu'il ne faudrait pas faire. J'aimerais que vous nous disiez quel avenir vous envisagez pour le Régime de pensions du Canada.
[Traduction]
M. Campbell: Eh bien, il se trouve que je l'ai consigné par écrit.
Le président: Bien. Nous aimerions que vous le lisiez.
M. Campbell: Il ne faut plus faire payer par la main-d'oeuvre canadienne active les pensions versées aux retraités. C'est pour cela qu'on en est là où nous en sommes. La Sécurité de la vieillesse a été adoptée en 1952 et, à l'époque, elle correspondait à 1 p. 100 du revenu, calculé sur la déclaration d'impôt. Jusqu'en 1967, où elle est passée à 4 p. 100, on a continué de la calculer sur la déclaration d'impôt. Elle faisait donc partie de ce calcul. C'est ainsi qu'elle apparaissait sur le formulaire. Mais, cette même année, on a adopté le Régime de pension du Canada et on a supprimé l'allusion à la Sécurité de la vieillesse.
On peut supposer que les impôts ont continué d'alimenter la caisse de Sécurité à la vieillesse, et ceux d'entre nous qui ont atteint l'âge honorable de la retraite ont payé leur dû. Cela s'oppose à la récupération.
Le public avait raison de s'attendre à ce que ces fonds résistent à l'examen actuaire. Mais tel ne fut pas le cas, à cause de l'échec de nature politique.
Dès qu'une personne quitte l'ombrage de l'arbre familial, je suppose qu'elle se prend entièrement en compte. Cela s'entend de son revenu et de sa retraite. Certains échouent et il faut que la société les prenne en charge. Pour cela, et pour leur offrir un soutien à la retraite nécessaire, mais limité, je suggère que l'on maintienne un régime de pension gouvernemental universel. Nous pourrons ainsi nous occuper de ceux qui en auront le plus besoin.
Je recommande également que l'on apporte des modifications à la loi pour que les régimes de retraite du secteur privé soient universels, transférables et non convertibles, de sorte que les gens ne liquident pas leur pécule quand les temps sont durs. Je recommande que l'on mette progressivement en oeuvre un tel programme, sur une certaine période, en attendant que les actifs de la société soient dégagés de leur responsabilité envers les personnes âgées et qu'ils disposent eux-mêmes des réserves suffisantes pour leur retraite, parce que je crois que nous devons tous apprendre à être indépendants dans cette période de notre vie.
[Français]
M. Brien: J'ai une question pour M. Lawrie. Vous avez parlé d'un système fiscal plus simple, plus compréhensible parce que, selon ce que vous avez dit, on pourrait récupérer plus de revenus de cette façon-là, parce qu'on est en train de lutter contre le déficit. Vous avez parlé d'un régime plus simple, comportant même une baisse des taux. J'essaie de voir comment tout cela pourrait être opérationnel. De quelle façon pourrait-on le faire? En termes concrets, qu'est-ce que ça signifie, selon vous, un système fiscal plus simple? Vous avez sûrement des idées qui pourraient nous aider.
[Traduction]
M. Lawrie: Le système fiscal plus simple... je me réfère à l'époque où je suis devenu comptable agréé dans la belle province, en 1965. La loi de l'impôt était épaisse comme ça. Maintenant, elle est épaisse comme ça et plus personne ne la comprend.
C'est qu'on passe tellement de temps à concocter les exonérations fiscales, les autres solutions, et tout le reste. Tout cela ne fait que compliquer horriblement les choses - à un rythme presque exponentiel - à chaque modification que l'on apporte. Finalement, plus personne ne comprend la loi.
De plus, comme je le disais, on consacre des sommes phénoménales à trouver de nouvelles façons d'imposer les gens, de nouvelles façons d'éviter des impôts et de nouvelles façons de contrôler le tout. On pourrait fort bien parvenir à régler ce genre de problème si l'on arrêtait de se servir de la Loi de l'impôt sur le revenu comme instrument de justice sociale, comme moyen d'encourager l'entreprise privée. Il faut en finir avec tout cela une bonne fois pour toute, du moins en ce qui concerne les entreprises privées et il faut laisser l'argent dans les mains de ceux qui savent comment le gagner, comment le réinvestir, et qui savent ce que valeur ajoutée veut dire.
Pour ce qui est des particuliers, là aussi, j'estime qu'on a inclu beaucoup de choses dans la loi de l'impôt et dans tout le régime fiscal... on était peut-être bien intentionné à l'époque, mais finalement ça n'a rien réglé. Alors, pourquoi n'en vient-on pas simplement à accepter l'idée que si l'on gagne x dollars, on sera imposé à tel ou tel taux. Je crois qu'on parle de taux effectif...
Quand, en 1983, je suis arrivé ici en provenance du Québec, la Colombie-Britannique était la deuxième province la moins imposée au Canada. Je crois qu'à présent elle est en tête de liste. Ce qui s'est produit, c'est qu'on a laissé les programmes sociaux influencer complètement la Loi de l'impôt sur le revenu, à un point qu'on n'avait absolument pas prévu.
Si le régime était universel et si l'on maintenait certains aspects actuellement assurés directement ou indirectement, on pourrait en arriver à une méthode d'imposition du revenu plus simple qui rendrait l'évasion fiscale moins stimulante. Si, plutôt que de se situer à 59 p. 100, par exemple, le taux supérieur d'imposition en Colombie-Britannique était ramené en dessous de 20 p. 100, les contribuables seraient moins tentés d'éluder l'impôt. Il serait beaucoup plus simple d'adopter un taux forfaitaire et d'appliquer d'autres méthodes de promotion de l'égalité sociale, qui fonctionneraient d'ailleurs beaucoup mieux. Selon moi, il suffit simplement de déterminer le revenu familial de base permettant de maintenir une certaine justice sociale et de ne plus avoir recours à la Loi de l'impôt sur le revenu pour cela.
[Français]
M. Brien: J'aurais une sous-question à ce sujet. Autrement dit, en ce qui concerne les transferts aux individus, vous préféreriez que les crédits d'impôt pour les frais de garde ou autres choses du genre accordés par le gouvernement soient plutôt faits par transfert direct à l'individu. Si, par exemple, on choisissait comme société de soutenir les frais de garde, on donnerait de l'argent directement aux individus plutôt qu'un crédit d'impôt. C'est là la première partie de ma question.
Deuxièmement, avec un impôt à taux unique, on perd l'augmentation progressive du système d'impôt. Est-ce que vous êtes d'accord pour que le système conserve quand même un impôt progressif?
[Traduction]
M. Lawrie: Je commencerai par répondre à la deuxième partie de votre question.
Je ne le pense pas. Je ne pense pas que le système soit «progressif», au contraire. Il ne fonctionne pas. Il incite les contribuables de revenu supérieur, qui peuvent s'offrir les conseils de spécialistes ou d'avocats, d'éluder l'impôt. Il y a tout un secteur spécialisé dans cela qui ne rapporte rien au pays. Donc, je ne pense pas que la formule soit progressive. Elle donne simplement lieu à des taux d'imposition supérieurs et à une plus forte propension, chez les contribuables, à éluder l'impôt.
On pourrait réaliser les objectifs de justice sociale en déterminant à quel revenu familial minimum il faudrait consentir une aide quelconque. Peu importe le programme envisagé, c'est ainsi qu'il faudrait s'y prendre. Et il ne faudrait pas exclusivement tenir compte du revenu de chacun, parce qu'une personne pourrait très bien mériter l'aide sociale mais vivre avec quelqu'un d'autre qui gagne 100 000$ par an.
Nous estimons que l'injustice, dans ce cas, est flagrante, sans compter qu'elle nous prive de fonds que l'on pourrait autrement mettre à la disposition de ceux et de celles qui en ont vraiment besoin. Tout cet argent est gaspillé à cause de l'universalité et nous croyons que ça ne fonctionne pas du tout.
Tout s'articule autour de la définition d'un revenu familial de base, ou, si vous préférez, d'un revenu par foyer. Nous estimons que tout doit découler de cela.
M. Grubel: Le Parti réformiste vient juste d'élaborer une proposition de réforme fiscale qui s'appuie sur les principes que vous venez d'énoncer et je partage, d'ailleurs, la plupart des opinions que vous avez exprimées. Si nous options pour ces solutions, nous nous en porterions mieux.
Je vais demander à M. Campbell qu'il me fasse part de son point de vue sur l'immigration, plus particulièrement au regard du mandat dont nous sommes saisis et de ce qu'il faudrait faire pour réduire le déficit.
M. Campbell: Grand Dieu! Vous conviendrez, j'en suis sûr, que l'immigration est très complexe. Mais essentiellement, on peut dire qu'elle nous coûte des milliards de dollars que nous pourrions économiser en grande partie, parce que nous n'avons pas besoin d'accueillir autant d'immigrants. Nous avons permis que le programme des réfugiés échappe à tout contrôle.
Nous comptons 1 300 000 chômeurs au Canada et nous avons toutes sortes de personnes au bien-être social; le nombre des chômeurs ne cesse d'augmenter ou plutôt, nous diminuons régulièrement les choix qui s'offrent aux personnes sans emploi, toutes compétentes, à cause des opérations de dégraissage dans l'industrie et dans la fonction publique. Personnellement, j'ai l'impression que tous ces talents pourraient répondre à la plupart de nos besoins.
Il peut arriver que l'on manque, maintenant ou plus tard, de spécialistes possédant certaines compétences techniques. Mais quand nous manquerons de spécialistes, nous pourrons toujours les faire venir pour occuper les postes existants ici, au Canada, mais nous n'avons certainement pas besoin pour cela du genre de programme actuellement en place.
J'ai parlé de l'augmentation absolument déraisonnable des coûts dans le budget. Pourquoi faisons-nous cela? Par exemple, rien ne prouve que l'augmentation du nombre d'immigrants soit un avantage pour la population résidente. On a effectué plusieurs études à ce sujet: celle du vérificateur général en 1982, celle du groupe de travail Nielsen en 1985, une étude démographique en 1989, d'autres études par le vérificateur général en 1990, celle du Conseil économique en 1991, et celle de Daniel Stoffman du Toronto Star, qui a nécessité une année de travail en 1992. En Colombie-Britannique, il y a eu l'étude du Lower Mainland Multicultural Education Project, en 1992, effectuée par le Social Planning and Research Council, par l'Association canadienne des commissions/ conseils scolaires et par plusieurs autres. Toutes ces études ont conclu que notre actuel programme d'immigration n'est pas valable, toutes ont fait ressortir les problèmes existants, toutes ont été publiées, mais les choses continuent sans que qui que ce soit se réfère à ces données disponibles.
Donc, pour moi, le problème est le suivant - et j'invite les membres du comité à y réfléchir: notre programme d'immigration est uniquement fondé sur le contenu du Livre rouge, lequel, en ce qui me concerne, a simplement été rédigé au nom de la rectitude politique et non pour répondre aux besoins du pays. Ce gouvernement n'a tenu aucune discussion, ni au sein du parti ni en privé ni dans un congrès, pour déterminer ce que devrait être notre politique d'immigration.
Il s'agit d'un gros budget qui déterminera le genre de pays que nous allons devenir. Il nous coûte cher pour l'instant, et à ces coûts, il faut ajouter ceux de l'aide sociale, de l'aide juridique et de l'aide à l'éducation.
Dans deux banlieues de la région métropolitaine de Vancouver, Richmond et Surrey, on dénombre 6 000 salles de classe mobiles dans un cas, et 300 toilettes mobiles dans les cours d'école, dans l'autre cas. Nous ne pouvons nous permettre cela. Nous nous retrouvons dans une situation où nous ne pouvons plus nous permettre le genre de coûts d'infrastructure que nous impose cette population rapidement croissante.
M. Grubel: Merci, monsieur Campbell.
M. Campbell: Donc, sans trop entrer dans le détail - ce que je ne peux me permettre parce que nous serions encore ici à minuit - je dirais simplement que nous devons nous livrer à une analyse véritable, honnête de ce que doit être l'immigration au Canada, des responsabilités que nous avons envers les réfugiés et de la façon dont nous devrions nous acquitter de ces responsabilités, et ainsi de suite. Nous ne faisons rien de cela. Le système est laissé à lui-même.
M. Grubel: Merci, monsieur Campbell. En votre qualité d'économiste, vous avez écrit sur le thème de l'immigration. Je connais votre réputation exceptionnelle d'observateur des questions liées à l'immigration. Je suis très heureux que vous en ayez parlé ici, parce que ce sujet est bien évidemment lié au budget.
Je vous comprends tout à fait et je suis d'accord avec vous qu'un réexamen des niveaux optimaux d'immigration s'impose, parce qu'on agit comme si les données actuelles étaient immuables. Je ne dis pas, a priori, que les niveaux devraient être supérieurs ou inférieurs, mais je comprends ce que le spécialiste que vous êtes nous dit.
Monsieur le président, j'aimerais poser une autre brève question à une autre personne qui s'est exprimée avec beaucoup de brio aujourd'hui. M. Robinson a affirmé à plusieurs reprises que le gouvernement adopte toutes ces politiques inappropriées parce qu'il écoute trop les groupes d'intérêt particulier.
Pourrait-il me dire, et dire à ce comité, ce qu'il entend par groupes d'intérêt particulier? Par exemple, M. Lawrie a évoqué la nécessité de limiter les dépenses et d'équilibrer le budget pour que le gouvernement ait les moyens de se débrouiller dans l'avenir. Est-il membre d'un groupe d'intérêt particulier ou fait-il cela parce qu'il s'intéresse au Canada en général. Et que dire de tous les autres témoins assis à cette table qui nous ont aussi recommandé de réduire les dépenses? Font-ils partie de groupes d'intérêt particulier ou s'intéressent-ils simplement au sort du Canada en général?
M. Robinson: Permettez-moi de parler des «riches», pour employer une terminologie plus simple. Tout ce que je voulais dire, c'est que les riches de ce pays nous mènent par le bout du nez. Ce sont eux les groupes d'intérêt particuliers qui achètent l'appareil politique et qui paient pour tout le saint-frusquin, pour voir ce que nous pouvons faire, ici, afin de maintenir les profits des banques. C'est ridicule de se prêter à ce jeu stupide.
Pour parler plus particulièrement du document que je vous ai soumis, prenons, par exemple, le thème de la Banque du Canada qui, à Ottawa, est une des voix s'exprimant pour ce groupe de riches. Et ceux-ci ne font pas que sembler avoir un temps d'avance sur notre gouvernement pour le contraindre à s'en tenir à un objectif d'inflation nulle: c'est bien eux qui ouvrent la voie.
Je ne sais pas exactement, monsieur le président, que faire du reste de ce document et comment réagir face à cette situation mais, pour l'essentiel, la Banque du Canada, en ramenant toutes les priorités à une inflation zéro, la réduction du déficit venant ensuite, suivie de la création d'emploi puis de la santé de l'économie - la création d'emploi et la santé de l'économie se retrouvant tellement loin qu'on ne peut pas vraiment parler d'une position en ce qui les concerne - il n'est donc pas du tout étonnant que nous ayons ce ridicule problème de déficit et nous ne faisons rien pour y remédier.
M. Grubel: Monsieur Robinson, le gouverneur de la Banque du Canada est venu témoigner devant nous et je peux vous assurer qu'il se préoccupe énormément de la création d'emploi.
Je vais maintenant vous poser une question à laquelle vous avez certainement une réponse à nous donner, j'en suis convaincu. À partir de quel revenu annuel est-on riche?
M. Robinson: Je pense qu'on pourrait parler de 100 personnes et de leurs partisans.
J'ai évoqué l'image de la guerre. Toute la population allemande s'est rangée derrière quelques dirigeants du gouvernement allemand lors de la Deuxième guerre mondiale. Ce ne sont pas les gens directement concernés qui posent des difficultés. C'est le fait qu'il y a tellement de gens qui les suivent, des gens qui suivent aveuglément les désirs des riches, entraînant la destruction du reste de la population.
Je ne parlerai même pas des gens à faible revenu. Je parlerai des revenus des familles moyennes, qui ont baissé de 5 p. 100 au cours des cinq dernières années, ce qui est une véritable honte. Ils ont baissé de 7 p. 100 et sont remontés de 2 p. 100. Il ne s'agit pas là des pauvres, mais de la majorité de la population du Canada. C'est un scandale.
J'ai particulièrement apprécié les observations qu'a faites M. Yung au sujet des pays de la ceinture du Pacifique, qui progressent alors que nous reculons. Je me joins à M. Yung. Je vous l'avoue bien franchement, j'aimerais aller dans les pays de la bordure du Pacifique. Ce qui se passe dans mon pays, le Canada, est ridicule. Cette poignée de gens très riches qui agissent grâce au pouvoir confié à la Banque du Canada, qui agissent par l'intermédiaire de la structure politique qui leur fait des cadeaux... Aujourd'hui, nous nous retrouvons devant toutes ces histoires abracadabrantes de Brian Mulroney au sujet des cadeaux politiques. Notre pays est devenu si instable que c'en est aberrant. On ne peut plus faire confiance à personne qui se trouve sur la scène.
Nous devons en revenir à l'essentiel. Nous devons rebâtir notre économie en fonction de la population du Canada et non selon le bon plaisir des riches.
M. Grubel: Monsieur Robinson, si je vous comprends bien, vous nous dites que nous sommes en difficulté au Canada parce que le gouvernement écoute des groupes d'intérêts particuliers. Je vous ai demandé quels étaient ces groupes d'intérêts. Vous nous dites que ce sont les riches. Je vous demande qui sont les riches et vous me répondez que c'est simplement une poignée de gens; je ne sais pas de qui il s'agit, mais je sais qu'ils sont là quelque part.
Vous nous dites ensuite que tout est de la faute de tous les insensés qui servent sans le savoir les intérêts des riches. De qui s'agit-il exactement... Voulez-vous dire par là que tous ceux qui ne font pas comme vous le voudriez sont des imbéciles, que tous ces groupes d'intérêt particuliers, ces imbéciles riches... Qui exactement est en faute ici et qui mène notre pays à la ruine?
M. Robinson: Tous ceux qui ne bâtissent pas notre pays avec enthousiasme au profit de la population canadienne et tous ceux qui acceptent le mode de pensée actuel, ce qui est très, très courant... qui peut se résumer par le terme de «capitalisme». Regardez le capitalisme et les valeurs qui y sont liées, suivez ce qui se passe et vous allez vous rendre compte de la situation. Nous avons un magnifique pays. Nous avons une population et un pays magnifiques qui sont incroyablement mal servis par des politiciens qui nous disent vouloir faire de la création d'emploi et de la croissance économique la grande priorité. Il est très clair que la grande priorité dans notre pays c'est l'inflation zéro et la réduction du déficit.
Le problème dans cette situation - et je l'ai souligné dans le document - c'est qu'il faut renverser ces priorités si l'on veut dans la pratique remédier à nos difficultés. Si l'on veut pouvoir un jour réduire le déficit, il faut que la création d'emploi et la mise en place d'une saine économie prennent le pas sur les objectifs d'inflation zéro et de réduction du déficit.
M. Grubel: Je me félicite de pouvoir comprendre maintenant comment résoudre les problèmes de notre pays. C'était tout à fait clair. Je vous remercie.
M. Robinson: J'ai bien du mal à vous croire.
Le président: Merci, monsieur Grubel.
Monsieur Walker.
M. Walker (Winnipeg-Nord-Centre): Merci, monsieur le président.
Je veux attirer l'attention de tout le monde sur l'étude du professeur Bressler et du professeur Hardwick. Il est clair que le gouvernement fédéral n'a pas toujours bien réussi à définir ses relations avec les universités. Depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, nous avons essayé différentes stratégies. Récemment, soit il y a deux ans environ, une série de propositions ont été faites qu'ont rejetées les milieux universitaires, les étudiants et le corps enseignant.
Vous avez attiré notre attention sur ce que je considère comme étant un problème bien réel, soit celui qui consiste à se demander comment maintenir un haut niveau de recherche. Pensez-vous que les conseils de subvention auraient la possibilité de progresser de 20, 30 ou 40 p. 100 si nous décidions que la meilleure façon de dépenser notre argent, ce n'est pas en accordant des crédits aux universités par des moyens indirects comme nous le faisons actuellement, sans aucune responsabilité?
Les gens n'aiment pas que je dise cela, mais vous savez qu'en réalité nous n'avons même pas le moyen de savoir si les provinces ont donné le moindre sou aux universités. Dans la situation actuelle, en vertu des programmes de transferts, nous ne sommes même pas autorisés à demander aux provinces si elles ont donné de l'argent à une université. C'est tout à fait aléatoire. Tous ceux qui pensent que cet argent ne passe pas par les mains du ministre des Finances ne comprennent pas comment fonctionne le système des chèques. C'est ce dernier qui décide si tel ou tel ministre va obtenir des crédits.
Je me demande donc s'il ne nous faudrait pas reporter notre attention sur les conseils de subvention. Dans l'affirmative, de quel pourcentage devraient-ils progresser? Disons par exemple que nous cessions de leur donner l'argent comme nous le faisons à l'heure actuelle; que nous accordions 6 p. 100 de plus au Conseil de recherches médicales et 75 p. 100 de plus au Conseil des sciences sociales. Dans quelle proportion vont-ils augmenter? Quel est le sentiment de la communauté des chercheurs? Vont-ils progresser rapidement ou simplement nous jeter de la poudre aux yeux avec des projets qui ne devraient pas être financés?
M. Bressler: La capacité existe. Je peux vous affirmer qu'il y a là la capacité d'augmenter le financement pour qu'il soit de 35 à 40 p. 100 supérieur à ce qu'il est à l'heure actuelle.
Les crédits provenant de ces conseils sont restés si constants depuis tellement d'années que bien des gens ont été abandonnés par le système. Ils sont toujours là et sont financés par d'autres mécanismes, mais les compressions de crédits que nous ressentons à l'heure actuelle sont très difficiles à surmonter. En réalité, ce que nous faisons, c'est que nous prenons la crème de la crème. La capacité est donc là.
Le problème, c'est que le financement direct du chercheur dans le cadre d'un projet précis n'est que l'une des dimensions de la question. L'autre dimension en ce qui a trait au paiement de transfert du FPÉ, c'est celle de l'infrastructure. Ce que vous nous dites, c'est que le gouvernement fédéral fait un chèque à la province et que cette dernière ne transmet jamais l'argent. C'est là que joue notre infrastructure, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays.
Dans le système américain, on parle de subventions «indirectes», mais le président de notre université parle de subventions «directes» étant donné qu'il appuie directement l'infrastructure. Un chèque de 150 000$ accompagne une subvention de 100 000$ alors qu'ici c'est par exemple un chèque de 100 000$ qui accompagne une subvention de 100 000$, et il nous faut alors trouver la différence pour financer l'infrastructure à l'université qui a bénéficié des paiements de transferts dans le cadre du FPÉ.
Nous évoquons dans notre mémoire les répercussions de ce système. La capacité est là, mais elle restera inutilisée tant que nous n'aurons pas modifié le mécanisme de fourniture de tout cet argent, ce que nous proposons dans notre mémoire.
M. Walker: Je m'en rends compte. C'est une question très importante... il faut simplement que tout le monde en prenne conscience.
J'ai toujours constaté dans les universités - et j'ai siégé aussi bien du côté de l'administration des universités qu'au sein du Conseil des sciences sociales - que ce qui était frustrant lorsque l'on devait tenir compte de l'infrastructure, c'est que les universités voulaient avoir 30 p. 100 lorsque David Walker lisait un ouvrage de sciences politiques et effectuait un projet de recherche, et 30 p. 100 pour un physicien dont les frais généraux sont en fait très élevés. Nous n'avions pas vraiment les moyens de bien définir ce dont avait besoin l'université pour offrir véritablement de bonnes conditions de travail aux chercheurs.
Comment mettre sur pied un mécanisme de financement des universités sur lequel on exerce en fait très peu d'influence alors qu'il faudrait s'assurer que les meilleurs chercheurs de notre pays progressent et passent de... alors que certaines disciplines ont un taux d'acceptation des demandes de financement qui ne dépasse pas 20 p. 100? Dans les sciences sociales, nous ne le faisons pas. Nous ne l'avons jamais fait non plus en tenant compte de toute une carrière; nous avons pris l'habitude de procéder en fonction de chaque projet. Par conséquent, les gens entrent dans le système et en sortent en fonction des projets, et les carrières scientifiques ont tendance à être bien plus appuyées que les autres.
Comment s'assurer, d'un point de vue fédéral, sans ruiner les universités, que l'on finance des recherches qui ne sont pas définies par les gouvernements, des recherches de qualité nationale et internationale, en permettant aux meilleurs de véritablement s'épanouir sans avoir à composer avec les politiques universitaires, les problèmes de frais généraux, et sans avoir à se demander qui va obtenir quoi, dans quelles conditions, comment, etc.?
Dr Hardwick: J'aimerais répondre en partie à votre première question et je passerai ensuite la parole au professeur Bressler.
Vous nous avez parlé de capacité, du point de vue du volume des projets, et il est clair qu'elle existe. Le deuxième point a trait à la compétence, et elle existe elle aussi. Par conséquent, je ne pense pas qu'il faille vous inquiéter pour savoir s'il y a suffisamment de gens qualifiés pour pouvoir s'en charger. Je pense aussi que lorsque ceux à qui l'on demande de faire des évaluations ne savent pas les faire, ils en conviennent et s'adressent à quelqu'un d'autre dans un autre pays. Étant donné les recherches globales qui sont menées à l'heure actuelle, je crois que vous pouvez être tout à fait confiant, comme je le suis en ma qualité, pour ce qui est des évaluations.
La question des frais généraux est intéressante. J'ai exposé mes conditions avec grand soin dans le rapport du CCNST. Je crois qu'il vous faut élargir la concurrence entre les recherches qui sont faites par le gouvernement, à l'interne, ainsi qu'au sein des universités et du secteur privé. C'est la seule discipline qui va limiter le coût de votre infrastructure; sinon, vous pouvez très bien être amené à financer des recherches inutiles.
Vous pouvez alors vous retrouver face à un consortium d'universités qui en arrive à l'échelle du pays à des coûts d'infrastructure raisonnables et compétitifs. Je crois que la situation va se résoudre d'elle-même de cette manière. Il vous faut toutefois accepter le fait que la loi canadienne n'interdit pas une intervention directe dans le domaine de l'éducation à l'heure actuelle, mais il vous faudra probablement trouver un mécanisme pour contourner ce problème par le moyen des contrats.
Laissez-moi vous dire dès le départ qu'après la Deuxième guerre mondiale, le gouvernement fédéral a fait preuve d'invention et a cherché à stimuler les universités. Il s'est par ailleurs rendu compte que s'il n'intervenait pas, on allait se retrouver «dans la mouise», pour ne pas dire plus.
Le président: Je ne sais pas si j'accepterais de dîner chez vous.
Dr Hardwick: Ce qu'a fait précisément le gouvernement de l'époque, c'est créer le Conseil de recherches médicales. Cela a stimulé la forte croissance que nous avons enregistrée dans le domaine, comme aux États-Unis elle l'a été par le développement de la recherche dirigée sans recourir à des contrats. Je pense donc que cette stimulation en valait la peine et qu'il faudrait l'envisager à nouveau. C'est quelque chose qui est recommandé dans le rapport du CCNST, qui préconise une ouverture et des études concurrentielles.
M. Walker: J'ai siégé au côté de Doug Kenney pendant cinq ans au sein du Conseil des sciences sociales et j'ai toujours pensé à quel point les recherches étaient brillantes et méritaient d'être financées, plus particulièrement par UBC.
Dr Hardwick: Nous sommes bien entendu d'accord avec cette solution.
Des voix: Oh, oh.
M. Bressler: J'ai deux réponses à vous donner très rapidement. David a parlé de l'examen par les pairs et je n'ai pas besoin d'y revenir parce que je pense que vous connaissez très bien la question. C'est la façon dont on procède à l'évaluation.
Laissez-moi maintenant vous donner une réponse très pratique à la deuxième question, qui consiste à se demander combien il faut précisément dépenser. Ce matin en fait, étant donné que je vais occuper un nouveau de VP à la recherche, le directeur du service de liaison de l'institut universitaire m'a demandé d'étudier la question des frais généraux que nous appliquons à tous nos contrats. Bien évidemment, nous devons appliquer des frais généraux sur nos contrats, mais de plus en plus les entreprises nous demandent pourquoi nous facturons 38 p. 100 et non pas 20 p. 100. Elles ne nous demandent jamais pourquoi nous ne facturons pas 50 p. 100, et c'est peut-être ce que nous devrions faire. Il s'agit ici des contrats industriels.
La réponse, c'est que nous pouvons désormais l'évaluer assez facilement. Nous pouvons en fait examiner le coût réel des moyens d'effectuer la recherche. Les techniques existent et nous avons les capacités nécessaires pour le faire dans nos institutions. Donc d'un point de vue très pragmatique, je lui ai répondu que nous pouvions le savoir précisément en quelques semaines, de façon à pouvoir dire à un partenaire industriel qui veut qu'un projet de recherche soit effectué à l'université : «les frais généraux de votre contrat s'élèvent à tant, et voici pour quelles raisons». Je crois que c'est possible.
M. Walker: Je vous remercie.
J'ai une autre question à poser, monsieur le président.
Le président: Est-ce que ce sera une question intelligente?
Des voix: Oh, oh!
M. Walker: J'en pose rarement deux de suite.
Des voix: Oh, oh!
M. Walker: Je m'adresse maintenant à la Fondation de Vancouver. Comme le sait M. Richardson, nous avons rencontré ces derniers temps un certain nombre de fondations de façon à essayer de voir clairement ce qu'il est possible de recommander.
Vous avez évoqué les organisations communautaires, sur lesquelles on a attiré notre attention, ainsi que les questions liées aux capitaux. Comment avez-vous fait pour recueillir un si grand nombre de donations à la Fondation de Vancouver - et c'est à peu près la même chose pour la Fondation de Winnipeg: c'est un montant énorme - sans parler de la question soulevée par les donations en capital, qui sont de plus en plus populaires au sein des fondations qui s'adressent à nous? Comment avez-vous fait pour accumuler un si grand nombre de donations dans le système actuel?
M. Mulcaster: Au cours des 50 ans d'histoire de la Fondation de Vancouver, il y a eu au départ des gens qui ont vu loin et qui se sont rendu compte qu'il était nécessaire de donner aux différentes collectivités la possibilité de se doter de réserves financières susceptibles de répondre aux besoins de leur population. Les gens qui croient en ce mécanisme ont tendance à appuyer ce genre d'initiative et c'est pour cette raison que la Fondation de Vancouver, celle de Winnipeg ainsi que les 70 autres fondations du Canada recueillent de l'argent.
Que ce soit pour des raisons fiscales, on obtient des réductions d'impôt en agissant ainsi, ou encore pour des motifs charitables, c'est une chose que bien des gens jugent bon de faire. Il y a là un certain équilibre. Les gens veulent appuyer leur collectivité et se servent en même temps de la fiscalité pour en bénéficier eux-mêmes.
En raison de la tendance au transfert de richesse dont nous avons parlé et étant donné qu'il y aura des trillions de dollars en jeu, les fondations communautaires sont le véhicule tout trouvé dans lesquelles on laisse de l'argent pour que l'on puisse bâtir des collectivités plus solides. Nous voyons que cette tendance est de plus en plus forte, et c'est pourquoi les fondations communautaires progressent aussi rapidement.
M. Walker: Très bien.
Le président: Merci, monsieur Walker. C'était étonnamment intelligent.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Puis-je maintenant passer la parole à M. St. Denis?
M. St. Denis (Algoma): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous d'être venus.
J'aimerais poursuivre moi aussi sur la question des fondations communautaires. Ce qui se passe est une révélation, du moins pour quelques-uns d'entre nous, au sein de ce comité, et je crois bien franchement que nous ne voyons que la pointe de l'iceberg. Le potentiel qu'offrent les fondations communautaires, pas simplement dans des grandes villes comme Vancouver, Winnipeg, etc., mais aussi dans des villes plus petites et même dans les petites localités des régions rurales, m'apparaît énorme.
Pourriez-vous me dire comment votre action pourrait se dérouler dans une plus petite localité. Quels seraient les changements qu'il faudrait apporter, sans qu'il en coûte aux provinces et au gouvernement fédéral des sommes énormes par le biais de la fiscalité, pour vous aider à faire ce que vous faites et faciliter la tâche des villes de 500, 1 000 ou 2 000 habitants qui veulent créer des fondations du même type qui, à mesure que les gouvernements centraux vont déléguer leurs responsabilités, seront tenues de prendre la relève?
Par ailleurs - et son honneur M. Les, le maire de Chilliwack, pourra aussi me répondre sur ce point - est-ce que vous concurrencez Centraide? Est-ce une clientèle différente, une façon de procéder différente? L'argent disponible est limité. Comment concevez-vous les campagnes de financement annuelles de ce genre d'organisations comparativement aux besoins à long terme que vous semblez devoir combler. Il me semble que ce que vous faites peut se révéler très utile à notre pays.
M. Mulcaster: Laissez-moi répondre tout d'abord à la dernière partie de votre question; en l'occurrence, les rôles respectifs de Centraide et de la fondation communautaire.
Nous avons des rôles complémentaires. La Fondation de Vancouver entretient des relations de travail très étroites avec le service de Centraide du sud de la partie continentale. Parmi les personnes qui assistent aujourd'hui à nos audiences, il y a Shamin Lalani, qui siège au sein du conseil d'administration de la Fondation de Vancouver en qualité d'ancien président du service de Centraide du sud de la partie continentale.
Nous considérons donc que nous collaborons très étroitement avec tous les partenaires en place.
Il vous suffit de considérer que la fondation communautaire est le compte d'épargne d'une société philanthropique alors que Centraide en est le compte de chèques pour voir qu'il y a des sommes d'argent qui passent par Centraide et qui sont dépensées chaque année alors que la fondation communautaire est en mesure de recueillir de l'argent qui sera utilisé à l'avenir. Elle s'efforce donc de constituer un patrimoine dont on pourra se servir plus tard.
De nombreux défis se posent aux fondations communautaires, étant donné qu'elles interviennent dans tous les secteurs ainsi que dans tous les milieux à but non lucratif.
L'un des problèmes que nous voyons, c'est l'égalité des conditions imposées à chacun. Tout le monde n'est pas placé sur un pied d'égalité pour ce qui est de la fiscalité du secteur à but non lucratif. Il y a des fondations, par exemple, qui ont l'avantage, du point de vue de la fiscalité, d'être des fondations d'État. Nous reconnaissons l'importance des fondations d'État en ce sens qu'elles donnent à un plus grand nombre de gens la possibilité de faire des dons, mais les fondations qui ne possèdent pas ce statut deviennent moins intéressantes. Les fondations communautaires ne bénéficient pas de ce statut pour l'instant et nous considérons que c'est une question que doit envisager le gouvernement fédéral, soit de mettre tout le monde sur un même pied ou d'envisager de conférer le même statut aux fondations communautaires.
M. St. Denis: Lorsque nous sommes allés à Winnipeg, nous avons entendu l'intervention de la fondation Thomas Sill, qui est je crois une fondation charitable privée. Elle nous a fait savoir qu'en vertu des règles actuelles elle enregistrait quelque excédent, je ne connais pas tous les termes techniques - qui lui a permis de reverser des fonds à certaines collectivités rurales.
Imaginons que votre conseil estime qu'il serait bon pour Vancouver que quelques localités environnantes aient la possibilité de se doter d'une fondation communautaire. Si je comprends bien, on ne pourrait pas le faire pour l'instant, n'est-ce pas?
M. Mulcaster: Depuis un certain nombre d'années, la Fondation de Vancouver a en fait pour priorité d'aider davantage de fondations communautaires à se créer au Canada, et plus particulièrement en Colombie-Britannique. Nous avons joué un rôle clé dans la création des fondations communautaires du Canada, qui est l'organisme national représentant toutes les fondations communautaires - je suis l'avant-dernier président de cette organisation - chargé de développer le réseau des fondations communautaires au Canada. Nous avons l'appui des fondations.
M. St. Denis: Pouvez-vous leur transférer une partie de vos fonds?
M. Mulcaster: Non. C'est davantage une question d'organisation, contribuer à l'accroissement du réseau.
En Colombie-Britannique, nous avons parlé avec la plupart des collectivités de la province de la création de fondations communautaires. Certaines d'entre elles vont mettre leurs fonds en commun avec les nôtres. Elles vont verser leurs capitaux dans la Fondation de Vancouver. Il en résultera la création d'une réserve plus importante, dotée de plus de compétences et de plus de capacités à investir.
M. St. Denis: Avec des compétences administratives.
M. Mulcaster: Plus efficaces, ce genre de chose.
Nous avons à l'intérieur de la Fondation de Vancouver neuf fondations communautaires dont nous administrons les capitaux. C'est efficace.
Les collectivités connaissent leurs besoins. Les services et les groupes communautaires sont compétents et en mesure de répondre aux besoins. Ce qu'ils ne savent peut-être pas toujours faire, c'est rassembler les capitaux, dans certains cas. Quant aux universités, elles en ont bien entendu la capacité. Elles le font, et d'autres le font aussi.
M. St. Denis: Si j'habite par exemple Smithville, qui s'est organisée ou a passé un contrat avec la Fondation de Vancouver pour que cette dernière administre ses fonds, en fin de compte, il s'agit de la Fondation de Smithville.
M. Mulcaster: Il s'agit de la Fondation de Smithville, et notre tâche est d'investir l'argent et de verser un rendement au même taux et sans frais supplémentaires, mais au même coût d'administration que celui que nous encourons pour administrer nos propres fonds. Il devient donc efficace et rentable pour Smithville de créer cette fondation et de la faire fonctionner en conférant aux donateurs potentiels la confiance nécessaire, ces derniers sachant que les fonds seront bien gérés et bien investis et qu'il y aura une caisse permanente qui fonctionnera à perpétuité. Si les activités locales de Smithville ralentissent pendant quelque temps, le conseil d'administration de la Fondation de Vancouver, qui dispose de cette caisse plus importante, s'assurera que l'argent soit affecté en conséquence.
M. St. Denis: Y a-t-il un conseil d'administration local à Smithville?
M. Mulcaster: Oui. Il est enregistré en tant que fondation communautaire fédérale ou en tant que groupe charitable.
M. St. Denis: Et c'est lui qui prend les décisions pour ce qui est de l'affectation des crédits, sans avoir cependant à s'inquiéter de la gestion.
M. Mulcaster: C'est exact.
La fondation Thomas Sill du Manitoba a estimé que la meilleure façon pour elle de s'implanter dans les collectivités - et dans un certain sens, c'est une fondation familiale ou une fondation d'entreprise, j'imagine - c'est de recourir aux fondations communautaires. Il suffit d'acheminer l'argent par l'intermédiaire de la fondation communautaire, les gens de la localité - Smithville, dans le cas qui nous occupe, ou toute autre localité - étant les mieux à même de savoir où sont les besoins.
M. St. Denis: Puis-je demander au maire de Chilliwack d'ajouter quelque chose, monsieur le président?
M. Les: C'est avec plaisir que j'ajouterai deux mots. Chilliwack s'est dotée il y a une dizaine d'années d'une fondation qui se débrouille bien, même si elle n'a pas l'ampleur de celle de Vancouver. Nous avons à l'heure actuelle un million de dollars au sein de la fondation et cette somme augmente chaque année.
Cela nous permet de faire un certain nombre de choses. Ainsi, il y a deux ans, nous avons accueilli à Chilliwack les jeux d'été de la Colombie-Britannique et nous avons fait des profits de près de 200 000$. Nous nous sommes demandés ce que nous allions faire de cet argent. Allions-nous le consacrer entièrement à l'aménagement d'un terrain de jeu ou de quelque chose comme ça? Nous avons décidé de l'investir dans la Fondation de Chilliwack, l'intérêt procuré par cette somme servant à perpétuité à financer des organisations sportives et autres. Au bout du compte, on va apporter davantage d'argent à la collectivité que si l'on s'était contenté de le consacrer à la construction d'une installation quelconque.
L'un des principaux objets de la fondation, telle qu'elle se développe, c'est le financement de subventions, de bourses d'études et autres, destinées aux étudiants qui sortent plus particulièrement de l'école secondaire, afin de financer leurs études par la suite. C'est une magnifique façon de répondre à certains besoins que l'on ne pourrait pas satisfaire autrement.
Nous avons aussi la chance de bénéficier de temps à autre à Chilliwack des largesses de la Fondation de Vancouver. Je sais que le YMCA de Chilliwack a bénéficié de subventions de la Fondation de Vancouver, et c'est aussi le cas des services communautaires de Chilliwack.
Je pense que les collectivités qui n'ont pas de fondation devraient effectivement y penser parce qu'il y a toutes sortes de gens différents dans notre société. Certains vont donner à Centraide, c'est leur vocation philanthropique. D'autres veulent laisser derrière eux un héritage qui durera plus longtemps, et c'est là que la fondation joue un grand rôle.
M. St. Denis: Ce pourrait aussi être un moyen de... je pense à la difficulté d'attirer les médecins dans les régions rurales. Vous avez parlé des bourses. Si vous pouviez aider vos étudiants à entrer dans les écoles de médecine, ce serait une excellente façon de les faire revenir ensuite dans leur collectivité en tant que médecins.
J'ai un autre point à ajouter, j'y reviendrai plus tard, si vous me le permettez.
Le président: Allez-y.
M. St. Denis: Je vous remercie.
Sur un autre sujet, j'aimerais m'adresser maintenant à M. Sulmona, de l'administration aéroportuaire. Pouvez-vous nous reparler de cette question de TPS qu'on ne peut pas percevoir sur les biens et les services qui transitent par le pays? Vous avez donné l'exemple des touristes qui descendent à Seattle et qui prennent l'autobus au lieu de l'avion.
M. Sulmona: Il y a deux exemples différents. La TPS n'est facturée que sur les billets d'avions internationaux. Les États-Unis sont considérés comme étant contigus au Canada d'un point de vue de la zone fiscale. Cela crée une situation qui entraîne l'application d'une taxe discriminatoire. Celui qui prend l'avion de Seattle à Vancouver paie la taxe, mais pas celui qui prend l'autobus ou même le traversier, par exemple. Il y a donc là un cas de discrimination.
Il y a une autre activité que l'on voit se dérouler, plus particulièrement à Vancouver, mais cela se fait de plus en plus à Toronto, et je sais que l'aéroport d'Hamilton est très impliqué dans la répartition des marchandises, notamment vers les États-Unis, Halifax et Montréal. Voilà ce qui se passe: on facture la TPS sur les marchandises qui entrent au Canada pour être transformées. Dans notre centre commercial international, ici à Vancouver, les marchandises entrent, peuvent être reconditionnées, etc., et sont réexportées vers les États-Unis. La TPS s'applique lorsque les marchandises arrivent au Canada et elle est remboursée lorsqu'elles repartent. Le problème ne vient pas du fait que la TPS soit appliquée sur ces marchandises, il vient des difficultés de crédit qui sont causées aux petites entreprises qui s'efforcent de faire ce travail. Elles doivent fournir d'importants cautionnements au gouvernement au titre de la TPS, et la nécessité de retracer toutes ces opérations donne lieu à une énorme paperasserie.
De plus, il y a de la paperasserie pour ce qui est du gouvernement du Canada. Le projet de loi C-102 règle une partie des problèmes, mais pas en ce qui concerne la TPS. C'est ce qui se passe lorsqu'on doit payer à l'avance. Nous disons que l'un des moyens de réduire en partie la paperasserie du gouvernement consisterait tout simplement à supprimer cette exigence pour les produits qui n'entrent pas au Canada de manière permanente.
Le président: Monsieur Grubel, vous vouliez dire quelque chose à ce sujet.
M. Grubel: Je crois que nous avons eu des audiences au sujet du projet de loi C-106, qui visait à faciliter les remises de droits de douane. On m'a fait savoir, étant donné que j'ai participé activement à la promotion d'une zone de libre-échange à Squamish, qu'il serait ainsi désormais possible de créer une zone de libre-échange étant donné que le problème que vous venez juste de mentionner au sujet des réexportations était le même en ce qui a trait aux droits de douane. J'avais l'impression, mais vous pouvez me corriger... et nous pourrions peut-être examiner la question: qu'il serait peut-être possible de prévoir les mêmes dispositions pour la TPS, s'il est clair que la marchandise doit être réexportée. On nous dit qu'on a rendu la chose bien plus facile.
M. Sulmona: Effectivement. En fait, ces observations ne portaient pas sur les droits de douane. Ces dispositions ont fait l'objet d'une exemption. Il y a tout simplement la disposition qui s'applique à la TPS ou encore à la CEMA, qui continue à prévoir un paiement à l'avance - suivi d'un remboursement. Nous disons simplement que c'est ici l'occasion de rationaliser les mécanismes administratifs qui s'appliquent à ce genre de marchandises.
Le président: Merci, monsieur Grubel.
C'est tout, monsieur St. Denis? Vous ne sollicitez pas des crédits de la fondation, n'est-ce pas?
M. St. Denis: Je m'excuse.
Le président: Je vais maintenant demander à tous ceux qui n'ont pas eu suffisamment la possibilité de s'exprimer lors des exposés initiaux ou en répondant à nos questions de ne pas hésiter à prendre la parole. Par ailleurs, je tiens aussi à donner à chacun d'entre vous la possibilité de résumer, en 30 secondes, le point de vue qui lui est propre. J'ai arrêté certaines personnes au milieu de leur discours. Est-ce que quelqu'un a quelque chose à ajouter?
Monsieur Pawluk.
M. Pawluk: J'aimerais évoquer plus directement la situation du déficit et de la dette et insister à nouveau sur le fait qu'en essayant de supprimer le déficit ou de réduire nos programmes sociaux, on n'agit que sur 6 p. 100 de la part de notre dette. Le paiement de nos intérêts en représente 50 p. 100. Nous devons nous attaquer aux taux d'intérêt ici même au Canada; les déterminer au profit des Canadiens. C'est prévu dans notre législation, le gouvernement fédéral étant en mesure d'orienter les politiques de la Banque du Canada.
En second lieu, il y a ces 44 p. 100 de recettes non recouvrées et d'impôts reportés. Il est incroyable qu'on n'en tienne pas compte à notre époque.
Le président: Madame Gullickson? Non.
M. Robinson: J'ai bien du mal à comprendre la façon dont on procède.
Le président: La façon dont on procède est bien simple. Si vous voulez prendre le temps de préciser un certain nombre de points que vous n'avez pas eu le temps d'évoquer ou que l'on n'a pas abordé au cours des questions - vous me suivez? - nous serons alors heureux de vous entendre.
M. Robinson: J'aimerais savoir si ce document va être lu par tous les membres de votre comité - et si l'on va me donner une réponse, sinon j'aimerais en lire la suite pour qu'au moins je puisse le faire consigner dans le procès-verbal de nos délibérations de cet après-midi, parce que ce n'est pas...
Le président: Combien de temps vous faudra-t-il pour le lire afin qu'il soit consigné dans notre procès-verbal?
M. Robinson: J'imagine que ça prendre cinq ou six minutes.
Le président: Il serait préférable que vous le résumiez.
M. Robinson: Excusez-moi. Nous traitons d'un problème plutôt grave dans notre pays...
Le président: Je sais...
M. Robinson: ... vous m'avez invité à participer et vous m'avez assez mal traité, et je pense que vous avez assez mal traité un certain nombre de personnes autour de cette table, dans le cadre de cette séance. Lorsqu'on se présente ici et que l'on nous dit que nous disposons de trois minutes alors que l'année dernière il y avait...
Le président: Monsieur Robinson, le greffier vous a fait savoir avant de venir que vous disposiez de trois minutes pour présenter votre exposé liminaire.
M. Robinson: Non, absolument pas. Sherrill se joint à moi pour dire qu'elle n'avait certainement pas idée que l'intervention n'allait durer que trois minutes. L'année dernière, nous avons certainement disposé de plus de trois minutes.
Le président: Bon, je comprends. Excusez-moi, alors. Les règles qui s'appliquaient partout ailleurs au Canada prévoyaient trois minutes, mais je vous fais mes excuses. C'est notre faute. Faites selon ce qui vous conviendra le mieux, monsieur Robinson.
M. Robinson: Je vais donc poursuivre mon exposé et rétablir les choses en espérant que d'autres, auxquels on a coupé la parole, en feront autant.
Le président: Je leur ai demandé de le faire.
M. Robinson: Il est demandé dans le rapport que l'on remette les choses en ordre. Que faut-il faire en premier? À l'heure actuelle, les priorités du Canada sont une inflation zéro, puis viennent ensuite la réduction des déficits, la création d'emploi et enfin la santé de l'économie. Comme nous l'avons évoqué, l'inflation négative a joué contre la santé de l'économie et pour pouvoir réduire le déficit, il faut une économie en bonne santé. La création d'emploi et une économie en bonne santé doivent être les grandes priorités.
La Banque du Canada a imposé au gouvernement canadien l'objectif de l'inflation zéro. Cette année, la banque a entrepris de publier des rapports et voici ce qu'il ressort du rapport sur la politique monétaire de novembre 1995.
Au cours des quatre années et demie qui viennent de s'écouler, la Banque du Canada a poursuivi avec succès des objectifs de lutte contre l'inflation, et depuis la publication du dernier rapport en mai, l'économie canadienne est plus faible que prévu et le marasme est par conséquent plus élevé sur les marchés de la main-d'oeuvre et des produits.
Il semble que cela signifie qu'il faille nous féliciter de notre performance alors que nombre de gens n'ont pas de travail.
Il semble que la Banque du Canada ne rende des comptes qu'à elle-même et qu'elle dirige l'action du gouvernement.
Il fut un temps, après la Deuxième guerre mondiale, où le gouverneur de la Banque du Canada, Graham Towers, considérait que sa grande priorité était la mise en place d'une économie stable et en bonne santé. Ainsi que l'a déclaré Graham Towers, avant la fin de la guerre, si nous ne réussissons pas cette fois-ci à bâtir un pays et un monde qui soit meilleur une fois que l'on aura obtenu la paix, ce ne sera pas par manque de connaissances, mais parce que... [Difficulté technique - Éditeur] ...le gouvernement usant de tous les pouvoirs qui lui sont propres pour rétablir la santé économique du Canada.
Pour ce qui est de la politique économique, on voit à la lecture du rapport sur la politique monétaire que la Banque du Canada se contente d'utiliser des taux d'intérêt pour lutter contre l'inflation. Lorsque les pressions inflationnistes poussent le dollar vers le haut, la réaction se fait au niveau des taux d'intérêt. Il en résulte des réductions de salaire et (ou) des suppressions d'emploi. L'inflation reste à zéro et l'économie se porte mal.
Toujours à propos de la question des pressions inflationnistes, un entrepreneur qui devrait se limiter à l'utilisation d'un bulldozer pour déplacer de la terre aurait du mal à travailler efficacement si ce dont il a besoin, c'est d'une pelle mécanique ou manuelle. Les pressions inflationnistes ont une multitude de causes et exigent une multitude de réponses.
Prenons un exemple local. Il y a des pressions inflationnistes bien déterminées à Vancouver qui font grimper la valeur de l'immobilier. En prévision de la prise de contrôle par la Chine en 1997, l'économie de Hong Kong souffre d'une grande instabilité. Par conséquent, les résidents de Hong Kong ont fait de gros investissements dans l'immobilier de Vancouver.
Les services de prêts commerciaux des banques se sont regroupés dans les grands centres. Les clients de ces services - ceux qui créent les emplois et qui les maintiennent - préfèrent s'implanter dans des villes qui permettent de s'adresser plus facilement à ces services.
Face à ces pressions, des interventions précises permettant d'attirer la population dans d'autres localités de la C.-B. sont plus intéressantes que la réduction des chèques de paie ou la mise à pied des employés.
Aux termes de ces interventions, lorsque les causes précises des pressions inflationnistes auront été identifiées, la Banque du Canada devra être équipée de toute une gamme d'outils pour pouvoir apporter des réponses précises et bien adaptées.
Sur la question de la réduction du déficit, il pourrait être utile de décrire la scène suivante. Pensez à un chariot qui serait tiré sur une route par un cheval appelé Cendrillon. Comme on peut l'imaginer, le conducteur ressemble à la belle-mère et le chariot n'avance pas assez vite sur la voie de ce que l'on appelle la réduction du déficit. La belle-mère se dit: «Si je lui donne un repas supplémentaire et si je retire huit filets de sécurité, le chariot avancera peut-être plus vite.» Aussitôt dit, aussitôt fait, mais le chariot n'avance pas plus vite pour autant.
La belle-mère se dit que son cheval est paresseux et elle donne des coups de bâton à Cendrillon. Elle continue comme ça pendant longtemps, il arrive que le cheval accélère un peu, mais l'objectif de la réduction du déficit est encore loin. Un an plus tard, alors que l'on n'a pas fait beaucoup de progrès et que les coups de bâton ont plu sur Cendrillon, un Canadien vient à passer et dit à la belle-mère qu'il l'a entendue lorsqu'elle a affirmé tout haut qu'il fallait se débarrasser d'autres filets de sécurité. Donner des coups de bâton au cheval est peut-être satisfaisant, mais on ne parviendra jamais à réduire le déficit si l'on ne gonfle pas les pneus du chariot. Ces pneus vont être gonflés grâce aux emplois et à l'augmentation des salaires des travailleurs, et leur déficit se réduira sans aucun problème. En passant, le crédit est une excellente pompe parce qu'il gonfle tout ce qui se trouve à portée, c'est-à-dire les gens qui sont sortis du système, et plus particulièrement les jeunes. On serait surpris de voir la charge qu'ils peuvent transporter.
Il a fallu du temps, mais la belle-mère a finalement compris. Elle a arrêté de frapper Cendrillon à coups de bâton. Elle a appris à se servir du crédit pour gonfler les pneus. Elle a même fini par apprécier Cendrillon. On a pu voir dernièrement qu'elle avait dépassé la réduction du déficit et qu'elle était en voie de réduire la dette.
Espérons que cette fin heureuse se produira bientôt. Le but est de réduire le déficit d'une manière qui profite à tous les Canadiens. En deux ans, il faut ramener les revenus familiaux au niveau de 1989, ce qui suppose une augmentation de 5 p. 100, et réduire de moitié le chômage. Ces objectifs devraient ramener le déficit à moins de 3 p. 100 du PNB.
J'aborderai maintenant la nécessité de bâtir une saine économie ainsi que la question du conformisme. De plus en plus de travailleurs ont choisi de ne pas se conformer aux valeurs des employeurs ou s'y conforment sans enthousiasme. Cela joue contre la productivité. La population canadienne se rend compte que cette tendance est cause d'instabilité pour l'avenir. Il convient d'agir pour que le cadre de travail attire tous les Canadiens. Au Nouveau-Brunswick, on s'est donné pour priorité d'instiller la confiance et l'espoir chez les gens. Cette attitude devrait s'étendre à l'ensemble du Canada.
Des capitaux sont à la disposition des grosses entreprises bien établies au Canada. Comme l'a dit M. Yung, les crédits sont coupés pour les petites entreprises et celles qui démarrent. La créativité est un élément fondamental d'une économie en bonne santé et il convient de l'encourager. Il s'agit de se servir du crédit pour créer des emplois et injecter des capitaux dans les petites entreprises et celles qui démarrent. Tout prêt qui est remboursé représente une grosse économie pour les gouvernements.
Il y a ensuite le crédit. Celui qui est sans emploi peut trouver du travail, recevoir des fonds du gouvernement ou encore de crever de faim. J'espère que vous vous joindrez à moi pour ne pas souhaiter que les gens crèvent de faim. En accordant des subsides, on abaisse les bénéficiaires et on crée des déficits; en procurant des emplois par le moyen du crédit, on permet aux gens de s'élever.
Prenons le cas d'un petit entrepreneur qui projette d'engager deux personnes au chômage coûtant aux gouvernements 30 000$ par an en paiements directs et en supervision. Cet entrepreneur bénéficie d'une garantie de prêt de 40 000$. Dans l'idéal, ce prêt sera remboursé. Les activités de l'entrepreneur vont continuer à se développer, il va engager davantage de gens et deux personnes verront leur carrière se rétablir. Les gouvernements réaliseront ainsi une économie directe de 30 000$ et les recettes fiscales augmenteront de leur côté. Il s'agit par là de bâtir le Canada et de réduire le déficit en mettant sur pied un système de prêts qui crée des emplois.
L'Union européenne a inventé le terme de «subsidiarité». En vertu de la subsidiarité - et nous avons évoqué ce principe tout à l'heure - toutes les tâches du gouvernement doivent être exécutées par le plus petit service en mesure de le faire. Les gros services ont pour tâche d'aider, d'appuyer et d'établir les normes. Ce sont les collectivités locales qui sont les mieux placées pour créer des emplois chez elles. Cette façon d'agir permettra de créer rapidement des emplois et de faire revivre nos collectivités dans tout le Canada. Le but est de donner la responsabilité aux collectivités de créer des emplois, en leur donnant la possibilité de garantir le crédit, comme l'exigent les créateurs d'emplois, conformément aux besoins du marché local de l'emploi.
Les mesures qui précèdent entraîneront un grand changement au Canada et remettraient le pays sur le chemin de la stabilité. En attribuant la faute à la victime, en usant du bâton et en créant une atmosphère de crise, on déstabilise l'économie. Vous avez la chance insigne qu'une saine économie puisse être mise sur pied en raison de la force morale de la population canadienne.
Les Canadiens se sont rassemblés récemment à Montréal parce qu'ils aiment notre pays et ils nous ont sorti d'une situation difficile. Les déficits sont une source de difficulté au Canada. Si vous agissez de manière à tirer parti de ce qu'il y a de meilleur chez tous les Canadiens, vous êtes sûr de réussir.
Merci de m'avoir accordé ce temps de parole.
Le président: Merci, monsieur Robinson.
Je vous ai vu lever la main, monsieur Buchanan. Voulez-vous ajouter quelque chose? C'est avant que nous passions à notre résumé de 30 secondes, auquel tout le monde aura droit.
M. Buchanan: J'allais essayer de le faire en 30 secondes, et je pourrais donc commencer ce tour de table.
Le président: Vous pouvez prendre plus de temps.
M. Buchanan: Si l'on veut réaliser les objectifs nationaux qui représentent le défi que nous avons choisi de relever au cours de cette séance, il nous faudra apporter de nombreuses améliorations, grandes et petites, dans tous les domaines. À mon avis, il n'y a pas de solution magique qui s'impose d'emblée.
Les fondations communautaires polyvalentes telles que les nôtres sont un outil précieux si on nous accorde le même traitement fiscal qu'aux fondations à objectif unique. Cela peut se faire facilement sur le plan individuel ou au sein d'une même catégorie, et sans frais.
Ce secteur serait, ainsi en mesure de recueillir des capitaux, principalement d'héritages, afin de les investir dans notre économie, les fonds étant capitalisés et les revenus que l'on en tire nous permettant de mieux faire face à l'évolution de la demande au niveau de nos collectivités. Cela permettrait d'atteindre ou d'aider à atteindre les objectifs nationaux qui sont d'améliorer les conditions de l'emploi et de la croissance en appuyant le développement du capital humain de nos collectivités et des capitaux financiers investis dans notre pays.
Nous allons laisser aux membres du comité une copie du dernier rapport annuel de la Fondation de Vancouver et nous sommes prêts à répondre à toute question et à tout commentaire au moment voulu.
Le président: Monsieur Campbell.
M. Campbell: Lors de ma première intervention, j'ai dit que j'aimerais parler de l'immigration. Bien entendu, l'ensemble du problème est trop complexe pour qu'on le règle ici. Dans les notes que je vous ai remises, j'ai fait figurer un certain nombre d'informations, mais j'aimerais souligner maintenant une ou deux choses qui se passent chez nous.
J'ai mentionné à un moment donné l'étude faite en matière d'éducation dans le sud de la partie continentale. On a constaté il y a deux ans que 43 000 adultes de la Colombie-Britannique ne connaissaient pas l'anglais, 129 000 le connaissaient très mal alors que 12 000 personnes appartenant à ces catégories allaient arriver en Colombie-Britannique au cours de chacune des cinq prochaines années. En 1994, 24 000 personnes n'ayant aucune notion d'anglais sont entrées. Il y avait 7 600 étudiants, ce qui correspond à 300 classes. Il y avait 16 400 adultes qui ne parlaient absolument pas anglais et qui en auront besoin pour se débrouiller chez nous.
Le gouvernement a un programme d'instruction pour les nouveaux arrivants au Canada qui s'intitule CLIC. Le financement accordé au titre du programme CLIC en Colombie-Britannique s'élève cette année à 18,6 millions de dollars. Il ne sert que 5 544 demandeurs. C'est moins de 40 p. 100 du nombre de gens qui sont arrivés l'année précédente et qui ont besoin de cette langue. Nous n'y arrivons tout simplement pas.
En conséquence, on se retrouve avec des ghettos ethniques dans lesquels les gens parlent leur langue. De ce fait, 45 p. 100 des élèves des écoles de Vancouver sont dans des classes d'anglais langue seconde et, parmi ceux-ci, 40 p. 100 sont nés au Canada. Nous avons donc abandonné la possibilité qu'avaient les enfants d'apprendre la langue de leur nouveau pays en jouant avec leurs petits voisins.
M. Pawluk: Monsieur le président, est-ce que l'on peut faire appel au règlement?
Le président: Vous pouvez faire tout ce que vous voulez, monsieur Pawluk. C'est nous qui sommes ici à votre disposition et non pas le contraire.
M. Pawluk: Je vous remercie, monsieur le président.
Je pense que tout ceci n'a rien à voir avec la nature de la question à l'ordre du jour, et il s'agit ici du comité des finances...
Le président: Monsieur Pawluk, je me dois de rejeter votre rappel au règlement.
Continuez, monsieur Campbell.
M. Campbell: C'est un problème commun à tous les secteurs.
Donc, que faisons-nous? Pour vous donner un exemple de ce qui peut se passer, nous avons une nouvelle catégorie d'immigrants qui a été mise sur pied l'année dernière. C'est la catégorie ayant été frappée d'une ordonnance de sortie du pays dont l'exécution a été reportée. Il s'agit de demandeurs qui n'ont pas réussi à obtenir le statut de réfugié et qui sont sous le coup d'une ordonnance de sortie du pays depuis trois ans mais qui ont réussi à garder un emploi pendant six mois depuis qu'ils ont présenté leur demande; alors que cette demande a pu être déposée il y a quatre ou cinq ans. Sans tenir compte du degré d'alphabétisation, des qualifications ou de toute autre chose, nous allons cette année laisser 2 500 personnes de cette catégorie rester dans notre pays, des gens qui sont tout simplement là parce qu'ils se sont prévalus des failles du système. Nous n'avons pas non plus les moyens de les éduquer.
Le problème est donc très complexe, il est très grave, et je vous adjure de vous pencher sur la question.
Le président: Merci, monsieur Campbell.
Qui d'autre veut dire un mot avant que nous fassions un tour de table en guise de conclusion?
M. Albanese: Au sujet de l'immigration, je crois savoir que les immigrants sont les moins nombreux à se retrouver à l'aide sociale. Je ne crois pas que les chiffres correspondant à l'immigration... Ce pays a été bâti avec des immigrants et avec des moyens de ce genre. Ce sont des membres productifs de notre société.
Les ghettos ethniques dont vous parlez... Nous avons des ghettos, par exemple, pour ce qui est de la pauvreté.
Ils lancent des entreprises, comme l'a fait M. Yung lorsqu'il est arrivé ici. Je ne crois pas que ce soit la grande préoccupation dans notre situation actuelle: des immigrants qui épuiseraient toutes les richesses du pays. Il y a des choses bien plus pressantes...
M. Campbell: Soyons clairs. Je n'ai rien dit de cela, je ne suis pas contre l'immigration et contre les immigrants. Je parlais des failles du système qui doivent être corrigées. Voilà de quoi je parlais.
M. Albanese: Vous semblez accorder une attention toute particulière aux gens qui ne parlent pas anglais. J'imagine que vous espérez que l'on fournira davantage d'éducation à ces gens pour qu'ils deviennent des membres productifs de la société.
M. Campbell: Je faisais simplement remarquer que nous faisons entrer ces gens si rapidement que nous n'avons pas le temps de les éduquer, de nous en occuper. Ce qui arrive entre autres lorsque nous faisons venir ces gens dans notre pays, c'est qu'ils s'attendent à réaliser de grandes choses mais qu'ils ne pourront pas y parvenir parce que nous n'avons pas les moyens de leur dispenser les services. C'est là le problème.
M. Albanese: Très bien. J'insistais simplement sur le fait qu'à mon avis ce sont des membres productifs de la société, qu'ils veillent à leur entretien et qu'ils apportent effectivement une contribution à la société. Donc, dans cette mesure, ils n'agissent pas au détriment de la société.
M. Campbell: J'ai demandé que tout cela soit examiné. On dit bien des choses qui ne sont pas vraies. Certaines des choses que vous venez de dire ne correspondent pas à la vérité, mais je ne veux pas me lancer sur le sujet.
Je dis tout simplement que c'est un problème très grave qui coûte très cher à notre société. Ce n'est pas juste, même pour un grand nombre d'immigrants. Nous avons l'obligation d'examiner la question en profondeur, et cet examen n'a pas eu lieu au cours des 25 dernières années. Nous nous sommes simplement laissés aller.
M. Albanese: Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faut revoir la question et procéder à des études, mais parallèlement je crois que cela nous empêche de voir qu'il y a des problèmes plus pressants au sujet des reports d'impôt, comme l'a dit M. Pawluk. Il y a des quantités énormes de capitaux qui sont laissés de côté, et c'est autre chose que les immigrants qui tireraient parti du système ou autre chose de ce genre.
M. Pawluk: Je m'excuse, mais à mon avis M. Grubel et M. Campbell devraient faire part de leurs préoccupations au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes.
Le président: J'ai pu constater que le Comité permanent des finances servait de paratonnerre sur presque toutes les questions qui ont plus ou moins à voir avec l'argent. Il semble que ce soit le lien qui nous réunisse ici.
Le mécanisme budgétaire a de multiples dimensions étant donné que tout programme que nous payons doit passer par le budget. Étant donné que ces programmes entraînent des dépenses ou des recettes, ils passent en quelque sorte par notre bureau.
Il arrive qu'un autre comité de la Chambre des communes nous aide sur l'une ou l'autre de ces questions, mais nous n'avons pas peur de la responsabilité qui consiste à traiter de tout ce qui touche à l'argent dans notre pays.
Je pense que notre séance tire à sa fin. Je n'ai vu personne d'autre qui veuille prendre la parole.
Pour ce qui est des interventions de 30 secondes en guise de conclusion, nous allons commencer notre tour de table par M. Yung. Vous n'êtes pas obligé d'intervenir si vous ne le souhaitez pas.
M. Yung: Ma conclusion sera bien simple. Je partage la philosophie de M. Lawrie au sujet de la simplification de notre fiscalité. En ce qui me concerne, Il ne s'agit pas de savoir combien on gagne, mais combien on garde après impôt.
Il faut que cet argent revienne à la population. Il faut faire en sorte qu'elle dépende d'elle-même et non pas du gouvernement.
Le président: Monsieur Sulmona.
M. Sulmona: Merci de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer aujourd'hui. Nous vous ferons parvenir par écrit notre point de vue actuel ainsi que certaines de nos observations au sujet des questions de politique. Malheureusement, nous n'avons pas pu le faire aujourd'hui.
Nous vous demandons simplement d'envisager de rationaliser le fonctionnement du gouvernement.
Le président: Monsieur Albanese.
M. Albanese: Merci encore de m'avoir invité ici à prendre la parole.
Je me demande encore pourquoi nous cherchons à tout prix à maintenir des taux d'intérêt élevés pour bloquer l'inflation et attirer les investissements étrangers. Il semble que ce soit notre priorité, attirer les capitaux étrangers sans se préoccuper des structures de soutien du capital humain de notre pays et sans veiller sur les investissements que nous avons faits par le passé.
Il faut espérer que l'on en fasse des priorités à long terme et que l'on se débarrasse de notre déficit en éduquant notre population et en prenant soin de nos programmes sociaux.
Le président: Monsieur Lee.
M. Lee: Je tiens moi aussi à remercier le comité.
Il y a une chose que je veux moi aussi souligner. Je rejoins en quelque sorte M. Lawrie pour dire que la productivité est à la base de la politique qui consiste à bâtir le Canada.
Je crois qu'il y a - j'utiliserai le jargon - un «changement de paradigme» en ce qui a trait à la façon dont la souveraineté économique du Canada peut s'exercer. Je parle du fait que la productivité est fondée sur l'économie réelle mais qu'à mon avis l'une des grandes difficultés qui se pose au ministre des Finances c'est de faire face aux pressions qui s'exercent à partir d'une économie fictive. À l'avenir, il va falloir que le ministère des Finances aborde la question de cette économie fictive et la façon dont elle influe sur les décisions budgétaires que prend le Canada.
Le président: Madame Gullickson.
Mme Gullickson: J'ai remis une copie de mon exposé à quelqu'un du premier rang. Je demande aux membres du comité de la lire.
Je n'ai pas l'impression que l'on m'ait vraiment accordé audience et je me félicite en fait de ne pas avoir pu finir mon intervention. Je vous demande donc de lire la copie de mon exposé.
J'aimerais remercier les autres témoins que nous avons entendus aujourd'hui. Les réponses sont là. J'espère simplement qu'on les a entendues.
Je vous remercie.
Le président: Merci, madame Gullickson.
Monsieur Robinson.
M. Robinson: Nous avons longuement traité au cours de cette séance de l'après-midi de choses qui, comme vous le dites, ont trait à l'argent. Sherrill représente ici les gens qui n'ont pas d'argent et je ne pense pas qu'on lui ait accordé l'audience qu'elle mérite.
Le président: On peut alors...
M. Robinson: Je voudrais que ce soit dit clairement, et...
Le président: Monsieur Robinson, je vous arrête.
Madame Gullickson, prenez le temps dont vous avez besoin. Nous avons répété cette offre à cinq reprises déjà...
M. Robinson: On n'a pas entendu autour de cette table ce qu'elle avait à dire et ce n'est pas ressorti des conversations. Elle me faisait remarquer que pendant que je lisais mon mémoire vous discutiez gentiment entre vous.
Je considère que c'est ridicule, lorsqu'on traite d'un sujet aussi important...
Le président: Bon, allez-y...
M. Robinson: ...parce que la population du Canada souffre de la mauvaise gestion de l'économie canadienne. L'instabilité est bien plus grande cette année qu'elle ne l'était l'année dernière. Si le comité aborde les choses de cette façon, elle sera encore considérablement plus élevée l'année prochaine.
Dans notre pays, la population vit dans la crainte des conséquences des compressions budgétaires décrétées par le budget de M. Martin en février dernier. Nous vivons dans un pays qui a peur de perdre une province. Nous vivons dans un pays qui a perdu sa stabilité et qui ne sait plus où il va. Il y a des gens qui souffrent - nous parlons de personnes comme vous et comme moi - et je vous dis que les intérêts des gens que représente Sherrill sont tout a fait essentiels et qu'il faudrait leur accorder tout l'après-midi parce que le reste est relativement accessoire.
Le président: Sentez-vous bien libre, madame Gullickson, de prendre tout le temps que vous voudrez. J'ai déjà fait cette offre et je la répète.
Mme Gullickson: Il est maintenant difficile pour moi de le faire. Je suis assise depuis un moment et je vous écoute, je ne veux pas être négative mais je suis très bouleversée. J'entends des gens nous parler de la Fondation de Vancouver, qui défend une très belle cause et qui fait un travail phénoménal, mais je me dis en mon for intérieur: «Mon Dieu, ayez pitié des pauvres.»
Je n'ai pas entendu parler de la possibilité de donner aux gens qui ont très peu de prendre part à la vie active en trouvant du travail, en payant leurs impôts et en progressant dans la vie. Je sais que ce n'était peut-être pas voulu. Je vous ai dit que c'était une crainte personnelle qui me venait à l'esprit.
Il y a des façons d'économiser de l'argent. Il y a des façons de gagner de l'argent. On ne parle pas de l'essentiel. Il y a des gens qui sont en train de mourir. Si un homme en Colombie-Britannique quitte son emploi pour une raison quelconque, et il se peut que ce soit une raison légitime, il n'est pas autorisé à bénéficier de l'aide sociale. Il n'est pas autorisé à bénéficier de l'assurance-chômage. Il doit donc supporter des emplois qui sont absolument horribles.
Il y a bien des choses qui se passent ici et les gens ne peuvent plus faire entendre leur voix. Ils ont perdu leurs droits. Cela aussi me préoccupe. Nous n'avons pas de filet de sécurité. Nous avons besoin d'appuis pour nous relever.
Je n'ai pas l'impression qu'on nous ait accordé aujourd'hui une audience. Je suis très bouleversée de voir que ce n'était pas... M. Walker est parti.
Le président: Et alors?
Mme Gullickson: Je n'avais pas l'impression...
Le président: Nous avons le procès-verbal de la séance.
Mme Gullickson: C'est mon sentiment, vous comprenez?
Le président: Très bien. Voulez-vous davantage de temps pour faire connaître votre point de vue?
Mme Gullickson: Non.
Le président: Vous voulez davantage de temps, monsieur Robinson?
M. Robinson: Non.
Le président: Très bien.
Monsieur Pawluk.
M. Pawluk: Merci, monsieur le président.
En dépit de la situation qui règne au Québec, la principale solution, si l'on veut que le Canada soit uni, nous vient des nombreux sondages et enquêtes effectués pendant de nombreuses années. Ce qui préoccupe avant tout les citoyens du Canada, aussi bien au Québec qu'ailleurs, c'est l'économie et ce sont les emplois. Il nous faut remédier à cette situation.
Lors de la dernière élection, le Parti libéral a promis que l'emploi constituerait sa grande priorité. Il vous faut tenir cette promesse, monsieur le président.
En second lieu, il nous faut accomplir la volonté du Canadien moyen. Je comprends qu'il s'agit là d'une tribune où l'on écoute. Il vous faut écouter et mettre en pratique un certain nombre de solutions de rechange qui, en matière de politique économique, ont été proposées au comité permanent par des gens comme Neil Brooks, Jack Biddell, le Comité sur la réforme monétaire et économique et le Centre for Policy Alternatives, que ce soit cette fois-ci ou lors des consultations précédentes.
C'est tout en ce qui me concerne.
Le président: Merci, monsieur Pawluk.
Monsieur Richardson, vous n'avez pas beaucoup parlé aujourd'hui. Vouliez-vous dire quelque chose?
Christopher Richardson (directeur, Gift Planning, Vancouver Foundation): Au nom de la Fondation de Vancouver, j'aimerais conclure en disant que nous avons mis sur pied un mécanisme très simple, à deux volets, sans frais, permettant de remédier à la situation inéquitable des organismes de charité d'État qui menace les fondations communautaires ainsi que la capacité, pour les autres organisations à but non lucratif, d'être en mesure d'encadrer la croissance et l'emploi à l'avenir.
Ce n'est pas le moment ici de préciser cette solution à deux volets pouvant être apportée à la Loi de l'impôt sur le revenu, parce que cela pourrait soulever certaines questions, mais nous vous fournirons une analyse par écrit de la question.
Je vous remercie.
Le président: Merci, monsieur Richardson.
Professeur Bressler.
M. Bressler: Je tiens grandement à vous remercier de la possibilité que vous nous avez donnée de présenter un mémoire aujourd'hui. Ce mémoire, nous vous le laissons et il figurera donc au dossier.
Par ailleurs, en dépit du fait que certains membres des groupes invités sont bouleversés par le fait qu'ils n'ont peut-être bénéficié de l'audience à laquelle ils s'attendaient, je dois dire qu'avant les deux dernières années - ou peut-être est-ce trois; je ne sais plus quand a eu lieu l'élection - nous n'avions pas eu la possibilité d'intervenir ainsi.
Je parle au gouvernement depuis des années des questions d'infrastructure et de recherche universitaires, et j'ai dû passer la plupart de mon temps à Ottawa pour y parvenir. Nous avons ici la possibilité de le faire dans notre propre province et dans notre propre ville. Je tenais simplement à dire qu'il s'agit là d'une démarche très différente et que nous l'apprécions.
Le Dr Hardwick voudrait faire quelques commentaires en guise de conclusion.
Dr Hardwick: Je vous remercie de la possibilité qui nous est offerte. Je conclurais en appuyant le rapport du CCNST, un rapport important et bien équilibré à notre avis.
Le deuxième élément a trait à la façon dont l'économie s'appuie sur la recherche. Il est utile de lire l'ouvrage de Richard Reich, The Work of Nations. On y voit l'importance de diriger notre économie en nous fondant sur l'innovation et la créativité, et je considère que c'est une formule raisonnable.
Le troisième point que je veux soulever, je l'ai évoqué tout à l'heure, il s'agit de la restitution de différentes fonctions à la périphérie. En décentralisant les questions de financement de la santé et des universités, vous perdez votre pouvoir. Vous pouvez conserver un pouvoir sous la forme de l'information et de l'usage qui est fait de cette information pour faire en sorte que les différentes économies provinciales périphériques ne s'écartent pas de la norme.
C'est un usage légitime de cette forme de pouvoir, et l'information c'est une opération que comprennent bien les politiciens. Compte tenu de cela, je souhaite que la recherche menée au niveau fédéral pour définir les normes de notre pays dans les secteurs que vous allez décentraliser, qu'il s'agisse des pêches, de la santé ou de l'éducation, vous mettront en bonne position lorsque vous vous efforcerez de conserver des normes transprovinciales ou transnationales.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Lawrie.
M. Lawrie: Je pense m'exprimer au nom d'à peu près tout le monde en disant que je sais que vous nous avez écoutés aujourd'hui et que j'espère que vous nous aurez entendus. J'espère qu'à la suite de cet entretien qu'au moins certaines choses que nous avions à vous offrir se traduiront en actions ou du moins en bonnes intentions.
Finalement, il faut voir ici qu'il faut bien se porter pour pouvoir faire le bien. De nombreuses personnes ont parlé de faire le bien. Nous ne pourrons pas y parvenir tant que nous n'aurons pas remis de l'ordre dans notre maison. Notre maison n'est pas en ordre. À partir du moment où nous avons 500 milliards de dollars de dette, ce n'est pas exactement... Quelle en est la contrepartie, finalement?
Nous devons régler la question de notre dette. Cela étant fait, nous pourrons alors passer à bien d'autres choses qui relèvent de cette opération qui consiste selon moi à faire le bien. Toutefois, nous ne pourrons pas faire le bien si nous ne nous portons pas bien. C'est le message que je voulais transmettre en particulier à votre groupe. Remettons de l'ordre chez nous et passons ensuite aux choses qu'en tant que Canadiens nous savons particulièrement bien faire.
Le président: Merci, monsieur Lawrie.
Monsieur Campbell.
M. Campbell: Merci. J'apprécie moi aussi la possibilité qui m'a été donnée de comparaître.
Je crois qu'il est juste de dire que nous ne pouvons pas traiter exhaustivement de toutes les questions dans une rencontre comme celle-ci, mais nous pouvons exprimer notre avis sur un certain nombre de choses, et j'espère que ces idées étant exprimées, elles seront reprises et suivies par votre comité. Je suis convaincu que ce sera le cas.
Lorsque j'étais dans l'administration - et j'y suis resté pendant 10 ans - ce qui m'a le plus gêné, du moins dans le secteur où j'étais, c'est le manque de capacité de gestion. J'ai déclaré, lors de mon intervention précédente, que j'avais le plus grand respect pour les gens qui étaient à la tête de ces services, mais qu'ils avaient des responsabilités qu'ils n'étaient pas capables d'assumer. Je pense que si vous régliez cette question, vous nous feriez économiser des milliards de dollars.
Le président: Merci, monsieur Campbell.
Monsieur Les.
M. Les: Merci, monsieur le président.
J'ai eu l'excellente chance cet après-midi de représenter les municipalités du Canada devant le comité.
Il me semble que deux grands défis se posent à notre pays. Le premier est bien entendu celui de la situation financière, et l'autre celui de l'unité nationale. Jusqu'à un certain point, du moins, les solutions sont quelque peu apparentées dans les deux cas. L'administration de notre pays devra être restructurée et décentralisée. C'est ce qui permettra d'obtenir les résultats économiques dont nous avons besoin. Par la même occasion, on répondra aussi en grande partie aux aspirations des différentes provinces et régions de notre pays, qui visent à obtenir une plus grande autonomie.
Je dirais en conclusion qu'en prenant les mesures nécessaires pour régler en particulier notre situation financière, il ne faut pas que nous transférions les obligations financières d'un type de contribuable à un autre. Il n'y a aucun intérêt à cesser de prendre l'argent dans les poches du contribuable qui paie de l'impôt sur le revenu pour le prendre ensuite dans les poches de celui qui paie l'impôt foncier. Le contribuable n'a absolument rien à y gagner. En réalité, lorsqu'on procède ainsi à ce genre de déplacements, on crée parfois beaucoup de dégâts dans la société.
Au nom des municipalités du Canada qui représentent les contribuables fonciers de notre pays, je vous demande d'agir avec prudence.
Le président: Merci, monsieur Les.
J'aimerais prendre quelques instants pour résumer très brièvement ce que nous avons entendu à mon avis. Je ne veux pas que l'on confonde mon point de vue avec celui des comités. Il s'agit de mon point de vue personnel.
Je crois que tout le monde s'entend autour de cette table pour essayer de remédier à la crise que constitue notre dette et notre déficit. On s'entend très mal sur la façon d'y parvenir. Il y a ceux qui disent que si l'on remet notre population au travail, si l'on insiste par exemple sur la création d'emploi, on résoudra en grande partie le problème. Je suis d'accord avec cette conception.
Je considère que ce doit être notre priorité à bien des égards. Nous avons trop de chômage ou de sous-emploi dans notre pays. La question qui se pose, c'est comment y parvenir? Certaines personnes autour de cette table ont déclaré que nous ne pourrons tout simplement pas faire les investissements nécessaires tant que nous n'aurons pas abaissé notre déficit et nos taux d'intérêt. Nous n'aurons pas confiance dans notre avenir. C'est donc en quelque sorte le problème de la poule et de l'oeuf, mais il est évident que nous devons lutter sur les deux fronts.
Nous avons entendu M. Yung - appuyé avec éloquence par M. Robinson - nous parler de la nécessité de financer les petites entreprises et d'apporter des capitaux aux petits entrepreneurs qui se trouvent dans la rue, qui veulent se relever et qui, si on leur en donnait la moindre possibilité, deviendraient des membres productifs de notre société. Nous avons vu ce genre de chose dans le cadre des expériences menées par les Canadiens dans les pays du tiers monde pour financer des micro-entreprises. À l'heure actuelle, nos banques ne sont pas prêtes à apporter des capitaux à nos petites entreprises. Je considère que notre gouvernement doit trouver les moyens de recourir à ce genre de solutions.
Nous avons entendu M. Les parler d'un programme de remise en état, qui est lui aussi un programme d'infrastructure. Il nous faut examiner de près cette question. Le dernier programme d'infrastructure que nous avons mis en application a coûté quelque 60 000$ par emploi aux contribuables. C'est un programme de création d'emploi très onéreux. Il nous faut voir aussi que nous y avons gagné une formidable infrastructure que nous n'aurions pas eue autrement, ce qui est indispensable si l'on veut être productif et concurrentiel à l'avenir.
Monsieur Campbell, je vais m'écarter un instant de notre sujet. Vous me rappelez beaucoup une personne qui m'est très chère, en l'occurrence mon père. Mon père était un homme d'affaires et il siégeait au sein d'une commission gouvernementale appelée l'Office d'expansion des entreprises, qui était chargé d'approuver les subventions aux petites entreprises.
Un jour, des gens se sont présentés et ont fait un exposé en déclarant qu'ils avaient trouvé la façon de fabriquer des ampoules incassables. Ils ont présenté des quantités de rapports et d'études de consultants au sujet de cette ampoule. Mon père a fini par se lasser. Il a pris l'ampoule, l'a lancé contre le mur et elle a éclaté en mille morceaux. Dans cette salle de conférence, il y a désormais «le point d'impact Peterson», et on l'a encadré.
Vous me rappelez beaucoup l'esprit pratique de mon père en analysant avec justesse les défauts de la commission à laquelle vous aviez affaire. Je pense qu'il reste beaucoup à faire en ce sens dans chacune de nos entreprises publiques. Il est possible que la solution que vous préconisez, soit de mettre à la disposition de tous ces gens des consultants en gestion, ou une compétence en gestion, soit la bonne. J'admire la justesse de votre pensée sur cette question en particulier.
Je sais que vous n'avez rien contre les immigrants, parce que vous l'avez déclaré. Je sais que dans mon propre comté de Willowdale, nous avons beaucoup de résidents dont la première langue n'est pas l'anglais. Ils le parlent très mal, mais ils n'ont commencé à l'apprendre que depuis leur arrivée ici. La seule chose qu'on puisse leur reprocher, c'est qu'ils obtiennent tous les premiers prix à l'école secondaire.
Monsieur Lawrie, vous avez évoqué un certain nombre de questions précises, telles que les coupures dans le domaine des incitations au développement économique régional et autres mesures de ce genre. Vous avez évoqué des solutions précises pour remédier au déficit, ce que nous avons particulièrement apprécié. Comme M. Pawluk, vous n'avez pas hésité à nous parler de mesures bien précises dont nous pourrions nous servir pour lutter contre le déficit et assurer notre avenir économique.
Docteur Bressler et docteur Hardwick, vous êtes revenus à nouveau sur le fait que le ratio de nos activités de recherche et de développement par rapport à notre économie était l'un des plus faibles du monde industrialisé. Étant donné que c'est ce que je clame depuis 10 ans, je suis très heureux de vous l'entendre dire. Nous ne faisons pas vraiment de progrès, et c'est un sujet de préoccupation. Je suis d'accord avec votre plaidoirie en faveur de la recherche fondamentale, et elle est partagée avec éloquence par M. Albanese au nom des étudiants. Nous avons proposé l'année dernière que les conseils de subventions soient l'une des seules branches du gouvernement qui ne subisse pas de compressions budgétaires. Malheureusement, c'est pourtant ce qui est arrivé, et je le regrette encore. Nous vous félicitons pour votre travail et j'espère que nous réussirons à atteindre une partie des objectifs et à répondre aux aspirations que vous nous fixez.
En ce qui concerne maintenant la Fondation de Vancouver, Christopher Richardson est venu nous voir précédemment à Ottawa et c'est lui qui a fait avancer ce merveilleux projet. Je considère que c'est une nouvelle façon de dispenser des services aux collectivités et aux individus, et cela d'une façon bien plus efficace, dans bien des cas, que lorsque le gouvernement s'efforçait de le faire. C'est une solution de rechange qui a fait ses preuves, nous vous en félicitons et nous suivrons votre exemple.
Les étudiants ont fait valoir avec une très grande éloquence qu'ils représentent - ils ne l'ont pas vraiment dit; ça paraît tellement aller de soi - notre avenir, et dans la mesure où on ne tient pas compte de leur potentiel, on remet en question notre futur.
La diminution des paiements de transfert va entraîner une augmentation des frais de scolarité, j'aurais mauvaise grâce à vous dire le contraire. Dans la mesure où c'est le cas, j'espère que nous serons en mesure de vous consentir les prêts dont vous avez besoin pour financer vos études et que ces prêts ne seront remboursables qu'en fonction de votre capacité de payer et des emplois que vous obtiendrez par la suite.
Je ne peux pas vraiment vous dire grand-chose d'autre étant donné que les coupures ont déjà été faites. C'est une chose qui a été décidée et on n'y reviendra pas.
Monsieur Sulmona, nous vous remercions d'être venu nous parler d'un autre domaine dans lequel à notre avis nous pourrions être bien plus productifs en éliminant la paperasserie, ce qui nous permettrait d'être bien plus compétitifs au plan international. Il y a cependant une chose qui m'inquiète terriblement à ce sujet. Imaginons que j'arrive à l'aéroport et que je n'aie pas 10$, est-ce que je vais partir ou non? Comment vais-je faire?
M. Sulmona: Vous êtes député, et je pense que vous êtes en mesure de trouver la solution tout seul.
Le président: Très bien. Je pense que 10$, c'est plus de 7 p.100 d'un billet de 100$, mais j'ai peut-être mal compris ici.
Permettez-moi, Sherrill Gullickson, de dire en guise de conclusion que vous représentez les gens qui sont tout au bas de l'échelle, qui sont les plus défavorisés, les plus vulnérables. J'espère que toutes les mesures que nous pourrons prendre à l'avenir tiendront compte du fait que ces gens méritent particulièrement qu'on les prenne en considération. Nous sommes jugés, et nous le serons à l'avenir, en fonction de la façon dont nous traitons les gens qui sont le moins en mesure de subvenir à leurs besoins.
Certaines solutions ont été avancées qui me paraissent bonnes.
Je dois vous dire, monsieur Pawluk, à vous ainsi qu'aux étudiants et à d'autres intervenants qui préconisent la solution des taux d'intérêt - tout ce que nous aurions à faire serait de pousser un bouton à Ottawa et les taux d'intérêt baisseraient - que cela entraînerait de graves conséquences pour nos taux d'intérêt à long terme et pour notre dette extérieure. Si je pensais qu'il suffit d'appuyer sur un bouton pour faire baisser les taux d'intérêt et pour que tout soit réglé, c'est la première chose que je ferais, parce que c'est notre principal poste de dépenses à l'heure actuelle, soit plus de 40 milliards de dollars par an. Je ne participe pas à une conspiration visant à enrichir les gens qui ont des capitaux et qui touchent des revenus d'intérêt. Bien au contraire. Notre travail serait si simple s'il suffisait de faire ça.
En conclusion, nous avons à faire des choix très difficiles. Votre collaboration nous a été particulièrement utile. Je constate aussi dans le cadre de cette réunion, grâce à la présence de John Les, que les provinces, le gouvernement fédéral et les municipalités ne constituent qu'un même réseau de services qui s'adresse en fin de compte aux contribuables. Il nous faut trouver de nouveaux moyens d'être efficaces, de collaborer et de dispenser les services. Le Canada est trop gouverné comparativement à d'autres pays.
La tâche va être énorme. Nous ne réussissons même pas à régler la question de l'unité nationale, qui nous coûte de l'argent, certains d'entre vous l'ont dit, sur le plan des taux d'intérêt et de l'incertitude que cela entraîne sur les marchés mondiaux et au Canada. Je considère toutefois, les gouvernements étant une création humaine et une création de la population canadienne, que nous avons l'obligation de les repenser et de trouver de meilleurs moyens de les faire fonctionner.
C'est toujours un plaisir de venir à Vancouver, la ville qui est probablement la plus belle du Canada, et de loin. C'est aussi probablement l'une des villes qui présente le plus de diversité sur le plan des opinions politiques et, par conséquent, l'une des plus intéressantes et des plus excitantes.
Je remercie chaleureusement tous les participants.
La séance est levée et nous reprendrons nos délibérations lundi après-midi, à 15h30, à Ottawa.