[Enregistrement électronique]
Le mardi 5 décembre 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des opérations gouvernementales.
Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude des systèmes d'attribution de marchés du gouvernement, y compris le système des invitations ouvertes à soumissionner (SIOS).
Notre comité tient à s'assurer que les procédures d'achat du gouvernement en ce qui concerne les produits et les services, sont des procédures justes et équitables pour tous les fournisseurs canadiens, y compris les petites et moyennes entreprises de toutes les régions du pays.
Nous tenons également à nous assurer que le processus d'attribution de marchés est transparent et accessible pour que tous les fournisseurs, grands et petits, aient l'impression d'avoir leur chance d'obtenir leur part de ce marché gouvernemental qui s'élève à 8 ou 9 milliards de dollars.
En même temps, notre comité doit s'assurer d'un rapport valeur-prix pour les produits et services achetés, et également de la qualité des services fournis par le gouvernement fédéral à tous les Canadiens.
Comme mes collègues le savent, notre comité reçoit aujourd'hui des représentants de la petite et moyenne entreprise; nous pouvons donc dire qu'il s'agit de «la journée de la petite et moyenne entreprise».
Nous souhaitons maintenant la bienvenue à M. Brien Gray, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.
Nous souhaitons commencer par votre association et entendre votre position en ce qui concerne les marchés gouvernementaux et, en particulier, le système des invitations ouvertes à soumissionner. Nous vous demandons de nous faire part des expériences que vous avez pu faire dans ce domaine, et également de nous faire des suggestions sur la façon de rendre le système plus accessible. D'excellentes occasions s'offrent aux Canadiens de tout le pays, et notre comité s'est engagé à améliorer le système actuel.
Après M. Gray, nous entendrons toute une série de témoins qui auront, chacun, deux ou trois minutes pour faire une déclaration d'ouverture, après quoi nous pourrons poser des questions aux témoins.
Monsieur Gray, je vous souhaite la bienvenue au comité. Vous pouvez commencer.
M. Brien Gray (vice-président principal, Politiques et affaires législatives, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci, monsieur le président et honorables députés. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante est heureuse de cette occasion de comparaître devant le Comité permanent des opérations gouvernementales de la Chambre des communes, et de discuter de l'accès aux marchés fédéraux pour les petites entreprises.
À première vue, on pourrait penser que le sujet n'inquiète pas beaucoup la petite entreprise, mais en réalité, c'est une question qui l'intéresse au plus haut point. Les politiques d'achat du gouvernement regroupent tous les problèmes auxquels se heurtent les petites entreprises dans l'environnement économique: manque d'information, procédures difficiles, problèmes de financement, paperasserie et occasions ratées.
Depuis un certain temps, le gouvernement, les représentants de la grosse entreprise et les économistes reconnaissent que c'est la petite entreprise qui créera les emplois dont le Canada a si désespérément besoin. Les très petites compagnies, celles qui ont moins de vingt employés, représentent actuellement environ 93 p. 100 des compagnies canadiennes. D'après les évaluations actuelles, le gouvernement fédéral dépense chaque année environ 14 milliards de dollars dont la petite entreprise reçoit entre 30 et 40 p. 100, selon la source de la statistique.
Le travail de ce comité, qui devrait permettre d'aller à la racine des problèmes ou des obstacles auxquels se heurtent les petites compagnies lorsqu'elles veulent se tailler une part équitable de ce gâteau que sont les marchés gouvernementaux, est extrêmement important. Lorsqu'elles réussissent dans cette entreprise, les petites compagnies élargissent leur action en ce qui concerne la croissance économique et la création d'emplois dans une économie en difficulté.
Le sujet qui intéresse ce comité - l'examen de divers aspects de l'attribution des marchés gouvernementaux en ce qui concerne les produits et les services - est un sujet d'étude important, en particulier dans la situation actuelle. De plus en plus, ces derniers mois et ces dernières années, la FCEI a reçu des plaintes sur la façon dont sont attribués les marchés du gouvernement, et cela à tous les paliers, fédéral, provincial et municipal. La FCEI a discuté de ces problèmes avec Industrie Canada, avec Travaux publics et Services gouvernementaux et avec d'autres ministères, et cherché à améliorer le système actuel.
Au milieu de novembre, nous avons envoyé un questionnaire à environ 15 000 membres qui nous semblaient être particulièrement bien placés pour vendre des produits et des services au gouvernement fédéral. Sur la base de ce sondage, nous voulions faire part au gouvernement fédéral des procédures qui pourraient améliorer l'accès aux marchés gouvernementaux pour les petites et moyennes entreprises. Les informations que nous recueillerons grâce à ce sondage permettront certainement de mieux comprendre les facteurs qui assurent le succès aux petites entreprises qui sollicitent des marchés gouvernementaux.
En préparant ce sondage, nous entendions de plus en plus parler des frustrations et des problèmes éprouvés par des entreprises indépendantes dans toutes les régions du pays, chaque fois qu'il s'agissait de faire affaire avec le gouvernement. Ces problèmes sont multiples et variés et ne doivent pas être étrangers aux membres du comité: le gouvernement attend beaucoup trop longtemps avant de payer ses factures. Le système d'attribution de marchés est incompréhensible, bureaucratique, confus et complexe. La paperasserie nécessaire pour faire une offre et obtenir un contrat est excessive. Il est impossible d'obtenir des informations sur les contrats disponibles. Les spécifications qui accompagnent les appels d'offres sont trop restrictives et souvent très complexes. Il est souvent difficile de savoir qui achète et/ou utilise les produits et services, si bien qu'il est difficile de comprendre en quoi consiste véritablement le besoin. Il est très difficile de se faire inscrire sur la liste des soumissionnaires pour les marchés locaux. Le processus de sélection du gouvernement semble favoriser les gens déjà connus. Les systèmes automatisés sont difficiles à comprendre et considérés comme très coûteux. Il est difficile de soutenir la concurrence des grosses compagnies. Enfin, les décisions semblent arbitraires et il est difficile, sinon impossible de déterminer pour quelles raisons une offre a été rejetée.
Comme je l'ai dit, ce sondage est actuellement en cours. D'après l'échantillonnage que je vous ai apporté, vous verrez que nous demandons à nos membres des données importantes.
Avec ce sondage, nous songeons à déterminer si nos membres vendent au gouvernement fédéral et, dans le cas contraire, pourquoi pas. Ensuite, nous leur demandons s'ils ont eu des problèmes lorsqu'ils ont vendu au gouvernement fédéral, et dans ce cas, avec quels ministères. Nous pourrons également établir des rapports entre les marchés qui sont décernés dans la région d'Ottawa et à l'extérieur. Nous demandons à nos membres quelle importance ils attachent à la solution de certains problèmes, par exemple des paiements en retard ou les spécifications.
Les gouvernements sont de plus en plus à l'heure de l'électronique, et il est donc important de déterminer si la petite entreprise utilise le système des invitations ouvertes à soumissionner, et sinon, pourquoi pas. Nous leur demandons également ce qu'elle pense des services équivalents et des tableaux d'affichage électronique. Des informations que peuvent nous donner les gens dont les offres ont été rejetées sont importantes. Lorsqu'ils ont eu des problèmes, de quoi s'agissait-il?
Nous posons également des questions au sujet de ISO 9000. Les petites compagnies sont-elles accréditées et, sinon, pourquoi pas? Nombre de nos membres se sont inquiétés de l'avènement d'ISO 9000. Ils comprennent que le gouvernement fixe des normes lorsqu'il attribue des marchés, mais ils craignent que le coût et la complexité d'une accréditation ne constituent un obstacle.
Enfin, nous demandons à nos membres ce qu'on pourrait faire pour faciliter la tâche des petites entreprises qui souhaitent obtenir des contrats du gouvernement fédéral.
Comme je l'ai déjà dit, la FCEI pense que les résultats de ce sondage, qui seront ventilés par province, par secteur et par taille, constitueront une base de données irremplaçable et devraient permettre aux décisionnaires du gouvernement et aux organismes d'attribution de marchés de comprendre beaucoup mieux les problèmes et les besoins uniques des petites entreprises qui sollicitent des contrats gouvernementaux.
Nous pensons avoir des choses très intéressantes à dire au début de la nouvelle année lorsque nous aurons les résultats de ce sondage, et nous aimerions comparaître à nouveau à ce moment-là pour vous faire part de nos conclusions. En attendant, j'ai pensé que les commentaires qui accompagnaient certains formulaires vous intéresseraient. Ils ne remplacent pas les données scientifiques d'un sondage, mais ils sont importants pour vous donner une idée de la nature et de l'importance des frustrations qu'éprouvent beaucoup de gens lorsqu'ils traitent avec le gouvernement fédéral. Je les ai classés par sujet.
En ce qui concerne les paiements:
- Paiements très longs à venir. On verse des intérêts (parfois), mais c'est loin d'être le taux offert
par les banques. À l'heure actuelle, nous avons 8 500$ en souffrance avec un ministère et
3 600$ avec un autre. Dans les deux cas, ils sont en retard de plus de 60 jours. Il est peu probable
qu'on nous donne le taux préférentiel plus 2%, qui est celui que nous obtenons nous-mêmes,
sur nos 12 000$.
- Il est intéressant de noter que cette question a été soulevée au forum sur la paperasserie dont je
suis coprésident. La question, c'est que les pénalités pour paiements en retard ne suffisent pas,
car c'est en réalité un problème de liquidité. Pour la petite entreprise qui a son banquier à ses
trousses, un paiement en retard provoque toutes sortes d'autres problèmes.
- Le fédéral refuse de payer les coûts supplémentaires lorsqu'ils ajoutent des éléments ou
lorsqu'ils font des erreurs. Les experts-conseils sont pratiquement acculés à la faillite. On
pourrait se passer de tels clients.
- Le gouvernement fédéral devrait envisager de payer les fournisseurs ou entrepreneurs à tous les
niveaux. Il ne devrait pas pouvoir payer l'entrepreneur général et se désintéresser de la question
quand un sous-traitant ou un autre fournisseur ne sont pas payés. C'est une procédure injuste
qui permet aux compagnies de profiter des petits entrepreneurs.
- Il nous est arrivé par le passé de faire des offres au gouvernement fédéral. C'est extrêmement
compliqué et cela prend beaucoup de temps.
- Les processus d'adjudication sont trop complexes et trop coûteux.
- Nous préférons traiter avec de «vrais» clients qui paient des prix raisonnables, qui paient en
liquide où à temps, qui apprécient nos services au lieu de les exiger et qui n'exigent pas non plus
des heures de paperasserie et des dépenses considérables pour préparer des offres et se
conformer à d'innombrables conditions.
- Une observation qui s'applique à tous les marchés gouvernementaux: la bureaucratie définit ce
qu'elle souhaite acheter. Dans certains cas, elle utilise les spécifications d'un produit qui existe.
Dans tous les cas, le produit fini est prédéterminé - votre compagnie ou vous-même êtes
disqualifié étant donné que vous ne vous pouvez pas faire une offre en présentant une solution
différente. La seule façon de contourner ce problème est de faire du démarchage ou du battage
politique. La plupart des petits entrepreneurs y renoncent.
- La compagnie est sur la liste des compagnies d'experts-conseils depuis environ dix ans.
Normalement, il devait y avoir un «roulement» et nous pouvions soumettre des propositions
concurrentielles. Nous n'avons jamais été contactés. Nos demandes d'information sont restées
sans réponse.
- Le SIOS est très coûteux et pas très convivial.
- Je suis propriétaire d'une petite imprimerie locale. Approvisionnements et Services décernent
la plupart des contrats à des entreprises de l'extérieur. Ils ne considèrent jamais les possibilités
locales.
- Récemment nous avons perdu un contrat assez important dans la région parce que la décision a
été prise à Ottawa, à 1 500 milles d'ici; ils ont tenu pour acquis que personne d'autre dans notre
région ne pouvait exécuter le travail et le contrat est allé automatiquement à une grosse société.
Ce que je ne comprends pas, c'est que nous avons sans cesse des contrats avec les mêmes
ministères. Comment Ottawa peut-il ignorer notre existence?
- Nous avons assisté à deux séminaires sur les politiques d'achat du gouvernement. Toutefois,
nous avons eu l'impression que si l'on faisait appel à nous, c'était uniquement pour avoir des
offres supplémentaires. Quand nous avons contacté directement les clients, ils nous ont dit
qu'ils n'avaient aucune intention de considérer notre offre. Sans vouloir critiquer la Défense
nationale, il est possible que notre offre n'ait pas été acceptable, mais le processus était
extrêmement compliqué.
- Nous vendons du matériel aux bases de l'armée. Nous n'avons aucun moyen de contacter des
bases qui ne sont pas actuellement nos clients. Lorsque nous réussissons à trouver un contact
dans une nouvelle base, nous réussissons toujours à leur vendre quelque chose. Le siège social
de la Défense nationale ou un autre service devrait pouvoir nous fournir le nom de personnes à
contacter et des numéros de téléphone.
- ISO 9000 est un coût supplémentaire considérable, un coût que les petits entrepreneurs ne
peuvent pas se permettre. Seules les grosses entreprises en ont les moyens.
En fin de compte, plusieurs questions sont importantes: est-ce que la petite entreprise a accès à ces contrats? Est-ce que le système actuel comprend la petite entreprise? Est-on prêt à faire affaire avec la petite entreprise? Est-ce que les organismes d'attribution de marchés préfèrent traiter avec de grosses compagnies pour gagner du temps et de l'argent? Y a-t-il un terrain d'entente culturel entre les fonctionnaires et la petite entreprise? Quelle part du marché, exactement, va à la petite entreprise? S'il n'y a pas de données sur cet aspect-là, il faut les trouver pour mettre en place des procédures intelligentes et axées sur la petite entreprise. Enfin, où en est l'imputabilité du système?
L'aspect positif de toute cette affaire, c'est qu'on examine attentivement les voies d'accès entre la petite entreprise et les services d'achat du gouvernement. En outre, ceux qui appliquent le système sont appelés à rendre des comptes. Dans ce sens, les travaux de votre comité sont particulièrement importants. De plus, je signale que le forum du secteur public et du secteur privé sur la paperasserie a adopté une résolution très ferme au sujet du paiement rapide des contrats gouvernementaux. Le Conseil du Trésor prépare actuellement sa réponse et ce problème devrait être réglé sous peu.
Le gouvernement fédéral doit mettre en place des politiques d'attribution de marchés efficaces pour s'assurer que la petite entreprise y a effectivement accès. Les principes de nos membres sont les principes de la libre entreprise. Toutefois, en présence d'obstacles impossibles à surmonter, on ne peut vraiment parler de marché libre. Il importe de trouver un point d'équilibre entre l'efficience du gouvernement, le contrôle des coûts, l'expansion et la multiplication des entreprises.
Dans un rapport sur les possibilités offertes par les politiques d'attribution de marchés, en particulier dans les marchés internationaux, le Comité de travail sur la petite entreprise dit ce qui suit:
- Le Comité estime qu'une compagnie acquiert un élément de crédibilité supplémentaire sur les
marchés internationaux lorsqu'elle peut prouver qu'elle a eu des marchés gouvernementaux.
C'est particulièrement utile aux compagnies qui ont mis au point un produit ou un service
qu'elles souhaitent mettre en marché à l'étranger. L'existence d'un marché gouvernemental
peut jouer un rôle extrêmement important et stimuler le développement de produits finis, de
services et de processus de génie pour un grand nombre de PME. Ces initiatives peuvent être
prises dans le cadre d'ententes internationales et financées à même les ressources destinées aux
programmes existants.
L'imputabilité en ce qui concerne les politiques d'attribution de marchés est un aspect particulièrement important. Les politiques sur les paiements en retard sont également importantes. Dans ce sens, plusieurs domaines méritent d'être étudiés, les possibilités offertes par les sociétés d'État, les attributions de marchés à l'étranger et les attributions de gros marchés en sous-traitance.
Enfin, j'aimerais que vous envisagiez d'adopter quelque chose comme le code de conduite des banques, un code qui s'appliquerait aux attributions de marchés. Lorsqu'une compagnie voit son offre refusée, il faut absolument que le client explique les raisons de son refus et les aspects de l'offre qui auraient pu être améliorés. De cette façon, la compagnie en question sera mieux placée pour réussir à une date ultérieure.
Pour terminer, je tiens à remercier le comité de nous avoir reçus aujourd'hui et d'avoir écouté les problèmes particuliers aux petites entreprises qui cherchent à traiter avec le gouvernement fédéral. Je tiens également à remercier le comité pour les initiatives qu'il a prises dans ce domaine. J'espère pouvoir comparaître à nouveau au début de la nouvelle année et vous faire part des résultats de notre sondage.
La FCEI est convaincue qu'en encourageant le secteur de la petite entreprise et en lui permettant d'obtenir une proportion plus importante des marchés du gouvernement fédéral, vous pouvez ouvrir une foule de nouvelles possibilités. De telles politiques, qui sont peu coûteuses, peuvent faire beaucoup pour stimuler l'économie et favoriser la croissance et la création d'emplois, et c'est d'autant plus vrai à un moment où le gouvernement injecte moins d'argent dans l'économie à cause des compressions qu'il effectue.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Gray, de cet exposé original et stimulant. Nous vous en sommes reconnaissants.
Nous allons commencer par mon collègue du Parti réformiste, M. White.
M. White (Vancouver-Nord): Merci, monsieur le président.
Monsieur Gray, tout d'abord, j'aimerais vous poser quelques questions afin de mieux connaître votre organisme. Pouvez-vous nous donner une idée du nombre total d'entreprises membres?
M. Gray: Oui, monsieur White, nous représentons les petites entreprises privées du pays. Nous comptons actuellement environ 85 000 membres.
M. White: Quel pourcentage de ces entreprises aurait 25 employés ou moins?
M. Gray: Pour l'ensemble du pays, 93 p. 100 des entreprises ont 20 employés ou moins. Nos membres affichent plus ou moins les mêmes pourcentages. En fait, je dirais que probablement 95 p. 100 de nos membres comptent 25 employés ou moins.
M. White: Très bien. Merci du renseignement.
Je pense que vous conviendrez qu'il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce que le gouvernement fonctionne différemment du secteur privé. Par exemple, dans le secteur privé, très souvent, l'acheteur favorise un initié. N'est-ce pas?
M. Gray: Oui.
M. White: Est-il donc raisonnable de penser que le gouvernement emploie des personnes de types différents qui ne se feront pas des amis des fournisseurs de certaines compagnies et, par conséquent, ne favoriseront pas cette entreprise particulière? Je n'ai peut-être pas exprimé cela très clairement, mais si vous avez un acheteur dans une société qu'un vendeur de photocopieurs lanon par exemple contacte constamment, n'est-il pas raisonnable de penser que celui-ci finira par décider que son entreprise a besoin d'un photocopieur. Il s'adressera alors probablement au vendeur de chez Canon. N'est-il pas raisonnable de s'attendre à la même chose au gouvernement?
M. Gray: Je ne pense pas qu'un grand nombre de nos membres contestent le fait que dans le secteur privé, les acheteurs ont leurs favoris dont ils achètent continuellement les produits si la qualité, les délais et le prix leur conviennent. Ces principes se comprennent aussi au sein du gouvernement, surtout à une époque où nous devons surveiller nos coûts. Toutefois, je pense que la question ici va plus loin.
Dans le cas du gouvernement, tous les contribuables se trouvent en fait à payer le transport. Si une entreprise peut sur le plan des délais, de la qualité et du prix soumissionner avec succès, l'exclure arbitrairement me semble... Je comprends certainement que si un fournisseur vous sert bien, vous aurez tendance à vous adresser à lui. Mais si quelqu'un d'autre se présente et offre une soumission aussi intéressante sinon meilleure, il est dans l'intérêt du contribuable de s'adresser à ce fournisseur.
Comme instrument de la politique publique, on dit - et je l'ai mentionné au cours de mon exposé - qu'il faut développer des entreprises canadiennes et une expertise. Si vous ne vous prévalez pas du levier considérable que constitue la politique en matière d'achat pour vous aider à cette fin, il me semble que vous ne ferez que travailler contre vos intérêts.
M. White: Pensez-vous qu'une solution consiste à faciliter l'accès aux décisionnaires afin que les petites entreprises aient au moins la possibilité de se présenter et de présenter leurs produits?
M. Gray: Notre exposé ici aujourd'hui tournait autour de l'accès. À notre avis, l'accès est fondé sur la taille des entreprises, leur réputation, leur capacité de lobbying. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte.
Si je suis un grand fournisseur international de photocopieurs par exemple, je dispose de nombreuses ressources que je peux utiliser pour convaincre les acheteurs de prendre mon produit. Je pense qu'il faut nous assurer que la porte est ouverte aux petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas des mêmes ressources financières et humaines. Elles doivent avoir la possibilité de soumissionner, ce qui, à leur avis, n'est pas le cas actuellement.
M. White: Très bien. Il est évident que l'on ne peut pas changer la politique du gouvernement ici, dans cette salle, mais...
M. Gray: J'espérais que vous pourriez y faire quelque chose.
M. White: En Nouvelle-Zélande, dont je suis originaire, on a transformé du tout au tout le processus d'achat du gouvernement. Par exemple, celui-ci a adopté le mode de financement du budget global pour certains ministères, ce qui donne aux administrateurs la possibilité de s'approvisionner localement en produits et en services.
Pensez-vous qu'il serait utile d'adopter cette formule, de procéder comme si le gouvernement était une entreprise divisée en succursales de façon à ce qu'une partie des achats se fasse localement?
M. Gray: Si les principes de l'accessibilité sont maintenus, ça ne fait pas une grande différence que l'on fonctionne en filiale ou que les achats soient centralisés. Ce qui compte, c'est l'accessibilité.
M. White: Bien. Quant à ce que le gouvernement explique pourquoi une soumission n'a pas été retenue, personnellement, je pense que cela créerait une surcharge administrative injustifiée pour le gouvernement, contrairement à ce qui se passe dans le secteur privé. Là, une entreprise n'a pas à vous expliquer pourquoi vous n'avez pas décroché le contrat. Si vous téléphonez à l'acheteur, vous pourrez sûrement lui poser la question, et il vous donnera une réponse quelconque au téléphone.
Je reviens à nouveau à l'amélioration de l'accessibilité; il serait sûrement plus raisonnable de permettre à la petite entreprise de téléphoner ou d'écrire à l'agent des achats plutôt que de créer au gouvernement un mécanisme quelconque destiné à justifier les décisions.
M. Gray: Ce qui m'intéresse, c'est qu'on puisse obtenir une réponse qui soit utile. Actuellement, beaucoup de nos membres disent ne pas avoir été retenus et n'avoir eu aucune nouvelle. Et puis, ils ne savent pas avec qui communiquer.
M. White: Est-ce que ce n'est pas cela qui compte?
M. Gray: Oui, c'est certain.
Le problème, c'est qu'on n'apprendra peut-être pas grand-chose d'utile au téléphone. Comme soumissionnaire ou fournisseur, je veux bien faire un appel si je reçois des renseignements complets. Bien trop souvent, que l'on parle à un banquier ou à l'agent des achats, on vous répond tout simplement que vous n'avez pas rempli les conditions. Ce n'est pas pour ça que les gens appellent.
Si on veut que la politique d'acquisitions favorise la croissance économique, il faut que le soumissionnaire non retenu sache pourquoi et à quelles conditions précises il n'a pas répondu. Il ne suffit pas de lui dire que le prix n'était pas le bon. Oui, ça demande peut-être un peu plus de paperasserie, mais il y a sûrement un moyen terme entre la surcharge administrative et la communication de renseignements utiles aux fournisseurs pour qu'ils sachent comment être retenus la prochaine fois.
M. White: Je ne suis pas sûr que vous m'ayez concaincu, ici.
Je veux vous poser une dernière question. Au sommet de votre liste, vous avez dit que le gouvernement met beaucoup trop de temps à payer ses factures. Sur une échelle de 1 à 10, quand vous parlez des raisons pour lesquelles la petite entreprise n'essaie même pas, diriez-vous que c'est un 9? Même si les factures ne sont payées qu'après la vente définitive du produit, vous nous dites que c'est un obstacle et que les gens ne s'essaient même pas. Sur une échelle de 1 à 10, où diriez-vous que se situe ce problème?
M. Gray: Je serai mieux en mesure de vous répondre lorsque j'aurai les résultats du sondage. D'après ce que nos membres nous ont dit jusqu'à présent, par contre, je peux vous dire que c'est extrêmement sérieux. Je dirais que ça se trouve parmi les cinq principaux problèmes.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, les petites entreprises, surtout au cours des cinq dernières années, ont été pressées comme un citron par les banques et si le gouvernement qui fait affaire avec les fournisseurs... C'est généralisé dans toute l'économie. Le dernier maillon de la chaîne, celui qui est le plus petit et le plus vulnérable, c'est le propriétaire d'une PME et c'est lui qui écope. C'est une chose pour une grande ou une moyenne entreprise de saigner à blanc une petite boîte - et je trouve cela inacceptable dans le secteur privé - mais que le gouvernement agisse de la sorte avec une entreprise qui paie ses impôts et qui fait tourner l'économie, je trouve cela honteux.
M. White: Je vais dire quelque chose qui va peut-être apporter de l'eau à votre moulin. Moi-même, j'ai été propriétaire d'une petite entreprise que j'ai exploitée pendant 10 ans avec 10 employés avant de devenir député et je peux vous assurer que c'était la principale raison pour laquelle nous ne soumissionnions jamais de contrats du gouvernement. Nous faisions des ventes à six compagnies du secteur privé, dégagions des bénéfices et étions payés sur livraison alors que nous aurions mis le même temps pour vendre un article au gouvernement fédéral sans compter qu'il aurait fallu attendre trois mois avant d'être payés. Ça nous enlevait toute envie de traiter avec le gouvernement. Je suis d'accord avec vous, et même si ce n'est pas directement relié au mécanisme d'approvisionnement, c'est sans doute l'un des aspects les plus sérieux sur lesquels le comité devrait se pencher.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur White. Je vois que beaucoup de vos collègues hochent la tête et je suis d'accord avec vous, c'est une question sérieuse.
Je veux maintenant inviter Mme Chamberlain à prendre la parole au nom des Libéraux.
Mme Chamberlain (Guelph - Wellington): Merci, monsieur Gray. Je suis très heureuse de vous accueillir ici aujourd'hui. Je suis un grand défenseur de la petite entreprise et j'en ai moi-même déjà eu une.
J'aimerais faire quelques observations avant de vous poser quelques questions. Tout d'abord, je veux vous dire que je suis d'accord avec plusieurs des choses que vous avez dites, notamment que le gouvernement met trop de temps pour payer ses factures et que cela vous cause des problèmes d'encaisse. J'espère que le comité et le président voudront bien s'en occuper parce qu'il s'agit d'après moi d'un problème très grave que le gouvernement doit corriger.
Pour ce qui est de la paperasserie administrative, nous effectuons actuellement une étude sur le sujet et beaucoup de choses sont en train de changer. Je pense que vous êtes au courant. Comme vous l'avez dit, vous y participez à titre de président, n'est-ce pas?
M. Gray: Oui, c'est moi qui suis le président.
Mme Chamberlain: Je pense que cela aura de bons résultats, d'après ce que nous avons vu, mais je vous demande de tenir bon car je sais que c'est l'une des doléances les plus graves de la petite entreprise.
Vous avez dit combien il est difficile de figurer sur la liste des soumissionnaires, et j'aimerais creuser un peu la question avec vous. Vous voulez aussi savoir pourquoi une soumission n'a pas été retenue. J'estime que le soumissionnaire qui n'a pas été choisi a le droit de savoir ce qui n'allait pas, ce qui est arrivé et comment il peut s'améliorer pour la prochaine fois.
Par ailleurs, j'aimerais avoir une copie de votre mémoire pour mes propres dossiers, si vous le voulez bien. Je serais très heureuse si vous pouviez m'en faire parvenir une copie. Deuxièmement, j'aimerais connaître les résultats de votre sondage lorsque vous les aurez.
Je le demande au président, j'aimerais que l'on envisage de faire comparaître M. Gray à nouveau pour discuter des résultats de son sondage parce que j'estime que cela est très important pour nos travaux.
Le président: Je suis d'accord.
Mme Chamberlain: Tout le monde ici a manifesté beaucoup d'intérêt pour la petite entreprise et c'est donc quelque chose d'essentiel pour nous.
Vous avez parlé du principe du roulement et vous avez dit que cela laisse à désirer. Pourriez-vous me dire en quoi?
M. Gray: Sur ce point précis, je parlais de ce qui est arrivé à un de nos membres. Les diverses citations que je vous ai données étaient les résultats ainticipés du sondage. Je n'ai pas encore les données définitives, mais je voulais vous donner une idée de ce que nous disent nos membres dans la case du questionnaire réservée aux commentaires. Ces propos venaient d'un expert-conseils qui commençait à en avoir plein le dos. Il s'est fait mettre sur une liste où tout le monde devait être retenu à tour de rôle et il semble qu'il ne l'ait jamais été. Lorsqu'il a demandé s'il pouvait avoir quelque chose, il y a eu très peu de réactions.
Je ne peux donc pas vous dire exactement aujourd'hui où cela laisse à désirer. Je suis désolé.
Mme Chamberlain: C'est bon de signaler la chose, mais si nous faisons des affirmations, il faut qu'elles soient justifiées. Si une compagnie a eu des problèmes, c'est la vérité dans son cas, mais pour nous, il faut examiner l'ensemble de la situation; s'il y a vraiment un problème et si quelqu'un est exclu à tout coup, il faut en discuter. Pour moi, la situation dans son ensemble, c'est cela.
M. Gray: Certains problèmes sont sûrement particuliers à une entreprise donnée, mais si c'est quelque chose que vous entendez tout au long de vos témoignages, cela vient corroborer ce que je vous dis.
Comme je vous l'ai dit, nous avons eu quelques réponses, pas beaucoup, mais si la question du roulement revient à nouveau sur le tapis, je vais venir vous en reparler.
Mme Chamberlain: Excellent.
Est-ce qu'il y a quelque chose pour les petites entreprises, comme des brochures, pour vous aider à soumissionner? De quoi disposez-vous? Y a-t-il quelque chose?
M. Gray: Je sais que certains ministères offrent des séminaires de familiarisation avec le système. De fait, l'une des personnes que j'ai citées aujourd'hui a dit que c'était de cette façon qu'elle a eu accès au système. Il y a aussi des brochures, mais j'ai l'impression qu'il n'y a rien de complet réuni en un seul document qui explique les choses clairement, qu'il s'agisse du processus en entier ou de la complexité de chaque étape. D'après ce que m'ont dit nos membres, ils sont entrés dans le système et ont trouvé que c'était si compliqué qu'ils ont tourné les talons.
Il y a lieu de demander aux fonctionnaires ce qu'ils pensent de la complexité de leur système - c'est quelque chose qui revient souvent - et de leur demander s'ils préviennent les gens et leur disent que ce sera compliqué.
C'est intéressant que je doive constamment revenir au cas des banques, mais vous comprendrez que comme représentants de la petite entreprise, nous avons eu beaucoup de contacts avec elles ces derniers temps. Beaucoup de petites entreprises ont eu une entente d'abstention et n'ont aucune idée du degré de complexité du système. C'est comme si les morts-vivants étaient dans des comptes spéciaux à la banque et ne pouvaient pas en sortir.
Je pense que le processus de soumission au gouvernement, à moins qu'on le connaisse déjà, c'est un peu la même chose. C'est comme entrer dans un labyrinthe et on ne sait pas où aller. Je pense qu'il faut absolument simplifier le processus, le rendre plus clair, plus compréhensible et plus accessible pour tout le monde.
Mme Chamberlain: Je vais conclure ici. On a beaucoup parlé des lacunes, mais je vous demande bien sincèrement y a-t-il quelque chose qui marche bien, selon vous? Y a-t-il du bon dans le processus de soumission?
M. Gray: L'idée d'un système d'invitations ouvertes à soumissionner accessible par ordinateur pour voir ce qui est offert, c'est un très bon départ. Sachez par contre que toutes les entreprises n'y ont pas accès. Même si 80 p. 100 de nos membres sont équipés d'un ordinateur, ils n'ont pas tous un modem pour pouvoir communiquer. Mais c'est au chef d'entreprise de décider s'il veut se brancher sur le système.
Ce qui compte vraiment, c'est de pouvoir faire le jumelage entre ce que j'ai à offrir et ce qui est demandé quelque part. Par exemple, un de nos membres de la région de Kingston, a indiqué à l'aide des mots clés qu'il était à la recherche de contrats à Trenton et Belleville, mais lorsqu'un marché a été octroyé par le pénitencier à quinze milles au nord de Kingston, il n'en a pas été informé.
Ça, c'est une faiblesse du système, et même si je pense que l'idée est bonne, je ne suis pas convaincu que cela fonctionne de façon idéale pour la petite entreprise.
Mme Chamberlain: Merci beaucoup.
Le président: Merci, madame Chamberlain.
Monsieur Bryden, je vous en prie.
M. Bryden (Hamilton - Wentworth): Je vais essayer d'être bref, parce que plusieurs témoins attendent.
Comment les petites entreprises apprennent-elles l'existence de contrats fédéraux dans leur région? Comment est-ce qu'une compagnie qui compte moins de 10 employés peut savoir si un contrat du gouvernement est offert dans la région?
M. Gray: Il y a toutes sortes de façons de le savoir.
M. Bryden: Bien, nommez-en quelques-unes.
M. Gray: Je vous avoue que je ne suis pas moi-même dans les affaires et je ne peux pas vous dire comment les entreprises procèdent.
Cela peut être le bouche à oreille: un fournisseur ou un concurrent pourra nous apprendre qu'il y a un appel d'offres. On peut être resté en contact avec tel ou tel ministère. Il y a toutes sortes de façons. Pour être honnête, je n'ai pas de données là-dessus.
M. Bryden: Si je pose la question, c'est parce qu'il y a quelques années, le gouvernement a cessé de faire de la publicité dans les journaux et ailleurs pour l'octroi de contrats. Savez-vous si cela a eu des effets négatifs sur les petites entreprises qui essaient d'en savoir plus sur les contrats du gouvernement?
M. Gray: Je ne peux pas répondre à votre question, parce que je l'ignore. Je suis certain que les témoins qui sont derrière moi, qui eux sont dans les affaires, pourront vous donner une réponse.
D'après ce que nous savons dans l'association, je vous dirai que lorsque les gens cherchent de l'information ou des conseils, normalement ils se tournent vers ce que j'appellerais des sources fiables. Cela inclut les fournisseurs, les concurrents, les bâilleurs de fonds, les conseillers juridiques ou comptables ou les associations corporatives. Nous avons souvent dit que si le gouvernement veut vraiment aider les gens à comprendre ce qui se passe, il devrait passer par des réseaux fiables.
Pour ma part, je vous dirai que si vous connaissez le processus et si vous avez l'habitude de chercher les appels d'offres du gouvernement dans les journaux, c'est un bon point de départ. Mais si vous êtes un nouveau venu, vous n'y penserez peut-être pas.
M. Bryden: Vous semblez dire que la publicité ne rapporte pas. Je trouve ça intéressant.
Si vous me permettez j'aimerais vous faire une suggestion. Vous pourriez peut-être demander à vos membres s'il serait utile pour eux que les contrats du gouvernement soient annoncés dans les journaux locaux parce qu'il s'agit d'une façon toute différente de procéder pour le gouvernement.
Le président: Bonne question, monsieur Bryden.
M. Bryden: Les fonctionnaires qui ont comparu au comité n'ont pas su me dire si ça avait eu des effets négatifs sur les petites entreprises qui cherchaient à se renseigner sur les contrats du gouvernement.
M. Gray: N'ont-ils pas pu vous dire si le nombre de soumissions avait baissé après cette décision?
M. Bryden: Ils ont tout simplement cessé de le faire, et ils n'ont aucun chiffre qui indique si cela a eu des effets négatifs sur les petites entreprises qui voulaient se renseigner sur les contrats du gouvernement. Ça m'a surpris.
M. Gray: Excusez-moi, monsieur, mais ils peuvent bien dire qu'ils n'ont pas de renseignement, mais je crois quand même qu'on peut deviner. S'il y a eu une baisse importante du nombre de contrats accordés à des entreprises d'une certaine taille, cela a bien des chances d'avoir eu des effets.
M. Bryden: Ils n'ont pas recueilli de chiffres, que je sache. Vous n'en avez pas eu vent non plus, et je trouve étonnant que cette façon d'informer la population de l'existence de contrats gouvernementaux ait été supprimée sans que personne semble être au courant. Mais ça, c'est une autre...
M. Gray: En réponse à votre question, je serais heureux de poser la question à nos membres.
M. Bryden: J'aimerais bien connaître la réponse.
Passons à autre chose. À deux reprises dans votre exposé vous avez parlé d'initiés, de lobbyistes et de manoeuvres politiques. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus, si vous le pouvez. Avez-vous le sentiment que les petites entreprises se sentent obligées d'intriguer auprès des hommes politiques pour avoir accès aux contrats du gouvernement? Je vois les gens derrière vous hocher la tête. C'est très intéressant.
M. Gray: Je vais hocher la tête moi aussi.
Ce n'est pas que je veux être évasif, mais on se doute pas mal qu'il y a un problème dans ce domaine, que si l'on ne se plie pas aux règles du jeu, on ne réussit pas. Si on joue le jeu, on a plus de chance de réussir.
Cette question, nous l'avons posée à nos membres, et je serai beaucoup plus en mesure de vous dire si c'est un problème sérieux d'après les chiffres que j'aurai compilés plutôt que d'après des anecdotes que j'ai entendues.
M. Bryden: J'ai une dernière question à ce propos. Faites-vous une distinction entre les pressions auprès des hommes politiques ou des bureaucrates pour obtenir un contrat?
M. Gray: Dans ce cas-ci, c'est la même chose.
M. Bryden: Merci.
Le président: Voilà qui est intéressant. Merci beaucoup, monsieur Bryden.
Monsieur Bélair.
M. Bélair (Cochrane - Superior): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d'être ici ce matin, monsieur Gray. Votre exposé était excellent.
Je lis dans votre texte que les petites entreprises obtiennent pour environ 5,5 milliards de dollars de contrats d'approvisionnements du gouvernement du Canada. Pourtant, plus tard dans le texte, vous tracez un tableau très sombre du système d'invitations ouvertes à soumissionner.
Ce système a été mis en route l'année dernière, et des centaines de milliers de contrats ont été adjugés. Le système semble marcher, mais vous dites qu'il est tellement complexe que certaines petites entreprises ont le sentiment de ne pas être traitées de façon équitable.
Vous avez parlé d'un sondage actuellement en cours auprès des petites entreprises. Tout d'abord, avez-vous participé à l'élaboration du nouveau service d'invitations ouvertes à soumissionner? Votre association a-t-elle suggéré ou recommandé au gouvernement des façons d'améliorer le système sur l'Internet? Vous avez parlé de modems et de communication de renseignements à vos membres. Avez-vous participé à la formulation de cela?
M. Gray: Vous parlez de l'élaboration?
M. Bélair: Oui.
M. Gray: Je vais revenir à ce que j'ai dit tout à l'heure et puis je parlerai de la participation.
En ce qui concerne le SIOS, il présente de nombreux avantages, c'est sûr. Mais c'est un système qui est encore imparfait et qui doit être amélioré. Comme pour tout nouveau système, il a ses imperfections.
Je peux vous donner l'exemple d'un consultant ici à Ottawa qui connaît très bien tout le système puisqu'il a travaillé à Services gouvernementaux Canada. Il a jugé que cela coûtait trop cher de se brancher sur le SIOS à cause du droit d'adhésion et des frais de connexion. C'était beaucoup moins cher pour lui d'utiliser le vieux système manuel plutôt que de se brancher sur le SIOS, plus compliqué et plus coûteux.
En ce qui concerne notre participation au développement...
M. Bélair: En d'autres termes, voulez-vous dire qu'il utilisait ses contacts au sein du gouvernement pour accéder, de façon détournée...
M. Gray: Non, pas de façon détournée, mais à travers ce que j'appellerais des anciennes méthodes. Et je ne veux pas dire qu'il avait ses entrées ou quelque chose de ce genre. Tout ce que je dis, en ce qui le concerne, c'est qu'il n'a pas profité de l'utilisation du système des invitations ouvertes à soumissionner. Il l'a trouvé trop coûteux et inutile. Une fois de plus, j'attends les données, et j'ai été très honnête dans mon témoignage à ce sujet, et je vous rapporte les frustrations de nos membres.
Je peux aussi vous parler des succès, mais je pense qu'en tirant les leçons des problèmes, nous pouvons améliorer le système. En ce qui concerne la mise en place du SIOS, on ne nous a pas demandé d'y contribuer et nous n'y avons pas participé. Voilà la réponse simple.
M. Bélair: D'après ce que vous venez de dire en réponse à d'autres questions, vous êtes maintenant prêts, si l'on vous y invite, à améliorer le système - en formulant des recommandations positives, bien entendu.
M. Gray: Bien sûr, nous le sommes. Je pense qu'en tant qu'organisation, nous avons la réputation de proposer au gouvernement des études solides et détaillées qui aident les décideurs et les autorités à prendre des décisions utiles et pertinentes pour nos membres; et notre force est de fournir des recommandations utiles et pratiques.
Le président: Monsieur Murray.
M. Murray (Lanark - Carleton): Monsieur Gray, merci pour votre exposé, qui est clair et utile.
Tout d'abord, la question des paiements en retard préoccupe beaucoup tous les membres du comité. Je me souviens - et je peux me tromper - qu'il y a quelques années, le gouvernement a décidé sciemment de...je ne dirai pas retarder le paiement au-delà des délais fixés, mais je pense qu'il a décidé de ne pas payer aussi rapidement que par le passé. Peut-être cette tendance a-t-elle été portée à l'extrême, je n'en suis pas sûr, mais c'est une situation intéressante. Évidemment, on l'a examinée, comme vous nous l'avez dit.
M. Gray: Monsieur Murray, en fait, les grandes organisations ont maintenant pour stratégie de retarder les paiements à leur propre avantage. Comme je l'ai déjà dit, c'est la personne en bout de ligne qui en pâtit.
Il ne fait aucun doute que, même si le gouvernement du Canada est censé payer ses factures en l'espace de 30 jours, il dispose maintenant d'une période de grâce de 15 jours sans pénalité, si j'ai bien compris. Ce qui revient à dire que le processus de paiements ne commence qu'après 45 jours; et il n'est pas rare que, dans certains cas, nos membres rapportent des cas de retards de 120 et 180 jours, même si j'ai mentionné 60 jours et plus.
Il est tout simplement inacceptable que votre propre gouvernement vous traite comme le font les plus durs du marché avec les entreprises qu'ils veulent marginaliser si elles ne jouent pas le jeu. Passe encore que les grandes sociétés le fassent - ce que je trouve terriblement inacceptable - mais que votre propre gouvernement vous joue ce jeu-là, c'est répréhensible.
M. Murray: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je trouve cette situation absurde dans la mesure où notre gouvernement s'évertue à trouver des moyens pour aider les petites entreprises, en réglant notamment le grave problème de liquidité qui touche toutes les PME. Le comité vient seulement de le constater après deux ans de travail. Comme je l'ai dit, cela a été très utile.
Vous avez dit que le gouvernement doit envisager de payer les factures de tous les fournisseurs, non seulement celles du titulaire du contrat, mais aussi celles des sous-traitants. D'après vous et vos membres, le non-paiement des factures est-il un problème plus grave dans le secteur public que dans le secteur privé?
M. Gray: Une fois de plus, cette observation a été faite par un de nos membres et elle a été fondée sur son expérience. J'ignore s'il s'agit d'un problème répandu. Je poserai la question aux entrepreneurs qui traitent avec le gouvernement de façon régulière. Veuillez-le-leur demander. Cependant, je pense qu'il s'agit d'une question assez intéressante.
L'un des avantages de ce sondage est qu'il nous a donné à réfléchir sur toutes sortes de ce que j'appellerais des questions connexes, des décisions d'ordre politique et des questions que nous devrions poser. Ainsi donc, une fois que l'on se penche sur la question, on se rend compte qu'elle a beaucoup de significations et on se demande quelles en sont les plus pertinentes. Je pense que nous en sommes encore à la première phase.
À mon avis, le travail de votre comité est terriblement important, car il va attirer l'attention du public. Nous ferons tout notre possible, non seulement avec ce sondage mais avec les prochains qui approfondiront les premiers résultats. Il serait insuffisant de nous arrêter en si bon chemin. Nous devons poursuivre nos recherches.
M. Murray: Au début de votre exposé, vous avez dit que la FCEI a reçu des plaintes concernant les achats à tous les paliers de gouvernement. J'ai été assez impressionné par le SIOS lorsqu'on nous l'a présenté. Honnêtement, j'ai eu l'impression que c'était un système convivial et assez utile. Je voulais vous demander si, à votre avis, le système fédéral au moins, c'est-à-dire le SIOS, peut servir de modèle à d'autres paliers de gouvernement, et si nous sommes peut-être plus avancés dans la prestation de services aux éventuels fournisseurs?
M. Gray: Je pense que l'idée d'un accès électronique est extrêmement importante et utile, mais je vous encouragerais à épurer le système actuel avant d'essayer de le vendre à d'autres paliers de gouvernement.
L'une des questions de notre sondage visait à identifier les membres de notre association et les paliers de gouvernement avec lesquels ils traitent. À l'avenir, nous allons chercher à connaître les problèmes relatifs aux achats provinciaux et municipaux, et non pas seulement fédéraux.
C'est bien beau de participer à ce débat, mais beaucoup de nos membres ont des contrats plus locaux que fédéraux, parce qu'ils sont franchement plus faciles à obtenir. Ils sont plus proches. Cela n'est pas rare, que l'on appartienne ou non au privé. Nous allons également nous pencher sur cette question pour cerner les problèmes.
Aujourd'hui, j'ai parlé de certains problèmes qui se posent à l'échelle fédérale. Il ne fait aucun doute qu'il y en a autant ou même plus aux deux autres paliers de gouvernement.
M. Murray: Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur White, je crois que vous avez une autre question brève.
M. White: J'ai une dernière question, monsieur Gray.
Évidemment, ce matin, nous avons beaucoup discuté du retard que le gouvernement accuse dans le paiement de ses factures. Avez-vous réfléchi aux motifs de ce retard? Savez-vous pourquoi le gouvernement agit de la sorte?
M. Gray: Étant donné qu'il éprouve des difficultés financières, c'est normal qu'il tarde à payer ses factures.
M. White: Je pense que vous avez raison. Je me demandais si cela était justifié, ou si vous pensiez qu'il s'agit simplement, pour ainsi dire, d'un cas de prévarication de la part de fonctionnaires qui refusent de faire avancer les dossiers et de payer les factures en bout de ligne.
M. Gray: C'est une question que vous devez vraiment examiner. À un moment donné, il devient rentable pour le gouvernement de traiter rapidement les dossiers car, en fait, cela coûterait moins cher si l'on payait plus vite. Il est important que vous interrogiez les témoins à cet égard.
Nous essayons de comprendre ce phénomène dans le cadre du comité sur la réduction de la paperasserie. Nous irons au fond des choses car nous sommes convaincus que le paiement rapide des factures est économique pour l'administration publique, en plus d'être un bonne pratique commerciale par rapport à nos fournisseurs.
M. White: Même si vous avez parfaitement raison de dire que si le gouvernement ramenait le délai de paiement de ses factures ne serait-ce que d'un mois, il pourrait être obligé d'emprunter 10 milliards de dollars demain sur le marché libre, ce qui augmenterait notre déficit et le service de la dette. Je suis que telle est la motivation. C'est mon opinion personnelle.
Je doute que le comité réussisse à convaincre le gouvernement de payer plus vite, mais je comprends ce que vous dites.
M. Gray: Nous parlons ici de promouvoir une bonne politique gouvernementale. Pour le gouvernement en effet, c'est une bonne politique de traiter ses clients avec respect.
Le président: Merci.
Monsieur Bellemare.
M. Bellemare (Carleton - Gloucester): Merci beaucoup.
Votre exposé était passionant et des plus révélateur. Je siège à ce comité depuis sa création, et auparavant, j'étais membre du Comité des comptes publics pendant cinq ans. Je m'intéresse beaucoup à la sous-traitance.
Commençons par certaines de vos observations.
Vous avez dit que le gouvernement fédéral consacre à peu près 14 milliards de dollars chaque année aux contrats. Il y a quelques années, au Comité des comptes publics, nous parlions de 3 milliards de dollars environ. Il y a deux ans, ce chiffre est passé à plus de 5 milliards. Le chiffre le plus récent est de 9 milliards de dollars; d'ailleurs, un journal a publié ce matin un tableau où figurait ce montant.
Vous dites que le gouvernement dépense 14 milliards de dollars. C'est toute une révélation. Où avez-vous obtenu ce chiffre?
M. Gray: Je dois dire que l'ai piraté d'une lettre que j'ai obtenue de M. Zed.
Des voix: Oh, oh!
M. Gray: Vous devez considérer ce chiffre de façon globale. Pouvez-vous me dire ce que représentent les 9 milliards de dollars? Il y a aussi les sociétés d'État. Leurs contrats sont-ils comptabilisés dans ces 9 milliards? Je n'en suis pas sûr.
Le président: Non, ils ne le sont pas.
M. Gray: Les contrats conclus à l'étranger font-ils partie des 9 milliards de dollars? J'en doute.
Si vous teniez compte de ces autres achats gouvernementaux et des possibilités offertes aux petites entreprises, je pense que le chiffre total serait beaucoup plus élevé que 9 milliards de dollars. Qu'il s'agisse de 14 milliards ou de 12 milliards, le fait est que c'est une somme considérable et les PME ont droit à une plus grande part.
M. Bellemare: J'aimerais beaucoup obtenir un exemplaire de la lettre que le président vous a envoyée. Elle contient peut-être toutes sortes de détails intéressants.
Pour continuer, vous avez dit que l'on doit vous accorder une plus grande part du gâteau. Je sais que bien des gens pensent que tout vient d'Ottawa. Ils semblent oublier que près de 30 p. 100 des activités du gouvernement fédéral se déroulent à Ottawa. Le reste est réparti de façon proportionnelle dans les autres régions du pays. Si l'Île-du-Prince-Édouard représente 1,5 p. 100 de la population, 1,5 p. 100 des fonctionnaires travaillent dans cette province. La répartition est proportionnelle à l'échelle nationale.
Je présume que les activités sont organisées en conséquence. On semble penser que si l'on veut acheter ou vendre quelque chose, il faut passer par Ottawa - est-ce que vous avez observé?
M. Gray: Une fois de plus, à cet égard, nous avons posé précisément la question suivante: avez-vous eu affaire à un organisme basé à Ottawa ou ailleurs? Nous le saurons et nous pourrons analyser nos résultats en conséquence. Je pense que ces informations nous seront très utiles.
M. Bellemare: Vous reviendrez, j'en suis sûr.
M. Gray: C'est exact.
Permettez-moi d'ajouter que, d'après notre expérience - une fois de plus, je me fonde sur les témoignages de nos membres - certains organismes semblent se débrouiller mieux que d'autres pour profiter des possibilités d'achats locales.
Par exemple, je sais que l'APECA est assez prévoyante à cet égard dans la région de l'Atlantique. Ma question est la suivante: les autres organismes gouvernementaux sont-ils aussi prévoyants dans les régions que l'APECA dans l'Atlantique? Je pense que l'expérience varie beaucoup et nous essayons de la comprendre.
Une fois de plus, voici les résultats de l'enquête. Je serai ravi d'en remettre un exemplaire à chacun de vous. Nous avons demandé à nos membres quels sont les ministères qui leur posent des problèmes et quels sont ceux qui ne leur en posent pas. Nous pourrons examiner les réponses en tenant compte du fait que certaines entreprises ont des contrats essentiellement à Ottawa et d'autres à l'extérieur d'Ottawa. Nous pourrons donc obtenir des informations qui ne sont peut-être pas parfaites, mais qui sont meilleures que celles dont nous disposons actuellement.
M. Bellemare: Dans votre enquête et vos études, faites-vous la différence entre...? Disons que le montant total des contrats est de neuf milliards de dollars; vous dites qu'il pourrait s'élever à14 milliards de dollars. Cependant, vous avez affirmé, à très juste titre, que vous comptez les organismes extérieurs, le Conseil national de recherches, ou toute activité qui ne relève pas directement du gouvernement fédéral.
Par exemple, avez-vous analysé séparément les services? Il y a un montant donné pour les services, les biens et la construction. Quand vous parlez de petites entreprises, nous pensons immédiatement aux gens qui vendent des biens. De toute évidence, il y a un problème d'accès dans les deux sens s'il s'agit des biens.
Si vous voulez acheter, par exemple, des matelas pour un camp militaire, même dans une ville comme Ottawa, nous sommes inondés de magasins de matelas. Dans l'ensemble du pays, il doit y avoir un million de magasins qui vendent des matelas. Chacun d'eux doit-il avoir une part des contrats gouvernementaux pour s'en sortir? À votre avis, comment ce système fonctionnerait-il?
M. Gray: Je ne pense pas qu'il soit pratique pour chaque vendeur ou distributeur de matelas du pays d'accéder à ces contrats. Je pense qu'il faut se conformer à une politique concernant...
Personne dans cette salle ne niera que le gouvernement doit respecter des normes au même titre que les entreprises. Nous avons besoin d'un produit de qualité. Il faut que ce produit soit livré à temps. Le service après-vente doit être très bon, et le prix raisonnable.
Cela dit, je pense que des politiques de développement économique, si je puis dire, sont indispensables. Il faut essayer de respecter les deux objectifs. Il ne faut pas jeter l'argent par les fenêtres pour atteindre le second objectif, mais il ne faut pas non plus rechercher l'efficience au point de nuire au développement économique.
M. Bellemare: Nous en arrivons à un problème qui me préoccupe. Que faire? Encourager et protéger l'économie locale, ou économiser, épargner de l'argent en acceptant l'offre la moins chère?
J'appelle cela le syndrome Wall-Mart. Le gouvernement pourrait dire qu'il achètera chez Wall-Mart parce que les prix sont les plus bas et les délais de livraison les plus courts. À mon avis, une telle démarche ruinerait toutes les petites entreprises.
À cause de l'ALENA, nous risquons fort, en fin de compte, d'acheter au Mexique ou aux États-Unis et de mener tout le monde à la faillite. La question est donc la suivante. Quel devrait être le facteur le plus important: le prix le plus bas ou la protection des économies locales?
M. Gray: À mon avis, il faudrait équilibrer les deux facteurs.
M. Bellemare: Je vous remercie.
M. Gray: C'est vous qui élaborez la politique gouvernementale. Je pense que vous devez respecter les deux objectifs car, en fin de compte, il vous incombe de promouvoir le développement du pays.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bélair.
M. Bélair: Monsieur le président, je serai bref.
Vous venez d'insinuer qu'une certaine partie des contrats doit être réservée aux PME. Vous vous souvenez certainement, monsieur Gray, que l'année dernière, une étude menée auprès des petites entreprises a révélé qu'il n'était pas nécessaire de mettre à l'essai une politique de réservation. Êtes-vous en train de dire aujourd'hui qu'il faut remettre cette idée à l'ordre du jour?
M. Gray: Non, pas du tout. Dans mon témoignage, je n'ai absolument pas parlé d'un programme d'achats réservés aux petites entreprises. Je parle simplement d'un accès juste et équitable. Si vous appliquez une politique qui donne aux gens un accès véritable, juste et ouvert, le marché va s'occuper de lui-même. Le problème, c'est que l'on a l'impression, souvent avec raison, que l'accès n'est pas véritable et libre.
Pour ce qui est d'une politique de réservation, nos membres sont partisans du marché libre. Ils ne croient pas qu'un régime distinct soit avantageux en fin de compte. Cela est contraire à certains objectifs du gouvernement actuel, notamment en ce qui concerne l'accord sur le commerce intérieur. L'un des plus gros problème, au Canada c'est qu'il existe des barrières artificielles autour de certains fiefs dans toutes les régions du pays, barrières qui sont censées aider les entreprises, mais qui, au contraire, limitent leurs possibilités.
Nous ne disons donc pas qu'il faut mettre en place un programme d'achats réservés à certains fournisseurs, car nous pensons qu'à partir du moment où on le fait pour les petites entreprises, on est obligé de le faire pour tous les groupes d'intérêts concevables. Je pense que nous devons commencer par assurer un accès libre et équitable et laisser le marché fonctionner de cette façon.
Le président: Je vous remercie.
En conclusion, nous demandons aux témoins de nous parler des modifications apportées aux contrats. À votre avis, pourquoi y a-t-il autant de modifications? La comptabilité est-elle mauvaise? Les chiffres sont-ils sous-estimés - autrement dit, y a-t-il des dépenses imprévues - ou voulez-vous faire d'autres suggestions?
M. Gray: Je n'en sais pas plus que ce que vous ont dit les témoins jusqu'à aujourd'hui, mais je présume qu'il y a beaucoup d'ajouts à certains contrats, et c'est l'une des raisons de ces modifications.
Le président: J'ai été content de vous entendre dire ne réponse à l'intervention de M. Bélair qui, à mon avis, était très valable, que la FCEI a des observations à faire sur le SIOS. Je pense que le gouvernement reconnaît lui-même qu'il s'agit d'un nouveau système et qu'il faut l'améliorer. En tant que secrétaire parlementaire, M. Bélair tient à obtenir ces renseignements, et en tant que comité gouvernemental, nous sommes heureux de recevoir vos idées à ce sujet, car nous voulons faire en sorte que ce système soit plus efficace et plus accessible.
Pour revenir à votre observation sur les achats réservés à certains fournisseurs, je sais que vous avez dit ce que vous en pensez, mais s'il n'existait pas d'autres moyens d'accéder aux contrats du gouvernement, seriez-vous toujours opposé à l'idée d'un tel programme?
M. Gray: Je pense qu'il faudra régler ce problème quand le système ne fonctionnera pas. À ce moment-là, en toute déférence, j'irai voir nos membres, comme nous le faisons dans tous les dossiers d'ordre politique, pour leur demander s'ils sont favorables à une politique de réservation. Jusqu'ici, ce n'est pas le cas.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Gray. Vous avez certainement donné matière à réflexion à notre comité et nous vous accueillerons à nouveau avec plaisir.
Chers collègues, je crois que nos témoins suivants sont là, et si cela vous convient, nous pourrions demander à M. Gray de rester à côté, et diviser en quelque sorte les témoins, pour qu'il puisse participer au débat avec les petites entreprises. Les échanges peuvent se poursuivre. Si cela vous convient, nous allons suspendre la séance pendant que le groupe de témoins suivant s'installe.
Nous reprenons nos travaux dans deux ou trois minutes.
Le président: La séance est ouverte.
Nous reprenons nos discussions avec les petites entreprises. Au nom du comité, je souhaite la bienvenue à M. Cowperthwaite, du Groupe des systèmes de ressources humaines à Ottawa, M. Earl Tice, vice-président de Nothing But Furniture à Markham, en Ontario et M. Gary Langhans, de SJS Packaging à Calgary.
Nous vous remercions de vous être donnés la peine de venir aujourd'hui. Votre opinion sur l'accès aux contrats gouvernementaux des petites et moyennes entreprises nous intéresse particulièrement
Avant que nous ne commencions, Mme Chamberlain a une requête à présenter au comité.
Mme Chamberlain: Monsieur le président, il y a aujourd'hui dans le Ottawa Citizen un article de Kathryn May, qui est assise au fond de la salle. Il traite des ressources naturelles et de contrats qui seraient accordés à la famille et amis de fonctionnaires. On y parle de certains domaines, comme les emplois d'été qui sont donnés à des étudiants parents de certains employés et on y mentionne divers principes qui n'ont pas été respectés.
Monsieur le président, je pense que nous devrions convoquer un témoin du ministère des Ressources naturelles. Sans vouloir offenser Mme May, je ne crois pas forcément tout ce que je lis dans les journaux, mais nous devons donner suite à cette affaire et nous former une opinion par nous-mêmes.
Le président: C'est une excellente suggestion. Je vais demander à notre greffière de contacter le sous-ministre et de lui demander s'il peut comparaître. Je crois que le 12 décembre serait une possibilité. Cela vous convient-il?
Mme Chamberlain: C'est parfait pour moi.
Le président: Dans ce cas, si nous le pouvons, nous les convoquerons pour le 12 décembre.
Monsieur White, votre parti n'y voit pas d'inconvénient? Parfait.
Chers collègues, nous allons commencer par un court exposé de deux ou trois minutes de chaque témoin. Si vous restez autour de la table, la discussion sera peut-être plus vivante.
Monsieur Gray, je vous rappelle que vous-même et les autres membres du panel pouvez intervenir chaque fois que vous le souhaitez.
M. Earl Tice (vice-président, Nothing But Furniture): Je suis vice-président à la fois de Nothing But Furniture et de Ecid Innovations, deux petites entreprises situées à Markham, en Ontario.
NBF est une entreprise familiale qui revend du mobilier de bureau fabriqué au Canada et aux États-Unis. Ecid Innovations est une petite entreprise qui conçoit et fabrique certains articles comme l'accoudoir Original pour les chaises d'ordinateur et la ligne de coussins Heather, qui comprend un coussin de conception unique pour les mères qui allaitent.
Dans la lettre que j'ai reçue du Comité permanent des opérations gouvernementales, on expliquait les objectifs du comité, et en particulier le souci du gouvernement d'obtenir des prix concurrentiels et de donner à tous les petits entrepreneurs la même chance d'obtenir des contrats gouvernementaux. Je vais donc essayer de vous offrir des suggestions positives sur la façon d'y parvenir.
D'après cette lettre, les produits et services achetés par le gouvernement doivent être au prix le plus économique, ce qui, j'imagine, doit vouloir dire le prix le plus bas. Deuxièmement, le gouvernement recherche l'optimisation des dépenses. À mon avis, ces deux objectifs se contredisent fréquemment.
Pour obtenir le prix le plus économique, le gouvernement doit d'ordinaire acheter directement au fabricant, et dans des quantités importantes. Si le gouvernement est tenu d'obtenir le prix le plus économique, il pourrait être amené à acheter plus que ce dont il a besoin pour respecter cet objectif.
À mon avis, l'optimisation des dépenses, c'est obtenir le produit dont on a besoin dans les quantités dont on a besoin, même si, à la pièce, le coût est plus élevé que le prix le plus économique. Par conséquent, je pense que le gouvernement devrait rechercher en priorité le meilleur rapport qualité - prix, et cela, de préférence au prix le plus économique.
Si j'ai été invité à comparaître devant le comité, c'est à la suite d'une lettre que j'ai écrite à un député du Nouveau-Brunswick, M. Paul Zed. Dans un article attribué à M. Zed, j'avais lu qu'on suggérait de réserver une proportion des contrats gouvernementaux aux petites et moyennes entreprises. À mon avis, c'est une bonne idée, laquelle a été retenue également par le gouvernement américain. En effet, je crois qu'une loi américaine oblige les organismes et ministères, et peut-être également certaines compagnies privées, à consacrer au moins 5 p. 100 de leur budget annuel à des transactions avec des petites entreprises ou avec des entreprises appartenant à des minorités ou à des personnes handicapées.
J'ai pris connaissance de cette information jeudi dernier, je n'ai donc pas eu le temps de m'assurer de son exactitude, mais j'ai tendance à penser que c'est vrai. Toutefois, j'ai eu le temps de contacter un petit entrepreneur de Floride qui m'a envoyé par messager des informations sur les politiques d'approvisionnement de l'État de Floride. Il existe en Floride un programme connu sous le nom de SNAPS, ce qui signifie: State-negotiated agreement price schedule (barème de prix négociés avec l'État). Ce programme permet d'obtenir le statut de fournisseur du gouvernement en moins d'une semaine et élimine la nécessité de faire des offres concurrentielles puisque les prix des produits et des services sont négociés d'avance.
Comment un petit entrepreneur peut-il s'inscrire au programme SNAPS? Il existe en Floride plus de 40 organismes et ministères qui peuvent acheter jusqu'à 11 000$ par année à des petites entreprises qui participent au programme SNAPS. Je crois comprendre que cette limite doit être portée à 150 000$ par organisme et par fournisseur le 15 janvier 1996.
Évidemment, il est nécessaire de définir ce qui constitue une petite entreprise. Cela pourrait se fonder sur le volume annuel de ventes en dollars. Par exemple, une petite entreprise aurait un volume de ventes annuel inférieur à 5 millions ou à 3 millions ou à 2 millions de dollars. Ce seuil reste à déterminer.
En exigeant qu'un pourcentage donné du budget d'un ministère aille à de petites entreprises, on assure une collaboration entre ce secteur et le gouvernement.
Pour beaucoup de petits entrepreneurs, l'idée de traiter avec le gouvernement fédéral est extrêmement intimidante. J'ai dans mon bureau un annuaire téléphonique du gouvernement fédéral, un annuaire d'une taille très respectable. Il est énorme. Je ne sais pas par où commencer.
Dans la région de Halton, un groupe de gestionnaires du privé qui ont pris leur retraite aide les petits entrepreneurs à régler les problèmes de croissance et de planification auxquels ils peuvent se heurter. Grâce à une subvention fédérale, ce groupe a produit un manuel intitulé Starting a Small Business Advisory Group (Comment organiser un groupe consultatif pour les petits entrepreneurs). Le gouvernement pourrait peut-être parrainer des groupes de gestionnaires fédéraux à la retraite qui se mettraient bénévolement à la disposition des petites entreprises dans les régions et les aideraient à s'y retrouver dans les dédales du gouvernement.
Je tiens à remercier le comité permanent de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui pour vous faire part de mes idées sur la façon dont la petite entreprise et le gouvernement peuvent collaborer davantage
Le président: Merci, monsieur Tice. Vous ne connaissez pas M. Bryden et sa manie de s'assurer que très peu est consacré aux groupes bénévoles. Il ne tardera pas à s'occuper de vous.
Nous entendons maintenant le représentant de SJM Packaging. Je vous en prie.
M. Gary Langhans (partenaire, SJM Packaging): Merci.
SJM Packaging est probablement la plus petite entreprise représentée ici. Nous fournissons des étuis protecteurs pour certains équipements utilisés sur le terrain. Nos clients typiques sont les sociétés pétrolières, celles qui exploitent les gisements pétroliers, les services de police ou l'armée. Je vais vous citer aujourd'hui un exemple qui illustrera certains des problèmes dont M. Gray a parlé, il s'agit d'un contrat octroyé par le ministère de la Défense.
Au départ, nous sommes entrés en contact avec la base militaire de Calgary dans le cadre de commandes locales. Vers le milieu de 1992, nous lui avons fourni un étui pour un ordinateur portatif et une imprimante. Les responsables ont trouvé notre produit plus solide que tout ce qu'ils avaient vu auparavant, son prix était concurrentiel et ils étaient satisfaits de notre service. Nous nous étions arrangés pour qu'il suffise d'ouvrir l'étui et de brancher la machine. Tous les branchements étaient déjà faits à l'intérieur de l'étui. Dans le courant de l'année, nous leur avons fourni du matériel à trois reprises, chaque fois dans le cadre de commandes locales. En effet, ils étaient satisfaits de ce que nous leur fournissions.
De bouche à oreille, notre réputation s'est étendue à toute l'armée. En 1993, la base de Petawawa nous a téléphoné et nous leur avons envoyé un de nos étuis pour qu'ils puissent l'évaluer. Ils avaient l'intention de faire des tests. Cet étui a fini entre les mains d'un gestionnaire de projets à Ottawa, un homme qui était sur le point de dépenser environ 2 millions de dollars à l'acquisition de 150 ou 200 ordinateurs portatifs.
Il nous a téléphoné et nous a demandé des informations et les spécifications de notre étui pour pouvoir les inscrire dans son appel d'offres. Il voulait essayer de convaincre les fournisseurs d'inclure notre étui dans leurs offres, et en fait, dans une annexe à la documentation, il donnait la liste des spécifications de notre étui, ajoutant qu'il l'aimait particulièrement, avec tel numéro de modèle, etc.
Finalement, une société d'ordinateurs fut choisie et les ordinateurs furent livrés dans les étuis que nous avions fournis.
Nous devenions ainsi des sous-traitants. C'est l'autre société qui avait le contrat principal; pour notre part, nous ne traitions pas directement avec le gouvernement. Et c'est là que les problèmes ont commencé. Nous sommes une très petite entreprise, et le fournisseur des ordinateurs et une très grosse compagnie ontarienne. Elle a voulu nous imposer certaines dispositions financières. C'est une compagnie que nous ne connaissions pas vraiment, et notre banquier n'était pas d'accord avec les conditions de crédit qu'on voulait nous imposer. Au départ, ils avaient accepté les modalités qui figuraient dans notre offre, mais par la suite, ils ont changé d'idée.
Cela ne nous a pas inquiétés immédiatement. Nous pensions qu'ils ne réussiraient pas à faire accepter une substitution puisqu'aucun autre étui ne correspond aux spécifications qui avaient été données et qui figuraient dans l'appel d'offres. C'est la spécification militaire la plus rigoureuse qui existe dans l'armée américaine. Toutefois, nos présomptions ne se confirmèrent pas.
Finalement, pendant l'année qui a suivi, nous avons eu un échange de correspondance avec le ministère des Approvisionnements et Services et celui de la Défense nationale. Je ne saurais vous décrire ici en détail tout ce qui suivit, mais nos plaintes portaient principalement sur deux aspects: des délais qui n'avaient pas été observés et une procédure irrégulière en ce qui concernait la substitution. C'était notre principal problème avec Approvisionnements et Services. D'autre part, nous estimions que le nouvel étui n'était pas conforme aux spécifications.
Pour vous donner un exemple de nos problèmes, dans la dernière lettre que nous avons reçue d'Approvisionnements et Services, on nous disait que les délais non respectés étaient un détail négligeable et que si, effectivement, la procédure suivie n'était peut-être pas tout à fait la bonne étant donné qu'il s'agissait d'un contrat final, cela importait peu et le ministère préférait ne plus en entendre parler.
Certaines personnes furent également chargées de se pencher sur toute cette affaire pour déterminer si la procédure avait été suivie et si la substitution avait été faite dans les règles. Ces personnes devaient étudier la question, et j'ai l'impression qu'en réalité... Approvisionnements et Services et le ministère de la Défense nationale ont bien échangé dans les règles tous les formulaires voulus. On nous a ensuite annoncé que la substitution avait été faite dans les règles et que le produit choisi était en réalité un produit supérieur. À ce moment-là, nous avons commencé à invoquer les dispositions de la Loi sur d'accès à l'information. Au fait, pendant toute cette affaire, c'est le seul moyen que nous ayons eu d'obtenir des informations car nous étions en sous-traitance, et pour nous, cela signifiait de nombreuses démarches et des retards considérables.
Quoi qu'il en soit, on nous avait dit que l'autre produit était supérieur. Nous nous sommes donc adressés aux responsables de l'accès à l'information et avons demandé les résultats du test. Tout ce que nous avons eu, c'est une brochure publicitaire de cette compagnie.
Nous avons plusieurs gammes de produits. Nous avions 40 exemplaires de ce soi-disant résultat de test sur notre comptoir car nous vendons également cette gamme d'étuis. Nous sommes donc retournés les voir, et bien sûr, nous avions des doléances.
Finalement, ils finirent par se rétracter quant à la supériorité de l'autre étui, mais évidemment, ils n'y avait pas eu de test pour ce nouvel étui. Dans une lettre, toutefois, on déclarait qu'un examen pratique de cet étui avait été effectué par un expert-conseil, et que l'étui était acceptable. Là encore, cela va à l'encontre de la procédure. Les spécifications étaient extrêmement détaillées. Pour effectuer toute la gamme des tests, il faudrait un mois.
Une dernière observation: l'expert-conseil et le gestionnaire de projets étaient une seule et même personne. C'est lui qui jugeait du bien-fondé de ses propres décisions quant à la qualité de l'étui et au produit de remplacement.
Comme je l'ai dit, nous avons donc été à la fois frustrés et déçus, et en même temps, furieux en notre qualité de contribuables. En fin de compte, nous avons commencé à nous essouffler, rien ne s'est produit. Beaucoup de documents ont changé de main, mais nous n'avons pas réussi à changer les choses.
Le président: Merci beaucoup pour cette anecdote et pour votre intervention.
Monsieur Cowperthwaite, je vous en prie.
M. Bill Cowperthwaite (vice-président, Groupe des systèmes de ressources humaines Ltée.): Merci, monsieur le président.
Le Groupe des systèmes de ressources humaines est une petite entreprise de cinq personnes qui offre des services de gestion des ressources humaines à un niveau stratégique du développement organisationnel, des services de planification et de sélection des ressources humaines et de gestion du rendement. Nos bureaux sont à deux pas de la Colline, ici à Ottawa.
Je tiens à vous remercier d'avoir accepté d'entendre notre opinion au sujet du système actuel d'approvisionnement du gouvernement fédéral et de ses effets sur la petite entreprise.
J'aimerais aborder quatre questions; premièrement, le recours aux préavis d'attribution de marché (ou PAM) qui désigne les marchés à fournisseur unique. Deuxièmement, les problèmes auxquels se heurtent les gestionnaires et la préférence qu'ils ont pour les fournisseurs uniques. Troisièmement, le fractionnement des marchés. Enfin, la perception des consommateurs.
Je précise tout de suite que je me suis trouvé des deux côtés de la barrière, ayant été à la fois directeur de grands projets gouvernementaux et, aujourd'hui, petit entrepreneur en concurrence avec d'autres entrepreneurs.
Pour commencer, en ce qui concerne les fournisseurs uniques, beaucoup de contrats annoncés au SIOS portent la mention «préavis d'attribution de marché», ou PAM. C'est un euphémisme qui veut dire fournisseur unique. De toute évidence, c'est une personne ou une société en particulier qui est visée.
Par exemple, dernièrement, dans un PAM, on était à la recherche d'un soumissionnaire qui devait être avocat, appartenir au conseil de la Reine, titre qui n'est plus décerné aujourd'hui aux avocats, et avoir une expérience de cinq ans d'une méthodologie qui existe à peine depuis cinq ans. De toute évidence, on avait l'intention d'accorder le contrat à une personne en particulier, bien que le principal créateur canadien de cette méthodologie réside à Ottawa et soit avocat, mais ne soit pas c.r.
On retrouve souvent ce genre de critères au SIOS, et le procédé est si peu subtil, que c'est une insulte à l'intelligence de beaucoup d'entre nous.
Des responsables de Travaux publics et Services gouvernementaux m'ont dit qu'ils font appel au PAM «parce qu'ils ne savent pas qui pourrait effectuer ce travail et espérent que le PAM sera contesté, ce qui leur permettra d'apprendre l'existence d'autres entrepreneurs».
Je précise que lorsque je me suis lancé dans les affaires, on m'avait dit que si je désirais retravailler pour un ministère, la dernière chose à faire était de contester le PAM, parce que cela vaut des ennuis à l'agent des contrats qui s'expose à la critique de ses gestionnaires. Par la suite, il évite donc de faire appel au contestataire. Deuxièmement, lorsqu'un contrat est contesté, cela risque d'empêcher l'octroi d'un marché à un fournisseur de prédilection, et cela attire l'attention sur le problème, ce qui diminue encore les chances du contestataire par la suite.
Une des fois où nous avons contesté un PAM, on nous a dit que nous avions effectivement les qualifications nécessaires, mais que l'organisation avait décidé de garder l'autre entrepreneur parce que le travail avait déjà commencé. De plus, la documentation fournie par ma société et ma lettre de contestation avaient été communiquées au concurrent qui téléphona ensuite à notre présidente, Mme Suzanne Simpson, pour l'insulter, à tel point que cela aurait pu faire l'objet de poursuites.
Bien sûr, n'étant pas assez malin pour tirer une leçon de ce premier incident, j'ai contesté un deuxième PAM car je savais que cinq autres entreprises ou personnes, au moins, pouvaient exécuter le travail requis, y compris l'un de nos associés. La contestation fut rejetée sous prétexte que notre organisation ne contrôlerait pas le travail du soumissionnaire, alors qu'en réalité, nous devions faire office d'entrepreneur principal pour notre associé.
Les organisations gouvernementales n'ont aucun mal à décourager les petits entrepreneurs de poursuivre une contestation. Il leur suffit de prolonger le processus, d'imposer des délais et des demandes d'information supplémentaires. Le plus souvent, les petits entrepreneurs n'ont ni le temps ni les ressources nécessaires pour persévérer dans de longues procédures bureaucratiques.
Sur la base de notre expérience, je sais aujourd'hui qu'il ne sert à rien de contester un PAM, et que cela aboutit forcément à des frustrations, voire des injures. Il est peu probable que je recommence. Évidemment, c'est ce qu'attendent les gens qui bénéficient des marchés à fournisseur unique.
Si j'ai cité ces exemples, c'est pour démontrer que le système PAM, si l'on s'en sert pour déterminer les candidats possibles, ne fonctionne vraiment pas. La meilleure façon de déterminer qui peut faire un travail, c'est d'afficher un avis au SIOS et d'attendre les offres.
Deuxièmement, je ne prétends pas qu'il s'agisse d'une tendance généralisée. Lorsqu'il y a contestation, il n'est pas normal qu'on envoie les informations de la société qui conteste à son concurrent. Ce genre d'information doit être considérée comme étant confidentielle, comme étant la propriété intellectuelle de l'organisation qui l'a produite.
D'autre part, je ne suis pas non plus contre les contrats à fournisseur unique. À mon avis, les particularités de certains marchés font que très peu de personnes sont vraiment qualifiées pour les exécuter. Par exemple, il y a plusieurs PAM sur l'habitat de certaines espèces rares de poissons, un sujet que connaissent vraiment une ou deux personnes seulement, et dans ce cas, c'est probablement une bonne chose. De temps à autre, cela peut être une bonne chose dans certains domaines de la recherche fondamentale, mais dans la majeure partie des cas, ce n'est pas une pratique normale, et ce n'est certainement pas à encourager.
Je prends peut-être trop de temps, mais je veux parler des pressions auxquelles sont exposés les gestionnaires de projets. Ayant été gestionnaire de projet moi-même, je sais qu'ils préfèrent souvent la méthode des marchés à fournisseur unique car ils ont des délais très courts pour mener à bien leur projet. Leurs maîtres, à la fois les hauts fonctionnaires et leurs maîtres politiques dans certains cas considérés comme particulièrement importants, veulent que le travail soit exécuté, et ce, dans les temps. Pour eux, le processus d'attribution de marchés est beaucoup trop long et beaucoup trop compliqué, et cela leur complique tellement les choses qu'ils préfèrent s'adresser à des fournisseurs uniques qu'ils connaissent; même si ce n'est pas toujours le meilleur candidat possible, ils savent que cela ira plus vite.
À mon avis, pour ce genre de projets, il faudrait un système intermédiaire, à mi-chemin entre l'offre permanente - qui ressemble beaucoup au programme SNAPS dont M. Tice a parlé - et les invitations ouvertes à soumissionner. On pourrait utiliser ce système lorsqu'il est possible d'approuver au préalable les soumissionnaires pour un projet particulier, et on pourrait attendre deux ans, par exemple, avant de les forcer à solliciter une nouvelle approbation ou de lancer un nouvel appel d'offres. Cela servirait pour un projet particulier, et pas forcément pour tous les secteurs du ministère en question.
Cette approbation préalable aiderait les gestionnaires de projets à respecter les délais tout en permettant aux entreprises de soumissionner, au lieu d'accorder les marchés uniquement à des amis ou à des organismes que l'on connaît déjà.
J'en viens maintenant au fractionnement des marchés. Les contrats de plus de 30 000$ sont censés être inscrits au SIOS. Très souvent, ce n'est pas le cas, et dans certains ministères, ces contrats sont très rares. Lorsqu'il s'agit de moins de 30 000$, ce n'est plus une obligation. Bien que cela soit interdit, il arrive tout de même très souvent que des soumissionnaires obtiennent des marchés de 25 000$ à titre expérimental, des marchés s'adressant à des fournisseurs uniques et approuvés à un niveau assez bas de la hiérarchie. Les personnes choisies peuvent ensuite obtenir d'importants contrats parce qu'elles sont, c'est l'euphémisme habituel, les seules qualifiées pour exécuter ce travail.
Dans mon secteur, celui des services, ce n'est vraiment pas un gros problème pour moi, sur la base d'un travail déjà exécuté, et exécuté correctement, cela va sans dire, de continuer dans la même voie et de prolonger le travail pour le compte d'un ministère.
Autre question, celle des consommateurs avertis. Très souvent, les gens qui lancent des appels d'offres, ou qui veulent octroyer des marchés, ne comprennent pas bien la nature du travail à accomplir. Par exemple, il y a un ministère qui accorde chaque année plusieurs contrats de l'ordre de 400 000 à 500 000$. Jusqu'à présent, ces contrats étaient accordés à une société choisie parmi cinq sociétés importantes. La plupart du temps, les clients ont relégué le produit fini aux oubliettes, car il leur était inutile. Voilà donc plusieurs millions de dollars dépensés chaque année pour des résultats qui ne servent à rien.
Le gouvernement semble n'avoir aucun système de contrôle de la qualité pour déterminer le rapport qualité-prix ou si les services sont bien exécutés et utiles à ceux qui les ont demandés. On pourrait empêcher les entrepreneurs qui ne respectent pas les critères de qualité de présenter des offres pendant une certaine période, tant qu'ils n'exercent pas un contrôle suffisant sur la qualité de leurs services. Si le gouvernement voulait vraiment économiser de l'argent, les responsables de projet auraient une connaissance plus approfondie des particularités d'un marché, ou encore, ils embaucheraient quelqu'un pour approuver les propositions et le résultat de ces propositions sur les plans de la qualité et de l'utilité.
Enfin, d'après mon expérience, la majeure partie des marchés gouvernementaux vont à des gens qui sont déjà connus des responsables d'attribution des marchés. Pour cette raison, les petits entrepreneurs ont beaucoup de mal à obtenir des marchés gouvernementaux car ils n'ont pas le personnel nécessaire pour arpenter les corridors des ministères et faire connaissance avec tous les responsables des marchés gouvernementaux. Évidemment, pour ceux qui ne sont pas basés à Ottawa, le problème est encore pire.
L'idée que le PAM, concept du fournisseur unique, puisse servir à trouver d'autres entrepreneurs intéressés, n'a aucun sens. Pour avoir cette information, il suffirait de parcourir les offres pour un projet donné.
Il doit y avoir un moyen terme entre l'offre permanente et le marché à fournisseur unique, un moyen terme qui permettrait aux gestionnaires de projets pressés d'obtenir un service rapide, et de respecter ainsi les délais qui leur sont imposés. La réponse réside peut-être dans un système de sélection préalable.
Le personnel des ministères doit bien connaître les particularités d'un marché pour différencier les bonnes offres des mauvaises et les bons résultats des mauvais.
J'ai entendu dire également que le Canada envisageait d'instaurer des programmes d'achats réservés à certains fournisseurs. J'ai eu la chance de représenter le Canada aux États-Unis, ce qui m'a permis de voir de moi-même comment fonctionne le programme d'achats réservés à certains fournisseurs dans ce pays. C'est un programme qui fonctionne peut-être là-bas, car pour eux, une «petite entreprise», c'est pour nous une très grosse entreprise. Apparemment, ce sont des compagnies dont le chiffre d'affaires est de 50 millions de dollars ou moins, ce qui englobe certainement un très grand nombre de sociétés canadiennes.
Toutefois, c'est un programme qui n'est pas vraiment populaire et, comme c'est souvent le cas lorsqu'on cherche à redresser un déséquilibre, ce programme a fait l'objet de certains abus. Je ne voudrais pas d'un tel programme au Canada. Ce que j'aimerais, c'est que toutes les entreprises soient sur un pied d'égalité en ce qui concerne les prix et la qualité, et cela, sans les préoccupations des grosses compagnies. Ces dernières, de leur côté, ont aussi leurs limites en ce qui concerne les frais généraux acceptables et ce qu'il en coûte pour préparer une offre. Je peux me défendre moi-même de la concurrence des grosses sociétés, à condition d'avoir la possibilité de démontrer ce que je peux faire.
Quelles que soient les règles, je demande qu'elles soient suivies; si l'on décide de les afficher au SIOS à un certain niveau, qu'on les affiche au SIOS à un certain niveau, et que je puisse faire une offre ouvertement et librement.
Merci, monsieur le président. Je suis désolé d'avoir dépassé le temps que vous m'aviez accordé.
Le président: Merci beaucoup.
Vos recommandations m'ont particulièrement frappé. Elles pourraient s'avérer très utiles lorsque nous envisagerons de faire nos recommandations à nos collègues du Conseil du Trésor.
Monsieur White, vous voulez commencer ce matin?
M. White: Oui, merci, monsieur le président.
J'ai une question à l'intention de M. Tice.
Je dois dire que ce programme d'achats réservés à certains fournisseurs me pose vraiment des problèmes. Je précise, au cas où vous n'auriez pas été là tout à l'heure, que j'appartiens moi-même à la petite entreprise, ayant travaillé dans ce secteur presque toute ma vie.
Comme M. Cowperthwaite l'a dit, et également M. Gray avant lui, ces marchés sont souvent systématiquement accordés à des gens connus. Un programme d'achats réservés à certains fournisseurs n'aurait-il pas pour effet de constituer un autre groupe d'intérêts spéciaux, un groupe qui aurait son propre budget? Les fonctionnaires ne finiraient-ils pas par rappeler les mêmes personnes chaque année pour remplir leur quota? Est-ce que ces gens-là ne finiraient pas par dépendre des fonds gouvernementaux, année après année, sans que ces marchés soient véritablement ouverts? N'est-ce pas en réalité un problème d'accès qu'on ne résoudra pas en réservant certaines sommes à la petite entreprise?
M. Tice: L'accès est certainement un problème. Nous sommes situés à Toronto et nous n'avons tout simplement pas le même accès aux ministères gouvernementaux à Ottawa.
Évidemment, le programme dachats réservés n'est pas parfait, mais il me semble qu'il permet, jusqu'à un certain point, d'accorder certains marchés expressément à des petites entreprises afin de leur assurer une part du gâteau. Encore une fois, je ne prétends pas qu'il n'y a pas de problème et qu'on ne doit pas prévoir des mécanismes de contrôle.
M. White: Convenez-vous qu'on aurait peut-être ainsi tendance à créer une dépendance?
M. Tice: Pas nécessairement. Si un vendeur doit remplir certaines conditions, je pense qu'il y aurait plusieurs vendeurs dans cette même catégorie. Il n'y a donc pas lieu de croire que le vendeur recevrait les contrats, année après année, à moins qu'il n'offre un service précis qui réponde aux besoins de ce ministère client.
M. White: Merci.
C'est tout, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur White.
Monsieur Bélair, je vous en prie.
M. Bélair: Monsieur le président, j'aimerais revenir sur le programme d'achats réservés, car cela intéresse vraiment de nombreux petits entrepreneurs au Canada.
Le témoignage du deuxième témoin semble contredire très directement celui de M. Gray en ce sens que ce dernier a déclaré que les petites entreprises au Canada ne privilégiaient pas une politique visant à réserver des fonds expressément pour les achats à de très petites entreprises. Pourtant, ces témoins disent qu'on doit réserver certaines sommes à cet effet.
J'aimerais donc poser ma question à M. Tice. Puisqu'il existe une entente qui prévoit que40 p. 100 des budgets soient alloués à la petite entreprise, à votre avis, faut-il réserver des budgets plus importants pour que les petites entreprises puissent être assurées de vendre au gouvernement?
M. Tice: Je suis convaincu qu'il faut augmenter les budgets, monsieur Bélair. Je pense que si l'on réservait, au sein d'un ministère, un pourcentage raisonnable aux petites entreprises, il y aurait une meilleure répartition des achats entre celles-ci.
À vrai dire, à l'heure actuelle, nous ne vendons ni au gouvernement fédéral, ni au gouvernement provincial ni aux municipalités. C'est vraiment trop difficile. Il faut simplifier le système.
En Floride, le système en place permet d'accréditer un fournisseur en une semaine. Le fournisseur peut donc se présenter, présenter ses produits aux acheteurs, indiquer ses prix et négocier immédiatement la transaction. Et tout cela parce que le fournisseur est accrédité en une semaine. Il ne recevra peut-être pas des contrats immédiatement, mais il peut certainement être accrédité. Une fois cela fait, je pense que c'est la responsabilité du fournisseur de s'adresser aux divers ministères pour la promotion de ses produits ou de ses services.
M. Bélair: En fait, monsieur le président, par le passé, il y avait un programme d'achats réservés. Cela existait. C'est sur la recommandation des petits entrepreneurs que le programme a été annulé.
Aujourd'hui, les chiffres révèlent que malgré l'annulation de ce programme, les pourcentages se maintiennent plus ou moins au même niveau. C'est d'ailleurs ce que disait M. Gray plus tôt. Ce programme n'est pas nécessaire, et ce n'est certainement pas le choix ou la préférence unanime.
Je pense que nous devons entendre d'autres petits entrepreneurs avant de prendre une décision quant à la recommandation que nous formulerons dans notre rapport.
Merci.
Le président: Je pense que vous avez raison, monsieur Bélair. Il ne semble pas y avoir unanimité sur cette question. Par conséquent, il nous est difficile de prendre une décision à ce sujet. Toutefois, il est intéressant d'obtenir des réactions à cette option.
Je pense, monsieur Gray, qu'au cours d'une rencontre future avec les représentants de la FCEI, dont nous avons parlé plus tôt, il serait utile de connaître la réaction de l'ensemble de vos membres à un programme d'achats réservés.
M. Gray: Nous avons des données intéressantes à ce sujet qui révèlent que nos membres s'y opposent, mais non par une grande majorité. Évidemment, il y a des divergences d'opinion, tout comme autour de cette table.
M. Cowperthwaite a déclaré que, à son avis et d'après son expérience aux États-Unis, le programme à l'intention de la petite entreprise n'est pas un succès monstre. Mes collègues américains me disent la même chose. Je ne pense donc pas qu'il faille considérer le modèle américain comme une panacée pour la petite entreprise au Canada.
Le président: Monsieur Cowperthwaite.
M. Cowperthwaite: L'un des problèmes liés à un programme dachats réservés aux petites entreprises, c'est que les grandes entreprises constituent de petites entreprises afin d'être admissibles, et appuient les efforts de ces dernières grâce à un très grand nombre de bureaux régionaux dans tout au pays, sans que l'on s'en rende nécessairement compte; il est impossible de l'interdire par une loi.
Le président: Excellent argument.
Monsieur Bryden, je vous en prie.
M. Bryden: Je vais poser mes questions à M. Cowperthwaite et à M. Langhans. D'après ce que vous dites - je pense que c'est de plus en plus notre impression - il y a beaucoup de tricherie aux niveaux inférieurs dans tous les ministères. Il existe des règlements, mais on triche partout. J'aimerais donc demander à chacun d'entre vous: que devrait faire le gouvernement pour exercer un contrôle? Que faire pour remédier au problème?
M. Langhans: Personnellement, je ne pense pas que de nouvelles lois ou de nouveaux règlements aideront les choses. Il existe déjà des règlements; ce qu'il faut, c'est être déterminé à les appliquer. Nous avions l'impression que ces règlements nous contrôlaient. Or en réalité, les règlements servaient à contrôler le public, mais cela n'a rien de surprenant.
Je ne sais donc vraiment pas comment provoquer un changmenet d'attitude. Cela va au-delà des lois.
M. Bryden: Monsieur Cowperthwaite.
M. Cowperthwaite: Tout dépend du moment où l'on envisage un projets en particulier et où il faut le faire exécuter. Le mauvais gestionnaire de projets en arrive à un certain point et tout à coup, il constate qu'il lui faut un consultant ou quelqu'un pour l'aider à se sortir d'une impasse particulièrement difficile ou encore qu'il lui faut faire un petit achat, à titre d'essai, pour déterminer si les spécifications sont ou non appropriées. La procédure de passation des contrats est très longue, fastidieuse et difficile. Le temps nécessaire à suivre la procédure entraînerait peut-être un dépassement du budget prévu par le ministère pour ce projet cette année-là. Il y aurait des retards. Les coûts pour le gouvernement augmenteraient considérablement à cause des retards dans le projet, etc.
Il faut donc prévoir un mécanisme qui permette aux gestionnaires de projets d'obtenir rapidement de l'aide. On pourrait faire une sélection préalable des soumissionnaires. Ce ne serait pas la même chose qu'une offre permanente qui se fait à l'échelle du ministère et qui permet à un vendeur de tel ou tel produit de faire accepter son produit au début de l'année pour un an, deux ans ou trois. Ensuite il peut vendre le produit. Dans ce cas-ci, il s'agirait d'une démarche, projet par projet. Quand vous savez qu'il vous faudra certains types de services ou de produits, vous pourriez les approuver au préalable. Il faut trouver une meilleure manière de permettre aux gestionnaires de respecter les délais sans avoir à se plier aux très nombreuses procédures des marchés de services.
Certains d'ailleurs ne savent même pas qu'ils peuvent conclure rapidement des contrats grâce aux offres permanentes, etc. Dans certains cas, ils ne savent même pas que cela existe. Je n'arrive pas à le leur reprocher, car parfois, c'est leur carrière qui est en jeu.
M. Bryden: Encore une fois, à vous deux messieurs - je m'excuse de vous exclure, monsieur Tice, mais vos commentaires portaient sur autre chose - serait-il utile d'avoir un meilleur accès à l'information?
M. Langhans disait qu'il avait dû passer par l'accès à l'information et qu'il avait éprouvé beaucoup de difficultés à se renseigner sur ce qui se passait. Faut-il que tout le processus soit plus ouvert? Devrait-on fournir plus d'information sur ce qui se passe, sur les décisions prises par les responsables des achats et sur ce qui est disponible au grand public? Est-ce une façon de s'en tirer?
M. Langhans: Nous n'avons éprouvé aucune difficulté à obtenir l'information grâce à l'accès à l'information. D'ailleurs, les renseignements sont disponibles, mais cela prend du temps. En plus, après avoir été consultés sur nos spécifications - puisqu'à l'origine, il s'agissait du produit de choix - nous avons été relégués... On ne voulait pas nous dire au téléphone qui était le nouveau fabricant ni le numéro du modèle retenu.
M. Bryden: On vous a refusé l'information.
Une dernière question dans cette veine. Est-ce qu'il serait utile d'avoir un ombudsman? Serait-il utile d'avoir un fonctionnaire du Conseil du Trésor, totalement indépendant, qui évaluerait les plaintes? Serait-ce une façon de régler le problème? Il doit y avoir une solution.
M. Cowperthwaite: Oui, je pense que dans certains cas, on devrait prévoir un mécanisme d'appel différent de ce qui existe actuellement. Vous pouvez vous adresser à l'agent des contrats, à l'agent du ministère des Travaux publics et demander pourquoi vous n'avez pas obtenu le contrat. Il est prévu dans la politique qu'on vous donne des explications si vous n'avez pas obtenu le contrat. Dans l'ensemble, on le fait, bien que parfois, il faille attendre très longtemps.
Pour revenir à ce que vous demandiez précédemment, je n'ai aucune difficulté à présenter une soumission ou à obtenir de l'information sur le SIOS. La difficulté, à mon avis, c'est que la terminologie n'est pas utilisée de façon uniforme. J'ai trouvé des choses qui avaient beaucoup d'importance pour moi sous des rubriques où je n'aurais même pas pensé chercher normalement, sauf que quelqu'un d'autre l'avait trouvé et me l'a dit.
Il n'y a aucun lexique actuel sur la structure de l'information pour uniformiser la présentation sur le SIOS afin que vous puissiez trouver facilement ce qui vous intéresse. On peut mettre n'importe quel nom. Ensuite, il peut y avoir un détail qui vous explique de quoi il s'agit.
On a toujours besoin du SIOS. Je souligne en passant que les Américains ont un programme intitulé «Commerce Business Daily». Il s'agit d'une liste quotidienne dans un journal spécial. D'ailleurs, il faut s'y abonner. C'est publié électroniquement, par télécopieur ou autre. Ou on peut attendre quatre ou cinq jours que le journal soit imprimé et distribué.
C'est aussi une procédure difficile. Je n'ai pas de problème d'accès, mais j'ai des problèmes liés à la normalisation des termes, etc.
M. Bryden: Je m'adresse à vous trois, messieurs. Pensez-vous que le fait que le gouvernement ait cessé de prendre des contrats de publicité dans des publications comme les journaux ait compliqué la tâche des petites entreprises qui souhaitent se renseigner sur les contrats dans leur région?
M. Cowperthwaite: Là encore, tout dépend. Disons qu'il s'égisse de publicité à l'échelle régionale. Là encore, il y a un si grand nombre de contrats. Je dois consulter le SIOS tous les jours afin de voir s'il y a quelque chose qui m'intéresse. Cela donne environ dix minutes par jour, à40 cents la minute, outre ce qu'il m'en coûte pour obtenir l'information pertinente à un contrat, avant de décider de soumissionner ou non.
La publicité à l'échelle régionale pourrait peut-être aider, mais il serait difficile d'utiliser un journal ordinaire. Il faudrait beaucoup d'espace dans les journaux.
M. Bryden: Je pense tout simplement à l'ancienne pratique qui consistait à annoncer à l'échelle régionale tous les contrats intéressant une région.
M. Cowperthwaite: Tout dépend évidemment du nombre de contrats et de la nature des activités. Avec des rubriques qui permettaient de trouver l'information rapidement, cela pourrait fonctionner.
M. Bryden: Monsieur Tice?
M. Tice: Tout dépend aussi des habitudes de lecture de chacun. Faut-il lire le journal tous les jours? Faut-il lire tel ou tel journal? Dans quelle section du journal l'annonce pourrait-elle? Franchement, je n'ai pas le temps de faire ce genre de recherches.
M. Bryden: Monsieur Langhans.
M. Langhans: Pour ma part, je préférerais l'idée du SIOS, en théorie tout au moins. Vous pouvez faire des recherches à partir de mots clés. Il n'est pas nécessaire de le faire quotidiennement. L'utilisateur n'a pas à se demander s'il doit consulter tel ou tel journal, dans telle ou telle ville. Le gouvernement va-t-il devoir placer des annonces dans tous ces journaux? Parfois, je m'inquiète du coût de toute cette publicité. Le SIOS permet de revenir en arrière et de faire un survol de la semaine précédente, si nécessaire. Cette idée me plait.
Le président: Vous aimez l'idée, mais peut-être faudrait-il la raffiner quelque peu.
M. Langhans: Le système pourrait peut-être être plus facile à utiliser.
M. Cowperthwaite: Techniquement, le SIOS est assez facile à utiliser. Je n'ai pas de problème de ce côté. Par contre, il faut parfois faire appel à des termes très précis pour trouver ce que l'on cherche.
Le président: C'est justement ce que nous souhaitons: des améliorations. Par exemple, nos collègues du ministère de la Santé ont comparu et nous ont soumis quelques suggestions. Certains témoins nous suggèrent également des améliorations au SIOS. C'est justement ce qui nous intéresse.
Merci, monsieur Bryden.
Monsieur Murray, s'il vous plaît.
M. Murray: Monsieur Cowperthwaite, je dois vous dire que votre exposé n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. J'ai une bonne expérience de l'appareil gouvernemental. Je n'ai jamais été fonctionnaire, mais j'ai eu l'occasion de traiter avec le gouvernement durant plus de 20 ans, tant à l'interne qu'à l'externe.
Vous m'avez justement rappelé certains aspects qui m'ont irrité au fil des années. J'ai toujours trouvé injuste que les hommes et les femmes politiques subissent tellement d'accusation de favoritisme alors que, d'après moi, c'est dans la fonction publique qu'il y a le plus de favoritisme.
Vous avez parlé de rapports qui finissent par dormir sur les tablettes. J'ai à l'esprit certains rapports qui ont coûté plus de 100 000$ et qui n'ont servi à rien du tout. Les fonctionnaires du ministère affectés à la tâche possédaient déjà dans leurs dossiers tous les renseignements nécessaires. Ils auraient pu rédiger eux-mêmes ces rapports.
J'ai hâte de voir le jour où nous trouverons le moyen de résoudre ce problème. Je sais bien que la petite entreprise a la vedette aujourd'hui dans nos délibérations et que nous nous efforçons de lui venir en aide, mais lorsque la question des abus revient sur la table, je ne peux m'empêcher de poser des questions.
Ma question ne porte donc pas seulement sur la gestion des programmes. Je me demande si vous pouvez m'expliquer les raisons de ce phénomène. Est-ce parce que certains budgets laissent des surplus et que certaines personnes ont des amis qui rédigent des rapports, des amis vers lesquels ils font pencher la balance, ou bien s'agit-il d'autre chose?
M. Cowperthwaite: Dans le cas dont j'ai parlé, les intéressés sont à la recherche de renseignements qui pourraient leur être extrêmement utiles et être utiles vraisemblablement à un grand nombre de secteurs d'activités.
L'attribution du contrat se fait dans une perspective administrative, alors qu'elle devrait en réalité se faire dans la perspective des sciences sociales. On pense plutôt en termes d'enquête économique qu'en terme d'enquête sociale. Les fonctionnaires savent ce qu'ils veulent faire mais ne savent pas nécessairement comment ils devraient le faire.
Il ne s'agit pas simplement d'argent qui reste à la fin de l'année. Là n'est pas la question. Les services sont très souvent d'excellente qualité. Comme on l'a souligné plus tôt, le secteur privé favorise certains entrepreneurs. Pourquoi le gouvernement n'en ferait-il pas autant? Dans le secteur privé on n'hésiterait pas à mettre à la parole toute personne qui ne donnerait pas un service de qualité, mais le gouvernement n'a pas les moyens de vérifier. Quand le produit ou le service n'est pas à la hauteur, tant pis.
J'ai entendu parler d'une société qu'on avait traîné devant les tribunaux pour ensuite lui demander de s'inscrire à la prochaine liste de soumissionnaires. Si c'est vrai, c'est ridicule. Comment peut-on fonctionner si on ne peut déterminer la qualité des biens ou des services reçus, sans pouvoir éliminer un entrepreneur, ou tout au moins lui dire qu'il n'a pas été à la hauteur et qu'il va être exclus de la liste des soumissionnaires pour un certain temps, jusqu'à ce qu'il soit en mesure d'offrir un produit ou un service de meilleure qualité? Dans une telle situation, le rapport qualité-prix sera toujours défavorable. Voilà l'un des problèmes.
M. Murray: En effet, je suis d'accord avec vous et, malheureusement, je connais des cas semblables. C'est un sujet qui mériterait peut-être d'être abordé un autre jour. J'aimerais y revenir plus tard.
Comme promis à M. Gray, je tiens à poser une question, au sujet des paiemenets qu'on ferait aux sons-traitant au lieu de payer tout simplement l'entrepreneur principal. Avez-vous une opinion à ce sujet? Est-ce même nécessaire? Je vous pose la question à tous.
M. Langhans: Nous étions en fait des sous-traitants et je comprends bien pourquoi on avait rédigé l'appel d'offres de cette façon-là. Autrement, il aurait fallu préparer un appel d'offres pour les ordinateurs et un autre pour les étuis. Ça va plus vite de dire «a fournis dans un étui.»
À ce moment-là, le sous-traitant est un peu à la merci de l'entrepreneur, comme ce fut notre cas. d'après les règles l'entrepreneur peut changer de sous-traitant si un produit n'est pas disponible ou si ce dernier n'est pas en mesure de le fournir. Cependant, rien ne précise ce qui détermine qu'un sous-traitant n'est pas en mesure de fournir l'article. On peut supposer que quelque chose s'est produit. Toutefois, dans notre cas, il n'y avait aucun problème concret. C'est un simple problème interpersonnel qui a permis à l'entrepreneur de déclarer de façon arbitraire que nous n'étions plus fournisseurs. Personne au gouvernement ne se pose de question ou se demande s'il existe effectivement un problème. Nous aurions pu prouver par lettre que le produit était en stock. L'entrepreneur a choisi de ne pas faire affaire avec nous et c'est tout ce qu'il lui fallait pour dire que nous n'étions pas en mesure de remplir la commande.
M. Murray: A-t-on laissé entendre qu'il faudrait faire une exception dans le cas de contrats gouvernementaux, par opposition aux contrats du secteur privé? Si j'ai bien compris par ailleurs, vous avez relativement peu d'expérience des contrats gouvernementaux. M. Tice nous a dit que son entreprise ne sollicitait pas de contrats.
Oui, monsieur Cowperthwaite.
M. Cowperthwaite: Pour le gouvernement, il est préférable de faire affaire avec un seul entrepreneur principal. C'est plus facile; cela fonctionne bien. Le rapport s'établit avec un seul interlocuteur et le problème est réglé. Par contre, le sous-traitant est un peu coincé si l'entrepreneur principal décide de lui rendre la vie difficile. Un mécanisme d'appel devrait certainement être prévu. Le sous-traitant devrait être en mesure de communiquer avec un représentant du gouvernement, un bureau des achats, pour signaler tout abus et solliciter une intervention. Il doit bien exister une protection quelconque.
Les représentants gouvernementaux préfèrent les entrepreneurs principaux. Ils favorisent les coparticipations. Ils favorisent les rapports entrepreneur principal/sous-traitant, mais certains problèmes peuvent se poser dans la mesure où le sous-traitant en difficulté ne peut faire appel à aucun mécanisme de défense.
Dans mon secteur d'activité, je fais constamment appel à des sous-traitants, mais je m'efforce d'entretenir d'excellents rapports avec eux dans l'intérêt de nos relations futures. Je cherche à faire appel à des sous-traitants valables et je m'efforce de les conserver. Si j'abuse d'eux, ils ne reviendront plus, sans compter que je ferai du tort à ma réputation. Il se peut que certains gros entrepreneurs ne se soucient pas de cet aspect, mais je continue à croire qu'un mécanisme de défense doit être prévu pour ce genre de situation, et que le sous-traitant dpot pouvoir faire appel d'une façon quelconque.
M. Murray: À l'heure actuelle, ce sont les députés qui jouent ce rôle. Lequel d'entre nous n'a jamais été contacté par un sous-traitant? C'est au moins cela.
Mme Chamberlain: Monsieur Cowperthwaite, je crois vous avoir entendu dire plus tôt que vous avez jadis travaillé au gouvernement fédéral.
M. Cowperthwaite: En effet.
Mme Chamberlain: Je ne voudrais pas que ma question soit mal interprétée mais il faut que je vous la pose puisque vous avez abordé le sujet. Pendant nos audiences non seulement sur l'attribution des marché mais sur d'autres questions aussi, on a souvent parlé de ces fonctionnaires qui, après avoir travaillé pour le gouvernement durant un certain nombre d'années, partant avec des pensions ou des indemnités pour ensuite se remettre au service du gouvernement, comme employé contractuel. Voilà une question qui me cause bien du souci.
Évidemment, dans certains domaines de spécialisation, ces personnes offrent au gouvernement des compétences qui lui sont nécessaires. Je le reconnais volontiers. Cependant, ces audiences nous ont permis de constater que parfois des gens qui ont quitté le gouvernement refont ensuite le même travail, souvent avec une meilleure rémunération. Et en même temps ils ont leur pension ou une indemnité d'excédentaire.
Qu'en pensez-vous? Vous qui avez oeuvré aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, qu'en pensez-vous?
M. Cowperthwaite: La question est complexe. Ce n'est certainement pas noir sur blanc. Si on force quelqu'un à prendre sa retraite, si on dit à une personne qu'on n'a plus besoin d'elle, qu'elle doit partir... Je pense à la Défense nationale, où il fallait prendre sa retraite à l'âge de 55 ans, bien que ce ne soit peut-être plus le cas aujourd'hui. On ne peut tout simplement pas dire à une personne de55 ans - c'est mon âge et j'ai encore l'impression de pouvoir être encore utile - qu'il est au bout du rouleau et qu'il ne peut plus rien faire. Ainsi, si on met un terme à l'emploi de quelqu'un, comment peut-on l'empêcher d'obtenir un autre emploi si c'est ce qu'il souhaite? Il n'est pas possible de contrôler ce genre de choses.
Par contre, certaines personnes partent de leur plein gré ou pour profiter d'une occasion. Il serait peut-être opportun dans de tels cas, de pouvoir déterminer si la personne peut revenir travailler directement dans le domaine qui était le sien. Je pense, par exemple, au cas d'un chargé de projet qui partirait pour aller immédiatement travailler pour le compte du fournisseur du même projet. Ce genre de situation risque de poser problème et il conviendrait de prévoir une période d'attente.
La compression des effectifs entraîne le départ de bon nombre de hauts fonctionnaires. Je reçois presque quotidiennement des demandes d'emploi de ces gens-là. D'après moi, c'est très bien. Ce n'est pas un problème. En effet, je participe à un processus concurrentiel. Je dois soumissionner. Je dois donner la liste de mes collaborateurs et ils sont évalués selon des critères établis.
Nous avons d'une part des gens qui prennent leur retraite et des personnes qui doivent partir parce que certains règlements limitent leurs perspectives de carrière et, d'autre part, ceux qui partent volontairement ou qui partent pour occuper un emploi et revenir par... dans ce dernier cas, il y a un problème et il faut fixer des limites.
La question est épineuse et elle va prendre une importance grandissante. D'après ce que nous savons déjà en matière de compressions des effectifs, la réduction actuelle des activités gouvernementales va donner lieu à une autre vague, imprévue celle-là, de réduction des effectifs, et ce pour des raisons purement médicales. En effet, toute compression importante des effectifs est suivie d'une onde de chocs de départs pour raisons médicales. Il faut donc prévoir une cette réduction des effectifs au cours des trois ou quatre prochaines années.
Vous allez perdre votre personnel d'expérience. Qui va prendre la relève? Vous allez devoir rappeler des gens. Ces personnes sont celles qui ont l'expérience nécessaire pour mener à bien les divers projets. Je crois donc que ce problème va s'aggraver au lieu de s'estomper durant un certain temps, jusqu'à ce que les nouveaux venus aient acquis l'expérience nécessaire.
Mme Chamberlain: Je ne prétend pas que toute personne qui quitte son emploi pour prendre sa retraite ou accepter une indemnité d'excédentaire, doit s'abstenir de se lancer en affaires. Le problème se pose lorsque la personne revient à l'endroit où elle se trouvait et avec une meilleure rémunération, sans compter l'indemnité et la pension. Voilà ce qui me préoccupe.
M. Cowperthwaite: Tout dépend du temps écoulé et de la situation de la personne qui en partie. Il faut pratiquement traiter ces questions au cas par cas.
Mme Chamberlain: Merci.
M. Bellemare: Je ne ménage jamais ma peine quand il s'agit de défendre les fonctionnaires, qui sont majoritaires dans ma circonscription. Vous avez évoqué une autre vague de compressions, que vous avez qualifiée de «médicale»...
M. Cowperthwaite: Oui, elle est liée à des raisons médicales. L'expérience nous montre en effet que dans les cas de compressions d'effectifs de grande envergure sans modification de la charge de travail... On a tendance à réduire les effectifs sans réduire parallèlement la charge de travail ni prévoir les effets de la compression. Je pense en particulier à bon nombre de sociétés américaines, qui ont une bonne longueur d'avance sur nous en la matière.
On a constaté, - par exemple à de la muinicipalité d'Edmonton, il y a quelques années au gouvernement de la Saskatchewan, gouvernement de au Saskatchewan, vers la fin des années 1970, ou au début des années 1980 - que ceux qui étaient épargnés par les compressions déployaient de grands efforts pour être à la hauteur de la tâche. À un moment donné cependant, les crise cardiaques, les ulcères et les dépressions se manifestaient. Dans la mesure, donc, où l'histoire se répète, c'est vraisemblablement ce qui va se passer à nouveau.
Le président: Merci.
Monsieur Cowperthwaite, vous avez parlé de contestation du préavis d'attribution marche. Si un soumissionnaire conteste le préavis, y a-t-il report de l'exécution ou du marché jusqu'à ce que la question ait été réglée.
M. Cowperthwaite: L'intéressé doit fournir des renseignements qui prouvent qu'il peut faire le travail, qu'il a les compétences voulues. Alors, selon la règle établie, tout soumissionnaire qui conteste avec succès un PAM est admissible comme soumissionnaire à l'appel d'offres.
Dans certains cas ce sont des marchés considérables dont la valeur atteint plusieurs centaines de milliers de dollars, et qui sont confiés à un fournisseur exclusif. Je crois bien que des fournisseurs de produits en diraient autant mais j'estime que, tout particulièrement dans le secteur des services, il est difficile de croire qu'il puisse exister un seul fournisseur à l'échelle de l'ensemble du pays. À mon avis, c'est tout à fait ridicule.
Le président: D'accord.
J'ai deux autres questions. Tout d'abord, le gouvernement devrait-il envisager l'idée d'une prime ou d'une mesure d'incitation pour les fournisseurs qui respectent les budgets et les délais? Nous avons constaté que les contrats font l'objet de nombreuses modifications. Ne serait-il pas logique d'accorder une légère prime à ceux qui respectent les délais? Dans la même veine, conviendrait-il d'imposer une amende quelconque aux entreprises qui ont l'habitude de dépasser les budgets?
M. Tice: Le problème c'est de déterminer qui est responsable du dépassement de coût. S'il c'est d'un ajout du gouvernement, c'est lui qui est responsable. Si c'est un oubli du fournissseur, c'est peut-être lui qui est responsable. Mais qui en décide? ça nous ramène à l'idée d'un arbitre.
Le président: Très bien.
M. Langhans: Cela semble raisonnable et je pense que cela pourrait avoir une certaine utilité. Comme l'a dit le témoin, il reste encore à déterminer la cause du dépassement. D'autre part, pour aller un peu plus loin, on pourrait peut-être prévoir une prime ou une pénalité pour le gouvernement en cas de paiement en retard.
Le président: Très bien.
M. Cowperthwaite: Je suis moi-même dans cette situation. Je suis au beau milieu d'un contrat qui a été retardé deux fois parce que le ministère n'arrive pas à se décider ou à respecter les délais convenus au départ. Je dois tout à coup m'arrêter pendant trois mois et garder quelqu'un en réserve pour qu'il puisse recommencer le travail instantanément. Quand le gouvernement aura enfin pris une autre décision, le contrat, qui devait durer quatre mois au départ, aura duré un an, mais on me demande d'être disponible immédiatement lorsque le ministère décidera de recommencer.
Cela veut dire que je dois garder un employé à ne rien faire en attendant le bon plaisir du ministère qui doit décider s'il continuer ou pas. Je n'en ai pas les moyens, mais je serai pénalisé si cet employé n'est pas disponible le jour où le gouvernement prendra sa décision.
Le président: Merci beaucoup, collègues.
Je tiens à remercier en votre nom les témoins de leurs exposés.
Je vois que le prochain groupe est déjà ici et avons 15 minutes de retard.
Je vous remercie beaucoup d'être venus nous donner le point de vue de vos régions respectives et nous vous sommes reconnaissants de nous avoir donnévotre opinion.
Nous allons suspendre la séance un instant.
M. Bryden: Un instant. Nous pouvons laisser les témoins partir, mais je dois moi-même vous quitter à midi, monsieur le président. Je voudrais proposer au comité d'entendre les fonctionnaires de Revenu Canada la semaine prochaine en plus des réunions que déjà prévues pour la réponse au projet de loi C-224. Si je ne m'abuse, les fonctionnaires pourraient comparaître mardi si cela vous va.
Le président: Ce serait très bien. Je pense que tout le monde serait d'accord.
Nous allons demander à la greffière de communiquer avec eux et nous les ferons venir pour une demi-heure un des jours où nous devions siéger de toute façon.
M. Bryden: Ce sera probablement au début de la semaine. Je pense qu'ils peuvent venir mardi prochain.
Le président: Nous allons suspendrons la séance pendant environ trois minutes.
Le président: Nous reprenons maintenant la séance. Le Comité des opérations gouvernementales va maintenant reprendre sa journée des petites et moyennes entreprises.
Au nom du comité, je tiens à souhaiter la bienvenue à M. Peter McKelvey, de Fundy Engineering and Consulting Limited, de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick; à M. David Simpson, de Bioquest Environmental Company Ltd., de Willowdale, en Ontario; à Brian March, de Kaycom, à Ville St-Laurent, au Québec; et à M. Geoff Burton, de BW Imaging, de Winnipeg, au Manitoba.
Je pense que nous avons là un bon évantal des entreprises du pays. Vous pouvez commencer, monsieur McKelvey.
M. Peter McKelvey (président, Fundy Engineering and Consulting Limited): Merci. Mesdames et messieurs et membres du comité, je m'appelle Peter McKelvey et je suis l'un des principaux associés de Fundy Engineering and Consulting Limited. Notre petite firme d'ingénierie emploie sept personnes. Nous travaillons dans tous les domaines de l'ingénierie géotechnique et environnementale et nous avons mis sur pied des projets dans les domaines des pêches, de l'aquaculture et de l'agriculture.
Nous avons travaillé pour plusieurs ministères du gouvernement, en l'occurrence Agriculture Canada, Travaux publics, Environnement Canada, le ministère de la Défense nationale, ou plutôt Construction de la défense Canada, la Société canadienne d'hypothèques et de logements, la Banque fédérale de développement, le ministère des Pêches et des Océans, la Société du Port de Saint-Jean, qui est une société d'État fédérale, et Revenu Canada.
Nous avons aussi travaillé à des projets financés par des organismes fédéraux tels que le CNR, le PARI et l'APECA. À part cela, nous avons travaillé pour des gouvernements municipaux et provinciaux et une société fédérale américaine.
Je voudrais vous parler de certaines de nos expériences et développer certains points de mon mémopir
Il y a plusieurs années, nous étions le plus bas soumissionnaire pour des enquêtes géotechniques en vue de la construction de quais dans les régions de la baie de Fundy pour le compte de Travaux publics. Le travail devait se faire pendant l'hiver dans des conditions assez quelque peu imprévisibles et le gouvernement nous avait demandé de donner un prix fixe. Nous avons dû, bien sûr, proposer un prix courant certains imprévus.
L'offre la plus basse, qui était la nôtre, dépassait cependant un peu le budget du ministère pour ce projet. Il a donc réévalué le projet, réduit l'ampleur des travaux et mené une enquête géotechnique à un seul endroit plutôt qu'à deux ou trois sites. L'enquête géotechnique a ensuite été confiée à une autre entreprise de la Nouvelle-Écosse à titre de rajout à un autre contrat sans que nous en soyons avertis. Il a fallu plusieurs mois pour que nous apprenions, étant le soumissionnaire le plus bas, que nous n'avions pas été consultés pour le projet modifié et qu'on ne nous avait pas non plus demandé de soumettre un prix pour ce travail.
Je voudrais aussi répondre à certaines de vos questions relatives à la sous-traitance. Ce que j'ai entendu ce matin m'a rappelé mes propres expériences.
Je me rappelle d'une autre enquête géotechnique pour un immeuble public qui devait être construit pendant l'hiver. Nous étions sous-traitant d'un architecte qui nous avait demandé un prix pour les services d'inspection. Comme il arrive très souvent, il fallait faire des travaux supplémentaires pour construire un trottoir et d'autres rajouts travaux supplémentaires en béton, sans parler des coûts supplémentaires à cause du mauvais temps en hiver.
L'architecte dont nous étions les sous-traitants n'a pas pris notre défense. Constatant qu'on ne nous payait pas, nous nous sommes adressés au ministère en cause, celui des Travaux publics, et l'on nous a dit: «il est trop tard pour présenter une réclamation pour des coûts supplémentaires. Nous le regrettons, mais nous ne pouvons rien faire». Nous avons donc perdu 2 500$.
Dans le même ordre d'idées, une autre firme d'ingénierie avec laquelle nous travaillions souvent s'est rretrouve avec une facture impyée de près de 100 000$ quand l'architecte qui gérait le projet à contrat a fait faillite. La firme a refusé de donner les plans du projet tant que le fournisseur n'aurait pas payé sa facture directement.
Nous avons aussi eu des contacts avec Agriculture Canada pour des projets financés dans le cadre d'ententes complémentaires fédérales-provinciales. Un prix fixe devait être soumis et nous avons eu le contrat. un prix fixe. Même s'il s'agissait d'un contrat à prix fixe, on nous avait demandé une quantité excessive de documentation, jusqu'aux récépissés écrits pour les coups de téléphone individuels et la moindre de nos dépenses. Nous avons dû remplir plusieurs formulaires, ce qui était complètement inutile ant, surtout pour un contrat à prix fixe.
Quand à la Défense nationale, ou plutôt Construction de la défense Canada, les projets que nous avons entrepris pour cet organisme étaient passés par le système SPEC, un système de détermination préalable de la compétence des soumissionnaires avec roulement et avec des procédures d'évaluation après que le projet est complété, ce qui veut dire qu'il faut faire du bon travail pour rester sur la liste.
Nous avons eu de bonnes expériences avec le SPEC. Nous en avons parlé aux firmes rivales et elles ont aussi obtenu des contrats avec ce système. Nous savons que les contrats doivent être répartis équitablement. Selon nous, ce système est tout à fait juste pour les contrats moins importants.
Cependant, tous les ministères du gouvernement qui devraient utiliser le système ne le font pas nécessairement. Pour un contrat donné, on nous a demandé directement de proposer un prix pour des services d'inspection lors de la deuxième phase d'un projet important de construction dans notre région. Il y avait eu un appel d'offres pour la première partie du travail et le contrat avait été octroyé à une autre entreprise. Quand est venu le temps de faire des travaux supplémentaires, le gestionnaire du projet nous a téléphoné. Je lui ai demandé ce qu'il voulait et il m'a dit: «Eh bien, je voudrais simplement avoir une idée des coûts».
Nous avions l'impression qu'il voulait simplement serrer la vis à son entrepreneur à nos dépends en nous demandant de proposer un prix pour qu'il sache quel montant il devrait raisonnablement verser à l'autre entreprise. Nous l'avons donc pris à parti en lui disant: «Si vous voulez faire un appel d'offres, nous voudrions de notre côté que vous y indiquiez vos exigences et que vous précisiez un délai pour la présentation des offres.» Il l'a fait. Nous avons donc présenté nos propositions et le contrat est allé à la même entreprise que la première fois.
Comme j'ignore ce que contenait l'autre proposition, je ne peux pas vraiment la commenter.
Par ailleurs, nous avons aussi travaillé pour la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Banque fédérale de développement, la Société du port de Saint-Jean, Environnement Canada et Revenu Canada. Cela s'est bien passé et nous avons eu l'impression d'être traités équitablement.
Au cours des années, nous avons aussi offert nos services à divers organismes du gouvernement fédéral. Ces organismes n'existent plus tous aujourd'hui, mais je vais vous donner la liste de ceux pour lesquels nous avons travaillé: l'ACDI, le SPEC, dont j'ai déjà parlé; ACCORD, le Service des invitations ouvertes à soumissionner...
Le président: Excusez-moi, monsieur McKelvey, mais c'est quoi ACCORD?
M. McKelvey: Je craignais que quelqu'un me pose cette question. ACCORD est un système semblable au SPEC pour les achats de matériaux, je pense. On a aussi besoin de services d'inspection de temps à autre dans le cadre de ce système. Nous n'avons eu qu'un seul contrat avec ACCORD.
Nous avons certaines suggestions à faire au sujet de certains de ces organismes. Bon nombre de petits exploitants de ma localité, que je rencontre dans le cadre d'associations professionnelles et à la Chambre de commerce, condamnent le SIOS pour des raisons que j'ai du mal à expliquer. Je pense cependant pouvoir dire qu'il faudrait un accès direct aux renseignements gouvernementaux, et que, de toute façon, le système actuel devrait être sérieusement remanié.
Je voudrais parler un peu des faiblesses que nous avons constatées dans le système. Tout d'abord, tous les contrats qui pourraient passer par le SIOS ne le font pas parce que certains ministères ne l'emploient pas. Deuxièmement, bon nombre de descriptions d'emploi sont difficiles à déchiffrer, ce qui veut dire qu'il est très difficile pour nous de décider si cela vaut la peine d'engager les dépenses nécessaires pour préparer une soumission complète.
Même si la corrélation peut paraître simple, nous trouvons le système lourd et coûteux. Les ministères du gouvernement doivent établir la liste de leurs besoins, la fournir au ministère des Approvisionnements et Services et ensuite divulguer et répartir ces renseignements par l'entremise d'un entrepreneur unique. Cela coûte de l'argent.
Le président: Je ne veux pas interrompre votre exposé, mais il nous en reste encore trois. Vous pourriez peut-être résumer et conclure.
M. McKelvey: Très bien. Je serai bref.
Selon nous, le gouvernement tellement a essayé d'être objectif que le système ne fonctionne pas. En outre, le coût de l'abonnement est un obstacle pour beaucoup de petites entreprises. Comme je l'ai déjà dit, de nombreux contrats visés par le SIOS ont déjà été octroyés à un fournisseur unique. Le SIOS semble mieux adapté aux grandes entreprises à cause de la nécessité d'informatiser les systèmes, du temps qu'il faut à une personne compétente pour surveiller ce qui se passe, la nature critique des appels d'offres et les coûts que cela représente.
Bon nombre de petites entreprises comme la mienne doutent de la valeur du SIOS. Le fait est que nous avons dépensé beaucoup d'argent pour le SIOS sans obtenir quoi que ce soit en retour. À mon avis, l'interface des logiciels est désuet. En outre, le système fonctionnerait mieux si chaque ministère gouvernemental se servait de l'Internet pour afficher ses besoins et permettait aux fournisseurs d'avoir accès à ces renseignements dans un climat de libre entreprise. Il faudrait aussi organiser ces renseignements autrement pour ceux qui le préfèrent.
Qui plus est, si l'on veut que la politique d'achat soit équitable pour les contrats d'une valeur inférieure à un certain seuil, il me semble que les ministères gouvernementaux devraient pouvoir acheter à des fournisseurs locaux partout dans le pays. Autrement dit, si un ministère a besoin d'un matelas à Inuvik, il ne devrait pas être obligé de passer par le SIOS. Il devrait pouvoir s'adresser directement au magasin de matelas de l'endroit.
Nous avons eu aussi des problèmes dans nos rapports avec l'ACDI. Selon nous, l'ACDI ne comprend la contribution que font les petites et moyennes entreprises au pays. Elle a l'habitude de regrouper ses contrats. Nous avons l'impression que les contrats de l'ACDI sont octroyés à un petit groupe d'entreprises du centre du Canada, c'est-à-dire surtout du Québec et en Ontario. Pourtant, il existe ailleurs des compagnies variées et compétentes qui seraient mieux placées pour faire face aux problèmes pays du tiers monde.
Le personnel de l'ACDI semble penser que les contrats octroyés à une grande entreprise profitent aux petites et moyennes entreprises. C'est comme si un petit cabinet d'avocats demandait à un gros cabinet d'Ottawa ou de Hull de lui envoyer des clients. L'ACDI ne comprend pas les réalités du monde des affaires et cela me pousse à me demander si elle comprend bien les besoins des pays du tiers monde. Nous recommandons que, parmi les critères utilisés par l'ACDI pour évaluer les propositions, on ajoute la promotion de nouveaux fournisseurs.
Dans le cas des professionnels du design, nous avons l'impression que le gouvernement achète très souvent les services de gestion et de design professionnels purement en fonction du prix, et pas seulement d'après la valeur des services fournis. Le design le moins cher n'est pas nécessairement la solution la plus rentable.
Un mot enfin au sujet des services professionnels. On n'exige pas que les entreprises du secteur des services professionnels et d'ingénierie soient accréditées selon la norme ISO 9000 parce que nous formons des associations professionnelles qui sont régies par les lois provinciales. L'accréditation ISO 9000 représente une dépense inutile et un fardeau beaucoup trop lourd pour les petites entreprises.
Le président: Merci beaucoup, monsieur McKelvey.
Monsieur Simpson, la parole est à vous.
M. David Simpson (président, Bioquest Environmental Co. Ltd.): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs. Je m'appelle David Simpson et je représente Bioquest Environmental Co. Ltd. Nous avons nos bureaux à Toronto et nous travaillons partout dans le Canada.
Je voudrais prendre quelques instants pour décrire brièvement notre entreprise et parler un peu des problèmes qui se sont présentés quand nous avons essayé d'obtenir des projets du gouvernement. Bioquest Environmental Co. Ltd. a été créée en 1992 pour commercialiser un nouveau procédé de biorestauration.
Bioquest est une entreprise canadienne qui a mis au point de nombreuses nouvelles méthodes d'utilisation de micro-organismes qui digèrent les hydrocarbures et divers autres composés organiques qui existent dans le sol, la nappe phréatique, les lacs ou les océans. La plupart de ces nouvelles technologies sont utilisées pour la biorestauration in situ, notre spécialité.
La biorestauration in situ présente d'énormes avantages. Elle se fait sur les lieux et rien n'est enlevé du site. La biorestauration in situ perturbe le site au minimum puisque nous pouvons forer dans les immeubles, à travers les planchers et injecter dans les sous-sols. Cela élimine les frais de transport des sols contaminés et élimine aussi les déchets de façon permanente. Il n'est plus nécessaire de transporter les déchets par camion vers des sites d'enfouissement.
À notre connaissance, nous sommes la seule entreprise du Canada qui posséde un brevet pour utiliser ce procédé
Encore plus important, le prix que nous offrons l'année prochaine, c'est-à-dire en 1996, pour restaurer ces sites contaminés est un prix fixe de 23,50$ la tonne et nous offrons une garantie de remboursement si le site n'est pas nettoyé pour une raison quelconque. Ces coûts sont très inférieurs aux coûts d'autres méthodes.
Depuis 1992, Bioquest Environmental Co. Ltd. a mené à bien bon nombre de projets pour diverses firmes d'ingénierie et un grand nombre de petites et de grandes entreprises ont utilisé notre nouvelle technologie et notre méthode peu coûteuse de restauration. Nous avons investi beaucoup d'efforts et d'argent pour essayer de faire affaire avec le gouvernement, tout particulièrement le ministère de la Défense nationale, mais sans succès.
En vue d'obtenir des projets de la Défense nationale, nous avons organisé des ateliers pour les employés des services environnementaux du Quartier général de la Défense nationale, ici même à Ottawa, et nous avons aussi mis sur pied d'autres projets expérimentaux qui se poursuivent.
On nous a avisés dès le début que nous devrions relier notre ordinateur au système SIOS pour pouvoir présenter une soumission à la Défense nationale. Nous nous sommes pliés à cette demande et nous avons très vite trouvé un projet à l'écran. Nous sommes entrés en rapport avec l'officier de l'environnement de la base, qui a semblé très intéressé. Pendant l'été, cependant, nous avons perdu tout espoir d'obtenir des contrats de la Défense nationale.
À deux reprises, des agents environnementaux nous ont dit qu'on ferait appel uniquement à des entrepreneurs locaux. Lorsque j'ai demandé pourquoi au deuxième agent, il m'a répondu d'appeler un député et de lui expliquer mon problème.
Donc, monsieur le président, lorsque j'ai lu l'article du Toronto Star dans lequel on vous citait à plusieurs reprises, je me suis fait un plaisir d'envoyer cet article par fax à votre bureau de Rothesay.
Je suis très heureux d'avoir pu représenter Bioquest ici même, à Ottawa, et je répondrai avec plaisir à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Simpson. Nous avons été heureux de vous accueillir.
Passons maintenant à M. March de Ville Saint-Laurent, au Québec.
M. Brian March (président, Kaycom Inc.): Bonjour, monsieur le président, et mesdames et messieurs du comité. Je vous remercie de m'avoir permis de vous faire part de mes préoccupations au sujet des pratiques qui ont cours dans les marchés publics, et particulièrement de cette tandance qui désavantage les petites entreprises: la multiplication des contrats à fournisseurs exclusifs. Je serai bref, puisque la discussion nous semble plus bénéfique.
Kaycom Inc. est une petite entreprise qui fait affaire uniquement avec le gouvernement et qui adhère à la norme ISO 9002. Quatre-vingt-dix pour cent de nos activités sont pour le couple auprès du ministère de la Défense nationale et à des applications militaires. Kaycom s'est familiarisée au cours des 15 dernières années dans les pratiques d'achat public et s'inquiète d'être maintenant lésée dans les pratiques de soumissions publiques.
Le recours à un fournisseur exclusif est de plus en plus courants, comme on peut le constater quotidiennement au Service d'invitations ouvertes à soumissionner, c'est le service qui publie les préavis d'adjudication de contrats et des bulletins du réseau d'approvisionnement et de débouchés d'affaires. Il faut maintenant apprendre à vivre avec le recours à desfournisseurs exclusifs qui se justifient dans bien des cas par des droits propriétaux ou par les besoins opérationnels. Toutefois, si le gouvernement veut vraiment optimiser ses contrats, il devrait les décerner de façon concurrentielle.
Au cours des dernières années, Services gouvernementaux Canada et les clients qu'il représente ont trouvé bien des façons de contourner la concurrence. Chaque cas semble unique et les ministères visés ont l'impression qu'ils ont pris la bonne décision en s'approvisionnant auprès d'un fournisseur exclusif.
Je peux vous donner des exemples; Kaycom s'est heurtée à des fournisseurs exclusifs et nous avons eu aussi de multiples expériences avec Services gouvernementaux Canada et la Défense nationale.
Si nous devons comparaître devant le comité c'est à cause d'un contrat décerné récemment à un fournisseur exclusif. Dans le cas qui nous occupe, on avait refusé à Kaycom le droit de soumissionner pour une conférence du ministère de la Défense nationale. Par-dessus le marché, les produits demandés devaient être fabriqués à partir de dessins du ministère de la Défense, dessins qui étaient la propriété de ce ministère. Il n'était donc aucunement question dans ce cas de droits de propriété nationaux.
Or, l'entreprise visée par ce contrat à fournisseur exclusif faisait affaire avec la Défense nationale depuis plusieurs années et avait des rapports très étroits avec le marché. Comme c'était d'une grosse entreprise commerciale soutenue par une importante société mère, il lui avait été très facile d'exercer une influence politique au ministère de la Défense nationale et à celui des Services gouvernementaux.
Une petite entreprise telle que Kaycom doit se battre chaque fois qu'elle veut soumissionner. Mais la plupart du temps, c'est inutile, puisque le contrat est accordé à l'entreprise choisie et que de toute façon on va nous donner des excuses. Pourquoi ne pas ouvrir les soumissions à tous? Même si Kaycom ne gagnait pas, le gouvernement y gagnerait quant à lui un prix concurrentiel.
Pour terminer, les critères qui régissent les contrats à fournisseurs exclusifs sont la façon la plus simple pour les ministères d'aller chercher l'entrepreneur de leur choix sans l'exposer à une évaluation subséquente. Les ministères ayant tous souffert de compressions d'effectifs au cours des dernières années, ont perdu beaucoup de spécialistes. Par conséquent, on fait de moins en moins preuve d'innovation et on se rabat sur les bonnes vieilles méthodes qui offrent le moins de résistance. Voilà pourquoi les fournisseurs exclusifs se multiplient. Or, il faut que l'on donne aux petites entreprises la possibilité de satisfaire aux critères et d'être évaluées équitablement par les agents du gouvernement.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur March.
M. Burton, de Winnipeg, qui représente BW Imaging.
M. Geoff Burton (Gérant général, BW Imaging): Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés et les invités, je m'appelle Geoff Burton et je suis propriétaire, avec mon associé William Beddome, d'une petite entreprise à Winnipeg, au Manitoba, spécialisée dans la conception et la preparation en impriverie. Nous employons 18 personnes, et nous sommes respectés dans l'industrie et dans le milieu des affaires. Nous existons depuis plus de 35 ans, et notre chiffre d'affaires annuel dépasse les deux millions de dollars.
Si je comparais aujourd'hui, c'est pour exposer notre fonction au sujet des marchés du gouvernement fédéral.
Comme nous sommes là depuis longtemps, nous avons vu le monde des affaires et la façon dont le gouvernement fédéral attribue le contrats évoluer fréquemment. Naguère, la plupart de nos transactions avec le gouvernement, se faisaient en sous-traitance pour les grandes agences de publicité qui avaient des contrats publics lucratifs. Autrement dit, nous avions plus de relations d'affaires avec les agences de publicité qu'avec le gouvernement fédéral directement.
Les nouvelles techniques ayant modifié de fond en comble notre industrie, les entreprises de publicité peuvent maintenant faire du travail maison et ne donne plus de travail en sous-traitance à des entreprises telles que la nôtre. Les entreprises de publicité continuent à obtenir les grands contrats, mais nos services à nous ne sont plus requis. Pour nous, c'est une perte de marché.
Ce qui existe aujourd'hui, c'est le SIOS qui, si je comprends bien, semble être rentable pour le gouvernement, car il répercute sur le secteur privé la majeure partie des coûts de sourçage. Le SIOS peut toutefois être un fardeau pour les petites entreprises, car elles doivent tous les ans payer des frais d'abonnement et elles sont obligées d'avoir un ordinateur personnel et un employé qui sache le faire fonctionner.
Ce qui m'inquiète le plus, c'est que la majeure partie des travaux annoncés au SIOS sont trop importants pour les petites entreprises. Ce qui m'intéresse tout particulièrement, ce sont les contrats décernés de façon non concurrentielle et qui ne sont pas assujettis au processus d'appel d'offres. La difficulté, c'est que les entreprises à qui l'on octroie les contrats les plus lucratifs sont en train de développer des liens d'affaires avec les fonctionnaires, et quand ils voudront accorder un contrat sans appel d'offres, ces fonctionnaires vont tout naturellement pressentir les gens avec qui ils ont forgé des liens.
Comment faire pour qu'un petit entrepreneur comme moi-même forge lui aussi ces liens? Le système actuel nous désavantage. Je comprends bien qu'il serait trop coûteux de soumettre tous les contrats à des appels d'offres. Comme contribuable, je tiens à ce que le gouvernement soit le plus économe possible.
J'aimerais tout de même que l'on puisse faciliter la tâche des petites entreprises qui veulent une part des marchés publics. D'ailleurs, avec des appels d'offres on réduit le coût réel des contrats. De nombreuses petites entreprises s'intéresseraient à des contrats de moins de 30 000$.
Le système actuel permet de fractionner les grands contrats en plusieurs contrats plus petits qui sont accordés sans appel d'offres. Il faudrait pouvoir comparer les entreprises à qui l'on octroie les contrats par appel d'offres et celles à qui l'on octroie les contrats sans appel d'offres pour déterminer si ce sont toujours les mêmes entreprises qui sont favorisées.
Le gouvernement devrait aider les petites entreprises à établir ces contacts. Peut-être pourrait-on publier un rapport qui informerait toutes les entreprises du type de contrats disponibles sans appel d'offres et qui énumérerait les ministères et les personnes au gouvernement distribuant le travail.
Au fil des ans, notre entreprise a écrit aux responsables dans les ministère et leur a téléphoné. Mais c'est une tâche difficile lorsqu'on n'a aucun détail au sujet du type de travail et aucun contact dans les ministères. Cela nous aiderait à cibler les contrats pour lesquels nous pouvons soumissionner si vous publiez une liste des divers contrats impartis de façon non concurrentielle.
Les petites entreprises font partie intégrante de l'économie canadienne. Je suis convaincu qu'une grande partie des contrats publics ne font jamais l'objet d'un appel d'offres. Peut-être est-ce idéaliste de croire que chaque contrat devrait faire l'objet d'un appel d'offres, mais il me semble qu'une certaine concurrence pourrait être rentable pour le gouvernement et rendraient ces contacts plus accessibles aux petites entreprises.
Il faut aider les petites entreprises à trouver ces contrats. Plus on facilitera le processus pour les petites entreprises plus les attributions seront concurrentielles. Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à M. White.
M. White: Je n'ai pas de questions pour l'instant. Merci, monsieur le président.
Le président: S'il vous en vient à l'esprit, je vous donnerai la parole.
Monsieur Bryden, vous avez la parole.
M. Bryden: Ce que dit M. March m'a particulièrement intéressé. À l'entendre, on a l'impression que tout le monde triche et qu'il n'y a que tricherie au gouvernement. Monsieur March, je m'adresse à vous d'abord: vous avez parlé du ministère de la Défense, où le problème semble friser l'épidémie. Que faire pour empêcher les responsables des marchés publics de tricher ainsi à un niveau relativement bas?
M. March: Je ne crois pas que ce soit tellement les agents qui trichent à ce niveau. C'est plutôt le système qui ne permet pas aux petites entreprises de prendre part équitablement à la concurrence.
Ce qui est unique au ministère de la Défense nationale, c'est que les grandes entreprises sont là depuis déjà longtemps. Comme la concurrence leur nuit, ces grandes entreprises cherchent aujourd'hui à obtenir les petits contrats qu'elles rejetaient jusqu'à maintenant. Même dans l'industrie de la défense aérienne, Lockheed et Boeing se sont associés pour obtenir les petits contrats dont elles ont besoin.
Le gouvernement semble combler les lacunes en permettant aux petites entreprises de soumissionner dans ces cas-là et en protégeant les grandes par le biais des préavis d'attribution de marchés. Lorsqu'un de ces préavis est contesté, on rejete la la contestation sous un prétexte quelconque.
M. Bryden: Mais ce n'est pas la faute du gouvernement. Ce n'est certainement pas une politiques du gouvernement, car ni moi, ni mes collègues, ne l'approuverions et nous sommes, après tout, le bras politique du gouvernement. Ne s'agit-il pas plutôt d'abus du système de la part de fonctionnaires?
M. March: Disons qu'ils manipulent le système.
M. Bryden: Mais ce que vous avez décrit ressemble à de l'abus je ne mâche pas mes mots.
M. March: Les petites entreprises n'ont aucun moyen de contester cette manipulation ou cet abus.
M. Bryden: Je m'adresse à vous tous, dans ce cas. Que faut-il faire? Faut-il demander à quelqu'un de vous initier et de s'assurer que tous les fonctionnaires respectent l'esprit des règles de la sous-traitance? Le problème est-il dans les règlements ou dans l'esprit des règlements? Donnez-nous une idée, car c'est vous qui en souffrez. Dites-nous comment attaquer le problème.
Le président: Commençons par vous, monsieur March.
M. March: Le problème est double. D'abord, on doit permettre aux petites entreprises de faire chaque fois une soumission. Je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible. Même si les petites entreprises ne sont pas compétentes sur le plan technique, même si c'est l'opinion des spécialistes, le fournisseur exclusif sera obligée de reconsidérer ses prix avec soin s'il fait face à une concurrence, et cela ne peut que réduire les coûts pour le gouvernement.
Le deuxième problème, ce sont les règles qui permettent à certains ministères, comme la Santé ou la Défense nationale, d'affirmer qu'il n'y a qu'une entreprise capable de faire le travail. Lorsque d'autres compagnie se présentent et offrent leurs services, on les ignore. Quelqu'un devrait surveiller cela ou encore un comité devrait revoir les préavis d'attribution. Il ne faudrait surtout pas, comme cela se fait actuellement, se contenter de comités internes qui, de toute façon, préfèrent le fournisseur exclusif.
M. Bryden: Merci de votre suggestion.
M. McKelvey: Nous avons justement l'impression d'avoir été victimes de la tricherie que vous venez de décrire, dans le cas particulier que je vous ai décrit. Nous avions fait la soumission la plus basse et pourtant nous avons été rejetés, car le ministère a changé le devis et a octroyé le contrat à quelqu'un d'autre.
Trois solutions sont possibles; d'abord, il faut reconnaître l'information et la gestion du processus d'appels d'offre supposent des coûts. En-dessous de certains seuils, il ne devrait pas être nécessaire de faire des appels d'offre, comme par exemple en-dessous de 5 000$. À vous de choisir le seuil. Vous pourriez demander un ou deux prix par téléphone, puis choisir un autre seuil et demander deux ou trois autres prix.
Nous avons également l'impression d'avoir été trahis par le système SPEC. Cela devait passer par les ministères, mais ça n'a pas été le cas.
Deuxièmement, il faudrait imposer le système SPEC ou le SIOS pour les contrats au-delà d'un certain seuil et pour les travaux plus importants.
Troisièmement, l'interface reste un peu lourd pour les petites entreprises; son coût et sa complexité en font parfois un obstacle. Il faudrait faciliter l'échange d'information.
M. Simpson: Pour notre part, nous ne pouvons dire si le SIOS est bon ou mauvais pour nous. Nous sommes nouveaux venus sur le plan rapports avec le gouvernement. Nos prix sont excellents, nous le savons. Nous garantissons notre travail, sinon le client ne paie pas. Nous savons également que nous n'obtenons rien du gouvernement. Dans notre cas, les gens de la Défense nationale et les agents à l'environnement font affaire avec des entrepreneurs locaux, un point c'est tout. Donc, le SIOS ne nous offre aucun débouché.
M. Burton: C'est pareil pour nous. Les affaires ont changé et nous devons faire affaire de plus en plus directement avec le gouvernement, alors que nous étions jadis sous-traitant pour d'autres entrepreneurs. Lorsque nous étions sous-traitants, nous devions tout de même soumissionner, et nous n'étions pas nécessairement choisis. Le gouvernement, je crois, devait obtenir deux ou trois prix pour chaque travail demandé, et nous avions notre part du travail.
Ce qui nous a nui, c'est que nous n'avons plus accès à ce genre de travail car les gros contrats sont octroyés ailleurs. Nous voudrions avoir les petits contrats, mais lorsque nous consultons le SIOS, nous constatons que les projets proposés sont beaucoup trop ambitieux pour nous. Voilà le problème pour nous, et nous n'avons pas de solution.
M. McKelvey: C'est ce que nous avons constaté nous aussi. Le SIOS annonce des grands contrats qui sont trop ambitieux pour nous.
M. Gray: Si je vous comprends bien, vous parlez du comportement du gouvernement. Pourquoi tant de contrats sont-ils octroyés de façon non concurrentielle? Pourquoi tant de contrats vont-ils à un fournisseur exclusif? Cela me fait penser aux banques auxquelles on pense toujours quand il s'agit de grandes structures et de lourdes méthodes d'exploitation.
Lorsque nous avons comparu devant Comité de l'industrie qui étudiait ce sujet, nous avons dit que pour changer le système, il faudrait modifier le régime d'amendes-récompenses des banques. Autrement dit, si le petit entrepreneur est puni sévèrement pour ses mauvaises créances, il n'est pas récompensé pour autant quand il paie à temps. Or C'est cela qui fait croître le chiffre d'affaires, qui fournit de l'emploi et favorise la croissance économique locale: Il faut donc équilibrer les amendes et les récompenses pour motiver les clients.
Il faut s'attaquer aux comportements. Qu'est-ce qui pousse les fonctionnaires à prendre ces décisions et qu'est-ce qui pousse les gouvernements à agir ainsi? Je crois que vous auriez des réponses si vous écoutiez certains anciens fonctionnaires chargés des achats. Leur réputation et leurs décisions ne sont plus en jeu, et ils accepteraient peut-être de parler plus librement. Je comprends que ceux qui travaillent actuellement au gouvernement hésitent à parler.
Le président: C'est une bonne suggestion.
Mme Chamberlain: Monsieur McKelvey, vous avez longuement parlé de l'ACDI dans votre exposé, et je n'ai pas l'impression que vous ayez eu de si bonnes relations que cela avec l'agence. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire quand vous parlez de confrérie des anciens en ce qui concerne les marchés publics? Vous parlez également d'un système de contrôle.
M. McKelvey: Il y a des femmes aussi parmi les initiés.
Des voix: Oh, oh!
Mme Chamberlain: Pas ici.
M. McKelvey: Nous avons essayé d'obtenir ce genre de marchés puisque j'ai de l'expérience dans les pêches à petite échelle et dans l'aquaculture. J'ai pensé qu'il serait intéressant de commercialiser ainsi ce genre de compétence. Cela fait six ans que nous essayons de travailler dans ce domaine.
Ma première expérience remonte à cinq ans environ. J'ai assisté à un colloque régional sur la façon d'obtenir des marchés de l'ACDI. Il fallait remplir des tas de formulaires et faire état de notre expérience et de nos qualifications sur support informatique. Nous l'avons fait et cela nous a demandé de 30 à 40 heures de travail.
Avant de remplir ces formulaires, nous avons participé à un déjeuner offert dans le cadre de ce colloque et nous étions assis à une table avec d'autres participants. Nous avions tous, y compris moi-même et un de mes anciens employeurs, déjà travaillé pour le compte de l'ACDI, mais aucun d'entre nous n'avait obtenu ces marchés par l'entremise du système. Le système était tellement lourd qu'il ne fonctionnait pas. C'était toujours la même histoire: «j'ai travaillé avec un tel à un projet il y a plusieurs années et il m'a appelé pour me dire qu'il y aurait tel projet bientôt; je me suis inscrit afin d'être pris en considération pour ce travail» ou «j'ai travaillé avec telle ou telle entreprise».
Lorsque nous sommes allés à l'ACDI, nous avons été accueillis par des fonctionnaires qui avaient très peu de sympathie pour les petites entreprises canadiennes qui essaient de se développer. Il était clair qu'ils préféraient traiter avec un nombre restreint d'entrepreneurs et regrouper le travail en accordant des marchés plus importants.
S'ils font cela, c'est peut-être pour réduire les frais généraux du gouvernement, mais l'ACDI évalue les propositions à la lumière d'un certain nombre de critères. Deux de ces critères sont: les répercussions sur l'environnement - ils aiment les projets qui améliorent la qualité de l'environnement - et l'égalité des chances dans le domaine du développement. Je pense qu'ils pourraient également inclure la croissance des petites entreprises et des petits fournisseurs dans les critères d'évaluation des propositions.
À ce jour, nous avons dépensé beaucoup d'efforts, sans résultats.
Mme Chamberlain: Merci.
Le président: En conclusion, j'aimerais vous poser une question soulevée par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante au sujet de la lenteur des paiements. Est-ce que ceux d'entre vous qui ont travaillé pour le gouvernement peuvent répondre à cette affirmation au sujet des paiements aux petites entreprises, affirmation faite par l'un de vos collègues de la petite entreprise qui représentait la FCEI? Est-ce que quelqu'un a de l'expérience dans ce domaine?
M. McKelvey: Beaucoup de nos clients sont lents à payer, c'est le fléau de notre type d'entreprise; les gouvernements ne sont pas les plus rapides, mais ils ne sont pas non plus les plus lents.
Le président: Ah bon, c'est bien.
M. Simpson: Dans notre cas, nous attendons avec impatience des paiements du gouvernement qui sont en retard.
Le président: Vos interventions nous ont été très utiles et vos exposés nous ont donné matière à réflexion.
M. Bellemare: J'ai une question, monsieur le président. La séance de ce matin a été très fructueuse. En aurons-nous une autre semblable? C'était vraiment une bonne idée, car nous avons entendu le point de vue des entrepreneurs et certaines de leurs préoccupations.
M. Gray dit qu'il y a un problème d'attitude de la part du gouvernement. Nous devons déterminer s'il s'agit d'un problème systémique et trouver les moyens de le corriger. J'aimerais que nous ayons une autre séance semblable avec d'autres témoins.
Le président: Il est difficile à cette période de l'année de réunir des hommes d'affaires des quatre coins du pays. Comme vous le savez, le groupe de témoins est un échantillon représentatif de l'Est et de l'Ouest et il a coûté cher à réunir. Toutefois, je vous remercie du compliment. Je pense que la prestation de ces messieurs a été très bonne.
Je ne voudrais pas que nous nous arrêtions sur une note négative. Certains ont utilisé le mot «tricher» et je ne suis pas sûr que le comité veuille endosser l'utilisation de ce mot. Nous voulons concentrer nos efforts sur les moyens d'améliorer les conditions d'accès et les systèmes. Monsieur McKelvey, vous nous avez fait de bonnes suggestions pour améliorer le SIOS. Il y a des difficultés et, en tant que députés et membres du comité, nous essayons de régler le problème, mais ce n'est pas un post-mortem que nous faisons. Nous cherchons également le moyen d'apporter des changements positifs.
Mme Chamberlain: Monsieur le président, je tenais simplement à dire qu'à l'instar de mon collègue, M. Bellemare, j'ai trouvé que la séance aujourd'hui était très bonne. Sans vouloir offenser ceux qui ont comparu, je remarque qu'il n'y avait pas une seule femme alors que nous savons que les femmes font des choses extraordinaires à l'heure actuelle, particulièrement dans le secteur des petites entreprises. Je tenais à vous le signaler, monsieur le président.
Le président: Nous en avons cherché.
Mme Chamberlain: Vous auriez pu chercher un peu plus fort.
Le président: Vous avez raison, madame Chamberlain.
M. Bryden: Je tiens à répondre à vos observations, monsieur le président. Lorsque j'entends dire, comme nous l'avons entendu ce matin, que les gens obéissent aux règlements à la lettre sans en respecter l'esprit, j'estime qu'ils trichent, et je pense que nous ne devons pas hésiter à appeler les choses par leur nom. Si des gens, comme ces témoins, souffrent parce qu'ils sont traités de façon injuste, alors, à mon avis, quelqu'un triche, et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas le dire.
Le président: Vous avez raison.
Chers collègues, en votre nom, je tiens à remercier ces petits entrepreneurs qui sont venus des diverses régions du pays et qui nous ont consacré une journée d'affaires. En tant que députés, nous essayons de tenir compte de ce que nous entendons dans toutes les régions du pays. Les gens nous disent qu'ils veulent un accès plus libre et plus juste. Avec la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui joue presque le rôle de grand frère des entreprises indépendantes de tout le pays - ou de grandes soeurs, madame Chamberlain - , nous aurons certainement des interventions intéressantes. Nous voulons entendre vos commentaires et vos conseils, et votre contribution nous est très utile.
Au nom du comité, je tiens à vous remercier. Nous vous sommes reconnaissants de votre contribution de ce matin.
La séance est levée jusqu'à mercredi. Entre-temps, si quelqu'un a de bonnes idées, je serai heureux de les recevoir.
La séance est levée.