[Enregistrement électronique]
Le mardi 30 mai 1995
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte.
Comme nous avons convenu de limiter le temps réservé à chaque témoin, voici comment je propose que nous procédions aujourd'hui pour la période des questions. J'accorderai 10 minutes au premier intervenant de chaque parti et, par la suite, cinq minutes à chacun des membres du comité. Je m'engage à faire preuve d'une certaine souplesse, mais si cette proposition vous convient, c'est la façon dont nous procéderons aujourd'hui.
Je vous demanderais également de me faire signe si vous voulez poser une question pour que je puisse établir la liste des intervenants. Ainsi, je pourrai m'assurer que vous ayez tous pu poser vos questions avant la fin de la séance.
Pendant la période de questions, je demanderais aussi aux membres du comité de s'en tenir à demander des renseignements à nos témoins et de ne pas faire de discours. Cela vous convient-il?
M. Silye (Calgary Centre): J'aimerais poser une question, monsieur le président. Pourquoi changez-vous la façon dont nous avons toujours procédé au sein de ce comité? C'est la première fois que vous proposez que nous procédions ainsi.
Si l'on s'en tient à votre proposition concernant les tours, pouvez-vous nous assurer de nous accorder à tous trois, qui sommes membres du comité, au moins dix minutes pour poser nos questions ou de nous permettre au cours des tours suivants de poser toutes les questions que nous souhaitons poser au président du Conseil du Trésor?
Le président: Lors de la dernière réunion, monsieur Silye, nous avons convenu d'accorder une heure et demie au ministre et une heure à chacun de nos témoins. J'essaie simplement de répartir le temps équitablement entre tous ceux qui veulent poser des questions.
Si peu de membres du comité désirent poser des questions, vous aurez l'occasion d'en poser au cours du tour suivant, ce qui vous donnera plus de dix minutes de temps de parole. Par contre, si beaucoup de membres veulent poser des questions, il faudra évidemment que je sois strict dans la répartition du temps. Si j'ai proposé de changer notre façon habituelle de procéder, c'est pour être juste envers tous.
M. Silye: Si nous n'avons pas terminé de poser des questions au ministre dans une heure et demie, pourquoi ne pouvons-nous pas lui demander de revenir une autre fois devant le comité?
Le président: Je m'en remets à cet égard au comité. Libre au comité de décider de la façon dont il veut procéder.
Monsieur Eggleton, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue devant le comité. Nous nous réjouissons d'entendre votre exposé, monsieur.
L'honorable Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs. Bonjour. Je suis venu vous entretenir du projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires.
Étant donné que le contenu de ce projet de loi a déjà fait l'objet d'un long débat, je me contenterai de formuler quelques observations à propos de certaines questions qui ont été soulevées dans le cadre de ce débat et de présenter une vue d'ensemble du contenu de ce projet de loi, accompagnée de brèves explications et précisions dans les cas où elles pourront faciliter la tâche aux membres du comité.
[Français]
Bien entendu, je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que vous pourrez me poser.
[Traduction]
Mes collaborateurs seront également à votre disposition pour répondre aux questions d'ordre technique que vous pourriez avoir concernant le projet de loi. Permettez-moi donc de vous les présenter. De la Division des pensions du Conseil du Trésor, il s'agit de Mme Sharon Hamilton, directrice exécutive, de M. Bryce Peacock, directeur de l'analyse financière - le spécialiste des chiffres, c'est lui - et de Mme Joan Arnold, agente, élaboration de la législation.
Dans le cadre du débat qui a entouré l'étude du projet de loi en deuxième lecture, plusieurs députés n'ont pas manqué de faire allusion à la nécessité d'assurer aux députés un régime équitable de rémunération. Selon certains avis exprimés, le régime de retraite, même après avoir subi les importants changements proposés dans le projet de loi, demeure exagérément généreux et devrait faire l'objet d'autres compressions.
Bon nombre de ceux qui ont émis cet avis ont également fait observer, cependant, qu'il y aurait lieu de songer à augmenter les salaires pour garantir un régime de rémunération équitable. Cette opinion a également été avancée dans le rapport Sobeco sur la rémunération globale. De l'avis du gouvernement, une augmentation compensatrice de la rémunération est inacceptable à une époque où les salaires sont gelés dans tous les secteurs de la fonction publique fédérale.
Dans le cadre du débat qui a entouré l'étude du projet de loi en seconde lecture, plusieurs intervenants ont également exprimé l'avis que le régime de retraite devrait être révisé de façon à calculer les pensions d'après une formule comparable à celle qui est courante dans le secteur privé. Ce régime a été décrit comme un régime de retraite auquel les employés et l'employeur cotisent des montants équivalents afin d'accumuler une somme en espèces qui est ensuite utilisée pour acheter une rente au moment de la retraite.
Cependant, d'après l'édition de 1992 de la publication Régimes de pensions au Canada de Statistique Canada, 5 p. 100 seulement des gens participant à des régimes de pension liés à l'emploi participent à des régimes de ce genre. Les 95 p. 100 restants - je dis bien 95 p. 100 - participent à des régimes de pension à prestations déterminées qui prévoient une formule établie pour déterminer les prestations. Les employés qui participent à ce genre de régime jouissent d'une plus grande certitude et d'une plus grande sécurité pour planifier leur retraite parce qu'ils sont en mesure de prévoir leurs prestations ultimes sans s'exposer à des taux d'intérêt défavorables qui pourraient être en vigueur au moment où la rente deviendra payable.
Selon l'étude susmentionnée de Statistique Canada, de façon générale, dans les régimes de retraite dont il a été question ci-dessus, la contribution des employeurs du secteur privé équivaut à environ 70 p. 100 des coûts du régime, alors qu'elle équivaut à 60 p. 100 dans le cas des employeurs du secteur public.
Bien entendu, dans le cas de régimes particuliers, la part des coûts assumée par l'employeur est beaucoup plus élevée; par exemple, dans le cas du régime de pension de retraite des Forces canadiennes, le ratio est d'environ 2,70$ versés par l'employeur pour chaque dollar cotisé par les employés.
On a également attiré l'attention sur les modalités du régime des parlementaires ayant trait à l'indexation. Je voudrais seulement faire remarquer qu'encore là, selon Statistique Canada, environ 44 p. 100 des cotisants à des régimes de pension au Canada jouissent d'une indexation automatique sous une forme quelconque, modalité que l'on retrouve le plus fréquemment dans le secteur public.
D'autres études ont révélé que la plupart des retraités participant à un régime du secteur privé obtiennent des augmentations ponctuelles calculées aux taux d'environ 40 à 50 p. 100 de l'IPC. S'ils ne jouissent pas de l'indexation automatique, bon nombre de ces employés touchent plus tard un équivalent sous la forme de cette prestation supplémentaire.
Je me suis permis de citer ces statistiques parce que j'estime important que nous ayons une bonne idée de la situation générale des pensions liées à l'emploi au Canada si nous voulons évaluer ce régime de pension de façon logique.
Pour ce qui est du régime de retraite des parlementaires, j'ai expliqué que les changements qu'il est projeté d'apporter dans le projet de loi C-85 donneront lieu à une réduction du coût du régime équivalant à 33 p. 100 de la masse salariale cotisable. Cet avancé se fonde sur la réduction de la valeur estimative de la cotisation que le gouvernement devra verser en 1995, qui sera ramenée d'un total de 10,8 millions de dollars à un total de 7,5 millions de dollars.
En conséquence des changements proposés dans le projet de loi, on prévoit que la valeur estimative combinée des cotisations que le gouvernement devra verser en 1995 pour le Sénat et la Chambre des communes sera ramenée de 10,8 millions de dollars à 7,5 millions de dollars, ce qui équivaudra à des économies de 3,3 millions de dollars.
[Français]
Monsieur le président, le projet de loi C-85 donne suite aux préoccupations exprimées par les Canadiens et satisfait aux engagements que notre gouvernement a pris avant d'entrer en fonction.
[Traduction]
De plus, le projet de loi renferme des dispositions qui permettront aux députés qui ont manifesté le désir de cesser leur participation au régime de le faire. De façon générale, notre gouvernement et ceux qui l'ont précédé ont indiqué, par le biais du régime fiscal et d'autres mesures, qu'ils étaient fortement convaincus de la valeur des régimes de pension parrainés par l'employeur, en tant que partie intégrante du régime de rémunération de chacun, et qu'ils appuyaient fortement ces régimes.
Néanmoins, le projet de loi C-85 donnera aux députés qui ont insisté sur ce point la possibilité d'exercer l'option de cesser leur participation au régime. Lorsqu'un député exercera l'option de cesser sa participation au régime, les cotisations qu'il aura versées pendant la présente législature lui seront remboursées. Dans le cas de ceux qui auront accumulé des années de service dans des législatures antérieures, mais qui n'auraient pas encore eu droit à une pension au début de la présente législature parce qu'ils n'avaient pas été député pendant 6 ans, la totalité de leurs cotisations leur sera remboursée.
[Français]
Tous les députés actuels qui désireront continuer à cotiser au régime devront l'indiquer.
[Traduction]
Pour répondre aux préoccupations exprimées par la population, le projet de loi C-85 fixe à 55 ans l'âge minimal donnant droit à une pension. Les députés qui quitteront le Parlement une fois que ce projet de loi sera en vigueur ne pourront plus toucher de prestations de retraite à l'égard du service accumulé après la date de la sanction royale de ce projet de loi, tant qu'ils n'auront pas atteint 55 ans.
Ainsi, le nombre de cas de «cumul de pension et de traitement» qui constitue le plus vif objet de préoccupation pour la population pourra être sensiblement réduit; je fais allusion en cela aux cas où des anciens députés relativement jeunes touchent une pension de député et redeviennent employés dans le secteur fédéral. En effet, le rapport Sobeco a laissé entendre que l'établissement d'un âge minimal donnant droit à pension constituerait un mécanisme de contrôle suffisant des cas de «cumul de pension et de traitement».
Néanmoins, nous reconnaissons que la population est très susceptible de ce point de vue. En conséquence, le projet de loi C-85 instaure des mesures de contrôle rigoureuses prévoyant la diminution de la pension, sans égard à l'âge de l'intéressé, dans le cas d'un ancien député qui touche une rémunération de plus de 5 000$ par an à l'égard de presque n'importe quel genre d'emploi dans le secteur public fédéral, peu importe que l'intéressé soit un employé de la fonction publique, d'une société d'État fédérale ou d'un organisme fédéral ou qu'il travaille à contrat. Les députés sont tenus de signaler tous les revenus de ce genre et d'accepter une réduction ou une annulation de leur pension à l'égard de ces périodes d'emploi.
L'autre élément important du projet de loi C-85 qui touche tous les députés actuels et futurs de la Chambre des communes est la réduction du taux d'accumulation. Au lieu d'acquérir une pension calculée à 5 p. 100 de l'indemnité sessionnelle moyenne à l'égard de chaque année de service donnant droit à pension, les députés acquerront dorénavant une pension calculée à 4 p. 100 de leur indemnité sessionnelle moyenne pour chaque année de service. Ce changement équivaut à une réduction de 20 p. 100 du niveau des prestations pouvant être versées en vertu du régime, ce qui constitue une importante réduction de la rémunération.
Corrélativement à cette réduction, le projet de loi prévoit la réduction de 2 p. 100 du taux des cotisations versées par les députés, qui sera ramené de 11 p. 100 où il se situe actuellement, à 9 p. 100 dans l'avenir. Ce taux de cotisation est presque le double de celui de la plupart des régimes de pension du secteur privé. Il faut donc rappeler que la part que les députés versent dans le régime est beaucoup plus considérable que ce qui constitue la norme.
En dernier lieu, permettez-moi de souligner l'instauration de prestations aux survivants dans le cas d'une personne qui était le conjoint de fait d'un député, alors que celui-ci faisait partie de la Chambre des communes, et qui demeure le conjoint du député jusqu'au décès de ce dernier. Les pensions de survivant de ce genre sont offertes en vertu des régimes de pension de la fonction publique depuis de nombreuses années et d'autres régimes de pension les prévoient également. Dans le cas d'un député qui laisse à son décès un conjoint en droit et un conjoint de fait, une formule prévoit la répartition des prestations entre les deux.
En conclusion, je vous invite à examiner avec soin le contenu du projet de loi C-85, qui constitue, à mon avis, une réponse très significative aux préoccupations formulées par les Canadiens. Ces préoccupations ont fait l'objet d'un débat lors de la campagne électorale et le gouvernement y a répondu dans le Livre rouge. Ce projet de loi va au-delà des engagements pris à cet égard par notre parti. Le projet de loi répond donc aux préoccupations formulées par les Canadiens tout en conservant un régime de rémunération globale acceptable eu égard à l'importance de l'emploi visé.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie, monsieur Eggleton.
M. Boudria (Glengarry - Prescott - Russell): Monsieur le ministre, à la page 3 de votre mémoire, vous indiquez que la contribution des employés du secteur privé représente 30 p. 100 du coût d'un régime de pension type contre 40 p. 100 pour ce qui est des employés du secteur public. Dans ce cas, comment expliquez-vous la croyance générale voulant que les employés et leurs employeurs cotisent à parts égales au régime de pension?
M. Eggleton: C'est tout simplement que certains ne connaissent pas la réalité ou ne veulent pas la connaître. Vous avez cependant très justement fait remarquer que ce taux de cotisation est même inférieur au taux normal dans le secteur privé.
M. Boudria: C'est intéressant. Au quatrième paragraphe de la cinquième page de votre discours, vous mentionniez le cas des députés qui auraient accumulé un certain nombre d'années de service dans des législatures précédentes mais qui n'avaient pas encore droit à une pension au début de cette législature-ci. Comme ils n'avaient cependant pas été députés pendant six ans, vous proposez que leurs cotisations leur soient remboursées. Savez-vous, monsieur le ministre, quel sera le taux d'intérêt qu'on leur accordera à l'égard de ces cotisations?
M. Eggleton: Aux termes du projet de loi, le taux est fixé à 4 p. 100.
M. Boudria: Dans ce cas, si un député n'occupe son poste que pendant une seule législature, on lui remboursera ses cotisations plus 4 p. 100 d'intérêt?
M. Eggleton: Oui. Ils pourront investir leurs cotisations dans un REÉR ou dans un autre type de régime de pension s'ils veulent profiter de l'abri fiscal ou ils peuvent demander qu'on leur paie leurs cotisations en espèces.
M. Boudria: Dans ce cas, le versement sera imposé, n'est-ce pas?
M. Eggleton: Oui.
M. Boudria: Voici donc la question que je me pose. Ce taux de 4 p. 100, qui varie selon l'état de l'économie, ne représente que le tiers ou la moitié de l'intérêt offert à l'égard des autres types d'investissement. D'après les recherches effectuées dernièrement pour moi par la Bibliothèque du Parlement, au cours des sept à huit dernières années, les CPG de cinq ans ou les REÉR ont offert des taux de rendement de 10 p. 100 en moyenne. Comme vous l'avez fait remarquer, non seulement les députés consentent un investissement dans leur régime de retraite, mais ils le subventionnent dans une certaine mesure puisqu'ils ne récupèrent que le tiers ou la moitié de l'intérêt auquel ils auraient droit normalement au moment où ils quittent leur poste, n'est-ce pas?
M. Eggleton: En un certain sens, oui.
M. Boudria: À la page 6, vous faites allusion au cumul de pension et de traitement. J'ai déjà fait allusion à ce phénomène à la Chambre.
Si j'ai bien compris, une disposition du projet de loi prévoit la récupération de toute rémunération supérieure à 5 000$ - et j'en déduis que cela ne s'applique pas à la sécurité de la vieillesse ou aux prestations de ce genre - lorsqu'il s'agit d'un revenu tiré d'un poste au sein du gouvernement fédéral. Qu'arrive-t-il des cas inverses de cumul de pension et de traitement?
Prenons le cas hypothétique d'un général ou d'un colonel ou même d'un contrôleur de la circulation aérienne qui serait à la retraite et qui serait élu député. Cette disposition de récupération s'applique-t-elle dans leur cas, et sinon, pourquoi pas?
M. Eggleton: Non, elle ne s'applique pas dans ce cas-ci. La disposition vise seulement ceux qui reçoivent de l'argent du Trésor fédéral.
M. Boudria: Je veux parler uniquement de ceux qui reçoivent une pension fédérale. Je ne veux pas parler de quelqu'un qui aurait été député à l'Assemblée législative de l'Alberta, par exemple.
M. Eggleton: Excusez-moi, mais j'imagine que c'est à cela que je songeais. Le contraire ne s'applique pas. La disposition porte uniquement sur les députés fédéraux qui quittent volontairement ou involontairement le gouvernement fédéral et sont ensuite nommés à un poste rémunéré par la Couronne fédérale.
M. Boudria: Cela ne s'appliquerait pas, par exemple, à un général.
M. Eggleton: Non. Le projet de loi a trait uniquement à la Loi sur les allocations de retraite des membres du Parlement. Il ne porte pas sur les prestations qu'ils reçoivent dans le cadre d'autres régimes de pension en plus de leurs rémunérations de députés.
Je m'excuse, mais j'ai oublié la première partie de votre question.
M. Boudria: Je disais que la mesure vise ceux qui cumule une pension et un traitement dans un sens, mais pas dans l'autre.
M. Eggleton: Non, en effet, à moins, bien sûr, que ces personnes décident volontairement de refuser leur pension pendant qu'elles sont députés. C'est une décision qu'elles peuvent prendre.
Comme vous le savez, même si le projet de loi n'est pas encore en vigueur, on a toujours évité volontairement de tels conflits, lorsque les nominations à des postes au gouvernement sont faites sur l'initiative du premier ministre. En ce qui concerne les nominations gouvernementales, cette disposition relative au cumul de la pension et du traitement s'applique donc déjà et ce, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement.
Il n'y a aucune disposition du projet de loi qui s'applique à ceux qui cumule une pension et un traitement à rebours, mais ils sont libres d'agir eux-mêmes s'ils le veulent.
M. Boudria: Y a-t-il maintenant des gens qui cumulent une pension et un traitement à rebours et qui remboursent leurs prestations de pension à votre connaissance?
M. Eggleton: Pas à ma connaissance.
Le président: Monsieur Plamondon.
[Français]
M. Plamondon (Richelieu): Monsieur le ministre, en ce qui a trait au double paiement, je reviens à la question de M. Boudria au sujet du cumul de pensions et de traitement.
Je suis surpris que, dans votre projet de loi, pour ce qui est des députés actuels qui ont droit à une pension, on ajustera cette pension au nouveau taux dès que la sanction royale aura été donnée au projet de loi.
Alors pourquoi, lorsque quelqu'un qui actuellement reçoit un cumul de traitement et de pensions, - prenons l'exemple de l'ambassadeur du Canada en France, M. Benoit Bouchard - lorsque la sanction royale sera donnée, son traitement ne sera-t-il pas immédiatement ajusté comme c'est le cas pour les députés, au lieu d'attendre un renouvellement ou, au nom du droit acquis, leur laisser les deux pensions?
[Traduction]
M. Eggleton: Je pense que cela dépend de la pratique courante et du fait que l'on juge équitable et raisonnable de procéder de cette façon dans le cas des droits à la pension.
Le projet de loi ne retourne pas en arrière sur les droits déjà acquis, sauf pour la disposition de retrait possible dans le cas de la législature actuelle. Autrement dit, les droits acquis jusqu'au moment de la sanction royale seront préservés. Ceux qui sont arrivés pendant que les anciennes règles ou les règles actuelles s'appliquaient, auront donc la certitude que leurs droits seront maintenus en préparation de leur avenir.
La même chose est vraie pour la dispositon relative au cumul de la pension et du traitement. Ceux qui avaient été nommés à un poste selon certaines dispositions dans le passé ne verront pas ces dispositions changer sans leur consentement du jour au lendemain. S'ils doivent être nommés pour un deuxième mandat, la question sera réglée à ce moment-là. Comme je l'ai dit il y a quelques instants, on s'en ait déjà occupé dans le cas des nominations faites depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel sur l'initiative du premier ministre.
C'est une question de rétroactivité et l'on ne modifie pas rétroactivement, d'habitude, les dispositions relatives aux pensions. Ordinairement, on repart à zéro à partir d'un régime révisé. C'est ce que nous comptons faire dans ce cas-ci et cela vaudra aussi pour les dispositions relatives au cumul d'une pension et d'un traitement.
[Français]
M. Plamondon: Vous me permettrez, monsieur le ministre, d'être en désaccord avec vous.
Lors de mon élection, on m'a offert un plan de pension, qui en cours de route, a été modifié. J'approuve les modifications que vous voulez faire en termes de limite d'âge et de générosité de participation du gouvernement. On modifie mon contrat d'élu en cours de route, mais pourquoi ne modifiez-vous pas celui des amis du régime qui ont reçu de beaux emplois? C'est ce qui me fatigue.
Je voudrais que vous appliquiez immédiatement les dispositions qui ont trait au cumul de pension et de traitement à ces gens-là au même titre que les pensions de député dès la sanction royale. Ils ont profité de ces droits acquis pendant des années. Maintenant, qu'ils cessent d'en profiter immédiatement et qu'ils vivent avec leur traitement, qu'ils choisissent de rester ou pas, soustrait de leur pension. C'est mon opinion; vous avez une opinion différente, alors on pourra faire le débat à la Chambre.
Deuxièmement, ne trouvez-vous pas que ce projet de loi provoque aussi une injustice envers les députés qui siègent à la Chambre des communes à Ottawa, par rapport aux députés qui siègent dans les assemblées législatives? Par exemple, M. Gauthier, qui était député, a été nommé sénateur et il ne reçoit pas de pension d'ancien député. Mme Bacon, à Québec et M. Simard, au Nouveau-Brunswick, reçoivent une pension de 45 000$ à titre d'anciens ministres provinciaux. Ils la gardent et ils siègent au Sénat.
N'est-ce pas un danger, puisque, dans votre projet de loi, on n'a pas trouvé le moyen de légiférer globalement? C'est rare qu'un député du Bloc québécois demande une centralisation. Mais on devrait accorder une réflexion plus grande pour ce qui est des ministres ou députés provinciaux. Il sera donc plus avantageux, si nous voulons faire carrière après la politique, carrière au niveau international, d'aller siéger dans les législatures provinciales pour pouvoir ensuite être nommés sans être pénalisés au niveau de la pension. Donc, il m'apparaît qu'on devrait s'interroger profondément là-dessus. Vous êtes-vous interrogé à cet égard?
[Traduction]
M. Eggleton: Pour ce qui est de la première question demandant s'il est approprié de changer les règles au milieu de la partie, j'imagine que l'autre solution serait de dire que les changements s'appliqueront uniquement à la prochaine législature. Cela répondrait à votre objection au fait que la situation que vous aviez acceptée au moment de votre élection changera maintenant au moment de la sanction royale, sans doute d'ici quelques mois.
Il me semble pourtant que nous avions bien annoncé nos intentions. Le gouvernement et les candidats de mon parti avaient expliqué dans le Livre rouge pendant la campagne électorale que nous jugions que ces changements étaient nécessaires. C'est ce que voulaient les Canadiens. Les Canadiens n'aimaient pas voir d'anciens députés prendre leur retraite quand ils étaient encore jeunes et recevoir une belle pension parce qu'ils estimaient qu'il faudrait établir un âge minimum quelconque. Ils n'aimaient pas non plus voir d'anciens députés nommés à des postes rémunérés à même le Trésor fédéral en même temps qu'ils recevaient encore une pension.
Nous avions dit pendant la campagne électorale que nous présenterions un projet de loi au Parlement pour régler cette question le plus tôt possible et c'est exactement ce que nous faisons. Nous remplissons notre promesse et nous faisons encore mieux puisque nous réduisons le taux de la pension qui sera plus tard versée aux députés. À mon avis, c'est une mesure tout à fait appropriée.
Nous avions cependant promis de ne pas essayer de récupérer les droits à la pension déjà gagnée, puisque cela ne se fait pas normalement ni dans le secteur public ni dans le secteur privé. Les droits acquis seront maintenus, mais à compter de la sanction royale, tout le monde sera visé par le nouveau régime. Il y aura un seul régime et non pas deux.
Quant à la possibilité que le nouveau régime soit injuste par rapport à celui d'anciens députés aux assemblées législatives et à l'assemblée nationale, je dois dire que nous avons examiné les divers régimes de pension. La situation évolue, comme nous le constatons certainemetn en Alberta. Il est même question d'adopter des formules différentes pendant la campagne électorale qui se déroule en Ontario. Ce n'est pas quelque chose de complètement stable; la situation évolue constamment.
Je ne peux pas imaginer que vous vouliez que nous adoptions une disposition qui empêcherait d'une façon quelconque les assemblées législatives provinciales ou l'assemblée nationale d'établir leurs propres dispositions relatives aux pensions. C'est leur droit et elles ont le devoir de le faire envers leurs propres députés et c'est à ces députés de décider ce qu'ils trouvent juste et raisonnable.
Nous avons tenu compte de tous les renseignements possible. Ces renseignements ont certes fait partie de notre examen, de même que de l'étude du groupe d'experts-conseils Sobeco Ernst & Young, qui ont examiné non seulement ce que font les gouvernements provinciaux, mais aussi ce qui se fait à l'échelle internationale. Nous avons tenu compte de tout cela.
Il y aura certainement des différences, mais cela fait partie des pouvoirs conférés à nos provinces selon notre régime parlementaire.
[Français]
M. Plamondon: J'aurais une dernière question. Monsieur le ministre, il me semble que lorsque vous êtes nommé ministre ou secrétaire parlementaire, vous accumulez une pension supérieure aux autres députés, pas nécessairement à cause du salaire, mais à cause des années supplémentaires qui sont ajoutées. Par exemple, quand vous siégez une année comme ministre, vous êtes considéré comme ayant siégé une année plus 72 p. 100 de l'autre année, soit 1,72 année, je crois. Pour les secrétaires parlementaires, il s'agit de 1,16 année et pour le Président du Sénat, 1,48 année.
N'est-ce pas un peu inéquitable? Est-ce vraiment cela? Je m'interroge et vos fonctionnaires pourront sûrement nous répondre. C'est ce qu'on appelle l'allocation de traitement supplémentaire. Est-ce que cela n'aurait pas pu être corrigé de façon à ce qu'une année soit une année?
[Traduction]
Mme Sharon Hamilton (directrice exécutive, Division des pensions, Conseil du Trésor): C'est une caractéristique du régime de pension que les cotisations supplémentaires versées pour un traitement supplémentaire... Au lieu de calculer les droits à la pension en se servant du salaire supplémentaire, on convertit les cotisations supplémentaires en états de service supplémentaires que l'on compare ensuite à l'indemnisation normale d'un député pour calculer la pension.
Il s'agit simplement d'une façon d'inclure dans le calcul des droits à la pension les périodes pendant lesquelles un député a été ministre et de lui verser une pension supplémentaire pour ces périodes puisqu'il avait à ce moment-là un salaire supérieur et donc des cotisations supplémentaires. Au lieu de se servir du salaire lui-même pour calculer le salaire moyen, nous convertissons la période pendant laquelle le député a été ministre en états de service supplémentaires et nous utilisons ensuite le salaire moyen normal qui vaut pour tout le monde.
Cela donne le même résultat que si l'on faisait le calcul en se servant du salaire moyen pour les périodes pendant lesquelles un député a été ministre par opposition au salaire pour les périodes pendant lesquelles il était simple député.
[Français]
M. Plamondon: Cela veut dire que si l'honorable ministre a siégé cinq ans et a été défait après cinq ans, son plan de pension lui donnerait huit ans de service, donc il aurait droit à la pension. Non?
[Traduction]
Mme Hamilton: Non, parce qu'il faut quand même avoir été député pendant six ans pour être admissible.
[Français]
M. Plamondon: Mais il aurait huit ans de service.
[Traduction]
Mme Hamilton: Il aurait peut-être huit ans de services aux fins du calcul de la pension, mais il faut néanmoins avoir passé six années réelles comme député.
[Français]
M. Plamondon: M. Mulroney a siégé neuf ans et il reçoit une pension équivalente à quinze ans, environ. Pour M. Trudeau, c'est la même chose, douze ans serait l'équivalent de vingt-quatre ans pour ce qui est de la pension. C'est cela?
[Traduction]
Mme Hamilton: Ils reçoivent une pension supplémentaire parce que leurs rémunérations étaient plus élevées.
Dans un régime de pension ordinaire pour des gens qui ont un salaire qui progresse normalement, on calcule les états de service actuariels et l'on se sert du salaire actuariel gagné. Pour un régime de pension où il peut y avoir de grands écarts dans la rémunération parce que quelqu'un peut être ministre et ensuite redevenir simple député, il y a des hauts et des bas dans la courbe de la rémunération. Cette méthode permet simplement de faire la moyenne des hauts et des bas qu'il peut y avoir pendant la carrière d'un député. Nous nous servons pour cela des états de service plutôt que du montant de la rémunération, mais le résultat est le même.
M. Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le ministre, je vous remercie de votre exposé et je remercie aussi tous ceux qui sont venus aujourd'hui. Cela fait beaucoup de monde pour une réunion sur une question qui, d'après les ministériels, n'intéresse pas le grand public.
Monsieur le ministre, avez-vous fait faire un examen actuariel du régime prévu dans le projet de loi C-85 ou avez-vous demandé à l'actuaire en chef du Bureau du surintendant des institutions financières de le faire?
M. Eggleton: Je voudrais d'abord répondre à votre préambule. Ce projet de loi porte sur une question qui intéresse le gouvernement. C'est le gouvernement qui a pris l'initiative de ce changement. Il l'a fait à cause de ce qu'il a entendu pendant la campagne électorale et parce qu'il avait promis de le faire et de réviser le régime de pension des députés. Nous remplissons notre promesse et nous faisons encore mieux. Il est donc faux de dire que nous ne nous intéressons pas à cette question.
Non, nous n'avons pas demandé à l'actuaire en chef du Bureau du surintendant des institutions financiaires de faire un examen actuariel du régime, mais cet examen a été fait. M. Peacock pourra peut-être vous en dire plus long.
M. Bryce Peacock (directeur, analyse financiaire, division des pensions du Conseil du Trésor): L'actuaire a fait des évaluations des conséquences des changements proposés au régime. On préparera aussi un rapport actuariel à propos du régime à compter du 31 mars 1994.
M. Harper: En réponse à votre réponse, je sais que vous jugez vous-même la question importante, mais vous devriez peut-être le signaler aux ministériels qui font partie du comité étant donné les observations qu'ils ont faites lors de notre dernière réunion.
Pour ce qui est du fait que l'actuaire en chef vous ait fourni certains chiffres, vous êtes sans doute au courant des dispositions de l'article 4 de la Loi sur les rapports relatifs aux pensions publiques. D'après cet article, dans le cas où une modification apportée à un régime de pension visé au paragraphe 3(i), ce qui s'applique au régime des allocations de retraite des députés, porte sur le coût des prestations ou établit un passif initial non capitalisé, le ministre demande à l'actuaire en chef d'effectuer une révision actuarielle à compter de la date d'entrée en vigueur de la modification. Cette disposition n'oblige-t-elle pas le gouvernement à déposer un rapport de l'actuaire en chef pendant les audiences du comité et pendant que le Parlement examine les changements que le gouvernement compte apporter à la loi?
M. Peacock: Pas d'après notre interprétation de la loi. On fera effectivement une révision actuarielle...[Inaudible] Je me suis trompé en disant 1994. Une révision actuarielle sera effectuée à compter de mars 1995.
M. Harper: Je dois dire que cela ne correspond pas à notre interprétation. J'ai relu le compte rendu du débat au moment de l'adoption du projet de loi. À l'époque, le sénateur Gauthier avait dit que le projet de loi visait justement à garantir que les députés auraient ces renseignements à leur disposition pendant l'étude au Parlement. Nous reviendrons là-dessus plus tard.
Je signale simplement que s'il y a un problème d'ordre juridique et que si vous n'êtes pas disposés à déposer la révision de l'actuaire en chef, nous pourrions avoir les mêmes problèmes que le comité avait eus dans le cas d'autres projets de loi, comme le C-22, le C-18 et le C-69, pour lesquels nous-mêmes et certains membres de l'autre endroit jugaient que le gouvernement n'avait pas respecté ses obligations.
Je voulais simplement vous signaler que nous reviendrons là-dessus plus tard.
M. Eggleton: Nous n'avons certainement pas l'intention de nous soustraire à nos obligations légales.
M. Peacock: Et le chiffre des coûts a été fourni; c'est-à-dire que l'on a chiffré les conséquences de la modification du régime, si je ne me trompe. Tout ça c'est une affaire d'interprétation.
M. Eggleton: Oui.
M. Harper: La loi parle effectivement d'une révision actuarielle complète.
Le coût du régime, maintenant: les chiffres que vous nous avez fournis indiquent une réduction de la contribution du Trésor public; en pourcentage de la masse salariale ouvrant droit à pension, on passe de 49 p. 100 à environ 33 p. 100. J'aimerais m'attarder quelques instants sur ce chiffre de 49 p. 100, car quand j'ai contacté votre bureau il y a environ un an, on nous avait dit que le régime en vigueur représentait une dépense correspondant à environ 63 p. 100 de cette masse salariale. Depuis les chiffres ont été révisés à la baisse, et bien entendu l'an dernier la cotisation de l'État a baissé.
Est-ce que vous pourriez nous expliquer brièvement la raison de cette évolution? Pourquoi, avant même que la loi ne soit modifiée, le régime de pension des députés coûte-t-il maintenant moins cher que l'an dernier?
M. Peacock: Le chiffre de 63 p. 100 incluait peut-être la part de l'employé. Trente-neuf pourcent, c'est la part de l'État seulement.
Après les élections de 1993, comme il y avait beaucoup de députés à la Chambre, le régime exigeait une contribution bien moindre de l'État. Voilà l'explication. Beaucoup de nouveaux députés ont été élus, qui ne totaliseront peut-être pas six années de service, alors que nous avions auparavant au Parlement beaucoup de députés qui allaient automatiquement remplir la condition des six ans. Avec la dernière réélection du gouvernement conservateur, il n'y en avait d'ailleurs que 88.
M. Harper: La réponse, du point de vue actuariel, c'est qu'il y a un roulement plus rapide que prévu d'élus de premier mandat, et de ce fait le régime coûte moins cher, sur le long terme, que prévu.
M. Peacock: Exactement. C'est une traduction de la composition de la nouvelle Chambre.
M. Harper: Je dis cela pour informer la population, c'est-à-dire les Canadiens qui jugent ce régime beaucoup trop généreux, et qui ne peuvent pas comparaître au comité ni influencer le processus d'une façon ou d'une autre. Leur seule façon de se protéger sur le plan financier, en l'occurrence, et à propos de ce régime, serait de ne pas réélire les députés qui terminent leur premier mandat, pour abaisser autant que possible le coût de ce régime de pension. Est-ce bien la conclusion logique?
M. Eggleton: Puisque vous le dites... nous pouvons penser à certaines personnes en particulier.
M. Harper: De fait, monsieur Eggleton, puisque les députés réformistes n'imposent aucune dépense au Trésor public, s'ils ne font pas partie du régime, et ce ne sera pas un problème pour nous. Mais mon analyse est-elle correcte, si l'on pense aux députés qui adhéreront à ce régime?
M. Eggleton: Remettons un petit peu les choses en perspective. Il est important que les Canadiens, du secteur privé ou public, prévoient leur retraite. Dans le cas contraire, ils pourraient se trouver par ailleurs à la charge du Trésor public. C'est donc à cela que nous pensons en proposant des réformes raisonnables.
Je pense que vous et votre parti devriez réfléchir encore à ce que vous êtes en train d'imposer à vos membres. J'espère que cette fois-ci votre whip dira encore: Tous ceux qui sont pour, sauf ceux qui désirent se prononcer autrement, au moment de prendre la décision, car pour le moment je ne vois rien de tel se produire.
Et vos familles? Lorsque l'on parle d'allocations de retraite, il y a des tas d'éléments à prendre en compte. Ce gouvernement veut encourager les Canadiens à planifier leur retraite et prévoir ce dont ils auront besoin. Il se trouve par ailleurs que la plupart des cotisations des députés à la caisse de leur régime de retraite ne sont pas reversées, puisque la plupart d'entre eux ne restent pas suffisamment longtemps.
Et ce que veulent d'abord les Canadiens, c'est une Chambre composée des meilleurs députés possible. Ils n'ont certainement pas en tête de les expulser automatiquement, sous prétexte qu'ils pourraient toucher leur pension, alors que de toute façon plus de la moitié d'entre eux n'y ont pas le droit, simplement en raison de ces événements naturels que l'on appelle les élections.
Ce que vous dites là n'est donc à mon avis pas du tout raisonnable. Encourageons au contraire les Canadiens et les députés à prévoir leur retraite. Et faisons-le dans des conditions raisonnables.
Et c'est précisément ce que nous pensons faire. Nous réduisons ce que ce régime de pension coûte au contribuable de quelque 33 p. 100. Nous réduisons donc en même temps la dépense de l'État, et assumons une part importante de l'effort de réduction du déficit et de la dette.
De plus, les traitements des députés sont gelés depuis six ans. Comme votre whip le fait lui-même remarquer, la rémunération devrait être revue, si ce n'est que nous avons également gelé les salaires de nos employés, si bien qu'il devient difficile de réclamer pour nous-mêmes une augmentation de traitement.
Remettons donc tout cela en perspective. Il est tout à fait normal que l'on prévoie sa retraite, et cela inclut les députés de votre parti.
M. Harper: Nous pouvons effectivement remettre les choses en perspective, si vous le désirez, monsieur le ministre. Notre horizon en l'occurence c'est qu'un pourcentage important de Canadiens n'ont pas eu d'augmentation de salaire depuis six ans, non plus, et qu'un autre pourcentage important de ces mêmes Canadiens qui travaillaient il y a six ans n'ont plus de travail aujourd'hui. Voilà pour la perspective.
Je ferai également remarquer - comme nous l'avons répété plusieurs fois, et vous le savez - que si vous nous proposiez des mesures qui nous offrent un régime comparable à celui du secteur privé, nous serions ravis d'y adhérer.
J'ai dit moi-même en diverses occasions qu'il est effectivement tout à fait raisonnable que les députés touchent des pensions également raisonnables. Si vous vous en tenez à ce principe, vous verrez, j'en suis sûr, que notre parti collaborera. Je trouve extrêmement regrettable que cela soit devenu l'objet d'un affrontement tel que nous allons finir par nous retrouver de part et d'autre sur un véritable pied de guerre permanent. Je crois qu'il serait préférable de trouver la voie d'un accord entre tous les partis, et cela sur une base raisonnable. Franchement, et cela en dépit de toutes vos belles paroles, je suis sûr que vous êtes de mon avis. Comme député élu pour la première fois, vous le savez aussi bien que moi.
En tout cas, et lorsque vous l'avez dit vous-même...
Le président: Une question encore.
M. Harper: Très bien. J'en avais pourtant d'autres à poser, et notamment au sujet du fait que dans son exposé, le ministre essaie de nous faire croire que ce régime de pension est tout à fait comparable à ce qui est par ailleurs courant dans le secteur privé ou public. J'aimerais poser des questions là-dessus, mais permmettez-moi d'abord d'en poser au moins une.
Parlons du taux d'accumulation: 5 p. 100 par année de service passe à 4 p. 100, ce sont les nouvelles dispositions du projet de loi. Combien y a-t-il, d'abord dans le secteur privé, ensuite dans le secteur public, d'employés - peut-être M. Peacock pourra répondre - qui bénéficient d'un taux d'accumulation de 4 p. 100 par année de service?
M. Peacock: Aucun...
M. Harper: Merci.
M. Peacock: ...si ce n'est peut-être au niveau des cadres supérieurs.
M. Eggleton: Faisons cependant remarquer tout de suite que cela se paie, il suffit de regarder ce que les députés versent.
Vous nous parlez de la norme, ou de la moyenne, dans le secteur privé. Peut-être que 4 ou 5 p. 100 de taux d'accumulation n'est pas la norme. En échange les employés n'ont un taux de cotisation que de 5 p. 100. Ici nous sommes à 9 p. 100. C'est presque le double. D'après les anciennes dispositions c'était encore plus. La cotisation était de 11 p. 100. Il faut donc tenir compte du fait que les députés cotisent plus.
M. Harper: Et combien de fois la part de l'employeur est-elle trois fois et demie cela? Qu'il s'agisse du secteur public ou du secteur privé?
M. Eggleton: Tout est relatif, c'est ce que je viens d'expliquer. Nous avons effectivement ici un régime de pension qui diffère de ceux du secteur privé. Mais il faut également noter que les employés cotisent plus.
Si les employés du secteur privé cotisaient à 9 p. 100, ils s'attendraient également à ce que leur pension soit relevée. De fait, le chiffre que j'ai cité tout à l'heure, et qui est emprunté à une étude de Statistique Canada, prouve ce que je viens d'expliquer. Si les employés cotisaient à 9 p. 100, ils s'attendraient également à ce que les prestations soient plus importantes...
M. Harper: Mais qu'ils payent 9 p. 100 ou moins, combien de ces employés...
Le président: À l'ordre. Monsieur Harper, votre temps est écoulé. M. Silye.
M. Silye: J'ai neuf questions à poser, et j'aimerais pouvoir les poser toutes. Si ça n'est pas possible - et vous n'avez qu'à voir également le nombre de questions que M. Harper n'a pas pu poser jusqu'au bout - j'aimerais demander, avec la permission de M. Eggleton, que celui-ci recomparaisse pour y répondre. J'aimerais que l'on en décide avant la fin de la réunion.
Le président: Posez donc vos questions, monsieur Silye, au lieu de laisser le temps passer.
M. Silye: Je ne faisais que vous faire une proposition, monsieur le président. Je vous trouve un petit peu dur, plus dur qu'à l'accoutumé.
Monsieur Eggleton, merci d'avoir répondu à notre invitation.
Vous dites que le projet de loi C-85 répond aux préoccupations des Canadiens. En répondant à M. Harper, vous avez également répondu à certaines des critiques selon lesquelles ce régime reste encore beaucoup trop généreux.
Et s'il paraît trop généreux à certains, c'est qu'on a ici un statut privilégié. Il y a d'abord ce à quoi ont droit le secteur privé et le commun des mortels, M. Peacock en a parlé, et pour les députés ici on a un taux d'accumulation de 4 p. 100...oui, je sais, vous l'avez réduit. Mais dans le secteur privé c'est 1,5 p. 100. Ici on peut toucher jusqu'à 75 p. 100 du salaire, alors que dans le secteur privé le plafond est de 70 p. 100.
La contribution du gouvernement est supérieure à celle des parlementaires. Et si des députés peuvent verser 9 p. 100, pourquoi le gouvernement ne se contenterait-il pas de la même contribution?
Les employés du secteur privé n'ont pas le droit de verser des cotisations aussi importantes que les députés. Ces derniers ont droit à une indexation très généreuse.
Voilà ce qui incite le secteur privé à trouver la pension des députés excessive. Du moins elle semble l'être. Par exemple, selon les dispositions de ce régime de retraite, vous avez droit aux prestations maximales de 75 p. 100 au bout de 19 ans. Dans le secteur privé, il faut 35 à 40 ans. Comment justifiez-vous ce régime de retraite aux yeux de ceux qui le trouvent encore trop généreux?
M. Eggleton: Je pourrais réitérer les mêmes arguments que tout à l'heure.
Je voudrais ajouter une ou deux choses. Comme je viens de le dire, si vous prenez les chiffres correspondants à la norme dans le secteur privé - les choses varient toutefois beaucoup dans le secteur privé - et si vous les comparez avec ce qu'obtiennent les députés... Vous pouvez comparer le taux de 1,5 p. 100 et le taux de 4 p. 100, par exemple, ou encore les 5 p. 100 contre les 9 p. 100. Les 5 p. 100 représentent la norme pour le secteur privé. Les députés versent une cotisation plus importante.
Pourquoi la contribution des députés est-elle plus élevée? C'est sans doute parce qu'ils reconnaissent que la durée de leur carrière est limitée. Il se peut qu'elle dure longtemps pour certains, mais pas pour la plupart d'entre eux. C'est une constatation facile à faire. Plus de la moitié des gens qui viennent ici ne restent pas les six années requises pour participer à ce régime.
Vous pourrez me rétorquer que la situation de l'emploi est également très incertaine, à l'heure actuelle, dans le secteur privé, mais ces chiffres indiquent clairement que, selon la loi des moyennes, la plupart des députés ne toucheront aucune pension. Voilà ce que les antécédents nous permettent de conclure.
Cependant, les députés passent ici certaines des années de leur vie où ils auraient pu gagner le plus d'argent - je ne parle de personne en particulier, mais des députés en général - pendant lesquelles ils auraient pu jouir d'une plus grande sécurité même s'il n'y a plus rien de sûr dans la vie. Beaucoup de gens renoncent à des emplois qui leur permettaient certainement de cotiser à un régime de retraite en vue de leurs vieux jours. Cependant, ils sont prêts à y renoncer pour venir ici se mettre au service de leurs concitoyens. C'est un geste noble de leur part et le public souhaite certainement que nous puissions continuer à attirer des gens de tous les milieux, qui n'auront pas à sacrifier leurs intérêts et ceux de leur famille en consacrant des années de service au Parlement.
Les députés ont estimé que la sécurité à long terme qu'assure un régime de retraite raisonnable était plus importante à leurs yeux que leur rémunération à court terme qui a diminué pour la plupart d'entre eux. Ils sont prêts à débourser plus d'argent pour l'obtenir. Afin d'assurer leur avenir, ils sont prêts à payer pratiquement le double de ce que versent les employés du secteur privé.
De nombreux députés - y compris ceux de votre parti - n'arrivent pas à reprendre leur carrière après l'avoir abandonnée pendant plusieurs années et avoir fait partie d'une formation politique. Je dis cela sans aucun sectarisme.
Quand vous avez examiné la rémunération globale des députés...vous avez dit qu'elle devrait être plus élevée. Le projet de loi C-85 ne prévoit pas une augmentation de cette rémunération. Il prévoit sa diminution. Vous avez pourtant dit qu'il faudrait augmenter votre salaire. Vous estimez qu'il faudrait l'augmenter, mais réduire la pension de retraite. Les anciens députés et un grand nombre de collègues à qui j'en ai parlé estiment, comme je viens de le dire, que ce sont là des dispositions importantes pour assurer leur retraite. Voilà la raison d'être de ces dispositions.
Faudrait-il réviser davantage le montant de la pension de retraite et le montant de la rémunération? Le rapport Sobeco Ernst & Young préconisait de réduire la pension de retraite et d'augmenter les salaires.
J'en ai parlé tout à l'heure en disant que le moment était mal choisi pour le faire. Je ne pense pas que le public tolérerait une hausse de salaire et je ne crois pas que nous puissions le faire étant donné que nous avons bloqué le salaire de nos employés pendant cinq des six dernières années. Notre rémunération reste donc au même niveau depuis six ans.
C'est sans doute faisable. Vous avez fait valoir d'excellents arguments, mais le moment est mal choisi. Par conséquent, si vous prenez la rémunération globale, en fait, nous la réduisons.
M. Silye: Monsieur Eggleton, dans votre déclaration d'aujourd'hui, vous dites que cela fait partie de la rémunération globale. La pension de retraite fait partie de la rémunération, surtout si l'on tient compte de la générosité des contributions. Ce régime de retraite accompagne ou complète la rémunération que reçoit le député. De toute évidence, vous en avez tenu compte pour mettre au point ce régime de retraite.
Avez-vous évalué ce qu'un député touche comme rémunération? En excluant le régime de retraite, combien touche un nouveau député - laissons de côté les ministres et les fonctions supplémentaires...que touche un député, monsieur Eggleton? Que répondriez-vous si quelqu'un vous le demandait?
M. Eggleton: Cela ne faisait pas partie des dispositions de ce projet de loi ou de notre mandat. Nous en sommes rapidement venus à la conclusion que le moment était mal choisi pour aborder la question des salaires.
Le rapport de Sobeco Ernst & Young, suggérait, je crois, 84 000$ ou 85 000$. Vous avez parlé de 150 000$, mais nous avons laissé entièrement cette question de côté. Le moment n'est pas venu de parler d'augmenter le salaire des députés. Comme nous réduisons les taux applicables au calcul des allocations de retraite, que nous imposons un âge minimum et que nous mettons fin au cumul d'une pension et d'une rémunération, le projet de loi représente une réduction de 33 p. 100 de la rémunération globale.
M. Silye: Pourquoi pas maintenant, monsieur Eggleton? Pourquoi ne pas remettre ce projet de loi à plus tard, le laisser expirer au Feuilleton, embaucher un organisme indépendant chargé de fixer un salaire transparent et imposable incluant les dépenses, qui établirait un régime de retraite pour lequel les contributions de l'employé et de l'employeur seraient les mêmes, qui ne serait pas plus généreux que les régimes en vigueur dans le secteur privé, dont la dévolution serait immédiate parce qu'un député est généralement élu pour au moins trois ou quatre ans, afin de rétablir l'intégrité de la rémunération de député?
Au lieu de dire que le moment est mal choisi ou que les salaires ont été bloqués, pourquoi ne pas se montrer honnête envers les citoyens et régler la question une fois pour toute au cours de cette législature afin de satisfaire tout le monde, tant le public que les élus? Pourquoi maintenir cette façade et ce petit jeu qui dure depuis des années? Vous êtes un nouveau venu et moi aussi. Pourquoi ne pas régler cette question et la régler comme il faut?
M. Eggleton: Monsieur le président, le député tient des propos contradictoires. Son parti réclame ce projet de loi depuis un certain temps. Il n'a cessé de nous demander quand il serait enfin présenté.
Le député me demande maintenant pourquoi ne pas le laisser expirer au Feuilleton, pourquoi ne pas le mettre de côté. Il me demande également pourquoi ne pas étudier la question plus à fond?
Cette question a été suffisamment étudiée. Nous avons déjà fait faire une étude indépendante, le rapport Sobeco Ernst & Young qui traite de la question du salaire que vous voulez régler; le rapport ne propose pas de l'augmenter autant que vous le proposez, mais il concerne le salaire. Nous avons dit clairement, pendant la campagne électorale, que nous allions aborder ces questions.
Le public nous a demandé de régler la question du cumul d'une pension et d'une rémunération et de l'âge minimum. Nous l'avons fait et nous sommes même allés plus loin en réduisant le taux applicable au calcul des allocations de retraite. Cela ne nous empêche pas, à l'avenir, d'apporter d'autres changements à la rémunération globale. Mais nous devrions commencer par adopter ce projet de loi afin de répondre aux désirs du public.
Le président: Monsieur McWhinney.
M. McWhinney (Vancouver Quadra): Monsieur le ministre, merci d'être venu et d'avoir répondu à certaines des suggestions que j'ai formulées ces derniers mois, au nom de mes électeurs et dont vous semblez avoir tenu compte.
J'aurais une ou deux questions à vous poser. L'une d'elles concerne les années de service, la période de six années, qui donne droit à la pension. Tout le monde a entendu parler du cas de cette personne qui, pendant cinq ans, a détenu la plus haute charge du pays et qui n'a pas droit à une pension.
Vous savez sans doute que la majorité des régimes de retraite publics et quasi publics du Canada et d'ailleurs des Etats-Unis, offrent une pension qui est fonction du nombre d'années de service. Si la pension était accordée dans les cas comme celui que j'ai mentionné, cela poserait-il un problème actuariel?
C'est possible. Je crois que le montant accumulé s'élève à 53 000$, soit une pension d'environ 5 000$ par année. Y aurait-il des difficultés à inclure cela dans un régime, ou même des cas d'une année de service, qu'offrent la plupart des régimes de pension quasi publics? À ce moment-là, je présume que la pension annuelle serait de 2 000$ ou même de 1 000$.
Du point de vue actuariel, ce genre de situation poserait-il des problèmes? Avez-vous envisagé cette possibilité?
M. Eggleton: Pour toute prestation supplémentaire, pour toute autre qualification qui requiert en fin de compte des prestations supplémentaires, il faudrait contribuer davantage pour assurer la solvabilité actuarielle du régime. Je comprends le cas dont vous parlez. Dans des cas semblables, nous nous demandons toujours quelle est la limite. Il y aura toujours des cas limites.
Nous avons estimé que le délai de six ans devait être maintenu pour l'acquisition des droits. Nous parlons de ce qui est la norme dans le secteur privé. Jusqu'ici, personne n'a signalé que ce délai était de deux ans dans le secteur privé.
Il existe une confusion entre l'acquisition des droits et les débours. Ces derniers ne seront plus possibles avant l'âge de 55 ans pour les pensions accumulées après la sanction royale, et le délai d'acquisition des droits sera toujours de six ans. Toutefois, dans le secteur privé, il faut seulement deux ans pour acquérir des droits dans un régime de pension. Il convient de le signaler. Il y a des choses qui sont différentes dans le secteur privé et des deux côtés de l'équation, et celle-là en est une.
Cela dit, nous avons estimé qu'il fallait régler de façon précise les questions que nous avions promis de régler pendant la campagne électorale. En effet, il y avait beaucoup de préoccupations quant au montant des prestations du régime, et nous avons déployé des efforts supplémentaires en ce qui concerne le taux d'accumulation.
Devrions-nous aller plus loin en ce qui concerne les différents types de cas? Je veux bien y réfléchir, mais nous ne pensons pas qu'il soit indiqué de le faire en ce moment. Peut-être plus tard, quand nous aborderons l'examen approfondi de la rémunération, comme on l'a noté, nous pourrions le faire; mais en ce moment-ci, notre proposition porte sur l'acquisition des droits au bout de six ans.
M. McWhinney: [Inaudible]...avez-vous examiné la question de la transférabilité qui, une fois de plus, est courante dans les secteurs privé et quasi public? Autrement dit, avez-vous pensé à l'intégration du régime de pension des parlementaires, quel qu'il soit, avec les régimes privés? Comme je l'ai dit, du point de vue actuariel, il n'y a pas de difficulté apparente dans les secteurs privé et quasi public.
M. Eggleton: D'abord, il y a un an, en réponse à une question de...je ne sais pas si c'était un député de votre parti, le premier ministre a déclaré que ce genre de disposition serait prévue. Par conséquent, on a évidemment eu assez de temps pour en étudier les ramifications. Toutefois, étant donné que la loi n'est pas encore entrée en vigueur, il convient d'attendre jusqu'à ce qu'elle soit proclamée avant d'offrir officiellement la période de 60 jours.
Mme Grey (Beaver River): Je vous remercie. Cela nous suffit.
Quand vous dites que notre whip est en train de prendre des décisions à la place de notre caucus...nous avons eu un vote au sein du caucus. Tous nos députés ont voté librement pour se retirer du régime, en espérant que nous serions en mesure de préparer nous-mêmes notre retraite au lieu de demander aux contribuables canadiens de le faire pour nous. Le délai de 60 jours ne nous intéresse pas particulièrement. C'est pour les futurs députés.
Deuxièmement, ceux et celles qui se retirent du régime obtiendront-ils l'indemnité de départ que l'on accorde aux députés, soit la moitié de leur salaire annuel? On ne peut pas obtenir cette indemnité si l'on reçoit la pension. Les députés qui refusent la pension obtiendront-ils la moitié de leur salaire annuel?
M. Eggleton: Dans la première partie de votre question, vous parlez des contribuables canadiens. Même dans la proposition que j'ai entendue ce matin, et que j'ai déjà entendue auparavant de la part des députés de votre parti...les contribuables canadiens contribuent même à cette indemnité de départ. Ce n'est pas comme si le contribuable canadien ne contribuait pas au régime de pension, même à celui que propose votre parti.
Quant à l'indemnité de départ, elle serait assujettie aux règles en vigueur; autrement dit, le député qui refuse la pension recevrait cette indemnité pour pouvoir se réinsérer dans le secteur privé. Comme je l'ai dit, cela arrive dans la majorité des cas, car la plupart des députés ne sont pas admissibles à une pension parce qu'ils n'atteignent pas la limite de six ans. La situation n'a donc pas changé. De même, un député qui reçoit une pension ne peut pas obtenir l'indemnité de départ.
Mme Grey: Je vous remercie.
Je voulais vous demander ce que vous pensez des audiences d'aujourd'hui. Quand nous nous sommes réunis le 18 mai, juste avant le congé, nous avons débattu des personnes qu'il ne fallait pas inviter comme témoins. Avez-vous participé au débat ou suggéré à vos collègues membres du comité les noms de personnes que vous aimeriez voir inviter, ou n'avez-vous tout simplement pas participé au processus?
M. Eggleton: Non, je n'y ai pas participé. C'est votre comité, et je respecte votre décision et celle du président de votre comité à ce sujet. Je ne suis qu'un invité ici.
Mme Grey: Très bien, nous aussi.
Avant de poser des questions aux témoins, je reviens sur les propos que vous avez tenus tout à l'heure; d'après vous, j'ai dit quelque chose qui semble erronée, à savoir que les contribuables financent le régime de pension...s'ils payaient 1$ comme employeur contre 1$ de la part des employés, je pense qu'ils n'y verraient pas d'inconvénient. Ce sont ces contributions exagérées, qui s'élevaient d'abord à 6$ contre 1$, et qui passent à 3,61$ contre 1$, qui me paraissent choquantes.
Passons maintenant au rapport de Sobeco Ernst & Young dont vous avez parlé tout à l'heure. Ce cabinet a demandé l'avis de la Coalition nationale des citoyens et d'autres groupes sur la question. Cela figure dans le rapport. Je me demande ce que vous en pensez.
Revenons un peu en arrière, car j'ai attiré l'attention du comité sur le Hansard du 18 mai, qui rapporte notre débat sur l'interrogation des témoins. Aux fins du procès-verbal, je vous rappelle que M. Boudria a déclaré qu'il n'avait pas particulièrement envie d'écouter M. Summerville; ce n'est pas une coalition de citoyens; ce n'est pas un groupe d'intérêt; c'est une entreprise.
De plus, Mme Parrish a déclaré, tout d'abord, je pense que vous êtes tout à fait qualifié - de même que M. Harper - pour représenter les idées de M. Summerville à cette table. Si nous en arrivons à être intimidés par des gens qui expriment des opinions extrêmes, alors je suis d'accord avec M. Plamondon. Elle a ajouté que nous ne pouvons pas nous soumettre à la harangue de quelqu'un comme M. Summerville, qui emploie des termes comme «porc» et «auge».
Monsieur le ministre, de toute évidence, il s'agit ici d'une question extrêmement sensible dans le reste du pays, une question qui suscite beaucoup de frustrations.
J'ai assisté également à la réunion comme invité, car je ne suis pas normalement membre du comité... Quand nous entendons des choses de ce genre de la part des députés du gouvernement, comment allez-vous amener la population à accepter un régime de pension aussi généreux? Je ne vois pas comment vous pouvez le faire, peu importe ce que votre adjointe a dit tout à l'heure au sujet des régimes de pension normaux et plus ordinaires dans le reste du pays.
Quand nous voyons des choses semblables, comment pouvons-nous, en tant que députés, allez dire à la population : eh bien, je suis désolé, mais on n'a pas permis à ces gens-là de comparaître, le comité a voté pour empêcher la Fédération canadienne des contribuables de témoigner parce qu'elle a des vues extrémistes ou parce les députés n'aiment pas qu'on les harangue?
Une voix: Des députés ont été refusés.
Mme Grey: En effet. Vous êtes le seul député qui sera ici pour représenter le Parlement. Tous les autres ont été purement et simplement tenus à l'écart. C'est frustrant pour la population canadienne qui nous regarde aujourd'hui et pour la presse qui essaie d'y comprendre quelque chose.
Sobeco Ernst & Young est un excellent groupe, qui a fait un travail considérable dans ce domaine, et il a consulté la Coalition nationale des citoyens et d'autres groupes. Pourriez-vous m'expliquer pourquoi nous permettons que ce genre de choses se produisent? Comment allez-vous faire accepter cela par la population quand vous comparaissez devant ce comité, tandis que ceux qui ont une opinion différente de celle du gouvernement en sont écartés?
M. Eggleton: Je peux répondre à votre question. Je pense que je l'ai déjà fait auparavant. Je ne suis pas du tout d'accord avec votre préambule. Vous remarquerez que les députés de tous les partis ont voulu que les Canadiens participent au processus, et en fait, ils entendent les Canadiens à ce sujet depuis un certain temps. Nous les avons entendus lors de la dernièr campagne électorale. Et nous l'avons fait depuis lors. Nous représentons tous des circonscriptions, et nous avons entendu nos électeurs à ce sujet.
Aujourd'hui, vous tenez des audiences. Celle-ci n'est pas la première, ni la dernière, ni la seule occasion que les gens auront de se faire entendre dans ce dossier. Vous avez aussi l'occasion de poser toutes les questions que vous voulez à Sobeco Ernst & Young, car ils vont également comparaître aujourd'hui.
Comme je l'ai déjà dit, je rejette l'opinion que le régime de pension est extrêmement généreux. Vous tenez compte de certaines statistiques, d'une partie des informations relatives au régime, et non pas de l'ensemble. Je pense qu'il faut regarder tous les éléments, en ce qui concerne non seulement le régime de pension, mais aussi le fait que la contribution des députés est supérieure à la norme et que leur période d'acquisition est plus longue.
Examinons ces facteurs. Je le dis précisément parce que nous devons être justes quand nous étudions séparément le régime de pension.
Examinons la rémunération dans son ensemble. Elle est en train de diminuer. Le salaire est gelé depuis six ans. Je ne pense pas que l'on puisse isoler le régime de pension. Il faut tenir compte de la rémunération globale. Nous ne pouvons pas parler d'augmentions de salaires maintenant, mais il faut que la rémunération soit raisonnable. Malheureusement, à cause de notre situation économique et de notre programme de compressions budgétaires qui est nécessaire pour assainir nos finances, nous devons réduire le régime de pension d'environ 33 p. 100, du moins en ce qui concerne la part des contribuables.
Je pense que le gouvernement est en train d'adopter une démarche raisonnable. Je ne partage pas du tout les affirmations que vous avez faites, je crois à tort, ni celles qui concernent la participation du public. Je sais que mes collègues, et vous en avez cité quelques-uns, peuvent vous répondre eux-mêmes, je sais que la population leur a dit clairement et à maints égards ce qu'elle pensait de cette question, et qu'ils aimeraient l'entendre.
Le président: Madame Parrish.
Mme Parrish (Mississauga-Ouest): Je vais essayer de vous poser rapidement cinq questions, monsieur Eggleton, et je m'attends aux mêmes réponses que j'obtiens de mon mari - oui ou non. La plupart du temps, c'est non.
Personnellement, en toute humilité, étant député depuis un an et demi, je pense que nous induisons la population en erreur en parlant ici d'un régime de pension. Ne parle-t-on pas de régime de prestations de retraite? Y a-t-il une différence entre les deux termes?
M. Eggleton: Du point de vue terminologique, il y en a certainement une, et peut-être aussi du point de vue juridique. Je crois que la plupart des gens pensent que nous parlons de régime de pension. Je vais demander à Mme Sharon Hamilton d'en faire la distinction.
Mme Parrish: Sharon, permettez-moi de préciser ma question.
Dans un régime gouvernemental de prestations de retraite, il ne faut pas nécessairement que la contribution de l'employeur soit égale à celle de l'employé. Mon mari verse dans son régime un certain montant par année, et sa compagnie apporte une contribution équivalente. En fait, l'apport du contribuable suffit pour honorer les obligations à l'égard des personnes déjà retraitées. N'est-ce pas? N'est-ce pas là la différence?
Mme Hamilton: En fait, il existe de nombreux régimes d'épargne-retraite que l'on appelle régime de pension, celui des parlementaires en est un. Celui dont vous avez parlé en est un autre. Le terme «régime de pension» est un terme générique qui désigne divers plans d'épargne...
Mme Parrish: J'essaie d'en arriver à l'argent que le gouvernement y investit chaque année. M. Eggleton vient de dire que le montant a été réduit de 33 p. 100. Il ne s'agit pas d'une contrepartie pour les députés en poste qui contribuent actuellement au régime. Il s'agit d'une somme nécessaire pour honorer des obligations antérieures. N'est-ce pas? Qu'est-ce que c'est?
Mme Hamilton: Non. Les allocations de retraite des députés proviennent de ce qu'on appelle une capitalisation intégrale, ce qui signifie que les recettes accumulées dans le régime chaque année suffisent pour financer les éventuelles prestations qui ont été accumulées au cours de l'année par les membres actuels du régime.
Mme Parrish: Ainsi donc, la réduction de 10,8 millions de dollars à 7,5 millions de dollars va être maintenue pendant de nombreuses années jusqu'à ce que le régime soit de nouveau modifié.
Mme Hamilton: Les coûts fluctuent, et ce pour diverses raisons. D'abord, à cause des changements de prévisions économiques. Ensuite s'il y a une élection et si le profil démographique des membres du régime change considérablement, les coûts pourraient changer en conséquence. Toutefois, en théorie, les coûts ont été réduits en permanence parce que le programme des prestations a été réduit en permanence.
Mme Parrish: Pour parler un langage que je peux comprendre, nous consacrons chaque année 10 millions de dollars aux déplacements des députés. Quarante ou cinquante pour cent d'entre eux, surtout ceux de l'Ouest, voyagent en classe affaires. Je me suis efforcée de réduire ce montant de 3 millions de dollars et je n'ai pas réussi. Félicitations, monsieur Eggleton. Vous avez réduit un montant équivalent d'un seul coup.
Dans le secteur privé, les contributions sont calculées en fonction d'une moyenne. Mon mari contribue à son régime de pension depuis 25 ans. En fonction de quoi calcule-t-on une contribution? Quelle est la contribution moyenne?
Mme Hamilton: Cela dépend tout d'abord des caractéristiques du régime. Cela dépend également si, dans certains cas, le régime de pension fait partie des avantages négociés...
Mme Parrish: Faudrait-il contribuer pendant six ans en moyenne pour s'attendre à une pension raisonnable?
Mme Hamilton: Voulez-vous dire afin de recevoir des prestations? Comme le ministre l'a dit, je pense que, dans la plupart des régimes, la période d'acquisition des droits est maintenant de deux ans.
Mme Parrish: Vous n'avez pas compris ma question. Si j'étais enseignante, et c'était ma profession, et si j'avais contribué à mon régime pendant six ans, pourrais-je m'attendre à recevoir en moyenne 20 000$ ou 30 000$ pour le reste de ma vie?
Mme Hamilton: Probablement non. En tant qu'enseignante, votre taux d'accumulation des prestations aurait été de 2 p. 100, comme c'est souvent le cas.
Mme Parrish: Très bien. Si j'étais restée enseignante, je présume que je serais devenue directrice d'école, mais on estimait toujours que je ne mâchais pas mes mots; peut-être pas. Si j'avais pris ma retraite après 25 ans d'enseignement en tant que directeur d'école, j'aurais reçu un montant forfaitaire de 50 000$ et une pension de 50 000$ par année pour le reste de ma vie. Par conséquent, et de toute évidence, j'ai choisi la mauvaise voie.
Prévoyez-vous des compressions supplémentaires dans ce régime de pension, monsieur Eggleton?
M. Eggleton: Je pense que l'étape suivante consistera à examiner l'ensemble de la rémunération des députés à la lumière du rapport de Sobeco Ernst & Young. Nous ne pourrons le faire qu'au moment où nous serons en mesure de régler la question des salaires.
Je pense que certaines des préoccupations exprimées par M. McWhinney pourraient être examinées dans ce contexte, mais je pense qu'il s'agit-là d'une question qui mérite d'être étudiée ultérieurement. Pour l'instant, telles sont les mesures que nous voulons prendre pour honorer les engagements figurant dans notre Livre rouge.
Le président: Madame Parrish, vos cinq minutes sont écoulées.
Madame Catterall, à vous.
Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Je reviens à M. Harper pour dire que j'ai un message différent à l'intention de mes électeurs. Plus vous continuez à m'élire, moins je recevrai de pension; veuillez donc m'élire le plus longtemps possible. Que m'importe si je suis pauvre à la retraite.
M. Harper: Mon prédécesseur demandait aux électeurs de l'élire pour ne pas être obligés de lui verser deux salaires. Tel était son raisonnement.
Mme Catterall: J'essaie aussi de clarifier ce dossier pour les gens qui tentent de rapporter des faits et non pas des spéculations.
Bien entendu, dans le débat sur les pensions des députés, l'un des problèmes réside dans le fait que le travail de ces derniers est singulier à bien des égards, et qu'il est difficile de trouver des éléments de comparaison. D'une manière générale, le poste du député se compare à celui d'un cadre moyen ou supérieur, selon les responsabilités qu'assume le député. Je ne sais pas si le Conseil du Trésor a fait des comparaisons entre le régime de pension des députés et celui des hauts fonctionnaires. En avez-vous fait?
Mme Hamilton: Nous n'avons pas fait de comparaison directe. Au fil des ans, nous avons obtenu diverses informations sur les régimes des pension des hauts fonctionnaires. Il n'existe pas de source d'information publique à ce sujet et, par conséquent, les données sont rares.
Mme Catterall: Essayons maintenant de faire quelques comparaisons. Quel est le taux d'accumulation des pensions des officiers supérieurs de l'armée et des hauts fonctionnaires?
Mme Hamilton: La Loi sur la pension de la fonction publique prévoit un taux d'accumulation de 2 p. 100 avec un facteur d'intégration au Régime de pensions du Canada; il y a donc une réduction des prestations par rapport au salaire sur lequel on prélève les contributions au RPC. La Loi sur la pension de retraite des Forces canadiennes comporte la même formule.
Mme Catterall: Qu'en est-il des hauts fonctionnaires et des officiers supérieurs?
Mme Hamilton: Ils sont assujettis à la même formule.
Mme Catterall: Je croyais que les prestations sont accumulées au taux annuel de 4 p. 100 et non pas de 2 p. 100.
Mme Hamilton: Pas en ce qui concerne les hauts fonctionnaires. Ces derniers et la plupart des personnes nommées par décret sont assujettis à la LPFP.
Mme Catterall: Quels sont ceux qui bénéficient du taux d'accumulation de 4 p. 100?
Mme Hamilton: Les sous-ministres des principaux ministères bénéficient d'un régime de pension supplémentaire qui échappe à la LPFP.
Mme Catterall: Leur taux d'accumulation est-il de 4 p. 100? Est-ce également le cas pour les officiers supérieurs de l'armée?
Mme Hamilton: Non.
Mme Catterall: Les sous-ministres, par exemple, contribuent-ils davantage pour obtenir un taux d'accumulation plus élevé?
Mme Hamilton: Non, il n'y a pas de contribution. Quand nous disons 4 p. 100, une fois de plus, ce n'est pas vraiment 4 p. 100, car le système est intégré au Régime de pensions du Canada.
Mme Catterall: Comme le nôtre.
Mme Hamilton: Le régime de pension des députés n'est pas intégré, c'est un régime cumulatif.
Mme Catterall: Parlons maintenant des cotisations. Quand vous dites qu'il y a une contrepartie de 3,5 p. 100, cela comprend-il l'intérêt alloué au régime?
Mme Hamilton: Parlez-vous de la part du gouvernement?
Mme Catterall: Oui.
Mme Hamilton: Non, il s'agit de la contribution directe de l'«employeur».
Mme Catterall: Le fait est qu'il n'y a pas de caisse. Est-ce que je me trompe? Le gouvernement n'y investit donc rien chaque année. Il paie les prestations, mais il ne verse pas d'argent dans une caisse.
Mme Hamilton: Au Trésor, il existe un compte relatif à toutes les obligations du gouvernement du Canada à l'égard des députés, anciens ou actuels, relativement à leur pension, comme il y a un compte pour la fonction publique.
Mme Catterall: Mais il n'y a pas vraiment d'argent dans un compte?
Mme Hamilton: Eh bien, c'est un compte de passifs, de la même façon que... Une partie de la dette est libellée de la même façon...
Mme Catterall: Il s'agit donc d'un compte sur papier et non pas d'un compte contenant de l'argent.
Mme Hamilton: C'est une partie de la dette, au même titre que les autres dettes du gouvernement.
Mme Catterall: Ainsi donc, le gouvernement ne verse pas vraiment d'argent dans ce compte chaque année, mais il en verse à ceux qui ont contribué au régime, et cela fait partie des recettes générales. N'est-ce pas?
Mme Hamilton: Les salaires des employés sont réduits du montant versé au compte de pension en leur nom. La contribution que le gouvernement verse à ce compte chaque année est comptabilisée comme une dépense. Il s'agit donc en fait d'une dépense gouvernementale.
Mme Catterall: Oui, je comprends. Mais il n'existe nulle part un fonds qui a été mis en réserve et qui produit des intérêts.
Mme Hamilton: Il ne s'agit pas de liquidités. C'est ça que vous voulez dire? On n'a pas constitué une réserve de liquidités et...
Mme Catterall: En effet.
Je veux en venir au fait que les prestations sont payées, mais le gouvernement ne met pas d'argent dans un compte quelque part, sauf ce qu'il verse à titre de prestations, et cela comprend l'ajustement actuariel qui a été fait voici quelques années. Et il s'agit d'un montant assez substantiel. Autrement dit, quand les députés versent leurs contributions, c'est de l'argent réel que le gouvernement économise et qu'il utilise à d'autres fins.
Mme Hamilton: Pas vraiment, parce que le gouvernement montre qu'il a versé cet argent aux employés au titre des salaires et qu'une partie de l'argent a été mis en réserve dans le compte des pensions, au lieu d'être versé aux employés pour qu'ils le convertissent en liquidités. De plus, en tant qu'employeur, le gouvernement a contribué au compte des pensions, ce qui représente une vraie dépense budgétaire. Quand les comptes sont établis chaque année, le gouvernement montre qu'il a dépensé cet argent. Par conséquent, il reconnaît cette dépense de façon courante.
Le président: Si Mme Catterall veut bien prendre la présidence, le comité pourrait continuer à siéger avec un quorum réduit pendant 20 minutes pour donner la parole aux députés qui veulent poser des questions. Cela vous convient-il?
Des voix: D'accord.
M. Boudria: Le seul problème, monsieur le président, c'est que nous allons travailler avec un quorum réduit ou un mini-quorum. Il se peut que nous demandions aux députés de se rendre à la Chambre. Étant donné que les collègues ici présents sont tous des agents de la Chambre, nous étions convenus d'ajourner pour une demi-heure.
Le président: C'est exact.
M. Boudria: Il se pourrait que nous libérions les députés pour que la Chambre puisse siéger.
Le président: D'accord? Il nous faut trois personnes.
Je suis désolé, monsieur Finlay, mais nous avons besoin de vous ici.
[Français]
Le deuxième tour, trois minutes, mais le premier tour pour MM. Pickard et Solomon, si le Comité...
[Traduction]
M. Silye: Monsieur le président, pourquoi ne pas inviter le ministre à revenir à notre prochaine réunion pour une demi-heure ou une heure?
Le président: Nous avons 20 minutes.
M. Silye: Monsieur le président, ce n'est peut-être pas suffisant.
Le président: Eh bien, ce n'est peut-être pas suffisant. Mais je pense que nous devrions essayer d'en finir et décider si nous allons faire autre chose plus tard. Je fais cette proposition uniquement pour donner la parole aux députés qui veulent poser des questions, surtout M. Solomon, qui est un membre suppléant, si cela vous convient.
[Français]
M. Plamondon: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
Le président: Oui, monsieur.
M. Plamondon: Je voudrais m'assurer qu'on fonctionne comme dans tous les comités, c'est-à-dire qu'on donne dix minutes normalement à l'Opposition officielle, dix minutes à l'autre parti et dix minutes au parti au pouvoir. Ensuite, c'est cinq minutes pour tous les membres.
Le président: Oui.
M. Plamondon: À un deuxième tour, on recommence dans le même ordre, c'est-à-dire l'Opposition officielle, le parti... Si tous les députés ont commencé.
Le président: Mais, nous ne sommes pas encore là. Je me suis simplement référé à la liste d'indication d'intérêt des députés que j'ai reçue. Alors, si vous voulez poser d'autres questions, vous êtes sur la liste, monsieur Plamondon.
[Traduction]
M. Silye: Mais qu'en est-il de sa question relative au deuxième tour?
Le président: Eh bien, nous n'en sommes pas encore là.
M. Silye: ...et de sa proposition que l'on donne 10 minutes à chaque parti, comme vous l'avez fait au premier tour?
Le président: Je pense que nous allons simplement donner cinq minutes à chacun et continuer ainsi. Si vous voulez travailler pendant 20 minutes, nous allons le faire.
Une voix: D'accord.
La vice-présidente (Mme Catterall): Monsieur Pickard.
M. Pickard (Essex - Kent): Monsieur Silye, j'ai trouvé les observations du whip du Parti réformiste très intéressantes. Nous savons tous qu'il a proposé que nous ramenions le taux d'accumulation du régime de pension à la norme dans le secteur public, c'est-à-dire à 2 p. 100. Je dirais qu'il s'agit-là d'une proposition très admirable. Je comprends certainement le point de vue de M. Silye, surtout quand il parle des allocations cachées que reçoivent également les députés.
Nous avons un salaire de 64 000$, une allocation non imposable de 21 000$, et 6 000$ d'indemnités de logement, qu'il propose d'inclure dans le salaire régulier. Il y a cinq minutes, vous avez dit que nous gagnons actuellement 140 000$, et vous aimeriez que nous portions ce salaire à 150 000$.
Eh bien, prenons un salaire de 150 000$ avec un taux d'accumulation de 2 p. 100, comparons-le à un salaire de 64 000$ à 4 p. 100, et voyons le régime qui coûte le plus cher. Si nous prenons la proposition du Parti réformiste, soit un salaire de 150 000$ à 2 p. 100, cela donne exactement 3 000$ par année. Notre proposition de 64 000$ à 4 p. 100 donne 2 560$.
Si l'on en croit ce que dit le Parti réformiste, rien n'est prévu en ce qui concerne les délais nécessaires à l'admissibilité. Par conséquent, tous les députés pourraient recevoir une pension et non pas la moitié de ceux-ci seulement.
Si l'on prend sa retraite après six ans de service ouvrant droit à pension à un taux de 2 p. 100 par année, si l'on se fie aux propositions des réformistes, on obtient 18 000$ par année. Selon la proposition du ministre, il ne s'agit que de 15 360$ par année.
Après 35 ans, on atteint le maximum de 70 p. 100 du salaire qui est dans ce cas de 150 000$, ce qui représente 105 000$.
Une voix: Une affaire en or.
M. Pickard: Selon la proposition du ministre, après 35 ans, on aurait droit qu'à 45 000$, soit une différence de 60 000$.
Vous connaissez sans doute les calculs actuariels, vous savez comment le système fonctionne, vous savez ce qui se passe dans le cas des calculs qui se basent sur un salaire élévé. Pourriez-vous me dire... D'après ces chiffres donc, il en coûterait au gouvernement canadien beaucoup plus s'il adoptait la suggestion du Parti réformiste que ce qui est proposé ici, n'est-ce pas?
Les réformistes pensent que notre régime de pension est en or. Je peux vous dire qu'ils suggèrent un régime en platine pour tout le monde. Il n'y a pas d'autre façon d'exprimer cela.
Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez, monsieur le ministre? Essayons vraiment de tirer tout cela au clair et soyons honnêtes.
M. Eggleton: Si le taux de formation de la rente est de 2 p. 100 par année conformément à la Loi de l'impôt sur le revenu, si ce pourcentage s'applique au salaire total, vous avez tout à fait raison. Dans le cas d'un salaire de 150 000$, avec un taux de 2 p. 100 par année, le montant de pension est plus élevé que celui que je vous ai présenté aujourd'hui.
Je vous ai entendu parler de 144 000$. Si vous vous basé sur ce chiffre, la somme est encore plus élevée.
M. Silye: Avec la contrepartie de l'employeur, il s'agira de 5 p. 100 sur 144 000$ dont on devrait déduire ensuite tous les avantages cachés.
M. Eggleton: Je ne sais pas si on est en train de monter tout cela en épingle, mais d'après ce que j'ai lu...
M. Silye: C'est exact.
M. Pickard: Monsieur Silye, vous pourrez faire vos commentaires plus tard si vous avez une autre question à poser. Personnellement je suis en train de demander que l'on réponde à ma question.
La vice-présidente (Mme Catterall): Monsieur Pickard a la parole.
M. Eggleton: Si je me base sur ce que j'ai lu dans le Hansard et que je tiens compte des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu, vous avez tout à fait raison. Notre régime n'est pas aussi alléchant que celui qui a été présenté par le whip du Parti réformiste.
M. Pickard: J'aimerais aller plus loin. Supposons que l'on retire l'argent du fonds de pension et que l'on le convertisse en REÉR avec dégrèvement fiscal dans le cas d'un salaire de 150 000$. Dans un tel cas, on n'aurait même pas besoin d'avoir un régime de pension pour la retraite car on disposerait d'une somme beaucoup plus considérable d'argent en banque; on pourrait déduire les crédits d'impôt et l'on accumulerait un bonne petite somme avec des REÉR, pourvu que les contributions soient élevées; tout cela dans le cadre du régime que nous propose les réformistes. Et le régime de retraite serait beaucoup plus intéressant que ce que l'on propose ici.
M. Eggleton: Je ne suis pas en désaccord avec vous. De quelque façon qu'on s'y prenne - et les REÉR ne sont après tout qu'une autre sorte de régime à prestations déterminées dont se prévalent beaucoup de gens, comme je l'ai dit. Quatre-vingt-quinze pour cent des Canadiens et Canadiennes des secteurs privé et public ont un régime à prestations déterminées comme celui-ci, peut-être pas exactement le même car tous les régimes sont différents, mais en tous cas dans la majorité des cas. Tout dépendra donc des niveaux de contribution. Mais si l'on se base sur les hypothèses que vous énoncez, je dois dire que je suis d'accord avec vous.
M. Pickard: Il s'agit ici d'un parti qui mène une bataille politique injuste et qui cite des chiffres. Il est très clair qu'avec un tel régime ce serait les contribuables qui devraient payer des sommes plus considérables que dans le cas du régime que nous proposons.
Je cherche à défendre les intérêts de mes contribuables comme tout le monde ici. Mais ils veulent une augmentation car le régime ne comprend que 300 personnes. Même le chef du parti jouit de privilèges spéciaux parce qu'il ne peut se satisfaire d'un simple salaire de député. Tout le monde est d'ailleurs au courant de cette situation.
À mon avis donc, tout cela n'est qu'un jeu politique de la part d'un parti qui veut discréditer tout le système. Les propositions de ce parti sont beaucoup plus coûteuses que les nôtres.
M. Eggleton: Vous avez vu juste, quand vous parlez des contribuables. C'est de ça qu'il s'agit en fin de compte. On peut toujours discuter de la question de savoir si le taux d'accumulation est trop généreux, faire des comparaisons entre les périodes d'acquisition du droit à la pension dans le secteur public ou privé, le degré d'indexation, le nombre de personnes qui obtiennent des indemnités spéciales. On peut faire tout cela, mais en fin de compte, ce qui préoccupe les contribuables canadiens, c'est combien cela leur coûte.
Les propositions contenues dans le projet de loi C-85 coûteront moins aux contribuables qu'à l'heure actuelle. Il s'agira d'une diminution de plus de trois millions de dollars, soit 33%.
Ce que le whip du parti réformiste propose équivaut à une augmentation pure et simple des coûts pour le contribuable. Cela ne fait aucun doute. C'est plus coûteux que ce que propose le gouvernement. Vous avez donc vu juste; ce qui compte, c'est ce que devra payer le consommateur.
M. Solomon (Regina-Lumsden): Dans les années soixante-dix monsieur le ministre, il y a eu une série de conférences fédérales-provinciales sur la réforme des pensions. On s'est rendu compte à la suite de ces conférences qu'il était dans l'intérêt du public de passer d'un régime à prestations déterminées à un régime à cotisations déterminées et cela, pour trois grandes raisons et d'autres également. Tout d'abord, dans le cadre d'un régime à prestations déterminées, il y a un déficit actuariel. Deuxièmement, il y a un problème de transférabilité d'un emploi à l'autre et d'une province à l'autre. Troisièmement, étant donné qu'il y a une période d'admissibilité de cinq ou six ans, la plupart des personnes n'étaient pas admissibles à une pension et ont obtenu un remboursement de leurs cotisations.
On a donc pensé à l'époque qu'il était sage de changer de régime. Il y a eu consensus sur cette question. On n'a pas adopté de loi à ce sujet, on s'est tout simplement mis d'accord pour dire que les gouvernements devraient étudier ces questions. En 1977, le gouvernement néo-démocrate d'Allan Blakeney en Saskatchewan a décidé de modifier son régime de pension pour la fonction publique en rejetant un régime à prestations déterminées. En 1979, ils ont fait la même chose pour leurs parlementaires et c'est ainsi que les membres de l'Assemblée législative ont pu bénéficier d'un régime à cotisations déterminées.
Il s'agissait-là d'un système très équitable pour les contribuables, peut-être pas aussi intéressant pour les députés que pour les fonctionnaires étant donné la période de temps ouvrant droit à pension pour les premiers, mais les fonctionnaires de carrière bénéficiaient ainsi d'un régime aussi bon sinon meilleur et moins coûteux pour les contribuables. C'est le genre de régime qui est adopté par de nombreuses associations canadiennes , l'Association des contribuables de la Saskatchewan, la Fédération des contribuables canadiens et même la National Citizens Coalition. Ces organisations estiment qu'il s'agit-là d'un régime équitable qui n'est pas extravagant.
Malgré ce changement en Saskatchewan,il reste encore un déficit actuariel de trois milliards de dollars qui remonte à l'ancien régime d'avant 1977 pour la fonction publique. C'est un chiffre assez étonnant et si nous n'avions pas changé de régime, il s'agirait sans doute maintenant de six ou sept milliards de dollars. Nous ne savons pas exactement ce qu'il en serait, mais cette somme donc aurait été beaucoup plus considérable qu'elle ne l'est à l'heure actuelle.
J'aimerais vous dire ceci: Il faut vous féliciter d'avoir présenté les recommandations que vous avez présentées au comité puisqu'elles réduisent de façon importante les coûts qui seront encourus par les contribuables. Il sera en effet beaucoup plus difficile d'être admissible à une pension, et beaucoup moins de parlementaires seront par conséquent admissibles. Cependant, en tant que membre de l'opposition, mon rôle ne se limite pas simplement à accueillir ces changements mais à présenter des recommandations pour améliorer encore la situation.
En septembre, je le rappelle aujourd'hui au ministre, j'avais présenté un projet de loi d'initiative parlementaire invitant le Parlement à adopter un régime de pensions à cotisations déterminées à l'intention des députés.
Voici ma première question: pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas envisagé... si le gouvernement y a songé, pourquoi n'a-t-on pas retenu l'idée de remplacer le régime à prestations déterminées par un régime à cotisations déterminées lequel a donné des résultats très positifs et recueille la faveur des contribuables d'autres provinces, comme la Saskatchewan?
M. Eggleton: Comme je l'ai dit tout à l'heure, il me semble que d'autres difficultés ont été signalées à propos d'autres dispositions du régime; il en avait déjà été question, à vrai dire, dans le rapport Sobeco Ernst et Young. Outre les indemnités de retraite, il y avait toute la question du régime de rémunération. À l'avenir, on pourra faire davantage, et on devrait faire davantage, pour aplanir ces difficultés.
Mais, à ce moment-là, le gouvernement estimait qu'un des éléments majeurs des recommandations ne pouvait pas être pris en compte, à savoir la question de l'augmentation du traitement des députés, augmentation qui devait être assortie de réductions de pensions. On a donc jugé qu'il valait mieux attendre une autre occasion où l'on pourrait repenser l'intégralité du régime. Je n'ai pas d'échéancier - qu'on le comprenne bien - pour aborder ces autres questions.
Toutefois, pour le moment, nous avons voulu nous occuper des questions très précises soulevées par le grand public, notamment des préoccupations que cause l'âge auquel certains députés quittent la vie publique et peuvent ainsi toucher un traitement et une pension en même temps. Nous nous sommes donc occupés de ces aspects-là.
Bien entendu, nous avons dû prendre en compte nos contraintes financières. Ainsi, nous avons réduit le taux d'accumulation et nous avons fait en sorte que le régime de rémunération des députés, notamment le régime de pensions, contribue a réduire le déficit car désormais il en coûte moins cher aux contribuables.
Voilà donc l'envergure du projet de loi C-85. Il n'exclut pas la possibilité à un autre moment de faire d'autres réformes. Nous estimions qu'il n'était pas opportun de faire un examen plus exhaustif de tout le régime de rémunération étant donné que nos employés sont déjà visés par le gel des salaires.
M. Harper: Je voudrais poursuivre la discussion que nous avions tout à l'heure à propos de la comparaison entre telle pension et les modalités qui prévalent dans le secteur privé. Auparavant, je voudrais faire quelques remarques.
Des choses fort valables ont été signalées. M. McWhinney en avait parlé auparavant. Il y a certains éléments mineurs du régime qui sont moins généreux que ce qui est offert dans le secteur privé. M. McWhinney a fait des suggestions très raisonnables et il a dit notamment à la Chambre que pour résoudre le problème de la rémunération des députés, il ne fallait pas rendre certains éléments du régime de pension trop généreux mais plutôt en faciliter la portabilité sur le plan interne ou externe. De toute façon, ce n'est pas ce que nous trouvons ici. Pour ma part, j'estime que les éléments les plus cruciaux du régime sont certainement beaucoup plus généreux que ce qui est offert dans le secteur privé.
J'ajouterai que si nous ne parvenons pas à faire adopter des amendements satisfaisants ici au comité, nous en présenterons certains à la Chambre. Ces amendements porteront sur la générosité de certains éléments du régime de rémunération sans qu'il y ait augmentation nécessaire par ailleurs, certainement pas augmentation de traitements. Nous allons voir comment M. Pickard et d'autres, qui s'inquiètent tant du contribuable au point d'en perdre le sommeil, voteront quand ces propositions-là seront mises aux voix.
M. Peacock peut peut-être répondre à la question suivante: quel pourcentage des travailleurs du secteur privé et les travailleurs du secteur public peuvent-ils faire valoir leur droit à une pleine retraite à l'âge de 55 ans?
M. Eggleton: Avant que M. Peacock ne réponde à cette question, je voudrais revenir sur votre préambule car votre raisonnement pèche très sérieusement quand vous qualifiez certains éléments de mineurs alors que d'autres seraient cruciaux, comme vous dites... bien entendu, c'est vous décidez ce qui est crucial et ce qui est mineur, n'est-ce pas?
Le député dit que le fait que la période d'acquisition des droits soit de six ans alors qu'elle n'est que de deux ans dans le secteur privé constitue un élément mineur. On ne peut pas parler d'élément mineur quand on sait que cette période de six ans entraîne la perte de toute pension pour la majorité de ceux qui viennent ici servir et qui cotisent au régime. C'est quelque chose de tout à fait majeur et c'est un élément du régime qui se démarque nettement de ce qui se passe dans le secteur privé.
Je ne puis donc pas être d'accord avec le député et je ne vous donne là qu'un exemple qui prouve qu'il est risqué de comparer les éléments mineurs et les éléments critiques. Il y en a d'autres.
Je ne peux donc pas être d'accord dans ce cas-là. L'argument à mon avis est tout à fait erroné.
Monsieur Peacock, voulez-vous répondre à cette question sur les 55 ans?
M. Peacock: Je ne pourrais pas vous citer de poucentages de mémoire toutefois, pour obtenir la pleine pension à l'âge de 55 ans, il faut de longues années de service. En vertu des dispositions fiscales, on applique la formule des 80 par exemple. Ainsi, à l'âge de 55 ans, quelqu'un qui aurait 25 ans de service pourrait obtenir une pleine pension. De même, à 50 ans, avec 30 années de service, on peut aussi obtenir une pleine pension.
Je ne peux cependant pas vous donner de chiffres de mémoire.
M. Harper: Vous conviendrez que seul un petit pourcentage de la population active peut être dans ce cas-là, n'est-ce pas?
M. Peacock: Je ne pense pas que ce soit un si petit pourcentage. Encore une fois, il s'agit de gens qui accumulent de longues années de service. Cela se voit couramment dans le secteur public en tout cas.
M. Harper: Nous pourrions débattre longuement de ce qui est mineur par rapport à ce qui est majeur et c'est pourquoi je voudrais examiner le tableau d'ensemble. Le gouvernement va devoir fournir à cette caisse 33 p. 100 de la masse salariale tous les ans pour financer ce régime. C'est le coût total. On pourrait revenir sur la question de ce qui est majeur et de ce qui est mineur. Nous savons toutefois qu'à un extrême certaines personnes ne toucheront aucune pension alors qu'à l'autre extrême, certains toucheront beaucoup, la moyenne étant toutefois de 33 p. 100. Comment ce régime se compare-t-il à celui offert dans le secteur public et dans le secteur privé?
M. Peacock: Les cotisations, c'est-à-dire les dépenses que représentent les pensions, sont des chiffres que l'on ne trouve pas facilement. Par le passé, quand nous pouvions compter sur les chiffres du bureau de recherche sur la paye on a pu constater que les cotisations représentaient de 5 p. 100 à 7 p. 100.
M. Harper: Nous serions donc parmi les plus élevés.
M. Peacock: Pour les enseignants ontariens, c'est probablement près de 9 p. 100 mais en moyenne, les cotisations du secteur privé comme du secteur public se situent entre 5 p. 100 et 7 p. 100.
M. Harper: Vous n'avez peut-être pas bien compris ma question. Quel pourcentage des employeurs verse 33 p. 100 de leur masse salariale à un régime de pensions?
Aucun, sauf la Chambre des communes.
M. Peacock: En comparaison avec un employeur du secteur privé ou du secteur public, on n'en trouve probablement pas.
M. Harper: Il n'y en a pas d'autre au pays, n'est-ce pas, selon vous?
M. Peacock: Pour l'ensemble des employés... Dans le cas des dirigeants d'entreprises, c'est possible. Encore une fois, ce genre de renseignements n'est pas rendu public.
M. Harper: La pleine indexation est-elle courante? Diriez-vous qu'elle est assez courante dans le secteur public et pas très courante dans le secteur privé?
M. Peacock: La pleine indexation n'est pas courante dans le secteur privé, en effet.
M. Harper: Elle n'existe pour ainsi dire pas, n'est-ce pas?
M. Peacock: C'est cela. Je dirais qu'il y a un très faible pourcentage des pensions qui sont automatiquement pleinement indexées. Le ministre l'a dit tout à l'heure, on constate un grand nombre d'augmentations ponctuelles.
M. Eggleton: Encore une fois, vous ne pouvez pas oublier cela. J'ai bien connu ce genre de situations. Cela peut coûter fort cher. Il vaut beaucoup mieux avoir prévu un régime de pensions dont les prestations vont correspondre à l'évolution de l'économie et de l'inflation subies entre les années ouvrant droit à la pension et les années où on la touche. Il est logique de prévoir cela. En fait, les députés versent une somme supplémentaire pour couvrir cela. Il s'agit d'un bon instrument de planification, plutôt que d'avoir recours... les gens, une fois que les années passent, avec l'inflation qui fait son chemin, constatent soudain que leur pouvoir d'achat s'est beaucoup érodé. C'est alors qu'on demande à l'employeur de débourser davantage afin de compenser.
Dans le cas des augmentations ponctuelles, le résultat est le même, mais c'est une piètre planification. En revanche, ceci est tout à fait raisonnable et le secteur privé devrait y recourir davantage. Bien sûr, ils finissent par payer, mais je vous dirais...
M. Harper: Pas à 100 p. 100.
M. Eggleton: Ils paient beaucoup d'argent. Mais vous n'avez pas explicitement ces renseignements.
Permettez-moi de vous dire, d'après les renseignements que j'ai pu obtenir que ces indemnités ponctuelles représentent beaucoup d'argent. Un régime est préférable.
M. Harper: Peut-être mais à un taux inférieur, à un taux inférieur à la pleine indexation. C'est peut-être la solution.
Quoiqu'il en soit, vous ne cessez de parler de la cotisation des députés. Les députés assument 9 p. 100 mais même à 9 p. 100 l'employeur cotise trois fois et demi plus que l'employé. Combien y a-t-il de régimes de pension dans le secteur privé et dans le secteur public où la part de l'employeur est trois fois et demi ou plus supérieure à celle de l'employé?
M. Eggleton: Encore une fois vous êtes sélectif.
M. Harper: Quel pourcentage?
M. Eggleton: Votre analyse statistique est sélective ce qui la fausse totalement. Il faut également tenir compte des taux de cotisation. Il faut...
M. Harper: C'est ce que j'ai fait.
M. Eggleton: ...tenir compte de tous les facteurs mais vous n'en retenez qu'un pour justifier votre conclusion.
Il n'y a pas que le régime de pensions, il faut tenir compte de tout. Les députés ont décidé de toucher moins sous forme de salaire, de rémunération annuelle, pour pouvoir toucher plus sous forme de pension de retraite. L'ensemble est inférieur à ce qu'il devrait être d'après votre propre whip.
M. Harper: Vous m'avez dit, monsieur Silye, ne pas avoir pris en compte l'ensemble.... [Inaudible]
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît.
M. Eggleton: Il est évident que 150 000$ ou 144 000$ c'est plus que 64 000$.
Le président: À l'ordre.
[Français]
Monsieur Plamondon, vous avez cinq minutes pour poser vos questions. Ce sont les dernières questions.
M. Plamondon: Ma question concerne toujours la pension des députés par rapport à celle des ministres et des secrétaires parlementaires. La haut-fonctionnaire qui vous accompagne pourra peut-être répondre à ma question.
Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure: le député, s'il siège un an, accumule une année de pension. Le ministre, s'il siège un an, accumule 1,72 année, soit presque une année et trois quarts pour son fonds de pension. Le secrétaire parlementaire, pour sa part, accumule 1,16 année. Finalement, le Président du Sénat, accumule 1,48 année.
Est-ce que vous avez l'intention de corriger ça pour ne pas privilégier davantage ceux qui, déjà, lorsqu'ils sont ministres, reçoivent un meilleur salaire, ont un chauffeur et des avantages? Tout à coup, lorsqu'ils prennent leur pension, ils ont encore plus d'avantages qu'un autre député. Il me semble qu'il y a un excès, d'autant plus qu'on me dit qu'au niveau du premier ministre, des ministres et des secrétaires parlementaires, une disposition prévoit qu'il n'y a pas de limites; ils peuvent dépasser 75 p. 100 de la pension, contrairement aux députés.
Par exemple, un ministre qui a siégé neuf ans au sein du dernier gouvernement conservateur, aura droit non pas à 45 p. 100 de sa pension, mais à 77 p. 100 de celle-ci puisqu'il faut multiplier ses années de service par 1,72. Est-ce vrai? Est-ce la bonne interprétation?
Cela veut dire que, M. Trudeau, qui a été là 16 ans, aura droit à 131 p. 100 de son salaire comme pension. M. Mulroney, quant à lui, aurait eu droit à un peu plus que 100 p. 100 de son salaire comme pension. Un ministre qui aurait siégé 20 ans, aurait le droit à 175 p. 100 de son salaire comme pension. Est-ce que c'est ça votre 1,72? Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose à corriger là-dedans?
[Traduction]
M. Eggleton: Je laisserai à Sharon Hamilton le soin de répondre sur les points plus techiniques. Mais comme elle l'a déjà dit tout à l'heure, les calculs sont fondés sur la rémunération. Pour atteindre les 75 p. 100 il faut avoir été parlementaire pendant 19 ans. Cela fait beaucoup. Il n'y en a pas beaucoup dans ce cas là. Il ne faut pas citer que les cas extrêmes qui sont assez peu nombreux.
M. Plamondon: Pas les ministres. Combien d'années pour les députés?
Mme Hamilton: Pour revenir à l'explication de tout à l'heure, quand on cotise à un régime de pension fondé sur le salaire et que la cotisation est calculée en fonction de l'intégralité du salaire perçu pour le travail qu'on fait, on finit par recevoir une pension de retraite qui est fonction de ces salaires.
Dans le cas des députés, comme ils ne bénéficient pas de la progression salariale associée aux autres carrières... Normalement on commence à travailler pour un patron. Ensuite on obtient des promotions et des augmentations de salaire et le salaire augmente progressivement. Par contre, quand on est député le salaire pendant la première législative peut être à un certain niveau. Pendant la deuxième, il peut diminuer de manière considérable avec la perte de certaines responsabilités supplémentaires qui précédemment étaient rémunérées. Il n'y a donc pas de progression salariale comme on l'entend dans les autres professions.
Cette formule de calcul dans la loi permet à ceux qui ont été députés pendant un temps assez long et qui ont touché à un moment ou à un autre des rémunérations supplémentaires de toucher une pension augmentée en conséquence. À cette fin, plutôt que faire un calcul de salaire moyen différent pendant la période où le député était ministre, pour calculer la pension pendant cette période et de faire un autre calcul du salaire moyen pour la période pendant laquelle il n'était plus que simple député, nous partons du salaire moyen de député auquel nous ajoutons ces périodes de rémunération surpplémentaire qui ont servi à ce calcul différent de cotisation. Cela nous permet d'augmenter la pension pour la période pendant laquelle une rémunération supplémentaire correspndant à des responsabilités supplémentaires à été gagné.
M. Plamondon: Cela veut dire que si un député est là pendant neuf ans, selon ce régime actuariel il percevra neuf ans multiplié par cinq. C'est-à-dire 45 p. 100. Si pendant neuf ans il a été ministre, il recevra cinq fois neuf multiplié par 1.72. Ce qui fait 77 p. 100, n'est-ce pas?
Mme Hamilton: Oui, mais le salaire moyen uitilisé pour le calcul est le salaire d'un député et non pas celui d'un ministre.
M. Plamondon: Supposons qu'il n'ait été ministre que pendant neuf ans, comme Benoît Bouchard ou Pierre Cadieux.
[Français]
Étant donné que pour un ministre, le fait de siéger un an équivaut à 1,72 année, on devra multiplier, par exemple, ses neuf années de service par 1,72, ce qui donne exactement 15,48 années. On multiplie ce résultat par 5 et on obtient alors 77,40 p. 100 de son indemnité. Donc, il a siégé neuf ans et il obtiendra une pension un peu plus élevée qu'un député qui a siégé 15 ans. Je veux savoir si le ministre a l'intention de corriger cela et de faire en sorte que pour un député comme pour un ministre, un an est un an?
[Traduction]
Un an est un an pour tout le monde.
Mme Hamilton: Cela dépend du salaire utilisé pour calculer la pension. Si cette personne n'a reçu que le salaire de base d'un député...
M. Plamondon: Je parle de pourcentage, pas d'argent.
Le président: Mais le pourcentage est le même. C'est le calcul qui est différent.
Mme Hamilton: Si le salaire moyen de tous les députés qui partent à un certain moment en même temps était de 60 000$ et que le salaire moyen d'un ministre était de 90 000$, et que je convertisse le salaire du ministre, tenant compte de ses responsabilités supplémentaires et que je faissent le calcul sur la base de 60 000$ au lieu de la base de 90 000$, j'obtiens le même résultat. Donc...
M. Plamondon: Non.
Le président: De toute évidence vous n'êtes pas d'accord. Vous pourriez peut-être en discuter ensemble tout à l'heure. Nous vons dépassé notre horaire. Je crois que le ministre est assez pressé de s'en aller et notre temp de discussion est expiré. On devrait pouvoir lui envoyer un exemple de ce calcul. Cela permettrait peut-être de mieux comprendre. Restons-en là pour le moment.
Je suspens la séance quelques minutes le temps de changer de témoin.
Le ministre est-il prêt à revenir à notre demande?
M. Eggleton: Cela dépend du comité. Je suis resté une demi-heure de plus et j'ai constaté que certaines des questions, surtout celles du Parti réformiste, devenaient répétitives.
Le président: Merci.
La séance est suspendue.
PAUSE
[Français]
Le président: Nous avons ici, aujourd'hui, de Sobeco Ernst & Young, MM. Philippe Martel et Yvan Pouliot, coauteurs du «Rapport sur la rémunération des parlementaires», présenté au président du Conseil du Trésor en 1994.
Vous avez la parole, messieurs. Est-ce que vous avez quelque chose à dire avant les questions?
M. Philippe Martel (coauteur du «Rapport sur la rémunération des parlementaires» présenté au président du Conseil du Trésor - 1994, Sobeco Ernst & Young): Effectivement, on avait peut-être l'intention de faire une petite introduction, c'est-à-dire définir nos rôles respectifs. Mon collègue, Yvan Pouliot, est actuaire de profession; c'est lui qui a été le principal artisan de nos recommandations en ce qui concerne le régime de retraite. Quant à moi, je suis associé responsable de la pratique de rémunération chez Sobeco Ernst & Young. J'ai été celui qui a été l'artisan, le chargé principal de l'étude qui a été faite.
À titre d'introduction, nous allons situer notre mandat et la perspective qui a été la nôtre au départ. Notre étude en était une dite de rémunération globale qui débordait la simple étude du régime de retraite. Ce qu'on a essayé de faire, pour ceux d'entre vous qui en avez pris connaissance, c'est une étude qui touchait aussi bien les différentes allocations que le régime de retraite, que l'indemnité de base. Regarder le tout dans une perspective d'ensemble était certainement une de nos préoccupations. L'autre volet, c'est de le regarder dans une perspective un peu stratégique, c'est-à-dire essayer de comprendre quel est le travail d'un député et d'essayer de situer nos recommandations en fonction de cela.
En résumé - le ministre et certains des collègues, ici, en ont fait état - , notre recommandation a été de proposer une augmentation d'indemnité des députés de 64 000$ à 88 000$ et aussi accompagnée d'une réduction du régime de retraite, dont mon collègue pourra parler.
Alors, notre recommandation impliquait effectivement une augmentation de 6 p. 100 de la rémunération totale. Par ailleurs, connaissant la situation économique du pays et du gouvernement, nous avons suggéré que, si on avait à parler d'un gel, on parlerait d'un gel de la rémunération totale, ce qui pouvait impliquer malgré tout une augmentation du salaire de base.
Alors, je laisse maintenant la parole à mon collègue, Yvan, qui va vous parler plus particulièrement du régime de retraite.
M. Yvan Pouliot (coauteur du «Rapport sur la rémunération des parlementaires» présenté au président du Conseil du Trésor - 1994, Sobeco Ernst & Young): Du côté du régime de retraite, l'approche qu'on a prise, ce n'est pas à partir d'un régime déjà existant, mais de déterminer ce que vise un régime de retraite, quels sont les objectifs d'un régime de retraite, comment ça se conçoit.
Dans l'histoire ou la façon de procéder, un régime de retraite se bâtit sur la carrière d'un individu. Autrement dit, on épargne pendant sa carrière pour avoir une pension raisonnable à l'autre bout. La carrière d'un individu dure entre 35 et 40 ans. Alors, c'est comme ça qu'on peut arriver, dans la plupart des régimes de retraite, à un taux de 1,5 à 2 p. 100 du salaire, ce qui fait 40 ans, à 1,5 p. 100, ce qui donne 70 p. 100; 35 ans, à 2 p. 100, donne encore 70 p. 100. Alors, la pension se bâtit sur une carrière.
Peu importe si la personne a un, deux ou trois emplois, c'est un processus continuel. Alors, on a considéré la période où un député est en fonction comme étant une période d'emploi comme une autre. La personne qui est élue a dû se bâtir une pension pendant qu'elle travaillait avant. Et si elle cesse d'être élue relativement jeune, elle va pouvoir continuer à se bâtir une pension après.
Pour cette raison, on recommandait que le taux de pension qui est donné pendant qu'on est député soit le même taux par année de service que les meilleurs régimes de retraite accordent, c'est-à-dire 2 p. 100. Par exemple, je travaille 10 ans dans le secteur privé: j'accumule 20 p. 100. Je travaille 10 ans dans le secteur public: j'accumule encore 20 p. 100. Je travaille 10 autres années dans le secteur privé: j'accumule encore 20 p. 100, ce qui totalise 60 p. 100.
L'approche qu'on avait avec cette formule, c'est qu'on est 15 ans dans le secteur comme député. On se bâtit une pension qui prend 35 ou 40 ans à se bâtir dans le secteur privé ou même dans le secteur public du côté des employés. Alors, c'était la principale recommandation, c'est-à-dire de ramener le taux de pension à 2 p. 100, pour que ce soit une partie de la constitution de la rente de retraite finale à l'autre bout.
Parmi les autres recommandations, on suggérait de ne pas payer de pensions à un âge très jeune, de commencer à payer à compter de 60 ans, avec une possibilité à 55 ans, mais avec une pénalité, et de réduire le taux d'indexation à l'excédent de l'inflation sur trois, parce qu'il y a beaucoup de gens qui prétendent que tous les retraités sont capables d'absorber le premier 3 p. 100 d'inflation à cause du vieillissement, puis de la réduction des dépenses. D'ailleurs, vous vous souviendrez qu'à un moment donné, on l'a proposé pour la pension de sécurité de la vieillesse.
Ensuite, il s'agit de réduire la contribution à un taux habituel de 5 p. 100 et de prévoir le vesting immédiat ou les droits acquis, de sorte que celui qui est élu député pour une période de deux ou cinq ans, aura ce petit morceau de pension pour bâtir la pension totale de sa carrière. S'il siège comme député pendant deux ou cinq ans, il aura deux ou cinq ans de crédit.
Et enfin, parlons de la portabilité, de sorte que si, après deux, cinq ou 10 ans, je choisis de transférer la valeur de mes droits dans un autre régime de retraite, je peux le faire. Ces droits, qui sont des engagements de la part du gouvernement, sont transférables et n'impliquent aucun coût.
Le président: Merci. Monsieur Plamondon, est-ce que vous avez des questions à poser?
M. Plamondon: Non, je préférerais attendre plus tard.
Monsieur Silye.
[Traduction]
M. Silye: Merci, messieurs, d'être venus aujourd'hui.
Comme vous pouvez l'imaginer, j'ai déjà lu votre rapport très attentivement, et d'ailleurs, c'est en me fondant sur vos recommandations, que j'ai proposé à la Chambre qu'on étudie ce régime de pensions, car il est beaucoup trop généreux. Il est plaqué or. Sous sa forme actuelle, il l'est toujours.
Cela étant dit, il faut quand même savoir comment attirer de bons candidats... En utilisant tous les moyens que vous avez signalés plus tôt. Je sais que vous avez entendu le ministre dire ces mêmes choses.
Je voudrais reprendre certaines de vos recommandations et voir si vous, étant spécialistes en la matière, croyez que certains aspects du régime de pensions sont encore trop généreux ou si vous pensez autrement.
Je ne crois pas que les députés devraient toucher des indemnités non-imposables. Dans votre rapport, vous dites la même chose à propos de la transparence. Vous proposez la transparence et j'appuie cette idée. C'est en éliminant tous les avantages non-imposables des députés qu'on arrive à ce montant élevé. Si la totalité de notre rémunération était taxable, peu importe le montant, il faut quand même savoir que ça coûte sans doute beaucoup plus aux contribuables qu'ils ne s'en rendent compte.
Je vais vous lire ces chiffres et vous me direz ce que vous en pensez. Avec cette transparence, accompagnées de vos recommandations sur le régime de pensions, voici les différences qui existent encore.
Tout d'abord, vous proposez que l'indexation ne s'applique qu'au montant supérieur à 3 p. 100 d'inflation. Ce régime prévoit une indexation intégrale, ce qui veut dire que peu importe si l'inflation est de 1,5 p. 100 ou de 2 p. 100, elle s'appliquera.
Deuxièmement, vous recommandez un taux de 2 p. 100 pour le taux d'accumulation. Le régime prévoit encore un taux de 4 p. 100.
Troisièmement, vous recommandez un taux de contribution de 5 p. 100. En vertu de ce projet de loi, il est de 9 p. 100.
Il est clair que le ministre n'a utilisé qu'une partie de vos recommandations car vous aviez une recommandation équilibrée pour la rémunération totale.
Vous suggérez, et vous le dites dans vos recommandations au ministre, que si ces mesures étaient adoptées, qui ressemblent aux recommandations du Parti réformiste, la valeur d'indemnisation des régimes passerait de 44 p. 100 de la rémunération à 12 p. 100 pour les députés à la Chambre des communes. Cela ferait économiser bien sûr de l'argent aux contribuables.
Lorsque vous parlez d'un taux de cotisation de 5 p. 100 pour les parlementaires, supposez-vous que le gouvernement contribuera également 5 p. 100? Pouvez-vous m'expliquer cela, s'il vous plaît?
M. Pouliot: Je commencerai par les deux derniers propos sur le taux d'accumulation et les cotisations.
Il faut, bien sûr, qu'il y ait une relation entre le taux d'accumulation et les cotisations des participants si l'on cherche à partager le coût de la manière habituelle. Nous proposons un taux d'accumulation de 2 p. 100 et une cotisation de 5 p. 100. Si nous avions proposé un taux d'accumulation de 4 p. 100, nous aurions peut-être également suggéré une cotisation de 10 p. 100, car il faut tenir compte du coût global du régime et ensuite décider du partage entre l'employé et l'employeur. Certains employeurs paient le tout, d'autres la moitié, et d'autres ne paient même pas la moitié du coût. Voilà ce qui explique les écarts bizarres entre les moyennes.
Mais cela va de pair. La cotisation de 5 p. 100 n'était pas nécessairement payée à moitié par l'employé et l'employeur. Il s'agissait plutôt d'un régime à cotisation ordinaire de 2 p. 100 dans lequel la part de l'employeur était un peu supérieure. Mais pas supérieure de six fois.
Quant aux ajustements en fonction du taux d'inflation, j'ai abordé ce sujet dans mes remarques préliminaires. Il est raisonnable de préconiser une indexation à un taux inférieur à celui de l'inflation à l'intention des personnes à la retraite, car ils leur en coûte moins cher pour vivre. Comme elles sont à la retraite, elles n'ont pas à se rendre au bureau chaque jour. Plus tard, ces personnes vendent leur voiture car elles ne peuvent plus conduire. Il y a toutes sortes de choses comme cela. Certains disent également que, dans le cas des personnes à la retraite, il ne faut pas calculer l'inflation en fonction du coût de la vie tel que celui-ci est calculé par Statistique Canada, car ce calcul se fonde sur un panier de provisions pour une famille de deux adultes et de deux enfants. Nous ne savons donc pas quel est le taux réel d'inflation qui s'applique aux personnes à la retraite.
On pourrait démontrer que lorsque l'inflation est inférieure à 3 p. 100, les personnes à la retraite continuent quand même de faire des économies. Elles continuent de mettre de l'argent de côté pour leur vieillesse. Ce qui importe, c'est de les protéger contre l'inflation prohibitive, ou l'inflation de 10 ou 12 p. 100 comme on l'a déjà connue. Dans un tel cas, il faudrait qu'il y ait une augmentation de 8 ou 9 p. 100. Toutefois, la première tranche de 3 p. 100 devrait être à la charge des personnes à la retraite. Comme je l'ai dit dans mes remarques, cette même mesure avait été proposée à une certaine époque pour le Régime de sécurité de la vieillesse. Ce n'est donc pas nouveau.
M. Silye: J'ai deux autres questions à poser. Pourriez-vous me confirmer que, sur la base d'un salaire annuel, vous estimez à 28 400$ la partie de la rémunération totale des députés qui est versée au régime de pension?
M. Pouliot: Oui.
M. Silye: En outre, dans votre rapport, vous étudiez en détail certains des avantages que reçoivent les députés. Vous parlez du régime des 64 points, dont le but est de permettre aux députés de voyager aller-retour de leur ville jusqu'à leur bureau principal - qui se trouve ici à Ottawa. Toutefois, dans le paragraphe que vous consacrez à ce système de 64 points, vous faites remarquer que ce système a valeur de rémunération. Certains députés peuvent faire jusqu'à six voyages sans avoir à expliquer que c'est pour affaires pour le Parlement. Ils peuvent emmener leur famille, leurs enfants à charge et leur conjoint partout au Canada. Cela a valeur de rémunération. Vous estimez cette valeur à une somme de 4 000$ à 12 000$. Dans votre document, vous utilisez ce chiffre de 4 000$ plutôt que celui de 12 000$.
Dans un autre domaine, vous dites que l'indemnité de frais de 21 000$, non imposable... Pour accroître la transparence, il faudrait dans certains cas en faire un montant brut imposable. C'est du moins l'argument que vous faites valoir quant à la transparence. Pourtant, lorsque vous faites votre tableau total de la rémunération, vous accordez à cet élément une valeur nulle alors que vous savez qu'un grand nombre de députés vivent près d'Ottawa, touchent cette indemnité de 21 000$ et ne l'utilisent pas. Vous dites dans votre rapport que 40 p. 100 des députés se servent de cette somme et que 60 p. 100 ne l'utilisent pas, et vous lui accordez pourtant une valeur zéro dans votre tableau. Pourquoi accordez-vous à cet élément une valeur de zéro alors qu'il a une valeur? Pourquoi avez-vous utilisé le chiffre plus faible de 4 000$ plutôt que celui de 12 000$?
Vous m'avez confirmé que le régime de pensions a une valeur de 28 000$ par année, si le député est réélu.
M. Martel: Vous avez raison de dire que l'indemnité de déplacement, ou le régime des points, a une valeur potentielle. Nous avons estimé que cette valeur équivaut à une tranche de salaire de 4 000$.
Ce chiffre aurait pu être de 12 000$. Si un député utilise la totalité de l'indemnité qui est versée à ce titre pour ses enfants ou son conjoint et se déplace pour des raisons personnelles plutôt que pour le transit entre sa circonscription et Ottawa, il y a là une rémunération potentielle qui peut être estimée à 12 000$.
Toutefois, nous croyons que cette indemnité est tout à fait légitime. Si un député veut que sa femme ou ses enfants viennent à Ottawa, une partie de cette indemnité ne constitue pas une rémunération.
Nous avons donc estimé qu'un tiers de ce montant pourrait être considéré comme une forme de rémunération. Nous avons recommandé que le programme soit révisé de façon à ce qu'il n'ait pas valeur de rémunération. Il ne faut pas que les dépenses soient liées de quelque façon que ce soit à la rémunération, tout le monde comprend cela. Ce que nous recommandons, en fait, à l'égard de toutes les allocations, c'est qu'il ne doit y avoir aucun doute que le remboursement des dépenses n'a rien à voir avec la rémunération.
Pour ce qui est de l'allocation de 21 000$, après avoir interrogé un grand nombre d'anciens députés et de députés actuellement en fonction, nous avons constaté que, pour la plupart d'entre eux, cette somme n'a pas valeur de rémunération. Elle représente strictement le remboursement des frais qu'ils doivent payer à Ottawa pour y entretenir une résidence secondaire. Néanmoins, nous avons dit dans notre rapport que pour certains autres - 30 p. 100 environ - l'allocation a valeur de rémunération si le député ne dépense pas la totalité de cette somme.
D'une façon générale, nos évaluations montrent que l'allocation n'a pas valeur de rémunération, sauf pour certains députés. Nous avons recommandé également dans ce cas des changements au système de façon à ce que tous les Canadiens comprennent que cette allocation constitue le remboursement légitime de dépenses et qu'elle n'a pas valeur de rémunération. Dans l'ensemble, bien sûr, nous estimons qu'elle n'a pas valeur de rémunération.
Le président: Monsieur Duhamel, s'il vous plaît.
M. Duhamel (Saint-Boniface): Merci, monsieur le président. Good morning, gentlemen.
J'ai trois ou quatre questions à poser. Je les poserai toutes ensemble et je vous laisserai y répondre après.
Aux fins de cette discussion, supposons pour l'instant que la rémunération totale pour les députés soit de 150 000$ par année. Supposons également que cela soit conforme aux normes appliquées actuellement dans le secteur public: le taux de 2 p. 100 par année, etc. Pourriez-vous me dire si un salaire assorti de telles normes serait plus coûteux dans l'ensemble pour les contribuables que ce que propose actuellement le gouvernement?
Deuxième question. Selon un certain nombre de commentaires, environ la moitié des personnes élues députés - et vous pourriez préciser les chiffres - ne touchent jamais de pension. Autre chiffre que j'aimerais connaître, combien d'anciens députés touchent une pension maximale? D'après certains, ce chiffre est élevé. Je ne le crois pas. J'aimerais le savoir.
Il y a aussi autre chose que j'aimerais beaucoup savoir. Certains ont dit - mais peut-être ai-je mal compris - que si nous participions à un programme de REÉR, il n'en coûterait rien aux contribuables. Je crois savoir que c'est tout à fait faux. Pourriez-vous me dire si j'ai raison?
Enfin, on m'a dit qu'au cours de cette étude, nous examinerions également ce qui se fait ailleurs de façon à faire des comparaisons. Pour ce qui est de l'âge auquel les députés peuvent toucher une pension, quelle comparaison pourrait-on faire entre notre régime et ceux qui existent dans des pays comme la France, l'Angleterre, l'Italie, l'Allemagne et d'autres, ainsi qu'avec les régimes des provinces et territoires? Je sais qu'il y a des variables et que la comparaison n'est pas facile, mais faites de votre mieux.
Dans certains de ces pays ou ailleurs au Canada, existe-t-il aujourd'hui des régimes de pensions dans lesquels l'âge d'admissibilité - après avoir été élu - soit aussi avantageux ou plus avantageux que ce qui est proposé ici? Le nombre d'années de service et le taux d'accumulation sont-ils égaux ou meilleurs? Quelle comparaison peut-on faire au titre de l'indexation? Ce sont-là mes questions, monsieur le président.
M. Pouliot: Voilà une bien longue question.
Pour ce qui est du salaire de 150 000$, nous avons dit dans notre rapport que la rémunération totale d'un député est de 104 000$. Il me semble qu'un salaire de 150 000$ sera plus coûteux. Cela représente 50 000$ de plus, alors pourquoi étudier cette hypothèse? Tout le monde sait cela.
M. Duhamel: Mais si cela se limite strictement au salaire... pour la pension également?
M. Pouliot: Oh oui.
M. Duhamel: D'accord. C'est très important parce que...
M. Pouliot: Pour la pension, c'est très faible. Un taux de 4 p. 100 appliqué à une pension de 60,000$ est égal à un taux de 2 p. 100 appliqué à une pension de 120 000$.
M. Duhamel: Ce serait donc encore davantage pour un salaire de 150 000$?
M. Pouliot: Oui.
M. Duhamel: Donc, d'accord. La question suivante...
M. Pouliot: Nous n'avons pas établi de statistiques quant aux députés qui touchent une pension ou à ceux qui touchent une pension maximale. Nous avons étudié les aspects théoriques du régime de pension ou de la rémunération. Nous n'avons pas fait de calculs. Les fonctionnaires qui sont ici ont sûrement ces chiffres, mais nous, nous ne les avons pas.
M. Duhamel: Je les leur demanderai, alors.
M. Pouliot: Il y a eu toutes sortes de rumeurs au sujet du programme de REÉR. A mon avis, les gens confondent le REÉR avec un régime de cotisations partagées également entre l'employé et l'employeur. N'importe quel régime de pensions peut être payé moitié-moitié par les parties. Dans un REÉR, le partage des cotisations peut se faire n'importe comment. L'employeur peut verser un dollar pour chaque dollar versé par l'employé, ou alors un dollar pour chaque tranche de 50c. ou un dollar pour chaque tranche de deux dollars. Il n'existe pas de règle.
Le REÉR, c'est une autre façon de cotiser à une pension. Comme le ministre l'a dit, cette méthode ne permet pas de savoir quelle sorte de pension on pourra obtenir en fin de compte. Si les taux d'intérêts sont élevés au moment de la retraite, la pension sera bonne. Si les taux d'intérêt sont faibles, la pension sera faible également. C'est de cette façon que se calcule le montant des pensions par année de retraite. Comme actuaire des pensions, j'estime qu'il s'agit d'économies en vue de la retraite, mais pas d'un régime de pension.
C'est un peu comme si vous investissiez toutes vos économies dans votre maison. Peut être pourrez-vous la vendre pour trois fois sa valeur, peut être ne pourrez-vous la vendre qu'à la moitié de son prix. C'est comme cela.
M. Duhamel: Pour conclure, nous dites-vous qu'un programme de REÉR pourrait être moins coûteux ou plus coûteux que ce qui est proposé? C'est bien ce que vous dites?
M. Pouliot: Cela dépend du montant.
M. Duhamel: En ce qui a trait à l'argent des contribuables?
M. Pouliot: Ca dépend du montant versé. Si le député verse la même somme que dans le régime actuel, il profitera de la même déduction d'impôt. Votre employeur ne paie pas d'impôts, alors, quelle est la différence?
M. Martel: Votre dernière question porte sur les comparaisons internationales.
M. Duhamel: Les comparaisons avec les autres pays et avec les régimes provinciaux et territoriaux...
M. Martel: Je ne crois pas que nous puissions entrer dans les détails, mais dans notre rapport, il y a un tableau qui pourrait vous éclairer à ce sujet.
M. Pouliot: Nous avons dit dans notre rapport que le coût d'un régime de pensions pour les députés était 44,1 p. 100. Comparativement aux autres pays, le coût du régime canadien est de 53 p. 100 celui du régime australien. Dans ce calcul, nous n'avons pas utilisé les coûts pour l'Australie. Nous avons établi combien il en coûterait pour appliquer au Canada le régime qui existe en Australie. C'est ce qu'il en coûterait aux députés si ce régime était appliqué.
Au Royaume-Uni, le coût seraite 17 p. 100. C'est bien inférieur. En Belgique, il serait de 54 p. 100, en Suède, de 16 p. 100, en France, de 34 p. 100 et aux Etats-Unis, de 15 p. 100.
Pour ce qui est de la générosité des régimes, on constate que ceux du Royaume-Uni, de la Suède et des Etats-Unis ne sont certes pas plus généreux que ce qui est proposé maintenant. Il ne s'agit pas des coûts du régime américain aux Etats-Unis mais plutôt des coûts de ce régime s'ils s'appliquaient ici.
Nous avons également fait la comparaison avec les provinces dans ce même rapport.
Nous avons fait la comparaison avec l'Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique. Comme point de départ, nous avons utilisé le chiffre de 44 p. 100 au niveau fédéral. En Ontario, les coûts étaient de 46 p. 100, au Québec, de 32 p. 100 et en Colombie-Britannique, de 45 p. 100.
Pour répondre à votre question, donc, les modifications proposées auraient pour effet d'amener la valeur du régime fédéral à un niveau inférieur à celui des régimes de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, à peu près au niveau du régime du Québec.
M. Duhamel: S'il me reste encore du temps, j'aimerais demander quelques éclaircissements. Je suppose que vous n'avez pas de données sur l'âge d'accessibilité. D'après ce que je sais, cet âge est de 55 ans ou moins, dans un certain nombre de provinces et de territoires. Je me trompe peut-être. Il en est de même des années de service, dont le nombre est inférieur aux six années présentement nécessaires pour obtenir une pension.
Pour ce qui est du taux d'accumulation, je n'ai pas de chiffres.
Sur le plan de l'indexation, je crois savoir que les régimes des différents pays et celui du Canada comportent des dispositions importantes dans ce domaine. J'aimerais savoir s'il est possible de comparer ces différents éléments. Le régime fédéral est-il différent des autres quant à de telles mesures? Je crois savoir que non et c'est pourquoi je pose la question.
M. Pouliot: Nous avons bien des réponses à cela dans notre rapport, mais il s'agit de les trouver.
Parlons de l'admissibilité à la pension. En Australie, il faut avoir 12 ans de service ou être âgé de 60 ans. En Belgique et en France, la pension peut être touchée lorsque le député quitte le Parlement. En Suède, il faut six ans de service. Au Royaume-Uni, la pension peut être touchée lorsque le député quitte du Parlement et aux États-Unis, après cinq ans.
En France, il faut attendre d'avoir 55 ans pour toucher la pension maximale. Les députés qui quittent le Parlement avant n'obtiennent qu'une pension réduite. Au Royaume-Uni, où l'âge est très élevé, le nombre d'années de service plus l'âge doivent équivaloir à 80 ans. Donc, si vous quittez le Parlement à 40 ans, il vous faudrait 40 ans de service, ce qui est impossible. Autrement, vous pourrez toucher une pension réduite ou un équivalent de la valeur actuarielle. Cela signifie qu'il vous en coûtera autant que si vous travaillez pour obtenir votre pension à l'âge de 60 ou 65 ans. Tout cela se trouve à l'annexe IV de notre rapport.
M. Martel: Il s'agit au fond de comparer le régime actuel et la révision proposée. Certains pays ont des régimes plus généreux que les régimes actuels et proposés, d'autres moins.
M. Duhamel: Qu'en est-il des régimes provinciaux et territoriaux...
Le président: Non, non.
M. Duhamel: ...[Inaudible] ...point?
Le président: J'ai bien peur que vous...
M. Duhamel: Je dois terminer.
Le président: Les 10 minutes sont écoulées. Nous allons donner la parole à M. Plamondon.
M. Duhamel: Avez-vous la réponse à cette dernière question?
Le président: Eh bien, quelqu'un d'autre pourrait poser cette importante question.
Monsieur Plamondon.
[Français]
M. Plamondon: Rapidement, est-ce que le projet de loi C-85, déposé, est conforme à la philosophie de votre rapport et deuxièmement, est-ce qu'on peut étudier le régime de pensions des députés sans étudier la rémunération des députés?
M. Martel: Il est clair que notre rapport avait une orientation dite de rémunération globale. Ce qu'on a constaté, à l'analyse détaillée de chacun des programmes de rémunération des députés et des sénateurs, c'est qu'il est évident que chacun de ces programmes-là a été conçu à la pièce.
Notre mandat était de regarder le tout dans une perspective globale et dite stratégique, ce que nous avons fait, et nos conclusions nous amènent à proposer une réforme en profondeur de l'ensemble des dimensions du régime de rémunération des députés et des sénateurs.
Il est évident qu'en tant qu'experts de l'extérieur, on reste sur son appétit, si on établit la réforme du régime de retraite, sans apporter de modifications au programme des allocations de départ et sans établir de cohésion entre les divers éléments de la rémunération.
Nous sommes d'accord sur l'orientation générale donnée par le projet de loi, eu égard à la réduction de la valeur du régime de retraite. Par ailleurs, le fait qu'aujourd'hui nous étudions seulement le régime de retraite nous laisse sur notre faim en ce qui a trait à une des recommandations fondamentales de notre rapport, soit une réforme en profondeur du régime de rémunération comportant une augmentation de l'indemnité de base des députés.
M. Plamondon: Si le ministre avait exactement mis votre rapport en application, quelle économie aurait-il réalisée du point de vue des contribuables, comparativement à ce qu'il prétend avoir économisé? Il dit avoir économisé 33 p. 100 du coût du régime de retraite. S'il avait tenu compte de vos recommandations quant aux salaires et aux pensions, aurait-il économisé davantage? En avez-vous une idée approximative?
M. Nantel: De notre point de vue, nos recommandations ne comportaient pas de réductions ou de diminutions des coûts de rémunération. Au contraire, nos recommandations, au point de départ, entraînaient une augmentation de l'ordre de 6 p. 100 de la rémunération totale des députés.
Nonobstant la situation financière du gouvernement, qui est certainement un élément important à prendre en considération pour prendre une décision judicieuse, nous recommandions au contraire, en tant que conseillers de l'extérieur, une augmentation de l'enveloppe de rémunération des députés de l'ordre de 6 p. 100, de sorte que, si aujourd'hui le ministre présentait une loi qui ferait baisser le coût de la rémunération d'environ de 5 ou 6 p. 100, soit de trois millions de dollars, il est évident que cela irait à l'encontre de nos recommandations.
Nos recommandations, je le répète, sont basées sur le fait que nous pensons que les députés canadiens ne sont pas assez rémunérés.
M. Plamondon: Votre recommandation portant sur l'âge de 60 ans me surprend, si je la compare aux normes des provinces canadiennes: 50 ans en Nouvelle-Écosse, au moins 50 ans ou un total de 65 ans au Québec, 55 ans en Ontario, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan, l'âge et les années de service égalant 60 ans à Terre-Neuve, ce qui permettrait à la rigueur de prendre sa retraite à 40 ou à 45 ans. Comment et pourquoi en arrivez-vous à établir l'âge de la retraite à 60 ans plutôt qu'à 55 ans?
M. Pouliot: Je reviens sur ce que j'ai dit dès le début. Selon l'approche que nous avons suivie, un régime de retraite doit se constituer sur une certaine période de temps. Dans le secteur privé, les gens prennent leur retraite à 65 ans, en général. Il arrive que certains privilégiés puissent le faire à 60 ans.
Comme le régime de retraite du député dépend en partie de l'accumulation d'une rente totale, pourquoi celle-ci serait-elle payable à 55 ans ou à n'importe quel autre âge si elle a été constituée, avant ou après l'élection du député, en fonction de l'âge de 65 ans?
Personne n'a les moyens de se constituer une rente encaissable à partir de l'âge de 55 ans.
M. Plamondon: Comparons, par exemple, avec ce qu'était ma situation personnelle avant de devenir député. J'étais professeur et j'étais en affaires. J'aurais touché ma pension de professeur à 55 ans. Comme homme d'affaires, je pouvais très facilement me constituer un fonds de pension qui m'aurait permis de quitter mon travail à 50 ans ou à 55 ans. Mon plan de carrière, en tenant compte de mes trois sociétés, me permettait de tout liquider à 53 ans et de me retrouver avec un fonds de pension beaucoup plus généreux que ce qu'on m'offre.
Si, par contre, je n'avais été que professeur, j'aurais pu quitter mon travail à 55 ans en touchant une pension complète, soit égale à 70 p. 100 de mon salaire. Dans les secteurs public et semi-public, l'âge de 55 ans s'applique dans énormément de cas.
Il me semble qu'il y a un élément que vous n'avez pas pris en considération : la durée moyenne du travail d'un député est très courte.
Avant 1984, la probabilité était de 5,5 années. Actuellement, elle est un peu plus longue, parce que les gouvernements ont été majoritaires trois fois de suite.
Pourtant, dans votre rapport, vous dites clairement que plus que 50 p. 100 des députés vivent des situations très difficiles, après avoir été députés. Il leur est difficile de se repositionner parce que, justement, le fait d'avoir été député, loin de les aider à se trouver un autre emploi, leur nuit, au contraire. Ce qui est l'opposé dans le cas d'un ministre qui se voit aidé par son passé de ministre.
Dans le cas des députés, leur passé leur nuit. Vous le dites dans votre rapport. Vous parlez des difficultés financières que connaissent les députés. La plupart d'entre eux mettraient un an à se trouver un autre emploi, si leur emploi précédent ne leur a pas été garanti par un congé sans solde, par exemple.
Donc, tout cet aspect dont vous avez parlé, vous y semblez peu sensible lorsque vous établissez l'âge de la retraite dans votre recommandation.
M. Pouliot: Notre rapport contient, par ailleurs, une recommandation d'indemnité de départ beaucoup plus importante que celle qui existe actuellement. Vous avez mentionné vous-même qu'il faut une année pour se replacer. L'indemnité de départ proposée couvrirait au moins une année. C'est là que réside, selon nous, le véritable besoin plutôt que dans le paiement d'une rente d'un montant x par année, qui serait relativement minime. Après seulement six ans, elle pourrait n'être que de 30 p. 100 du salaire, soit de 18 000$ par année, pour le reste de la vie. Une personne dans ce cas a bien davantage besoin de 60 000$ pour l'année à venir que de 18 000$ pour le reste de ses jours.
M. Martel: Si vous me le permettez, j'ajouterai qu'en examinant la structure du régime actuel de retraite, nous voyons qu'il a été conçu exactement pour les raisons que vous avancez, comme filet de sécurité en cas de départ.
Or, notre thèse est à l'effet qu'un régime de retraite n'est pas un filet de sécurité. Un régime de retraite doit préparer les gens à la retraite. Le levier par lequel on doit sécuriser la transition de carrière d'un député et d'un sénateur, c'est par son allocation de départ, qui utilise les fonds de l'employeur de façon beaucoup plus judicieuse. Il est beaucoup moins coûteux pour un employeur de donner une allocation de départ couvrant une année que d'accorder à vie un régime de retraite de 20 000$, lequel ne correspond pas aux besoins.
Vous remarquerez ce que dit aussi notre rapport: lorsqu'un député se trouve à nouveau un emploi après une année, sa situation est bien plus avantageuse que lorsqu'il était député. Nous avons là la preuve qu'il n'a pas besoin de ce régime de retraite, une fois qu'il s'est trouvé un emploi. Le député se trouve dans une situation difficile pendant cette période d'un an qui suit son départ du Parlement. C'est à ce moment-là qu'il a besoin de l'aide financière de son employeur, non pas sous forme de régime de retraite, mais sous forme d'une allocation de départ généreuse, mais pas plus généreuse qu'ailleurs.
Notre recommandation prévoit, comme Yvan le disait, une allocation de départ pouvant aller jusqu'à un an et élimine cette allocation dans le cas de ceux qui bénéficient d'une clause de retour au travail, ce que nous considérons trop généreux.
Donc, selon nous, régime de retraite, allocation de départ et rémunération de base forment un ensemble qui doit être examiné dans une perspective globale.
M. Plamondon: Je vais terminer par la question suivante: L'allocation de départ dont vous parlez est-elle indépendante du fait que la personne se soit trouvé ou non un emploi?
M. Martel: Justement pas. Nous avons vu qu'il y a, je crois, quelque 20 p. 100 des députés qui ont un contrat de travail implicite ou explicite avec leur ex-employeur. Nous disons que la personne qui retourne à son ancien emploi ne devrait pas toucher une allocation de départ. Elle n'y est pas admissible.
Une allocation de départ, c'est une sorte d'assurance. Nous disons que l'allocation de départ doit être versée uniquement à celui qui en a besoin. Donc, celui qui trouve un emploi après trois semaines, ou encore après un ou deux mois, ne touche pas d'allocation de départ. Ce n'est pas le but de l'exercice. Sinon, c'est être trop généreux, c'est jeter l'argent par les fenêtres comme employeur.
M. Plamondon: Merci.
Le président: Merci, monsieur Plamondon. La parole revient maintenant à Mme Parrish.
[Traduction]
Mme Parrish: Merci beaucoup.
J'ai lu votre rapport avec grand intérêt. Vous avez parlé entre autre du manque d'estime des gens à l'égard des hommes politiques depuis une quinzaine d'années, et ce, partout au pays. Malheureusement, les diatribes du genre que nous devons écouter ces jours-ci n'arrangent pas beaucoup les choses.
Vous avez parlé d'un régime comparable au régime enregistré d'épargne-retraite. Votre collègue a dit qu'un tel régime est très sensible aux fluctuations des taux d'intérêt d'une année à l'autre.
Je m'inquiète également d'un autre aspect d'un tel régime et j'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. Ce régime créerait deux catégories distinctes de députés: ceux qui peuvent se permettre de contribuer 13 500$ par an à leur REÉR et ceux qui arrivent tout juste à payer leurs hypothèques et à se remettre d'une longue campagne électorale. Je me trouve dans cette dernière catégorie. Ne risque-t-on pas de créer deux classes de députés: ceux qui peuvent bien planifier leur retraite, et ceux qui ne peuvent le faire à cause de moyens limités une fois élus?
M. Pouliot: Cela pourrait être vrai s'il n'y avait pas de régime de pensions et si on vous demandait de prendre l'initiative de contribuer à votre propre REÉR. Mais s'il s'agit d'un REÉR auquel cotisent tant l'employeur que l'employé, c'est-à-dire auquel vous pourriez contribuer vos 9 p. 100, ou tout autre pourcentage, et auquel le gouvernement contribuerait également 9 p. 100, le problème que vous avez mentionné ne se présenterait pas parce que vous n'auriez pas le choix. Par contre la difficulté se présenterait en l'absence d'un régime de pension.
Mme Parrish: Il est question dans certaines assemblées législatives provinciales de la totalité des contributions à un REÉR, et il appartient au député de prendre la décision. Mais cela ne place-t-il les intéressés à la merci du ministre des Finances qui peut décider de son propre chef - et je ne possède aucun renseignement d'initiés - de faire passer la contribution maximale de 13 500$ à 7 000$ l'année prochaine?
M. Pouliot: C'est possible, mais ce n'est pas là que se situe le danger. Le vrai danger, c'est qu'avec un tel régime facultatif on peut contribuer ou non. Un bon nombre ne vont pas contribuer au régime, ou ils y contribueront pour ensuite retirer les sommes déposées pour acheter une maison, une voiture, ou faire un autre type d'achat. Je ne me souviens pas du montant annuel des retraits, mais il est très impressionnant.
L'obligation de participer doit être l'un des éléments d'un régime de pensions; sans cet élément le régime ne sert à rien.
Mme Parrish: S'il appartient à chacun de décider de participer ou non à un REÉR, ne risque-t-on pas de voir que certains se retrouveront complètement démunis du fait de ler choix?
Si j'ai bien compris, quand vous dites dans votre rapport que les salaires sont faibles et que les pensions sont généreuses, il me semble que vous dites que nous ne sommes pas suffisamment rémunérés actuellement. Par conséquent, la part que le gouvernement contribue à nos salaires est élevée mais les prestations de retraite ne sont pas nécessairement généreuses.
Les gens supposent, compte tenu des salaires modestes que nous recevons, qu'on nous offre un régime de pension généreux afin de nous apaiser.
Là encore, ce n'est pas le résultat de ce dont nous avons parlé. Etant donné que les salaires ne sont guère généreux, nous sommes bien forcés d'améliorer nous-mêmes nos pensions. Par conséquent, le gouvernement doit nous apporter une contribution.
Ce n'est pas parce que les salaires sont trop faibles qu'on nous accorde, en conséquence, des prestations de retraite très importantes après 20 ans. Ne serait-il pas plus exact de dire que les salaires sont faibles, que nous ne pouvons pas contribuer des sommes plus fortes et que, par conséquent, la contribution du gouvernement doit être plus élevé?
M. Pouliot: Que 40 p. 100 de votre salaire aille à un régime de pension, il s'agit toujours d'une dépense. C'est un coût qui ne disparaît pas. Comme quelqu'un l'a déjà fait remarquer, le fait que le gouvernement n'ait pas de fonds ne change rien au coût. Si votre salaire était augmenté de 44 p. 100 et si vous n'aviez pas de régime de pensions, le coût demeurerait le même pour le gouvernement. Il y a donc que d'autres raisons politiques qui justifient les faibles salaires, mais je vais m'abstenir d'en parler.
Mme Parrish: Si les REÉR devenaient un élément du régime de pensions, ce qui est le cas pour certains gouvernements provinciaux, ne courrons-nous pas le risque d'être accusés de maintenir le maximum des contributions à un niveau élevé pour l'ensemble de la population de façon à ce que nos propres régimes de pensions soient protégés? Je sais que vous n'iriez pas dire des choses si odieuses mais d'autres le feraient.
Finalement, je voudrais parler de la transparence et de la responsabilisation. Incidemment, je signale que je suis d'accord avec M. Silye qui estime que le régime devrait être plus transparent. Je crois que la notion même d'allocation exempte d'impôt est un moyen de rouler le public ou de se cacher derrière toutes ces petites catégories.
À mon avis, le public veut savoir combien gagne un commissaire scolaire, un conseiller municipal, un député à une assemblée législative provinciale, ou un député fédéral.
À Toronto, un conseiller municipal touche 63 856$ par an...
Une voix: Oh!
Mme Parrish: ...dont un tiers est exempt d'impôt. Et ils peuvent rester chez eux avec leurs enfants et leurs familles.
Ils reçoivent également 17 025$, une allocation de dépenses non-imposable ainsi que des indemnités de kilométrage illimitées. D'après mes estimations limitées, à la mesure où nous ne bénéficions pas d'une portion non-imposable de nos 64 000$, un conseiller municipal local qui ne quitte jamais sa ville est payé plus que moi. Il est impossible de comparer ces deux salaires.
Le président: Madame Parrish, veuillez poser votre question.
Mme Parrish: Lorsque l'on examine les salaires des députés, si l'on envisage toute la notion des politiciens, avez-vous pensé à abandonné tous ces avantages non-imposables et à recommander que chacun paie directement ses dépenses et aie un salaier fixe?
M. Martel: Nous estimons qu'il faudrait totalement éviter le concept des avantages non-imposables. Nous avons dit que si c'est un salaire, il doit être imposable. Si c'est une dépense justifiée, c'est tout comme ma présence aujourd'hui, elle sera remboursée. Si je vais voir d'autres clients, mon employeur me le rembourse.
Le concept que nous avons proposé est absolument le même. Il ne doit y avoir aucune confusion sur le fait de savoir si les 21 000$ représentent un salaire ou non. À notre avis, ce n'est pas un salaire, mais il l'est pouir certains car il n'a pas été désigné comme il convient. En apportant quelques modifications mineures, on préciserait bien clairement que votre salaire de député est de 64 000$, un point c'est tout.
Pour le moment, on ne sait pas très bien s'il s'agit de 100 000$ ou de 64 000$. Je pense que c'est un problème car, selon nous, ce que confirment les différentes enquêtes que nous avons menées et les contrôles que nous avons faits, la plupart des gens estiment que cette allocation non-imposable est en fait utilisée pour venir vivre à Ottawa. Ce sont des dépenses qui ne devraient pas être utilisées comme un salaire.
Mme Parrish: Merci.
Le président: Monsieur Harper.
[Français]
M. Harper: Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs Pouliot et Martel, de votre présence parmi nous aujourd'hui.
[Traduction]
J'aimerais vous poser quelques questions. Premièrement, je dois dire que j'apprécie votre rapport. Je ne suis pas d'accord avec tout ce que vous dites ni avec la méthodologie, mais je pense qu'il est très réfléchi.
J'aimerais faire une observation au sujet des pensions. Nous allons être très clairs et passer rapidement pour que personne n'ai du mal à comprendre les questions. Ce que vous proposez por les régimes de retraite dans votre plan est nettement moins généreux que ce qui est proposé dans le projet de loi C-85. C'est exact. S'il y avait une contribution gouvernementale de 9 p. 100 à un régime de type privé à partir du salaire courant, cela serait également nettement moins généreux que ce que prévoit le projet de loi C-85. Est-ce exact?
Dans le cadre de votre étude, vous avez demandé l'opinion de la National Citizen Coalition, la Fédération canadienne des contribuables et certaines autres associations. Pourquoi?
M. Martel: Nous pensions à ce moment-là que ces gens avaient fait de nombreuses autres représentations auprès du gouvernement. On nous a demandé de les rencontrer et de faire des entrevues. C'est essentiellement la raison.
M. Harper: Ont-ils apporté une contribution utile?
M. Pouliot: Je pense que nous n'avons obtenu qu'une opinion écrite sur laquelle nous avons fait des observations dans notre rapport. Je ne peux pas vous donner la page, mais cela a été fait à la fin de 1993, c'est pourquoi je ne me rappelle plus très bien. Il nous a été au moins utile de savoir ce qu'ils pensaient.
M. Harper: Je suppose que vous avez également organisé des groupes de réflexion et envoyé des questionnaire à certains membres du public.
M. Martel: Non, nous l'avons fait avec des députés et des anciens députés, mais pas dans la population.
M. Harper: Vous avez organisé des groupes de réflexion avec des députés. Vous n'avez donc pas demandé l'opinion de la population.
Les parties sur la rémunération m'ont posé quelques problèmes. Vous concluez que les députés devraient recevoir un certain montant, calculé ntamment sur leur propre contribution et la contribution des anciens députés, en fonction de la façon dont ils ont évalué leur emploi et de la façon dont vous évaluez l'équivalence avec les secteurs privé et public. Par exemple, vous avez pris en compte le nombre d'heures. Vous avez dit que, à votre avis, un député moyen travaille combien d'heures par semaine ou par mois?
M. Martel: Je ne me rappelle pas, mais c'est environ 60 à 70 heures par semaine.
M. Harper: C'est 60 ou 70 heures. Vous avez recommandé que l'on verse un salaire supplémentaire considérable au ministre. Cela veut-il dire que les ministres travaillent encore plus d'heures que ces 60 et 70 heures? Travaillent-ils encore 60 et 70 heures en tant que députés?
M. Martel: Nous ne sommes pas rentrés dans les détails. Tout ce que nous savons c'est que lorsque nous avons fait l'enquête auprès de députés et leur avons demandé combien d'heures ils travailaient, que la Chambre siège ou non, ces heures semblaient très longues. Je n'ai pas fait une ventilation des heures travaillées par le ministre au sein du groupe des députés. Dans cette étude, les ministres étaient essentiellement considérés comme des députés. C'est pourquoi je n'ai pas...
M. Harper: Donc vous n'avez pas essayé d'évaluer l'efficacité et la nécessité de ce nombre d'heures?
Cela me pose un problème. Laissez-moi vous raconter une anecdote, pour citer mon père. Lorsque Kim Campbell était candidate à la direction du Parti conservateur et que nous connaissions tous ces problèmes à la Défense et en Somalie, elle a été beaucoup critiquée. Elle ne semblait pas être à la hauteur et on a dit qu'elle ne faisait pas son travail, qu'elle devrait abandonner sa candidature et retourner à ses fonctions de ministre.
Elle a répondu qu'elle faisait son travail. Mon père m'a dit à cette époque-là que, bien entendu, cela ne pouvait pas être un emploi à temps plein.
C'est ce qui m'étonne. Comment peut-on dire que l'on travaille 60 à 70 heures à titre de député alors qu'un ministre prétend travailler des heures supplémentaires en plus de ce montant outre ses déplacements et quand même se porter candidat à la direction du parti ou autre chose encore?
Je n'essaie pas de critiquer outre-mesure votre rapport car je crois qu'il est largement valable, mais je crois que ce genre de questions doit être examiné avec plus de soins. Peut-être avons-nous besoin d'une évaluation sur le terrain de ce que les gens font exactement et de la valeur de ce travail.
M. Martel: Ce sont des questions que nous abordons, que ce soit en faisant une étude à la Banque de Montréal ou ailleurs. Nous cherchons à avoir une évaluation et une analyse totalement exactes de ce que les gens font et si leur travail est justifié.
Lorsque nous comparons le nombre d'heures que les anciens députés qui travaillaient ici il y a 15 ou 20 ans nous ont mentionnées et le nombre d'heure données par les députés actuels, peut-être vous-même, il est intéressant de voir que les chiffres correspondent exactement. Cela m'incite à penser que les chiffres doivent être exacts en ce qui concerne le nombre d'heures pendant lesquelles travaillent les députés.
Le président: Une autre brève question, monsieur Harper.
M. Harper: D'accord. Lorsque vous avez fait des comparaisons internationales des pensions ou autres choses - et d'après votre témoignage cela varie très largement; il y a en fait d'énormes écarts - avez-vous essayé d'évaluer les raisons de ces écarts? S'agit-il de chiffres arbitraires, y a-t-il des facteurs culturels qui ont à voir avec le rôle d'un législateur dans ces pays ou faisiez-vous simplement des comparaisons statistiques?
M. Pouliot: Nous savons pourquoi par exemple le régime de retraite d'un certain pays est beaucoup moins généreux que celui du Canada mais nous ne connaissons pas le contexte. Nous ne savons pas comment ils en sont arrivés là. Nous avons simplement examiné le régime et analysé ce qu'il en coûterait ici pour avoir ce régime.
Le président: Monsieur Pickard, avez-vous... une ou deux questions seulement?
M. Pickard: Oui. Merci monsieur le président. J'espère avoir suffisamment de temps. D'après moi, nous devons examiner tout cela dans son contexte.
Je pense que votre rapport est excellent. Je l'ai parcouru et je trouve que vos recommandations sont très bonnes.
Il est certain que certaines choses ne sont pas exactement telles qu'elles devraient l'être. Vous avez notamment suggéré que l'indemnité de déplacement de 21 000$ devrait être réduite de 8 000$.
On pourrait apporter bien des changements, mais à la suite de votre évaluation, vous en êtes arrivés à la conclusion que les députés du Parlement sont légèrement sous-rémunérés. Cela tient compte de tous les avantages, salaires et autres facteurs. Dans ces conditions, vous avez recommandé une augmentation de 6 p. 100, une augmentation que les contribuables devraient assumer.
Dans un monde parfait, il est certain que cela serait facile à faire, mais malheureusement nous ne vivons pas dans un monde parfait. Nous en sommes très loin. Il y a des gens qui travaillent pour le gouvernement fédéral et qui n'ont pas eu d'augmentation de salaire depuis cinq ans. Il y a des députés dont le salaire n'a pas augmenté depuis cinq ans.
Nous avons un système qui n'accepterait absolument pas un changement général, en particulier s'il entraînait une augmentation de 6 p. 100 de la rémunération des députés. Que cela soit juste ou non, c'est inacceptable. Il y a la question de ce qui est acceptable et de ce qui ne l'est pas, ainsi qu'un élément d'équité.
M. McWhinney: Question?
M. Pickard: Je suis désolé, je ne pense pas que vous devriez m'interrompre. Je dispose de cinq minutes...
M. McWhinney: Je pense que je dois interrompre. C'est une question théorique.
M. Pickard: C'est un argument.
M. McWhinney: J'invoque le Règlement.
Le président: Je suis sûr que beaucoup de députés souhaitent poser des questions et je vous demande instamment d'utiliser votre temps pour la poser au lieu de faire des observations. Nous aurons l'occasion de le faire plus tard, je demande donc instamment aux députés de poser des questions.
M. Pickard: L'argument que je présentais avec cette question est très important pour tous les députés et tous les contribuables. Nous devons envisager un système équitable.
Il est certain que les propositions actuelles du ministre ne contribuent pas à ce que vous jugeriez équitable. Je ne sais pas au juste ce que représente pour les députés une diminution de coûts du gouvernement de 3 millions de dollars, mais il me semble évident qu'avec un chiffre global, on diminue considérablement le montant brut que le gouvernement paie à ses députés.
Disons que votre recommandation est de 6 p. 100, une réduction supplémentaire de 6 p. 100. Pour le moment, nous ne traitons que des pensions. Il serait tout à fait injuste de voir là une recommandation équitable si nous revenons à 2 p. 100 sans apporter les autres redressements que vous avez suggérés dans votre rapport.
Je suppose alors que les intentions du ministre qu'il a exprimées dans ses promesses électorales, et celles que le ministre exprime dans ses propositions de rémunération aux députés tiennent davantage compte du contribuable que ne le ferait une étude indépendante. C'est la preuve que nous nous dirigeons vers une diminution des coûts pour le contribuable. Je pense que c'est un point très important et j'aimerais que vous me répondiez à ce sujet.
M. Pouliot: Tout ce que je peux dire, c'est que cela ne faisait pas partie de notre mandat. C'est le problème du gouvernement et non celui des consultants. On nous a demandé de déterminer ce que doit être la rémunération des députés, compte tenu des autres rémunérations. C'est ainsi que nous en sommes arrivés à 88 000$.
Mais si pour d'autres raisons, vous estimez que cette somme est trop élevée, nous ne pouvons rien y faire. C'est votre décision.
Le président: Merci beaucoup. Je pense que cela met fin au temps prévu pour l'exposé et les questions à ces témoins. Je veux vous remercier tous les deux d'être venus aujourd'hui et je vous remercie des réponses que vous avez données au comité.
Un témoin: Merci.
Le président: Notre prochain témoin est Robert Fleming de Robert Fleming international Research Inc.
Monsieur Fleming, si vous voulez bien prendre place à la table, vous pourrez commencer votre exposé. J'ai remarqué que vous avez distribué un document aux membres du comité. Je tiens à vous accueillir, monsieur, et vous remercier d'être venu. Si vous voulez faire des remarques liminaires, la parole est à vous.
M. Robert J. Fleming (président, Robert Fleming International Research Inc. et éditeur de la publication Canadian Legislatures): Merci beaucoup de m'avoir invité à comparaître devant vous. Ce n'était pas mon idée mais celle de quelqu'un d'autre. Donc je ne représente pas de groupe d'intérêt particulier. Je peux simplement vous parler de mon expérience des 16 dernières années au cours desquelles j'ai examiné l'état de l'administration des assemblées législatives du Canada, y compris le Sénat et la Chambre des communes. Je publie un volume, intitulé Canadian Legislatures depuis 1979.
Je ne sais pas si je devrais lire rapidement mon mémoire - je ne sais pas - mais je vais peut-être commencer par là. Mais j'aimerais dire qu'il est presque impossible pour un particulier, même un particulier qui connaît aussi bien que moi la Chambre des communes et le système en général, d'obtenir des renseignements pour faire des recommandations informées. Il y a peut-être des erreurs dans le document qui vous a été remis, mais cela est dû au fait qu'aux deux appels téléphoniques que j'ai fait à la Chambre des communes, on m'a dit que toute la question de l'âge et des années de service des députés était confidentielle.
J'aimerais dire pour mémoire que cela est tout à fait ridicule. Mais cela veut dire que j'ai dû faire ma propre recherche à l'aide de mon propre personnel, pour établir l'âge et les années de service des 295 députés. Je l'indique pour mémoire. Une des personnes que j'ai appelée était un employé du bureau du greffier.
Le gouvernement et divers autres organismes se sont donné beaucoup de mal pour essayer d'expliquer le régime de prestations de retraite actuellement en vigueur pour les députés ainsi que les modifications proposées qui suivraient l'adoption du projet de loi C-85. Mais le système est devenu si compliqué au cours des années qu'il est presqu'impossible pour la plupart des gens, qu'ils appartiennent au gouvernement ou non, de le comprendre.
Il est très difficile d'essayer d'évaluer les propositions présentées dans le projet de loi C-85. Au mieux, elles semblent être un ensemble bigarré qui cherche à apaiser certains membres du public, les médias et la Chambre des communes elle-même qui exige que le régime des prestations de retraite des députés et des sénateurs corresponde davantage à ce que l'on considère généralement comme étant des prestations de retraite acceptables en 1995.
Un examen attentif des années de service des députés et des résultats des élections au cours de la dernière décennie montrent que la scène politique fédérale est très instable. Le Parlement est un lieu de travail aléatoire et précaire, mais la même chose est vraie du reste du Canada.
Il faut un minimum de six années de service pour qu'un député ait droit à recevoir une pension. Notre analyste indique que sur les 295 députés siégeant au Parlement, 95 seront admissibles cette année. Le groupe comprend 80 Libéraux, 7 NPD, 4 Bloc québécois, 1 Conservateur, 1 Réformiste et 1 député indépendant.
Le fait que 81 députés sont Libéraux et que seulement 14 appartiennent à d'autres partis donne à penser que le gouvernement doit faire preuve de beaucoup de prudence et de sagesse en présentant ce projet de loi. C'est un domaine qui est devenu un sujet politique particulièrement délicat dans tout le Canada.
Vingt et un des 95 députés ayant droit à une pension de retraite ont servi pendant plus de 15 ans. Si ces députés décident de prendre leur retraite, ils recevront une pension maximum non réduite calculée sur 75 p. 100 de la moyenne des gains de leurs six années consécutives de rémunérations les plus élevées. Ils toucheraient cette pension immédiatement.
Le projet de loi C-85 prévoit que les députés de la Chambre des communes ou les sénateurs doivent, à l'avenir, avoir au moins 55 ans pour pouvoir recevoir les pensions de retraite. Selon nos calculs, seulement 10 députés sur 21 ayant actuellement droit à une pension répondraient à ce critère. Mais ces députés et tous les autres qui ont droit à recevoir les pensions de retraite bénéficient de la règle des droits acquis. Dans leur cas, l'exigence relative à l'âge de 55 ans ne s'applique qu'à la partie du revenu gagné au cours des années suivant la sanction royale du projet de loi.
L'âge des 21 députés qui ont droit aux prestations de retraite maximums va de 40 ans pour l'honorable Brian Tobin à 65 ans pour l'honorable Charles Caccia. M. Tobin est député depuis 15 ans; M. Caccia, d'après nos calculs, l'est depuis 27 ans. M. Tobin pourrait toucher une pension de retraite maximum d'environ 60 000$ à 65 000$ en fonction de son âge et de ses années de service, s'il décidait de prendre sa retraite aujourd'hui.
Le haut de l'échelle est occupé par le premier ministre qui pourrait recevoir une pension de retraite immédiate d'environ 100 000$ en fonction de sa rémunération de député, d'ancien chef de l'opposition et de premier ministre. Je crois qu'il pourrait recevoir également d'autres émoluments; il me semble que le chiffre tourne autour de 45 000$.
La proposition figurant dans le projet de loi C-85 voulant que les pensions de retraite ne soient pas versées aux députés avant qu'ils atteignent l'âge de 55 ans permettrait d'économiser des fonds mais le projet de loi établit un système à deux niveaux qui permet à environ 30 députés élus avant 1987 de retenir la plupart, sinon la totalité, de leurs prestations de retraite actuelles.
Cela ne serait pas un obstacle pour un grand nombre de députés prenant leur retraite et recevant leur pension immédiatement au lieu d'avoir à attendre jusqu'à l'âge de 65 ans. Par contre, les députés récemment élus et les futurs députés devront faire des sacrifices importants, l'équité de cette mesure est douteuse.
Le fait d'abaisser le taux d'accumulation des prestations de 5 p. 100 par an à 4 p. 100, comme le propose le projet de loi, signifierait qu'un député qui prend sa retraite après le minimum de six années de service recevrait une pension correspondant à 24 p. 100 de son salaire annuel moyen ou une indemnité de 64 400$ qui se traduirait par une pension de retraite de 15 450$.
Cela représente toujours un montant deux fois supérieur aux dispositions d'autres régimes de retraite au Canada. Mais je crois comprendre d'après une entrevue avec les médias à l'extérieur, que les responsables des finances estiment qu'il existe des régimes de retraite qui sont aussi favorables.
Si le taux d'accumulation de 4 p. 100 était ramené à 3 p. 100, les députés recevraient une pension de 18 p. 100, soit 11 600$ par an, ce qui est encore beaucoup plus que les meilleures prestations accordées aux groupes de plus en plus restreints des gens ordinaires régis par des régimes de retraite.
Contrairement à certaines provinces comme l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard - je pourrais parler plus précisément des trois premières, où l'on s'efforce de simplifier et de remanier les régimes de retraite des députés, les dispositions du projet de loi C-85 telles qu'elles existent actuellement ne réussiront pas à convaincre les Canadiens que le gouvernement fait un effort sérieux pour modifier la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires de façon à tenir compte de leurs préoccupations.
De nombreux députés justifient ce régime de retraite «riche» selon n'importe quel critère en disant qu'il compense leur salaire, qui est passé de 46 400$ en 1982 à seulement 64 400$ en 1995. Je peux comprendre ce point de vue.
Mais le fait est que la question du traitement équitable est appropriée des pensions de retraite des députés ne peut être résolue sans d'abord s'attaquer au problème général de la rémunération. Il faut un examen approfondi, réalisé par un organisme extérieur, de toute la structure de la rémunération, des avantages et des allocations des députés, telle qu'elle existe actuellement, afin d'apporter des changements qui soient justes pour les députés et que ceux qui les ont élus comprennent et acceptent.
Ces questions importantes doivent être étudiées à l'extérieur de l'arène politique par un groupe représentatif de personnes compétentes, y compris plusieurs députés. Je sais que cela se fait déjà dans certaines provinces, et plus récemment en Saskatchewan.
D'ailleurs, je crois personnellement que si des personnes de l'extérieur devaient examiner la situation de votre programme de rémunération, vous en arriveriez à un résultat beaucoup plus intéressant que celui dont vous bénéficiez actuellement et vous auriez en plus la confiance des contribuables canadiens.
Merci beaucoup, monsieur le président
Le président: Merci beaucoup, monsieur Fleming.
[Français]
La première série de questions commencera avec M. Plamondon, s'il vous plaît.
M. Plamondon: Merci, monsieur Fleming. Vous avez énoncé plusieurs principes et fait une critique du projet de loi C-85. Dans l'étude que vous avez faite sur l'ensemble des régimes des provinces, est-ce que le projet de loi est comparable aux régimes qu'on retrouve, par exemple, en Ontario, au Québec, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve, ou est-ce que ce projet de loi C-85 ne fait pas en sorte que le fonds de pensions des députés fédéraux sera comparable aux fonds de pensions des députés provinciaux, dans ces provinces-là?
[Traduction]
M. Fleming: Il est intéressant que vous ayez choisi les provinces où aucun changement ne se produit. C'est certainement le cas de l'Ontario où j'ai été administrateur en chef de l'Assemblée législative pendant de nombreuses années.
Le fait est que les Canadiens doivent savoir que ce sont les autres provinces, c'est-à-dire l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba dans une certaine mesure - bien qu'il semble y avoir une certaine confusion, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard qui sont actuellement à l'avant-garde en ce qui concerne la restructuration complète des programmes de rémunération, allocations et avantages des députés.
C'est pourquoi je pense que si la Chambre des communes veut assumer un rôle de chef de file, et je crois qu'elle doit le faire, il faut alors envisager des changements plus généraux que ceux qui sont proposés dans le projet de loi.
Il y a plusieurs aspects à envisager. En Ontario, les députés n'ont pas à contribuer à leur régime de retraite sur leurs allocations non imposables. Leur contribution à leur pension est limitée et se fonde strictement sur leurs indemnités. Dans la plupart des autres provinces, jusqu'à présent, les députés pouvaient contribuer à leur pension en fonction d'une combinaison de leurs indemnités et de leurs allocations imposables.
Je dois dire entre parenthèses que cela représente une situation très intéressante au Canada. Le fait que sept provinces ont permis à leurs députés de cotiser en fonction de leurs allocations non imposables de même que de leurs indemnités, et les députés l'ont fait, montre que les allocations non imposables ont en fait été traitées comme un salaire par bon nombre des députés des assemblées provinciales.
Je sais que ce n'est pas le cas ici, mais je pense qu'il est extrêmement difficile de faire une comparaison car c'est comme comparer des pommes et des oranges. J'en reviens à nouveau à la question du rôle de chef de file.
[Français]
M. Plamondon: Si vous aviez à faire une recommandation au ministre concernant le dépôt d'un projet de loi sur les régimes de pensions, quelles seraient les changements prioritaires que vous lui demanderiez?
[Traduction]
M. Fleming: Cela vous surprendra peut-être, mais je ne suis pas contre le projet de loi C-85 car il comporte certaines mesures valables comme la limite des 55 ans et l'abaissement du taux d'accumulation à 4 p. 100.
Mais franchement, vous n'allez pas dans la bonne voie en évitant à de nombreux députés élus depuis longtemps d'avoir à faire leur part. Or ce n'est pas le cas dans certaines des provinces où l'on apporte des changements au système car les députés qui y servent depuis longtemps doivent faire leur part.
C'est le cas de la Saskatchewan où huit députés auraient pu toucher jusqu'à 100 p. 100 de leur indemnité moyenne. Pourtant à la retraite, ils seront limités à 70 p. 100 de leur salaire final.
Je crois donc qu'il faut envisager les choses de cette façon.
[Français]
M. Plamondon: Merci.
Le président: Merci, monsieur Plamondon. Monsieur Harper.
[Traduction]
M. Harper: Merci beaucoup, monsieur le président et monsieur Fleming.
J'aimerais revenir sur cette question. Vous avez fait observer à juste titre que le projet de loi prévoit un régime à deux niveaux. Simplement pour clarifier ce que vous avez dit à ce sujet, pensez-vous qu'il serait plus juste d'apporter des changements rétroactifs plutôt que d'adopter un régime à deux niveaux?
M. Fleming: Je ne sais vraiment pas. Ce que j'ai essayé de dire, et ce que j'aurais dû dire, c'est que je ne suis pas sûr que ce projet de loi soit une très bonne idée - même s'il est utile dans la mesure où il permet de repenser l'ensemble de la question en ce qui concerne le Parlement du Canada. Il faut toujours en revenir au fait que l'on doit demander à des gens de l'extérieur d'examiner sur cette question. Franchement, le projet de loi tel qu'il existe actuellement pourrait même constituer un obstacle.
Je fréquente les milieux législatifs depuis un certain nombre d'années... Et il faut énormement de temps, comme vous le savez, pour qu'une loi soit adoptée et il faut énormément de temps pour la modifier. Je suis convaincu que même si ce texte de loi peut répondre aux objectifs du gouvernement - et je répète qu'il y a un pourcentage très élevé de députés libéraux qui, d'une certaine façon, bénéficieront de ce régime - le texte de loi lui-même complique encore la situation.
Il faut toutefois se retrousser les manches et se mettre au travail. Je vous parle bien simplement, en tant qu'ami du Parlement, en tant qu'ami d'un certain nombre de gens autour de cette table, et en tant que personne qui ne représente absolument aucun parti. Je n'ai aucun préjugé; je cherche à être impartial.
Il m'apparaît cependant que nous en sommes arrivés à un point - et c'est vrai pour toutes les assemblées législatives du Canada - où il nous faut aborder le problème fondamental de toutes ces poches qu'il faut remplir, comme l'a indiqué Sobeco Ernst & Young, et régler cette question. Tout cela est devenu bien trop compliqué. J'avoue que les députés devraient, à mon avis, être payés davantage, mais uniquement une fois que l'on aura examiné - comme on vient de le faire - la valeur que représentent effectivement toutes ces autres questions.
Prenez le cas du Manitoba. Voilà cinq ans que les députés avaient le même salaire et ils viennent de recevoir une augmentation qui a fait passer ces salaires de 27 967$ à 56 500$. Toutefois, comme vous le savez probablement, on a retiré les 13 982$ d'allocations pour dépenses personnelles. J'ajoute que la pension la plus élevée, d'après ce que l'on m'a dit, qui est versée au Manitoba à un ancien député, est en fait, de 30 000$.
Parallèlement, les droits acquis sous l'ancien régime de pension ont été conservés jusqu'au 24 avril 1995. À partir de cette date, les anciens et les nouveaux députés cotisent à un REÉR pour un montant qui est égalé par le gouvernement jusqu'à concurrence de 7 p. 100. Par conséquent, les nouveaux députés ne bénéficient plus que du REÉR.
Par contre, ils touchent désormais 56 500$ au lieu de ce qu'ils touchaient auparavant. J'ai posé la question à la greffière; elle m'a répondu que le régime avait été adopté sans difficulté. Le public a parfaitement compris et jugé que c'était tout à fait normal.
D'ailleurs, une commission indépendante a déjà examiné toutes ces questions il y a quelques années, et le gouvernement a accepté toutes ses recommandations sans faire la fine bouche.
Je répète que l'indemnité doit être relevée. Le gouvernement va devoir faire face à ses responsabilités à un moment donné, et il faut qu'il en arrive à cette solution.
La même chose s'est produite lorsque je suis devenu administrateur de l'Assemblée législative de l'Ontario en 1974. J'ai déclaré que nous avions besoin d'un nouveau toit et nous avons pu installer un nouveau toit pour 1,5 million de dollars.
Les responsables ont attendu quelque 18 ans - M. Boudria pourra vous le confirmer - et après avoir bien fait trainer les choses, il a fallu payer 24 millions de dollars pour faire installer le nouveau toit plus tard. L'ensemble du bâtiment avait besoin d'être rénové, mais les Progressistes-conservateurs comme les Libéraux n'ont pas voulu passer à la caisse; et rien n'a été fait. C'est le NPD qui s'en est chargé. Le bâtiment est maintenant restauré.
Je crois donc sincèrement qu'à partir du moment où vous vous efforcez de mettre en place le futur système de gouvernement parlementaire du Canada - je ne sais pas si M. McWhinney sera d'accord avec moi sur ce point - au moment où nous nous parlons, en 1995, il vous faut envisager des modifications importantes de toute la structure.
Excusez-moi de parler autant, mais toute cette question...
M. Harper: C'est plein d'enseignements.
Je vais vous faire part d'un certain nombre de commentaires et d'observations; vous me direz ce que vous en pensez. On nous répète à satiété et l'on nous dit dans de nombreuses analyses que si les allocations de retraite des députés sont si généreuses, c'est parce que leur salaire est en fait trop bas, que ce soit par rapport au passé, lorsqu'on tient compte des augmentations récentes ou que l'on applique tout autre critère. On nous dit aussi que les députés ont besoin de bénéficier de pensions très généreuses en raison de l'insécurité de leur emploi et du risque très élevé qu'ils courent de ne pas être réélus.
Pourtant, lorsque je considère le régime de pension des députés, il ne semble pas être conçu pour s'adapter à cette réalité, ni pouvoir l'expliquer. Ce sont les députés en début de carrière et qui risquent le plus d'être renvoyés dans leur foyer, qui ne peuvent prétendre bénéficier du régime. Ceux qui en bénéficient le plus sont ceux qui sont ici depuis longtemps, qui sont proches de l'âge de la retraite, de même que les ministres du Cabinet, des gens, surtout lorsqu'ils sont parvenus au sein du Cabinet, qui pourront postuler à toutes sortes de postes d'administrateurs et d'emplois de rechange une fois terminée leur carrière politique.
Ma théorie est-elle bonne; est-ce logique? Les explications qui sont données au sujet du régime de pension ne semblent absolument pas répondre à ce genre de besoins.
M. Fleming: C'est très difficile à dire. Certains d'entre vous le savent, j'ai siégé pendant 13 ans à la présidence de Queen's Park où je me suis efforcé d'étudier toutes ces questions. J'ai été secrétaire de la Commission de régie interne. J'ai donc pu voir de près tout ce qui se passe.
Je peux vous dire qu'à un moment donné les salaires des députés ont augmenté très rapidement en pourcentage mais, bien entendu, c'était la même chose pour les salaires des fonctionnaires. Il y a eu des augmentations incroyables pouvant aller, disons, jusqu'à 10 ou 11 p. 100 par an. Toutefois, il est arrivé un moment où l'on a serré la vis.
Je pense qu'il s'agissait d'une décision insidieuse - et je le dis en tant que personne qui se situait à l'extérieur des parlements - lorsqu'on a décidé d'une manière ou d'une autre de ramener de 20 à 15 ans la période ouvrant droit à une pension intégrale. Je pense qu'on en a décidé ainsi - et je peux le comprendre - tout simplement parce que les gens ont estimé qu'après tout, s'ils ne pouvaient pas obtenir un salaire suffisant, il fallait au moins qu'ils reçoivent une bonne pension. Le chiffre a donc été remené à 15.
C'est une tendance que l'on a constatée partout au Canada. Il en est résulté une situation totalement coupée de la réalité. Ce qui se passe maintenant, c'est que les salaires des législateurs au Canada sont inférieurs à ce qu'ils devraient être.
Je ne suis absolument pas d'accord avec tous ceux qui comparent les députés aux médecins, aux avocats, aux entrepreneurs de construction, aux enseignants, aux gouverneurs - à Dieu sait qui - parce que vous appartenez à une catégorie bien particulière. Vous avez un rôle bien particulier au Canada et il faut que vous puissiez le jouer.
Vous devez pouvoir compter sur l'appui de la population. En matière de salaires, vous n'avez pas à vous plier à une grille de la fonction publique, ou à un système de classification correspondant aux entreprises. Ce serait ridicule.
Un vice-président d'une grosse société m'a abordé il y a quelques années et m'a dit, Bob, pourquoi n'imposes-tu pas une description de tâches à tous ces gens. Reconnaissons bien franchement que ce serait absolument impossible de le faire pour les députés du Parlement ou des assemblées législatives. Je pense que vous méritez mieux. Nous devons trouver le moyen, et vous devez trouver le moyen, de faire confiance à d'autres personnes qu'à vos compatriotes pour veiller à votre bien-être. Il y a autour de vous des gens qui peuvent s'en charger.
J'en reviens à votre question. Donc, dans la situation actuelle, les salaires sont trop bas, les prestations sont bien trop généreuses, et la population canadienne s'agite beaucoup.
Le président: Cela fait 11 minutes maintenant que vous parlez; je vais donc passer à Mme Parrish.
Mme Parrish: Je vous remercie. En fait, j'ai beaucoup apprécié de pouvoir travailler avec vous.
Lorsque vous évoquez toutes ces comparaisons, estimez-vous qu'elles pourraient être valables en raison du type de carrière qu'abandonne les gens qui viennent ici? Estimez-vous que nous sommes, en quelque sorte, justifiés de faire ces comparaisons étant donné que l'homme de la rue n'a plus l'énergie suffisante pour se faire élire, lutter pour devenir candidat et abandonner une carrière pour venir ici?
Estimez-vous que cela est en quelque sorte justifié, parce que si l'on fait un sondage parmi les gens qui sont ici, c'est de ces milieux qu'ils viennent?
M. Fleming: Excusez-moi, mais de quel genre de justification parlez-vous?
Mme Parrish: Est-ce justifié de faire une comparaison avec les médecins, les avocats et les fonctionnaires lorsqu'on examine...
M. Fleming: Je pense que oui, mais je n'aime pas à penser que les députés du Parlement du Canada... ou que le public en arrive, en quelque sorte, à un point où il assimile votre travail à celui de quelqu'un qui exerce une profession qu'il peut comprendre. Franchement personne, à part ceux qui ont déjà siégé au sein d'une institution comme la vôtre, ne peut comprendre votre travail.
Vous êtes malheureusement votre pire ennemi parce que vous êtes perçus comme des gens qui protègent leur monde. Deux ans ici, et vous avez tendance à oublier le bon sens et le monde que vous avez quitté. Il n'en reste pas moins qu'il faut qu'il y ait des gens qui veillent au bien-être des élus au Canada.
Mme Parrish: Monsieur Fleming, je suis ici depuis près de deux ans et j'espère avoir gardé un peu de bon sens.
M. Fleming: Je pense que c'est le cas, à en juger par vos questions.
Mme Parrish: Je me réfère à une partie de votre rapport en particulier.
Des voix: Oh, oh!
Mme Parrish: Non. Vous dites cela à cause des commentaires que j'ai faits au début lorsque j'ai déclaré apprécier votre intervention.
C'est ainsi que nous nous attirons les bonnes grâces des fonctionnaires.
Je vous renvoie au paragraphe dans lequel vous nous parlez de ramener le taux cumulatif de 5 à 4 p. 100; c'est une question qui me tient à coeur.
J'ai passé deux périodes de trois ans dans des administrations locales, sans droit à la retraite. J'ai mis trois ans à obtenir la candidature la plus difficile dans l'histoire de la politique canadienne et, depuis six ans que je suis ici, j'ai obtenu le droit de toucher 15 450$ par an. C'est la réduction qu'entraîne le nouveau régime de M. Eggleton par rapport aux 19 320$ antérieurs, qui ne constituaient déjà pas un pactole.
Si j'étais restée - et souvenez-vous que les années les plus productives chez les femmes sont celles pendant lesquelles elles n'ont plus à changer les couches et à faire toutes ces choses horribles que j'ai faites pendant un certain temps...
M. Fleming: Je ne crois pas qu'il y ait une différence entre les hommes et les femmes.
Mme Parrish: Il y a une différence. En réalité, il y a une différence. Nous avons un cap différent...
M. Fleming: Pas dans le monde dans lequel je vis.
Mme Parrish: ...à passer lorsque nous prenons de l'âge; il y a bien une différence.
Donc, pour ce qui est de ce régime de pension, si j'avais continué à exercer une carrière tranquille et sûre - et je prends toujours l'enseignement comme exemple - avec toute cette ancienneté, j'obtiendrais probablement à la retraite quelque 30 000$. Qu'avez-vous à répondre à cela, puisque vous semblez penser qu'avec 4 p. 100 on n'ira pas assez loin?
M. Fleming: Non, je n'ai pas dit cela. J'ai tout simplement dit que 3 p. 100 donnerait un rendement moindre. Tout ce que je dis, c'est qu'un groupe comme le vôtre doit tenir compte de l'ensemble de la situation. Des gens comme vous doivent considérer que le fait d'entrer à la Chambre des communes en tant que députés élus est un privilège; un service rendu à la population canadienne.
Votre réputation en a été renforcée. Votre avenir pourrait en être amélioré considérablement, et il y a bien d'autres facteurs que les députés autour de cette table doivent prendre en considération en plus des facteurs monétaires.
Je ne suis pas venu me présenter devant votre comité parce que j'étais payé pour le faire. Le fait de venir ici me coûte beaucoup d'argent, sans compter qu'il a fallu réécrire complètement mes notes à compter de 20 heures hier soir et jusqu'à 10 heures ce matin. Il nous faut donc tous contribuer d'une certaine manière.
Mme Parrish: Savez-vous, monsieur Fleming, que les sténographes ne le considèrent, mais que je viendrais ici même sans pension. J'y viendrais même si je n'étais pas payée. Je considère que c'est un privilège d'être l'une des 295 personnes dans ce pays qui siègent ici.
Une voix: Ce n'est pas mon cas.
Des voix: Oh, oh!
Une voix: Dieu merci!
M. Fleming: Vous devez toucher une pension équitable mais, malheureusement, on ne peut pas considérer votre situation indépendamment du reste.
Mme Parrish: Heureusement qu'il y a des gens qui me protègent contre moi-même, parce que j'ai des responsabilités familiales.
M. Fleming: Je suis sûr que Don Boudria s'en charge.
Mme Parrish: Et vous voulez que les gens qui font partie du commun des mortels se présentent ici, n'est-ce pas? Si nous étions tous des multimillionnaires et des athlètes professionnels, bien installés avant de venir ici, nous n'aurions pas un Parlement représentatif, n'est-ce pas?
M. Fleming: Non... [Inaudible]
Mme Parrish: Nous avons donc besoin d'une certaine forme de régime de pension, que nous le voulions ou non.
M. Fleming: C'est l'autre argument mais, alors que je considère que le Parlement du Canada a besoin d'un régime de pension, cette proposition de REÉR a tendance à entraîner une dégradation de votre situation, ce qui me paraît ridicule.
Mme Parrish: Merci, monsieur Fleming.
Le président: Voilà, je vous remercie.
Mme Parrish: [Inaudible] ...avant que vous me coupiez la parole.
Le président: C'est ce que vous avez fait, et bien avant. Merci, madame Parrish. Vous aviez 10 minutes; c'est très bien. Nous aurons davantage de temps plus tard pour d'autres députés.
Mme Grey: Merci, monsieur Fleming. J'ai apprécié vos commentaires. J'ai toutes sortes de questions à vous poser, mais je m'en tiendrai à un ou deux des points que vous avez évoqués.
Le régime de pension est trop favorable, ou il semble qu'il le soit. On peut parler en termes d'économie ou de politique, les deux choses sont évidemment liées. Il me semble que vous vous intéressez davantage aux répercussions politiques sur la population canadienne, qui regarde tout cela et qui doit bien entendu, payer la note.
M. Fleming: Que l'on économise 3 millions de dollars ou 10 millions de dollars, c'est une broutille au niveau du gouvernement du Canada; de sorte qu'il est inutile de convaincre les gens.
Mme Grey: Quant à la perception qu'en ont les gens, vous dites qu'il n'y a pas de raison de se préoccuper de 3 millions de dollars lorsqu'on a 500 milliards de dettes. Toute la question, bien entendu, est là.
Vous nous avez dit que personne dans notre pays ne trouvait à redire à un régime de pension équitable. En ce qui concerne ce projet de loi en particulier, le projet de loi C-85, peut-on dire tous ceux qui bénéficiaient du régime avant 1988 vont continuer à le faire? Ceux d'entre nous qui ont été élus en 1988 ou après auront la possibilité d'en sortir; il y a une plage de 60 jours après que le projet de loi aura reçu la sanction royale.
Pouvez-vous nous expliquer pour quelle raison les députés doivent, soit sortir du régime, soit en adopter toutes les modalités? Il faut en sortir totalement ou y adhérer totalement, et l'on ne bénéficie même pas de la contribution de l'employeur à part égale avec l'employé. Essentiellement, on prend tout ou on perd tout. Il n'y a rien «d'équitable» dans ce genre de pension.
M. Fleming: Je ne peux pas vraiment vous répondre. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'envisage avec une grande réticence l'adoption de ce projet de loi. Je crois que l'on confond les problèmes.
C'est un peu à l'image de la dette nationale. Tous ceux d'entre nous qui sont autour de cette table sont en grande partie responsables de sa création, et nous devons penser à ceux qui vont suivre. Le problème, ici à la Chambre des communes, c'est que les députés les plus âgés - ceux qui siègent depuis le plus longtemps, devrais-je dire - vont effectivement bénéficier du régime, mais pensent-ils vraiment aux députés nouvellement élus et à ce que cela va signifier pour leur avenir? Je n'ai pas vraiment la réponse lorsqu'il s'agit de se demander si l'on doit sortir ou non du régime.
Mme Grey: Pensez-vous que les députés élus avant 1988 devraient avoir comme les autres la possibilité de sortir du régime?
M. Fleming: Si j'en crois mes chiffres, je me demande qui pourrait bien vouloir sortir de ce régime de pension en particulier. Il faut considérer les chiffres. Je pense que vous êtes la seule, avec le député indépendant, à vouloir sortir du régime.
Mme Grey: Je vous le concède, et je ne pense pas que ce soit une question de savoir si l'on veut en sortir. Je me préoccupe tout autant de mon avenir et de ma retraite que mes collègues.
Le problème, c'est qu'on a quasiment l'impression qu'il faut en sortir en raison de la pression politique. La population canadienne ne va tout simplement pas accepter ce genre de choses. Je considère donc qu'à partir du moment où la possibilité de sortir du régime a été accordée, il aurait fallu qu'elle le soit à tout le monde.
M. Fleming: Effectivement. Je ne suis pas actuaire, comme le sait bien Don Boudria, mais je crois que c'est quelque chose qui aurait probablement dû être envisagé.
Mme Grey: Lorsque vous considérez la chose de l'extérieur, en tant qu'expert de la question jusqu'à un certain point, ne pensez-vous pas que cette possibilité de sortir du régime s'apparente à un outil politique visant un groupe particulier de gens qui ont déclaré à l'avance qu'ils voulaient en sortir - autrement dit, les Réformistes? Ce n'est pas votre impression?
M. Fleming: Pour être franc, même si j'admire votre travail, lorsque j'examine la question, je ne peux que me demander pour quelle raison Mme Grey veut sortir du régime. Quel est l'objectif? Est-ce vraiment bon pour son avenir?
Je dois avouer que oui, il faut bien faire la part des choses entre les questions politiques et les questions économiques; mais il faut aussi considérer ce qui se passe dans tous les autres régimes de pension au Canada. Une fois qu'on est embrigadé dans ces régimes, on ne peut pas véritablement en sortir. Là encore, je vous répète qu'il ne s'agit pas d'un régime de pension de type classique, quelque soit la façon dont on l'habille, quand on tient compte de toutes ces poches différentes et des différents pourcentages que payent les gens.
Mme Grey: Les lois sont les mêmes pour tout le monde dans notre pays, et si vous cotisez, comme je le fais, à un régime de pension, une fois que vous êtes bloqué à l'intérieur du régime - et six ans, c'est pour nous la durée qui est prise en compte - vous ne pouvez plus en sortir. L'assistant du président du Conseil du Trésor, était ici ce matin et, lorsque je lui ai demandé: «C'est la loi; comment pouvez-vous changer uniquement cela?», il m'a répondu «Et bien, le premier ministre est entrain de changer la loi». Autrement dit, ce que nous voyons dans cette loi...
M. Fleming: Je n'en suis pas sûr. Hier soir, je parlais à un fonctionnaire qui a peur de perdre son emploi. Il a 37 ans et il travaille depuis 14 ans pour le gouvernement. Il m'a dit que s'il le voulait, il pouvait sortir du régime. C'est quelque chose que je ne savais pas.
Mme Grey: Je l'ai pris de bonne foi lorsque le président du Conseil du Trésor m'a dit que je pouvais en sortir; mais ceci va plus loin que n'importe quel système de pension que j'ai jamais vu dans les sociétés d'assurance. J'ai appris quelque chose de nouveau par rapport au peu que je savais sur les droits acquis en matière de pension. Je suis membre de l'Association des enseignants de l'Alberta, et mes prestations ont été bloquées à l'intérieur du régime lorsque je suis entrée au Parlement en 1989. On m'a dit: «Désolé, mais vous n'avez par le choix dans ce cas; les prestations sont bloquées.»
M. Fleming: Il faut bien voir que pendant des années, si vous étiez employé du gouvernement de l'Ontario - je ne sais pas ce qui se passe pour le gouvernement fédéral - vous étiez bloqué pendant dix ans et vous ne pouviez pas sortir du régime.
La situation a changé maintenant, et nombre de ces dispositions sont passées à la trappe. On peut avoir un REÉR et le transférer ailleurs. Auparavant, on ne pouvait rien transférer ailleurs, sauf entre le gouvernement fédéral et les provinces et, je crois, les universités et les municipalités.
Mme Grey: J'en conviens. J'aimerais que vous nous parliez rapidement de la situation en Alberta et du fait que Ralph Klein a annulé ce régime de pension. Était-ce une décision politique ou économique, selon votre estimation?
M. Fleming: C'est un peu des deux; toutefois, il faut bien le reconnaître, mesdames et messieurs, nous en sommes à un point au Canada où il faut faire des appels du pied à la population. Par conséquent, il faut faire la part des choses entre la quantité d'argent qui va être économisée - la conjoncture est évidemment bien mauvaise - et ce qui est juste et équitable. Si nous siégions dans l'État de la Californie, il y aurait aucun régime de pension pour tous ceux qui ont été élus après 1988 ou 1989, je crois. C'est quelque chose qui a été totalement supprimé.
Croyez-moi, on a tendance partout à démembrer les régimes de pension et à recourir aux REÉR et à d'autres formules, mais je ne crois pas que ce soit la solution ici. Oui, votre régime de pension est encore trop favorable et non, vous n'allez pas pouvoir régler la question tous seuls; vous n'allez que la compliquer, comme vous le faites depuis des années. Il vous faut confier la chose à un organisme extérieur.
Je ne sais pas combien de fois il faudra vous dire cela, mais j'ai le sentiment qu'on commence à y venir parce que c'est ce qui se passe, en Nouvelle-Écosse, au Manitoba, en Colombie-Britannique et dans d'autres provinces. Ce n'est pas ce qui se passe en Ontario. L'Ontario, tout de suite après Ottawa, devrait prendre l'initiative, et ce n'est pas le cas.
M. Boudria: Je tiens tout d'abord à souhaiter la bienvenue à notre témoin. Nous avons fait un long chemin ensemble. Je regrette qu'il n'ait pas pu obtenir les renseignements qu'il souhaitait. C'est dommage, parce que d'après les explications qu'il nous a données au sujet de ce qu'il cherchait, c'est une chose que l'on trouve de manière générale en consultant le Guide parlementaire canadien et quelques autres documents.
M. Fleming: C'est exactement ce que j'ai fait toute la fin de semaine.
M. Boudria: C'est pourtant disponible sous cette forme; un résumé aurait certainement pu vous être fourni pour des raisons tout à fait logiques. Là encore, je regrette que cela n'ait pas été fait.
J'aimerais vous poser quelques questions, monsieur Fleming, au sujet des prestations. Il y a des malentendus en ce qui a trait à leur importance relative.
D'autres intervenants ont parlé aujourd'hui d'un projet de REÉR. Je n'ai pas pu aborder la question à ce moment-là, mais j'aimerais vous exposer ce qui suit et vous demander éventuellement ce que vous en pensez.
Comme d'autres, j'ai entendu des allégations au sujet de ce régime de pension que l'on dit si généreux, etc. Il est indéniable qu'il est généreux, mais il faut voir aussi que les primes sont assez élevées. J'ai demandé à la bibliothèque du Parlement d'étudier mon propre cas. J'en ai un exemplaire ici et je suis disposé à le communiquer à mes collègues.
L'étude fait état de ce que je posséderais aujourd'hui si j'avais gardé les primes et si je les avais déposées dans un REÉR, l'employeur cotisant pour le même montant. On m'a demandé quel était le taux d'intérêt que je voulais appliquer. Je leur ai dit de prendre le taux d'intérêt des certificats de placement garanti sur cinq ans, sans aucune fioriture, sans aucun fonds commun de placement. La bibliothèque a donc calculé l'intérêt sur l'ensemble de la période et nous sommes arrivés à un taux d'intérêt moyen de 11 p. 100 car, souvenez-vous, les taux d'intérêt ont atteint 14 p. 100, même s'ils sont aujourd'hui de beaucoup inférieurs. On a fait le total de toutes les primes, plus les intérêts accumulés, et l'on m'a dit que j'avais versé 136 988$ de cotisations. Si vous ajoutez le montant équivalent de l'employeur, on arrive exactement au double, soit à 272 000$.
Là encore, si l'on appliquait le même taux d'intérêt moyen, j'aurais un rendement qui s'élèverait à quelque chose comme 27 000$ à l'heure actuelle, rien qu'en intérêt. Sans toucher au capital et sans faire quoi que ce soit, c'est l'intérêt que je toucherais. Je pourrais probablement toucher un autre revenu sans jamais être accusé de cumuler une autre chose du même genre.
Si je partais maintenant, ma pension de député serait de 30 000$. La différence entre les deux est de 3 000$. Ce ne serait pas 16 millions de dollars et autres balivernes qui font le bonheur des caricaturistes dans les journaux mais 3 000$ par an. Ne pourrions-nous pas remettre les choses en perspective.
Je le répète, ce n'est pas moi qui ait fait ce calcul. Il a été fait par des gens très compétents qui travaillent à la Division économique du service de recherche de la bibliothèque du Parlement.
M. Fleming: Combien d'années de service avez-vous - onze?
M. Boudria: Treize.
M. Fleming: Mais vous avez d'autres postes.
M. Boudria: C'est juste dernièrement. Je n'en avais pas pendant tout ce temps. J'ai un autre poste maitenant, mais c'est depuis deux mois seulement.
M. Fleming: Vous avez maintenant un poste qui va être pris en compte et vous allez y gagner parce que autant que je puisse en juger, vous êtes sur le point d'obtenir une pension intégrale. Vous allez en perdre une légère partie en raison du projet de loi C-85, mais vous n'allez pas véritablement en subir les conséquences. Reconnaissez bien franchement que si vous aviez 272 000$ en 1995, il est probable que vous auriez davantage à vous inquiéter d'une diminution et de ne pas pouvoir obtenir 27 000$ par an.
M. Boudria: Les certificats de placement garanti ne diminuent pas vraiment. Ils n'augmentent peut-être pas aussi vite qu'avant, mais ils diminuent rarement.
M. Fleming: Si vous pouviez bloquer cet argent ici...
Je n'en continue pas moins à penser que, dans une large mesure, vous devez reconnaître que pour que vous puissiez obtenir 30 000$ par an, le gouvernement du Canada, en plus de ce qu'il a cotisé pour vous, a dû mettre une très grosse sommes d'argent pour que ces 30 000$ soient possibles.
M. Boudria: Non, c'est une cotisation à part égale.
M. Fleming: Je comprends bien que vous parlez de «cotisation à part égale», mais le gouvernement du Canada a dû mettre un gros montant dans le compte de Don Boudria pour compléter le tout et faire en sorte que vous puissiez toucher vos 30 000$.
M. Boudria: Je conteste cette analyse en vous faisant remarquer qu'à partir du moment où j'atteins 15 ans d'ancienneté - en supposant que le projet de loi C-85 n'ait pas été déposé - la pension cesse d'augmenter tant que l'on a pas atteint 60 ans, ce qui fait intervenir le facteur relatif à l'inflation. À partir de là, chaque fois que vous siégez pendant une année supplémentaire, vous travaillez essentiellement comme député à 25 ou à 30 p. 100 de votre salaire. Vous toucheriez de toute façon le reste si vous n'étiez pas là.
M. Fleming: Si vous étiez un homme d'affaires avisé, vous quitteriez à ce moment-là. Je suis sûr que vous allez gagner la prochaine élection, vous avez donc le choix.
M. Boudria: Eh bien, merci.
La seule raison pour laquelle je parle de tout cela, c'est pour tenter de démontrer que les chiffres qui nous sont présentés sont cités bien souvent hors contexte et ne reflètent pas toujours la situation.
M. Flemming: Vous avez soulevé une question qui me concerne. Il y a tous ces spécialistes de Sobeco Ernst & Young qui viennent ici et qui nous préparent des rapports magnifiques. Comme je l'ai dit dans ma brève déclaration, les gens s'y perdent. C'est très compliqué. Les grandes questions disparaissent derrière toutes sortes d'éléments techniques et de jugements de valeur.
M. Boudria: Merci.
M. Silye: Monsieur Fleming, j'ai été très heureux de vous entendre dire tout à l'heure que l'indemnité était trop faible, les avantages sociaux trop élevés et le régime de retraite encore trop généreux. Il se trouve que je partage ce point de vue.
Je sais que nous, les députés, recevons un salaire imposable. Nous avons également droit à une allocation non imposable et à des avantages non imposables. En plus de tout cela, si nous sommes réélus, nous avons droit à une pension. Si nous ne sommes pas réélus, nous n'avons pas droit à une pension mais à une indemnité de départ.
Si nous avons tous choisi de renoncer à ces avantages, c'est parce qu'ils sont trop généreux. Si nous disons qu'ils sont trop généreux, vous êtes obligé de dire que cela ne suffit pas, que cela n'est pas ce que veulent les Canadiens. Je voulais simplement satisfaire votre curiosité et vous dire pourquoi nous agissons ainsi. Le gouvernement au pouvoir continue à embrouiller les choses et à justifier la situation actuelle en se servant de tous les arguments que nous avons entendus ce matin.
Je suis également d'accord avec vous lorsque vous suggérez que l'on pourrait résoudre ce problème s'il existait un organisme indépendant de la Chambre des communes qui serait chargé de prendre ce genre de décisions. Mais cet organisme ne risque pas d'être créé parce que le ministre et le gouvernement ont déclaré que ce n'était pas le momemt. Cette confusion n'est donc pas près de se dissiper.
Vous dites que l'indemnité est trop faible et les avantages sociaux trop élevés et que le Régime de retraite est trop généreux. Comment devrait-on, d'après vous, modifier ce régime pour amener les Canadiens à penser que les députés et le gouvernement ont pris des décisions saines et raisonnables dans ce domaine?
M. Flemming: Cela va peut-être vous paraître ridicule, mais pourquoi ne pas demander à ceux qui ont droit à une pension complète, ou qui vont bientôt avoir ce droit, d'accepter une réduction. En Saskatchewan, ils ont réussi à décider sept ou huit députés provinciaux, dont les droits à la retraite étaient antérieurs à 1979, à accepter de recevoir 70 p. 100 de l'indemnité à laquelle ils auraient autrement eu droit.
Je ne sais pas tout ce que cela recouvre. Cela nous ramène à la question qu'a posée Deborah Grey au sujet de la situation des nouveaux députés. Mais il me paraît possible de limiter les avantages auxquels ont droit les députés ayant plus d'ancienneté, en adoptant une loi, par exemple, parce qu'auprès tout, ils vont quitter ces lieux - Queen's Park, comme on disait - x milliers de dollars assurés tous les ans, qu'ils aient 40 ans, 50 ans ou plus. Je crois que cela serait possible.
Je suis tout à fait en faveur de la retraite anticipée, et si ce projet de loi est adopté, je dirais que l'âge de 55 ans est certainement un bon choix. Aux États-Unis, il n'y a qu'une ou deux assemblées législatives qui ont fixé l'âge de la retraite à 55 ans, dans la plupart des États, c'est 60 ans. Mais c'est sans doute bien.
Je ne sais pas si l'on réduit sur une base actuarielle la pension de retraite de ceux qui s'en prévalent avant l'âge de 55 ans... Eh bien, non, cela ne marcherait pas, mais il devrait y avoir un moyen de contrôler cela. Le fait de combiner 55 ans et 4 p. 100 est une bonne chose.
Ce qui me gêne le plus, c'est que ce projet de loi ne règle pas toute la question. Comme l'ont indiqué les témoins qui m'ont précédé - je vous demande de m'excuser de n'avoir pu arriver plus tôt - il paraît difficile de distinguer le traitement, les allocations, etc. et la pension. Ce projet vise uniquement - et je n'aime pas utiliser ce mot - à enjoliver la situation pour que les Canadiens ne s'aperçoivent pas qu'il n'aborde pas le problème fondamental.
Je ne veux pas manquer d'égards à un comité qui est présidé par mon propre député de Kingston, mais c'est néanmoins...
En passant, - et ce n'est pas moi qui l'ai demandé - le Whig-Standard de Kingston a publié un éditorial à ce sujet samedi que le président a certainement lu.
M. Duhamel: Merci d'être venu.
Je voulais faire deux brefs commentaires et si possible, avoir peut-être votre réaction. Cela concerne le fait que vous avez parlé d'une absence de collaboration.
J'aimerais vous communiquer certains chiffres. Par exemple, à l'heure actuelle, il y a 432 députés qui reçoivent des pensions de retraite. Depuis 1980, un peu plus de 50 p. 100 des députés qui ont été élus reçoivent une pension de retraite. De fait, moins de 50 p. 100 - soit 48 p. 100 - reçoivent des pensions de 30 000$ ou moins. Donnée intéressante, si l'on examine l'âge des députés aujourd'hui: il y en 12,9 p. 100 - soit moins de 13 p. 100 - qui ont moins de 54 ans. Par conséquent, même si l'on conservait le même régime de retraite, il n'y aurait pas beaucoup de députés qui recevraient leur pension avant 54 ans.
Je tiens à faire remarquer que ces statistiques sont mal connues. Elles semblent indiquer que même si le régime est en lui-même généreux, il n'y a pas, dans l'ensemble, beaucoup de personnes qui reçoivent des pensions de retraite généreuses. Voilà ma première remarque.
Certains affirment que les Canadiens réagissent très mal à ce qui se passe à propos du régime de retraite des députés. Vous avez indiqué que c'était, d'après vous, le système qui était mauvais, avec le jugement des tiers, etc.. Mais n'y a-t-il pas également un manque de collaboration entre les intéressés? Sommes-nous vraiment prêts à examiner cette question dans un esprit objectif et analytique ou n'est-ce pas plutôt l'aspect politique qui a la priorité?
M. Fleming: Vous avez présenté, il y a quelque temps déjà, un projet de loi qui a fait l'objet de nombreux commentaires. La plupart des députés du Bloc québécois en ont présentés. Quelques députés libéraux seulement l'ont fait.
D'après moi, les Libéraux - le gouvernement du Canada - se sont fondés sur l'avis d'actuaires et de Dieu sait qui d'autre pour décider d'introduire ces changements dans le projet de loi. Vous semblez déterminés à le faire adopter coûte que coûte, tel que vous l'avez conçu.
En tant que simple citoyen du Canada, même si je connais très bien le système - et je ne me vante pas - comment pourrais-je critiquer votre projet?
Mais cela soulève une question. Vous m'avez appelé il y a cinq ou six jours pour me dire que vous aviez invité x personnes à comparaître devant le Comité et, officieusement, qu'il y avait certaines personnes que vous n'aviez pas invitées - maintenant cela n'a plus rien d'officieux, et je peux comprendre peut-être pourquoi...
Je sais que la tradition parlementaire veut qu'il y ait une deuxième lecture et que le projet de loi soit ensuite envoyé devant un comité, mais je trouve néanmoins qu'à cette étape du processus, c'est une façon extraordinaire de procéder. La fin de la session n'est pas non plus très loin. Il est évident que la majorité des députés va faire adopter ce projet de loi.
Je n'ai qu'une chose à vous dire: je ne pense pas que vous écoutiez les avis qu'on vous donne sur certaines de ces questions. Je pense que ce projet sera adopté; toutefois, malgré ce que peuvent vous dire le président du Conseil du Trésor ou d'autres fonctionnaires, vous allez contre l'opinion publique si vous ne confiez pas cette question à une instance plus large.
Je ne parle pas du genre de commission qui conduit ses travaux comme vous le faites. Il faudrait, je crois, réunir des parlementaires sages et expérimentés avec des actuaires pour examiner l'ensemble de la question et formuler des recommandations.
Je pense que si vous choisissiez de le faire très rapidement, avant que la situatioin soit hors de contrôle, vous pourriez obtenir des résultats spectaculaires. Votre image en sortirait embellie et vous obtiendriez des indemnités plus fortes.
J'ai parlé de cette question à des Canadiens très raisonnables et sensibilisés à ces questions et qui, je crois, ont toute leur tête. Ce ne sont pas des gens qui sautent aux conclusions, mais ils sont d'avis que vous ne voulez écouter personne et que vous n'en faites qu'à votre tête. Cela va nuire au Parti libéral du Canada, au gouvernement du Canada et certainement à tous les Canadiens. Il me semble qu'il faudrait tenir compte de cela.
Je fais un peu de sciences politiques et je constate que le Parti libéral du Canada, en tant que gouvernement, a obtenu d'excellents résultats depuis octobre 1993; mais je pense que tout cela risque de prendre fin si le gouvernement ne choisit pas la transparence pour régler cette question. Cela touche en réalité tout ce qui se rapporte à l'administration de la Chambre des communes.
J'ai essayé de me renseigner par téléphone en faisant quelques appels et je trouve tout à fait choquant que deux personnes différentes - de fait, il y en a peut-être eu trois - ont affirmé ne rien pouvoir me dire parce qu'il s'agissait de renseignements confidentiels.
Le président: Le temps qui vous était imparti est écoulé. Vous avez eu plus de cinq minutes et le temps de parole prévu est écoulé.
Je tiens à vous remercier, monsieur Fleming, d'être venu ce matin. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de préparer votre intervention et de venir ici.
M. Fleming: Le plaisir est pour moi.
Le président: Je suis sûr que nous vous reverrons.
Le témoin suivant est le professeur Franks, un des commissaires de la Commission chargée d'étudier les indemnités des parlementaires créée en 1994.
Monsieur Franks, veuillez vous asseoir à la table. Je crois savoir que vous avez préparé une déclaration. Nous serons très heureux de vous entendre. Vous avez la parole, monsieur.
[Traduction]
M. C.E.S. Franks (professeur, commissaire, Commission chargée d'étudier les indemnités des parlementaires en 1994): Merci, monsieur le président. Je pensais que je serais accompagné par mes deux collègues commissaires, M. Lapointe et Mme Jean Pigott, mais je vois qu'ils n'ont pu venir. Leur présence me manque beaucoup,
[Français]
surtout parce que mon français n'est pas assez bon pour que je puisse m'exprimer au sujet des pensions des députés. J'espère donc que tout le monde m'excusera de parler en anglais.
[Traduction]
La commission a examiné la question des pensions de retraite dans le contexte de la rémunération globale des députés. C'est principalement de cela que je vais parler.
Par la suite, si vous le souhaitez, je suis disposé à vous expliquer, dans la mesure du possible, les raisons à l'origine de nos recommandations. Je dois vous avertir, dès le départ, que nous n'avons pas étudié suffisamment en profondeur la question des pensions pour pouvoir bien connaître les conséquences des différents choix possibles. Nous avons voulu apporter une solution rapide et partielle, plutôt qu'une solution globale.
Si l'on compare uniquement les retraites des députés à celles des autres professionnels, il est vrai que la pension de retraite des députés semble excessive; c'est la comparaison que l'on fait habituellement.
Lorsque ces projets de réforme des pensions des députés ont été communiqués au public, les journaux se sont remplis de rapports dans lesquels on comparait la pension à laquelle aurait droit un député après 15 ou 20 ans de service et celle que recevrait, après une période comparable, un enseignant ou un fonctionnaire. Il n'est pas surprenant que les pensions des députés aient paru, par comparaison, très généreuses.
Ce que ces rapports et ces spécialistes n'indiquent pas, c'est que moins de 10 p. 100 des députés siègent à la Chambre pendant au moins 15 ans et qu'après la plupart des élections - celle de 1993 est une exception à cet égard - la plupart des députés n'ont pas siégé suffisamment longtemps, moins que la période de six ans exigée, pour recevoir une pension. De fait, il y a beaucoup d'anciens députés qui non seulement n'ont droit à aucune pension de retraite, mais qui ont du mal à se trouver du travail et à se réintégrer dans la vie privée après avoir siégé comme députés.
Je ne sais pas quel est le nombre moyen d'années d'ancienneté des enseignants ou des employés des grandes entreprises, ni celui des années où ils cotisent au régime de retraite de leur organisme. Dans la fonction publique, la durée moyenne du service est d'environ 20 ans.
Le fonctionnaire moyen a non seulement droit à une bonne retraite entre 55 ans et 65 ans, selon ses années d'ancienneté, mais cette pension lui est garantie à vie et elle est indexée sur l'inflation. Je ne crois pas que les régimes des enseignants et des autres professionnels soient beaucoup moins généreux, ni que plus de la moitié des cadres de la plupart des organismes n'aient habituellement pas suffisamment d'années d'ancienneté pour recevoir ne serait-ce qu'une pension de retraite minimale.
Les discussions publiques qui portent sur le traitement et la pension des députés sont trop souvent fondées sur de fausses données et sur des arguments tirés de situations exceptionnelles. Avec le régime actuel, il y a très peu de députés qui entrent jeunes au Parlement et ceux qui ont la chance de quitter la Chambre en ayant droit à une pension de retraite importante à un âge relativement jeune sont bien rares. La plupart des anciens députés n'ont pas droit à ces pensions généreuses. Je le répète, après des élections, la plupart des anciens députés n'ont droit à aucune pension de retraite.
Il est préférable d'examiner la question de la pension des députés dans le contexte de la rémunération globale des représentants élus. Les députés sont beaucoup moins bien payés que les membres des professions libérales. À l'échelon international, les députés canadiens sont les moins bien payés au monde.
Si l'on tient compte d'autres facteurs comme la durée des sessions parlementaires, la possibilité d'exercer d'autres activités rémunérées, la probabilité de faire carrière dans la politique et d'avoir droit à une pension de retraite suffisante pour subvenir à leurs besoins, ou des pratiques comme celles de la société française, on constate que la situation des représentants élus canadiens est bien inférieure à celle de leurs homologues des autres pays.
La faiblesse de cette rémunération a un effet sur la vie politique canadienne. La proportion des députés canadiens qui décident volontairement d'arrêter de siéger et de ne pas se représenter - près de 20 p. 100 à chaque élection - est supérieure à celle des députés qui quittent leur siège pour quelque raison que ce soit, décès, défaite électorale ou choix personnel - en Grande-Bretagne, aux États-Unis ou dans les pays continentaux. L'environnement dans lequel travaille le député canadien doit comporter de graves lacunes pour entraîner un roulement aussi rapide et un désir aussi intense de quitter la politique.
La pension de retraite et la rémunération globale ne sont pas, bien entendu, les seuls aspects du travail des députés qui soient à l'origine de ce roulement, mais ce sont manifestement des facteurs qui y contribuent de façon importante.
Certains soutiendraient que ce roulement n'est pas grave et qu'il est bon de voir constamment arriver de nouveaux députés à la Chambre des communes. Mais la façon dont cela se passe au Canada est loin d'être une bonne chose. Les études comparatives des assemblées et du processus législatif démontrent qu'il n'est pas possible d'avoir une Assemblée législative forte, composée de représentants indépendants et efficaces, ni d'avoir des comités législatifs dynamiques, si l'Assemblée ne comporte pas un groupe important de députés d'expérience, prêts à se consacrer à une carrière politique. Leurs années d'ancienneté leur permet d'acquérir l'influence, les connaissances et le pouvoir que seules peuvent apporter des années de travail et d'expérience dans les mêmes fonctions.
Le Parlement du Canada ne comprend pas de députés de ce type. Sa capacité d'obliger le gouvernement à rendre des comptes, de faire redresser les torts causés aux citoyens et de débattre des grandes questions en est d'autant affaiblie. Cela touche également la capacité de renouveler le personnel politique canadien.
Les pays qui font concurrence au Canada dans l'économie mondiale disposent d'un grand nombre de représentants élus qui ont de l'ancienneté, des connaissances et de l'expérience; c'est ce qui fait la force de leurs assemblées législatives et de leur vie politique. Au Canada, on cultive plutôt l'amateurisme. Dans le monde d'aujourd'hui, que ce soit celui des entreprises, du commerce ou des sports, les amateurs ne peuvent se mesurer aux professionnels. Si le Canada veut prendre sa place dans l'économie mondiale, il ne doit pas envoyer une équipe de politiciens amateurs, tout comme il ne peut envoyer aux Olympiques une équipe composée de joueurs de hockey amateurs en espérant gagner. Si le Canada ne veut plus être taxé d'amateurisme, il doit traiter ses hommes politiques comme des spécialistes respectés, et non pas en faire la cible du moindre groupe mécontent qui cherche un responsable ou un bouc émissaire.
On n'examine pas suffisamment sérieusement la question du traitement, de la retraite et de la rémunération globale des députés. Il faut considérer ces indemnités comme une juste récompense accordée à des spécialistes qui font un travail essentiel pour la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes. Lorsque le public ou les parlementaires abordent la question de la rémunération, la discussion est trop souvent dépourvue du sérieux et des bases factuelles qu'elle mérite.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Franks.
[Français]
Pour les premières questions, la parole est à M. Plamondon.
M. Plamondon: Dans les recommandations de votre commission d'étude sur les indemnités des parlementaires, vous avez adroitement intitulé votre rapport «Idéaux démocratiques et réalités financières». Est-ce que le projet de loi C-85 vous apparaît satisfaisant par rapport à ce que vous avez souhaité dans vos 50 et quelque recommandations?
[Traduction]
M. Franks: La principale recommandation que nous ayons faite au sujet des pensions était de choisir l'âge de 55 ans, c'est ce que semble retenir le projet de loi. Dans cette mesure, je dirais que oui.
Nous n'avons pas tenté de déterminer quelle devait être la part respective des députés et du gouvernement pour ce qui est des cotisations, ni le montant de la pension. Nous avons présenté des recommandations très souples, à part celles qui portent sur l'âge de 55 ans. Dans ce sens, je ne vois rien dans ce projet de loi qui soit carrément contraire à nos recommandations.
[Français]
M. Plamondon: Dans votre rapport, vous avez parlé du cumul de pensions et de traitements, du double-dipping. Vous en avez parlé un peu sans faire de recommandations très précises. Le gouvernement recommande qu'il n'y ait pas de double paiement dans son projet de loi. Est-ce que vous croyez que l'application de cette loi devrait se faire immédiatement à partir de la sanction royale, tout comme le changement des pensions des députés se fera immédiatement après la sanction royale, conservant les droits acquis jusqu'à la sanction royale?
Selon vous, est-ce que ceux qui profitent d'un traitement et d'une pension devraient également commencer à soustraire immédiatement la pension du traitement lors de la sanction royale plutôt qu'on leur laisse les privilèges? La plupart des gens qui seront touchés par ça, ce sont des gens qui ont reçu des nominations politiques d'un gouvernement conservateur ou d'un gouvernement libéral. Alors, est-ce qu'on ne devrait pas, selon vous, commencer immédiatement et préciser que le double paiement cesse avec la sanction royale?
[Traduction]
M. Franks: Pour autant que je me rappelle, nous n'avons jamais parlé de ça à la commission.
Nous avons certes parlé du cumul de revenus. À ce sujet, nous nous sommes dits qu'il fallait respecter l'équité; c'est-à-dire que si l'on veut supprimer le cumul des revenus pour une catégorie d'employés de la Couronne, députés ou fonctionnaires, quel que soit le nom par lequel on les désigne, il faudrait le faire pour tous.
Il nous a alors fallu examiner certaines situations, qui ont fait l'objet de débats au Parlement, comme celle du militaire à la retraite ou celle du fonctionnaire à la retraite qui se fait élire au Parlement et qui obtient ensuite un emploi où il a droit à une retraite payée par la Couronne, ou le cas de la personne qui bénéficie d'une retraite de la Couronne du chef d'une province et qui est élue au Parlement, ou celui d'une personne qui bénéficie d'une pension de retraite privée. Nous n'avons pas réussi à trouver un moyen équitable de différencier toutes ces situations. Nous avons donc été obligés de poser la question suivante: Pourquoi faire des députés le seul groupe au Canada à qui l'on interdit le cumul de revenus? Nous ne sommes pas arrivés à donner une réponse qui nous satisfasse.
Au cours de nos travaux, nous nous sommes aperçus que la question à l'étude était très chargée politiquement et qu'elle devrait en réalité être réglée par le Parlement lui-même. Mais nous avons été incapables de trouver une réponse qui nous satisfasse en nous fondant sur les principes d'équité ou la notion d'indemnité équitable ou sur la nécessité de traiter de façon équitable des groupes différents.
Pour ce qui est de l'entrée en vigueur des dispositions du projet de loi, nous n'en avons jamais parlé. Je ne peux donc vous fournir de réponse sur ce point. Je crois que cette décision relève finalement du gouvernement et que c'est à lui de la justifier auprès du public.
[Français]
M. Plamondon: Cela veut dire que le fait de mettre une clause dans le projet de loi concernant le cumul de pension et de traitement, selon vous, crée plus d'injustice que de justice envers les députés qui ont siégé au niveau fédéral, dans le sens que ces gens-là seront plus pénalisés que d'autres qui ont travaillé dans l'armée, au niveau provincial ou municipal. Je vous donne l'exemple du maire Drapeau qui travaille à l'Unesco pour le gouvernement canadien. Il a une très grosse pension de la ville de Montréal et lui, il ne serait pas touché.
Moi aussi, je m'interroge. Je suis pour qu'on abolisse le double paiement, mais si on l'abolit, il me semble qu'il faudrait l'abolir pour tous et non pas seulement pour une catégorie de gens.
[Traduction]
M. Franks: Quant à savoir pourquoi s'en prendre aux députés en particulier, je dirais que la réponse est très simple. Le traitement des députés est une question qui est beaucoup plus d'actualité que le traitement des autres citoyens, et il y a eu un certain nombre de groupes d'intérêt qui ont soulevé la question de la rémunération des députés, alors que l'on n'a jamais parlé de celle des juges, des fonctionnaires, des militaires, des anciens maires de Montréal, des médecins, des avocats ou des autres citoyens.
Notre étude nous a permis de constater - et je crois que cela figure dans notre rapport - que le public a l'impression que les députés sont beaucoup mieux payés qu'ils ne le sont en réalité, notamment si l'on compare leur situation à celle d'autres professionnels comme les médecins et les juges. Il n'y a pas beaucoup de gens qui savent que le salaire de base d'un député est de fait celui d'un major de l'armée ou d'un enseignant d'expérience; ce n'est donc pas un salaire extrêmement élevé.
Au cours des entretiens privés que j'ai eus avec des gens, j'ai constaté que la chose la plus surprenante dans la façon dont le public perçoit la retraite des députés est que les gens ne connaissent pas les faits. Cela doit venir du poste qu'ils occupent. Lorsque vous vivez dans un aquarium, il y faut s'attendre à ce qu'on vous regarde. Le Parlement est le plus grand aquarium du Canada.
[Français]
M. Plamondon: Merci.
Le président: Merci, monsieur Plamondon. Alors, monsieur Harper, s'il vous plaît.
[Traduction]
M. Harper: Merci, professeur Franks.
Vous déclarez dans votre rapport que les députés sont en réalité sous-payés. Qu'avez-vous recommandé finalement comme rémunération totale?
M. Franks: J'ai une très mauvaise mémoire des chiffres et j'espère que vous ne m'en voudrez pas si je me trompe. Nous avons conclu sur une déclaration que la presse a reprise - et je pense à M. Silye lorsque je dis ceci - selon laquelle dans un monde idéal, un député toucherait plus de 100 000$. Nous avons donc fini par recommander un peu moins que cela, je crois que c'était 86 000$.
Permettez-moi de vous expliquer quelque chose, sans animosité aucune vis-à-vis de ceux qui sont autour de la table. Personnellement, comme la commission d'ailleurs, je pencherais plutôt du côté de M. Silye que du côté du système actuel. Nous estimons qu'il faut faire une distinction entre salaire et dépenses. Il faut reconnaître que les députés n'ont pas tous les mêmes dépenses, que cela dépend de leur circonscription. Plus la circonscription est grande, plus elle est éloignée, plus il est difficile d'y aller et d'en faire le tour pour rencontrer la population - et cela entraîne des frais considérables. Il y a aussi le problème des deux résidences, l'une à Ottawa et l'autre chez soi, et toutes les difficultés connexes.
Nous avons recommandé de couper une bonne partie de l'indemnité de dépenses non justifiables et d'en laisser un peu. Nous nous sommes dits que, comme la plupart des professionnels, les députés avaient besoin d'un peu d'argent de poche pour vaquer à leurs occupations. Nous avons estimé par ailleurs qu'ils devraient être tenus de rendre compte de l'utilisation de leur indemnité de dépenses - pour assurer la transparence. Autrement dit, à de très rares exceptions près, les députés devraient faire la liste de toutes leurs dépenses, comme tous les autres professionnels, et ces renseignements devraient être du domaine public.
Si on suit ce raisonnement, on admet que le salaire doit être considéré comme tel et correspondre à ce que touche normalement une personne occupant ce genre de poste, et que les dépenses doivent être payées comme telles. De fait, pour le salaire, nous avons fait preuve de beaucoup d'imagination et je n'avais jamais rien vu de pareil.
Nous avons essayé d'analyser le travail du député en le décomposant en différentes fonctions, directeur de bureau, législateur, conseiller en matière de politique, etc. Nous avons essayé de savoir quel salaire touchaient les personnes exerçant ces fonctions professionnellement au Canada, et nous avons ensuite fait un calcul proportionnel selon le temps consacré aux différentes activités. C'est ainsi que nous sommes arrivés à un chiffre qui dépasserait sans doute les 100 000$, si l'on ajoutait tous les éléments. Mais pour présenter un chiffre susceptible d'être accepté, nous savions qu'il fallait descendre beaucoup plus bas et c'est ce que nous avons fait. C'est ainsi que nous avons raisonné.
Nous avons donc pensé à un salaire qui refléterait les responsabilités et les fonctions d'un député, en cessant de chercher à déguiser le salaire en indemnité de dépenses - lorsque c'est bien de cela qu'il s'agit - les dépenses devant être pleinement justifiables, comme pour n'importe quel professionnel.
M. Harper: Enfin de compte, vous avez fait des comparaisons des différentes activités par opposition à ce qui est indiqué.. Vous l'avez pas dit, mais dans votre mémoire, vous sembliez indiquer que c'était international...
M. Franks: Je l'ai simplement mentionné dans mon mémoire. Je ne voulais pas répéter ce qui se trouve dans le rapport de la commission. Je pensais que les autres commissaires seraient là pour expliquer.
Je voulais insister sur le fait que nous sommes, d'après moi, dans une position particulière au Canada puisque nous avons, d'après toutes les méthodes de mesure que j'ai pu trouver, le Parlement le plus amateur de tous les pays occidentaux. Cela a un impact négatif sur le Canada. C'est dû, en partie, au niveau de rémunération. Je ne dis pas que c'est la cause principale, mais c'est un facteur. D'après moi, les politiciens n'auront pas le respect qu'ils méritent tant qu'ils n'auront pas le salaire qui leur revient.
M. Harper: Le public interprétera sans doute cela dans l'autre sens; les amateurs méritent un salaire plus bas.
Vous avez déjà entendu cette question parce que je l'ai posée à M. Fleming. J'aimerais entendre vos commentaires.
Dans votre document, vous répétez une bonne partie des arguments que nous avons entendus. Je vais à nouveau poser la question. Ces pensions sont là parce que les députés touchent des salaires trop bas. Elles existent parce que les députés n'ont aucune stabilité d'emploi et qu'il leur est difficile de se réadapter au marché du travail tout d'un coup, etc.
Je le répète encore une fois, si l'on étudie la structure du régime de retraite, on s'aperçoit qu'elle ne vise pas du tout à répondre à ces besoins. Ceux qui sont au début de leur carrière n'ont pas droit aux allocations de retraite. Ceux qui ont les allocations les plus élevées sont ceux qui sont là depuis plus longtemps. Ils sont souvent plus âgés. Il sont presque certainement ministres. Ils ont d'excellentes perspectives professionnelles en dehors du cabinet et du gouvernement. Beaucoup d'entre eux continuent à travailler et gagnent beaucoup plus d'argent. Comment peut-on concilier le régime de pension avec tous ces éléments?
M. Franks: Autrefois - je remonte à une vingtaine d'années en arrière - beaucoup de députés sont partis sans retraite. À l'époque, il n'y avait pas d'indemnités pour les députés partant sans retraite, ni d'indemnités de réétablissement, ou peu importe comment on l'appelle. On a vu des députés qui n'avaient pas assez d'argent pour prendre l'avion pour rentrer chez eux lorsqu'ils ont perdu leur siège. De fait, je connais au moins une députée pour qui il a fallu passer le chapeau en caucus afin de réunir assez d'argent pour payer son billet d'avion jusqu'à la côte ouest. C'est cette transition que l'on a essayé de faciliter avec le régime de retraite et tous les changements apportés aux indemnités et aux dépenses.
Je suis de votre avis, cela ne règle pas le problème des députés qui ne sont pas restés assez longtemps pour avoir droit à une retraite. C'est pour ceux-là que l'on a établi diverses indemnités pour faciliter la transition. Dans notre rapport, nous avons recommandé que l'on augmente ces indemnités et que tous les députés y aient droit, qu'ils soient admissibles aux allocations de retraite ou pas. Ces indemnités de départ se comparent à celles que reçoivent les personnes qui travaillent dans des entreprises ou ailleurs, lorsqu'elles quittent un emploi au bout de peu de temps.
Il y a des imperfections dans le régime de retraite. À mon avis, et ce n'est pas l'avis du public canadien dans son ensemble, l'impact financier réel de ces imperfections n'est pas très grand. Le principal problème est de parvenir à une représentation optimale au Parlement canadien et à une rémunération suffisante pour les députés.
Une autre idée, pour reprendre une analogie sportive... Si j'ai bien compris, lorsque le régime de pension a été instauré, la seule profession où l'on ait pu trouver des carrières à hauts risques comparables à celle des députés c'est dans la Ligue nationale de football aux États-Unis. Dans une certaine mesure, le régime de pension initial a été calqué sur le régime de pension de la Ligue nationale de football aux États-Unis. Cela rejoint ce que je pense de la politique, que c'est un sport de contact, mais je ne sais pas dans quelle mesure cette analogie peut vraiment être utile.
M. Harper: Vous avez parlé du cumul des revenus, et je ne suis pas opposé à ce que vous avez dit. Au fur et à mesure que nous en avons parlé, la définition du cumul n'a cessé de s'élargir. Si l'on adopte la définition de certains députés, cela s'appliquerait à un énorme pourcentage de la population âgée de plus de 60 ans.
Si l'on essaie de cerner le problème - avant d'en arriver à l'étude article par article du projet de loi - il me semble qu'au départ, le problème du cumul des recours était très spécifique. Tout d'abord, cela venait du fait que les députés avaient droit à une retraite très jeunes. Quelqu'un pouvait donc toucher une retraite à 40 ou 50 ans et prendre un autre emploi.
Deuxièment, ce n'est pas par le biais d'un concours de la fonction publique qu'ils obtenaient un deuxième emploi au gouvernement. C'était du favoritisme flagrant. Quelqu'un qui avait été député était nommé à un autre poste par le même gouvernement, même après avoir été battu aux élections dans certains cas. J'ai l'impression que les cas de cumul qui inquiètent les gens - même au sein de la fonction publique fédérale - sont en fait de nature très restrictive.
M. Franks: J'aimerais dire un mot à ce sujet à titre personnel, mais pas en qualité de membre de la commission.
L'un des problèmes, pour moi, et j'ai beaucoup écrit sur ce sujet, c'est que les partis politiques, au niveau fédéral ou provincial, ou les deux, offrent souvent des emplois pour récompenser la bonne conduite d'ex-parlementaires.
Le premier ministre Trudeau a nommé tellement de membres de son caucus à des postes de faveur en 1984 que, de majoritaire, son gouvernement est devenu minoritaire, avant les élections. J'ai toujours trouvé cela sidérant et c'est un fait dont le public canadien n'a jamais vraiment pris conscience. Ce n'est pas ainsi que se comporte un gouvernement qui pense maintenir sa représentation parlementaire après des élections.
Je voudrais un système dans lequel les avantages accordés aux députés, soit par la société, soit par le Parlement, soient suffisants pour que les postes de faveur offerts après la période passée au Parlement ait moins d'influence sur les députés, ou moins d'influence potentielle.
Dans ce sens, on pourrait dire qu'il faudrait éliminer le cumul pour les parlementaires, mais pas ailleurs dans le secteur public où cela pourrait se justifier. Ce n'est pas là un argument classique pour justifier l'élimination du cumul. Si l'on examine la question sous un angle plus large, je crois que les cas soulevés par M. Plamondon sont de véritables problèmes. Je connais beaucoup de fonctionnaires qui prennent leur retraite à 55 ans - ce sont des professionnels - et qui travaillent ensuite comme consultants pour le gouvernement par le biais d'une petite entreprise ou autre. Ils gagnent probablement beaucoup plus d'argent qu'avant. Il y a toutes sortes de problèmes de ce genre qu'il faudrait examiner.
Je le répète, si ce qui se passe au Parlement en ce domaine nous inquiète, c'est que le Parlement est le cas le plus visible. Quant à moi, ce n'est pas tant le gaspillage de deniers publics qui me préoccupe, mais plutôt l'effet que cela peut avoir sur le comportement des députés et sur leurs attentes.
Mme Catterall: Il est agréable d'entendre reconnaître que notre travail est important pour le pays et pour le monde, et pas seulement pour nous en qualité de députés. Pendant tout ce débat, j'ai eu l'impression que les députés n'étaient là que pour une seule raison, se préparer un petit lit douillet et remplir leurs poches.
Franchement, tout laisse penser le contraire. Le témoin précédent a parlé de députés qui ont droit maintenant, ou ont eu droit avant, à une pleine retraite. À en croire ce qu'ont répété si souvent les députés de l'autre côté de la Chambre, on pourrait dire que la seconde où ils ont droit à cette magnifique assiette au beurre, ils vont partir en courant avec tous leurs dollars.
Du coup, je me demande pourquoi quelqu'un comme M. Caccia, qui aurait eu droit à une pleine retraite il y a 12 ans, a continué à se présenter pendant 12 ans encore, et à contribuer ainsi, comme vous le dites, à donner à ce pays à un groupe de législateurs expérimentés et compétents. Il a délibérément renoncé à un demi million de dollars, et je ne compte même pas les intérêts que cet argent aurait rapporté au fil des années, puisqu'il aurait plus que doublé pendant la période dont nous parlons.
Nous avons un ministre de la Couronne qui a maintenant droit à une pleine retraite après avoir passé 15 ans ici. Cela représenterait plus de 50 000$ par an. Et pourtant, je pense que Brian Tobin va de nouveau se présenter, au lieu de disparaître avec cet argent et d'aller se gagner un beau salaire confortable quelque part, en plus de sa pension.
Pendant toutes les années où j'ai observé la situation, les députés ont agi ainsi, et ont gardé leur poste en renonçant aux avantages financiers qu'ils auraient pu avoir, souvent en se désavantageant même financièrement. Je ne vous ai donné que deux exemples aujourd'hui. Je suis heureuse de vous entendre présenter un point de vue différent ce matin.
Il faudra peut-être donner des explications à certains des députés de l'autre côté de la table pour qu'ils comprennent l'état d'esprit des personnes qui continuent à travailler comme député au Parlement, bien que ce ne soit plus dans leur intérêt sur le plan financier. Je vous ai donné deux exemples parmi beaucoup d'autres.
Je voudrais passer à certaines des questions touchant la retraite elle-même et à ce que votre commission a peut-être étudié.
On semble avoir, à tort, l'impression que l'on augmente la valeur des allocations de retraite dans cette loi au lieu de les réduire. Pourtant, nous les réduisons bel et bien.
On a parlé de donner aux députés des retraites comparables à celles des autres salariés. Il est très difficile de trouver une situation comparable. À part cela, pour que les régimes soient comparables, il faudrait aussi qu'ils soient transférables comme les régimes de pension privés.
Une députée comme Mme Grey, par exemple, pourrait combiner les années de services où elle a cotisé à un régime de retraite comme enseignante et ses années de service à titre de députée. C'est ce que peuvent faire la plupart des Canadiens qui ont cotisé à des régimes de retraite. Si Mme Grey était entrée à la fonction publique à un salaire comparable, elle pourrait ajouter ses années de service comme députée aux autres années.
Votre commission s'est-elle demandée si c'est un facteur qui touche les retraites des députés?
M. Franks: Oui et non.
Mme Catterall: Avez-vous dit oui et non?
M. Franks: Nous avons réfléchi à la question et nous nous sommes dits que nous n'avions pas le temps de trouver une réponse. De mon point de vue, pas en tant que commissaire mais parce que je m'intéresse à toute cette question, si l'on admet qu'il faut revoir l'ensemble de la rémunération, les retraites doivent en faire partie au lieu d'être examinées à part, comme c'est le cas ici.
En ce sens, j'aurais tendance à dire que les régimes de retraite des députés devraient être comparables à ceux des autres professionnels travaillant à court terme. Très simplement, cela voudrait dire que l'on achète un REÉR, la Chambre des communes effectuant des versements équivalents - ou plus ou moins, je ne vais pas préciser. Ensuite, le REÉR appartient en totalité au député et il est transférable, comme les autres REÉR. Je crois que cela règle le problème, mais il faut ensuite tenir compte de tous ces autres contextes, parce que chaque fois que l'on étudie le salaire des députés, on y inclut la valeur attribuée aux pensions. Mais ce n'est que la valeur qu'on leur attribue.
En réponse à votre longue question de tout à l'heure, qui n'en était pas une, je n'ai jamais rencontré de député qui attendait impatiemment de prendre sa retraite parce qu'il ou elle avait droit à une pension. Par ailleurs, j'ai rencontré beaucoup de députés qui ont envie de rester à la Chambre parce que cela les conforte de savoir que le régime de retraite sera là pour subvenir à leurs besoins, lorsqu'ils auront fini d'essayer d'élever une famille avec un revenu très modeste. Si cela peut vous aider, nous avons aussi constaté cela très souvent à la commission parmi les députés à qui nous avons parlé ou qui nous ont écrit.
Mme Catterall: Je crois vous avoir entendu dire que vous ne teniez pas nécessairement compte du coût que représentaient pour les contribuables les diverses propositions que vous avez faites. Je ne sais pas si vous avez étudié les versements et les cotisations correspondant à la retraite.
Je voudrais distribuer cela aux membres du Comité, à titre d'information. Monsieur le président, c'est un extrait de l'état annuel du compte d'allocations de retraite des députés, et notre témoin aura peut-être des observations à faire. Il y a un résumé annuel des cotisations des députés, des cotisations du gouvernement et des intérêts gagnés sur ce compte. On fait la comparaison avec le total des sommes versées. Cela remonte jusqu'à 1952, lors de la création du régime.
Pour chacune de ces années, les sommes versées étaient inférieures aux sommes perçues. Je voudrais que le Comité demande des éclaircissements à ce sujet au Conseil du Trésor pour savoir d'où vient ce 3,5:1 ou ce 6:1 que la National Citizens Coalition continue d'utiliser dans sa publicité.
Je dois dire aussi que presque chaque année, les cotisations des députés ont dépassé celles du gouvernement. La seule exception, c'est lorsque le gouvernement de l'époque a décidé, pour une raison quelconque, en 1992, qu'il lui fallait procéder sur une base actuarielle sérieuse, alors pourtant que depuis 40 ans, les cotisations et les revenus avaient largement couvert les dépenses. On a décidé tout d'un coup qu'il fallait procéder sur une base actuarielle solide de façon à pouvoir payer n'importe quel député susceptible de prendre sa retraite à n'importe quelle date au cours du prochain siècle.
Les choses ont donc changé depuis, monsieur le président, puisque le gouvernement n'a plus les mêmes obligations.
J'aimerais toutefois que les représentants du Conseil du Trésor nous expliquent ce rapport de 3,5:1 qu'ils nous ont mentionné, compte tenu de cet historique.
Le président: Madame Catterall, tout ceci est bien beau, mais je pense que ce n'est pas vraiment le moment de le demander.
Mme Catterall: Ce n'est peut-être pas le bon moment, mais le comité peut poser des questions aux hauts fonctionnaires autrement qu'en...
M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): Je ne sais pas d'où la National Citizens' Coalition tire ses chiffres. Pourquoi ne leur demandez-vous pas de venir vous l'expliquer?
Le président: C'est aux témoins qui sont ici qu'il faut poser des questions. Le témoin peut...
Mme Catterall: Si le témoin souhaite faire un commentaire...
Le président: Il a tout à fait le droit de le faire. Sinon, sauf tout le respect que je vous dois, madame Catterall, votre question n'est qu'une simple réflexion à haute voix.
Mme Grey: Nous voulons avoir ces chiffres du Conseil du Trésor.
M. Franks: Monsieur le président, si nous n'avons pas approfondi davantage la question des pensions, c'est que les analyses des coûts et avantages d'un régime de pension entraînent des calculs mathématiques très complexes, sans parler d'hypothèses sur la longévité des gens et une foule d'autres choses. C'est le travail d'actuaires professionnels. Non seulement nous n'avions pas le temps de le faire, mais notre budget ne nous le permettait pas.
À l'heure actuelle, pratiquement tous les régimes de pension du monde ont l'air de faire de l'argent si l'on se base sur la comptabilité de caisse annuelle.
Le principal problème qui préoccupe les sociétés et les gouvernements au sujet des passifs sans capitalisation, c'est le passif futur, quand la population augmente. Évidemment, là encore on part d'hypothèses: Le nombre de personnes qui travaillent, le montant qu'elles touchent, le montant de la pension, l'inflation, la croissance des investissesments, etc.. Quand on parle de tout cela, il y a toujours une marge d'erreur. Dans bien des cas, bien que les gens refusent de l'admettre, cette marge d'erreur est tellement importante qu'on ne peut pas avoir la moindre idée de ce qui se passera dans 20 ans.
Personnellement, pour ce qui concerne les pensions des députés, j'ai l'impression que, tôt ou tard, les dépenses vont dépasser les recettes. Ce jour-là, je ne sais pas... L'avantage de la formule du REÉR est qu'il n'y a absolument aucune inquiétude à avoir de ce côté-là.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Silye, vous avez été très patient.
M. Silye: Merci, monsieur le président.
Monsieur Franks, je voudrais vous demander votre opinion sur deux choses.
Tout d'abord, il y a une contradiction entre la dernière remarque du dernier paragraphe de l'exposé d'aujourd'hui et ce que vous dites dans votre rapport. En effet, vous dites aujourd'hui qu'il faut traiter plus sérieusement toute la question de la rémunération. Vous laissez entendre que bien souvent, on ne lui accorde pas l'attention qu'elle mérite. Vous l'avez constaté ici aussi.
Nous sommes limités à une journée d'audition de témoins. Nous sommes limités à une heure, à cinq minutes. Le gouvernement traite la question par-dessous la jambe. Il fait cela pour la forme. Vous le confirmez.
Le ministre est venu ici. Je ne sais pas si vous étiez là.
J'avais recommandé qu'un groupe indépendant, sans lien de dépendance, examine l'ensemble de la question et propose quelque chose qui restaurerait l'image des politiciens, mais ce n'est pas le moment. Cela ne fait que renforcer le côté égoïste du projet de loi C-85, et le gouvernement ne veut pas le comprendre.
Or dans votre rapport, vous dites qu'il faudrait accorder aux députés un traitement de 86 000$ par an avec une couverture suffisante pour leurs frais. Pourtant, il n'est pas prudent de recommander une hausse de 25 p. 100 de leurs indemnités. Cela ne ferait qu'accroître la rancoeur du public à l'égard du gouvernement et des politiciens. Vous faites donc tout un sermon vous-même. D'un côté, vous recommandez une vision ouverte et généralisée, vous êtes tout à fait pour. Mais ensuite, vous dites qu'il vaudrait peut-être mieux ne pas recommander d'augmentation, car cela ne ferait qu'accroître l'hostilité. Que me répondez-vous?
Deuxièmement, le commentaire que vous faites dans votre mémoire, disant que les politiciens... nous avons besoin de vétérans ici, on ne peut pas avoir des nouveaux qui ne connaissent rien, et plus un politicien a de l'expérience, plus il fait bien son travail. Je crois qu'il y a beaucoup d'arguments à opposer à cela.
Ma question est donc celle-ci: est-ce qu'un député passant ici deux mandats - c'est-à-dire de huit à 10 ans - n'aurait pas autant à offrir au pays que quelqu'un qui va rester 16 ans, 25 ans ou plus de 15 ans?
J'aimerais avoir votre avis sur ces deux questions.
M. Franks: Ce sont deux questions excellentes. Comme nous l'avons dit, il y a beaucoup d'arguments pour et contre dans les deux cas que vous évoquez.
Pour ce qui est de la première question, vous devez admettre que le rapport d'une commission n'est qu'un rapport de commission. C'est très bien; c'est là-dessus que nous nous sommes entendus. J'aimerais que les autres commissaires soient là avec moi pour donner des précisions.
De fait, nous avons voulu concilier ce qui nous paraissait souhaitable avec ce qui est politiquement possible. Nous n'aurions peut-être pas dû nous livrer à cet exercice et nous aurions dû nous borner à décrire simplement la situation idéale. Mais nous avons préféré décrire aussi ce qui nous paraissait raisonnable et ce que nous voudrions que le Parlement fasse immédiatement. Nous avons reconnu dans le rapport qu'il y avait une différence entre ce que, d'après nous, les députés devraient toucher et ce que nous recommandions. C'est dit ici. Voilà l'explication en réponse à la première question.
La deuxième portait sur les députés à long terme, si j'ose dire. Je me suis rendu compte en écrivant cela que les Partis d'opposition n'allaient sans doute pas être très favorables à cet argument en faveur des députés qui restent longtemps, parce qu'à de rares exceptions près, ils sont nouveaux au Parlement. Je sais aussi qu'il y a, en Amérique du Nord en particulier, un mouvement très fort en faveur de mandats limités.
Si l'on cherche à limiter les mandats aux États-Unis, c'est que 95 p. 100, au moins, des membres du Congrès se représentent aux élections, et parmi ceux-là - la dernière élection étant une exception - ils sont généralement moins de 2 ou 3 p. 100 à être battus. Donc une fois que l'on est entré, on n'en sort pratiquement plus. Le Sénat est encore plus sûr. Les dernières élections constituent une exception. Cela veut dire qu'un membre du Congrès américain - ne parlons pas du niveau des États qui a aussi une influence - en tenant compte des deux chambres du Congrès, a une bonne chance de faire là une carrière de 20 ans ou plus.
Pour un député au Parlement canadien, l'espérance de carrière est de moins de cinq ans. Vous n'allez pas vous mettre à trembler à cette idée parce que vous le savez sûrement. Je veux parler des années passées au Parlement.
Pour étudier tout cela, il faut tenir compte du contexte d'ensemble.
Je comprends que l'on veuille limiter la durée du mandat des membres du Congrès et des sénateurs aux États-Unis parce que la représentation n'évolue pas là-bas, comme vous l'avez très bien expliqué dans vos remarques.
Le problème est tout à fait inverse à la Chambre des communes fédérale canadienne. Il y a un roulement tel qu'il y a un manque de continuité, un manque d'expérience. De plus, cela entraîne un manque d'autonomie chez les députés.
Je ne me souviens pas si vous étiez là lorsque nous parlions des votes libres, mais pour qu'un député soit autonome et se sente libre de défier les chefs de son Parti, il ne doit pas craindre de mettre son siège en jeu. Les élus américains n'ont pas à s'inquiéter du leadership du Parti pour ce qui est de revenir et ils savent que les électeurs vont les soutenir. Bien rares sont les députés canadiens qui peuvent être aussi confiants. La plupart du temps, ils représentent moins de 20 p. 100. Je crois que c'est encore moins à l'heure actuelle. Aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, les sièges assurés représentent environ 80 p. 100.
Si j'insiste sur la continuité au Canada, c'est parce qu'elle n'est pas suffisante. Si je critiquais le Congrès américain, j'adopterais sans doute un point de vue différent.
J'espère avoir répondu à votre question.
M. Silye: Encore une question. Approuvez-vous les indemnités non imposables? Vous ne parlez pas dans votre rapport des avantages non imposables que reçoivent les députés.
M. Franks: Il y en a dans toutes les professions.
M. Silye: Toutes les professions bénéficient d'avantages non imposables?
M. Franks: Bien sûr.
M. Silye: Pourriez-vous nous donner des précisions sur ce point, s'il vous plaît?
M. Franks: Comme professeur, je peux obtenir des subventions de recherche. Elles ne sont pas imposables. Elles financent une bonne partie de mes travaux, ce qui est aussi très utile. Les médecins vont participer à des congrès dans le monde entier pour mieux connaître les dernières découvertes dans leur domaine, à Tahiti, en Finlande et ailleurs.
M. Silye: Avez-vous une police d'assurance-vie qui est assortie d'une exemption d'impôt?
M. Franks: J'ai une police d'assurance-vie qui est payée.
M. Silye: Devez-vous payer des impôts dessus?
M. Franks: C'est assez courant dans l'industrie d'avoir une police d'assurance-vie.
M. Silye: Payez-vous la prime?
M. Frank: Je paie la prime.
M. Silye: Nous ne payons pas la prime. Vous le savez, vous avez étudié la rémunération.
M. Franks: Je vais me répéter. Quand je regarde l'ensemble du programme de rémunération, je ne trouve pas que les députés sont trop payés. Cela dit, je répondrai à votre question directement.
Vous savez sans doute que la rémunération et les allocations des députés proviennent de deux enveloppes législatives distinctes.
La première est régie par des lois, dont la Loi sur le Parlement du Canada et celle dont il est question ici. Si je comprends bien, il y a un amendement à une autre loi. Je ne me souviens pas laquelle. Mais une fois adoptées, ces dispositions réglementaires sont figées. Elles sont coulées dans le bronze, à moins que quelque chose ne survienne.
L'autre enveloppe est le budget annuel du Parlement, qui est adopté simplement à titre de budget et qui peut être changé puisque c'est un budget.
Une partie importante des allocations, dont l'allocation de logement de 6 000$, les allocations de déplacement - et je ne suis pas certain dans le cas des pensions, mais je suppose qu'elles entrent dans la même catégorie - se trouve dans les budgets annuels. S'ils sont chargés de cette façon, c'est que les gouvernements et le Parlement craignent au plus haut point, et à juste titre, de toucher aux lois à cause de la réaction publique que suscitent des mesures de ce genre. Si je les modifiais, je ne voudrais pas que ces deux programmes se fassent concurrence pour essayer de parvenir aux mêmes résultats.
J'ajouterai ceci, toutefois. Il est ressorti clairement des rapports de recherche de notre commission qu'il est absolument impossible d'accroître les traitements ou les allocations des législateurs d'un pays sans soulever la colère publique. Le pays qui réussit le mieux à les augmenter, parce qu'il se moque un peu de l'opinion publique, ce sont les États-Unis.
M. Pickard: Merci d'être venu témoigner, monsieur Franks.
Votre point de vue m'intéresse beaucoup dans une perspective politique. Je pense que l'argument n'est pas tant économique que politique. Comme vous l'avez bien fait ressortir, les électeurs sont très cyniques à propos des politiciens et de la vie politique.
Vous avez été très clair dans votre rapport:
- Peu importe nos résultats, nous ne pensons pas qu'il soit prudent de porter les traitements des
députés à 86 000$.
- Que le premier jour de la prochaine législature, les traitements soient portés à 86 000$.
Le ministre a certainement tenu compte de votre opinion selon laquelle il serait tout à fait imprudent, actuellement, de toucher aux traitements et aux autres avantages - les allocations non imposables et tout ce qui les accompagne.
Tous les témoins qui ont comparu devant nous aujourd'hui ont déclaré que les députés ne sont pas assez payés - tous sans exception.
Vous appuyez le rapport de Sobeco Ernst & Young.
Une voix: Tout comme M. Silye.
M. Pickard: Oui, même les Réformistes sont d'accord.
Mais, à mon avis, il y a un jeu politique dans tout ce débat. Ce jeu politique tourne autour du fait que les régimes de retraite devraient être modifiés parce qu'ils sont trop extravagants.
Mais afin que justice prévale, ne pensez-vous pas que le ministre a effectivement réduit la rémunération des députés par les mesures qu'il a prises et a essayé d'apporter quelques adoucissements, comme vous semblez l'avoir proposé, soit dit en passant? Il aurait pu aller plus loin, mais cela aurait-il été équitable, non seulement aux yeux des contribuables, mais aussi des gens qui ont été élus? Serait-il équitable d'aller plus loin maintenant, quand on ne peut que toucher aux pensions et pas aux traitements? À long terme, faudrait-il concevoir et appliquer un mécanisme, comme celui que vous proposez, qui porterait sur l'ensemble du programme?
La question est la suivante: Politiquement, devrions-nous jouer ce jeu actuellement? Ce n'est pas une question de finances, c'est une question politique et tout le monde dans la salle le sait bien. Les gens alignés là-bas s'affichent comme Réformistes, etc. C'est une question politique. Les raisons invoquées par les deux camps sont très politiques et ne tiennent pas compte de l'aspect financier.
Je pense, Deborah, que votre remarque à propos de l'intérêt financier raisonnable est importante. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit; mais où allons-nous finir si cette proposition va de l'avant?
Je pense que la justification de la disposition de désengagement, une autre question politique en ce qui me concerne... les Réformistes ont demandé à se désister. On leur a donné la possibilité de faire ce qu'ils avaient demandé.
M. Franks: Vous posez une foule de questions. Je peux proposer deux attitudes face à la rémunération. Supposons que les dépenses couvrent les dépenses, et que nous jouions franc-jeu. Oublions les pensions, parce que nous supposons que les REÉR les ont achetées et que nous avons réglé ce problème.
Je vois deux solutions pour régler le problème de la rémunération, mais il me semble que le gouvernement du Canada n'est pas disposé à retenir l'une ou l'autre, peut-être pour de bonnes raisons.
La première consisterait à mettre sur pied des commissions indépendantes composées de gens équitables, de gens qui ont des points de vue semblables, comme moi, et dont les recommandations lieraient les parties. Ces recommandations ne pourraient être débattues, et ce que nous recommanderions deviendrait la réalité. Je crois comprendre que le Manitoba a adopté cette solution. Je me trompe peut-être, mais je crois qu'il en est ainsi.
La deuxième solution consisterait à lier la rémunération des députés à d'autres professions ou d'autres emplois. Une commission qui a précédé la mienne a proposé un lien avec le salaire moyen versé au Canada. Une autre façon de procéder serait d'établir un lien avec les juges fédéraux d'échelon inférieur, ce qui représenterait une hausse considérable pour vous, que le public s'en rende compte ou non. On pourrait aussi prendre le niveau médian des hauts fonctionnaires, les fonctionnaires de rang le plus élevé, les sous-ministres et les sous-ministres adjoints, et fixer la rémunération à ce niveau.
Une voix: Comme leurs pensions.
M. Franks: Il serait nécessaire de rester en poste pendant un certain temps avant d'avoir droit à la pension. Ce n'est pas le cas actuellement pour les députés.
Il me semble que l'une ou l'autre de ces solutions réglerait le problème de chaque gouvernement et de chaque Parlement appelés à prendre une décision. Cela ne règle pas le problème de l'hostilité du public. Je le répète, d'après nos études, il est impossible d'accroître la rémunération des députés ou même de modifier les pensions, comme on le fait actuellement, sans soulever un tollé de protestations. C'est vrai dans tous les pays que nous avons étudiés, sauf les États-Unis lesquels, comme je l'ai dit, semblent offrir une rémunération élevée sans grande réaction publique.
M. Harper: Je voudrais poser quelques questions inspirées de vos observations. D'abord, à propos de vos dernières remarques. Dans certains cas, je ne suis pas du tout d'accord avec le fond de votre témoignage et je pense que vous présentez ces arguments comme s'ils étaient évidents alors qu'il est parfois possible de donner une explication complètement différente.
Permettez-moi seulement de contester votre dernière remarque, selon laquelle il y a eu relativement peu de protestations aux États-Unis au sujet des salaires élevés et des hausses de rémunération, par rapport à d'autres pays. Une explication est peut-être que le roulement est faible et qu'ils sont protégés, mais il y a quand même des élections. La différence tient peut-être au fait que les législateurs américains continuent d'être de vrais législateurs, dans le sens classique du terme, et que dans d'autres régimes parlementaires, l'exécutif et les partis dominent tellement la vie politique que le législateur moyen n'est simplement pas important et pas digne, aux yeux du public, du traitement élevé qui serait accordé à un membre du Congrès américain.
M. Franks: Les membres du Congrès américain ne sont pas les législateurs les mieux payés au monde. Singapour remporte la palme. La France ne vient pas loin derrière. Quand je parle du cumul des mandats, une très forte proportion des législateurs français - plus du tiers d'entre eux, peut-être plus de la moitié - sont titulaires d'une charge dans un autre palier de gouvernement; et quand on fait le compte, il y a des gens qui obtiennent...
M. Boudria: Il peut y en avoir jusqu'à quatre.
M. Franks: On peut gagner 70 000$ à titre de maire, plus une automobile et un chauffeur, à la disposition de son épouse. On siège au conseil régional et on gagne ainsi 70 000$ par année, plus une automobile et un chauffeur, à la disposition des enfants, puis on gagne 70 000$ à titre de membre de l'Assemblée nationale, plus une automobile et un chauffeur, à sa disposition. Ce n'est pas inhabituel.
M. Harper: Mais cette explication est systématique et n'a rien à voir avec...
M. Franks: Je n'irai pas jusqu'à dire que les législateurs américains sont bien payés parce qu'ils le méritent et que les autres ne le méritent pas.
M. Harper: Je le sais bien. Je dis simplement que d'autres explications assez évidentes sont possibles.
J'ai une deuxième question brève. Vous avez déclaré, et c'est juste, que le public ne comprend pas toujours les faits et que l'opinion publique, ou celle des députés à la limite, se fonde parfois sur des malentendus.
Ne vaudrait-il pas mieux ouvrir un processus comme celui-ci, ou un autre mécanisme salarial, à la participation publique ou au débat public? On suppose toujours dans certains milieux que si nous agissons ainsi, nous aboutirons au plus faible dénominateur commun. Les gens qui croient que les députés devraient être payés tant de dollars par année obtiendront gain de cause. Mais en réalité, n'est-il pas plus probable que si l'on donne plus d'information et si l'on élève le débat public, on obtient une évaluation bien meilleure à ce niveau et que les politiciens et leur entourage doivent aussi convenir que leur auto-évaluation est peut-être un peu élevée?
M. Franks: Pensez-vous, si nous agissions ainsi, qu'il faudrait inclure les fonctionnaires, les juges, les militaires, et tous les employés de la Couronne ou seuls les députés seront-ils...
M. Harper: Je n'y avais pas pensé; je parle seulement des députés.
M. Franks: Je vois.
A ma connaissance, le pays qui va le plus loin dans cette direction est la Suède. Dans ce pays, la liste des gens dont le salaire est fixé par le gouvernement et rendu public va du premier ministre jusqu'aux évêques, aux membres du clergé, aux facteurs, aux gardiens de prison, etc., tous les fonctionnaires du gouvernement ou tous les employés reliés au gouvernement. Cette liste est fixe et comprend une centaine de catégories, dont les législateurs. Quand les législateurs suédois sont peu payés par rapport au Canada, ils le sont par rapport à tous les autres pays, mais leur traitement est comparable à celui des ambassadeurs et des juges suédois. Tous les traitements sont reliés les uns aux autres. Je le répète, c'est le seul pays que je connaisse qui soit allé au bout de ce raisonnement.
Les Suédois disent qu'ils ont besoin d'une échelle salariale nationale. Il y a beaucoup d'arguments contre ce raisonnement, parce que nous vivons dans une société de libre entreprise. Là encore, le problème en est un d'équité à mon avis. Si vous ciblez un groupe, pourquoi ne pas cibler quiconque travaille pour le gouvernement?
M. Harper: Je pense que, bien souvent, on entend dire que nous sommes des représentants publics chargés de fixer nos propres salaires et que cela nous place dans une situation un peu délicate.
M. Franks: L'autre solution, c'est de fixer votre salaire et d'affirmer ensuite que vous en assumez la responsabilité et que les électeurs peuvent vous mettre à la porte aux prochaines élections s'ils ne sont pas contents. Je parie que c'est ce que vous souhaitez et, peut-être, la solution à retenir.
Le président: Nous semblons nous diriger dans cette direction.
Merci beaucoup, professeur Franks. Voilà qui conclut les témoignages de ce matin. La séance du comité est interrompue jusqu'à 15h30.
M. Silye: Monsieur le président, je voudrais invoquer le Règlement. Notre comité a reçu une lettre de la Canadian Taxpayers Federation, qui demandait à présenter un bref exposé au comité sur la question des pensions des députés. M. Kenney est présent dans la salle et j'aimerais proposer, appuyé par M. Harper, qu'il soit entendu et présente un bref exposé, soit maintenant, soit après le dernier témoin, qui devrait comparaître à 16h30.
Le président: Quel est le souhait du comité?
M. Boudria: Entendons-le maintenant. Nous devrons bien sûr lever la séance à 14 heures, à cause de la Période de questions.
M. Silye: J'ai un exemplaire de son mémoire, alors je pense qu'il pourrait témoigner.
Motion adoptée
M. Jason T. Kenney (directeur exécutif, Canadian Taxpayers Federation): J'ai quelques exemplaires de notre mémoire, mais je ne pense pas qu'il y en ait assez pour tout le monde.
Le président: On peut les distribuer.
Vous avez la parole, monsieur Kenney.
M. Pickard: Monsieur le président, pouvez-vous présenter M. Kenney?
Le président: M. Kenney peut le faire lui-même au début de son exposé. Merci, monsieur Pickard.
M. Kenney: Merci beaucoup. Je vous remercie de me donner la parole. Je m'appelle Jason Kenney. Je suis directeur exécutif de la Canadian Taxpayers Federation.
Nous sommes un organisme de pression non partisan, sans but lucratif et qui compte 84 000 membres. Notre mandat consiste à promouvoir une utilisation responsable et efficiente des deniers des contribuables, à promouvoir des réformes démocratiques et à encourager les contribuables à participer davantage au processus politique.
Nous nous intéressons depuis toujours à la rémunération et au régime de retraite des parlementaires et, plus précisément, aux régimes de retraite des législateurs provinciaux. C'est pour cette raison que nous avons demandé à comparaître devant le comité.
Nous étions navrés que le comité ait décidé de ne pas nous entendre, mais nous sommes heureux que vous nous donniez cette possibilité aujourd'hui. J'essaierai d'être bref et j'espère que notre mémoire vous donne des recommandations plus détaillées.
Vous étudiez le projet de loi C-85 et je tenterai de limiter mes remarques à ce projet de loi sur lequel notre mémoire se concentre, encore que des questions plus vastes concernant la rémunération des députés soient en cause.
Permettez-moi de dire, d'entrée de jeu, qu'à notre avis et à celui de nos membres évidemment, le régime de retraite actuel prévoit des niveaux de prestations tout à fait déraisonnables, et ce, pour deux raisons bien précises.
De tous les Canadiens, seuls les parlementaires peuvent légiférer eux-mêmes les prestations versées par les contribuables, prestations payées à même les deniers publics obtenus par l'entremise de pouvoirs du gouvernement, il s'agit d'un pouvoir unique dont jouissent seulement les législateurs. Ainsi, quand j'ai entendu le témoin précédent déclarer que d'autres personnes pourraient cumuler des pensions et des traitements et que ce n'est pas le cas des députés, je pense qu'une différence cruciale est que les législateurs se trouvent, sinon en conflit d'intérêts réel, du moins en conflit d'intérêts perçu en ce qui concerne l'établissement de leur propre rémunération.
Les coûts actuels du régime de retraite des députés sont tout à fait injustifiables, selon nous. J'ai entendu un député se demander si le régime est bien financé ou non.
Il est assez clair que, d'après toutes les données actuarielles, pour chaque dollar versé par les députés, le gouvernement verse environ 5,80$, par l'entremise des contribuables, grâce aux volets enregistrés et non enregistrés du régime.
Nous sommes fermement convaincus qu'il faut une réforme fondamentale et des prestations de retraite de base suffisantes pour les députés. Nous ne proposons pas, comme je l'ai entendu dire par certains députés ici et par le passé, qu'il ne devrait pas y avoir de prestations de retraite pour les parlementaires, pas plus que nous ne proposons que la rémunération globale des députés fédéraux et de leurs homologues provinciaux soit inférieure à leur valeur sur le marché.
Nous proposons que la rémunération soit uniformisée. La norme s'appliquerait non seulement aux pensions et aux prestations de retraite, mais aussi à des aspects comme les allocations de dépenses non imposables. Il est évident que les parlementaires, fédéraux et provinciaux, sont les seuls à pouvoir recevoir jusqu'au tiers de leur revenu en franchise d'impôt. Là encore, il y a deux poids et deux mesures.
Le régime actuel, qui prévoit un taux d'accumulation des prestations de 5 p. 100 et diverses autres dispositions, dont les conditions d'acquisition, dépasse de loin les prestations maximales accordées aux régimes enregistrés de retraite en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada. Nous ne pensons pas que les réformes prévues par le projet de loi C-85 régleront vraiment ce problème.
Le problème que pose le régime n'est pas simplement le niveau des prestations, mais aussi la structure du régime. Même si le projet de loi C-85 ramènera le taux d'accumulation des prestations de 5 à 4 p. 100, ce taux sera tout de même le double de celui des meilleurs régimes non seulement du secteur public, mais également du secteur privé. Nous estimons qu'après l'adoption du projet de loi C-85, le taux de cotisation du contribuable sera de 4,76$ par dollar versé par les députés.
Pour décrire notre recommandation très simplement, nous croyons que le Parlement devrait reconnaître la nouvelle vague de réforme qui déferle actuellement au Canada en ce qui concerne les prestations de retraite des politiciens.
Le projet de loi C-85 démontre que le gouvernement et le Parlement sont tout à fait déphasés, non seulement par rapport aux points de vue de quelques groupes d'intérêts radicaux, mais aussi à ceux de la vaste majorité de vos électeurs et, d'ailleurs, aux points de vue d'un nombre croissant de vos collègues provinciaux.
Nous avons participé de près aux efforts visant à réformer les pensions des législateurs dans les quatre provinces de l'Ouest et en Ontario. Comme vous le savez probablement, le Parti libéral, par exemple, en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique, a appuyé la conversion des régimes antérieurs à prestations déterminées, ou des régimes actuels de l'Ontario et de la Colombie-Britannique à taux d'accumulation des prestations de 4 p. 100, en REÉR autofinancés à cotisations déterminées. Bien sûr, les gouvernements de la Saskatchewan et du Manitoba ont déjà apporté ces changements. Le gouvernement de l'Alberta a complètement aboli le régime et les deux partis d'opposition en Ontario et en Colombie-Britannique ont promis de convertir leurs régimes à prestations déterminées en régimes autofinancés à cotisations déterminées après les élections prévues dans leur province.
Voilà précisément le genre de réforme que nous recommandons au Parlement, l'adoption d'un régime qui assurerait un niveau raisonnable de prestations de retraite à tous les parlementaires, qui ne créerait pas deux poids et deux mesures, et qui mettrait fin à ce cynisme extraordinaire à l'égard de nos institutions politiques.
Des groupes comme le nôtre - et permettez-moi d'être parfaitement clair parce que je pense qu'il existe un malentendu à ce sujet - n'existent pas pour créer ou fomenter le cynisme public à l'égard de nos institutions politiques. Au contraire. En maintenant un régime comme celui-ci, tous les députés qui décident de voter en faveur du projet de loi C-85, décident, selon nous, de continuer d'accentuer le cynisme public à l'égard des législateurs, de nos parlementaires et de nos institutions parlementaires.
Dans notre mémoire, nous donnons un bref compte rendu des réformes entreprises dans diverses provinces, y compris l'Île-du-Prince-Édouard. Le modèle que nous proposons est le régime de pension adopté par le gouvernement néo-démocrate de la Saskatchewan en 1979, qui fonctionne très bien pour les législateurs de cette province. Si vous parlez aux députés à la retraite de l'Assemblée législative de la Saskatchewam, vous constaterez qu'ils trouvent leurs prestations de retraite très suffisantes.
Nous proposons la conversion du régime de retraite actuel des députés en un régime autofinancé à cotisations déterminées, qui éliminerait la possibilité de non-capitalisation du passif, qui éliminerait la possibilité d'aberrations évidentes comme le cumul de pensions et de traitements et qui réglerait le grave problème des députés à ce sujet.
Merci encore une fois de nous permettre d'exprimer ces brèves remarques. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
M. Harper: Merci, monsieur Kenney. Je vous remercie en particulier pour une remarque que je n'avais pas eu l'occasion d'exprimer auparavant. Un député a indiqué que, parce que nous avons créé un poste comptable pour établir une caisse de retraite des députés, puis emprunté pour la financer, il ne s'agissait pas d'argent réel. Venant d'un député chevronné, cette remarque contribue à expliquer comment nous nous sommes endettés de 500 milliards de dollars au Canada.
J'aimerais seulement que vous apportiez des précisions sur les régimes provinciaux. Quels types de cotisations du gouvernement prévoient ces régimes, qui ont été adoptés ou proposés par le Parti libéral de l'Ontario et de la Colombie-Britannique?
M. Kenney: Dans ces deux provinces, l'Ontario et la Colombie-Britannique, les deux partis d'opposition ont proposé des REÉR où le gouvernement verse 9 p. 100 du traitement imposable - pas les allocations de dépenses non imposables, seulement le traitement imposable - des députés et les législateurs versent une cotisation équivalente de 9 p. 100 également; autrement dit la cotisation maximale permise pour les régimes à cotisations déterminées et les REÉR.
M. Harper: Ont-elles préconisé ou accordé en même temps des hausses salariales?
M. Kenney: Non, et certainement pas l'opposition dans ces provinces, à ma connaissance. Évidemment, le régime de retraite albertain a été éliminé complètement et on a réduit les traitements de 5 p. 100, tout comme en Saskatchewan ainsi qu'en Colombie-Britannique si je ne m'abuse. On constate donc une réforme importante dans quelques provinces, une réduction des traitements.
Notre organisation ne prétend évidemment pas que ce soit l'idéal à long terme. Nous comprenons que les législateurs ont besoin d'être rémunérés correctement, mais en période d'austérité budgétaire et économique, il ne s'agit pas simplement d'un problème politique; c'est aussi un problème économique, car on a l'impression que les députés ne participent pas aux sacrifices financiers qu'ils exigent des contribuables et de leurs électeurs.
M. Harper: En ce qui concerne votre proposition, qui ressemble à la nôtre - un REÉR comportant des cotisations égales de 9 p. 100 - supposons que les députés puissent arriver à un consensus aux alentours de ce niveau de 18 p. 100, mais pas nécessairement en cotisations déterminées. S'il s'agissait plutôt d'un régime à prestations déterminées à peu près équivalent, 2 p. 100, etc. Cette solution vous serait-elle acceptable, ou le principe des prestations déterminées est-il tout à fait inacceptable?
M. Kenney: Un régime enregistré standard à prestations déterminées limitées à un taux d'accumulation des prestations de 2 p. 100, respectant les limites imposées par la Loi de l'impôt sur le revenu au sujet des conditions d'acquisition, etc. serait certainement préférable au statu quo, mais à notre avis, les gouvernements du Canada font généralement face à un problème beaucoup plus vaste en ce qui concerne le passif non capitalisé des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur public. Nous pensons que le problème tient à la structure de ces régimes. Ils créent un niveau de prestations artificiel, qu'il n'est pas nécessairement possible de soutenir, compte tenu des cotisations actuelles et futures.
Nous pensons que le Parlement du Canada devrait fixer une norme élevée en éliminant la possibilité d'avoir un passif non capitalisé, en convertissant les régimes en des reégimes à cotisations déterminées ou en un REÉR à cotisations à part égale. Nous accepterions un régime à prestations déterminées plus modeste, mais nous pensons que l'objectif réel de la forme du régime de retraite devrait être de le convertir en un régime autofinancé, qui interdit le passif non capitalisé.
M. Duhamel: Merci de votre exposé. Deux questions, brièvement.
Vous avez indiqué que le taux d'accumulation, qui existe encore dans le projet de loi, est deux fois plus élevé que la normale. N'est-il pas vrai également que le taux soit de 4, 3 ou 2 p. 100, que l'aspect le plus important de ce taux d'accumulation est ce à quoi il est relié, autrement dit le traitement auquel il est lié?
Essentiellement, si le traitement d'un député est de 64 000$ par année, 128 800$ par année s'il était à ce taux - certains ont proposé que le taux soit plus élevé - un taux de 2 p. 100 aboutirait exactement au même résultat, n'est-ce pas, dans mon exemple?
L'autre question se rapporte aux chiffres que j'ai en main et qui ne semblent pas concorder avec les vôtres. Le gouvernement versera 3,60$ par dollar versé par les députés. C'est le chiffre indiqué dans les documents fournis par le Conseil du Trésor. L'écart est assez important par rapport au projet de loi.
Je me demande dans quelle mesure vous êtes certain que vos chiffres sont plus exacts que les miens. Je ne veux pas lancer un débat. Je voudrais seulement avoir des chiffres exacts.
Très brièvement, les autres questions connexes... Les données de Statistique Canada indiquent que les employeurs du secteur privé assument environ 70 p. 100 du coût des régimes et les employés, 30 p. 100, ce qui donne un ratio de 2,3:1, en grande partie à cause de l'importance des régimes non cotisables. Dans le secteur public, les taux sont environ 60 p. 100 versés par l'employeur et 40 p. 100, par l'empleoyé. Dans les Forces canadiennes, le ratio est actuellement de 2,70$ par le gouvernement, contre 1$ par membre du régime et à la GRC, il este de 2,10$ par dollar. Êtes-vous d'accord avec ces chiffres? Deuxièmement, souhaiteriez-vous que tous ces régimes et d'autres reviennent à un ratio de 1:1? Seulement pour les députés ou pour tout le monde?
M. Kenney: Nous ne sommes certainement pas venus ici pour entrer dans le débat sur la réforme fondamentale des pensions du secteur public, mais nous préférerions que les pensions de notre secteur public soient assainies du point de vue actuariel. Cela veut dire qu'il faudrait finir par éliminer progresssivement les régimes à prestations déterminées qui promettent un niveau de prestations hors de proportion avec les cotisations. Ils transmettent un énorme passif aux futurs employés et aux futurs contribuables.
En ce qui concerne le pourcentage des contributions effectuées dans divers secteurs de l'économie, il ne tient bien entendu pas compte du grand nombre de Canadiennes et de Canadiens qui n'ont aucun régime de pension et qui n'économisent pour leur retraite que ce qu'ils peuvent contribuer individuellement à un REÉR.
M. Duhamel: Qui s'accompagne aussi d'une aide gouvernementale.
M. Kenney: Non, je ne voudrais pas me lancer dans une discussion théorique sur le fait de savoir si une dépense fiscale entraînera un déboursé pour le gouvernement. Je pense que non.
M. Duhamel: Je veux seulement en être sûr, car si j'achète un REÉR pour lequel je reçois une déduction de revenu, et si le gouvernement ne prélève pas d'impôt là-dessus et ne peut pas dépenser l'argent correspondant au cours des années à venir, vous dites que cela ne constitue pas une aide gouvernementale. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.
M. Kenney: Non. Je pense que c'est un avantage fiscal raisonnable, mais pas un droit spécial. Ce n'est pas un versement de transfert et, dans ce sens, je ne dirais pas qu'il s'agit d'une aide de la part du gouvernement.
Je veux dire que ceux qui contribuent à leur propre retraite en cotisant pour un REÉR ou pour un autre régime d'épargne, ont un taux de contribution de 100 p. 100. Là encore, je vous renvoie simplement à la tendance croissante qui se manifeste parmi les assemblées législatives du Canada. Vous ne pouvez pas négliger cela. D'ici un an, sept des dix assemblées législatives auront supprimé leur régime de pension ou l'auront remplacé par un régime à cotisation déterminée avec jumelage de fonds. C'est une réalité politique et juridique sur la base de laquelle on évaluera ce que feront les députés fédéraux.
M. Duhamel: Les forces armées, la GRC et la fonction publique donc...
M. Kenney: Eh bien, là encore, de nombreux députés disent que le régime de pension parlementaire constitue une façon déguisée d'assurer une rémunération adéquate pour les parlementaires. Ceux-ci ne veulent pas se payer 150 000$ de façon trop visible, transparente ou être forcés de rendre des comptes à ce sujet.
M. Duhamel: Vous aimez ce chiffre de 150 000$ avec 2 p. 100 versé globalement, n'est-ce pas?
M. Kenney: Peu importe le chiffre. Je n'en suis pas spécialement partisan, mais l'important est qu'on nous dit que les gens qui travaillent, par exemple, à la GRC ou dans l'Armée ont des pensions à rémunération totale plus raisonnable. À notre avis, le...
M. Duhamel: Pensez-vous aux simples soldats ou aux officiers quand vous dites que leur rémunération est plus raisonnable?
M. Kenney: Je ne veux pas me faire passer pour un expert sur la rémunération des militaires et je n'ai aucune idée de ce que gagne un simple soldat ou un officier. Je sais par contre ce qu'est un passif non capitalisé. C'est une dette pour les contribuables, qui doivent financer les pensions dont le montant dépasse celui des cotisations des bénéficiaires. Je pense que cela cause un problème aussi bien fiscal que moral.
M. Boudria: Vous avez recommandé un REÉR - et je sais que ça n'est que votre deuxième choix. Vous préférez le système utilisé par une province que vous avez décrit. Mais le type de REÉR que vous recommandez comporterait une soi-disant contribution de l'employeur, car techniquement parlant, bien sûr, la Chambre n'est pas notre employeur. Quand j'ai vu le terme «soi-disant», je ne le dis pas de façon critique, c'est seulement pour décrire l'employeur présumé. Est-ce cela que vous recommandez?
M. Kenney: Oui, et le jumelage de fonds.
M. Boudria: Et la contribution à parts égales.
M. Kenney: C'est exact.
M. Boudria: Je ne sais pas si vous étiez là quand un autre témoin a comparu ici ce matin. J'ai demandé à la bibliothèque du Parlement d'analyser ma propre situation. La situation est approximativement la suivante, en quelques mots. Si j'avais bénéficié d'un programme et si j'avais commencé à verser des cotisations en 1984, avec le taux des CPG, sans doute la façon la moins risquée d'investir, mes propres cotisations se monteraient maintenant à 136 988$. Si on double ce chiffre, sur la base d'une cotisation égale de la part de l'employeur, comme vous le dites, j'aurais maintenant 273 976$ dans mon compte de REÉR ce qui, simplement en intérêts, me rapporterait environ 27 000$ par an si je prenais ma retraite.
Si je prenais ma retraite aujourd'hui, ma pension de député se monterait à 30 000$. On a donc 27 000$ d'un côté et 30 000$ de l'autre. Avec ces chiffres, d'où sort-on que notre régime de pension est horriblement plus généreux que tout ce qui a jamais pu être imaginé dans la galaxie quand la différence est inférieure à 10 p. 100?
M. Kenney: Eh bien, les chiffres que vous citez, monsieur Boudria, concernent bien sûr les prestations de la première année. Si votre employeur et vous-même cotisiez à parts égales pour constituer une rente, celle-ci reposerait sur des fonds propres sur lesquels vous vous serviriez au fil des ans. Vous ne pourriez vous permettre de commencer à en retirer des prestations à l'âge de 40 ou 45 ans comme peuvent le faire certains députés fédéraux à la retraite ou défaits parce que le régime à prestations déterminées leur permet de retirer des prestations jusqu'à leur mort, et il reste encore les prestations aux conjoints. En plus, elles sont indexées, ce qui n'est pas autorisé pour le... Enfin, c'est financièrement impossible quand on retire des prestations d'une rente.
M. Boudria: Mais je ne parle pas de prélever de l'argent sur le capital initial; je tiens seulement compte de l'intérêt dans mon calcul. Si j'ajoutais cela, il n'y aurait sans doute aucune différence.
Une voix: [Inaudible]
M. Boudria: Ce n'est pas moi qui l'ai fait.
M. Duhamel: Qui l'a fait, monsieur Boudria?
M. Boudria: La direction de la recherche de la Bibliothèque du Parlement. J'en remettrai des exemplaires au Comité cet après-midi.
M. Kenney: En fait, un régime à prestations déterminées, surtout s'il est indexé, protège ses participants contre les incertitudes du marché, y compris l'inflation, etc. Quand on a une rente, on est assujetti dans une certaine mesure aux conditions réelles du marché, alors que ce n'est pas le cas si l'on a un régime à prestations déterminées. Si l'inflation augmente de 20 p. 100 on est protégé.
M. Boudria: Peut-être, mais si le taux d'intérêt passe à 20 p. 100, le taux sur cinq ans des CFG, si on a investi son argent ainsi, augmentera aussi. L'argent investi augmente à un rythme plus rapide.
Ce que je veux dire, c'est que vous prétendez dans votre mémoire, que notre régime est considérablement plus généreux que ceux que vous pourriez mettre au point. Je conteste votre affirmation en disant qu'il y a des études, tout au moins une qui a été faite pour moi à titre individuel, - et je sais que vous l'avez malheureusement pas devant vous, mais vous avez pu en entendre parler un peu plus tôt ce matin - montrent qu'il n'y a pratiquement pas de différence. Ce n'est donc pas cinq ou six fois mieux. Il y a une différence de 10 p. 100 si je suppose que je ne puise même pas dans le capital initial et que je dépense seulement l'intérêt.
M. Kenney: Nous sommes prêts à examiner cette étude, monsieur Boudria, mais je vous dirai que, si tel est le cas, quel est le problème? Pourquoi ne pas vous débarrasser de ce terrible fardeau politique en adoptant un régime de ce genre? Vous recevriez de toute façon le même type de prestations, si c'est ce que vous dites.
M. Boudria: Laissez-moi vous demander quelque chose. Si vous dites qu'il n'y a pas de problème, pourquoi vous plaignez-vous d'un problème qui n'existe peut-être pas?
M. Kenney: Parce que je n'ai pas vu vos chiffres, monsieur Boudria.
M. Boudria: Merci.
M. Kenney: En fin de compte, un régime à contributions déterminées empêche la constitution de passif non capitalisé, à la différence d'un régime à prestations déterminées.
Mme Parrish: Permettez-moi de vous dire ma reconnaissance, monsieur Kenney. Si nous adoptions en fait votre REÉR, le total de nos contributions et de celles que verserait pour un montant égal le gouvernement ne pourrait pas dépasser 13 500$ par an. Si nous adoptions ce plan, ne vous plaindriez-vous pas que nous maintenons artificiellement le niveau des versements élevés chaque année et pour l'ensemble du pays afin que le nôtre puisse rester élevé?
M. Kenney: Non. En fait, nous sommes au premier rang de ceux qui demandent une augmentation régulière des contributions au REÉR.
Mme Parrish: Nous avons limité cela cette année et si le chiffre tombe l'année prochaine à 6 000$, comment fonctionnera votre régime?
M. Kenney: Il fonctionnera de la même façon pour les députés que pour les autres Canadiennes et Canadiens concernés. C'est justement ça. Vous devez suivre les règles que vous établissez pour le reste de la population.
M. Duhamel: Pas pour les pauvres.
Le président: Ainsi se termine notre séance de ce matin. Nous reviendrons à 15h30. La séance est levée jusqu'à ce moment-là.
SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI
[Français]
Le président: Le Comité poursuit son étude du projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi sur les allocations de recherche des parlementaires et prévoyant le rétablissement d'une disposition.
[Traduction]
Nous accueillons cet après-midi M. Paul McCrossan, qui est actuaire. M. McCrossan, merci d'être venu.
M. Paul McCrossan (actuaire, Eckler Partners): Merci monsieur le président. J'ai une brève déclaration qui je crois a été traduite et distribuée, ainsi que d'autres documents que je vous invite à lire quand vous en aurez le temps.
Je remercie les honorables membres de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet du projet de loi C-85.
C'est toujours un plaisir pour moi en tant qu'ex-député de revenir au Parlement. Et doublement un plaisir aujourd'hui, car j'ai l'occasion de renouer connaissance avec votre greffière, Mme Carrière, que j'ai eu le privilège de cotoyer au Comité des finances durant la 33e et la 34e législatures.
J'ai avec moi deux documents et quelques tableaux. Le premier document à discuter est extrait d'un article de Benefits Canada qui sera imprimé aujourd'hui, et j'ai en main des exemplaires du texte définitif, au lieu des copies xerox qu'on vous a remises. Il donne des détails inédits sur la manière dont les prestations de retraite des députés ont vu le jour.
Vous remarquerez qu'il contient beaucoup d'information qui peut être considérée comme «secrète». À ma connaissance, on n'a jamais rendu publique la petite histoire de la création de l'actuel régime de retraite des députés. J'ajoute aussi qu'à ma connaissance, je n'ai jamais divulgué les secrets de mon groupe parlementaire, mais j'ai décidé de le faire en l'occurence à cause du projet de loi dont le comité est saisi et parce que je crains les retombées négatives graves que peut avoir le projet de loi pour les députés et pour le Parlement.
Le deuxième document est l'ébauche d'un article de suivi que j'ai écrit pour le numéro du mois prochain de Benefits Canada, où j'explique comment les pensions des députés devraient être structurées. Comme vous le verrez, j'ai fait quatre grandes recommandations. Premièrement, la pension des députés devrait être ramenée à une accumulation annuelle de 2 p. 100 du salaire moyen des trois dernières années, payables à 60 ans, comme ce qui est permis dans le secteur privé.
Je signale en passant que le taux de 2 p. 100 et l'âge de 60 ans sont repris de la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est ce que stipule la Loi de l'impôt sur le revenu pour qu'un régime de retraite soit valable.
Ces pensions devraient être acquises après deux ans, tel que stipulé par la Loi sur les normes de prestations de pension, et les cotisations des députés devraient être réduites par rapport aux niveaux actuels. Des intérêts au taux du marché devraient être versés sur le remboursement des cotisations, en application de la Loi sur les normes de prestation de pension, au lieu de 4 p. 100 comme c'est le cas actuellement.
Deuxièmement, le député qui n'est pas admissible à une pension parlementaire à l'âge de 60 ans devrait recevoir une indemnité de 3 mois de salaire au moment de son départ de la Chambre et devrait aussi avoir droit à une allocation de soutien à long terme pouvant atteindre 1,5 mois de salaire par année de service en tant que député pour une période maximale de deux ans, jusqu'à ce qu'il trouve un autre emploi ou qu'il commence à toucher sa pension de retraite.
Ceux d'entre vous qui ont lu le récent rapport parlementaire savent que les députés qui ont été défaits aux dernières élections ont connu des difficultés considérables.
Troisièmement, les allocations de dépenses et de voyage des députés devraient être entièrement ou largement versées contre des pièces justificatives. D'après ma propre expérience, le plus gros poste de dépense liée à l'emploi pour la plupart des députés sont les frais de déplacement entre Ottawa et leur ville de comté et ce qu'il en coûte pour maintenir une deuxième résidence à Ottawa. Je recommande qu'une allocation maximum d'au moins 15 000$ soit prévue pour ces dépenses et que cette allocation soit versée contre des pièces justificatives; si d'autres allocations non justifiées sont maintenues, elles devraient plafonner à environ 10 000$.
Quatrièmement, le traitement des députés devrait être beaucoup plus élevé qu'à l'heure actuelle. L'échelle de traitement devrait refléter la pension réduite et la nouvelle prime de départ proposée ci-dessus.
Comme vous pouvez le constater, je pense qu'on devrait aligner le traitement des députés sur les pratiques en vigueur aujourd'hui dans le secteur privé. Vous remarquerez que la solution que je recommande suit de très près ce qu'ont recommandé ce matin mes collègues actuaires du cabinet Sobeco. Elle s'inspire également de bon nombre des orientations recommandées par les commissaires parlementaires. J'ajoute d'emblée que j'ai écrit mon article avant d'avoir lu leur rapport et que mes propositions se fondent largement sur mes études de 1987 pour tenter d'établir un régime de rémunération rationnel pour les députés.
On vous demande aujourd'hui d'étudier le projet de loi C-85 et on m'a dit que vous aviez convenu d'entendre des témoins une journée seulement avant d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi. En fait, le projet de loi visant les allocations parlementaires a été adopté à toutes les étapes en une seule journée, en comité plénier de la Chambre, sans même que les députés ne disposent du texte du projet de loi pour commentaire.
Il suffit de consulter le Hansard pour se rendre compte que les députés ont débattu de ces allocations sans même avoir en main le projet de loi. Comme vous le savez, la distribution des documents relatifs à la Chambre est parfois incomplète.
J'exhorterais le Comité de se réunir à huis clos, après l'audition des témoins d'aujourd'hui, pour discuter des réactions aux audiences de la journée avant de passer à l'étude article par article. J'exhorterais aussi plus particulièrement les députés ministériels du Comité à rencontrer leurs collègues du caucus, et notamment le ministre des Finances, avant d'amorcer l'étude article par article.
Permettez-moi de revenir sur les diverses étapes de mon raisonnement. J'en arrive à la conclusion que le projet de loi est néfaste. Pour vous, à titre de députés, néfaste pour le Parlement, comme institution, et néfaste pour le Canada puisque, en adoptant ce projet de loi, vous aurez limité la marche de manoeuvre du Parlement par rapport à son défi le plus pressant, à savoir celui de repenser les régimes de revenu de retraite et de soins médicaux du Canada en fonction des réalités financières du pays et du vieillissement rapide de sa population.
Permettez-moi de décortiquer un peu ce que je viens de proposer. Pour ce qui est des députés, le projet de loi représente une mauvaise politique pour vous les députés actuels et pour les députés qui viendront après vous. Il ne contribue nullement à l'élaboration d'un régime de rémunération raisonnable pour les députés et risque même de nuire à la formulation d'un tel régime, et ce pour deux raisons. En effet, le projet de loi établit vos avantages à un seuil plus élevé que celui auquel la plupart des contribuables ont accès. Du même coup, il réduit le coût de l'ensemble des mesures de rémunération qui vous touchent. Ainsi, lorsque vous aurez à revenir sur ces mesures de rémunération pour en arriver à un résultat convenable, vous devrez alors les relever par rapport au seuil où vous les aurez réduites et l'opération sera d'autant plus difficile qu'elle devra être faite en deux étapes plutôt qu'une.
Le projet de loi réduit la rémunération pour services futurs, mais il maintient vos avantages à un niveau nettement supérieur à ce qui est permis dans le secteur privé et même dans le secteur public. À mon avis, tant que vos avantages de retraite dépasseront les niveaux auxquels les contribuables ont accès, une partie importante de l'opinion publique continuera de prétendre que les députés sont trop payés.
Comme je le montre dans mon second article, au cours des 14 années écoulées depuis l'adoption en 1981 du régime actuel, le traitement des députés a été limité à sept années par des gouvernements qui tenaient compte de cette perception du public dans la mise en oeuvre de programmes de limitation des dépenses.
On a demandé à plusieurs reprises ce matin si les avantages de retraite des députés étaient élevés en raison du fait que leur traitement était faible. On peut soutenir l'inverse, d'après moi, à savoir que depuis 1981, les traitements ont été limités en raison des avantages de retraite élevés. J'ai pu confirmer cette possibilité à toutes les étapes dans mon deuxième document.
Ainsi, l'adoption du projet de loi à l'étude réduit la rémunération totale des députés sans atténuer le climat de réprobation qui entoure toute cette question. Je crois qu'on peut en dire autant du maintien des dépenses sans pièces justificatives exonérées d'impôts et de l'allocation de déplacement.
Aux yeux du public, les hommes et les femmes politiques passent de plus en plus pour des escrocs. On le doit à certains scandales, c'est vrai, mais d'après moi, la vraie raison c'est que les règles qu'ils s'imposent à eux-mêmes ne sont pas celles qu'ils imposent au public en général. Lorsque la presse parle de prestations de retraite excessives et d'allocations exonérées d'impôts qui peuvent être dépensées sans pièces justificatives, ils ne viennent que confirmer des perceptions déjà largement répandues.
Vous savez très bien comme moi que les hommes et les femmes politiques de tous les partis, dans leur très grande majorité, sont ici pour servir les intérêts supérieurs du pays. Vous savez pourtant également, tout comme moi, qu'un nombre inquiétant et grandissant de Canadiens vous considèrent, vous et vos semblables, comme des escrocs.
Si vous légiférez dans le sens d'un traitement préférentiel à votre égard, même s'il s'agit d'un traitement moins préférentiel qu'il ne l'est à l'heure actuelle, comme il est proposé dans le projet de loi, même si votre rémunération totale est réduite, vous continuerez à attiser le cynisme et à vous attirer la réprobation.
Maintenant, pour ce qui est des répercussions d'ordre national, il doit être évident pour vous tous que la pyramide des âges est en évolution au Canada. Compte tenu de nos difficultés financières actuelles, cela veut dire qu'il sera de moins en moins possible de lever les impôts qui permettront de financer le niveau actuel de prestations en matière de sécurité de la vieillesse, de revenu supplémentaire garanti, de RPC, de RRQ et d'assurance-maladie.
À l'occasion de son dernier budget, le ministre des Finances a fait savoir qu'il allait rencontrer ses homologues provinciaux à l'automne pour discuter de la reformulation des régimes que je viens de mentionner, lorsqu'il aura publié son document sur le vieillissement.
Ainsi j'estime que si l'une des dernières initiatives du Parlement avant l'arrêt des travaux pour l'été consiste à adopter une loi qui garantisse aux députés des prestations de retraite nettement supérieures à celles auxquelles les citoyens ordinaires ont accès, et si l'une de ses premières initiatives à la rentrée d'automne consiste à lancer un programme visant à convaincre les gouvernements provinciaux et ces mêmes citoyens que les avantages consentis actuellement dans le cadre des régimes de retraite publics et des régimes d'assurance maladie sont devenus insoutenables, alors le Parlement aura perdu l'autorité morale d'agir d'une manière qui corresponde aux besoins du pays.
J'ai fourni certains tableaux et graphiques qui expliquent les origines de la crise imminente. Ils ne font pas partie de mon exposé, mais je vous les fournis à titre d'information.
En résumé, il nous faut un Parlement intègre qui soit en mesure d'agir dès cette année pour repenser nos programmes sociaux nationaux au lieu d'attendre qu'une crise financière à venir oblige le gouvernement à revenir sur ce qu'il aura promis.
J'exhorte les ministériels qui siègent au Comité à s'entretenir avec leur ministre des Finances afin d'être en mesure d'évaluer les risques qui pourraient découler de l'adoption de ce projet de loi, aussi bien pour lui que pour la restructuration des régimes d'avantages sociaux dont le Canada a besoin.
Si vous permettez l'adoption d'un projet de loi qui confère aux députés des prestations de retraite beaucoup plus élevées que celles auxquelles les citoyens ont accès au moment même où vous vous apprêtez à proposer de réduire les prestations d'un régime public, vous risquez d'indigner de nombreux Canadiens qui vous reprocheront de protéger vos privilèges alors même que vous vous apprêtez à éliminer leurs avantages. Dans un tel cas, vous mériteriez le mépris du public.
[Français]
Le président: Monsieur Plamondon, avez-vous des questions?
M. Plamondon: Merci, Paul. J'ai grand plaisir à vous revoir depuis que j'ai siégé avec vous au Comité des finances. Je crois que c'était en 1984, ainsi qu'en 1988. Nous avons fait tous les deux partie du Comité des finances.
Après avoir entendu votre rapport, je dois dire que je le trouve un peu philosophique. Je ne sais pas si la situation est la même dans toutes les circonscriptions électorales. Je suis en politique depuis 11 ans et je n'ai jamais rencontré personne dans la mienne qui m'ait parlé de mon régime de retraite ou de mon salaire. Je n'en ai jamais entendu parler en 11 ans. Personne ne s'en est plaint ou a passé la remarque que je suis trop bien payé, etc. Ce n'est pas répandu, du moins dans ma circonscription.
Je me rappelle que le gouvernement conservateur, en 1985 ou 1986, a voulu faire un exemple. Lors d'un Budget, on a annoncé que le salaire du premier ministre serait réduit de 15 p. 100, celui des ministres de 10 p. 100 et celui des députés de 1 000$ par année. Nous étions tous fiers d'aller annoncer le Budget conservateur dans nos circonscriptions. Or, je n'ai pas rencontré une seule personne qui était au courant qu'on avait fait ces réductions. Personne ne m'en a parlé, pas même un journaliste.
Donc, quand vous me dites, Paul, qu'il existe une perception négative chez les gens à propos de notre crédibilité et que si nous ne révisons pas complètement notre régime de retraite, notre crédibilité sera à la baisse, j'en doute un peu.
Vous nous dites aussi dans le même document qu'il faudrait que nous soyons bien payés, que nous ayons un salaire raisonnable, incluant la partie non taxable de ce salaire. J'imagine les journaux de demain titrant: «Les députés se votent un salaire de 90 000$ ou de 95 000$, mais ils ont diminué leur fonds de pension de 2 p. 100 au lieu de 5 p. 100.» Je n'aurais pas envie de me promener dans ma circonscription après la parution d'une nouvelle comme celle-la. La situation serait bien pire en ce qui a trait à la perception des gens, à ma crédibilité et à tous les commentaires négatifs que j'entendrais à propos des députés.
C'est pourquoi je vous dis, même si j'apprécie votre document, que je le trouve un peu philosophique. Même un document contenant les plus belles idées du monde n'arriverait pas à satisfaire les râleurs, les rouspéteurs et les esprits chagrin. Il en existe toujours une minorité dans toutes les provinces du Canada, j'imagine. Il faut vivre avec cette réalité.
Moi aussi, j'aurais souhaité un meilleur projet de loi, mais je crois que celui-ci marque un pas dans le sens du progrès. Il faudra peut-être le modifier régulièrement, à tous les deux ou trois ans. Pour le moment, on se trouve à corriger le pire irritant qui était l'âge de 55 ans. Le deuxième irritant, du point de vue de l'opinion publique, c'était le cumul d'une pension et d'un traitement. Cela irrite beaucoup de gens. Quant au reste, le fait d'avoir une retraite comme tout autre travailleur semble normal.
Ce régime de retraite est-il trop généreux ou non? Il y a peut-être là des ajustements à faire, comme ceux que vous avez suggérés, mais je ne suis pas d'accord sur l'idée de tout laisser tomber sous prétexte que cela augmenterait notre crédibilité. Je ne le crois pas.
[Traduction]
M. McCrossan: Merci, monsieur Plamondon.
Je vais m'efforcer d'aborder l'une après l'autre les diverses questions que vous avez soulevées. Vous avez dit qu'aucun de vos électeurs au Québec n'avait abordé avec vous la question des régimes de retraite des députés. J'accepte vos propos.
J'ai d'ailleurs noté avec intérêt que, dans l'étude du commissaire parlementaire au sujet des députés, de leurs revenus et des perceptions du public à cet égard, le degré de satisfaction de l'électorat québécois semblait nettement plus élevé que celui de toute autre province. L'étude contenait un graphique que je pourrais trouver au besoin, qui illustrait les degrés de satisfaction par rapport aux députés, province par province. Il en ressortait essentiellement que le degré d'insatisfaction augmentait d'est en ouest au Canada.
J'estime certainement que la question des régimes de retraite des députés attise un mécontentement considérable dans la presse et parmi la population du Canada anglais. Je ne pourrais dire à quel point c'est différent pour le Canada français, étant donné que je ne regarde pas autant Le Téléjournal à Radio-Canada que je ne le faisais auparavant. Néanmoins, il semble que les constations des commissions parlementaires correspondent à vos propres observations.
Un salaire plus élevé, dites-vous, serait plus difficile à justifier. À cet égard, certains des témoins de ce matin ont proposé, et même cité, l'exemple du Manitoba, où une commission indépendante, qui ne relevait pas des députés, a proposé une augmentation considérable du traitement, sans pour autant proposer un changement de la rémunération globale. Voilà, selon moi, où il faut situer le débat. Cette commission a pu agir de la sorte sans susciter un tollé puisque la population avait bien compris qu'un régime raisonnable de rémunérations avait été formulé par d'autres que les premiers intéressés: les députés.
Je comprends pourtant. Le ministre a dit ce matin qu'on hésite à augmenter les traitements. Or, le traitement fait partie de la rémunération. On peut jongler avec les catégories. Je comprends pourquoi il est peut-être difficile d'augmenter les traitements. Je comprends pourquoi les gouvernements évitent de le faire: pour des raisons qui ont trait aux relations publiques. Même les députés y sont réticents. Je dois pourtant soutenir que ce Comité, tout particulièrement, a l'obligation, par rapport au Parlement, de veiller à ce que soit institués les régimes de rémunération qui permettront d'intéresser des personnes qui ont les compétences voulues et qui assureront une rémunération raisonnable.
M. Boudria a posé un certain nombre de questions et il me semble que les députés eux-mêmes ne comprennent pas le fonctionnement du régime des rémunération. Permettez-moi de vous l'expliquer, en deux minutes.
Le député ne reçoit rien du tout tant qu'il n'a pas passé six ans comme parlementaire on l'a rappelé ce matin très clairement. Ainsi environ la moitié des députés ne reçoivent rien du tout. Au moment du sixième anniversaire, le passif du gouvernement correspond au total des salaires versés au cours des six premières années. Le montant d'argent nécessaire pour financer le régime de pensions est égal à 100 p. 100 des traitements reçus par le député au cours de la sixième année, si vous vous rendez à la sixième année.
Pour chaque année comme député par la suite, entre la sixième et la quinzième, le gouvernement assume 100 p. 100 des traitements des députés pour chacune des années, à condition que le député ait moins de 65 ans.
Au-delà de la quinzième année, la responsabilité diminue, et il en va de même après l'âge de 65 ans. Le régime coûte donc 60 p. 100 en moyenne. Cependant, le député moyen est une entité qui n'existe pas dans la réalité. Le député obtient des prestations ou bien il n'en obtient pas. Ce 60 p. 100, comme le signale les actuaires, représente une moyenne composée d'un grand nombre de zéros, d'un grand nombre de 5 p. 100 et d'un nombre décroissant de pourcentages correspondant à des députés qui ont siégé au-delà de l'âge de 65 ans ou durant plus de 15 ans.
Voilà quels sont les effets concrets du régime. Il entraîne de graves difficultés financières pour les députés en premier mandat qui n'ont pas suffisamment de ressources financières pour assurer leur subsistance et régler leurs dépenses. C'est un peu comme une loterie.
Pour ceux qui réussissent à dépasser la sixième année, ils voient rétroactivement et immédiatement le salaire qu'ils ont gagné au cours des six premières années doubler et se transformer en élément de passif pour le gouvernement. Voilà comment le régime fonctionne.
[Français]
M. Plamondon: Vous semblez oublier une chose dans vos calculs. En 1981 ou en 1982, lorsqu'il y a eu la fameuse réforme complète du régime de retraite par le comité présidé, je crois, par M. Comtois, le fonds de retraite des députés, qui n'appartenait pas à l'État, contenait des millions de dollars. C'était ainsi parce que à peu près aucun député ne touchait de retraite. Le gouvernement a alors pris la décision de prendre ces millions pour les mettre dans le fonds consolidé de l'État et de payer lui-même à l'avenir les retraites grâce à ses contributions et à celles des députés.
Cette réforme coûte maintenant de l'argent à l'État, dix millions de dollars par année. Si on avait placé cet argent qui était en réserve en 1981 et géré non pas par l'État mais par le fonds, en tenant compte des intérêts dont le taux était entre 1982 et 1984 de 18, 19 et 20 p. 100, les montants d'argent en réserve combleraient sans doute facilement le coût des dix millions de dollars à payer cette année.
En 1981, c'était une affaire payante pour le gouvernement de prendre en main les régimes de retraite. Aujourd'hui, ce ne l'est plus. Mais si on tient compte des sommes en jeu en 1981, je ne suis pas certain que la charge soit si lourde pour le gouvernement d'assumer une partie du coût des retraites.
Nous sommes d'accord, cependant, qu'en période de compressions budgétaires, tout le monde doit payer. Baisser de 33 p. 100 marque un pas en avant. Toutefois, on aurait peut-être pu faire davantage.
[Traduction]
M. McCrossan: Monsieur Plamondon, je crois que vous faites erreur et que certains documents le confirmeraient. J'ai déclaré que le projet de loi avait été présenté en 1981 et qu'il n'était pas accompagné d'estimations de coûts.
Dans l'article destiné à Benefits Canada, j'ai signalé que les estimations de coûts avaient été faites après le fait et que le projet de loi entraînait une augmentation du passif de 93 millions de dollars. Voilà qui correspondait justement à la dette provisionnée créée aux fins du régime de retraite des députés.
En 1985, cette dette avait atteint 135 millions de dollars. Elle a continué à augmenter jusqu'en 1993.
Une voix: C'était en 1981.
M. McCrossan: Non, 1981 est l'année de la création du régime.
La confusion, tout à fait explicable par ailleurs, a trait au fait que vous vous penchiez sur les états de l'actif du régime, qui mettent en rapport les entrées et les sorties. Je recevais moi-même ces états, à titre de député. Ils constituaient essentiellement en un relevé des cotisations des députés par rapport aux prestations versées aux anciens députés. Il s'agissait donc essentiellement d'une comptabilité de caisse. On pouvait y constater l'existence d'un actif de quelque 30 millions de dollars. Par contre, le passif de 120 millions de dollars n'y figurait pas. Il y avait donc un déficit de 90 millions de dollars.
Et cela n'était pas attribuable aux agissements peu scrupuleux du gouvernement de l'époque. Le gouvernement n'en savait rien. Je n'ai par ailleurs rien à dire au sujet d'Yvon Pinard.
Je puis vous dire qu'en 1983, des députés de tous les partis ont tenté d'en savoir davantage sur ces chiffres. Doug Frith, député libéral à l'époque, présidait un comité sur le régime de retraite. Il a tenté de connaître la situation, mais il n'a pas été en mesure de le faire.
On a parlé plus tôt durant la journée de la Loi sur les rapports relatifs aux pensions publiques, à laquelle on doit les chiffres sur lesquels vous vous êtes penchés aujourd'hui. C'est la loi que j'ai proposée en 1987. Elle a reçu l'appui de tous les partis, y compris celui du Parti libéral, par la voix notamment de Jean Robert Gauthier, qui siège aujourd'hui au Sénat.
Cette mesure a bénéficié de l'appui général étant donné que les ministériels à l'époque étaient tout aussi frustrés que les députés de l'Opposition. Ils n'arrivaient à obtenir aucun chiffre au sujet de leur régime - on a rappelé, ce matin, justement, que même l'âge et le nombre d'années de service des députés relevaient du secret d'État.
Nous avons donc fait adopter en 1987 une loi qui bénéficiait de l'appui de tous les partis, afin que cela ne se reproduise plus. Les députés devaient donc recevoir des rapports chiffrés et être avisés des conséquences de toute mesure législative ayant une incidence sur ce régime, sur la sécurité de vieillesse, sur le Régime de pensions du Canada, le SRG, le régime de retraite de la fonction publique, celui des forces armées et ainsi de suite.
Quoi qu'il en soit, jusqu'en 1981, les gouvernements ne disposaient pas de chiffres. C'était la méthode de la comptabilité de caisse. Ce n'est qu'en 1982-1983 qu'on a commencé à faire les calculs relatifs à une initiative prise deux ans plus tard.
M. Plamondon: Merci.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Plamondon. Monsieur Duhamel, la parole est à vous.
[Traduction]
M. Duhamel: Merci beaucoup pour votre exposé.
J'ai trois questions que je voudrais vous poser maintenant, pour qu'elles soient toutes exposées pendant le temps que je dispose et vous donner ainsi l'occasion d'y répondre.
Vous avez peut-être entendu certains des commentaires qui ont été faits et certaines des propositions présentées ça et là. Je crains qu'on ne laisse entendre que ce que fait le gouvernement, qui aurait d'ailleurs pu aller plus loin, va coûter plus que certaines de ces propositions.
Cela me paraît insultant car, manifestement, si l'on a un taux d'accumulation de 4 p. 100, de 5 ou 3 p. 100, selon le cas, pour influer de façon importante sur ce qu'il en coûte au contribuable, le taux d'accumulation doit être relié à la rémunération globale. J'aimerais que vous nous expliquiez un peu cela.
La deuxième chose que je voudrais que vous nous expliquiez brièvement, s'il vous plaît, car je cas que vous êtes éminemment qualifié en la matière, est le régime à cotisations déterminées ou le REÉR. Certains laissent apparemment entendre - je ne pense pas que ce soit une mauvaise intention de la part de qui que ce soit - que cela ne coûte rien à personne: je paie et l'État ne paie pas, ni le contribuable. Je ne connais pas grand-chose en matière de régime de pension et je me trompe donc peut-être mais, à ma connaissance, cela coûte de l'argent au contribuable comme pour les autres solutions.
Peut-être pourriez-vous comparer le régime à cotisations déterminées au régime à prestations déterminées parce que, dans le premier cas, je pense qu'il est difficile de savoir ce que l'on recevra en fin de compte et, dans le deuxième cas, dans un sens, on paie pour recevoir le produit sur lequel on s'est entendu ou celui que représentera le régime de pension.
Pour finir, j'ai remarqué ce matin, selon diverses personnes, que nous devrions adopter un régime comportant des cotisations égales de la part du gouvernement et des employés.
Je remarque qu'au Canada, à l'heure actuelle - et je ne crois pas que tout le monde y ait accès - avec les modifications que propose le gouvernement, la contribution de celui-ci atteindra apparemment 3,60$ pour chaque dollar versé par un député. On me dit que, dans le secteur privé, l'employeur assume 70 p. 100 du coût du régime et les employés 30 p. 100, soit un rapport de 2,3 pour 1 et cela tient surtout au grand nombre de régimes non contributifs. La proportion dans le secteur public est d'environ 60 p. 100 pour l'employeur et 40 p. 100 pour les employés. Dans les forces canadiennes, la relation est de 2,70$ pour le gouvernement et 1$ pour les membres du régime et de 2,10 pour 1 à la GRC.
Je soulève cette question parce que, si l'on suppose un instant qu'il serait sage d'adopter finalement un système de contribution à parts égales pour les députés fédéraux, est-ce que l'on verrait ensuite ce système s'étendre à d'autres secteurs? Autrement dit, les gens qui proposent cette égalité des contributions pensent-ils peut-être moins aux députés qu'au domaine plus vaste de l'ensemble des employés et du gouvernement?
M. McCrossan: Je crois pouvoir répondre à votre première question que ce projet de loi coûtera, de toute évidence, au contribuable moins que le régime actuel de rémunération. Celle-ci est manifestement réduite et je pense que les estimations du ministre sont raisonnables.
Vous ne m'avez pas demandé de les comparer à d'autres propositions et peut-être souhaiterez-vous le faire dans une question supplémentaire.
M. Duhamel: On peut le faire. Mais j'ai déjà demandé si, oui ou non, ce que le gouvernement fait n'est pas plus coûteux que certaines des autres propositions avancées ça et là. Par exemple, le salaire de 150 000$ par an avec un taux d'accumulation de 2 p. 100... Je crois qu'il est important de signaler cela au procès-verbal.
M. McCrossan: À propos de ces 150 000$ par année avec un taux d'accumulation de 2 p. 100, un Régime de retraite enregistré ne peut pas accumuler des prestations pour un salaire supérieur à 86 600$.
En d'autres mots, un contribuable du secteur privé qui met au point un système répondant aux dispositions de la Loi sur l'impôt sur le revenu ne peut pas obtenir de prestations correspondant à un salaire supérieur à 86 600$ à moins de se prévaloir d'autres dispositions législatives relatives à l'impôt sur le revenu, ce qui est bien sûr possible.
M. Duhamel: Donc un administrateur d'hôpital ou un surintendant d'école ou encore un chef de police ou autre gagnant éventuellement plus de 86 000$ ne peut verser que 2 p. 100 de 86 000$? Ai-je bien entendu?
M. McCrossan: Ils reçoivent généralement une prestation de 2 p. 100 pour un revenu allant jusqu'à 86 000$. Ensuite, ils peuvent constituer un compte de retraite pour les sommes dépassant 2 p. 100 de 86 000$ mais il y a différentes mesures de dissuasion qui s'appliquent dans un tel cas pour tous les organismes, à l'exception toutefois du gouvernement fédéral.
Le gouvernement fédéral acquitte une pénalité fiscale. En quelque sorte, l'argent sort de la poche droite pour aller dans la poche gauche. Vous êtes le seul employeur auquel cela ne paraisse pas financièrement inacceptable et la plupart des régimes du secteur privé ne dépassent pas la limite de 86 000$.
En ce qui concerne les rapports entre un régime à prestations déterminées et les régimes à cotisations déterminées, j'ai en fait participé à la rédaction de la partie du budget de 1985 qui portait là-dessus. L'élément clé est cette somme de 86 600$. Dix-huit p. 100 de la masse salariale correspondant à l'ensemble de la vie professionnelle produira un régime moyen final indexé de 2 p. 100 avec un âge de départ à la retraite de 62 ans. Donc, quand le gouvernement a mis cela en place, d'abord dans le budget Lalonde de 1984, puis dans le budget Wilson de 1985, il a fixé cet équivalent entre 18 p. 100 et 2 p. 100 de 86 600$ correspondant à la pension. Dans des conditions moyennes d'investissement, peu importe le système si quelqu'un l'utilise pendant toute sa carrière. Quelqu'un de jeune a peut-être intérêt à choisir le régime à cotisations déterminées. Le régime à prestations déterminées convient mieux à quelqu'un de plus âgé. En effet, le premier coûte la même chose chaque année alors que le deuxième a des coûts qui vont en augmentant, mais dont la valeur moyenne correspond à celle de l'autre. Les deux se recoupent approximativement à l'âge de 45 ans. Pour les gens de moins de 45 ans, il vaut mieux le régime à cotisations déterminées, celui de 18 p. 100. À plus de 45 ans, 18 p. 100 ne suffit pas à payer une pension finale de 2 p. 100. Voilà pourquoi il y a un lien entre les deux points.
Pour moi, l'histoire de la contribution à parts égales n'est rien d'autre qu'une manoeuvre de diversion. C'est quelque chose qui vient surtout de la fonction publique du Canada, c'est-à-dire des enseignants, des employés provinciaux et fédéraux. Cela n'est pas du tout la norme dans le secteur privé. Je ne veux pas remonter trop loin en arrière, mais je pense que l'on a introduit ce système pour bien faire comprendre aux employés que s'ils demandaient quelque chose, il faudrait qu'ils payent leur juste part pour l'avoir. Je pense qu'historiquement, c'est ainsi que ce système est né. Il reposait également sur des considérations relatives à l'impôt sur le revenu. Des régimes de ce genre pouvaient être avantageux à cet égard. Ils sont plutôt rares à l'heure actuelle dans le secteur privé et la plupart des régimes de rémunération des cadres ne prévoient aucune contribution de l'employé ou une contribution minime; sinon, les répercussions sur les impôts sont négatives.
M. Duhamel: Une contribution minime ou aucune contribution de la part des employés.
M. McCrossan: Tout à fait. Il n'y a aucune raison pour que l'on déduise quelque chose de votre salaire dans la mesure où ce qu'on ne vous verse pas est pris en considération pour ce qui est de la composition globale de votre rémunération. Mon employeur m'accorde par exemple une pension moyenne finale de 2 p. 100 à l'âge de 60 ans. Je ne paie rien, c'est lui qui assume tout. Je paie par le biais du reste de ma rémunération. Cela ne contribue pas vraiment à réduire mes impôts à l'heure actuelle, mais il fut un temps où c'était le cas. Je pense que ce système de contribution à parts égales a tout un passé, mais un concepteur de régimes de prestation moderne ne chercherait pas à établir le moindre rapport entre les contributions des employés et celles des employeurs.
Pour en revenir à ce régime-ci, jusqu'en 1993 le plan en vigueur stipulait que les membres devaient verser 11 p. 100, le gouvernement 11 p. 100 également et les prestations atteindraient tel montant etc. Bien entendu, ce qui manquait, c'était les 40 p. 100 supplémentaires nécessaires pour payer les prestations. En 1993, il a fallu combler l'écart qui était - j'ai oublié maintenant - d'environ 200 millions de dollars avec le déficit qui s'était accumulé au fil des ans. Le principe de l'égalité des contributions en ce qui concerne le régime de pension des députés de je ne sais quand en 1993 était purement fictif. En fait, les choses se passent comme cela aujourd'hui encore. Vous versez 11 p. 100, le gouvernement aussi et, à la fin de l'année, celui-ci ajoute l'argent nécessaire pour combler le déficit.
M. Duhamel: Vous nous dites donc que les rapports qui ont été déterminés, 3,50$ pour 1$ ou 2,70$...
M. McCrossan: Ils ne veulent rien dire.
M. Duhamel: Ils ne veulent rien dire. Est-ce que cela coûte plus cher au contribuable?
M. McCrossan: Non, dans la mesure où l'on tient compte de l'ensemble de la rémunération. Si vous examinez les recommandations du rapport Sobeco, celles-ci viseraient à faire passer la rémunération de 11 à 5 p. 100, en imputant une somme inférieure. Si elle était passée de 11 à 0 p. 100, la somme aurait été supérieure. Ce qui compte, c'est la contribution totale et non pas la façon dont les choses sont agencées. Les gens choisissent ce qui les avantage sur le plan fiscal.
M. Duhamel: Quelle est donc la solution?
M. McCrossan: J'ai recommandé dans le deuxième article exactement la même chose que votre dernier témoin, du fait que le Parlement est apparemment incapable de mettre au point son propre régime.
M. Duhamel: Pourquoi?
M. McCrossan: À cause des altercations politiques que l'on a vu ici même ce matin.
M. Duhamel: Pourriez-vous donner plus de détails à ce sujet?
Le président: Votre temps va bientôt s'écouler; donc, si vous arrêtiez de poser des questions, nous pourrions attendre la fin de la réponse. Je sais que vous aviez toute une série de questions à poser et vous avez fait cela très bien au début, mais le fait est d'interrompre constamment le témoin et ses réponses prolonge les choses et nous avons dépassé les dix minutes.
Par souci de justice envers les autres membres du Comité, quand M. McCrossan aura terminé cette réponse, nous donnerons la parole à quelqu'un d'autre.
M. McCrossan: Je pense que, pour faire une comparaison, c'est un peu la même chose que l'établissement des limites et des circonscriptions.
Je pense que les gens acceptent l'idée que les commissions judiciaires établissent les limites des circonscriptions électorales et même si nous savons tous que les députés peuvent influencer ce processus, on sait que la marge de manoeuvre est très limitée.
Comparativement aux États-Unis où le découpage des circonscriptions est tout à fait arbitraire et les limites des circonscriptions dessinent des zigzags parce que les députés s'occupent avant tout de leurs propres intérêts. Voilà une bonne comparaison à mon avis.
Je pense que la population acceptera qu'un organisme indépendant définisse un système de rémunération convenable et vous devriez cesser d'exploiter cela politiquement.
M. Harper: Merci, monsieur McCrossan, d'être venu nous faire part de vos idées. J'ai trouvé votre exposé extrêmement bien préparé et vous avez présenté des idées intéressantes pour tous les députés, particulièrement ceux du côté gouvernemental.
Je passerai un peu plus tard à la question des prestations de pension, mais ce qui m'apparaît extrêmement intéressant dans ce projet de loi - et vous avez expliqué pourquoi il était mauvais et les liens qui le rattachent à d'autres questions - et ce qui manque est peut-être ici la répartition des prestations et des coûts.
En fin de compte, ceux qui devront adopter ce projet de loi sont les députés de l'arrière-banc du côté du gouvernement qui en sont à leur premier mandat, ceux-là même n'en retireront absolument rien. C'est eux qui ont le plus en jeu. Ce que je trouve le plus fascinant dans tout cela, c'est qu'il y a eu le même genre de dynamique que ce que vous avez sans doute connu dans le passé lorsque quelqu'un s'est levé en caucus pour dire: «En plus, ajoutons une option de retrait; les députés Réformistes se feront bien avoir». Bien sûr, il a oublié de dire aux nouveaux députés qu'il en allait de même pour eux. C'est là une chose en fonction de quoi on les jugera.
Je me pose des questions au sujet de la procédure suivie. Est-ce que le gouvernement ou un de ses représentants vous a jamais contacté, en tant qu'ancien parlementaire et actuaire spécialisé dans le domaine, pour vous demander votre avis lors de la préparation de ce projet de loi ou des rapports préparatoires au dépôt de ce projet de loi?
M. McCrossan: Le gouvernement ne m'a pas contacté. J'ai toutefois participé au sondage du commissaire parlementaire.
M. Harper: Je voulais passer à la loi à laquelle vous avez brièvement fait allusion, la Loi sur les rapports relatifs aux pensions publiques. Vous étiez ici ce matin lorsque j'ai posé quelques questions à son sujet. Je crois que c'était un projet d'initiative parlementaire qui émanait de vous.
M. McCrossan: Oui.
M. Harper: Il s'agissait de prévoir des révisions actuarielles dans le cadre de la préparation des projets de loi relatifs aux pensions et on y mentionnait diverses lois, notamment, à l'alinéa 3(1)b) la Loi sur l'allocation de retraite des parlementaires.
L'article 4, «modification d'un régime», se lit comme suit:
- Dans le cas où une modification apportée à un régime de pension visé au paragraphe 3(1) porte
sur le coût des prestations ou établit un passif initial non capitalisé, le ministre demande à
l'actuaire en chef d'effectuer une révision actuarielle à compter de la date d'entrée en vigueur
de la modification.
M. McCrossan: Oui, il y a des précédents à cet égard dans le Hansard, non seulement dans les débats de la Chambre, mais au cours du dernier Parlement également lorsque le gouvernement a présenté des modifications au Régime des pensions du Canada. On a signalé en comité que les membres ne disposaient pas d'une étude actuarielle effectuée conformément aux dispositions de la Loi sur les rapports relatifs aux pensions publiques leur permettant d'examiner l'impact des modifications apportées au RPC.
On a aussitôt demandé à l'actuaire en chef du gouvernement de déposer ce rapport qu'il avait d'ailleurs en fait déjà préparé. Il a été présenté au Comité conformément à la loi. Je ne pense pas que vous ayez besoin de l'ensemble de l'évaluation. Je crois savoir que les travaux sont si avancés que vous pouvez déjà inspecter les chiffres si vous le voulez. De fait, au cours de la préparation de cette réunion, il a été convenu avec le Conseil du Trésor que certains des résultats seraient mis à ma disposition afin que je puisse en tenir compte dans mes réflexions.
Si vous pensez que vous avez besoin d'une évaluation actuarielle absolument officielle, cela pourrait prendre plusieurs mois. Le niveau de rigueur professionnel requis ralentit beaucoup les choses. Si vous voulez par contre des faits sur lesquels baser votre jugement en vous servant de recherches préliminaires, vous pouvez en disposer dès maintenant.
M. Harper: Vous pensez donc que les documents auxquels vous avez eu accès répondent aux critères énoncés dans la loi.
M. McCrossan: Oui. La loi demande une évaluation actuarielle complète. Je pense qu'en tant que députés fédéraux, vous vous devez d'être réalistes. Si vous voulez des renseignements, vous pouvez les obtenir. L'objectif de ce projet de loi est tel qu'on ne vous demande pas d'agir à l'aveuglette, qu'en tant que parlementaires vous devriez avoir l'égalité d'accès aux renseignements que détient le gouvernement lorsqu'il prépare les propositions qu'il veut soumettre.
M. Harper: Vous étiez là lorsque j'ai posé une question ce matin. Vous pouvez peut-être nous expliquer la situation en vous appuyant sur votre expérience en tant qu'ancien député.
Comme je l'ai dit précédemment, on nous explique constamment que le Régime de pension des députés sert à compenser la faiblesse du salaire et la forte insécurité que connaissent les députés. Comme je l'ai signalé à plusieurs reprises, un examen de la structure du régime de retraite montre que la façon dont sont conçues les prestations ne vise par les gens qui ont ce genre de problème. Êtes-vous également de cet avis? Pourriez-vous faire la lumière sur cette question?
M. McCrossan: Je peux vous donner les impressions que j'ai retirées de ce travail en 1986 et 1987. Quand quelqu'un avait fait une longue et prestigieuse carrière, devenir député en était le couronnement et il y avait donc beaucoup plus de personnes âgées que de jeunes gens parmi les députés. Le versement immédiat d'une pension tel que prévu en vertu du régime actuel est tout à fait sensé si on est élu à l'âge de 55 ans et qu'on sert le public pendant dix ans jusqu'à ce que on atteigne l'âge de 65 ans. Qui donc a vraiment pensé à cela?
On n'avait pas envisagé par le passé, et c'était assez rare à l'époque, que des gens de 21 ou 22 ans seraient élus députés et siégeraient pendant 5, 10 ou 15 ans. Ce régime est en fait conçu pour quelqu'un qui vient au Parlement à la fin de sa carrière, offrant les dernières années de sa vie et étant récompensé en conséquence. Il ne s'agissait pas de compenser la faiblesse du salaire et je pense que, si l'on voit quels en sont les effets, ils se situent justement à l'opposé. L'effet en a été de maintenir les salaires à un bas niveau. C'est devenu un point chaud.
M. Harper: Je n'ai pas très bien compris votre comparaison entre le régime à prestation déterminée et le régime à cotisation déterminée. Pourriez-vous donner plus de précision? Pensez-vous que nous devrions abandonner complètement le régime à prestation déterminée? Vous avez semblé faire des propositions qui allaient dans ce sens. Ou ne s'agit-il pour vous que d'un deuxième choix?
M. McCrossan: Non, je ne conseillerais certainement pas d'abandonner le principe d'un régime à prestation déterminée. La situation est cyclique.
De 1930 à 1955, la grande majorité des régimes du secteur privé avait des cotisations déterminées, parce que le coût en était connu. On venait de connaître les difficiles années de la dépression et les employeurs voulaient savoir ce que les choses leur coûtaient.
Du milieu des années cinquante à 1970, la plupart des gens ont abandonné ces régimes à cotisations déterminées pour passer au régime à prestations déterminées, l'entrée en scène de l'inflation rendant les gens désireux de savoir quelles prestations ils allaient recevoir.
Ensuite, au cours des années 1970, l'intérêt que rapportaient les régimes à cotisation déterminée était très faible. Les années 1970 ont été très défavorables aux investissements dans les caisses de retraite. Les entreprises spécialisées s'inquiétaient. Leur principal problème était le déficit de ces régimes.
Depuis le resserrement de la masse monétaire introduit par Volcker en 1981, le rendement réel des actifs est excellent. Les régimes à cotisations déterminées paraissaient donc supérieurs de 1981 à 1994 parce que les taux d'intérêt réels et le rendement des régimes de pension était bon.
Je ne pense pas que l'on puisse élaborer un projet de rémunération en se fondant sur une époque économique anormale. La période de 1981 à 1994 était aussi anormale que celle de la Grande dépression, à la seule différence que la rentabilité des placements étaient inversée. Je soutiens qu'il n'est pas dans l'intérêt des députés d'adopter un régime à cotisation déterminée. Il est dans l'intérêt général des retraités d'avoir à l'avance une idée du revenu qu'ils recevront une fois à la retraite.
M. Harper: Que pensez-vous de l'indexation et des régimes à prestations déterminées?
M. McCrossan: Je ne pense pas qu'il soit important que cela fasse partie ou non de la rémunération globale pour autant que l'indexation soit offerte à un coût réaliste. Personnellement, je suis partisan de l'indexation à 100 p. 100. C'est ce que j'ai dans mon propre régime de retraite. J'ai convaincu les employeurs de l'offrir. Cela coûte cher. Je pense que les gens qui peuvent se le permettre devaient demander l'indexation.
Parce qu'il s'agit d'élaborer un projet global de rémunération, comme Sobeco l'a fait ce matin... son représentant proposait une indexation légèrement inférieure à 3 p. 100 au-dessus du coût de la vie. Cela coûte moins cher d'après leur calcul. En fait, ils accordent un crédit sur les salaires aux gens qui acceptent une prestation moins élevée. Il faut examiner les différentes composantes de la rémunération et choisir les prestations qui vous conviennent. Si vous voulez l'indexation à 100 p. 100, très bien, vous serez simplement obligé d'accepter un salaire un peu inférieur.
M. Harper: Dans votre exposé, vous préconisez un taux annuel d'accumulation de 2 p. 100 sur les trois dernières années, payable à partir de 60 ans. L'indexation intégrale va s'ajouter à cela. Quel est d'après vous le montant de la cotisation correspondant?
M. McCrossan: Probablement de 18 à 20 p. 100 du salaire.
M. Harper: C'est donc proche du maximum.
M. McCrossan: Oui. Cela dépend de la répartition des députés en fonction de l'âge, mais je dirais que ce genre de prestations représente 18 à 20 p. 100 du salaire au lieu de 60 p. 100 actuellement. La façon dont cette cotisation est payée importe peu, qu'elle soit payée dans un rapport de 10 à 10, 9 à 9 ou 18 à 0, pour autant que l'ensemble des composantes de la rémunération soit raisonnable. Pourquoi se soucier de savoir qui paye, si le total est juste?
M. Harper: Dans un sens, c'est toujours la même personne qui paye.
M. McCrossan: C'est exact.
Mme Parrish: J'aimerais remercier le témoin. Il m'a montré deux choses. La première est qu'on ne meurt pas nécessairement lorsque l'on quitte le Parlement. Il a un travail rémunéré. La deuxième est que les députés ne partent jamais de façon définitive. Ils reviennent et hantent encore les lieux lorsqu'ils n'ont pas tout à fait terminé de faire ce qu'ils voulaient. Je suis heureuse que vous soyez ici.
Je voudrais inscrire quelque chose au compte rendu à l'intention des députés de l'autre côté de la table. Le vendredi 21 janvier 1994, M. Elwin Hermanson a posé la question suivante à la Chambre des communes:
- En décembre dernier, le député de Calgary-Sud-Ouest a écrit au premier ministre pour lui
demander de modifier le régime de façon à permettre aux députés du parti Réformiste ou de
n'importe quel autre parti de s'en retirer.
Mme Parrish: Oui.
Il a poursuivi ainsi:
- Nous aimerions savoir si le gouvernement a l'intention de continuer à nous forcer à participer
au régime de pension des députés.
- Si le député ne veut pas participer à ce régime, nous pourrons prendre des arrangements à cette
fin.
Monsieur McCrossan: Vous affirmez que 50 p. 100 des députés ne reçoivent jamais cette prestation?
M. McCrossan: C'est exact.
Mme Parrish: Il leur en coûte plus de 30 000$ en quatre ans pour cotiser à ce régime.
M. McCrossan: Oui.
Mme Parrish: Pour ceux qui ont été élus dans des comtés très difficiles ou pour ceux qui ont mis leur armure, enfourché leur cheval blanc et voulu sauver le monde et qu'ils s'aperçoivent qu'ils n'y arrivent pas ou pour ceux qui s'ennuient rapidement, il serait sans doute bien préférable de se retirer du régime, et d'investir dans un REÉR ces 30 000$. Est-ce bien vrai?
M. McCrossan: C'est exact. Ce serait une bonne décision financière.
Mme Parrish: Cela serait une bonne décision financière. Merci.
M. Boudria: Ceux qui ne s'attendent pas à être réélus feraient donc partie de cette catégorie.
Mme Parrish: Je l'avais compris.
Quel est le montant que le Canadien moyen verse dans son REÉR? Je ne parle pas ici de médecins ou d'avocats. Vous êtes actuaire et vous avez sans doute tous ces chiffres en tête.
M. McCrossan: Les études du ministère des Finances bien qu'encore provisoires, démontrent que le Canadien moyen n'existe pas. Cela dépend beaucoup de l'âge. Entre 5 et 10 p. 100 des Canadiens dans leur vingtaine versent une cotisation. 95 p. 100 des Canadiens dans la soixantaine cotisent à leur REÉR. S'ils gagnent moins que le revenu moyen, le taux des cotisations est très faible. Lorsqu'ils gagnent trois fois le revenu moyen, le taux des cotisations est très élevé.
Mme Parrish: Dans le cas, disons, d'un policier ou d'un pompier ou...
M. McCrossan: Dans le cas d'un policier, la réponse est très simple. La réponse est zéro parce qu'il contribue déjà un maximum à la caisse de retraite des pompiers.
Mme Parrish: D'une façon générale, les chiffres dont je dispose nous disent que la plupart des Canadiens accumulent au total 10 000$ dans leur REÉR au cours de leur vie, et qu'ils ne versent jamais plus de 2 000$ à 3 000$ par an, lorsque la situation est favorable. Est-ce bien exact?
M. McCrossan: Je pense que les moyennes sont trompeuses. Lorsque le gouvernement a introduit un plan d'accession à la propriété il y a quelques années, plan que le ministre des Finances Martin a développé, tout le monde a été surpris du nombre des gens qui s'en sont prévalus. Je pense que 1,5 million de personnes ont effectué des dépôts assez importants. Lorsque vous dites qu'il y a 15 000 adultes et que vous demandez quelle est la situation moyenne, c'était un mélange en fait de cas particuliers.
Mme Parrish: Puis-je vous interrompre et vous poser une autre question?
M. McCrossman: Oui.
Mme Parrish: Si vous êtes très riche et que vous gagnez 130 000$ par an, vous pouvez verser 13 500$ dans votre REÉR cette année. Si vous avez du mal à joindre les deux bouts, que vous venez d'acheter une maison, que vous avez un enfant et un seul salaire, vous ne cotisez pas à un REÉR.
M. McCrossan: Cela est possible.
Mme Parrish: Si vous êtes comme moi, une Canadienne moyenne, vous avez du mal à y verser 2 500$ par an.
M. McCrossan: Une Canadienne moyenne...
Mme Parrish: J'aurais aimé vous entendre dire oui, cela m'aurait permis de passer à la question suivante.
Disons que c'est 5 000$.
M. McCrossan: Je vais essayer d'être bref.
Le Régime de pensions du Canada et la sécurité de la vieillesse accorde une prestation qui représente environ 45 p. 100 du salaire moyen dans l'industrie et des prestations pour une personne qui gagne le salaire moyen de l'industrie. Une personne qui gagne le SMI n'a pas besoin d'épargner beaucoup d'argent pour recevoir une prestation équivalente à 70 p. 100 de son salaire. Pour une personne qui gagne la moitié du SMI, c'est le gouvernement qui épargne pour elle la plus grande partie des sommes destinées à la pension de retraite, cette personne n'a presque aucun intérêt à épargner. La personne qui gagne deux fois le SMI a par contre intérêt à épargner beaucoup et c'est ce qu'elle fait. Les gens essayent de conserver le niveau de vie qu'ils avaient avant de prendre leur retraite, en tenant compte des prestations versées par le gouvernement. Les gens sont assez habiles lorsqu'il s'agit de comparer des dollars actuels et des dollars futurs.
Mme Parrish: À l'exception des députés... de certains tout au moins.
Le président: Une dernière question brève.
Mme Parrish: Une dernière question brève, et c'est d'ailleurs davantage un commentaire qu'une question.
Vous dites qu'il s'agit là d'une question controversée et M. Plamondon affirme que l'on n'en parle pas beaucoup au Québec. J'ai fait un sondage auprès des ménages de ma région et j'ai eu 400 réponses. Spontanément, sans que les questions portent sur la retraite des députés, plus de 50 répondants en ont parlé. J'ai écrit à chacune de ces personnes en leur expliquant le nouveau système, et je leur ai demandé de bien vouloir m'appeler si elles avaient d'autres questions ou d'autres objections. Savez-vous combien j'ai eu de réponses? Une.
Si ce régime est critiqué, c'est parce que nous ne l'avons pas suffisamment expliqué à la population. Les difficultés viennent du fait que les gens se servent de ce régime pour se faire du capital politique; ce nouveau régime est bien pensé, c'est un pas dans la bonne direction et personne ne nous félicite.
M. McCrossan: Je peux vous dire que personne ne vous félicitera. C'est une réaction politique. De plus, la presse a donné une image très déformée du nouveau régime, je ne sais pour quelle raison.
Je crois que j'ai parlé de la règle... en fait, je n'en ai peut-être pas parlé. si vous êtes marié et avez moins de 60 ou de 65 ans, pour chaque dollar de revenu annuel il faut avoir 20$ en réserve. Ce rapport de 20 à 1 est assez constant. Après les dernières élections, vous avez peut-être vu des caricatures représentant Carole Jacques et d'autres jeunes députés comme Perrin Beatty et lu des articles qui disaient qu'ils allaient recevoir des millions et des millions de dollars en prestations. Ces chiffres avaient été calculés en prenant pour acquis qu'ils vivraient selon l'espérance normale de vie, et en tenant compte de l'inflation. J'estime que ces articles étaient très trompeurs.
Ces prestations étaient très élevées. Si l'on veut en déterminer la valeur économique actuelle, il suffit de multiplier le montant annuel de la retraite par 20 et l'on a une assez bonne idée du montant exact auquel a droit un député. Les méthodes de calcul qu'ils utilisent donnent des chiffres de 5 à 10 fois supérieurs.
Il y a eu beaucoup d'exagération des deux côtés. Les députés et les hommes politiques ne savent guère s'expliquer.
Mme Parrish: Merci.
M. Silye: Monsieur McCrossan, je n'ai pas assisté à votre exposé, mais j'ai parcouru votre mémoire pendant que j'écoutais les commentaires. Votre point de vue me paraît fort intéressant. Il me semble que vous êtes un des rares à vouloir résoudre l'ensemble du problème et non pas des aspects secondaires. Vous avez formulé certaines recommandations qui me paraissent très intéressantes.
Je tiens à vous signaler que les deux partis, les Libéraux et les Réformistes, ont fait campagne contre le régime de retraite actuel trop généreux. Nous avons été les premiers à le faire. Cela fait longtemps que nous nous opposons à ce régime, nous avions pris cette position au cours de l'élection précédente et nous voulions modifier le régime de retraite des députés.
Les Libéraux ont également déclaré dans leur Livre rouge qu'ils voulaient le changer eux aussi. Nous avons entendu certaines rumeurs au sujet de leur projet et nous sommes venus dire de modifier le régime de retraite. Il faut concevoir un bon régime de retraite, combiné à une bonne rémunération des députés, de façon à ce que le contribuable canadien puisse être satisfait d'un régime qui est trois à quatre fois meilleur que celui qu'offre le secteur privé.
Les Libéraux ont présenté le projet de loi C-85. Je ne pense pas que ce projet aille suffisamment loin. Je pense qu'il est encore beaucoup trop généreux. Dans ces circonstances, nous avons demandé de pouvoir nous en retirer. Cela ne sera pas mauvais pour nous parce que nous allons au moins montrer que nous sommes intègres et que nous agissons en fonction de ce que nous disons.
Je suis d'accord avec la plupart de vos recommandations. Vous faites notamment remarquer qu'on n'arrivera jamais à résoudre ce problème tant qu'on n'aura pas mis sur pied un régime global au lieu d'essayer de modifier le régime actuel selon les besoins, avec chaque gouvernement qui attaque l'un les pensions, l'autre les indemnités, un autre encore les avantages non imposables. C'est ce qu'il faudrait faire, mais le ministre dit qu'il n'est pas possible de refondre le régime, que ce n'est pas le temps d'en parler, à tel point que les discussions sont polarisées. Tout cela me semble, je dois le dire très franchement, bien inutile. Nous n'arriverons à rien tant que personne n'aura l'estomac - je peux parler d'estomac en comité - de dire quels sont les problèmes sans en faire de la politique. Nous n'arriverons jamais à découvrir une solution si nous continuons de cette façon.
À la lecture de votre mémoire, j'ai cru comprendre qu'en 1985 un membre du gouvernement conservateur avait eu la même idée. On avait pensé élaborer un nouveau régime de pensions qui serait comparable à ceux du secteur privé. Vous avez fait partie de ce groupe. Pouvez-vous me dire pourquoi il n'en est rien sorti?
M. McCrossan: J'en parle dans l'article.
M. Silye: Je l'ai lu et c'est pourquoi je vous ai posé cette question. Il y a des choses qui manquent. Vous sautez par-dessus certaines choses.
M. McCrossan: Lors de la présentation du budget de 1985, le gouvernement s'était engagé, puisqu'il disposait de certaines études, de ramener le coût du régime de retraite des députés aux niveaux de ceux du secteur privé. Un tiers environ du budget de 1985 concernait la législation relative aux retraites, notamment des modifications au Régime de pensions du Canada, à la Loi sur les normes des prestations de pensions. On a présenté un projet par an en moyenne sur une période qui s'est avérée être de six ans, de sorte que nous n'avons fini qu'en 1990, je crois.
Vous n'avez pas accordé une grande priorité au régime de retraite des députés. Le gouvernement modifiait un élément à la fois. Comme je l'ai mentionné dans l'article, on a parlé de cette question. C'est le ministre des Finances qui l'a abordée à la dernière réunion du caucus avant l'élection de 1988. J'ai parlé dans mon article de début d'émeute.
Je parlais plutôt de la répartition des indemnités entre les députés qui avaient moins de 6 ans d'ancienneté et ceux qui avaient entre 6 et 15 ans. Je crois que l'on peut dire que la plupart des députés qui vociféraient contre le ministre des Finances étaient ceux qui avaient de 6 à 15 ans de service et qui savaient qu'ils recevaient en fait une indemnité correspondant à 100 p. 100 de leur traitement. Il en reste peut-être encore un dans la Chambre des communes qui pourrait vous le confirmer.
J'ai appris par la suite qu'il y avait eu également de vives discussions à l'extérieur du caucus libéral. Je ne sais pas jusqu'où les députés sont allés et je ne voudrais pas que les députés violent le secret des délibérations de leur caucus. J'ai beaucoup hésité à le faire. Le fait est qu'il y a de grands perdants et de grands gagnants lorsqu'on décide de mettre sur pied un système rationnel. Les députés qui connaissent la valeur exacte de l'indemnité auquelle ils ont droit vont lutter à mort pour la conserver. C'est ce qui s'est produit en 1988.
M. Silye: Il se produit aujourd'hui dans le caucus libéral la même chose qui s'est produit en 1985.
Le président: S'il vous plaît.
M. McCrossan: Je ne demanderais pas à vos collègues libéraux de le confirmer.
Le président: Nous n'entrerons pas dans ces questions. S'il vous plaît.
La période des questions au témoin est terminée. Monsieur McCrossan, je tiens à...
M. Silye: Ai-je eu droit aux mêmes cinq minutes que Mme Parrish?
Le président: Oui. Vous avez commencé par une déclaration de deux minutes et demie, monsieur Silye.
M. Silye: Mme Parrish a eu trois minutes et demie?
Le président: Elle n'a pas été très rapide non plus, mais je vous ai chronométré.
Je tiens à vous remercier d'être venu. Les renseignements que vous avez fournis au comité nous seront très utiles et nous vous remercions de l'exposé écrit que vous avez remis. Nous sommes prêts à passer au témoin suivant. J'apprécie les efforts que vous avez faits, monsieur.
Notre témoin suivant cet après-midi est M. Brian Corbishley, associé directeur du cabinet KPMG Management Consulting.
Monsieur Corbishley, je tiens à vous remercier d'être venu à Ottawa aujourd'hui. Je crois savoir que vous êtes parti de Calgary pour venir ici. Nous vous en sommes reconnaissants. Vous avez la parole, monsieur. Je pense que vous allez commencer par un exposé.
M. Brian Corbishley (associé directeur KPMG Management Consultant): Oui, monsieur le président. Merci de m'avoir invité ici aujourd'hui. J'aimerais commencer par un bref exposé dans lequel je vous décrirai brièvement les raisons qui me permettent de parler de ce sujet.
Je suis responsable depuis 14 ans de nos activités de consultants à Calgary, et j'étais auparavant vérificateur général adjoint du Canada, ce qui explique que je connais assez bien tous ces aspects.
Je consacre une bonne partie de mes activités au domaine de la rémunération. Je vais me fonder sur les travaux que j'ai effectués pour le compte du gouvernement de l'Alberta, ces dernières années, au sujet de la rémunération des députés provinciaux pour vous parler aujourd'hui. Dans le cours de cette étude, nous avons examiné la rémunération des députés fédéraux, ainsi que celle des députés dans les différentes provinces. Je connais donc bien la façon dont les députés de la Chambre sont rémunérés.
Si je comprends bien, monsieur le président, le projet de loi qui vous a été soumis modifierait le régime de pensions des députés de deux façons. Premièrement, le droit aux prestations de retraite passerait de 5 à 4 p. 100 par année de service. Deuxièmement, ce projet fixe un âge minimum de 55 ans à partir duquel les députés peuvent recevoir leur pension de retraite.
Les autres éléments principaux du régime demeureraient inchangés. Cela comprend l'indexation de la pension pour tenir compte de l'inflation à l'âge de 60 ans, de façon rétroactive, et un montant maximum de la prestation de retraite correspondant à 75 p. 100 de la moyenne des six meilleures dernières années.
Lorsqu'on examine les diverses composantes de la rémunération, notamment les pensions de retraite, pour voir si elles sont équitables et concurrentielles, on est amené à comparer ce qu'offrent d'autres organisations. je dois vous dire, monsieur le président, que le régime de pensions proposé est, d'après mes calculs, sept fois plus généreux que le régime moyen offert par le secteur public et quatre fois plus généreux que les régimes offerts par le secteur privé. Je vais vous dire pourquoi.
Premièrement, la prestation de retraite, qui correspond à 4 p. 100 par année de service, est environ, comme vous l'ont déjà déclaré plusieurs témoins, le double de ce qu'offrent les secteurs public et privé.
Deuxièmement, dans les autres secteurs, vous pouvez habituellement prendre votre retraite lorsque le total de votre âge et des années d'ancienneté est égal à 85. Ainsi, une personne de 55 ans doit avoir 30 années de service, et non pas 19, pour avoir droit à sa retraite. En cas de retraite anticipée, le montant des prestations est normalement diminué de deux à trois points de pourcentage par an.
Troisièmement, votre régime est indexé pour tenir compte de l'inflation. Dans le secteur public, les pensions sont dans l'ensemble indexées en moyenne sur les deux tiers de l'inflation. Il est très rare dans le secteur privé que les pensions soient indexées, et lorsqu'elles le sont, elles ne le sont qu'après le départ à la retraite.
Enfin, le montant maximal de la pension des députés correspond à 75 p. 100 des sommes gagnées au cours des six meilleures dernières années. Pour les autres, c'est habituellement 70 p. 100, mais il faut 35 ans de service pour y avoir droit contre 19 ici.
Le régime de pensions comporte des éléments très divers et il est donc difficile de les comparer. Pour pouvoir le faire, il faut donc combiner tous ces éléments dans une unité unique. Cette unité est le montant de la prestation de retraite gagné par année de service à partir des cotisations de l'employeur. Cela ne tient donc pas compte des cotisations des députés. Nous n'avons pas tenu compte des cotisations des employés parce que, comme l'a fait remarquer l'intervenant précédent, dans le secteur privé, il est très rare que l'employé cotise au régime de retraite.
Je vais vous citer un certain nombre de chiffrres qui correspondent à un député de 49 ans, qui a 9 ans de service et qui a 50 p. 100 de chances d'être réélu. Je ne sais pas si ce profil se retrouve chez un membre du comité, mais ce sont les paramètres que nous avons utilisés pour l'étude effectuée en Alberta. Cela ne représente peut-être pas le député moyen mais cela en est suffisamment près pour me permettre de faire ressortir mon argument.
Le montant de la prestation provenant de la cotisation de l'employeur, la cotisation du gouvernement, pour une année de service pour ce soi-disant député moyen est d'environ 43 000$ par an, avec le régime actuel.
En d'autres mots, cela veut dire en gros que si vous mettez de côté 43 000$ par année, si vous l'investissez et répétez l'opération pour chaque année de service, cela permettra de verser la pension. Ce montant serait ramené à 34 000$ environ avec le régime proposé.
Dans le secteur public, l'étude effectuée en Alberta nous a permis de constater qu'une personne du même âge, qui gagnerait le même revenu, gagnerait environ 5 000$ par an comparativement à 34 000$ ou à 43 000$. Dans le secteur privé, ce montant serait d'environ 9 000$.
Essentiellement, la pension de retraite est une forme de revenu différé. On pourrait en fait en arriver au même résultat en versant à ce député une somme supplémentaire de 34 000$ par année, en l'obligeant à l'investir, ainsi que sa propre cotisation de 9 p. 100, en vue de sa retraite.
Bien entendu, puisque la cotisation maximale au REÉR pour un député serait d'environ 12 000$, cela représente quelque 60 000$ avant impôts. Autrement dit, le montant de la prestation gagnée en un an en raison de la cotisation de l'employeur est à peu près égal à l'allocation, ce qui est une autre façon de dire ce que disait le témoin précédent.
Nous nous sommes alors demandé comment on pouvait justifier un tel régime de pension? Le principal argument semble être que l'on cherche ainsi à indemniser les députés pour le préjudice causé à leur carrière. Je ne pense pas que l'on puisse retenir cet argument pour les raisons suivantes.
Nous avons obtenu de Statistique Canada des données qui indiquent qu'un employé travaille en moyenne pendant sept ans pour le même employeur, période qui n'est pas très différente du nombre d'années pendant lequel siège en moyenne un député. Le nombre des années de service a peut-être été un excellent motif à un moment donné, mais il ne l'est certainement plus.
Même si ce n'est pas le cas général, on peut dire que la plupart des gens qui changent de travail voire même d'employeur demeurent dans la même profession, ce qui n'est pas habituellement le cas des députés. Il nous paraît par conséquent logique d'indemniser les députés pour avoir interrompu leur carrière, mais pas en leur versant une pension très élevée pendant 25 années ou plus. Il convient plutôt de leur verser une indemnité de départ ou de réinstallation.
Dans le secteur privé, les indemnités de départ lorsque la cessation d'activité est involontaire, ce qui est le terme technique pour décrire la perte d'une élection, sont d'un mois par année de service jusqu'à un maximum, qui est souvent fixé à 12 mois. Ce genre d'indemnité pourrait aider les députés, en attendant qu'ils trouvent un autre travail, et leur offrirait même peut-être la possibilité de se recycler.
Je crois également que les députés qui ne sont pas réélus doivent obtenir à l'heure actuelle une aide financière jusqu'à un maximum de 18 000$ pour leurs dépenses de réinsertion, ainsi que pour des consultations financières et professionnelles, mais ce montant ne comprend pas d'indemnité de départ.
Si l'on veut rémunérer les députés de façon juste et équitable, il me semble - et je crois que c'est ce que pensent la plupart des autres témoins - qu'il faille considérer la composante retraite dans le contexte de toutes les autres composantes de la rémunération.
Il faudrait ajouter un tableau à mes commentaires. Ce tableau représenterait une comparaison de l'ensemble de la rémunération des députés et celle qui correspond à des emplois du secteur public et privé de nature comparable en termes de facteurs comme les connaissances, l'expérience, l'intensité du travail, la responsabilité, les conditions de travail, c'est-à-dire les facteurs que l'on utilise lorsqu'il s'agit de parité salariale.
Comme je l'ai mentionné, les pensions de retraite sont une forme de revenu différé. Si l'on ajoute le montant de la pension de retraite gagnée chaque année à l'indemnité et à l'allocation non imposable, vous obtenez la rémunération globale annuelle des députés, que l'on peut alors comparer à celle qu'offrent les autres secteurs. D'après le tableau, vous pouvez constater que l'indemnité des députés est relativement faible, mais lorsqu'on y ajoute la pension, la rémunération globale des députés est relativement élevée, si on la compare aux autres secteurs.
Comment expliquer cette situation? Le système de rémunération des députés fédéraux et de la plupart de députés provinciaux remonte à l'époque où le travail de député n'était qu'un travail à temps partiel au Canada. L'indemnité servait à compenser la perte de revenu correspondant aux quelques heures consacrées aux travaux effectués à la Chambre des communes et dans la circonscription. C'est pourquoi l'on parle d'indemnité. L'allocation non imposable avait pour but de rembourser les membres pour les frais de déplacement et de logement et de subsistance à Ottawa.
À l'heure actuelle, les députés ont un travail à temps plein, voire même encore plus exigeant. Il est impossible de conserver une autre source de revenu. L'indemnité est devenue en fait un salaire mais au lieu d'ajuster le salaire en conséquence, tous les gouvernements successifs ont cherché à le plafonner.
Il existe d'autres dispositions qui traitent du moins en partie de l'indemnité de déplacement et d'hébergement, et l'indemnité non imposable fait partie intégrante de la rémunération, au même titre que les mesures de recouvrement des dépenses. Pour ces raisons, on s'est mis à croire qu'on avait adopté un régime de retraite de luxe afin de compenser les députés pour le traitement insuffisant qu'ils touchent. Ces anomalies historiques ont ensuite été perpétuées pour des raisons politiques. Les traitements élevés attiraient l'attention; ce n'était pas le cas pour les pensions de retraite, du moins jusqu'à présent. On les tenait pour acceptables sur le plan politique, et cela semble être encore le cas.
Les traitements ont été gelés pendant sept ans, et le régime de retraite réduit qu'on propose est encore de quatre à sept fois plus élevé que ce que les autres Canadiens peuvent gagner. À mon avis, il faut repenser tout le régime de rémunération dans le contexte des fonctions du député d'aujourd'hui.
C'est à cause du régime de retraite que le cumul de la pension et du traitement est controversé. Cela semble vraiment dépasser la mesure. Si le régime de retraite ressemblait à celui des autres secteurs et n'aurait droit à pension qu'à l'âge de 60 ou de 65 ans, le cumul ne serait pas déraisonnable. Dans les autres secteurs, les gens peuvent prendre leur retraite après une carrière complète, toucher une pension et amorcer une autre carrière.
En résumé, je crois qu'on ne saurait considérer isolément un volet de la rémunération, en l'occurrence les retraites. Un régime de rémunération que les Canadiens estimeraient juste comparativement à ce à quoi ils ont droit établirait une norme compétitive d'indemnisation qui équivaudrait aux salaires versés dans les autres secteurs, permettrait d'abolir l'indemnité non imposable, de rembourser les dépenses raisonnables sur présentation de reçus, et de verser une indemnité de départ suffisante aux députés défaits aux élections afin de les aider à faire carrière ailleurs. Ces mesures vous permettraient alors d'adopter un régime de retraite comparable à d'autres secteurs, tout en tenant compte du caractère unique de la fonction de député.
Merci.
Le président: Merci.
[Français]
M. Plamondon: Je n'ai qu'une question. Pourquoi le double dipping est-il plus acceptable à 60 ans qu'à 55 ans?
[Traduction]
Comprenez-vous ma question?
M. Corbishley: Oui.
M. Plamondon: Pourquoi le cumul est-il plus acceptable à 65 ans qu'à 55 ans?
M. Corbishley: Je me suis peut-être mal exprimé. Ce que je veux dire, c'est que le cumul est acceptable si vous avez une rente constituée raisonnable.
Si le montant de la pension de retraite auquel vous donnent droit vos années de service est raisonnable et comparable - disons que vous avez travaillé pendant dix ans dans un secteur quelconque et mérité un tiers d'une pension raisonnable, puis dix ans dans un autre secteur et mérité un autre tiers de votre retraite, et dix ans dans un autre secteur, si bien qu'aux termes de votre carrière, vous avez travaillé dans trois secteurs différents, dont l'un où vous étiez député fédéral, vous ne pourriez toucher une pension complète à moins de trouver un emploi dans un autre secteur. Pourquoi ce secteur ne pourrait-il être l'administration fédérale ou un contrat fédéral?
Le problème avec le cumul, c'est que la retraite est suffisante sans avoir besoin d'un autre emploi après qu'on a cessé d'être député.
[Français]
M. Plamondon: Vous dites que la retraite suffit. Dans les statistiques dont je dispose, sur le nombre de députés qui reçoivent une pension de retraite, 77 p. 100 ont plus de 60 ans. Il n'y en a que 16 p. 100 qui ont entre 50 et 60 ans. Il y en a 5 p. 100 qui ont moins de 45 ans. Non, ce n'est même pas 1 p. 100.
Alors, je ne comprends pas comment ils pourraient cumuler deux emplois afin de recevoir une pension, s'ils reçoivent leur pension de député à 60 ans dans 77 p. 100 des cas. Je pense que la perception du public est...
Il est bon de remettre en question les régimes de retraite, mais ce n'est pas la réalité. Vous parlez d'un certain nombre de personnes qui reçoivent des sommes d'argent extravagantes. Or, 75 p. 100 de ceux qui touchent une pension reçoivent moins de 35 000$. On ne peut pas vivre avec 35 000$, du moins pas dans ma région.
[Traduction]
M. Corbishley: Mais le fait est que le montant de la pension qu'on gagne par année de service est beaucoup plus élevé que dans tout autre secteur. Si vous aviez une retraite équivalente à un autre secteur, disons le genre qu'on propose - 2 p. 100 par année de service et ainsi de suite - il ne serait pas alors aussi déraisonnable d'obtenir un nouvel emploi au sein d'un organisme fédéral par exemple. Cela semble aujourd'hui beaucoup plus déraisonable à cause du montant de la retraite.
[Français]
M. Plamondon: Êtes-vous d'accord sur le fait qu'on pourrait cependant rapidement apporter une correction dans ce projet de loi-là en mettant en application ce qui touche le double-dipping immédiatement après la sanction royale au lieu de l'appliquer seulement à ceux qu'on nommera prochainement ou à ceux dont on renouvellera le mandat ou qui sont déjà en place? Qu'est-ce que vous en pensez?
[Traduction]
M. Corbishley: Si vous voulez mettre en oeuvre la mesure sur le cumul, j'imagine que le plus tôt sera le mieux. Je ne vois pas pourquoi vous retarderiez cela.
[Français]
M. Plamondon: Dans le projet de loi, ceci s'applique seulement pour ceux qui seront nommés après la sanction royale du projet de loi ou pour ceux qui sont en place, si on renouvelle leur mandat. Alors, comme on modifie les pensions des députés en cours de mandat, pourquoi ne modifierait-on pas aussi les pensions, en cours de mandat, de ceux profitent présentement du double-dipping?
Je donne un exemple concret: Benoît Bouchard est ambassadeur en France. Il touche un salaire de 150 000$ par année et il a une pension de ministre. Alors, quand la loi sera sanctionnée, immédiatement après, on devra soustraire sa pension de son salaire. Mais, si on nomme un autre ambassadeur dans un mois, on devra obligatoirement soustraire sa pension de son salaire. Selon le projet de loi actuel, celui qui est en place peut garder tous ses privilèges pour le reste de sa vie, parce qu'un ambassadeur est nommé à vie, tandis qu'il y a des gens qui sont nommés pour cinq ans. C'est seulement si on renouvelait le mandat dans cinq ans que les dispositions relatives au double-dipping s'appliqueraient. Alors, c'est dans ce sens-là que ce serait un moyen de corriger rapidement la situation. Les 55 ans dans la loi, c'est déjà un pas en avant. Les dispositions relatives au double-dipping, appliquées immédiatement, seraient déjà un autre pas et peut-être qu'on pourrait ensuite penser en pourcentages. Je ne sais pas si je me trompe.
[Traduction]
M. Corbishley: Je crois que vous avez trois situations ici. Vous avez d'anciens députés fédéraux qui sont employés à l'heure actuelle aux termes d'un contrat fédéral quelconque. Vous avez les députés actuels qui pourront obtenir un jour des contrats fédéraux. Vous avez aussi les futurs députés, ceux qui seront élus aux prochaines élections.
Chose certaine, l'État a des obligations contractuelles envers ceux qui occupent de tels emplois. La question des accords ou des contrats, qui deviennent des obligations, se pose toujours. C'est comme si l'on modifiait rétroactivement le régime de retraite. Ne faites pas cela parce qu'il s'agit d'une obligation qu'on a assumée jusqu'à ce jour.
Donc, à mon avis, vous ne devriez rien changer pour les personnes qui ont actuellement des contrats. Si le contrat expire et qu'il s'agisse de savoir s'il sera renouvelé ou non, vous pouvez alors faire des changements.
Pour les députés actuels, c'est un peu plus difficile. J'incline à penser qu'il faut appliquer cette mesure. On ne devrait pas permettre le cumul aux députés actuels, non plus qu'à ceux qui seront élus aux prochaines élections, parce que l'État n'a pas pour le moment d'obligations contractuelles envers eux.
M. Silye: Je vous remercie de votre exposé, monsieur Corbishley. Vous rejoignez essentiellement notre pensée, à savoir que le régime prévu par le projet de loi C-85 est extrêmement généreux, est encore trop généreux, et est supérieur à ce qui existe dans le secteur public ou privé. Je vais laisser aux députés d'en face le soin de digérer toutes vos statistiques.
Étant donné que vous êtes un spécialiste des questions comme les retraites et la rémunération, j'aimerais vous soumettre un scénario pour que vous me disiez si ces critères sont acceptables ou non, et je vous demanderai ensuite votre avis sur une recommandation.
Essentiellement, le témoignage de Sobeco Ernst & Young nous a appris aujourd'hui que la valeur du régime de retraite fondée sur un salaire annuel vaut est d'environ 28 000$. Mais vos chiffres varient, selon l'angle qu'on prend. Je sais que c'est une question très compliquée, mais partons seulement du fait que le régime de retraite vaut 28 000$.
Les députés touchent un traitement imposable de 64 400$; je pense que tout le monde est d'accord avec ça. Ils touchent également deux allocations non imposables: une allocation de dépenses de 21 300$ que tout le monde reçoit; et une indemnité de déplacement non imposable de 6 000$ pour les députés qui vivent à plus de 100 kilomètres d'ici. Ce qui totalise un montant non imposable de 27 300$.
Il faut ajouter à ça les nombreux avantages non imposables. Je ne parlerai pas de tout ce qui est caché, des détails infimes, mais seulement des choses qui sont mentionnées dans ces rapports, que tous les députés ont pu lire, et je m'en tiendrai donc à des données actuelles.
Ce qu'on mentionne dans tous ces rapports, ce sont les assurances-maladie et les régimes de soins dentaires auxquels les députés ont droit. Je les évaluerai à, disons, 1 000$. Ce pourrait être plus élevé. Mais ce sont des avantages qui sont imposables pour notre personnel. Le stationnement gratuit que nous avons partout, aux aéroports, ici ou au bureau, vaudrait 150$ par mois ou 1 200$ par année dans le secteur privé. Sobeco Ernst & Young évalue à 4 400$ l'assurance-vie gratuite, qui s'applique aussi à mon conjoint et aux enfants à ma charge. On inclut aussi dans la rémunération le laisser-passer gratuit de ViaRail, dont la valeur dépend de l'usage qu'on en fait. Beaucoup de gens ne s'en servent pas. On évalue cela à seulement 500$. Les voyages gratuits pour la famille vaudraient entre 4 000$ et 12 000$. Certains députés s'en prévalent, d'autres non.
Cet ensemble d'avantages pour les députés fédéraux vaudrait au minimum 11 000$, sans impôts.
Prenons les montants non imposables, ces 11 000$ et 27 000$, et comparons-les un moment à un salaire transparent et imposable pour voir ce que touchent actuellement les députés fédéraux. Si vous êtes d'accord avec cette logique, je ramènerai au montant brut les montants non imposables pour établir le montant net que les députés touchent aujourd'hui afin que l'on compare des pommes avec des pommes.
On ramène au montant brut les 27 300$ et l'on obtient 54 600$. Si l'on ramène au montant brut les 11 000$ - je ne me sers que du montant minimum des avantages non imposables de 11 000$, et non des 17 000$ que touchent certains députés - et cela donne 22 000$. Donc, si vous additionnez les 28 000$, les 64 400$, les 54 600$ et les 22 000$, ça donne 169 000$.
Si nous voulions donner aujourd'hui aux députés la même rémunération qu'ils touchent en incluant la retraite, les indemnités non imposables, l'indemnité de déplacement non imposable, les avantages sociaux non imposables - et je n'ai pas inclus tous les avantages, et j'ai la certitude qu'on pourrait en ajouter quelques-autres, mais je ne veux pas être mesquin - et si l'on mettait tout cela dans un seul salaire transparent et imposable, cela donnerait 169 000$, n'est-ce pas?
Êtes-vous d'accord avec cela?
M. Corbishley: Si vous mettiez tout cela dans un seul salaire, oui. Je pense qu'on pourrait probablement ramener au montant brut une partie des choses que vous mentionnez, mais je ne suis pas sûr qu'on pourrait le faire pour l'ensemble.
M. Silye: D'accord, donc oublions-en quelques-uns. Mais j'affirme pour ma part que la rémunération, que l'on inclue ou que l'on exclue le régime de retraite, qui est trop élevé à notre avis... et le gouvernement motive sa loi aujourd'hui en disant que les traitements sont peut-être trop bas, les indemnités trop basses, les heures trop longues, la réélection incertaine, mais pour ceux qui touchent la pension de retraite, c'est une récompense.
Donc, on justifie ce régime de retraite qui est encore trop généreux, trop cousu d'or, en disant qu'on n'en reçoit pas assez ailleurs.
Ce que j'essaie de prouver, c'est que les députés touchent quelque chose. Ils touchent quelque chose par des moyens que le public ne comprend pas.
C'est ici qu'intervient ma recommandation. C'est ce à quoi je veux en venir. Je voulais prendre mon temps pour y arriver.
Notre parti est venu ici parce qu'il est contre ce régime de retraite, et nous y avons recommandé des changements. Nous avons proposé des solutions et des changements au cours du débat. Nous y avons consacré une journée d'opposition entière. Cela fait un an que nous réclamons cela.
Nous croyons qu'il faut créer un organisme indépendant. Je crois que votre maison, Sobeco Ernst & Young, et quelques autres témoins pourraient s'unir et constituer l'organisme indépendant dans lequel le public canadien aurait confiance. Nous serions obligés de l'accepter. Nous avons recommandé aujourd'hui la création de cet organisme; on nous répond qu'il ne saurait en être question. C'est ce qu'on nous répond. Si ça vous plaît, présentez-vous aux élections. Si ça ne vous plaît pas, tant pis.
Si l'on adoptait cette recommandation, ne croyez-vous pas qu'une mesure de ce genre rétablirait le crédit des politiciens, que la question de la rémunération irriterait moins le public canadien parce qu'elle échapperait au contrôle des députés? On ne saurait y voir un raisonnement intéressé. Le gouvernement libéral ne serait pas critiqué. Peu importe ce que recommanderait cet organisme. Personne ne serait blâmé. N'aurait-on pas ainsi un système plus intègre et plus honnête? Est-ce que ce serait un moyen de régler ce problème?
M. Corbishley: Je crois certainement moi aussi qu'on ne s'y retrouve absolument pas dans le système actuel et que le public ne s'y retrouve pas. Je crois que si l'on expliquait les choses de cette façon, par exemple, le public serait tout à fait indigné d'apprendre quelle somme totale... Ou selon ce que vous dites, qu'on ramène au montant brut tous ces avantages ou non.
Au gouvernement de l'Alberta, nous avons examiné ce qui se faisait dans les autres provinces au niveau décisionnel, et nous avons recommandé la création d'une commission indépendante. Mais vous avez déjà cela ici. Vous avez la Commission Lapointe.
Si tous les députés pouvaient s'entendre pour dire que, oui, ils se rangeront aux décisions de quelque organisme indépendant et bien qualifié, cela marcherait probablement. Mais, au bout du compte, c'est toujours le Parlement qui est l'autorité ultime. Vous devrez toujours décider si, oui ou non, vous acceptez les recommandations de cet organisme.
Chose certaine, si vous pouviez tous vous entendre sur cette question, cela assainirait de beaucoup l'atmosphère et rétablirait votre crédit.
M. Silye: Vous avez analysé ce régime de retraite-ci. Est-ce exact? Vous avez analysé les 4 p. 100 par année, la retraite à 55 ans - et non le régime de retraite précédent.
M. Corbishley: En fait, j'ai analysé les deux.
M. Silye: Mais lorsque vous dites que le régime proposé dans le projet de loi C-85 est - comme vous dites, c'est compliqué et on ne s'y retrouve pas - environ sept fois plus généreux que le régime de retraite typique du secteur public et quatre fois plus généreux que le régime de retraite typique du secteur privé, le croyez-vous sincèrement? Des témoins nous ont dit aujourd'hui que ce n'était que deux ou trois fois supérieur. Vous êtes donc celui qui lui avez accordé jusqu'à ce jour la plus haute valeur.
M. Corbishley: Vous avez mentionné les 28 000$ dont parlait Sobeco Ernst & Young. J'imagine qu'ils ont examiné la répartition selon l'âge, la durée du service et tout le reste, pour parvenir à une moyenne. Mon analyse se fondait sur le choix d'une moyenne. Il s'agissait en fait de la moyenne de l'Assemblée législative de l'Alberta au moment où nous avons fait l'analyse - soit 49 ans avec neuf ans de service et tout le reste. C'est pourquoi mon chiffre se situe à 34 000$. Le leur est de 28 000$. C'est ce qui explique la différence.
Sans dire que leur chiffre est plus précis que le mien, il s'agit quand même d'un régime qui est quatre fois et demie plus généreux que celui du secteur public et trois fois supérieur à celui du secteur privé.
M. Silye: Si nous utilisons alors votre chiffre - en revenant à l'analyse que j'essayais de faire et en ramenant les montants au brut - et même si nous ne ramenons pas les montants au brut, si nous utilisons les avantages sociaux non imposables valant annuellement 11 000$, sans les ramener au brut, le traitement de 64 000$, et en utilisant vos chiffres de 34 000$ pour la valeur de la retraite et de 27 000$ pour l'allocation de dépenses non imposable, et encore, sans ramener ces montants au brut, cela nous donne 136 000$.
Si on voulait rendre visibles ces trois différentes composantes, toutes ces enveloppes distinctes d'indemnisation et de remboursement des dépenses, les rendre transparentes, imposables et montrer aux Canadiens exactement ce que gagne un député, est-ce qu'on ne devrait pas alors en calculer la valeur brute? À 21 000$, ne le feriez-vous pas?
M. Corbishley: Je ne sais si on en calculerait la valeur brute. J'ignore quelle partie de cette allocation de dépenses est en fait utilisée pour des dépenses.
Je préférerais l'abolir et exiger des reçus pour les dépenses. Je ne sais pas si pour la moyenne des députés, les dépenses sont équivalentes ou supérieures à ce montant. Je ne sais pas si on a examiné cette question. Peut-être que Sobeco Ernst & Young l'a fait.
M. Silye: De façon globale, d'après ce qu'on a dit ici, à votre avis, est-ce que les députés reçoivent entre 140 000$ et 170 000$?
M. Corbishley: Si on parle de rémunération totale. On ne peut inclure les dépenses légitimes.
M. Silye: Non. Donc les 6 000$ ne compteraient pas.
M. Corbishley: Moi, j'avais calculé 120 000$.
Mme Parrish: Je ne peux m'empêcher de faire une observation. Même si je le trouve charmant et que j'aime être en sa compagnie, je regrette beaucoup que M. Silye se soit emporté en Chambre. Il a maintenant passé des heures à essayer de justifier ces 150 000$.
Je pense que vous l'avez fait aujourd'hui, d'accord? Peut-on laisser tomber la question?
Il a été très intéressant pour moi d'entrer en contact avec KPMG au cours de l'une de ses diverses permutations et réorganisations. J'ai déjà traité avec eux auparavant. Vous changez constamment l'organisation de l'entreprise de gestion.
J'ai une question piège. Lorsque j'étais présidente de la commission d'appel, nous avons retenu les services de votre entreprise à deux reprises. La première fois, à l'occasion d'un appel d'offres, nous voulions que vous proposiez pour les secrétaires un régime qui soit peu coûteux, économique et vendable - et vous l'avez fait.
La deuxième fois, les surintendants vous ont demandé de proposer un régime gonflé, exotique, nee plus ultra et justifiable - et vous l'avez fait.
Est-il vrai que la demande de proposition que vous recevez vous donne une bonne idée de l'orientation que la société qui achète vos services souhaite que vous preniez?
M. Corbishley: Non.
Mme Parrish: Absolument pas?
Lorsque M. Klein a retenu vos services ou vous a demandé conseil - je ne parle pas ici de vous personnellement, mais plutôt de votre entreprise - cela a donné pour résultat que l'Alberta s'est retrouvée sans régime de pension. Lorsqu'il a retenu vos services - ne le prenez pas personnellement, je parle ici de votre entreprise - l'intention de M. Klein n'était-elle pas que vous arriviez avec une réponse disant qu'aucun régime de pension n'était requis?
M. Corbishley: Tout d'abord, ce n'est pas M. Klein qui a retenu nos services. C'était le comité des services aux députés.
Mme Parrish: C'est presque la même chose.
M. Corbishley: Deuxièmement, nous n'avons pas recommandé l'abolition des pensions.
Mme Parrish: Qu'avez-vous recommandé?
M. Corbishley: Nous avons recommandé que les pensions soient réduites conformément aux recommandations de plusieurs témoins que nous avions entendus.
Mme Parrish: Que pensez-vous de l'idée d'interdire totalement un régime de pension et de passer directement à un REÉR?
M. Corbishley: Nous avons fait deux différentes études. À la suite de la première, nous avons recommandé un régime de retraite à prestations déterminées réduites. Cette recommandation n'a de toute évidence pas été acceptée. Nous avons donc fait une recommandation qui n'était pas celle que le client cherchait.
Mme Parrish: Non - mais vous avez essayé de nouveau.
M. Corbishley: On nous a ensuite demandé de mettre à jour cette étude après que la pension eut été abolie, ce que nous n'avons pas recommandé. Il y avait d'autres recommandations. Nous avons en outre recommandé l'abolition des indemnités non imposables, et cela n'a pas été accepté. Nous avons recommandé l'augmentation des indemnités, ce qui a été rejeté.
Mme Parrish: À votre avis, en tant que professionnel qui témoigne ici aujourd'hui, si après un ou deux autres budgets difficiles le ministre des Finances décidait de plafonner les contributions à un REÉR à 7 500$ pour tous les Canadiens, est-ce que les membres de l'Assemblée législative de M. Klein seraient en très bonne posture à la fin de leur prochain mandat?
M. Corbishley: À l'heure actuelle, ils n'ont absolument rien pour la retraite.
Mme Parrish: Mais ils peuvent investir eux-mêmes dans un REÉR, jusqu'à concurrence de 13 500$ par an.
M. Corbishley: Oui, comme tout le monde.
Mme Parrish: Laissez-moi vous poser la question de nouveau: si le ministre des Finances imposait une limite de 7 500$ au montant qu'une personne peut investir dans un REÉR, se retrouveraient-ils dans une situation désespérée?
M. Corbishley: Leur situation ne serait pas pire que celle de n'importe qui d'autre.
Mme Parrish: Merveilleux.
À la page 3, vous dites:
- Qu'est-ce qui peut modifier de telles pensions améliorées? Le principal argument semble être
qu'il faut indemniser les députés pour avoir interrompu leur carrière. À mon avis, ce n'est pas
un argument valable et ce, pour les raisons suivantes.
- Les données de Statistique Canada montrent qu'aujourd'hui, les gens ne travaillent en moyenne
pour le même employeur que pendant sept ans, ce qui n'est pas tellement différent du nombre
d'années pendant lesquelles un député occupe généralement son poste.
À votre avis, après le 8 juin en Ontario, quel sera l'employabilité d'un ministre du Cabinet néodémocrate dans son domaine de compétence?
Des voix: Oh, oh!
Mme Parrish: Je ne veux pas être sarcastique. Je pense qu'il s'agit d'une grave préoccupation.
M. Corbishley: Immédiatement après ce paragraphe, j'ai dit: «De façon générale, toutes ces personnes continuent d'exercer la même profession tandis que ce n'est pas le cas pour les députés.» Par conséquent, je pense qu'il y a un argument en faveur d'une certaine forme d'indemnisation pour cette interruption de leur carrière, mais pas sur une période de 25 à 30 ans, comme cela semble être le cas à l'heure actuelle avec les pensions.
Mme Parrish: Si les choses continuent de la même façon pour moi, je ne réussirai jamais à rester encore sur cette terre pendant 25 ans.
L'autre observation que vous avez faite, c'est que dans le secteur privé, les employeurs ne contribuent pas aux régimes de pension. Vous dites que vous n'y contribuez pas, et M. McCrossan a dit la même chose. En fait, lorsque vous parlez de rémunération totale, vous recevez 4 000$, 5 000$ ou 6 000$ par an de moins en salaire parce que votre employeur s'occupe de cette question compliquée des pensions.
M. Corbishley: Si vous considérez la question sous l'angle de la rémunération totale, je pense encore une fois, comme le témoin précédent l'a dit, que cela ne fait pas de différence.
Mme Parrish: Vous avez parlé des problèmes des augmentations de salaire des politiciens. Il y a une réalité qu'on appelle la politique. Ne pensez-vous pas que nous nous heurtons à un mur de briques à l'heure actuelle et que ce n'est pas tout simplement un caprice de notre part?
M. Corbishley: Vous êtes les experts en politique, pas moi.
Mme Parrish: Vous vous débrouillez assez bien en politique aujourd'hui.
Mme Grey: Je vous remercie d'être venu cet après-midi. C'est bon d'entendre tout cela.
J'aurais une petite observation à faire pour commencer. Ça me fait penser à quelqu'un qui est à l'agonie et qui essaie de s'accrocher à tout prix à quelque chose qu'il sait qu'il va perdre tôt ou tard. Je pense que cette étude illustre ce point mieux que tout ce que nous avons vu aujourd'hui.
Ma question s'adresse aux députés ministériels, et je vous la pose à vous également. Quelle partie du mot «généreux» est-ce que vous ne comprenez pas? On ne peut pas justifier de telles choses alors qu'on sait que, comme l'a démontré l'une des entreprises les plus réputées au pays, peu importe de quelle façon vous regardez les choses, on parle de nombres sept fois, quatre fois ou trois fois plus élevés.
Je vous le dis à vous, monsieur, car tout d'abord vous êtes un expert en la matière tandis que je ne le suis pas; je ne pense pas qu'aucun d'entre nous dans cette salle soit un expert dans le domaine - et deuxièmement, parce que vous êtes contribuable comme nous. En tant qu'expert, vous avez dit que vous ne pouviez appuyer le projet de loi C-85, mais je voudrais savoir ce que vous en pensez en tant que contribuable. Pouvez-vous l'accepter, oui ou non?
M. Silye: Vous ne faites pas de politique, maintenant.
M. Corbishley: Mon principal problème relativement au projet de loi ne tient pas tant au montant de la pension comme tel, qu'à la pension considérée indépendamment de toute autre chose.
Encore une fois, j'imagine que vous avez déjà la preuve devant vous. Si vous regardez la rémunération totale et que vous la compariez avec celle d'autres secteurs, comme j'ai tenté de le faire ici, vous vous apercevez alors que la rémunération totale est loin d'être comparable; il ne s'agit pas seulement de la pension.
Encore une fois, cela est basé sur l'étude albertaine. Comme je l'ai dit, les chiffres sont approximatifs et ne sont peut-être pas entièrement transférables, et je n'ai pas toute l'information nécessaire pour faire la même chose dans le cas des députés, mais je suppose que ce n'est pas tellement différent.
Mme Grey: Deuxièmement, ce tableau est assez clair. Je suis visuelle. Lorsque je vois un tel tableau, tout cela est très logique. Je pense que n'importe quel Canadien qui assisterait à une assemblée locale organisée par son député aurait... ça rend les choses assez claires.
Lorsque je vois un gouvernement qui est obsédé à l'heure actuelle par un projet de loi sur l'équité en matière d'emploi dont la Chambre est saisie... Vous ne pourriez jamais montrer cela à un de vos électeurs et dire que vous croyez dans l'équité en matière d'emploi alors que vous êtes du côté gauche de ce tableau. Vous ne pourriez jamais faire accepter cela. Vous ne pourriez le faire accepter dans ma circonscription à Lac La Biche, pas plus que vous ne pourriez le faire à Halton-Peel ou à Saint-Boniface. C'est aussi simple que cela.
Lorsqu'on regarde ces chiffres et le montant total de la rémunération, qui n'a absolument aucun sens sur ce tableau, lorsqu'on regarde le régime de pension qui est quatre ou sept fois plus généreux que pour n'importe qui d'autre au pays, la question que je vous pose est la suivante: comment allons-nous nous en sortir alors qu'il y a autant d'arrogance sur la Colline parlementaire, comme je l'ai constaté au cours de la dernière législature? Comment va-t-on réussir à laisser de côté les questions de politique et à créer un esprit entre nous, et c'est certainement ce que nous voulons, et dire que nous avons besoin d'aide pour nous sortir de cette situation?
Alors, ne cherchons pas tant à défendre ce point de vue. Ne nous y accrochons pas jusqu'à l'agonie, comme je l'ai dit tout à l'heure. Comment allons-nous nous en sortir pour le bien de tous afin que ce tableau ait beaucoup plus d'allure, et que l'on ne soit pas obligé de vendre ce genre d'obscénité dans les circonscriptions que nous représentons? On ne peut pas y arriver.
Vous l'avez prouvé ici aujourd'hui, de façon très claire. Comment pouvez-vous nous aider à nous sortir de ce pétrin?
M. Corbishley: Encore une fois, comme je l'ai dit, je ne suis pas un expert dans le domaine politique.
Une façon d'y arriver serait peut-être d'avoir une commission indépendante, comme M. Silye l'a proposé. Comme je l'ai dit, je ne sais pas si vous pouvez vous entendre sur la question.
Vous en êtes là où vous êtes, et le régime de rémunération est ce qu'il est à cause d'une série de décisions politiques qui ont été prises hors contexte, sans regarder la situation totale. Vous êtes toujours dans cette situation.
Je ne sais pas. Si j'avais la réponse aujourd'hui, quelqu'un d'autre l'aurait sans doute trouvée il y a des années.
Mme Grey: Enfin, il y a la question du désistement. Notre collègue d'en face a dit que nous avions soulevé la question en Chambre. Oui, nous avons effectivement soulevé la question en Chambre, et oui, notre caucus a voté à l'unanimité pour le désistement.
Ce n'est pas que je cherche à avoir du mérite. Deux collègues ici dans cette salle et le premier ministre m'ont traitée d'opportuniste, parce que j'ai décidé de ne pas participer.
Je risque de perdre littéralement des centaines de milliers de dollars, car j'ai quarante-deux ans et j'ai acquis mes droits de pension à partir du 13 mars. Malgré toutes les blagues et le fait qu'on me traite d'opportuniste, si j'étais opportuniste, je n'aurais pas dit un mot à ce sujet en espérant que tout cela passerait facilement. Ensuite j'aurais dit, «Zut, c'est dommage; je n'ai plus d'option.»
Mais étant donné que nous sommes d'avis que nous ne pourrons absolument pas faire accepter cela au pays, notre caucus a décidé de ne pas participer. C'est moi qui vais écoper, car je suis la seule qui ait des droits acquis à la pension, mes 51 collègues n'en ont pas.
Donc, lorsque quelqu'un de tout nouveau vient me dire que je suis opportuniste, ou que j'essaie d'en faire tout un plat... je risque littéralement de perdre des centaines de milliers de dollars. Le comité a entendu ce matin que je ne recevrais même pas d'indemnité de départ. Donc, je n'apprécie vraiment pas ce genre de commentaire qui donne l'impression que j'essaie de faire de l'argent. En fait, cette mesure me fait perdre beaucoup d'argent.
Je vous demande tout simplement ce que vous pensez de cette clause de désistement. Est-elle raisonnable? Tente-t-on ainsi de viser un groupe paarticulier de gens, comme les Réformistes, qui disent non? Est-elle valable?
M. Corbishley: Je ne suis ni un actuaire ni un expert sur les pensions, mais je pense que la plupart des experts diraient qu'une pension est un droit qui ne devrait pas être optionnel. Si certains employés l'obtiennent, tous les autres devraient également l'obtenir.
Personnellement, je ne suis pas d'accord avec cela. Je pense que vous devriez avoir un choix. Pour bien des choses de nos jours, nous n'avons pas beaucoup de choix, mais ici, nous devrions en avoir un. Je pense qu'une personne devrait pouvoir examiner un régime de pension et décider si elle veut préparer elle-même sa retraite, si elle a besoin d'argent comptant maintenant, et ainsi de suite. Il faudrait s'éloigner de cette attitude paternaliste selon laquelle l'employeur doit s'occuper des employés, et traiter plutôt les gens en adultes. C'est là mon avis.
Mme Grey: Mais il devrait être possible de se retirer dès le premier jour, et non après six ans et quatre mois...
M. Corbishley: Oui, bien sûr.
Mme Grey: ...après avoir adhéré au système et avoir obtenu 4 p. 100 sur l'argent versé pendant les six ans et demi.
M. Corbishley: Oui.
Mme Grey: Bingo.
M. Boudria: Je ne sais pas si c'est un rappel au Règlement, mais nous allons être forcés de suspendre la séance et de demander à nos témoins de nous attendre.
Le président: Si vous avez terminé, nous en avons fini avec les questions. Il me reste les noms de MM. Pickard et Harper.
M. Boudria: Très bien, mais il faut tout de même que nous allions voter. Apparemment, on s'est mis d'accord et les votes devraient aller très vite.
Je me demande si notre témoin sera encore disponible à 18 heures.
M. Corbishley: En fait, je dois prendre un avion.
M. Boudria: Il y a des députés qui n'ont pas eu l'occasion de poser des questions, ce qui est dommage.
M. Harper: Les seules questions que j'avais portaient sur les recommandations au sujet de la compensation de l'Alberta et je pourrai trouver ces détails dans le rapport.
Le président: À quelle heure est votre vol?
M. Corbishley: À 19 heures.
M. Pickard: Pour régler le problème, comme M. Harper s'est désisté, je me désiste également. Toutefois, j'aurais aimé préciser certaines choses au sujet des mesures de compensation. J'ai eu l'impression que quelqu'un qui a une automobile dont il a besoin pour son travail, pourrait...
M. Boudria: Nous devons tout de même aller voter. Nous revenons à 18 heures?
Le président: Dès que le vote est terminé.
PAUSE
Le président: Nous reprenons notre séance.
Le comité est-il prêt à passer à l'étude article par article?
M. Harper: Monsieur le président, j'invoque le Règlement; nous avions soumis les noms de deux témoins dont nous avions eu l'impression qu'ils étaient approuvés, mais nous ne les avons pas entendus. L'un d'entre eux était M. Fox-Descent du Manitoba.
Le président: Monsieur Harper, la greffière me dit qu'il n'était pas disponible.
M. Harper: Qu'il n'était pas disponible aujourd'hui entre 9 heures et 16 heures ou bien qu'il est décédé?
Le président: Il n'était pas disponible. Je ne sais pas à quel moment il n'était pas disponible.
M. Harper: Et on n'a pas cherché à trouver un autre moment?
Le président: Pas que je sache. Pour vous faire un rapport plus complet, je dois attendre le retour de la greffière qui l'a contacté.
M. Boudria: Qui était l'autre témoin?
M. Harper: Je croyais que nous avions demandé également à entendre les membres de la commission d'enquête de l'Île-du-Prince-Édouard.
Le président: Je pense que nous ne nous étions pas mis d'accord à ce sujet-là. La seule personne qui n'a pas pu venir et sur laquelle nous étions d'accord, c'est M. Fox-Descent. C'est du moins ce que la greffière m'a dit.
M. Harper: Il faudrait que je consulte mes notes, mais je suis certain que ce témoin-là était sur notre liste, et je ne vois pas pourquoi il n'aurait pas été approuvé puisqu'il répondait aux critères du gouvernement.
Le président: Si je me souviens bien, on s'était dit que c'était la même chose que de fixer des pensions pour un conseil de ville, et que par conséquent, ce n'était pas justifié. Je me souviens d'avoir entendu cette observation. Mais ce n'était probablement pas votre opinion, Monsieur Harper.
Est-ce qu'on a demandé à M. Fox-Descent de comparaître aujourd'hui?
La greffière du comité: Oui, on lui a demandé de comparaître aujourd'hui. Sa secrétaire m'a rappelée pour me dire qu'il n'était pas libre le 30 mai.
M. Harper: Et il n'a pas voulu comparaître à une autre date non plus?
La greffière: Je n'ai pas demandé cela, car le comité m'avait demandé de l'inviter le 30 mai. On ne m'a pas dit non plus s'il était disponible dans le courant de la semaine.
M. Harper: Monsieur le président, qu'est-ce que vous avez l'intention de faire, l'étude article par article, et quoi d'autre? L'étude article par article n'était pas prévue à notre ordre du jour de l'après-midi. Est-ce qu'on a oublié autre chose par inadvertance?
Le président: Non, pas que je sache. J'avais simplement pensé que lorsque les députés auraient terminé les audiences des témoins, ils souhaiteraient passer à l'étude article par article pour en terminer avec cette question. Je n'ai pas pensé qu'il était utile de poursuivre ces délibérations. C'est ce que j'avais cru comprendre à la dernière réunion.
M. Boudria: Pourquoi retarder les choses? Nous avons entendu tous les témoins. On nous a demandé soudainement d'entendre un témoin supplémentaire, nous avons accepté. On nous a demandé de retenir le ministre une demi-heure de plus, nous avons accepté. Tout ce qu'on nous a demandé, nous l'avons accepté. Est-ce qu'on cherche à temporiser, de quoi s'agit-il?
Le président: Je n'ai pas l'impression qu'on cherche à temporiser, est-ce que je me trompe?
M. Harper: Évidemment, que les députés de la majorité souhaitent continuer, cela ne me surprend pas particulièrement. En apparence, nous avons respecté la procédure. Nous avons fait venir des témoins, nous leur avons posé toutes sortes de questions, et j'imagine que nous sommes prêts maintenant à passer à l'étude article par article et à ne pas du tout tenir compte de leur témoignage.
Si c'est le désir du comité, je ne suis pas d'accord, et je tiens à ce que cela soit noté.
Le président: Qu'est-ce que vous voulez faire, vous voulez remettre tout cela à plus tard et interrompre l'étude du projet de loi?
M. Harper: Je pense que nous pourrions au moins attendre la prochaine séance, jeudi. Je continue à croire que nous devrions entendre un ou deux groupes de témoins que nous n'avons pas entendus. Si nous ne voulons même pas faire cela, je ne vois pas quel mal il y aurait à attendre jeudi prochain, ce qui permettrait aux membres du comité de digérer quelque peu les témoignages, de repenser à leur position, et peut-être même de discuter de la question. Mais comme je l'ai dit, c'est aux députés de la majorité d'en décider.
M. Pickard: À notre dernière réunion, nous nous étions mis d'accord sur l'ordre du jour de cette réunion-ci, et nous avions décidé d'entendre les témoins, mais également, de passer à l'étude article par article. Monsieur le président, vous avez expliqué très clairement tout ce que nous allions faire à cette réunion. J'ai trouvé que c'était raisonnablement clair et que cela ne faisait pas de doute. Je suis arrivé ici prêt à siéger ce soir aussi longtemps qu'il le faudrait, et à mon avis, nous étions tous d'accord pour en terminer avec cette affaire. Certains d'entre nous ont d'autres obligations. Pour ma part, j'aurais beaucoup de mal à assister à la séance de jeudi et je ne voudrais pas qu'on change ces dispositions. Je me suis déjà engagé à être ailleurs avec le ministre, un autre ministre, dans ma circonscription.
Nous devrions faire ce qui avait été prévu à la dernière réunion.
M. Harper: Je ne me souviens absolument pas - En fait, il semblait évident à la dernière réunion que les députés réformistes n'étaient pas d'accord avec cette façon de procéder. Mon collaborateur me dit que nous avons vérifié auprès du bureau de la greffière et auprès du bureau de notre leader à la Chambre et qu'il n'était pas question de passer aujourd'hui à l'étude article par article. Ce n'était absolument pas à l'ordre du jour de la séance de cet après-midi.
M. Boudria: C'était à l'ordre du jour quand je suis arrivé ce matin.
Le président: Personne ne suggère d'entendre d'autres témoins. Je ne me trompe pas, personne ne voudrait entendre d'autres témoignages, à l'exception de celui de M. Fox-Descent qui n'était pas disponible aujourd'hui?
M. Harper: Évidemment, monsieur le président, nous avions suggéré beaucoup d'autres témoins.
Le président: Oui, mais vous ne les suggérez pas maintenant. J'ai l'impression que nous avons entendu un bon éventail de témoignages.
M. Boudria: Nous avons même eu un témoin aujourd'hui. Soit dit en passant, nous avons entendu ces témoins objectifs, et environ une heure après la fin de cette audience, nous avons vu un groupe de personnes charger des cochonnets dans un camion.
Le président: Vous avez parlé de petits cochons?
M. Boudria: Oui.
Mme Catterall: Des petits cochons?
Des voix: Oh, oh!
M. Boudria: Des petits cochons sur la pelouse devant le Parlement.
Mme Catterall: Vous voulez dire des cochons en plastique.
M. Boudria: Du personnel qui travaille sur la Colline les a aidés.
Mme Parrish: Je ne suis jamais là quand il se passe quelque chose d'intéressant.
M. Boudria: Voilà donc les témoignages indépendants que nous avons entendus.
Le président: Eh bien, c'est aux membres du comité de décider. Est-ce que vous souhaitez passer à l'étude article par article? Nous sommes d'accord?
M. Harper: J'invoque le Règlement. Si nous passons à l'étude article par article, j'imagine que nous allons terminer assez rapidement. En restant là, après avoir discuté des pensions des députés toute la journée, je ne voudrais pas donner l'impression que j'approuve cette parodie et que c'est une façon bien utile d'utiliser notre temps ou l'argent du contribuable. Je vais donc retourner dans mon bureau et faire quelque chose de plus utile, ce qui, bien sûr, vous laisse libre d'approuver le projet de loi comme vous en aviez l'intention depuis le début de la journée.
Merci beaucoup.
Mme Catterall: Avant que M. Harper ne nous quitte, j'aimerais lui demander s'il renonce à participer à cet exercice, et pour quelle raison. Il semble avoir des idées préconçues avant même le début de cet exercice.
M. Harper: Ce sont des idées préconçues qui me sont venues en écoutant les délibérations.
Mme Catterall: Pardon?
M. Harper: Des gens ont la possibilité de discuter d'une façon utile à la Chambre.
Mme Catterall: Si on se retire du débat, il s'ensuit qu'on ne peut naturellement pas participer à ce même débat.
M. Boudria: Monsieur le président, je demanderais votre permission de prendre la parole pour quelques instants, j'imagine que M. H. Harper sera obligé de lire ce que je vais dire dans les Procès-verbaux et témoignages, puisqu'il ne se trouve plus ici - nous avons entendu la plupart des témoins dont les noms ont été soumis par tous les partis.
[Français]
Les témoins demandés ont été entendus. Je me souviens des requêtes de M. Plamondon qui a demandé des experts et nous les avons entendus. Le Parti réformiste a demandé plusieurs témoins et la plupart ont été entendus. Aujourd'hui même, nous en avons ajouté un qui, quelques minutes plus tard, était en train de charger des petits cochons de plastique dans un camion devant le Parlement. Nous avons ajouté des gens, nous avons allongé le temps, nous avons écouté le ministre plus longtemps, toujours pour faire plaisir au même député. Maintenant, il décide de quitter le Comité parce qu'il ne veut pas participer à ce qu'il qualifie de farce. Selon moi, cela signifie que le Comité ne votera pas selon son désir et qu'il ne veut pas être présent. En attendant...
Le président: Nous avons encore...
M. Boudria: Oui, j'ai terminé mon intervention.
Le président: Le Comité est prêt à commencer.
L'article 1 est-il adopté?
Les articles 1 à 3 inclusivement sont adoptés
[Traduction]
Les articles 4 à 6 inclusivement sont adoptés
[Français]
Les articles 7 à 9 inclusivement sont adoptés
[Traduction]
Les articles 10 à 14 inclusivement sont adoptés
[Français]
Les articles 15 à 19 inclusivement sont adoptés
[Traduction]
Article 20
[Français]
M. Plamondon: Monsieur le président, je voudrais proposer un amendement à l'article 20. Je vais expliquer aux autres participants les raisons de l'amendement. C'est l'amendement concernant le paiement en double, c'est-à-dire percevoir un traitement et une pension. Mon amendement irait dans le sens qu'après la sanction royale, les gens en place n'auraient plus le droit au double paiement au même titre que les députés changent de fonds de pension, ils changeraient de traitement en cours de mandat.
L'amendement à l'article 20 se lirait comme suit: «il est proposé que l'article 20 soit modifié en retranchant les lignes 41 à 48, page 21, et les lignes 1 à 15, page 22, et en les remplaçant par ce qui suit: «toute allocation ou autre prestation de l'ancien parlementaire visé au paragraphe 3 est suspendue pendant la période où il occupe l'emploi fédéral ou est partie au marché»».
M. Boudria: La difficulté que je vois avec l'amendement, prima facie, est la suivante:
Je suis d'accord avec M. Plamondon en ce qui concerne les double dippers. Mais, il n'en demeure pas moins qu'il y a le problème suivant: Supposons qu'un ancien député - aux fins de la discussion - , qui vient de Terre-Neuve, a quitté avec une pension de 15 000$ par année, il y a x nombre d'années. Aujourd'hui, il gagne 10 000$ par année, est employé par le gouvernement fédéral et prend soin du quai dans sa circonscription. Il n'est pas un employé, c'est une nomination politique, les gardiens de quai.
Cette personne-là, donc, n'aurait pas plus le droit à cela. Je veux bien croire qu'un nouveau prend sa décision: «Je ne prends pas le poste, parce que je dois le déduire». Mais, lorsqu'une personne fait peut-être cela depuis des années, c'est là qu'est la difficulté.
Il y a une protection, par exemple, dans le système. C'est que plusieurs de ces postes viennent à échéance. Par exemple, un ambassadeur ou plusieurs autres...
M. Plamondon: Il n'y a pas d'échéance.
M. Boudria: Il n'y a pas d'échéance...
M. Plamondon: Un ambassadeur n'a pas de contrat et il peut être renvoyé quand on le veut.
M. Boudria: D'accord, mais il ne reste quand même pas longtemps et lorqu'il vient au Canada, il est réaffecté ailleurs, c'est une nouvelle nomination et là je pense que la nouvelle règle s'applique. D'autant plus que si, par exemple, quelqu'un est nommé à la commission des pensions pour un terme de trois ou cinq ans, lorsque son terme est renouvelé - et c'est arrivé dans le cas de M. Ian Deans - , le premier ministre a exigé de lui, à titre de condition, pour que sa nomination soit renouvelée, qu'il renonce à sa pension. Peut-être que ce n'est pas M. Deans, mais M. Broadbent, peut-être même les deux.
M. Plamondon: Broadbent et Perrin Beatty ont refusé leur pension. Mais, c'était volontaire.
M. Boudria: Oui, c'était volontaire, parce que le projet de loi n'était pas là. Mais, avec le projet de loi, lorsque le terme vient à sa fin pour être renouvelé, il faudrait accepter la réduction de pension, sinon on n'aurait pas la position. C'est dans le projet de loi qui est devant nous.
Alors, il y a une protection supplémentaire à ce niveau-là, là où les mandats viennent à échéance. Cela accomplit une partie de ce que dit M. Plamondon.
Mais moi, je veux aller plus loin à ce niveau-là, pour la raison que je viens d'invoquer. Si cela fait quinze ans que la personne est partie de l'appareil gouvernemental et qu'elle occupe un poste quelque part, elle se voit coupée du jour au lendemain, peut-être que même, dans certains cas, elle est comme congédiée par l'adoption de cet amendement et c'est ce qui m'inquiète.
M. Plamondon: J'avoue que je ne comprends rien à ce que vous venez de dire. J'ai émis l'idée et demandé à mon recherchiste de me dire dans un langage juridique ou habituel de texte de loi comment cela devrait être écrit, de l'écrire dans les deux langues officielles et de me le donner. Je comprends ce que je veux, c'est que les dispositions relatives au double-dipping s'appliquent immédiatement, mais il paraît que c'est la façon dont il faut l'écrire. Peut-être l'a-t-on mal écrit, nous pourrions voter.
Je sens qu'il y aura une réticence; alors, je ne veux pas en débattre pendant deux heures. Si nous nous entendons sur le principe, nous trouverons bien les lignes pour le faire. Si nous ne nous entendons pas, je l'aurai proposé et il aura été battu, voilà tout.
M. Boudria: Monsieur le président, je me demande s'il n'y a pas une solution pour M. Plamondon. Je veux attirer son attention, il consulte présentement son personnel.
M. Plamondon: Je vais retirer mon...
Le président: M. Ducharme est ici comme conseiller législatif, il pourrait peut-être nous aider.
M. Philippe Ducharme (conseiller législatif): La disposition prévoit qu'il y ait une suspension pure et simple des allocations et des indemnisations plutôt qu'une réduction de celle qui est prévue au paragraphe 5 pour la personne qui fait plus de 5 000$, pour l'avenir évidemment.
M. Boudria: Monsieur le président, si nous défaisons l'amendement de M. Plamondon, il ne peut plus le proposer à l'étape du rapport. Je me demande s'il ne considérerait pas de le retirer, s'il est mal rédigé, et ainsi il ne perdra pas l'occasion de le proposer.
M. Plamondon: Je vais retirer mon amendement, je le déposerai à l'étape du rapport, à la Chambre.
Le président: Est-ce qu'il y a consentement unanime pour qu'il puisse le retirer? D'accord.
L'amendement est retiré.
[Traduction]
Les articles 20 à 28 inclusivement sont adoptés
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le président: Est-ce que le projet de loi est adopté?
Des voix: Adopté.
[Français]
Le président: Dois-je faire rapport du projet de loi C-85 à la Chambre?
Des voix: Adopté.
Le président: D'accord.
[Traduction]
Merci beaucoup. Nous avons terminé toutes les questions à l'ordre du jour d'aujourd'hui.
J'aimerais informer les membres de quelque chose. Vous avez tous reçu un gros lot de documents du directeur général des élections qui portent sur une révision ou une adaptation de la Loi électorale du Canada aux fins de la Loi sur la consultation populaire, selon laquelle les dispositions de la Loi électorale du Canada seraient incluses comme règlements en vertu de la Loi sur la consultation populaire. La lecture de ces document est passionnante et vise à vous endormir.
Cependant, ces règlements ont été renvoyés au comité aux fins d'un examen et nous avons deux semaines pour les étudier. Je suggérerai alors aux membres qu'ils profitent de leurs moments de loisir au cours des prochains jours pour lire ces documents.
Si vous voulez tenir une réunion pour discuter de ces documents, on pourrait le faire. Si personne ne s'oppose à cette question, on n'a pas besoin de se réunir. Je me fie aux pratiques du passé en disant cela. C'est la deuxième fois que ces documents passionnants apparaissent au comité, une fois lors du dernier Parlement et maintenant.
La dernière fois, nous avons fait quelques appels téléphoniques, nous nous sommes mis d'accord sur quelques observations convenables, ces observations ont été rédigées et ensuite envoyées au directeur général des élections, comme nous avons le droit de faire.
James pourrait peut-être les lire. Il est certain que cela le divertirait.
Nous sommes donc d'accord pour confier cela à James? Si cela pose des problèmes, ou si James éprouve des difficultés, nous nous réunirons pour décider de ce que nous devons dire au directeur général des élections.
À mon avis, il n'est pas nécessaire de lui demander de venir témoigner à ce sujet. Le Sénat est en train de faire une étude détaillée et on me dit qu'un expert a été engagé pour étudier la question. C'est donc parfait.
La séance est levée.