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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 26 octobre 1995

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[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Bienvenue à tous.

Avez-vous déterminé entre vous dans quel ordre vous voulez faire vos exposés, ou suivra-t-on l'ordre de la liste que nous avons ici?

Je devrais peut-être rappeler que nous nous sommes présentés avant le début de la séance.

Cependant, aux fins du procès-verbal, Andy, voulez-vous vous présenter à nouveau?

M. Scott (Fredericton - York - Sudbury): Andy Scott, député de Fredericton - York - Sudbury.

M. Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Warren Allmand, Montréal.

M. McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Ian McClelland, Edmonton Sud-Ouest.

Le président: Rey Pagtakhan, président, député de Winnipeg-Nord.

Je vous demanderais de vous présenter à votre tour.

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M. Steve Mantis (secrétaire, Ontario Network of Injured Workers Groups): Je rappelle Steve Mantis.

Voulez-vous connaître notre affiliation? Combien de renseignements voulez-vous avoir?

Le président: Une phrase.

M. Mantis: Je représente l'Ontario Network of Injured Workers Groups.

M. Jim Sanders (directeur national, Direction des relations gouvernementales et internationales, Institut national canadien pour les aveugles): Jim Sanders, de l'Institut national canadien pour les aveugles.

Mme Heather Delisle (vice-présidente, exécutif interne, Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire): Heather Delisle, représentante de l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire.

M. Frank Smith (Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire): Frank Smith, également représentant de l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire.

M. David Pollock (directeur général, Conseil canadien de la réadaptation et du travail): David Pollock, du Conseil canadien de la réadaptation et du travail.

Mme Lynda White (présidente sortante, Conseil canadien de la réadaptation et du travail): Lynda White, Conseil canadien de la réadaptation et du travail.

Mme Sharon Irwin (Trait d'union - Réseau d'information sur l'intégration dans le milieu en service de garde): Sharon Irwin, Réseau d'information sur l'intégration dans le milieu en service de garde.

Le président: Merci à vous tous.

Qui veut commencer? Voulez-vous tirer à pile ou face? Voulez-vous que je choisisse?

Monsieur Sanders.

M. Sanders: Merci, monsieur le président, membres du comité.

Je représente l'Institut national canadien pour les aveugles, l'INCA, et les observations que je ferai aujourd'hui sont fondées sur une histoire qui remonte à près de 80 ans. Notre principale préoccupation et ce qui nous intéresse par dessus tout c'est le renouvellement de la stratégie nationale pour les personnes handicapées, fondé non pas sur des principes philosophiques mais sur la réalité économique. Nous avons besoin de leadership au niveau national. Il doit y avoir une stratégie centralisée pour que les personnes aveugles et malvoyantes du Canada puissent recevoir un niveau de service adéquat. La cécité est une incapacité majeure peu fréquente. Toute régionalisation ou répartition des responsabilités aurait pour effet soit d'affaiblir, soit d'éliminer la possibilité de répondre aux besoins particuliers des personnes aveugles uniquement pour des raisons d'économies d'échelle.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples puis je passerai la parole à mes collègues.

Toute décentralisation - je sais bien que la décentralisation et la délégation de pouvoirs constituent une tendance qui va continuer - de certains services, du leadership et de la stratégie aurait pour effet d'affaiblir... Il serait peut-être utile que je vous donne deux ou trois exemples.

La bibliothèque nationale de l'INCA est un centre de production et de distribution de matériel audio et de documents en braille en français et anglais. On y produit plus d'un million de documents qui sont distribués chaque année aux personnes aveugles dans tout le Canada. Cela veut dire un million de documents qui sont distribués et dont la plupart sont retournés puisqu'il s'agit d'une bibliothèques. Il serait insensé d'avoir 10 ou 12 de ces bibliothèques au Canada qui produiraient et distribueraient des livres. Ce ne serait évidemment pas possible.

Nous offrons ce service indépendamment et sans aucune aide du gouvernement. Quoi qu'il en soit, voilà un service qui ne pourrait pas exister de façon décentralisée. Tous les services spécialisés pour les personnes aveugles sont organisés à l'échelle nationale même si la prestation est décentralisée: programmes de formation pour les professionnels, normes, méthodes, et dans certains cas, des travaux de recherche et de développement très pratiques. Au cours des 30 dernières années, des milliers d'emplois ont pu être créés grâce au partenariat entre le gouvernement fédéral, l'INCA et, dans certains cas, avec les universités. Dans les années quarante, cinquante et soixante, par exemple, des personnes aveugles ont reçu une formation de dactylo-dictaphoniste et ont pu faire carrière et continuer à le faire, dans des entreprises et des organismes des secteurs publics et privés. C'était une initiative - une initiative novatrice - du gouvernement fédéral et de l'INCA.

Entre les années 1960 et les années 1980, l'INCA, le gouvernement fédéral et l'Université du Manitoba ont créé un programme de formation de programmeurs d'ordinateur qui a existé jusqu'à tout récemment lorsque l'évolution de la technologie l'a rendu inutile. Des centaines d'emplois ont été créés. Des centaines de programmeurs d'ordinateur aveugles travaillent encore aujourd'hui. Le gouvernement fédéral, l'Université du Manitoba et l'INCA ont également créé et fait l'essai d'un programme de physiothérapie pour personnes aveugles à l'Université du Manitoba. C'est un autre programme qui n'existe plus aujourd'hui. Mais c'était un programme canadien de formation qui a permis à des personnes aveugles de se trouver du travail novateur et très pratique.

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Il y a de très nombreux exemples. Sans stratégie nationale... de fait, depuis peu, nous n'avons plus la possibilité de faire des expériences, d'innover, de faire des essais ou de mettre en oeuvre des projets-pilotes à cause de l'absence de leadership et de stratégie nationale.

Ces choses ne se feront pas à l'échelle régionale. Nous sommes tout simplement trop peu nombreux pour que ce soit viable.

Voilà, monsieur le président, mon exposé liminaire.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Sanders.

Je demanderais maintenant à Mme Heather Delisle de faire son exposé.

Mme Delisle: Je vais passer la parole à Frank, le directeur exécutif de l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire.

M. Smith: Premièrement, je tiens à remercier le comité de nous avoir invités à participer aujourd'hui à cette discussion sur la Stratégie nationale pour l'intégration des personnes handicapées et sur la possibilité de renouveler ce programme, qui doit cesser d'exister à la fin de l'exercice en cours.

Il est évident que nos membres - des étudiants handicapés du niveau postsecondaire - de tout le Canada ont intérêt à ce qu'il y ait des programmes nationaux forts et une participation fédérale forte dans la mise en oeuvre de programmes de formation, d'emploi et d'éducation pour les personnes handicapées de ce pays.

Quels sont les principaux problèmes auxquels font face nos membres?

Voyons d'abord les statistiques. D'après l'enquête de 1991 sur la santé et les limitations d'activités, il y avait 112 200 étudiants handicapés au niveau postsecondaire au Canada. Cela représente environ 7,5 p. 100 des étudiants des collèges et des universités. Il est donc clair qu'il y a de plus en plus de personnes handicapées qui font des études postsecondaires et qui cherchent des possibilités de formation et d'éducation qui leur permettront de participer pleinement au marché du travail.

Lorsque nous regardons les taux d'emploi, et notamment l'emploi dans les programmes de formation, nous constatons que nous avons très largement participé à la stratégie nationale au cours des cinq dernières années. Quarante-huit pour cent des Canadiens handicapés qui font partie de la population active ont un emploi. Pour les personnes non handicapées ce pourcentage est de 73 p. 100. Pour ce qui est des diplômés universitaires, 67 p. 100 des personnes handicapées ont un emploi comparativement à 87 p. 100 pour les personnes sans incapacité.

Si les inégalités sont évidemment énormes, il n'en reste pas moins que les personnes handicapées qui font des études postsecondaires ont une bien meilleure chance de se trouver un emploi que celles qui n'en font pas.

En même temps, 21 p. 100 des personnes handicapées indiquent qu'elles ont dû interrompre leurs études pendant des périodes assez longues en raison de leur incapacité et 17 p. 100 d'entre elles ont suivi moins de cours qu'elles ne l'auraient fait si elles n'avaient pas été handicapées.

Qu'est-ce que l'avenir réserve à nos membres?

Ce qui est certain c'est qu'avec la mise en oeuvre du nouveau transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux à partir de 1996-1997, et le Fonds d'investissement en ressources humaines, notre avenir est incertain.

L'un des résultats de la décentralisation et des réductions de financement qui font que les provinces ont moins d'argent pour couvrir les coûts d'éducation et les services sociaux pour nos membres sera vraisemblablement une augmentation des frais de scolarité, ce qui aura probablement pour effet de réduire l'accès à nos membres et de rendre l'éducation postsecondaire inabordable à l'avenir pour les étudiants handicapés.

Les étudiants handicapés ont souvent des dépenses plus élevées en raison de leurs incapacités et risquent de souffrir davantage d'une augmentation des coûts d'éducation ou du coût de la vie pendant qu'ils sont aux études. Comme l'éducation postsecondaire devient plus chère, ils craignent aussi de se retrouver avec de lourdes dettes à la fin de leurs études. Étant donné ces problèmes auxquels font face nos membres, ils ont besoin d'une forte présence nationale et d'une stratégie nationale renouvelée qui aidera les personnes handicapées dans les domaines de l'éducation et de la formation.

En 1993, lorsque l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire a mené une étude sur l'aide financière disponible aux étudiants handicapés du niveau postsecondaire, afin de répondre aux besoins individuels pour le futur, 44 p. 100 des quelque 400 étudiants qui ont participé à l'étude ont indiqué que leur revenu total toutes sources confondues, y compris les programmes fédéraux et provinciaux d'aide aux étudiants, n'était pas suffisant pour couvrir le coût de leurs études.

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Comme les provinces reçoivent moins d'argent du gouvernement fédéral, elles continueront à réduire les budgets affectés aux collèges et aux universités. Nous avons déjà commencé à le constater. Le résultat sera presque certainement une baisse des dépenses pour les programmes et les services à l'intention des personnes handicapées, pour les aides techniques et l'équipement informatique, pour la rénovation d'immeubles et d'installations inaccessibles.

Bien sûr, il y a également des choses positives qui commencent à arriver, suite aux modifications au Programme canadien de prêts aux étudiants qui fournit de l'aide aux étudiants ayant une incapacité permanente et qui a un volet subvention. Il faut aussi mentionner le renouvellement des dispositions d'exonération pour ceux qui sont incapables de rembourser leurs prêts. Ce sont des initiatives nationales positives.

Mais en même temps, de nombreux étudiants handicapés dépendent du Programme de réadaptation professionnelle des invalides qui a été créé en 1961 pour les aider à payer leur formation postsecondaire. À l'heure actuelle, ce programme à frais partagés à raison de 50 p. 100 par chaque partie est administré par le ministère du Développement des ressources humaines. Bien sûr, nous ne savons pas ce qui arrivera à ce programme, à ses initiatives de financement et aux possibilités qu'il crée, après 1995-1996.

Depuis la création de notre association en 1986, nos membres nous disent qu'il faut une présence nationale forte dans les domaines de l'accès à l'éducation postsecondaire, du financement, des programmes de formation et des possibilités d'emploi. Nous espérons que votre comité nous appuiera et encouragera le gouvernement fédéral à continuer à faire preuve de leadership dans ces domaines. Merci.

Le président: Je passe maintenant la parole à M. Steve Mantis.

M. Mantis: Merci, monsieur le président. Merci de m'avoir invité aujourd'hui à mettre mon grain de sel. Je suppose que ça ne pèsera pas plus lourd que cela.

Je représente l'Ontario Network of Injured Workers Groups. Nous sommes une association bénévole composée de 36 groupes affiliés locaux de tout l'Ontario. Nous sommes un groupe d'entraide. Nous sommes là essentiellement pour nous aider les uns les autres à faire face aux effets d'une incapacité causée par un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Je ne suis pas venu ici aujourd'hui pour demander la charité. Je suis ici en tant que citoyen de ce pays. Je suis ici en tant que contribuable. En tant que citoyen, je crois avoir le droit de vous dire comment je voudrais que soit dépensé nos impôts. Nous n'avons pas besoin de plus d'argent. Nous devons utiliser celui que nous avons de façon intelligente.

Parlons du gaspillage que fait le gouvernement fédéral en tant qu'employeur.

Vous êtes le principal employeur au pays. Vous dépensez 200 millions de dollars par année en coûts directs à cause des incapacités de vos employés.

Ce que vous imposez à vos employés lorsqu'ils deviennent handicapés au travail est horrible. Vous leur dites: «Allez-vous en. Nous vous donnerons une pension. Nous n'avons plus besoin de vous».

Pensez-vous que c'est une bonne façon de dépenser votre argent - mon argent? Je ne le pense pas.

Nous avons constaté à maintes et maintes reprises que si on prend une approche positive et qu'on commence par poser les bonnes questions - quel genre de lieu de travail voulons-nous avoir, quel genre de collectivité voulons-nous avoir - alors nous pouvons trouver des solutions. Si vous commencez par vous demander comment vous pouvez économiser de l'argent, si vous partez de l'hypothèse qu'il n'y a pas d'argent et qu'il faut trouver des moyens pour réduire les coûts, alors vous allez vous enfoncer davantage, car ces coûts ne disparaîtront pas. Si vous ne prenez pas conscience des coûts relatifs à ces incapacités, ils ne feront que s'accumuler.

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Au bout du compte, les employeurs économisent beaucoup d'argent lorsqu'ils mettent en oeuvre un programme qui dit: «Votre contribution est précieuse, nous pensons que vous pouvez faire une différence, nous ferons tout notre possible pour que vous puissiez revenir au travail et nous ferons notre possible pour empêcher que nos employés deviennent handicapés, parce que nous avons la responsabilité, tant morale que juridique, de protéger nos employés.»

Parlons d'un employeur privé, la Société Weyerhaeuser, la première société de produits forestiers en Amérique du Nord. Elle a économisé 60 p. 100 de ses coûts directs pour les incapacités. Si vous voulez économiser de l'argent, prenez 60 p. 100 des 200 millions de dollars que vous dépensez maintenant. Cela donne 120 millions de dollars par année. Vous avez beaucoup de ressources, à vous de les utiliser de façon intelligente.

Je deviens émotif lorsque je parle de ces questions, car ce que je vois me fait vraiment peur. Nous nous trouvons dans une situation où le gouvernement fédéral dit qu'il n'est pas responsable. Il dit qu'il appartient à quelqu'un d'autre d'établir les normes pour la collectivité où nous voulons vivre.

Eh bien, laissez-moi vous dire que lorsque je vois comment vont les choses, je ne blâme pas les Québécois de dire qu'ils veulent aller dans une autre direction, car ce que je vois me fait peur. Nous disons que nous pouvons nous passer des personnes les plus vulnérables de notre société.

La stratégie nationale tire à sa fin, et c'en est une qui, je crois, nous a permis de réaliser des progrès. D'après toutes les rumeurs que nous entendons et avec les coupures dans les programmes, on ne s'inquiétera plus des personnes handicapées. Les subventions aux organismes bénévoles diminueront de 80 p. 100. Avez-vous réduit votre propre salaire de 80 p. 100? Je ne pense pas.

On prévoit éliminer le programme qui a déjà été mentionné, le Programme de réadaptation professionnelle des invalides. Nous allons intégrer tout le monde dans le courant général. Tout le monde est maintenant égal dans notre société. Alors, les personnes handicapées auront le même accès, n'est-ce pas? Eh bien, lorsque nous allons au Centre d'emploi du Canada dans notre collectivité, on nous dit: «Nous ne connaissons rien aux handicapés, nous ne sommes pas en mesure de nous en occuper. Nous n'avons pas assez de ressources. Nous ne pouvons pas le faire. Nous sommes désolés, mais nous n'y pouvons rien».

C'est cela l'intégration. Nous parlons de créer une société où les forts survivront, et pour le reste, eh bien, quoiqu'il arrive, je suppose que c'était de leur propre faute. Je suppose qu'ils ont dû faire quelque chose de mal pour mériter cette incapacité, et maintenant nous allons nous assurer qu'ils n'auront jamais l'occasion de participer pleinement à la société.

Ce que je cherche, c'est le leadership. M. Grose nous dit que les politiciens ne sont pas des leaders. Je suppose que nous n'avons pas besoin de vous alors si vous êtes incapables d'avoir une vision, de vous lever et de dire, nous voulons une collectivité où nous nous entraidons, où nous apportons notre soutien à ceux qui ont besoin d'aide. Nous aurons chacun notre tour, car nous aurons tous besoin d'aide un jour ou l'autre dans notre vie. Nous avons besoin d'aide pour nous adapter aux nouvelles circonstances qui nous placent dans une situation nettement désavantageuse dans la société.

Ce gouvernement, et, de fait, ce comité, devraient faire preuve du leadership qu'il nous faut. C'est vous qui êtes censés vous occuper de ces questions.

Voilà, c'est ce que je voulais dire. Je suis désolé de devoir dire que le Canada deviendra un endroit beaucoup moins agréable à cause de ces problèmes.

Le président: Merci, monsieur Mantis.

Vous avez fait allusion, je pense, à l'un de nos membres. Lorsque je l'ai entendu poser sa question ce matin, j'ai pensé qu'il parlait de leadership dans un partenariat.

J'aimerais maintenant entendre Mme Lynda White et M. David Pollock, s'il vous plaît.

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Mme White: Merci de nous avoir invités.

Le Conseil canadien de la réhabilitation et du travail est un réseau national d'organismes et de personnes. Notre mission est de promouvoir et d'appuyer l'égalité et l'équité en matière d'emploi pour les personnes handicapées. Nous nous y employons en créant des partenariats, en acquérant des compétences, en partageant des connaissances et en influençant les attitudes.

Lorsque nous regardons les gens qui travaillent avec les personnes handicapées, nous constatons qu'il y a des valeurs tout à fait fondamentales auxquelles ceux d'entre nous qui travaillent étroitement avec les personnes handicapées et de nombreuses personnes à l'extérieur de notre milieu souscrivent. Ces valeurs sont l'accès et l'intégration pleine et entière des personnes handicapées à tous les aspects de la vie canadienne.

Citons entre autres les transports, l'éducation, l'emploi, les loisirs, le logement et les communications. Ce sont des valeurs fondamentales auxquelles la majorité d'entre nous aspirent et auxquelles tout le monde devrait avoir accès.

Certains ont parlé de la nécessité d'augmenter les crédits budgétaires alloués aux handicapés. Bruce Halliday, le président du comité précédent le vôtre, citait le chiffre de 20 milliards de dollars comme coût des handicapés pour le Canada. Une augmentation de ce coût ne se justifie pas. Une gestion plus efficace et plus responsable de ces crédits devrait nous permettre de faire des économies, à condition de travailler ensemble.

Le transfert de la responsabilité financière du fédéral aux régions nous inquiète. Certains ont tout à l'heure vanté les mérites des soins à domicile. Tout en étant fort valide, ce concept malheureusement ignore ceux et celles qui veulent avoir les moyens de leur autonomie.

Quand j'entends certaines questions concernant cet aspect financier... c'est ici qu'interviennent mes deux rôles. Je travaille à la Banque royale dans les services responsables de l'équité et de la diversité en matière d'emploi.

Je crois d'ailleurs, monsieur Allmand, que vous avez une assez bonne expérience de ces problèmes d'emplois. Je me souviens d'une réunion d'un comité parlementaire au cours de laquelle vous posiez des questions très pointues alors qu'on commençait tout juste à parler d'équité en matière d'emploi.

Dans mon autre vie, mon service est responsable du recrutement de personnes handicapées. Nous aidons aussi les organismes communautaires qui s'occupent d'arts, de santé, de bien-être - tout un éventail. Avec un budget de 15 millions de dollars l'année dernière, notre banque est l'entreprise la plus généreuse du Canada.

J'entends tout le temps dire que les entreprises qui veulent employer des personnes handicapées devraient en assumer le coût. À toutes fins utiles, c'est ce que nous faisons et si je suis ici aujourd'hui, c'est aux frais de la Banque royale. Je ne suis pas en train de faire quelque chose d'autre dans un bureau.

Les membres de notre comité de bienfaisance me disent que dans la conjoncture de restrictions fiscales à tous les niveaux de gouvernement on compte de plus en plus sur les dons privés. Il devient de plus en plus difficile pour nous de continuer à financer des organismes avec lesquels nous collaborons depuis des années, de bons organismes que nous voulons continuer à soutenir et d'accepter en même temps de nouvelles demandes provoquées par les contraintes financières auxquelles sont assujetties les divers paliers de gouvernement.

Le secteur privé canadien ne pourra pas combler tout le vide ainsi créé et pourtant certains semblent le croire.

Nous avons parlé un peu d'intégration. S'il y avait dans nos textes législatifs une loi sur l'intégration, nous ne serions pas là aujourd'hui. Je ne dis pas qu'il faudrait en adopter une immédiatement quoique je sache que des projets de loi dans ce sens ont déjà été proposés à la Chambre.

Si on estime que 15 p. 100 de la population canadienne souffre d'un handicap ou d'un autre - et ce chiffre ne fera qu'augmenter, la population vieillissant - il serait logique que chaque ministère affecte 15 p. 100 de son budget aux besoins des handicapés. Il ne serait alors plus nécessaire d'avoir ces crédits spéciaux. Cependant, nous n'en sommes pas encore là. Nous n'en sommes pas encore là dans le secteur privé, nous n'en sommes pas encore là, comme nous l'avons entendu dire, dans le secteur public, nous n'en sommes pas encore là dans notre société.

Je crois que nous traversons une phase de transition. Penser qu'un jour nous n'aurons plus à nous réunir autour d'une table pour discuter de certaines de ces questions, qu'il n'y aura plus aucun problème d'accès, est utopique.

En attendant, il faut trouver le moyen de bien gérer cette transition et de rendre le système responsable pour éviter les rétrogradations au niveau régional, ce que beaucoup craignent.

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Il faut que les handicapés eux-mêmes participent aux décisions qui façonneront la société que nous souhaitons tous. Il faut les impliquer dans toutes nos décisions. Il ne faut pas que le gouvernement l'oublie et c'est en partie la raison de notre présence ici aujourd'hui.

David voudrait ajouter une ou deux petites choses.

M. Pollock: J'aimerais ajouter ce qui représente à mes yeux un des objectifs clés que les Canadiens et nos dirigeants devraient se fixer pour la prestation des services conçus par les gouvernements.

Il y a quelques jours je discutais avec des fonctionnaires et nous n'avons pratiquement parlé que de contraintes et de compressions budgétaires. J'ai l'impression que les crédits destinés à aider les handicapés ne seront plus désormais alloués qu'à ceux qui travaillent ou qui ont travaillé. Vous avez probablement déjà entendu ce genre de commentaire.

Si nous voulons faire quelque chose pour tous les handicapés dans la société... si j'étais à votre place, je me demanderais quels crédits de quels ministères seront alloués aux programmes de formation de base, aux programmes de formation spécialisée et d'éducation en alternance, pour m'assurer que les handicapés qui n'ont encore jamais travaillé puissent en avoir l'occasion.

J'ai du mal à comprendre quand certains disent que ce sont les contraintes financières qui nous obligent à supprimer ces crédits. Que le gâteau rétrécisse, personne ne le conteste, mais cela ne nous dégage pas de la responsabilité de préserver certaines priorités. Je demanderais quels crédits et quel pourcentage de la population totale des handicapés qui n'a pas encore travaillé sera pris en charge par ces programmes.

D'après ce que je peux voir, un fort pourcentage de ces crédits est alloué à ceux qui ont déjà travaillé. Pourtant si on considère l'ensemble des handicapés, je ne pense pas me tromper en disant que la majorité d'entre eux n'a jamais travaillé. C'est le secteur le plus petit. Il est indispensable de ne pas l'oublier dans vos priorités d'allocation de ressources réduites.

Mme Irwin: Je crois tout à fait approprié que je sois la dernière à intervenir car je représente un groupe sur lequel la stratégie nationale d'intégration des handicapés n'a eu pratiquement aucun impact, à savoir les très jeunes enfants handicapés.

Je vous parlerai surtout de l'inclusion de ces enfants dans les programmes de garderie et ce qu'elle signifie pour ces enfants, pour leurs parents et pour la société en général.

Il semblerait que pour une raison ou pour une autre ces enfants ont été laissés sur la touche par la stratégie nationale d'intégration des handicapés. Un très petit nombre de projets de recherche ont été entrepris, mais aucun projet-pilote, aucun modèle, aucun service, aucun examen.

Je ne sais pas pourquoi cette population a été ignorée. C'est peut-être parce qu'elle ne peut pas parler pour elle-même; ce sont leurs parents et ceux qui s'en occupent qui parlent en leur nom. Peut-être parce qu'elle représente très peu d'années-personnes - de zéro à cinq par opposition à 18 à 65 pour la population adulte. Peut-être parce que beaucoup d'entre eux ne comptent même pas tant qu'ils n'ont pas atteint l'âge de trois ans ou de quatre ans. Peut-être parce qu'ils ne votent pas.

Quelle que soit la raison pour laquelle ces tous jeunes handicapés ont été négligés par la stratégie nationale, il est de plus en plus clair que tout nouveau plan ou toute nouvelle stratégie devra absolument les prendre en compte.

Les économistes, les sociologues, les chercheurs et les parents sont tous d'accord, c'est pendant les premières années qu'il faut intervenir si l'on veut multiplier les chances de résultats. Selon le projet Perry Preschool si souvent cité, chaque dollar dépensé pendant ces années-là se traduit plus tard par des économies de 7$ dans toutes sortes de domaines, par exemple dans celui de l'éducation spécialisée, ou pour toutes sortes de raisons, qu'il s'agisse de grossesses prématurées, de rupture de scolarité ou de capacité de gain accrue.

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Cette multiplication des chances de réussite est un argument important en faveur des garderies. C'est aussi un argument important incitant le fédéral à s'assurer que les enfants handicapés soient inclus dans les programmes de garderie bénéficiaires de crédits ou d'avantages fiscaux fédéraux.

Le deuxième argument militant en faveur de cette inclusion - et d'ailleurs Steve, je souhaite changer le nom de notre organisme et remplacer «intégration» par «inclusion» pour ne plus jamais avoir de problème de terminologie - des enfants handicapés dans les programmes bénéficiant de crédits ou d'avantages fiscaux fédéraux, ce sont les avantages qu'en tirent leurs mères ou ceux qui en ont la responsabilité.

Ces femmes sont grossièrement sous-représentées dans le monde du travail et sur-représentées sur les listes du bien-être social, et c'est dû en grande partie à cet accès excessivement limité aux programmes de garderie, aux coûts plus élevés et aux besoins plus complexes de leurs enfants handicapés. Ces femmes sont systématiquement ghettoisées alors que les autres mères ont accès à la formation et à l'emploi.

Beaucoup de parents disent: «Ce n'est pas le handicap de mon enfant qui est difficile à vivre, c'est la pauvreté que le manque de services appropriés provoque». Beaucoup de parents ont parlé au Comité permanent sur le développement des ressources humaines de leur difficulté à travailler tout en élevant un enfant aux besoins spéciaux et ont suggéré des remèdes appropriés.

Il y a un troisième argument important militant en faveur de cette inclusion. Non seulement les enfants handicapés bénéficient directement de ces services, mais leurs petits camarades non handicapés apprennent la solidarité et comprennent la diversité dès leur plus jeune âge, qualités qui les accompagnent à l'école et dans la société.

Les recherches commencent à nous donner raison quand nous affirmons que les enfants non handicapés tirent un bénéfice direct de cette inclusion. Pour que la société canadienne soit composée d'individus à l'aise dans la diversité dans un monde de plus en plus global et multiculturel, nous savons que cette attitude à le plus de chance de se développer quand les enfants handicapés et non handicapés jouent et apprennent ensemble.

J'aimerais passer à la crise actuelle d'accès à ces services pour ces enfants handicapés. Malgré le manque de législation ou d'ententes conditionnelles de partage des coûts, beaucoup de programmes de garderie au Canada ont décidé indépendamment d'accueillir quelques enfants handicapés.

Parfois, ils l'ont fait avec une assistance financière, parfois sans. Ils ont donné une formation complémentaire à leurs employés, modifié l'environnement physique, embauché du personnel supplémentaire, adopté et adapté certains programmes, etc. Des programmes qui encore dernièrement hésitaient devant le moindre petit handicap, accueillent de plus en plus des enfants aux besoins plus complexes.

Les enfants handicapés restent toujours sous-représentés d'une manière disproportionnée dans ces programmes mais les niveaux de sous-représentation diminuent. Cependant, la fin du Régime d'assistance publique approchant, ces programmes s'inquiètent de plus en plus de leur survie. Les provinces continueront-elles à attribuer des sommes équivalentes à ces programmes alors que des programmes plus établis comme ceux de la santé, de l'éducation postsecondaire et du bien-être rivaliseront pour les mêmes dollars? La réponse est vraisemblablement non.

Dans ce contexte de soutien réduit et sans une loi pour les handicapés incluant spécifiquement les garderies, il est à craindre que les enfants handicapés aient de moins en moins accès à ces programmes. Ces programmes, à regret, refuseront d'accueillir ces enfants qui coûtent plus cher pour ne pas mettre en danger leur existence même. Ainsi, de plus en plus les enfants handicapés seront exclus de ces programmes; leurs mères auront de moins en moins accès à la formation ou à l'emploi et les enfants non handicapés perdront les avantages que cette association dès leur plus jeune âge avec des enfants handicapés peut leur apporter.

J'ai une ou deux petites suggestions modestes à vous faire. Bien que je sois à 100 p. 100 pour une loi pour les handicapés, et que j'appuie les fortes suggestions faites par d'autres groupes représentants les handicapés, je limiterai aujourd'hui mes suggestions à trois qui me semblent réalisables.

Premièrement, l'engagement du Livre Rouge à étendre le financement des garderies sur la base d'une subvention fédérale de 720 millions de dollars à coûts partagés à raison de 40-40-20 avec les provinces et les parents devrait être lié à une promesse provinciale d'accueil d'un plus grand nombre d'enfants handicapés. Le respect d'objectifs et de calendriers fixés d'avance permettrait de mesurer la performance des provinces.

Deuxièmement, les allocations familiales accordées aux mères participant à des programmes de formation fédéraux et à des programmes de formation financés par le fédéral devraient être doublées pour les enfants handicapés. Cela leur permettrait d'avoir accès à des services de toute évidence plus onéreux puisqu'ils nécessitent un personnel plus spécialisé et un matériel adapté.

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Ces allocations complémentaires devraient être justifiées par des reçus émis par des prestataires agréés et contrôlés. Le gouvernement serait ainsi assuré que ces sommes seraient utilisées aux fins prévues.

Troisièmement, nous recommandons une campagne de promotion et d'éducation pour faire comprendre aux prestataires de ces services les besoins particuliers des enfants handicapés. Je suggère une variété d'activités d'allant du tutorat à la formation en passant par la promotion des bénéfices de l'inclusion, des bourses et des prêts non-remboursables aux étudiants se destinant à ces métiers, et la multiplication des programmes ayant démontré leur succès.

Le maintien et l'augmentation du niveau de participation d'enfants handicapés dans les programmes de garderie est un atout social et devrait être une priorité sociale. Les enfants handicapés, leurs parents et la société dans son ensemble en sont les bénéficiaires. Les gains réalisés dans ce domaine au cours de la dernière décennie sont en danger puisque le programme du Régime d'assistance publique destiné à aider les parents dans le besoin ou risquant d'être dans le besoin sera noyé dans le transfert des programmes sociaux et de santé.

Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer pour maintenir et accroître le niveau actuel de participation des très jeunes enfants handicapés et leur famille. Nous demandons au gouvernement fédéral qu'il en soit ainsi.

Le président: Merci beaucoup.

Sur ce, j'inviterais les membres du comité à vous poser des questions.

Monsieur McClelland.

M. McClelland: Merci, monsieur le président.

Je remercie tous les témoins aujourd'hui d'être venus et d'avoir partagé avec nous leurs idées.

Un des thèmes constants que j'ai remarqué dans vos propos, dans ceux de la table ronde précédente, et dans ceux d'autres tables rondes est la crainte, pratiquement palpable, que la réorganisation du financement provoqué par le transfert des programmes sociaux et de santé laisse les handicapés sur le bord de la route.

Toute idéologie mise à part, que nous soyons ou non d'accord, il me semble assez réaliste de poser comme hypothèse qu'il y aura de plus en plus de dévolution du pouvoir du centre vers les provinces dans la majorité des activités de la société canadienne que cela nous plaise ou non. Il me semble que si nous voulons rester un pays, notre identité nationale se fondera sur des valeurs partagées par toutes les juridictions. Le rôle que beaucoup d'entre vous considèrent être celui du gouvernement fédéral sera de réunir les régions au Parlement national, de promouvoir le consensus et de faire partir l'exemple du centre.

Dans cette perspective, il me semble qu'une des raisons pour lesquels les handicapés ont une bonne raison de s'inquiéter c'est qu'ils ne constituent pas un groupe homogène. C'est un groupe où sont représentés les sexes, les races, les couleurs, etc. Pourtant pour les handicapés, les handicaps n'ont rien à voir avec ces autres caractéristiques. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

J'ai l'impression que si les handicapés n'étaient pas considérés comme faisant partie d'un groupe désavantagé pour des raisons de sexe, de couleur, de race, ou d'autres caractéristiques de ce genre, mais avaient des besoins spécifiques pour des raisons d'handicaps, il serait plus facile de démontrer la nécessité de les aider financièrement ou sur d'autres plans comme d'autres l'ont suggéré.

Quelqu'un veut-il répondre? Y a-t-il du vrai là-dedans ou pensez-vous que je suis tout à fait à côté de mes pompes?

Le président: [Inaudible - Éditeur]...les témoins, si je comprends bien votre question. Quand vous avez dit «par rapport aux autres groupes désavantagés», vous pensiez...

M. McClelland: Sauf votre respect, monsieur le président, les témoins peuvent décider eux-mêmes s'ils veulent répondre. Ils n'ont pas besoin que vous interprétiez ce que je viens de dire.

Le président: Je voudrais guider les témoins, et si vous n'êtes pas d'accord, monsieur McClelland... Vous dites «par rapport à d'autres groupes désavantagés». Pour que votre réponse soit bien comprise, j'aimerais savoir si vous parliez d'équité en matière d'emploi ou d'autre chose.

.1305

M. McClelland: Je pensais surtout à la Charte des droits et libertés et de l'inclusion de groupe en fonction de la Charte.

Le président: Très bien.

Voulez-vous répondre, monsieur Mantis, après quoi je donnerai la parole à MM. Sanders et Pollock.

M. Mantis: Il faut commencer par où M. McClelland a dit qu'il fallait le faire, c'est-à-dire par le transfert des responsabilités. De votre point de vue, c'est peut-être une bonne chose. C'est un choix que fait le gouvernement.

Le gouvernement peut choisir diverses voies. C'est celle que le gouvernement a choisie. Ce n'est pas la seule, il y en a d'autres.

De fait, si on prend le cas de l'Europe, où les programmes nationaux sont très solides, la création de la Communauté économique européenne entraîne l'établissement de normes nationales qui sont en fait internationales.

Plusieurs choix s'offrent donc à nous. Il n'y a pas qu'une seule façon de procéder.

Tous ces pays indépendants se demandent où sont les normes les plus élevées, celles que l'on peut imiter, parce qu'elles souhaitent une société qui attache du prix à l'être humain et à l'esprit humain. C'est la première chose.

Si nous choisissons de nous comparer à d'autres groupes désavantagés, nous nous engageons sur la voie de la désunion. Moi, je veux vivre dans une société de rassemblement et les décisions que vous prendrez auront beaucoup de conséquences. Vous avez le choix.

Pour ma part, je dis qu'il faut considérer l'être humain et l'esprit humain. Comment peut-on appuyer cette vision d'une façon qui soit responsable du point de vue financier? Décidons d'abord où nous voulons aller avant de décider qui sont les plus méritants.

M. Sanders: Je pense que les avis exprimés et les questions posées vont au coeur du débat. La décentralisation et le transfert des responsabilités sont un parti pris mais c'est quand même ce qui se fait. Notre travail à nous, sur le terrain, et à vous au gouvernement fédéral c'est de veiller à ce que ce soit bien fait.

J'ai commencé mon exposé en disant que la cécité est un handicap majeur peu fréquent et si on ne reconnaît pas qu'il y a des économies d'échelle à faire, certains programmes ne verront jamais le jour. Cela dit, il y a beaucoup de raisons qui militent en faveur de la prestation localisée de certains services.

De fait, l'Institut national canadien pour les aveugles, organisme à but non lucratif à Charte fédérale essaie constamment de maintenir l'équilibre entre les intérêts nationaux, régionaux et locaux. Ce qui est essentiel, et c'est là où je vous demande vos conseils et votre intervention auprès des décideurs, c'est la définition de «handicap».

Pour les aveugles, ce n'est pas un problème d'ordre médical mais bien d'ordre technique. Une formule de type médical ne va donc pas nous aider.

Deuxièmement, et essayez de vous en souvenir lorsque vous posez vos questions, «les handicapés», ça n'existe pas comme entité. Mes besoins à moi, comme aveugle, n'ont rien à voir avec ceux de celui qui est dans un fauteuil roulant, qui est sourd ou qui a des difficultés d'apprentissage.

Seul un aveugle a besoin de documents en braille. Il n'y a que lui qui a besoin d'apprendre à voyager tout seul en se servant d'une canne blanche ou d'un chien-guide. Ce sont des services très spécialisés.

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Ceux qui rédigent les politiques au niveau fédéral nous ont dit, et ils me l'ont dit il y a un mois à peine, que les handicapés, selon eux, seront mieux servis à l'échelon local par un centre général pour les handicapés. Ils ont tout à fait tort. Des services assurés localement? Oui. Mais ils doivent l'être par quelqu'un qui me connaît et qui peut réagir à ma cécité.

Le danger ici, c'est de confondre parti pris et réalité pratique. Je vous en prie, demandez à ceux qui élaborent les politiques de mettre leur parti pris de côté et de réfléchir à ce que cela signifie dans la réalité.

En cas de doute, demandez à ceux qui ont de l'expérience sur le terrain de faire l'essai de la théorie parce que dans certains cas la décentralisation sera ce qu'il y a de mieux. Dans d'autres cas, elle sonnera le glas de ce que nous avons et de ce à quoi nous nous attendons comme citoyens canadiens.

M. Pollock: Monsieur McClelland, je ne suis pas très porté à faire l'apologie de l'Église catholique, mais il y a dans la doctrine catholique quelque chose qui s'appelle le principe de la subsidiaire. Vous savez peut-être de quoi je parle. Cela signifie en gros qu'en société les décisions doivent être prises le plus près de la base possible pour être efficace. Le critère déterminant, c'est l'efficacité.

Au niveau fédéral, à l'occasion du transfert des responsabilités, il y a beaucoup d'éléments essentiels dont les décideurs devront tenir compte. J'ai entendu parler de certains centres d'emploi - Steve Mantis a en parlé, je crois - qui sont particulièrement difficiles à utiliser. Par exemple, il faut songer à les installer ailleurs.

À l'organisme où je travaille, nous nous sommes dotés de ce qu'on appelle un réseau dispersé qui permet aux handicapés de préparer un curriculum vitae et de remettre le fichier aux employeurs. Nous essayons d'étendre ce service à l'échelle du pays.

Dans le cas d'innovations technologiques de ce genre, c'est un gaspillage énorme de temps et d'argent pour un petit organisme à but non lucratif de négocier une multitude d'ententes régionales.

Il faut un mécanisme à l'échelle fédérale qui rassemble les principaux intervenants régionaux; cela crée une synergie et facilite la planification même si sur le plan financier la décision finale revient aux régions. À certains endroits on va trouver d'excellentes idées et ailleurs de moins bonnes et c'est pourquoi il faut une courroie de transmission pour discuter de ce qui est bon et de ce qui ne l'est pas.

Le pendule ne doit pas osciller d'un extrême à l'autre. Il faut toujours se poser la question: qu'est-ce qui est indispensable? Quels sont les grands principes? De quels mécanismes a-t-on besoin pour favoriser l'efficacité et l'atteinte des principaux objectifs? Il faut un équilibre et des mécanismes appropriés.

Pour ce qui est des mécanismes de financement du gouvernement fédéral, cela signifie qu'il ne faut pas que vous transfériez la totalité des responsabilités en la matière. Il faut des initiatives nationales et aussi des initiatives locales. Il faut que vous demandiez aux bureaucrates de s'inspirer de ces principes lorsqu'ils prendront leurs décisions.

Merci.

Le président: Monsieur Grose.

M. Grose (Oshawa): Merci, monsieur le président.

Je tiens à remercier tous nos témoins d'aujourd'hui. Lynda, je tiens à vous dire que c'est tout particulièrement un plaisir pour moi de vous voir à l'extérieur du bureau. Les rapports que j'ai eus avec vos collaborateurs au bureau n'ont pas toujours été entièrement satisfaisants lorsque j'occupais mes fonctions précédentes.

Je veux parler de leadership, Steve. Mes électeurs m'ont envoyé ici pour écouter les dirigeants des divers groupes et entreprises et avec mes collègues, je suis ici pour décider de ce qui peut ou doit être fait et essayer de le faire. Pour moi, vous êtes un de ces chefs de file. Si j'en étais un, c'est moi que vous écouteriez plutôt que le contraire. C'est ce que je veux dire par chef de file.

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Sharon, je connais mal la situation des enfants handicapés, mais d'après ce que vous avez dit, j'ai l'impression qu'on les met dans le même sac que les autres. Vous avez beaucoup parlé de garderies et d'autres choses. N'y a-t-il pas de programmes particuliers pour ces enfants? N'y a-t-il pas non plus d'organismes spécialisés? Est-ce qu'on vous raccroche toujours à d'autres groupes?

Mme Irwin: Si vous voulez avoir une idée de ce dont le Canada aura l'air après le transfert des responsabilités, il suffit d'examiner les programmes de soins pour enfants et d'intervention précoce. C'est comme une boule de cristal dans laquelle on voit à quoi ressembleront les divers programmes quand tout aura été transféré.

C'est la fragmentation et la confusion la plus totale. Il n'y a pas de normes ni de principes d'une province à l'autre et le service aux familles avec de jeunes enfants nage dans le vague le plus total.

Pour répondre à votre question, je dirai qu'il y a certain services précoces. Ils sont essentiellement le prolongement des soins hospitaliers qui ont permis de déterminer que les enfants présentent des risques biologiques ou avérés. C'est ce qu'on appelle des programmes d'intervention précoce ou d'examen des nourrissons.

Ces programmes sont reliés aux besoins de la famille et non pas aux besoins en matière d'emploi ou aux besoins de l'enfant à un âge un peu plus avancé quand il a besoin de se socialiser. C'est une chose. Ces services sont très dispersés et risquent de disparaître. D'autres disparaîtront d'ici la fin de décembre.

Ces services n'ont jamais été un droit même pour ceux qui appartiennent à une catégorie particulière de handicap. Ça existait pour certains enfants mais pas tous.

Je vous ai parlé des soins pour enfants. Pour nous, cela englobe la pré-maternelle, les programmes pour les enfants d'âge préscolaire, les soins de jour et la garde parascolaire. Ce sont tous des programmes pour les enfants dont les parents sont occupés ailleurs.

Dans les années 1970, dans cette catégorie, il y avait des programmes particuliers pour les enfants handicapés. Certains d'entre eux étaient administrés par les associations de vie autonome. D'autres étaient dirigés par des centres pour le développement de l'enfance surtout dans le cas d'handicaps physiques. Il y a un certain nombre de programmes pour les enfants sourds ou qui souffraient d'une déficience grave de la vue.

Dans la plupart des cas, il s'agissait de programmes à temps partiel considérés comme des programmes pédagogiques destinés à des bambins. Ces programmes duraient deux heures mais la famille en avait besoin pour toute la journée parce que la mère devait aller travailler et elles devinrent de plus en plus nombreuses à devoir le faire.

La plupart de ces programmes n'existent plus. Ils ont été absorbé par la communauté. Une bonne partie des deux heures que l'enfant passe dans ces programmes est occupée à lui enfiler sa combinaison d'hiver et à l'amener au prochain endroit.

Il y a des jours où l'enfant est à un endroit entre 7 heures et 9 heures du matin puis doit attendre avant d'aller ailleurs de 9h30 à 11h30 et va ensuite à un troisième ou à un quatrième endroit. Personne ne sait si avant de partir ce matin-là l'enfant avait fait une bonne nuit. On veut éliminer tout ça et avoir quelque chose de suivi qui répond aux besoins du jeune. Cela n'existe pas.

M. Grose: Merci. Je pense que vous avez répondu ce que les autres témoins auraient probablement dit si je leur avais posé la question. Je pose mes questions un peu à l'aveuglette.

M. Scott: En plus des signes avant-coureurs de ce qui s'en vient, c'est une mise en garde pour ceux qui pensent que la situation de cette catégorie de personnes va connaître des améliorations à cause de la sympathie qu'ils suscitent dans la population. Personne n'attire davantage la sympathie que le groupe d'enfants dont Mme Irwin a parlé.

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Parce que le gouvernement n'a pas exercé le leadership qu'il fallait pour recenser les besoins et créer des programmes pour y répondre, toutes les bonnes intentions restent lettre morte faute de décisions des autorités. C'est un message important qu'il faut rappeler: ce n'est pas parce que nous savons que c'est une bonne cause que les choses vont s'améliorer comme on le voudrait.

J'aimerais parler un instant des normes nationales. On a parlé de transfert de responsabilités. Je pense que dans une certaine mesure problème est un problème de définitions. On parle bien de transfert de responsabilités et de normes nationales. Parfois, les gens se sentent rassurés ou effrayés alors qu'ils ne le devraient pas.

Je pose la question. Elle est simple. Ce n'est pas nécessairement mauvais que certains programmes soient transférés aux localités. Ce n'est pas mauvais en soi, n'est-ce pas?

Je signale pour les besoins du compte rendu qu'il y a un certain nombre de hochements de tête.

Ce faisant, par contre, il faut distinguer entre transfert des responsabilités et abdication. Êtes-vous aussi de cet avis?

On acquiesce. Nous sommes bien partis.

Je pense qu'il faut préciser nos termes dans ce débat parce qu'il n'y a sans doute pas autant de divergences de vue qu'on croirait. C'est à cause de l'imprécision des définitions. L'automne dernier, j'ai participé à l'examen de la sécurité sociale et j'ai été renversé de voir comment deux groupes différents du pays pouvaient envisager la même situation de façon tout à fait différente. Puis j'ai constaté que les avis n'étaient pas différents du tout, ce n'était que les mots qui l'étaient.

Soyons très prudents avec les mots que nous employons et disons bien que la prestation locale de services, en tenant compte de la vision nationale... Je ne vais pas parler de normes nationales parce que c'est une expression qui a beaucoup de connotations. Je dirais seulement que le gouvernement national a l'obligation de présenter une vision du pays.

Le groupe précédent a parlé de vérifications sociales. Il faut avoir quelque chose à vérifier. Il faut avoir une vision pour pouvoir faire une comparaison. Quelle est-elle? Est-ce la meilleure qui existe au pays? Est-ce la pire? Est-ce celle que le pays juge appropriée? Si c'est le cas, qui peut s'en charger sinon le gouvernement fédéral?

J'imagine qu'il n'y avait pas de question dans tout ce que j'ai dit, mais le président a dit tout à l'heure que nous sommes ici pour une table ronde et je suis ses instructions. Si quelqu'un veut répondre, je serais très heureux de l'entendre.

M. Mantis: Vous avez abordé des questions importantes. Pour faire des progrès, il faut faire le point de la situation. Ce que vous avez dit était très juste.

Quand on parle du rôle du gouvernement fédéral, il faut savoir ce qui se fait actuellement. On arrive à la fin de la Stratégie nationale pour l'intégration des handicapés. Qu'est-ce qui prend sa place? Eh bien, rien, on dirait.

Aucun palier de gouvernement ne s'est engagé à s'assurer que les personnes handicapées puissent participer pleinement à la collectivité. Au début on avait un ministère avec un ministre chargé de ces questions. On a fusionné ce ministère avec le nouveau ministère du Développement des ressources humaines. Après la réorganisation de ce dernier, les problèmes des personnes handicapées sont devenus de moins en moins prioritaires, à tel point qu'actuellement personne n'a de mandat précis pour s'occuper de ces questions.

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Si on veut que le gouvernement fédéral soit proactif, il faut que les décideurs soient engagés. C'est le cas de n'importe quel programme en milieu de travail. Sans l'engagement des décideurs, le programme ne se réalisera pas. Il faut établir des normes ou des pratiques. Je ne sais pas comment vous voulez formuler cela, mais je crois qu'il faut avoir une vision. Il faut aussi que la vision soit assez détaillée, expliquant le rôle des participants, la structure et l'évaluation de ces programmes.

Je crois que nos programmes ont souvent échoué parce que des spécialistes externes disaient: «Nous savons ce qu'il vous faut. Nous nous occuperons de vous». En réalité, ces programmes n'ont pas donné de très bons résultats. Je pense qu'il faut établir une structure organisationnelle précisant les responsables de la réalisation de ces programmes. Pour l'instant il n'y a personne.

Il y a donc des raisons qui expliquent nos craintes. Nous constatons que les facteurs qui doivent encourager les décisionnaires à tenir compte des besoins des personnes handicapées sont en train de disparaître. Nous constatons cela au niveau local, où certains programmes ne sont plus financés par le ministère fédéral. Dans la plupart des cas, les personnes handicapées doivent donc se tourner vers le Trésor. Elles ne reçoivent pas l'assurance-chômage. Tous ces fonds vont maintenant ailleurs. Les programmes visant à aider ces gens à trouver un emploi ont disparu.

Ce ne sont pas des craintes qu'on a simplement inventées. Ce sont les conclusions logiques qu'il faut tirer des décisions du gouvernement fédéral. C'est une triste situation.

Le président: Monsieur Sanders, avez-vous des observations?

M. Sanders: Merci monsieur le président.

Oui, nous avons besoin d'une vision nationale, de directives nationales, et d'une stratégie nationale. Nous avons besoin d'un système de prestation de services qui soit aussi local que possible. Au risque de me répéter, j'aimerais ajouter qu'il nous faut un système local de prestation de services spécialisés.

Je pense que le système a très bien fonctionné, et c'est en grande mesure grâce à ce dernier que je suis ici aujourd'hui. En tant que personne aveugle, j'avais besoin de ces services qui m'ont permis de voyager ces 28 dernières années et de travailler dans différentes régions du Canada. Je pense que le système a très bien fonctionné. J'ai toute confiance que le système continuera de fonctionner.

À cause de la dévolution et de la décentralisation, nous sommes dans une période très incertaine et assez obscure. Je crains qu'on ne comprenne pas très bien les besoins des personnes handicapées.

J'aimerais vous donner deux exemples. Une province a déjà adopté et appliqué le modèle générique. Un travailleur social très bien formé et très compétent rencontrera, rassurera et réconfortera toutes les personnes handicapées de la région concernée. Le problème est qu'on se limite à offrir de l'assurance et du réconfort professionnels, sans jamais prendre des mesures concrètes pour vraiment aider les personnes handicapées. C'est un modèle qui ne fonctionne tout simplement pas.

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Quoique le gouvernement fédéral ne soit pas compétent en matière d'éducation, il faut constater les résultats de l'intégration scolaire des personnes handicapées. La tendance actuelle est de les placer dans le milieu le moins restreint possible.

Il y a plus de 20 ans, je me souviens d'avoir participé au débat entre d'une part la ségrégation et l'établissement d'écoles centralisées pour les aveugles et d'autre part l'intégration et la décentralisation de l'éducation. Nous nous croyions très intelligents. Il y a 20 ans, nous avons fait la plus grande erreur de notre vie. A moins qu'ils n'aient la chance de naître dans une ville précise, la plupart des enfants aveugles sont maintenant analphabètes car on ne leur enseigne pas le braille et ils n'ont pas accès à des services spécialisés.

Cette observation est fondée sur la réalité et non pas sur l'émotion. Le fait est que les diplômés actuels des lycées et des universités sont analphabètes. Ils me demandent s'ils peuvent travailler pour moi et si j'ai un ordinateur qui parle ou qui a de gros caractères. Ils ne peuvent pas travailler sans ordinateur ou lire des notes. J'ai mes notes devant moi en braille.

En ce qui concerne la politique en matière d'éducation, nous avons perdu la bataille. J'espère que nous ne perdrons pas la bataille de la politique relative à la réadaptation et aux services sociaux.

Merci.

Mme White: J'aimerais en revenir à quelques-uns des commentaires qui ont été faits.

Nous avons des modèles de décentralisation de certains de nos services. Je ne travaille pas exclusivement pour le Conseil canadien de la réhabilitation et du travail, je me penche aussi sur certaines de ces questions. Nous cherchons à créer une organisation travaillant dans toutes les provinces et nous essayons aussi de décentraliser nos activités.

Nous essayons de définir les valeurs essentielles de notre organisation que nous devons absolument protéger pour assurer la cohérence de nos activités. Nos clients dans toutes les régions du pays doivent savoir que nous avons des valeurs fondamentales qui se traduisent dans la façon dont nous les traitons et dont nous traitons nos employés.

Il va sans dire que ces modèles existent actuellement dans le secteur privé. Ils existent aussi au sein du gouvernement, sous forme de régime de soins de santé et des régimes privés que certaines provinces essaient de mettre en place, et il est évident qu'on essaie d'établir des contrôles dans ce domaine. Ils existent aussi au sein des organisations comme celles que représentent les gens assis autour de cette table.

Si nous voulons avoir une identité nationale, il faut absolument définir les valeurs fondamentales que nous respectons dans toutes nos activités. Ce sont des valeurs clés et essentielles à nos activités au niveau local et au professionnalisme indispensable à l'intégration des personnes handicapées.

On peut voir le programme de réadaptation professionnelle, ou 40 p. 100 des fonds sont affectés à l'éducation, comme une occasion de continuer son éducation, qui est de compétence provinciale, ou bien on pourrait le considérer comme un programme menant à l'emploi et ouvrant d'autres horizons. Dans ce cas-là, comment envisageriez-vous l'administration et la dévolution d'un fonds pareil?

Le président: Avant de donner la parole à Ian pour une deuxième fois, j'aimerais juste poser une question moi-même à l'Association nationale des étudiants handicapés. Est-ce que les lignes directrices et les mécanismes du nouveau Programme canadien de prêts aux étudiants tiennent compte des besoins des étudiants handicapés?

M. Smith: La différence est que l'ancien Programme canadien de prêts aux étudiants ne reconnaissait pas vraiment que les étudiants handicapés avaient des problèmes particuliers de financement et d'accès.

Le Programme canadien de prêts aux étudiants a toujours été un programme de prêts. Il ne tenait pas compte du temps supplémentaire dont ont besoin les personnes handicapées pour terminer les études secondaires ou universitaires. Il ne tenait pas compte des coûts supplémentaires que doivent encourir beaucoup d'étudiants handicapés pendant leurs études postsecondaires.

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Bien entendu, l'autre problème concernant ce programme, c'est que les fonds pour les études à temps partiel étaient très limités. En fait, seulement 1 p. 100 des crédits alloués annuellement allait aux étudiants à temps partiel.

Personne n'ignore que la conjoncture économique, l'évolution du marché du travail et les structures familiales sont en train de changer fondamentalement, de manière générale, la situation de tous les étudiants de l'enseignement postsecondaire. D'une manière plus particulière, parce qu'ils sont handicapés, beaucoup d'étudiants optent pour des études à temps partiel.

Les étudiants handicapés profitent du nouveau programme de manières différentes. Je crois que le plus gros avantage de ce nouveau programme est qu'il fonctionnera en tandem avec le programme de réhabilitation professionnelle des personnes handicapées. Certains types de financement et de services sont mieux gérés par un programme comme le programme RPPH que par un programme d'aide aux étudiants.

Ceci dit, cependant, le nouveau programme de prêt aux étudiants offre des bourses et des prêts aux étudiants affectés de toutes les sortes d'handicaps. Il tient compte du coût supplémentaire de ces handicaps. Il finance le matériel spécial et les frais de scolarité. Il finance toute une variété de choses différentes dont les étudiants handicapés ont besoin pour mener à termes leurs études.

Cependant, un certain nombre d'étudiants handicapés continueront à être oublié parce que, par exemple, un élément majeur de ce programme de prêts aux étudiants destinés aux étudiants handicapés est cette bourse spéciale d'aide fédérale d'un maximum de 3 000$ par année de scolarité.

Si on considère qu'il y a environ 112 000 étudiants du postsecondaire handicapés et que le plafond du financement fédéral est fixé à 3 000 dollars par étudiant, 2 000 à 3 000 étudiants par année bénéficieront de ce programme. Dans une province comme la Saskatchewan, par exemple, cela pourrait représenter de 60 à 70 étudiants. Cela ne fait pas beaucoup.

Il est vrai que certaines provinces ont leur propre programme et que beaucoup de provinces complètent la somme offerte par le fédéral. En même temps, si les programmes de RPPH disparaissent, les avantages offerts par le programme fédéral, ses bourses et son aide aux étudiants handicapés permanents ne seront pas suffisants pour mettre les étudiants handicapés à égalité avec ceux qui ne le sont pas.

Il est indispensable d'avoir des programmes fédéraux consistants, un programme de prêt consistant complété par des bourses et des prêts provinciaux ainsi qu'un programme de RPPH consistant reconnaissant la nécessité de financer la réhabilitation et la formation professionnelle et prenant en compte le coût supplémentaire de ces handicaps.

Le président: J'aimerais ne pas me tromper. Vous avez dit qu'un certain nombre d'étudiants seront laissés en plan à cause du nombre qui aura besoin de cette aide et du plafond fixé à 3 000 dollars. J'en déduis que d'après vos renseignements le montant maximum prévu ne pourra satisfaire toute la demande. C'est bien cela?

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M. Smith: Oui, c'est un très bon point.

Nos enquêtes nous ont montré que 44 à 50 p. 100 des étudiants handicapés estiment que le financement et l'aide offertes par ces programmes, niveaux fédéral et provincial combinés, ne sont pas suffisants pour couvrir leur frais d'études. Dans la majorité des cas, cela varie de 1 000$ à 3 000$ auxquels bien entendu il faut ajouter toutes sortes de biens et de services dont il faut également tenir compte.

Il arrive donc à tout moment que de 40 à 50 p. 100 d'étudiants handicapés du postsecondaire ne reçoivent pas suffisamment d'aide pour financer leurs études.

Du point de vue économique, avoir un programme d'aide aux étudiants national qui n'oublie pas les étudiants handicapés est un atout parce que les statistiques montrent que si on leur offre les moyens de poursuivre des études supérieures leurs chances d'accéder au monde du travail sont deux fois supérieures que s'ils n'ont fait que des études secondaires ou des études moins poussées.

Donc, certainement du point de vue économique, que le gouvernement fédéral investisse dans l'avenir des handicapés par le biais de programmes de ce genre ne peut être que rentable. Les montants dépensés sont relativement minimes par rapport aux bénéfices pour la société et pour les handicapés qui en bénéficient.

Le président: Je promets à Ian de poser une dernière question puis de lui donner la parole. C'est une question que j'aimerais voir clarifier et que les membres du comité, je pense, aimeraient aussi voir clarifier.

Bien entendu, il y a une limite aux fonds disponibles. Nous le savons. Vous nous avez tous dit tout à l'heure que nous pouvions faire plus avec ce que nous avons déjà ou plutôt que nous pouvons faire plus sans rien demander de plus à cause des restrictions financières. Supposons que c'est possible.

Si vous étiez le ministre responsable de ce programme, vous serait-il possible d'offrir le meilleur programme avec les ressources disponibles ou ne serait-ce vraiment possible qu'en augmentant ces ressources?

Je vous pose la question à vous, M. Smith. Imaginez que vous êtes le ministre responsable. Comment résoudriez-vous ce dilemme?

M. Smith: À tout le moins, c'est une question très difficile.

Il importe de conserver une marge de manoeuvre suffisante pour que ces programmes puissent évoluer, changer, tenir compte des nouvelles réalités fiscales, fonctionner dans le cadre financier disponible, etc.

Nos membres estiment que les programmes qui sont en place depuis une vingtaine d'années avec le genre de modifications et d'améliorations apportées dans le nouveau programme de prêts aux étudiants, ont très bien servi les étudiants handicapés en leur permettant de poursuivre leurs études malgré quelques petits problèmes.

Tout ministre chargé de ces problèmes, demain, constatera, considérant le nombre d'handicapés inscrits à des programmes collégiaux et universitaires et le taux de chômage de ces diplômés une fois qu'ils sont entrés sur le marché du travail, que ces programmes ont très bien accompli ce qu'on attendait d'eux. Les sommes accordées sous forme d'assistance fédérale et/ou provinciale, tout particulièrement sous forme de bourses aux étudiants handicapés sont relativement minimes comparés aux résultats obtenus.

.1345

Je crois que Heather est probablement mieux en mesure de parler de ce genre de question que moi-même. Elle est actuellement étudiante.

Mme Delisle: J'écoute depuis un bon bout de temps Frank et tous les autres.

Quand je pense à l'aide accordée aux étudiants que je connais, je crois qu'on ne comprend pas bien que lorsqu'un étudiant handicapé poursuit ses études, le temps qu'il y consacre comparé à un étudiant non handicapé ne lui permet pas de prendre un emploi à temps partiel. Par exemple, ma déficience visuelle fait qu'il me faut dix minutes pour lire une simple page.

Le transport est un tout autre problème qui peut vous empêcher de prendre cet emploi à temps partiel. Je vois mes camarades qui travaillent à la librairie ou qui servent le café pour se faire quelques dollars en plus. Pour les handicapés, aussi, les études sont parfois plus longues parce que lorsqu'on est étudiant à temps partiel on n'a pas ces rapports de solidarité avec des camarades avec lesquels on suit deux ou trois cours.

Il est clair qu'en donnant aux gens de l'argent pour organiser eux-mêmes leur éducation plutôt que pour des programmes de réadaptation préconçus, on va leur donner satisfaction. Je pense qu'il n'y en a pas beaucoup parmi nous qui auraient accepté de suivre un programme universitaire ou autre pendant des années pour faire quelque chose qui ne les intéressait pas.

Je ne suis pas sûr d'avoir bien répondu à la question.

Le président: Si.

Mme Delisle: Il faut absolument accorder des prêts et des subventions, car il n'y en a pas assez. Je connais de nombreux étudiants qui ont dû abandonner parce qu'ils n'avaient pas suffisamment d'argent et qu'ils n'avaient pas d'autres recours.

Il y aussi bien souvent des étudiants comme moi qui ont déjà fait partie de la population active, qui sont d'anciens étudiants, et qui n'ont pas de parents sur qui compter. Les femmes handicapées qui ont des enfants et suivent un programme d'éducation doivent se demander en plus qui va s'occuper de faire la cuisine pendant qu'elles étudient. Je pourrais continuer encore longtemps comme cela. Il faudrait manifestement accorder plus de subventions.

Le président: Je vais demander un peu de patience à Mme Irwin car j'ai promis de laisser un peu de temps à M. McClelland.

M. McClelland: Non, ce n'est pas nécessaire. Allez-y.

Le président: Bien.

Madame Irwin, veuillez poursuivre.

Mme Irwin: Monsieur le président, je souhaitais répondre à votre question sous l'angle de la garde d'enfants. En matière d'utilisation des fonds, la meilleure chose à faire pour la garde d'enfants serait de tirer cela de l'enveloppe globale du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Il est parfaitement évident que ce programme, s'il n'est qu'un volet mineur et même pas réalisé à l'échelle nationale de cette enveloppe globale, va disparaître, au détriment des enfants handicapés et de leurs familles ainsi que d'autres personnes qui ont recours à la garde d'enfants.

Le président: Monsieur McClelland.

M. McClelland: Merci, monsieur le président.

Ma question s'adresse surtout à Mlle Irwin, mais les autres peuvent y répondre aussi. Je crois fermement à l'idée d'intégrer dans toute la mesure du possible dans le système scolaire les enfants qui ont des besoins spéciaux et les enfants handicapés. Dans ces conditions, il est évident qu'il faut commencer dès le pré-scolaire. Je pense que la grande majorité de nos concitoyens sont convaincus du bien-fondé d'une telle entreprise sociale. Si nous voulons faire évoluer nos valeurs, c'est par là qu'il faut commencer.

Le problème, c'est qu'on me signale que cela ne se fait pas sans difficulté car on prend des enfants qui ont été entourés de soins et on les place dans le système scolaire sans autre forme d'encadrement. Le résultat, c'est qu'on augmente la pression sur les enseignants qui sont obligés de se débrouiller.

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Avez-vous de l'expérience dans ce domaine? Que pourrait faire la société pour éviter ce genre de situation? Y a-t-il des personnes prêtes à aider bénévolement les enseignants? Avez-vous une idée sur la question?

Mme Irwin: Oh, bien sûr.

Tout le monde parle de la différence entre abandonner quelqu'un quelque part et intégrer cette personne. L'idée que nous avons eu - et Jim Sanders a très bien parlé de l'erreur que nous avons commise il y a 20 ans en pensant que c'était la bonne formule - était de transférer toutes les ressources alimentant des programmes séparés à des programmes intégrant l'éducation réalisée sur une base communautaire. On pensait éviter ainsi le trou noir de l'administration et les faux prétextes à des réductions de fonds; on se disait que l'argent serait mieux utilisé et servirait à alimenter un système au sein duquel chacun aurait une chance de faire progresser les valeurs dont vous parlez.

Bien souvent, ce n'est pas ce qui s'est passé. Les enfants sont retournés dans des classes au moment où les effectifs grossissaient et les aides-enseignants qui étaient là l'année précédente ont disparu. Ce n'est pas de cette vision que nous parlons, ce n'est pas comme cela que nous concevons des programmes appliqués sur une base communautaire et qui incluent tous les enfants au niveau de la garderie.

J'ai entendu dire la semaine dernière qu'il était question en Ontario de passer à l'intégration, ou de fermer les portes du programme séparé. J'ai prêché pendant 20 ans cette inclusion, et je m'entends encore dire: «Ne le faites pas maintenant. Faites un peu d'intégration à rebours, intégrez en douceur des enfants de la collectivité au sein de ce programme, mais gardez cet argent sous la main jusqu'à ce que nous soyons au bout de cette période.»

Le président: Monsieur Maloney

M. Maloney (Erie): Nous sommes là pour examiner la stratégie nationale. Des témoins nous ont dit que nous n'avions pas eu de stratégie nationale au cours des cinq dernières années mais qu'il y a tout de même eu des réalisations positives dans certains domaines. C'est comme si nous avions un beau bateau tout neuf mais sans gouvernail et avec des cales vides.

Pourriez-vous nous suggérer des orientations précises? Que faire pour changer la situation? Avons-nous besoin d'un secrétariat aux personnes handicapées? Si c'est le cas, qui devrait en faire partie? Aurions-nous besoin d'un vérificateur social pour contrôler ce qui se fait sur le plan fédéral, provincial et local? Pouvez-vous nous suggérer des orientations? Que faire, et comment?

Mme White: Francine Arseneault l'a dit très clairement ce matin quand elle a parlé d'inclusion et de consultation.

Il est certain que la stratégie nationale a eu certaines répercussions positives, mais il n'y avait pas de stratégie et il n'y a pas eu de consultations au départ avec des personnes handicapées pour déterminer les orientations. Les consultations doivent aussi servir à déterminer les meilleurs moyens d'exécuter la stratégie au niveau gouvernemental, que ce soit par le biais d'un secrétariat aux personnes handicapées ou autre. Il faut repartir à la base...

Si l'on a une stratégie inclusive, le problème est de savoir comment on assure la communication. La communication n'a pas du tout marché au cours de la dernière période. Les gens savaient qu'il y avait une stratégie, mais ils n'avaient aucune idée de ce qu'elle devait servir à réaliser. Ils savaient qu'il y avait des crédits disponibles à divers endroits, mais ils ne savaient pas à quoi cet argent servait. S'il y avait eu une certaine imputabilité...

C'est cela, ma dernière remarque sur ce point: l'imputabilité au niveau de l'évaluation. C'est ce qu'on entend constamment dire aussi dans le monde des affaires de nos jours. Il faut pouvoir justifier l'utilisation de l'argent: montrez-moi ce que vous avez fait avec cet argent. C'est à ce niveau que la stratégie a laissé à désirer, même si elle a aussi donné lieu à des choses excellentes.

Si nous avions eu une stratégie claire avec de bonnes consultations et une bonne communication pour permettre aux gens de savoir comment elle allait être administrée et évaluée, les gens y auraient cru et auraient eu une attitude beaucoup plus positive.

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M. Pollock: Pour compléter cette dernière réponse, à une époque où on parle de plus en plus de partenariats avec toutes sortes de partenaires sociaux, les groupes communautaires, les entreprises privées, les petites entreprises et les syndicats, il est toujours passionnant de mettre à l'essai un projet-pilote novateur.

En définitive, il faut solidement implanter ces projets; il faut réserver de l'argent pour préparer les liens nécessaires de façon à permettre à d'autres intervenants de reprendre le projet le jour où le gouvernement cesse de le financer et continuer à le faire fonctionner de manière autonome, ou, s'il ne peut pas s'autofinancer, négocier à l'avance avec le gouvernement pour continuer à avoir un peu d'argent afin d'en assurer la survie. L'idée, c'est d'éviter de faire les choses à la va-vite parce que le créneau va du 31 mars au 31 mars.

Parfois, il faut des mois pour établir des relations de confiance au sein d'une communauté. Il est donc important d'envisager une phase 1 et une phase 2 du projet de manière à ce que, même si le financement ne suit pas, l'entreprise se poursuit néanmoins dans une deuxième phase.

Il est toujours frustrant de devoir respecter un délai artificiel qui n'a peut-être aucun rapport avec vos capacités réelles, d'accélérer la mise sur pied d'un projet à cause des limites de l'année civile et de voir ensuite les ministères se dépêcher de liquider les fonds à la fin de l'année pour pouvoir les conserver l'année suivante. Ces limites de temps sont très gênantes et il faudrait les revoir.

Je pense qu'il faudrait en particulier bien réfléchir à la façon dont on réalise et on implante les projets pilote dans les communautés. Les tables rondes sur ces projets devraient se dérouler au début et non à la fin du projet.

M. Sanders: Nous pourrions souligner plusieurs legs de la stratégie nationale. Ils sont pour la plupart mentionnés dans l'examen du Développement des ressources humaines. Nous pouvons examiner cela.

La «stratégie» est peut-être un peu...

Le président: Permettez-moi de vous interrompre. Vous avez déjà eu un exemplaire de ce rapport?

M. Sanders: Je n'ai pu en examiner que les premières pages car je viens de revenir à mon bureau. On est aussi en train de le publier en braille et j'ai eu le plaisir d'apprendre aujourd'hui qu'on allait l'envoyer par messageries demain.

Je n'ai donc pas eu l'occasion de l'examiner, mais j'ai participé à de nombreuses heures de discussion qui représentent des journées entières au cours desquelles j'ai exprimé mon point de vue et celui de notre organisation dans le cadre de notre participation directe. Je pourrais vous mentionner de nombreux bons exemples de l'utilité de cette stratégie.

Je pense que le terme de «stratégie» est un peu exagéré. Toutefois, on a sincèrement essayé d'élaborer une stratégie. En fait, il nous faut une stratégie qui soit l'expression d'une vision.

J'ai insisté avec bien d'autres pour qu'on crée le Secrétariat à la condition des personnes handicapées qui relève maintenant de Développement des ressources humaines et de votre comité permanent.

À mon avis, le comité permanent a atteint et même dépassé tous les espoirs optimistes que je pouvais avoir. Sans ce comité permanent, je n'aurais plus aucun interlocuteur à Ottawa pour discuter d'une vision nationale. On me renvoit toujours à un bureau régional ou à une province, mais aucun d'entre vous ne l'a fait aujourd'hui. Il faut continuer votre travail et continuer à lutter pour préserver votre existence. Si vous disparaissez, nous n'aurons plus personne.

M. Mantis: Je pense que les participants cet après-midi et auparavant ont dit et répété qu'il fallait prendre un certain nombre de mesures.

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Je crois que mon petit mémoire de deux pages récapitule bien ces mesures. Linda et David ont expliqué que les méthodes utilisées dans le cadre des projets-pilotes et des nouvelles initiatives ont en fait entravé leur succès.

Je connais le petit jeu des organismes de financement. C'est toujours: Attendez, attendez que nous ayons les nouvelles directives pour cette année, car le gouvernement a de nouvelles priorités. Ensuite, on en arrive au mois de septembre et on nous dit: «Dépêchez-vous de présenter votre demande et de dépenser l'argent avant le 31 mars». Désolé, mais nous ne sommes pas des surhommes. Nous sommes très forts, mais nous ne sommes pas des magiciens.

Nous n'arrêtons pas d'entendre parler de «partenariat». Au lieu de paroles, nous voudrions bien des actions. Ce n'est pas comme cela qu'on réalise un partenariat. Un partenariat, cela consiste à élaborer ensemble une stratégie et un plan de travail. Nous avons des responsabilité, vous en avez aussi, alors passons à l'action. Ensuite, on évalue régulièrement les progrès pour s'assurer que les choses se déroulent comme prévu.

Mais on a l'impression que cette formule consiste à aider des groupes d'intérêts spéciaux. C'est devenu un mot tabou au Canada, à tort. J'appartiens à un groupe d'intérêts spécial. Je suis une personne handicapée et je n'ai nullement envie de le cacher. Nous pouvons contribuer à faire de notre communauté un endroit où il fait bon vivre, mais nous devons le faire dans le cadre d'un partenariat, et ce partenariat se manifeste parfois sous forme d'argent; il ne s'agit pas de sommes énormes car nous sommes pauvres. Cinquante pour cent d'entre nous vivent en deça du seuil de la pauvreté. Nous n'avons pas beaucoup de ressources.

Si nous devons vraiment participer de façon utile à une consultation, il faut que nous ayons l'appui des organisations qui représentent les personnes handicapées.

Le président: Permettez-moi d'intervenir.

Avez-vous tous été consultés sur l'évaluation de la stratégie nationale? Elle tire à sa fin. Si vous ne l'avez pas été, dites-le nous pour que cela soit consigné à notre compte rendu.

Si vous avez vu l'ébauche de ce rapport, estimez-vous qu'il reflète les opinions que vous avez formulées à l'occasion de cet examen?

M. Mantis: Nos organisations n'ont pas participé à ce travail. Nous n'avons vu aucun rapport. La dernière fois qu'on nous a demandé ce que nous pensions de la stratégie nationale, c'était il y a environ trois ans et demi.

Mme Irwin: On nous a seulement demandé à la fin ce que nous en pensions. Il y a eu une espèce de discussion sur les objectifs à fixer pour les étapes futures d'une stratégie nationale.

Les tout petits enfants et les organisations qui représentent leurs intérêts n'ont aucunement participé à la planification et à la réalisation de la stratégie sur cinq ans.

Le président: Monsieur Sanders, on vous a consulté, non?

M. Sanders: Oui, pour une évaluation, et on nous a demandé nos commentaires et nos recommandations dans l'optique d'un renouvellement de la stratégie.

Mais évidemment, personne n'a été consulté sur son élaboration. Notre organisation a été consultée partout dans le pays, comme je l'ai été moi-même à titre individuel. Je vous ai dit que pendant un certain temps j'ai été plongé là-dedans jusqu'au cou. Je n'ai pas encore fini de lire le rapport.

Mme White: J'ai personnellement présenté une évaluation, et mes commentaires sont parfaitement cohérents. Si on m'a interrogé personnellement, c'est parce que je suis à cheval sur diverses organisations au service des personnes handicapées, et que d'autre part je m'occupe d'essayer d'intégrer les personnes handicapées sur le marché du travail.

Le CCRT a formulé des commentaires oraux, et non présenté un mémoire en tant que tel.

Le président: Il est maintenant 14h05 environ. La période de questions a débuté depuis cinq minutes. Avec l'indulgence des témoins, nous pouvons continuer au maximum jusqu'à deux heures et quart, heure du début de la période des questions proprement dite.

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Si certains membres du comité doivent partir, je le comprends très bien. Sinon, nous pouvons poursuivre les questions.

Monsieur Maloney, voulez-vous continuer? Quelqu'un d'autre? Il faut profiter de toutes les occasions.

Les membres du comité qui s'absentent sont tout excusés.

Madame White, vous avez parlé de valeurs fondamentales qui ne devraient pas être négociables. De quoi s'agit-il pour ce qui concerne les personnes handicapées?

Mme White: Je crois qu'il faut consulter ces personnes à ce sujet. Je crois que très souvent, chez les personnes handicapées, les gens, handicapés ou non, hésitent à parler au nom de ces personnes handicapées. Personne ne s'estime habilité à le faire. Je vous renvoie donc à la notion de consultation.

Toutefois, ce qui me semble fondamental, c'est l'idée d'une intégration et d'un accès complet, par opposition à ce dont je vous parlais tout à l'heure. Sans moyens de transport, les gens ne peuvent pas avoir d'éducation. Sans éducation, ils ne peuvent pas avoir accès à l'emploi, aux loisirs et aux communications qui devraient être un droit pour chacun dans la société.

Si nous ne faisons pas les choses correctement à ce niveau, nous continuerons toujours à considérer les personnes handicapées comme un fardeau et non un atout pour notre économie. Les personnes handicapées veulent contribuer à notre économie et oeuvrer au progrès de notre pays et à l'amélioration de nos finances.

M. Pollock: Je voudrais faire une autre remarque, et je me fais l'écho de celles de mon amie Mme White.

Vous pourrez y songer la prochaine fois que vous examinerez la réglementation fédérale des sociétés d'assurances privées. La rigidité est une des valeurs problèmes. J'imagine que c'est le contraire pour la souplesse. Nous avons dans la société de nombreuses personnes qui ont un handicap quelconque et qui voudraient travailler, qui seraient prêtes à prendre un emploi et à atténuer le fardeau social si elles n'avaient pas peur d'être ensuite définitivement privées d'assurances. Les catégories d'assurances sont souvent extrêmement rigides. En vertu de ces catégories, une personne est soit totalement handicapée, soit entièrement apte.

La vérité se situe évidemment à mi-chemin. Le gouvernement fédéral, de concert avec les compagnies d'assurance canadiennes, doit essayer de rendre le système plus souple, afin d'alléger les inquiétudes et l'angoisse des personnes qui autrement accepteraient un emploi. J'aimerais souligner cet aspect.

M. Sanders: Permettez-moi de dire un mot à ce sujet. Les personnes handicapées ne sont pas comme des raisins qui poussent en grappe. Nous sommes des individus; ceux d'entre nous qui ont le même handicap ont des points communs, mais nous n'avons pas de caractéristiques communes, dans l'ensemble. La deuxième valeur est que nous ne sommes pas malades. Nous n'avons pas besoin de médecins. La plupart d'entre nous avons besoin de compétences ou d'accès à des services communautaires nous permettant de vivre au sein de la société.

Mme Irwin: Quoi que vous fassiez, n'oubliez pas de tenir compte des jeunes enfants dans toute nouvelle stratégie nationale. C'est un fait que les enfants qui ont participé à de bons programmes de garderies inclusifs se démarquent énormément et à plusieurs égards, des autres enfants qui n'ont pas connu un environnement diversifié du point de vue culturel et au niveau des aptitudes des participants. Dans le premier cas, les enfants semblent être plus tolérants et célèbrent même la diversité qu'ils constatent autour d'eux. Ils font preuve de plus de souplesse dans la résolution de problèmes. Leurs aptitudes cognitives sont au moins au même niveau que celles des enfants qui sont isolés des enfants handicapés.

Pour paraphraser quelqu'un d'autre, j'ai fait un rêve hier soir... dans l'avion. J'ai dû prendre l'avion au moment où se faisaient les grands discours. Je n'avais même pas une petite radio avec moi pour les écouter. J'ai changé d'avion à Halifax et l'avion a également fait escale à Montréal. C'est ainsi lorsqu'on voyage à partir du Cap-Breton. Lorsque les passagers montréalais sont montés dans l'avion, j'ai étudié leurs visages dans l'espoir d'y découvrir l'effet que les discours auraient eu sur eux. Mais les visages n'ont rien trahi, et j'espérais pouvoir parler à mon voisin, mais le siège à côté de moi est resté vide.

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Ensuite, comme la plupart d'entre vous, je me suis précipitée sur ma télévision dès mon arrivée à Ottawa pour suivre le déroulement des événements pendant le reste de la nuit, ou presque. Lorsque je me suis levée ce matin, j'ai réallumé la télé pour voir si la situation avait changé. Par la suite, j'ai travaillé sur l'ébauche finale de mon mémoire pour ce comité.

Le message que j'ai tenté de véhiculer dans mon mémoire est que l'expérience des garderies inclusives, c'est-à-dire celles où les enfants jouent déjà avec des enfants handicapés, rend les petits plus à l'aise avec les jeunes qui sont différents, ils les respectent davantage et apprécient ce qui les distingue des autres. Je suis fermement convaincue que si nous avions eu des garderies inclusives, nous n'aurions pas à nous préoccuper du résultat référendaire de demain.

Mais si une autre occasion se présente, peut-être la saisirons-nous tous pour devenir plus tolérants des autres Canadiens et de ce qui les distingue de nous.

Merci.

Le président: Vous avez certainement réussi à piquer l'intérêt déjà biaisé d'un pédiatre.

Madame Delisle.

Mme Delisle: J'aimerais parler de la question des valeurs. Je ne parle pas au nom de toutes les personnes handicapées. Je parlerai en mon nom propre, quoique je ne croie pas que mes valeurs en tant que personne handicapée diffèrent énormément des valeurs d'autrui.

Voici mes valeurs: un mode de vie convenable, pouvoir faire des études, pouvoir avoir accès à ces études et ensuite à un emploi. Je crois que tous les Canadiens partagent ces valeurs.

Je crois que c'est moins une question de valeurs que d'accès et d'élimination d'obstacles. Je ne vais pas vous réciter la liste des handicaps physiques ni des attitudes de toutes sortes, mais je crois qu'il se passe une chose intéressante lorsqu'on se réunit autour d'une table - comme c'est le cas ici - et qu'on essaie d'identifier ce qui nous distingue; on retrouve beaucoup de choses que l'on a en commun. C'est tout ce que je voulais dire.

Le président: On appelle cela une table ronde, même si cette table-ci est rectangulaire, mais c'est à cause de la configuration de la salle. Je dis cela pour blaguer.

Voici ce qui me vient à l'esprit. Nous sommes un comité national du Parlement qui se penchent sur la situation des personnes handicapées. Vous êtes venus de certaines provinces. Les gouvernements provinciaux ont-ils créé des comités pour étudier la question des personnes handicapées et vous ont-ils consultés régulièrement ou demandé votre avis?

Est-ce que vous leur avez fait des représentations? Un des problèmes auxquels fait face le gouvernement fédéral pour ce qui est du programme canadien de prêts aux étudiants, c'est que parfois les provinces - consciemment ou pas, sagement ou pas - se déchargent de leur responsabilité envers certains programmes qu'elles finançaient auparavant. Citons, à titre d'exemple, le programme de réadaptation professionnelle pour les étudiants handicapés. On répond moins bien à vos besoins si les provinces sont responsables. Mais le gouvernement fédéral, par le biais du programme de prêts aux étudiants n'est dorénavant pas capable de répondre à vos attentes.

Ce genre de situation vous est-elle familière, et dans l'affirmative l'avez-vous portée à l'attention des provinces?

Monsieur Smith.

M. Smith: C'est toujours une préoccupation. Étant donné la situation actuelle en Ontario avec le nouveau gouvernement, nous avons vraiment peur que les étudiants subventionnés au titre du programme canadien de prêts aux étudiants voient leur financement de réadaptation professionnelle d'autant amputé , par la province. Il se peut également que la contribution financière versée en vertu du programme provincial de prêts aux étudiants diminue.

Étant donné la nature du programme, il faut continuellement surveiller les actions des provinces. De plus, il faut toujours insister sur les normes nationales. Il est particulièrement difficile de le faire dans le domaine de l'éducation, parce que c'est, bien sûr, orientation un domaine de ressort provincial.

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Nous avons besoin de normes nationales et d'une orientation nationale qui puissent - comme dans le cas du Programme de prêts aux étudiants du Canada et du Programme de réadaptation professionnelle des personnes handicapées - quoi qu'il advienne, et quelque soit son titre à l'avenir - maintenir ces normes quantifiables. Ainsi, les étudiants des universités et collèges canadiens pourront obtenir de l'aide en vertu de ces programmes, où qu'ils vivent au Canada.

Étant donné la dévolution des programmes et du financement, et parce que le gouvernement fédéral est en train de décentraliser son rôle dans ce genre de programme, nous craignons vraiment que les étudiants d'une province seront désavantagés par rapport aux étudiants d'ailleurs.

Le président: Je vais devoir mettre fin à cette réunion. La période des questions va commencer d'un instant à l'autre, et il nous faut une permission spéciale de la part du Whip pour continuer de siéger.

Je sais que les témoins et les députés sont encore très intéressés à discuter de cette question, mais je me dois de vous remercier au nom du comité pour votre apport très utile. Si vous avez des remarques complémentaires, vous pouvez les faire parvenir au comité.

Sur ce, je vous remercie encore une fois. La séance est levée.

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