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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 17 octobre 1995

.0934

[Traduction]

Le président: Bonjour. Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-232, Loi modifiant la Loi sur le divorce (garde d'un enfant ou accès auprès d'un enfant par un des grands-parents). Nous accueillons comme témoin aujourd'hui maître Glen How, C.R., ainsi que maître André Charbonneau.

.0935

Mme Jennings (Mission - Coquitlam): J'invoque le Règlement, monsieur le président.

Le président: Oui, madame Jennings.

Mme Jennings: Monsieur le président, j'ai deux rappels au Règlement. Le premier porte sur les témoins qui viendront nous parler du projet de loi C-232. Le deuxième concerne la présence d'un conseiller législatif à nos séances.

Premièrement, j'estime que notre comité a besoin de plus d'information sur le projet de loi C-232. Cette étude est loin d'être finie. Jusqu'à présent, le processus a été injuste. Le comité devrait entendre des professionnels aptes à présenter un point de vue qui n'a pas encore été entendu. Jusqu'à présent, à l'exception de moi-même et de Nancy Wooldridge, les témoins ont tous été des avocats qui s'opposent au projet de loi et qui n'ont pas d'expérience pratique en la matière. En toute justice, il faudrait que l'autre camp puisse se faire entendre.

Monsieur le président, je vous ai remis des noms qui figuraient dans des lettres que j'ai remises au comité avant de partir, le 3 octobre. J'espérais que ces personnes seraient appelées à témoigner.

Barbara Baird, de Fredericton, est une spécialiste très compétente du droit de la famille et qui, dans ces causes, défend régulièrement les droits des grands-parents. Gerald Culhane, de Vancouver, a une longue expérience de tels dossiers, est lui-même grand-père, depuis de nombreuses années, et s'occupe quotidiennement de questions liées aux drois des grands-parents. Sheila Keat, pour sa part, est très vexée à l'idée qu'on prétende que Steven Andrew s'exprime au nom de tous. D'après elle, ce projet de loi n'a pas fait l'objet des discussions qui s'imposent et maître Andrews ne s'est prononcé qu'au nom de dix membres du comité. Elle entend chaque jour environ deux personnes, de nouveaux cas, qui se trouvent dans la situation prévue par mon projet de loi. Chuck Merovitz, qui est ici à Ottawa, est pour le projet de loi C-232.

Les témoignages que nous avons entendus ne suffisent pas. En toute équité, le comité devrait entendre des représentants des deux camps.

Le président: J'aurais besoin d'une précision. Vous avez dit que le processus est injuste. En quoi est-il injuste?

Mme Jennings: J'estime que l'on devrait au moins envisager la possibilité d'entendre les témoins que j'ai suggérés. C'est moi qui ait présenté le projet de loi et, bien sûr, je tiens à ce qu'il soit examiné de façon juste et impartiale. Pour autant que je sache, on n'a pas tenu compte de mes suggestions ni demander à ces personnes de venir témoigner.

Le président: Voulez-vous dire que le procesus est injuste parce que nous n'avons pas entendu les témoins que vous avez suggérés?

Mme Jennings: Non. Je veux simplement dire que nous n'avons pas encore entendu et que nous ne prévoyons pas entendre d'avocats qui appuient ce projet de loi alors que je sais pertinemment, ayant parcouru le pays l'an dernier, que de nombreux avocats du pays sont pour ce projet de loi. Il me semble étrange que le Comité de la justice n'ait pas trouvé ou même tenté de trouver un avocat qui représente ce point de vue.

Le président: Vous savez que c'est le comité directeur qui choisit les témoins et que votre parti est représenté au sein de ce comité?

Mme Jennings: Oui, je le sais, mais malheureusement...

Le président: En avez-vous parlé avec le représentant de votre parti?

Mme Jennings: Oui, et je sais que M. Ramsay a présenté mes suggestions de témoins au comité directeur. Il est malheureux qu'il n'y ait qu'un député réformiste au sein de ce comité, mais nous ne pouvons rien.

Ayant présenté ce projet de loi, je me dois d'insister pour que nous entendions des avocats représentant l'autre côté de la médaille.

Le président: Votre premier rappel au Règlement portait sur les témoins que vous vouliez convoquer. Le deuxième...?

Mme Jennings: Mon deuxième rappel au Règlement concerne la présence d'un conseiller législatif à nos séances. Il importe pour les députés qui présentent un projet de loi devant le Comité de la justice puissent compter sur les conseils d'un conseiller indépendant pouvant répondre aux questions sur le projet de loi. Vous vous souvenez sans doute que, lors de mon témoignage, un membre du comité...

Une voix: [Inaudible - Éditeur]

Mme Jennings: Oui, et je n'ai pu donner les précisions demandées. Je n'ai pu que signaler que, malheureusement, la personne qui avait rédigé mon projet de loi était absente. J'en étais désavantagée; c'était bien dommage et cela n'aurait pas dû se produire.

En l'occurence, il m'apparaît logique que le légiste qui a rédigé mon projet de loi soit présent.

Le président: Quand voulez-vous que ce conseiller législatif soit présent? Vous savez sans doute qu'un conseiller législatif ne peut être présent à toutes les audiences où nous examinons un projet de loi, particulièrement puisque nous sommes généralement saisis de nouvelles mesures législatives.

Mme Jennings: Cela correspond en fait à deux questions. Si je ne m'abuse, nous ne disposons des services que de trois conseillers et demi. Il nous en faudrait peut-être plus. Par ailleurs, il m'apparaît nécessaire que le rédacteur d'un projet de loi soit présent au moment où le député qui présente le projet de loi témoigne devant un comité.

Le président: Très bien. Quand voulez-vous que ce conseiller soit présent?

Mme Jennings: Dans mon cas, il est trop tard puisque j'ai déjà témoigné. Il pourrait néanmoins être présent pendant l'étude article par article.

Le président: D'accord, pendant l'étude article par article.

Oui, monsieur Ramsay.

M. Ramsay (Crowfoot): Je voudrais une précision. Pourquoi ne disposons-nous pas des services d'un conseiller juridique à temps plein?

Le président: Nous avons un conseiller à temps plein. Une attachée de recherche est présente en ce moment-même.

M. Ramsay: Je parle plutôt d'un conseiller législatif comme celui qui a assisté à nos séances sur les autres projets de loi, y compris le projet de loi C-68. Deux conseillers législatifs ont assisté à toutes nos séances sur le projet de loi C-68. Pourquoi ne sont-ils pas ici maintenant?

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Le greffier du Comité: Monsieur Ramsay, on a adopté une nouvelle façon de procéder. Étant donné que les conseillers législatifs sont peu nombreux, seulement trois et demi, comme vous l'avez dit, on a décidé qu'ils n'assisteraient pas aux réunions des comités, sauf lorsqu'il s'agit de l'étude article par article, à moins qu'il y ait une demande précise dans ce sens de la part d'un président. On verra comment les choses iront. M. Louis-Philippe Côté assiste en ce moment à une autre réunion.

M. Ramsay: Voilà précisément là où je veux en venir. Je crois qu'un de nos collègues du Bloc Québécois a posé la même question. Pourquoi ne pouvons-nous pas compter sur les services d'un conseiller législatif à toutes les étapes de notre étude de ce projet de loi? Pourquoi les députés de l'opposion et les ministériels ne peuvent-ils compter sur un conseiller législatif indépendant qui leur donnera des conseils et des précisions, au besoin? Que faisons-nous si quelqu'un soulève un point sur lequel on voudrait un avis indépendant? Pourquoi n'avons-nous pas de tels services?

Un changement a été apporté, et j'aimerais bien comprendre pourquoi. Je ne crois pas que nous devrions poursuivre nos travaux en l'absence d'un conseiller législatif.

Le président: Monsieur Ramsay, depuis que je suis président du comité, c'est la première fois qu'on demande la présence d'un conseiller législatif. Nous pouvons examiner la question à nouveau, mais vous savez qu'il n'y a que trois conseillers et demi et que, compte tenu de tout le travail qu'abattent les comités, il est impossible qu'un de ces conseillers soit là à toutes les séances. Il y a aussi une question de coûts. Je suis certain que vous êtes fort préoccupé pas les coûts. Tous ces facteurs doivent être pris en compte.

Par conséquent, si vous tenez à ce qu'un conseiller législatif soit présent à une date précise, faites-le savoir à M. Dupuis qui m'en parlera. Nous pourrons peut-être alors prendre des arrangements en ce sens. Nous ne tentons pas de vous compliquer la vie. Nous voulons accéder à vos demandes dans la mesure du possible, mais c'est aussi une affaire de logistique.

M. Ramsay: Puisque vous soulevez la question des coûts, parlons-en. J'aimerais bien savoir ce que coûterait un conseiller législatif à temps plein. Nous ne pouvons déterminer à l'avance si des questions seront soulevées qui nécessiteront la présence d'un conseiller législatif. Je ne saurais vous dire quels points seront abordés aujourd'hui; alors, que ferons-nous si nous avons des questions pour les conseillers législatifs aujourd'hui? Que ferons-nous?

Le président: Notre attachée de recherche est ici, juste à côté de moi. C'est aussi une conseillère indépendante, même si elle ne rédige pas de projets de loi. Vous pouvez lui poser vos questions. Elle assiste à toutes les séances sur le projet de loi C-232 et peut nous donner son avis juridique sur toutes les questions que vous voulez bien lui poser.

M. Ramsay: D'accord.

Mme Jennings: Monsieur le président, lorsque j'ai témoigné, Mme Venne a demandé pourquoi aucun conseiller législatif indépendant n'était présent. Elle avait alors soulevé la question.

Monsieur Dupuis, vous avez dit qu'un changement avait été apporté. L'a-t-on communiqué dans une lettre, une note de service ou un autre document? Dans l'affirmative, j'aimerais voir ce document.

Le président: Vous pourrez en parler avec M. Dupuis après la réunion. Je crois que nous devrions maintenant passer à notre ordre du jour. Vous pourrez donner suite à cette question après la séance.

Mme Jennings: Ne puis-je pas demander que moi, et pourquoi pas, tous les membres du comité recevions cette lettre ou cette note de service traitant de ce changement?

Le président: On ne m'a pas indiqué qu'une telle lettre ou note existe. Nous pouvons tenter de déterminer si un document de ce genre a été envoyé, mais...

Mme Jennings: Monsieur le président, je demande qu'on nous en remette une copie.

Le président: Je le répète, nous en discuterons avec M. Dupuis. Je suis sûr qu'il fera de son mieux pour vous aider.

Mme Jennings: Merci.

Le président: Passons maintenant la parole au témoin.

Monsieur How, allez-y, je vous prie.

M. W. Glen How (avocat, W. Glen How & Associates): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, et les témoins, je suis heureux de vous faire part aujourd'hui de quelques remarques sur le problème du divorce.

Les litiges familiaux constituent l'un des principaux problèmes de nos tribunaux. On estime que, en Ontario du moins, environ 50 p. 100 de tout le travail des tribunaux est fait en droit de la famille. C'est donc une question très grave pour la population et le contribuable, et je suis heureux que vous accordiez à ce sujet toute l'attention qu'il mérite.

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Je crois pouvoir dire que j'ai une longue expérience en droit de la famille. J'ai plaidé les deux dernières causes qu'a entendues la Cour suprême du Canada sur ce sujet, et j'aimerais vous en parler.

Mais d'abord, j'aborderai le projet de loi C-232 dont vous êtes saisis. Je vous ai remis un mémoire contenant des remarques sur ce projet de loi. En guise de préface, je souligne que les lois en matière familiale ne sont pas satisfaisantes. Même la Cour suprême ne s'y retrouve pas. Elle a rendu des jugements très contradictoires. Bon nombre d'universitaires - j'en ai cité quelques-uns - ont affirmé que la situation en est à un point tel qu'il est maintenant temps de créer un tribunal administratif qui traiterait uniquement des litiges familiaux.

Je n'irais pas jusque-là. Mais je suis d'accord pour dire que les lois en matière familiale sont insatisfaisantes. Je suis donc heureux que vous étudiez attentivement ce sujet.

Une des plus grandes sources de problèmes - et c'est un sujet sérieux - c'est la garde des enfants, qui est régie par les articles 16 et 17 de la Loi sur le divorce. Ce sont ces articles queMme Jennings propose de modifier avec son projet de loi. Elle propse un nouveau paragraphe 16(3) qui stipulerait que:

L'obtention de l'autorisation du tribunal n'est pas un obstacle insurmontable. Les grands-parents qui présentent une demande légitime et sérieuse peuvent s'attendre à ce que le tribunal les autorise à la présenter. Toutefois, les questions familiales font déjà l'objet de bien des litiges et tous ces litiges ne contribuent pas nécessairement au bien-être des enfants.

Les procès entraînent la polarisation des parties. Les enfants sont pris par le litige. Ils se sentent forcés de prendre partie pour l'un ou l'autre de leurs parents. Les procès dans ce domaine sont une mauvaise chose. En fait, on pourrait les décrire comme étant un mal nécessaire. En conférant des pouvoirs non seulement aux parents, mais aussi aux grands-parents, on ne peut que faire augmenter le nombre de recours en justice. S'il s'agit d'une poursuite sérieuse, il y aura droit d'appel de toute façon. Dans le cas contraire, si la poursuite est frivole, le tribunal la rejettera probablement. En donnant aux grands-parents le droit d'être entendus par le tribunal sans autorisation préalable, on ne fera que compliquer et emmêler une situation déjà très complexe.

Par conséquent, je comprends que les défenseurs de ce projet de loi n'ont que de bonnes intentions, mais il ne faut pas tenir compte de ce que dit la loi seulement; il faut être suffisamment réalistes pour comprendre ce qu'en seront les effets. C'est le résultat final qui compte. Pour cette raison, je remets en question la pertinence et la sagesse de la mesure législative qui ne fera qu'accroître le nombre de litiges sur ce bien triste sujet qu'est le divorce.

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Honnêtement, il y a tant de familles et d'enfants qui sont déchirés par le divorce... et je dois malheureusement admettre que ce sont parfois les grands-parents qui ont provoqué le litige. Il y a des jeunes époux qui ont des disputes et des malentendus qui finiraient par se régler si on les laissaient en paix; malheureusement, les familles s'en mêlent et cela finit devant le tribunal. C'est très néfaste pour les enfants.

La loi contient une belle expression, «l'intérêt de l'enfant». C'est bien joli. Chacun se dit que c'est pour l'intérêt de l'enfant qu'il pose tous ses gestes. Mais qu'est-ce que l'intérêt de l'enfant? Qui peut prétendre savoir ce qu'est l'intérêt de l'enfant? Lorsqu'on prend une décision au sujet d'un enfant de deux, cinq ou dix ans, on peut difficilement savoir quelles seront les conséquences à long terme. Prendre une décision dans l'intérêt d'un enfant en très bas âge...

J'estime honnêtement que nous nous leurrons. Personne parmi nous ne sait ce qui est dans l'intérêt de l'enfant. Même les juges le reconnaissent, y compris l'éminent juge Ivan Rand qui a déclaré que seule l'omniscience lui permettrait de le savoir.

C'est une théorie très dommageable. Plutôt que de nous guider, elle nous mène à la confusion parce que personne ne sait comment interpréter la loi. Chaque juge interprète la loi comme il lui semble bon ce jour-là.

Parce que les juges jouissent d'une très grande discrétion, l'issue des procès est imprévisible. Plutôt que d'en venir à des ententes qui apaiseraient les parties, on multiplie les difficultés inutilement.

Je voudrais aussi parler du droit d'accès des deux parents et du droit qu'ont les deux parents de se communiquer les informations et d'enseigner leurs croyances à leurs enfants. Tout cela fait partie de la vie de famille. Les gens ne sont pas toujours d'accord. Les enfants ont le droit de le savoir et de connaître le parent qui n'a pas la garde aussi bien que l'autre.

Les restrictions que l'on a imposées à bien des conjoints qui n'avaient pas la garde de leurs enfants... Il y a eu deux causes à ce sujet, dont l'une s'est rendue jusqu'à la Cour suprême. C'est mal. C'est une violation de la Charte; ces droits prévus par la Charte devraient être respectés. Il me semble que tous les députés tiennent à ce que les droits prévus par la Charte soient respectés.

Je n'entrerai pas dans tous les détails. Dans mon mémoire, je suggère des façons de régler les problèmes et d'améliorer la loi. J'aimerais toutefois ajouter encore une chose.

Nous réfléchissons et nous nous demandons sérieusement comment nous pourrions améliorer les séparations et les poursuites intentées en vertu de la Loi sur le divorce. Mais nous devrions prendre un peu de recul et être réalistes.

Voici ce que je voudrais vous dire respectueusement. Si nous calculions toutes les sommes qui sont consacrées aux poursuites, aux honoraires des avocats, aux dépenses des tribunaux et aux séparations des familles... Si nous nous servions d'un peu de cet argent pour enseigner aux familles comment elles peuvent rester unies, nous aiderions beaucoup plus les familles, les enfants et la population canadienne.

Ce sera là ma conclusion. Ce sont là les remarques que je tenais à faire. Je sais que les membres du comité font de très bon contre-interrogatoires et je serai heureux de répondre à leurs questions.

Le président: Merci. En l'absence des députés du Bloc Québécoise ce matin, madame Jennings, vous avez dix minutes.

Mme Jennings: Maître How, merci de nous avoir fait part de vos expériences.

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Vous nous avez dit que la confusion règne dans les tribunaux, à l'heure actuelle, en matière de divorce; pourquoi alors inclure aussi les grands-parents. Moi, je ne suis pas avocate, mais je connais les avocats qui traitent régulièrement de ces questions devant les tribunaux, entre autres, maître Culhane.

En ce qui a trait à ce que vous venez de dire, j'aimerais savoir ce que vous pensez des remarques de M. Culhane qui a dit:

Pourriez-vous me dire ce que vous pensez du point de vue de maître Culhane?

M. How: J'en serai ravi. D'ailleurs, à l'onglet 2 de mon mémoire, vous verrez que je fais essentiellement les mêmes remarques sur les mauvaises pratiques en droit de la famille. À la page 125, j'aborde précisément ces questions. À la page 124, dans l'une des déclarations que l'on trouve au bas de la page...

M. Regan (Halifax-Ouest): J'invoque le Règlement, monsieur le président. Pourrions-nous préciser que vous nous renvoyez bien à la deuxième section de votre mémoire? Les numéros de page ne se suivent pas du début à la fin.

M. How: En effet. À la page 124 de l'onglet 2, je dis:

Voilà ce que je tente d'éviter. Je suis donc d'accord en partie avec votre ami.

En outre, à la page 127 de l'onglet 2, je traite de ce que les tribunaux peuvent et devraient faire pour améliorer la pratique du droit de la famille. J'en parle au paragraphe 2(iii):

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Je suis donc d'accord avec lui. Il y a certainement des problèmes. La question que je me pose cependant est celle-ci: le fait d'ajouter plus de gens à cette procédure va-t-il atténuer le problème? Ma réponse est non.

Il a dit que tout le monde peut être entendu sauf les grands-parents. Je signale bien respectueusement que ce n'est pas vraiment le cas. On peut convoquer les grands-parents au même titre que n'importe quel autre témoin. Ils peuvent avoir voix au chapitre. S'il y a une grave injustice, s'il y a une irrégularité très grave, les grands-parents peuvent demander au tribunal l'autorisation de participer aux audiences.

Le problème, il faut bien l'admettre, c'est que des gens qui s'aimaient et qui cohabitaient ne décident de pas se séparer parce qu'ils sont encore heureux ou qu'ils s'aiment encore. Ils le font parce qu'il y a beaucoup d'hostilité dans le couple. Bien souvent l'un ou l'autre conjoint se sent rejeté et cela le met en colère. Il y a donc à ces audiences des gens qui sont déjà très troublés. Parfois, on ne peut pas en venir à un règlement. On ne peut pas satisfaire les deux conjoints. Même après le procès et après avoir dit tout le mal qu'ils peuvent l'un de l'autre, ils ne seront toujours pas satisfaits du résultat, peu importe la décision du juge. Le fait d'ajouter à cela...

Le président: Pourriez-vous être un peu plus bref? Mme Jennings a certainement d'autres questions à poser et son temps de parole est limité.

M. How: Merci, mais beaucoup de questions avaient été posées...

Le président: Je sais.

M. How: ...et j'essayais d'y répondre. Je ferai cependant ce que vous me demanderez.

Tout ce que je veux dire, c'est que le fait d'ajouter plus de gens à une procédure déjà terriblement confuse ne va pas aider les enfants ou qui que ce soit d'autre à mon avis.

Mme Jennings: Merci M. How, mais il me semble que cela dépend du genre de personens que nous voudrions ajouter.

M. How: Je suis bien d'accord. Vous connaissez sans doute beaucoup de gens très gentils et de bons grands-parents - j'en connais aussi et j'en suis heureux - mais il y en a beaucoup qui ne le sont pas. Ils peuvent être très gentils s'ils se conduisent bien. Il y en a beaucoup qui gardent la famille ensemble. Il y a cependant beaucoup de familles désunies et d'enfants qui n'ont jamais su quel était leur vrai foyer, par exemple. Bon nombre de cas que j'ai défendus et dont j'ai déjà parlé aujourd'hui sont des cas où l'intolérance religieuse est la motivation avouée des parties en cause.

C'est donc vrai, madame Jennings, que si vous faites affaire avec d'honnêtes gens, vous ne vous trouverez probablement pas dans une situation de ce genre, mais il faut reconnaître que les lois sont faites pour tout le monde. Il y en a qui sont des gens bien, mais il y en a beaucoup d'autres qui ne le sont pas.

Mme Jennings: Monsieur How, je vous signale que M. Culhane s'occupe d'une centaine de cas par année où des grands-parents sont en jeu. La plupart sont réglés à l'amiable. Cette année, 40 de ces cas sont allés devant le tribunal et il a eu gain de cause.

Je suis d'accord que ce n'est pas une solution que d'accroître le nombre de procès, mais selon moi, c'est exactement ce qui se passe maintenant vu que les grands-parents doivent intenter eux-mêmes des poursuites au lieu d'avoir déjà droit de parole devant le tribunal. Il faut entamer un nouveau litige; on a parfois un juge qui ne connaît pas toute l'affaire; cela coûte quelque chose au contribuable; on a une nouvelle salle de procès; et les parents doivent témoigner de nouveau. Cela veut dire beaucoup plus d'affaires devant les tribunaux que ce ne serait le cas si les grands-parents pouvaient être entendus au même moment que les autres.

Je voudrais savoir ce que vous en pensez.

M. How: S'ils ont une question grave à soulever, ils peuvent avoir l'autorisation du juge pour intervenir, mais s'ils veulent simplement pouvoir témoigner devant le tribunal n'importe quand et gaspiller le temps du tribunal pour promouvoir un point de vue qui est très souvent contraire à l'intérêt de l'enfant et qui est basé simplement sur la fierté familiale...

Je peux par exemple vous parler du cas d'un couple en instance de divorce dont je parlais dans la lettre que j'ai envoyée à votre comité. La mère était une jeune femme très bien et son mari était un trafiquant de drogues irréfléchi qui avait été un enfant gâté. Il venait d'une famille très riche et la fierté de ses parents ne pouvait pas permettre que la pauvre jeune mère ait la garde de l'enfant.

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Ces parents riches ont donc dépensé un quart de million de dollars pour faire tout un plat au sujet du fait que la jeune femme était témoin de Jéhovah. Ils n'aimaient pas sa religion. Ils étaient prêts à dépenser tout cet argent pour essayer d'obtenir que l'enfant soit confié à ce père irresponsable et criminel. Voilà ce que faisait les grands-parents. J'ai eu d'autres cas du même genre. Ce n'est qu'un exemple parmi bien d'autres.

C'est pour cela, madame Jennings, qu'il faut maintenir un certain équilibre. Ce qui peut sembler mauvais dans un cas peut être la bonne chose dans l'autre et il faut donc opter pour ce qui donnera le meilleur résultat dans la majorité des cas. Vous pouvez parler d'un cas où le résultat a été mauvais parce que les grands-parents ont dû obtenir une ordonnance du tribunal avant d'intervenir. Pourtant, il y a bien d'autres cas où l'intervention des grands-parents a causé beaucoup de tort. Les deux cas peuvent se présenter.

Tout ce que j'essaie de dire, c'est que les grands-parents peuvent intervenir devant le tribunal s'ils ont quelque chose d'important à dire, mais s'ils veulent simplement se mêler des affaires du tribunal, c'est une bonne chose qu'ils aient un obstacle à surmonter.

M. Gallaway (Sarnia - Lambton): Je vous remercie de votre exposé, monsieur How.

On nous a signalé presque de façon ex parte dans des lettres que nous avons reçues que ce projet de loi augmenterait dans certains cas le nombre de procès s'il était adopté. D'autres ne sont pas du même avis.

Vous avez vous-même affirmé que le projet de loi augmenterait le nombre de procès. Selon moi, si l'on veut ajouter des gens à ceux qui peuvent déjà intervenir, il est probable que plus de gens vont effectivement intervenir.

Pourtant, on nous a dit que certains États américains de même que la Grande-Bretagne, je pense, ont des lois qui ressemblent un peu à ce projet de loi-ci. Vous êtes-vous renseigné sur le nombre de procès à ces endroits? Je crois que vous avez fait allusion à une publication du Michigan. Avez-vous examiné ce qui se passe ailleurs?

M. How: Je ne l'ai pas fait pour vérifier cette situation-ci, mais j'ai l'impression que, dans la plupart des cas, la loi de ces États américains et de la Grande-Bretagne se rapproche du paragraphe 3 de la loi actuelle qui prévoit que les grands-parents peuvent intervenir dans certains cas. Si ni l'un ni l'autre des conjoints ne peut vraiment s'occuper de l'enfant, n'importe lequel tribunal de droit commun permettra aux grands-parents d'intervenir.

Il me semble cependant que le fait qu'ils soient obligés d'obtenir l'autorisation du tribunal sert de tampon pour éviter que les grands-parents ne fassent appel au tribunal simplement parce qu'ils se sont disputés avec leur bru, par exemple. Malheureusement, cela ne dérange pas les personnes très riches de dépenser leur argent pour des querelles purement personnelles.

Selon moi, la loi actuelle offre un très bon contrepoids. C'est mon avis. La loi n'empêche pas les grands-parents d'intervenir mais elle ne leur ouvre pas tout grand la porte.

M. Gallaway: Vous avez aussi parlé de l'intérêt de l'enfant. C'est un objectif tout à fait noble et louable.

M. How: Cela semble très bien.

M. Gallaway: Cela semble très bien, mais qui sait au juste en quoi cela consiste?

M. How: Personne.

M. Gallaway: D'après votre expérience, et je sais que vous avez plaidé bien des fois devant la Cour suprême, s'agit-il d'une norme tangible et objective ou bien est-ce quelque chose de tout à fait subjectif qui dépend d'où souffle le vent et du juge devant qui vous témoignez?

M. How: Et de ce qu'il a mangé hier soir. C'est tout à fait discrétionnaire. La loi ne dit rien là-dessus. La loi ne dit absolument rien à ce sujet et c'est tout à fait inadmissible.

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Je vous prie de vous reporter à la page 126 à l'onglet 2. J'y cite une ancienne cause de 1765. C'est juste au milieu de la page.

M. Regan: Pourquoi ne cite-t-on pas ce passage devant le tribunal?

Des voix: Oh, oh!

M. How: Monsieur Gallaway, ce n'est pas très flatteur pour les juges, mais cela montre ce qui peut se passer. C'est effectivement ce qui est arrivé dans certains des cas dont je pourrais vous parler. Je peux vous en donner des exemples.

Le fait est que, si l'on veut éliminer une partie de ces bêtises, et je pèse mes mots en disant cela parce que, dans bien des cas, ce sont souvent des bêtises, il faut établir certaines règles. Nous avons quelque chose comme 1 000 ou 1 500 juges au Canada et s'ils se fondent pour rendre leurs décisions simplement sur leur état d'esprit ce matin-là, la loi cessera d'exister. Les avocats ne pourraient plus décider ce qui est le facteur primordial. Sinon, ils pourraient régler un plus grand nombre de ces questions.

L'expression «l'intérêt de l'enfant» n'a aucune valeur réelle. Je peux vous citer une déclaration de Rosalie Abella, qui est maintenant juge de la Cour suprême du Canada. Il s'agit d'une déclaration qu'elle avait faite et que je cite à la page 15 de mon mémoire, au début. C'est tiré d'un ouvrage sur le droit de la famille en Ontario. Je vais vous lire le plus important:

Cela résume très bien ce que doit être la loi. Si c'est tout à fait discrétionnaire, elle ne sert à rien; ce n'est plus une loi du tout. N'importe qui peut l'interpréter à sa façon.

Je pourrais me reporter ici à l'affaire Young et D.P. que j'ai plaidée devant la Cour suprême. Nous en avons déjà discuté, mais le passage que je vais citer ne figure pas dans mon texte parce qu'il était déjà trop long. Il est tiré du volume 49 du Report and Family Law, troisième édition, page 133. Il s'agit d'un article de James McLeod, auteur bien connu sur cette question. Voici ce qu'il a dit au sujet de ces deux décisions de la Cour suprême: ces deux décisions sont pour ainsi dire incompatibles.

La Cour suprême elle-même peut donc avoir des idées divergentes et rendre deux décisions tout à fait contradictoires sur la même question et le même jour.

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Voilà la gravité du problème. Je peux vous donner la solution. C'est ce que j'avais proposé à la Cour suprême pendant mon plaidoyer: Il est temps que vous établissiez certaines règles pour déterminer ce qu'est «l'intérêt de l'enfant». Il peut être question de ce qui est bon pour la santé, du châtiment corporel et des choses de cette nature. Ce n'est pas au juge de donner son avis là-dessus.

Voyez ce qu'on dit les juges à propos des affaires que j'ai plaidées. Il y a eu l'affaire Young en Colombie-Britannique. Madame le juge Proudfoot avait dit qu'il fallait empêcher cet homme d'enseigner ce qu'il enseignait. C'était une chose que madame Proudfoot réprouvait et elle lui avait donc interdit de parler de sa religion à sa famille.

L'affaire s'est rendue à la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. La Cour d'appel a jugé que la décision était scandaleuse et que le juge n'aurait jamais dû rendre une telle ordonnance. La décision a donc été annulée. La Cour suprême a maintenu la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique.

Il y a donc des différences énormes. Une décision peut aller complètement dans un sens et une autre dans le sens inverse. S'il y a deux avocats qui examinent un problème, comment vont-ils pouvoir jamais trouver des terrains d'entente?

C'est ce qu'on devrait faire. Les affaires de ce genre ne devraient pas être jugées devant les tribunaux. Quand il y a un procès dans de tels cas, tout le monde est perdant.

M. Gallaway: Selon vous, dans quelle mesure le projet de loi change-t-il la perception traditionnelle du rôle d'un parent?

M. How: Je l'ai déjà dit. Le projet de loi ne ferait que permettre davantage d'interventions par des tierces parties sans même que celles-ci soient obligées de prouver à un juge que cette intervention est utile.

N'importe qui peut intervenir devant le tribunal s'il peu t convaincre le juge que c'est utile. Dans certains cas, les grands-parents devraient pouvoir intervenir, alors que dans d'autres, la seule motivation est la fierté de la famille ou quelque chose du genre plutôt que le bien-être de l'enfant. C'est ce que je trouve très troublant. À mon avis, la loi actuelle constitue un obstacle utile dans le cas d'interventions frivoles et indéfendables.

M. Gallaway: Très bien, merci.

Le président: Monsieur Ramsay ou madame Jennings.

M. Ramsay: Merci, monsieur le président.

Je suis tout à fait d'accord sur ce que vous avez dit au sujet de la discrétion permettant de déterminer ce qui constitue l'intérêt de l'enfant et des dangers de cette discrétion. Pourtant, vous voudriez que le juge continue d'user de sa discrétion pour décider s'il doit ou non accepter la demande d'un grand-parent qui veut être reconnu par un tribunal. Vous dites que le juge doit conserver ce pouvoir discrétionnaire alors que vous critiquez les décisions discrétionnaires.

Je ne comprends pas très bien votre raisonnement. Il me semble que ce pouvoir discrétionnaire n'est pas toujours utilisé de la même façon. Ce n'est peut-être pas une bonne interprétation, mais je voudrais que vous m'expliquiez.

D'une part, il me semble que vous avez très bien expliqué le tort que peut causer le pouvoir discrétionnaire du tribunal. D'autre part, vous dites que le juge doit conserver ce même pouvoir discrétionnaire lui permettant d'accepter ou de rejeter les demandes présentées par les grands-parents aux termes de la loi actuelle sur le divorce. La demande sera acceptée uniquement si le juge décide...

M. How: Puis-je vous répondre?

M. Ramsay: Laissez-moi terminer. Par ailleurs, la modification à la loi enlèverait ce pouvoir discrétionnaire au juge et permettrait aux grands-parents d'être reconnus par le tribunal, ce qui, bien sûr, supprimerait le pouvoir discrétionnaire dont vous avez parlé.

.1020

Sachez, bien sûr, que quand j'ai examiné cet amendement, j'ai constaté que le juge a toujours le dernier mot quant aux arguments que les grands-parents peuvent lui présenter quand ils comparaissent au tribunal dans une affaire de droit d'accès, de visite ou de garde.

Pourriez-vous nous en parler?

M. How: Oui.

M. Ramsay: J'aimerais vous poser une ou deux questions.

M. How: Très bien.

Voici ce qui en est: c'est un problème d'équilibre entre un pouvoir discrétionnaire illimité et un pouvoir discrétionnaire limité. Ce dernier signifie que son exercice est assujetti à l'application de directives données; le pouvoir discrétionnaires illimité signifie qu'on peut aller dans n'importe quel sens et faire ce qu'on veut.

Les juges connaissent très bien le principe qui consiste à déterminer si une personne a un intérêt défendable qui justifierait qu'elle intervienne dans une affaire, qu'elle soit représentée et qu'elle fasse partie du procès. Pour en décider on peut appliquer de nombreuses règles et de nombreux principes juridiques. Il s'agit donc d'exercer un pouvoir discrétionnaire limité.

Ce que je ne peux pas accepter quand on invoque l'intérêt de l'enfant c'est qu'on fait appel à un pouvoir discrétionnaire tout à fait illimité, ce qui va vraiment à l'encontre du droit constitutionnel.

Prenons la célèbre affaire Roncareli, où le juge Rand avait à l'époque jugé qu'il n'existait en droit aucun pouvoir discrétionnaire illimité. C'est valable pour le droit bien conçu, mais la Cour suprême, dans ses deux dernières affaires, a malmené la loi. Quand les tribunaux s'égarent, les législateurs peuvent y remédier. C'est la distinction entre ces deux situations.

On peut prévoir des freins à l'exercice du pouvoir discrétionnaire, conformément aux principes I énoncés à la fin de l'onglet 2. Établissons-les et définissons les règles. Ensuite, demandons que les juges de première instance énoncent les règles sur lesquelles ils s'appuient.

Actuellement, ils se contentent de dire qu'ils prennent une ordonnance en tenant compte de l'intérêt de l'enfant. Sur quoi s'appuient-ils? Personne ne le sait.

Quand on s'adresse à la Cour d'appel, on dit qu'il a été question de l'intérêt de l'enfant. C'est tout. On ne peut rien invoquer.

Franchement, c'est devenu de l'anarchie, non plus du droit. C'est pourquoi j'ai dit à la Cour suprême - et je vous le dis à vous, gens éclairés - il est temps d'établir des règles et de leurs donner du poids. Je sais que cela a l'air bien gentil de parler de l'intérêt de l'enfant, mais on fait perdre temps et argent aux intéressés.

M. Ramsay: Une autre question?

Le président: D'accord, allez-y.

M. Ramsay: Je remercie le président, parce que c'est une sous-question, et dans cinq ou dix minutes, il aura été trop tard pour la poser.

Si je comprends bien la Loi sur le divorce, le juge a le pouvoir discrétionnaire de dire aux grands-parents qu'il a examiné leur demande, mais qu'il les déboute, si bien que ni l'un ni l'autre des grands-parents comparaissant devant ce juge n'obtiendra le moindre droit d'accès étant donné que le juge a le pouvoir discrétionnaire de le refuser. C'est ce dont je vais parler maintenant.

Aux termes du présent projet de loi, le pouvoir discrétionnaire serait supprimé. Les grands-parents auraient un droit qu'ils n'avaient pas auparavant en raison du pouvoir discrétionnaire.

Vous n'avez pas bien fait ressortir, à mon avis - et je le dis bien respectueusement - la contradiction que semble contenir votre raisonnement au sujet du pouvoir discrétionnaire qui s'applique dans le cas de l'intérêt de l'enfant et dont vous dites qu'il n'existe pas dans cet autre cas. Je regrette, mais vous ne m'avez pas convaincu.

Je ne suis pas féru de droit. C'est peut-être ce qu'il faudrait pour saisir votre raisonnement, mais ça n'a rien donné avec moi.

Je vous remercie, monsieur le président.

M. How: Je regrette si je n'ai pas pu vous convaincre, mais il y a aussi de nombreux juges que je n'ai pas convaincus, et c'est pourquoi il ne faut pas trop s'en faire.

Le président: Madame Phinney, vous avez cinq minutes.

Mme Phinney (Hamilton Mountain): Merci, monsieur le président.

Le Québec a une loi du Code civil qui en somme interdit qu'on refuse arbitrairement aux grands-parents de voir leurs petits-enfants.

Pourriez-vous nous en parler, et nous dire si vous pensez que toutes les provinces devraient avoir aussi un...

.1035

M. How: On ne devrait rien faire d'arbitraire. Si des juges agissent parfois arbitrairement, quelqu'un doit prendre une décision.

Oui, ils ont le droit d'être là. J'ai oublié le libellé. Avez-vous le libellé de cet article? Je n'ai pas le document en main.

Je fais partie du Barreau du Québec, mais je n'ai pas toutes les lois en mémoire.

Mme Phinney: C'est juste ici. Jack l'a.

M. Ramsay: À l'article dont nous parlons:

M. How: Oui, je n'ai pas d'objections à cela. Il faut donc s'adresser au tribunal. Si vous le faites, quelqu'un décidera s'il y a ou non motif grave. C'est un peu comme ce qui se passe dans le cas où un juge rend une ordonnance.

Il me semble que c'est tout à fait la même chose: il faut qu'il y ait des motifs graves pour faire obstacle aux relations des enfants avec leurs grands-parents. Je n'y vois aucune véritable différence, sans vouloir vous contredire.

Autrement dit, s'il y a de bonnes raisons pour que les grands-parents continuent d'avoir des relations personnelles avec leurs petits-enfants, alors bien sûr les grands-parents devraient le faire, mais s'il n'y a pas de bonnes raisons à cela ou s'il existe des motifs graves - ce n'est que le revers de la médaille - alors ils ont quelque chose à prouver pour contourner l'opposition des parents. Je ne vois pas de grande différence entre ces deux propositions.

Mme Phinney: Ce n'est pas vraiment ce que je demandais, mais plutôt si vous pensez que toutes les provinces devraient avoir une mesure semblable?

M. How: Que cette mesure se trouve dans la législation fédérale ou provinciale, ce pouvoir sur les familles est à double tranchant. Je n'ai pas vérifié les lois de toutes les provinces, je n'examine que cette proposition. Comme je l'ai expliqué, je ne pense pas que ce soit nécessaire.

Mme Phinney: Dans vos observations à la page 5 de l'introduction vous dites que le pouvoir discrétionnaire illimité a entraîné une discrimination religieuse. Vous vous prononcez brièvement là-dessus. Pourriez-vous expliquer ce que vous entendez par là.

M. How: Oui, avec plaisir. C'est quelque chose qui a trait à l'affaire Young c. Young. La mère s'est présentée au tribunal en disant qu'elle était intolérante et elle a exigé qu'on interdise à son mari de parler de sa religion aux enfants. Elle invoquait donc son intolérance.

Je vous renvoie à l'onglet 2. J'ai cité certains des jugements pour montrer les vues diamétralement opposées des juges.

Le juge de première instance était le juge Proudfoot. Avec tout le respect que je lui dois, c'est une dame qui semble parfois se présenter au tribunal avec une idée toute faite avant même que le procès ne commence. Pire encore, quand les avocats maintiennent leur désaccord avec elle, elle le prend comme un affront personnel.

En l'occurrence, à la clôture du dossier, elle m'a débouté et elle a aussi dit que je devrais être condamné aux dépens, soit une petite somme de 50 000$. Je m'en serais fait si elle n'avait pas déjà agi de la même manière avec trois autres avocats et de toute façon la Cour d'appel a renversé tous ces jugements.

Voici l'ordonnance qu'elle avait prise. Ce n'était pas une ordonnance à caractère juridique; c'était une ordonnance à caractère religieux:

Rappelez-vous, c'est la demanderesse qui a elle-même fait état de son intolérance.

Donc il ne pouvait pas leur en parler et ne pouvait pas les emmener à l'église avec lui.

Le juge a conclu qu'il:

.1030

Il ne pouvait même être question de la religion du père.

Au bas de la page se trouve une décision du juge Wood de la Cour d'appel. Il examinait les protections que confère la Charte. Il y a le droit au libre exercice de la religion. Si on ne peut pas parler à ses enfants, quelle liberté a-t-on?

Après avoir discuté de la Charte, il dit:

Quand la Cour suprême du Canada a été saisie de cette affaire, elle a maintenu le jugement de la Cour d'appel, mais à quatre contre trois.

Est-ce plus clair ou moins clair?

Mme Phinney: Je ne vois pas comment cela concerne les grands-parents - mais mon temps est écoulé.

Le président: Je regrette, mais nous avons déjà bien dépassé le temps prévu pour ce tour de table de 5 minutes.

[Français]

Madame Venne, avez-vous des questions à poser?

Mme Venne (Saint-Hubert): Comme j'ai été malheureusement retardée sur la route, je vais prendre connaissance du mémoire. Je remercie le témoin d'être venu.

[Traduction]

Mme Jennings: Monsieur How, certaines choses que vous avez dites me préoccupent, surtout à propos du pouvoir discrétionnaire des juges. Ce n'est peut-être pas un système idéal. Mais c'est celui que nous avons, et nous faisons constamment appel au pouvoir discrétionnaire des juges.

Vous avez dit qu'il y aura d'innombrables grands-parents qui s'adresseront au tribunal si le projet de loi C-232 est adopté. Ce n'est pas du tout le cas. Ce sera sans doute comme les choses se passent maintenant, à savoir que cela n'intéressera que ceux qui n'ont pas de droit de visite continu. Après un divorce, de nombreux parents souhaitent effectivement que les grands-parents paternels et maternels continuent de voir les enfants. C'est important, et ils y veillent déjà. Nous en avons la preuve.

En outre, M. Langlois, avocat qui pratique au Québec, a signalé ici il y a deux semaines qu'à sa connaissance, il n'y a pas plus de litiges au Québec depuis que la loi oblige les parents à ne pas faire obstacle au désir des grands-parents de voir leurs petits-enfants. Je voulais donc m'assurer que tout était très clair en ce qui concerne ces préoccupations.

J'aimerais aussi dire que selon M. Culhane, ce qui intéresse le plus un grand-parent c'est de veiller à l'intérêt de l'enfant, et cela ne se fait habituellement pas rapidement. Ils ne sont pas impatients de se présenter devant un tribunal. Personne n'aime les procès. Malheureusement, avec l'augmentation du nombre de familles désunies, le rôle des grands-parents en tant qu'élément stabilisateur et soutien continu ne cesse d'augmenter. Dans toutes les disputes concernant les enfants, le mariage et le divorce, les grands-parents sont presque les seuls, mis à part les parents, qui sont prêts à assumer la tâche qui consiste à s'occuper effectivement des enfants.

Que répondez-vous à M. Culhane, qui dit:

Que répondez-vous à M. Culhane à ce sujet?

M. How: Avec tout le respect que je lui dois, il fait erreur; c'est tout. C'est une différence de vue, il peut avoir une opinion différente. Mais soyons réalistes. Il simplifie à outrance. Ce peut être bon. Ce peut être mauvais. Je ne pense pas que le monde s'arrêtera pour autant.

C'est donc votre opinion. J'ai essayé d'expliquer et d'exposer, d'après mon expérience, divers litiges qui n'ont rien donné. Au Québec, on laisse la responsabilité aux grands-parents de démontrer qu'il faut pouvoir invoquer contre eux des motifs graves. Je pense qu'il en est de même dans les provinces de common law. C'est la même chose. Je ne vois pas une grande différence.

.1035

S'il n'y a pas d'autres questions, j'aimerais parler...

Mme Jennings: Oui, il y a d'autres questions, monsieur How. En fait, je dois dire à l'instar de M. Ramsay que vous ne m'avez pas non plus du tout convaincue.

Vous avez parlé de l'intérêt de l'enfant. Je vous dirais que l'ONU sait sans doute ce qui en est de l'intérêt de l'enfant pour avoir unaniment appuyé la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant qui dispose qu'ils doivent avoir accès à leur famille.

Cette question m'intéresse vraiment, parce qu'on répète sans cesse que les grands-parents risquent de s'en mêler et d'entreprendre toutes ces démarches.

Je vous dirais que, dans la majorité des cas, les grands-parents sont de bonnes et généreuses personnes. On mentionne toujours des cas qui, à mon avis, ne représentent qu'une faible proportion. J'ai été dans tout le Canada. J'ai parlé à des grands-parents. Je suis très préoccupée par le fait qu'on ne présente pas les choses sous leur vrai jour, à mon avis.

M. How: Je n'essaie pas du tout de présenter les choses sous un faux jour. La plupart des grands-parents sont de bonnes personnes, j'en conviens. La plupart des grands-parents n'ont pas à s'adresser aux tribunaux. La plupart des familles ne connaissent pas ce genre de dispute.

Il arrive cependant que le problème se pose. Je pense que c'est une protection utile parce que j'ai eu connaissance de différents cas où les grands-parents se sont montrés utiles et d'autres où ils n'ont fait que compliquer les choses. Il y a des deux. Je ne crois pas que le monde s'arrêtera quoi qu'on décide. Je pense que la loi, telle qu'elle est, suffit.

Mme Jennings: Voulez-vous répondre à ma question au sujet des Nations Unies - et du Canada - qui reconnaisent que l'enfant a le droit d'avoir accès à sa famille?

M. How: Oui, je le pense. Je ne le conteste pas. Je veux que les familles soient unies. Ce que je fais valoir, c'est que ce n'est souvent pas une bonne chose que ces questions aboutissent devant les tribunaux et ce n'est pas une pratique que je veux encourager.

C'est mon avis. Il y a là quelque chose de très nuisible. Qu'on l'intègre ou non, je ne pense pas que cela change vraiment les choses. Nous nous montrons trop procéduriers, au lieu d'essayer de nous occuper des gens et de les aider à garder leur famille intact.

J'ai ici un livre où l'on parle des choses qu'on pourrait faire si l'on consacrait plus de temps à aider les gens à rester ensemble. Il s'intitule Making Your Family Life Happy. C'est le genre de chose que le gouvernement devrait diffuser.

Si nous aidions les gens à rester ensemble, on s'épargnerait bien des misères à long terme. Ils seraient plus heureux s'ils restaient ensemble et se donnaient la peine de régler leurs difficultés, au lieu de jeter l'éponge à la première occasion.

Une femme est venue un jour demander le divorce. Je lui ai posé quelques questions. Elle et son mari s'étaient disputés à la noce et avaient rompu. Elle demandait maintenant le divorce. Le mariage n'avait même pas été consommé.

Il y a pas mal de gens bizarres de nos jours. J'essaie de maintenir le juste milieu.

Je pense avoir dit tout ce que j'avais à dire sur cette question, mais j'aimerais ajouter quelque chose pendant que j'y suis...

Le président: Cela a-t-il trait à la question, monsieur How?

M. How: Non, pas à cette question, mais...

Le président: Nous empiétons déjà sur le temps de parole de ceux qui ont des questions à poser.

M. How: Très bien.

Le président: C'est un problème, parce que nous avons effectivement encore des gens sur la liste. Peut-être que s'ils peuvent poser leurs questions, celles-ci aborderont ce que vous voulez dire.

M. How: C'est bien.

Le président: Madame Skoke, vous avez cinq minutes.

Mme Skoke (Central Nova): Merci, monsieur How. Je représente Central Nova.

Je prends certainement bonne note de vos observations. Pour ma part, vous avez réussi à me convaincre.

M. How: Je suis heureux d'avoir convaincu quelqu'un.

Mme Skoke: Pourriez-vous dire, pour les fins du compte rendu, de quelles affaires vous vous êtes occupé, en ce qui concerne la Cour suprême du Canada? Ai-je raison de dire que c'était l'affaire Young c. Young et D.P. c. C.S.?

M. How: C'est juste. Ce sont les deux affaires en question. Ce sont les deux dernières décisions de la Cour suprême sur cette question.

Mme Skoke: Vous avez dit que dans ces deux affaires les décisions étaient contradictoires, mais je pense que vous avez parlé de la loi qui a été «malmenée».

M. How: Oui.

Mme Skoke: Pouvez-vous me dire brièvement comment la loi a été malmenée?

.1050

M. How: Très bien. D'abord, puis-je vous renvoyer rapidement aux observations de certains des légistes? Voyez l'onglet 2 à la page 110, la seconde page. On dit ceci:

D'autres observations ont été faites à ce sujet. J'ai parlé de l'observation de M. McLeod selon laquelle ces deux jugements étaients incompatibles.

Mme Skoke: J'ai lu les observations de M. McLeod. En fait, je les ai utilisées dans un litige dont je me suis occupée.

Que pouvez-vous nous dire au sujet de la pratique de la Cour suprême du Canada à l'égard des dépens dans les contestations concernant la Charte? Si quelqu'un entamait une contestation concernant la Charte, comme vos clients l'ont fait en l'occurrence, quels frais en découlent-ils, et dans quelle mesure la Cour suprême du Canada est-elle disposée ou non à accorder les dépens?

M. How: Je n'ai pas eu connaissance de beaucoup de plaintes au sujet de l'attribution des dépens. Le juge de première instance a demandé que je paie les dépens, bien sûr, mais la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a renversé sa décision et la Cour suprême lui a donné raison.

Mme le juge L'Heureux-Dubé tenait encore à ce que je paie tous les dépens. C'est sa responsabilité. Mais je vais être bien franc: le jugement de Mme le juge L'Heureux-Dubé va dans tous les sens. On peut y trouver tout ce qu'on cherche. C'est vraiment un jugement qui ne tranche rien. Il maintient ces pouvoirs discrétionnaires absolus et illimités.

C'est pourquoi j'ai essayé de faire en sorte que la Cour suprême - certains étaient d'accord avec moi - fixe certaines règles.

J'ai énoncé certaines règles pour les fins de mon mémoire, au début, et aussi dans cet article que j'ai écrit à ce sujet.

Mme Skoke: Au sujet du pouvoir discrétionnaire illimité du juge dont vous parlez, surtout en ce qui a trait à la définition de l'intérêt de l'enfant, quelle contestation, le cas échéant, avez-vous entamée eu égard à la compétence du tribunal? Était-ce une contestation concernant la Charte? Comment avez-vous...

M. How: C'était une contestation ayant trait à la Charte. J'ai contesté le fait qu'on invoque l'intérêt de l'enfant. J'ai dit que ce n'était pas du tout conforme au droit.

Ce qu'on écrit tous les légistes confirment ce que j'ai eu à dire. L'un d'eux est Jeffrey Wilson. Voyez l'onglet 2 au bas de la première page, la page 109. C'est quelqu'un de très compétent dans ce domaine. Il dit que si ces jugements sont ce qu'on peut obtenir de mieux sur le plan du droit, les membres de la profession ont le devoir d'y mettre fin et de proposer un système améliorant la situation.

Le juge Goerge Walsh, qui est l'une des sommités dans ce domaine, a dit essentiellement la même chose. Vous le verrez à la page 125 de l'onglet 2. Voilà la confusion dont je parle. Le juge Walsh a parlé de l'avenir du droit de la famille. Qu'allait-il en advenir?

.1045

Il est de l'école conservatrice, c'est un penseur très réfléchi. Et il est réaliste: C'est bien ainsi.

Le pire, c'est que la famille moyenne a déjà suffisamment de mal à joindre les deux bouts quand elle est intacte. En cas de séparation, deux maisonnées différentes essaient de se tirer d'affaire avec le même revenu. Il y a donc vraiment des problèmes, et les enfants en souffrent réellement.

Mme Skoke: Malheureusement, je n'ai plus de temps. Nous devrons en reparler plus tard.

M. How: Je serai ravi qu'on en reparle.

M. Ramsay: J'aimerais aborder un point qu'a soulevé Mme Venne.

À propos de l'article 611 du Code civil du Québec, on envisage le fardeau de la preuve sous un autre angle. Dans cet article, le fardeau de la preuve revient à la personne qui veut refuser aux grands-parents le droit de voir l'enfant.

Mais dans cet autre article, on inverse à toutes fins utiles le fardeau de la preuve en ce sens que le fardeau de la preuve n'est pas le même que dans le cas de l'amendement proposé par le projet de loi C-232. Dans cet amendement, les grands-parents auraient le droit de présenter leur demande au tribunal. C'est, bien sûr, ce que nous cherchons.

Actuellement, la loi sur le divorce ne reconnaît pas ce droit. C'est aux grands-parents qu'il revient de présenter une demande au tribunal. Nous nous en remettons encore au pouvoir discrétionnaire du juge, à savoir s'il veut ou non entendre les grands-parents, compte tenu de leur demande.

Mais à l'article 611, le droit des grands-parents est reconnu. Les seuls cas où les grands-parents peuvent se voir refuser l'accès à leurs petits enfants sont ceux où quelqu'un fait valoir un motif accepté par les tribunaux.

Pouvez-vous nous en parler? Quand vous avez répondu à la question de Mme Venne, ce n'était pas très clair. J'aimerais que vous insistiez sur l'oglibation de justification.

M. How: De quelle question s'agit-il?

M. Ramsay: Selon l'article 611, les grands-parents ont des droits qui ne peuvent pas être niés, à moins que quelqu'un invoque des motifs graves. Et d'autre part, vous essayez de nier aux grands-parents le droit de faire appel au tribunal. C'est ce à quoi vous vous opposez. Vous vous opposez à ce que les grands-parents se voient reconnaître un droit sans avoir à présenter d'abord de demande.

M. How: Avec l'article 611, comment cela aboutirait-il devant un tribunal? Autrement dit:

C'est un principe de droit. Mais il faudrait qu'il y ait obstacle. Ils devraient se présenter au tribunal pour prouver en premier lieu qu'il y a eu obstacle, n'est-ce pas?

M. Ramsay: Donc cela protège le droit des grands-parents.

M. How: Un instant. Imaginez un peu...

M. Ramsay: N'est-ce pas?

M. How: Voyons les choses concrètement. Ils doivent s'adresser à un tribunal d'abord. Les grands-parents devraient s'adresser à un tribunal et prouver d'abord et avant tout qu'on a fait obstacle à leurs relations personnelles avec leur petit-enfant. N'est-ce pas?

M. Ramsay: Je ne sais pas s'il en serait ainsi.

M. How: Sans vouloir vous contredire, c'est le cas.

Puis, s'ils démontrent qu'on fait obstacle aux relations personnelles de l'enfant avec ses grands-parents, qu'il s'agisse des parents ou de quiconque s'oppose à la poursuite des relations, une fois qu'il est établi qu'il y a obstacle, il reviendrait à la partie adverse de soit permettre ces relations, soit de montrer qu'il a un motif grave pour s'y opposer. Dans les deux cas, il faut donc s'adresser aux tribunaux et les juges doivent trouver un juste équilibre entre les intérêts des deux parties et des enfants.

.1050

Je ne vois pas vraiment beaucoup de différence.

Le président: Mme Torsney posera la dernière question.

Mme Torsney (Burlington): Elle concerne aussi le Code civil et l'article 611.

Puisque la Charte des Nations Unies a été évoquée, j'aimerais dire que j'ose espérer queMme Jennings sera membre de notre comité lorsque nous étudierons la Loi sur les jeunes contrevenants. Le Parti réformiste veut voir les jeunes de moins de 18 ans dans des prisons pour adultes, ce qui bien entendu est contraire à cette charte.

L'article 611 du Code civil s'applique à tous les aspects des relations avec les enfants et les petits-enfants, sauf dans les cas de divorce puisque la Loi sur le divorce est une loi fédérale et cet article concerne d'autres lois. Pourriez-vous nous en dire un peu sur ceci, s'il vous plaît.

M. How: Vous venez justement de le dire. La Loi sur le divorce est une loi fédérale mais ces dispositions du Code civil sont là car un divorce peut être accordé en vertu d'une loi relevant du droit civil.

M. Carbonneau connaît mieux que moi le droit civil. Voudriez-vous lui permettre de dire un ou deux mots sur l'article 611?

Mme Torsney: Certainement.

[Français]

Me André Carbonneau (avocat, W. Glen How & Associates): L'article 611 existe dans le contexte du Code civil du Québec où on a déjà défini l'autorité parentale. Les grands-parents ne sont pas investis de l'autorité parentale, mais ils ont un droit d'accès.

Le projet de loi met les grands-parents et les parents sur un pied d'égalité. Ce pourrait donc être interprété comme les mettant sur le même pied pour ce qui est de l'accès à l'enfant et de son instruction. Je fais référence au paragraphe 16(5) proposé où on dit:

Donc, ce projet de loi élève le grand-parent au même niveau d'autorité parentale que les deux parents. Cette disposition dérange les juristes. On compare des pommes et des oranges lorsqu'on prend le Code civil et qu'on isole l'article qui donne aux grands-parents l'accès à l'enfant sans comprendre qu'il exclut l'autorité parentale. Ce sont deux notions différentes.

[Traduction]

Dans la loi québécoise, les grands-parents ont accès à leurs petits-enfants mais ils n'ont pas l'autorité parentale. Les parents n'ont pas le droit de faire obstacle aux relations personnelles entre les grands-parents et leurs petits-enfants. Il revient aux grands-parents de dire qu'on leur refuse de voir leurs petits-enfants mais ils ne comparaissent devant les tribunaux avec une quelconque autorité parentale.

Le projet de loi C-232 semble leur donner l'autorité parentale. Je crois que c'est là que se situe le problème.

Mme Torsney: N'est-il pas également vrai que l'article 611 gouverne les actions des parents et des grands-parents que la famille soit intacte ou divorcée, alors que ce projet de loi ne propose de changements qu'en cas de famille divorcée? Dans les cas où les personnes sont toujours mariées, même avec cet amendement les grands-parents pourraient toujours ne pas avoir accès à leurs petits-enfants. Ce projet de loi ne couvre toujours pas cette circonstance.

M. Carbonneau: Exactement.

Mme Torsney: Vous vouliez dire quelque chose tout à l'heure et vous n'avez pas pu le faire?

M. How: Merci.

Je voulais parler des conséquences de ces affaires dans lesquelles des décisions de contraintes religieuses avaient été prises par des juges parce qu'ils désapprouvaient la religion des gens. C'est une atteinte à la Charte mais au Québec c'est une pratique courante. La Cour d'appel du Québec - j'ai comparu devant elle dans cinq affaires différentes - restreint systématiquement les droits des Témoins de Jéhovah. Les décisions ne sont plus toujours unanimes mais ces ordonnances de restriction continuent d'être systématiques. C'est tout à fait injuste, mais ce sont uniquement les Témoins de Jéhovah qui sont les victimes de ce genre d'abus.

.1055

Permettez-moi de vous référer à la page 124 de la deuxième partie de notre document. Il s'agit de commentaires de John Syrtash, légiste qui a écrit un livre sur la religion et la culture dans la famille canadienne. Il montre bien la réalité:

C'est pourtant ce qu'ils font.

Mme Torsney: C'est un commentaire très intéressant. En fait, je crois que c'est M. Ramsay qui l'autre jour a dit qu'il ne voudrait pas que ces parents influent sur la religion de ses enfants.

M. How: Oui, je suis d'accord, et il faut faire valoir ce point ici. Quand on fixe des règles, il faut... à la page 126 de la deuxième partie, je dis qu'il faut:

Dans plusieurs de ces affaires - et je donne des références - les juges de la Cour d'appel ont ignoré les témoignages et ont mis en avant leur propre vue sur la religion. Ils ont tout à fait le droit d'avoir leur propre opinion, mais rien ne les autorise à rendre des ordonnances obligeant un enfant à devenir catholique romain. Mais c'est exactement ce qui se passe et c'est...

Le président: Il nous reste environ une minute. Merci, monsieur How et monsieur Carbonneau, d'être venus aujourd'hui nous faire part de vos vues sur ce projet de loi. Je suis certain qu'il sera tenu compte de tout ce que vous nous avez dit aujourd'hui quand nous prendrons notre décision.

Il y a une dernière question que j'aimerais régler, madame Jennings, au sujet de témoins supplémentaires dont nous avons déjà parlé tout à l'heure. Nous avons été saisi d'un projet de loi sur la protection des témoins et il faut que nous nous en occupions. C'est le comité directeur qui prendra la décision, mais y aurait-il un problème à ce que nous entendions ces témoins - si le comité directeur décide d'en entendre d'autres - après les audiences consacrées au projet de loi sur la protection des témoins?

Mme Jennings: Combien de temps cela prendra-t-il?

Le président: Je ne suis pas sûr. À peu près une semaine.

Mme Jennings: À peu près une semaine? Je suppose...

Le président: Peut-être même deux. Cela ne devrait pas être très long mais nous allons passer au projet de loi sur la protection des témoins et le comité directeur décidera de l'opportunité d'entendre d'autres témoins.

Mme Jennings: Merci, monsieur Bodnar. C'est essentiel. Encore une fois, marraine de ce projet de loi, j'insiste sur le principe de les entendre. Je suis par conséquent d'accord avec vous - une ou deux semaines.

Le président: Merci.

M. How: Pourrais-je ajouter une dernière chose? J'ai écrit un chapitre sur ce sujet des conflits en matière de religion, de garde et d'accès dans le livre de M. McLeod. Je n'en avais de copie tout à l'heure mais j'en ai maintenant. C'est un sujet que vous devriez étudier avant de prendre votre décision et j'aimerais donc vous les laisser. Vous pouvez soit les distribuer...

.1100

Le président: Merci beaucoup, monsieur How. Le greffier les distribuera à tous les membres du comité.

Merci. La séance est levée.

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