[Enregistrement électronique]
Le jeudi 2 novembre 1995
[Traduction]
Le président: Certains d'entre nous sont là et d'autres ne vont pas tarder à arriver. Certains mettent plus longtemps que d'autres à souper ce soir. Enfin, nous sommes de retour. Pouvez-vous m'entendre dans votre belle province de Colombie-Britannique?
M. Philip Eidsvik (Pacific Fisherman Alliance, Vancouver): Oui, il fait beau et je vous entends bien.
Le président: Vous m'entendez? Parfait. Comment allez-vous?
M. Eidsvik: Je vais bien.
Le président: Vous remplacez Paddy, ce soir, n'est-ce pas?
M. Eidsvik: Oui, Paddy est retenu à Prince Rupert. Il m'a dit: «Phil, je vais te dire ce qu'il faut dire, et tu iras le dire à ma place». J'ai répondu que je le ferais avec plaisir.
Le président: Phil, il vous a peut-être dit ce qu'il fallait dire à son avis mais je suis sûr que vous allez de toute façon dire ce que vous aurez envie de dire.
M. Eidsvik: C'est seulement une rumeur.
Le président: D'accord. Phil Eidsvik de la Pacific Fisherman Alliance est notre premier témoin ce soir et il se trouve dans la belle ville de Vancouver. Avant de commencer, est-ce qu'il pleut là-bas?
M. Eidsvik: Non, je vous ai dit que c'était une journée magnifique. Nous avons du soleil, c'est le paradis. Vous vous êtes trompé de ville.
Le président: Je sais que les deux côtes sont des paradis. Vous savez, je pense qu'il fait aussi 75 ou 80 beaux degrés à Halifax en ce moment.
Allez, trêve de fanfaronnades. Pourquoi ne pas commencer. Vous savez que nous examinons le projet de loi C-98, la Loi sur les océans. Il nous a été envoyé après la deuxième lecture et nous essayons de savoir ce qu'en pensent les différents groupes concernés, s'ils trouvent que c'est un bon projet de loi ou pas. Est-ce un bon projet de loi «mais»? S'il y a des «mais», que devons-nous faire, d'après vous, pour l'améliorer?
Cela étant dit, je vous donne maintenant la parole, Phil. C'est à vous.
M. Eidsvik: Je suis heureux que vous preniez le temps de nous parler, à nous qui sommes ici sur la côte ouest. Je sais que Paddy vous est reconnaissant de l'avoir appelé et de l'avoir invité, et je suis ravi de le représenter ici.
Il y a trois ou quatre questions qui nous ont paru un peu préoccupantes lorsque nous avons lu le projet de loi. Je crois qu'il y a de bons changements dans ce projet, mais je vais rapidement vous dire ce qui nous inquiète. Ensuite, si vous avez des questions... Nous ne sommes pas experts en ce qui concerne ce projet de loi et nous n'allons certainement pas vous demander 45 minutes.
En premier lieu, nous nous sommes demandé si le projet de loi avait préséance sur la Loi sur les pêches dans certains domaines. Cela nous inquiète un peu au vu de certains éléments du projet, parce que la Loi sur les pêches, malgré ses lacunes, a évolué au cours des 100 dernières années de façon à assurer la meilleure gestion possible du poisson. Nous sommes un peu inquiets à l'idée d'une nouvelle loi qui pourrait avoir préséance. Je suis certain que le comité va se pencher sur cette question, mais je voulais tout de même la signaler.
Cela nous amène aux accords de partenariat, ce qui illustre bien les raisons pour lesquelles je m'inquiète de la question de préséance. Par exemple, le ministre pourrait-il conclure un accord de partenariat qui prendrait le pas sur une ou plusieurs dispositions de la Loi sur les pêches concernant la capture du poisson dans nos eaux territoriales? Nous avons des problèmes avec les accords de partenariat. Nous les appuyons dans une certaine mesure, mais nous remarquons que le ministre peut, par le biais de ces accords, faire certaines choses qu'il ne pourrait peut-être pas faire dans le cadre de la Loi sur les pêches. Prenons par exemple le cas de la réglementation des permis de pêche communautaires des Autochtones, dont nous avons beaucoup discuté.
Ces permis contiennent une disposition permettant la signature d'un accord de partenariat avec les bandes autochtones. Lorsqu'il y a conflit entre les règlements des pêches et ceux du permis autochtone, ce sont ces derniers qui l'emportent sur les règlements des pêches.
C'est cela qui nous inquiète. Nous tenions à soulever la question d'autant plus que le ministre se voit confier de très vastes pouvoirs discrétionnaires dans ce projet de loi.
Le troisième élément est, bien sûr, la composante autochtone. Je l'ai vu mentionner à plusieurs reprises dans les documents d'information concernant ce projet de loi. Nous voulons être sûrs qu'à l'exception du poisson que l'on pêche pour se nourrir, si les règlements doivent être appliqués à d'autres pêcheurs, ils le seront à tous, sans distinction - sauf pour les règlements de l'article 35 bien sûr.
Le quatrième problème sur lequel nous revenons continuellement est celui de l'exécution de la loi. Il y a d'excellentes dispositions à ce sujet dans le projet de loi. Nous manquons déjà terriblement de ressources en Colombie-Britannique pour faire respecter la loi et les règlements, même en puisant dans les effectifs de la Garde côtière. Comment pouvons-nous espérer réussir à assumer les fonctions d'exécution supplémentaires mentionnées dans ce projet de loi avec les ressources que nous avons?
C'est peut-être le moment de rectifier ce qui nous paraît être une lacune de la Loi sur les pêches. Il y est beaucoup question de l'exécution mais pourtant il n'y a aucune disposition ministérielle visant à maintenir un certain niveau d'effectifs pour faire respecter la loi. Pour nous, cela devrait être la première priorité à Pêches et Océans, avant tout le reste. Nous pouvons discuter tant que nous voulons de règles et de lois, mais s'il n'y a pas de police du poisson pour les faire appliquer, nous perdons notre temps.
Nous voudrions surtout qu'il y ait quelque chose à ce propos dans le projet de loi, de sorte que quel que soit le gouvernement au pouvoir, quelles que soient les priorités, l'exécution soit toujours au premier rang - et c'est valable pour toutes les pêches.
Voilà donc les quatre points principaux que nous voulions soulever. Ils sont d'ordre assez général; je crois qu'ils s'appliquent aussi bien à la pêche intérieure qu'à la pêche côtière et à la pêche au-delà de la limite des 200 milles. J'espère que cela pourra vous être utile.
Le président: D'accord. Les questions dont vous avez parlé ont également été soulevées par d'autres avant vous, Phil. Hier, nous avons entendu des pêcheurs de la côte est soulever le même genre de problèmes. Nous avons donc demandé hier aux représentants du ministère de revenir, et c'étaient nos premiers témoins aujourd'hui. Voyons si j'arrive à relire mes notes de ce matin.
Le ministère nous a assurés, en réponse aux questions soulevées hier, qui étaient presque identiques, qu'il n'y a rien dans ce projet de loi au sujet des droits de pêche - vous n'en avez pas parlé, mais autant commencer par là - les droits de pêche, les droits d'accès à la pêche. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui puisse influencer les accords de gestion intégrée dans le domaine des pêches - c'est bien cela? Je vois quelqu'un du ministère hocher la tête en me regardant; je m'inquiète quand je ne vois personne hocher la tête. De plus, ce projet de loi n'a aucun effet sur les allocations de pêche, les quotas ou les QIT, par opposition à la pêche sportive, ou autre chose du même genre.
Les accords de partenariat sont mentionnés dans le cadre des plans de gestion intégrée - n'est-ce pas? On annonce pour bientôt des plans de gestion où tout est regroupé et qui incluent les pêches, de telle sorte que si l'on présente un plan de gestion intégrée pour une région donnée, le ministre sera tenu de veiller à ce qu'il y ait des représentants des intervenants ou des différents partenaires, et les pêcheurs sont, bien sûr, parmi les premiers. Mais ce projet de loi ne porte absolument pas sur des questions comme les droits d'accès à la pêche, les quotas... Tout le monde ici sait cela par coeur, je crois, parce que nous avons posé la question tellement souvent.
Cependant la nouvelle question que vous avez soulevée porte sur l'exécution. Effectivement, l'un de nos témoins précédents a justement fait remarquer que l'on ne parlait pas beaucoup de l'exécution dans le projet de loi. Vous soulevez une question intéressante; on nous a dit qu'il y avait un problème sur la côte ouest où il n'y a pas suffisamment de ressources actuellement pour faire appliquer la réglementation des pêches actuelle. Je sais qu'avec la SPA, il a fallu faire encore plus avec le peu d'argent disponible à consacrer aux activités d'exécution. Cela a suscité de grandes difficultés dans le domaine des pêches et la situation sur la côte ouest nous l'a amplement démontré.
Puisque nous sommes reliés à la côte, l'un des représentants du ministère souhaite-t-il parler de l'exécution et nous dire si le ministère considère qu'en donnant de nouvelles responsabilités au ministre, le projet de loi peut avoir un impact sur ce tout petit budget d'exécution?
M. Don Kowal (directeur, Direction de la répartition des ressources, Pacifique, Arctique et eaux douces, ministère des Pêches et Océans): Je suis Don Kowal, du ministère des Pêches et Océans - je suis directeur de la Direction de la répartition des ressources du Pacifique.
Ce projet de loi contient quelques dispositions concernant l'exécution mais nous n'en avons pas encore complètement défini les conséquences, de même que celles de notre association récente avec la Garde côtière en ce qui concerne les activités d'exécution. Nous savons qu'il faudra tenir compte de certains paramètres en matière d'exécution et nous sommes en train de les étudier dans le cadre de notre association avec la Garde côtière.
Le président: Mais cela ne concerne que la Garde côtière. S'agit-il des nouvelles fonctions qui ont été transférées au ministre dans le cadre du regroupement?
M. Kowal: C'est exact.
Le président: D'accord. Mais le problème soulevé par Phil, et qui me paraît légitime - et sur la côte ouest du Canada, on nous l'a dit à plusieurs reprises - c'est que les ressources consacrées à l'exécution manquent cruellement; il y a eu des coupures dans les ressources. Il a été possible d'en récupérer une partie mais malgré tout, elles sont encore inférieures à ce qu'elles étaient il y a quelques années. Les dispositions de ce projet de loi risquent-elles de pénaliser encore plus ce budget des pêches et des forêts?
M. Kowal: Cela me paraît fort peu probable.
Nous avons entrepris très sérieusement de mettre sur pied des usines de poisson intégrées. Ce faisant, nous définissons les priorités de chacune des pêches et nous accordons une grande importance à la question des ressources d'exécution pour être sûrs qu'il y aura une surveillance adéquate. Ce sera pris en considération dans tous les programmes que nous mettrons sur pied.
Le président: Était-ce un oui, ou était-ce une façon nuancée de dire «j'espère que non»?
M. Kowal: Non, comme nous l'avons déjà dit, nous allons intégrer tous nos efforts, et je vous réponds que ce projet de loi ne devrait pas avoir d'impact majeur sur nos ressources d'exécution.
Le président: Phil, avez-vous d'autres commentaires maintenant que vous avez mis la main sur ce spécialiste du ministère? Ses propos seront au compte rendu.
M. Eidsvik: Oui. Je reconnais que c'est difficile parce que le ministère n'a qu'un budget limité. Nous étudions une nouvelle loi et c'est exactement comme le disait Tobin aux Nations Unies lorsqu'il a fait son allocution à l'OPANO - il disait que c'était une perte de temps parce que sans les ressources nécessaires à l'exécution, tout ce qu'on fait aux Nations Unies ne sert à rien.
Je me demande s'il serait possible d'imposer dans la nouvelle loi un certain niveau de ressources d'exécution afin que les administrations n'aient pas autant de latitude pour modifier les niveaux d'exécution selon leurs problèmes budgétaires. C'est peut-être une approche un peu radicale mais je crois que la gravité des problèmes d'exécution que nous avons eus au cours des 10 dernières années montre que la formule actuelle n'est peut-être pas suffisante. Nos rédacteurs législatifs pourraient peut-être essayer de résoudre le problème. C'est là que je veux en venir - je crois que l'on ne donne pas assez d'importance à cet aspect. Si nous devons établir de nouvelles fonctions, essayons de trouver un moyen d'être sûrs que dans 15 ans, quel que soit le gouvernement, l'exécution sera toujours la priorité.
M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): Je voudrais me présenter à Phil. Je remplace Mike Scott ce soir; il ne pouvait pas venir.
Je voudrais revenir au ministère des Pêches à propos de la question que vous avez soulevée quant aux pouvoirs du ministre de donner suite à des demandes d'augmentation de quotas de la part des Autochtones et à ce genre de chose. À votre avis, ce projet de loi donnera-t-il ces pouvoirs au ministre ou pas?
M. Kowal: Ce projet de loi n'a rien à voir avec les problèmes de gestion de la pêche. Toutes ces mesures relèvent de la Loi sur les pêches.
Le président: Cela vous satisfait-il, Phil?
M. Eidsvik: Oui, je suis heureux et rassuré d'entendre que nous n'avons pas besoin d'accorder trop d'importance à ce projet de loi. Nous allons pouvoir continuer à discuter des dispositions de la Loi sur les pêches.
Le président: Oui, Phil, ce qui signifie que nous devrons continuer à faire attention à vous parce que vous allez suivre très attentivement le prochain projet de loi qui devrait proposer des amendements à la Loi sur les pêches.
M. Eidsvik: Oui, je comprends. Nous suivons attentivement et nous attendons impatiemment et...
Le président: ...vous êtes tout ouïe. Pardon pour le jeu de mots.
Monsieur Frazer, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Frazer: Non, c'est tout. Merci.
Le président: Très bien. Je crois que nous avons apaisé vos craintes, Phil. Vous êtes le témoin le plus facile que nous ayons eu ces derniers jours. Nous sommes très heureux de vous avoir entendu.
M. Eidsvik: Merci de m'avoir écouté.
Le président: Dites bonjour à Paddy pour nous. Nous avons regretté son absence ce soir.
M. Eidsvik: Je transmettrai.
Le président: D'ici la fin du mois, nous devrions avoir les amendements à la Loi sur les pêches et je sais qu'ils intéressent beaucoup votre association. Lorsque ce sera déposé, je vous demande de faire appel aux bons offices de votre député pour obtenir la loi afin de la lire très attentivement, parce que nous aurons besoin de votre aide lorsque nous l'étudierons.
M. Eidsvik: Oui, nous l'examinerons de près. Merci de votre temps.
Le président: Merci.
Nous accueillons maintenant John Spence, de Canadian Ocean Frontier Research Initiative.
Comment allez-vous, John?
M. John Madden (président, Canadian Ocean Frontier Research Initiative): Monsieur le président, je ne suis pas John Spence. Je suis John Madden, ce qui doit vous surprendre un peu.
Le président: Le prénom était bon.
M. Madden: Je suis très heureux que vous soyez en avance mais John Spence est encore en chemin. Il pensait commencer dans 25 minutes seulement. Cependant, je suis président du comité de la COFRI. Je ne voudrais pas que vous perdiez votre temps et je suis tout à fait prêt à commencer, si vous me le permettez.
Le président: Je vous en prie.
M. Madden: Merci beaucoup. Tout d'abord, je voudrais vous remercier de nous permettre de vous parler aujourd'hui. Je ne sais pas si vous avez travaillé sans relâche ou si vous avez pu trouver un moment pour souper.
Je suis président de la Canadian Ocean Frontier Research Initiative. M. John Spence en est le directeur exécutif par intérim et c'est lui qui vous présentera la plupart de nos commentaires.
Premièrement, nous nous réjouissons de l'arrivée de la Loi sur les océans et surtout, nous attendons impatiemment l'évolution de la stratégie de gestion des océans qui en découle. Nous avons quelques observations à faire sur ces deux aspects. En particulier, comme notre nom l'indique, nous nous intéressons à la recherche et au développement. Nous cherchons des structures nouvelles et originales pour pouvoir réaliser une grande partie des recherches dont on a un besoin urgent dans les océans et que nous avons beaucoup de mal à financer.
Je suis heureux de vous dire, monsieur le président, que M. Spence vient d'arriver. Sans plus attendre, je vais vous présenter John Spence.
Le président: Merci, John.
Bienvenue au comité. Je crois que nous avons quelques minutes d'avance. Vous êtes prêt ou il vous faut quelques minutes?
M. John Spence (directeur exécutif par intérim, Canadian Ocean Frontier Research Initiative): Non, je suis prêt. J'ai une question. Pouvons-nous présenter nos diapositives? Je les ai envoyées à votre bureau il y a environ une heure. Ou dois-je me contenter de parler? Cela m'est égal.
Le président: Il vaut peut-être mieux que vous parliez. Je ne crois pas que nous ayons encore reçu vos diapositives. Nous n'avons pas prévu de projecteur. Nous avons l'imagination très fertile et nous allons donc...
M. Spence: Bon. Suite à l'introduction de M. John Madden, j'aimerais rapidement récapituler l'historique des activités océaniques coordonnées par le Conseil des sciences qui ont débouché sur la création de la Canadian Ocean Frontier Research Initiative.
Il y a trois ans environ, nous avons réuni un groupe très hétéroclite de bénévoles, environ 400 personnes représentant tous les secteurs d'activités touchant à l'océan sur la côte ouest, et élaboré un rapport-cadre stratégique intitulé Ocean Opportunities for the West Coast of Canada, dans lequel nous désignions de nombreuses possibilités futures de création de richesses et d'emplois.
J'aimerais me reporter à quelques points de ce rapport qui me paraissent très pertinents à votre examen de la Loi sur les océans.
Si vous le souhaitez, je peux vous faire parvenir un exemplaire de ce rapport et des recommandations.
Premièrement, nous avons reconnu les énormes différences qui existent entre les trois régions océaniques du Canada, l'Atlantique, l'Arctique et dans notre cas le Pacifique. Nous nous sommes concentrés sur les besoins futurs de la région pacifique, et je souhaite mentionner en particulier que nous avons souligné la nécessité impérieuse d'une coordination régionale de la recherche, de la gestion océanique et de l'exploitation des océans. Chaque région a ses caractéristiques particulières. Tous les participants à cette étude étaient profondément convaincus qu'il fallait nous doter de mécanismes sensibles aux disparités régionales pour mobiliser l'ensemble des intervenants et des intérêts.
Nous poursuivons depuis lors notre effort de mise sur pied de ces mécanismes régionaux. Je suis heureux de pouvoir vous dire qu'à mon avis la COFRI constitue un pas important dans cette direction, mais que d'après nous, il faudrait organiser une coordination d'ensemble plus généralisée sur la côte ouest.
Pour ce qui est de l'intérêt que ce rapport peut présenter en ce qui concerne la Loi sur les océans, nous voudrions dire qu'en lisant le texte du projet de loi, nous y constatons un souci très prononcé et très louable de conservation.
Toutefois, nous avons la profonde conviction sur cette côte qu'il sera essentiel de faire intervenir les usagers côtiers et les collectivités côtières si l'on veut atteindre cet objectif de conservation. À notre avis, il est essentiel d'établir des partenariats avec ces utilisateurs de l'océan pour réaliser les objectifs de développement durable.
De plus, nous comprenons très bien que la Loi sur les océans, comme elle est une loi habilitante, ne tient pas compte de l'urgence extrême de créer des emplois dans le contexte de l'économie océanique. Il nous semble toutefois très important de souligner que, face au déclin de secteurs traditionnels comme la forêt et les pêches, il est de la plus haute urgence d'investir dans la création d'emplois à forte composante de connaissances dans le domaine océanique.
Nous développons tout cela dans notre rapport. Il s'agit notamment de pêcheries à haute valeur basées sur la communauté, de tourisme, d'aquaculture, d'utilisation plus efficace des technologies de pointe, de cartographie des océans, de planification des zones côtières, etc.
Nous tenons à préciser que vu la conjoncture, nous voyons grossir rapidement les effectifs des assistés sociaux d'un grand nombre de ces localités, alors que l'océan pourrait vraiment être un vecteur de création d'emplois durables pour l'avenir. C'est quelque chose qui va être de plus en plus important au Canada.
Pour en venir à la Canadian Ocean Frontier Research Initiative, vous vous demandez peut-être ce que c'est que cette fondation que John vous a présentée. Je vais très rapidement vous expliquer en quoi consiste la COFRI, d'où elle sort, quels sont ses programmes prioritaires et quels sont ses rapports avec la Loi canadienne sur les océans.
Tout d'abord, la fondation COFRI telle qu'elle existe actuellement avec son conseil d'administration, est une fondation émanant du secteur des pêches qui a une mission de recherche et d'innovation dans le domaine océanique. Ce n'est pas une entité cloisonnée. C'est un institut sans murs qui peut fonctionner en collaboration avec de nombreux partenaires au niveau des gouvernements, des universités et de l'industrie.
Elle constitue une base commune de partenariat et de recherche coopérative pour tous ces intervenants qui s'intéressent à l'océan. C'est un organisme contractant qui a déjà un certain bagage. Je n'ai pas le temps de vous parler de tous les contrats auxquels nous travaillons déjà, notamment des contrats très intéressants que la COFRI a réussi à obtenir à l'étranger. J'ajouterais simplement que nous envisageons pour ce nouveau mécanisme de partenariat une ouverture de plus en plus internationale.
La COFRI est aussi un centre d'excellence pour la recherche océanique et l'innovation en matière de technologie océanique.
L'énoncé de mission élaboré par les nombreuses personnes qui ont participé à la fondation de la COFRI consiste à réaliser des profits économiques en même temps qu'un environnement durable grâce à des recherches pluridisciplinaires sur les ressources exceptionnelles de la zone économique exclusive du Canada sur la côte pacifique... et il est question de manière plus détaillée de création de partenariats de recherche, de réalisation de recherches stratégiquement importantes pour constituer une base de connaissances et enfin d'élaboration de nouvelles technologies qui nous permettront d'être mieux en mesure d'exploiter l'océan de manière durable. En un mot, je pense que vous constaterez que cet énoncé de mission est très proche des objectifs à long terme de la stratégie de gestion des océans, et nous souhaiterions donc vous présenter la COFRI comme un mécanisme régional susceptible d'aider le Canada à atteindre ses objectifs.
Nous avons évolué très rapidement à partir d'un souci initial de trouver le moyen de faire des recherches océaniques de manière beaucoup plus rentable. Les coûts de la recherche océanique grimpent en flèche. Nous avons travaillé d'arrache-pied à essayer de les réduire. Je suis heureux de vous dire que nous avons de bonnes preuves qu'en utilisant correctement la technologie et en faisant collaborer les divers intervenants, le Canada peut réaliser à un coût beaucoup plus raisonnable toutes les missions qu'il veut mener dans les océans.
La fondation a un conseil d'administration éminent dont font partie les présidents des trois universités de notre côte ainsi que cinq ou six représentants de grandes industries océaniques. Nous avons l'honorable John Frazer, qui a consenti à faire partie de ce conseil à titre de simple particulier. Nous avons aussi des représentants du ministère fédéral des Pêches et Océans ainsi que du gouvernement provincial. Vous constaterez que, grâce à la diversité de nos administrateurs, nous sommes bien guidés par des personnes qui pourront superviser les activités futures de la fondation COFRI.
Les activités de la COFRI sont étroitement liées à l'élaboration de partenariats pour réaliser ces diverses missions océaniques. Ces partenariats peuvent nous aider à obtenir les appuis financiers nécessaires pour mener d'importantes recherches océaniques. Ils peuvent nous fournir des formules rentables de gestion des océans. Ils nous permettent de puiser dans les ressources précieuses des chercheurs scientifiques de talent que nous avons partout au Canada. Ils sont aussi une tribune qui nous permet de passer de la recherche aux applications, à la commercialisation, très, très rapidement; et je pense que c'est un souci majeur au Canada à l'heure actuelle. Enfin, nous sommes d'avis que ces partenariats contribueront à consolider les divers efforts scientifiques et les initiatives qu'exigera la stratégie de gestion des océans du Canada.
J'aimerais très rapidement vous parler de quelques-uns des thèmes sur lesquels nous nous sommes concentrés dans le cadre des divers programmes de la COFRI, car, je vous le répète, ils sont pertinents pour notre avenir.
Il est devenu manifeste que la grande préoccupation pour notre côte, et je pense qu'il en va de même pour les autres côtes du Canada, c'est la gestion de la zone côtière. Je dois dire que nous avons été enchantés de voir qu'il était question dans la Loi sur les océans de créer des zones de protection marine, et même d'organiser une gestion intégrée des ressources de nos zones côtières. Je suis heureux de vous dire que c'est quelque chose qui a une incidence principalement sur nos zones côtières, notamment la région du détroit de Géorgie où s'exercent d'énormes pressions, pression démographique, exploitation des ressources halieutiques, etc.
Nous espérons pouvoir communiquer à l'avenir à votre comité d'autres renseignements sur les partenariats qui vont s'établir au niveau des grandes industries de la zone du détroit de Géorgie et de notre zone côtière, et dans lesquels seront représentés les intérêts du gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et diverses collectivités, pour intervenir sur ces problèmes très importants.
Deuxièmement, nous avons défini un effort ou programme de géosciences marines qui sera axé sur l'exploration et la comptabilisation des ressources géologiques de notre zone économique exclusive sur la côte ouest. Ces ressources revêtent à notre avis une importance stratégique pour notre pays, et nous essayons de trouver les moyens de mener ces recherches à un coût raisonnable à l'avenir.
Le troisième programme porte sur les zones de protection marine. Il s'agissait de mobiliser les ressources scientifiques permettant de comprendre la biodiversité marine et de déterminer comment la préserver à l'avenir face à une exploitation croissante de l'océan.
Le programme suivant présente un intérêt immédiat manifeste. Il consistait à réunir une vaste équipe de représentants de l'industrie, du monde universitaire et du gouvernement pour voir comment utiliser judicieusement la technologie pour évaluer les stocks de poisson. Ceux d'entre vous qui viennent de la côte est ont des problèmes d'évaluation des stocks de poisson, et c'est la même chose pour nous. Nous pensons avoir réuni un groupe remarquable de personnes qui cherchent à réduire les coûts d'évaluation des stocks de poisson et à associer l'industrie aux efforts des chercheurs scientifiques afin de réduire ces coûts.
Notre cinquième programme est un programme de sensibilisation et d'éducation du public sur les océans intitulé Ocean Public Awareness and Education Program, qui met à profit tous les organismes qui s'occupent d'éducation du public, de l'Aquarium de Vancouver aux diverses chaînes de télévision éducative, ainsi que les compétences que nous avons acquises dans notre région et dans tout le pays en matière d'utilisation de média de pointe pour l'éducation. Nous avons réuni tous ces intervenants pour voir avec eux comment faire passer le message des océans auprès du public canadien, comment élaborer des programmes à l'intention des écoliers et des autres personnes qu'il faut à notre avis sensibiliser à l'importance de nos océans et de nos ressources océaniques. La sensibilisation du public nous semble en effet être un élément extrêmement important de la gestion intégrée des ressources océaniques. Il faut absolument que les Canadiens soient instruits de l'importance de nos océans.
Nous avons un programme de développement technologique qui fait une synthèse de tous ces programmes pour essayer de regrouper des technologies communes, d'élaborer des bases communes et de mobiliser les ressources voulues pour faire progresser ces divers domaines d'intérêt océanique.
C'est grâce à ce programme, par exemple, que nous avons pu dégager des possibilités considérables d'économies grâce à une utilisation judicieuse des technologies de pointe. Pour vous donner un simple exemple, nous pensons pouvoir ramener les coûts des levés hydrographiques qui sont actuellement de l'ordre de 80 $ le kilomètre avec les navires de recherche coûteux que nous utilisons, à environ 5 $ par kilomètre, etc., etc. Il nous semble donc très important pour notre pays, à une époque où nous avons des déficits considérables et où nous cherchons à réaliser des économies, de voir tout ce que peut nous apporter la technologie de pointe.
Voilà donc un aperçu très rapide des activités de la COFRI, monsieur le président. En conclusion, je dirais simplement qu'à notre avis les partenariats régionaux vont être très importants à l'avenir pour nous permettre d'administrer correctement nos océans, et que c'est grâce à ces partenariats plutôt que par le biais d'une gestion et d'une administration centralisées que nous pourrons établir les modalités d'une exploitation durable des océans à l'avenir.
Deuxièmement, nous voudrions insister sur l'urgence de créer des emplois durables liés à l'océan pour l'avenir. Nous savons bien que ce n'est pas vraiment l'objet de la Loi sur les océans. Nous voudrions simplement dire que nous espérons que cette loi permettra de créer des emplois durables à l'avenir plutôt que d'accumuler les obstacles à la création de tels emplois.
Troisièmement, nous voulions vous faire part de notre sentiment que les partenariats sur une base communautaire seront fondamentaux pour nous permettre de parvenir à une exploitation durable.
Enfin, nous souhaiterions vous présenter la COFRI, à vous et à tous ceux qui auront la responsabilité future d'appliquer la Loi sur les océans et la stratégie de gestion des océans, comme un exemple de mécanisme régional composé de bénévoles au niveau régional qui se sont réunis pour démontrer que des partenariats dans le domaine des sciences et de la technologie marine peuvent aider notre pays à accomplir son mandat d'exploitation durable des océans et à s'acquitter de toutes les nouvelles obligations que nous contracterons en ratifiant les conventions internationales sur le droit de la mer.
Monsieur le président, avant de vous laisser, je voudrais demander à mon collègue John Madden s'il a d'autres remarques de conclusion à formuler.
M. Madden: Monsieur le président, je voulais simplement vous dire qu'à notre avis ce modèle est particulièrement pertinent et utile non seulement pour réaliser des recherches de manière économique et efficace et non seulement pour les autres océans - et il serait apparemment question de monter quelque chose d'analogue dans la région atlantique du Canada - mais aussi pour d'autres secteurs d'activité. Il s'agit d'une entreprise un peu expérimentale, mais animée d'un enthousiasme merveilleux. Si vous voyez la force de notre conseil d'administration, vous devez vous rendre compte de l'importance de cet effort.
Le président: Je tiens à vous féliciter de ce que vous avez fait. Je vis en Nouvelle-Écosse, sur la côte. J'ai la chance d'avoir là, au bord de l'eau, l'Institut océanographique de Bedford. Nous avons dans notre région de nombreuses petites entreprises privées qui exploitent les ressources de l'océan. Nous faisons énormément de recherche fondamentale et de recherches appliquées dans le cadre d'organismes et de programmes gouvernementaux, mais ce qu'il nous manque, à ce qu'il me semble en tout cas, c'est ce lien et ce maximum de partenariats nécessaires pour réaliser ce dont vous parlez, des emplois durables à long terme dans les industries océaniques.
Où en êtes-vous dans ce domaine sur la côte ouest, quel genre de partenariats et de recherches avez-vous? Les entreprises privées font manifestement des recherches dans le domaine maritime, mais Pêches et Océans Canada, Environnement Canada, la Commission géologique du Canada font aussi beaucoup de recherches qui elles aussi sont importantes et peuvent dans bien des cas avoir des applications commerciales. Où en êtes-vous à cet égard sur la côte ouest?
M. Madden: Disons tout d'abord que notre organisation est très récente et que nous n'avons donc pas tout un long passé historique à vous raconter. En fait, nous sommes encore essentiellement dans une période de rodage. Nous n'avons eu jusqu'à présent qu'une seule réunion du conseil d'administration, il y a quelques semaines seulement. Nous avons eu la surprise, comme le disait tout à l'heure John, de voir atterrir quelques entrepreneurs chez nous avant même d'avoir créé notre Fondation. Nous avons trouvé que c'était un très bon signe.
Cela dit, il est exact que c'est le gouvernement fédéral qui effectue l'essentiel des recherches dans ces domaines au Canada. Mais les laboratoires du gouvernement font l'objet de pressions énormes actuellement, et il est donc très difficile, sur le plan financier, de poursuivre ces activités, surtout en ce moment. Ce n'est pas de tout repos. Mais il y a un élan d'enthousiasme extraordinaire, et comme l'a déjà dit John, je crois que nous avons accompli des progrès.
Toutefois, je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que nous croulons sous les offres de contrat que nous nous précipitons à la banque. Pas du tout. Mais nous avons été très encouragés, notamment par l'aide que nous a apporté l'Institut des sciences de la mer.
M. Spence: Je voudrais simplement ajouter que nous nous sommes beaucoup inquiétés des problèmes de financement de l'Institut des sciences de la mer parce que c'est un organisme qui fait des études à long terme très importantes et dont nous avons grand besoin pour améliorer nos connaissances.
Permettez-moi de faire une observation. Grâce à la Fondation COFRI que l'on est en train de créer, les membres de l'industrie et les autres partenaires se sentent plus à l'aise pour invertir dans ces partenariats dont nous parlons. Je crois que tout le monde s'entend pour dire qu'il est essentiel, pour être sûr que le travail pourra se poursuivre à l'avenir, d'amener ces différents partenaires à délier les cordons de leurs bourses, si j'ose dire, et à mettre l'argent sur la table. Les réactions ont été excellentes à l'égard de ces systèmes de contributions proportionnelles qui permettent à différentes personnes de participer en donnant de l'argent ou des contributions en nature. C'est un forum neutre pour ceux qui ne veulent pas signer de contrat avec un seul laboratoire ou un organisme gouvernemental.
M. Madden: C'est peut-être encore plus vrai pour les gouvernements provinciaux. Comme vous le savez, c'est surtout le fédéral qui engage des dépenses de recherche mais les provinces s'intéressent de très près à la question. Cette formule permet aux gouvernements fédéral et provinciaux de collaborer et notre gouvernement provincial nous a beaucoup appuyés.
M. Spence: Il est ainsi plus facile d'oblitérer certaines des différences politiques qui peuvent exister entre les différents paliers de gouvernement. Nous sommes un peu un terrain neutre où l'on peut éviter certains pièges politiques.
M. Madden: Ça existe?
Le président: Avant de passer à M. Frazer, je voudrais poser encore une question. Elle porte sur les sciences, la recherche et le développement. Avant le dernier exercice budgétaire, je crois avoir vu tous les ministres ayant un intérêt dans la recherche océanique ou dont le ministère travaillait dans ce domaine. J'ai tout fait pour les convaincre que s'il fallait réduire les dépenses au nom de l'austérité fiscale, c'était un domaine où l'on risquait de perdre beaucoup en voulant économiser un peu si l'on procédait à des coupures sans tenir compte de leur impact négatif potentiel sur l'emploi futur dans les industries liées à la mer. Il y a tout de même eu certaines réductions.
Comme tout le monde en parle, je voudrais vous poser une question au sujet des formules de partenariat. C'est une belle idée.
La plupart des travaux scientifiques se font dans les laboratoires du gouvernement fédéral sur les deux côtes et à Ottawa, au CNR et ailleurs. Comme il est toujours difficile de financer ces recherches, pensez-vous qu'un partenariat soit possible avec, par exemple, l'Institut océanographique de Bedford ou le laboratoire sur le phytoplancton du Conseil national de recherches à Halifax? Ils pourraient signer des contrats avec le secteur privé pour commercialiser les services ou les produits et, ensuite, faire revenir ces fonds à la science. Tout ne partirait pas dans le grand trou noir du Trésor public. Comme j'ai l'impression qu'il n'y a toujours pas beaucoup de capacité de recherche dans le secteur privé, ce genre de formule vous paraît-il valable?
M. Madden: Oui, tout à fait, et je vais vous donner un exemple. Je vous ai dit que nous n'en avions pas beaucoup mais John Spence a dit tout à l'heure que nous avions réussi à conclure un contrat avec le Japon avec l'aide, je dois dire, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. C'était un contrat de recherche dans le domaine géoscientifique.
Suite à ce contrat, la plus grande partie des fonds a été versée à des chercheurs de l'Université de Victoria mais il y a eu aussi des revenus pour financer les recherches au Centre géoscientifique du Pacifique, le laboratoire du gouvernement fédéral. C'est un bon exemple puisque c'est un partenariat qui a permis de conserver des emplois au CGP, comme le fait remarquer John à juste titre, tout en nous aidant tous.
Le président: [Inaudible] ...dans un domaine également, n'est-ce pas?
M. Madden: Il faut absolument que la science soit derrière l'industrie. La plupart du temps, dans l'industrie, on n'a pas le temps de faire un travail aussi approfondi.
M. Spence: Si vous me permettez d'ajouter un mot, monsieur le président, il y a presque une certaine tension entre le secteur de la recherche et celui de l'industrie où l'on est plutôt près de ses sous. Les membres de l'industrie veulent que les recherches débouchent sur des résultats clairs, c'est-à-dire le plus souvent sur des créations d'emplois et des objectifs très précis.
Étant donné la recherche fondamentale effectuée dans les instituts dont vous avez parlé, il est souvent très difficile de donner des horizons et des résultats précis comme cela. Il y a cette tension très intéressante, l'industrie voulant absolument, si elle paie, des résultats clairs. Mais les scientifiques disent que ce n'est pas si facile et qu'il faut une vision à plus long terme. C'est une dynamique très intéressante mais je crois que c'est un débat très sain.
M. Frazer: J'étais intrigué parce que vous avez beaucoup de thèmes très intéressants. Plus précisément, je suis étonné de voir que nous n'avons pas de méthode précise pour évaluer les stocks de poisson. Je suis profane en la matière et je ne pourrais vous suivre dans une explication trop détaillée, mais voulez-vous parler d'une évolution de la technologie actuelle, d'une nouvelle méthode révolutionnaire, ou de quoi exactement? Pourriez-vous me donner des précisions sur ce point, s'il vous plaît?
M. Spence: Oui. Pour vous donner un exemple, certaines des sociétés membres de la COFRI ont été parmi les premières à utiliser des véhicules sous-marins autonomes pour des applications de défense. Ces navires autonomes peuvent partir en mer pour presque rien à côté de ce qu'il faudrait payer pour envoyer un vrai bateau avec l'équipage et tout le reste. Plusieurs indications nous portent à croire que l'on peut se servir de ces plates-formes pour monter les sonars et les divers dispositifs que l'on utilise pour évaluer les stocks de poisson. De plus, il apparaît que ces appareils, étant plus silencieux, perturbent moins les bancs de poissons qu'un navire.
En bref, disons que nous avons toute une série de projets portant sur différentes applications de ce genre sur cette côte, et nous savons qu'ils sont également intéressants pour la côte est. C'est donc un domaine très prometteur.
Enfin, nous savons qu'il existe une demande mondiale pour ce type de technologie. Ce n'est pas seulement pour nous au Canada, mais c'est partout dans le monde. Je viens de rentrer de Corée, où l'on a un grand besoin de technologies permettant de savoir aussi économiquement que possible combien il reste de poisson. Tout le monde a le même problème.
M. Frazer: Merci beaucoup.
M. Madden: Puis-je me servir de cette question comme d'un tremplin pour parler de quelque chose qui, à mon avis, illustre très bien la force de cette idée de recherche en coopération? Au départ, nous avions une série de projets de recherche dans le domaine des pêches. Un comité d'examen scientifique les a examinés et a conclu qu'ils étaient tous très intéressants mais qu'aucun ne portait sur le problème central, en l'occurrence l'évaluation des stocks. Nous ne savons pas combien de poissons il y a.
Comme vous vous en doutez, cela a provoqué certains remous chez les scientifiques. Ils se sont tous mis au travail autour de la table et sont revenus beaucoup plus forts. Ils étaient beaucoup plus enthousiastes et avaient plusieurs propositions sur la façon de régler cette question urgente.
M. Dhaliwal (Vancouver-Sud): Bonjour, John. Je suis heureux de vous revoir tous les deux. Je préférerais vous voir en chair et en os, comme avant, plutôt que par des moyens électroniques. Excusez-moi, j'ai manqué une partie de votre exposé; j'étais un peu en retard. Mais j'ai entendu la fin.
Je suis content de voir que vous progressez et que vous êtes déjà en train de prendre des contacts et de signer des contrats pour votre nouvelle organisation. Je voudrais vous remercier d'avoir une telle vision de la mer et des océans: de comprendre que la mer est un bien précieux et doit être traitée comme tel. Je sais que vous allez appuyer ce projet de loi.
Votre participation est très appréciée par le comité. Merci de nous avoir présenté cet exposé. J'espère vous revoir bientôt lorsque je reviendrai sur la côte ouest.
Mme Payne (St. John's-Ouest): Bonsoir, messieurs. Je trouve votre Fondation extrêmement intéressante. Je viens de Terre-Neuve et je regrette seulement que vous n'ayez pas été là il y a 15 ou 20 ans pour compter les stocks sur la côte est. Nous aurions peut-être pu éviter la situation d'aujourd'hui.
Je pense que vous avez répondu à la plupart de mes questions mais je me demandais quel allait être votre niveau de recherche. D'après ce que vous avez dit, vous allez vous intéresser à tous les domaines pratiquement.
M. Spence: Nous laissons la demande, qu'elle vienne du gouvernement ou de l'industrie, déterminer les thèmes de recherche. Nous voyons apparaître des domaines stratégiques très clairs sur lesquels il est possible d'obtenir rapidement un consensus de toutes les différentes parties qui s'entendent pour reconnaître que ce sont effectivement des domaines prioritaires et acceptent de dépenser leur argent durement gagné pour les résoudre. Lorsqu'on fait ce genre d'exercice et que l'on demande aux gens de mettre l'argent sur la table, on arrive très rapidement à définir avec précision les recherches à entreprendre.
M. Madden: Effectivement.
Si vous me permettez d'ajouter un mot, lorsque nous avons commencé ce programme, nous voulions nous concentrer sur la crête de Juan de Fuca ou il y a, comme vous le savez certainement, des cheminées géothermiques, beaucoup d'éléments intéressants sur le plan de la géophysique et de la biodiversité et des phénomènes biologiques particuliers. On nous a dit très vite que tout cela était très beau mais que - j'allais dire les vraies personnes, mais ce n'est pas un mot conseillé - les priorités du gouvernement se trouvaient plutôt à l'intérieur du bassin de Géorgie et que si nous voulions réussir, nous aurions intérêt à nous pencher plutôt sur ce secteur.
Finalement, notre groupe s'est beaucoup rapproché des secteurs qui lui semblent correspondre aux véritables priorités de notre société. Cela ne veut pas dire que beaucoup de scientifiques ne seraient pas enchantés de pouvoir étudier certains des autres problèmes aussi, si c'est possible.
Mme Payne: En fait, c'est pour cette raison que je vous ai posé la question. Nous avons beaucoup entendu parler de tout ce qui se passait sur le plancher océanique, au fond des mers, où la température de l'eau change d'heure en heure, passant presque d'un extrême à l'autre. Il me semblait qu'il y avait un manque de technologie ou un manque de volonté dans ce domaine. C'est pour cette raison que j'ai posé la question.
M. Madden: Merci. Nous sommes très heureux que vous l'ayez posée.
Le problème auquel nous nous heurtons, c'est le coût de certaines technologies. Elles ne sont pas coûteuses comparées au budget de R-D total pour les océans, mais elles sont onéreuses; elles se chiffrent à 1 ou 2 millions de dollars. C'est très difficile pour un seul ministère gouvernemental d'engager ce genre de dépenses à l'heure actuelle.
Nous voulons donc amener les ministères à travailler ensemble, à coopérer. Le ministère de la Défense est disposé à prêter des véhicules pour les expériences - des véhicules autonomes, par exemple - et cela peut-être intéressant pour tous les chercheurs. Toute l'aide que vous pouvez nous donner sera la bienvenue.
Mme Payne: Nous aurons certainement beaucoup de travail pour vous, mais je ne suis pas sûre de pouvoir en dire autant pour l'aide. Merci.
Le président: En conclusion, je voudrais vous remercier de votre exposé.
Je suis un peu votre âme soeur sur la côte est. Je dis déjà depuis longtemps que l'industrie de la mer représente un potentiel énorme de création d'emplois durables et de richesse. Malheureusement, voilà trop longtemps que sur la côte est, on ne s'intéresse aux océans que pour le poisson. Nous n'avons pas vu les écosystèmes, la biodiversité, et toutes les possibilités qu'ils recèlent.
Je suis aussi très heureux d'entendre que sur votre côte, vous semblez appuyer la présentation d'un projet de loi de ce genre au Parlement du Canada. Je sais que des groupes semblables de la côte est appuie aussi ce projet de loi.
M. Madden: Tout à fait.
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous écouter.
Le président: Merci d'avoir pris le temps de venir bavarder avec nous ce soir.
Le témoin suivant est Gerald Hamilton, du Pacifique Institute of Deep Sea Technology.
Nous sommes impatients d'entendre ce que vous aurez à ajouter à nos délibérations sur la Loi sur les océans. La parole est à vous, monsieur.
M. Gerald Hamilton (président, Pacific Institute of Deep Sea Technology): Merci, monsieur le président. Pouvez-vous me dire si vous avez reçu la télécopie que je vous ai envoyée de mon exposé? Le texte a-t-il été traduit en français, comme il le fallait?
Le président: Je ne crois pas qu'il ait été traduit. Je ne sais pas. Je l'ai en anglais seulement, mais nous le ferons traduire. Tout ira bien. Si ce n'est pas encore traduit, ce sera fait plus tard, il n'y aura pas de problème.
M. Hamilton: Je m'inquiétais parce que c'était important pour vous et nous tenons à faire les choses comme il faut.
Le président: C'est à vous. Nous sommes prêts.
M. Hamilton: Monsieur le président, permettez-moi tout d'abord de vous remercier de me donner la possibilité d'intervenir au sujet du projet de loi C-98 au nom des 27 membres de notre Conseil d'administration qui représentent pratiquement tous les secteurs - politique, universités, et industrie - sur la côte ouest. Je crois que nous vous avons donné une liste de ces membres du Conseil. C'est un groupe extrêmement varié puisqu'il y a un ancien gouverneur général de notre beau pays; le sénateur Jack Austin, que vous connaissez peut-être; un ancien chancelier de l'Université de Colombie-Britannique; un ancien commissaire de l'Expo et président du port; de grands industriels des secteurs marins et des membres influents des trois universités de la région.
Vous vous demandez peut-être pourquoi ils se sont regroupés et pourquoi ils ont choisi le nom particulier de «Pacific Institute of Deep Sea Technology». C'est le nom que nous avions choisi au début mais je crois que nous allons bientôt nous faire appeler le «Canadian Pacific Ocean Institute», ou quelque chose du genre.
Il est important que vous compreniez le calibre de toutes ces personnes. M. Spence que vous venez d'écouter est aussi l'un des administrateurs de cet organisme, comme beaucoup de ceux que vous voyez sur la liste.
Nous nous sommes regroupés il y a quatre ans et demi, lorsqu'il est devenu évident qu'il n'y avait aucune coordination dans le domaine des sciences de la mer; de ce fait, le Canada n'a pu se maintenir au niveau des autres pays et atteindre ses objectifs légitimes, ce que nous espérons vivement voir rectifié par le projet de loi C-98.
Il faut reconnaître que si les divers segments des industries de la mer - c'est-à-dire le transport, l'étude des fonds, les océans et les pêches, l'énergie et les mines, la défense, la Garde côtière, etc. - étaient incapables de se coordonner il y a quatre ans et demi, ils sont actuellement dans une situation déplorable. C'est essentiellement pour cette raison que je suis là, pour essayer de vous offrir l'aide de notre groupe.
Permettez-moi de commencer par une note un peu discordante, monsieur le président. Vous êtes si aimable que je m'en veux, mais je dois le faire.
Pour ce qui est de la composition de votre comité, sur les 11 membres, six viennent de la région atlantique, huit de l'est, et deux seulement représentent la Colombie-Britannique et la région pacifique. Je vous pose donc la question suivante: «N'avons-nous pas appris avec le référendum de lundi dernier que le Canada trouvera son salut dans la délégation des pouvoirs, et n'avons-nous pas, non seulement l'Atlantique, mais bien deux océans qui méritent tous deux notre attention?
Fondamentalement, notre mécontentement vient surtout du fait que le potentiel de création d'emplois et de prospérité est indissociable de l'existence d'un mécanisme de coordination qui consacrera son attention, 24 heures sur 24, au progrès et à l'avancement du développement et de la gestion environnementale des océans. C'est avant tout pour cette raison que je prends la parole ce soir au nom de toutes ces éminentes personnalités. Plusieurs d'entre elles ont reçu l'Ordre du Canada et toutes ont de grandes connaissances.
Je voudrais faire comprendre au comité, si je le puis, monsieur le président, qu'il y a une crise ici - «ici» étant la côte ouest. Tous les ministères gouvernementaux sont en lambeaux et ne peuvent ou ne veulent mettre sur pied un programme cohérent qui permette de lancer de nouvelles initiatives dans le secteur marin. Par conséquent, nous sommes convaincus que ce genre de programme doit venir du secteur privé, de groupes comme le nôtre, qui obtiendront la majeure partie du financement de collègues asiatiques, qui ont peut-être encore des fonds disponibles, semble-t-il, et respectent la technologie et le savoir-faire organisationnel canadiens.
Notre raisonnement est celui-ci: s'il n'y a pas d'argent dans les différents ministères - Pêches et Océans, Énergie et Mines, Défense, la Garde côtière canadienne et tous les autres - nous avons deux options: la première, ne rien faire en attendant que la situation s'améliore, et l'autre, peut-être, par le biais du secteur privé, et pas par l'entremise de ces pauvres malheureux qui ne savent pas s'ils auront encore un emploi la semaine prochaine, de trouver une façon de financer ce qui doit être fait sur la côte pacifique dans le prolongement de la Loi sur les océans que vous proposez maintenant.
M. John MacDonald, l'un des membres éminents de notre Conseil - et je ne sais pas si vous le connaissez, c'est sans doute le premier industriel dans ce domaine - va préparer un programme d'action au cours des deux prochaines semaines - donnez-lui trois semaines - et notre groupe l'enverra probablement voir votre comité à la Chambre des communes. Cela amplifiera encore le rapport préparé par le B.C. Science Council. En voilà un autre: mettez l'étude Ferencz-Weicker ici. Elle a été commandée par le ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest, qui n'a plus d'argent non plus. Il y en a encore une autre, qui a été faite par Mme Kenney-Wallace, au nom du Conseil consultatif national des sciences et de la technologie. Toutes ces études concluent qu'il faut impérativement créer ici une Commission des océans pour assurer la coordination.
Vous avez là trois rapports, monsieur le président, qui arrivent tous à cette conclusion. Vous entendrez sans doute aussi les représentants de la province de Colombie-Britannique qui vous diront qu'un rapport intergouvernemental a été réalisé par le ministère des Investissements et qu'il arrive encore à peu près à la même chose.
La question que je vous pose, monsieur le président, est celle-ci: Combien faudrait-il de rapports et d'études qui tous concluent à la nécessité d'une commission de coordination de ce genre? Or, c'est exactement ce que l'on retrouve dans le projet de loi C-98, mais il n'y a rien au sujet de la mise en oeuvre. Ce n'est pas une critique. Je crois que le projet de loi de M. Tobin atteste d'une vision à long terme et nous tenons à l'en féliciter.
Voici notre offre. Avec le concours d'autres personnes qualifiées choisies par vous, par nous, ou par tous ceux qui participeront, notre groupe peut vous aider à faire le pas suivant.
Vous voudrez peut-être que nous nous alliions à la Fondation Asie-Pacifique du Canada, qui pourrait bénéficier de cette alliance. C'est un groupe qui est contrôlé par le gouvernement fédéral et ce serait peut-être une évolution très naturelle.
M. MacDonald souhaite une association étroite avec le Institute of Ocean Sciences à Sydney, Colombie-Britannique, qui est sous-utilisé et dans lequel vous avez déjà investi des fonds publics.
Voilà des suggestions que l'on pourrait envisager de suivre.
Nous vous demandons, monsieur le président, de montrer à l'Ouest du Canada qu'il mérite un grand soutien politique dans ce domaine. C'est cela que nous vous demandons. La prospérité future de tout le pays se trouve peut-être dans l'océan Pacifique. C'est pourquoi nous croyons qu'il y aura peut-être des possibilités de financement à explorer dans le secteur privé de différents pays riverains du Pacifique. Mais ces possibilités doivent être examinées officiellement dans le cadre d'une coopération entre un groupe du secteur privé comme le nôtre et l'enthousiasme du gouvernement.
Si le secteur privé est prêt à faire preuve de leadership, monsieur le président, pourquoi notre gouvernement central ne ferait-il pas preuve d'enthousiasme et de vigueur dans son action?
C'est le point essentiel. Je vais y revenir dans un instant.
À propos, M. Jim McFarlane, O.C., m'a demandé de vous signaler que la Loi sur les océans ne semble pas faire mention de l'article 76 de la Conférence sur le droit de la mer, qui définit nos frontières nationales. Il se demande si c'est un oubli. J'ai voulu lui faire plaisir en l'indiquant.
En résumé, monsieur le président, nous n'avons pas besoin d'un fatras de programmes ponctuels ici et là; nous avons besoin que vous nous aidiez, par le biais de la Loi sur les océans, à reconnaître la réalité des problèmes régionaux de l'océan Atlantique, sur lesquels nous avons lu tant de choses et dont j'ai eu l'honneur de parler à M. Tobin, et des problèmes que nous avons ici sur la côte pacifique.
Les deux questions doivent être abordées séparément. Vous déciderez peut-être d'opter pour une organisation qui saurait gagner votre confiance et qui pourrait consacrer tout son temps à la question de la coordination et de l'établissement des priorités et à déterminer où les dépenses seraient les plus judicieuses dans l'intérêt de tout le pays. Nous pouvons prendre l'exemple de l'Administration de l'aéroport international de Vancouver à qui l'on a donné de tels droits.
Nous vous demandons donc de nous aider à créer une commission de la côte ouest qui assurerait ce travail, et vous verrez que le secteur privé sera prêt à vous apporter toute l'aide nécessaire dans l'intérêt de notre pays. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Monsieur Hamilton, notre pays est très vaste, il a trois océans, mais malgré tout, les initiatives prises par votre organisation et les suggestions que vous formulez pour la région du Pacifique seraient aussi recommandées pour la côte est du Canada.
Nous avons entendu aujourd'hui un M. Frank Smith, de la Newfoundland Ocean Industries Association, qui appuyait le projet de loi. Il lui reprochait un peu de ne pas aller suffisamment loin mais disait qu'il serait peut-être bon de mettre en place un office des mers. Je ne crois pas que les deux idées soient très différentes, même si les noms ne sont pas les mêmes. Il représentait des groupes industriels de la côte est du Canada. D'après lui, le potentiel est énorme mais il faut absolument une coordination optimale et une action dictée par des politiques.
Vous tenez des propos pratiquement identiques sur la côte ouest. C'est extraordinaire, dans un pays aussi grand que le nôtre, d'entendre deux organisations prestigieuses dire: «Oui, nous appuyons le projet, mais il ne faut pas s'arrêter là, il faut faire un pas de plus.»
Vous représentez des organisations composées de personnes hautement qualifiées et respectées qui offrent leurs services pour participer à un partenariat, pour que cela fonctionne et parvenir à maximiser de façon durable les ressources marines sur nos côtes. Vous pourriez peut-être échanger vos cartes d'affaires sur la côte est et sur la côte ouest et la pression venant des deux côtes finira peut-être par faire bouger Ottawa.
M. Hamilton: Et que penseriez-vous d'ajouter quelques députés de Colombie-Britannique à votre comité, monsieur, pour que nous sentions...
Le président: Nous sommes toujours heureux d'accueillir des députés de Colombie-Britannique au comité, et comme l'un d'eux vient de me le dire, pour les députés de la côte ouest, c'est la qualité, pas la quantité qui compte.
M. Hamilton: Dites à votre collègue que son argument est très convaincant, mais vous savez ce que je veux dire, rien ne vaut quelqu'un qui sait faire entendre sa voix.
Le président: Je comprends très bien. L'un des problèmes est que la composition du comité reflète la composition des partis à la Chambre. J'aurais aimé qu'il y ait plus de députés libéraux élus sur la côte ouest parce qu'ils auraient ainsi plus d'occasions d'occuper ces cinq chaises.
Je dois ajouter, très sincèrement, que les membres du comité de Colombie-Britannique, aussi bien le secrétaire parlementaire que les autres - M. Frazer, M. Cummins, M. Scott, M. White - ont été très actifs au comité et présentent toujours la position de la côte ouest à chacune des réunions. Votre observation est très juste.
M. Hamilton: Mais comment allons-nous organiser cette commission? Que pouvez-vous faire? Vous dites que le député des provinces atlantiques a demandé quelque chose d'analogue. Êtes-vous prêts à accorder un certain pouvoir local à un organisme comme celui-là, comme cela s'est fait pour l'Administration de notre aéroport?
Le président: Je ne sais pas. Ce n'est pas en mon pouvoir. Je ne suis pas le ministre. Je sais en tout cas que le ministre s'est beaucoup démené pour trouver des partenaires pour travailler en cogestion et a délégué un maximum de pouvoirs, dans la limite du raisonnable et de la logique, à ce genre d'organismes.
Nous pouvons certainement formuler une recommandation en ce sens, en disant qu'il y a deux groupes très organisés - il y en a peut-être d'autres - sur les deux côtes qui ont offert leurs services pour mener à bien de façon concrète certains des objectifs de ce projet de loi et ce, très rapidement. Nous pourrons peut-être envisager d'inclure ce genre de recommandation dans notre rapport sur le projet de loi.
M. Frazer: Monsieur le président, je voudrais féliciter M. Hamilton de son exposé et je suis très favorable à cette idée de coopération entre l'industrie et le gouvernement.
Peut-être que l'industrie, qui doit fonctionner de façon relativement efficace, aura une certaine influence sur le gouvernement et que le gouvernement saura en tirer les enseignements. Je crois que c'est un excellent concept. Merci.
M. Hamilton: Merci.
Le président: Je voudrais vous poser une question, si c'est possible, avant de passer à M. Dhaliwal. En ce qui concerne les plans de gestion intégrée des zones côtières, quel rôle pensez-vous pouvoir jouer pour que ces plans de gestion représentent l'ensemble des intérêts existant dans la région, qu'il s'agisse d'environnement, d'industrie, de pêches...? Vous chargeriez-vous seulement de coordonner l'élaboration de ces plans dans le cadre de chacun de ces groupes pour présenter ensuite le plan au gouvernement? Est-ce ainsi que votre groupe fonctionnerait?
M. Hamilton: Nous serions heureux de faire cela. Il faut que personne ne soit oublié. Les sciences de la mer ne se limitent pas à la pêche et à ce genre de chose. Cela va beaucoup plus loin. Nous voudrions vous présenter, et c'est d'ailleurs ce que nous allons faire, un plan d'action queM. MacDonald est en train de préparer.
Cela sera fait par notre organisation. Nous voudrions participer à la coordination. Nous voudrions faire venir de nouvelles personnes. Nous aimerions travailler en collaboration avec M. Dhaliwal, particulièrement, puisqu'il a joué un grand rôle dans la préparation de cette Loi sur les océans.
Nous voudrions faire tout ce qui est nécessaire. Le rôle que nous souhaitons jouer est celui d'animateurs, en quelque sorte, comme l'ont dit les autres personnes, pour passer à l'action. Il faut que l'on nous fasse confiance et que l'on nous accorde une position officielle. C'est pourquoi j'ai dit que, si vous le désirez, il serait peut-être bon que nous soyons associés à la Fondation Asie-Pacifique.
M. Dhaliwal: Bonsoir, Gerald. Je suis content de vous revoir. Je voudrais aussi vous féliciter de l'exposé que vous avez présenté au comité et de votre travail dans le domaine des industries de la mer.
Je voudrais également vous féliciter d'avoir réuni autant de personnes éminentes, des gens comme John MacDonald et d'autres membres de votre conseil. C'est assez remarquable d'avoir quelqu'un comme ça. Je suppose qu'il s'agit de John MacDonald de MacDonald Dettwiler and Associates Ltd., qui est très connu...
M. Hamilton: Naturellement.
M. Dhaliwal: ... dans toute la Colombie-Britannique et sans doute dans tout le pays pour son travail dans la haute technologie.
J'ai eu l'occasion de visiter les installations lorsque le ministre de l'Industrie est venu ici pour leur 25e anniversaire.
Vous avez aussi parlé de l'Institut des sciences de la mer, que j'ai visité récemment - il y a seulement quatre semaines. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de tout voir. Vous avez dit que l'Institut était sous-utilisé. Comme c'est encore assez frais dans ma mémoire puisque j'y suis allé récemment, je voudrais que vous nous disiez comment l'on pourrait mieux utiliser les installations, les services et le personnel de l'Institut.
M. Hamilton: Lorsqu'un ministre visite un centre, on vous montre ce qu'on veut bien vous montrer, je suppose, dans une grande mesure. Comme je suis de l'extérieur, je peux le dire aussi gentiment que possible.
Je me fie à M. MacDonald, qui a dit que l'Institut était sous-utilisé. Nous avons d'excellents cerveaux dont nous aimerions continuer à nous servir si possible. Nous allons approfondir ce sujet dans notre plan d'action. Je fais confiance à M. MacDonald pour préparer tout cela. Lorsque le président du comité recevra notre rapport, j'aimerais que nous ayons une petite rencontre. Je voudrais avoir vos commentaires.
Le centre existe déjà. Il y a là des bateaux qui ne sont pas utilisés, et il a creusé la question. Nous pourrons vous donner les faits et les chiffres, si vous le voulez bien.
M. Dhaliwal: Merci de me tenir informé de vos activités et de vos préoccupations. Continuez. Je suis heureux d'entendre que vous avez d'autres représentants à ce comité et que vous allez faire le maximum pour qu'il y ait plus de députés libéraux dans l'Ouest afin que nous ayons plus de membres à ce comité. Merci beaucoup de nous avoir présenté un exposé.
M. Hamilton: Merci, monsieur.
Le président: Merci de nous avoir informés. J'ai hâte de recevoir le plan d'action lorsqu'il sera prêt. J'ignore pendant combien de temps encore nous aurons ce projet de loi. Il doit nous rester encore environ deux semaines et j'espère donc que vous pourrez nous faire parvenir ce document. Il y a ici des fonctionnaires du ministère ainsi que des membres du personnel du ministre, qui ont pris des notes. Vous avez fait une offre très intéressante. Nous veillerons à ce qu'elle soit transmise et nous espérons qu'elle sera acceptée. C'est exactement le type de partenariats avec le secteur privé et de partenariats avec des groupes, des organismes et des fondations extérieurs qui peut améliorer le fonctionnement du gouvernement.
Mme Payne de Terre-Neuve va faire le nécessaire pour vous mettre en rapport avec M. Smith de l'association de Terre-Neuve afin de comparer vos notes.
M. Hamilton: Excellent.
Si je puis avoir le dernier mot, brièvement, je voudrais seulement dire que cette conférence est magnifique. Nous commencions presque à perdre courage. J'allais perdre tous ces collaborateurs précieux parce que nous continuions à errer dans les couloirs du pouvoir de deux segments différents du gouvernement, sans arriver nulle part. C'est vraiment à vous de nous mettre dans une position où nous pourrons travailler. Nous sommes prêts à le faire, mais il faut nous donner une place. Il faudrait peut-être demander à la Fondation Asie-Pacifique de nous en faire une.
Merci de m'avoir accueilli.
Le président: C'est une excellente recommandation. Merci beaucoup.
Maintenant nous souhaitons la bienvenue à Linda Nowlan, avocate représentant la West Coast Environmental Law Association.
Bienvenue au comité. Avant de présenter votre mémoire, peut-être auriez-vous l'obligeance de nous parler un peu de votre association, afin que nous sachions en quoi consiste son mandat et les personnes qu'elle représente.
Mme Linda Nowlan (avocate, West Coast Environmental Law Association): Merci infiniment de m'avoir invitée à vous adresser la parole aujourd'hui.
La West Coast Environmental Law Association est un groupe de défense de l'intérêt public et du droit de l'environnement à but non lucratif qui est active à Vancouver depuis 1974. Nous travaillons tout particulièrement dans cinq domaines du droit de l'environnement. Nous possédons une bibliothèque et nous représentons un certain nombre de clients. De plus, nous renseignons le public sur toute question liée au droit de l'environnement.
Mais notre plus importante activité, à mon avis, consiste à favoriser la réforme du droit, et c'est justement pour cela que je me présente devant vous aujourd'hui. Nous nous efforçons de participer le plus possible à l'élaboration, à tous les paliers de gouvernement, de nouvelles lois qui vont assurer un maximum de protection pour notre environnement. Voilà ce qui nous a motivés à comparaître devant le comité aujourd'hui.
De plus, je suis de Vancouver, et comme vous l'a déjà expliqué le témoin précédent, nous tenons dans cette région à nous assurer que les océans bénéficient d'un maximum de protection. Vous avez reçu un certain nombre de représentants du secteur privé, et j'aimerais donc vous présenter un peu l'optique du secteur des organisations non gouvernementales que je représente.
Les groupes environnementalistes en Colombie-Britannique sont un peu inquiets de voir la rapidité avec laquelle ce projet de loi passe les différentes étapes menant à son adoption, et de se rendre compte qu'ils peuvent difficilement participer aux audiences. Le fait est que bon nombre de personnes n'étaient même pas au courant de ces audiences. J'ai eu de la chance en ce sens qu'on m'a contactée et que j'ai pu assister à la réunion d'aujourd'hui. J'insiste cependant sur le fait que vous l'avez organisée rapidement sans donner beaucoup de préavis, et qu'il y aurait eu une plus grande participation aujourd'hui si les gens avaient pu profiter de cette occasion.
Dans mes remarques aujourd'hui concernant les améliorations à apporter à la Loi sur les océans, j'ai l'intention de mettre l'accent sur les mesures législatives concrètes qu'il faut prendre pour concrétiser la vision énoncée par le ministre Tobin dans son document de réflexion. Je pense que ce document était assez remarquable en ce sens qu'il mettait vraiment l'accent sur la protection des océans. Le ministre Tobin a parlé de la nécessité d'abandonner les mesures ponctuelles axées sur le court terme qui sont à l'origine de la surexploitation des ressources et de la dégradation environnementale. Il a dit que nous devons concrétiser nos responsabilités et nos bonnes intentions dans une politique qui va assurer l'utilisation durable des ressources et la protection environnementale. À notre avis, la Loi sur les océans, telle qu'elle est actuellement rédigée, a besoin de quelques modifications mineures pour vraiment traduire cette vision.
Nous avons des préoccupations environnementales sérieuses ici sur la côte du Pacifique. Le B.C.-Washington Marine Science Panel, un groupe mis sur pied par le B.C.-Washington Marine Environmental Co-operation Council, a récemment mené une étude scientifique qui a débouché, en 1994, sur un rapport sur les eaux que nous partageons avec les États-Unis. Ce rapport énumère les principales menaces pour l'environnement dans notre région. Le plus important de ces dangers écologiques est la perte de la biodiversité. Le groupe en question a déterminé que la destruction, la modification ou la dégradation des habitats constitue la plus importante priorité environnementale de la région, étant donné que ses effets sont irréversibles. La perte d'habitat représente un danger écologique potentiellement très important, alors qu'on peut facilement éviter ce problème.
Je sais que le gouvernement fédéral s'intéresse davantage à la protection des eaux qu'à celle des habitats des zones côtières, qui est une responsabilité provinciale, mais je sais aussi que votre projet de loi vise à améliorer la coordination des activités entre les différents paliers de gouvernement. Je vous exhorte vivement à reconnaître que la protection de la biodiversité est l'un des problèmes majeurs auquel vous pouvez vous attaquer par le biais de ce projet de loi. Il suffit d'apporter un certain nombre d'améliorations à ce dernier pour aborder directement le problème.
Les autres difficultés que nous connaissons sont liées à la croissance rapide de notre région. Les projections de croissance démographiques sont en effet tout à fait étonnantes, et vous pouvez vous imaginer qu'il en résulte de fortes pressions pour aménager une proportion de plus en plus importante du territoire. La majeure partie de la population de la Colombie-Britannique habite sur la côte ou alors tout près. Environ 70 p. 100 de la population de la province habite soit à côté, soit très près du détroit de Géorgie. Cette forte population et l'aménagement accru de notre territoire représentent une charge considérable, charge qui influe nécessairement sur nos eaux marines.
Il y a de nombreuses éventuelles sources de pollution, et il y a également le legs de la contamination industrielle du passé. Le document de réflexion auquel j'ai fait allusion tout à l'heure déclarait que l'un des objectifs du projet de loi serait de remettre en état le milieu marin. J'exhorte donc le comité à préciser dans le projet de loi l'objectif de la remise en état de l'environnement. Il y est question d'élaborer une stratégie de gestion des océans, mais on n'y parle guère de la remise en état de l'environnement marin, alors que cela s'impose dans bon nombre de zones.
J'imagine que certains de mes commentaires sur la formulation précise des différentes propositions législatives vous rappelleront ceux d'autres groupes environnementalistes ou organisations non gouvernementales au Canada.
Mon premier commentaire concerne l'absence d'une disposition de déclaration d'objet, d'une part, et de principes directeurs, d'autre part. Il est très important d'inclure dans ce projet de loi une disposition qui énonce l'objet de la mesure législative... ainsi qu'un certain nombre de principes directeurs, sur lesquels reposera la stratégie de protection des océans adoptée pour le siècle à venir. À cet égard, je voudrais proposer un libellé précis pour l'article en question et des principes directeurs qui pourraient l'accompagner.
Parmi les principes, notons en premier lieu le principe de prévention, un principe scientifique fort important: là où il existe un danger de dommage écologique grave ou irréversible, des mesures doivent être prises pour prévenir la contamination avant d'avoir la preuve irréfutable que des dégâts ont réellement été causés à l'environnement. Mentionnons, parmi les autres principes, la prévention de la pollution, qui est la pierre angulaire - ou va bientôt l'être, j'en suis sûre - de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement; comme je le disais tout à l'heure, la préservation de la diversité biologique et la prévention de sa destruction; l'utilisation durable des ressources biologiques marines, estuariennes et côtières, car la protection de la biodiversité englobe nécessairement des mesures de protection traditionnelles, telles que la création de zones de protection et la conservation de l'ensemble des ressources, sans oublier, bien entendu, les principes énoncés dans la Convention sur la biodiversité, et notamment celui de l'utilisation durable de nos ressources biologiques. Il s'agit là d'un principe très important à incorporer dans la loi.
Il conviendrait aussi de consacrer dans la loi le principe de la participation du public. Je sais que la consultation d'un grand nombre d'intervenants et de groupes intéressés est à l'origine de ce projet de loi. Mais je pense qu'il conviendrait peut-être que vous communiquiez directement ce message au public en énonçant dans la loi que la participation du public est un principe directeur important.
Il y a aussi le principe de l'équité intergénérationnelle, élaboré lors de la Conférence de Rio dans le cadre de l'Action 21, et selon lequel il faut reconnaître les droits des générations futures quand nous parlons de protection environnementale et de développement durable.
Ma principale préoccupation au sujet du projet de loi concerne la partie II, où il est question de la stratégie de gestion des océans. Cette partie du projet de loi est certainement très positive et je félicite d'ailleurs le gouvernement d'avoir pris l'initiative d'élaborer une telle stratégie. J'estime cependant que la formule qu'on retrouve actuellement dans le projet de loi n'est pas assez énergique. À mon avis, il faudrait y rattacher des objectifs, des délais et un calendrier précis.
Je recommande notamment qu'on prévoit la préparation de rapports à présenter au public. Le public en général et les groupes écologiques ont très mal accueilli la décision d'Environnement Canada d'éliminer les rapports sur l'état de l'environnement. Après la publication du rapport sur l'état de l'environnement de 1996, le gouvernement fédéral ne préparera plus aucun rapport sur l'état de l'environnement, comme cela a été le cas jusqu'à présent.
À mon avis, il serait important que la Loi sur les océans inclue une disposition prévoyant la préparation d'un rapport sur l'état des océans qui permette de suivre les progrès accomplis en ce qui concerne la mise en oeuvre de la stratégie de gestion des océans. Il serait préférable, à mon avis, que cette activité soit explicitée dans le projet de loi. On pourrait prévoir un intervalle de deux ans pour la publication des rapports, si l'on jugeait que la préparation d'un rapport annuel constituerait pour ceux qui préparent ces rapports une charge trop lourde.
Il serait également utile d'avoir plus de détails concernant les différents éléments de cette stratégie. J'estime que les concepts importants du contrôle de la qualité du milieu marin et de la préparation de rapports à ce sujet doivent faire partie intégrante de la stratégie et donc être explicités dans le projet de loi. L'obligation de réunir et de contrôler des données est tout à fait fondamentale si l'on veut vraiment suivre les progrès réalisés au niveau de la préservation du milieu marin. Encore une fois, je voudrais proposer un libellé pour cette disposition.
L'article 32 du projet de loi, qui concerne la mise en oeuvre des plans de gestion, a un caractère tout à fait facultatif. Au lieu d'employer le terme «peut», je recommanderais qu'on opte plutôt pour «doit»; il devrait s'agir d'une activité obligatoire. En ce qui nous concerne, le ministre devrait avoir l'obligation de faire tout ce qui est prévu à l'article 32. Encore une fois, ce serait l'occasion pour le ministre de tenir sa promesse, car il a bien dit dans son document de réflexion que l'évaluation de la qualité du milieu marin passe par des lignes directrices, des normes ou des objectifs précis visant à préserver la qualité des habitats et l'abondance, la qualité et la diversité des ressources. À mon avis, cet article va devoir être modifié pour concrétiser cette vision dans le projet de loi C-98.
Il faudrait également incorporer à l'article 32 un certain nombre de paragraphes qui préciseraient le type de données qui seraient contrôlées et la méthode qui permettrait de savoir dans quelle mesure on a donné suite aux recommandations du rapport. Parmi les éventuels changements, mentionnons la possibilité de reprendre la formulation qu'on trouve dans l'article sur la recherche scientifique, où il est question de collecte de données, pour prévoir que le ministre devra «assurer la collecte de données en vue d'une meilleure connaissance des océans, de leurs ressources biologiques et de leurs écosystèmes, y compris des composantes de la biodiversité marine», et aussi de tout procédé ou catégorie d'activité susceptible d'influer sur l'intégrité des écosystèmes estuariens, côtiers et marins.
Je pense que le projet de loi doit préciser que ces données, une fois disponibles, seront contrôlées. Il ne suffit pas d'en faire la collecte et de les mettre quelque part; il faut les contrôler et établir des rapports à présenter au public sur ce qui a été observé.
Comme nous avons déjà signé la Convention sur la biodiversité et que nous élaborons activement notre propre stratégie à ce sujet, il convient de rappeler que l'une des obligations énoncées dans cette convention est celle d'agir. Une fois que vous avez réuni et contrôlé vos données, vous avez une autre obligation très importante, c'est-à-dire de prendre les mesures qui s'imposent pour réglementer tout procédé ou activité dont les effets nocifs sur le milieu marin sont connus. Cette obligation est précisée au paragraphe 8(1) de la Convention sur la biodiversité.
Une autre amélioration à apporter à la Loi sur les océans consisterait à imposer une obligation analogue au gouvernement, de sorte qu'il soit tenu de prendre des mesures dès que les données réunies conformément à la Loi permettent d'indiquer l'existence d'un danger écologique important pour l'environnement marin.
Je suis sûre qu'on vous a déjà beaucoup parlé des zones de protection marines. Je suis très contente de voir qu'il en est question dans le projet de loi. Nous félicitons d'ailleurs le gouvernement d'avoir pris cette initiative.
Juste pour vous donner quelques statistiques, en Colombie-Britannique, moins de 0,1 p. 100 des zones côtières et marines bénéficient de protection. Même dans les réserves écologiques les plus strictement contrôlées, la pêche commerciale continue d'être permise. Il n'y a qu'une seule zone de protection marine à usage strictement non commercial en Colombie-Britannique, cette zone ayant pu être créée grâce aux efforts d'une ONG qui travaille très fort pour en établir d'autres. J'espère que c'est justement ce genre de groupe qui va participer à l'élaboration de la stratégie de gestion des océans dont il est question dans ce projet de loi. Il s'agit en fait de la Marine Life Sanctuaries Society, dont les représentants vont peut-être communiquer avec vous ou vous soumettre un mémoire sur le projet de loi à un autre moment.
Comme c'est le cas d'autres zones de protection établies par le biais de lois destinées à protéger les parcs, l'obligation de publier des rapports sur les progrès réalisés dans l'établissement de différents types de zones de protection marines devrait être explicitée dans le projet de loi, d'après le modèle de la Loi sur les parcs nationaux.
Il faudrait prévoir des délais précis pour la préparation des plans de gestion de ces zones, qui devraient d'ailleurs être incorporés dans le projet de loi. Il conviendrait que ces plans de gestion soient déposés devant le Parlement, encore une fois selon le modèle prévu dans les diverses lois sur les parcs. Pour résumer, donc, le projet de loi devrait préciser que le public participera à la préparation des plans de gestion et à la détermination des zones de protection.
Mon dernier point à propos de l'aspect protection environnementale de la Loi sur les océans et de la concrétisation de la vision énoncée par le ministre Tobin dans son document de réflexion, concerne les lignes directrices relatives à la qualité environnementale, qui se trouvent actuellement au paragraphe 32 d) du projet de loi. À la place de ces lignes directrices, nous recommandons que le pouvoir réglementaire prévu dans le projet de loi vise également cette question-là, et ce, pour les raisons que je vais maintenant vous exposer.
L'utilité de lignes directrices environnementales, du type qu'on retrouve dans le projet de loi, reste à prouver. De plus, contrairement aux règlements, il n'est pas possible de les faire appliquer par un tribunal. Depuis un certain temps, tous les paliers de gouvernement semblent privilégier l'activité volontaire en ce qui concerne la protection environnementale. Cela inquiète beaucoup des groupes comme le nôtre, qui travaille dans le domaine du droit de l'environnement, parce que nous savons qu'on peut faire respecter les règlements, mais non les lignes directrices. Étant donné que les ressources gouvernementales deviennent de plus en plus rares, votre priorité sera nécessairement d'assurer le respect de tout ce qui a un caractère obligatoire, de par la loi, mais pas forcément les conditions énoncées dans des lignes directrices. Nous savons également que la recherche menée à ce sujet indique que les industries attachent beaucoup plus d'importance aux règlements qu'aux lignes directrices. Le fait est que l'activité volontaire intéresse beaucoup moins les entreprises que la réglementation.
Je pourrais d'ailleurs vous citer des extraits d'une étude menée en 1994 par Peat Marwick, KPMG, qui révélait que 95 p. 100 des gestionnaires chargés de questions environnementales ayant participé au sondage ont indiqué que la nécessité d'observer la réglementation les motivait à prendre des mesures concrètes, comparativement à 16 p. 100 des répondants qui ont dit que les programmes gouvernementaux d'action volontaire les motivaient à modifier leur comportement.
Il y a donc de réels avantages à établir des règlements, et nous le constatons d'ailleurs tous les jours quand les gens nous appellent pour nous demander ce qu'ils peuvent faire. Si un règlement ou une loi - par opposition à un code de conduite volontaire ou une ligne directrice - est déjà en vigueur, il est évidemment beaucoup plus facile de les aider.
Nous recommandons par conséquent qu'on ajoute un autre élément au pouvoir réglementaire prévu à l'article 35; ainsi, au lieu de prévoir des lignes directrices à ce sujet, on accorderait au ministre le pouvoir d'établir des normes de protection et de gestion du milieu marin.
Voilà qui termine mes remarques concernant les mesures à prendre pour concrétiser cette vision dans la loi. Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup. Nous trouvons toujours fort utile qu'un témoin indique clairement pendant son exposé les différents articles du projet de loi qui le préoccupent, qu'il nous explique la nature de ces préoccupations, et qu'il nous donne une idée des amendements que nous pourrions apporter à la loi pour la renforcer ou la clarifier. Nous tenons donc à vous en remercier.
Je crois comprendre que votre organisation travaille déjà très activement dans le domaine de l'immersion des déchets en mer. Quand nous avons commencé notre travail, je pense que la plupart des gens étaient d'accord pour dire que les principes exposés dans ce projet de loi étaient inattaquables. Ce sont des principes que tous ceux qui s'intéressent à la protection du milieu marin ou des océans seraient prêts à défendre. Voilà justement l'aspect positif de ce projet de loi.
Ce qui me préoccupe un peu, cependant, c'est que nous n'avons pas souvent l'occasion de réexaminer les lois. C'est inévitable, étant donné la nature de notre régime. Après l'adoption d'une loi, à moins que son réexamen futur n'y soit prévu, il se peut que les objectifs fort louables de cette mesure législative ne puissent pas être réalisés parce que les règlements d'application ne soient pas à la hauteur. Je sais très bien que très peu de lois sont réexaminées par le Parlement. Une fois qu'un projet de loi a été adopté, avec ses défauts et ses beaux principes, il est peu probable qu'il subisse des modifications avant bien longtemps.
L'une des choses qui nous préoccupent, c'est le fait que certaines lois n'ont pas été incorporées dans la Loi canadienne sur les océans. L'un des principaux objectifs de ce projet de loi était de regrouper, quand cela semblait logique, des lois ou des programmes actuellement en place et de nous assurer que le ministre aurait non seulement une fonction de coordination mais la responsabilité précise de leur application. En ce qui concerne la Loi canadienne sur la protection de l'environnement que vise la partie VI, et qui traite de l'immersion des déchets en mer, j'aurais trouvé normal, à la suite de l'examen des programmes et de la consolidation des lois, que la responsabilité de cette mesure législative passe de la ministre de l'Environnement au ministre des Pêches, c'est-à-dire à celui qui est responsable de l'administration de la Loi canadienne sur les océans.
Et il y a une autre loi importante qui n'est pas mentionnée dans le projet de loi C-98. Il s'agit de la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques, et notamment les règlements d'application concernant l'immersion des déchets dans les eaux de cette région, qui relèvent de la responsabilité du ministre des Affaires indiennes et du Nord.
Puisque ce projet de loi représente l'unique occasion qui nous sera offerte de fusionner toutes ces mesures législatives dans un même projet de loi, si nous nous rendons compte qu'il y a des lacunes importantes, nous devrions faire l'impossible pour les y inclure, afin que cette mesure soit aussi énergique et efficace que possible après avoir passé toutes les étapes requises. J'aimerais bien savoir ce que vous en pensez, c'est-à-dire si vous pensez que nous devrions convoquer la ministre de l'Environnement et ses hauts fonctionnaires, et lui demander pour quelles raisons elle estime que ces lois ou que certaines parties de lois devraient continuer de relever de son ministère. Peut-être serait-il préférable de les incorporer dans la nouvelle Loi canadienne sur les océans.
Mme Nowlan: Il me semble que vous êtes mieux placé que moi pour répondre à cette question. Je présume que la ministre de l'Environnement a dû vous dire pourquoi le Règlement sur l'immersion des déchets en mer et la Loi sur la prévention de la pollution dans les eaux arctiques ne sont pas visés par cette consolidation. J'ai entendu dire à un moment donné qu'ils seraient inclus dans le projet de loi. Mais quand je l'ai lu, je me suis rendu compte que ce n'était pas le cas. Je me suis dit qu'un comité comme le vôtre, qui a l'habitude d'élucider ce genre de mystères, serait certainement en mesure de fournir une explication à des citoyens comme nous. Mais je suis tout à fait d'accord pour dire que ce serait logique de les inclure.
Le président: J'ai un peu l'impression de lire un roman policier. Il va falloir attendre le dénouement pour connaître l'auteur du crime.
Nous n'avons pas encore reçu la ministre, mais... Sans vouloir me faire passer pour un expert, il me semble que ce sont des éléments importants qui devraient être incorporés dans la nouvelle Loi sur les océans. Êtes-vous du même avis ou pouvez-vous nous dire, en vous fondant sur votre expérience du droit de l'environnement, s'il y a de bonnes raisons de ne pas le faire?
Mme Nowlan: Si l'idée est de regrouper en une seule loi l'ensemble des activités liées aux océans, il me semble important de le faire.
Par contre, j'hésite à éliminer complètement le rôle de la ministre de l'Environnement. Je comprends très bien que le ministère des Pêches et Océans ait la responsabilité de jouer un rôle de chef de file dans ce domaine. Mais j'espère que cela ne voudra pas dire qu'Environnement Canada sera complètement exclu, car ce ministère a jusqu'à présent joué un rôle important au niveau de la protection environnementale - peut-être encore plus important que le ministère des Pêches, par le passé, même si je sais que les deux ministères travaillent toujours en étroite collaboration. Mais je ne vois aucune raison ni légale ni stratégique, de ne pas incorporer ces mesures dans la Loi sur les océans, encore une fois avec la réserve que le ministère de l'Environnement continuerait à participer à toutes décisions relatives à l'immersion des déchets en mer ou à la pollution des eaux arctiques, car je trouve normal que ce dernier joue un rôle de premier plan à cet égard.
Certaines parties de la Loi canadienne sur la protection environnementale accordent des droits particuliers au public, mais ces droits sont absents du projet de loi concernant les océans. Deux particuliers peuvent demander qu'on fasse enquête sur une prétendue violation de la LCPE. Si les dispositions relatives à l'immersion des déchets en mer de la LCPE devaient disparaître, le public n'y aurait plus du tout accès. Il y a également un certain nombre de recours que je voudrais examiner plus en profondeur avant d'affirmer que toute disposition liée à l'immersion des déchets en mer devrait être incorporée dans la Loi canadienne sur les océans. Le fait est que les dispositions de la Loi canadienne sur la protection environnementale liées à l'immersion des déchets en mer offrent un certain nombre de protections au niveau de la procédure. Malheureusement je connais moins bien la Loi sur la prévention de la pollution dans les eaux arctiques.
Mais je trouve logique, surtout si vous envisagez d'élaborer une stratégie de gestion des océans, que l'une de vos priorités soit l'immersion des déchets en mer, si votre mandat est de veiller à la salubrité du milieu marin. Encore une fois, je sais qu'il y a un certain nombre de problèmes de ce côté-là. Je reçois parfois des appels de pêcheurs et d'autres qui voient des gens qui rejettent des substances dans la mer et qui veulent savoir ce qu'ils peuvent faire.
J'espère que cela répond à votre question.
Le président: Oui, mais c'est l'un des mystères que nous allons devoir élucider d'ici la semaine prochaine.
D'autres témoins nous ont parlé d'un problème avec l'article 28, qui concerne la stratégie de gestion des océans. Cet article se lit ainsi:
- Il est entendu que la présente partie ne s'applique pas aux lacs, fleuves et rivières.
En ce qui concerne la gestion des lacs, rivières et fleuves, je sais que dans certains cas, la coupe à blanc, lorsqu'elle est pratiquée près des rives, provoque un problème d'ensablement qui peut avoir de nombreuses conséquences. Il y a aussi la question de l'aménagement du territoire et de tout ce qui s'y rattache; même si le gouvernement ni aucun ministère fédéral n'en a la responsabilité constitutionnelle, ces activités vont nécessairement influer sur la salubrité et la biodiversité du milieu marin.
Conviendrait-il de préciser dans ce projet de loi - bien que ce dernier ne vise pas les lacs, fleuves et rivières - que même si cette question relève des provinces, le ministre doit consulter les gouvernements provinciaux et territoriaux respectifs en vue de l'élaboration des plans de gestion? Pensez-vous que ce serait une bonne idée d'ajouter cet élément-là pour que la situation soit bien claire?
Mme Nowlan: Oui, absolument. J'ai remarqué la même chose que vous, mais je me suis dit que le gouvernement veut exclure la possibilité qu'on conteste la légitimité de ce pouvoir en invoquant la Constitution. Il est évident qu'on ne peut pas séparer les différents éléments d'un écosystème. On ne peut pas séparer le fleuve Fraser de l'océan Pacifique. Ce qui se passe dans nos rivières et nos ruisseaux, qu'ils soient grands ou petits, influence grandement la qualité du milieu marin.
Nous avons déjà un certain nombre d'exemples d'institutions ou de programmes qui ont été mis sur pied pour veiller à la protection d'écosystèmes transfrontaliers, comme le Programme d'aménagement du bassin du Fraser. Ce programme prévoit la participation des gouvernements provinciaux, fédéral et municipaux, car chaque palier de gouvernement a des responsabilités précises à l'égard du fleuve Fraser.
Votre idée d'incorporer une disposition prévoyant la consultation avec d'autres paliers de gouvernement au sujet des rivières me semble très bonne. Par contre, c'est justement ce genre de disposition qui peut être mal compris du public. Les gens ont parfois du mal à comprendre pourquoi cela serait nécessaire. Et après tout, quand on parle de la salubrité de l'environnement marin, la distinction semble un peu artificielle; il est évident que l'océan n'est pas entité distincte et autonome, et nous ne pouvons pas le traiter comme telle.
Le président: Puisque vous parlez du Fraser, je vais tout de suite passer la parole à M. Frazer, qui vient de la côte ouest du Canada. Je pense qu'il a quelques questions à vous poser.
M. Frazer: En fait, monsieur le président, j'habite au large de la côte ouest du Canada, sur l'île Saltspring qui fait partie des îles du golfe.
Vous avez parlé tout à l'heure de l'incidence des rivières et des ruisseaux sur l'océan, et vous avez justement touché une corde sensible, madame Nowlan, quand vous avez mentionné la nécessité de faire participer le public et le fait que ce projet de loi n'exige pas la préparation de rapports.
Vous avez dit que l'article 32 n'est pas assez exigeant. Pour ma part, je trouve que l'article 33 utilise trop souvent le terme «peut» et pas assez le mot «doit» en parlant de l'obligation du ministre de consulter les intéressés.
Avez-vous décidé de ne pas en parler pour une raison particulière, ou est-ce que vos remarques visaient également cet article-là?
Mme Nowlan: Cette omission n'était certainement pas délibérée. À mon avis, le caractère facultatif de la formulation qu'on trouve dans toute la partie II du projet de loi n'est pas du tout approprié; les «peut» devraient être remplacés partout par des «doit», pour que ce soit une obligation. Je suis entièrement d'accord avec vous à ce sujet. La participation du public doit être obligatoire, et non facultative.
M. Frazer: Dans le même ordre d'idées, vous avez parlé dans votre exposé liminaire des zones de protection marine. Au Parti réformiste, nous ne sommes pas contre ce genre de choses, mais nous estimons que les organismes concernés devraient être consultés pour que tout le monde sache ce qui est prévu et pour que ces zones soient constituées après une planification adéquate. Êtes-vous d'accord avec moi?
Mme Nowlan: Oui, la consultation est évidemment fort souhaitable.
Je répète: l'océan couvre la majeure partie de la surface du globe. Or, les statistiques indiquent que seulement une infime proportion de cet écosystème bénéficie de protection. Il est essentiel de désigner des zones de protection marine où il sera désormais interdit de prendre tout ce qu'on veut à des fins de consommation ou autres. Mais il va sans dire que les organismes concernés, publics et privés, et les utilisateurs de ces ressources doivent d'abord être consultés.
Je sais que les gouvernements fédéral et provinciaux commencent déjà à élaborer une stratégie conjointe en vue de constituer des zones de protection marine. Je ne l'ai pas encore vue, mais j'en ai entendu parler, alors je sais que ce travail est actuellement en cours.
M. Frazer: Vous et moi sommes entièrement d'accord là-dessus. Merci beaucoup.
Le président: Je tiens à vous remercier pour votre exposé. Je sais que vous avez probablement toutes sortes d'autres occupations et responsabilités, mais je voudrais vous demander de réfléchir encore à la question de la formulation, parce que c'est important. Si vous pensez que vous pourriez coucher vos idées par écrit et mettre la main sur le rapport que vous avez cité tout à l'heure, je vous demanderais d'envoyer le tout à notre greffier par télécopieur. Cette information nous serait certainement très utile au moment de faire l'examen article par article du projet de loi et de préparer les recommandations à déposer à la Chambre. Est-ce qu'il vous serait possible de faire cela?
Mme Nowlan: Bien sûr, avec plaisir. J'aurais peut-être dû vous envoyer cela plus tôt, mais je n'ai pas eu le temps. J'imagine que l'information en question est sans doute déjà sur votre bureau, mais je vais me pencher de nouveau sur la question, en essayant de tenir compte des observations des membres du comité. Je m'engage à vous communiquer cette information dans les plus brefs délais.
Le président: Je vous remercie d'avance de l'intérêt que vous portez à la question et de bien vouloir prendre le temps d'examiner en profondeur ce projet de loi.
Catherine Stewart, je suis content de vous voir. Je ne vous ai plus revue depuis la Conférence sur le droit de la mer tenue à New York il y a quelques mois.
Mme Catherine Stewart (responsable de la Campagne de défense des pêches, Greenpeace): Oui, c'est bien cela. Moi, aussi, je suis contente de vous revoir.
Le président: Cela s'est très bien terminé. Les ONG ont d'ailleurs travaillé très fort. Quel dommage que d'autres grandes questions internationales ne puissent pas être réglées de cette façon.
Je suis content de vous voir. Nous sommes réunis aujourd'hui pour parler du projet de loi C-98. Je suis sûr que vous avez beaucoup de choses à nous dire, alors je vous cède aussitôt la parole.
Mme Stewart: Merci, Ron. Je vais vous faire un exposé qui va peut-être vous sembler un peu décousu. Je suis sûre que Linda et d'autres témoins sur la côte est vous auront déjà fait valoir bon nombre des mêmes arguments.
Je voudrais commencer tout d'abord par vous remercier de m'avoir donné cette occasion de comparaître devant le comité. Je voudrais commenter brièvement la partie I concernant les zones maritimes et demander quelques précisions sur la question de la zone du plateau continental sur laquelle s'exerce la juridiction canadienne.
Après avoir lu les définitions qu'on retrouve dans les articles 17, 18 et 19, il me semble que le gouvernement fédéral pourrait étendre bilatéralement la zone du plateau continental sur laquelle s'exerce sa juridiction au-delà de la limite des 200 milles marins. Je ne suis pas sûre toutefois que ce soit vraiment l'intention du gouvernement. Jusqu'à un certain point, l'article 76 de l'UNCLOS offre déjà cette possibilité. D'ailleurs, un autre témoin qui a comparu dans le courant de la journée a fait allusion à l'article 76.
Je crois comprendre, cependant, que la souveraineté du Canada ne s'étend pas aux ressources halieutiques. Encore une fois, je demanderais au comité de m'indiquer s'il s'est penché sur la question et s'il est au courant des intentions du gouvernement en ce qui concerne la possibilité que la souveraineté du Canada s'étende aux ressources halieutiques, dans l'éventualité de l'extension de la zone économique exclusive de 200 milles.
Étant donné la tension qui existe à l'heure actuelle, et les nombreuses confrontations, parfois appuyées par les armes à feu, qui ont eu lieu jusqu'à maintenant, et que la convention dont on vient de parler - qui découle de la Conférence des Nations Unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs - n'a pas encore été ratifiée, je pense que ce serait dangereux de laisser entendre à la communauté internationale que le Canada envisage d'étendre la zone sur laquelle s'exerce sa souveraineté sans qu'on ait d'abord éclairci la question des ressources halieutiques et qu'on sache exactement ce qui relève de la responsabilité des autorités canadiennes et à quel titre ces dernières assument cette responsabilité.
Je crois sincèrement qu'une telle initiative pourrait mettre en péril la ratification de la convention des Nations Unies relative aux pêcheries - et ce serait vraiment très dommage, étant donné les efforts considérables déployés par le ministre Tobin et bon nombre d'autres représentants du gouvernement canadien pour faire aboutir les négociations à ce sujet.
Le président: Je voudrais réagir au point que vous venez de soulever, Catherine.
Quand les fonctionnaires du ministère ont présenté une séance d'information sur le projet de loi, cette question a justement été soulevée par M. Baker - cela ne vous surprendra pas, j'en suis sûr - qui vient de la côte est. Il est clair que le gouvernement n'a pas l'intention d'étendre la zone sur laquelle s'exerce sa juridiction au-delà de la limite des 200 milles et de prétendre par conséquent que le droit fédéral vise les ressources halieutiques qui s'y trouveraient.
Mme Stewart: On parle donc uniquement des ressources naturelles non biologiques...
Le président: C'est exact. Il ressortait clairement de la discussion - c'est moi qui ai soulevé ce point, mais les fonctionnaires du ministère étaient du même avis - que la Convention issue de la Conférence des Nations Unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs semble donner un certain poids à la position des États côtiers. Elle permet en effet aux États membres de l'organisation régionale - l'OPANO - de prendre des mesures de conservation analogues à celles prises par les États côtiers dans leurs eaux territoriales pour pallier, mettons, à la situation qui existe actuellement sur la côte est.
Quant au pouvoir du ministre, en vertu de ce projet de loi, de désigner des zones de protection marine, il est clair que si le ministère décide de constituer une telle zone dans une frayère - mettons qu'elle soit située à la limite de la zone économique des 200 milles - aux termes de la Convention issue de la Conférence des Nations Unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs, les États membres de l'organisation régionale pourraient difficilement justifier la prise de mesures allant à l'encontre de cette décision.
Je ne crois pas que le gouvernement ait l'intention d'étendre la zone sur laquelle s'exerce sa juridiction, mais ce projet de loi lui donne malgré tout un outil important pour convaincre l'organisation régionale de défendre énergiquement l'application de mesures de conservation au-delà de la limite des 200 milles.
Mme Stewart: Cela me rassure. Merci.
Toujours sur la question de la Convention des Nations Unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs, je pense que M. Tobin a clairement indiqué dans sa dernière allocution devant l'Assemblée plénière des Nations Unies que la négociation de cette convention constituait une grande réussite pour le Canada et pour toutes les nations représentées à l'ONU.
Je pense que cet enthousiasme et les efforts déployés par le Canada pour faire avancer ce dossier font que le Canada a maintenant l'obligation morale d'essayer d'incorporer dans ses lois internes un certain nombre des principes négociés à New York.
Malheureusement, mon examen du projet de loi C-98 m'amène à conclure que nous n'avons pas vraiment respecté notre obligation morale, sinon légale, d'y énoncer clairement ces principes.
Le fait que le projet de loi ne mentionne aucunement la biodiversité préoccupe Greenpeace, et plusieurs autres ONG, d'ailleurs. On n'y précise pas non plus que la stratégie de gestion des écosystèmes marins sera axée sur le principe de prévention. Toute mention des droits ou intérêts des communautés côtières ou des pêcheurs saisonniers est totalement absente et le projet de loi est muet sur la nécessité de minimiser le gaspillage dans le secteur des pêches, de réduire les prises accessoires, et de favoriser la mise au point d'engins de pêche sélectifs.
Tous ces principes sont clairement énoncés dans la Convention de l'ONU, convention que le Canada s'est engagé à ratifier.
Passons donc à l'article 28 et à la question de la gestion. Je ne suis ni avocate, ni spécialiste de la rédaction des lois, mais j'avoue que le libellé de cette disposition m'inquiète, notamment en ce qui concerne les espèces anadromes.
Je me demande si on pourrait formuler l'article 28 de manière à confier au ministère des Pêches et Océans la responsabilité de veiller à la conservation des lacs, fleuves et rivières qui soutiennent les espèces anadromes - par exemple, ceux qui débouchent dans des zones côtières et qui peuvent donc influer sur la salubrité de l'écosystème estuarien.
Nous avons parlé de principes. J'aimerais simplement ajouter que dans la partie qui décrit les principes qui vont guider l'application de la loi, il conviendrait - toujours conformément à la Convention de l'ONU - de demander que le principe de la transparence y soit inclus.
Je vous demande d'être indulgents, car je n'ai pas eu le temps de discuter de mon exposé avec ceux qui m'ont précédée, et j'imagine par conséquent qu'il y a une certaine répétition. Je pense néanmoins qu'il ressort clairement de nos remarques respectives que nous avons des intérêts communs.
Encore une fois, nous ne sommes pas très contents de constater le nombre de fois où revient le terme «peut» dans cet article, et nous vous exhortons vivement à le remplacer par le terme «doit».
Au paragraphe 32c), il est question de constituer des organismes de consultation ou de gestion dont les membres pourraient être nommés ou désignés par le ministre ou certains organismes gouvernementaux. Je vous fais remarquer cependant que la gestion intégrée des zones côtières nécessite la participation et la coopération du grand public et des utilisateurs des ressources dans les zones et communautés côtières.
À mon avis, on doit éviter de consacrer dans cette loi un principe aussi antidémocratique que celui de prévoir que le ministre nommera ou triera sur le volet les membres de groupes et d'organes de consultation. Cette mesure législative doit au contraire reconnaître clairement que la gestion intégrée ne peut se réaliser que si les résidents des collectivités côtières participent à part entière à toute initiative de ce genre.
Le paragraphe 32d) déclare que le ministre peut établir des directives, des objectifs et des critères concernant la qualité du milieu. Il doit s'agir d'une obligation pour le ministre, et non d'un choix.
Je suis d'ailleurs déçue de voir que la seule déclaration significative au sujet de la salubrité de l'écosystème marin qu'on retrouve dans ce projet de loi ait un caractère facultatif. Cet article doit établir des objectifs précis au niveau de la remise en état de l'écosystème marin, décrire les méthodes qui permettront de responsabiliser les pouvoirs publics et définir un plan d'action.
Vous m'excuserez de répéter ce qui a déjà été dit, mais comme ce sont des questions critiques, je me permets de faire quelques-unes de mêmes observations que les témoins précédents.
L'alinéa 33(1)b) prévoit que le ministre peut conclure des accords avec d'autres ministres ou toute personne de droit public ou de droit privé. Vous avez donné quelques précisions à ce sujet tout à l'heure, en répondant à un autre témoin, M. Eidsvik, mais nous insistons encore une fois pour que cela ne débouche pas sur la privatisation de la gestion des ressources halieutiques et pour que le gouvernement tienne des consultations concernant d'éventuelles modifications à apporter à la Loi sur les pêches, si l'objet de ce projet de loi est d'autoriser de tels changements.
L'article 35 nous préoccupe également. Tout en étant encouragés de voir qu'il y est question de l'éventuelle constitution de zones de protection marine, nous sommes troublés de constater que nulle part ailleurs dans le projet de loi est-il question de conservation et de protection des ressources halieutiques et de leur habitat. Si vous regardez la deuxième partie de cet article, vous verrez que les mesures envisagées ne visent que les zones de protection marine.
Par conséquent, si le gouverneur en conseil ne constitue pas de zones de protection marine, aucune mesure de conservation et de protection des ressources halieutiques ne sera obligatoire, à part celles définies au paragraphe 36(1) en cas d'urgence. Le comité est-il vraiment convaincu que cet article nous permettra de respecter nos obligations en vertu de la convention des Nations Unies sur les stocks de poissons?
Je voudrais également demander au comité en quoi consiste la définition des ressources halieutiques. La définition de ce terme revêt une importance critique dans le projet de loi. Les définitions utilisées traditionnellement par le MPO pour négocier des protocoles d'entente avec les provinces, comme celui qui est actuellement en voie de négociation sur les questions d'habitat, sont extrêmement étroites. Elles tendent à ne viser que les espèces qui sont considérées avoir une valeur commerciale ou celles identifiées comme telles par le passé.
Bien que le projet de loi définisse les termes «ministère», «droit», «navire», et «ministre», on n'y trouve aucune définition des termes «ressource halieutique» ou «ressource naturelle biologique» - une lacune importante, à notre avis. Nous recommandons vivement d'incorporer ces définitions dans le projet de loi.
Nous préconisons également la mention, à l'article 36, du principe de prévention ou de mesures de prévention. Si le libellé actuel est retenu, la nature de la preuve à présenter pour justifier la prise de certaines mesures restera mal définie et les facteurs pouvant déclencher une action de la part du gouvernement demeureront tout aussi incertains. Par conséquent, rien ne sera fait tant que l'écosystème ne sera pas menacé de destruction ou de dommage irréversible, c'est-à-dire le modèle que nous avons toujours appliqué jusqu'à présent.
L'article 37 détermine les amendes maximales qui seront infligées lors de violations de l'alinéa 35b) et du paragraphe 36(1). À notre avis, une amende maximale de 100 000 $ à la suite d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire ne sera pas un découragement suffisant pour les entreprises, et nous recommandons par conséquent un chiffre beaucoup plus élevé.
J'ai également trouvé préoccupant que la seule mention de prévention de la pollution marine que j'ai pu repérer dans le projet de loi figure à l'article 41 de la partie III, où il est question des fonctions de la Garde côtière canadienne. Il semble normal que le ministre, s'il doit assumer la responsabilité des écosystèmes marins, accepte également - et que le projet de loi précise qu'il s'agit d'une obligation - de prévenir la pollution des écosystèmes marins.
Passons à l'article 42 au sujet des sciences de la mer. Encore une fois, nous insistons sur la nécessité de faire remplacer le terme «peut» par le terme «doit»; en réalité, nous n'avons pas le choix. Encore une fois, je fais allusion au fait que le Canada appuie la Convention des Nations Unies sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs. L'article 5j) déclare que les États côtiers «recueillent et mettent en commun sans retard des données complètes et exactes sur les activités de pêche» alors que l'article 5k) de la Convention des Nations Unies porte que «les États côtiers entreprennent et favorisent les recherches scientifiques appliquées à la gestion et à la conservation des ressources halieutiques». Il s'agit par conséquent d'une obligation très claire. Si nous avons l'intention, en tant que gouvernement, de ratifier cette convention des Nations Unies, il nous incombe de reconnaître cette obligation en termes très clairs et précis dans nos lois internes.
Si vous me permettez, je vais sauter un certain nombre de points.
Encore une fois, les accords de partenariat: nous devons nous assurer qu'il y est question de transparence. Même si je me rends compte que certains renseignements devront être considérés comme confidentiels ou des secrets industriels, là nous ne parlons pas de technologie; nous parlons plutôt du principe général de la transparence, et de son application dans la négociation et l'exécution de ces accords. Les résidents des communautés côtières, les pêcheurs, les ONGE et d'autres intéressés doivent avoir accès à des informations qui vont leur permettre de savoir ce que le gouvernement est en train de négocier, avec qui il négocie, et quels engagements ont été pris concernant la durabilité et la viabilité à long terme des ressources marines.
Nous recommandons également de prévoir dans le projet de loi une procédure de réexamen en bonne et due forme. Rédiger un projet de loi n'est évidemment pas tâche facile. Nous nous associons par conséquent à vos remarques précédentes, monsieur le président, concernant la nécessité de réexaminer et de modifier éventuellement une loi qui est en vigueur depuis un certain temps. Nous souhaiterions par conséquent que cette exigence fasse partie du projet de loi et qu'on prévoie son réexamen dans un délai fixe.
J'ai l'impression que mes autres points ont sans doute déjà été soulevés, peut-être à plus d'une reprise, et je vais donc en rester là. Si vous avez des questions à poser, je serais heureuse d'y répondre.
Le président: Catherine, comme d'habitude, vous nous avez présenté un excellent mémoire. Vous avez soulevé tous les points les plus importants en nous faisant un exposé des plus cohérents. Je vous demanderais simplement de faire parvenir au greffier le mémoire que vous venez de lire...
Mme Stewart: Avec plaisir.
Le président: ...parce que nous allons en avoir besoin au moment de préparer les amendements.
À mon avis, la question des termes utilisés dans le projet de loi et les suggestions que vous nous avez faites à ce sujet-là, en vue de garantir que ces dispositions législatives cadrent avec les gains réalisés aux Nations Unis... sont très importantes, de même que les arguments que vous avez fait valoir au sujet de la biodiversité. Vous êtes sans doute le quatrième témoin à nous dire qu'il n'en est nullement question dans ce projet de loi. Nous allons donc préparer des amendements qui permettraient d'y incorporer cette notion.
Il est également clair que l'alinéa 35b) a besoin d'être modifié, parce qu'il y est question de ressources halieutiques. Pour moi, cela indique que les rédacteurs ont fait une erreur, car lorsqu'on parle de ressources marines, on ne parle pas uniquement de ressources halieutiques. Ce point a d'ailleurs déjà été soulevé à deux ou trois reprises par d'autres personnes. Il y a donc un certain nombre d'amendements importants à apporter au projet de loi pour le rendre efficace.
La seule question que je voulais vous poser ressemble un peu à la dernière: voyez-vous d'autres lacunes à combler? Nous avons déjà parlé de tout ce qui doit être changé ou clarifié, mais y a-t-il, selon vous, d'autres lacunes majeures qui vont réduire l'efficacité de la Loi canadienne sur les océans quand elle sera enfin en vigueur? Donc, y voyez-vous d'autres omissions importantes?
Mme Stewart: Eh bien, il s'agit essentiellement des éléments que nous avons déjà mentionnés, c'est-à-dire la nécessité de concrétiser la vision énoncée dans le document du ministre qui était à l'origine de ce projet de loi, et d'y expliciter un certain nombre de principes progressistes. J'ai été très déçue de me rendre compte, en lisant le projet de loi, qu'on n'y parlait guère de biodiversité, de prévention de la pollution marine, du principe de prévention, du contrôle et de l'élimination de polluants marins d'origine terrestre, d'une méthode intégrée de gestion écosystémique et d'une méthode de gestion intégrée pour l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Ce qui semble clair ici, c'est qu'il n'y a pas de coordination entre la main gauche et la main droite.
C'est très bien que le premier ministre ait demandé à M. Tobin de sauvegarder le saumon de la côte ouest. Mais les fonctionnaires de ce dernier ont récemment déclaré que près d'un demi-million de saumons sont morts en raison de la température élevée de l'eau du fleuve Fraser - il s'agissait en fait des températures les plus élevées jamais enregistrées. Or, le Canada ne respecte pas ses obligations en vertu du traité international sur la réduction des émissions de CO2. Une approche gouvernementale intégrée est donc indispensable.
Si nous voulons assurer la durabilité des écosystèmes marins, nous ne pourrons pas nous contenter de réduire les polluants d'origine terrestre, de bien gérer les projets de sondage des fonds marins et les activités de pêche directes et de réduire leur incidence sur l'écosystème. Si nous voulons assurer la durabilité du milieu marin, nous allons devoir nous intéresser aussi au problème de l'appauvrissement de l'ozone, et à ses effets sur la production de phytoplancton, à la viabilité des écosystèmes marins, au changement climatique et à ses effets sur la température de l'eau et la durabilité des espèces. Tous ces éléments sont tout aussi importants les uns que les autres, et c'est la raison pour laquelle je trouve intéressant que certaines activités...
Jusqu'à un certain point, l'idée que l'immersion des déchets en mer continue de relever d'Environnement Canada me semble souhaitable, même si logiquement, c'est quelque chose qui devrait normalement être visé par la Loi sur les océans. Il faut que ces deux ministères travaillent en étroite collaboration et communiquent régulièrement entre eux. Si une certaine fragmentation est inévitable, puisque plusieurs ministères auront des responsabilités dans ce secteur, il devient encore plus important d'encourager les ministères fédéraux à assurer de bonnes communications interministérielles. Voilà ce qui permettra d'assurer une bonne gestion de tous ces dossiers à long terme.
Le président: Merci. Je passe la parole à M. Dhaliwal.
M. Dhaliwal: Je voudrais dire tout d'abord que depuis notre rencontre à New York, plusieurs mois se sont écoulés, et je suis donc content de vous revoir. Je voudrais également vous remercier pour votre exposé.
Vous n'avez pas beaucoup parlé des zones de protection marine. Certains témoins sont d'avis que nous devrions peut-être nous fixer des objectifs précis, c'est-à-dire un certain nombre de zones de protection marine ou un délai spécifique pour la constitution de ces zones. Je me demande si vous avez des idées particulières à ce sujet, et aussi quelle procédure il faudrait suivre, d'après vous, pour les mettre en place. Comme vous le savez, nous ne nous sommes pas encore vraiment penchés sur la question de savoir comment nous devrions déterminer l'emplacement des zones de protection maritime. Il y aura nécessairement plusieurs étapes avant la désignation proprement dite et de longues consultations.
Je voudrais également savoir si vous pensez que la loi devrait être réexaminée après trois ans, quatre ans ou cinq ans? Je suis d'accord avec vous pour dire que c'est important. Il s'agit d'une nouvelle loi et nous ne savons pas très bien quels résultats elle va donner. Il faut donc prévoir un réexamen en profondeur en comité à un moment futur. Peut-être pourriez-vous me dire quel délai vous semblerait convenir.
Je me demande donc si vous auriez des idées qui nous aideraient à régler ces deux questions.
Mme Stewart: Je voudrais bien pouvoir vous donner des idées, mais curieusement, vous m'avez demandé d'aborder une question qui ne correspond pas vraiment à notre domaine de spécialisation, à savoir les zones de protection marine.
Je sais que de nombreux autres groupes, s'ils avaient été au courant de ces audiences, auraient probablement été ravis de venir vous parler des zones de protection marine. Nous nous ferions un plaisir de vous donner leurs coordonnées, parce qu'ils ont une idée précise des critères les plus importants à satisfaire et de la proportion de l'écosystème marin qu'il convient de protéger. Ils pourront peut-être même vous faire des suggestions au sujet de la procédure à suivre.
Même si Greenpeace préconise la constitution de zones de protection marine, nous avons certaines réserves à ce sujet. Nous craignons que les autorités y voient une solution facile à ce qui peut être un problème très complexe. Nous n'allons certainement pas favoriser la diversité des espèces si, par exemple, nous constituons une zone de protection marine qui se trouve coincée entre une raffinerie de pétrole et une usine de pâtes, si les règlements qui sont déjà en place ne sont pas appliqués, et si le cycle de la marée et le mouvement des espèces entraînent la contamination d'un secteur situé à la périphérie ou même à l'intérieur - comme c'est fréquemment le cas - de la zone de protection.
Nous sommes fermement convaincus qu'une stratégie de constitution de zones de protection s'impose, mais une stratégie appuyée par l'application rigoureuse des règlements de la Loi sur les pêches relatifs aux substances dangereuses, des règlements d'application de la LCPE et des lois environnementales qui sont déjà en vigueur.
Malheureusement, ce n'est pas le cas à l'heure actuelle. À moins que l'initiative consistant à constituer des zones de protection marine ne soit appuyée par l'application rigoureuse des lois existantes, le public est susceptible d'y voir une sorte de panacée alors que le problème restera entier. Je laisserai aux groupes qui travaillent directement dans ce domaine le soin de vous dire quelle proportion de l'écosystème devrait être protégé, puisque je vous ai exposé nos réserves à ce sujet.
Pour ce qui est du réexamen de la loi, je pense qu'il conviendrait de prévoir ce réexamen deux ou trois ans après son entrée en vigueur. Cela peut vous sembler un peu court, mais j'ai l'impression que ce sera peut-être nécessaire. Après deux ou trois ans, nous saurons quelles autres questions importantes doivent être abordées dans la loi. Ainsi nous ne serons pas obligés d'attendre trop longtemps pour régler tout éventuel problème, même si le processus d'examen proprement dit risque d'être assez long.
M. Dhaliwal: Merci beaucoup.
Les représentants du Fonds mondial pour la nature ont soulevé un certain nombre de points au sujet des zones de protection marine, mais je voulais aussi connaître la position de Greenpeace à ce sujet. Merci infiniment pour votre exposé. Je pense que vous nous avez donné de très bonnes idées et je peux vous assurer que nous les étudierons avec sérieux.
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
Je tiens à vous dire que je suis vraiment ravi que nous ayons pu vous recevoir ce soir. Vos observations sont extrêmement importantes. J'ai aussi demandé à d'autres témoins de réfléchir à ces mêmes questions. Je sais que vous avez écouté les commentaires d'autres témoins également.
Pour nous, ce projet de loi représente une première étape fort importante. Nous sommes un petit peu inquiets, parce que si des erreurs sont commises, les bases de ce projet de loi ne seront pas solides. Et quand les fondations ne sont pas bien faites, il s'ensuit que la maison ne peut résister aux rigueurs de l'hiver.
Donc, nous vous saurions gré de bien vouloir nous envoyer les documents dont nous avons parlé tout à l'heure. Si vous avez d'autres observations au sujet du projet de loi, n'hésitez pas à nous le faire savoir. Quand nous allons commencer à préparer la version définitive, peut-être permettriez-vous que nous nous mettions de nouveau en rapport avec vous pour vous demander d'autres éclaircissements avant de faire rapport du projet de loi à la Chambre; je sais que personnellement, je trouverais cela bien utile.
Mme Stewart: Bien sûr, je serais très heureuse de le faire, Ron.
J'encourage vivement le comité à communiquer avec un maximum de groupes et de particuliers et à solliciter leurs vues. Je me rends compte qu'un budget limité vous empêche peut-être de voyager, mais il me semble très important que la consultation soit aussi large que possible et que vous soyez prêts à prendre le temps qu'il faut.
Bien que de nombreuses ONG, y compris Greenpeace, se plaignent souvent de la lenteur de l'action gouvernementale, nous avons été un peu pris au dépourvu cette fois-ci. Nous trouvons regrettable que le gouvernement ait agi aussi vite, passant rapidement les étapes de la première et de la deuxième lectures, et convoquant des audiences avec très peu de préavis et très peu de consultation des ONG, des pêcheurs et des communautés côtières, dont la majorité ignorent encore que tout cela est en cours.
Enfin, si vous me permettez un dernier commentaire, je dirais que le gouvernement ferait mieux de ralentir les travaux et de consulter les personnes qui vont être directement touchées par cette loi. Vous avez raison de croire que c'est une loi très importante, et comme ses conséquences pourraient être assez considérables, il faut absolument que vous entendiez leurs points de vue.
Merci infiniment de m'avoir accordé ce temps de parole. Je suis bien contente que nous ayons pu finir un peu plus tôt que prévu.
Le président: Merci.
Je voudrais remercier tous nos témoins à Vancouver d'avoir accepté de comparaître. Nous attendons avec impatience de recevoir vos mémoires écrits et toute autre observation que vous pourriez juger utile. Merci infiniment de votre participation.
La séance est levée.