[Enregistrement électronique]
Le mardi 24 octobre 1995
[Traduction]
Le président: Bonjour, chers collègues. Nous reprenons l'étude du projet de loi C-101, Loi sur les transports au Canada.
Notre premier témoin est quelqu'un que le comité connaît bien. Il s'agit de Ron Bennett, directeur législatif des Travailleurs unis des transports. Il est accompagné de Tim Secord, directeur législatif alternant.
Bienvenue à notre comité, messieurs. Nous sommes toujours impatients d'entendre les exposés inspirants que vous faites aux membres toujours assidus de notre comité. Nous avons bien hâte d'entendre ce que vous avez à nous dire aujourd'hui, mais nous espérons que vous pourrez vous en tenir à 15 minutes, Ron, pour que nous puissions vous poser des questions quand vous aurez terminé.
Bienvenue et vous pourrez commencer quand vous serez prêts.
M. Ron Bennett (directeur législatif, Travailleurs unis des transports): Merci, monsieur le président. Comme d'habitude, les Travailleurs unis des transports sont heureux de venir témoigner devant votre comité. Les choses ont bien changé au cours des années et nous avons perdu la salle du Comité des chemins de fer, mais votre comité a encore beaucoup de travail important à faire.
Le projet de loi C-101 représente de toute évidence un engagement envers un remaniement important de la Loi sur les chemins de fer, qui nous a bien servis pendant des années. Même nous reconnaissons cependant qu'il fallait vraiment mettre un peu d'ordre dans la Loi, et c'est l'une des choses que vise le projet de loi C-101.
Nous allons essentiellement passer en revue certains des points saillants de notre mémoire, que nous avions remis il y a quelque temps. Ensuite, nous sommes tout à fait disposés à répondre à vos questions.
Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de Tim Secord, le directeur législatif alternant pour le Canada. À compter du 1er janvier prochain, il sera directeur législatif canadien. Je suis certain qu'il reviendra témoigner devant votre comité à maintes reprises à l'avenir.
La première chose que je tiens à signaler, c'est que les TUT reconnaissent en principe qu'il faut apporter certains changements à la Loi nationale sur les transports de 1987 et que, sous bien des aspects, la Loi sur les chemins de fer est maintenant périmée. Certaines de ses dispositions ont été abrogées ou modifiées par d'autres lois comme la Loi sur la sécurité ferroviaire. Même si certains changements sont nécessaires, nous craignons que l'on procède peut-être un peu trop rapidement.
Il est cependant juste de dire que nous avons participé à certaines consultations avec les adjoints du ministre et que nous avons bien apprécié cette innovation. Ce n'est pas souvent dans le passé qu'on nous a consultés à l'avance à propos de projets de loi. Nous avons bien aimé pouvoir discuter de certaines des ébauches préparées pour le personnel du ministre.
Nous sommes très inquiets des changements proposés aux dispositions qui portent sur le fonctionnement des sociétés ferroviaires et l'abandon des lignes étant donné que l'on n'a pas prévu de consultations et de participation du public. Selon nous, c'est une chose qui a très bien fonctionné dans la Loi sur les transports nationaux et qui était très efficace aussi à l'époque de la Commission canadienne des transports. C'était une bonne chose de pouvoir tenir des audiences publiques au sujet de l'abandon des lignes.
Je sais que la raison pour laquelle on veut modifier ce processus, c'est pour accélérer le processus d'abandon, de vente ou de transfert des lignes. La seule chose qui nous inquiète, c'est que le public ne pourra pas participer au processus et nous espérons que vous pourrez envisager certains changements dans ce domaine.
Une autre chose qui nous préoccupe, c'est que le même processus semble exister non seulement dans l'industrie des transports, mais dans d'autres industries pour lesquelles le secteur fédéral veut faire passer au secteur provincial ou aux municipalités le coût des opérations commerciales au Canada. À notre avis, cela entraînera soit une détérioration des services, soit des coûts élevés pour les contribuables.
Bien sûr, nous savons que s'il y a des coûts qui reviennent au gouvernement fédéral, c'est le contribuable qui paiera la note. Cependant, nous craignons que les régions moins riches du pays n'auront pas les moyens de payer pour ces services et qu'elles finiront par les perdre.
Nous savons que la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a maintenant été modifiée, mais nous craignons que la caisse d'aide à l'adaptation mise sur pied dans le cadre de ces changements ne suffira pas à compenser les besoins créés par les changements apportés au tarif du Nid-de-corbeau. Nous ne savons pas si les gouvernements provinciaux, surtout dans les régions des Prairies où le réseau routier n'est pas à la hauteur du réseau de l'Ontario, vont être en mesure d'assumer les coûts reliés à l'accroissement du nombre de camions sur les routes quand les céréales cesseront d'être acheminées par train grâce aux nombreuses lignes d'embranchement des Prairies.
De façon générale, nous croyons aussi, et cela peut sembler étrange de nous entendre dire une telle chose, qu'il faudrait une initiative fédérale pour s'attaquer au problème du réseau routier national. Le gouvernement devrait peut-être verser une partie des recettes produites par la hausse de la taxe d'accise sur l'essence ou autre chose du genre à un programme routier national. Cela ne nous arrive pas tellement souvent de préconiser la réfection des routes parce que nous considérons les camions comme nos principaux rivaux, mais nous savons que les changements apportés à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et les modifications contenues dans le projet de loi C-101 vont exercer d'énormes pressions sur l'infrastructure routière de l'Ouest canadien.
La deuxième chose importante qui nous préoccupe, c'est que le projet de loi ne semble pas vraiment s'attacher à la question du service voyageur. Les services voyageurs qui ne relèvent pas maintenant de VIA Rail et sont subventionnés par le gouvernement en vertu de la LNT seront laissés, comme nous le disons dans notre mémoire, et c'est peut-être un peu trop fort, à la merci du ministre selon l'article 49 de la mesure. Selon nous, les services voyageurs pour lesquels on a établi qu'il existait un besoin devraient être subventionnés. L'article 49 devrait l'énoncer plus clairement au lieu de dire simplement qu'il y aura des négociations entre le ministre et les divers transporteurs.
Les TUT sont bien d'accord pour qu'on s'efforce de transférer les lignes au lieu de les abandonner. Nous n'aimons certes pas voir des lignes abandonnées. Dans certains cas, cependant, peu importe ce qu'on peut faire, il faut à la fin du compte abandonner la ligne. Si les lignes sont transférées plutôt qu'abandonnées, cela veut dire que les marchandises pourront continuer d'être transportées par chemin de fer, ce qui est important selon moi. Nous n'avons rien à redire aux CFIL. Nous sommes cependant tout à fait convaincus qu'ils doivent être internes, comme je l'ai dit un millier de fois déjà. Ils doivent continuer de faire partie du réseau ferroviaire. Il ne faudrait pas s'en servir ou sembler s'en servir pour détruire les syndicats des cheminots.
C'est clairement la possibilité que laisse entrevoir l'Association des syndicats de cheminots du Canada en demandant qu'on s'occupe en même temps du code du travail. Ce n'est pas ce que nous comptons faire nous-mêmes. Nous n'allons pas demander à votre comité de modifier le code du travail ou de formuler des recommandations en ce sens, sauf que nous croyons que si les sociétés ferroviaires peuvent se servir de cette mesure pour se départir d'un certain nombre de leurs lignes d'embranchement, les travailleurs qui vont être touchés par ces changements doivent être protégés d'une façon quelconque.
Soit dit en passant, le chemin de fer Central Western a été le premier CFIL du Canada. On a fait beaucoup de bruit à ce sujet. Nous avons toujours eu certains soupçons à propos de la façon dont cela s'est fait et d'où l'argent venait, mais maintenant que l'on annonce des changements et que le gouvernement nous dit que nous devons nous tourner vers la libre entreprise et favoriser un libre mouvement des marchandises, qu'arrive-t-il? On se prépare encore une fois à sortir du pétrin le chemin de fer Central Western grâce à une partie de l'argent qui avait été réservé pour les paiements pour le grain de l'Ouest pour que cette compagnie puisse continuer à subsister. Cela nous étonne beaucoup que le gouvernement actuel, qui veut privatiser le CN et faire en sorte que la situation au Canada se rapproche davantage de ce qu'elle est aux États-Unis à cause de la Loi Staggers, ait pris une telle décision au sujet de ce chemin de fer.
Sous bien des aspects, nous nous inquiétons des changements à la Loi sur les chemins de fer. Nous n'allons cependant pas entrer dans ces détails maintenant parce que nous savons qu'il fallait apporter certains changements d'ordre administratif, comme nous l'avons dit dès le départ. Selon nous, le projet de loi va peut-être trop loin et trop vite. Nous comprenons néanmoins que certaines de ces mesures visent à accélérer la vente du CN et à rendre le CN plus attrayant pour les acheteurs.
Nous ne sommes pas complètement convaincus que le Canada doive aller aussi loin que la Loi Staggers, et nous ne sommes pas non plus complètement convaincus que cette approche ait bien fonctionné dans tous les cas aux États-Unis. C'est cependant ce que le gouvernement a décidé de faire en ce qui concerne ce projet de loi, et certains vous ont sans doute dit que ce n'était pas suffisant à leurs yeux.
Les TUT savent qu'on n'a pas retenu pour ce projet de loi l'idée d'accorder aux chemins de fer d'intérêt local des droits de circulation sur les lignes exploitées par les principaux transporteurs. C'eut été d'ailleurs une grave erreur. L'efficience réclamée par les expéditeurs n'en aurait pas découlé.
Je ne sais d'ailleurs pas ce que veulent au juste les expéditeurs. On leur offre aujourd'hui les mêmes tarifs qu'en 1974-1975. Ils ne seront pas satisfaits avant d'avoir obtenu les mêmes tarifs qu'en 1930, mais nous étions bien aises de voir ces tarifs disparaître. Si le comité avait des doutes à ce sujet, je peux l'assurer que cette mesure ne serait pas dans l'intérêt à long terme des expéditeurs pas plus que dans celui des chemins de fer canadiens.
Cela étant dit, monsieur le président, je répondrai maintenant volontiers à vos questions.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Bennett. Comme par le passé en ce qui concerne d'autres projets de loi, les TUT ont étudié soigneusement chaque page de ce projet de loi-ci et y ont proposé des modifications. Nous vous remercions de votre mémoire.
J'ouvre maintenant la période de questions.
Monsieur Johnston, avez-vous des questions?
M. Johnston (Wetaskiwin): Pas pour l'instant, monsieur le président. Je vous remercie.
Le président: Très bien.
Monsieur Nault, à vous.
M. Nault (Kenora - Rainy River): Je vous remercie, monsieur le président.
Je me réfère à une partie du projet de loi lui-même et à la partie du mémoire des TUT où l'on compare l'avantage qu'il y aurait à légiférer en ce qui touche les chemins de fer d'intérêt local plutôt qu'à laisser libre cours aux négociations.
J'aimerais obtenir une explication et peut-être une précision des représentants des TUT sur le contenu du paragraphe 22 à la page 7 du mémoire. Je cite:
- Nous continuerons de le faire aussi longtemps que le processus législatif le permettra, mais
nous pensons que ce processus aurait dû être prévu dans le projet de loi.
M. Bennett: En un mot, monsieur le président, oui, nous aimerions qu'on légifère en ce sens ou que cette protection soit assurée dans le projet de loi. Nous pensons effectivement qu'on devrait envisager la possibilité de créer un chemin de fer d'intérêt local avant de vendre, de louer ou de céder la ligne.
À notre avis, le problème que pose le projet de loi c'est qu'il existe actuellement des accords négociés créant des chemins de fer d'intérêt local. Nous espérons d'ailleurs qu'il y en aura davantage, mais ce projet de loi facilite la tâche aux chemins de fer qui veulent vendre certains tronçons de sorte qu'il ne nous sera pas possible d'entamer des négociations pour créer d'autres chemins de fer internes même si nous pensons que c'est dans l'intérêt de tous les intéressés.
En bref, voilà donc ma réponse. Nous ignorons cependant quels amendements il conviendrait d'apporter au projet de loi, mais nous voudrions que ce principe soit protégé dans la loi car il ne l'est pas à l'heure actuelle.
M. Nault: J'aimerais aussi une précision sur la conviction exprimée par les TUT au paragraphe 23 de la page 7 de leur mémoire. Je cite: «Les chemins de fer d'intérêt local devraient continuer de relever du gouvernement fédéral».
Je suis sûr que vous savez que les exploitants de chemins de fer d'intérêt local ont parfaitement le droit de demander une charte fédérale et de relever ainsi du gouvernement fédéral s'ils le souhaitent. À l'heure actuelle, ils peuvent toujours choisir d'être réglementés par le gouvernement provincial. Faudrait-il, selon vous, les contraindre à relever du gouvernement fédéral?
M. Bennett: Monsieur le président, il est inhabituel qu'on me pose une question à laquelle je peux répondre aussi brièvement. Ma réponse est oui.
M. Nault: Dans ce cas, pourquoi voudriez-vous ainsi forcer la main à l'exploitant d'un chemin de fer d'intérêt local?
M. Bennett: Nous estimons que la législation fédérale protège mieux les travailleurs. C'est la principale raison pour laquelle nous voudrions que les chemins de fer d'intérêt local demeurent de compétence fédérale. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous voulons surtout assurer une certaine protection aux employés actuels du CN et du CP, les principaux chemins de fer fédéraux. À notre avis, la Loi actuelle ne les protège nullement. C'est le point que nous faisons valoir au paragraphe 23.
M. Nault: Vous ne vous êtes pas étendu très longuement sur ce qui semble constituer la pomme de discorde parmi les expéditeurs, soit le paragraphe 27(2) de la Loi qui porte évidemment sur l'accès des expéditeurs à l'Office, mais nous nous demandons toujours si cet accès est nécessaire.
Avez-vous des commentaires à faire au sujet du paragraphe 27(2) et au sujet de l'ensemble du processus de réglementation qui vise, sous une forme ou une autre, à protéger les expéditeurs de taux concurrentiels? J'aimerais connaître la position du syndicat sur la réglementation et sur les changements que nous y apportons. Au sein du comité, nous avons eu de vives discussions avec les expéditeurs au sujet de l'incidence de ces changements sur leur rentabilité et leur compétitivité.
M. Bennett: En fait, la première fois que nous avons étudié toute la question des tarifs concurrentiels, nous n'étions pas très enthousiastes parce que nous n'y comprenions rien. Je ne suis pas sûr qu'on ait supprimé tout recours aux expéditeurs.
Au sujet du paragraphe 27(2), je ne suis pas sûr... L'expression «préjudice important» doit sûrement préoccuper les expéditeurs, mais je ne comprends pas vraiment leur point de vue. De façon générale, nous n'avons pas vraiment examiné les articles de la Loi qui se rapportent à ce qu'on pourrait appeler les opérations financières entre expéditeur et transporteur. Nous n'avons pas consacré beaucoup de temps à l'étude de cette question.
M. Nault: J'aimerais poser une dernière question. Les expéditeurs ont laissé entendre de façon indirecte plutôt que directe que depuis 1987, soit depuis l'adoption de la LTN, il existe une certaine concurrence artificielle qui a permis aux chemins de fer et aux expéditeurs de conclure de très bons accords. Les expéditeurs s'interrogent sur la nécessité pour le gouvernement d'intervenir dans ce domaine. Selon eux, certaines modifications administratives s'imposent, mais tout comme les chemins de fer, ils sont d'avis que le gouvernement n'a pas vraiment à s'immiscer dans leurs affaires et qu'il n'est pas nécessaire de modifier en profondeur la loi.
J'aimerais savoir quelle est l'opinion du syndicat sur la situation de l'industrie ferroviaire canadienne. Les membres de votre syndicat pensent-ils notamment que les changements qu'on propose sont nécessaires parce que si ces changements ne sont pas effectués maintenant, ils risquent de ne pas apprécier ceux qu'on leur proposera par la suite. J'aimerais connaître l'avis des travailleurs là-dessus.
M. Bennett: Dans l'ensemble, nos membres reconnaissent que des changements sont nécessaires, mais ils sont très hésitants. Nous nous méfions du changement. Nous avons cependant étudié la situation et nous en avons discuté avec nos membres. Ils savent que certains changements s'imposent.
Ils se préoccupent toujours des changements législatifs comme ceux qui ont été apportés au cours de la dernière ronde de négociations, car l'objectif était alors de tenir compte des intérêts tant du syndicat que de l'industrie ferroviaire, mais ce n'est pas ce qui s'est produit. Le juge ne s'est penché que sur les opérations transcanadiennes ou sur la liaison Montréal-Vancouver dans le cas du CP et ne s'est pas préoccupé de rendre une décision qui favoriserait de bonnes relations de travail. Nos membres se méfient donc de tout changement.
Peu à peu, nous prenons conscience qu'il faut faire quelque chose dans l'ouest du Canada; il faut faire quelque chose au sujet de la situation des lignes d'embranchement et il faut faire quelque chose au sujet du coût global. Si les provinces ne sont pas disposées à abaisser leurs diverses taxes foncières et taxes sur les carburants, il faut trouver une autre solution. Mais nous commençons à en avoir par-dessus la tête d'être convoqués à la table des négociations et d'assumer nous-mêmes le fardeau en entier.
Petit à petit, nous prenons conscience que nous devons peut-être appuyer certains changements proposés. Pour ma part, je ne peux assurément pas défendre la cause des expéditeurs et je ne le ferai jamais. En effet, j'ai déjà dit que la législation «Aller sans entraves» de M. Mazankowski était une loi des expéditeurs. Elle demeure une loi des expéditeurs et je ne pense pas que le projet de loi C-101 y change quoi que ce soit. Je crois que dans l'ensemble, la législation demeure conçue en fonction des expéditeurs, même si je suppose que l'on pourrait soutenir qu'au bout du compte, elle vise le mieux-être à la fois des compagnies de chemin de fer et du public. Ce qui me préoccupe, c'est que les chemin de fer doivent continuer d'être en mesure de faire leurs frais dans un marché libre. Si nous avons un marché libre, les compagnies doivent pouvoir faire leurs frais.
Le président: Chers collègues, y a-t-il d'autres questions?
Il semble qu'il n'y en ait pas.
Monsieur Bennett, monsieur Secord, merci beaucoup d'être venus faire une présentation devant notre comité. Nous vous sommes reconnaissants du travail que vous avez accompli dans ce rapport.
M. Bennett: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je voudrais ajouter que j'ai la chance, grâce à de mauvaises négociations dans le passé, de pouvoir prendre ma retraite à la fin de l'année malgré mon jeune âge et que j'ai l'intention d'en profiter. Ce sera donc ma dernière comparution devant le comité. C'est avec plaisir que j'ai comparu ici à diverses reprises, sous divers gouvernements et devant divers députés, et je vous souhaite le meilleur succès dans vos délibérations.
Merci beaucoup.
Le président: Nos meilleurs voeux de retraite, Ron.
Chers collègues, nous souhaitons maintenant la bienvenue à John Edgar, de Repap Enterprises Inc.
M. John R. Edgar (vice-président, Transports, Repap Enterprises Inc.): Bon après-midi.
Le président: Bon après-midi. Je ne sais plus trop l'heure qu'il est, mais en tout cas, je vous souhaite la bienvenue devant le comité.
Si vous pouviez résumer votre présentation en une quinzaine de minutes ou moins, nous aurions le temps de vous poser quelques questions à la fin de votre exposé. Je vous demanderais de bien vouloir nous présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez la parole.
M. Edgar: Je m'appelle John Edgar et je suis vice-président aux Transports de Repap Enterprises Inc.
Je suis accompagné aujourd'hui de M. Howard Hart, qui siège au conseil d'administration de Repap et qui était auparavant président de l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers.
Repap souscrit aux observations présentées au comité par l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers. Pour sa part, la compagnie Repap a décidé de faire porter sa présentation uniquement sur l'accès immédiat et raisonnable à l'Office. Nous croyons qu'en l'absence d'un tel accès, les dispositions prévues ailleurs dans le projet de loi quant à l'aide aux expéditeurs seront dénuées de sens. Nous avons déjà fait parvenir au comité copie de notre mémoire.
M. Hart fera quelques observations liminaires, après quoi nous serons disponibles pour répondre à toute question que vous voudrez bien nous poser.
Monsieur Hart.
M. Howard Hart (administrateur, Repap Enterprises Inc.): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, c'est un plaisir pour moi que d'être ici cet après-midi.
Je me permets de prendre quelques secondes pour donner des précisions sur mon compte. Comme M. Edgar l'a dit, j'ai fait carrière à l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers, où j'ai travaillé pendant une quarantaine d'années. Pendant les 23 dernières de ces 40 années, j'étais président et chef de la direction de l'Association.
Je peux vous dire qu'à ce poste, je m'intéressais de très près aux questions de transport. Ces questions ont toujours préoccupé l'association au nom des entreprises du secteur et, au fil des années, nous avons participé à un bon nombre de débats publics dans le domaine des transports. Je crois que ma carrière m'a effectivement permis d'être un témoin privilégié des répercussions d'un certain nombre de régimes instaurés successivement au Canada dans le domaine des transports et de voir comment chacun de ces régimes avait influé sur l'évolution des compagnies de chemin de fer et des expéditeurs.
Lorsque j'ai commencé à m'intéresser à ce dossier, nous devions composer avec une mesure législative adoptée dans les années de l'après-guerre. Ma foi, il me semble que c'est si loin que c'est presque comme si cela venait d'une autre planète; quoi qu'il en soit, c'est ce qui existait à l'époque. Il y a eu ensuite la Loi de 1967 sur les transports nationaux et la Loi de 1987 sur les transports nationaux. À mon avis, il ne fait aucun doute que la Loi de 1987, celle qui est actuellement en vigueur, a été, en matière de transport, la mesure législative la plus importante et la plus efficace jamais adoptée dans notre pays.
Cette loi a accompli un certain nombre de choses. Elle a soulagé les sociétés ferroviaires de certains aspects de leur fardeau réglementaire. Elle a exigé des transporteurs ferroviaires qu'ils se fassent concurrence pour fixer les prix, alors qu'en vertu de la loi antérieure, ils étaient autorisés à convenir des taux qu'ils offriraient aux expéditeurs, et ils ne se privaient pas pour le faire.
Grâce à ce nouveau cadre concurrentiel instauré par la loi - ce qui a été à mon avis sa principale contribution - les transporteurs ferroviaires ont fait preuve de beaucoup plus de créativité dans leurs services. L'efficacité des chemins de fer s'est améliorée et les coûts ont baissé. Si l'on analyse honnêtement ce qui s'est produit au cours de ces années, il faut bien admettre que les transporteurs ont brillamment réussi à tirer parti de la mesure.
La Loi de 1987 établissait aussi clairement que la concurrence serait le moteur des décisions concernant les taux et les services. Dans les cas où la concurrence était insuffisante ou inefficace, la loi a fait intervenir des éléments favorables à la concurrence, comme le prix de ligne concurrentiel, maintenant bien connu, les arrangements relatifs à l'interconnexion et l'arbitrage des propositions finales. À l'appui de ces éléments, la loi a prévu des dispositions d'accès à l'Office des transports du Canada, dispositions qui sont simples et efficaces et qui - ce qui est le plus important à mes yeux - permettent une intervention rapide.
Selon moi, cette mesure s'est avérée excellente. Elle a réussi à inciter les transporteurs ferroviaires à prendre de nouvelles initiatives pour favoriser l'efficience et elle a créé un cadre favorable à la concurrence au sein duquel pouvaient évoluer les transporteurs et les expéditeurs. Elle a eu d'excellents résultats.
Le projet de loi C-101 que le comité étudie maintenant conserve en grande partie la même orientation et je pense qu'il en féliciter les rédacteurs de politiques. Le projet de loi va encore plus loin pour réduire le fardeau de la réglementation imposée aux transporteurs ferroviaires, ce qui est fort nécessaire. Et si la réaction récente des transporteurs est garante de l'avenir, on peut être sûr qu'ils sauront augmenter leur efficience et leur productivité.
On retrouve dans le projet de loi les mêmes dispositions concernant les taux concurrentiels de base et les services comme les prix de ligne concurrentiels, l'interconnexion et l'arbitrage des propositions finales, et nous nous en réjouissons. Malheureusement, on y introduit parallèlement certains concepts nouveaux qui sont moins réjouissants et qui, pour parler franc, nous semblent inutiles. Permettez-moi d'essayer de vous en convaincre.
Dans le projet de loi C-101, on a recours à une nouvelle terminologie, terminologie douteuse dont l'interprétation est incertaine. Le projet de loi propose également un processus plus rigide pour ce qui est de l'accès à l'Office. Nous ferons de ces deux points le sujet principal de notre exposé.
Soit dit en passant, le groupe Repap appuie sans réserve le mémoire de l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers et d'ailleurs a contribué à sa rédaction. Cependant, dans notre propre mémoire, nous voulons nous concentrer sur la question de l'accès à l'Office.
Le paragraphe 27(2) exigera de l'expéditeur qu'il fasse la preuve qu'il a subi un préjudice important avant d'avoir accès à la procédure d'arbitrage de l'Office.
Je pose la question: Qu'entend-on par «préjudice important»? Je ne pense pas qu'on ait jamais utilisé ces expressions dans une mesure concernant les chemins de fer auparavant. Comment fait-on la distinction avec d'autres genres de préjudice, ou simplement un préjudice ordinaire? À mon avis, il s'agit là d'une expression qui prête énormément à confusion.
Mais la question la plus importante est la suivante: Pourquoi cette disposition est-elle nécessaire alors qu'en vertu de la procédure actuelle prévue par la loi, qui ne prévoit pas cet obstacle, l'Office des transports du Canada n'a pas reçu une avalanche de cas. En fait, je crois que l'Office n'a été saisi que d'une poignée de cas depuis les huit ans environ que la loi est en vigueur.
Le paragraphe 34(1) permet à l'Office d'accorder des indemnités si une demande est jugée frustratoire. Je suis heureux qu'il ne s'agisse pas d'une accusation; on énonce simplement une éventualité. Mais l'expérience ne montre pas qu'il y ait eu de nombreux cas - qu'ils soient frustratoires, bien fondés ou autres. Par conséquent, une fois de plus, pourquoi un tel obstacle?
Bref, je crois que l'expérience des huit dernières années montre qu'en raison de la simplicité, de l'efficacité et de la rapidité de la procédure d'accès à l'Office, la Loi de 1987 est idéale. Elle a incité les transporteurs et les expéditeurs à conclure leurs propres règlements négociés sans l'intervention de l'Office, à quelques exceptions près. Cela s'est produit grâce à la simplicité de l'accès à l'Office, et je pense que c'est merveilleux. Les différends ont été réglés dans l'arène commerciale et non pas devant l'Office.
Je ne suis pas du tout étonné que les paragraphes 27(2) et 34(1) aient été sévèrement critiqués par des compagnies de transport importantes et réputées lors de leur comparution devant le comité. Il s'agit notamment de la Commission des transports des provinces de l'Atlantique, de l'Association canadienne des producteurs de pâtes et papiers, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, de la Ligue canadienne de transport industriel, de l'Association des manufacturiers canadiens, et peut-être d'autres que je ne connais pas.
À l'instar de la compagnie Repap, ces entreprises demandent que les deux dispositions du projet de loi soient supprimées, et sollicitent l'aide du comité à cet effet.
Dans le même ordre d'idées, j'ai été impressionné par les propos du ministre Young quand il a pris la parole à ce sujet devant le comité le 4 octobre. Je pense qu'il avait parfaitement raison. Il a dit en cinq lignes ce que j'ai dit en plusieurs paragraphes.
Il a déclaré:
- Le recours est une question importante qu'il faut régler dans ce projet de loi. Nous ne savons pas
encore si nous sommes absolument sur la bonne voie. Monsieur le président, le but de l'exercice
est de nous assurer qu'en fin de compte, nous ne serons ni devant l'Office national des
transports, ni devant les tribunaux, mais en train de faire des affaires.
À notre avis, la suppression des paragraphes 27(2) et 34(1) et le maintien des dispositions de la LTN de 1987 relatives à l'accès permettraient d'atteindre cet objectif.
Une dernière observation, si vous permettez, monsieur le président. Au cours des dernières années, les chemins de fer ont amélioré considérablement leur efficacité, leur productivité, leur rentabilité et leur façon de travailler. Je crois que les éléments de la LTN de 1987 favorables à la concurrence les ont encouragés dans ce sens. À mon avis, si on limite les dispositions de cette loi portant sur l'accès à l'Office, on n'améliorera certainement pas la situation.
Je vous remercie. John?
M. Edgar: Si vous avez des questions, messieurs, nous serons heureux d'y répondre.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous commencerons par M. Johnston à moins que vous ne vouliez vous abstenir pour l'instant?
M. Johnston: Oui.
J'ai aimé votre exposé, mais il n'a suscité aucune question.
Monsieur le président, puis-je céder mon tour à mon collègue?
Le président suppléant (M. Hubbard): Je dois d'abord donner la parole aux différents partis.
Monsieur McKinnon.
M. McKinnon (Brandon - Souris): Messieurs, bienvenue au comité. Ma question porte sur ce que j'ai entendu, car je n'ai pas tout lu; il se peut donc que mes observations ne soient pas tout à fait exactes. Si j'ai bien compris, vous préféreriez que l'on conserve le statu quo au lieu d'apporter des modifications à la loi; est-ce que mon interprétation est inexacte?
M. Hart: Compte tenu de la portée très limitée du témoignage de la compagnie Repap, que je représente ici aujourd'hui, tel serait le cas. Nous aimerions que les paragraphes 27(2) et 34(1) soient supprimés. En effet, cela nous ramènerait à la situation créée par la Loi de 1987 qui, à notre avis, et pour toutes les raisons que j'ai mentionnées, a été très efficace.
M. McKinnon: D'après les témoignages de tous les membres de l'industrie, il existe des problèmes qu'il faut régler. D'où la nécessité d'inclure de nouvelles dispositions dans la loi.
Je suis d'accord avec vous sur certains termes - notamment frustratoire - que vous avez mentionnés. Pouvez-vous proposer d'autres termes qui seraient plus appropriés?
M. Hart: Nous proposons simplement qu'on les supprime. Soyons clairs. Nous connaissons tous l'adage selon lequel il ne faut pas réparer ce qui fonctionne.
En ce qui concerne plus précisément l'accès, monsieur le président, nous estimons qu'il est très efficace, et nous pensons que de nombreuses personnes ayant des intérêts légèrement différents des autres partagent cet avis. Cela tient au fait que l'ancienne loi mettait les expéditeurs et les transporteurs sur un pied d'égalité et leur permettait, dans presque tous les cas, de régler eux-mêmes les différends. Par conséquent, les solutions étaient mutuellement satisfaisantes.
M. Edgar: Permettez-moi d'ajouter qu'à mon avis, en vertu de la Loi de 1987, l'accès à l'Office incitait les transporteurs et les expéditeurs à trouver des solutions négociées. L'Office participait rarement à ce processus.
Autrement dit, la facilité de l'accès à l'Office était une mesure incitative. Si cette mesure n'existe pas, je pense que les transporteurs et les expéditeurs ne négocieront pas, mais ils seront en litige. En d'autres termes, les paragraphes 27(2) et 34(1), qui imposent les principes du préjudice important et de la demande frustratoire, ne réduiront pas le nombre de cas qui seront soumis à l'Office; en fait, ces cas seront plus nombreux.
J'ai été impliqué dans des affaires antérieures à la Loi de 1987. L'une concernait la «Prince Albert Pulp Compagny» et elle a duré six ans.
Comment déterminer si le recours est fondé? Nous allons nous retrouver en train de définir ce qui est important et ce qu'est un préjudice. Il s'agira de déterminer s'il faut voler dans un portefeuille ou dans un coffre-fort.
Dans certaines localités où la société Repap travaille, nous avons les mains liées. La concurrence n'est pas égale dans tous les éléments du secteur ferroviaire. Elle varie. Elle est très rude dans le coeur industriel du pays, mais il n'y a pas d'aller-retour à The Pas, au Manitoba, et il n'y a pas de camions tous les jours. Il n'y a pas de trains non plus. Nous parcourons des distances plus longues pour parvenir aux marchés et, en général, étant donné que nous pouvons accéder à l'Office, nous sommes en mesure de nous asseoir et de négocier de bonne foi avec les compagnies de chemin de fer. Tout se passe assez bien, et il y a rarement des affaires frustratoires ou autres.
M. Hart: Monsieur le président, mon collègue a fait une observation intéressante sur l'ancienne loi. Vous avez dit que l'affaire Prince Albert a duré six ans. Avez-vous gagné?
M. Edgar: oui.
M. Hart: Mais il a fallu attendre six ans pour avoir gain de cause. À peu près à la même époque, une autre affaire lancée par un groupe industriel - je pense qu'il s'agissait de la «Western Wood Pulp» - et je ne sais combien d'années cela a duré. L'industrie a finalement gagné devant les tribunaux, mais il a fallu faire preuve d'une grande endurance physique et d'une grande capacité financière pour tenir le coup. Telle était la situation avec la Loi de 1967; mais cela a cessé avec la Loi de 1987.
Le président suppléant (M. Hubbard): Madame Sheridan, il nous reste quelques minutes avant la fin du premier tour.
Mme Sheridan (Saskatoon - Humboldt): Je vais vous demander brièvement des éclaircissements sur une observation qui a été faite. Je pense qu'elle est de vous, mais en ce moment-ci je n'en suis pas sûre.
Je comprends votre position concernant le paragraphe 27(2); beaucoup d'autres l'ont exprimée, y compris les représentants de l'industrie canadienne des pâtes et papiers. Avez-vous dit tout à l'heure, en parlant de l'arbitrage, que vous considérez le paragraphe 27(2) comme un obstacle qui vous empêcherait de recourir également à l'arbitrage?
M. Edgar: Non.
Mme Sheridan: Pourriez-vous nous le confirmer de façon précise au cas où il y en aurait d'autres qui auraient mal compris?
M. Edgar: Je ne crois pas que nous ayons parlé d'arbitrage. Nous avons parlé des cas qui seraient soumis à l'Office des transports. Je crois que l'arbitrage est un processus distinct.
Mme Sheridan: C'est juste. Nous avons toutefois entendu d'autres témoins qui semblent penser qu'il y a un lien quelconque entre les deux; je voulais simplement m'assurer que vous n'étiez pas de ceux-là.
M. Edgar: Non.
Mme Sheridan: Je vous remercie.
M. Hart: Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas clair. On m'a posé la même question à plusieurs reprises, et je suppose que nous devrions tous nous reporter au libellé du projet de loi.
Mme Sheridan: Si on se reporte au libellé, dans un cas, il s'agit de l'Office, dans l'autre, de l'arbitre. N'empêche qu'on n'a pas toujours affaire à un de ces avocats véreux et grassement payés dont on entend tellement de mal.
M. Hart: Je suis content de ne pas en être un.
Mme Sheridan: En réalité, ils ne sont pas aussi noirs qu'on le dit. C'est tout, monsieur.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous revenons maintenant à M. Johnston. Vous voulez céder la place à Mme Wayne?
M. Johnston: Volontiers.
Mme Wayne (Saint John): Merci beaucoup.
Monsieur Hart, comme l'ont dit certains de mes collègues, beaucoup des expéditeurs qui ont témoigné devant nous nous ont parlé non seulement des paragraphes 27(2) et 34(1), mais aussi de l'article 113, qui dispose que les prix et conditions visant les services fixés par l'Office doivent être commercialement équitables et raisonnables. Or, le projet de loi C-101 ne donne pas de définition de ce qui est équitable et raisonnable.
Je me demande si vous avez quelque chose à dire à ce sujet. La plupart de ceux qui témoignent devant nous ont de sérieuses réserves au sujet de cet article et voudraient qu'il soit supprimé du projet de loi.
M. Hart: Oui, j'ai effectivement quelque chose à dire à ce sujet, madame Wayne, et je vous remercie pour votre question.
Dans le cas de l'article dont vous parlez, tout comme pour la beauté, tout est dans le regard. Qu'est-ce qui est équitable et raisonnable?
À mon avis, il n'est pas sage d'inclure des termes comme ceux-là dans le projet de loi, car ils ne peuvent que mener à des litiges. Chaque fois que l'Office rendra une décision, elle déplaira à l'une ou l'autre partie; par conséquent, on fera appel aux tribunaux et le litige durera sans doute plusieurs années et coûtera très cher.
Encore là, il me semble qu'on ajoute quelque chose qui ne se trouve pas dans la LTN de 1987 relativement à l'accès et à la façon de régler ces questions. Pardonnez-moi de le dire - cela ne surprendra personne - mais nous considérons que le régime instauré en 1987 est celui qu'il faut conserver. Le gouvernement doit être très heureux de cette disposition puisqu'il n'aura pas à entrer dans la mêlée. Les expéditeurs et les transporteurs seront obligés de résoudre eux-mêmes leurs différends.
Mme Wayne: Merci beaucoup.
Le président suppléant (M. Hubbard): Y a-t-il d'autres questions?
Nous tenons à vous remercier d'être venus témoigner devant nous. J'ai déjà rencontré M. Edgar et j'avais déjà entendu la plupart de ses préoccupations. Monsieur Hart, vous avez, vous aussi contribué à nos délibérations. Avez-vous des remarques de clôture que vous aimeriez faire?
M. Hart: Je conclurais en disant que nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps de nous entendre. Je suis désolé que Bob Nault ait manqué une partie de notre témoignage. J'ai eu l'honneur de témoigner devant un comité qu'il présidait il y a de cela quelques mois. Je suis content d'avoir revu Mme Wayne et d'être venu témoigner devant vous.
Je crois que nous avons bien fait savoir ce que nous pensons du projet de loi C-101, et nous espérons que vous prendrez les mesures correctives qui conviennent. Si j'en juge par les propos qu'on a cités, il semble que M. Young soit du même avis que nous.
Le président suppléant (M. Hubbard): Vous devrez le lui rappeler.
M. Edgar: Je voudrais simplement ajouter un mot pour dire comme je suis heureux de voir que Miramichi est représenté aussi bien à ce bout-ci de la table qu'à l'autre.
Le président suppléant (M. Hubbard): Et Repap aussi.
Nous levons la séance jusqu'à 16h30, heure à laquelle nous devons entendre M. Campbell, de la Chambre de commerce du Canada.
PAUSE
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous reprenons donc la séance. Nous tenons à souhaiter la bienvenue à M. Campbell et à Mme Glover, de la Chambre de commerce du Canada.
Nous sommes prêts à entendre votre exposé. Nous avons prévu 30 minutes pour vous entendre. J'espère que vous pourrez nous faire votre exposé en l'espace de 10 ou 15 minutes, pour que les membres du comité puissent ensuite vous poser des questions.
Mme Sharon Glover (vice-présidente, Relations gouvernementales, Chambre de commerce du Canada): Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, au nom des membres de la Chambre du commerce du Canada, nous tenons à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui sur le projet de loi C-101, la Loi sur les transports au Canada.
Je suis Sharon Glover, première vice-présidente chargée des relations avec les gouvernements et des questions d'intérêt public. Je suis accompagnée du président du conseil d'administration, M. Gary Campbell.
Pour les membres du comité qui ne nous connaissent pas, la Chambre de commerce du Canada est la plus importante et la plus représentative de toutes les associations canadiennes. Nos membres représentent tous les secteurs de l'entreprise privée, de sorte que nous sommes la voix de l'entreprise canadienne tout entière.
Grâce à notre réseau de 500 chambres de commerce locales, nous avons des partenaires associés dans chacune des circonscriptions fédérales. Ce réseau, qui comprend également plus de 90 associations commerciales, regroupe plus de 170 000 entreprises.
Aussi, en témoignant devant votre comité, nous représentons non pas seulement les expéditeurs ou les compagnies de chemin de fer qui sont membres de notre association, mais toute la gamme des intérêts commerciaux au Canada qui profiteraient du renouvellement de l'infrastructure des transports nationaux et des gains de rendement qui en résulteraient pour notre économie.
Nous participons depuis de nombreuses années au débat sur ce dossier d'intérêt public. La Chambre de commerce a suivi de près le travail de la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux qui a précédé le dépôt du projet de loi.
Dans les discussions que nous avons eues avec les représentants de la Commission et du ministère des Transports, nous avons bien insisté sur le fait que la santé économique du Canada passe nécessairement par un secteur des transports nationaux viable.
Avant que M. Campbell ne vous parle du projet de loi comme tel, je tiens à faire savoir au comité que nous nous attarderons de manière générale aux grandes questions d'intérêt public que soulèvent les réformes proposées et que nous ferons état des domaines où les membres de la Chambre de commerce voudraient voir des progrès encore plus importants.
Nous nous en remettons à nos membres dans les divers secteurs touchés pour vous fournir leurs conseils spécialisés sur les aspects plus techniques du projet de loi.
Je cède maintenant la parole au président de notre conseil d'administration, monsieur Gary Campbell.
M. Gary Campbell (président du conseil d'administration, Chambre de commerce du Canada): Merci. Bonjour.
La Chambre de commerce du Canada reconnaît le lien vital qui existe entre la qualité de notre infrastructure de transport et notre compétitivité.
Pour que le Canada puisse se réaliser pleinement comme pays compétitif dans le monde de demain, nous devons continuer à avancer dans la voie de la viabilité à long terme de notre infrastructure de transport. Les mesures qui seront prises doivent faire partie d'une stratégie à long terme pour le Canada qui vise à consolider nos perspectives d'avenir comme compétiteurs de premier rang dans le secteur des transports et dans les nombreux secteurs dont la compétitivité dépend de la viabilité du secteur des transports.
Les chemins de fer doivent à tout prix investir dans leur infrastructure. Ces investissements auront un effet positif sur les expéditeurs qui auront ainsi accès à des services plus compétitifs. Pour bien comprendre l'importance de la mesure proposée, il convient de signaler que la viabilité des transporteurs canadiens et de certains ports d'exportation canadiens s'est détériorée depuis janvier 1988, au moment où la LTN de 1987 est entrée en vigueur. Même depuis janvier 1992, quand la Commission d'examen a entrepris son travail, les faillites se sont multipliées dans le secteur du transport routier, les chemins de fer ont connu des pertes record et les problèmes se sont intensifiés dans les secteurs de l'aviation civile et du transport maritime.
La nécessité de réforme de la réglementation dirigiste canadienne est encore plus cruciale du fait du régime relativement compétitif qui caractérise l'industrie des transports américaine. Dans le contexte d'une économie nord-américaine de plus en plus intégrée, il est vital que les obligations et les coûts imposés aux prestataires de services de transport des deux côtés de la frontière soient le plus égaux possible.
Un déséquilibre croissant des règles du jeu entre le Canada et les États-Unis favorise les transporteurs et les prestataires américains. L'économie du Canada se développant de plus en plus sur un axe nord-sud, les conséquences négatives d'un tel déséquilibre ne feront qu'empirer pour le Canada.
L'infrastructure routière et les économies résultant d'une plus grande densité de trafic donnent déjà un avantage naturel aux transporteurs américains sur les transporteurs canadiens. Par conséquent, la réglementation à laquelle sont assujettis les transporteurs canadiens rend leurs services beaucoup moins compétitifs. La réglementation inutile imposée par la loi canadienne est un obstacle à leur compétitivité. La Chambre de commerce du Canada ne cesse de répéter depuis longtemps que la réglementation des transports doit éviter tout impact négatif sur la rentabilité et l'efficacité des services de transport.
Dans ce contexte, la Chambre est encouragée par les récents efforts du ministre, M. Young, et des fonctionnaires de Transports Canada pour libéraliser les règlements. La loi de privatisation du CN crée un précédent important car elle permet au secteur privé de montrer ses capacités dans le domaine où il est le meilleur, la commercialisation. L'élimination de subventions onéreuses accordées aux expéditeurs, conséquence des réformes apportées à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, est un autre exemple de réforme appuyée par la Chambre.
Le projet de loi C-101 dont il est question actuellement poursuit ce processus de libéralisation. En particulier, le ministère y prend acte de la nécessité de réduire le fardeau de la réglementation imposée aux transporteurs et aux expéditeurs.
La Chambre de commerce n'a cessé de rappeler que l'incapacité ou presque des chemins de fer sous tutelle fédérale à satisfaire la demande de leurs clients entraînait obligatoirement une augmentation des coûts d'exploitation. En conséquence, la Chambre dans sa déclaration de 1995 sur le renouvellement ferroviaire a résolu d'appuyer tout changement à la LTN et à la Loi sur les chemins de fer qui permettrait aux chemins de fer sous tutelle fédérale de gérer avec plus d'efficacité leurs activités et leurs investissements.
La Chambre est donc encouragée par les dispositions du projet de loi C-101 qui allègent les restrictions relatives à la rationalisation des réseaux. Elle appuie la prémisse selon laquelle la liberté d'accès à un marché et de sortie d'un marché est le critère indispensable au succès de la compétitivité.
Comme vous ne l'ignorez sans doute pas, les dispositions de ce projet de loi donnent toute possibilité à des acheteurs privés ou, dans certains cas, publics, de faire des offres pour des lignes mises aux enchères. En même temps, les transporteurs sont autorisés à abandonner des lignes si aucun acheteur ne se présente. La Chambre appuie cette approche qui verra, selon elle, le maintien de services existants lorsque les forces du marché le justifient.
Un autre exemple de réglementation inutile éliminée par ce projet de loi concerne les fusions et les acquisitions réglementées par l'Office national des transports. Désormais c'est le Bureau de la politique de concurrence qui en sera chargé. Il est important que ce genre de chevauchement de compétences ainsi que d'autres soient réglés en particulier entre les compétences provinciales et la compétence fédérale. L'environnement s'en trouve simplifié à la fois pour les expéditeurs et les transporteurs.
Il est important que les dispositions favorables aux expéditeurs telles que l'accès à des prix de ligne concurrentiels et l'interconnexion entre transporteurs, soient maintenues. Néanmoins, estimant que la déréglementation et la transparence devraient être de rigueur dans le secteur des transports, nous estimons nécessaire que les membres de votre comité s'intéressent à certaines ambiguïtés de ces dispositions.
Le critère de préjudice important ainsi que l'article qui menace de sanctions toute plainte frustratoire doivent être clarifiés s'ils doivent demeurer dans le projet de loi.
Il ne faudrait pas que les expéditeurs qui ont légitimement à se plaindre soient entravés par des règlements, des frais ou une procédure excessifs. Nous répétons notre position, des négociations commerciales ne devraient pas être faussées par des règlements inutiles lorsque le marché lui-même offre des options. Comme autre solution, l'Office ne pourrait intervenir que lorsque l'inexistence d'autres moyens efficaces de concurrence est démontrée.
Enfin, il y a les implications de l'article 48 qui autorisent des restrictions de capacité et de prix en cas de «perturbation extraordinaire».
Les membres de la Chambre se plaignent du caractère vague de ce concept et des possibilités d'abus que les pouvoirs trop larges envisagés par cet article laissent préfigurer. Il faut que cet article soit mieux défini ou soit purement et simplement supprimé étant donné l'existence de dispositions législatives qui permettent déjà au Parlement de décréter des mesures temporaires dans de telles circonstances.
En conclusion, la Chambre comprend les difficultés du comité qui doit trouver un juste équilibre entre la viabilité à long terme des transporteurs et les besoins des expéditeurs, des télécommunications et des autres secteurs touchés. Bien que sur ce plan, des améliorations soient nécessaires, nous estimons que le projet de loi C-101 marque un net progrès dans ce sens. Il est évident que tous les intéressés bénéficieront des conséquences libéralisatrices de ce projet de loi.
Pour finir, la Chambre de commerce du Canada répète son soutien au projet de loi C-101 notamment au niveau de la rationalisation des réseaux ferroviaires. Cependant, en même temps, nous encourageons le gouvernement à reconnaître de manière plus explicite la nécessité de mesures supplémentaires pour la viabilité économique à long terme de l'industrie canadienne des transports.
Nous recommandons que cette notion de viabilité soit incluse dans le préambule du projet de loi. Cela facilitera l'adoption des mesures de déréglementation et des mesures fiscales encore nécessaires pour atteindre l'objectif recherché.
Bien que le projet de loi C-101 vise en partie à faciliter le projet de renouvellement ferroviaire, le fardeau excessif des taxes imposées aux chemins de fer canadiens vis-à-vis de leurs homologues américains doit être le prochain point à l'ordre du jour législatif. Les transporteurs canadiens continuent à être largement désavantagés tant sur le plan de la fiscalité que sur celui de la réglementation.
Nous aimerions que lors de vos rencontres avec les gouvernements provinciaux, vous leur fassiez comprendre l'importance de réduire les taxes provinciales sur les carburants, la vente de matériel roulant et les emprises et d'évaluer les autres biens des chemins de fer en utilisant des tarifs communs.
Dans ce sens, les efforts législatifs visant à faciliter le renouvellement ferroviaire ne doivent pas être définis uniquement en fonction de la LTN de 1987. Nous croyons que puisque cette loi ne constitue qu'une partie de l'environnement compétitif de l'industrie canadienne des transports, il est nécessaire d'instaurer un régime dans lequel les politiques fiscales et de réglementation des gouvernements fédéral et provinciaux s'alignent sur l'esprit compétitif de la loi.
C'est l'élément principal de notre message de cet après-midi. Dans cette perspective, nous serons toujours prêts à participer à un tel processus d'examen.
Je vous remercie infiniment.
Le président suppléant (M. Hubbard): Merci. C'est probablement un des premiers exposés objectifs que nous entendons depuis un bon bout de temps. Les autres étaient très subjectifs.
Madame Sheridan.
Mme Sheridan: Merci. Excellent exposé, très clair.
J'aimerais vous poser des questions sur ce que vous pensez de la réglementation. Si je vous ai bien compris, d'une manière générale, elle est à éviter chaque fois que c'est possible. Si je vous ai bien entendus, vous avez dit que la réglementation ne peut avoir un rôle légitime que lorsque l'expéditeur est prisonnier d'un seul moyen de transport. Ou quelque chose de ce genre. Je ne vous cite pas exactement. Vous avez dit que la réglementation pouvait être nécessaire dans ces circonstances. Pourriez-vous me dire si je me trompe? Ensuite je vous poserai ma question. Je vous ai peut- être mal compris.
M. Campbell: Je crois que vous avez un peu dépassé notre pensée. Une certaine réglementation est nécessaire. Nous faisons peut-être plus allusion au mécanisme de règlement des conflits entre les expéditeurs et les transporteurs.
Mme Glover: Exactement. Nous proposons une autre solution. Nous disons que des négociations commerciales ne devraient pas être faussées par des règlements inutiles. L'Office national des transports n'interviendrait qu'en cas de monopole flagrant. Autrement, il faut laisser jouer les forces du marché.
Mme Sheridan: Donc, s'il n'y a pas de concurrence, s'il n'y a comme moyen de transport que le chemin de fer, par exemple, vous comprenez l'intervention d'une instance de réglementation. Suggérez-vous alors que ce projet de loi devrait inclure une sorte de critère de captivité pour déterminer si cet expéditeur est oui ou non captif? Des témoins nous ont dit que ce serait ouvrir la porte à toutes sortes de problèmes et de désagréments, à des procédures juridiques compliquées et onéreuses. Ou est-ce que je vais encore une fois plus loin que vous?
M. Campbell: Non, nous essayons simplement de proposer d'autres solutions lorsqu'il s'avère très difficile à des expéditeurs de faire entendre raison à un transporteur. Le recours à l'Office pourrait être envisagé dans de tels cas.
Parfois la résolution de conflits de ce genre entraîne une multiplicité de démarches tellement ridicules que recourir à l'Office serait beaucoup plus simple.
Je ne pense pas que nous puissions entrer plus dans le détail car ce que nous voulons c'est vous donner une idée générale afin que vous réfléchissiez, ce qui me semble indispensable, à des solutions.
Je ne sais pas si j'ai vraiment répondu à votre question, mais...
Mme Glover: Je pourrais peut-être ajouter que nous ne proposons pas vraiment de critère de captivité. Nous n'en avons pas du tout discuté. Nous n'avons pas été aussi loin dans notre réflexion.
Mme Sheridan: Bien, c'était la réponse dont j'avais besoin. Merci.
Le président suppléant (M. Hubbard): Madame Sheridan, avez-vous une autre question?
Mme Sheridan: Non, merci. C'est tout.
Le président suppléant (M. Hubbard): Très bien, la parole est donc à M. Johnston.
M. Johnston: Monsieur le président, je vais laisser mon tour à Mme Wayne si cela ne vous dérange pas.
Le président suppléant (M. Hubbard): Pas du tout.
Mme Wayne: J'ai deux questions à poser, monsieur le président. Premièrement, j'aimerais savoir si la Chambre de commerce a fait une étude comparative sur le transport routier et le transport ferroviaire et si elle a calculé la multiplication des coûts de l'entretien des routes quand le trafic augmente considérablement comme on le constate dans d'autres pays.
M. Campbell: Je vais demander à Mme Glover de vous répondre. C'est surtout elle qui s'occupe du Comité des transports.
Mme Glover: Non, nous n'avons pas fait une telle étude. Savoir comment la Chambre a arrêté ses positions vous aiderait peut-être à mieux comprendre notre perspective.
Nous avons des comités composés de représentants de compagnies qui sont membres des diverses chambres. Ce sont eux qui paient nos salaires. Ils nous prêtent des volontaires pour siéger à nos comités. Au Comité des transports, il y a des représentants des expéditeurs, des compagnies de chemin de fer et des autorités portuaires.
Nous avons essayé d'inclure autant de gens concernés par les problèmes de transport que possible et c'est leur conclusion. Mais nous ne sommes pas un institut de recherche pas plus que nous ne prétendons pouvoir mener ces recherches. Non pas que cela soit inutile, mais nous n'en faisons tout simplement pas.
Mme Wayne: Si je vous ai posé cette question, c'est parce que je sais que vous n'êtes pas un institut de recherche. En revanche, quand on considère le coût, vos taxes, etc., quand on considère la reconstruction inéluctable de ces routes si la charge des véhicules qui les utilisent n'est pas strictement contrôlée, cela va coûter énormément d'argent et au lieu de subventionner une industrie, celle des chemins de fer, on en subventionnera une autre, celle du camionnage. Je me disais donc simplement qu'en tant qu'hommes et femmes d'affaires...
Mon autre question est la suivante. Vous dites que votre comité était composé d'expéditeurs, etc., et je remarque dans votre exposé que vous ne dites rien sur le paragraphe 27(2) alors que tous les expéditeurs nous en ont parlé, réclamant sa suppression.
Sur quel point plus précis...? Vous avez parlé, je crois, du paragraphe 34(1), des plaintes frustratoires. Vous êtes-vous intéressés aussi au paragraphe 27(2), à cette notion de préjudice important?
M. Campbell: Oui.
Mme Wayne: Oh, je m'excuse.
M. Campbell: Nous disons simplement que ce critère nous semble un peu trop complexe.
Mme Wayne: Oui.
M. Campbell: Mais nous ne proposons pas de solution.
Mme Wayne: Vous ne réclamez pas sa suppression comme les expéditeurs le font.
M. Campbell: Nous demandons simplement à votre comité de le clarifier car...
Mme Wayne: Simplement de le clarifier.
M. Campbell: Oui.
Mme Wayne: Très bien, merci beaucoup, monsieur le président.
Le président suppléant (M. Hubbard): Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Nault.
M. Nault: Une des questions que j'allais vous poser - et vous pourriez peut-être y réfléchir et nous en informer plus tard - concerne votre suggestion d'approche différente pour le paragraphe 27(2). Elle rendrait nécessaire la définition d'expéditeur captif car l'absence de concurrence correspond à une forme de captivité, évoquée par Mme Sheridan, qu'il faut définir.
Nous aimerions beaucoup savoir quelle définition vous proposeriez car notre comité est un peu divisé sur cette question et nous avons aussi demandé aux expéditeurs de nous donner une définition car, jusqu'à présent, personne ne nous en a donné. Je vous demande donc d'y réfléchir et de nous communiquer les fruits de cette réflexion si c'est possible.
J'ai une autre question concernant votre approche à la page 2 de votre mémoire, le dernier paragraphe, où vous dites:
- Le processus envisagé dans la loi donne la possibilité à des acheteurs privés ou, dans des cas
limités, publics à faire des offres sur des lignes de chemin de fer mises aux enchères aux taux du
marché. En même temps, il permet aux compagnies de chemin de fer d'abandonner les lignes
qui ne font l'objet d'aucune offre. La Chambre est favorable à cette approche qui vise le
maintien des services ferroviaires existants lorsque les forces du marché le justifient.
Deux questions. Premièrement, la Chambre limite-t-elle sa proposition uniquement au fret ou englobe-t-elle aussi les services de passagers? Si les efforts des communautés et (ou) des compagnies restent vains, l'abandon de ces services est inéluctable?
Deuxièmement, le gouvernement peut-il invoquer l'intérêt public quand une ligne n'est plus commercialement viable, tout au moins dans les circonstances actuelles, l'intérêt pour le développement d'une région l'incitant à la subventionner d'une manière transparente?
J'aimerais connaître votre réponse à ces deux questions.
M. Campbell: La position de base du Comité et de la Chambre dans ce domaine sont la déréglementation et la loi des forces du marché. Nous n'avons donc pas de position plus définie que cela à moins que vous ne vouliez ajouter quelque chose, Sharon.
Mme Glover: Non, nous ne parlons pas uniquement du transport des marchandises, donc notre position concerne aussi les passagers. Le gouvernement choisit souvent de subventionner différents secteurs pour soutenir différentes régions. Malheureusement, étant donné la situation financière du gouvernement, il n'est pas en mesure de faire tout ce qu'il pourrait souhaiter. Il est même possible qu'il n'ait pas le luxe de faire plus. Laisser jouer la loi des forces du marché quand la décision n'est peut-être pas très agréable est probablement la solution la plus financièrement responsable pour ce gouvernement.
M. Nault: J'aimerais revenir sur un point. Selon les différentes chambres de commerce et les régions, les opinions et les résolutions adoptées peuvent varier beaucoup. Personnellement, je suis du nord de l'Ontario. Je me fais une idée très différente du développement régional de ce que vous indiquez ici comme votre approche générale.
Avez-vous interrogé les chambres membres des diverses régions au sujet de l'opportunité pour les gouvernements de s'impliquer de façon transparente dans le développement régional au niveau du secteur des transports? Par exemple, si on voulait subventionner une ligne ferroviaire en particulier - je vais parler d'une ligne qui est mentionnée très souvent en comité, la ligne de Churchill, qui est très importante pour la région du nord du Manitoba - on passerait, de façon transparente, par l'enveloppe du développement régional plutôt que de laisser le CN ou le CP l'interfinancer en utilisant les profits réalisés à un bout de la ligne pour compenser les pertes occasionnées à l'autre bout. Avez-vous sondé l'opinion de vos membres sur la façon dont ils voient le développement économique dans les régions éloignées par rapport aux régions où les lignes sont déjà rentables et où le problème ne se pose pas avec autant d'acuité?
M. Campbell: Nos politiques à l'échelon national sont élaborées lors de nos réunions annuelles auxquelles participent des délégués de tout le pays. Elles sont longuement discutées, elles sont annoncées bien à l'avance et font l'objet d'un vote. Chaque politique ne reçoit évidemment pas un appui unanime, il y a 500 chambres, mais elle reçoit au moins l'assentiment de la majorité. Vous vouliez parler de la question des subventions?
Mme Glover: Le sujet de la ligne de Churchill est venu sur le tapis il y a quelques années à notre réunion annuelle. On nous a demandé de l'appuyer. Nous en avons discuté et voté contre. Il faut une majorité des deux tiers pour qu'une résolution soit rejetée.
M. Nault: Très bien. Je vous pose la question différemment.
Le développement régional ne signifie pas nécessairement l'octroi de subventions. Le développement régional doit permettre à une certaine région d'améliorer sa situation économique à long terme. Ce que je veux savoir, c'est si la chambre nationale sonde ces régions et ses chambres membres au sujet des mécanismes utilisés pour en arriver à des formes de partenariat entre le secteur privé, les municipalités, les gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral, dans le cadre du développement régional - relativement, entre autres, aux voies de transport nécessaires pour que nous soyons concurrentiels. J'essaie de voir si quelqu'un quelque part envisage d'utiliser l'enveloppe du développement régional en vue d'améliorer les transports.
M. Campbell: Une fois que nous avons une politique nationale - notre politique de base peut consister à appuyer ce projet de loi, particulièrement en ce qui concerne la libéralisation des embranchements - nous n'en dérogeons pas à l'échelon régional. Une mesure, qu'elle soit locale, provinciale ou fédérale, peut être bonne pour une région en particulier; nous ne prenons pas position à cet égard. Notre politique de base, telle que décidée par nos membres à nos assemblées nationales, est que nous sommes essentiellement en faveur de la déréglementation. Nous n'intervenons pas au niveau régional.
Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais nous n'avons pas à être en accord ou en désaccord avec chacune de nos chambres; nous nous bornons à travailler avec elles. Nous faisons de notre mieux pour représenter nos 500 chambres et 170 000 membres à l'échelon national. Ce qui ne veut pas dire que nous reflétons nécessairement toujours l'opinion de chaque chambre. Il y en a qui peuvent être en désaccord avec nous. Nous parlons au nom de la majorité. Nous n'intervenons jamais relativement aux mesures régionales.
Sharon.
Mme Glover: Si je peux ajouter quelque chose, Gary, nous n'avons pas effectué ce genre d'analyse.
Gary a tout à fait raison de dire que nous nous bornons à exprimer la perspective nationale. Nous n'avons pas essayé de voir quels peuvent être les effets des diverses subventions dans les régions. Nous n'avons pas examiné cette question.
M. Nault: Très bien. Merci, monsieur le président.
Le président suppléant (M. Hubbard): Merci, monsieur Nault.
Comme il a été question de Churchill, je pense que M. McKinnon...
M. McKinnon: Oui, je pense que la question mérite d'être examinée plus avant.
Dans la mesure où une certaine inquiétude se manifeste chez les entreprises des localités qui se trouvent le long de la ligne, aux deux bouts également, et, ce qui est plus important, chez les gens qui désirent expédier leurs produits à l'étranger, les députés ministériels du Manitoba - et nous avons également beaucoup d'appui du côté de l'opposition. Pour la province du Manitoba, il est crucial que cette ligne devienne rentable, du moins plus rentable qu'elle ne l'est actuellement.
La Chambre s'intéresse-t-elle au développement dans les régions plus éloignées du pays de façon générale ou à la ligne Churchill en particulier?
Mme Glover: Je suppose que la question est très importante pour la Chambre de commerce de l'endroit. Si elle voulait attirer notre attention sur cette situation, elle nous enverrait une résolution dont nous discuterions au cours de notre réunion annuelle. Nous n'irions pas à Churchill pour voir ce qu'il en est. Ce serait la Chambre de l'endroit qui nous ferait part de sa politique en la matière. Elle ne l'a pas fait ces derniers temps. Il y a au moins deux ans qu'elle ne nous a pas présenté de résolution.
M. McKinnon: La question s'est quand même déjà présentée?
Mme Glover: Certainement.
M. McKinnon: À votre connaissance, quelle a été la position de la Chambre à ce moment-là?
Mme Glover: À ma connaissance, la Chambre locale a appuyé les lignes, tandis que la Chambre nationale a refusé de le faire.
Le président suppléant (M. Hubbard): Vous avez une question, madame Sheridan, pour mettre fin...
Mme Sheridan: Oui, une question dans la même veine que celle de M. Nault relativement à vos membres et la façon dont vous les représentez.
Je me demande d'abord si votre organisme national représente les Chambres de commerce rurales, les Chambres de commerce des petites villes de la Saskatchewan ou du Manitoba? Font-elles partie de votre organisme?
M. Campbell: Certainement.
Mme Sheridan: Vous n'englobez pas que les grandes villes?
M. Campbell: Non.
Mme Sheridan: Je suis neutre. Je suis objective, comme la présidence a dit de vous que vous l'êtes également. Je vous poserai la question suivante: si vous représentez les Chambres de commerce des petites villes des régions rurales, ce mémoire a-t-il été discuté, pour commencer, et est-ce que ces chambres ont été d'accord avec l'idée d'accentuer encore davantage le processus d'abandon? En tant que représentante de telles régions, ce que j'entends, c'est que comme gouvernement, nous ne devrions pas assouplir cette réglementation parce qu'autrement nous risquons de signer l'arrêt de mort des petites localités. C'est ce que pourrait signifier l'abandon d'autres embranchements. Une municipalité régionale qui aurait construit une route jusqu'à l'élévateur qui se trouverait le long d'un embranchement soudainement abandonné risquerait également de perdre beaucoup d'argent. Parlez-vous au nom de ces régions également et avez-vous discuté de la question?
M. Campbell: Pour répondre à la première partie de votre question, nous représentons les 500 Chambres de commerce du Canada, plus les Chambres provinciales et territoriales. Pour ce qui est de l'autre partie, nous n'avons pas encore discuté de la question de l'abandon comme tel.
Mme Sheridan: C'est révélateur. Je me demandais s'il y avait eu un processus quelconque.
Le président suppléant (M. Hubbard): Merci à vous et merci aux témoins.
Nous avons beaucoup de pain sur la planche, puisque plus de 100 groupes différents doivent comparaître devant nous. Beaucoup d'entre eux chantent la même chanson, mais il est toujours bon d'avoir des chanteurs qui chantent quelque chose d'autre. Espérons qu'à la fin de ce processus nous aurons un morceau de musique convenable. Merci.
M. Campbell: Merci beaucoup.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous souhaitons la bienvenue à M. Doidge, M. Bradley et M. Sonneveld.
Monsieur Sonneveld, plusieurs membres du comité sont de l'Ouest et nous avons hâte d'entendre comment la province d'Ontario se compare, en termes de production de céréales, aux régions plus agricoles du Canada.
Je ne sais trop qui est votre porte-parole, mais vous avez de dix à quinze minutes pour nous faire un exposé, qui sera suivi d'une période de questions.
M. Brian Doidge (analyste en marketing, Ontario Grains and Oilseeds Group): Merci, monsieur le président.
Je voudrais faire une brève introduction. Je m'appelle Brian Doidge et je représente l'Association des producteurs de maïs de l'Ontario. Vous connaissez peut-être Gus Sonneveld, directeur des recherches à l'Office de commercialisation des producteurs de blé de l'Ontario. Nous sommes également accompagnés de Cecil Bradley, directeur des recherches à la Fédération de l'agriculture de l'Ontario, et John McGill, agent de liaison inter-provincial à l'Office de commercialisation des producteurs de blé de l'Ontario. Également Kim Cooper, qui est le représentant commercial à l'Office de commercialisation des producteurs de soya de l'Ontario.
Collectivement, nos organisations représentent environ 64 000 cultivateurs de l'Ontario. Nous produisons environ 1,3 milliard de dollars de céréales et d'oléagineux, dont à peu près le tiers est exporté. Nous sommes intéressés au premier chef au transport en vrac, de sorte que nous nous intéressons tout naturellement à la Loi sur les transports au Canada.
Je ne vais pas lire les mémoires que nous avons préparés, mais nous avons plusieurs observations à faire. Premièrement, nous sommes d'accord avec l'orientation générale du projet de loi, telle que nous l'interprétons, c'est-à-dire l'instauration d'un système ferroviaire moins réglementé, plus efficace, moins coûteux et plus compétitif. Nous insistons sur le mot «compétitif». Nous sommes donc en faveur de beaucoup des dispositions du projet de loi.
Nous avons toutefois des préoccupations sur deux points importants sur lesquels nous attirons votre attention. Le premier concerne la procédure d'appel, dont vous avez beaucoup entendu parler, à maintes et maintes reprises. Je passe rapidement, car je veux simplement énumérer les faits saillants.
Le deuxième point, dont vous avez peut-être moins entendu parler, concerne les relations entre les chemins de fer d'intérêt local et ceux de la première catégorie, c'est-à-dire autorisés par les autorités fédérales.
Avant d'aller plus loin, nous voulons signaler que nous sommes en faveur des CFIL, mais nous avons de graves inquiétudes quant aux relations de travail entre les chemins de fer d'intérêt local et ceux de première catégorie.
Nous sommes d'avis que dans l'Ontario rural, en particulier, le CN et le CP n'ont pas particulièrement bien servi les intérêts agricoles. On pourrait donner beaucoup d'exemples des lacunes du service et des problèmes quant à l'affectation des wagons. En général, les compagnies de chemin de fer ont fait savoir très clairement que cela ne les intéresse pas tellement de transporter les denrées agricoles en provenance ou à destination de l'Ontario rural. Si tel est le cas, nous serons dans une situation intenable si nous dépendons de lignes secondaires qui n'ont pas de très bonnes relations de travail avec les grandes compagnies de chemin de fer.
Nous attirons l'attention sur le dernier paragraphe de la première page.
Nous pensons pouvoir surmonter la plupart des difficultés du projet de loi C-101 en insérant une disposition permettant les droits de circulation réciproques entre les CFIL et les compagnies de première catégorie, au moins jusqu'au point de correspondance le plus rapproché Si nous avions des droits de circulation réciproques, nous pourrions assurer la compétitivité du système ferroviaire.
Nous remarquons qu'il y a un certain nombre d'autres intervenants, dont vous avez déjà entendu certains. Par exemple, la Canadian Oilseed Processors Association invoque le même argument, tout comme la Ligue canadienne de transport industriel.
À la page 2, nous traitons de la procédure d'appel. Vous avez déjà entendu parler des articles 27, 34 et 35. À notre avis, il sera encore plus difficile pour un expéditeur de défendre sa cause devant les autorités si le projet de loi C-101 est adopté. Cela nous semble une mesure rétrograde. Plus précisément, en ce qui concerne l'article 27, nous croyons qu'il faut définir à la fois le niveau et la méthode permettant de calculer le niveau à partir duquel le préjudice est suffisamment important pour que l'office entende l'appel. Ce n'est pas clairement défini dans le projet de loi. Cette lacune fait de cette disposition un obstacle pour un petit expéditeur qui veut plaider sa cause.
À l'article 34, nous croyons que le projet de loi C-101 doit définir plus clairement ce qui constitue une demande frustratoire et qui est chargé d'en décider. À notre avis, vous devez définir clairement le coût qui peut être exigé de tous les requérants.
À l'article 35, nous croyons qu'il faut préciser dans le projet de loi le montant des droits que l'on peut imposer, afin que le petit expéditeur sache à quoi s'attendre dès le départ.
C'est à la page suivante que l'on aborde nos préoccupations les plus graves, à savoir les relations entre les lignes secondaires et les grandes compagnies. Plus précisément, nous voulons que le projet de loi C-101 définisse clairement les tarifs marchandises, le niveau de service, la fourniture de wagons, les droits de circulation et les relations entre les lignes secondaires et les grandes compagnies de chemins de fer.
À nos yeux, beaucoup d'expéditeurs de l'Ontario rural sont captifs. Pour remettre les choses dans leur contexte, disons que les expéditions de denrées agricoles en provenance et à destination de l'Ontario, pas seulement les céréales, mais aussi les engrais, les produits chimiques, tout ce qui a rapport à l'agriculture, représentent environ 3 p. 100 du trafic ferroviaire du CN et du CP en Ontario. C'est insignifiant.
Ils ont dit très clairement ce qu'ils envisageaient pour le système ferroviaire dans le Sud de l'Ontario. Il y aura une ligne principale de Sarnia à Toronto, et de là jusqu'au Québec. Nous croyons qu'il pourrait y avoir une autre ligne traversant la péninsule du Niagara jusqu'à Buffalo-Fort Erie, et qu'il pourrait y avoir une autre ligne descendant de London vers Windsor. Mais c'est tout.
La très grande majorité des localités du Sud de l'Ontario ne seront pas des servies par les grands transporteurs. Nous nous retrouverons avec une série de petits exploitants de lignes secondaires, et si nous n'avons pas une relation de travail clairement définie et défendable entre ces deux entités nous croyons que nous nous retrouverons avec un système qui ne sera pas viable.
C'est pourquoi nous insistons sur certaines dispositions, notamment l'article 113. Nous croyons que le projet de loi C-101 doit définir clairement et simplement la procédure et la formule utilisées par l'office pour l'établissement des tarifs. Le mécanisme doit comporter une comparaison avec des tarifs comparables. Si vous ne trouvez pas le moyen de faire cela, alors nous préconisons le retrait pur et simple de cet article.
Nous voudrions également dire quelques mots de l'article 28, que nous n'abordons pas dans notre mémoire. L'article 28 s'explique par l'absence d'une disposition permettant d'accorder une aide immédiate. Dans la LTN de 1987, il y avait une disposition relative à l'aide immédiate. Nous proposons que vous ajoutiez un paragraphe 28(3) au projet de loi C-101 afin de prévoir la fourniture d'une aide immédiate en cas d'appel. En effet, un petit expéditeur du Sud de l'Ontario ne peut se permettre d'attendre de trois à six mois avant de recevoir de l'aide. Il serait ruiné bien avant cela.
L'article 114 touche un point qui nous semble très important. Le législateur a pris bien soin dans le projet de loi C-101 de définir ce qu'est une compagnie de chemins de fer. Les compagnies de chemins de fer d'intérêt local y sont désignées sous le nom de «transporteur local». Dans toutes les dispositions du projet de loi du C-101 il est question d'une compagnie de chemins de fer. Il n'y est nulle part fait mention des relations ou des obligations qui existent entre une compagnie de chemins de fer, c'est-à-dire les compagnies de première catégorie, et le transporteur local, c'est-à-dire les CFIL. Cela nous semble une lacune très grave. Nous voulons que vous énonciez clairement les obligations en matière de services d'une compagnie de réglementation fédérale envers une ligne secondaire de réglementation provinciale. À cette fin, nous croyons que le projet de loi C-101 doit préciser clairement les exigences en matière de fréquences du service imposées à une compagnie de chemins de fer réglementée par le gouvernement fédéral à l'égard d'une ligne secondaire de réglementation provinciale, c'est-à-dire qu'il faut préciser combien de temps il faudra pour mettre en place un wagon, combien de temps il faudra pour insérer ce wagon dans le système.
Quand on en arrive à l'article 28 et aux autres dispositions du projet de loi qui traitent de l'interconnexion et des points de correspondance, dans toutes les définitions il est question d'une compagnie de chemins de fer d'une part et d'une autre compagnie de chemins de fer d'autre part, ce qui veut dire deux compagnies de catégorie un. Il n'y est absolument pas question de l'interconnexion ou des points de correspondance entre une ligne principale et une ligne secondaire.
Je passe maintenant à l'article 137. Nous savons par expérience qu'en Ontario les grandes compagnies ne sont pas intéressées, et le projet de loi 101 ne précise pas en détail leurs obligations envers les exploitants de lignes secondaires ou envers les expéditeurs. Par conséquent, nous croyons que le projet de loi C-101 doit définir clairement les obligations en matière de fourniture de wagons, d'échéancier et d'acheminement, au point que si une compagnie de chemins de fer fait une offre de tarif, cette offre implique nécessairement une offre de service, de sorte que l'offre d'un tarif devrait s'accompagner de l'offre de fournir le wagon.
Nous estimons que l'article 138 du projet de loi C-101, qui porte sur les droits de circulation et l'utilisation des rails, devrait prévoir des droits de circulation réciproques pour les CFIL ou les chemins de fer assujettis à la réglementation provinciale.
Je vous donne un exemple. En Ontario, il existe un chemin de fer que vous connaissez peut-être, le chemin de fer Goderich-Exeter. Il prend des céréales et livre des engrais et des produits chimiques dans les régions du Sud de l'Ontario. Nous pouvons faire transporter les céréales à destination de la côte est des États-Unis par ce chemin de fer. Il doit toutefois faire la liaison avec le CN. Il n'y a pas d'autres façons. Le CN, sur les trajets allant de, disons, Clinton, en Ontario, jusqu'à Baltimore ou au Sud-Est des États-Unis.. La partie du transport assuré par le CN est peut-être de 70 milles. C'est le CN qui est le CFIL, et il a déjà indiqué qu'il ne s'intéresse pas au transport de produits agricoles dans le Sud de l'Ontario.
Mettez-vous à la place des expéditeurs de grain du Sud de l'Ontario. Il y a déjà un CFIL. S'ils peuvent obtenir des services de wagon porte-rails, et s'ils s'engagent à vendre et à livrer des marchandises dans le Sud-Est des États-Unis, mais que le CN ne veut pas prendre cette marchandise, ou ne veut pas placer les wagons, parce que tout ce qui reste du CN dans le Sud de l'Ontario, c'est le tronçon de la ligne principale allant de Sarnia à Toronto, le CFIL n'a plus de raison d'être. Si nous ne pouvons pas obtenir de services et si le projet de loi C-101 n'impose pas l'obligation de fournir ces services, alors on ne prend pas à notre avis les mesures qui s'imposent, du moins dans le Sud de l'Ontario.
Je terminerai en faisant mention de l'article 141, qui traite du plan triennal d'abandon de lignes ferroviaires Voilà un certain temps que nous avons fait une proposition en ce sens, car nous aimerions que la rationalisation du système dans le Sud de l'Ontario se fasse de façon planifiée.
On a demandé au témoin précédent ce qu'était le point de vue de la collectivité rurale sur l'abandon des lignes ferroviaires. Les quatre groupes que nous représentons ont compris qu'il y aura une rationalisation importante des chemins de fer, du secteur des silos et du secteur des approvisionnements et services Cela dit, nous estimons que cette rationalisation doit se faire de façon planifiée pour tout l'Ontario, et non pas de façon disparate. Par conséquent, nous appuyons l'article du projet de loi C-101 qui oblige les entreprises ferroviaires à présenter un plan triennal.
Une dernière remarque: la Fédération de l'agriculture de l'Ontario voudrait ajouter un commentaire; je céderai donc la parole à Cecil deux petites minutes... Cela concerne l'abandon des emprises.
M. C. Bradley (représentant, Groupe de producteurs de céréales et d'oléagineux de l'Ontario): Outre sa contribution au mémoire que Brian vient de passer en revue pour vous, la FAO tient à communiquer au comité ses remarques sur l'entretien des emprises. C'est une question qui peut sembler futile par rapport aux grands thèmes du projet de loi C-101, mais c'est néanmoins une question très importante pour bon nombre de nos membres Cela les touche quotidiennement et irrite certains d'entre eux quotidiennement.
Comme Brian vient de l'indiquer, certains anticipent le jour où bien des lignes ferroviaires seront abandonnées en Ontario, à mesure que les entreprises ferroviaires tenteront de s'adapter aux réalités du marché. Lorsque des chemins de fer seront abandonnés, le sort d'emprises d'une longueur considérable sera incertain. D'après l'expérience de nos membres, les entreprises ferroviaires n'accordent plus beaucoup d'intérêt à l'entretien des emprises - je pense aux clôtures, au drainage, au contrôle des mauvaises herbes, etc. - une fois qu'elles ont obtenu le permis d'abandon.
La LTN de 1987 ne donne aucune directive à cet égard, mais nous estimons qu'il vaudra la peine de prévoir dans le projet de loi C-101, ou dans le texte qui sera promulgué, une disposition décrivant clairement les responsabilités des entreprises ferroviaires en matière d'entretien des emprises jusqu'au moment où le titre est cédé pour d'autres usages, qu'il soit cédé à une municipalité qui en fera un couloir récréatif, à une autre entreprise ferroviaire qui y implantera un CFIL ou aux propriétaires des terres adjacentes. On devrait indiquer clairement aux entreprises ferroviaires quelles sont les mesures d'entretien qui leur incombent jusqu'au moment de la cession du titre.
Merci.
Le président suppléant (M. Hubbard): Avec la permission du comité, je passerai dès maintenant au tour de cinq minutes. Jim, est-ce que cela vous va?
M. Gouk (Kootenay-Ouest - Revelstoke): Je crois que cela me suffira. Je n'ai que deux ou trois questions.
Avant que nous n'entendions des témoins, j'ai passé en revue le projet de loi et j'ai pris en note toutes les dispositions qui m'apparaissaient litigieuses. Puis, avant d'arrêter ma position, j'ai décidé d'entendre les opinions des intervenants.
C'est très intéressant. J'avais pris en note l'article 114, mais je n'ai pratiquement rien entendu au sujet de ses dispositions. Il est très intéressant d'entendre vos commentaires. J'en prends bonne note; je les comparerai à mes propres observations.
Examinons l'article 34, et plus particulièrement le paragraphe 27(2). Vous opposez-vous formellement à cette disposition, quel que soit son libellé, ou ne croyez-vous pas qu'on pourrait la clarifier ou la modifier de façon à ce qu'elle soit acceptable? Est-ce le concept même qui vous répugne, ou est-ce que vous craignez que ce paragraphe ne vous empêche d'avoir accès à l'office, ou est-ce le fait que cet article pourrait s'appliquer à l'arbitrage qui vous préoccupe?
M. Doidge: Je vais répondre. Contrairement à d'autres témoins qui vous ont suggéré d'éliminer cet article, nous avons, dans notre mémoire, indiqué qu'il pouvait être conservé. Nous suggérons de définir plus précisément l'expression «préjudice important» employée au paragraphe 27(2). Vous devez établir à quel niveau le petit expéditeur ne risquera pas de voir son appel rejeté parce qu'il ne peut prouver qu'il a subi un préjudice suffisant.
Si vous parveniez à définir cela, cet article pourrait être acceptable. Nous ne vous conseillons pas de le supprimer, parce que nous ne voulons pas non plus qu'il y ait toutes sortes d'appels non fondés.
M. Gouk: Vous croyez que l'article 34 n'est pas suffisant.
M. Doidge: C'est exact.
M. Gouk: Il est intéressant que vous ayez choisi ce mot.
M. Doidge: J'allais employer le terme «frustratoire», mais je ne sais pas comment ça s'écrit.
M. Gouk: Au sujet du paragraphe 34(1), certains ont dit qu'il pourrait être tout aussi bénéfique que nuisible aux expéditeurs, en ce sens qu'il mettrait fin aux objections non fondées à vos demandes que l'une ou l'autre partie pourrait évoquer. Certaines études de cas nous laissent croire que, en effet, il pourrait en être ainsi.
J'en ai parlé avec des groupes, avec les groupes de producteurs-expéditeurs avec lesquels je me suis entretenu, et, après avoir consulté leurs avocats, ils se sont dits d'accord avec moi pour dire que ce paragraphe ne leur serait peut-être pas entièrement nuisible.
Qu'en pensez-vous?
M. Doidge: Encore une fois, nous estimons que cet article a un certain mérite et qu'il ne serait pas nécessaire de le supprimer, seulement de le modifier. Il suffirait de préciser clairement ce qui constitue une demande, une intervention ou une objection «frustratoire».
À l'heure actuelle, on pourrait invoquer tous les arguments possibles chaque fois qu'un appel serait interjeté. Premièrement qu'est-ce qu'un «préjudice important»? Et puis, qu'est-ce qu'une demande «frustratoire»? Il faut que cela soit clairement défini. Les petits expéditeurs seraient alors mieux en mesure d'évaluer leur chance d'avoir gain de cause dans un appel.
M. Gouk: Ma dernière question porte sur vos remarques sur l'article 28. Essentiellement, vous aimeriez que l'article qui figurait dans la LTN de 1987 figure aussi dans le projet de loi C-101?
M. Doidge: Oui, et particulièrement le paragraphe 40(3) de la LTN de 1987. Nous vous suggérons de conserver cette disposition.
M. Gouk: J'en ai pris bonne note. J'y réfléchirai certainement.
Merci, monsieur le président.
Le président suppléant (M. Hubbard): Merci, Jim.
Madame Cowling, vous avez une question?
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Oui. Merci, monsieur le président.
J'ai une question à vous poser sur le secteur des céréales et des oléagineux de l'Ontario. Est-ce que ce secteur dépend totalement des chemins de fer?
M. Doidge: Non.
Mme Cowling: Quels autres moyens de transport pouvez-vous utiliser, et, s'il y en a, offrent-ils une concurrence quelconque aux services ferroviaires?
M. Doidge: Dans le Sud de l'Ontario, nous avons la chance d'avoir accès aux transports maritime, routier et ferroviaire. Le service choisi dépend en bonne partie du lieu de destination des marchandises. Gus expédie, bien entendu, une bonne partie de son blé outre-mer par navire. Une bonne partie du maïs et des fèves de soja expédiés aux États-Unis, surtout vers le Nord-Est et le Sud-Est, est expédiée par chemin de fer. Une bonne partie du blé transporté vers les minoteries et du maïs acheminé vers certains transformateurs près de la frontière est expédiée par camion.
Ce que nous voulons surtout, c'est favoriser la concurrence et la viabilité dans l'industrie des transports. Nous voulons que la voie maritime soit concurrentielle. Nous voulons un accès à des services ferroviaires concurrentiels et nous voulons une industrie du camionnage concurrentielle.
Mme Cowling: Mon autre question est celle-ci: vu que nous examinons la ligne secondaire Goderich, pourriez-vous dire à notre comité quelles choses entre autres nous devrions surveiller dans le cas des CFIL? De quoi devrions-nous nous préoccuper à titre de parlementaires?
M. Gus Sonneveld (représentant, Groupe de producteurs de céréales et d'oléagineux de l'Ontario): Il y a bien des choses, mais comme vous le savez, l'agriculteur doit d'habitude payer la note d'une façon ou d'une autre. Le marché ne dépend pas uniquement des prix, mais aussi de la logistique. Le prix d'un produit dépend des délais, du transport et des installations. Un point, c'est tout. Peu importe que l'agriculteur habite l'Ouest ou l'Est du Canada. Cela dépend du marché.
Je peux vous donner un exemple de ce qui se passe au niveau de l'interconnexion pour déterminer si vous pouvez obtenir un débouché ou non. Disons que vous utilisez une ligne secondaire. Nous qui nous occupons de commercialisation disons ceci: si les droits d'interconnexion dépassent un certain montant la tonne, nous ne pourrons plus utiliser la ligne tant que les droits d'interconnexion n'auront pas été rabaissés. Cela nous empêche d'utiliser la ligne. C'est une chose dont vous devriez tenir compte.
Quel est le coût total, et comment les taux sont-ils partagés? Je pense que M. Doidge en a parlé. Ce sont des questions très importantes.
Ce ne sont pas les expéditeurs qui paient le coût. Il ne faut pas l'oublier. Ce sont les producteurs ou les consommateurs. Si vous voulez faire une analyse du service, c'est de ce facteur qu'il faut tenir compte. Les consommateurs ou les producteurs peuvent-ils payer les coûts de transport? Peu importe que l'on parle de pâte de bois ou de céréales.
Les producteurs cherchent des débouchés. C'est la logistique qui détermine si vous pouvez vous rendre au marché ou non. Voilà les principaux facteurs que vous devriez examiner relativement à ce projet de loi et aux instances présentées par les témoins. Ma réponse est-elle claire?
Mme Cowling: Merci.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Je n'ai pas vraiment de question à poser. Je voudrais simplement féliciter le témoin de son attitude.
J'ai essayé d'expliquer au début de l'après-midi, ou ce matin, que, à la fin du compte, c'est l'agriculteur et le consommateur qui paient les coûts de transport. Si l'on se débarrasse des agriculteurs, il n'y aura bientôt plus de consommateurs non plus. Les producteurs sont donc très importants. Je vous remercie de l'avoir signalé.
Le président suppléant (M. Hubbard): Il y a de nombreux agriculteurs parmi les membres du comité aujourd'hui. Je donne maintenant la parole à M. Nault, qui n'est pas agriculteur, mais plutôt...
Une voix: C'est un cheminot.
M. Nault: Pas nécessairement.
M. Sonneveld: Vraiment?
M. Nault: Vraiment. Vous pouvez l'interpréter comme vous le voulez.
Je voudrais d'abord parler de l'obligation qu'ont les chemins de fer régis par le gouvernement fédéral de fournir des services aux chemins de fer régis au niveau provincial. Si je ne m'abuse, une charte régie au niveau fédéral prévoit certaines obligations du transporteur public. Je voudrais donc savoir exactement ce que vous voulez dire par les obligations de service. Il me semble que ce que le propriétaire d'un CFIL doit faire, c'est acheminer les marchandises vers la ligne principale du transporteur public. C'est ensuite au transporteur public qu'il incombe d'acheminer ces marchandises vers le marché.
J'ai un peu de mal à comprendre pourquoi vous croyez que les dispositions du paragraphe 27(2) vous empêcheraient d'avoir recours à l'office. Il me semble que, si le CFIL peut transporter les marchandises jusqu'à la ligne principale, le transporteur public est ensuite obligé de transporter les marchandises jusqu'au marché dans des délais raisonnables. Vous pourriez donc invoquer le paragraphe 27(2) pour faire valoir à l'office que la viabilité de l'expéditeur est sérieusement menacée parce que le transporteur public ne remplit pas ses obligations. Y a-t-il quelque chose qui m'échappe, ou s'agit-il d'autre chose? C'est la première raison pour laquelle je pense que votre argument à propos de l'article 114 ne tient pas, parce que l'obligation du transporteur public existe encore.
Deuxièmement, relativement à l'article 27(2), cela m'étonne un peu d'entendre les expéditeurs nous dire que nous devrions définir exactement ce que l'on entend par «préjudice important». Vous demandez au comité et au gouvernement du Canada de lier les mains à un office qui est maintenant habilité à décider lui-même ce qui peut être considéré comme un préjudice important dans des conditions commerciales très différentes, par exemple en Ontario et dans l'Ouest du Canada. Dans un tel cas, ce sont des arbitres neutres, et je ne parle pas ici du processus d'arbitrage qui ne relève pas de l'office, qui déterminerait ce qui constitue un préjudice important.
Cela m'inquiète un peu que vous nous demandiez de définir ce principe alors que nous voudrions que ce soit l'office qui en décide en fonction de principes commerciaux. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi les expéditeurs voudraient que nous définissions cette notion? À mon avis, ce serait plus dangereux dans certains cas que de laisser un office autonome qui serait à l'avantage des deux parties.
M. Doidge: C'est une question à deux volets, et je vais m'efforcer d'y répondre.
Le premier avait trait à la fiabilité et aux obligations du transporteur public. Vous avez dit au début que le CFIL transporte les marchandises jusqu'au point d'interconnexion. Si les transporteurs de la ligne principale ne fournissent pas des wagons de chemin de fer, comment le CFIL va-t-il transporter les marchandises jusqu'au point d'interconnexion?
M. Nault: Justement. Est-ce que cela ne constituerait pas une raison suffisante pour que l'office détermine qu'il y a préjudice important pour l'expéditeur? Je décide de créer un CFIL, peu importe que ce soit au niveau provincial ou fédéral, et je dis ensuite au CN ou au CP que, pour que mon entreprise soit viable, j'ai besoin que le CN ou le CP me fournisse des wagons dans des délais raisonnables. Les transporteurs principaux veulent bien expédier mes marchandises, mais ne voulaient plus s'occuper de la ligne secondaire, et c'est pour cela que j'ai décidé moi-même ou que quelqu'un d'autre a décidé de l'acheter. Si les transporteurs principaux refusent, n'ai-je pas une raison suffisante pour faire appel à l'office en disant que les transporteurs principaux m'acculent à la ruine? Il me semble que c'est ce qui constitue un préjudice important.
Y a-t-il quelque chose qui m'échappe? C'est ainsi que j'interprète cette disposition.
M. Doidge: Selon nous, ce sont les détails qui vont déterminer la viabilité des expéditeurs. Les délais sont importants; c'est ce qui compte pour les CFIL et pour les marchands de céréales qui se servent d'un CFIL. Des délais d'une semaine, de deux semaines ou d'un mois avant l'arrivée d'un wagon peuvent faire annuler un contrat. Nous n'avons pas les mêmes...
M. Nault: Justement. Est-ce que ce n'est pas une raison suffisante pour que vous alliez dire à l'office que les transporteurs principaux ne vous fournissent pas les wagons ou ne les fournissent pas à temps pour que vous puissiez remplir les conditions du contrat que vous voulez conclure avec celui qui veut acheter vos produits? Personne n'a mis cette hypothèse à l'épreuve.
M. Doidge: La réponse dépend nettement de la façon dont on définit un préjudice important.
M. Nault: Mais je n'ai pas de définition.
M. Doidge: Justement; le projet de loi non plus.
M. Nault: C'est à l'office de décider s'il y a préjudice important ou non.
M. Doidge: En effet. Vous demandez d'abord aux expéditeurs qui se servent d'une ligne secondaire de décider s'ils peuvent convaincre l'office qu'il existe un préjudice important. Ils doivent le prouver, alors que la société ferroviaire dira que c'est faux, qu'elle avait accepté de fournir les wagons, mais qu'elle a eu du mal à les obtenir et qu'elle a donc attendu deux semaines.
C'est l'argument qui serait invoqué. Le petit expéditeur ne sait pas ce qui constitue un préjudice important. Il devra décider lui-même et dire: je pense avoir de bon arguments et je vais donc faire appel à l'office. Il court cependant d'autres risques sans même le savoir. Il ne connaît pas le montant des frais que l'office pourrait lui faire payer si sa plainte est rejetée. Cela suppose, bien sûr, que l'office n'aura pas rejeté sa plainte dès le départ sous prétexte qu'elle est frustratoire.
M. Nault: Nous allons y venir dans un instant. J'ai fait le raisonnement contraire. Si l'on définit les délais acceptables pour l'affectation des wagons avant même que quelqu'un porte plainte à l'office, on constatera que certaines conditions acceptables pour un expéditeur ne le sont pas pour un autre. Comment l'office va-t-il pouvoir rendre des décisions si on lui dit qu'un délai de deux semaines est acceptable pour un expéditeur alors qu'un autre expéditeur a besoin d'un délai de deux jours? L'office doit décider lui-même ce qui constitue des délais acceptables selon les circonstances. Je ne vois pas comment le gouvernement peut définir pour l'office ce qui constitue des délais acceptables pour l'affectation des wagons.
Nous savons tous que l'affectation des wagons est très complexe, et je le sais parce que je l'ai déjà fait. Si vous avez un conducteur paresseux, il y aura de sérieux problèmes. Un retard peut être causé par toutes sortes de facteurs. Il peut y avoir des ennuis mécaniques. Il y a toutes sortes de choses qui peuvent empêcher un expéditeur d'obtenir ses wagons à temps et qui sont particulières à l'industrie ferroviaire. Si une locomotive tombe en panne parce qu'elle a été prise dans la neige et a déraillé, l'expéditeur devra peut-être attendre une semaine avant d'obtenir ses wagons parce que c'était la seule locomotive disponible. Sinon, les wagons auraient pu venir d'ailleurs.
Vous pourriez faire appel à l'office et dire que le retard vous a causé un préjudice important, alors que la société ferroviaire dira qu'il y avait de bonnes raisons à cela. C'est pour cela qu'il faut de la souplesse dans la loi et que je me demande pourquoi vous voudriez une définition tellement précise que cela reviendrait à dire à l'office comment rendre ses décisions avant même qu'il reçoive une plainte.
M. Doidge: Revenons en arrière un instant et voyons le point de vue d'un petit expéditeur du Sud de l'Ontario qui essaie d'obtenir des wagons de chemin de fer. Dans l'Est du Canada, nous ne participons même pas au processus d'affectation des wagons.
En février 1994, l'OTG a menacé de récupérer 10 p. 100 des coûts d'exploitation d'une ligne directe payables au CN et au CP. Cela équivalait à quelque 20 millions de dollars. Il n'a fallu qu'une fin de semaine au CN et au CP pour réagir. Le vendredi, le CN avait annoncé qu'il retirait 150 wagons du service, soit 20 p. 100 de leurs wagons dans l'Est. Le même après-midi, le CP annonçait qu'il doublait le tarif marchandises pour le trains passant par Buffalo. Cette décision entrerait en vigueur non pas deux mois ou deux semaines plus tard, mais le lundi suivant, soit le jour ouvrable suivant. Les principales sociétés ferroviaires annonçaient donc aux expéditeurs du Sud-Ouest de l'Ontario qu'ils n'auraient pas les wagons promis parce que ces wagons devaient être acheminés vers l'Ouest pour respecter les délais de livraison sur la côte ouest aux termes de la LTGO.
Voilà la situation dans le Sud de l'Ontario. On ne tient même pas compte de nos besoins dans la formule d'affectation des wagons de chemin de fer. Nous ne sommes même pas représentés à la table de négociation. Personne ne défend nos intérêts.
M. Nault: C'est une autre chose, mais je sais que vous en parlez parce que cela constitue un problème important.
Le président suppléant (M. Hubbard): Je devrai peut-être...
M. Nault: Monsieur le président, c'est probablement l'une des meilleures discussions que nous avons eues jusqu'ici. Je pense que nous devrions continuer un peu.
Le président suppléant (M. Hubbard): Je pense que vous avez déjà très bien approfondi la question, et je vous ai déjà accordé plus de temps que prévu.
M. Nault: J'aurais voulu parler aussi de l'entretien de l'emprise des chemins de fer. C'est une question importante pour le Sud de l'Ontario, mais j'imagine qu'il faudra attendre une autre occasion.
M. Bradley: J'imagine que vous pourriez nous inviter à revenir.
M. Nault: Je peux rester encore cinq minutes; je n'ai pas d'autres engagements ailleurs.
Le président suppléant (M. Hubbard): Je vais maintenant donner la parole à Jim. Il a quelque chose à dire.
M. Gouk: Je voudrais faire une brève observation, monsieur le président.
L'office doit venir témoigner au sujet des paragraphes 27(2) et 34(1), et il le sait depuis longtemps. J'ai demandé que l'office vous donne des exemples pour montrer pourquoi il a besoin de ces dispositions. Autrement dit, depuis 1987, y a-t-il eu des cas où l'office aurait pu ou aurait dû avoir recours à de telles dispositions? Vu le long préavis que nous avons donné à l'office, il me semble que s'il ne peut pas montrer pourquoi il a besoin de ces dispositions, nous devrons nous demander pourquoi elles y sont. C'est ce que je ferai moi-même.
Je n'affirme pas catégoriquement que ces dispositions doivent disparaître, mais je tiens à bien faire comprendre à l'office qu'il doit expliquer pourquoi elles doivent y être. Si l'office peut nous citer des cas où il aurait pu résoudre certains problèmes si les dispositions de l'article 27(2) ou de l'article 34(1) avaient existé, très bien. J'ai besoin de preuves, parce que s'il n'y en a pas, je veux qu'on m'explique pourquoi ces dispositions sont là.
Le président suppléant (M. Hubbard): Je remercie les témoins. Nous pourrions probablement passer toute la soirée ici, mais nous devons respecter l'horaire. Les membres du comité ne sont pas tous satisfaits de cet horaire, mais je sais que les membres de votre groupe seront prêts à discuter de ces questions en privé avec Bob ou tout autre membre...
M. Sonneveld: Au nom de notre groupe, je tiens à vous remercier de nous avoir permis d'être ici. Vous avez tout à fait raison. Je connais votre horaire. Si vous voulez obtenir d'autres renseignements, vous pourrez communiquer avec n'importe lequel de nos organismes, et nous vous les fournirons volontiers.
Le président suppléant (M. Hubbard): Je souhaite maintenant la bienvenue à notre témoin suivant. Il s'agit de M. Jim Weir, qui représente James Richardson & Sons Limited - Division des grains.
M. Jim Weir (vice-président, James Richardson & Sons, Limited - Division des grains): Merci beaucoup, monsieur le président.
D'après ce que m'ont dit certains amis dans l'industrie et ce que j'entends ici même depuis quelques minutes, j'ai vraiment l'impression que je devrais maintenant faire passer la musique de Monty Python et dire: «Voici maintenant quelque chose de tout à fait différent.» Je voudrais bien pouvoir vous dire quelque chose de tout à fait différent. Malheureusement, je vais sans doute essayer de confirmer ce que certains autres témoins vous ont déjà dit à propos de ce projet de loi.
Votre comité donne l'occasion à ceux d'entre nous qui sont touchés par les lois fédérales sur les transports de participer à la création d'un nouveau régime des transports, d'un meilleur régime, du moins nous l'espérons, pour le Canada.
Nous comprenons tous maintenant que cela coûte beaucoup trop cher à notre époque d'avoir un réseau qui satisfait tout le monde et que c'est un gaspillage.
Nous pouvons tous convenir au départ que nous avons vraiment besoin d'un ensemble de principes ou d'énoncés d'intention clairs, rationnels et logiques de la part du gouvernement dans le cadre de ce projet de loi.
À notre avis, ce projet de loi, par l'intermédiaire de l'article 5, établit certains principes directeurs. Je pense qu'il nous oriente dans la bonne direction en rendant possible, par un mécanisme commercial plus normal plutôt que par la réglementation, la fixation des taux exigés et des services offerts. Nous estimons que le jeu des forces du marché qui encouragent la concurrence en matière de taux et de service devrait être assorti de garanties raisonnables contre toute pratique déloyale ou restrictive.
Nous estimons que le gouvernement a reconnu à juste titre deux choses dans cette mesure législative. La première, c'est que la concurrence et le jeu des forces du marché dans le domaine du transport, particulièrement celui du grain, ne sont pas la solution idéale et, par conséquent, ne sont pas les seuls moyens de protéger l'intérêt public.
Nous pensons aussi que le projet de loi reconnaît qu'il est nécessaire de prévoir une période d'adaptation ou de transition d'un régime à l'autre pour le transport du grain.
En définitive, nous avons besoin dans le domaine du transport d'une législation conçue au Canada, pour les Canadiens, d'une législation qui reconnaît les caractéristiques uniques de l'économie canadienne, et non pas d'un ensemble de règles importées d'ailleurs que l'on plaquerait ici. Nous pensons que cela s'applique particulièrement aux expéditeurs de grain canadien, étant donné que leur activité représente environ une tonne sur quatre à acheminer en vrac dans notre pays.
Pour la gouverne du comité, je voudrais mettre mes remarques en perspective. Comme vous le savez sans doute, tous les intervenants de notre industrie consacrent actuellement énormément d'énergie à essayer de bâtir un meilleur système. Notre mémoire n'est qu'un instantané, si vous voulez, face à la mesure législative proposée. Avec ou sans elle, nous continuerons de collaborer avec les autres entreprises céréalières, avec les agriculteurs, avec les transporteurs ferroviaires et avec le gouvernement pour trouver des solutions raisonnables aux problèmes et aux défis qui sont les nôtres.
La réforme réglementaire visée par le projet de loi C-101 soutient l'intérêt envers un processus constructif de changement visant à rendre plus économique et plus rapide le transport des biens vers les marchés. En général, le gouvernement fédéral essaie de maintenir un bon équilibre entre les besoins des transporteurs et ceux des expéditeurs dans les lois qu'il dépose.
La Division des grains s'intéresse tout particulièrement aux rapports établis par ce projet de loi entre les deux chemins de fer nationaux et nous-mêmes, en tant que client expéditeur. En général, nous croyons que les dispositions du projet de loi relatives à l'accès concurrentiel sont adéquatement protégées par le maintien des obligations des transporteurs publics.
Grâce à la Loi sur les transports au Canada, les dispositions de la Loi sur les transports nationaux (1987) s'appliqueront désormais au secteur du grain de l'Ouest du Canada. Pendant la délicate période de transition des quelques prochaines années, il incombera à tous ceux qui sont dans le système de travailler à atteindre des buts qui assureront la croissance à long terme et la prospérité de la collectivité agricole et de l'économie canadienne en général. Sous réserve de quelques modifications, la Division des grains est d'avis que la Loi sur les transports au Canada y contribuera.
Jusqu'à l'abrogation de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest... Les expéditeurs de grain se demandaient dans quel nouveau cadre ils auraient à fonctionner. Les membres du comité sont certainement au courant du fait que les céréaliculteurs de l'Ouest du Canada, à l'instar des exploitants de silos et des transporteurs ferroviaires, ont été encadrés par un régime extrêmement serré pendant bien des années.
La Loi sur les transports nationaux de 1987 contenait des dispositions sur les niveaux de service qui, pour l'essentiel, décrivaient les droits et obligations des expéditeurs et des transporteurs. Les articles 114 à 117 du projet de loi conservent ces dispositions. À notre avis, le maintien de ces «règles de base» assure l'appui nécessaire aux dispositions du projet de loi sur l'accès concurrentiel. Le maintien des obligations des transporteurs publics corrige une lacune de la proposition originale.
À notre avis, les dispositions sur les obligations des transporteurs publics et sur l'accès concurrentiel remplissent précisément leur office, c'est-à-dire intervenir en l'absence d'une véritable concurrence. Dans bien des cas, l'industrie céréalière de l'Ouest du Canada fait face à un transporteur ferroviaire en situation de monopole. Dans d'autres cas, il y a un duopole. Mais il n'existe pas de concurrence véritable entre les modes de transport pour l'acheminement du grain. On ne peut pas vraiment compter sur le camionnage pour transporter quelque 30 millions de tonnes de grain par an. Aucune autre infrastructure n'existe pour absorber un tel volume, comme peuvent le faire par exemple les cours d'eau intérieurs aux États-Unis.
Les expéditeurs de grain en vrac des Prairies devraient continuer d'avoir accès aux dispositions de la LTN de 1987 sur l'accès concurrentiel, parce que ce trafic est en général captif du rail et, à de nombreux endroits, d'une compagnie de chemin de fer en particulier. Et il continuera d'en être ainsi. Malgré la rationalisation du système des silos à grain, cela continuera d'être le cas à bon nombre d'endroits.
Ainsi, le projet de loi met les mesures réglementaires à la disposition des expéditeurs et des compagnies de chemins de fer. Le fait qu'elles aient été peu utilisées dans le passé est une preuve de leur justesse pour les expéditeurs de grain pendant l'importante période de transition.
L'Office des transports du Canada remplace l'actuel Office national des transports. Nous souhaitons que le gouvernement fasse en sorte que l'office nouvelle version ne soit pas l'ombre de lui-même et puisse continuer de s'acquitter de son mandat de manière équitable et efficace.
Bien que nous convenions qu'il est nécessaire de contenir les coûts, l'office doit être assuré d'un niveau convenable de ressources pour exercer son mandat, y compris pour ce qui est de sa composition.
En ce qui a trait au processus d'abandon des lignes de chemin de fer, le projet de loi cherche à uniformiser la manière dont une compagnie de chemin de fer peut se retirer d'un marché, abandonner les voies excédentaires et sous-utilisées ou céder une ligne à l'exploitant d'un court tronçon. En général, les propositions contenues dans la nouvelle loi sont logiques si l'on incite les compagnies de chemin de fer à devenir plus efficaces. Après tout, l'un des buts visés par le gouvernement est de promouvoir un service ferroviaire plus efficace.
Les dispositions du projet de loi sont maintenant suffisamment rigoureuses, à notre avis, pour qu'on aborde les questions de réglementation comme la compétitivité et l'abandon ou la cession de lignes. Il ne conviendrait pas d'inclure d'autres dispositions qui étendraient la portée du projet de loi à d'autres aspects économiques ou sociaux.
Je vais maintenant aborder trois ou quatre points précis.
À notre avis, l'article 155 est nécessaire pour appuyer l'éventuel processus de prise de décisions du gouvernement en ce qui concerne le barème des taux maximaux. Il faudra se fonder sur des constatations pour déterminer les gains d'efficience qui auront été faits au cours de la période de transition. On pourra continuer de recourir, pour ce faire, aux examens des coûts, comme le fait déjà l'office.
Les trois derniers paragraphes de notre bref mémoire portent sur des articles qui ont suscité énormément de commentaires souvent cyniques ou, à tout le moins, sceptiques. On discute parfois de ces recours d'une façon qui laisse entendre que les expéditeurs et les transporteurs ferroviaires sont constamment à couteaux tirés.
En outre, on présente les choses comme si les recours sont régulièrement ou souvent utilisés pour régler le sort d'un malheureux expéditeur. Deux de ces articles prédisent pratiquement que le nouveau régime donnera lieu à une série de constatations.
Dans les faits, nous prévoyons qu'on aura très peu recours à ces dispositions. D'ailleurs, l'expérience a montré qu'on les a peu utilisées. L'important, c'est qu'il existe un processus de dernier recours raisonnable, abordable et assez expéditif pour aider les deux parties à maintenir leurs relations d'affaires. Introduire des obstacles ou des critères supplémentaires ne servirait qu'à encourager des rapports qui seraient davantage axés sur l'affrontement, et, au bout du compte, nous ne pensons pas que ce genre de rapports soient sains, productifs et dans le meilleur intérêt de nos clients.
Le paragraphe 27(2), dont de nombreux autres témoins ont parlé, prévoit que l'office ne peut, en fait, être saisi que d'une affaire bien fondée et qu'il doit être convaincu de la nécessité d'acquiescer à la demande d'un expéditeur qui «subirait autrement un préjudice important. Le projet de loi ne contient nulle part ailleurs une explication satisfaisante de ce que l'on entend par «demande». Pourrait-il s'agit de «plaintes» relativement aux obligations des transporteurs publics? Nous l'ignorons. Quelle est la raison de cet article vague, qui manque de clarté et de précision?
Vu l'absence de détails précis, nous sommes enclins à douter de la valeur de cette disposition. On dresse ici un obstacle important, qui risque de devenir coûteux, de prendre beaucoup de temps et d'avoir pour effet de décourager l'application légitime des dispositions sur les droits des expéditeurs. Une affaire deviendra d'autant plus difficile à la lumière du nouvel article 113 concernant les «prix et conditions [qui] doivent être commercialement équitables et raisonnables». Le paragraphe 27(2) devrait être abrogé.
Nous faisons une recommandation similaire concernant l'article 34. Nous sommes d'accord sur la notion générale selon laquelle l'office peut ordonner le paiement de frais. Nous ne voyons toutefois pas, encore, pourquoi on y ajoute d'autres dispositions et un libellé supplémentaire. En fait, je pense qu'on pourrait terminer la phrase à peu près au milieu, et je peux m'en occuper pour vous.
Enfin, l'article 113, qu'on a déjà mentionné, est semblable aux articles 27 et 34. Encore là, nous dirions qu'étant donné ses faiblesses évidentes et sa piètre justification cet article devrait être abrogé.
Monsieur le président, membres du comité, en bref, les propositions que contient le projet de loi sont en grande partie, à notre avis, raisonnables. Ce projet de loi ne satisfera pas à toutes les attentes précises de tous les intervenants du système des transports. Ce qu'il importe de se demander, c'est si nous sommes sur la bonne voie et si l'on a atteint un équilibre raisonnable.
Si le projet de loi présente des lacunes en ce qui concerne notre domaine d'activité, le secteur céréalier, nous estimons que les solutions que nous proposons ne feraient pas dévier le gouvernement de la voie qu'il a tracée. Nos suggestions tiennent vraiment compte du milieu dans lequel nous fonctionnons aujourd'hui, et dans lequel nous fonctionnerons vraisemblablement dans quelques années. Avec ces changements, il y a un échange raisonnable eu égard au bouleversement massif du régime de transport du grain qui est en train de se produire.
Je conclus ainsi mon exposé. Si les membres du comité veulent me poser des questions, je me ferai un plaisir d'y répondre. Si je ne peux pas fournir de réponses maintenant, je m'engage à le faire le plus rapidement possible.
Le président supplément (M. Hubbard): Merci, monsieur Weir.
Je vais accorder des périodes de cinq minutes. Jim, êtes-vous prêt?
M. Gouk: Nous pourrions peut-être partager mon temps de parole.
Je ne traiterai pas du paragraphe 27(2). Vous étiez ici et vous avez donc entendu les observations que j'ai faites.
J'ai cependant une question à poser sur un domaine que je ne connais pas aussi bien que d'autres, soit les taux de fret, les plafonds ou les maximums qui sont imposés à ce titre pour les céréales. Je voulais connaître vos vues sur cette question. Vous ne les avez pas présentées. Êtes-vous pour leur disparition progressive, leur maintien ou leur suppression?
M. Weir: Le régime de taux maximums qu'on a mis en place est une mesure transitoire qui me semble recueillir un appui considérable dans l'Ouest du Canada.
Comme l'a mentionné votre collègue, c'est vraiment l'agriculteur, le producteur, qui en fin de compte doit, de quelque manière - soit directement, soit indirectement - subir les conséquences de la mise en place d'un régime de ce genre. Comme nous avons été assujettis à un régime de transport réglementé, et vu le caractère transitoire d'un régime de taux réglementés, je pense que nous pouvons pendant un certain temps continuer de nous diriger vers un système qui réagisse davantage aux forces du marché.
M. Hoeppner: Une brève question sur la restructuration et la rationalisation du système de manutention des grains. Je regarde le nombre de silos que vous avez, et nous savons que les trains-blocs vont s'imposer dans ce système ferroviaire nouveau et plus efficace. Cela vous créera-t-il des problèmes? Pourrez-vous y faire face, ou comment cela concorde-t-il avec les plans de l'entreprise?
M. Weir: Tous nos amis du secteur, toutes les entreprises, se trouvent plus ou moins dans la même situation. Nous savons que vous savez que nous avons une surcapacité en ce qui a trait au rendement que nous pouvons atteindre dans la manutention de cette denrée.
Ainsi, toutes les entreprises, y compris la mienne, se voient obligées de trouver de nouveaux capitaux, de réinvestir dans le système. Je sais que cela coûte très cher de nos jours de construire de nouvelles installations - de 5 à 10 millions de dollars - et ces installations vont faire partie de notre nouvelle structure dans l'avenir.
M. Hoeppner: On sait qu'en fin de compte, ce sont les agriculteurs qui paient. C'est pourquoi je me demandais comment vous feriez face à cette restructuration.
M. Weir: Je pense que les agriculteurs ont clairement dit que nous ne pouvons pas nous offrir le système que nous avons aujourd'hui. Si on ne peut pas s'offrir le système qu'on a, il faut rationaliser, tant le réseau ferroviaire que l'autre infrastructure, le système des silos à grain.
Les céréaliculteurs ne s'attendent plus à trouver un silo tous les six milles. Dans la plupart des cas, ils ne pensent plus conduire leurs propres camions sur une vieille route pour se rendre à un silo. Comme vous le savez bien, l'agriculture et l'industrie céréalière canadiennes sont très en avance, et les agriculteurs sont très avant-gardistes et des gens d'affaires avisés. Ils saisissent l'importance économique de leur entreprise tout aussi bien que les autres.
M. Hoeppner: Je crains que certaines sociétés céréalières n'aient des difficultés à financer leur restructuration. C'est plus ou moins la question. Je me demandais comment cela vous toucherait. James Richardson s'en tire encore assez bien.
M. Weir: Je ne pense pas que l'argent abonde et qu'on n'ait qu'à se servir. Je pense que nous devrons tous nous montrer très prudents au moment de décider où investir pour en tirer un rendement.
Nos actionnaires, soit dit en passant, veulent tout autant savoir ce qu'on fait de leur argent, que ce soit dans le secteur particulier de l'entreprise où je travaille, ou que ce soit dans une autre entreprise qu'ils exploitent. Ils sont comme toute autre entreprise.
Mme Cowling: Merci, monsieur Weir, pour votre exposé. Je vais essayer d'être brève.
Vous avez mentionné qu'il fallait prévoir une période d'adaptation. Pourriez-vous préciser cela pour le comité? En outre, croyez-vous que le gouvernement du Canada devrait dérèglementer entièrement le secteur céréalier?
M. Weir: Pour répondre à votre première question, oui. Je pense qu'on reconnaît très bien qu'il est raisonnable de prévoir une période de transition. La raison en est, entre autres choses, que nous avons une infrastructure particulière et une façon de faire des affaires et qu'il faut prévoir une certaine période d'ajustement pour en changer. Combien de temps faudra-t-il? À quel rythme se fera cette adaptation? Cela reste à voir. Si l'abandon de voies de chemin de fer se fait de façon très dynamique, nous allons évidemment rationaliser beaucoup plus rapidement le système des silos.
Je pense qu'il faut toujours une période de transition. Sa durée peut être discutable, mais en l'occurrence je pense que faire carrément passer un secteur d'un type de régime à un autre, c'est ne pas tenir compte de certaines des particularités qui caractérisent depuis longtemps ce secteur.
Pour ce qui est de la deuxième question, je pense qu'une partie de l'exposé traitait du fait que nous préférerions dans la plupart des cas - et quand je dis «nous» je pense que cela veut dire tout le monde dans ce secteur - fonctionner sans être assujettis à des prix et à des règlements artificiellement établis. C'est ce que nous préférerions.
Cependant, comme j'essaie de l'expliquer - et d'autres l'ont sans doute expliqué tout aussi bien que moi - les considérations d'ordre géographique et le simple volume de denrées qu'il faut déplacer dans certains cas créent des situations où il peut être nécessaire de disposer de certaines protections extérieures.
Si vous me demandez de prédire si un jour nous ne serons plus assujettis à aucune réglementation, je dirais que nous n'en arriverons jamais sans doute à ce point, mais j'espérerais qu'un jour nous n'y recourions que très peu. Cela compte plus pour moi que d'être effectivement assujetti ou non à une réglementation. L'important, c'est de voir si nous avons besoin d'y recourir.
M. McKinnon: Pour revenir à ce que vous pensez de l'avenir du camionnage dans le secteur céréalier, je crois que vous avez dit que le camionnage ne représente qu'environ 3 p. 100 du transport. Pensez-vous que dans l'avenir il se maintiendra à ce niveau?
M. Weir: Je ne pense pas avoir cité de chiffres. Ce que j'ai dit, ou ce que je vais préciser, c'est que de plus en plus de producteurs accordent des contrats de camionnage pour répondre à leurs besoins...
M. McKinnon: Bien.
M. Weir: ...leurs besoins en matière de transport. Ce que j'ai dit, c'est que les producteurs n'ont pas besoin de trouver un silo à grain tous les six milles, ou à un jet de pierre de leur ferme.
M. McKinnon: Seulement si le lance-pierre est enregistré.
M. Weir: Ça, c'est un autre débat.
Ai-je répondu à votre question? Pas tout à fait?
M. McKinnon: Pas tout à fait, mais presque.
M. Nault: À propos du paragraphe 27(2), ce que nous avons découvert en nous entretenant avec presque tous ceux qui ont comparu à ce comité, c'est que les prix compensatoires, ou les prix de ligne, ou le recours à l'office, n'ont été évoqués que de rares fois. Pouvez-vous me dire si dans l'ancienne loi, à votre avis... il est arrivé très rarement que des gens s'adressent à l'office... s'il y avait une définition dans la loi, ou si en fait une définition avait finalement été proposée par l'office, compte tenu de ce que par expérience il jugeait raisonnable et commercialement équitable.
M. Weir: Pour dire vrai, je ne sais pas si l'office avait publié des définitions. Ce que j'essayais de dire au sujet du paragraphe 27(2) et de quelques autres dispositions du projet de loi, c'était simplement que la LTN de 1987 et les dispositions en vigueur, compte tenu de l'usage qu'on en a fait, semblent avoir atteint leur but. Nous demandons simplement d'où on a tiré ces nouvelles parties et ce qu'il y a dans ce libellé additionnel qui va améliorer le milieu et nous aider à mieux mener nos affaires, mieux que nous n'avons pu le faire sous l'ancien régime.
M. Nault: Ne reconnaissez-vous pas, alors, que la seule raison pour laquelle c'était efficace dans l'ancienne loi, c'est que les expéditeurs s'en servaient pour créer un effet de levier...
M. Weir: Oui.
M. Nault: ...et que c'était la seule raison pour laquelle cela s'y trouvait? Manifestement, la plupart des gens ne se donnaient pas la peine de s'adresser à l'office pour se plaindre d'un préjudice important s'ils avaient indûment subi un tort quelconque, mais ils s'en servaient comme monnaie d'échange.
M. Weir: Je ne peux pas dire si tel était ou non le cas, ni parler de toutes les situations dans lesquelles des expéditeurs et des transporteurs ont pu se trouver. Toutefois je peux dire que dans une autre sphère de compétence nous avons récemment fait l'expérience d'un recours à l'office et avons en fait constaté à notre grand plaisir qu'en réalité nous n'avions pas à aller aussi loin que ce que permettait la loi en vigueur. Le transporteur et nous-mêmes étions quelque peu hésitants face à la procédure très longue et complexe qui pouvait être en place, et nous nous sommes dit qu'il vaudrait peut-être mieux pour nous deux que nous nous rencontrions et tentions de résoudre raisonnablement le problème qui se posait, plutôt que d'avoir à franchir une autre étape.
M. Nault: Merci, monsieur le président.
Le président suppléant (M. Hubbard): Y a-t-il d'autres questions?
Monsieur Weir, merci d'être venu.
M. Weir: Je vous en prie.
Le président suppléant (M. Hubbard): Bonne continuation. J'espère que tout ira pour le mieux pour vous et tous les producteurs et expéditeurs.
M. Weir: Merci.
Le président suppléant (M. Hubbard): Vous vous adressiez à un agriculteur quand vous parliez du bon travail que font les agriculteurs. J'espère que vous en êtes conscient.
M. Weir: Je sais.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous accueillons maintenant des représentants du Transportation Communications International Union: M. Daniher, que j'ai déjà rencontré à Thunder Bay, et M. Prebinski, n'est-ce pas?
Mme Maureen Prebinski (directrice, Éducation, Transportation Communications International Union): Mme Prebinski.
Le président suppléant (M. Hubbard): Pardon; Mme Prebinski.
Vous étiez sans doute déjà dans la salle. Nous disposons d'environ une demi-heure pour vous entendre. Habituellement, le témoin fait un exposé de dix à quinze minutes, et nous lui posons ensuite des questions qui durent de dix à quinze minutes. Nous vous invitons d'abord, si vous le voulez bien, à présenter votre exposé, après quoi nous vous poserons des questions.
M. Herbert Daniher (vice-président directeur, Division des grains, Transportation Communications International Union): Nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui, et nous ne ferons qu'un bref exposé afin d'avoir plus de temps pour les questions et réponses.
Le Transportation Communications Union (le TCU) représente plus de 10 000 travailleurs de tout le Canada qui s'occupent du transport des marchandises, des gens et des informations. Les membres du TCU sont des employés des chemins de fer nationaux et provinciaux, des entreprises de camionnage, des traversiers et de l'industrie du grain du Canada. Près de la moitié d'entre eux sont dans le domaine du transport ferroviaire et des industries connexes, notamment la manutention du grain et le transport intermodal.
Nous abordons le projet de loi C-101 du point de vue tant des travailleurs de l'industrie que de l'intérêt public.
Nous exposons différents sujets de préoccupation et les présentons dans le paragraphe suivant. Vous pourrez vous y reporter à loisir.
Il est troublant de constater que depuis 1987 la politique canadienne des transports est établie en fonction des profits. L'article 3 de la Rail Act of 1980 des États-Unis énonce que cette loi a pour objet de prévoir la restauration, l'entretien et l'amélioration des installations et de la stabilité financière du réseau ferroviaire des États-Unis.
La déréglementation au Canada a pour but premier, au contraire, de garantir de bas tarifs aux expéditeurs au moyen de diverses mesures telles que l'accès à des services concurrentiels.
Une vision aussi étriquée empêche notre gouvernement d'élaborer une politique des transports véritablement intégrée au Canada. Alors que les États-Unis ont reconnu que la viabilité économique de leurs transporteurs était nécessaire pour favoriser la multiplication de réseaux de transport multimodal intégrant le train, le camion et le bateau, le Canada a abandonné cette responsabilité à la concurrence et aux forces du marché.
Il faut concevoir des modèles de planification régionale qui tiennent compte des divers modes de transport, des besoins différents en la matière et de l'environnement, et qui prennent en considération l'intérêt public. À bon droit, le gouvernement a la responsabilité d'établir une politique canadienne des transports vraiment intégrée qui ne soit pas à la merci des caprices des forces du marché.
En vertu du projet de loi C-101, le gouvernement abdique sa responsabilité envers le développement régional en abandonnant la réglementation aux expéditeurs. D'ailleurs, le projet de loi permettra à un expéditeur de désigner des parcours passant par les États-Unis s'il n'existe pas de parcours continu entièrement situé au Canada «qu'il puisse emprunter convenablement pour un prix concurrentiel». Autrement dit, pour expédier des marchandises d'un point à l'autre au Canada, il ne sera pas obligatoire d'emprunter un parcours entièrement au pays s'il existe une solution plus économique.
Il y aura certainement une hausse de la quantité de marchandises canadiennes acheminées via les États-Unis vers une destination au Canada. La suppression des subventions prévues dans la Loi sur le transport du grain de l'Ouest accélérera ce mouvement nord-sud. Pourtant on ne fait rien pour corriger les principaux problèmes qui minent la compétitivité de notre industrie ferroviaire par rapport à celle des États-Unis. Le projet de loi ne traite absolument pas des facteurs tels que les politiques fiscales, notamment le taux de la taxe sur le carburant diesel.
La déréglementation qui se poursuit dans les transports et les dispositions du projet de loi C-101 relatives aux réseaux ferroviaires canadiens compliqueront l'accès de la population aux voies de communication et nuiront à la sécurité des chemins de fer. Selon le document d'information produit par Transports Canada sur le projet de loi C-101, le ministère a comme principaux objectifs notamment de rationaliser et d'abréger le processus actuel de rationalisation des lignes ferroviaires.
La loi favoriserait la création de ce que le ministère appelle «une industrie vigoureuse de chemins de fer sur courtes distances». Le ministère croit que ces chemins de fer vont revitaliser le secteur ferroviaire et maintenir la desserte des petites localités. Il souligne leur succès supposé aux États-Unis et déclare que près des deux tiers des lignes qui seraient vraisemblablement rationalisées au Canada pourraient devenir des chemins de fer sur courtes distances viables.
Étant donné ces objectifs, le projet de loi C-101 supprime l'obligation de faire approuver la vente ou l'abandon de lignes par l'ONT. Dorénavant, une compagnie de chemin de fer devra produire un plan détaillé indiquant les lignes qu'elle entend continuer à exploiter et celles qu'elle désire vendre, louer ou abandonner au cours des trois années suivantes.
L'article 141 ne l'oblige pas à soumettre ce plan à l'Office des transports du Canada, à un ministère, à ses employés concernés, ni à aucune autre partie intéressée.
Dans les deux paragraphes suivants de notre mémoire, nous exposons un processus accéléré, mais je passe au point principal, qui est que les tiers ne pourront plus demander d'être entendus par l'ONT. Or, même si le régime de l'ONT créait parfois des difficultés, au moins il permettait aux tiers d'intervenir. En vertu de la nouvelle loi, le public n'aura plus aucun moyen de se prononcer sur la vente et l'abandon de lignes de chemin de fer.
Nous estimons important que toutes les personnes concernées aient l'occasion de faire valoir leur point de vue sur la vente et l'abandon de liaisons ferroviaires vitales pour leurs localités.
Transports Canada semble convaincu que les dispositions du projet de loi C-101 vont permettre de créer une industrie vigoureuse de chemins de fer sur courtes distances et de maintenir des services ferroviaires qui disparaîtraient autrement. Dans son document d'information sur le projet de loi, le ministère écrit que les chemins de fer sur courtes distances ont de bonnes chances de revitaliser le secteur et de maintenir la desserte de petites collectivités.
Pourtant, en 1993, la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux signalait que de nombreux obstacles entravaient la croissance d'une industrie des chemins de fer sur courtes distances au Canada.
Nous citons ici la commission, qui dit que, premièrement, il semble y avoir pénurie d'entrepreneurs canadiens prêts à racheter les lignes disponibles ainsi que de capitaux-risques pour les financer. Par ailleurs, de lourds investissements peuvent être requis pour remettre dans un état acceptable l'infrastructure.
Cela signifie que nos petits chemins de fer secondaires sont vulnérables et risquent d'être acquis par des entreprises américaines. Ne nous leurrons pas. Les chemins de fer sur courtes distances aux États-Unis ne sont pas des petites entreprises incapables de payer des salaires de premier ordre, des avantages sociaux et les autres protections prévues dans les conventions collectives. Les petits chemins de fer américains appartiennent à des multinationales dont les avoirs et les profits se comptent par millions de dollars. La plupart de leurs prises de contrôle sont financées entièrement par endettement. D'habitude, ils exploitent des lignes courtes avec un budget minime, font d'énormes profits et réinvestissent fort peu dans l'infrastructure des lignes et dans les localités avoisinantes.
Grâce à une faille des règlements de la Interstate Commerce Commission, ils arrivent à acheter une ligne secondaire comme si ce n'était pas un chemin de fer. Ils obtiennent ainsi d'être exemptés de l'application de la législation du travail qui garantirait aux travailleurs la protection, pendant une certaine période, de leurs conventions collectives en vigueur.
On peut se demander si le projet de loi C-101 ne prépare pas la voie pour ce genre de choses au Canada.
Les exploitants des lignes courtes n'arrivent à en tirer des profits qu'aux dépens de leurs employés, puisqu'il leur est pratiquement impossible de réaliser des économies ailleurs dans l'exploitation. Par exemple, ils ne peuvent pas profiter de prix plus bas pour les fournitures, les pièces et le matériel comme le font les gros transporteurs qui négocient des tarifs au volume ou qui réalisent des économies d'échelle.
Transports Canada croit aussi que les chemins de fer sur courtes distances améliorent le service aux expéditeurs et encouragent le développement de pratiques plus rentables et plus axées sur le service dans l'industrie. Il y a des tas d'exemples aux États-Unis, et certains au Canada, qui montrent qu'il y a un problème d'accès et que les normes ne sont pas respectées. Très fréquemment, on se retrouve avec moins de services, pas de services ou un accès limité aux services, et non pas avec une ligne commercialement plus viable.
Pour le personnel des chemins de fer, c'est un cercle vicieux. Si la compagnie n'a d'autres moyens que les concessions pour réaliser des profits, elle va finir par en demander de nouvelles.
Autre exemple que nous remarquons aux États-Unis, certains exploitants de lignes courtes sont en train de faire du lobbying auprès du Congrès afin d'être exemptés de l'obligation de contribuer au régime de retraite des cheminots. S'ils ont gain de cause, même les retraités se ressentiront de la précarité de l'emploi dans les chemins de fer sur courtes distances.
Je répète qu'il y aura des conséquences si ces chemins de fer s'implantent au Canada. Qu'arrive-t-il aux employés de ces lignes? Le cheminot moyen du CN et du CP a travaillé pendant presque toute sa vie adulte pour les chemins de fer. Les employés du Canadien National on en moyenne dix-sept années d'ancienneté. Dans les localités isolées du Nord de l'Ontario, certains employés ne font que des quarts de nuit malgré leur vingt à vingt-cinq années d'ancienneté parce que d'autres dans le district en ont plus qu'eux encore. Jusqu'à maintenant, ces travailleurs étaient protégés en vertu des dispositions sur la sécurité d'emploi. Qu'arrivera-t-il s'il n'y a plus de dispositions, plus de protection, garantissant que ces cheminots pourront être traités équitablement?
Comme nous le constatons en Ontario, il est question de modifier la Loi sur les relations de travail en ce qui concerne toute la question du maintien des droits syndicaux lorsqu'une entreprise est vendue. On a déjà les grandes lignes d'un projet de loi qui précisera le régime de réglementation pour les lignes courtes. En fait, M. Harris va essentiellement éliminer cette protection qu'avaient les travailleurs ontariens, et ce, probablement avant la fin de l'année.
Une certaine protection législative doit être conférée à la main-d'oeuvre actuelle, que ce soit en vertu du Code canadien du travail sous forme de droits syndicaux acquis ou en vertu de dispositions du projet de loi obligeant les nouveaux propriétaires à négocier avec les agents de négociation actuels des employés. En fait, nous avons deux exemples. Tout d'abord, ACR, où nous étions à la tête d'un groupe de syndicats - il y en a actuellement neuf. Wisconsin Central est venue acheter cette compagnie. Nous avons maintenant une convention collective dans cette entreprise. Nous avons dirigé les négociations, que nous avons pu finalement faire aboutir. Il y a donc des exemples de réussite en ce qui concerne les prises de contrôle de compagnies qui doivent être exploitées comme des compagnies de lignes courtes.
L'autre exemple que je donnerai - et c'est une histoire horrible - concerne une usine de provendes à Thunder Bay qui a été achetée par Archer-Daniels-Midland. Quand l'acheteur est arrivé, il a pratiquement abrogé la convention collective qui existait... et ce n'était certainement pas une convention collective très généreuse; il s'agissait d'un strict minimum. Bref, l'acheteur l'a tout simplement mise à la poubelle et éliminé tous les droits à l'ancienneté, la pension de retraite, les avantages sociaux. Si nous avons dans cette convention collective une procédure de règlement des griefs et d'arbitrage, c'est uniquement parce que c'est imposé par la loi. Si nous voulons donc que l'exemple d'Archer-Daniels-Midland s'impose au Canada et si c'est la façon dont nous voulons traiter nos cheminots, c'est facile: oublions toute protection. Toutefois, je ne souhaite à aucun cheminot canadien d'avoir à subir les conséquences d'une prise de contrôle comme celle d'ADM.
Déréglementation et sécurité. Il suffit de voir ce qui se passe dans l'industrie du camionnage depuis sa déréglementation pour craindre les problèmes de sécurité. En effet, le relâchement des normes de sécurité dans ce secteur est l'un des effets les plus tangibles de cette déréglementation. Ce sont maintenant les expéditeurs qui mènent dans le transport routier; ils ont imposé leurs prix, ce qui a fait baisser les salaires et le revenu des camionneurs et augmenté le nombre d'heures de route autorisées par jour. Cette prolongation de la journée des routiers a accentué la fatigue des conducteurs, qui peut être dangereuse dans le transport longue distance.
Vous êtes probablement pour la plupart au courant des inspections qui ont été menées cet été en Ontario et qui ont amené à envoyer au garage 50 p. 100 des camions qui circulent sur les autoroutes parce qu'ils ne satisfaisaient pas aux règlements du ministère des Transports concernant la sécurité.
Dans l'industrie des chemins de fer, les compressions gouvernementales et l'autoréglementation de l'industrie auront une incidence directe sur la capacité de Transports Canada de protéger la sécurité du public. Nous craignons que les exploitants de lignes courtes ne tentent de se faire exempter de l'application des règlements sur la sécurité pris en vertu de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Nous partageons aussi les inquiétudes exprimées par le Congrès du travail du Canada dans le mémoire qu'il a présenté sur la Loi sur la sécurité ferroviaire au Canada en octobre 1994, à savoir que le processus actuel de réglementation ne sert pas l'intérêt public, puisqu'il autorise l'industrie à élaborer elle-même les règlements et à appliquer les normes de sécurité.
La Loi sur le transport du grain de l'Ouest. La suppression des subventions prévues dans la LTGO aura pour effet de dérèglementer la production et le transport du grain au Canada. Le mouvement du grain vers les ports sera déterminé par le marché et non plus par l'obligation législative de faire passer le grain par des ports canadiens si l'on veut toucher une subvention.
Ce que nous craignons, c'est une hausse de la quantité de marchandises canadiennes qui sera acheminée via les États-Unis vers une destination au Canada ou à l'étranger. La suppression des subventions prévues dans la LTGO accélérera ce mouvement nord/sud. Une étude effectuée par la Northern Ontario Transportation Coalition a mené à la mise en garde suivante: quand les agriculteurs commenceront à payer le plein prix pour le transport de leur gain vers un point d'exportation, les chalands subventionnés du Mississippi pourraient attirer les exportations canadiennes de grain actuellement transportées par les réseaux ferroviaires et portuaires de l'Est du Canada.
Le transport entièrement par rail jusqu'à la côte américaine du golfe du Mexique serait aussi possible, puisque, à cause de la concurrence des chalands, les tarifs restent bas. La zone d'attraction du golfe du Mexique sur le grain exporté pourrait s'étendre vers l'ouest jusqu'à Moose Jaw.
Je ne vais pas essayer de préciser si en fait le réseau du Mississippi est ou non subventionné par l'État. Nous savons tous qu'il l'est. Essentiellement, nous ne bénéficierons pas de la même position concurrentielle que les États-Unis.
Si la valeur du dollar canadien augmente, la disparition des subventions aura un effet pire encore que ressentiront non seulement les transporteurs, mais aussi le port de Thunder Bay et la voie maritime du Saint-Laurent, sans parler de tous ses employés.
Dans un rapport de travail produit pour la Commission d'examen de la LTN en 1992, l'Office national des transports déclarait que le grain, plus que toute autre denrée, influait sur la rentabilité des chemins de fer. Dans le cas de la LTGO, nous sommes passés d'un système dans lequel on mettait l'accent sur l'optimisation des recettes du producteur à quelque chose qui va optimiser les recettes des chemins de fer. J'aimerais savoir quand on va commencer à envisager un système qui profitera à toute la population canadienne en favorisant un développement économique durable tout en conservant les dizaines de milliers d'emplois en cause.
Les deux pages suivantes de notre mémoire portent sur un article qui essentiellement a été clarifié depuis. Le ministre Young a indiqué, contrairement à ce que nous disons dans notre mémoire, que les subventions ne seraient pas supprimées aux compagnies de chemins de fer. Il reste néanmoins que le projet de loi C-101 ne prévoit pas de possibilité d'intervention de la part de tiers. Donc, même si les subventions n'ont pas été réduites, si quelqu'un décide de fermer des lignes de chemin de fer desservant certaines régions, il n'y a pas moyen de s'y opposer.
En terminant, au nom des membres du Transportation Communications Union, nous réitérons ce qui nous préoccupe dans le projet de loi C-101. Celui-ci n'établit pas une politique intégrée des transports qui répondra aux besoins des Canadiens à l'aube du XXIe siècle. Tandis que les États-Unis ont adopté une politique tablant sur la stabilité financière et sur la restauration du réseau ferroviaire, le gouvernement du Canada parle d'un réseau adéquat de services de transport le plus économiques possible.
Nous partageons le point de vue de la Northern Ontario Transportation Coalition, qui a recommandé que la Loi sur les transports nationaux soit modifiée de sorte que la viabilité économique durable des transporteurs basés au Canada constitue l'un de ses objectifs exprès. Nous partageons ce point de vue et soutenons de plus que le projet de loi C-101 devrait étendre cet objectif à toutes les industries tributaires du réseau de transport canadien englobant le train, l'avion, le camion et le bateau.
Le président suppléant (M. Hubbard): Merci, monsieur Daniher.
Monsieur McKinnon.
M. McKinnon: Merci de votre exposé.
J'ai noté une ou deux choses. Je ne vous cite pas mot, à mot mais je crois que vous avez dit que toute mesure d'économie ou changement ou amélioration se faisait sur le dos des employés - ou semblait se faire sur le dos des employés. Je me demande si ce n'est pas un peu exagéré, ou si du moins vous ne simplifiez pas un peu trop les choses.
M. Daniher: C'est presque un sujet ou une catégorie de préoccupation à part. Nous sommes un syndicat international et nous aurions beaucoup d'exemples à vous citer. Nous avons représenté littéralement des milliers d'employés de ces chemins de fer. Il y avait une échappatoire dans la loi qui permettait d'acheter ces lignes sans se préoccuper aucunement des conventions collectives en vigueur. En fait, ce que nous constatons - et il y a beaucoup d'exemples - c'est qu'ils prennent le contrôle de la société, opèrent des compressions de personnel, suppriment tout ceux qu'ils peuvent et finalement abandonnent la chose au prochain exploitant.
M. McKinnon: Je serais de façon générale d'accord avec vous, mais il y a d'autres éléments en cause. Il peut y avoir des changements dans la réglementation qui leur permettent aussi de réduire certains de leurs coûts: des inspections qui ont prouvé qu'après un certain temps ils continuent à respecter les codes de sécurité, etc.
Je veux simplement dire qu'il doit y avoir d'autres...
M. Daniher: Je dirais que notre rapport porte essentiellement sur ce qui va arriver à l'employé qui travaille actuellement pour ces chemins de fer.
Deuxièmement, même dans ce règlement - je viens d'examiner ce que fait l'Ontario - quand on passe à un réseau de lignes courtes, on n'échappe pas à la réglementation... Il faut toujours essentiellement satisfaire aux normes de sécurité, et c'est important. Les lignes courtes qui existent au Canada aujourd'hui doivent maintenir leur infrastructure. C'est une des choses que nous avons signalées dans notre mémoire à propos des investisseurs canadiens, qui devraient avoir les moyens d'investir dans l'infrastructure afin de respecter ces normes.
Je ne peux pas dire avec certitude si c'était par ailleurs inspiré par l'appât du gain parce qu'il y avait des règlements, mais nous savons que nos membres, les travailleurs que nous représentons, ont beaucoup souffert. Nous ne voudrions pas que cela se répète au Canada, et c'est ce que nous disons dans notre mémoire.
M. Gouk: Vous dites que l'abrogation de la LTGO va accroître le risque que certains mouvements de céréales se déplacent vers le sud. Je suppose que vous êtes au courant des dispositions sur le retour à charge concernant Thunder Bay, selon lesquelles les céréales étaient transportées jusqu'à Thunder Bay, la subvention était versée, et le train repartait avec les céréales vers le sud.
M. Daniher: Oui, nous étions au courant. En fait, le groupe de travail mid-Canada que je préside actuellement, et dont j'étais membre à l'époque, a beaucoup fait pression sur le gouvernement à ce sujet, parce que nous estimions que ce n'était pas rentable. D'autre part, cela bloquait les wagons de chemin de fer inutilement. Actuellement, il n'y a pas de pénurie de wagons, mais ces deux dernières années cela avait des conséquences pour la productivité du port parce qu'il n'y avait pas suffisamment de wagons, ceux-ci étant retenus à cause de cette obligation de retour à charge. Donc, non seulement nous étions au courant, mais nous avons également pris des mesures très sérieuses pour le faire éliminer. Je pense qu'on a essayé d'éliminer cela même avant d'éliminer la LTGO.
M. Gouk: Bien. Je vous félicite, parce que c'était une disposition stupide, et je suis heureux que cela ait disparu même avant.
J'aimerais revenir sur le point principal, sur les lignes courtes et le risque de perdre les droits syndicaux, ou droits du successeur. Je dois vous dire que je n'appuie pas l'idée d'avoir des droits syndicaux pour les lignes courtes, car s'il y a de tels droits, il y a les règles du métier - je ne sais pas si c'est l'expression juste - qui font que dans le cas d'une grosse entreprise, comme le CN ou le CP, il y a suffisamment de monde pour assumer une fonction précise parce que cette fonction nécessite autant de monde. S'il s'agit d'un chemin de fer de 30 milles de long, il n'est plus du tout rentable d'avoir des gens dans toutes ces catégories. Donc, indépendamment des changements nécessaires dans l'échelle des salaires, il est nécessaire d'apporter des changements à ces règles du métier afin que l'on puisse demander à quelqu'un d'assumer d'autres fonctions que celles de son poste précis parce qu'il n'y aurait pas autrement de quoi l'occuper.
S'il y a quatre différentes descriptions d'emploi, ou métiers, mais qu'il n'y a que du travail pour deux personnes, comment peut-on régler cette situation s'il n'est pas possible de renégocier les contrats ou de rédiger un nouveau contrat en conséquence?
M. Daniher: C'est une question à deux volets.
D'abord, il faut une certaine maturité dans les négociations pour comprendre que quelqu'un ne signera pas d'accord prévoyant des droits du successeur s'il croit qu'il sera bombardé de dispositions dont le résultat serait une surproduction syndicale ou une situation où il n'y aurait que du travail pour deux personnes, mais où il faudrait quatre personnes pour le faire. Ce ne serait tout simplement pas viable au plan économique. En effet, si vous voulez conserver des emplois dans ces domaines, il va falloir reconnaître ce fait et travailler avec l'acheteur. Je crois que cela peut se faire par règlement négocié.
ACR, qui a dû régler ce genre de questions, est un bon exemple. La concurrence est forte. Il faut faire face à la réalité et voir comment on peut servir ses clients tout en étant concurrentiels. Nous voyons que les grandes compagnies de chemins de fer veulent abandonner une grande partie du réseau ferroviaire parce qu'elles peuvent faire des profits plus élevés en n'exploitant que des lignes principales au pays. Je crois que si vous essayiez d'analyser cette situation en détail, on vous dirait que... On dit toujours qu'il y a beaucoup d'inefficacité parce qu'on est coincé si on achète quelque chose prévoyant des droits du successeur qui régissent certaines dispositions du contrat. Ce n'est pas nécessairement le cas.
À mon avis, il n'y a rien ou presque rien auquel on peut faire appel. C'est toujours un prétexte ou un outil politique, mais en réalité, l'expérience démontre...
Je crois que les Travailleurs unis des transports ont dû faire face à cette situation dans le cas de certaines lignes au Québec, où la compagnie voulait les privatiser. Ils ont trouvé un moyen d'appliquer des règles de travail que certaines personnes considéraient comme étant archaïques ou inefficaces, et ils sont parvenus à des ententes.
Je sais que notre entente avec ACR est semblable. Dans l'industrie céréalière, où je me trouve, nous travaillons dans un environnement qui change tous les jours. Même avec un processus de négociation qui a mûri nous apportons des changements à nos rapports qui visent à satisfaire les besoins des clients et à nous rendre plus efficaces pour que nous puissions assurer notre avenir.
M. Gouk: Je ne suis pas préoccupé par les employés et l'employeur. Cela se passe entre eux. Le problème, c'est l'abandon, ou l'abandon possible, qui affectera toutes les communautés et tout ce qui les touche.
Dans ma propre circonscription en Colombie-Britannique, qui est l'une des trois provinces qui ont des droits du successeur à l'heure actuelle - et qui, d'après moi, sera probablement la deuxième province à les perdre sous peu - il y a eu deux abandons, un dans ma circonscription et l'autre en partie dans ma circonscription. Dans les deux cas, des cheminots compétents et expérimentés voulaient acheter la ligne, et dans les deux cas ils ne l'ont pas fait en partie à cause des dispositions régissant les droits du successeur.
D'autres dispositions sont problématiques, et vous les avez abordées ici. Mais il y a d'autres facteurs, tels que les politiques fiscales, les taxes sur les carburants, les taxes foncières, etc. Quant aux droits du successeur, dans les deux cas, on m'a dit clairement que ces droits étaient un obstacle lors des négociations.
Les chemins de fer sur courtes distances intérieurs sont une solution de rechange. En toute honnêteté, lorsque j'en ai entendu parler, j'ai cru que les syndicats seraient contre cette idée. J'ai été surpris de voir qu'ils y avaient consenti volontiers. Il ne s'agit pas d'un consentement sans réserve, mais d'un consentement tout de même.
Ce qui me préoccupe, ce sont les compagnies de chemins de fer qui prévoient abandonner une ligne, et qui disent que si personne ne l'achète elles vont l'enlever. Je veux voir cette ligne en exploitation. C'est le résultat que je veux voir. Si les acheteurs potentiels disent qu'ils ne peuvent pas ou ne vont pas acheter la ligne - et franchement, d'un point de vue communautaire, la raison importe peu, à cause des droits du successeur et du contrat inhérent - il faut chercher une solution de rechange.
La semaine passée, nous avons reçu des représentants de différents syndicats. Je leur ai demandé leur opinion sur un amendement - dont j'ignore le libellé pour le moment - qui permettrait à la société de chemin de fer de mettre la ligne en vente avant de l'abandonner. Elle serait obligée de faire une offre publique de vente et de faire affaire avec tous ceux qui feraient une offre. S'il n'y avait pas d'offres selon elle acceptables, ce serait le gouvernement fédéral, provincial ou régional qui en deviendrait responsable, selon le cas.
Que pensez-vous d'une disposition qui obligerait les sociétés de chemin de fer à consulter les syndicats avant la vente pour savoir si oui ou non ils veulent participer à l'achat d'un chemin de fer d'intérêt local, ou à mettre en place un processus de négociation semblable à celui qui existe dans le cas d'une offre d'achat visant la création d'un CFIL? Est-ce une solution possible à votre avis?
M. Daniher: Voulez-vous dire que ce sont les syndicats qui achètent la ligne? Ou s'agit-il plutôt de négocier...
M. Gouk: Non, je parle de la procédure qui a été suivie par le passé.
Disons qu'il s'agit d'une ligne qui est toujours la propriété du Canadien National et qui est exploitée par ses employés. Ce sont toujours des employés du CN. Plutôt que de vendre la ligne, on rédige un nouveau contrat - et il en existe déjà - qui porte sur la ligne en question. Les employés travaillent uniquement pour le CFIL. Donc le contrat est modifié, mais cela évite la perte de la ligne et la perte des emplois des employés syndiqués.
M. Daniher: Absolument. Cette façon de procéder indique clairement que tous doivent s'intéresser à la question, même si certains employés ne travaillent pas pour le CFIL; quant à la ligne, ce sera une ligne d'apport. Si une ligne est abandonnée et que toutes les marchandises sont transportées par camion, la ligne d'apport sera perdue. À long terme, il y aura une incidence sur les emplois de toute façon, et la personne qui a toujours travaillé dans la même collectivité en subira certainement les conséquences. Cette personne n'aura pas la possibilité de...
Certains de nos employés ont dû déménager à l'autre bout du pays afin de sauvegarder leur sécurité d'emploi. S'ils pouvaient rester dans la même collectivité, près de leurs familles, etc...
M. Gouk: Vous estimez donc que pour atténuer ces préoccupations on pourrait créer un CFIL avec la participation des syndicats avant qu'on cesse d'exploiter la ligne.
M. Daniher: Une telle approche serait un élément du processus, mais elle est certainement loin d'offrir une protection convenable par rapport aux dispositions actuelles. En vertu des droits du successeur, il y a une position de négociation qui est prévue. Comme je l'ai dit, si nous nous lançons...
M. Gouk: Je crois savoir que depuis l'instauration des droits du successeur, il n'y a pas eu d'achat de CFIL en Ontario. Certains ont pensé acheter, mais ont fini par se retirer, essentiellement - d'après ce qu'ils ont dit - à cause des droits du successeur.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous allons devoir avancer. En fait, je pense vous avoir accordé un peu trop de temps. Excusez-moi.
Avez-vous des questions à poser, monsieur Nault?
M. Nault: Non.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous tenons à remercier de nouveau nos témoins de leurs exposés.
Il va falloir examiner le point soulevé par M. Gouk. Nous avons posé ce genre de questions aux représentants des sociétés de chemins de fer lors de leur comparution. Je sais que l'on ne s'est pas toujours beaucoup préoccupé des droits des employés lors de l'abandon de certaines lignes de chemin de fer. Nous allons certainement tenir compte de cette question. Nous vous remercions d'être venus nous parler de cette question entre autres.
M. Daniher: Merci.
Le président suppléant (M. Hubbard): Nous nous réunissons demain, à 15h30, dans la salle 209 de l'Édifice de l'ouest. La séance est levée.