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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 30 novembre 1995

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[Traduction]

La présidente: Je déclare la réunion ouverte.

Nous avons ce matin un groupe intéressant de témoins. C'est en quelque sorte une table ronde d'universitaires. Je vais les laisser se présenter eux-mêmes.

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M. J.R. Mallory (présentation individuelle): Il y a une règle qui dit que l'âge passe avant la beauté. Autant qu'elle s'applique à moi.

Je suis depuis un certain temps déjà, comme vous pouvez le voir d'après mon âge, professeur émérite de sciences politiques à l'Université McGill. J'en connais beaucoup moins long sur le sujet que mes deux collègues ici présents aujourd'hui, mais nous ferons de notre mieux ensemble pour répondre à vos questions.

Du point de vue historique, le vote des crédits est une question qui est à l'origine de l'ordre constitutionnel parlementaire. La légitimité du gouvernement dépend de l'appui de l'assemblée législative puisque celle-ci lui fournit les fonds dont il a besoin pour faire face à ses dépenses. Sans argent, un gouvernement ne peut pas fonctionner. C'est ainsi que les parlements et, en fin de compte, la population en sont venus à exercer un ascendant sur la Couronne.

Néanmoins, notre système politique et parlementaire ayant évolué et n'étant plus ce qu'il était à une époque lointaine, l'ouverture de crédits a fini par prendre l'allure de ce que Walter Bagehot a appelé l'aspect élevé de la Constitution et par jouer un rôle presque aussi purement symbolique que la sanction royale. Serait-il possible de faire en sorte que l'octroi de crédits ait une plus grande signification et de redonner aux députés un plus grand rôle à jouer afin qu'ils puissent tenir le gouvernement responsable, voire influer sur les décisions financières qui touchent au coeur même de la politique?

À cet égard, il semble utile d'évoquer le rapport de 1979 de la Commission royale sur la gestion financière et l'imputabilité, plus communément appelé le rapport Lambert. Même si son mandat portait surtout sur la gestion financière interne et la reddition de comptes dans la fonction publique, la Commission a aussi examiné les moyens de renforcer le contrôle exercé par le Parlement sur le processus. Elle dit, à la page 438 de son rapport:

Voici la conclusion à laquelle elle en est arrivée, et ce à la page 441:

La situation s'est-elle améliorée depuis? La présentation des budgets de dépenses a été améliorée, c'est du moins ce qu'on nous dit. Ils sont plus intelligibles du point de vue comptable, mais ils ne traduisent pas encore grand-chose du point de vue politique ou comme documents utiles à une surveillance législative de l'administration.

Des progrès marginaux ont été réalisés, mais le but que constitue une surveillance efficace est demeuré lointain et difficile à atteindre. L'idée d'un comité qui aurait la possibilité deux fois au cours d'une année, soit au printemps comme à l'habitude et à l'automne, d'examiner le rendement par rapport aux plans mérite qu'on s'y arrête.

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Il ne faut pas oublier que le Conseil du Trésor se considère comme l'organisme à qui il revient de concilier les objectifs de la politique des ministères avec les ressources disponibles dans le cadre de tout le processus budgétaire. À ses yeux, l'examen parlementaire, qui dans certains cas pourrait exiger des changements d'orientation, est susceptible de déséquilibrer la structure rationnelle qu'il a mise en place.

Par conséquent, les gouvernements offriront de la résistance à un abandon de la prise de décision rationnelle par le Cabinet appuyé par la bureaucratie. Donc, que peuvent faire les parlementaires pour devenir un élément plus utile du processus?

Si leur effectif est stable, les comités en viennent avec le temps à faire preuve d'une certaine dynamique de groupe qui s'explique par le fait que leurs membres travaillent et voyagent peut-être même ensemble, d'où une compréhension commune de la matière traitée, de sorte que la discipline de parti s'estompe un peu au profit de l'expérience collective des membres du comité. Cela a ses limites.

Les députés demeurent essentiellement loyaux envers leur parti et peuvent faire l'objet de mesures disciplinaires de la part des whips. La loyauté envers un comité peut revêtir plus d'importance que la conduite à laquelle on s'attend à la Chambre, mais notre constitution fournit au gouvernement de nombreuses armes pour se prémunir contre une situation comparable aux événements récents à Washington.

La meilleure arme dont les députés peuvent se doter consiste en une expérience et en une connaissance des secteurs de dépenses qu'ils ont à examiner. Il faut bien se rendre compte que la Chambre actuelle ne ressemble pas à la plupart de celles qui l'ont précédée en ce sens que bon nombre d'entre vous ne savent pas encore très bien comment le système fonctionne et en quoi leur rôle consiste.

La tâche est plus exigeante que d'habitude, quoique comme M. Franks l'a signalé il y a longtemps, l'impotence relative de la Chambre canadienne, par comparaison à d'autres assemblées législatives, s'explique en partie par un roulement relativement élevé des députés. Ainsi, le défi qui consiste à savoir comment être efficace se pose pour chaque nouveau Parlement, mais plus particulièrement pour celui-ci.

Le système pourrait certes être amélioré en ce qui concerne le processus budgétaire, mais si les députés avaient les connaissances et l'expérience voulues, même le système actuel fonctionnerait mieux et ces derniers se sentiraient moins frustrés et plus utiles. Il est important de se rappeler quel est l'objet de l'affectation des crédits dans le contexte moderne.

Le Règlement actuel fait qu'il est quasiment impossible de mettre en jeu la confiance dans le gouvernement pour une question de subsides. Notre constitution rend impossible un système à l'américaine qui confère aux comités législatifs une place prépondérante dans le processus budgétaire.

Quel rôle jouer? Il y aurait moyen de favoriser une plus grande responsabilisation et une meilleure évaluation du rendement. Au moment de l'examen automnal, les comités pourraient essayer de mesurer le rendement des plans ministériels, d'où une étude plus approfondie des programmes couronnés de succès. Si le gouvernement tenait compte des rapports des comités, il devrait s'ensuivre des changements d'orientation, mais tout dépend de l'incidence des rapports des comités sur les médias et, en dernière analyse, sur l'opinion publique, à laquelle les gouvernements doivent être sensibles.

Bref, l'examen des crédits ne consiste pas pour un comité permanent à avoir un rôle à jouer dans la façon dont les ressources sont gérées au cours d'un exercice en particulier. Lorsqu'ils ont maîtrisé la matière à traiter, après enquête et évaluation des programmes, les comités permanents peuvent invoquer des arguments utiles et persuasifs quant aux modifications à apporter aux politiques et dont ni les ministres ni leurs hauts fonctionnaires ne seraient saisis autrement.

À mon avis, c'est sur quoi l'étude des crédits par les comités doit être axée « sur l'obligation de rendre compte et la gestion, pas sur les grands objectifs des politiques, car la question est de savoir non pas comment les ressources sont réparties, mais bien comment elles sont gérées et si les objectifs ont été atteints.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci.

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M. C.E.S. Franks (professeur, Département des sciences politiques, Université Queen's): Je suis professeur au Département de sciences politiques à l'Université Queen's.

J'ai été pendant des années un humble élève de M. Mallory pour ce qui est de divers aspects du gouvernement parlementaire, et je ne reprendrai donc pas ici ce qu'il vient de dire. Je m'excuse de ne pas avoir mis mes observations par écrit, mais les circonstances m'en ont empêché.

Je vais vous présenter une série de points. Ils vont vous paraître un peu décousus, parce qu'ils se rapportent à diverses préoccupations. Je ne suis pas prêt à dire qu'il y a des thèmes sous-jacents que je peux vous donner pour relier parfaitement toutes ces idées entre elles.

Le premier point, c'est que le budget des dépenses ne représente qu'une petite partie d'un processus très vaste qui a un aspect interne, qui concerne le gouvernement, et un aspect externe, qui concerne le Parlement. Ce processus regroupe les très vastes mécanismes financiers qui constituent historiquement les moyens par lesquels le Parlement a acquis et exercé un contrôle sur le gouvernement.

Les étapes du processus au cours d'un exercice sont très semblables aux étapes qui ont marqué son évolution.

La première étape est celle de l'affectation de crédits par le Parlement. C'est là que s'inscrit le budget des dépenses.

La deuxième étape est celle de l'utilisation des crédits. Elle correspond aux débours des fonds, à ce qu'on en fait, ce qui est exclusivement une fonction exécutive.

La troisième étape du processus, dont on n'a vraiment commencé à parler au Parlement que vers le milieu du XIXe siècle, est celle de la vérification. C'est à cette étape que le vérificateur général et les comités des comptes publics, inventés essentiellement par Gladstone au milieu du XIXe siècle, ont un rôle à jouer.

Il s'agit en quelque sorte d'un cercle de contrôle. Au départ, il y a les lois de crédits, les lois du Parlement, qui dictent la somme que le gouvernement peut avoir, pas plus. Elles précisent à quoi peut servir l'argent et comment il peut être dépensé.

Tout se termine par une vérification à l'intérieur du cadre de contrôle. Premièrement, il y a la responsabilisation, ce qui veut dire qu'il faut rendre compte de tous les crédits. Deuxièmement, il y a la légalité, ce qui veut dire que ces crédits doivent être dépensés selon les lois et les règlements. Troisièmement, il y a la vérification, du bien-fondé pour reprendre une vieille expression, qui s'apparente davantage de nos jours à une vérification d'optimisation des ressources.

J'insiste là-dessus, car ce qui se produit aux étapes préliminaires a une incidence sur ce qui arrive ensuite. Il y a un lien entre toutes ces étapes qui ne peuvent pas être dissociées les unes des autres. Gladstone parlait du cercle du contrôle. Je trouve que c'est une très bonne description.

Même si, de nos jours, le gouvernement a la quasi-certitude que le Parlement approuvera toutes ses propositions de dépenses, cela ne veut pas dire que le processus est inutile car, comme je l'ai indiqué, à chaque étape, il y a des contrôles juridiques et des contrôles parlementaires, sans oublier le processus de vérification, auquel le gouvernement est soumis. Par conséquent, ce qui est dit et fait à l'étape préliminaire du processus budgétaire est très important.

Permettez-moi ici de faire quelques observations supplémentaires sur la Loi de crédits et le budget des dépenses. Il me semble que leur fonction première est une fonction de contrôle, ce qui veut dire qu'ils définissent les limites de ce que le gouvernement peut faire. Leur deuxième fonction consiste à expliquer et à interpréter ce que le gouvernement fait pour d'autres, mais je considère cela comme secondaire.

J'aimerais également ajouter qu'il est très souvent arrivé au gouvernement du Canada et au Parlement du Canada, au fil des ans, d'adopter des lois de crédits. Il y a eu des programmes auxquels des millions, voire des centaines de millions de dollars, ont été consacrés sur la seule foi de l'autorisation légale conférée par une disposition de la Loi de crédits.

J'ai toujours considéré que ce n'est pas une bonne chose, et je continue à le penser. Je ne sais pas combien il y a actuellement de dispositions en ce sens, mais permettez-moi de vous dire que cela se fait. Dans le passé, d'importantes sommes d'argent ont ainsi été dépensées.

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Le troisième point que je veux aborder brièvement ici est celui du vote de confiance et des crédits. À mon avis, les motions concernant les crédits ordinaires sont en réalité des motions de confiance. Le budget global du gouvernement est en quelque sorte un document de politique, et un rejet de ses vues quant aux modifications à y apporter constitue un vote de défiance, que cela soit dit officiellement ou non.

Par contre, je ne vois pas pourquoi le Parlement ne pourrait pas réduire des dépenses particulières prévues au budget sans que la confiance soit remise en question. Je pense que l'on ne devrait parler de vote de défiance que dans les cas où la réduction est tellement importante qu'elle équivaut à une critique du gouvernement, dans les cas où la motion portant réduction des dépenses contient le mot «confiance» ou bien dans les cas où le gouvernement aurait dit à l'avance qu'il s'agit d'une motion de confiance et qu'elle sera interprétée comme telle. Autrement, je pense que le Parlement a toujours eu le droit et devrait avoir le droit de réduire les dépenses sans que cela soit considéré comme une remise en question de la confiance.

Je n'englobe pas l'augmentation des dépenses dans ce que je viens de dire, ni bien sûr la nécessité d'obtenir la recommandation royale, qui est un moyen dont dispose de toute façon la Couronne pour empêcher le Parlement d'augmenter les dépenses.

Permettez-moi d'aborder une autre question: les dépenses législatives. À l'heure actuelle, elles représentent un pourcentage très élevé des dépenses du gouvernement du Canada, ce qui veut dire que durant n'importe quel exercice, le Parlement n'a pas à se prononcer par un vote sur le budget des dépenses et n'exerce aucun contrôle direct. Il n'a un contrôle direct que sur les lois influant sur la taille des dépenses législatives.

Je ne vois pas pourquoi, dans le cycle de préparation des budgets des dépenses, le Parlement et ses comités ne pourraient pas examiner ces lois plus régulièrement qu'à l'heure actuelle. Je reviendrai à cette question dans une minute sous un angle légèrement différent.

Il y a un cinquième point que je tiens à soulever, parce que c'est une question qui m'a toujours préoccupé, à savoir si le Parlement devrait voter des sommes nettes ou brutes. À mon avis, la plupart du temps, les crédits votés par le Parlement devraient correspondre à une somme brute, pas à une somme nette. Il ne devrait s'agir d'une somme nette que dans le cas d'une dépense d'entreprise par exemple, d'un programme lié à des fonds renouvelables, auquel cas la somme totale n'aurait pas tellement d'importance au regard du crédit parlementaire parce qu'elle n'affecterait pas vraiment le Fonds consolidé du revenu et le Trésor public.

Mais, pour la plupart des budgets des dépenses, je crois fermement qu'il devrait s'agir d'une somme brute. Cela nous ramène encore une fois à la création du Fonds consolidé du revenu par Edmund Burke et aux réformes économiques connexes du XVIIIe siècle.

Je vais laisser cela de côté pour l'instant et vous parler du système des comités. Ceux d'entre vous qui sont au courant de ce que j'ai écrit récemment savent que mes commentaires seront pour la plupart négatifs et pessimistes et qu'à mon avis, les comités parlementaires ne sont capables que de ce dont leurs membres sont capables.

Pour être efficaces à l'intérieur d'un système législatif, les comités ont besoin de deux choses. Ils ont besoin dans un premier temps de membres expérimentés qui soient là pour longtemps et, dans un deuxième temps, d'une vue d'ensemble, pas à court terme, mais bien à long terme, qui porte sur de nombreuses années.

Au Canada, trois restrictions frappent les comités parlementaires. Je ne prétends pas les énumérer dans l'ordre, mais permettez-moi de vous les signaler. Elles ne sont pas non plus clairement délimitées, et je m'en excuse.

Figure en premier lieu parmi les restrictions imposées à ce que les comités peuvent faire le contrôle du gouvernement. En général, les comités parlementaires sont plus étroitement contrôlés par le gouvernement au Canada que dans n'importe laquelle des autres assemblées législatives que j'ai étudiées, y compris celles d'autres pays du Commonwealth et, évidemment, des États-Unis.

La deuxième restriction, c'est que l'opposition se comporte davantage comme une opposition et moins comme un Parlement au Canada que dans n'importe quel autre pays que j'ai examiné. C'est là, bien sûr, l'autre aspect du contrôle exercé par le gouvernement. Je n'essaierai pas de vous dire ce qui vient en premier et ce qui vient en deuxième. C'est une interaction qui existe depuis tellement longtemps que nous supposons que les comités parlementaires seront dominés par le gouvernement et que, la plupart du temps, l'opposition va faire figure d'opposition.

Nous ne supposons jamais que les membres d'un comité vont se faire collectivement le porte-parole du Parlement contre le gouvernement. Les occasions qu'ils ont de le faire et les fois où ils l'ont fait sont relativement peu nombreuses.

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Le troisième facteur, pour ce qui est des restrictions avec lesquelles les comités doivent composer « et je répète ce que j'ai dit ici bien des fois « c'est le fait à mon avis que nous avons trop d'amateurs à court terme. Je veux parler de politiciens amateurs. Je ne critique en rien la qualité des députés. Je pense que la majorité de nos représentants à Ottawa et au Parlement du Canada sont des gens remarquables.

Le problème, c'est que le travail d'un parlementaire, comme celui de n'importe qui d'autre, nécessite une formation et une expérience plutôt solides et, pour être influent ou influente, un député ou une députée doit avoir: premièrement, les antécédents qu'il faut; deuxièmement, les contacts qui lui permettent de fonctionner à l'intérieur d'un système très complexe; et, troisièmement, l'assurance qu'il ou elle sera là après les prochaines élections pour reprendre le collier et rembourser sa dette ou se venger le cas échéant. Ce n'est peut-être pas une façon très gentille de dire les choses, mais ce que je veux dire, c'est que je trouve cela nécessaire pour «

La présidente: Je vois ce que vous voulez dire.

M. Franks: « pour avoir un pouvoir effectif et influer sur les événements avec le temps.

Au Canada, le taux de roulement moyen au moment d'une élection se situe entre 40 et 60 p. 100. Il a été de 70 p. 100 lors des dernières élections. Cela veut dire qu'on ne peut pas compter sur le genre de député « ou sur le genre de comité parlementaire » qui en arrivera avec le temps à avoir une vue d'ensemble des choses, qui assurera une certaine continuité, qui disposera d'un horizon temporel suffisamment long pour faire ce qu'il y a à faire.

Je n'entrerai pas dans les détails ici, mais le contraste entre le comité britannique des comptes publics et son homologue canadien est terriblement frappant. Ce sont deux comités tout à fait différents. Cela ne veut pas dire que le comité canadien des comptes publics n'est pas efficace de temps à autre. Il n'a tout simplement pas pu apporter les changements nécessaires au système ou lui imposer la même orientation à long terme que le système britannique.

J'en suis venu à la conclusion que, peu importe les changements apportés à la structure des comités, ceux-ci ne fonctionneront pas de façon vraiment différente, et ils ne feront pas non plus dans l'ensemble beaucoup plus que ce qu'ils font actuellement. Ils pourraient accomplir de petites choses « un comité peut de temps à autre être extrêmement efficace » mais vous ne pouvez pas être assurés de l'existence de comités efficaces à long terme étant donné les contraintes que je viens de décrire.

Quant aux budgets des dépenses et aux horizons temporels, je me suis souvent demandé si un horizon prévisionnel d'un an suffisait. Dans le système suédois, le tiers des ministères du gouvernement se présentent devant la Riksdag chaque année pour faire approuver un budget triennal comportant un horizon de trois ans.

Je me suis souvent dit qu'un système de ce genre inciterait les gens à voir plus loin, à s'interroger sur les répercussions à long terme des programmes pour qu'il soit possible d'exercer un meilleur contrôle sur les véritables problèmes et apporter les changements qui s'imposeront dans un certain nombre d'années peut-être, habituellement pas l'année suivante, mais dans un avenir plus lointain.

Mon huitième point concerne les journées réservées à l'étude des subsides. À mon avis, elles ne servent à rien. Elles ne permettent pas d'accomplir ce qui était censé être. Nous pourrions en discuter plus longuement si vous le voulez.

La dernière observation que je tiens à faire porte sur le budget lui-même et je me contenterai de répéter ce que j'ai dit tout à l'heure: il est essentiel comme document de contrôle. Il est très important puisqu'il permet d'expliquer à la population canadienne ce que le gouvernement fait. Par contre, il n'est pas tellement utile à qui veut étudier un programme ou les dépenses du gouvernement.

Par exemple, vous trouverez au début de la Partie II du Budget des dépenses un énoncé des objectifs globaux des ministères du gouvernement. J'aurais dû apporter ce document avec moi pour vous montrer ce que je veux dire, mais prenons la GRC et les Affaires extérieures qui sont des exemples classiques. Ce sont là les exemples que je donne habituellement à mes étudiants quand je leur parle de voeux pieux inutiles énoncés dans un language administratif. En d'autres mots, les termes utilisés sont tellement abstraits et empreints de bonne volonté que personne ne pourrait ne pas être d'accord, mais ils ne veulent rien dire lorsqu'il s'agit de définir les objectifs ou encore de contrôler ou d'évaluer ce que les ministères font.

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Cela nous ramène à tout le problème des mesures du rendement, à la façon dont elles sont utilisées et à l'endroit où elles le sont, mais ce que je tiens à faire ressortir, c'est que la manière dont les budgets sont structurés et décrits pose un problème par définition, problème que nous n'avons pas encore essayé de régler, je pense, au Canada.

Comme je l'ai dit, c'était là un pot-pourri d'idées. J'ose espérer que quelques-unes d'entre elles seront utiles à certaines des personnes ici présentes.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Lindquist.

M. Everet Lindquist (professeur de sciences politiques, Université de Toronto): Je suis professeur agrégé de sciences politiques à l'Université de Toronto. Contrairement à mes deux collègues, je n'ai pas consacré la plus grande partie de ma carrière à l'étude des assemblées législatives, mais j'ai très vite compris pourquoi il fallait que je m'intéresse à la question.

J'aborde le sujet sous un angle très différent, davantage sous celui que Ned Franks a adopté lorsqu'il a mentionné ses deux derniers points, qui avaient à voir avec la question de l'amélioration de l'information fournie au Parlement. Mes observations s'inspireront aussi un peu de l'expérience que j'ai vécue auprès du Secrétariat du Conseil du Trésor comme professeur invité il y a quelques années.

Je vais reprendre aujourd'hui certaines observations que j'ai faites comme membre d'un groupe de travail sur la responsabilité de la fonction publique devant le Parlement et les assemblées législatives, et tout ce que cela suppose comme défis, lors de la conférence organisée à l'automne 1995 par le Groupe canadien des études des questions parlementaires. Mme Catterall et le vérificateur général faisaient eux aussi partie de ce groupe. J'ai depuis donné à mes observations un titre qui montre, je pense, à quel point certaines des questions en jeu ici sont complexes: «Improving Information to Parliament, Groups and Citizens on Government Programs: Will the New Accountability Tools Lead to More Constructive Engagement?»

La conférence avait pour titre Parliaments in the Eye of the Information Storm: Citizen and Public Service Accountability. J'ai essayé par mes observations de contester certaines des idées présentées lors de cette conférence par Peter Aucoin, professeur d'administration publique et de sciences politiques à l'Université Dalhousie. Il voulait exposer aux participants bon nombre des idées qui proviennent de ce qu'on appelle le mouvement en faveur d'une «nouvelle gestion publique», lequel met beaucoup l'accent sur la nécessité de trouver des moyens de faire en sorte qu'on s'attache davantage aux résultats, à l'amélioration du rendement des programmes de la fonction publique et des ministres, ainsi qu'au renforcement de l'obligation de rendre compte.

J'ai voulu faire ressortir par mes observations que même s'il s'agit à mon avis d'un mouvement très important, il perd de vue une partie du contexte dans lequel ce que j'appelle le «réseau de responsabilité» fonctionne, de même que certaines des questions que M. Franks a soulevées tout à l'heure à propos de la qualité de l'information avec laquelle chacun doit travailler.

Les tenants de la nouvelle gestion publique estiment que les mesures du rendement, les plans opérationnels et autres choses du genre aideront à améliorer les délibérations. Je n'en suis pas si certain. Je crois que nous devons aussi nous demander quels sont les autres renseignements qui pourraient nous être utiles dans notre travail.

Je vais vous exposer brièvement mes observations. J'ai ici des copies de mon exposé intégral.

J'ai commencé par les vues de Peter Aucoin au sujet de la nouvelle gestion publique. Permettez-moi de vous signaler, outre les trois points que je vous ai mentionnés tout à l'heure au sujet de certains des objectifs de ce mouvement, quelques-unes des façons dont ces gens pensent pouvoir assurer une meilleure gestion publique et une meilleure surveillance des ministres et des fonctionnaires.

Premièrement, ils croient qu'il devrait y avoir délégation des pouvoirs et des responsabilités en ce qui concerne la gestion des programmes. Deuxièmement, ils croient que les responsabilités en matière de politiques et de prestation de programmes devraient être délimitées clairement. Troisièmement, il faudrait recourir davantage à des contrats pour l'évaluation du rendement des hauts fonctionnaires afin que des gens de l'extérieur puissent examiner le travail qu'ils font. Quatrièmement, il faudrait s'engager davantage à améliorer les régimes de responsabilisation.

Ces idées sont censées servir de complément à ce que j'appellerais les nombreuses méthodes traditionnelles d'examen des moyens de rendre des comptes, comme la période des questions, la surveillance par les organismes centraux, le travail du vérificateur général du Canada et l'examen par le Comité des comptes publics et de nombreux autres comités permanents et toute une série d'organisations analogues à des ombudsmans, ainsi que la procédure d'accès à l'information.

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Qu'est-ce que la nouvelle gestion publique viendrait ajouter, sur le plan de l'information, au travail qui se fait déjà? Eh bien, j'ai déjà mentionné les indicateurs de rendement. Il y a aussi cette merveilleuse technique, «l'analyse comparative», qui consiste à mesurer comment d'autres organisations et pays font le même genre de travail; l'utilisation de normes de services; les chartes du citoyen, du genre de celle que le gouvernement du Royaume-Uni a adoptée; le recours à des plans opérationnels et à des perspectives économiques; et des régimes de vérification et d'évaluation plus transparents.

Je le répète, je fais des mises en garde, mais il ne faudrait pas croire pour autant que je critique ce mouvement. Nous voulons réfléchir soigneusement au genre d'information dont nous avons besoin pour que certaines de ces idées fonctionnent. Dans mes observations, je dis tout d'abord que nous devons avoir une vue d'ensemble de ce que j'appelle le «réseau de responsabilité», que mes deux collègues ont déjà mentionné; que ces nouvelles idées et ces nouveaux outils de responsabilisation s'insèrent dans un réseau d'intervenants qui englobent des gestionnaires de programme, des citoyens et des clients, des ministres, des équipes de hauts fonctionnaires ministériels, des équipes de vérification et d'évaluation, des défenseurs de la mesure du rendement, le Conseil du Trésor et son Secrétariat, des comités permanents, le vérificateur général et de nombreux autres organismes de surveillance.

Ce que je tiens à faire ressortir ici « et je sais que vous le savez tous très bien « c'est que chacun de ces intervenants défend ses propres intérêts, a ses propres tâches et responsabilités, et qu'il y a bien souvent incompatibilité. Dans le passé, comme Peter Aucoin, Paul Thomas et bien d'autres l'ont signalé, l'interaction entre ces intervenants a souvent mené à l'obscurcissement du régime de responsabilisation et à l'incapacité d'utiliser vraiment l'information qui existe de manière positive et constructive. Je ne suis pas naïf; bon nombre de mes suggestions et de celles de mes collègues ne modifieront pas radicalement cette dynamique.

Laissez-moi vous expliquer pourquoi j'ai certaines réserves au sujet de la confiance en des mesures du rendement « en l'utilisation de documents sur les perspectives dans le dessein d'en arriver à un rendement mesurable.»

Ma première question est la suivante: quelle utilité peuvent avoir les nouveaux outils de responsabilisation dans le contexte d'importantes compressions budgétaires, de la réduction des effectifs et de la restructuration de la fédération? Autrement dit, si l'importance doit être accordée à la mesure des résultats et du rendement et qu'il faille pouvoir compter sur l'existence de données de base, peut-on raisonnablement s'attendre à être capables de mesurer bon nombre de programmes qui sont en réalité de véritables cibles mouvantes?

Ma deuxième question est la suivante: quels sont les aspects des programmes et des ministères qui seront ou qui peuvent être mesurés et, par conséquent, mis en lumière? Ces outils donneront-ils une idée adéquate de la gestion et du fonctionnement interne des ministères gouvernementaux? Les nouveaux outils de responsabilisation serviront-ils vraiment de fenêtres qui permettront de jeter un jour nouveau sur ce qui se passe à l'intérieur d'un ministère, ou feront-ils davantage fonction d'un oeil de porte qui ne permettra qu'une espèce de vue limitée de ce qui se passe?

Ma troisième question est la suivante: les nouveaux outils de responsabilisation ne risquent-ils pas de donner une image déformée du rendement des ministères et des programmes gouvernementaux? Je pense qu'il s'agit d'une arme à deux tranchants. Il se peut qu'il y ait des ministères qui ne soient pas bien gérés ou des programmes qui ne donnent pas les résultats escomptés, mais les indicateurs pourraient en réalité donner à entendre que tout fonctionne à merveille. Par contre, certains indicateurs du rendement pourraient montrer qu'un ministère ne s'en tire pas très bien, qu'il ne répond pas aux attentes, alors que ses gestionnaires et ses employés font admirablement face à la situation. Donc, la question est la suivante: ces outils déboucheront-ils sur une plus grande transparence à propos du fonctionnement du gouvernement ou jetteront-ils un voile sur ce qui se passe vraiment?

Une réponse à cette question, qui est en quelque sorte une critique, consiste à dire que la mise au point de tels outils de responsabilisation devrait se faire par tâtonnement, et qu'ils évolueront certainement. Selon cette façon de voir, pareils outils sont contestables et imparfaits; la quête de meilleurs outils est nécessairement un processus continu pour tous les intéressés « tant ceux qui font partie de la bureaucratie que ceux qui essaient d'examiner minutieusement leurs activités.»

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Je suis disposé à accepter cet argument. On n'a qu'à regarder ce qui s'est fait en Alberta pour avoir l'exemple d'un gouvernement qui s'est empressé d'adopter un système axé sur le rendement. Il n'a pas cherché à mettre les points sur les «i» ni les barres sur les «t»; il s'est tout simplement mis au travail en attendant de voir ce que cela donnerait et il a impliqué les législateurs. Je souscris à l'idée de ne pas trop planifier et à l'idée d'expérimenter. Donc, dans l'ensemble, je dirais qu'il faut procéder plus rapidement que trop lentement dans ce secteur.

Ce dont j'ai peur, c'est qu'une trop grande confiance en des indicateurs du rendement nous amène à nous heurter aux problèmes que le processus a toujours posés « qu'on ait tendance à s'en tenir à des politiques administratives particulières; qu'on attache trop d'importance à des erreurs en particulier ou à l'impossibilité d'atteindre certaines normes ou de suivre certains exemples; et qu'on ait tendance à blâmer ou à admonester les ministres ou leurs représentants si les résultats escomptés n'ont pas été atteints.»

À mon avis, la difficulté tient ici à l'absence d'une vue d'ensemble des problèmes de gestion que peuvent poser la prestation et l'examen des programmes.

Lorsque je pense à ces outils et au contexte dans lequel ils seraient utilisés, j'ai bien peur qu'à moins que d'autres mesures ne soient prises, ils ne feront qu'encourager le public à considérer la fonction publique comme une boîte noire insensible et apparemment incompétente. Ils pourraient également continuer à inciter les ministres et les hauts fonctionnaires à éviter l'erreur et à choisir des indicateurs du rendement qui ne soulèvent aucune controverse. Ils pourraient néanmoins continuer à empêcher des étrangers « et j'inclus parmi eux les députés » de saisir toutes les difficultés que suppose l'harmonisation des options qui s'offrent pour régler des questions ou des problèmes en particulier.

Cela m'amène à poser la question suivante: comment encourager une discussion plus équilibrée et intelligente de la gestion et du rendement des ministères et des programmes à une époque de changements profonds?

Bien des gens pensent trouver pas mal de renseignements dans la Partie III du Budget des dépenses, mais il m'est rarement arrivé, lorsque j'ai fait des recherches et travaillé pour le gouvernement, de trouver ce que je cherchais lorsque j'ai consulté le budget pour avoir une idée de la façon dont les ministères et les programmes fonctionnent. Il est difficile de dépasser la barrière des catégories budgétaires, de la structure des crédits, de la structure organisationnelle et des principales réalisations « dont la liste est habituellement très très longue.»

Ma crainte, c'est que le plan opérationnel, les documents sur les perspectives et d'autres outils de responsabilisation ne permettront pas d'obtenir grand-chose de plus, surtout pas pour ceux d'entre vous qui ne travaillent pas pour un ministère ou qui n'ont rien à voir avec les programmes. Il est intéressant de constater que la plupart des défenseurs des nouveaux outils de responsabilisation supposent que ceux qui les utiliseront connaissent aussi bien la structure, les caractéristiques et les clients des programmes que ceux qui travaillent pour les organismes centraux et au bureau du vérificateur général et qui surveillent ces programmes à temps plein. Or, la plupart des gens n'ont ni des connaissances ni une expérience aussi poussées.

Ce que je proposerais alors, pour que ces nouveaux outils soient vraiment utiles « et c'est en réalité une forme d'encouragement » c'est de fournir de plus amples renseignements sur les ministères et les programmes. Il nous faut pouvoir offrir de bons organigrammes et profils. Cela aiderait en ce qui concerne non seulement le cycle de responsabilité, mais aussi l'organisation de consultations publiques plus vastes au sujet de ces questions et de bien d'autres encore. Il y a une espèce d'intérêt public qui va au-delà des travaux des comités.

En quoi consisteraient une bonne description ou un bon profil organisationnel? Il faudrait qu'ils comportent les dimensions suivantes: les tâches et les pouvoirs clés au niveau des programmes; les principales compétences et connaissances du personnel; l'emplacement des bureaux de la direction, des responsables des programmes et des régions; l'environnement, par exemple le type de clients avec lesquels il faut travailler, les résultats auxquels il faut s'attendre et les «intrants» avec lesquels il faut composer; et, enfin, les principales tendances et les répercussions de ces tendances pour le programme.

Serait-il difficile d'élaborer de tels profils, de les présenter de manière à ce que des gens comme vous en viennent à comprendre très rapidement les activités des ministères? Les étudiants qui suivent mon cours d'analyse organisationnelle à l'Université de Toronto ont à le faire constamment. Ils sont capables de rédiger en un semestre des travaux qui, en relativement peu de temps, donnent aux gens une bonne idée du fonctionnement d'une organisation et des principales questions qui les intéressent. Ils peuvent donner un bon aperçu de l'organisation.

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J'ai apporté avec moi aujourd'hui le rapport annuel du ministère des Finances « l'équivalent de notre Secrétariat du Conseil du Trésor » du gouvernement de l'Australie. Ce document a presque 200 pages. Il renferme le budget des dépenses, mais il donne aussi une très bonne idée de la façon dont cet organisme central fonctionne. Deux cents pages, c'est volumineux, mais les renseignements que ce document contient sont assez accessibles.

Je pense que nous pourrions tirer profit aussi des progrès réalisés dans le secteur des logiciels graphiques et de la technologie de l'information. Nous pouvons trouver des moyens de fournir énormément d'information très succinctement sous une forme très facile à digérer. Je sais que ce genre d'idée risque d'alarmer bien des gens qui travaillent pour des ministères opérationnels et des organismes centraux, mais tout le monde doit se contenter de ressources beaucoup moins nombreuses. Or, pour moi, il s'agit là d'une ressource qui pourrait être utilisée par des journalistes, par des universitaires, par toute une série d'autres organisations pour qui l'examen des opérations du gouvernement présente un intérêt. Nous pourrions par conséquent essayer de trouver un moyen de mettre nos ressources en commun pour mieux décrire le travail que le gouvernement fait.

Si vous me le permettez, j'aimerais commenter certaines des observations que M. Paul Thomas, professeur à l'Université du Manitoba, vous a fait parvenir. Je ne vous les lirai pas toutes, mais vous avez en main un document très intéressant qui complète en quelque sorte les observations que nous vous avons faites tous les trois aujourd'hui. Ce document a pour titre Parliament and Money: Some Points to Ponder. Je sais que M. Thomas en a envoyé une copie au comité parce qu'il ne pouvait vous rencontrer.

Comme mes collègues, il a fait observer que les députés s'intéressent peu à l'examen des budgets des dépenses, que les journées réservées à l'étude des subsides servent à des débats ouverts et qu'une plus grande attention semble en réalité être portée aux budgets à l'intérieur des comités permanents. Il a aussi fait observer que les réformes de 1968 sont loin d'avoir comblé toutes les lacunes du processus, mais je n'entrerai pas dans les détails puisqu'ils sont décrits dans son document.

Il y a une chose intéressante qu'il dit ici, à savoir que la présentation du budget « document imparfait et souvent inutile « contribue au manque d'intérêt. Il signale cependant que ce n'est pas là une cause des principales lacunes que comporte le processus d'examen des crédits. Il s'agit en réalité d'une mise en garde qui revient à ce que je disais. À son avis, même si nous trouvions une nouvelle façon de présenter le budget de manière à ce qu'il contienne plus d'information, cela ne changerait rien à la dynamique des comités. Nous devons trouver d'autres moyens d'inciter les députés à examiner ces choses plus en détail et faire en sorte qu'ils en aient le temps.

Il voit d'un bon oeil l'instauration d'un système de gestion des dépenses à Ottawa, car il offrira l'occasion aux comités permanents, ainsi qu'au comité des comptes publics, d'examiner les documents sur les perspectives fournies par le gouvernement du Canada. Il se demande cependant si ces documents, une fois combinés à la Partie III, ne seront pas trop longs à examiner. Je sais aussi que mes recommandations entraîneraient une augmentation du volume des renseignements à examiner.

Il propose comme solution que nous trouvions une façon de fournir cette information en direct, par des moyens électroniques, pour que les gens y aient accès plus rapidement. J'ajouterais qu'elle pourrait être mise à jour pour que nous n'ayons pas, chaque année, à produire toute une nouvelle série de documents.

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Il propose en outre que les comités, et cela revient à ce que M. Frank disait, soient plus ouverts sur l'avenir et, tout comme le gouvernement, participent à des examens intensifs des programmes.

Il donne ici l'exemple du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Selon lui, ce comité a fait du bon travail en ce sens, et la Chambre des communes devrait envisager des moyens de faire la même chose. Cela cadrerait très bien avec la notion d'un horizon prévisionnel de deux ou trois ans.

Selon M. Thomas, il devrait y avoir un comité permanent de l'examen des dépenses de programme qui compterait 30 membres et trois sous-comités et serait doté de suffisamment de personnel de soutien. Cela réglerait en partie le problème du manque de temps pour les députés et des recherches à effectuer. Il fait observer également que ce comité et ses sous-comités devraient coordonner leurs activités avec celles du comité des comptes publics, du comité des finances et des comités permanents de la Chambre des communes, ainsi qu'avec celles du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

Je suis en faveur de ces propositions, mais, je le répète, je m'interroge sur la contribution que des députés relativement inexpérimentés « ou qui connaissent mal le fonctionnement des grandes organisations bureaucratiques, devrais-je plutôt dire » peuvent apporter à un examen des programmes de ce genre. De toute évidence, une solution consisterait à tenir de nombreuses audiences et à tirer profit de l'expérience d'un grand nombre d'experts de l'extérieur. Mais, je le répète, je me demande s'il y en a beaucoup parmi eux qui comprennent le fonctionnement de ces bureaucraties. C'est un argument auquel il faudra réfléchir soigneusement pour ce qui est du genre d'information qui sera fournie à l'avenir.

La présidente: Je pense que vous nous avez présenté un exposé assez long et très utile, qui touche un peu à tout.

Laissez-moi vous expliquer ce que nous avons prévu pour le reste de la matinée. Étant donné que nous avons la chance de vous avoir tous les trois parmi nous aujourd'hui, j'ai pris des dispositions pour que nous mangions tous ensemble ce midi de manière à pouvoir poursuivre la discussion, car une heure, ce n'est pas tellement long vu les experts que nous avons avec nous.

Il nous reste une chose à régler. Je propose de continuer jusqu'à 11 h 30 à peu près, de régler la question restée en suspens après notre réunion de lundi, puis de dîner. Si quelqu'un pense avoir besoin d'une pause entre-temps, vous n'avez qu'à me le signaler. Ça va?

M. Williams (St-Albert): Madame la présidente, avant d'aller plus loin, pourrions-nous demander que les documents qui nous ont été présentés par M. Paul Thomas sur le Parlement et les crédits soient ajoutés au compte rendu comme s'ils avaient été lus?

Je crois savoir également que M. Lindquist avait un exposé écrit, dont il a cité des extraits, mais qu'il n'a pas lu mot pour mot... et je demanderais que nous annexions aussi ce document.

La présidente: Je pense que nous avons des textes de MM. Lindquist et Mallory qui n'ont pas été distribués au comité parce qu'ils n'avaient pas été traduits. Donc, vous proposez qu'ils soient annexés au compte rendu de la réunion d'aujourd'hui.

M. Williams: J'en fais la proposition.

La motion est adoptée

La présidente: Sommes-nous maintenant prêts à passer aux questions?

M. Williams: Merci, madame la présidente. J'aimerais tout d'abord signaler à nos témoins de ce matin à quel point j'apprécie qu'ils partagent avec nous leurs vastes connaissances sur la question qui nous intéresse.

La question à l'étude est d'essayer de faire en sorte que le Parlement aborde le processus budgétaire de manière plus efficace. Comme vous l'avez tous souligné, les budgets ne sont présentés au Parlement que pour la forme. Quel est le rôle réel du Parlement et quel rôle devrait-il jouer dans l'approbation ou l'examen des budgets des dépenses?

Je crois personnellement que le Parlement a perdu le contrôle des deniers publics et que le gouvernement obtient toujours ce qu'il veut. Je vois une distinction nette entre le Parlement et le gouvernement. Je pense que vous le reconnaissez tous et que vous avez tous des solutions à proposer. Vous avez tous parlé de la nécessité d'obtenir plus d'information. Nous avons en fait un autre comité qui s'intéresse à cette question, de sorte que je vais m'en éloigner pour l'instant.

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Comment le Parlement peut-il en venir à jouer un rôle plus efficace dans le contrôle des deniers publics? Je crois que le gouvernement donne une interprétation beaucoup trop stricte de la confiance et que, comme M. Franks l'a indiqué je pense, cette confiance ne devrait pas s'appliquer en ce qui concerne les réductions ou les petits changements proposés par le Parlement, quoique je sois d'accord avec vous pour dire que la confiance existe pour ce qui est des principaux documents budgétaires.

J'aimerais qu'il y ait relâchement de la confiance de la part du gouvernement. Je songe à deux segments de dépenses: aux dépenses législatives auxquelles vous avez tous fait allusion et aux budgets des dépenses et crédits que nous approuvons annuellement.

Vous avez tous indiqué à quel point les programmes législatifs sont importants. Je ne pense pas qu'on puisse en faire une analyse poussée tous les ans. C'est pourquoi j'ai présenté l'an dernier un projet de loi d'initiative parlementaire concernant l'évaluation des programmes dans lequel je proposais que les grands programmes soient évalués tous les sept ou dix ans en fonction de quatre critères fondamentaux. Le programme a-t-il toujours son utilité? Satisfait-il aux critères qui ont été établis? Sa prestation est-elle efficace? Existerait-il un meilleur moyen de satisfaire à un besoin identifié au sein du grand public?

Selon moi, la contribution du Parlement aux grands programmes législatifs devrait suivre un cycle de sept à dix ans.

En ce qui a trait au budget des dépenses, je pense que le Parlement devrait se méfier de la cooptation pour ce qui est des programmes du gouvernement. Je ne pense pas que ce soit là son rôle, mais j'aimerais avoir vos vues là-dessus.

Le rôle du Parlement est de protéger les deniers publics et de fournir au gouvernement les crédits dont il a besoin. Si le Parlement est mêlé de trop près aux programmes et que les documents sur les perspectives indiquent qu'il faudrait avoir ceci ou cela, changer ceci ou modifier cela... une fois que le processus bureaucratique aura suivi son cours et que la chose aura été présentée au Parlement sous la forme d'un budget des dépenses, il se pourrait que les intentions du comité aient été déformées. Lorsqu'un budget aura pris forme, il se pourrait que ce ne soit plus du tout la même notion et, pourtant, parce que le Parlement aurait eu son mot à dire à une étape antérieure, comment pourrait-il alors s'opposer à ce qu'il aurait approuvé ou proposé dans un premier temps? Je m'interroge sur la cooptation du Parlement quand il y va du gouvernement, parce que je pense que c'est à ce dernier qu'il revient de faire part de ses intentions au Parlement et de lui demander son approbation.

Que pensez-vous du fait que je fasse une distinction aussi claire entre les deux rôles? Est-elle possible? Nous allons commencer par M. Franks.

Des voix: Oh, oh.

M. Franks: C'est la même rengaine. Pourquoi est-ce que tout le monde est toujours sur mon dos?

Cela nous ramène au rôle du député. Ai-je raison de penser que vous êtes un député réformiste?

M. Williams: Je suis réformiste et je siège au Comité des comptes publics.

M. Franks: Et je suppose que vous êtes comptable également. Donc, vos vues sur certaines de ces choses pourraient ne pas concorder avec celles des membres d'autres partis.

M. Williams: C'est vrai.

M. Franks: Lorsque je regarde autour de la table, je m'aperçois aussi que seuls deux des trois partis au Parlement sont représentés ici. Est-ce exact?

La présidente: Oui.

M. Franks: Les vues de l'autre parti ne correspondent peut-être pas aux vôtres ou à celles du parti ministériel.

La présidente: Ce parti n'a pas l'intention d'être ici longtemps. Je suis désolée, je ne devrais pas vous entraîner dans ce débat. Il a fait rage à la Chambre toute la journée.

[Français]

M. Franks: Peut-être devrais-je vous adresser la parole en français.

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[Traduction]

Le rôle du député était à l'origine de représenter une région et, habituellement, de défendre les intérêts de cette région au Parlement. Le rôle du député du gouvernement était d'obtenir le consentement des électeurs pour augmenter les impôts, beaucoup moins pour les dépenses, et le rôle du représentant de la circonscription était d'exposer les griefs, de là entre autres l'utilité des pétitions. Mais c'est de la procédure relative aux griefs que le processus législatif et les projets de loi sont nés.

La transformation du rôle du député en un membre d'un parti est, elle aussi, un phénomène du XIXe siècle. Cela n'a jamais été autant le cas en Angleterre qu'au Canada, quoique d'après le texte que nous avons examiné « mais je ne parle pas de M. Mallory » dans les années 50, les systèmes se ressemblaient tellement qu'on aurait dit qu'il s'agissait du même.

Cependant, l'expérience des dernières décennies a révélé que le député britannique a toujours un rôle très important à jouer comme représentant de sa circonscription, contre le gouvernement ou peu importe, quelles que soient les couleurs de son parti. C'est ce que font ressortir la fréquence de la dissidence dans les deux camps au moment des votes officiels à la Chambre des communes et de nombreuses défaites des gouvernements en Grande-Bretagne.

Nous n'avons rien de comparable au Canada, ce qui m'amène à parler encore une fois du problème des rapports entre un député et sa circonscription et, une fois de plus, de la question du roulement élevé qui s'explique en partie par un changement d'opinion de la part de l'électorat et par la décision dans un pourcentage élevé des cas « je dirais à peu près 50 p. 100 habituellement » de ne pas briguer de nouveau les suffrages. Et ce pourcentage de 50 p. 100 est plus élevé que celui des députés qui décident de quitter la politique pour quelque raison que ce soit aux États-Unis ou en Angleterre, et beaucoup plus élevé que ce qu'on trouve dans les pays européens.

Il y a des problèmes au sujet du rôle du député qui n'ont jamais été cernés, mais si je regarde autour de la table, je dirais « au risque de me tromper parce que vous n'êtes qu'un tout petit groupe » que la moitié d'entre vous ne seront probablement plus ici après les prochaines élections. C'est là la norme et, même s'il est impossible de généraliser à cause de votre tout petit nombre, cela vous donne une bonne idée.

Cela dit, nous nous retrouvons avec deux problèmes pour ce qui est du rôle du député au Canada. Le premier concerne l'allégeance, une allégeance presque exclusive, des députés envers leur parti, généralement parlant, et le deuxième a trait au fait que le député ou la députée doit composer avec un horizon temporel plutôt court. Il me semble que ce problème est à l'origine de ce que le Parlement peut ou ne peut pas faire.

J'ai dit tout à l'heure qu'il est très rarement arrivé au Canada qu'un comité parlementaire, y compris le comité des comptes publics, ait agi à titre de comité du Parlement et défendu ses propres intérêts contre le gouvernement, intérêts qui auraient débordé le cadre de la discipline de parti. Cela est arrivé tellement peu souvent que les quelques cas importants qui viennent à l'esprit sont davantage ceux d'un comité ayant agi comme un tout à l'intérieur des limites prescrites et appuyées par le gouvernement. Par exemple, on fait habituellement allusion au comité des finances Blenkarn lorsqu'on veut donner l'exemple d'un comité autonome et indépendant, mais d'après mes observations, et d'après la thèse de l'un de mes étudiants de troisième cycle, je dirais que oui, il a été autonome, mais dans des limites avec lesquelles le gouvernement se sentait parfaitement à l'aise de sorte qu'il n'est jamais vraiment allé à l'encontre de sa volonté.

Voilà un problème et une énigme qui limitent gravement, à mon avis, ce que le Parlement et ce que les comités peuvent faire. Comme je l'ai dit, cela n'a rien à voir avec le mérite et les compétences des députés individuels. Le problème a plutôt énormément à voir avec la façon dont notre système de représentation fonctionne au Canada.

Je suis tenté de vous parler à nouveau de l'horizon temporel, car vous avez parlé d'un cycle de sept à dix ans. J'avais suggéré trois ans. Le problème que posent un grand nombre de décisions, c'est que les répercussions financières réelles ne se manifestent pas avant un bon nombre d'années. Si l'on veut changer quoi que ce soit, il est souvent de loin préférable d'apporter un changement sur-le-champ en s'attendant à un changement important à l'avenir au lieu d'essayer d'opérer un changement radical et spectaculaire en un an.

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Je n'ai jamais rencontré beaucoup de ministres « et encore moins de simples députés « qui seraient intéressés à planifier à plus long terme. C'est l'une des raisons pour lesquelles je me demande si un processus budgétaire selon lequel des crédits seraient approuvés pour une période de trois ans pourrait être utile. Il pourrait forcer tout le monde à se reporter aux documents de base « aux politiques ministérielles dont Everet parlait, aux lois sous-jacentes et ainsi de suite « et à les examiner en tant que sources des dépenses pour les repenser au besoin.

J'ai bien peur que le cycle de trois ans, étant donné la politique canadienne, demeure un voeu pieu.

J'espère avoir répondu à certaines de vos questions.

M. Williams: Monsieur Mallory.

M. Mallory: Je ne pourrais pas ne pas être d'accord avec une bonne partie de ce que M. Franks vient de dire, car il a tout à fait raison.

Il m'est arrivé de penser que l'un des problèmes qui se posent pour les députés, à titre individuel et en tant que membres d'un comité, tient, non pas à un manque d'information, mais plutôt à une surabondance d'information. Cela s'explique en partie par le fait qu'ils ne comprennent pas vraiment l'importance de toute cette information.

Bien sûr, le temps est l'un des facteurs qui interviennent. Un député qui est ici depuis vingt ans en connaît pas mal sur un tas de choses, et il peut voir l'importance de l'information qu'il reçoit beaucoup mieux qu'un autre, élu il y a à peine un an et demi.

Il ne faut pas oublier non plus que d'astucieux employés du Conseil du Trésor et cadres supérieurs des ministères ne peuvent pas résister à la tentation de vous éblouir avec toute leur science en vous présentant de l'information qui a probablement un sens pour eux mais qui, consciemment ou inconsciemment, n'a pas été conçue de manière à en avoir un pour vous. Nécessairement, les rapports entre le Parlement et l'administration, qui sont au coeur même de la vie parlementaire depuis des siècles, veulent qu'à un moment ou à un autre les deux adversaires finissent par être assujettis aux mêmes règles du jeu.

Cela va s'avérer très difficile, parce que nous ne voulons pas aller à l'extrême et adopter le système américain, opter comme les Américains pour la séparation des pouvoirs, ce que les Britanniques auraient pu faire au XVIIIe siècle, mais n'ont pas fait. Que ce soit pour le meilleur ou pour le pire, nous avons un système à l'intérieur duquel le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif dépendent en quelque sorte l'un de l'autre, comme l'a dit Bagehot. Nous devrions essayer d'utiliser ce système au mieux, parce qu'il comporte ses avantages et ses inconvénients, tout comme celui des Américains.

La séparation des pouvoirs entre le Parlement et le gouvernement a toujours menacé d'être complètement déséquilibrée par des ministres et des fonctionnaires ayant réussi à amener le Parlement, par cooptation comme vous l'avez dit, à accepter leur façon de voir. Il n'y a aucune raison pour laquelle cela ne pourrait pas se faire, parce qu'il s'agit d'un gouvernement élu. L'électorat lui a dit qu'il pouvait dicter le programme pour les quatre ou cinq années à venir, et la seule façon que nous avons de changer quoi que ce soit à cela est de revenir à la charge tous les jours au Parlement pour préciser ou redéfinir le programme afin que la prochaine fois, l'électorat choisisse de confier l'établissement du programme à quelqu'un d'autre.

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Entre-temps, la cooptation n'est pas nécessairement une mauvaise chose, parce que les députés ne sont pas là uniquement pour trouver toujours à redire, pour mettre en fureur des hauts fonctionnaires travailleurs qui essaient d'appliquer les lois que le Parlement a adoptées. Les deux parties ont mutuellement intérêt à faire ce qu'il y a à faire du mieux qu'elles le peuvent avec les moyens à leur disposition, d'où la communauté d'intérêts qui peut s'établir entre un ministère et son comité, à la manière un peu de relations entre clients.

On ne saurait parler de politique de la confrontation. Les grandes réalisations du gouvernement parlementaire ne se trouvent pas dans une bataille rangée des parlementaires contre la Couronne, du genre de celle que John Hampden a livrée et dont John Diefenbaker parlait. Pas du tout.

Ce qui compte, c'est le fait que ces deux pouvoirs distincts, qui font partie du processus nous amenant à parler d'un gouvernement légitime et, en des termes ordinaires, honnête, sont tous deux engagés dans une entreprise commune. Le système de gouvernement responsable que nous avons fait que cette jonction est partie intégrante du processus. Comme l'a dit Walter Bagehot, c'est ce qui boucle la boucle.

Pour en revenir à la cooptation, disons qu'elle peut fonctionner dans les deux sens. Un comité avisé et persistant qui trouve vraiment utile de concentrer son attention sur une question en particulier « et je suppose que cela nous ramène à votre projet de loi d'initiative parlementaire... Les comités permanents seraient plus utiles s'ils examinaient les programmes législatifs, qui n'ont rien à voir avec les budgets, et ils devraient les examiner dans une perspective à long terme.

S'il comprenait ce qui se passe et s'il ne se laissait pas distraire par les exigences de la politique au jour le jour, le gouvernement s'apercevrait lui aussi que ce serait dans l'intérêt de chacun d'apporter les améliorations que tout le monde juge nécessaires. Lorsqu'il y va de l'administration d'un programme, les hauts fonctionnaires qui en sont chargés et les membres d'un comité parlementaire qui essaient de savoir ce qui se passe à l'intérieur pourraient s'apercevoir qu'ils ont des intérêts communs.

La cooptation n'est peut-être pas une mauvaise façon de voir les choses du point de vue d'un comité permanent et de ses rapports avec son ministère client. En un sens, il peut y avoir cooptation de part et d'autre en vue d'une entreprise commune. Ainsi, pour reprendre les paroles immortelles de Robert Thompson, la discipline de parti ne pourra pas entraver la voie au débat parlementaire.

C'est ce que je tenais à ajouter à l'observation de M. Franks, avec qui je suis d'accord.

La présidente: [Inaudible--Éditeur] ... la question de M. Williams, et près d'une demi-heure s'est déjà écoulée.

M. Lindquist: Ma première réaction, c'est qu'il faut tenir compte de l'état actuel des choses. Même s'il y a menace de cooptation, le fait de ne pas être coopté a aussi débouché sur une certaine dynamique et un sentiment d'impuissance. La cooptation est une façon de se mêler de ce qui se passe.

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J'utilise des métaphores depuis tout à l'heure, mais je dois dire que l'idée du nouveau système de gestion des dépenses me plaît en ce sens qu'il y aura présentation de documents sur les perspectives et ainsi de suite. C'est une façon de faire participer la Chambre des communes au processus. Ces documents ne vous fourniront peut-être pas toute l'information que vous aimeriez avoir, mais il reste que des gens viendront rencontrer les comités, qu'un dialogue pourra être entamé et qu'il y aura une meilleure sensibilisation.

La cooptation n'est pas nécessairement une mauvaise chose non plus si on a pu se former une idée des questions sur lesquelles la discussion porte et qu'on soit à même de faire des évaluations. C'est pourquoi je dirais, une fois de plus, que les indicateurs du rendement ou la maigre Partie III du budget dont nous disposons actuellement pourraient ne pas suffire. Mais si vous aviez votre propre idée du ministère et de ses programmes, je pense que vous vous sentiriez moins menacé par la cooptation.

Je tiens également à signaler, dans le contexte de ce que vous venez de dire, monsieur Mallory, que les gouvernements veulent danser eux aussi. Ils sont dans une situation extrêmement difficile. J'ai été étonné de constater à quel point il est difficile pour les hauts fonctionnaires d'expliquer les pressions qui s'exercent sur eux. Cela les intéresserait probablement plus qu'on le pense, plus que le veut la sagesse populaire, de sensibiliser les députés et d'autres personnes du dehors aux tensions qu'ils vivent.

Je ne veux pas minimiser par là le fait que le gouvernement au pouvoir aura toujours tendance à faire preuve d'esprit de parti. Mais ce dialogue présente un certain intérêt et il me semble que les comités parlementaires peuvent jouer un rôle très important en mettant en discussion certaines de ces questions, ce que le gouvernement ne peut pas faire. Il ne peut pas penser ce qui est impensable, et cela pourrait être une façon d'entrer dans la danse.

Enfin, je tiens à mentionner qu'un roulement élevé est aussi un argument. Un roulement moins élevé veut dire que la connaissance provient de l'expérience. Ce sur quoi j'ai essayé d'attirer votre attention, c'est sur le fait qu'il serait possible peut-être d'inculquer cette connaissance d'une manière différente à des gens qui en sont à leurs premières armes, mais qui comprennent vite.

La présidente: M. Franks a une autre observation à faire. Je vais lui laisser la parole, après quoi nous allons passer à Mme Skoke.

M. Franks: Je serai très bref. Je repensais à ce que j'ai dit à propos des rapports entre les comités et le gouvernement. Au cours des ans, il y a bel et bien eu des comités qui ont défié le gouvernement. Je vais vous donner un exemple qui illustre très bien la façon dont cela peut se faire.

Dans les années 70, lorsque des scandales ont éclaté à propos du service de sécurité de la GRC, l'une des choses qui est ressortie, c'est que le gouvernement avait ouvert du courrier par l'entremise des postes « c'était le bureau de poste ou la GRC qui ouvrait le courrier » sans avoir été autorisé par la loi à le faire. Il était assez clair que la prérogative royale ne couvrait pas une telle chose au Canada, bien qu'on ait affirmé que c'est le cas en Angleterre.

La réaction du premier ministre Trudeau a été de présenter au Parlement un projet de loi autorisant le service de sécurité à ouvrir le courrier. Ce projet de loi a été renvoyé au comité de la justice présidé par le député Mark MacGuigan où il a délibérément été abandonné parce que MacGuigan a dit aux membres du comité que cela n'avait aucun sens, que le gouvernement faisait fausse route, qu'il fallait mettre un terme à tout cela. C'est ce qui a été fait. Ce genre de chose se produit de temps à autre.

M. Mallory: J'aurais quelque chose à ajouter à cela. M. MacGuigan était très bien informé parce qu'il a été président de ce comité pendant un certain nombre d'années, et il répugnait à renoncer à son poste. Il a acquis un ascendant énorme sur le comité, car il savait exactement ce qu'il voulait et il savait exactement aussi ce que le comité devrait faire. Donc, un président fort est quelque chose d'important également dans le processus parlementaire.

Mme Skoke (Central Nova): Madame la présidente, j'aimerais profiter de l'occasion pour remercier nos témoins d'être venus nous rencontrer ce matin. Je suis la députée de Central Nova. Je tiens à ce que vous sachiez que j'ai apprécié vos observations, concernant notamment le manque d'expérience et de connaissances et l'immaturité des nouveaux députés.

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Je suis titulaire d'un baccalauréat ès arts, et les sciences politiques étaient ma matière principale. En fait, M. Aucoin m'a enseigné. Je suis diplômée en droit de l'Université Dalhousie et j'ai pratiqué le droit pendant 19 ans. Je suis ici depuis deux ans et je me suis aperçue qu'il y a un système à l'intérieur d'un autre. Il y a un processus politique et un processus législatif, et les deux entrent souvent en conflit.

Je respecte vos vues au sujet du rôle du député, du fait que ce rôle est actuellement en train de changer, du conflit qui semble exister entre le rôle traditionnel du député et ce qu'il est devenu aujourd'hui, et à propos aussi du rôle des comités, de la façon dont ces comités fonctionnent à l'intérieur de délais particuliers et de l'emprise que le gouvernement exerce sur eux.

Cela dit, je suis d'accord avec vous et je respecte vos vues. Toutefois, comme députée, je suis dans une position difficile. De toute évidence, j'ai un devoir non seulement envers mes contribuables mais aussi envers tous les Canadiens pour ce qui est du gouvernement, de son fonctionnement, de ses programmes, des dépenses et de l'application des lois.

J'aimerais que vous me disiez, en ce qui concerne l'exécutif et le législatif et en ce qui concerne également la façon dont ce système à l'intérieur du système fonctionne, quelle est la part de la politique, par opposition à la gestion et à la comptabilité, dans le processus budgétaire applicable aux dépenses.

Je vais vous citer un extrait du dernier paragraphe de M. Thomas. Je ne sais pas si vous avez son exposé écrit. Je n'ai pas encore reçu les autres mémoires. J'ai trouvé très intéressant ce que j'ai lu. Je vais vous le lire pour que vous me fassiez vos commentaires, surtout sur la mesure dans laquelle la politique intervient dans la prise de décisions et l'affectation de dépenses par le gouvernement. Voici ce qu'il dit:

Je vous demanderais de commenter ses observations. Comment pouvez-vous m'aider comme députée à concilier le conflit réel entre le processus politique et le processus législatif et m'indiquer ce que je peux ou devrais faire?

M. Mallory: Je vais y aller en premier. Il est évident que chaque acte posé par le gouvernement est en un sens un acte politique parce que nous avons un gouvernement que nous avons choisi par le biais d'un processus politique. Le gouvernement a été choisi parce qu'il défendait certaines idées et certains intérêts par opposition à d'autres. Le choix s'est fait le jour de l'élection.

Un gouvernement a tout intérêt à survivre, à ne pas se laisser embarrasser continuellement, parce qu'il lui faudra revenir devant l'électorat au bout de cinq ans tout au plus pour voir s'il sera réélu, à moins d'être épuisé au point d'abandonner la partie.

Tout le processus est fondé sur l'espoir. Il n'y a pas à s'en sortir. Avant que la question ne fasse l'objet d'une discussion et qu'une décision ne soit prise par les ministres du Cabinet, les hauts fonctionnaires des ministères doivent définir la position qui sera adoptée. Ce ne sont pas des eunuques politiques. Ils sont sensibles à l'aura politique qui les entoure. C'est pourquoi ils essaient d'élaborer des politiques qui plairont à leurs maîtres. Sinon, ils risqueraient d'y laisser leurs emplois.

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Les politiques ainsi élaborées sont exposées au Parlement parce qu'il faut adopter des lois, approuver les dépenses et ainsi de suite. C'est là la première fois qu'elles font l'objet d'un débat public, mais je ne sais pas s'il y a moyen de savoir par les médias ce qui se passe exactement, à moins d'être un mordu de la chaîne parlementaire.

La confrontation à la Chambre, à laquelle vous participez tous les trois chaque jour, est en quelque sorte du théâtre de rue. Certains messages essentiels sont ainsi transmis, à savoir qu'il y a deux ou trois façons d'envisager ce qui devrait être fait. Ce sera au public de se faire une idée.

Vous jouez en quelque sorte dans la dernière scène d'un processus politique. En un sens, il y a un autre niveau où vous intervenez également, où le Parlement joue le rôle d'un superviseur, d'un évaluateur, pas celui des débats parlementaires, mais bien celui des travaux des comités. Lorsque vous-mêmes ou que l'un des membres de votre équipe téléphonez à un ministère au nom d'un commettant, vous intervenez, mais à un niveau différent encore une fois.

C'est ce que j'appelle la politique avec un petit «p». La politique avec un grand «p» se déroule à la Chambre ou dans les médias. Vous devez vous faire à la réalité que vous vivez plusieurs vies en même temps, si cela peut vous réconforter.

M. Lindquist: J'aimerais répondre brièvement à votre question intéressante en disant tout d'abord que la budgétisation a fait couler beaucoup d'encre. Bien sûr, elle correspond à bien des choses et je vous recommanderais de lire les ouvrages d'Aaron Wildavski dans vos temps libres. Selon lui, les budgets concernent le présent, le passé, l'avenir, la politique, la comptabilité, la gestion. La liste est longue. On peut en donner n'importe quelle définition.

D'après moi, les observations de Paul Thomas reviennent à dire que lorsqu'on a un processus de budgétisation relativement fermé, même si le gouvernement de l'heure qui présente un budget a des vues et des intérêts politiques clairs, il reste que le processus et les résultats conservent un caractère plutôt rationnel.

Vous n'avez qu'à prendre le système de gestion des dépenses. Un cycle précis est prévu. Il y a des points de contrôle à franchir. Des documents sur les perspectives vont être publiés. Vous verrez aussi les budgets des dépenses. Il ne faut pas oublier non plus les indicateurs de rendement, les programmes de qualité et j'en passe.

Il est intéressant de constater qu'un processus relativement fermé, même s'il a pour objet d'assurer une certaine ouverture, cache toutes les difficultés que comporte la production de ces documents, toutes les valeurs différentes qui interviennent le moment venu de décider en quoi consiste un bon indicateur de rendement, ce qu'il mesurera, s'il est parcimonieux ou non et s'il montre vraiment ce qui se passe en réalité. Je pense qu'il s'agit là du voile dont il parlait.

D'après ce que je comprends, on se demande ce qui va arriver lorsqu'il y aura une plus grande ouverture. Les choses vont se politiser encore davantage parce que tous n'épouseront pas les mêmes vues. Je pense qu'il essaie d'apaiser les inquiétudes qu'entretiennent un bon nombre d'entre vous. À quoi faut-il s'attendre étant donné votre capacité analytique limitée par comparaison de celle de ces ministères gouvernementaux et des organismes centraux?

Je crois qu'il cherche à dire qu'en dépit de cette lacune « vous pouvez faire certaines choses pour accroître votre capacité analytique » l'important, c'est qu'il y ait un débat politique sur ces questions. Cela sera sain. Cela va permettre de faire ressortir ce qui se passe nécessairement au sein de la bureaucratie.

Il y a moyen de faire ressortir par des débats la diversité des vues des Canadiens dont on n'entend jamais parler, ce qui n'est pas sain à mon avis à propos de cette dynamique. Donc, ce qu'il veut dire pour moi, c'est qu'en dépit d'une capacité analytique insuffisante, vous avez un rôle important à jouer.

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M. Franks: Je peux faire une distinction, qu'aucun de mes éminents confrères n'a faite, entre la politique et la bureaucratie. Je pense qu'on peut, en théorie et en pratique, faire cette distinction et dire que certains types de décisions et d'activités ont essentiellement un caractère bureaucratique et suivent des normes et des règles bureaucratiques routinières et uniformes tandis que d'autres ont un caractère politique en ce sens qu'on peut parler des pressions qui s'exercent, de valeurs conflictuelles et de vues différentes, ce qui ne pose aucun problème.

J'irais plus loin encore et je dirais que le système canadien ne fait aucune distinction dans la pratique. En Grande-Bretagne, l'agent comptable, qui est la personne responsable des transactions financières devant le Parlement par l'entremise du comité des comptes publics, est l'équivalent d'un sous-ministre. Ce n'est pas le ministre. L'agent comptant signe les comptes et assume personnellement toute responsabilité. Nous n'avons aucun équivalent au Canada. En théorie, c'est le ministre qui est responsable devant le Parlement.

La présidente: Le contrôleur général ne joue-t-il pas un rôle équivalent?

M. Franks: Absolument pas. Le contrôleur général était le représentant d'un organisme central qui a établi les structures, les processus et les règlements, mais il n'était pas responsable des transactions liées aux comptes, à moins que vous songiez à ce qui se faisait avant 1971. Est-ce la période à laquelle vous pensiez?

La présidente: Je pensais au rôle que ce bureau a joué dans l'histoire. A-t-il déjà exercé les mêmes fonctions?

M. Franks: Il faut remonter bien loin en arrière et, même à ce moment-là, c'est le ministre qui était responsable. Le contrôleur signait les chèques, mais le ministre était officiellement responsable.

Les choses se passent assez différemment en Grande-Bretagne. Nous accusons beaucoup de retard par rapport à ce pays. Et même un pays comme la Grande-Bretagne accuse du retard sur la Suède pour ce qui est de cette distinction, car, en Suède, le gros des dépenses sont engagées par des organismes administratifs autonomes qui fonctionnent séparément de l'exécutif politique.

Je tenais à le signaler parce que dans la mesure où les activités administratives courantes sont officiellement séparées des autres, elles sortent de la sphère politique, ce qui rétrécit le sens de ce que l'on peut considérer comme politique.

Mme Skoke: Donc, cela ne se fait pas au Canada.

M. Franks: Pas du tout. C'est plutôt le contraire. L'une des caractéristiques marquantes du système canadien est l'intrusion de considérations politiques dans des secteurs qui sont considérés comme bureaucratiques dans la plupart des autres pays.

M. Lindquist: Il serait utile aussi de souligner que l'idée de faire une distinction entre les instances politiques et celles qui sont responsables de la gestion des programmes est la source d'inspiration d'une bonne partie du nouveau mouvement de gestion publique. Prenons ce qui se passe en Suède et en Nouvelle-Zélande. Les organismes exécutifs dont il est question ici sont distincts du gouvernement.

M. Franks: J'ai un rapport assez détaillé sur la question. Il en est encore à l'étape d'une ébauche, mais je serais prêt à en remettre une copie au comité s'il juge que cela pourrait lui être utile.

La présidente: Nous aimerions bien le voir. Cela nous intéresserait tous.

M. Franks: Il a été rédigé grâce à une subvention de recherches du Centre canadien de gestion, mais il ne sera pas publié sous sa forme actuelle, ce qui fait que je n'ai aucune hésitation à vous en remettre une copie.

La présidente: Merci.

M. Franks: Dans le même ordre d'idées, même si on peut dire que certaines choses sont politiques en ce sens qu'elles comportent des jugements de valeur, des façons de voir différentes et une rivalité d'intérêt, il y a une autre dynamique politique qui occupe une place importante dans le régime parlementaire, soit celle qui existe entre le gouvernement et l'opposition.

Je maintiens qu'un Parlement vaut ce que vaut l'opposition et qu'un gouvernement vaut ce que vaut son Parlement. Donc, un lourd fardeau pèse sur les épaules de l'opposition en ce sens qu'il lui faut veiller à ce que le gouvernement fasse du bon travail.

M. Williams: Voilà un autre argument qui milite en notre faveur.

Des voix: Oh, oh.

M. Franks: Vous êtes très utiles.

Je pense que la force du système parlementaire en ce qui concerne les budgets et les dépenses tient à ce que la responsabilité du budget et de la gestion des dépenses relève clairement du gouvernement. En deux mots, il s'agit d'un gouvernement responsable. Tous savent qui est responsable.

Je mets tout le monde ici au défi de me dire qui est responsable du budget à l'intérieur du système américain. Je n'en sais rien. Vous connaissez le système mieux que moi.

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M. Lindquist: Mais cela est en train de changer, parce qu'avec deux chambres dominées par les Républicains, le sens des responsabilités s'est beaucoup amélioré ces dernières années.

M. Franks: Vous avez vu la négociation entre...

M. Lindquist: Même s'ils sont en guerre avec le président, on ne peut pas dire...

M. Franks: La question, c'est qu'au Canada on sait quels vauriens nous gouvernent, et si on ne les aime pas, on n'a qu'à les mettre à la porte. Je ne veux pas parler du Parlement actuel, mais, à mon avis, l'électorat canadien s'est prononcé clairement en 1993 en se débarrassant plus promptement que jamais d'un gouvernement dont il ne voulait plus. C'est là à mon avis la véritable force de ce système. Les responsabilités sont clairement définies et le processus de reddition de comptes, par l'entremise du Parlement et ensuite à l'électorat, est très clair. La situation est loin d'être la même aux États-Unis, au point où on ne sait pas au juste qui jeter dehors si on veut un changement quelconque.

Cela dit, je ne suis pas du tout d'accord pour dire qu'un examen des prévisions budgétaires et des dépenses du gouvernement peut toujours être impartial, car ce sont là des documents de politique clés. Le processus veut qu'on exige des comptes du gouvernement, et je m'attendrais à ce que l'opposition prenne la tête du mouvement et le critique.

C'est la raison même pour laquelle le président du comité des comptes publics est un député de l'opposition « parce qu'il a tout intérêt à critiquer le gouvernement. À mes yeux, les choses sont encore moins impartiales et plus importantes en ce qui concerne les budgets des dépenses, parce qu'ils ont une portée politique beaucoup plus grande que les comptes » du moins en temps normal. Je ne voudrais donc pas qu'on enraye l'esprit de parti, du moins pas en ce qui concerne les processus budgétaires.

La présidente: Il nous reste 15 minutes. J'aimerais savoir si les membres du comité pourront se joindre aux témoins à l'heure du lunch.

Mme Skoke: Je suis censée être au Comité des ressources naturelles, donc...

La présidente: Ce sera vers midi.

Mme Skoke: J'aimerais bien les harceler de questions.

La présidente: Vous pourriez peut-être vous faire remplacer.

Mme Skoke: Je vais essayer.

M. Williams: Je dois être à la Chambre à midi trente.

La présidente: Y resterez-vous longtemps?

M. Williams: Je suis en service aujourd'hui, j'en ai bien peur.

La présidente: Moi aussi, mais on m'a autorisée à m'absenter.

M. Williams: La discussion de ce midi sera-t-elle enregistrée?

La présidente: Elle ne peut pas l'être, mais notre attaché de recherche et notre greffière vont certainement nous accompagner. Nous allons prendre toutes les notes qu'ils pourraient juger utiles à nos travaux.

Vous pourriez peut-être persuader un de vos collègues.

M. Malhi (Bramalea-Gore-Malton): Un certain nombre de témoins ont proposé qu'un comité soit exclusivement chargé d'examiner le budget des dépenses. Avez-vous des commentaires à ajouter à leur proposition?

M. Franks: Je vais commencer parce que j'ai déjà lancé plusieurs pointes aux comités. L'avantage serait qu'un tel comité aurait clairement pour fonction d'examiner le budget des dépenses. Il est évident que les comités parlementaires, dans l'ensemble, n'ont pas fait du très bon travail pour ce qui est du budget des dépenses.

Le danger, c'est qu'on risque de susciter de nombreuses attentes. Il me semble que chaque fois qu'une réforme a visé les comités parlementaires, on a exagéré les résultats qu'elle pourrait donner, ce qui fait qu'il y a eu des déceptions.

Je n'ai rien contre l'idée d'un comité du budget, à la condition que les comités permanents qui examinent les ministères laissent de côté le budget des dépenses. Idéalement, l'examen des activités d'un ministère devrait englober le budget des dépenses, car celui-ci en dit long sur un ministère et sur les mesures de contrôle à adopter. A priori, donc, l'idée ne m'excite pas tellement.

M. Mallory: Je suis d'accord avec M. Franks. Après tout, nos comités permanents sont différents de leurs homologues britanniques. Les Britanniques avaient une espèce de comité chargé de l'examen des dépenses brutes dont relevaient des sous-comités qui se répartissaient les secteurs de dépenses. Mais ils n'ont pas, comme nous, de comités permanents s'occupant de secteurs de dépenses plus ou moins bien définis.

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Donc, les comités permanents s'acquittent en réalité des fonctions des sous-comités britanniques chargés d'examiner les budgets. L'analogie est différente parce que les Britanniques peuvent parfois nous apprendre des choses et que nous pouvons parfois leur en montrer. Ils ont rétabli des comités permanents du genre des nôtres il y a dix ans, et ils sont maintenant très fiers des résultats. Je ne pense pas qu'il nous serait utile de mettre à l'essai le modèle d'un important comité des budgets dont relèveraient des petits groupes de deux ou trois députés pour chaque secteur de dépenses, car il ne s'agirait pas là d'une amélioration par rapport à ce que nous avons déjà. Ce que nous avons n'est pas fameux, mais c'est mieux que rien et c'est la seule chose que nous ayons.

M. Lindquist: Je suis d'accord. Nous n'accomplirions aucun progrès, selon moi, en mettant tout entre les mains d'un comité qui aurait de vastes responsabilités. Toutefois, j'imagine qu'un comité ou un sous-comité pourrait être responsable de l'examen de la qualité des budgets des dépenses.

Cela pourrait concorder avec ma proposition. Si vous vouliez un genre différent de base d'information qui servirait de complément à ce qui existe déjà, et si vous aviez ces nouveaux indicateurs de rendement, vous voudriez que les comités permanents approfondissent les questions et les évaluent à l'aide de données solides, de bons outils de recherche et d'un soutien analytique.

Cependant, si vous souscrivez à une observation que j'ai faite dans mon exposé préliminaire et à l'approche adoptée par l'Alberta, qui consiste à laisser énormément de place à l'expérimentation dans la documentation fournie par les ministères opérationnels, alors quelles leçons tirer de ce que différents ministères ont fait? Vous en remettriez-vous tout simplement au gouvernement de l'heure et aux organismes centraux qui l'appuient? Je pense donc que certains députés pourraient avoir un rôle à jouer dans l'évaluation du budget des dépenses à cette étape de l'analyse, mais qu'il ne faudrait pas confondre tout cela avec l'idée d'exiger que les ministères et le gouvernement rendent des comptes dans des secteurs particuliers, ou de procéder à un examen triennal des programmes du genre de celui que MM. Franks et Thomas ont recommandé.

La présidente: Je vais me prévaloir de la prérogative de la présidence et utiliser les dix minutes qui restent pour m'attarder à une seule question.

Comme vous le savez, le Règlement a été modifié pour exiger précisément des comités qu'ils examinent les budgets des années subséquentes et qu'ils fassent des recommandations. Je crois que le défi consiste à les amener à s'intéresser à l'intégration de ce processus. Contrairement à M. Williams, je considère qu'il s'agit d'un processus intégré et que le budget des dépenses s'inscrit presque à la toute fin. Le comité peut en fait vérifier si le gouvernement a produit un budget des dépenses qu'il juge conforme à ce qui devrait être considéré comme des priorités en matière de politique.

J'ai siégé au cours de la législature précédente à un comité qui, exceptionnellement, n'était imbu d'aucun esprit de parti, le comité de l'environnement présidé par David MacDonald. Dans nos rapports au Parlement, nous avons échappé dans l'ensemble à la tendance qui consiste à respecter la discipline de parti. Je ne me souviens d'aucun rapport qui n'a pas fait l'unanimité, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il s'agissait de documents insipides. Comme députés de l'opposition, nous étions satisfaits, et les membres du gouvernement l'étaient eux aussi parce qu'ils réussissaient à faire avancer les dossiers voulus.

J'ai vécu une expérience analogue en ce qui concerne les lois lorsque je faisais partie de l'opposition, car nous avons à ce moment-là réussi à obtenir la collaboration de membres du parti ministériel pour que des amendements soient apportés à des projets de loi renvoyés à un comité dont je faisais partie.

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Il n'est pas dans l'intérêt du Parlement ni du public qu'il y ait entre le parti ministériel et le parti de l'opposition un mur que personne ne veut franchir. Je crois que c'est un peu ce que vous avez dit tous les trois.

Même si je trouvais que ce comité fonctionnait extrêmement bien et qu'il ne se souciait pas du tout de quel côté de la Chambre on venait, ce comité n'a jamais très bien réussi à faire valoir ses intérêts et à examiner les prévisions et les dépenses du gouvernement à la lumière de ce qu'il considérait être des priorités pour le gouvernement.

Comment franchir cet obstacle? Des rapports sont déposés, rangés sur une tablette, recouverts par la poussière, puis oubliés. Il me semble que si on commençait à faire un lien entre ce qui devrait être et ce qui est et que si on essayait d'influer sur la situation de manière à s'engager dans la direction souhaitée, on réussirait peut-être à intéresser davantage les parlementaires à tout le processus de la responsabilité financière et de l'influence. Je ne sais pas au juste comment on pourrait s'y prendre.

M. Mallory: Si vous me permettez d'intervenir, je dirais que c'est un problème qui se pose non seulement dans votre monde, mais aussi dans celui où j'ai vécu pendant longtemps. On peut vouloir accomplir une tâche principale ou une série de tâches, comme faire progresser une université et former une nouvelle promotion de diplômés, mais on finit par se laisser embarquer beaucoup plus qu'on l'aurait voulu dans une série de groupes de réflexion que quelqu'un met sur pied.

Les administrateurs aiment ces groupes de réflexion temporaires parce qu'ils montrent que les choses bougent. C'est le symbole même de toutes les grandes vertus, comme l'auto-examen et tout le reste.

C'est un monde qui est le même que le vôtre en un sens. Les comités parlementaires peuvent être tentés à l'occasion de se transformer en groupes de réflexion. Ils ne peuvent pas l'être tout le temps. La plus grande partie des documents qu'ils produisent accumulent en fait la poussière sur des rayons de bibliothèque. Il arrive parfois qu'ils suscitent une prise de conscience dans leur entourage, mais ce n'est pas souvent le cas.

Il est déjà assez difficile de faire prendre conscience de certaines choses au ministre. Si cela s'avère impossible, on peut alors essayer de faire prendre conscience au public, mais c'est encore plus difficile.

Le travail le plus utile d'un député au jour le jour consiste à veiller à ce que des lois soient adoptées et à se sortir d'embarras ou à mettre quelqu'un d'autre dans l'embarras, selon le cas. C'est un jeu auquel on se livre tous les jours à la Chambre. Le temps passe et c'est à cela que les députés occupent une bonne partie du peu de temps dont ils disposent.

Il n'est pas toujours facile de distraire leur attention de problèmes urgents qui les amènent parfois à passer une bonne partie de leur précieux temps à se demander si quelqu'un est allé à la réunion de tel ou tel comité ou va prendre la parole au moment d'un débat en particulier ou poser une certaine question. Il ne reste pas beaucoup de temps pour la réflexion et pour se demander ce qui devrait occuper un ministère ou un comité au cours des trois prochaines années.

Il n'y a pas tellement d'information qui pourrait aider un comité à le faire. Prenons la plupart des rapports portant sur le Parlement que j'ai examinés. Le rapport McGrath et d'autres encore disent tous les même choses. C'est ce que Lambert a dit lui aussi. C'est une question d'attitude. Comment amener les gens à changer d'attitude pour qu'ils fassent la chose à faire? C'est ce que nous considérons comme la chose à faire, pas ce qu'en pensent les whips.

Il n'est pas très facile d'y parvenir parce que les horizons sont différents pour chacun. Vous pourriez, comme députée, vous intéresser à un secteur de dépenses en particulier, envisager de vous attaquer à certaines questions que vous voudriez examiner et préciser dans un délai donné, mais vous devez aussi composer avec un horizon temporel sur lequel influent les prochaines élections et la date de la prorogation, sans oublier l'influence que tout cela aura sur les projets de loi à l'étude. Il y a toutes sortes d'horizons conflictuels, et il faut constamment faire des choix.

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Les ministres doivent faire des choix à un rythme qui effraierait la plupart des gens, mais le commun des mortels doit aussi faire des choix, individuellement et collectivement. Vous arriverez peut-être, individuellement, grâce à vos connaissances, à votre expérience ou à votre ascendant, à influencer la collectivité au sein de laquelle vous travaillez « disons un comité parlementaire » mais vous ne pourriez pas le faire si vous arriviez directement de l'extérieur en pensant tout connaître; il vous faudrait pour cela avoir acquis une connaissance graduelle de la situation, de la façon de s'en tirer.

Vous avez soulevé un point qui fait vraiment partie de la politique au jour le jour. Si vous siégez à un comité qui s'occupe de mesures législatives, comme députée de l'opposition, et aimeriez que certains changements soient apportés, vous n'obtiendrez pas ce que vous voulez si chaque membre du comité s'en remet à la discipline de son parti. Vous arriverez à obtenir des changements si vous pouvez exercer une certaine influence, obtenir une certaine cooptation, si vous voulez, de certains députés d'en face.

L'opposition est sournoise, mais utile. Vous pouvez accomplir énormément si vous savez comment vous y prendre.

Examinons la situation sous un autre éclairage. De nos jours, un comité sénatorial où les députés du parti ministériel ne sont pas majoritaires peut obtenir que des amendements importants soient apportés à un projet de loi, mais cela veut dire que la Chambre et le Sénat se renvoient ce projet de loi, et tout le monde s'offusque du temps perdu.

Dans le bon vieux temps, lorsque le Sénat avait l'habitude de procéder à une étude préalable « ce qu'il a cessé de faire à cause de l'esprit de parti « un comité sénatorial aurait pris un projet de loi qui figurait au Feuilleton à la Chambre » et qui venait probablement de franchir l'étape de la deuxième lecture « il en aurait fait une étude préalable et il aurait pensé aux moyens à prendre pour l'améliorer.» Au lieu d'attendre que le projet de loi parvienne jusqu'au Sénat, pour s'y attaquer et ensuite le renvoyer à la Chambre qui le rejettera et le renverra à nouveau, les représentants du Sénat qui appuyaient ces amendements entraient tranquillement en communication avec le cabinet du ministre.

Donc, lorsque le projet de loi parvenait à l'étape de l'étude en comité à la Chambre des communes, ce n'est pas l'opposition qui y proposait des amendements « car il n'aurait pas fallu que les journaux accusent qui que ce soit d'esprit de parti » mais bien le ministre comme s'il s'était agi de ses propres amendements. Tout cela, sans apparente partialité politique.

Le sectarisme politique est une bonne chose, car c'est ce qui fait fonctionner la machine, mais il est parfois important de le masquer et de faire semblant qu'il n'existe pas parce que c'est la façon dont les choses fonctionnent.

La présidente: Monsieur Franks.

M. Franks: Je ne vais commenter qu'un aspect de vos observations très utiles qui portent à réflexion. Il me semble que l'endroit où ce que nous appelons les comités permanents peuvent être le plus efficace n'est pas celui où se discutent les grandes orientations politiques « comme la question de savoir s'il devrait y avoir ou non un contrôle des armes à feu ou s'il devrait y avoir une refonte de l'assurance-chômage » mais à un niveau plus bas où le gouvernement n'a pas une politique que l'opposition pourrait rejeter ou vouloir rejeter. C'est pour cette raison que les rapports du Comité de l'environnement, et de bien d'autres comités au fil des ans, ont été aussi excellents. Le comité des affaires autochtones a lui aussi fait un travail superbe de temps à autre, tout comme le comité de l'agriculture, pour ne mentionner que ceux-là.

La présidente: Le Comité des droits de la personne également.

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M. Franks: C'est vrai. Cela nous ramène au budget des dépenses. Je ne vois pas comment un comité parlementaire qui serait impartial pourrait dire qu'il est tout à fait en désaccord sur le budget du gouvernement dans tel ou tel secteur, ou quelque chose du genre. Ce serait terriblement dommageable.

C'est à un niveau plus bas « là où il s'agirait de savoir si les dépenses prévues dans le cas d'un programme en particulier sont nécessaires ou si les objectifs énumérés sont pertinents » que les comités pourraient jouer un rôle extrêmement utile.

M. Lindquist: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je voudrais prendre un peu de recul et vous donner une vue d'ensemble plus vaste des points que votre question soulève.

Tout d'abord, il y a eu des écrits et de nombreuses réflexions dans le monde universitaire « nous ne faisons rien d'autre » sur la pertinence des recherches effectuées, surtout des recherches axées sur les politiques, et sur la question de savoir si elles ont une incidence sur quoi que ce soit. Je ne vous dirai pas à quelles conclusions nous en sommes arrivées. Oui, je vais vous le dire.

Il est ressorti de tout cela qu'il est très difficile de démontrer l'incidence de rapports particuliers. Un lien est rarement établi entre un rapport présenté et une décision prise. On en est arrivé à la conclusion qu'il y a une dynamique encore plus importante en ce sens que les idées finissent par mijoter, que des gens ayant des vues différentes en viennent à discuter ensemble.

Je conviens aussi de l'importance de réunir les gens pour qu'ils puissent discuter ensemble non pas de valeurs de base, car il risquerait alors d'y avoir un choc important des idées et très peu de progrès, mais plutôt des instruments à utiliser ou des moyens à prendre pour faire les choses différemment ou faire des choses qui prêtent moins à controverse, le terrain étant alors propice au progrès et à une meilleure compréhension des raisons pour lesquelles telle ou telle valeur nous tient à coeur.

Tout cela pour dire que vous devriez replacer dans un plus vaste contexte les travaux des comités en tenant compte non seulement de ce qu'ils font actuellement, mais aussi de ce qu'ils feraient s'ils adoptaient certaines des idées qui ont été mentionnées ici aujourd'hui, parce qu'il pourrait s'avérer difficile de juger du succès obtenu.

Je dois dire que j'ai été frappé aussi par ce que Ned Franks a dit à propos des transactions quotidiennes des députés qui leur laissent relativement peu d'occasions propices à la réflexion stratégique. On entend dire exactement la même chose non seulement dans le monde universitaire, mais aussi dans les ministères opérationnels et les organismes centraux. Les transactions prennent tout notre temps. Elles consistent, dans certains cas, à répondre à vos demandes. Je vous parle là d'organisations qui ont une capacité analytique beaucoup plus grande et une plus grande capacité, dirais-je, de prendre du recul pour réfléchir. Toutefois, nous vivons dans un monde qui évolue rapidement et il est très difficile de dominer la situation.

Qu'est-ce que tout cela veut dire?

Premièrement, je pense qu'il vous faut considérer les travaux de comités comme celui-ci et d'autres organisations, lorsque vous faites des recherches et donnez des exemples, comme un moyen d'approfondir vos connaissances personnelles de sorte que lorsque vous avez un moment pour réfléchir ou qu'une décision se présente, vous savez que le comité est là et que le gouvernement est réceptif. Certains travaux de défrichement ont déjà été faits et vous pouvez progresser rapidement. Vous aviez peut-être cru que le rapport de recherche rédigé il y a cinq ans n'avait eu aucune incidence, mais il aura permis en fait d'établir des fondements.

Deuxièmement, laissons de côté les connaissances personnelles pour l'instant et supposons que l'enjeu consiste également à sensibiliser un groupe plus nombreux d'individus, pas seulement les députés d'un autre parti ou les deux Chambres, mais aussi des gens de l'extérieur du Parlement à certaines des questions afin que lorsqu'une fenêtre s'ouvrira vous puissiez compter sur des gens qui pourront se prononcer d'une manière plus intelligente.

Enfin, et ce que je vais dire a trait au bagage personnel de connaissances, mais devrait aussi vous inciter tous à envisager les choses à moyen ou plus long terme... J'établirais un parallèle avec les avocats ou les médecins qui tôt dans leur éducation ont délaissé les sciences humaines pour se demander plus tard pourquoi ils ne s'y étaient pas intéressés davantage et n'avaient pas lu plus de romans ou travaillé davantage certaines autres matières. Lorsque quelqu'un devient ministre, il regrette souvent de ne pas avoir utilisé le temps dont il disposait comme député de l'opposition pour apprendre à mieux connaître les différents portefeuilles auxquels il va probablement être affecté.

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L'Institut d'administration publique du Canada a publié un livre intitulé Taking Power qui examine ces transitions et les raisons pour lesquelles bien des députés ont l'impression, tout comme bon nombre de leurs adjoints, de ne pas être prêts à gouverner. C'est là un autre avantage indirect que je vois dans ce genre de travaux, qu'ils vous prépareront tous mieux, ainsi que vos partis, en prévision du moment où vous devrez vous intéresser non seulement à la politique, mais aussi à la gestion.

La présidente: Je suggère que nous nous arrêtions ici et que nous revenions à nos affaires courantes, qui ne devraient pas prendre trop de temps je pense. Je crois savoir que des représentants du Conseil du Trésor aimeraient pouvoir discuter pendant une demi-heure avec nos témoins avant l'heure du lunch. Est-ce vrai?

Je suppose que je dois vous compter parmi eux, Monsieur Hopwood. Si je l'avais su, j'aurais demandé au Conseil du Trésor de payer leur transport jusqu'ici puisque votre budget est beaucoup plus gros que le nôtre.

Seriez-vous prêts à payer le lunch? Nous allons vous prêter nos témoins si... Est-ce le genre de négociations qui se font au sein de la bureaucratie britannique au moment de la préparation du budget des dépenses?

Merci beaucoup. Nous allons vous revoir pour le lunch dans la salle à dîner parlementaire de l'édifice du Centre dans une demi-heure à peu près.

Nous avons une très petite question à régler, c'est-à-dire un changement à apporter aux formalités de vote. Je crois que M. Williams a discuté de la question avec le Conseil du Trésor.

J'en ai parlé avec lui et je proposerais que nous fassions rapport au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour lui dire que nous ne nous opposons pas à ce changement pour le budget des dépenses de l'an prochain, mais en lui précisant, cependant, que le comité a entamé un examen en profondeur et qu'il pourrait vouloir faire d'autres recommandations lorsqu'il l'aura terminé. Est-ce que j'ai tout dit ou y a-t-il autre chose que vous voudriez ajouter?

M. Williams: Oui, merci, madame la présidente.

L'idée du Conseil du Trésor est d'amalgamer les dépenses en capital secondaires, qui étaient distinctes, avec les dépenses de fonctionnement. J'ai déjà indiqué, et je le répète, que je crains qu'il n'en soit pas rendu compte comme il le faudrait devant le Parlement.

Je ne m'opposerai pas à ce changement. Nous allons l'autoriser à la condition « et je dis bien à la condition » qu'il s'agisse d'une mesure provisoire; il devrait favoriser l'efficacité et faire taire le cynisme de ceux qui amalgament ces chiffres; ils les amalgament d'une façon pour ensuite les désassembler et les assembler à nouveau pour le Parlement.

À une époque où on recherche tant l'efficacité, je suis prêt à acquiescer à la demande à la condition qu'il s'agisse d'une situation temporaire, qu'au moment où nous discuterons du nouveau processus, nous n'ayons pas à partir de ce niveau plus bas de responsabilité; nous reconnaissons qu'il s'agit d'une mesure temporaire destinée à favoriser l'efficacité à court terme et que le Parlement doit examiner... Je le répète, je pense que le Parlement devrait exiger davantage de comptes et exercer un meilleur contrôle sur les fonds.

Je suis prêt à donner mon approbation pour le moment et à autoriser le Conseil du Trésor à faire ce qu'il nous demande, mais à la condition que nous en revenions au même niveau de responsabilité que nous avons aujourd'hui et non pas au niveau plus bas où nous allons nous retrouver parce que nous aurons accepté cette mesure.

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La présidente: Voulez-vous laisser à notre personnel le soin de rédiger le message?

Je pense que nous voulons tout simplement dire que le président du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre tient à faire savoir au président du Conseil du Trésor que nous ne voyons aucune objection à ce changement dans les formalités de vote, sous réserve d'un examen plus approfondi par le comité du point de vue de la responsabilité.

Est-ce que cela vous convient?

M. Williams: Oui, l'attaché de recherche peut rédiger une lettre en ce sens et nous examinerons sa belle prose.

La présidente: Je pense que nous devons faire rapport au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, et la présidence du comité fera ce qu'il faut après cela.

Y a-t-il d'autres questions? Alors, la séance est levée.

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