[Enregistrement électronique]
Le mardi 2 mai 1995
[Traduction]
Le président: Bernie Collins a fait savoir qu'il serait en retard et je ne sais pas où sont les réformistes. Ils finiront bien par arriver.
Jack, permettez-moi de souhaiter la bienvenue au président de la Fédération canadienne de l'agriculture. Comme votre mémoire n'est pas dans les deux langues officielles, plutôt que de le distribuer nous vous écouterons en parler pour ne pas désavantager M. Chrétien.
M. Jack Wilkinson (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup. La version traduite devrait arriver avant que nous n'ayons fini. Nous avons témoigné quatre fois au cours des 36 dernières heures et nous n'avons pas pu faire tout traduire à temps.
Comme nous avons témoigné devant votre comité plénier ce matin, je crois que nous pouvons passer assez rapidement aux questions relatives au transport et nous abstenir de refaire l'historique de la Fédération canadienne de l'agriculture. Notre mémoire contient des commentaires sur la protection des revenus, les mesures d'adaptation, etc., car nous pensions que vous vouliez parler des conséquences potentielles de ces changements apportés à la politique des transports pour l'avenir de notre industrie. C'est pour cette raison que nous avons ajouté ces points supplémentaires. Nous nous ferons un plaisir d'en discuter, si vous le voulez.
Notre mémoire n'est pas très long car comme vous le savez, l'histoire des rapports de la FCA avec la politique des transports est relativement courte. C'est dû aux dissensions créées par la nature même de cette politique des transports et à la participation réclamée à nos membres. Les avis à la FCA sont partagés et nous n'avions pas jusqu'à présent arrêté de position. Mais puisque la décision a été prise par le gouvernement, nos membres nous ont demandé de faire certaines suggestions pour défendre leurs intérêts et répondre à leurs besoins.
Les modifications envisagées aboutiront nécessairement à des changements radicaux. Les données pour le calcul des coûts et du revenu net changeront pour tous les agriculteurs et il faudra qu'ils y trouvent des solutions. Comme vous le savez, cela variera d'une façon considérable selon que vous serez exploitant dans l'une ou l'autre région des Prairies. Se retrouver dans une région où la ligne de chemin de fer sera désaffectée aura plus d'un impact au niveau du coût des transports.
Comme nous en avons discuté aussi ce matin, il reste encore à déterminer comment ces coûts seront répartis dans tout le système, quels avantages seront transférés des propriétaires aux exploitants métayers et sur la base de quelle entente.
Nous savons déjà que pour de nombreuses exploitations, surtout à la frontière entre la Saskatchewan et le Manitoba, le total de ces coûts pourrait se monter à 25 000$. Bien évidemment, cela dépend des récoltes et du volume transporté. Mais venant s'ajouter à l'augmentation du prix des engrais et d'autres coûts fixes cette année, les conséquences seront importantes.
Nous avons discuté un peu plus tôt ce matin de la déclaration d'objectifs du ministre, des objectifs d'exportation, dont de transport du grain, et du groupe de travail qui réfléchit à ces questions depuis le mois de mai de l'an dernier. Si on considère certains des objectifs que le gouvernement et le Canada en général s'étaient fixés en termes d'exportation et de volume d'exportation, il faut se demander si ces changements radicaux ne les remettent pas en question.
Il est évident que nous nous intéressons vivement aux résultats des discussions bilatérales sur le blé avec les États-Unis qui seront déterminants sur le plan des débouchés. La géographique deviendra un facteur encore plus crucial qu'auparavant. Pour être juste, il faut cependant reconnaître que la possibilité de vendre leurs produits aux États-Unis intéressera tout particulièrement les agriculteurs du Manitoba. Il semble que compte tenu des changements et de l'état de la voie maritime, il continuera à être plus onéreux d'expédier les produits par ce système. De plus en plus de produits étant exportés à partir de côte ouest, le problème s'amplifie pour eux.
Le fonds d'adaptation de 300 millions de dollars n'en prend que plus d'importance. Je parle des points cités par le ministre qui figurent sur la liste. Je sais qu'il est question d'élargir le champ d'application de ces 300 millions de dollars. Encore une fois, nous craignons que la géographie ne vienne bouleverser tout ce bel agencement. L'accès à ce fonds pour financer l'industrie des aliments déshydratés, l'infrasctructure routière, etc. variera considérablement d'une province à l'autre.
Keystone Agricultural Producers Inc., un des membres de notre organisation au Manitoba, s'inquiète tout particulièrement que dans les nouvelles méthodes de paiement on ne parle pas des coopératives qui risquent de voir ce fonds d'adaptation de 300 millions de dollars leur passer sous le nez. Ils ont l'impression que compte tenu des critères jusqu'à présent identifiés, le Manitoba se retrouvera avec moins que rien.
Ils ont aussi l'impression que les agriculteurs du Manitoba regroupés en coopératives seront pénalisés sans aucune chance véritable d'indemnisation.
Il faut ensuite se demander si tous ces changements apportés à la politique des transports aboutiront vraiment au cours des prochains mois à un système de transport ferroviaire plus efficace et moins onéreux. L'abandon d'un certain nombre d'embranchements aura des conséquences négatives, sans parler des interdictions d'abandon jusqu'ici respectées qui seront pratiquement levées.
Est-ce que cette réduction des coûts pour les chemins de fer se traduira par une réduction des tarifs pour les agriculteurs? Il est évident qu'il y aura une augmentation du coût. Il est très difficile de faire des prévisions.
J'étais en Saskatchewan il y a trois semaines. L'arrivée du printemps a été particulièrement rude et c'est tout juste si les routes peuvent supporter la charge d'une camionnette vide ou d'une voiture particulière. Sur les routes secondaires, la charge maximum est de 6 000 livres. Pendant six semaines, pratiquement rien ne pourra être transporté. Ça pourrait devenir un très gros problème... comment assurer le transport de ces produits suffisamment à l'avance pour respecter les délais de livraison et d'expédition.
Est-ce que le système de terminaux, sur la côte et à certains points à l'intérieur, aura la capacité d'accueillir ces produits pour assurer la livraison douze mois sur douze? C'est ce qui se fait et ce qui est tenu pour acquis depuis des années.
Le président: Pourriez-vous ralentir pour l'interprète?
M. Wilkinson: Oui, je m'excuse.
Il va y avoir des changements considérables même sur des points auxquels on n'a pas beaucoup pensé. Au niveau de la manutention, il y aura d'énormes différences.
Nous avons quelques suggestions à faire. Certaines d'entre elles sont tirées du mémoire des regroupements des Prairies concernant le plafonnement des tarifs marchandises pour les cinq prochaines année prévu par la nouvelle loi. Il faudrait maintenir ce plafond à la fin de cette période à moins de démontrer que ce n'est plus nécessaire. Selon nous et selon certains de nos membres, il ne serait peut-être pas opportun qu'il soit instauré de manière définitive. Il est plus logique d'avoir l'option de renouveler son maintien si nécessaire ou de modifier la politique plus tard. À notre avis, cette modification est indispensable.
Il faudrait également modifier l'article 181.12(2) afin de supprimer la spécification du nombre d'années durant lesquelles le plafond des tarifs marchandises sera appliqué. Il faudrait aussi inclure à l'examen de 1999 l'obligation de vérifier si les agriculteurs ont bénéficié de façon égale des avantages ou des économies. Cet examen devrait également inclure une révision du plafond des tarifs marchandises pour déterminer la nécessité de son maintien ou non.
En outre, il faudrait supprimer l'article 181.19 qui abroge les dispositions du projet de loi C-76 relatives au plafond des tarifs marchandises.
J'ai déjà parlé des mesures relatives à l'abandon des lignes de chemin de fer.
Il y a ensuite l'assujettissement du transport des grains à la Loi nationale sur les transports. Ce changement ne devrait être effectué que s'il est prouvé que le transfert à la LNT permettra vraiment de protéger les producteurs captifs de céréales et d'oléagineux. C'est encore une fois la même chose, nous voulons pouvoir vérifier si ce qui était prévu s'est matérialisé, avec la possibilité d'apporter des chamgements si des changements s'avèrent nécessaires.
J'ai parlé du fonds d'adaptation de 300 millions de dollars et de ses répercussions sur les regroupements. Certains ont suggéré que ces fonds soient versés par l'intermédiaire d'instruments de soutien du revenu comme le RARB ou le CSRN.
Cela nous inquiète car ces programmes connaissent de tels soubresauts - comme nous l'avons signalé ce matin - que certains de nos producteurs s'en retirent. En particulier pour certains groupements sectoriels où l'avis de retrait a été donné, se servir de ces programmes pour effectuer les paiements pourrait poser un problème. Nous suggérons de ne pas passer par ces programmes. Cependant, il faudrait sans doute créer un autre mécanisme pour un nombre assez important d'agriculteurs que vous ne pourrez plus joindre par le biais de ces programmes. Quel que soit le mécanisme adopté, il faudrait qu'il soit le même pour tous les agriculteurs, qu'il s'agisse de l'accès au fonds d'adaptation ou à d'autres allocations.
Comme nous l'avons déjà suggéré, s'ajoute à cela certains problèmes à beaucoup plus long terme. Il va y avoir des changements au niveau des coûts. Il va être très difficile d'analyser l'impact de ces changements importants sur les programmes de protection du revenu. Est-ce que, avec cette diminution du revenu net pratiquement inéluctable...? Je sais que tout cela dépend des prévisions de prix de vente.
La participation diminuant, il est possible que les prestations diminuent aussi. Il y a l'exemple du compte de stabilisation du revenu net. Quand la structure et la rentabilité d'une exploitation agricole changent, la hauteur de ces contributions change également. Nous craignons également que les contributions et l'indexation de la moyenne du prix mobile de la formule du RARB n'entraînent une réduction du niveau de soutien dans les programmes sectoriels.
Nous avons d'autres commentaires sur les changements plus généraux auxquels nous avons fait allusion. Je crois que le mieux pour le moment serait que je m'arrête et que je réponde à vos questions puis, s'il reste du temps, que j'aborde tout autre sujet qui vous conviendra, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Wilkinson. Monsieur Chrétien.
[Français]
M. Chrétien (Frontenac): Pour un gars qui s'est couché tard et qui a beaucoup travaillé depuis ce matin, vous n'avez pas l'air trop fatigué. Il faut croire que vous êtes un homme vigoureux et dans la bonne trentaine.
Expliquez-moi, en termes simples et concrets, ce qui arriverait, par exemple, à trois producteurs céréaliers... Prenons-en un pour chacune des provinces du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta. Imaginons notre producteur céréalier à 50 km d'une ligne de chemin de fer. Il produit de l'orge ou de l'avoine qu'il doit transporter à l'aide de camions à 50 km pour l'acheminer au port de Vancouver afin qu'il soit expédié outre-mer.
Dans chacun de ces trois cas, quelle serait la perte de revenu, considérant qu'ils ont chacun une ferme de 1 000 acres? J'aimerais savoir, afin de mieux comprendre, quelle serait la contribution de chacun de ces trois producteurs à la diminution du déficit fédéral. Pouvez-vous répondre à cela?
[Traduction]
M. Wilkinson: C'est une question difficile à analyser avec un degré absolu de certitude. Je crois qu'il est raisonnable de penser que les gens se demandent combien de dollars en moins ils auront l'année prochaine. L'inconnu dans cette équation, c'est l'impact des conditions sur le marché et de l'offre et de la demande.
Il est évident que de l'Alberta au Manitoba en passant par la Saskatchewan, le coût supplémentaire de transport augmente de manière considérable. Par exemple, beaucoup pensent que la croissance de la demande pour le boeuf et le porc permettra aux agriculteurs de l'Alberta de compenser une partie de leurs pertes.
Il reste que les variations sont très grandes que vous vous trouviez dans le nord de l'Alberta du côté du district de Peace River où les coûts de transport sont considérables ou que vous vous trouviez plus près des parcs d'embouche et de la frontière américaine dans le sud.
Arrivé au milieu de la Saskatchewan, on peut penser... D'après certains agriculteurs, pour des surfaces cultivées de 1 000 acres, pour reprendre votre exemple, il faut compter de 10 000$ à 15 000$ de plus en transport. Il est évident que cela dépend du genre de récolte. Vous avez cité comme exemple l'orge et l'avoine, mais cela dépend. Le rendement à l'acre de la lentille ou du canola est beaucoup moins important. À l'acre, le coût de transport est inférieur à celui d'autres céréales.
Au Manitoba, le coût du transport dans certaines régions peut monter jusqu'à 30$ la tonne. Il y a probablement des députés du Manitoba qui pourraient vous donner une réponse plus précise, mais d'après mes conversations cela peut aller jusque-là. Il y a des régions à très forte production où le coût de transport supplémentaire pourait monter jusqu'à 45$ l'acre selon le produit cultivé - dans certaines régions on arrive à produire presque 2 tonnes d'orge à l'acre, et le coût du transport est en conséquence.
Il y a beaucoup de spéculation au sujet de l'expansion de l'industrie fourragère en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba. Il n'y a pas eu beaucoup de changements dans ce sens au cours des dernières années. Il est possible que la concurrence au niveau des céréales fourragères ait aussi un impact. Pour le moment au Manitoba et en Saskatchewan, on ne fait qu'en parler mais nous ne savons pas ce qui se passera au cours des deux ou trois prochaines années.
Le président: Monsieur Chrétien, je me demande s'il serait possible à notre personnel de recherche de donner substance à votre question en trouvant les chiffres pour ces trois agriculteurs hypothétiques. Est-ce que ce serait possible? Agriculture Canada ou Transports Canada ont peut-être ce genre de renseignements. Nous verrons si nous pouvons trouver des chiffres.
[Français]
M. Chrétien: Vous avez touché un point sensible, monsieur Wilkinson. Vous avez dit que certains producteurs céréaliers pourraient se tourner vers une diversification de leur activité agricole. C'est justement là un point très sensible au Québec.
L'Union des producteurs agricoles et moi-même croyons que cela va entraîner une importante diversification dans l'Ouest. Cette diversification pourrait venir concurrencer les producteurs agricoles québécois et ontariens de façon déloyale, compte tenu du fait que le gouvernement donnera 1,6 milliard de dollars non imposables aux producteurs céréaliers.
Vous avez parlé des 300 millions de dollars du fonds d'adaptation et du milliard de dollars qui pourrait servir de garantie pour des prêts à l'exportation. Croyez-vous que la diversification va prendre de l'ampleur à un point tel que cela pourrait mettre en péril la production actuelle au Québec et en Ontario?
[Traduction]
M. Wilkinson: Nous sommes tout à fait au courant à la FCA de la position du Québec et de l'Ontario, des craintes de l'industrie du bétail et des ramifications possibles. Je pense que vous devez savoir qu'une partie de la production porcine du Manitoba est expédiée au Québec pour être transformée. D'après nous, c'est le montant de la somme envisagée qui déterminera l'universalisation ou la régionalisation des indemnités.
Quand il a été question de 7 milliards de dollars - ou de 5 milliards, cela dépendait de son interlocuteur - il était évident que l'UPA a exprimé beaucoup plus d'inquiétude pour son secteur du bétail que quand il n'était question que de 1,6 milliard de dollars.
Je crois qu'il est extrêmement difficile pour le moment de mesurer le transfert possible de production de bétail vers le sud et vers l'est. Il est donc extrêmement difficile de dire s'il y aura un impact négatif d'un degré conséquent sur l'industrie du bétail tant que nous ne connaîtrons pas la destination de ce produit. La consommation de porc connaît une forte croissance dans les pays du littoral pacifique, et il est possible qu'une grande partie de ces produits soit originaire de l'ouest ou du sud avec très peu de l'est. C'est d'après moi un problème commercial de plus parmi les nombreux qu'il nous faut régler avec les États-Unis.
Encore une fois, ce matin, au Comité de l'agriculture, nous avons discuté du genre d'accès qui sera garanti aux produits agricoles canadiens et américains. Si cette croissance a vraiment lieu et que le marché initial est les États-Unis, en cas de fermeture de la fermeture de la frontière il est raisonnable de supposer qu'à court terme pour le moins il y aura un mouvement vers l'est. J'estime simplement qu'il est extrêmement difficile de prédire avec une certitude quelconque la destination de ce bétail. Il est clair que certains des marchés américains sont plus proches que le Québec et l'Ontario.
Le président: À ce sujet, est-il possible que cette réduction du différentiel de coût des grains de provende dans l'ouest ait un impact sur l'industrie du bétail dans d'autres régions du Canada? Si je prends l'Île-du-Prince-Édouard par exemple, Jack, avec la perte de l'aide au transport des céréales fourragères combinée au changement apporté à la LTGO, j'ai un avantage supplémentaire de 48$ la tonne pour l'orge par rapport à un agriculteur du Manitoba. Jake sera gagnant sur tous les tableaux; ses céréales fourragères lui coûteront moins cher, ce qui lui permettra de produire de la viande moins chère.
M. Wilkinson: Suivant la solution apportée à certaines de ces questions, les retombées sont claires. Elles peuvent être considérables. Nous ne présumons pas par exemple, qu'avec l'ACTF dans les Maritimes, nous aurons toujours le statu quo dans six mois. Si c'était le cas, il y aurait très peu d'industries fourragères et des quantités de denrées.
Avec les modifications à la LTGO et l'ACTF, il va y avoir des retombées régionales considérables si l'on ne s'occupe pas en même temps de la structure financière du transport des céréales. Si on ne le fait pas, il va y avoir des changements énormes.
Avec les pratiques culturales utilisées, on ne peut pas faire n'importe quel changement dans la production des Prairies. D'après les estimations, notre production de canola par exemple est à peu près plafonnée. Compte tenu de la rotation en raison des maladies et de toutes sortes d'autres choses, on ne peut pas, et on ne veut pas d'ailleurs abandonner la production de céréales. La question est de savoir quelle quantité sert à alimenter les minoteries, les fabriques de pâte et l'industrie fourragère.
Il est clair et évident qu'il va y avoir des changements importants. Ce que l'on peut peut-être entrevoir pour les Maritimes, c'est l'arrivée par bateau de maïs et d'orge d'autres provenances, qui serait le seul moyen de sauver l'industrie fourragère.
C'est la même chose que pour l'évolution des coûts de production au niveau régional par rapport à ce qu'ils étaient jadis. Plus cette pression va s'intensifier sur les organisations de production et les agriculteurs, plus il va y avoir des retombées négatives sur les régions reculées les plus éloignées des zones de consommation, avec des coûts d'acheminement élevés et une faible population à desservir. L'agriculture de l'avenir sera très différente de celle que nous avons connue dans le passé. Selon les mesures qu'on prendra au cours des années à venir, le choc sera plus ou moins dur.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Je voudrais consacrer mon intervention aux 300 millions de dollars et au réajustement du dispositif qui impliquerait la voie maritime dans le financement d'ensemble, car cette question me concerne directement en tant que représentante du Manitoba. C'est une question qui concerne non seulement le Manitoba, mais la voie maritime et l'est de la Saskatchewan.
J'estime profondément qu'avec un régime déréglementé des transports, toutes les régions du pays doivent être traitées équitablement. Toutefois, je crois que quand on utilise des modèles comme le système de paiement des producteurs, on n'a pas à examiner tous les aspects de la question.
Il y a par exemple la position du Manitoba. Pendant des années, le Manitoba a assuré un interfinancement d'une foule d'embranchements du nord de l'Alberta et du nord de la Saskatchewan. Je pense qu'il faut en tenir compte quand on examine les ajustements de ce financement regroupé intégrant la voie maritime.
Il faut aussi que nous soyons absolument certains - et j'aimerais avoir votre point de vue à ce sujet - du point de mise en commun. Si on le déplace de Scott, dans la Saskatchewan, pour réduire la zone céréalière, cela a des conséquences désastreuses sur la voie maritime car elle a besoin de tout le grain qui y transite actuellement pour rester viable. J'aimerais donc savoir votre position à ce sujet ainsi que sur l'avenir de la voie maritime.
Il y a aussi Prince Rupert. Je crois que les producteurs du Manitoba et de la Saskatchewan financent le transport du grain sur 140 milles jusqu'à Prince Rupert; le coût est assumé par l'ensemble du système. Si nous évoluons vers un régime déréglementé, il faut justifier d'une façon quelconque ces 140 milles supplémentaires à destination de Prince Rupert et non plus de Vancouver. J'aimerais aussi avoir votre avis à ce sujet.
J'ai encore une question à vous poser, Jack, au sujet de la proposition de la Commission canadienne du blé. Avez-vous eu l'occasion de l'examiner? Qu'en pensent vos adhérents?
M. Wilkinson: Vous m'avez posé beaucoup de questions auxquelles je ne pourrai probablement pas vous donner les réponses que vous souhaitez.
Nous n'avons pas encore examiné la proposition de la Commission canadienne du blé, mais nous allons certainement le faire.
Pour ce qui de la question de la mise en commun et de diverses autres remarques que vous avez faites, les gens du groupe Keystone sont très inquiets car ils pensent qu'on n'a pas donné tout le poids voulu aux questions qu'ils ont soulevées. On en revient à cette partie de bras de fer des gouvernements provinciaux. Avec Keystone, on a l'impression que les producteurs du Manitoba se demandent si le gouvernement fédéral va continuer à faire pression pour maintenir un certain degré de mise en commun maintenant qu'on a mis en place des mesures de compensation. Ou au contraire, va-t-il, sous l'effet des pressions extraordinaires de l'Alberta, par exemple, battre en retraite sur un certain nombre de ces points et laisser le Manitoba devenir de moins en moins compétitif? Pour eux, il est très important que les 300 millions servent à des mesures d'adaptation.
La voie maritime a de graves difficultés pour toutes sortes de raisons, notamment les quantités de grain à transporter. Jusqu'à ces dernières années, le trafic en vrac sur la voie maritime a diminué. Ce n'est que ces deux dernières années qu'il y a eu une reprise. À long terme, le coût d'utilisation de cette voie maritime est prohibitif en raison des travaux d'amélioration des écluses, de l'emplacement des marchés céréaliers et du coût de transport sur cette voie maritime.
Nous connaissons bien ces problèmes et nous avons essayé d'en tenir dûment compte dans nos entretiens avec le gouvernement fédéral de façon à faire en sorte de ne pas privilégier par exemple les Prairies aux dépens des autres régions.
Par exemple, pour l'ACTF, après la répartition des ressources dont nous avons parlé, on a proposé - à condition de ne pas empiéter sur ce qui se faisait dans les autres provinces - une certaine souplesse d'utilisation de ces ressources pour compenser les divers préjudices subis selon qu'on était en Colombie-Britannique, à Terre-Neuve, dans le nord de l'Ontario ou au Québec. Je pense qu'il va falloir proposer cette souplesse dans une certaine mesure car les préjudices vont varier considérablement selon qu'on sera sur un embranchement ou sur une grande ligne et selon le dispositif de transport par route dont on disposera. Je pense qu'on n'ira pas bien loin avec 300 millions de dollars. C'est vraiment peu.
Il y a aussi toute la question de la mise en commun par la Commission du blé pour transporter les produits du Manitoba aux États-Unis, de la priorité qu'on va lui donner et aussi de la compensation pour les frais supplémentaires et le manque d'accès à Vancouver.
J'aimerais être plus précis, mais je suis désolé.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): Bienvenue, Jack. Je ne dirai pas que vous n'avez jamais rien fait. Ne vous inquiétez pas.
Nous avons toujours tendance à nous retrouver dans ce genre de pétrin quand nous pourrions vraiment nous en passer. Nous avons maintenant la remise en état des transports. Je viens de finir de lire le discours des Japonais au Conseil canadien du canola: je n'en reviens pas de constater que nous ne pouvons pas répondre à leur demande. Ensuite, je constate que la Commission du blé n'arrive pas à avoir suffisamment d'orge fourragère pour les marchés japonais. J'apprends aujourd'hui que les fourragers de l'Alberta viennent chercher de l'orge dans le sud-ouest du Manitoba. La concurrence est forte.
Pourquoi nous trouvons-nous dans de tels pétrins? Je sais bien qu'il faut diversifier, qu'il faut augmenter la production de boeuf. Nous n'avons pas assez d'orge pour les marchés disponibles. Le prix a l'air correct. Nous pourrions transporter des quantités énormes de canola. Que faisons-nous? Répondez-moi, Jack.
M. Wilkinson: Vous ne pensez tout de même pas avoir la réponse à toutes ce questions aujourd'hui.
M. Hoeppner: Il faut commencer.
M. Wilkinson: Certes, mais je pense que pour le canola c'est assez évident. Si nous ne trouvons pas une solution à ces problèmes de maladie et de sensibilité à la chaleur, nous n'allons pas pouvoir augmenter les surfaces cultivées.
Je crois vraiment, par exemple, que ce n'est pas nécessairement dans les Prairies qu'on va augmenter les surfaces cultivées en canola. On pourra les agrandir par exemple dans les Maritimes, et dans le nord de l'Ontario et du Québec, car leur climat plus frais est plus favorable.
Si nous ne réglons pas les questions de sélection et et de variété pour surmonter le problème de la disclaritine et de la peste noire, je ne crois pas que nous pourrons répondre à la demande de canola au Canada étant donné ces problèmes de maladie et de rotation.
Pour ce qui est de l'orge, le prix est peut-être raisonnable cette année, mais les cours ont été très bas ces dernières années. Les agriculteurs perdaient plusieurs dollars par tonne. Je ne peux pas faire pousser de l'orge à 70$ la tonne. C'est pourtant le genre de prix qu'on payait aux producteurs. Il y a eu une reprise du marché, mais il faut quand même faire des précisions. Si le canola se vend 400$ la tonne contre 70$ pour l'orge, il est évident que les agriculteurs vont faire du canola.
Les pois et les lentilles donnent aussi de bons résultats. Si nous ne payons pas l'orge, nous allons avoir de sérieux problèmes. Nous avons peut-être le dos au mur. Encore une fois, s'il y a la concurrence au niveau des prix dont vous parlez, il y aura peut-être très peu de répercussions dans certaines provinces au niveau de la perte financière pour le transport de l'orge.
M. Hoeppner: L'avantage de cet orge bon marché, c'est que cela nous a permis de nous diversifier et de faire beaucoup plus de boeuf, ce qui était vraiment nécessaire. Aujourd'hui, il faudrait encore augmenter cette production, mais nous commençons à avoir de l'orge qui coûte plus cher. C'est ce qui s'est passé en 1974 quand nous avons...
M. Wilkinson: Je sais, mais nous avons en Alberta 11 producteurs qui produisent 25 p. 100 du boeuf. Évidemment, ils ne produisent pas tout leur orge. C'est bien gentil de dire qu'il faut se diversifier et faire du bétail et du porc, de la valeur ajoutée, etc. Mais si l'on produit l'orge dans une exploitation et que les éleveurs de bétail comptent sur des céréales fourragères bon marché... On n'a pas le genre de système intégré où l'on cultive ses propres céréales fourragères pour alimenter le bétail qu'on élève, et qui permet de regagner sur la vente des porcs ou du boeuf ce que l'on perd sur l'orge.
Les gens qui cultivent des céréales pour alimenter le bétail doivent gagner suffisamment d'argent, sinon ils font tout ce qu'ils peuvent pour changer de culture. On l'a déjà vu dans le passé. On verra encore cela au Manitoba, par exemple, où des tas d'agriculteurs envisagent de réduire ou même de supprimer leur culture d'orge ou d'autres récoltes qui rapportent peu. Ils les abandonnent. Ils répètent année après année qu'ils n'ont pas les moyens de cultiver ces céréales. Peut-être qu'avec la concurrence, l'argent va revenir, mais cela n'a pas été le cas ces dernières années.
M. Hoeppner: J'ai l'impression que nous avons des excédents parce que nous n'avons pas un réseau de transport nous permettant d'amener ces denrées aux destinations où il y a une demande. Nous avons donc une accumulation. Il y a eu deux grèves dans l'industrie du canola. Tout cela fait mal.
En tant que dirigeant agricole, j'aimerais bien que vous puissiez organiser ces groupes d'agriculteurs pour éviter que ce genre de chose ne se reproduise à chaque fois que nous en sommes à une étape critique de l'histoire de notre agriculture.
M. Wilkinson: Bien franchement, monsieur, croyez-vous que les agriculteurs n'ont pas demandé maintes et maintes fois au gouvernement fédéral d'essayer de régler le problème des transports? Nous sommes profondément convaincus que les projections du ministre fédéral concernant le transport de céréales par la côte ouest sont totalement irréalistes si on ne règle pas une foule de questions liées au transport.
Les délais de rotation, les terminaux sur la côte ouest, les heures de travail sur la côte ouest, certaines des conventions qui ont été signées... Nous ne sommes pas antisyndicalistes, nous ne l'avons jamais été. Dans l'ensemble, dans le monde agricole, nous sommes pour une juste rémunération du temps et du travail.
Il y a des situations absurdes dans le domaine des transports qui limitent toujours les quantités qu'on peut déplacer. C'est un fait, on l'a dit et répété. Les agriculteurs n'y peuvent pas grand-chose tant que les gouvernements ne se décident pas à intervenir sur ces problèmes auxquels nous sommes confrontés depuis des années.
J'espère que ces pressions vont contribuer à mobiliser encore plus les agriculteurs et les politiciens pour résoudre un cerain nombre de ces problèmes de transport. J'espère qu'on pourra le faire sans un affrontement entre syndicalistes et agriculteurs. J'espère qu'on pourra le faire grâce à des négociations raisonnables, qu'on pourra augmenter le nombre d'heures de transport par jour pour atteindre les objectifs.
M. Hoeppner: C'est exactement ce que j'attendais de vous. Je ne voulais pas le dire à votre place, mais je crois que vous avez parfaitement raison. En tant que réformiste, je ne peux pas faire basculer tout seul le gouvernement. J'ai besoin de votre aide, comme bien d'autres députés. Le gouvernement est un animal étrange. Vous savez ce qui s'est passé pour le transport des céréales... ou la répartition des wagons. Nous nous mettons tous d'accord sur quelque chose, mais on ne le fait jamais. Je suis heureux de vous entendre et j'espère que vous direz la même chose aux membres de votre organisation.
M. Collins (Souris - Moose Mountain): Monsieur le président, je suis heureux que vous ayez relevé la question du plafonnement, car je crois que c'est très important. Il n'y a pas de raison de changer cela. Si ça fonctionne, c'est qu'il y a une bonne raison à cela... supprimer le plafonnement comme vous le disiez.
Passons à autre chose. Tout d'abord, monsieur Wilkinson, j'aimerais savoir si vous vous considérez comme un pessimiste ou un optimiste.
M. Wilkinson: Cela dépend du sujet.
M. Collins: Eh bien, je vous ai entendu à deux reprises, et je n'ai pas vraiment envie de vous dire si je vous considère comme un optimiste ou un pessimiste. Quand vous venez rencontrer des comités ou des représentants des divers gouvernements... Si les choses étaient faciles, nous serions tous unanimes. En période difficile, nous relevons les défis; c'est le point de vue de la Saskatchewan. Durant ma campagne, je n'ai jamais entendu un agriculteur me demander une subvention ou une aumône. Tout ce qu'ils demandent, c'est de pouvoir vendre leurs produits à un prix raisonnable et d'être en mesure d'être concurrentiels à l'échelle mondiale.
Je suis heureux que vous ayez abordé certains des points mentionnés par M. Hoeppner. Quand on parle d'efficacité des chemins de fer, avec des distances parcourues qui étaient de 100 milles par jour et qui sont maintenant de 250 milles et des gens payés pour deux jours et demi, on ne peut pas s'exposer à ce genre de critique.
Regardez les différences et les inégalités entre le port de Thunder Bay et le port de Vancouver par opposition à Seattle ou d'autres. Que voulez-vous que nous fassions?
J'aimerais savoir si à votre avis nous devrions être propriétaires des voies ferrées. Beaucoup de gens trouvent que nous y avons investi des quantités d'argent considérables. Elles devraient peut-être nous revenir de plein droit, et nous pourrions les louer aux compagnies de chemin de fer. Devrions-nous utiliser les deux lignes? Mais que pensez-vous des lignes secondaires?
M. Wilkinson: Du point de vue des transports, comme vous et moi l'avons déjà dit, il va falloir que les choses changent. Prenez une usine d'automobiles ou n'importe quoi d'autre, elles tournent 24 heures par jour. C'est comme cela que marchent les affaires. Cela ne dérange personne. C'est comme cela qu'on augmente le volume, qu'on réduit les frais et qu'on vent du produit.
Nous n'avons rien eu à faire dans les contrats signés avec ces syndicats ces dernières années. Des organisations comme Prairie Pools et à peu près tous les groupes d'agriculteurs de l'Ouest, que ce soit des producteurs généraux et des groupes spécialisés dans certaines denrées, ont toujours demandé aux gouvernements provinciaux et fédéral de prendre l'initiative pour régler ces problèmes syndicaux.
Il y a eu, quoi, 14 grèves en neuf ans, ou quelque chose comme cela? Jusqu'à 25 syndicats interviennent entre le moment où le grain est déversé dans le wagon et celui où il est chargé sur un bateau. Les motifs de problèmes sont multiples dans ce genre de système et le processus d'arbitrage ne suffit pas. Il a permis à l'occasion de rétablir le travail et le transport, mais il n'a pas permis de régler le problème à long terme de savoir ce qui se passera l'année prochaine et l'année suivante.
Il faudrait donc vraiment régler ces difficultés, sinon ce sera la même chose que pour l'industrie de la potasse, où il est très sérieusement question, je crois, de faire transiter le produit par Seattle. Le secteur céréalier canadien n'a rien à retirer de la situation actuelle. Nous essayons de donner du travail à des Canadiens et d'accroître notre activité économique. Il est absurde de ne pas profiter de nos capacités de transport des céréales. Il faut améliorer cela.
Pour ce qui est d'être propriétaires des voies ferrées, il s'agit de savoir ce que l'on fait du régime actuel. D'après ce que je crois comprendre, une fois qu'on a travaillé au CP pendant 8 ans, on est employé à vie. Même dans le cas des lignes secondaires, il faut racheter la convention collective. Il y a eu des tentatives pour racheter des embranchements abandonnés dans diverses régions du pays. Si cela se faisait dans un certain délai, il fallait aussi reprendre la convention. La plupart du temps, les lignes n'étaient pas rentables dans ces conditions.
Dans un certain nombre de cas, on a réussi à faire fonctionner des lignes secondaires de façon rentable. Je pense que c'est un élément de la solution au moment où l'on ferme de nombreuses lignes; il faut offrir le maximum d'options aux collectivités et aux organisations situées à proximité de ces lignes, que ce soit des pools, des compagnies d'élévateurs ou autres. Il faut tout faire pour essayer de préserver le maximum de lignes ferroviaires. Plus on le fait vite, mieux c'est. Il vaut éviter d'en arriver au point où la voie ferrée s'est tellement détériorée qu'il devient ruineux de la remettre en état.
Nous sommes ouverts à toutes les suggestions qui pourront être proposées lors des consultations. Quant à savoir si vous avez payé suffisamment d'impôts pour être propriétaires des lignes ferroviaires, je ne le sais pas mais il est certain que bien des gens trouvent qu'on a déjà payé beaucoup.
Le président: Ils sont pratiquement propriétaires de la ligne du CN.
M. Collins: Et les droits d'exploitation?
M. Wilkinson: Je ne connais pas assez la question.
M. Collins: Je pourrais vous donner des exemples de tronçons de lignes ferroviaires que les compagnies ont supprimés, et qui ont disloqué tout l'ensemble. On recule pour avancer. On se demande pourquoi on est dans un tel pétrin, et c'est à cause de ce genre de choses. Vous avez raison, il est temps de regarder la réalité en face.
Que peut-on faire, quelles sont les lignes qu'il faut conserver et entretenir? Je crois qu'une partie de ces 300 millions de dollars va devoir être consacrée à des travaux d'infrastructure et de réparations des lignes.
J'ai une autre question. Prévoyez-vous des trains-bloc plus grands et plus de terminaux? Je sais qu'à Weyburn, ils prévoient une usine d'éthanol. J'espère qu'elle fonctionnera bien. Que pensez-vous de ces terminaux et de ces trains-bloc plus importants et du nettoyage sur les Prairies?
M. Wilkinson: Franchement, je crois qu'il faut examiner tout cela pour réduire les coûts. Je ne vois pas de raison de faire du nettoyage sinon dans les Prairies. Pouquoi ne pas conditionner le grain plus près de la source et avoir le criblage et le reste dans le secteur du bétail? On l'a fait dans le passé pour des raisons qui n'ont pas été évidentes pour tout le monde. Pendant des années, on a réclamé une meilleure utilisation du système, mais pour une raison quelconque, cela ne se fait pas autant qu'on le souhaiterait dans le domaine des chemins de fer.
C'est la même chose pour les délais de roulement, les frais de surestarie, on met le doigt sur les problèmes, mais les choses n'évoluent pas beaucoup. Même si le ministre a un peu progressé sur certains points, si l'on avance un peu dans l'idée de frais liés à la surestarie, les gouvernements les uns après les autres se sont montrés incapables de vraiment affronter clairement le problème. Il va vraiment falloir le faire maintenant parce que les frais vont être incroyables pour les agriculteurs.
M. Collins: Les députés qui sont ici faisaient partie de ce comité. Je ne sais pas comment cela s'est fait, mais en tout cas nous avons eu un sous-comité des transports et un sous-comité de l'agriculture qui ont étudié la question et présenté sept ou huit recommandations. Nous ne les avons peut-être pas toutes réalisées. Je n'ai vraiment pas envie qu'on les perde de vue et je n'ai aucune envie d'entendre à nouveau les histoires d'horreur de tous ceux qui viendront raconter qu'ils ont ou qu'ils n'ont pas eu leur part dans toute cette question.
Vous avez raison. Je ne suis pas agriculteur, mais j'ai énormément de sympathie pour les agriculteurs compte tenu de toutes ces choses sur lesquelles ils n'avaient aucun contrôle et qui pourtant ont des retombées directes sur leur existence et sur leurs ressources.
Le président: J'ai quelques questions, Jack, mais j'aimerais tout d'abord faire un commentaire à la suite de ce qu'a dit M. Collins sur l'optimisme.
Ceux d'entre nous qui sont agriculteurs doivent être optimistes, sinon nous ne serions pas ici. Voilà maintenant 25 ans que j'entends ces idées qui viennent d'Ottawa. C'est facile d'être optimiste lorsque l'on élabore des théories, mais la situation est très différente lorsqu'on est sur la ferme et qu'on doit payer des factures. Voilà la différence, peu importe que certaines de ces idées viennent du gouvernement actuel ou des gouvernements précédents.
Il ne fait aucun doute que dans ce cas-ci, certains agriculteurs risquent de perdre plus de 20$ la tonne sur l'orge, sur les céréales qu'ils produisent, à la suite de ce changement au niveau du transport. C'est un fait. Nous devons maintenant trouver le moyen d'asseoir ce secteur sur une base solide afin que ces collectivités rurales puissent avoir un avenir, que ce soit grâce à la diversification ou par un autre moyen.
Ma question concerne vraiment ce point, Jack. Je vous ai dit ce matin que si on prend nos obligations aux termes du GATT, les changements apportés à la NTGO jusqu'à présent allaient au-delà de nos obligations en vertu du GATT. Les Américains, de leur côté, ne prennent que les mesures minimums pour respecter leurs obligations en vertu du GATT, s'ils font même cela.
Étant donné ce genre de scénario, que devons-nous faire dans notre cas pour être concurrentiels aux termes des nouvelles règles du GATT, alors que nous en faisons peut-être en fait plus que nécessaire tandis que notre principale concurrent au sud de notre frontière ne le fait pas? Quelles sont vos recommandations à ce sujet?
Je ne voudrais pas que notre comité ait les mains liées pour ce qui est... à cause du déficit, nous ne pourrions recommander A, B, C ou D. Si les Américains font certaines choses et que nous devons leur faire concurrence et que pour cela il faut avoir davantage d'argent que ce qui est prévu dans le budget de l'agriculture, alors disons-le, pourvu que nos obligations en vertu du GATT soient respectées.
M. Wilkinson: Je ne devrais peut-être pas dire ceci, mais bon nombre des changements à la politique agricole au cours des derniers mois n'ont absolument rien à voir avec le GATT. Nos obligations en vertu du GATT n'exigeaient absolument aucun changement à l'aide au transport des céréales fourragères. On aurait pu envisager certaines options politiques, comme la mise en commun des céréales, ce qui aurait permis de réduire la quantité nécessaire pour les exportations de l'ouest. Je conviens que cela aurait peut-être été difficile dans certains des pays vers lesquels nous exportons et qui voulaient l'élimination totale. Mais comme vous l'avez dit, le GATT a servi souvent d'excuse pour les changements qui ont eu lieu, alors qu'à notre avis, il n'est pas réaliste d'attribuer ces changements à nos obligations en vertu du GATT.
Donc je pense que dans une grande mesure, il s'agit d'un exercice motivé par le budget qui aura certains...et peut-être un changement sur notre façon de voir l'agriculture au Canada et dans quelle mesure le gouvernement, tout au moins à l'échelle fédérale, interviendra dans le domaine de l'agriculture.
Cela dépendra beaucoup de ce qui se passera avec la loi américaine. Dans quelques semaines, nous irons à Washington à l'occasion de l'assemblée de la Fédération internationale et nous allons essayer de savoir plus en détails ce que les Américains prévoient en ce qui a trait à leurs lois agricoles. Ce qu'ils feront par rapport à leur réserve de terre sous conservation et en ce qui a trait à leurs programmes de soutien du revenu agricole déterminera dans une grande mesure quelles seront les conséquences pour le Canada et s'ils seront très agressifs lors de ces négociations commerciales bilatérales.
À notre avis, la liste de ce que le gouvernement doit faire est très longue. Que ce soit la réforme réglementaire, le budget de R & D, le type de filet de sécurité qui doit être mis en place, les efficiences au niveau du transport - voilà autant de questions critiques pour lesquelles il faut faire quelque chose et qui relèvent du gouvernement fédéral. Si le gouvernement n'agit pas, la collectivité agricole risque de se retrouver avec de sérieux problèmes. Chacun de ces changements coûte de l'argent au producteur dont le revenu net l'an dernier a finalement été le même qu'en 1974. Il est assez clair que la plupart des gens n'ont pas de gros problèmes d'impôt sur le revenu du côté agricole. Ils se retrouvent avec toutes sortes de factures - l'inspection, l'agréage, le transport et la liste continue.
Le président: Vous dites donc essentiellement que d'une part, la collectivité agricole est prête à accepter le genre de changement que l'on propose en matière de transport mais qu'il faut d'autre part compenser grâce aux réformes de la réglementation et au filet de sécurité dont vous parlez et que vous avez proposé, sinon cela risque de ne pas fonctionner?
M. Wilkinson: C'est cela. On ne pourra pas totalement accepter le genre de changement qui s'en vient si on est un producteur du Manitoba et qu'on perd sa ligne ferroviaire et qu'on a...
Tout ce que je dis, c'est qu'on accepte dans une certaine mesure que le gouvernement ait décidé d'apporter de tels changments. Il s'agit de déterminer quel sera exactement l'impact de tout cela. Est-ce qu'on parle du plein montant qui est proposé, ou est-ce qu'il s'agit des changements qui doivent être apportés et qui vont abaisser le coût, qui feront en sorte que les options de diversification et de valeur ajoutée seront une réalité dans le Prairies?
Toutes ces céréales ne doivent pas nécessairement aller à Vancouver. Cependant, allons-nous agir assez rapidement? Allons-nous agir assez rapidement en ce qui a trait aux pâtes alimentaires? Qu'est-ce qui nous retient dans ces domaines? Les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les organismes de producteurs spécialisés dans le secteur agro-alimentaire vont-ils agir avec suffisamment de détermination pour poursuivre de telles initiatives? Ou est-ce qu'on va continuer d'en parler? Je pense que toutes ces initiatives seront critiques pour décider si quelqu'un recevra une facture de 40$ ou de 15$ l'acre parce qu'il y a une usine de fabrication de pâtes alimentaires à 150 milles de leur ferme.
Le président: J'ai une dernière question avant de donner la parole à M. Chrétien. En ce qui a trait au changement massif dans le cadre de la réforme de la réglementation, alors qu'on abandonne la LTGO, qui comporte certaines mesures de protection pour la collectivité agricole par rapport au plafonnement et aux embranchements, etc, et en ce qui a trait à la Loi sur les transports nationaux et les modifications qui y seront apportées dans une avenir très rapporché, à votre avis, est-ce que l'intérêt public, l'intérêt agricole, sera bien servi dans ce nouvel environnement?
Je me rappelle qu'à un moment donné, lorsqu'on avait la Comission canadienne des transports, si une ligne devait être abandonnée, les agricultuers et les collectivités avaient la possibilitlé de s'adresser à la commission. On a laissé tomber la commission, et on a aujourd'hui l'Office national des transports qu'on est censé laisser également tomber alors que la LTGO disparaît. Comment le public pourra-t-il exprimer son point de vue lorsqu'un embranchement est abandonné, etc? Comment la colletivité rurale et la collectivité agricole pourront-elles à votre avis faire valoir leur point de vue une fois que l'office aura disparu?
M. Wilkinson: Tout d'abord, comme nous l'avons dit, si on garde l'option d'une période de cinq ans pour ce qui va arriver, nous pensons qu'il est implicite qu'il y aura un processus pour obtenir le point de vue de la collectivité rurale canadienne. Mais si on décide d'aller de l'avant avec ce qui est proposé, de lever le plafond de cinq ans ou d'apporter ces changements d'ici 1999, etc., nous pensons qu'il y aura très peu de possibilités de consultation. Nous pensons donc qu'il est absolument essentiel de prévoir dans le projet de loi un processus qui permettrait d'évaluer si les objectifs établis ont été réellement atteints et s'il est nécessaire de maintenir un plafond.
Le président: Merci, Jack. Monsieur Chrétien.
[Français]
M. Chrétien: Actuellement, il est prévu qu'on aura un plafond de cinq ans pour les tarifs de transport des céréales. En fait, les prix seront gelés pour cinq ans. J'imagine que les compagnies ferroviaires vont perdre de l'argent, peut-être pas la première année, mais dans les troisième, quatrième et cinquième années. Vous avez même dit plus tôt qu'il y aurait peut-être possibilité de demander au gouvernement fédéral de prolonger cette période de cinq ans pour que les prix soit gelés le plus longtemps possible.
Si les compagnies ferroviaires perdent de l'argent, elles vont probablement se tourner vers le gouvernemnet fédéral pour demander une compensation financière.
À ce moment-là, ne serait-ce pas ressusciter en partie la LTGO qu'on enterrera à partir du mois d'août prochain?
[Traduction]
M. Wilkinson: Il y a quelques points que j'aimerais aborder ici. À notre avis, le plafond ne constitue pas en fait un gel des tarifs, mais une formule selon laquelle certains calculs seront effectués pour déterminer les augmentations ou les changements qui seront permis. Je ne pense pas qu'il soit juste de dire que ce tarif sera gelé la première année et que par conséquent, à cause des coûts qui augmentent, les chemins de fer vont nécessairement en souffrir.
Une autre question, c'est qu'avec les changements en ce qui a trait à l'interdiction de l'abandon des lignes ferroviaires, par exemple, nous pensons, tout comme nos membres, que le compagnies ferroviaires vont essayer très vigoureusement et le plus rapidement possible d'abandonner les lignes ferroviaires qui, par le passé, n'étaient pas rentables en raison des volumes peu élevés. Il y a raison de croire que des compagnies ferroviaires pourront en fait réaliser des économies importantes si elles abandonnent les voies qui sont les moins rentables ou qui représentent une perte nette.
Nous ne disons pas qu'à la fin de la période tout le monde devra automatiquement se tourner vers le gouvernement, mais il est important d'examiner dans quelle mesure les lignes ferroviaires sont abandonnées. Il s'agit d'une formule par opposition à un montant en dollar absolu qui peut être demandé. Mais nous ne voulons pas tout simplement supposer automatiquement que le plafond va disparaître à la fin de la période de cinq ans. On devrait plutôt évaluer s'il est nécessaire de mettre en place un autre système de réglementation à la fin de cette période.
Le président: Monsieur Chrétien a souligné que la réponse de Jack en ce qui concerne le plafond est absolument juste. D'après cette formule, les chemins de fer sont assurés d'un rendement de 20 p. 100 sur le capital.
L'autre jour, le sous-ministre a dit que cette formule leur permettait d'être rentables. Il est intéressant de noter que dans ce régime, les compagnies ferroviaires sont les seules à être assurées d'une rentabilité.
Mme Cowling: Je voudrais parler des changements massifs qui sont en train de s'opérer dans le secteur agricole à l'heure actuellle. J'étais dans ma circonscription pendant la fin de semaine, et je tiens à déclarer aux fins du compte rendu que les gens dans ma circonscription vont de l'avant. Ils envisagent la diversification. Nous envisageons l'éthanol. Nous envisageons un certain nombre d'aspects très positifs des changements massifs qui sont en train de s'opérer.
J'aimerais citer un passage d'une coupure de presse que j'ai reçue au sujet du rapport de déchargement des wagons de l'Office du transport du grain: «Les déchargements cumulatifs pour l'année jusqu'à présent ont augmenté de 35 p. 100 à Thunder Bay, de 22 p. 100 à Vancouver et de 40 p. 100 à Prince Rupert».
Au fur et à mesure que ces changements se produisent, Jack, votre organisme va jouer un rôle majeur pour nous aider, car à mesure que nous passerons à des installations plus grandes et que nous commencerons à transporter ces céréales plus rapidement à travers le réseau, il y aura des aspects négatifs. Lorsqu'on apporte des changements, il y en a toujours. Nous savons que lorsqu'il y a des changements, il y a toujours des désavantages, mais d'un autre côté, il y a les avantages. J'espère que nous pourrons examiner tout cela d'un point de vue positif pour la collectivité agricole. Ce que vous voyez, Jack, est peut-être l'avenir du réseau de transport et certains désavantages pour tout le pays, car, vous avez mis le doigt sur ce qui se passe dans bien des régions rurales au Canada.
M. Wilkinson: Ce serait bien, mais vous savez aussi bien que moi... Si, comme on l'a dit ce matin, on regarde la situation des agriculteurs de façon optimiste ou d'un point de vue positif, cela reflète le fait que malgré toutes les coupures budgétaires qui nous ont été imposées, par exemple, au cours des trois ou quatre dernières années, le gouvernement fédéral s'en est assez bien tiré en ce sens qu'il n'a pas tellement reçu de critiques négatives. Nous allons essayer de trouver des points positifs, mais le gouvernement devra réagir rapidement.
Pourquoi est-ce que le gouvernement fédéral ne tente-t-il pas davantage de faire quelque chose par rapport aux États-Unis qui se sert du programme de subventions aux exportations contre l'un des pays de l'ALÉNA, c'est-à-dire le Canada? Pourquoi semble-t-il que ce genre de chose se poursuive alors que nous avons le droit de combattre de telles mesures?
Je pense qu'il incombe aux deux parties de faire quelque chose, et je ne veux pas vous contredire. Nous ferons de notre mieux de notre côté, mais il est essentiel que le gouvernement agisse le plus rapidement possible dans son domaine de compétance pour régler la question et passer au prochain point à l'ordre du jour plutôt que de tout simplement parler des problèmes.
Le président: Nous devons nous arrêter ici, car je sais la FCA doit rencontrer le Comité des finances dans quelques minutes. Vous voulez sans doute rassembler vos pensées. Au nom du comité, j'aimerais remercier la FCA d'être venue. Je vous remercie de vos commentaires et de l'information que vous nous avez données. Merci, Jack et Sally. Nous nous reprendrons la prochaine fois.
J'inviterais maintenant M. Payne, du Central Western Railway, à s'approcher. M. Payne est président directeur général de Central Western Rail.
Bienvenue, monsieur Payne. Je crois que vous avez un mémoire à nous présenter. Comme votre mémoire n'est pas traduit, nous allons le garder de côté jusqu'a ce que vous nous ayez présenté votre exposé. En effet, c'est pour être équitable à l'égard des gens qui ne parlent que le français.
M. Thomas Payne (président-directeur général, Central Western Railway): Merci, monsieur le président et membres du comité. C'est pour moi un privilège de comparaître devant vous aujourd'hui.
J'ai amené avec moi un associé, M. Daniel Mall, qui est un producteur de Morrin, en Alberta, le long de notre ligne de chemin de fer. Il est président du Conseil consultatif des producteurs pour la Central Western Railway. Il s'agit d'un conseil consultatif très actif qui réunit huit producteurs qui ont une exploitation agricole le long de nos lignes de chemin de fer et qui recourent à notre compagnie ferroviaire que nous exploitons dans le centre-est de l'Alberta. M. Mall fera quelques observations lorsque j'aurai terminé.
J'aimerais tout d'abord parler brièvement du cadre vers lequel le secteur se dirige, tant avec le projet de loi à l'étude qu'avec les révisions à la Loi sur les transports nationaux et à la Loi sur les chemins de fer. Je pense que M. Goodale a très bien résumé ces questions lorsqu'il a comparu devant votre comité la semaine dernière: un transport plus rapide, moins coûteux, plus efficace, et une juste part des coûts et des avantages. Je pense que ce sont là nos objectifs également.
Dans son témoignage, il a déclaré que le GATT interdit en fait les subventions directes aux chemins de fer, de sorte que le gouvernement souhaite s'en éloigner. En fin de compte, c'est le marché qui déterminera de façon ouverte les tarifs marchandises, après la période de transition, mais le tarif marchandise maximum sera maintenu jusqu'en l'an 2000. Tôt ou tard, les révisions à la Loi sur les transports nationaux entreront en vigueur.
Nous répondons déjà pratiquement à tous les critères prévus dans la nouvelle politique, et même au-delà. Je ne peux que me réjouir de tout coeur des révisions apportées à la Loi sur les chemins de fer et à la Loi sur les transports nationaux qui entreront sans doute en vigueur cette année ou l'an prochain. J'approuve en outre le principe de compensation du producteur.
Je ne pense pas que la Central Western s'oppose de quelque façon que ce soit au fait qu'elle doive faire concurrence aux autres compagnies sur le marché pour le transport des marchandises. Nous devons cependant avoir des règles du jeu équitables par rapport au Canadien National et au Canadien Pacifique et nos coûts doivent être inclus dans le système.
Qu'avons-nous fait à la Central Western depuis nos débuts en 1986? Eh bien, nous avons pris deux embranchements à coûts élevés et à faible densité et nous les avons transformés en un chemin de fer régional à faibles coûts qui appartient à des Canadiens et qui est exploité par eux. Il s'agit de la seule compagnie ferroviaire régionale à part la Southern Rail's Co-op, mais cette dernière exploite deux petites lignes de 25 milles chacune.
La photo dans la trousse que nous vous avons fait parvenir est celle d'un train qui se dirige vers l'est à destination de la subdivision Coronation. Nous avons eu des trains d'une longueur pouvant varier entre 2 et 198 wagons. Nous avons un temps de rotation pour la division de moins de 24 heures, et nous sommes capables de le faire pour les deux subdivisions. Nous avons rempli une commande spéciale de la Commission canadienne du blé pour 198 wagons et notre temps de rotation était de 36 heures dans une subdivision seulement. Nos coûts d'exploitation sont considérablement moins élevés que ceux du Canadien National ou du Canadien Pacifique, c'est-à-dire une différence de coût d'un million de dollar par année par subdivision. Je pense que l'on peut dire que la Central Western répond à tous les critères imposés par le gouvernement lorsque notre compagnie a été créée.
Passons maintenant au projet de loi C-76. Le tarif marchandises lié à la distance qui est prescrit à l'annexe III du projet de loi prévoit le paiement d'un coût. Dans ce tarif marchandises, le coût est payé si toutes les céréales sont livrées en fin de compte à des transporteurs nationaux, le CN ou le CP. Ils recouvrent ensuite leurs coûts de 1,052 milliard de dollars, ou le montant qui est prévu dans le projet de loi.
Il n'y a qu'une seule lacune. Nous transportons des céréales et nous les livrons, mais nos coûts ne sont pas inclus dans ce tarif marchandises. Bien que nous percevions un petit pourcentage lié à la distance, dans certains cas nous ne percevons aucun montant. Ce pourcentage est si peu élevé, au point de rendre la Central Western non rentable.
Ce qui arrive, c'est que 93 p. 100 de notre revenu brut disparaît parce que l'on ne tient pas compte de notre compagnie ferroviaire pour établir la moyenne des coûts du réseau, comme c'est le cas pour toutes les autres embranchements qui dépendent du transport du grain, sur le CN et le CP. On établit une moyenne des coûts d'embranchement pour le CN et le CP par rapport aux voies principales pour en arriver à une moyenne, un tarif moyen. Je pense que c'est une question d'équité. Si quelqu'un d'autre, y compris nous-mêmes, allait voir le CN et le CP demain pour leur dire que nous voulons exploiter un chemin de fer régional sur un embranchement après l'adoption du projet de loi à l'étude, nous pourrions le faire car le CN et le CP pourraient nous accorder un tarif marchandises compensatoire révisé lorsqu'on arrive au lieu de correspondance. Étant donné que nos coûts ne sont pas inclus dans le calcul de ce tarif marchandises, le CN et le CP ne sont pas en mesure de nous donner la même division.
Qu'arrivera-t-il le 1er août si le projet de loi à l'étude est adopté dans sa forme actuelle? Il sera adopté et le dernier train de la Central Western s'arrêtera avant minuit le 31 juillet et nous devrons débrancher l'aiguille. Nous n'avons pas d'autre choix.
Les expéditeurs sont de notre côté; le gouvernement albertain est de notre côté; l'Alberta Wheat Pool est de notre côté; Unifarm est de notre côté. Mous aimerions faire une proposition au gouvernement pour corriger ce défaut du projet de loi. Il s'agirait simplement d'ajouter nos coûts au système et de nous traiter de la même manière que le CN et le CP. C'est tout.
Merci, monsieur le président.
M. Daniel Mall (président, Producers' Advisory Board, Central Western Railway Corporation): Après la présentation de Tom, monsieur le président, je vais simplement vous donner quelques petites précisions à mon sujet.
Je m'appelle Dan Mall et je suis agriculteur à Morrin, en Alberta, soit au sud de la subdivision de Stettler. J'ai une exploitation agricole d'environ 2 500 acres et j'expédie environ 2 000 tonnes de grain par an avec la Central Western Railway.
Je suis également président du Conseil consultatif des producteurs de Central Western Railway. Le conseil comprend huit membres. Quatre de la subdivision de Stettler et quatre de la subdivision Coronation-Lacombe. Notre rôle est de conseiller Central Western Railway sur des questioins de politique, dans le but d'améliorer son service à la clientèle. Je puis vous assurer que notre conseil ne recommande aucunement à M. Payne de mettre la clé sous la porte le 3l juillet.
En 1984, lorsque Tom a voulu acheter la subdivision de Stettler, j'étais probablement l'un des premiers à lui lancer les pierres pour le chasser parce que nous voulions conserver le service du CN. Depuis lors, j'ai eu l'occasion de participer de près aux activités du Central Western Railway. J'ai constaté que son esprit d'entreprise l'amène à améliorer constamment sa productivité et son service à la clientèle. Jusqu'à présent, seules les voies secondaires de qualité inférieure pouvaient être rachetées, et CWR en a amélioré considérablement l'exploitation. Nous estimons aujourd'hui que d'autres économies substantielles pourraient être réalisées si CWR pouvait étendre ses activités à de meilleures voies secondaires, voire, pourquoi pas, à des voies principales.
Le nouveau projet de loi vise quatre objectifs: réduire les activités et subventions gouvernementales; réduire les frais d'exploitation des sociétés de chemin de fer; déréglementer le transport ferroviaire; établir une structure destinée à faciliter l'exploitation des voies courtes, à accélérer le processus d'abandon de certaines voies et renforcer les droits de circulation.
Les sociétés de chemin de fer exploitant les courtes voies peuvent faire partie ingégrante de ce processus, mais à condition que l'on établisse une structure législative leur permettant de bien travailler et de gagner de l'argent. Le problème qui se pose aujourd'hui à CWR avec le nouveau projet de loi est qu'il lui sera impossible d'être payé à partir du 1er août 1995, ce qui veut dire que ses coûts ne seront pas pris en considération dans l'assiette de coûts servant à établir les tarifs.
Si les sociétés de chemin de fer nationales étaient assujetties à un système complètement commercial, les voies courtes pourraient s'adresser à elles pour négocier des ententes de partage des revenus en assurant une certaine partie du transport. Par exemple, si le tarif établi par les sociétés nationales pour transporter des céréales d'un point A à un point B était de 30$, une petite société pourrait leur proposer d'assurer le transport pour 10$ jusqu'à un point de correspondance, après quoi les sociétés nationales auraient 20$ pour le reste du trajet. De cette manière, on aboutirait au même tarif d'environ 30$. C'est une répartition des tâches que les sociétés pourraient négocier. Cependant, comme les sociétés de chemin de fer nationales travaillent avec des tarifs maximums, établis en fonction de leurs coûts, comme elles sont réglementées et comme les coûts ne sont calculés que pour les voies qu'elles exploitent, elles n'ont pas d'argent à partager avec les sociétés opérant sur de courtes distances.
Tout ce que nous vous demandons, c'est de faire en sorte que les frais d'exploitation de Central Western Railway soient intégrés à l'assiette des coûts et qu'ils soient payés au CN ou au CP pour que celles-ci puissent négocier des ententes de partage des revenus avec les sociétés opérant sur de courtes distances. Soyons parfaitement clairs, nous ne sommes pas ici pour demander de l'argent. Nous demandons simplement un système permettant à Central Western Railway d'être payé.
Avec un nouveau projet de loi acceptable, les activités moins onéreuses des sociétés travaillant sur de courtes distances constitueraient un outil extrêmement attrayant pour offrir des taux de fret moins élevés aux agriculteurs. En effet, une société de courte distance ayant des frais d'exploitation moins élevés et collaborant avec un transporteur national permettrait d'offrir des tarifs moins élevés pour les mêmes distances que si le service était fourni uniquement par le transporteur national. Par exemple, si le tarif d'un transporteur national pour aller d'un certain point à Vancouver était de 30$, une société travaillant sur de courtes distances pourrait négocier un tarif de 8$ pour sa partie du trajet, et le transporteur national aurait 20$ pour le reste, ce qui ferait un tarif de 28$ seulement. Ce genre de chose serait tout à fait possible si les petites sociétés pouvaient négocier avec les grandes.
Je suis agriculteur et j'accepte parfaitement qu'une petite société puisse faire faillite si elle n'est pas compétitive. Cependant, il ne faut pas les pousser à la faillite simplement par négligence du législateur. Il vous appartient de leur donner la possibilité de faire leur travail et, si elles font faillite parce qu'elles ne peuvent pas résister à la concurrence, c'est leur problème.
Voilà ce que je souhaitais dire au comité, monsieur le président. Je vous remercie beaucoup de votre attention.
Le président: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Chrétien, voulez-vous commencer?
[Français]
M. Chrétien: Il vaudrait mieux qu'on y revienne plus tard, mais j'ai d'abord une courte question. Si je comprends bien, le CWR a acheté deux tronçons qui appartenaient au CN ou au CP et qui n'étaient pas rentables, j'imagine. Vous les avez achetés et vous êtes en train de les rendre rentables. C'est bien cela?
[Traduction]
M. Payne: Exactement. Nous avons investi six millions de dollars pour racheter ces voies, et le tarif qui nous est consenti est sensiblement inférieur à celui qui était auparavant consenti au CN et au CP. Malgré cela, nous réussissons à gagner de l'argent. Je précise que nous sommes associés au Chemin de fer de Québec, pour le tronçon Québec-Charlevoix, qui est une voie que nous avons réussi à rendre rentable, alors qu'elle était autrefois déficitaire.
[Français]
M. Chrétien: Je reviendrai plus tard.
[Traduction]
Mme Cowling: Je voudrais bien comprendre ce que vous demandez. Si je vous ai bien compris, vous avez racheté un tronçon qui n'était pas exploité de manière efficiente et vous l'avez rendu rentable. Qu'attendez-vous du gouvernement fédéral, dans un régime de déréglementation? Si l'on doit déréglementer le système, les exploitants vont devoir assumer leurs coûts et devenir compétitifs. Pouvez-vous donc m'expliquer comment vous pensez être compétitif dans un régime déréglementé?
M. Payne: Si vous examinez les paiements consentis aux sociétés de chemin de fer, ils ont toujours été calculés en fonction des coûts. Ce projet de loi maintient cette méthode jusqu'à l'an 2000. Comment le CN et le CP et Central Western fonctionnent-elles dans le régime actuel? Aujourd'hui, le CN et le CP reçoivent 658 millions de dollars au titre de paiement relevant des subventions du Nid-de-Corbeau. En fait, 653 millions de dollars sont destinés au CN et au CP, et cinq millions de dollars à Central Western, Southern Rail's Co-Op et B.C. Rail, les participants de l'article 60. Dans le nouveau système, ces sommes seront versées aux agriculteurs de toutes les provinces de l'Ouest.
Comment les sociétés de chemin de fer vont-elles récupérer cet argent? Elles devront le faire par le truchement des tarifs qu'elles imposent aux agriculteurs des Prairies. Lorsque les voies de Central Western ont été soustraites de l'assiette de coûts, le tarif de Stettler n'a pas diminué de 12$, il a augmenté de 50$ à chaque point d'acheminent des Prairies. Aujourd'hui, les agriculteurs du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta sont bénéficiaires dans la mesure où ils profitent d'une baisse de leur tarif global.
Nous sommes tout à fait prêts à faire directement concurrence à nos adversaires, que ce soient les camionneurs ou les autres sociétés de chemin de fer, mais il faut que nous puissions récupérer nos coûts par le truchement des taux de fret, aux mêmes conditions qu'eux. À l'heure actuelle, la législation ne nous le permet pas.
Le président: Si je vous comprends bien, monsieur Payne, vous ne bénéficiez pas des avantages existants dans la législation actuelle. Bien que nous ne soyons pas saisis de cette législation, vous dites que vous ne profitez pas de ses dispositions. N'est-ce pas?
M. Payne: C'est cela.
Le président: Pourriez-vous préciser pourquoi vous n'avez pas été inclus dans l'assiette des coûts?
M. Payne: Si vous examinez, les documents qui vous ont été distribués, notamment la partie concernant les sommes versées en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, le projet de loi C-76, dans la toute première partie, dans les pages roses, vous verrez que les paiemeints actuels consentis au CP et au CN sont de 1,0528 milliard de dollars. Central Western, du fait de la répartition des sommes en fonction des distances, obtient 200 000$, et 3,3 millions de dollars au titre de l'article 60. Cela donne donc un coût total de 1,0563 milliard de dollars dans le régime actuel.
Passez maintenant à la partie 3, deux pages plus loin. Vous y voyez ce dont nous avons besoin. Pour le CP et le CN, en vertu de la LTGO actuelle, projet de loi C-76, on calcule les taux de fret en fonction de la somme de 1,0528 milliard de dollars. Cela relève de l'article 183, si je ne me trompe. Nos paiements étaient versés auparavant aux agriculteurs. Les sommes que nous aurions obtenues directement du gouvernement sont maintenant versées aux producteurs de l'Ouest canadien à tous les points de livraison.
Les tarifs changent légèrement selon les divisions, et l'on voit disparaître une somme de 2,7 millions de dollars qui est donnée aux agriculteurs. À chaque point de livraison des Prairies - Beanfaith, en Saskatchewan, Hudson Bay Junction; Tisdale; Brandon, Regina; Swift Current; Calgary sur la voie principale - les taux de fret comportent un élément de coûts pour les voies secondaires et pour les voies principales.
Lorsqu'on a fixé le tarif de base pour ce projet de loi, on n'a pas tenu compte de 1,0528 milliard de dollars plus 3,5 millions de dollars de Central Western, on a oublié d'ajouter les 3,5 millions de dollars correspondant aux réels coûts de Central Western. Donc, le taux de fret est aujourd'hui d'environ 9c. la tonne trop faible à chaque point de livraison.
Comme le CN et le CP rassemblent des céréales à tous les points de livraison des Prairies, ils admettent - ils nous l'ont confirmé par écrit - qu'ils profitent de coûts que nous assumons. Lorsque nous leur promettons un train à un point de correspondance, nous pouvons leur demander une partie des revenus, correspondant à 2,7 millions de dollars, plus 800 000$ à partir de l'échelle tarifaire, ce qui nous donne les 3,5 millions de dollars qui nous reviennent.
Autrement dit, les sommes versées au CP et au CN sont identiques à celles qui sont payées aujourd'hui. Si nos coûts étaient pris en compte, les sommes qui nous seraient payées seraient également identiques à celles qu'on nous verse aujourd'hui. Mes explications sont-elles assez claires?
Le président: Quel ministre a commis cette erreur dans le projet de loi?
M. Payne: Je ne sais pas. Je ne sais pas d'où vient ce projet de loi, du ministère des Transports, de l'Agriculture, ou des deux. À une certaine époque, tout le monde s'occupait en même temps de la LTGO, de la LNT et de la Loi sur les chemins de fer. Plus tard, on a confié la Loi sur les chemins de fer et la LNT à un groupe de travail, la LTGO à un autre, et on ne nous a pas demandé de participer aux discussions sur la LTGO.
Le président: Que vous répond-on quand vous demandez que le problème soit corrigé? Je suppose que vous l'avez demandé?
M. Payne: Oui. Nous avons écrit au ministère en décembre, avant le budget, pour demander que le problème soit corrigé. Nous n'avons pas eu de réponse. Nous avons écrit à Transports Canada. Nous avons de nouveau écrit à M. Young le 23 janvier, en lui exposant le problème en détail, avec les calculs précis que nous avions établis avec les services de calcul des coûts du gouvernement et des sociétés de chemins de fer. Là encore, nous n'avons pas eu de réponse.
Après le dépôt du budget, on nous a informés que nos coûts n'avaient pas été pris en compte. Nous avons donc collaboré avec le ministère. M. Mulder, le sous-ministre, a écrit au CN et au CP pour leur demander de remettre une partie de leurs revenus fondés sur les coûts, étant donné que les coûts de Central Western n'étaient pas pris en considération. Le ministère à répondu que nous devrions nous adresser au comité des finances si nous voulions faire modifier le projet de loi.
Je suis donc venu ici pour m'adresser aux membres du comité des transports, du comité de l'agriculture et du comité des finances, afin d'obtenir une modification du projet de loi.
Le président: Autrement dit, lorsque les bureaucrates font une erreur, ce sont les politiciens qui doivent la corriger, n'est-ce pas?
M. Payne: Je ne sais pas qui a fait l'erreur, mais on m'a dit de m'adresser au comité des finances.
Le président: Bien.
Marlene.
Mme Cowling: Je sais bien comment fonctionne le système. Je voudrais cependant parler des subventions croisées - problème que j'ai déjà soulevé à plusieurs reprises - et du rôle du comité d'examen des paiements aux producteurs. Nous n'avons jamais eu aucune indication, en ce qui concerne ce comité d'examen, qu'il y ait subventionnement croisé de toute une foule de voies secondaires du nord de la Saskatchewan et du nord de l'Alberta par les producteurs de l'est de la Saskatchewan et du Manitoba.
Puisque tout le monde veut que chacun obtienne sa juste part, je dois vous dire, comme je viens d'une région enclavée, et que Bernie vient de l'est de la Saskatchewan, que nous voulons absolument avoir notre juste part pour assurer la survie de nos producteurs.
Il y a également 140 milles de voies jusqu'à Prince Rupert. Je suis sûr que votre société jouera un rôle à ce sujet. Je parle ici de l'Alberta. La somme est payée à même le système global.
Quand on parle de justice et d'équité, j'espère que l'on pourra tenir compte des 140 milles supplémentaires jusqu'à Prince Rupert dont nous assumons les frais dans les Prairies de l'Est, afin de protéger les intérêts des producteurs des régions enclavées du Manitoba et de l'est de la Saskatchewan. Je voudrais savoir ce que vous en pensez.
M. Payne: Il faut tenir compte du fait que les taux de fret sont pondérés. Les sociétés de chemins de fer ne font aucune différence lorsqu'elles transportent du bois ou des céréales, vers l'est ou vers l'ouest. Les barèmes ont été réduits. Lorsque l'ATN a examiné les coûts, on a constaté que la prime de transport en montagne n'était plus là. Il n'y a plus de différences de coûts d'exploitation lorsqu'un train transporte des marchandises que ce soit à Thunder Bay ou à Vancouver. Cela a donc été réglé.
Si on parle de l'entretien des voies, je dois vous dire que je préfère entretenir les voies des montagnes plutôt que celles des Prairies. Du point de vue des ingénieurs, l'expansion causée par la chaleur en été et le refroidissement en hiver causent beaucoup plus de stress aux voies des Prairies que dans les montagnes.
Pour ce qui est des subventions croisées, on commence avec une voie principale à faibles coûts. Pour faire partir un wagon du centre de l'Alberta, on peut obtenir un tarif commercial de 1 100$. Qu'il s'agisse de transporter 100 tonnes de céréales ou 100 tonnes de bois, on peut obtenir un tarif commercial qui se situe entre 1 100$ et 1 700$, voire parfois 2 500$, selon le produit, à partir de l'Alberta.
À quel moment tient-on compte des 1 000$ supplémentaires que l'on doit payer pour un wagon à partir de Lacombe, entre Edmonton et Calgary? Cette somme vient du fait que l'on utilise un entranchement ou une voie principale axée à coûts élevés, qui a été intégrée à la voie principale pour donner un coût moyen. De ce fait, on a un coût artificiellement élevé pour la voie principale et un coût artificiellement bas pour les voies secondaires. Je ne crois absolument pas que le coût réel que doit assumer le CP pour utiliser cette voie secondaire afin d'aller chercher ce wagon à Meadow Lake, en Saskatchewan, soit de 36$. Je ne le crois tout simplement pas. Il y a donc subventionnement croisé.
Si toutes les autres voies secondaires des Prairies sont intégrées au nouveau régime d'établissement des coûts, pour effectuer les paiements, que deviendront nos agriculteurs et nos collectivités? Nous avons 17 points de livraison principaux et nous versons des taxes qui représentent 42 p. 100 des recettes totales de ces collectivités. Si nous disparaissons, ces collectivités disparaîtront aussi. À mon avis, c'est injuste.
M. Mall: Puis-je répondre à cette question, monsieur le président? Le problème vient sans doute du fait que nous travaillons dans un système d'établissement des coûts réglementé.
Voyez ce qui se passe aux États-Unis, où il y a beaucoup plus de sociétés de chemins de fer opérant sur de courtes distances, mais dans un régime non réglementé, qui permet aux sociétés de se faire concurrence sur les prix. Normalement, les prix sont établis en fonction des coûts que doivent assumer les sociétés. Dans notre cas, comme tous les coûts sont réglementés et que les tarifs sont fondés sur ces coûts, les suppléments correspondant aux distances ne reflètent pas les coûts réels dans les Prairies.
Par exemple, pour reprendre un exemple que Tom a mentionné, le coût de transport à partir de Coronation est de l'ordre de 30$. Cela comprend peut-être 10$ la tonne pour choisir le wagon et l'amener au lieu de correspondance, et 20$ la tonne pour acheminer le wagon à Vancouver par la voie principale. Par contre, pour les 25 milles qui suivent, le tarif change seulement de 50c. la tonne. Malgré cela, le coût du travail à la ville suivante est quand même de 10$ la tonne, mais le tarif n'a baissé que de 50c. la tonne. Donc, au lieu de 30$, on est maintenant à 29,50$. si on passe à la ville suivante, on tombe à 29$.
Le barème ne reflète pas le travail réellement effectué à chaque point de livraison, puisque tout est intégré à une moyenne. Voilà le problème. Nous sommes encore assujettis à un régime partiellement réglementé, alors que nous devrions fonctionner dans un régime purement commercial.
Le président: Il va y avoir un vote en Chambre et nous devrons partir dans dix minutes.
Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Je me demandais, monsieur le président, si l'on ne pourrait pas résoudre tout simplement le problème en les laissant acheter tout notre réseau ferroviaire, pour qu'ils l'exploitent à moindres coûts.
M. Payne: Nous essayons.
Le président: Morceau par morceau.
M. Hoeppner: En regardant la carte, je me demande s'il est vrai que vous pouvez exploiter les voies secondaires à des coûts beaucoup moins élevés, pourquoi conserver le CP et le CN? C'est là qu'il y a un problème.
M. Payne: On n'a pas mis en place une structure législative permettant le transfert facile des voies secondaires. Je crois que ce projet de loi va dans ce sens, car il nous permet de faire une répartition en fonction du régime de calcul des coûts visant à assurer la survie de toutes les voies autres que les nôtres.
Le jour où ce projet de loi sera adopté, sans avoir été modifié, je pourrais m'adresser au CN et au CP pour leur dire que je veux gérer les subdivisions de Lowman et de McLeod avec mon personnel et mon matériel excédentaire de la subdivision de Stettler. Je leur demanderais quels sont leurs coûts. S'ils me disent que le coût d'exploitation de ces voies secondaires est de 11,95$ la tonne, je leur dirais que je ferais le travail pour 8$.
Le système commencera alors à se rationaliser. Ce qui va arriver, c'est que l'on pourra exploiter des voies secondaires en demandant moins que le tarif maximum établi en vertu de la loi parce que les coûts auront baissé. Tout le monde s'en sortira. Le CN et le CP s'en sortent sur la vie principale, et nous nous en sortirons sur les voies secondaires, si nous sommes encore là.
M. Hoeppner: Savez-vous pourquoi les coûts varient tellement d'une voie secondaire à l'autre? J'ai examiné les chiffres concernant beaucoup de voies secondaires et je ne trouve pas l'explication.
M. Payne: La comptabilité des sociétés de chemins de fer est vraiment fort mystérieuse, et c'est une question à laquelle je ne peux répondre. Je puis cependant vous dire que nous sommes ceux qui travaillons avec les coûts les plus faibles sur toutes les voies des Prairies canadiennes à densités comparables. Nous avons commencé à 13,25$ la tonne payés par le gouvernement, et nous en sommes maintenant à 8,75$. Sur les autres voies, où la densité est un peu meilleure, nous pourrions faire encore mieux. Il faut cependant que nous réussissions à survivre. Si la structure législative est adéquate, nous serons dans la course.
Des gens disent que beaucoup de voies seront abandonnées à cause de ce projet de loi. Cela dit, pour qu'il y ait une bonne concurrence, il faut que les sociétés de chemin de fer aient la possibilité d'abandonner certaines voies et de faire ce qu'elles veulent.
Chaque fois qu'on abandonnera un mille de voie, il y aura une réduction de 10 000$ le mille des taux de fret intégrés au barème. Cela soulève cependant la question suivante: Pourquoi une société de chemin de fer abandonnerait-elle un mille de voie secondaire si cela doit lui faire perdre une telle somme? Je peux fort bien laisser une voie secondaire en suspens - couper les herbes, réparer les barrières, payer les taxes municipales, mais ne jamais y faire passer un train - pour environ 3 000$ à 4 000$ le mille par an. Pourquoi devrais-je l'abandonner complètement si cela me pénalise sur le plan des tarifs?
Le président: Nous examinons cette question, Jake.
Je ne voudrais pas lever la séance avant de poser une autre question. Nous allons faire notre possible pour résoudre votre problème de coût, mais en ce qui concerne l'avenir, qui est notre principale préoccupation, que devrions-nous recommander au gouvernemeint pour faciliter le recours à un plus grand nombre de voies courtes dans la région céréalière?
M. Payne: Il faut qu'il y ait dans la nouvelle Loi sur les chemins de fer et dans la nouvelle Loi nationale sur les transports une nouvelle procédure simplifiée de correspondance et de transport. Mes discussions avec Wyatt Green, du ministère, me permettent de penser que l'on avance dans cette voie. Plus vite ce sera fait, mieux cela vaudra.
Il y a cependant un problème: La nouvelle législation ne nous sert à rien car elle ne tient pas compte de nos coûts. On y revient toujours.
La voie dans laquelle s'est engegé le gouvernement est bonne. Elle est réaliste et efficace. Continuez donc ce travail au sujet de la LNT et de la Loi sur les chemins de fer. J'ai dit à mes expéditeurs, le Pool du blé de l'Alberta, qui est à l'origine de près de 80 p. 100 du trafic céréalier, que ses intérêts sont protégés dans la nouvelle LLT et dans la nouvelle Loi sur les chemins de fer. Je crois que l'on va dans la bonne voie.
Le président: Si vous avez des recommandations à nous faire à l'avenir, n'hésitez pas à nous les adresser par écrit. Nous les examinerons avec beaucoup d'attention car l'évolution du système ferroviaire nous intéresse beaucoup.
M. Hoeppner: Payez-vous les mêmes taxes que les sociétés de chmins de fer?
M. Payne: Oui.
Le président: En ce qui concerne les collectivités et les agriculteurs touchés par votre voie secondaire, que pouvez-vous nous dire?
M. Payne: Eh bien, 1 500 agriculteurs perdront leur transport ferroviaire.
Le président: Il y a donc 1 500 agriculteurs qui utilisent Central Western Rail. Dans combien de collectivités?
M. Payne: Dans 17 collectivités vraiment actives, et près de 24 petites collectivités et hameaux de l'est de l'Alberta. Il y a donc 24 petites collectivités, 17 points de livraison, 1 500 agriculteurs et 250 milles de voie ferroviaire. Et ces agriculteurs se retrouveront avec un transport moyen de 60 milles dans chaque sens.
Le président: Nous allons devoir lever la séance. Vous pourriez peut-être rester en contact avec Sonia au sujet des questions d'abandon de voie, afin de nous fournir des informations complémentaires pour que nous puissions poser les bonnes questions.
M. Payne: J'en serais très heureux.
Le président: Veuillez nous excuser de devoir partir. Nous sommes très heureux de vous avoir accueillis et nous allons faire notre possible au sujet de votre problème. Merci.
La séance est levée.