[Enregistrement électronique]
Le jeudi 8 juin 1995
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte. Cet après-midi notre témoin est M. Laurent Pellerin, le président de l'UPA.
Monsieur Pellerin, je vous donne la parole pour votre exposé, et ensuite, nous passerons aux questions.
Notre collègue, M. Collins, sera encore occupé pour environ dix minutes, mais il viendra sous peu.
Je vous souhaite la bienvenue.
[Français]
M. Laurent Pellerin (président, Union des producteurs agricoles): Bonjour. Je vais vous présenter l'Union des producteurs agricoles et, dans un deuxième temps, je vais demander à mon partenaire, M. Lebeau, de vous présenter nos différents commentaires sur les modifications des programmes qui nous concernent.
Depuis plus de 70 ans, de l'Union catholique des cultivateurs à l'Union des producteurs agricoles, la classe agricole québécoise a patiemment construit un mouvement rigoureux et autonome financièrement pour promouvoir, défendre et développer ses intérêts professionnels, économiques, sociaux et moraux. C'est ainsi que les membres de l'Union ont tour à tour oeuvré au développement économique des régions en créant les premières coopératives financières et des coopératives agricoles aussi. Ils ont également contribué au développement académique du Québec en travaillant au sein du Conseil supérieur de l'éducation, au développement de la presse québécoise en fondant en 1929 l'hebdomadaire La Terre de chez nous, et au développement communautaire en appelant, en 1991, les États généraux du monde rural.
Aujourd'hui, l'Union confédère 16 fédérations régionales et 20 syndicats ou fédérations spécialisés. Elle compte sur l'engagement direct de plus de 3 000 producteurs et productrices agricoles à titre d'administrateurs. Elle multiplie ses interventions en Europe pour le GATT, en Afrique pour le développement d'une mise en marché ordonnée et aux États-Unis pour l'élargissement de ses marchés.
Active tant sur les scènes régionales que nationale et internationale, elle est l'organisation professionnelle de près de 50 000 agriculteurs et agricultrices qui ont d'ailleurs investi collectivement 11,6 milliards de dollars en infrastructures agricoles afin de générer des revenus annuels de près de 4 milliards de dollars de ventes à la ferme et 65 000 emplois directs.
Enfin, elle convie ses membres à la conquête des marchés, soucieuse qu'elle est de leur permettre d'accomplir la noble tâche de nourrir le Québec ainsi que les marchés extérieurs.
Je vais demander à M. Lebeau de vous présenter nos commentaires sur les programmes étudiés.
M. Serge Lebeau (économiste, Union des producteurs agricoles): Mesdames et messieurs les députés, d'abord, on tient à s'excuser du fait qu'on n'a pas d'exemplaires de notre mémoire en anglais. Les délais ont été trop courts. Ça nous a été impossible de déposer cet après-midi un exemplaire de notre mémoire en anglais, mais je pense que ce sera fait dans les prochains jours.
[Traduction]
Le président: Ne vous en faites pas, le contraire se produit souvent aussi.
[Français]
M. Lebeau: Je tiens d'abord à vous remercier de nous permettre aujourd'hui de vous présenter le mémoire de l'Union des producteurs agricoles.
Les opinions exprimées au cours de cet exposé sont évidemment celles de l'UPA. Elles ont cependant été rédigées suite à des consultations auprès de trois de nos partenaires, c'est-à-dire le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, l'Association professionnelle des meuniers du Québec et la Coopérative fédérée de Québec.
Le présent mémoire vise à commenter certaines dispositions énoncées dans le projet de loi C-76 dont l'abrogation de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et la Loi sur le transport des marchandises dans la région Atlantique. Nous profitons également de cette rencontre pour vous faire part de notre réaction à la suite de l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères et vous indiquer nos attentes suite aux différents communiqués qui ont été émis pour annoncer les mesures de transition et d'adaptation que le gouvernement fédéral entend utiliser pour pallier à l'abandon des différents programnmes de transport qui touchent le secteur agricole.
Il va sans dire que l'intervention que nous faisons aujourd'hui reflète la situation de l'Est du Canada et particulièrement celle du Québec, soit le contexte d'une région importatrice de céréales, fortement spécialisée dans les productions animales. En conséquence, il nous sera difficile de répondre à toutes les questions que le président du Sous-comité, M. Easter, nous a soumises, car celles-ci s'adressent dans certains cas au contexte particulier des Prairies. Néanmoins, il nous semble important de vous signifier nos inquiétudes face au désengagement de l'État fédéral du secteur agricole et plus particulièrement du secteur des transports.
J'aimerais tout d'abord vous rappeler que les trois programmes de transport qui sont abandonnés avaient pour objet de compenser les désavantages compétitifs de certaines régions en raison de leur éloignement. Il ne faut pas oublier, en effet, que l'agriculture est finalement la principale source d'emploi et de revenu des régions rurales et la base de l'occupation du territoire. Passons en revue ces programmes et tentons d'évaluer l'impact de leur élimination sur l'Est du Canada et en particulier sur le Québec.
Prenons ainsi le premier programme, soit le Programme du transport du grain de l'Ouest. L'élimination de ce programme aura pour effet de faire baisser le prix des grains disponibles pour l'alimentation animale dans les provinces des Prairies - selon les experts, on parle de 8 à 15$ la tonne métrique par rapport au prix actuel - , venant ainsi briser l'équilibre concurrentiel entre l'Est et l'Ouest.
L'élimination d'un deuxième programme, soit le Programme de transport des céréales fourragères, aura, quant à elle, l'effet de faire augmenter le prix des grains disponibles pour l'alimentation animale dans l'Est au moins dans les régions où cette subvention était disponible, les Maritimes et les régions périphériques du Québec.
Enfin, l'abandon d'un troisième programme, soit le Programme de la subvention au transport des marchandises de la région Atlantique, aura inévitablement un impact sur les coûts de production des entreprises agricoles situées dans les régions concernées par ce programme. Les secteurs agricole et de la forêt privée du Québec sont touchés par une coupure de 10 millions de dollars par le retrait de cette subvention.
Les producteurs de lait et de viande de ces régions auront donc un double désavantage compétitif par rapport à leurs concurrents de l'Ouest, simplement par les nouvelles réalités de marché issues des décisions budgétaires. Les productions animales sont à la base de l'économie agricole du Québec; elles représentent près de 80 p. 100 des recettes monétaires brutes provenant des opérations agricoles de la province.
Les mesures de transition et d'adaptation nous inquiètent. Parlons d'abord des mesures pour compenser l'abandon du Nid-de-Corbeau.
Il y a d'abord la compensation de 1,6 milliard de dollars qui sera versée aux producteurs de l'Ouest et, ensuite, le fonds d'adaptation de 300 millions de dollars qui sera versé au secteur agricole des Prairies. Si la compensation de 1,6 milliard de dollars est versée aux propriétaires de terres arables, donc sans qu'on la cible vraiment sur les producteurs exportateurs de grain, les producteurs de produits animaux de l'Ouest auront un autre avantage compétitif par rapport à ceux de l'Est.
Il ne faut pas perdre de vue qu'avec l'élimination du Nid-de-Corbeau, on met fin à un programme de 100 ans. Le développement de l'agriculture canadienne a été fortement influencé par ce programme. En effet, au début du siècle, le compromis entre l'Est et l'Ouest a été de subventionner un programme de transport dans l'Ouest pour que cette région se spécialise dans le secteur céréalier, alors que les productions animales devaient se développer dans l'Est. Il est difficile aujourd'hui de connaître les répercussions à court et à moyen termes de l'élimination de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Une chose demeure: il faut que l'élimination de ce programme se fasse dans le respect des principes suivants.
Le premier principe fondamental que le gouvernement fédéral doit respecter est que les taxes payées par l'ensemble des contribuables de l'Est du Canada ne devraient en aucun temps servir à subventionner des projets de diversification dans l'Ouest qui risqueraient de faire compétition à l'agriculture de l'Est. En d'autres termes, les fonds alloués par le biais de ce programme devraient en priorité servir à améliorer le transport des céréales et non pas, comme il a été énoncé, à financer des équipements ou des infrastructures sans en préciser la nature ou encore des projets de diversification qui viendraient concurrencer les productions dans lesquelles nous avons investi au Québec au cours des 25 dernières années. Si la compensation de 1,6 milliard de dollars et le fonds d'adaptation de 300 millions de dollars sont versés aux propriétaires de terres arables, par exemple, sans vraiment cibler ces montants sur les producteurs exportateurs de grain, les producteurs de produits animaux auront un autre avantage compétitif par rapport à ceux de l'Est.
Le deuxième principe dont devrait se préoccuper l'actuel gouvernement est que toute réforme envisagée doit l'être dans le respect de l'équité. Ceci se traduit par deux objectifs fondamentaux, soit l'établissement d'un environnement compétitif équitable et l'équité des dépenses du gouvernement fédéral dévolues au secteur agricole dans les différentes régions du Canada. En d'autres termes, il nous apparaît clair que l'abandon des subventions dans l'Ouest canadien sera compensé par le gouvernement fédéral par des mesures de transition (on parle de 1,6 milliard de dollars) et d'adaptation (ici, on parle de 300 millions de dollars). Par contre, la rupture de l'équilibre compétitif à la défaveur de l'Est ne semble pas être prise en compte suffisamment.
En effet, on parle d'un programme d'adaptation de 60 millions de dollars dont les deux tiers sont déjà engagés, notamment dans des programmes nationaux en gestion agricole, sur l'examen des revenus agricoles ou sur la sécurité à la ferme, le reste étant destiné à d'autres initiatives à l'échelle canadienne. Il nous semble que la majeure partie ou la presque totalité de ce fonds devrait être réservée à l'Est en contrepartie de ce qui est versé à l'Ouest. Il est en effet essentiel que le Québec obtienne une part équitable de ce qui est versé aux producteurs de l'Ouest pour nous permettre de nous adapter au nouvel environnement économique auquel le secteur agricole est confronté aujourd'hui. Selon les études réalisées par les experts, les montants alloués au Québec pour compenser l'abandon du programme d'aide au transport du grain de l'Ouest devraient se situer entre 24 millions de dollars et 46 millions de dollars par année au cours des quatre prochaines années.
Finalement, pour terminer sur ce principe d'équité entre l'Est et l'Ouest, nous nous attendons à recevoir des programmes de compensation équivalents à ceux des producteurs de l'Ouest au regard des traitements fiscaux et du montant forfaitaire qu'on leur accorde. À cet égard, vous savez sans aucun doute que les propriétaires de terres arables de l'Ouest obtiendront un paiement en capital ex gratia de 1,6 milliard de dollars en deux versements, ce qui équivaut à environ 2,2 milliards de dollars si on considère l'exemption fiscale qui leur est accordée. Nous nous attendons donc à obtenir de tous les programmes de transition et d'adaptation offerts pour compenser le retrait de l'État fédéral, une part équitable de ce qui est offert dans l'Ouest.
Puis il y a le fonds de compensation de 62 millions de dollars sur 10 ans qui a été annoncé dans le cadre de l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères.
En considérant le principe d'équité que nous avons déjà énoncé, et surtout les objectifs qui en découlent, il ne nous apparaît pas que le fonds de compensation offert par le gouvernement fédéral dans le cadre de l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères soit équitable, si l'on compare ce fonds à ce qui est offert aux provinces de l'Ouest. La compensation offerte par le gouvernement fédéral dans le cadre de ce programme équivaut à environ 3,4 années, en ne tenant pas compte évidemment de l'exemption fiscale. En comparaison, le gouvernement fédéral offre l'équivalent de 2,75 années de subvention comme compensation pour l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères. En tenant compte de ce principe d'équité, le fonds de compensation pour pallier à l'abandon de l'aide au transport des céréales fourragères devrait être d'un montant net de 62 millions de dollars assorti de la possibilité d'utiliser les mêmes traitements fiscaux que les propriétaires de terres arables de l'Ouest. En outre, les montants nécessaires pour prolonger le programme jusqu'au 31 décembre ne devraient pas être pris à même les fonds de compensation, ni le fonds général d'adaptation et de développement rural.
Finalement, pour terminer sur ce principe d'équité entre l'Est et l'Ouest, nous nous attendons à ce que les provinces touchées par l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères puissent avoir le choix de toucher la subvention en un ou deux versements, comme cela est offert aux provinces touchées par l'abandon de la LTGO.
Ensuite, nous demandons d'obtenir les parts historiques qui nous ont été consenties au cours des dix dernières années par le biais de ce programme.
Enfin, il y a le fonds d'adaptation de 326 millions de dollars sur six ans qui a été annoncé pour pallier à l'abandon de la subvention au transport des marchandises de la région Atlantique. Nous croyons d'abord que, compte tenu des objectifs de ce programme, c'est-à-dire «de procurer dans les taux certains avantages aux personnes et aux industries des provinces et régions touchées par ce programme», les sommes consenties suite à l'abandon de celui-ci devraient permettre aux expéditeurs de s'ajuster et de s'adapter à la nouvelle structure des coûts de transport. Deuxièmement, la part du Québec agroalimentaire et de la forêt privée était d'environ 10 millions de dollars annuellement. Nous souhaitons que le gouvernement fédéral, et en particulier Transports Canada, retourne à l'industrie agroalimentaire et de la forêt privée québécoise rien de moins que la part historique qu'elle détenait. Il nous apparaît également primordial que le type d'intervention soit ciblé pour éviter qu'une province concentre ce programme d'adaptation sur des activités de production qui provoqueraient une distorsion sur les marchés.
En terminant, et toujours en tenant compte du principe d'équité que nous avons énoncé précédemment, nous réclamons comme pour les autres programmes des mesures de compensation et d'adaptation équitables à ce qui est offert à l'Ouest en regard des montants totaux, des traitements fiscaux et du montant forfaitaire. En clair, nous réclamons l'équivalent de 3,4 années de subvention pour compenser l'élimination du Programme d'aide au transport des marchandises de la région Atlantique, soit un niveau de compensation d'environ 373 millions de dollars, assortie d'avantages fiscaux, au lieu des 326 millions de dollars qui nous sont offerts.
Il est difficile, en ce moment, de prédire quelles seront l'ampleur et la vitesse des changements dans le visage de l'agroalimentaire canadien que les décisions budgétaires annoncées entraîneront. Il est certain que de tels changements prendront place. Ils risquent de ne pas être positifs pour le secteur au total, pour celui de l'Est en particulier qui en est un de production animale surtout. Il s'ensuit que le gouvernement fédéral devrait prendre tous les moyens pour faciliter la transition suite à l'abandon des programmes agricoles, particulièrement au niveau des provinces de l'Est, dont le Québec.
Compte tenu de ces observations que nous venons d'apporter à votre attention, nous attendons du gouvernement canadien:
- qu'il veille à cibler, le plus possible, le versement de la compensation sur la Loi du transport du grain de l'Ouest aux producteurs de grain qui devront absorber le choc de la hausse des frais de transport du grain pour ne pas que l'abandon du programme de subvention au transport soit compensé par un programme de diversification;
- qu'il offre aux producteurs de l'Est un programme de compensation équitable par rapport au programme offfert aux producteurs de l'Ouest en regard des traitements fiscaux et du montant forfaitaire qu'il leur accorde. Tous les programmes abrogés sont visés par ces mesures;
- qu'il modifie le montant des sommes allouées au Fonds général d'adaptation et de développement rural pour pallier à l'avantage compétitif de l'Ouest, suite à la baisse des prix des céréales. Comme certains experts l'estiment, le Québec devrait obtenir des remboursements se situant entre 24 et 46 millions de dollars annuellement au cours des quatre prochaines années pour rééquilibrer la compétition Est-Ouest;
- que le fonds de compensation de 62 millions de dollars prévu dans le cadre de l'abandon du Programme d'aide au transport des céréales fourragères soit versé en totalité et non réduit du montant nécessaire à sa reconduction jusqu'au 31 décembre 1995 et que le Québec obtienne au minimum la part historique qu'il détient depuis 10 ans;
- que le fonds d'adaptation consenti pour pallier à l'abandon des Programmes d'aide au transport des marchandises de la région Atlantique soit équitable par rapport à ce qui est versé en compensation aux Prairies, qu'il permette aux expéditeurs de s'adapter à la nouvelle structure des coûts de transport et que l'industrie agroalimentaire et de la forêt privée québécoise reçoive rien de moins que la part historique qu'elle détenait.
Dans cet exposé, nous avons commenté de façon plus particulière les dispositions touchant les programmes de transport. Au terme de cet exposé, nous réitérons la position que nous avons défendue au cours des 15 dernières années, soit que le gouvernement fédéral accorde un traitement équitable au secteur agricole du Québec afin que l'agroalimentaire et les régions rurales et particulièrement celles de l'Est ne soient pas injustement traités par ces dispositions.
Nous vous remercions de votre attention et sommes disposés à répondre à vos questions.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie beaucoup, messieurs.
Monsieur Chrétien, voulez-vous commencer?
[Français]
M. Chrétien (Frontenac): Monsieur Pellerin et monsieur Lebeau, je voudrais vous souhaiter la plus cordiale des bienvenues sur la Colline parlementaire, particulièrement devant les membres du Sous-comité.
Je vous avais prévenu, à mon arrivée tout à l'heure, qu'il n'y aurait pas foule ici. Le Comité compte cinq députés et nous sommes trois, ce qui fait 60 p. 100 de présence. Ce n'est pas si mal. Un de moins et on n'avait pas quorum. Alors, je vous prie d'excuser mes collègues qui devraient arriver bientôt. Étant donné que cela touche le Québec, mes amis du Parti réformiste semblent beaucoup moins intéressés. Il faut les comprendre, puisqu'ils représentent exclusivement l'Ouest, sauf un pour l'Ontario.
Vous avez abordé le problème de la diversification des producteurs agricoles de l'Ouest, à partir des taxes de l'ensemble du Canada, des Canadiens et des Canadiennes. C'est un des points que j'ai soulevés plus d'une fois en Chambre, et je pose la question presque constamment à nos témoins. La plupart du temps, ils nous disent qu'il n'y aura pas de diversification. Je suis nerveux. Je suis content que vous ayez, monsieur Lebeau, soulevé le danger d'une diversification à même les taxes de tout le monde.
Maintenant, j'aimerais que vous vulgarisiez le 3,4 ans de subvention pour dédommager et compenser les producteurs agricoles de l'Ouest, alors que pour nous, au Québec, il s'agit de 62 millions de dollars en dix ans et de 326 millions de dollars en six ans pour les provinces Atlantiques, ce qui représente 2,75 ans. Je n'ai pas bien compris. Pourriez-vous prendre quelques secondes pour réexpliquer cela d'une façon plus claire?
M. Lebeau: Dans le cas de l'Ouest, c'est 1,6 milliard de dollars plus 300 millions de dollars. Cela fait 1,9 milliard de dollars divisés par 560 millions de dollars qui sont accordés annuellement. Cela fait 3,4 ans.
M. Chrétien: D'accord.
M. Lebeau: Pour le programme des céréales fourragères, si je ne me trompe pas, c'était 18 millions de dollars par année, sur 3,4 ans. On arriverait à peu près à 63 millions de dollars, si je ne me trompe pas, encore une fois.
Maintenant, dans le cas des céréales fourragères, on nous suggère de reconduire le programme jusqu'au 31 décembre. Cela coûtera environ 13 millions de dollars. Des 62 millions de dollars du fonds de compensation, on vient soustraire 13 millions de dollars, ce qui veut dire qu'il ne reste plus que 49 millions de dollars de fonds de compensation. Cela équivaut non pas à 3,4 ans, mais à 2,75 ans.
M. Chrétien: D'accord.
M. Lebeau: On pourrait ajouter là-dessus que tous les programmes de transport se terminent au 1er août. C'est sûr qu'il y a une reconduction du programme des céréales fourragères jusqu'au 31 décembre, mais il y a là aussi une équité non seulement en fonction du rapport du nombre d'années, mais aussi du fait qu'on calcule les 13 millions de dollars à partir du 1er avril jusqu'au 31 décembre, alors que pour les autres, il n'y a pas de soustraction de faite du 1er avril jusqu'au 1er août.
M. Chrétien: Je pose la question à M. Lebeau ou à M. Pellerin. Pour l'aide au transport des fourragères, on parle de régions périphériques de l'Est du Québec. Pourriez-vous me les nommer, comme le Lac-Saint-Jean, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine?
M. Pellerin: Ça couvre presque toute la région de la Côte-Nord, Charlevoix, où on a un bon noyau de producteurs de porcs et de producteurs de volaille; toute la région du Lac-Saint-Jean; la région de Québec-Sud, à partir de la rivière Chaudière; tout ce qui est à l'est de la rivière Chaudière jusqu'au fond de la Gaspésie, y compris les Îles-de-la-Madeleine; quelques villages de la région du Nord du Québec, de l'Abitibi, et quelques villages isolés en Estrie, près de la frontière américaine.
M. Chrétien: Donc, ma région de Thedford-Plessisville ne serait pas pénalisée?
M. Pellerin: Non.
M. Lebeau: Il doit y avoir des municipalités qui sont touchées.
M. Pellerin: Oui, mais pas beaucoup.
M. Chrétien: À l'autre bout de mon comté...
M. Pellerin: Peut-être à l'autre bout de votre comté, oui.
M. Lebeau: En fait, la subvention du Québec devient accessible à partir de Montréal, Trois-Rivières, Québec, plus 83 kilomètres. Si vous êtes à plus de 83 kilomètres de Québec ou de Trois-Rivières, par exemple, à ce moment-là, il n'y a pas de problème: vous êtes admissible à la subvention.
M. Pellerin: À partir des trois ports sur le fleuve Saint-Laurent - Montréal, Trois-Rivières, Québec - , ces subventions-là sont appliquées.
M. Chrétien: Est-ce que cet abandon de l'aide au transport des fourragères peut avoir une incidence malheureuse ou catastrophique pour certains agriculteurs québécois?
M. Pellerin: Pour certains agriculteurs, tout à fait. Prenez un producteur d'oeufs de consommation qu'on a installé de peine et de misère aux Îles-de-la-Madeleine il y a déjà quelques années, avec un quota exceptionnel fixé par l'Office canadien des producteurs d'oeufs. Ce producteur-là a tout près de 20 000 pondeuses et bénéficie de subventions d'environ 50$ la tonne de grain transporté, pour une consommation de 800 à 1 000 tonnes par année. Vous comprendrez bien que ce producteur-là aura de très grandes difficultés à continuer à maintenir cette production-là sur les Îles-de-la-Madeleine.
Il y a des cas moins pathétiques, mais très significatifs financièrement, comme celui des producteurs de porc de Charlevoix. L'abandon de cette subvention-là peut représenter 10 000$, 15 000$, 20 000$ et même jusqu'à 25 000$ pour des fermes d'envergure familiale en termes de réduction de support et de coûts supplémentaires pour s'approvisionner en céréales. Il est évident que cela aura un impact pour ces producteurs-là.
Souvent, comme ce sont des lois qui sont très vieilles et qui sont appliquées depuis des dizaines et des dizaines d'années, elles touchent des fermes qui ont vu passer une, deux ou trois générations. Ces fermes ont de nouvelles installations et une nouvelle capitalisation. Les jeunes se sont réinstallés selon des lois connues, connues depuis 100 ans dans certains cas et depuis des dizaines et des dizaines d'années dans le cas du transport des grains de l'Est. Puis, du jour au lendemain, on leur dit que cela n'existe plus et on les met dans une situation financière périlleuse.
M. Chrétien: Le gouvernement a prévu un montant d'argent d'adaptation qui est, si ma mémoire est bonne, de 62 millions de dollars en dix ans. Si vous étiez un proche conseiller deM. Goodale, est-ce que vous auriez trois ou quatre idées qu'on pourrait lui donner pour s'adapter? Si on répartit cette somme équitablement, cela ne fait que 6,2 millions de dollars par année. Allez-y donc de votre cru.
M. Pellerin: D'abord, il faut établir la proportion historique de cette subvention que le Québec a eue au cours des dix dernières années. On prend un référentiel de dix ans parce qu'on calcule souvent sur les dix dernières années. Le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest disent que ce n'est pas la subvention historique qu'ils veulent avoir, mais ce dont ils auraient eu besoin pour développer éventuellement des productions. Nous, on a un peu de difficulté avec ça. Il faut d'abord établir le montant de compensation historique et, deuxièmement, s'assurer que ce sont les producteurs qui bénéficiaient de la subvention qui seront compensés, comme les producteurs de l'Ouest. On espère que ce seront les producteurs atteints par la disparition de cette subvention qui recevront compensation. C'est la même chose pour l'Est du Québec. On ne devrait pas verser ces subventions pour améliorer des routes qui, indirectement, pourraient profiter à des producteurs. Il serait très difficile de retrouver la facture de 15 000$ ou de 25 000$ dont je parlais tout à l'heure. Il y a des producteurs qui seront affectés.
Ce pourrait être des interventions personnalisées chez les producteurs atteints pour les aider à mieux s'équiper, soit pour recevoir des céréales sur ces fermes, soit pour les transformer à la ferme. Ce pourrait être, dans certains cas, des installations régionales là où il y a vraiment des lacunes au niveau de l'entreposage du grain qui vient par la voie fluviale du Saint-Laurent ou de la production locale. Je prends le cas des Îles-de-la-Madeleine, où le producteur doit entreposer ses céréales à l'automne pour tout l'hiver parce que les conditions de transport ne sont pas idéales en cet endroit l'hiver. Il y aura peut-être des installations d'entreprosage supplémentaires pour ces producteurs.
Il ne faut pas que cet argent soit simplement distribué dans l'ensemble du système, parce que ce sont les producteurs individuels qui étaient visés par cette subvention. Il faut s'assurer que ces gens-là auront les moyens de s'adapter.
M. Chrétien: Monsieur Pellerin, le gouvernement aura tout un problème. Cela fait au moins trois fois que je vous entends dire que dans l'Ouest, il faudra s'assurer que ce soient les propriétaires des fermes qui reçoivent la subvention. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais dans l'Ouest, il y a 35 p. 100 des fermes qui sont louées, qui appartiennent à la Société du crédit agricole, à de grosses banques ou même au gouvernement de la province.
Le gouvernement a une patate chaude. Il faudra qu'il prenne une décision à un moment donné. À qui va-t-il envoyer le chèque? Est-ce que ce sera au locataire ou au propriétaire? Il semble que le prix des fermes pourrait diminuer sensiblement vu qu'on abolit la LTGO. Si le prix de la ferme baisse, cela devrait aller au propriétaire. Si le propriétaire possède 600 000 hectares, il peut les louer à autant de personnes qu'il le veut bien. Quel serait votre point de vue dans un cas semblable?
M. Pellerin: J'aimerais faire une distinction. On parle des gens de l'Ouest. Il faudrait que ce soit versé aux producteurs qui bénéficiaient de la subvention d'exportation. Par exemple, les producteurs qui font de la production animale dans l'Ouest canadien, qui n'exportaient pas de grain vers les marchés d'exportation et qui ne bénéficiaient donc pas de la subvention d'aide au transport pour fins d'exportation ne devraient pas, en principe, recevoir de compensation relativement à l'abandon du programme. La compensation devrait aller au producteur qui exportait du grain, qu'il soit le propriétaire ou le locataire de la terre - je pense qu'il appartient aux gens de l'Ouest de résoudre ce problème - , et qui bénéficiait donc de la subvention au transport.
M. Chrétien: Monsieur Pellerin, je devrai quitter vers 17 heures. Le jeudi, j'ai toujours des engagements en soirée dans ma circonscription.
Aujourd'hui, par respect pour l'Union des producteurs agricoles du Québec, dont je suis d'ailleurs membre, j'ai retardé mon activité dans ma circonscription à 21h30. Donc, si je pars précipitamment tout à l'heure, ce n'est pas par mépris à votre égard.
M. Pellerin: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Chrétien.
Madame Cowling.
Mme Cowling (Dauphin - Swan River): Je suis très heureuse que vous soyez ici en tant que représentants de l'UPA, si je ne m'abuse. Mais êtes-vous également membre de la Fédération canadienne de l'agriculture?
M. Pellerin: Oui.
Mme Cowling: Je me rappelle que votre ancien président a souvent dit qu'il était important pour les agriculteurs du Québec de travailler avec leurs collègues au niveau national, au sein d'autres organisations agricoles, parce que l'union fait la force. J'imagine que c'est encore votre mandat, et que vous travaillez encore de concert avec vos autres collègues canadiens.
[Français]
M. Pellerin: Il n'y a pas de doute que l'Union des producteurs agricoles continue de mettre beaucoup d'énergie et de temps à travailler avec les confrères et les consoeurs des autres provinces canadiennes. Cet après-midi même, depuis très tôt ce matin, j'étais en conseil d'administration avec la Fédération canadienne de l'agriculture. J'ai échangé sur l'heure du midi avec Ray Howe, anciennement du Saskatchewan Wheat Pool, sur l'application de la subvention des compensations relatives à l'abandon du Nid-de-Corbeau dans l'Ouest canadien.
On continue d'intervenir directement auprès des producteurs de l'Ouest canadien pour les sensibiliser à notre point de vue, et on vient vous rencontrer aujourd'hui afin de vous sensibiliser à notre point de vue. Même si nous savons que le projet de loi C-76 est rendu très loin devant la Chambre, nous jugeons quand même utile et nécessaire de vous prévenir des risques que nous prévoyons pour l'avenir, et cet avenir n'est pas seulement pour l'an prochain. Il n'est pas possible d'abandonner un programme de 100 ans sans penser que cela aura des conséquences insoupçonnées pendant les cinq ou les dix prochaines années. Ce sont des conséquences qu'il faudra mesurer.
Au Québec, où on fait beaucoup de production animale, il faudra surveiller de très près le résultat. On vous a fourni une référence dans notre document sur une étude que M. Garth Coffin, du Collège Macdonald, a faite sur l'incidence, au Québec, de l'abandon du Programme de transport du grain de l'Ouest. Ce ne sont pas nos chiffres. Ce sont des chiffres de plusieurs universitaires - parce que le travail a été fait en collaboration avec d'autres universités - qui prétendent qu'il y aura un manque à gagner ou un coût supplémentaire de production de 24 à 45 millions de dollars par année au Québec. C'est un impact très significatif.
[Traduction]
Mme Cowling: Je me demande si le comité pourrait obtenir une copie de ce rapport. Je crois qu'il nous serait utile lorsque nous ferons nos recommandations au ministre.
[Français]
M. Pellerin: Certainement. On va déposer les copies nécessaires. Même si on n'avait pas été prévenus pour la traduction, on va le déposer. Dans quelques jours, vous en aurez sûrement une traduction anglaise.
[Traduction]
Mme Cowling: Merci beaucoup.
J'aimerais maintenant parler du système de transport et du chemin de fer qui transportent nos marchandises d'un bout à l'autre du pays. Est-ce que votre organisation a une politique en ce qui concerne les chemins de fer? D'après vous, devrait-on maintenir la voie ferrée d'un bout à l'autre du pays?
[Français]
M. Pellerin: Pas réellement. L'UPA pense que la question du transport du grain de l'Ouest est une préoccupation des producteurs de l'Ouest et que ces gens-là vont prendre les meilleures décisions possibles en ce qui concerne leurs besoins pour pouvoir continuer à exporter ce grain-là. On souhaite qu'une grande partie des sommes d'argent du fonds d'adaptation de 300 millions de dollars disponibles dans l'Ouest canadien soit investie dans l'amélioration des installations de transport.
Nous n'avons pas la prétention d'être capables de faire des choix pour les producteurs de l'Ouest. Ces gens-là ont à réfléchir à leurs besoins, à rationaliser où ce sera nécessaire, à investir dans l'amélioration où ce sera nécessaire. Il semble que certains producteurs de l'Ouest veuillent continuer à privilégier la côte ouest pour les exportations internationales. D'autres, plus près du Manitoba, et je pense que c'est votre cas, préfèrent peut-être la tête des Grands Lacs. Je pense que le marché déterminera rapidement, avec le choix des producteurs de l'Ouest, ce qu'il y a à faire sur ce réseau ferroviaire.
[Traduction]
Mme Cowling: D'après ce que je comprends, deux provinces canadiennes prévoient des fonds pour leurs producteurs. Je crois qu'il s'agit du Québec et de l'Alberta. Combien d'argent reçoivent les producteurs québécois du gouvernement provincial? Combien touchent vos producteurs?
[Français]
M. Pellerin: Le financement provincial de quel programme? À quoi faites-vous allusion?
[Traduction]
Mme Cowling: Je parle du secteur agricole.
[Français]
M. Pellerin: Le budget général?
[Traduction]
Mme Cowling: Oui.
[Français]
M. Pellerin: Au Québec, nous avons un ministère de l'Agriculture provincial. Le gouvernement du Québec investit des sommes en agriculture au Québec. Vous voulez connaître l'ordre de grandeur du budget du ministère de l'Agriculture?
[Traduction]
Mme Cowling: Grosso modo.
[Français]
M. Pellerin: Le budget du ministère de l'Agriculture du Québec s'élève à environ 600 millions de dollars par année.
[Traduction]
Mme Cowling: La diversification dans d'autres secteurs canadiens semble vous préoccuper beaucoup. Pouvez-vous documenter l'impact de la diversification sur les producteurs, notamment sur les nouveaux producteurs québécois?
[Français]
M. Pellerin: Le plus gros impact de la diversification dans l'Ouest canadien pour l'Est du Canada, au cours des dernières années, a été la politique de l'Alberta du Crow Offset, qui a un peu simulé l'abandon du Programme de transport du grain de l'Ouest.
Ce programme de compensation de l'Alberta a provoqué une augmentation substantielle de la production porcine en Alberta, de l'ordre de 8 à 10 p. 100, pendant les années où le programme a été appliqué. S'il fallait que la conséquence soit la même dans toutes les provinces de l'Ouest.... Bien sûr, c'est un marché dans lequel le Québec, l'Ontario et les Maritimes ont déjà investi, et il y a sûrement une conséquence directe au niveau du surplus que cette production-là pourrait connaître au Canada. Le prix pourrait être déprécié, d'autant plus que le gouvernement fédéral, dans le même budget, réduit d'environ 30 p. 100 les programmes de sécurité du revenu de ces mêmes productions.
On pourrait se retrouver dans une situation assez pénible si l'abandon du Programme du transport du grain de l'Ouest provoquait une augmentation substantielle des productions animales dans l'Ouest canadien.
Le pire exemple serait probablement que la subvention ou la compensation de l'Ouest soit payée indifféremment à tous les producteurs de l'Ouest qui détiennent des acres de terre, même si ces gens-là n'exportaient pas de céréales, donc aux producteurs de l'Ouest qui produisaient du grain et le donnaient en pâture à leurs animaux. Or, si ces gens-là recevaient une compensation dans le cadre de l'abandon du Programme du transport du grain de l'Ouest, ils pourraient immédiatement, puisqu'ils n'ont pas de grain à exporter, réinvestir cet argent-là pour augmenter la production animale, ce qui nous semble tout à fait contraire à l'esprit du programme de compensation annoncé.
Le programme devrait servir, je le répète, à donner une compensation aux producteurs qui exportaient du grain et qui veulent continuer d'exporter du grain.
[Traduction]
Le président: Merci, Marlene. Je sais que vous devez partir.
Monsieur Chrétien, aimeriez-vous poser une autre question?
[Français]
M. Chrétien: Après vous.
[Traduction]
Le président: Je vais poser ma question après vous, si vous avez encore des questions.
[Français]
M. Chrétien: Merci beaucoup, monsieur le président, de votre compréhension.
Pour clarifier ce qu'a dit Mme Cowling lorsqu'elle a parlé des trains, dans ma région, et je pense que c'est à peu près la même chose chez vous, monsieur le président, le train n'a maintenant plus d'importance pour les agriculteurs.
Ma coopérative de Disraeli, qui est la 18e en importance, et même la 5e en importance au Québec, utilise le camion depuis une dizaine d'années parce qu'elle avait un très mauvais service de train. Presque toutes les coopératives sont construites à quelques mètres de la voie ferrée, mais les trains de la compagnie ferroviaire offraient un service exécrable. Les wagons arrivaient 10 à 12 jours en retard et souvent le grain avait pris l'eau et était de qualité médiocre à cause des wagons-trémies. La la livraison se fait donc maintenant par camion.
J'ai été élevé près d'une voie ferrée. Lorsque j'étais petit gars, les porcs étaient expédiés par train, la moulée arrivait par train, tout se faisait par train ou presque. Mais maintenant, on ne se sert du train que dans 1 ou 2 p. 100 des cas. C'est insignifiant.
M. Pellerin: Au Québec, on consacre beaucoup de temps à cela. Depuis quelques années, le gros débat porte sur la transformation des voies ferrées en pistes cyclables. On fait du lobbying auprès des compagnies de chemin de fer pour s'assurer que lorsqu'on crée des voies cyclables, les sorties n'aboutissent pas sur nos terres.
M. Chrétien: Je voudrais, monsieur le président, revenir à autre chose. Quand vous en avez parlé, j'ai été distrait par la personne qui supervise les comités. Il s'agit de la recherche qui a été faite par un professeur de l'Université Laval, si j'ai bien compris.
M. Pellerin: L'Université McGill; le Collège Macdonald.
M. Chrétien: Alors, c'est le Collège Macdonald qui a fait une étude exhaustive et qui a constaté qu'à cause de la seule disparition de la LTGO - j'ai été très surpris, moi aussi, lorsque j'ai lu cela dans le journal - entraînerait des pertes pouvant aller jusqu'à 46 millions de dollars par année. Je ne sais pas si le gouvernement était conscient de cet effort additionnel qu'on demandait aux agriculteurs québécois.
M. Pellerin: Dans notre présentation, on est plutôt modérés. Si on suivait l'étude de M. Coffin mot à mot, il faudrait additionner les deux montants. Il parle d'un impact, pour le Québec, de près de 75 ou 77 millions de dollars parce qu'il additionne les deux effets. Si on choisissait un effet ou l'autre, ce serait 24 ou 46 millions de dollars. Il y a deux effets isolés: quand on compte à la tonne, et quand on compte par tête affectée. M. Coffin et ses collègues prétendent qu'il faut additionner les deux effets. Nous n'allons pas aussi loin. Nous vous donnons simplement le résultat brut de leurs travaux. Nos propres économistes avaient évalué cela à 20 millions de dollars, alors que le gouvernement fédéral nous parlait d'un impact d'à peu près 10 millions de dollars pour le Québec. C'est M. Yvon Proulx, qui a participé au dernier comité d'experts sur le fameux Programme de transport du grain de l'Ouest, qui avait évalué à au-delà de 20 millions de dollars l'impact annuel de l'abandon du Programme de transport du grain de l'Ouest.
M. Coffin n'est pas en dehors de l'ordre de grandeur. C'est tout à fait dans l'ordre de grandeur qu'on avait prévu.
M. Chrétien: Monsieur Pellerin, je me suis toujours intéressé de très près à l'agriculture québécoise, même avant d'acquérir ma ferme. Si ma mémoire est bonne, Jean-Luc Pepin, qui était ministre des Transports, avait voulu modifier le Nid-de-Corbeau et l'UPA avait alors sorti ses griffes.
Je me souviens d'une manifestation monstre ici, sur la Colline parlementaire, et là on a abandonné cela. L'UPA, évidemment, a eu ses craintes concernant la diversification, mais à part ça, il n'y a pas eu de manifestation du tout. Est-ce que c'est parce qu'à l'époque, on avait mal présenté la modification du Nid-de-Corbeau ou était-ce une formule différente, ou encore avez-vous évolué, vous aussi, et êtes-vous d'accord que les agriculteurs fassent leur part pour abaisser le déficit annuel du pays?
M. Pellerin: J'aimerais d'abord traiter du premier commentaire. C'est sûr que la situation a évolué. Tout le monde a évolué depuis 15 ans. La situation a changé à certains endroits.
Le façon de mettre fin au programme est différente de celle qui avait été prévue en 1980. La situation financière des producteurs, autant dans l'Est que dans l'Ouest du Canada, en particulier celle des producteurs de céréales de l'Ouest, a beaucoup changé depuis 15 ans. On nous dit que les terres de 30 ou 40 p. 100 des producteurs de Saskatchewan seraient reprises ou gérées par la Société du crédit agricole. C'est une situation qui n'existait pas en 1980.
L'âge moyen des producteurs de l'Ouest canadien est de 10 à 15 ans supérieur à l'âge moyen des producteurs de l'Est canadien. Donc, cela a sûrement un impact différent de celui d'il y a 15 ans. Par conséquent, nos craintes par rapport à la diversification sont différentes de celles qui pouvaient exister il y a 15 ans.
Cependant, on continue à privilégier certaines choses. On a participé, depuis 15 ans, à des comités pour essayer de trouver des façons d'abandonner ce programme-là. Il existe un argument plus pressant aujourd'hui, et c'est la situation financière des gouvernements. Les gouvernements des 20 dernières années au Canada nous ont mis dans une situation financière qui est très différente de celle qui prévalait à la fin des années soixante-dix. Tout le monde admet cela assez facilement.
Alors, il existe sûrement une flexibilité nouvelle, qui est présente chez tous les Canadiens. Cependant, on vous prévient quand même que l'abandon de ce programme-là, avec les compensations qui sont offertes, risque de provoquer des changements dans la production agricole de l'Ouest canadien, mais aussi de l'Est canadien. C'est cette partie-là qui nous intéresse aujourd'hui.
On demande au gouvernement canadien de surveiller les conséquences qui pourraient résulter de l'abandon de ce programme-là et d'apporter les correctifs nécessaires. Vous savez, le gouvernement a annoncé un programme de compensation dans l'Ouest et un certain programme d'adaptation dans l'Est, mais pour nous, ça ne se terminera pas là. On n'abandonne pas un programme de 100 ans en pensant que les conséquences ne vont durer que quelques mois. C'est impossible!
Les conséquences vont peut-être se faire sentir sur plusieurs générations. Ce programme a duré pendant plusieurs générations. Pour nous, l'abandon de ce programme est un événement historique. C'est la voie ferrée canadienne. C'est une des choses par lesquelles on a uni les 10 provinces. Rappelez-vous votre histoire! On vient d'abandonner ce programme-là.
M. Chrétien: Monsieur Pellerin, vous savez que je défends d'abord et avant tout les producteurs agricoles québécois. À la Chambre, j'ai fait plus d'un discours décriant l'iniquité du dernier Budget, et vous en avez été témoin. Je suis un de ceux qui disent, par exemple, que 1,6 milliard de dollars et 300 millions de dollars... Il y a 1 milliard de dollars qui s'ajoutent à cela, et on pourrait, semble-t-il, les utiliser pour exporter à des entreprises privées, mais non de gouvernement à gouvernement. Si on additionne tout cela et qu'on tient compte du fait que les 1,6 milliard de dollars ne sont pas imposables, ça dépasse les 3,7 ou 3,9 milliards de dollars.
Hier, deux gros cultivateurs de la Saskatchewan sont venus témoigner. Il y en a un qui a 3 500 acres. Je me rappelle que j'ai sursauté et Bernie aussi. Le 1,6 milliard de dollars représentait pour lui entre 25 000$ et 30 000$. Il disait que c'était des «peanuts», de l'aide sociale, et il nous recommandait de donner ces 1,6 milliard de dollars aux universités ou encore aux organismes à but non lucratif.
Je trouve qu'on en donne trop et lui, il trouvait que c'était des «peanuts», que ça ne valait pas la peine. Vous voyez qu'il est difficile de jauger les situations dans ce pays. Encore ce matin, j'ai fait une allocution sur le projet de loi C-92 visant à modifier la Commission canadienne du blé et j'ai répété qu'il n'y avait pas eu d'équité envers les producteurs agricoles québécois et ontariens.
J'aimerais connaître votre point de vue, monsieur Pellerin.
M. Pellerin: Vous me dites que la situation a changé. Je vous disais aussi que la situation avait changé depuis 1980. Ce qui était prévu en 1980 comme paiement aux producteurs, et ce qui leur est offert maintenant, c'est un peu différent. Comme vous dites, 25 000$, 30 000$ pour un producteur qui a 3 000 acres de terre, ce n'est sûrement pas un incitatif à la diversification aussi important que ce à quoi les producteurs de l'Ouest s'attendaient. À un certain moment, ces gens-là réclamaient 7 milliards de dollars en compensation.
C'est une des raisons pour lesquelles notre réaction est moins virulente qu'elle ne l'était en 1980. Mais nos arguments de fond sont les mêmes. On réclame un traitement comparable, équitable.
Si le producteur de l'Ouest reçoit 20 000$ exempts d'impôt parce que le programme est abandonné dans l'Ouest canadien, on réclame que le producteur de l'Est, qui recevra x milliers de dollars à cause de l'abandon du programme des céréales de l'Ouest, reçoive l'argent en un ou deux paiements et non pas sur six ans comme c'est proposé. Cet argent devrait aussi être libre d'impôt.
Pourquoi traite-t-on différemment l'Ouest et l'Est? C'est la même chose.
M. Chrétien: Merci, monsieur Pellerin.
[Traduction]
Le président: Je pense qu'une des choses que ce Comité ne veut pas faire c'est de commencer à échanger de l'argent d'est en ouest. Cependant, je prends très au sérieux ce que vous avez à dire sur la compensation, et sur le fait qu'elle sera peut-être différente dans chacune des régions, et nous allons y réfléchir.
Ce qui importe peut-être plus, c'est de savoir comment nous pouvons nous assurer qu'il y aura traitement juste et équitable à l'avenir. Voilà sur quoi je veux me pencher. Je vous avoue que je me pose des questions à ce sujet. L'industrie agricole canadienne dans son ensemble est extrêmement complexe. Je trouve fort étrange qu'aucune étude d'impact n'ait été faite pour ce qui est de l'aide au transport des céréales fourragères. Je vous l'avoue très franchement. On aurait dû faire une étude d'impact.
Je crois que vous avez dit qu'il devrait y avoir une certaine surveillance de ce qui va se passer. Vous avez absolument raison. On ne peut pas abandonner un programme vieux de 100 ans et s'attendre à ce que des conséquences... [Difficultés techniques - Éditeur]. Les conséquences se feront sentir très longtemps, et le gouvernement fédéral a sa part de responsabilité dans ce domaine.
Comment pourrions-nous surveiller la situation? En outre, si nous relevons des problèmes suite à cette surveillance, comment proposez-vous qu'on s'y attaque?
[Français]
M. Pellerin: On se rejoint. Vous devez avoir des origines de producteur.
[Traduction]
Le président: Oui, absolument.
[Français]
M. Pellerin: On se rejoint beaucoup lorsqu'on dit qu'on n'abandonne pas un programme vieux de 100 ans en pensant qu'il n'y aura à cela que des conséquences court terme. Comment surveille-t-on? Je pense que le gouvernement a une reponsabilité morale.
Le producteur qui s'est établi au cours des dix dernières années dans les Maritimes ou au Québec en bénéficiant de la subvention au transport du grain de l'Est, s'est établi en connaissant les conditions de marché auxquelles son père et son grand-père avaient été habitués. Il s'installe et construit dans ces conditions. Le gouvernement décide de changer les conditions pour les ramener aux «vraies» conditions du marché. Les vraies conditions datent de 100 ans. Le gouvernement a la responsabilité morale de surveiller la baisse des quantités agricoles produites dans ces régions, ainsi que les contraintes sur l'augmentation des coûts de production.
Tous les producteurs ne feront pas faillite, mais beaucoup seront affectés. Soyez assurés que le gouvernement du Québec, la Coopérative fédérée du Québec, nos partenaires de la Coalition de 1980 et nous, de l'UPA, allons surveiller de près les impacts de l'abandon de ces programmes au Québec.
J'ai l'impression que les gouvernements des Maritimes vont aussi surveiller ces impacts. L'Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle-Écosse vont sûrement avoir un grand intérêt à surveiller ces impacts. Il existe une responsabilité première au gouvernement fédéral. La fermeté ou l'agressivité des partenaires du Québec de 1980 pourrait revenir si, avec les années, on s'apercevait que les impacts sont pires que ceux qu'on avait escomptés et si le gouvernement n'était pas prêt à intervenir dans les prochaines années relativement à des effets supplémentaires qui n'auraient pas été prévus au moment où on se parle.
Comment réglera-t-on le problème? Ne choisissons pas de moyens aujourd'hui sans en avoir mesuré les impacts.
Si le gouvernement prenait au moins la décision de mesurer ces impacts, on aurait déjà un outil sur lequel on s'entendrait pour intervenir à nouveau dans deux, trois ou cinq ans, parce qu'on est convaincus que les impacts vont aller jusque-là.
[Traduction]
Le président: Ce matin, le ministre de l'Agriculture du Manitoba a témoigné. Il a dit qu'il croyait beaucoup au potentiel du marché du porc. Il n'est pas le seul à partager cet avis au pays. Parfois je me demande d'où les économistes tirent l'information leur indiquant qu'il existe toutes sortes d'excellents débouchés pour les produits. Après tout, ce ne sont pas eux qui font la culture ni la vente, ou eux qui prennent des risques.
Pour ce qui est de la ventilation des programmes au Canada - Marlene en a parlé un peu plus tôt, il existe des programmes provinciaux au Québec, en Alberta, ainsi que dans toutes les autres provinces. Si les dix provinces se font concurrence pour l'investissement en capital, ou pour d'autres investissements, dans leur industrie porcine, ou pourront-elles trouver des débouchés? Et quelles seront les conséquences de leurs actions?
Est-ce qu'il y a un rôle pour le gouvernement national dans ce domaine? Le marché laitier a évidemment des limites. Et nous savons tous quel effet un surplus de production a sur le prix. Croyez-vous qu'il y a des risques si chaque province encourage ses producteurs à investir davantage dans les domaines A, B ou C? En fin de compte, ce sont les producteurs qui souffrent des conséquences.
[Français]
M. Pellerin: Comme le même exercice de retrait se fait un peu partout au Canada, au Québec, nous avons prévenu le gouvernement provincial que nous, producteurs agricoles et représentants des producteurs agricoles, ne nous opposerions pas vraiment à ce que les gouvernements se retirent de tous les mécanismes de soutien financier si, en contrepartie, ils nous accordaient des choses qui ne coûtent rien. Je pense entre autres à des pouvoirs suplémentaires pour qu'on puisse aller chercher dans le marché les revenus nécessaires pour couvrir nos coûts de production.
Nous avons rencontré la Régie des marchés agricoles du Québec, l'organisme qui chapeaute la mise en marché des produits agricoles. Nous lui avons servi le même avertissement et nous lui avons demandé de faire preuve d'imagination pour essayer de trouver toutes les avenues possibles pour nous permettre de mettre en marché nos produits de façon à en retirer des revenus nous permettant de vivre de la production agricole.
Plus récemment, j'ai rencontré le Conseil national des produits de la ferme à Ottawa, où j'ai tenu les mêmes propos: Vous êtes un organisme responsable de la mise en marché des produits agricoles canadiens; nous vous offrons notre collaboration pour étudier toute forme possible d'amélioration des lois qui nous permettrait de mettre en marché nos produits agricoles pour que nous puissions en tirer des revenus décents permettant aux producteurs et productrices de vivre de l'agriculture.
Ce pays n'a pas à être fier du fait que, de plus en plus, les producteurs sont obligés d'aller chercher des revenus extérieurs à la ferme pour venir à bout de vivre. Le Québec est une des dernières provinces où la principale occupation des producteurs agricoles est l'agriculture. Partout ailleurs au Canada, le revenu extérieur à la ferme est plus important que le revenu de la ferme. Il y a des tendances que le gouvernement devrait prendre en considération. Si on veut des gens spécialisés qui deviennent des professionnels de l'agriculture, il faut leur permettre d'avoir les outils pour vivre de cette agriculture.
[Traduction]
Le président: Je me demande s'il est possible pour les gouvernements, ou pour des personnes qui connaissent très bien le marché, d'analyser les données disponibles aux producteurs pour en savoir davantage sur ces supposés marchés.
Prenez, par exemple, la Commission canadienne du blé, qui connaît très bien son marché. La commission est même au courant du temps qu'il fait dans ces pays d'exportation, des cultures qu'on y trouve, et d'autres informations. Ne serait-il pas plus utile d'avoir accès à ces données plutôt que de dépendre uniquement des marchés boursiers? Est-ce que c'est une avenue qui mérite d'être explorée?
[Français]
M. Pellerin: Certainement. J'ai, avec grande fierté, participé au cours des dernières années à la mise en place de Canada Pork International, une compagnie dont la propriété est divisée entre les producteurs et les transformateurs canadiens et qui s'occupe de reconnaissance de marchés à travers le monde.
Malheureusement, toutes ces bonnes informations qu'on va chercher à travers le monde ne nous permettent pas encore de tirer des revenus qui nous permettraient de vivre de cette production porcine, surtout dans la période qu'on traverse actuellement. Les prix sont intensément déprimés, mais c'est quand même un outil qui nous donne un certain espoir d'avoir à l'avenir une meilleure percée sur les marchés d'exportation, si on peut survivre jusque-là.
[Traduction]
Le président: Certains se demandent, les provinces Maritimes notamment, si une province peut être auto-suffisante en matière de production de céréales, une fois le Programme d'aide au transport des céréales fourragères abandonné. La Nouvelle-Écosse est loin de pouvoir subvenir à ses propres besoins. Quel est le niveau d'auto-suffisance en matière de production de céréales fourragères au Québec?
Ensuite, sur le même sujet, certaines personnes dans les provinces Maritimes croient qu'il y a d'autres sources de céréales fourragères, telles les sources étrangères, par exemple. Que pensez-vous de ces deux questions?
[Français]
M. Pellerin: Je parle de la situation du Québec, actuellement. Pour ce qui est du grain produit pour la consommation animale, le Québec, ces dernières années, a été très près de l'autosuffisance. En moyenne, au cours des dernières années, le Québec a été à 80 p. 100 autosuffisant en matière de production céréalière.
Certaines provinces Atlantiques, curieusement, au cours des dernières années, à cause du commerce mondial un peu fou, auraient eu avantage à acheter du grain sur le marché mondial plutôt que sur le marché canadien, par voie fluviale, du grain en provenance de l'Est. Il est un peu bizarre que la Nouvelle-Écosse en particulier puisse s'approvisionner sur le marché mondial à moins cher qu'au Canada et reçoive son grain d'un bateau européen ou américain qui passerait près de Saint-Jean. C'est un peu bizarre, mais c'était la situation ces dernières années.
Malgré toutes les bonnes intentions annoncées lors de la signature du GATT, je suis à peu près convaincu que cette situation-là peut durer encore pendant plusieurs années. Il sera alors plus avantageux de s'approvisionner sur le marché mondial à des prix ridicules que de mettre en marché de façon intelligente les céréales qu'on produit ici, au Canada.
[Traduction]
Le président: Merci.
Marlene, avez-vous d'autres questions? Il nous reste juste assez de temps pour une question.
Mme Cowling: Oui, j'ai une toute petite question sur la diversification et la valeur ajoutée.
Est-ce que vous insistez davantage sur la valeur ajoutée dans votre ligne de production?
[Français]
M. Pellerin: Il n'y a pas de doute que c'est dans les deuxième et troisième transformations que les gens de la transformation du Québec investissent. Je vais donner l'exemple du porc, que je connais beaucoup mieux. Même s'il ne produit que 33 p. 100 de la production canadienne, le Québec fait 50 p. 100 des exportations au Japon. Pourquoi le Québec fait-il 50 p. 100 des exportations de viande porcine au Japon? C'est parce qu'on est allés plus loin dans le travail: désossage, dégraissage, coupes plus raffinées, inspecteurs japonais sur les chaînes d'abattage du Québec. On est allés encore plus loin pour répondre aux besoins du client.
C'est vrai aussi pour nos exportations aux États-Unis où, depuis les dernières années, à cause de différentes raisons, la douane américaine en particulier, on cherchait à exporter le moins de kilos possible. On a donc procédé au désossage, à la transformation de la viande; on a fabriqué du jambon, du bacon. Tous ces produits ont été surexploités au cours des dernières années pour s'assurer qu'on puisse conserver ces marchés. On va continuer. C'est la tendance normale.
[Traduction]
Le président: Merci, messieurs. Votre présentation nous a été fort utile. Merci beaucoup.
La séance est levée.