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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 23 octobre 1995

.1537

[Traduction]

Le coprésident (M. Milliken): La séance est ouverte. Nous avons le quorum ce qui va nous permettre de commencer la réunion de cet après-midi.

[Français]

Il me fait plaisir d'accueillir aujourd'hui l'honorable Gregory T. Evans, commissaire à l'intégrité pour la province de l'Ontario;

[Traduction]

M. Derril McLeod, c.r., commissaire aux conflits pour la province de la Saskatchewan; M. Wayne Mitchell, commissaire aux intérêts des parlementaires de la province de Terre-Neuve; l'hon. Ted Hughes, commissaire aux conflits d'intérêts pour la province de la Colombie-Britannique etM. Robert Clark, commissaire à la déontologie de la province de l'Alberta.

Nous sommes ravis d'avoir un si grand nombre de témoins avec nous aujourd'hui. Cela va nous permettre, je l'espère, d'éviter des heures et des heures de témoignages. Nous allons écouter un maximum de témoignages cet après-midi. Nous avons très hâte d'entendre ce que vous avez tous à nous dire.

M. Evans est venu la semaine dernière, comme vous le savez peut-être, et son exposé nous a paru instructif et fort utile. Nous espérons que vous allez échanger des commentaires et entamer peut-être une discussion entre vous, ce qui aiderait grandement le comité dans ses travaux.

Nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir ici. Je sais que vous assistez à une conférence à Ottawa. J'espère que la séance d'aujourd'hui constituera pour vous une préparation intéressante aux réunions que vous êtes sur le point de tenir, je crois.

Je crois savoir que vous souhaitez tous présenter un exposé. Je ne me mêlerai pas de fixer un ordre de présentation, à moins que vous ne le souhaitiez.

M. Epp (Elk Island): Tout le monde ne souhaite peut-être pas présenter un exposé mais nous serons très heureux d'entendre les personnes qui souhaitent intervenir; les membres du comité poseront ensuite des questions. Nous allons donc commencer par M. Mitchell.

M. D. Wayne Mitchell (commissaire aux intérêts des parlementaires, province de Terre-Neuve): Merci. J'aimerais effectivement vous présenter un bref exposé. J'en ai déjà remis le texte aux membres du comité. J'essaierai d'être bref.

C'est un grand plaisir pour moi que de comparaître devant les honorables membres du Sénat et de la Chambre des communes dans le cadre de vos audiences publiques sur l'élaboration d'un code d'éthique à l'intention des parlementaires. C'est en outre un honneur pour moi que de partager avec vous mon expérience ainsi que celle de mes collègues des différentes provinces canadiennes dans le domaine de l'évolution des règles d'éthique applicables aux députés des assemblées législatives provinciales.

.1540

Après l'élection générale du 3 mai 1993, une des premières mesures qu'ait prises l'administration libérale de Clyde Wells a été d'adopter un projet de loi régissant les conflits d'intérêts à l'intention des membres de l'assemblée législative et des ministres du gouvernement. Cette loi a remplacé les lignes directrices en matière des conflits d'intérêts chez les ministres qui existaient depuis 1982.

Le premier ministre Wells m'a fait un grand honneur lorsqu'il a proposé de faire de moi le premier commissaire aux intérêts des parlementaires. J'ai été encore plus touché lorsque la législature a donné son accord unanime à cette nomination, avant la proclamation de la nouvelle loi le 1er juin 1993.

Le cadre législatif régissant les conflits d'intérêts des députés provinciaux de Terre-Neuve et du Labrador impose aux députés et aux ministres certaines normes de conduite destinées à éviter que ces personnes n'utilisent leurs charges dans leur propre intérêt et ceux de leur famille; à cet effet, il prévoit la nomination d'un commissaire indépendant ayant le pouvoir de se prononcer sur la façon dont les députés respectent la loi, celui de tenir des enquêtes et de recommander à l'assemblée législative des sanctions en cas de violation de ces normes. Cette loi prévoit la divulgation au commissaire de tous les intérêts privés que possèdent les députés et leurs familles, et ce sur une base annuelle ou en cas de changement important dans leur situation personnelle. Elle impose l'obligation de divulguer publiquement certains intérêts privés définis que possèdent les députés et leurs familles et elle prévoit la présentation d'un rapport annuel à l'assemblée législative concernant l'application de la loi en général et le bureau du commissaire en particulier.

Je me propose, après brève réflexion, d'aborder certains aspects de l'expérience que j'ai acquise depuis deux ans, qui pourraient intéresser le comité.

Les normes légales en matière de conflits d'intérêts à Terre-Neuve établissent certaines règles que les députés doivent respecter dans l'exécution de leurs fonctions publiques. Ces normes constituent également pour les tiers un moyen objectif de vérifier que les fonctions publiques sont bien séparées des affaires privées des députés. Plus précisément, notre loi contient certaines interdictions, notamment l'article 22 qui traite de trafics d'influence, l'article 23 de l'utilisation de renseignements d'initiés; l'article 24 concerne les cadeaux et les avantages personnels; l'article 28 traite de la vente d'investissements comme moyen d'échapper à ses obligations; l'article 32 interdit de conclure des contrats avec le gouvernement dans certaines circonstances et l'article 33 est une disposition générale qui concerne la participation à des décisions favorisant des intérêts personnels.

Il y a une chose que je voudrais souligner après ce bref examen de cette loi, c'est que, d'après moi, l'on peut dire que la véritable éthique consiste à respecter ces normes sans qu'il soit nécessaire d'avoir à en vérifier l'application.

En plus des normes qui s'appliquent à tous les députés de l'assemblée législative, la loi de Terre-Neuve contient certaines dispositions qui tiennent compte du caractère particulier de la position des ministres. L'article 27, notamment, interdit aux ministres d'exercer des activités commerciales; l'article 29 énonce que les ministres ne devraient pas se laisser influencer par des offres d'emplois; l'article 30 énonce que les ministres ne peuvent conclure un contrat ou obtenir des avantages dans un délai d'un an après avoir quitté un ministère ou un organisme du gouvernement à moins que le commissaire ne les y autorise; et aux termes de l'article 33, les ministres ne participent pas aux décisions de leur ministère ou du cabinet qui peuvent favoriser leurs propres intérêts privés.

J'aimerais signaler en second lieu que compte tenu de l'attention qu'accorde le public - du moins dans la province que je représente - aux mesures ministérielles, il est indispensable que les ministres respectent scrupuleusement ces normes de conduite plus exigeantes, si l'on veut que la population ait confiance dans la qualité des normes d'éthique gouvernementales.

Il est incontestable que la disposition la plus contraignante de la loi de Terre-Neuve sur les conflits d'intérêts est l'article 36 qui oblige tous les députés à divulguer au commissaire tous leurs intérêts financiers et ceux de leur famille. En pratique, la réaction négative qu'a suscitée cette obligation assez vaste s'est atténuée au cours des ans. C'est peut-être parce qu'on accepte plus facilement que le fait d'occuper une charge publique comporte certaines obligations en matière de divulgation. Il est également possible que les députés comprennent mieux que l'attention qu'ils sont régulièrement obligés d'apporter aux rapports entre leurs fonctions publiques et leurs intérêts financiers privés est à l'avantage de tous.

.1545

Certains ont critiqué en privé et dans un cas contesté publiquement l'obligation qu'impose la loi de Terre-Neuve sur les conflits d'intérêts de déclarer intégralement les intérêts financiers privés du conjoint. Ce sujet est abordé dans les deux rapports annuels que j'ai présentés à l'assemblée législative de Terre-Neuve. Notre époque privilégie les droits et libertés individuels et il est difficile de convaincre tout le monde de la nécessité d'étendre l'application des normes en matière de conflits d'intérêts aux membres de la cellule familiale. Cela n'a pas empêché un comité spécial de l'assemblée législative de Terre-Neuve de proposer tout récemment encore de reconnaître, par voie législative, la nécessité d'étendre ces normes au conjoint, selon la définition générale donnée à l'alinéa 20g) de notre loi.

La divulgation publique des intérêts financiers aux termes de l'article 37, avec les exceptions de l'article 20, permet à la population d'exercer un certain contrôle sur ces aspects sans immixtion excessive dans les affaires privées des députés et de leurs familles. Les déclarations publiques des membres prévues par cette loi sont mises à jour tous les ans. En pratique, il est rare que l'on demande d'examiner les rapports de divulgation publique des députés mais leur existence permet aux membres du public de s'informer et de tirer des conclusions sur la conformité à l'éthique de la conduite des députés.

Le commissaire aux intérêts des députés est un représentant indépendant de l'assemblée législative aux termes de l'article 34, ce qui lui permet de surveiller l'application de la loi. Le commissaire exécute sa mission en rencontrant de façon régulière les députés dans le but de préciser les rapports pouvant exister entre leurs fonctions publiques et leurs intérêts personnels et en leur fournissant des conseils sur la façon d'éviter les situations de conflits d'intérêts.

Je n'ai encore pas eu à recommander de sanctions aux termes de l'article 45. En outre, l'article 35 prévoit la présentation de rapports annuels à l'assemblée législative au sujet de l'administration de la loi, ce qui permet à la population de se tenir au courant des questions d'éthique que peut soulever la conduite des députés provinciaux.

La loi sur les conflits d'intérêts de la province de Terre-Neuve permet uniquement au commissaire de procéder à une évaluation objective de la conduite du député en question par rapport aux normes prévues par la loi. La loi ne mentionne aucunement la question des conflits d'intérêts apparents, comme le fait celle d'autres provinces. Il m'arrive de formuler des suggestions dans le but de renforcer la confiance du public dans les activités des députés mais c'est aux députés eux-mêmes de veiller à ce que leurs actes soient au-dessus de tout soupçon.

Il est encourageant de noter que certains députés ont été jusqu'à s'imposer à eux et à leur famille des normes plus exigeantes que celles que prévoyait la loi. C'est particulièrement vrai dans le cas des membres du cabinet dont le premier ministre entend une conduite irréprochable.

Je dirai pour terminer que ce n'est que grâce à un effort collectif que l'on peut veiller à ce que les membres du gouvernement respectent un code d'éthique. Il faut commencer par amener les députés à se conformer strictement à des normes de conduite précises et à toujours agir en tenant compte des réactions que pourrait avoir un public bien informé. Le commissaire de son côté doit fournir des avis pour éviter l'apparition de situations de conflits d'intérêts. Il a d'ailleurs le pouvoir, en cas de besoin, d'imposer certaines obligations et de proposer des sanctions en cas de violation de ces normes de conduite.

Les titulaires de charges publiques doivent faire preuve d'ouverture et de transparence pour que le public ait la possibilité de s'informer de leur situation et de poser ensuite des jugements éclairés sur la façon dont ces personnes exécutent leurs missions.

Je suis heureux de vous dire qu'à Terre-Neuve et au Labrador il y a eu un effort concerté pour imposer au gouvernement des normes très exigeantes en matière d'éthique. C'est ce qu'illustre le fait que l'assemblée législative a adopté une loi en 1993 concernant la conduite des députés. Il faut également signaler que les deux rapports annuels du commissaire ne mentionnent aucun manquement important à ces normes et ne font pas non plus ressortir la nécessité d'imposer des sanctions. C'est ce qu'indique également, d'après moi, le fait qu'au cours des deux années qui ont suivi l'adoption de cette loi il n'y a guère eu de critique au sujet des conflits d'intérêts.

Je remercie le comité de m'avoir donné l'occasion de lui faire part de ces réflexions personnelles sur l'éthique, selon mon point de vue, qui est celui du commissaire aux intérêts des parlementaires de la province de Terre-Neuve et du Labrador. Monsieur le président, je vous remercie.

Le coprésident (M. Milliken): Merci beaucoup, M. Mitchell. Nous avons apprécié vos commentaires.

Monsieur Clark, souhaitez-vous faire une déclaration?

M. Robert C. Clark (commissaire à la déontologie, province de l'Alberta): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, chers collègues, c'est un honneur pour moi que de prendre la parole devant le comité cet après-midi.

J'aimerais présenter très rapidement quelques remarques.

.1550

La situation de la divulgation publique des intérêts personnels des députés dans ma province est très semblable à la situation qu'a décrite mon collègue de Terre-Neuve.

Je dois à vrai dire signaler qu'au départ certains députés ont manifesté un certain ressentiment à l'égard des obligations en matière de divulgation ou les ont remises en question. Il faut signaler que les députés albertains remplissent un document de divulgation, qu'ils me remettent comme l'exigent mes fonctions de commissaire et que j'examine en présence du député et de sa conjointe. L'étape suivante consiste à préparer un rapport de divulgation publique. Ce rapport est envoyé au député qui l'examine avant qu'il soit transmis au bureau du greffier pour divulgation publique.

Le rapport qui est transmis au bureau du greffier en vue d'être divulgué au public ne mentionne pas le nombre d'actions que possède le député concerné ni le montant de ses engagements financiers. Le rapport indique que le député possède des actions dans tel organisme ou telle société ou que celui-ci a une obligation envers telle institution financière ou qu'il a cautionné un prêt consenti par telle compagnie fiduciaire. On a considéré qu'il était suffisant d'indiquer au public la nature des intérêts personnels du député.

Je donne également, monsieur le président, un autre conseil aux députés en ce qui concerne l'application de cette loi. Respecter cette loi, c'est bien mais j'invite toujours les députés à faire également ce que j'appelle le test du nez, c'est-à-dire à exercer leur flair. Réfléchissez à ce que vous faites et si cela ne vous gêne pas qu'on en parle en première page du Calgary Herald ou de l'Edmonton Journal, c'est que vous avez probablement parfaitement raison de le faire. Le test du nez est un peu plus exigeant que les critères de la loi mais je crois que ce conseil a été utile à un certain nombre de députés.

Le deuxième commentaire que je souhaite faire, monsieur le président, concerne l'article 41 de notre loi. Cette disposition est assez particulière parce qu'elle permet à un député de consulter le commissaire et de lui signaler qu'il projette d'effectuer un investissement particulier ou d'apporter un changement important à sa situation financière. Le député peut ensuite demander au commissaire de lui remettre des directives ou des conseils écrits sur la façon dont il devrait agir pour respecter la loi canadienne. Dès qu'un député me présente ce genre d'information, je suis tenu en vertu de la loi de lui fournir une réponse. S'il m'a donné tous les renseignements nécessaires et que le conseil fourni est erroné, je dis aux gens en blaguant que c'est la faute de ma secrétaire, mais ce n'est pas vrai; la responsabilité de l'erreur incombe au commissaire, et ce n'est que justice, parce que c'est lui qui fournit le conseil au député.

Lorsque j'ai été nommé au poste de commissaire il y a bientôt trois ans de cela, un des membres du comité qui recommandait cette approche à l'assemblée législative de l'Alberta m'a dit que je devrais essayer de me comporter comme un prêtre 90 p. 100 du temps et 10 p. 100 comme un policier. J'ai constaté que c'était là un conseil fort utile et je sais qu'il y a un bon nombre de mes collègues qui ont eux aussi adopté cette approche.

Quatrièmement, j'aimerais parler des rapports. Tout comme mon collègue de Terre-Neuve, nous présentons un rapport au président de l'assemblée, qui est ensuite examiné par l'assemblée. Pour ce qui est des budgets et des modifications législatives, nous faisons rapport à ce que nous appelons le comité des agents législatifs, le comité auquel l'ombudsman, le vérificateur général, le directeur général des élections et le commissaire à l'information et à la protection de la vie privée présentent leurs propres rapports. C'est ce comité qui s'occupe de notre budget. Il examine également nos demandes de modifications législatives qu'il présente ensuite directement à l'assemblée législative.

Je vais terminer mes commentaires, monsieur le président, en vous donnant deux exemples des situations que nous avons rencontrées en Alberta.

Bien évidemment, il faut toujours partir de l'idée que tous les députés sont honnêtes. En vertu de la loi, un député peut demander au commissaire d'effectuer une enquête sur sa conduite ou sur celle d'un autre député. Il est arrivé qu'un des ministres du gouvernement de l'Alberta me demande d'effectuer une enquête au sujet d'allégations qui le concernaient. Il s'agissait de la vente d'actions de Syncrude Canada Limited. Selon des articles dans les médias, la ministre avait utilisé son influence pour fournir des renseignements initiés à une société qui avait acheté des actions de Syncrude. Le frère de la ministre était le président de la société acheteuse. La ministre avait demandé que l'on fasse enquête. L'enquête a été terminée en une semaine. J'ai eu le plaisir de faire savoir à l'assemblée que la ministre avait non seulement eu une conduite sans reproche dans ce cas mais que la députée avait en outre été au-delà de ce qu'exigeait la loi.

L'important dans cette histoire c'est que les députés ont pu constater qu'après mon enquête et mon rapport la presse n'a plus parlé de cette histoire. Les nouvelles n'en ont plus parlé. Je ne pense pas qu'on en ait jamais discuté publiquement par la suite.

.1555

Le dernier commentaire que je voudrais faire porte sur un cas qui s'est produit l'année dernière où un membre de l'opposition est venu me voir et m'a dit très franchement qu'il avait contrevenu à la loi. Il participait en tant qu'associé à une petite entreprise qui avait effectué des travaux pour le ministère des Travaux publics. Ce député est venu me voir pour me demander d'effectuer une enquête. C'est ce que j'ai fait. Le député avait été très direct et très ouvert à ce sujet. Il a fini par rembourser le bénéfice qu'il avait réalisé sur les travaux effectués pour le ministère des Travaux publics. Le rapport a été transmis à l'assemblée législative. J'ai indiqué qu'il avait effectivement contrevenu à la loi mais que, d'après moi, ce n'était pas intentionnel. J'ai recommandé qu'on n'impose dans ce cas aucune sanction.

En fin de compte, il n'y a qu'un seul article qui a été publié dans les médias albertains au sujet de ce député. Je crois que cela a en fait bien montré que cette personne était fort honnête.

En conclusion, cette loi qui est en vigueur en Alberta depuis trois ans s'applique aux 83 députés de l'assemblée législative de l'Alberta ainsi qu'aux 70 hauts fonctionnaires de la province. Il s'agit des sous-ministres et des personnes qui occupent des postes à plein temps dans des commissions et des offices. Les hauts fonctionnaires n'ont pas à préparer de rapport de déclaration publique; ils effectuent une déclaration privée au commissaire.

Dans l'ensemble, je suis d'accord avec les observations qu'a formulées mon collègue de Terre-Neuve. Le système qui existe en Alberta semble bien fonctionner.

Le coprésident (M. Milliken): Je vous remercie beaucoup monsieur Clark. Voilà une expérience intéressante.

Monsieur Hughes, voulez-vous aussi nous faire un exposé?

M. E.N. (Ted) Hughes (commissaire aux conflits d'intérêts, province de la Colombie-Britannique): Oui, monsieur le président. Je vais parler en utilisant mes notes mais je vais également improviser quelques commentaires.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant le Comité mixte spécial sur un code d'éthique à l'intention des sénateurs et des députés de la Chambre des communes, ici à Ottawa.

Je vais diviser mes remarques en trois parties. Je vais tout d'abord décrire rapidement l'expérience de la Colombie-Britannique. Deuxièmement, je vais aborder d'autres questions qui, je le sais, intéressent le comité. Troisièmement, je vais tenter de préciser comment ce domaine va évoluer, puisque ma dernière année au poste de commissaire aux conflits d'intérêts pour la Colombie-Britannique est déjà bien entamée.

Notre loi a été adoptée en juillet 1990. J'ai été nommé commissaire intérimaire le 1er octobre de la même année. Cette loi est entrée en vigueur le 1er décembre 1990. Ma nomination par intérim a été confirmée par l'assemblée législative le 23 mai 1991 qui m'a nommé pour une période de cinq ans. Cela fait donc plus de cinq ans que j'occupe ce poste, si l'on tient compte des quelques mois d'intérim.

Notre loi vise tous les députés de l'assemblée législative. Elle n'établit aucune distinction, pour ce qui est de son application, entre les membres du conseil exécutif et les députés de l'assemblée, même s'il y a certains articles qui traitent uniquement du rôle et de la position des membres du cabinet, comme l'article 8, qui interdit le fait d'exploiter une entreprise et d'exercer une profession d'une façon qui empêcherait un haut fonctionnaire du gouvernement d'exercer ses fonctions.

Les trois responsabilités qui m'ont été confiées ne diffèrent pas beaucoup de celles qu'ont décrit aujourd'hui mes collègues de Terre-Neuve et de l'Alberta: premièrement, il y a la divulgation; deuxièmement, un rôle consultatif et troisièmement un volet enquête. Je vais rapidement parler de ces différents aspects.

Je tiens tout de même à préciser avant de commencer que j'occupe un poste à mi-temps. Ma rémunération ne représente que la moitié de celle du vérificateur général, de l'ombudsman et du commissaire à l'information et à la protection de la vie privée. Ce sont les trois autres hauts fonctionnaires de l'assemblée. C'est moi qui ai proposé cet arrangement parce que mes fonctions ne sont pas aussi exigeantes que celles qu'ils exercent, pour ce qui est du temps qu'il faut leur consacrer et du personnel nécessaire. En un sens, ce poste est aussi important que le leur mais il n'est pas situé au coeur de l'activité gouvernementale comme le sont les trois autres, en particulier compte tenu du fait que dans notre province mes responsabilités visent uniquement les députés, à la différence de l'Alberta où cette loi vise également les hauts fonctionnaires.

.1600

Les modalités de la divulgation sont identiques pour les 75 députés. Je vais vous remettre une série de formulaires que les députés doivent remplir annuellement. Il y a un formulaire sur lequel ils doivent indiquer leurs biens, leurs dettes et leurs sources de revenu. Il y a également un autre formulaire où l'on doit indiquer les participations qu'ont les députés dans des sociétés privées.

Selon notre système, lorsqu'un changement important intervient dans la situation financière d'un député au cours d'une année donnée, il faut remplir un formulaire et le déposer à mon bureau dans les 30 jours. J'ai une copie de ce formulaire avec moi. Je serais heureux de vous remettre tout cela.

J'estime avoir bénéficié de la collaboration totale des députés tout au cours de mon mandat. Il est possible que si les députés ont toujours été prêts à venir me voir tous les ans et à remplir les documents c'est que, à la différence de ce qui se passe dans certaines autres provinces, ils ne sont pas tenus de chiffrer le montant des biens qu'ils possèdent. Ils sont tenus d'indiquer les biens qu'ils possèdent, ainsi que leur nature, mais ils n'ont pas à me révéler la valeur de ces biens. Je peux le leur demander en cas de besoin mais je le fais rarement parce que c'est le fait d'être propriétaire du bien ou d'avoir une dette - et non sa valeur - qui peut déclencher le conflit. Je crois que c'est ce qui explique en partie la collaboration dont j'ai bénéficié. Les conjoints ont d'ailleurs manifesté le même esprit de coopération.

Selon la loi, je suis tenu de rencontrer chaque année le député et son conjoint, si cela est possible. Au cours de ma première rencontre avec le député, j'ai insisté pour que le conjoint y assiste. J'ai été plus laxiste par la suite sur ce point.

Ma deuxième fonction est celle de conseiller, comme l'a mentionné mon collègue de l'Alberta. Il arrive fréquemment que des députés me demandent de fournir une opinion sur certaines questions. Je crois pouvoir dire que la plupart de ces demandes émanent de ministres, mais ce n'est pas toujours le cas.

Vous voudriez certainement savoir quels sont les sujets sur lesquels ils sollicitent mon opinion. Je peux vous dire qu'ils souhaitent que je confirme que le projet qu'ils entretiennent n'est pas visé par une des nombreuses interdictions de la loi.

La principale interdiction est celle de l'article 2.1 de la loi qui énonce:

La loi définit auparavant ce qu'est un conflit d'intérêts et un conflit d'intérêts apparent.

Je ne pense pas me tromper en disant que la Colombie-Britannique est la seule province où la loi traite des conflits d'intérêts apparents. Cette définition du conflit d'intérêts apparent a été ajoutée par l'assemblée qui a adopté une modification en 1992; elle reprend pour l'essentiel la définition qu'en avait donnée le juge en chef Parker dans l'enquête Stevens qui avait été menée au cours des années 1980.

L'article qui traite des conflits d'intérêts apparents ne m'a jamais causé de problème. Je sais que c'est une disposition controversée pour certains de mes collègues. Il est vrai que cette disposition impose une norme plus exigeante aux députés mais je crois pouvoir dire que cela a donné d'assez bons résultats.

La loi interdit également d'utiliser des renseignements d'initiés, d'influencer des personnes en position d'autorité, d'accepter des dons et des avantages et de passer des marchés avec le gouvernement. Les députés m'écrivent en ma capacité de conseiller pour que je leur fournisse une opinion sur ces questions.

Le troisième volet de mes fonctions concerne les enquêtes. Aux termes de la loi, les membres de l'assemblée législative ou les membres du public peuvent solliciter mon opinion lorsqu'ils prétendent qu'il y a eu violation de la loi et précisent qu'il existe des motifs raisonnables de penser qu'il y a eu effectivement violation de cette loi. Il m'appartient ensuite, si j'estime qu'ils ont établi les faits essentiels, de mener une enquête et de présenter un rapport à l'assemblée. En outre, si je constate qu'il y a eu violation de la loi, il m'est possible de recommander que l'on impose une peine ou une sanction et c'est l'assemblée législative qui décide s'il y a lieu de donner suite à ma recommandation.

.1605

Je suis heureux de pouvoir dire qu'au cours de ces cinq années et même davantage, je n'ai jamais eu l'occasion de recommander que l'on impose une peine ou une sanction à un député. Je crois que c'est un bon signe, pour plusieurs raisons. J'hésiterais certainement pas à faire si j'estimais que les circonstances l'exigeaient mais nous avons réussi à faire fonctionner le système - malgré les enquêtes qui ont eu lieu - sans que cette mesure soit nécessaire.

S'il avait fallu imposer une sanction, ç'eut été à l'assemblée et certainement pas au commissaire de le faire, mais c'est toutefois lui qui l'aurait recommandé. L'assemblée peut donner suite ou non à la recommandation qui lui est faite, mais cela ne s'est jamais produit en Colombie-Britannique.

Je sais qu'il existe une ou deux autres questions au sujet desquelles vous aimeriez connaître ma réaction. La première est celle de savoir s'il convient d'instituer un ou deux systèmes. C'est-à-dire que vous avez à l'heure actuelle un système où le conseiller en éthique s'occupe des hauts fonctionnaires du gouvernement du Canada. Cette division ne se justifie pas en Colombie-Britannique, parce que notre système a relativement bien fonctionné mais, comme je l'ai dit, il existe des dispositions spéciales pour les députés et les secrétaires parlementaires. Un système à deux volets serait sans doute très faisable à Ottawa pour le gouvernement fédéral, en particulier puisque vous avez commencé avec un système de portée assez restreinte. Je n'ai rien à ajouter sur ce point parce que cela serait peut-être la meilleure solution pour vous.

On se demande également s'il faut un système d'origine législative - c'est-à-dire, un système qui est créé par une loi, comme c'est le cas au niveau provincial. Je peux dire que je ne pense pas que le système utilisé en Colombie-Britannique aurait été aussi efficace s'il n'y avait pas eu cette loi.

À Ottawa, le code actuel applicable aux titulaires de charges publiques, si j'ai bien compris, diffère de la loi provinciale sur ce point, parce qu'il n'est pas fondé sur une loi. Mais je sais que vous avez entendu les commentaires de notre éminent collègue, M. Wilson, le conseiller en éthique ici, et je crois qu'il sera en mesure, ou a été en mesure, de vous dire si le système actuel est efficace et suffisant.

Je dirai simplement que j'estime que le système utilisé en Colombie-Britannique n'aurait pas été aussi efficace s'il n'était pas fondé sur une loi, renforcé par les possibilités de mener des enquêtes et d'imposer de sanctions, en cas de besoin.

Quant à la question de savoir à qui on devrait confier l'administration d'un tel système, et de décider si cette personne devrait venir de l'intérieur du gouvernement ou de l'extérieur, je crois qu'il y a des avantages des deux côtés. Lorsque j'ai été nommé à ce poste, j'avais une bonne expérience du gouvernement, puisque j'avais été sous-ministre pendant plusieurs années, et je crois que cette expérience est un élément important parce que l'on sait comment fonctionne le gouvernement. J'avais également l'avantage d'avoir reçu une formation juridique mais je ne pense pas que cela soit vraiment nécessaire puisque l'on peut toujours obtenir des conseils juridiques pour un certain prix. Je suis sûr que plusieurs d'entre vous êtes d'accord avec moi sur ce point.

La dernière partie de mon exposé va porter, comme je l'ai mentionné au départ, sur la façon dont j'entrevois l'avenir. Je vais commencer par poser la question suivante: pourquoi les provinces et les territoires ont-ils adopté une loi et Ottawa un règlement pour les titulaires de charges publiques. Quelle est la raison d'être de ces systèmes?

J'estime que la force d'une nation se nourrit des principes moraux et éthiques qui l'inspirent et que la valeur de ces principes moraux et éthiques dépend en fin de compte des citoyens qui ont été démocratiquement élus pour diriger notre pays, que ce soit dans les provinces, les territoires ou les municipalités. L'élément central sur lequel s'appuient les principes et valeurs morales et éthique est l'intégrité, l'honneur et le mérite de nos représentants élus démocratiquement à tous les niveaux de gouvernement.

Je pense que les lois sur les conflits d'intérêts qui se sont multipliées au Canada, au niveau des provinces, au cours des deux à sept dernières années, visaient à solidifier cet élément central et à veiller à ce que les représentants élus ne soient pas tentés de faire passer leur intérêt personnel avant l'intérêt général. C'est probablement ce qui a également été à l'origine du code à l'intention des titulaires de charges publiques en vigueur à Ottawa mais également à celle de la création de ce comité qui a été chargé d'examiner la situation des parlementaires, des ministres et des secrétaires parlementaires de la Chambre des communes.

.1610

Dans l'ensemble, la loi relative aux conflits d'intérêts qui a été adoptée en Colombie-Britannique - et je crois ailleurs aussi au Canada - a permis d'accomplir ce que souhaitaient ces rédacteurs. C'est pourquoi je préconise, pour ce qui est des conflits d'intérêts, de préserver la situation actuelle, avec les conditions imposées, en particulier avec les mécanismes d'exécution de la loi.

J'ai toutefois constaté au cours des cinq années pendant lesquelles j'ai occupé ce poste que les conflits d'intérêts ne constituent qu'un aspect, qu'un volet si vous voulez, de l'intégrité, de la moralité, de la confiance et de l'honneur de la fonction publique. Je crois que la loi actuelle, pour ce qui est de la Colombie-Britannique du moins, devrait viser davantage l'intégrité, la confiance et l'honneur de la fonction publique, comme elle l'a fait pour la notion de conflits d'intérêts.

J'ai l'intention de déposer mon rapport annuel pour l'année 1996 au début de l'année prochaine et de recommander, comme j'y ai fait allusion discrètement dans le passé mais plus nettement dans ce prochain rapport, que l'on insère dans notre loi des articles que l'on retrouve dans les lois en vigueur dans d'autres régions du pays. Je vais vous donner un exemple.

La loi sur les conflits d'intérêts des Territoires du Nord-Ouest, commission dont mon collège l'hon. Greg Evans et moi ont l'honneur de faire partie, dispose que les députés:

Il y a bien sûr aussi le code fédéral, qu'administre M. Wilson à la demande du premier ministre et dont la disposition liminaire énonce:

Vous avez également entendu notre collègue, l'hon. Greg Evans qui vous a parlé la semaine dernière des progrès réalisés en Ontario, depuis que la loi sur les conflits d'intérêts a été remplacée par une loi sur l'intégrité des députés. Une des clauses du préambule de cette loi précise: «Les députés doivent agir d'une façon intègre et impartiale qui soutienne l'examen le plus rigoureux.»

Je félicite mon collègue ontarien pour le rôle qu'il a joué dans l'introduction de ces changements grâce à cette nouvelle loi. Je suis heureux qu'ils aient décidé, comme ils vous l'ont dit la semaine dernière, d'inclure également les conventions parlementaires ontariennes dans cette loi. Je suis personnellement en faveur d'insérer une déclaration plus précise, comme celles dont je vous ai parlé, qui existent dans les Territoires du Nord-Ouest et dans ce code. Néanmoins, ces modifications vont dans la bonne direction.

Si l'on devait retenir ma suggestion, la loi de la Colombie-Britannique devrait, tout comme cela a été fait en Ontario, changer de titre et s'appeler la loi sur «l'intégrité» ou «la déontologie» et le titre de commissaire devenir, comme c'est le cas en Ontario, celui de «commissaire à l'intégrité», titre que porte mon collègue M. Evans, ou comme en Alberta, celui que porte mon collègue M. Clark, de «commissaire à la déontologie».

Si l'on ajoutait ce genre de disposition à la loi, j'estime que cela permettrait d'imposer la norme la plus élevée possible puisque l'on regrouperait dans une loi les exigences que l'on retrouve en Colombie-Britannique en matière de conflits d'intérêts et celles du code fédéral, qui seraient combinées à un mécanisme efficace d'enquête et d'application de la loi.

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D'après moi, c'est au sujet de la question de l'application de la loi qu'il vous sera le plus difficile de faire une recommandation. J'espère que les explications que je vous ai données aujourd'hui sur le fonctionnement de notre système vous seront utiles, tout comme les observations que j'ai faites. Je suis certain que nous serons tous heureux d'apporter des précisions sur ces questions si vous le souhaitez.

Merci.

Le coprésident (M. Milliken): Merci beaucoup, monsieur Hughes. Je vous remercie d'avoir remis ces documents au comité. Je suis certain qu'ils nous seront très utiles.

Monsieur McLeod.

M. Derril G. McLeod, c.r. (commissaire à l'information et à la protection de la vie privée pour la Saskatchewan et commissaire aux conflits d'intérêts pour la Saskatchewan): Monsieur le président, j'aimerais formuler un certain nombre de remarques. Je vais tenter d'être bref.

L'économie générale de la loi de la Saskatchewan n'est guère différente de celle des autres provinces et il n'est donc pas utile que je revienne sur ce point.

Les exigences en matière de divulgation sont légèrement plus strictes que celles de la Colombie-Britannique. Dans les états de divulgation restreinte, il faut révéler les montants mais dans les états de divulgation publique que je prépare et qui peuvent être consultés par le public, la valeur des biens, le montant des dettes ou les choses de ce genre ne sont pas mentionnés. Ces états sont en fait beaucoup plus limités.

Cela est nouveau pour moi. Il n'y a qu'un an et demi que j'occupe ce poste mais j'ai pu rencontrer tous les députés et leurs conjoints au cours de ce processus.

Je suis convaincu, et je suis heureux de pouvoir vous le dire, que cette loi n'a pas été récemment adoptée en Saskatchewan - et je crois que c'est la même chose partout - parce que les députés sont tout d'un coup devenus malhonnêtes ou se sont trouvés en situation de conflit d'intérêts. Il me paraît important de souligner que ce genre de loi cherche principalement à protéger la population et non pas les députés. Elle a un rôle secondaire et c'est lui qui, bien entendu, intéresse directement les députés. Elle permettra de renforcer la réputation de probité et d'intégrité des institutions que sont le Sénat, la Chambre des communes, et les assemblées législatives provinciales.

Il faut rappeler que la plupart du temps les conflits d'intérêts sont bien plus apparents que réels. Je viens de terminer ma première enquête en Saskatchewan au sujet d'une allégation de conflit d'intérêts qui concernait le ministre des Services sociaux. On pensait qu'il y avait conflit. Il m'a suffi de 10 jours pour préparer et présenter un rapport qui a démontré qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts et que la loi sur les conflits d'intérêts des députés n'avait pas été violée.

Une autre chose à ne pas oublier est que ces dispositions ne sont pas très différentes de celles des codes d'éthique qui existent et qu'ont adopté toutes sortes d'institutions et de professions, en fait, elles leur sont très ressemblantes. Les universités, les hôpitaux, les professions juridiques, les professions médicales et les professions infirmières ont toutes adopté ce genre de code, pour la même raison. Il s'agit de protéger le public et de renforcer la confiance de celui-ci dans ces institutions, car cette confiance n'a pas toujours été très forte. je crois que l'on pourrait appliquer ici le même raisonnement.

Je voudrais ensuite faire remarquer que selon ces lois, les institutions, qu'il s'agisse des assemblées législatives provinciales ou de la Chambre des communes, sont les juges suprêmes pour ce qui est de la décision à prendre dans une affaire donnée. Je n'ai rencontré qu'une exception dans les lois que j'ai examinées. La loi de la Saskatchewan, la loi ontarienne et celle de la Colombie-Britannique je crois, prévoient toutes une sanction que peut imposer le juge d'une cour provinciale en cas de violation des articles concernant l'embauche d'un député qui n'exerce plus de fonctions publiques.

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Cela me pose certains problèmes. Une ministre qui démissionnait de son poste m'a demandé ce qu'elle pouvait faire et ce qu'elle ne devait pas faire. Je n'ai pu que lui dire que son projet me paraissait probablement acceptable mais que, selon la loi, c'était à un juge de la cour provinciale d'en décider. Je ne comprends pas très bien la raison d'être de ce genre de disposition et je ne suis pas convaincu qu'elle puisse être utile.

Évidemment, il est toujours tentant de vouloir aller dans tous les détails. Il est rarement bon d'aller trop dans les détails parce que le particulier exclut le général. Dans l'enquête que je viens de mener à bien, j'ai été amené à décider si le ministre avait respecté ou non l'article 5 de la loi de la Saskatchewan. La loi de la Saskatchewan énonce:

La loi définit ensuite ce qu'il faut entendre par famille. La famille comprend uniquement les enfants à charge. Je suis en train de faire enquête et le député est accusé d'avoir aidé son fils, mais celui-ci a 22 ans. Comme il n'est pas à sa charge et il n'est pas visé par la loi. Tout cela est un peu idiot et ne sert à rien. Cela est ridicule.

La loi ontarienne par exemple contient un article très intéressant. Je dois dire qu'en fait cette loi est, à bien des égards, une loi modèle qui mériterait d'être étudiée par quiconque souhaiterait adopter une loi dans ce domaine.

Mon dernier commentaire concerne la nomination de personnes de l'extérieur - au poste de commissaire, comme les gens qui sont ici - pour les charger d'interpréter la loi et de fournir des conseils. N'oublions pas que la décision finale appartient à la Chambre, au Sénat ou à l'assemblée législative provinciale. Il est probablement sage de confier ce poste à une personne qui ne fait pas partie de la Chambre ou de l'institution. Nous sommes cinq ici, nous avons tous des antécédents différents et, je crois, nous avons tous été nommés de la même façon, par vote unanime de nos assemblées législatives, ce qui indique probablement qu'il est possible de trouver des personnes capables d'effectuer ce travail, des personnes en qui les députés puissent avoir confiance, qui sont capables d'examiner assez rondement des questions qui risqueraient autrement de s'envenimer et de créer des difficultés, et de les régler.

Le coprésident (M. Milliken): Merci, monsieur McLeod.

Monsieur Evans, voulez-vous prendre la parole aujourd'hui ou allez-vous vous contenter de déposer votre mémoire?

M. Gregory Thomas Evans (commissaire à l'intégrité de la province de l'Ontario: Vous savez que je réponds toujours oui.

Le coprésident (M. Milliken): Très bien.

M. Evans: J'ai remis aux députés le rapport annuel qui, comme vous pourrez le constater je l'espère, contient un certain nombre de commentaires et de critiques. J'ai estimé avoir le droit de faire un certain nombre de commentaires compte tenu de mon ancienneté dans ce poste. Vous trouverez ensuite des questions et réponses dans lesquelles nous avons supprimé les noms, et qui sont d'une grande utilité pour le personnel des bureaux de circonscription.

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Je vous ai également remis un exemplaire de la nouvelle loi sur l'intégrité des députés qui a été adoptée au cours de la dernière session mais n'est entrée en vigueur que le 6 octobre. J'ai également remis au coprésident le compte rendu du hansard concernant l'adoption de la loi ainsi que sa proclamation. Je vous ai laissé ces comptes rendus pour que vous sachiez comment cette loi a été préparée.

Nous n'avons guère obtenu de résultats avec le comité de l'administration de la justice. Nous avons obtenu trois rapports différents qui ne nous ont guère aidé. C'est pourquoi j'ai décidé de demander au premier ministre de l'époque, Bob Rae, s'il accepterait de demander aux chefs des deux autres partis de choisir quelqu'un. Il n'était pas nécessaire que cette personne soit député, en fait, un député a été nommé, il est maintenant procureur général, mais les deux autres étaient des avocats. Nous avons travaillé ensemble pendant longtemps, avec mon chef de cabinet, Lynne Harris, et nous avons consacré beaucoup de temps à la rédaction de ce projet de loi.

Les trois membres qui ont été choisis par leurs partis ont rencontré un comité de leur caucus - je crois que ce comité comprenait quatre ou cinq personnes - et ils leur ont présenté le projet, ils ont obtenu leurs réactions, ils ont ensuite parlé à un groupe plus important et bientôt, l'ensemble du caucus était au courant de ce que nous faisions. Lorsque le projet de loi a été présenté pour adoption, il n'a rencontré aucune difficulté.

Je crois que je recommanderais cette méthode, qui consiste à commencer avec un petit groupe et ensuite à faire accepter le projet par votre groupe parlementaire. Cela permet de confier ce travail à des gens qui n'ont pas une attitude trop partisane, si je peux utiliser ce mot, parce que l'intégrité n'est pas l'apanage d'un seul parti. Cela a très bien fonctionné. Nous avons reçu de nombreuses critiques, beaucoup d'objections, mais cela nous a obligé à beaucoup améliorer le projet de loi.

Nous sommes maintenant en train d'expliquer la loi aux députés et à leur personnel. Ils vont tous recevoir des exemplaires de la loi dès que l'imprimeur de la Reine, ou son homologue en Ontario, va nous les envoyer. Nous avons déjà rencontré le personnel des bureaux de circonscription d'un des partis - je crois qu'il y en avait près de 250 - et nous leur avons expliqué le sens de cette loi et son utilité. À la suite de ces rencontres, nous avons reçu beaucoup de demandes de renseignements. Nous y répondons, je crois, très rapidement et les députés pensent que c'est le cas. Mais nous en recevons encore davantage.

Après cette réunion, nous avons été inondés pendant quelques jours. Nous avons reçu une avalanche de fac-similés et d'appels téléphoniques mais j'estime qu'il est excellent que les députés sachent qu'ils peuvent s'adresser à nous. Auparavant, il y en avait qui ne prenaient pas la peine de le faire, et c'est eux qui connaissaient certains problèmes. C'est pourquoi je leur dis de s'adresser à mon bureau et de demander conseil. Si je leur donne un mauvais conseil, je risque ma tête, mais si c'est le député qui ne fait rien et se place dans une situation difficile, c'est sa tête qu'il risque.

Mon rôle consiste, d'après moi, à protéger le public, mais cela revient également à protéger les députés. Tout cela s'équilibre. Je dis aux députés que s'ils acceptent d'appliquer les règles, je serais leur ami. S'ils ne le font pas, je ne serai pas vraiment leur ami parce que je serais obligé de faire enquête.

Nous nous occupons uniquement des conflits réels. C'est une conclusion tout à fait objective. Il me paraît difficile de s'occuper des conflits apparents, parce que cela est très subjectif. Il y a des gens qui sont soupçonneux, qui aiment critiquer, et l'on risque de recevoir trop de plaintes.

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Nous nous occupons uniquement des plaintes émanant des députés, du conseil exécutif ou de la Chambre elle-même, l'assemblée. Mais si un membre du public nous appelle pour porter plainte, je lui demande s'il connaît le nom de son député. S'il ne le connaît pas, je lui donne le nom des députés des circonscriptions voisines. Et comme ils sont habituellement des députés de l'opposition, ils acceptent avec plaisir de transmettre cette plainte pour embarrasser le gouvernement. Notre bureau ne refuse pas les plaintes des membres du public, pourvu qu'elles soient justifiées.

Je pense également qu'avant de faire enquête sur ces plaintes, il serait bon qu'elles soient examinées par un membre du groupe parlementaire. Je crois avoir déclaré il n'y a pas longtemps qu'il y a toujours un irresponsable, parfois plusieurs. Mais si la plainte n'est aucunement fondée et qu'elle est rejetée, cela n'est pas bon pour la personne qui l'a présentée, ni pour le parti qu'elle représente ni pour l'assemblée législative.

Vous savez, on attaque facilement les institutions de nos jours. On attaque le Parlement, on attaque les législateurs, on attaque les représentants municipaux, on attaque les juges et les tribunaux. Mais les gens offrent rarement des critiques constructives. Lorsque vous leur demandez de qui ils parlent, ils disent «eh bien, pas mon député» ou «pas le juge devant qui j'ai comparu mais l'autre» - des choses très vagues de ce genre. C'est pourquoi ce type de loi est essentiel lorsqu'il s'agit de gros sous. Le gouvernement manie beaucoup d'argent. Les chefs d'entreprise pensent que cela est nécessaire et c'est une industrie en pleine croissance. Si les besoins n'étaient pas là, on n'assisterait pas à une telle croissance et je peux vous dire que c'est un domaine qui se développe. C'est une industrie en pleine croissance.

Je suis certain que tous les députés et mes collègues ici ont tous hâte de répondre à vos questions. Je vous remercie de m'avoir invité. Je serais très heureux de répondre à vos questions.

Le coprésident (M. Milliken): Merci, monsieur Evans.

J'aimerais poser une question avant de lancer le débat, question que j'adresserai peut-être à tous les membre du panel. Dans l'exécution de vos fonctions, vous êtes tous amenés à faire enquête sur des plaintes et à exercer ensuite divers types de pouvoirs. Sans vouloir entrer dans tous ces détails, voilà ce que j'aimerais savoir: la plupart des plaintes que vous recevez visent-elles des membres du cabinet, ou la plupart d'entre elles concernent-t-elles des membres du cabinet et les secrétaires parlementaires, en d'autres termes, ceux que nous pourrions décrire comme étant les titulaires d'une charge publique? Êtes-vous en mesure de discerner une tendance dans ces plaintes?

M. Evans: Je dirais le cabinet.

M. Hughes: Je suis d'accord. En Colombie-Britannique, c'est ce qui se passe dans l'ensemble. Pas exclusivement mais peut-être dans 80 p. 100 des cas.

M. Clark: Je dirais 60/40, le cabinet étant visé par 60 p. 100 des plaintes. Je dirais tout de même que nous n'avons pas reçu beaucoup de plaintes ces trois dernières années, il est donc difficile de dégager une tendance.

M. Mitchell: Il n'y a pas beaucoup de plaintes à Terre-Neuve. Mais, parmi celles que nous avons reçues, la plupart portaient sur le processus de décisions au niveau du cabinet, même si certaines concernaient des députés de l'assemblée législative.

M. McLeod: Je n'ai reçu qu'une plainte. Elle concernait un ministre.

Le coprésident (M. Milliken): J'ai sur ma liste le sénateur Gauthier.

Le sénateur Gauthier (Ontario): Merci monsieur le coprésident.

Bienvenue à Ottawa et à tout ce que cette ville offre. Je suis heureux de constater que vous tenez votre réunion à Ottawa. Cela est bon pour l'industrie du tourisme dans ma collectivité. Je viens d'Ottawa, comme vous le savez fort bien, et je suis un peu partial lorsqu'il s'agit de vanter ma région. Bienvenue donc.

Cela dit, je n'aime pas beaucoup les connotations qu'a en anglais et en français l'expression «code of conduct», en français, on dit code d'éthique, code of ethics in English.

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J'estime - et je crois que la plupart de vous l'avez également mentionné - qu'il est préférable d'utiliser le mot intégrité ou commissaire à l'intégrité, parce que c'est une notion plus large qu'un code de conduite, qui veut dire en fait bonne conduite. Je crois que lorsque l'on dit «code de conduite», on veut parler de «bonne» conduite, sans le dire.

Je crois que c'est M. McLeod qui a déclaré que d'après lui l'expression «commissaire à la déontologie» était acceptable. Avez-vous parlé d'intégrité et de déontologie... L'Ontario utilise le terme «intégrité»?

Je suis d'accord avec vous. Je pense qu'il faut faire une distinction entre un code de déontologie, un code de conduite et un code d'intégrité. Un code de conduite a souvent pour but de restaurer auprès du public la réputation des hommes politiques. Je ne le sais que trop - cela n'est pas possible; quel que soit le nombre de codes de conduite que l'on décide d'adopter.

Nous avons une loi sur le Parlement du Canada - je pense que vous connaissez tous cette loi - qui contient beaucoup de choses au sujet des conflits d'intérêts, des perceptions du public, comme la façon dont les députés et les sénateurs dépensent les fonds publics. La plupart des plaintes que nous avons reçues depuis 20 ans que je siège au Parlement ont porté sur cette question - la façon dont les députés dépensent les fonds publics, que ce soit pour des raisons partisanes, par intérêt personnel ou pour un autre motif.

Nous n'avons pas de commissaire à l'intégrité ici. Il y a un commissaire à la déontologie qui s'occupe des postes de ministres... ou des titulaires de charges publiques. Mais c'est surtout la mauvaise utilisation des fonds publics attribués aux députés qui a fait l'objet de critiques.

Je voudrais vous poser une question. Est-ce que dans votre assemblée législative, tous les députés ont un budget à administrer, et si c'est le cas, avez-vous reçu des plaintes à ce sujet? Est-ce que ces plaintes portent surtout sur la façon dont le député administre son budget ou portent-elles sur d'autres questions?

M. Evans: Nous ne nous occupons pas de leurs budgets.

Le sénateur Gauthier: Qui s'en occupe?

M. Evans: C'est l'administration qui s'en occupe, notre bureau de régie interne.

Le sénateur Gauthier: Est-ce que c'est la même chose pour toutes les autres assemblées législatives?

M. McLeod: Il y a eu une modification en 1994, portant sur le chapitre 40 de la loi sur les conflits de la Saskatchewan. Le commissaire est autorisé à examiner la façon dont les députés ont utilisé leurs indemnités, leurs débours, ainsi que les sommes destinées à acheter des biens et des services. Cette question est soumise au commissaire si un député conteste la décision qu'a rendue le président de la Chambre au sujet de la façon dont le député a utilisé ses indemnités.

Le sénateur Gauthier: Dans vos provinces, l'un d'entre vous a-t-il été amené à examiner la façon dont les titulaires de charges publiques ont administré des fonds publics, le budget attribué à leurs bureaux, par exemple? Vous me dites que vous n'êtes pas responsable de ces questions-là. Savez-vous s'il y a eu des plaintes à ce sujet? Si vous me dites que vous n'avez jamais reçu de plaintes concernant la façon dont un député de votre assemblée législative -

M. McLeod: Nous avons connu quelques graves problèmes en Saskatchewan mais les responsables se sont retrouvé devant les tribunaux pour répondre à des accusations de fraude. On prétendait que certains députés avaient utilisé de façon irrégulière leurs indemnités et leurs budgets.

Le sénateur Gauthier: Mais personne d'autre n'a été saisi d'un cas de ce genre?

M. McLeod: Il s'agit plutôt de droit pénal lorsque l'on parle d'utilisation irrégulière de fonds.

Le sénateur Gauthier: Je le sais bien. C'est pourquoi j'ai abordé le sujet. C'est un des fléaux que nous connaissons à Ottawa.

M. Clark: En Alberta, il y a une entente sous la responsabilité du président... et des officiers législatifs. Ils sont chargés de contrôler la façon dont les députés administrent leurs budgets. Les plaintes à ce sujet qui ont été envoyées à mon bureau ont tout simplement été transmises au président.

Le sénateur Gauthier: Le président vous a-t-il déjà consulté au sujet de...?

M. Clark: Officieusement.

Le sénateur Gauthier: Officieusement dans votre cas, monsieur Clark.

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M. Hughes: Vous abordez un domaine qui m'a déjà préoccupé.

Lorsque cette loi de la Colombie-Britannique a été modifiée en 1992, on a ajouté un article qui énonçait: «À la demande du lieutenant-gouverneur en conseil ou de l'assemblée législative, le commissaire peut accepter des missions spéciales s'il l'estime approprié.»

Cet article a été utilisé une seule fois. J'ai reçu une demande unanime, immédiatement après l'adoption de la modification en 1992, qui m'invitait à accepter une mission spéciale qui consistait à examiner la façon dont les indemnités comprises dans les budgets des bureaux des députés étaient dépensées. J'ai bien volontiers entrepris ce travail supplémentaire, j'ai rédigé deux rapports provisoires et un rapport final et j'ai consacré des centaines d'heures à cette question. J'ai formulé une série de recommandations qui ont été présentées au comité de régie de la Chambre, qui est présidé par le président.

Lorsqu'il y a deux ou trois mois j'ai reçu une plainte d'un député au sujet du fait que mes recommandations n'avaient pas été suivies d'effet, j'ai découvert que deux ans et demi plus tard, les membres du comité de gestion n'avaient pas encore examiné mes recommandations. Elles étaient restées sur les tablettes pendant tout ce temps. Je crois qu'on s'agite un peu en ce moment et que le président essaie d'organiser une réunion.

C'est sans doute à cause de cela que j'ai mentionné certaines choses aujourd'hui au sujet de l'intégrité. Ce travail n'avait rien à voir avec les conflits d'intérêts. Il s'agissait plutôt de vérifier que l'argent des contribuables avait été dépensé sagement; pourtant les recommandations que j'avais faites ont été mises de côté par le comité de gestion pendant deux ans et demi. Cela ne m'a pas fait plaisir mais ce n'est pas moi qui décide.

Le sénateur Gauthier: Pensez-vous que les assemblées législatives provinciales, comme l'assemblée fédérale, devraient demander au commissaire de jouer un rôle plus important pour ce qui est - comment dire? - du contrôle ou de la bonne utilisation des fonds par les députés? Devrait-il juger la façon dont les députés dépensent ces fonds?

M. Hughes: J'estime que si l'on présente des demandes particulières au commissaire, elles devraient avoir un lien avec la raison d'être de ce poste.

Le sénateur Gauthier: Pensez-vous que le rôle du commissaire devrait être étendu à ce genre de choses en Colombie-Britannique, par exemple?

M. Hughes: Non, je n'ai jamais pensé que c'était nécessaire.

Le sénateur Gauthier: Qu'en pensent les autres commissaires? Monsieur Clark?

M. Clark: Je suis d'accord avec M. Hughes. Cela n'est pas encore un problème.

J'aimerais peut-être ajouter qu'il est important de ne pas trop charger le rôle du commissaire si l'on veut qu'il continue à avoir les excellents rapports qu'il entretient avec les députés. Cela permettra au commissaire de continuer d'avoir des échanges très ouverts avec les députés.

Le sénateur Gauthier: Vous ne souhaitez donc pas élargir la portée de cette loi pour vous permettre de faire cela.

M. Clark: Je pense qu'il serait bon de faire certains changements mais je ne crois pas qu'ils devraient concerner la question des indemnités ou des dépenses des députés -

Le sénateur Gauthier: Y a-t-il quelqu'un qui pense que l'on devrait prévoir un rôle de ce genre?

M. Evans: Le président nous a effectivement posé quelques questions sur certains points mais non, je ne le souhaiterais pas.

Le sénateur Gauthier: Il vous paraît préférable de confier cela à la régie interne de la Chambre?

M. Evans: C'est exact.

Le sénateur Gauthier: Très bien, je suis d'accord avec vous.

Vous avez déclaré que vous aimeriez peut-être que l'on élargisse la portée de cette loi pour qu'elle englobe certains domaines supplémentaires. Pourriez-vous en mentionner quelques-uns?

Je dois dire qu'on nous a remis une étude très complète de toutes ces lois. C'est notre service de recherche qui s'en est chargé et il a fait de l'excellent travail. Je ne vais donc pas vous poser de questions au sujet de la C.-B. ou de l'Alberta mais j'aimerais simplement savoir comment vous voyez la possibilité d'élargir la portée de votre loi. Quel est le genre de choses que vous aimeriez prévoir?

M. Clark: Je crois que nous allons examiner cette loi probablement d'ici deux ans en Alberta et nous allons voir ce qu'a fait M. Evans en Ontario et en tirer des leçons. Il est très possible que nous envisagions ce genre de démarche. Voilà très franchement ce à quoi je pensais.

Le sénateur Gauthier: Puis-je vous poser à tous une question? Devrait-on appliquer des normes différentes aux titulaires de charges publiques et à ceux qui n'en sont pas titulaires mais qui sont des députés?

M. Evans: Oui.

M. McLeod: Oui.

M. Hughes: Oui.

M. Clark: Oui.

M. Mitchell: Oui.

Le sénateur Gauthier: Vous êtes donc tous d'accord. Je vous remercie beaucoup.

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Le coprésident (M. Milliken): Très bien, monsieur le sénateur.

Madame Brushett.

Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Merci, monsieur le président, et merci, messieurs, d'être venus ici cet après-midi. J'aimerais poser plusieurs questions et j'adresserai la première à M. Mitchell de Terre-Neuve.

Vous avez dit que les normes qu'impose le gouvernement de Terre-Neuve en matière d'éthique par votre entremise sont plus élevées que celles que prévoit la loi. Pourriez-vous nous donner un exemple d'une norme plus exigeante que vous auriez imposée?

M. Mitchell: À Terre-Neuve, c'est la loi qui fixe ces normes. Les députés qui souhaitent répondre aux attentes du public s'imposent parfois des normes plus exigeantes et je vais vous donner un exemple.

Selon notre loi, la cellule familiale comprend le conjoint, les enfants mineurs et les parents à charge. Je connais plusieurs députés qui ont décidé, à plusieurs reprises, de ne pas intervenir, même dans un cas où leurs frères participaient à l'examen de questions contractuelles avec le gouvernement, ou des choses de ce genre. Ces députés ont décidé eux-mêmes d'appliquer ce genre de normes, pour respecter des notions plus larges de déontologie et d'intégrité. Ce n'était pas une obligation imposée par le commissaire.

Mme Brushett: Merci beaucoup.

Monsieur Hughes, quels genres de sanctions seriez-vous prêt à fixer avant que la Chambre ou l'assemblée législative ne le fasse? En avez-vous imposé ou avez-vous uniquement présenté des recommandations?

M. Hughes: Ce sont uniquement des recommandations et la loi elle-même en précise la nature. Les voici: le commissaire peut recommander que le député soit réprimandé, que le député soit suspendu pendant une période précisée dans le rapport, que le député soit tenu de payer une amende pouvant aller jusqu'à 5 000 $ ou que le siège du député soit déclaré vacant jusqu'à ce que l'on tienne une élection dans sa circonscription électorale.

Comme je l'ai dit, il est heureux que ce ne soit pas au commissaire de décider d'imposer une sanction, ce qui me paraît normal. Il peut uniquement faire des recommandations. C'est la Chambre qui décide par un vote à la majorité. Je n'ai jamais eu à recommander une sanction mais voilà les sanctions que le commissaire peut imposer en vertu de la loi.

Mme Brushett: Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris; je crois toutefois que M. McLeod a déclaré qu'il pensait que c'était au commissaire de faire la recommandation finale et qu'il ne voyait aucune raison de confier cette tâche à un juge provincial. Vous ai-je bien compris?

M. McLeod: Oui.

Mme Brushett: Cela dit, je vais vous soumettre un cas. Supposons qu'un ancien ministre ait eu connaissance de renseignements qui n'avaient pas encore été rendus publics et qu'il décide ensuite de démissionner et de travailler pour une société privée ou supposons qu'il ait été exclu pour un an - je ne suis pas très sûre de la loi qui s'appliquerait à un tel cas - et si un membre du public estimait que cela crée un grave conflit ou que le député serait en mesure de fournir des renseignements extrêmement avantageux, ne pensez-vous pas que cela devrait faire l'objet d'une enquête publique?

M. McLeod: Il n'est pas facile d'échapper à la justice. Lorsqu'il existe une loi et un commissaire chargé de l'interpréter et de l'appliquer, il n'existe aucune raison de ne pas l'appliquer, en respectant les dispositions en vigueur, aux députés qui ne sont plus députés ou aux ministres qui ne sont plus ministres. J'ai uniquement mentionné cela parce que nous avons tous dit que les organes législatifs conservent le contrôle de toute cette question. Il y a effectivement une exception importante mais je ne suis pas sûr qu'elle soit justifiée. Ce n'est pas une question simple mais elle mérite d'être examinée, d'après moi.

Mme Brushett: Pensez-vous que le public serait d'accord avec vous?

M. McLeod: Je n'ai jamais réussi à me faire élire.

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Mme Brushett: Puis-je vous poser une dernière question? Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris certaines parties de l'exposé de M. Evans, de l'Ontario. Je crois que vous avez tous été nommés par décret en conseil -

M. Evans: C'est exact.

M. Clark: Non.

Mme Brushett: Vous avez dit non? J'aimerais avoir des précisions sur ce point. Si vous avez été nommé par décret en conseil, comment y a-t-il pu y avoir consentement unanime de l'assemblée législative? C'est ce que je ne comprends pas très bien.

M. Evans: Je devrais apporter une précision. J'ai été nommé à la suite d'un vote unanime de l'assemblée législative.

Mme Brushett: Merci. Et vous, monsieur McLeod?

M. McLeod: Par un vote unanime de l'assemblée législative. Bien entendu, il faut que votre nom soit choisi au départ. Mais par la suite, il faut un vote unanime de l'assemblée législative.

M. Hughes: Dans mon cas j'ai été nommé commissaire intérimaire par décret en conseil mais c'était pour mettre les choses en route avant la prochaine session de la Chambre. Mon nom a ensuite été soumis à l'assemblée législative. La loi prévoit que la nomination est faite sur présentation d'une motion par le premier ministre qui doit être appuyée par deux tiers des députés présents et ayant droit de vote. D'après ce que je sais toutes les personnes qui ont voté étaient favorables à ma nomination mais il n'est pas nécessaire que cette décision soit unanime. On m'a dit que tel avait été le cas.

M. Clark: Dans mon cas, ils ont publié une annonce dans les journaux de la province. Je n'avais jamais demandé un poste de ma vie. J'ai envoyé quelque chose et on m'a convoqué pour une entrevue. Je suis passé devant un comité composé de neuf membres de l'assemblée: six du parti au pouvoir, deux du NPD et un Libéral. Le comité a recommandé unanimement à la Chambre que je sois nommé à ce poste.

M. Mitchell: Dans mon cas, j'ai été nommé conformément au paragraphe 34(2) qui dit:

Voilà quel est le processus de sélection du commissaire à Terre-Neuve.

Mme Brushett: Merci beaucoup. Je me demandais comment cette décision législative unanime concordait avec les décrets en conseil.

Le coprésident (M. Milliken): C'est toujours un plaisir, madame Brushett.

Monsieur Epp.

M. Epp: Je me fais l'écho de ces expressions de gratitude à votre endroit. Je vous demande de m'excuser parce que je ne suis pas très en forme aujourd'hui. Je n'ai pas dormi plus de quatre heures et j'en ressens les effets.

Le sénateur Gauthier: Vous n'avez pas besoin de dormir davantage n'est-ce pas?

M. Epp: J'essaie habituellement de dormir six heures.

Vous arrive-t-il de découvrir, dans l'exercice de vos fonctions, des situations qui ne sont pas couvertes par la loi alors que vous avez le sentiment qu'elles devraient l'être? Avez-vous le droit de recommander à votre assemblée législative de modifier le règlement?

M. Hughes: Il me paraît toujours possible de signaler à un membre du gouvernement les lacunes que l'on a constatées. D'une façon générale, je ne pense pas qu'aucun d'entre nous ait le pouvoir d'aller au-delà de ce que notre loi prévoit.

Vous avez parfaitement raison. Il y a certaines situations que je ne trouve pas normales mais qui ne sont pas visées par la loi. Il ne s'agit pas de conflits d'intérêts ou d'apparence de conflits comme ces termes sont définis dans la loi, de sorte que nous n'avons pas le droit d'intervenir. C'est l'assemblée législative qui commande et c'est elle qui indique jusqu'où nous pouvons aller.

Je m'entends bien avec les députés. Mon bureau est situé tout près de l'assemblée législative. Je rencontre tous les députés au moins une fois au cours d'entretiens privés; je les connais donc bien. Je crois pouvoir affirmer que je peux prendre contact avec n'importe lequel d'entre eux, si je le souhaite. Je serais bien surpris si mes collègues n'avaient pas le même genre d'entente.

M. Clark: C'est ce dont traite le paragraphe 42(1) de notre loi, intitulé «Conseils généraux et recommandations». J'essaie de regrouper dans un dossier les questions qui pourraient figurer dans cette catégorie. Lorsque je rencontre le premier ministre et le chef de l'opposition une fois par an, et qu'il y a une question qui me gêne parce qu'elle n'a pas été résolue, je choisis l'occasion d'en parler. Voilà comment je procède.

.1655

M. Mitchell: Dans mon cas, j'ai présenté au bout d'un an un rapport annuel à l'assemblée législative dans lequel j'ai signalé un certain nombre de dispositions de la loi qui étaient d'après moi soit insuffisantes, soit trop ambiguës pour s'appliquer aux situations de conflits d'intérêts. Le président de l'assemblée a accepté ce rapport annuel et renvoyé l'étude de ces questions à un comité spécial de l'assemblée législative. Je me suis donc servi du rapport annuel pour vous faire certains commentaires à ce sujet aux législateurs. De leur côté, les législateurs ont la possibilité d'agir en proposant des modifications législatives, s'ils jugent souhaitable de le faire.

M. McLeod: Je n'ai pas encore eu l'occasion de le faire mais je procéderai comme M. Mitchell. J'utiliserai le rapport annuel. J'ai mentionné tout à l'heure que l'article 5 de la loi de la Saskatchewan, par exemple, ne veut rien dire. Cela figurera dans mon rapport annuel.

M. Evans: Je ferais la même chose. Nous avons toutefois regroupé tous ces problèmes avant de réviser cette loi et de préparer la nouvelle loi.

J'ai probablement exercé, avant cette loi du moins, des pouvoirs que je n'avais peut-être pas, et c'est pourquoi je souhaitais voir rapidement adopter une nouvelle loi. Vous avez lu l'ancienne loi. Elle a suscité une vive opposition et une controverse au sujet de la déclaration de la valeur des biens. J'ai jugé qu'elle n'exigeait pas cela, je me suis refusé à le faire et je ne l'ai pas fait.

Il y a d'autres choses moins importantes que vous devez évaluer. Je crois qu'il faut se demander si cela est dans l'intérêt du public? Cela va-t-il lui nuire? Si ce n'est pas le cas, il ne faut pas s'en occuper.

Je crois vous avoir parlé la semaine dernière d'une personne qui devait verser une pension alimentaire pour un enfant. Cela ne concerne pas les tiers. Personne semble connaître ce genre de choses ou devrait le faire. Je ne pense pas qu'une telle obligation doive être divulguée.

Avec la nouvelle loi, je possède des pouvoirs assez larges.

M. Epp: J'aurais une question au sujet des emplois. Je sais que les députés et les sénateurs ont souvent d'autres revenus que ceux que leur procure leur fonction. Il s'agit parfois de revenus de placement et parfois de revenus provenant d'un travail qui demandent parfois peu de temps pour être gagnés, parfois beaucoup. Pensez-vous qu'il faudrait prévoir dans la loi des lignes directrices ou des limites dans ce domaine?

M. Evans: Nous établissons une distinction dans notre loi. Il y a le revenu provenant du gouvernement et les revenus provenant d'autres sources.

M. Epp: Il faut les déclarer mais le montant des gains n'est pas limité.

M. Evans: Non. Je ne pense pas que j'aie le droit de fixer les montants qu'ils peuvent gagner. Il faut se demander si ces personnes consacrent plus de temps à leurs affaires qu'aux fonctions pour lesquelles elles ont été élues? Si c'est le cas, c'est à la Chambre de les rappeler à l'ordre, pas moi.

M. Epp: Pas à vous?

M. Evans: Non.

M. Clark: Puis-je ajouter quelque chose? Mon expérience est légèrement différente. J'ai été député de l'assemblée législative de l'Alberta pendant 21 ans, tant du côté du gouvernement que de celui de l'opposition. Je crois que c'est aux électeurs de décider. S'ils constatent qu'un de leurs représentants consacre trop de temps à ses affaires et qu'il ne s'occupe pas de ses électeurs, je crois que le public va lui faire savoir très rapidement.

Pour ce qui est des ministres, il leur est interdit en Alberta d'occuper un emploi à l'extérieur et s'ils ont des placements, ils doivent se trouver dans une fiducie sans droit de regard. Je ne souhaite pas avoir à dire à un député qui n'est pas ministre qu'il ne peut exercer tel ou tel genre d'activités commerciales, pourvu qu'il respecte les dispositions de la loi.

M. Epp: Vous êtes tellement loin de nous que vous jouissez d'un large recul. Que proposez-vous pour amener les sénateurs à rendre des comptes? Ils n'ont jamais à faire face à leurs électeurs.

M. Evans: Ils ont de la chance.

Des voix: Oh, oh!

M. Clark: Je viens d'une province qui a un point de vue assez particulier sur le Sénat.

M. Epp: Oui. Merci. Je crois avoir dit ce que j'avais à dire.

J'aurais une dernière -

Le coprésident (M. Milliken): Je pensais que vous vouliez une réponse, monsieur Epp.

Le sénateur Gauthier: Je n'ai pas compris.

M. Epp: Vous n'avez pas compris? Eh bien je vais vous l'expliquer en détail. Il faudrait peut-être qu'ils soient élus pour que -

Le sénateur Gauthier: Mais avec Charlottetown, les Canadiens ont décidé de ne pas le faire. Cela n'est pas ma faute.

.1700

M. Epp: Eh bien, c'est ce que je pense.

J'aimerais aborder un autre aspect qui concerne le conseiller ou le commissaire à la déontologie, je ne connais pas son titre exact. Vous avez tous mentionné comment vous avez été choisi mais j'aimerais savoir si vous accordez une grande importance à votre indépendance apparente. En d'autres termes, vous n'avez pas été nommé par le premier ministre de votre province; vous avez été choisi par l'assemblée législative. Vous êtes donc politiquement plus libre pour prendre des décisions et faire vos enquêtes.

Je viens sans le vouloir de vous montrer quelle est ma position sur ce sujet. J'ai dit depuis le début que j'aimerais que notre conseiller à la déontologie n'ait pas de liens politiques à cause de la nature des enquêtes qu'il doit effectuer. J'aimerais avoir les commentaires de chacun sur ce sujet, si vous voulez bien.

M. Clark: Il sera notre hôte demain.

M. Epp: Soyez gentils avec lui. C'est une personne honorable mais je crois qu'il faut lui donner la liberté dont il a besoin pour faire son travail.

M. McLeod: Je peux vous dire ce que je pense. Je suis convaincu que le commissaire doit être uniquement un représentant de l'assemblée législative et qu'il doit être indépendant sur le plan politique et être inamovible, ce qui dans mon cas - et je crois que c'est ce que l'on retrouve habituellement dans ces lois - veut dire qu'il a été nommé pour un mandat de cinq ans par l'assemblée législative.

M. Hughes: J'aurais éprouvé beaucoup de difficulté à certains moments si l'on ne m'avait pas considéré comme une personne tout à fait indépendante et impartiale.

M. Epp: Par exemple, pour faire enquête sur le premier ministre.

M. Hughes: J'ai été amené, que cela me plaise ou non, à faire enquête sur deux premiers ministres.

M. Epp: C'est vrai, deux.

M. Hughes: Il y a toujours des gens qui ne sont pas satisfaits, à juste titre d'ailleurs, des résultats obtenus mais j'estime que mon impartialité et le fait de pouvoir faire ce qui me paraît être bon compte tenu des circonstances, sans avoir de comptes à rendre aux politiciens, ont beaucoup contribué à faire accepter, d'une façon générale, le résultat de mes travaux. Je ne dis pas que tout le monde est satisfait mais à ma connaissance, personne n'a contesté mon impartialité et mon respect de l'équité.

M. Clark: Je suis du même avis que M. Hughes. J'ai été amené à intervenir dans deux situations difficiles qui concernaient des ministres. Il est évident que certaines personnes ne sont pas d'accord avec les conclusions auxquelles je suis parvenu mais il était important que le public puisse constater que j'étais une personne indépendante, que j'avais un mandat de cinq ans que m'avait accordé l'assemblée législative et qu'en l'absence de cause valable, je ne serais pas révoqué.

M. Mitchell: J'accorde beaucoup d'importance au fait d'avoir été nommé en vertu d'une résolution unanime. Il me semble qu'il faut avoir la confiance de tous les députés pour exercer ce genre de fonctions. Je suis heureux de ne pas appartenir à l'un des deux côtés de la Chambre avec toutes les contraintes que cela implique. Le fait d'être un représentant de l'assemblée législative m'a beaucoup aidé; c'est, d'après moi, la seule façon d'exercer mes fonctions en conservant la confiance des membres de l'assemblée.

M. Evans: L'indépendance est indispensable; c'est une décision qu'il faut prendre au moment de la nomination. Si la personne ne convient pas au poste, il ne faut pas l'y nommer.

Lorsque l'on m'a pressenti, si c'est bien le terme à utiliser - on m'en a parlé de toute façon - je venais de quitter la Cour suprême après 25 ans et la tâche qui m'attendait était tout à fait nouvelle. L'ancien lieutenant-gouverneur, John Aird, avait rempli les fonctions et donné les instructions et les lignes directrices pendant un bref laps de temps. Je crois savoir qu'un des partis, pas celui qui était au pouvoir à l'époque, voulait que cette personne soit une femme et qu'elle soit plus jeune. Je leur ai dit que c'étaient là deux conditions qu'il m'était bien impossible de remplir. J'ai ensuite été nommé. Celui qui s'opposait à cette nomination est devenu par la suite premier ministre et il m'a reconduit à mon poste, et cela veut sans doute dire qu'il a été satisfait de mon travail.

.1705

Mais si vous n'êtes pas indépendant et que vous ne vous considérez pas comme indépendant, vous ne devriez pas accepter ce poste.

Le coprésident (M. Milliken): Monsieur Malhi.

M. Malhi (Bramalea - Gore - Malton): Pensez-vous que les députés ne devraient pas accepter les voyages qu'on leur offre ou qu'il suffit de divulguer ce fait? Sur quoi devrait, d'après vous, porter cette divulgation?

M. Clark: Le public devrait être en mesure de savoir quels sont les intérêts personnels des députés, qu'il s'agisse d'actifs ou de dettes. En Alberta, un citoyen pourrait se rendre au bureau du greffier, prendre connaissance des intérêts personnels du député pour pouvoir juger si le député agit, dans notre cas, conformément à la Loi sur les conflits d'intérêts. C'est le genre de renseignement auquel le public doit avoir accès.

Dans notre province, il y a des députés qui ont cru au départ que l'on exercerait toutes sortes de pressions sur les gens et que l'on ferait circuler des histoires sur eux. Aujourd'hui, personne ou presque ne s'intéresse au fait que nous déposions les documents de divulgation auprès du greffier.

M. Mitchell: Pour poursuivre dans la même veine, je dirais que l'une des premières réactions qu'a suscitées notre nouvelle loi lorsqu'elle a été adoptée en 1993 a été la peur maladive qu'ont éprouvé les représentants élus face à l'obligation de divulguer publiquement leurs intérêts personnels. Nous collaborons ensemble depuis quelques années pour appliquer la loi et en arriver à un équilibre raisonnable entre ce que le public doit savoir d'après eux - en évitant d'alimenter les curiosités maladives et les ingérences inacceptables. Je ne pense pas qu'aucun de nos 52 députés ait eu lieu de se plaindre, pour le moment, des faits qui ont été divulgués au public ou de la façon dont l'on a procédé. Il demeure possible pour le public de prendre connaissance de renseignements de base à partir desquels il lui est possible de tirer des conclusions raisonnables.

M. Hughes: J'aimerais simplement ajouter ceci. Cela va peut-être vous intéresser. J'occupais mon poste... J'allais dire au moment où l'on a déclenché deux élections provinciales - en tout cas, à la veille d'une élection et je crois qu'il y en aura une autre en temps et lieu. La dernière fois et ces dernières semaines, des personnes qui envisageaient de se porter candidates pour un parti politique m'ont demandé ce qu'il fallait faire. Quelles étaient les normes à respecter? Ils disaient cela m'intéresse vraiment mais ma famille voudrait savoir et moi aussi.

J'ai beaucoup apprécié cette occasion de leur expliquer quelles étaient les exigences de la loi. Je crois pouvoir dire qu'une fois ces choses expliquées, ces personnes se sont rendu compte que ce n'était pas aussi terrible que ce qu'ils pensaient avant de venir me voir. Au cours des jours qui ont précédé la dernière élection, je ne pense pas qu'il y ait eu une seule personne qui ait refusé de se présenter pour cette raison après être venue me voir.

Je crois que c'est un service que rendent tous nos bureaux. Il est très utile de faire savoir aux gens ce que l'on attend d'eux.

M. McLeod: Notre loi exige une divulgation complète, mais il n'est pas nécessaire qu'elle soit détaillée. Cela figure dans la partie relative à la divulgation restreinte. Le rapport de divulgation publique est très limité. Ce rapport ne contient pas beaucoup de renseignements, si ce n'est les renseignements de base qui permettent de déterminer quels sont les intérêts personnels du député. C'est tout.

M. Evans: L'état de divulgation restreinte que prévoyait la nouvelle loi était assez détaillé d'après moi. Nous l'avons réduit considérablement. L'état de divulgation publique n'est pas très intéressant à lire à mon avis. Il ne mentionne pas grand-chose.

.1710

Les députés s'habituent à venir me voir. J'ai survécu à trois gouvernements différents, à trois partis différents et j'ai été confirmé dans mon poste, je peux donc en déduire qu'ils sont satisfaits de mes services. Nous ne recevons pas beaucoup de plaintes.

Il y a des gens qui s'inquiètent de pas grand-chose. Lorsqu'ils viennent me voir... je notais auparavant le nom des enfants. Une femme est venue et m'a déclaré avoir très peur qu'on lui vole ses enfants. Cela ne m'était jamais venu à l'esprit. Comme je l'ai dit, j'en ai neuf, et personne ne m'en a jamais volé un. Mais nous avons répondu à cette crainte en inscrivant uniquement un numéro: un, deux, trois, selon le cas.

En leur parlant, vous apprenez à les connaître assez bien. Cela fait huit ans pour moi donc... Je pense que l'essentiel est de vérifier que l'intérêt général est protégé, voilà ce qu'il faut faire, il ne faut poser des questions sur la vie privée d'un député que si cela est vraiment nécessaire.

Le coprésident (M. Milliken): Je n'ai pas saisi la réponse que vous avez donnée à la question qui portait sur la nécessité de divulguer les voyages gratuits. Si un député accepte un voyage qu'on lui offre, doit-il divulguer ce fait?

M. Clark: Si la valeur du voyage est supérieure à 200 $, il doit alors le divulguer.

Le coprésident (M. Milliken): Ils doivent le divulguer?

M. Clark: Oui, si c'est à titre de cadeau.

M. Mitchell: Le montant est de 500$ à Terre-Neuve.

Le coprésident (M. Milliken): Madame Beaumier.

Mme Beaumier (Brampton): J'estime qu'on a répondu à la plupart des questions que je me posais. Il y a juste une chose qui m'intéressait. M. Hughes a parlé de conflits d'intérêts apparents. Qu'est-ce d'après vous un conflit d'intérêt apparent?

M. Hughes: Lorsque notre premier ministre actuel se trouvait dans l'opposition, il avait dit que s'il prenait le pouvoir - ce qu'il a fait par la suite - il allait adopter une loi en matière de conflits d'intérêts qui serait la plus sévère au Canada. Un des éléments essentiels de ce projet était d'insérer dans cette loi une définition de ce qui constitue un conflit d'intérêts apparent. La voici:

Le critère repose donc sur le jugement que porterait une personne raisonnable au courant des faits et qui l'amènerait à penser que le député a dû se trouver en situation de conflit d'intérêts. Il faut qu'une personne raisonnable ait pu porter un tel jugement.

J'ai été amené à appliquer cette définition, et bien entendu, elle est très subjective, mais c'est ce que dit notre loi. J'aurais eu beaucoup moins de travail ces trois dernières années si cette disposition n'avait pas existé. J'aurais également eu beaucoup moins de travail si la modification de 1992 autorisant les membres du public à porter plainte n'existait pas.

Je partage le point de vue de mon collège Evans lorsqu'il dit que... Je n'ai jamais demandé cette modification. Je n'y suis pas opposé mais le fait que les plaintes soient transmises aux députés de l'opposition ne m'a jamais gêné. J'ai toujours pensé que cela fonctionnait très bien. Il y a bien sûr beaucoup de membres du public qui m'écrivent sur des sujets qui ne constituent pas des conflits d'intérêts lorsqu'on les examine mais j'essaie de leur expliquer pourquoi ce n'est pas le cas ou de faire enquête si cela est nécessaire.

Je dois dire que vous avez posé une bonne question au sujet des conflits d'intérêts apparents. Voilà ce qu'il en est. Cette définition, comme je l'ai mentionné dans mes observations, est très semblable à celle qu'a formulée le juge en chef Parker dans l'enquête sur Sinclair Stevens.

Le coprésident (M. Milliken): Madame Catterall.

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Je vous demande de m'excuser d'avoir manqué une bonne partie de votre exposé.

Pour revenir sur ce sujet, pensez-vous qu'il existe un risque de conflit entre votre rôle de conseiller auprès des députés et votre rôle d'enquêteur? Est-il important que ces deux rôles soient confiés à la même personne ou devrait-on envisager de les séparer?

.1715

M. Evans: Je conçois que cela puisse soulever un problème pour une personne de l'extérieur. Le commissaire fait en effet enquête, ensuite, il joue un rôle de juge et finalement, c'est l'exécuteur. Je veux dire que c'est lui qui recommande la sanction.

Voici ce que j'ai constaté. Lorsque l'on reçoit une plainte, on l'étudie de près en se demandant s'il s'agit d'un problème grave. Si c'est le cas, je procède à une enquête aux termes de la Loi sur les enquêtes. Dans les autres cas, je ne pense pas qu'il est nécessaire de déclencher une telle enquête lorsque les sommes en jeu sont faibles. La plupart du temps, la plainte est réglée facilement. Cela ne m'inquiète donc pas trop. Mais je comprends ce que les apparences peuvent laisser supposer.

Mme Catterall: J'essaie de savoir si le rôle que vous jouez en qualité d'enquêteur peut compromettre les rapports que vous établissez avec les députés en qualité de conseiller.

M. Evans: On ne va pas très loin en fait. Au moins, dans ma situation, je reçois la plainte, je l'examine et je me demande si cela soulève un problème grave. Si c'est le cas, j'ai le choix entre deux choses: je peux demander à quelqu'un d'autre de me fournir une opinion juridique, ce que j'ai déjà fait, ou je peux décider que la plainte mérite qu'on fasse enquête.

Mme Catterall: Ou la confier alors à quelqu'un d'autre?

M. Evans: Eh bien, non. Je ne la confie pas à quelqu'un d'autre parce que c'est moi qui mène l'enquête.

Mme Catterall: C'est ce que je me demandais, pensez-vous que le fait de mener des enquêtes est un rôle qui chevauche, de façon contradictoire, celui que vous jouez, à savoir celui de conseiller auprès des députés sur ces questions.

M. Evans: Pour commencer, lorsque vous recevez une plainte, vous n'êtes pas en train de donner un avis. La plainte concerne la conduite d'un autre député, et c'est cela que vous examinez. Vous ne donnez pas de conseil à ce moment, vous vous demandez tout simplement, est-ce une affaire grave? Dois-je me dessaisir de l'affaire et demander une opinion juridique à quelqu'un d'autre ou est-ce suffisamment grave pour que je conduise une enquête? Je ne pense pas qu'en réalité ces rôles se chevauchent.

M. Hughes: Je ne me suis jamais senti compromis, pour reprendre votre terme, qui me paraît fort juste d'ailleurs. Mais notre loi, comme les autres aussi je pense, contient un article qui suit l'article nous autorisant à fournir conseils et opinions aux députés. Cet article énonce qu'après avoir fourni un avis sur les questions qui vous ont été posées,

Si le député vous a demandé une opinion et vous a communiqué tous les faits nécessaires de façon exacte et complète, vous donnez votre opinion et le député a le droit de se baser sur elle. Cela met un terme à la demande, et il n'y a pas d'enquête par la suite, pourvu que l'on vous ait communiqué dès le départ tous les faits pertinents.

J'espère que cela répond à votre question.

Mme Catterall: J'ai une autre question technique moins importante. Il y a quelques lois qui contiennent des chiffres en dollars; vous avez parlé de 500$ pour un voyage. Y a-t-il dans ces lois une clause d'indexation automatique de ces montants de façon à ne pas avoir à modifier la loi chaque fois que vous voulez la mettre à jour? Ce montant de 500$ est convenable aujourd'hui mais devrait peut-être passer à 1 000$ dans quatre ans.

M. Mitchell: Non, il n'y a pas de clauses d'indexation dans notre loi.

M. Hughes: Selon notre loi, dès que le cadeau est supérieur à 200$, le député doit le déclarer au commissaire et demander à celui-ci s'il convient ou non de le garder.

Mme Catterall: Je crois qu'une bonne partie de cette discussion concerne la façon dont le public perçoit l'honnêteté des personnes concernées et non pas la question de savoir si les représentants élus sont vraiment honnêtes. Vous avez tous appliqué une loi qui existe depuis un certain temps. Avez-vous constaté un changement dans l'opinion publique à cause de l'existence de cette loi sur les conflits d'intérêts ou sur la conduite des députés?

.1720

M. Evans: Il est assez difficile de savoir si cela a un effet dissuasif. Je ne pense pas que les journaux parlent autant qu'avant de ce genre de problèmes. Je crois que les députés savent fort bien que cette loi existe.

M. McLeod: Je pense qu'elle a un effet. N'oubliez pas que l'image que se fait le public de cette question dépend de ce qu'il lit dans les journaux ou entend dans les médias.

M. Evans: C'est exact.

M. McLeod: J'ai été amené à communiquer une opinion la semaine dernière. La presse avait beaucoup parlé de cette affaire et cela y a mis un terme. Dès que la presse arrête de parler d'une affaire, l'opinion publique se calme rapidement.

M. Clark: Il est déjà arrivé que des journalistes me demandent si certains agissements sont conformes ou non à la Loi sur les conflits d'intérêts. Vous ne pouvez pas vous placer dans la situation du député. Il est arrivé qu'un média mentionne certains faits, que le député en question vienne nous voir et que je déclare à l'assemblée législative que le député avait agi de façon très honorable. Je crois que cela a servi d'avertissement aux journalistes trop zélés, et qu'ils savent maintenant qu'ils feraient mieux de vérifier les faits un peu plus sérieusement pour ne pas avoir l'air trop ridicule.

Mme Catterall: Si l'on parle d'une affaire alors qu'il n'y en a pas, on risque fort de paraître ridicule.

M. Clark: Le député peut demander au commissaire d'examiner la façon dont il a agi.

Mme Catterall: Mais à votre connaissance, il n'y a pas eu de sondage dans votre province pour déterminer si l'existence de ce code a modifié l'opinion publique.

M. Clark: Mon budget n'est pas suffisant pour cela.

M. Hughes: Je peux vous dire qu'à ma connaissance il n'y a pas eu d'enquête de ce genre en Colombie-Britannique. Mais je crois d'après ce que j'ai entendu que les gens qui s'intéressent à la vie politique sont heureux qu'un tel bureau existe.

Mme Catterall: Pouvons-nous passer à une question plus technique? Je m'intéresse davantage à la situation des députés qu'à celle des ministres et des secrétaires parlementaires, parce que je crois que la situation de ces derniers est assez bien contrôlée. Toutes vos lois exigent qu'un député cesse d'exercer ses fonctions législatives lorsqu'il s'agit d'un domaine qui touche ses intérêts personnels. Pouvez-vous décrire ce que vous entendez par cesser d'exercer ses fonctions législatives?

M. Evans: Supposons que le député est un enseignant ou le conjoint d'un enseignant et que l'assemblée législative examine un projet de loi concernant les enseignants. Je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas présenter des observations à ce sujet à l'assemblée législative. Je crois qu'il a également le droit de voter sur un tel projet de loi, parce que cette question vise de nombreuses personnes; il n'est pas nécessaire qu'il cesse d'exercer ses fonctions. Par contre, si la mesure vise un petit nombre de personnes, je pense qu'il devrait le faire.

Mme Catterall: Je vais vous présenter une hypothèse. Au lieu d'être un enseignant, le conjoint est membre du conseil scolaire. L'assemblée est en train d'examiner un rapport qui recommande la fusion de conseils scolaires, ce qui pourrait directement toucher le poste que le conjoint de la députée occupe. Cela serait un peu plus direct.

M. Evans: Oui.

Mme Catterall: Vous dites qu'il y a deux façons de cesser d'exercer ses fonctions: le député peut renoncer à participer à l'étude de l'affaire ou à exercer son droit de vote. Et qu'en est-il des réunions privées à laquelle participent des ministres et au cours desquelles on veut influencer leur décision à l'égard d'un contrat? Cela fait-il également partie des fonctions législatives à laquelle un député ne devrait pas participer?

M. Evans: Oui.

Mme Catterall: Cela comprendrait donc le lobbying, la participation au comité et au caucus. Vous définissez cela de façon très large.

M. Evans: Oui.

Pourrais-je faire une remarque supplémentaire? Dans votre exemple, tant que tous les conseils scolaires de la province sont traités exactement de la même façon, le député n'est aucunement en situation de conflit. Il pourrait y en avoir une dans le cas de la profession d'enseignant ou d'une profession juridique. Mais dans le cas d'une modification très précise qui ne toucherait qu'un petit groupe de personnes faisant partie des professions juridiques et que le député risquerait d'en tirer avantage, je conseillerais à ce député de ne pas participer à l'étude de l'affaire en caucus ou à l'assemblée ni de prendre la parole à ce sujet. Il devrait déclarer devant l'assemblée législative, pour que l'on le note dans le hansard, qu'il ne va pas -

.1725

Mme Catterall: - ni d'essayer d'influencer d'autres députés. C'est un peu plus difficile n'est-ce pas?

M. Clark: Oui. C'est évident.

M. McLeod: Ces lois utilisent l'expression «membre d'une vaste catégorie de personnes». Cela n'est pas très clair.

Mme Catterall: Non, cela n'est pas simple.

M. McLeod: J'estime qu'il n'aurait pas fallu utiliser le mot «vaste». On fait partie d'une catégorie ou on n'en fait pas partie. Cela ne devrait pas être très difficile de déterminer cela. Quelqu'un peut faire partie d'une catégorie donnée, qui peut comprendre peu de membres, mais on ne peut se fonder uniquement sur le nombre de personnes qui en font partie.

Mme Catterall: Il me semble que le but de cette disposition est de veiller - et je crois que la loi ontarienne sur les conflits dans le domaine municipal le dit aussi - à ce que cette personne n'ait pas un intérêt en commun avec la collectivité. Le but de cette disposition n'est pas d'empêcher le député d'exercer ses fonctions à titre de représentant élu. Pensez-vous qu'on ait réussi à formuler correctement cette idée?

M. Evans: Comme je l'ai mentionné, nous avons examiné cette idée pendant un certain temps et nous avons examiné beaucoup de propositions. Si l'on utilise l'expression «un groupe important» qu'est-ce que cela veut dire? Nous avons donc laissé cela de côté. Finalement nous avons parlé d'une «vaste catégorie».

Mme Catterall: Pensez-vous que pourvu que tout le monde comprenne ce que cela veut dire, les mots utilisés importent peu?

M. McLeod: Je dirais que si l'on disait simplement «une catégorie de personnes», cela suffirait probablement. Cela éviterait de parler du nombre de ces personnes.

M. Clark: Je me suis retrouvé dans une situation assez délicate au cours de la dernière session. J'avais fourni un avis qui n'était pas très bon. Après la session, j'ai demandé aux deux groupes parlementaires de se réunir avec moi. Nous nous sommes entendus sur la façon d'interpréter cet article de la loi. Je peux dire que cela a donné de bons résultats mais je viens de communiquer tout cela aux députés et je n'ai pas encore eu leurs réactions. Mais voilà comment nous avons procédé.

Mme Catterall: Très bien, merci.

Le coprésident (M. Milliken): Deux personnes aimeraient prendre la parole au cours de la deuxième ronde de questions, le sénateur Gauthier et M. Epp. Je vais les inviter à poser chacun une question.

Le sénateur Gauthier: J'aimerais profiter de la présence de nos experts pour leur poser cinq questions. Je voudrais que vous me répondiez par oui ou par non.

Vous êtes tous d'accord je crois pour que ce code soit d'origine législative et non une simple résolution des deux chambres. Y a-t-il des gens qui ne sont pas d'accord avec cela?

Des témoins: D'accord.

Le sénateur Gauthier: Devrions-nous avoir deux hauts fonctionnaires du Parlement, par exemple, l'un pour les parlementaires et l'autre pour les ministres? Je sais que vous n'en avez qu'un. À l'heure actuelle, nous avons un conseiller en déontologie et nous envisageons de créer un autre poste. Devrait-on plutôt créer un tribunal indépendant qui serait chargé de déterminer les obligations des parlementaires et des ministres aux termes d'un code de déontologie, si je peux utiliser cette expression? Je la préfère. Y a-t-il des gens qui ne sont pas d'accord avec cela?

M. Evans: Je préfère avoir une personne pour le Sénat et une pour -

Le sénateur Gauthier: Je le sais; vous me l'avez dit. Je parle d'une personne pour les ministres et d'une autre pour les parlementaires.

Une voix: Oh non, non.

Le sénateur Gauthier: Devrions-nous créer un seul poste?

M. McLeod: Oui.

Le sénateur Gauthier: Qui devrait administrer le code, une personne de l'extérieur ou de l'intérieur? Je crois que certains ont mentionné qu'il serait préférable de confier ce poste à une personne de l'extérieur. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui estime qu'il serait préférable de choisir une personne de l'intérieur, comme le greffier de la Chambre?

M. Evans: Cela dépend de la personne.

M. McLeod: Si la Chambre fait porter son choix sur une personne, c'est celle-là qu'il faut engager, quelle qu'elle soit.

M. Evans: Je crois qu'à Terre-Neuve vous avez déjà un bureau auprès de l'assemblée législative.

M. Mitchell: Nous faisons partie de la fonction publique.

Le sénateur Gauthier: Êtes-vous tous d'accord? Oui.

Vous avez tous déclaré que vous utilisiez un système de divulgation. Pensez-vous que le système fédéral de divulgation devrait exiger que l'on mentionne les valeurs? En d'autres termes, devrait-on obligatoirement déclarer la valeur des biens faisant l'objet de la divulgation?

M. Clark: Voulez-vous parler des divulgations restreintes?

Le sénateur Gauthier: Oui.

M. Evans: Oui.

M. Hughes: Je n'ai éprouvé aucune difficulté à effectuer mon travail en Colombie-Britannique sans que cela soit obligatoire.

M. McLeod: Cela est obligatoire en Saskatchewan mais je n'en vois vraiment pas la nécessité, à moins que la somme en jeu soit tellement importante qu'elle puisse avoir une influence sur la situation. Si quelqu'un possède une centaine d'actions de la société d'engrais Ajax, cela n'intéresse personne.

.1730

Le sénateur Gauthier: Qu'en pensez-vous monsieur Clark? Cela vous intéresse-t-il?

M. Clark: Je possède des actions de Petro-Canada.

M. Mitchell: Nous divulguons les aspects financiers.

Le sénateur Gauthier: En précisant la valeur des biens mentionnés?

M. Mitchell: Oui, il faut communiquer la valeur des biens au commissaire. Cela ne m'a jamais causé de problème non plus qu'aux députés, pourvu que le commissaire conserve ces renseignements aux seules fins d'en parler aux députés concernés.

Le sénateur Gauthier: Lorsque vous parlez de divulgation complète, cela vise-t-il le député et son conjoint?

M. Mitchell: Dans notre cas, cela comprend le député, son conjoint, ses enfants mineurs et ses parents à charge.

Le sénateur Gauthier: Est-ce la même chose dans tous les cas? Les conjoints et conjointes sont tous visés ici?

M. Clark: Oui.

M. Hughes: Oui.

Le sénateur Gauthier: Vous n'avez pas eu à rencontrer l'épouse de John Crosbie alors.

M. Evans: Eh bien, j'en ai entendu parler.

M. McLeod: Ce n'est pas si grave que ça.

Le sénateur Gauthier: Elle s'y est refusée.

Le coprésident (M. Milliken): A-t-on répondu à vos questions, monsieur le sénateur Gauthier?

Le sénateur Gauthier: Oui.

Le coprésident (M. Milliken): Monsieur Epp, avez-vous une question à poser?

M. Epp: Une seule. On nous a dit que si nos exigences en matière de divulgation et d'obligation de rendre compte étaient trop strictes, nous risquions de perdre de bons candidats. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?

M. Evans: Non.

M. Clark: Non, pourvu que les candidats connaissent les critères utilisés au départ.

M. McLeod: J'ai effectué ma première série de rapports de divulgation il y a un an et je n'ai eu aucun problème avec les députés, une fois que je leur ai expliqué la façon dont cela fonctionnait, que je leur ai dit qu'ils n'avaient pas à s'inquiéter et que je n'allais pas me mêler de leurs affaires personnelles ou communiquer des renseignements les concernant au public.

M. Hughes: Je pense que si nous invitons tous les candidats intéressés à venir nous parler, nous pourrons leur expliquer quelles sont les obligations dans ce domaine et nous pourrons je crois dans l'ensemble, leur montrer que ces obligations ne sont pas aussi impressionnantes qu'ils le pensent.

M. Epp: Merci.

M. Evans: Ils vont tous, à un moment donné, faire partie du cabinet. La seule chose qu'ils veulent savoir, ce sont les restrictions qui sont applicables aux membres du cabinet.

Une voix: Sont-ils tous ici?

Le coprésident (M. Milliken): D'habitude, il y en a plus.

M. Evans: Il y en a quelques-uns qui n'ont pas été élus.

Le coprésident (M. Milliken): Je tiens à remercier les cinq témoins qui sont venus cet après-midi. C'est un plaisir que d'entendre votre opinion sur cette question et je crois que les membres du comité ont beaucoup apprécié les échanges très directs que nous avons eus et noté les différences qui existent entre les diverses provinces que vous représentez. Je peux vous dire que vos opinions vont être très utiles aux membres du comité et que nous en tiendrons certainement compte lorsqu'il s'agira de préparer un rapport sur cette question. Nous espérons que celui que nous proposerons sera accepté cette fois-ci.

À moins que quelqu'un n'ait une autre question à soulever, je déclare la séance levée.

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