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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 7 novembre 1995

.1531

[Traduction]

La présidente: La séance est ouverte.

Je vais demander au greffier d'expliquer aux membres du comité le programme de travail qui nous attend.

Le greffier du comité: Madame la présidente, j'aimerais attirer l'attention des membres du sous-comité sur les deux derniers paragraphes de la deuxième page de l'ordre du jour. Je vais le lire, pour éviter de mélanger les chiffres.

Il indique que quatre projets de loi sujets à vote et trois motions sujettes à vote sont actuellement inscrites au Feuilleton. Cela signifie que nous ne pouvons choisir qu'un seul nouveau projet de loi et deux nouvelles motions, sauf que dans les prochains jours on peut compter que quelques projets de loi et quelques motions seront expédiés.

Le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre doit faire son rapport au plus tard le mardi 21 novembre. Le mercredi 22 novembre, le premier député du tirage sur lequel nous travaillons actuellement, M. Solomon, verrait sa motion débattue dans l'après-midi. Donc, le mercredi 22 novembre, à 15 heures, sera le dernier jour où nous pourrons faire notre rapport et nous devrions être fixés sur la situation d'ici jeudi de cette semaine.

Ma recommandation au sous-comité serait donc de voir où en sont les choses demain, pour voir s'il faut se réunir et prendre des décisions sur les textes sujets à vote. Mais pour le moment, s'il vous fallait faire rapport aujourd'hui, vous ne pourriez choisir qu'un seul projet de loi et deux motions.

La présidente: Si je lis entre les lignes, vous préconisez d'attendre jusqu'à demain soir pour soumettre notre rapport, et entre-temps de procéder à un examen serré, tout en sachant que nous pourrons peut-être sélectionner quelques propositions de plus.

Le greffier: Oui, ou vous pourriez peut-être établir un ordre de priorité, selon ce qui sera disponible à la dernière minute, et le sous-comité pourrait peut-être vous autoriser à inclure dans le rapport tout ce qui est possible, en suivant l'ordre prioritaire. Plusieurs stratégies sont possibles. Vous voudrez peut-être en discuter à huis clos.

La présidente: Oui, et puisque la Chambre ne siégera pas la semaine suivante, nous...

Le greffier: Oui, mais vous voudrez probablement savoir quelle est la situation à la fin de cette semaine.

La présidente: Quelqu'un a-t-il des questions à poser au greffier? Non?

Monsieur Proud, vous connaissez la routine: vous avez cinq minutes, ensuite de quoi nous appuyons sur un bouton et votre siège éjectable vous fait passer droit à travers le plafond.

M. George Proud, député (Hillsborough): Si j'ai bien suivi ce qui a été dit à l'instant, il est probablement inutile que je me lance, n'est-ce pas?

La présidente: Non. Nous devons en choisir un aujourd'hui, mais il y a la possibilité d'en choisir deux.

Le greffier: Ne soyez pas découragée, madame la présidente. Il y aura quelques trous d'ici que le comité fasse son rapport. La situation n'est pas aussi bouchée que cela en a l'air.

M. Proud: Ce projet de loi que je présente, le projet de loi C-292, porte commémoration du berceau de la Confédération. Je nourris ce projet depuis longtemps, en fait depuis mon arrivée ici, en 1988.

Puisque je ne dispose que de quelques minutes, je ne vais pas entrer dans tous les détails. J'ai déjà vu deux fois un projet de loi d'initiative parlementaire disparaître des tablettes, une fois en 1991 et une autre fois en 1993.

Cependant, j'ai réussi à faire adopter en 1990 une motion d'initiative parlementaire. Elle disait que, de l'avis de la Chambre, la ville de Charlottetown, dans l'Île-du-Prince-Édouard, devrait être désignée comme berceau de la Confédération afin de commémorer ce qui était à l'époque le 125e anniversaire de la conférence de 1864 des Pères de la Confédération.

.1535

La conférence de Charlottetown a été un grand événement historique et la ville qui l'a abritée, Charlottetown, devrait être commémorée. C'est le but du projet de loi C-292: consacrer Charlottetown comme berceau de la Confédération.

En vertu de ce projet de loi, s'il est adopté, le ministre du Patrimoine canadien disposerait de différents moyens pour assurer la commémoration des sites et bâtiments où la conférence de Charlottetown s'est tenue avant 1867. Lors de la conférence de 1864, les délégués du Canada et des Maritimes ont convenu du principe d'une union, le Dominion du Canada. C'est à cette date, à Charlottetown, que s'est ouvert un horizon de possibilités infinies. Les délégués représentant plusieurs provinces ont décidé de fonder une nation, ayant perçu que l'union fait la force.

On peut retrouver l'atmosphère de la conférence de 1864 lorsqu'on se promène dans Charlottetown. On peut commencer la visite en remontant la rue Great George depuis le port, le chemin suivi par les Pères de la Confédération à leur descente du paquebot Queen Victoria. La rue est plantée d'arbres et à travers eux on voit surgir Province House. C'est dans ce bâtiment que s'est déroulée la conférence et c'est lui qui abrite aujourd'hui l'assemblée législative de la province.

Bien que chaque Îlois connaisse l'histoire de la naissance du Dominion et se fasse un plaisir de la raconter aux visiteurs, nous apprécierions le soutien et les ressources du gouvernement du Canada pour la faire connaître et vivre à tous les Canadiens. Les habitants de Charlottetown sont conscients de leur environnement historique et ils se sont efforcés d'en préserver l'aspect physique et, par là, l'esprit de la conférence de Charlottetown. Quantité de maisons et de bâtiments de l'époque existent encore et ont été pleinement restaurés; Government House, la résidence du lieutenant-gouverneur de l'Île-du-Prince-Édouard, et Province House n'en sont que deux exemples.

La rue Great George est considérée aujourd'hui dans son entièreté comme site historique national et le terrain de la maison de William Pope, l'un des Pères de la Confédération originaire de l'île, a été désigné parc national.

Je pense que les Canadiens ont besoin de symboles unificateurs. Nous avons besoin que l'on nous rappelle notre grand passé afin que nous puissions envisager l'avenir avec espoir. Je crains que si nous ne faisons pas un effort concret pour affirmer notre identité de Canadiens, pour affirmer les raisons pour lesquelles ce pays a été créé à l'origine, nous risquons de le perdre par défaut. Cela, j'en suis convaincu, serait une tragédie, nous qui avons tant de grandeur derrière nous et un avenir si prometteur.

Le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle important en aidant à aménager les sites historiques liés aux événements de 1864 dans et autour de la ville. On pourrait faire beaucoup pour préserver, restaurer et faire revivre quantité de lieux associés à la conférence. Les Îlois oeuvrent pour la désignation officielle de leur capitale non seulement par désir de préserver et souligner son rôle historique singulier mais également, madame la présidente, pour renforcer l'économie locale et provinciale, dont le tourisme est un pilier.

Ce projet de loi poursuit deux objectifs, le premier étant de promouvoir la fierté nationale à un moment où nous en avons particulièrement besoin, et le deuxième étant d'aider une économie saisonnière à réaliser son potentiel. C'est pourquoi j'estime que le projet de loi C-292 devrait être soumis à un vote. S'il est promulgué, il permettra au gouvernement de promouvoir l'unité nationale en commémorant le berceau de la Confédération, et les avantages économiques de l'expansion du tourisme seront l'une des heureuses conséquences de sa participation.

J'aimerais conclure par une citation de l'un des délégués de l'Île-du-Prince-Édouard à cette conférence, Thomas Heath Haviland, l'un des Pères de la Confédération. Il a déclaré:

La présidente: Je vous remercie, George. Les membres du comité ont-ils des questions? Monsieur Caron.

[Français]

M. Caron (Jonquière): Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard a-t-il déjà pris des mesures pour souligner, d'une façon ou d'une autre, le fait que Charlottetown a été le berceau de la Confédération? Le gouvernement de l'Île a-t-il érigé des plaques ou fait autre chose?

[Traduction]

M. Proud: Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard a certainement agi. L'assemblée législative, par exemple, se réunit toujours dans la maison coloniale originale. Le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement fédéral et la ville de Charlottetown, cette année, ont inauguré un parc commémorant le débarquement des Pères sur le port, à l'endroit où le navire a accosté et où ils ont pris pied à terre. Il y a là un parc commémoratif. Beaucoup d'argent a été investi, par exemple, dans les maisons d'époque et les anciens hôtels ont été restaurés en l'état qui était le leur en 1864. Ils ont été rachetés par le secteur privé et restaurés. Le gouvernement provincial a contribué de différentes façons à ces travaux.

.1540

Ce projet de loi donnerait au gouvernement du Canada le pouvoir d'ériger des plaques, des monuments ou tout ce qu'il jugerait nécessaire. Il y a déjà actuellement des monuments. Comme je l'ai dit, la rue elle-même est un monument et le bâtiment est un monument, mais nous estimons que ceci donnerait une consécration officielle.

M. Bélanger (Ottawa-Vanier): Vous dites qu'une motion à cet effet a déjà été adoptée par la Chambre. Quand était-ce?

M. Proud: Le 6 novembre 1990.

M. Bélanger: On pourrait donc dire que le gouvernement a déjà une certaine marge de manoeuvre, fort de cette motion de la Chambre.

M. Proud: Oui, le gouvernement l'aurait, mais voyez-vous, ce n'était pas un projet de loi et par conséquent la motion n'a pas force de loi. Nous avons proposé une motion à l'époque, et elle a été adoptée à l'unanimité de tous les partis de la Chambre. Cela n'a posé aucun problème.

C'est pourquoi je propose cette mesure; elle donnerait au ministre responsable le pouvoir de faire ces autres choses que nous aimerions voir faites.

M. Bélanger: Je vous remercie.

La présidente: Il n'y a pas d'autres questions.

Je vous remercie, George.

M. Proud: Je vous remercie.

La présidente: Monsieur Hanger, vous avez cinq minutes et ensuite nous disparaissons.

M. Art Hanger, député (Calgary-Nord-Est): Je vous remercie, madame la présidente.

Je considère que la motion 389 en est une très importante que tous les Canadiens aimeraient voir débattre à la Chambre des communes. Elle est lourde de conséquences pour le système d'immigration canadien et devrait déclencher un débat animé.

La Commission de l'immigration et du statut de réfugié a été créée suite à l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans la cause Singh c. ministre de l'Emploi et de l'Immigration, en 1985. Elle est responsable de la détermination du statut de réfugié de ces demandeurs d'asile qui parviennent à se rendre jusqu'au Canada par leurs propres moyens. La CISR fait également office de tribunal d'appel pour ceux dont l'expulsion du Canada a été ordonnée.

La CISR est un organisme extrêmement dispendieux, puisqu'il coûte 80 millions de dollars par an aux contribuables. Les 235 commissaires nommés par décret sont à la fois plus nombreux et mieux rémunérés qu'il ne convient.

En outre la CISR se montre indifférente aux intérêts des Canadiens et est devenue représentative d'intérêts particuliers de l'industrie de l'immigration, s'étant donnée elle-même le mandat d'élargir la définition de «réfugié» au-delà de ce que les Canadiens, ou même les Nations Unies, ont jamais envisagé.

La CISR a perdu le contact avec les Canadiens et est virtuellement intouchable. Le seul moyen que possède le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration pour influencer l'orientation de la Commission est de refuser de reconduire les commissaires individuels à l'expiration de leur mandat. De fait, dans une interview à la radio de CBC, le 3 août 1994, le ministre de l'Immigration, Sergio Marchi, a reconnu qu'il y a un manque de contrôle sur les commissaires. Même ceux qui rendent des décisions d'une absurdité flagrante ne peuvent être censurés ou sanctionnés par le ministre.

Chers collègues, supprimer la CISR ne signifie pas fermer nos portes aux réfugiés, absolument pas. Au contraire, le mécanisme que prévoit ma motion améliorerait grandement le traitement des dossiers des réfugiés et rendrait le système plus équitable et plus efficace pour les réfugiés véritables.

Permettez-moi de mettre les choses en perspective. Le taux d'admission moyen des pays qui acceptent les réfugiés n'est que de 14 p. 100 des demandeurs d'asile. Aux États-Unis, il est de 22 p. 100. Au Royaume-Uni, il est de 5 p. 100. Au Canada, il atteint dans certaines régions le chiffre renversant de 90 p. 100.

Nul qui connaît un tant soit peu le flux des demandeurs d'asile arrivant au Canada peut imaginer que 90 p. 100 de ces personnes répondent à la stricte définition que les Nations Unies donnent du «réfugié». Néanmoins, la CISR les accepte car il n'existe aucun mécanisme de reddition de comptes qui permettrait aux citoyens canadiens d'exercer une influence sur le processus.

En outre, en acceptant presque tous les réfugiés qui arrivent au Canada, nous remplissons notre quota de réfugiés et ne conservons plus aucune latitude pour tendre la main aux millions de réfugiés qui souffrent et n'ont pas les moyens de parvenir jusqu'au Canada.

.1545

Si nous avions un système responsable qui permette de réellement faire le tri entre les réfugiés véritables et les faux, on libérerait les ressources nécessaires pour accueillir des réfugiés d'outre-mer. Ma motion, si elle était promulguée, rendrait le système meilleur pour les Canadiens, qui auraient leur mot à dire, et les réfugiés véritables, qui ne se retrouveraient pas relégués à la fin de la file d'attente par des gens qui savent comment exploiter le système actuel.

Madame la présidente, la CISR a perdu toute crédibilité et est devenue une bureaucratie boursouflée qu'il faut abolir. Le contrôle doit être replacé aux mains des élus, et non accaparé par des commissaires désignés. Je demande à votre comité de songer sérieusement à permettre que cette motion soit débattue à la Chambre. Elle touche de près la vie des Canadiens et elle présente une idée dont le temps est venu. Le gouvernement cherchera à se défiler, mais il est temps qu'une question comme celle-ci soit confrontée immédiatement.

Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Monsieur Stinson.

M. Stinson (Okanagan-Shuswap): Si je vous ai bien compris, vous avez dit que la CISR n'a de comptes à rendre qu'au ministre et que le ministre a comme seul moyen d'action le refus de reconduire le mandat.

M. Hanger: Non. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié a été créée suite à une décision judiciaire. Elle est un tribunal quasi-judiciaire. Les membres qui sont nommés par le gouvernement ne sont pas responsables devant le ministre, ils sont indépendants de toute influence politique, ainsi que le ministre l'a souligné.

Tout le problème est là. Du fait des décisions qui ont été prises, la responsabilité repose sur les épaules du ministre et des élus du peuple. Ce dernier est très préoccupé par des décisions qui lui échappent entièrement.

[Français]

M. Caron: Vos recherches ont permis d'établir que la Commission avait été mise sur pied en 1985.

[Traduction]

M. Hanger: C'est exact.

[Français]

M. Caron: Qu'est-ce qu'il y avait avant la Commission? Était-ce le ministère qui prenait les décisions en matière d'accueil des réfugiés ou y avait-il un autre organisme? Qu'est-ce qui a poussé le gouvernement, selon vous, à mettre sur pied un organisme comme celui-là en 1985?

[Traduction]

M. Hanger: Je vais commencer par répondre à la première question. La Cour suprême a rendu un arrêt en 1985, statuant en substance que tout demandeur du statut de réfugié aurait droit à une audience orale. La prémisse de mon argumentation est que cet arrêt n'obligeait en rien le gouvernement à mettre sur pied un tribunal quasi-judiciaire. La décision de la Cour suprême disait très clairement qu'une audience orale devait être accordée. Mais elle pouvait être tenue aussi bien par des fonctionnaires ayant la formation voulue, et ce serait même plus approprié qu'un tribunal quasi-judiciaire dont les décisions échappent au contrôle du gouvernement.

M. Bélanger: Vous devrez excuser mon ignorance à ce sujet, mais est-ce que les nominations à la CISR sont révocables ou pour une durée fixe?

M. Hanger: Il s'agit de nominations pour un mandat de cinq ans faites par décret.

M. Bélanger: Mais sont-elles révocables?

M. Hanger: Par qui? Le ministre?

M. Bélanger: Par le gouverneur en conseil.

M. Hanger: C'est juste.

M. Bélanger: Donc, dans la pratique, le gouverneur en conseil a davantage de latitude que le refus de la reconduction. Il pourrait démettre un commissaire, n'est-ce pas?

M. Hanger: Oui, pour un motif justifié, mais ce mécanisme n'est pratiquement jamais utilisé. Ce que je veux dire c'est que, en l'état actuel des choses, la responsabilité et la reddition de comptes du ministre sont très éloignés du processus décisionnel.

.1550

M. Bélanger: A-t-on voulu, lors de la création de la Commission, lui donner un statut d'autonomie, l'abriter des interventions politiques?

M. Hanger: Oui, c'est l'argument qui était utilisé. Cependant, avec le système actuel, il y a une influence, et ce n'est certainement pas celle du ministre mais plutôt celle de l'industrie, qui dicte son bon vouloir, en court-circuitant entièrement l'électorat.

La présidente: Pourriez-vous préciser ce que vous voulez dire? Qu'entendez-vous par «industrie»?

M. Hanger: Eh bien, il y a tout un milieu d'avocats et de consultants spécialisés en immigration qui ont un intérêt à ce que le système reste tel qu'il est.

Lorsqu'on parle de détermination du statut de réfugié, ce sont quelque 25 000 requérants qui arrivent au Canada par leurs propres moyens. Il y a toute une industrie, si vous voulez, qui gravite autour de ces 25 000 requérants. Avec tous les appels et les recours, cela embouteille considérablement nos tribunaux - le tout aux dépens, je le signale, des réfugiés véritables qui continuent à languir dans les camps outre-mer. Beaucoup n'obtiennent pas l'asile ou sont refoulés vers un pays sûr. D'une certaine façon, le Canada a négligé nombre d'entre eux à cause de ce processus de détermination du statut de réfugié que nous avons.

Par exemple, l'année dernière, les Nations Unies ont déclaré réfugiés véritables 60 000 personnes en quête d'un lieu d'asile. Seules 25 000 ont pu être placées. Trente-cinq mille n'ont trouvé aucune terre d'accueil alors que, par cet autre processus, ces autres personnes qui peuvent faire le voyage jusqu'au Canada - et beaucoup arrivent via les États-Unis et d'autres pays tiers sûrs et y demandent l'asile et sont donc déjà en lieu sûr - par ce processus de la CIRS ouvert à tous les abus, le Canada les autorise à s'établir chez nous.

La présidente: Préconisez-vous donc de prendre tous les 60 000, sans tri du tout?

M. Hanger: Pas du tout. Des 60 000 dont je parle, un certain nombre sont placés dans des pays qui acceptent les réfugiés. Le nombre accepté par d'autres pays diminue. Ceux dont s'occupe la CIRS sont ceux qui débarquent chez nous et se déclarent réfugiés. Des dizaines de milliers viennent via les États-Unis. Ils ont déjà obtenu, ou demandé l'asile là-bas, et pourtant ils viennent faire une demande ici.

La présidente: D'accord, et cette commission, comme vous l'avez dit à plusieurs reprises, est un tribunal quasi-judiciaire.

M. Hanger: C'est juste.

La présidente: En d'autres termes, elle est à l'abri de toute influence politique.

M. Hanger: Elle est censément à l'abri de l'influence politique, mais elle est sujette à des influences extérieures.

La présidente: C'est une question d'opinion. Mais vous venez demander aujourd'hui que l'on remette la prise de décision aux mains des politiciens.

M. Hanger: Je demande qu'elle soit remise aux mains des fonctionnaires formés de l'administration. Là il y a reddition de comptes, le ministre devient responsable et actuellement, non, je ne peux prendre de décision car la décision est prise par un tribunal quasi-judiciaire.

M. Bélanger: À votre connaissance, une motion similaire a-t-elle jamais été présentée pendant l'une des journées d'opposition?

M. Hanger: Non.

La présidente: Y a-t-il d'autres questions?

Bien, je vous remercie, monsieur Hanger.

M. Hanger: Je vous remercie.

La présidente: Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo, député (Mississauga-Sud): Je vous remercie, madame la présidente. Je suis ravi d'être parmi vous cet après-midi pour parler du projet de loi C-337.

.1555

[Français]

Je suis très heureux de me joindre à vous cet après-midi afin de discuter du projet de loi C-337.

[Traduction]

Le Parlement est saisi de cette question depuis 1992. J'ai deux rapports, mais je n'en ai pas apporté d'exemplaire pour le comité. L'un émane du gouvernement du Canada; l'autre du Comité permanent de la santé, tous deux concernant le syndrome d'alcoolisme foetal, une tragédie évitable, et la sensibilisation et la prévention à cet égard.

Divers autres projets de loi d'initiative parlementaire ont tenté de promouvoir l'une des principales recommandations contenues dans le mien. Cependant, aucun n'a jamais été soumis au vote de la Chambre en raison du processus par lequel nous devons passer.

Ce projet de loi prévoit que des mises en garde soient placées sur les contenants de boissons alcoolisées disant: «La consommation de boissons alcoolisées réduit la capacité de faire fonctionner des machines ou de conduire une automobile, et elle peut être nuisible pour la santé ou provoquer des malformations congénitales au cours de la grossesse». Cette mise en garde est recommandée par Santé Canada. C'est également la mise en garde qui figure sur tous les contenants de boissons alcoolisées aux États-Unis. En fait, chaque fabricant canadien de boissons alcoolisées qui exporte aux États-Unis appose déjà cette mise en garde sur les étiquettes des bouteilles exportées, et cela se fait donc déjà.

Nous savons tous les problèmes que cause la conduite de machines et de véhicules en état d'ébriété. Le syndrome d'alcoolisme foetal est également appelé effet de l'alcool sur le foetus, selon qu'il y ait manifestation physique de la maladie, comme dans le cas du syndrome de Down qui se manifeste par certains défauts physiques.

Le syndrome d'alcoolisme foetal touche 5 p. 100 de toutes les naissances; 5 p. 100 de toutes les déficiences congénitales résultent de la consommation d'alcool pendant la grossesse. Un enfant sur 500 souffre du syndrome d'alcoolisme foetal ou d'effets de l'alcool sur le foetus comparé à un enfant sur 700 souffrant du syndrome de Down. C'est donc une maladie plus répandue. En outre, le coût de cette maladie, d'après les estimations que Santé Canada a présentées au Comité de la santé juste ce matin, est de 2,7 milliards de dollars. Cette maladie peut être totalement prévenue. Elle est causée uniquement par la consommation d'alcool.

Santé Canada va prochainement émettre une déclaration conjointe avec les ministères de la Santé provinciaux à l'effet qu'il n'y a pas de niveau sûr de consommation d'alcool pendant la grossesse. Il n'y a aucune garantie.

Je vous ai distribué copie d'une pétition concernant ce projet de loi. Elle est actuellement mise en circulation par le Fetal Alcohol Support Network, le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies et la Fondation de la recherche sur l'alcoolisme et la toxicomanie. Cette mesure bénéficie d'un soutien énorme.

Je vous ai également remis copie de l'ordre du jour sur le syndrome et les effets de l'alcoolisme foetal auquel j'ai pris part la fin de semaine dernière. Il est absolument impératif que nous nous penchions sur les effets de cette grave maladie.

Ces effets sont l'existence chez l'enfant de trouble déficitaire de l'attention, de difficultés d'apprentissage, d'un retard à apprendre à parler, d'un déficit de raisonnement et de jugement, sans parler de troubles du système nerveux central, de lésions cérébrales et d'insuffisance cardiaque. C'est quelque chose de très grave, et la tragédie est que cela peut non seulement être prévenu, mais que c'est probablement la maladie des enfants la moins connue de toutes.

Le Comité permanent de la Santé a décidé de mener une nouvelle étude sur le développement de l'enfant et une stratégie de prévention des maladies infantiles. Le syndrome de l'alcoolisme foetal sera un important domaine d'étude pour nous.

La dernière chose que j'aimerais dire c'est que les répercussions pour les distilleries et les brasseries seront tout simplement insignifiantes. D'ailleurs, il existe un programme, connu sous le sigle ARAI, le Programme d'évaluation des risques d'alcoolisme et d'intervention. Il a été élaboré conjointement par l'Association médicale canadienne et Santé Canada et financé conjointement par Santé Canada et l'Association des brasseurs du Canada. Son objectif premier est de former les médecins à identifier les patients qui présentent des symptômes de consommation excessive d'alcool et à sensibiliser plus particulièrement les femmes enceintes aux problèmes de la consommation d'alcool pendant la grossesse.

.1600

Il ne fait nul doute dans mon esprit que ce projet de loi permettra de réaliser d'importantes économies. Il ne peut être que propice au Canada et aux enfants du Canada et je vous prie tout simplement d'en faire un projet de loi sujet à vote afin que nous disposions d'une législation permettant d'éliminer ce problème.

Je vous remercie.

M. Stinson: Vous avez dit que cette maladie coûtait 2,7 milliards de dollars par an?

M. Szabo: Oui. Je peux vous en dire un peu plus.

Ce chiffre recouvre les frais d'éducation spéciale, les coûts de soins de santé additionnels, la perte de productivité, la formation et le recyclage et le fait que le retard intellectuel ou la déficience cognitive des malades rend leur intégration à la société canadienne très difficile. Le syndrome d'alcoolisme foetal entraîne donc des frais tout au long de la vie des sujets.

M. Bélanger: Je suppose que vous parlez du contenant d'origine, et non du verre dans lequel on verse une bière-pression, par exemple.

M. Szabo: Oui. Ce sont les produits au niveau du distributeur...

M. Bélanger: Donc, le point de vente d'origine. Bien.

La présidente: C'est une précision intéressante. Cela ne touchera donc en rien les boissons alcoolisées achetées dans les bars ou les restaurants.

M. Szabo: En fait, ce qui se passe, c'est que Santé Canada et les ministères provinciaux de la Santé encouragent les tavernes et les bars à apposer des affiches. On en trouve déjà dans certains établissements, qui mettent en garde contre les risques de la consommation excessive d'alcool.

La présidente: Dans vos recherches, avez-vous constaté que les mises en garde apposées sur les paquets de cigarettes réduisent la consommation de tabac par les femmes?

M. Szabo: Je crois comprendre votre question.

Une étude indépendante a été commanditée par Santé Canada et il ne fait nul doute que les avertissements ne s'adressent pas tant aux fumeurs existants qu'à ceux susceptibles de commencer à fumer. Les avertissements sont destinés principalement à ceux qui passent à un autre stade.

Je pense que le parallèle ici est que les adultes boivent, ce qui est socialement acceptable tant que c'est avec modération. Mais l'arrivée d'une grossesse exige toute une réévaluation et je pense que les mises en garde et l'éducation continue par le biais de ces diverses organisations, les réseaux et Santé Canada et les ministères provinciaux de la Santé afin de sensibiliser les Canadiennes au risque potentiel de la consommation d'alcool pendant la grossesse, seront certainement utiles. Cela ne peut faire de mal, et je suis sûr que cela sera utile.

La présidente: Travaillez-vous également au sein de ce Comité de la santé auquel vous siégez à des recommandations en ce sens?

M. Szabo: Malheureusement, l'étude du Comité de la santé porte principalement sur des stratégies de prévention en vue d'assurer une meilleure santé et un meilleur développement chez les enfants, et il vient seulement de commencer ce travail. Il se poursuivra pendant environ quatre ou cinq mois.

Cette question particulière fera sans doute l'objet d'un document annexe que nous prévoyons de rédiger, en sus de notre rapport ordinaire, pour mettre en garde tous les Canadiens - et nous tenons à ce qu'il soit distribué à tous les Canadiens.

Cependant, je considère qu'il n'est pas nécessaire d'étudier cela plus avant ou d'attendre davantage. La solution me paraît évidente et a le soutien de tous les partis au sein du Comité de la santé, et je suis sûr le soutien de tous les partis à la Chambre.

La présidente: J'ai été frappée d'apprendre, dans mes lectures sur le syndrome d'alcoolisme foetal, que les plus grands dégâts sont causés au cours des six premières semaines de la grossesse, à un moment où la femme ne sait même pas qu'elle est enceinte. C'est manifestement un problème qu'il faudra attaquer par tous les côtés à la fois.

[Français]

M. Caron: Si j'ai bien compris, vous avez dit que certains producteurs apposaient des étiquettes comportant de tels avertissements sur des produits destinés à l'exportation. Y a-t-il des pays qui demandent que ces mises en garde soient apposées sur les produits?

[Traduction]

M. Szabo: En sus des États-Unis?

[Français]

M. Caron: Oui, à part les États-Unis.

[Traduction]

M. Szabo: Je ne sais pas dans quelle mesure. Tout ce que je sais est que les producteurs canadiens placent actuellement cette mise en garde sur les produits à destination des États-Unis.

La présidente: Je vous remercie, Paul.

.1605

Paul Forseth.

M. Paul Forseth, député (New Westminster-Burnaby): Bon après-midi. Je suis ici pour présenter le projet de loi C-323. Son titre officiel est Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (ordonnance de libération). C'est un projet de loi très simple et très court, mais ses ramifications pourraient être assez lointaines.

Il ajouterait les indemnités civiles pour coups et blessures à la liste prévue à l'article 178 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Il irait clairement dans le sens d'une plus grande responsabilité personnelle à l'égard d'actes illégaux.

Lorsqu'une personne inflige des coups et blessures, la victime peut réclamer des dommages-intérêts au moyen d'une poursuite en droit civil. Cependant, en vertu de la LFI actuelle, si le contrevenant déclare faillite, les dommages-intérêts qu'il doit sont effacés, causant un nouveau détriment à la victime.

Ce projet de loi aiderait, par exemple, les femmes victimes de sévices dans leur relation et celles agressées sexuellement. Il leur permettrait d'obtenir les ressources nécessaires pour un traitement et se remettre des sévices vécus.

Nous connaissons tous les limites des traitements assurés par le régime d'assurance-maladie, les limites des organismes bénévoles et la difficulté de trouver les ressources financières pour payer des honoraires de psychologue, lesquels ne sont pas couverts par le régime d'assurance-maladie.

En modifiant la LFI, il ne sera plus possible au contrevenant d'éviter de payer les dommages-intérêts qui lui ont été infligés à la suite d'une poursuite civile.

L'idée de ce projet de loi vient d'un avocat de mes amis, de Vancouver. Il a écrit au ministre de l'Industrie à plusieurs reprises pour connaître sa réaction devant l'idée de modifier la LFI, car cette loi apparemment relève du ministère de l'Industrie.

Je voudrais vous lire une lettre du 6 avril de cette année adressée par le ministre de l'Industrie à mon ami. Voici ce qu'elle dit:

C'est signé John Manley.

Madame la présidente, si ce projet de loi est soumis à un vote, il permettra à tous les députés de débattre d'une mesure qui aura sans aucun doute un impact énorme sur la vie de beaucoup. C'est particulièrement vrai du nombre énorme de femmes battues qui restent sans ressources pour s'occuper de leurs enfants et qui ont néanmoins besoin d'un traitement psychologique ou de services thérapeutiques. Elles sont souvent les victimes d'hommes jouissant de ressources financières considérables et qui sont directement responsables de cette situation au sein de la collectivité.

Je voudrais que ce projet de loi aille en comité pour que toute modification technique requise soit apportée. Il ressort de la lettre du ministre de l'Industrie qu'il avait espéré déposer un projet de loi, mais il est maintenant novembre et nous n'avons toujours rien vu. Je pense que cette législation est importante pour la sécurité et le bien-être de tous les Canadiens et c'est pourquoi je demande au comité de le soumettre à un vote.

Comme vous le savez, les victimes ne portent aucune étiquette politique. Les enfants victimes d'inceste pourraient obtenir ainsi des services auxquels ils n'auraient pas autrement accès, car la guérison est souvent un processus très long. Ces services ne sont pas toujours couverts par les régimes d'assurance-maladie ou d'autres programmes provinciaux.

Pour ce qui est d'une femme récupérant après une agression et une situation de violence familiale, les ressources disponibles sont souvent très minces. Des groupes de femmes de Vancouver sont venus me voir. Elles sont intéressées par ce projet de loi. Elles ont cité des cas où des indemnités ont effectivement été imposées parce que l'agresseur disposait de ressources et le tribunal a imposé des versements mensuels pour défrayer un traitement psychologique. Mais peu après, l'intéressé déclarait faillite et se lavait les mains de la situation.

.1610

Ce que je demande ici est simplement d'ajouter à une liste déjà existante le fait qu'une déclaration de faillite ne libère pas l'intéressé de cette obligation. Cette liste de dérogations comprend actuellement une amende infligée par un tribunal; une pénalité ou ordonnance de restitution imposée par un tribunal pénal; une pénalité ou ordonnance de restitution imposée par un tribunal à l'égard d'une infraction; une dette provenant d'un engagement ou d'un cautionnement en matière pénale; les pensions alimentaires, toute dette ou obligation résultant de la fraude, du détournement, de la concussion ou de l'abus de confiance commis à titre de fiduciaire; toute dette ou obligation résultant d'obtention de biens par de fausses représentations ou des présentations erronées et frauduleuses de faits.

Autrement dit, vous pouvez détourner des fonds, faire des chèques sans provision et voler votre employeur, mais si vous êtes condamné à des dommages-intérêts par un tribunal civil pour agression et inceste, rien de comparable. Il y a manifestement un déséquilibre.

Prenez un conducteur en état d'ébriété qui accumule un montant important d'amendes et essaie de s'en sortir en déclarant faillite. Il devra néanmoins payer ses amendes et ne pourra se dégager de cette obligation, mais il peut ignorer le jugement civil qui lui ordonne de payer des services psychologiques à la victime. Il y a manifestement un déséquilibre quant à l'ordre de grandeur et à la nature des conséquences que nous visons.

Comme vous le savez, un tribunal pénal est limité dans les ordonnances de restitution ou d'indemnisation qu'il peut imposer. Il s'en remet souvent pour cela à un tribunal plus approprié, tel qu'une cour civile, pour déterminer les indemnités courantes destinées à rétablir une situation appropriée.

Je demande simplement d'ajouter une nouvelle catégorie à la liste actuelle, et c'est exactement ce que fait mon projet de loi. Il ajoute à la liste toute indemnité pour coups et blessures accordée en vertu du jugement d'un tribunal dans une instance civile et des intérêts courus, avant ou après jugement, sur telle indemnité, qu'ils soient accordés par le tribunal ou découlent de l'opération de la loi.

En d'autres termes, un tribunal civil aura quelque espoir ou perspective de pouvoir aider ce type de victimes. C'est pourquoi la question me paraît si pertinente, particulièrement à une époque où l'on se préoccupe de plus en plus de la violence familiale. Ce projet de loi devrait être soumis à un vote.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Forseth.

Sachant qu'on ne peut extraire du sang d'une pierre, il n'y a pas d'avantage immédiat pour la femme victime ou quiconque. Ce que vous dites c'est que, si un jour l'homme retrouve un travail, il ne pourra se libérer de cette obligation. Elle lui restera imposée et il devra finir par payer.

M. Forseth: Il s'agit d'appliquer à cette situation les mêmes dispositions qu'à une amende ou une pension alimentaire.

La présidente: Mais ce n'est pas un avantage immédiat; c'est à plus long terme.

M. Forseth: C'est juste. Ce que je dis, c'est qu'il y a une grande lacune dans la loi, lorsqu'on compare certaines situations. Mais il faudrait certes une ordonnance d'un tribunal dans une instance civile et aussi la capacité de payer.

Il arrive que des jugements soient prononcés, mais j'ai essayé de faire ressortir le déséquilibre ici, qui permet au contrevenant de déclarer faillite et de se laver les mains des conséquences.

La présidente: Je vous remercie.

Il n'y a pas d'autres questions. Votre exposé à été très clair. Merci beaucoup.

M. Forseth: Je vous remercie.

La présidente: N'y voyez pas de bon signe ou de mauvais signe. Je ne peux rien prédire.

Monsieur McClelland.

M. Ian McClelland, député (Edmonton-Sud-Ouest): Bonjour, madame la présidente et chers collègues.

C'est peut-être une première dans ce comité, car je ne suis pas ici pour demander que ma motion soit soumise à un vote. De fait, ma motion, manifestement, ne répond pas aux critères voulus pour cela. Elle a uniquement pour but d'ouvrir le débat. C'est ce qu'elle fait et c'est ce qu'elle fera en tant que motion ne pouvant être soumise à vote.

.1615

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de placer les gens dans une situation où ils devraient voter pour ou contre le fait de chanter l'hymne national. Nous sommes à peu près certains qui serait en faveur et qui serait opposé. Il s'agit de savoir comment s'y prendre, car pour ce qui est des partis fédéralistes, je pense qu'ils seront à peu près unanimes à reconnaître que ce serait une bonne chose à faire.

La présidente: Je vous remercie, monsieur McClelland. Puisque vous avez vous-même dit que la motion n'est pas admissible à un vote et que nous ne pouvons rendre de conclusion aujourd'hui sur cette question, quelqu'un aurait-il une question rapide? Non? Je vous remercie.

C'était un joli petit tour de lobbying, n'est-ce pas? Bien joué.

M. Epp n'est pas encore ici, pas plus que Mme Gaffney, Svend Robinson et Nelson Riis.M. Fournier va présenter pour M. Assad.

Le greffier: Non, M. Mills va présenter pour M. Assad. Notre réceptionniste est actuellement au téléphone pour voir si M. Mills ne pourrait pas venir plus tôt.

La présidente: D'accord, c'est bien. Nous pouvons faire une pause de cinq minutes.

.1619

La présidente: Nous sommes prêts pour vous, monsieur Epp.

M. Ken Epp, député (Elk Island): Je remplace encore une fois quelqu'un d'autre. Je gagne à tous les coups, vous savez. La dernière fois...

La présidente: Est-ce que vous faites payer vos collègues pour le service?

M. Epp: Non, en fait je ne suis pas partisan de ce genre de dessous de table.

La présidente: Simple vérification.

.1620

M. Bélanger: De quel genre êtes-vous partisan?

La présidente: Il leur soutire 12 jours de présence à la Chambre.

M. Epp: Quoi qu'il en soit, j'ai toujours gagné jusqu'à présent, et j'espère qu'il en sera de même aujourd'hui.

Il s'agit d'un projet de loi de mon collègue de Yellowhead, et il concerne la poste.

Vous savez tous, j'en suis sûr, que Postes Canada est probablement l'une des plus grandes sociétés et l'un des plus grands employeurs du pays, si bien que l'avenir de Postes Canada est très important. Nous pensons que le fonctionnement de Postes Canada, son efficience et son service aux Canadiens seraient meilleurs si Postes Canada était totalement privatisée. La Société livrerait ainsi concurrence sur un terrain de jeu égal avec les autres fournisseurs de services similaires.

Nous parlons non seulement de l'acheminement du courrier ordinaire de première classe, mais aussi d'autres activités dans lesquelles Postes Canada s'est lancée, à savoir le service de messagerie et celui de courrier publicitaire. Ce sont des domaines dans lesquels Postes Canada met à profit son monopole pour livrer concurrence et, parfois, évincer les entreprises privées qui sont des employeurs et des contribuables totalement légitimes. Nous pensons qu'ils devraient jouer sur un terrain de jeu égal et la meilleure façon de l'assurer serait de privatiser les activités et les services de la Société. En gros, elle cesserait d'être une société d'État, comme c'est le cas actuellement.

Voilà donc l'essence du projet de loi, mais j'irais encore plus loin pour vous exhorter à en faire une motion sujette à vote, car cette question est si importante pour les Canadiens de tout le pays. Je pense qu'il serait très bon que les députés forcent une décision à ce sujet, du moins à ce stade-ci. Il se peut que la majorité des députés ne soient pas en faveur d'une telle mesure, mais je pense qu'il est très important d'au moins lancer le débat dans le pays, de même qu'à la Chambre. Je vous exhorte donc à soumettre ce projet de loi à un vote, et d'en faire également une motion d'initiative parlementaire débattue à la Chambre.

Voici qui met fin à mon exposé. S'il y a des questions ou des commentaires, je serais heureux de les entendre.

La présidente: Y a-t-il des questions, messieurs?

Je comprends maintenant pourquoi ils vous envoient.

[Français]

M. Caron: Pourquoi présentez-vous une telle motion? Pensez-vous qu'actuellement, la Société canadienne des postes ne fournit pas le service pour lequel elle a été mise sur pied? Pensez-vous que ce service n'est pas bien dispensé à l'ensemble des Canadiens qui peuvent en avoir besoin?

[Traduction]

M. Epp: Je le pense effectivement. Postes Canada est allée au-delà de son mandat initial d'acheminer le courrier et fait aujourd'hui bien plus que cela. Elle a empiété sensiblement sur la messagerie. C'est bien connu. Je pense également qu'elle se comporte de façon déloyale, ce qui motive la motion: privatisons Postes Canada pour établir un terrain de jeu égal pour tous les concurrents.

J'ai parlé à plusieurs personnes dans le secteur de la messagerie et elles m'ont fait valoir des arguments très convaincants. Je suis convaincu par ce qu'elles m'ont dit. Ces entreprises ne peuvent soutenir la concurrence de Postes Canada dans le domaine des messageries parce que Postes Canada offre le service au client à un moindre coût. En tant que députés, nous ne parvenons pas à extorquer la vérité à Postes Canada car celle-ci n'est pas obligée à présenter séparément les composantes de ses recettes dans son système comptable. Elle nous remet des états financiers globaux à la fin de chaque année, couvrant l'ensemble de ses activités.

.1625

Par exemple, elle a obtenu cette année une hausse de 2 cents du prix du courrier de première classe. Si je me souviens bien, elle affichait une perte d'environ 40 millions de dollars et l'a invoquée pour justifier cette hausse. Or, toutes les études que nous avons pu faire démontrent que l'acheminement du courrier première classe est en fait bénéficiaire.

N'étant pas obligée de séparer ses sphères d'activité, elle accroche le wagon des services de messagerie à la locomotive du courrier. Grâce au prix élevé qu'elle fait payer le courrier de première classe, elle évince les entreprises de messagerie du marché. Elle impute le coût de ses services de messagerie au courrier première classe, ce qui lui permet d'offrir des prix imbattables pour la messagerie.

La même chose est vraie pour le courrier publicitaire. Lorsque j'étais critique du service postal, j'ai reçu un certain nombre d'interventions de journaux de petites villes dont l'essentiel des revenus provient de la publicité et de l'insertion dans leurs journaux de brochures publicitaires occasionnelles. Postes Canada a entrepris d'imprimer et de livrer ces brochures à un prix moindre que ce que pouvaient offrir les petits journaux, si bien que ces derniers ont perdu une partie substantielle de leurs revenus.

Dans le même temps, Postes Canada jouit du monopole pour l'acheminement du courrier de première classe. Il lui suffit de s'adresser au Cabinet et de dire qu'elle a une perte de 42 millions de dollars et qu'il lui faut une hausse du prix des timbres, et c'est fait. Lorsqu'elle est venue demander cela il y a 18 mois, nous avons posé toute une série de questions. Postes Canada et le ministre n'y ont pas répondu. Aussi, devant ce refus, nous ne pouvons que conclure qu'ils ont quelque chose à cacher pour ce qui est de l'imputation des coûts aux différentes activités.

Nous pensons que si l'on privatisait Postes Canada, elle serait obligée de livrer concurrence. D'autres gens d'affaires, comme les entreprises de messagerie, par exemple, pourraient également acheminer du courrier de première classe et ce serait à l'avantage des Canadiens de tout le pays car ils bénéficieraient d'un prix concurrentiel bas dans tous ces domaines.

La présidente: Monsieur Epp, pour faire un peu d'histoire, vous savez que les services de messagerie ont fait leur apparition à cause des grèves dans les postes. Qu'est-ce qui est venu en premier, la poule ou l'oeuf? Le service postal existait. Les entreprises de messagerie ont surgi à cause des grèves qui ont eu lieu quand j'étais enfant, et c'était il y a très longtemps.

M. Epp: Pas tout à fait. Il est vrai que les grèves postales les ont vraiment aidées, car en période de grève les gens qui avaient besoin d'acheminer des petits colis et du courrier se sont tournés massivement vers les entreprises de messagerie. Même si en droit l'acheminement d'un colis est censé coûter trois fois plus cher qu'une lettre, un service de messagerie ne peut le faire de manière concurrentielle avec Postes Canada. Donc, lorsque Postes Canada fonctionne normalement, ces entreprises n'ont pas cette clientèle. Mais elles existaient déjà, sinon elles n'auraient pu remplir cette fonction pendant les grèves.

La présidente: Je sais que vous improvisez, mais avez-vous pu, en prévision d'aujourd'hui, réunir des études qui auraient été faites et qui établiraient que cette mesure serait bénéfique aux contribuables du pays de même qu'aux entreprises dont vous parlez?

Par exemple, on paye aujourd'hui le même prix pour acheminer une lettre n'importe où au Canada et Postes Canada doit absorber le coût de l'acheminement dans des régions d'accès très difficile. Il y a là une forme de péréquation qui caractérise les fédérations. Avez-vous fait des études ou avez-vous eu accès à des études prouvant que cela fera faire des économies?

M. Epp: Je ne sais même pas si de telles études existent, si elles ont jamais été faites.

La présidente: Vous me dites que les entreprises de messagerie ne peuvent soutenir la concurrence, que leurs tarifs sont plus chers.

M. Epp: C'est fondé sur des données qu'elles ont rassemblées. Évidemment, ils s'inscrivent dans leur optique commerciale propre, mais lorsqu'ils nous ont présenté ces chiffres, nous pouvions voir exactement ce qui se passait car ils nous ont montré les chiffres. Ce sont juste quelques entreprises privées qui ont fait ce travail, ce n'était pas une étude d'ensemble. Je ne m'en souviens pas à brûle pourpoint, mais ils nous ont montré leurs chiffres d'exploitation et ce qu'il leur en coûte par colis. Elles doivent couvrir leurs frais et prévoir une petite marge bénéficiaire. Postes Canada offre le service à un coût moindre que leur prix de revient.

.1630

J'ai dans mes dossiers - et j'ai peut-être remis cela au nouveau critique de Postes Canada, mais c'était dans mes dossiers -une lettre d'un client à l'une de ces entreprises disant textuellement que ce client ne ferait plus appel à elle parce que Postes Canada offrait tel prix, et il était sensiblement inférieur.

La présidente: Je suis heureuse de l'entendre.

Monsieur Bélanger.

M. Bélanger: Je suppose que toute cette motion est fondée sur la prémisse qu'il y a interfinancement consistant à puiser dans les recettes du courrier première classe pour subventionner les services de messagerie, etc. Est-ce là votre prémisse?

M. Epp: Je ne suis pas certain que ce soit la seule, mais c'est certainement l'un des fondements de la motion, car le fait est que Postes Canada livre concurrence sur le marché privé mais en même temps jouit du monopole du courrier de première classe et peut utiliser l'interfinancement pour baisser ses prix.

C'est pourquoi nous disons que si les postes étaient privatisées et s'il y avait véritable concurrence, cela pourrait fonctionner aussi dans l'autre sens et que ce serait plus équitable pour les consommateurs.

M. Bélanger: Est-il exact qu'une poursuite en justice est en instance de jugement au Québec sur cet aspect même, intentée par une ou plusieurs entreprises de messagerie concurrentes de Postes Canada?

M. Epp: C'est possible, je ne suis pas au courant.

M. Bélanger: Je pense que c'est le cas. Vous n'en êtes donc pas informé.

M. Epp: Non, je ne suis pas au courant. Si c'est le cas, j'imagine que cela renforce les arguments en faveur de cette motion.

Il y a peut-être aussi un aspect juridique qu'il conviendrait de vérifier...

M. Bélanger: C'était la question que j'allais poser au greffier.

M. Epp: ...à savoir si nous pouvons déposer une motion à la Chambre alors que l'affaire est en instance de jugement.

M. Bélanger: Je ne sais pas, mais la motion semble respecter les formes voulues, etc. Pour ce qui est de savoir si le fait de rendre la motion sujette à vote aurait une incidence sur le procès en cours, le greffier pourrait peut-être nous le dire.

Le greffier: Madame la présidente, dans l'immédiat, le débat permettrait simplement aux députés d'exprimer un avis sur le sujet. Si la motion était mise aux voix, ce serait simplement un avis de la Chambre, sans conséquences juridiques ou procédurales.

M. Bélanger: Je vous remercie.

La présidente: Y a-t-il d'autres questions?

Je vous remercie beaucoup, monsieur Epp.

M. Epp: Je vous remercie, et j'apprécie l'attention que vous accordez à la motion de mon collègue.

La présidente: La prochaine fois, j'aimerais que vous arriviez avec une motion disant que le courrier ne sera plus livré qu'un jour sur deux dans toutes les maisons du pays, et nous économiserons ainsi un peu d'argent.

M. Epp: Effectivement...

La présidente: Allez-y et travaillez là-dessus, monsieur Epp.

M. Epp: ...ce n'est pas politiquement correct, mais c'est une chose...

J'ajoute, juste avant de partir, que le rôle de Postes Canada devra nécessairement changer. Je connais déjà beaucoup de gens qui ont abandonné Postes Canada et se servent du courrier électronique.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Epp.

C'est ma faute, c'est moi qui ai lancé la balle.

M. Stinson: Vous n'êtes pas censée faire cela.

La présidente: Je sais.

M. Epp: Lorsque cela se fera de plus en plus, il vaudra mieux que les postes soient privatisées afin de pouvoir livrer concurrence à d'autres entreprises. Je vous remercie.

La présidente: Soyez la bienvenue, madame Gaffney.

Mme Beryl Gaffney, députée (Nepean): Merci beaucoup. Il s'agit du projet de loi C-241, qui était une motion, la motion 14, inscrite précédemment au Feuilleton de la Chambre. Elle a été débattue, mise aux voix et adoptée.

La raison pour laquelle je présente un projet de loi d'initiative parlementaire sur le même sujet est, tout d'abord, que rien de concret n'a encore été fait. Nous avons avancé, mais nous ne sommes pas encore au stade où j'espérais être. Je crains vraiment que cela se perde quelque part et que ce soit relégué derrière des affaires plus importantes à l'ordre du jour.

J'ai parlé avec le ministère de la Justice qui travaille sur la question. Il semble que l'imposition des allocations pour enfants sera modifiée. Il semble que des dispositions seront mises en place pour régir cela, de même que pour donner des directives aux juges et à ceux chargés de faire payer les mauvais payeurs.

Ce projet de loi est une mesure de précaution pour obliger le gouvernement à agir. Le ministère de la Justice m'assure que les modifications qu'il envisage seront soumises au Cabinet, probablement dans les six prochaines semaines, avant l'ajournement de Noël de la Chambre.

.1635

Il se peut donc que ce projet de loi ne soit jamais introduit au Parlement. Cela se pourrait très bien. Il s'agit simplement d'intensifier la pression.

Le comité fédéral-provincial-territorial sur le droit familial a pleinement appuyé ce que je disais et formulé des recommandations similaires à ce que je disais dans ma motion. Le groupe de travail mis sur pied par le ministère de la Justice, sous la direction de Sheila Finestone et qui a sillonné le pays, a également appuyé ce que je disais dans ma motion.

C'est un peu comme la personne qui porte non seulement une ceinture pour soutenir son pantalon, mais aussi des bretelles. J'utilise cette procédure comme levier pour assurer que le gouvernement agisse.

Je demande que ce projet de loi soit déclaré sujet à vote. Je sais que vous aurez de la difficulté à vous prononcer là-dessus. J'ai moi-même du mal à m'expliquer pourquoi je fais cela. Pourquoi n'ai-je pas inscrit une motion au Feuilleton en même temps que je présentais un projet de loi? C'était principalement parce que je savais que la motion serait débattue immédiatement, alors qu'avec un projet de loi j'étais à la merci du tirage au sort. Le tirage au sort a maintenant eu lieu, et j'interviens donc maintenant également par ce biais.

Si vous avez des questions, je me ferai un plaisir d'y répondre. C'est compliqué, même pour moi; ça l'est vraiment.

La présidente: En substance, le projet de loi prévoit que le mari ou le conjoint qui n'a plus la garde des enfants paiera intégralement l'impôt...

Mme Gaffney: Non, ce n'est pas à moi d'en décider. C'est au Cabinet d'en décider. Je dis simplement que quelque chose ne va pas dans le régime fiscal. Il faut le rendre plus équitable car il ne l'est pas actuellement. C'est au Cabinet de décider comment il va répartir l'impôt ou ce qu'il va faire. Je ne sais pas. Tout ce que je dis, c'est qu'il faut introduire un peu de justice dans le système. Ce n'est pas moi qui prend la décision, ce n'est pas à moi de le faire.

La présidente: Dans ce cas, je ne comprends pas la note explicative. Elle dit que le projet de loi modifierait la Loi de l'impôt sur le revenu de sorte que l'allocation pour enfant ne soit plus déductible du revenu de celui qui la paie.

Mme Gaffney: Excusez-moi. Où avez-vous lu cela?

La présidente: C'est la note explicative, page 1 a). Elle ajoute: «...et ne soit plus un revenu pour la personne qui la reçoit». Pour faire un résumé de type Reader's Digest, il me semble que le parent qui n'a pas la garde paye intégralement l'impôt et que le parent qui a la garde ne paye rien, ce qui est la façon dont cela fonctionne dans les mariages.

Mme Gaffney: N'est-ce pas terrible. Je n'ai pas lu cela.

La présidente: C'est sur la page de droite, Beryl, dans les notes explicatives. J'aimerais que les choses soient absolument claires.

Mme Gaffney: Donc l'allocation pour enfant n'est plus déductible du revenu imposable de celui qui la paye et n'est plus un revenu pour la personne qui la reçoit et cela englobe...

Je crains que ce ne soit pas entièrement exact, car il se pourrait que le revenu soit scindé aux fins de l'impôt. C'est ce qui pourrait être décidé.

La présidente: Est-ce donc un tribunal qui va décider ou...

Mme Gaffney: C'est le Cabinet qui va décider. C'est lui qui prend cette décision.

Cela signifie qu'il faut modifier cela. Je suppose que j'aurais dû lire cela. J'ai fait confiance à quelqu'un d'autre.

La présidente: Malheureusement, ça n'est plus modifiable une fois que le texte nous est transmis.

Le greffier: Madame la présidente, comme vous le savez, les notes explicatives ne font pas partie du projet de loi. Mais l'explication présente certainement un problème.

Mme Gaffney: Puis-je modifier cela? Il faudra que je revoie cela, car ce n'était pas ce que je pensais faire.

Le greffier: C'est une interprétation des rédacteurs juridiques, je suppose.

Mme Gaffney: Il y a différentes façons de procéder. Je sais qu'ils envisagent toutes sortes de solutions.

La présidente: Cela n'est donc pas du tout ce que vous visiez?

Mme Gaffney: Non, ce n'est pas ce que je voulais faire.

La présidente: Nous prêterons grande attention au libellé lorsque nous en débattrons et veillerons à ne pas en donner une interprétation erronée.

Y a-t-il d'autres questions? Non?

Mme Gaffney: C'était assez peu douloureux. Je vous remercie.

La présidente: Vouliez-vous souffrir?

Mme Gaffney: Non, pas aujourd'hui.

M. Svend Robinson, député (Burnaby-Kingsway): Du moment qu'ils ne me réservent pas la souffrance.

La présidente: Mais vous êtes notre favori. Est-ce que vous remplacez M. Taylor?

.1640

M. Robinson: Oui. Est-ce mon tour maintenant?

La présidente: C'est à vous.

M. Robinson: Je voudrais tout d'abord vous transmettre les excuses de mon collègue Len Taylor, qui aurait beaucoup voulu faire cette présentation directement au sous-comité, mais il en est malheureusement empêché. Il est dans sa circonscription et m'a demandé de le représenter.

Je commencerai par dire que si Len a énormément travaillé sur la question soumise au sous-comité, celle des revendications territoriales des Autochtones, je ne puis prétendre pour ma part être un expert en la matière, ni de près ni de loin. Mais j'essaierai de présenter des arguments de mon mieux, pour le compte de Len, et de répondre à vos questions.

Je pense que vous avez la motion déposée par M. Taylor, numéro M-484, invitant le gouvernement à créer une nouvelle commission indépendante concernant les revendications territoriales des Autochtones, ainsi que le recommandait le rapport annuel 1994-1995 de la Commission des revendications des Indiens.

J'ai passé en revue les critères qui guident le sous-comité pour déterminer ce qui peut être soumis à un vote, et à mon sens, cette motion les remplit tous. J'espère que le comité, en appliquant les critères - et je pense que ce sont toujours les mêmes depuis octobre 1987, madame la présidente - conviendra que cette motion les remplit tous et qu'aucun ne la disqualifie.

Je vais vous expliquer brièvement de quoi il retourne. La Commission des revendications des Indiens est un organisme mis sur pied en juillet 1991. Elle se compose de cinq membres et a pour fonction de conseiller le gouvernement et d'autres parties lorsqu'il y a des divergences de vues sur des revendications territoriales particulières. Elle n'a pas de pouvoir de décision ni rien de ce genre, mais lorsqu'il y a désaccord, soit sur une revendication territoriale particulière soit sur les critères d'indemnisation appliqués par le gouvernement aux fins de la négociation d'un règlement, cette commission peut formuler des recommandations.

Comme je l'ai dit, elle a été créée en 1991. Ce devait être un organisme temporaire. Un groupe de travail mixte a été mis sur pied en même temps en vue de formuler quelques recommandations pour établir de nouvelles modalités de règlement des revendications territoriales. Cependant, ce processus s'est enrayé en 1993.

Quelle est donc la situation aujourd'hui? La Commission des revendications des Indiens a indiqué très clairement, dans son rapport annuel le plus récent, que:

Membres du sous-comité, cette commission recommande donc de la façon la plus catégorique l'élaboration d'une nouvelle politique et d'un nouveau mécanisme en matière de revendications territoriales, afin de mettre fin à la situation actuelle où le gouvernement est à la fois juge et partie. C'est le gouvernement du Canada qui, à toutes fins pratiques, décide de la validité ou de l'absence de validité d'une revendication contre lui-même.

La principale recommandation que cette Commission des revendications des Indiens a formulée est donc la création d'un organisme indépendant qui effectuerait au moins l'évaluation initiale de la validité d'une revendication territoriale autochtone contre le Canada, et c'est la première recommandation de son rapport au gouvernement.

Elle accorde beaucoup d'importance à cette recommandation. Mon collègue, M. Taylor, s'est saisi de la question. Il a posé des questions à la Chambre, il est intervenu dans les débats sur la motion d'ajournement. Or, rien n'indique jusqu'à présent que ce sera inscrit au calendrier législatif du gouvernement. Je sais que c'est l'un des critères que le comité applique. Si le gouvernement annonce qu'il va agir sur une question, le comité ne veut pas gaspiller le temps réservé aux affaires émanant des députés. Mais ce n'est pas le cas ici. Le gouvernement n'a encore rien décidé et je suis sûr que les membres du comité auront leurs propres opinions sur l'opportunité de prendre une telle mesure. Mais je n'ai pas besoin de vous dire que ce ne sont pas ces opinions qui doivent vous guider s'agissant de la décision de soumettre ou non la motion à un vote.

La création d'une commission indépendante concernant les revendications territoriales autochtones fait partie de la politique du Parti libéral depuis au moins la dernière élection fédérale. Je sais combien les promesses formulées dans le Livre rouge comptent aux yeux d'au moins quelques membres de ce comité, et je veux vous rappeler que l'une de ces promesses était que:

.1645

Voilà l'engagement qui a été pris. Cette motion faciliterait la création de cette commission et la tenue de cette promesse.

Enfin, je souligne l'urgence de cette affaire. La Commission des revendications des Indiens l'a jugée être de la plus haute importance. Elle a dit: «Tout ce que nous avons appris à titre de commission jusqu'à présent montre qu'il est impératif d'entamer le processus de réforme immédiatement». Elle poursuit en recommandant avec fermeté la création de cette commission.

Ce serait une occasion pour la Chambre et tous les députés de débattre des mérites de cette proposition et de formuler une recommandation au gouvernement visant à donner suite non seulement à cette recommandation, mais tenir également la promesse faite en 1993.

La présidente: Y a-t-il des questions? Monsieur Stinson.

M. Stinson: Qui constituerait cette commission et qui y siégerait? Vous dites qu'elle serait indépendante, mais comment cela fonctionnerait-il?

M. Robinson: La structure exacte de la commission n'a pas été déterminée. Les membres en seraient nommés par le gouvernement fédéral en concertation avec les Autochtones, et sans doute avec l'Assemblée des premières nations et d'autres organisations représentatives des Autochtones.

Ce serait un organisme indépendant qui ne ferait pas partie du gouvernement, ni rien du genre. Il pourrait peser les arguments présentés et faciliter les négociations sur les revendications. Les députés voudront sans doute donner leur avis sur la structure et les modalités précises pendant ce débat.

[Français]

M. Caron: Avez-vous une idée du volume de travail qu'aura cette commission, compte tenu de l'ensemble des revendications au Canada?

M. Robinson: Oui.

M. Caron: En termes d'ampleur, de personnel, de membres, ce serait sûrement un organisme assez important.

M. Robinson: Oui, bien sûr, et nous aurons beaucoup de travail à faire, parce que, comme le député le souligne, il y a beaucoup de revendications territoriales qui n'ont pas encore été jugées selon le processus actuel.

C'est un organisme très important, et il est important que le gouvernement assure à cet organisme indépendant les ressources nécessaires. Sans ressources, il pourrait y avoir encore un problème de retard. Par exemple, en Colombie-Britannique, comme M. Stinson le sait fort bien, on attend depuis de nombreuses années la résolution de la revendication des autochtones Niska, et il y a beaucoup d'autres revendications territoriales. Donc, il est très important que cette commission soit créée le plus tôt possible et qu'elle ait les ressources nécessaires pour accomplir son travail.

C'est l'une des raisons pour lesquelles j'espère que le comité va permettre un débat. Si le Parlement se prononce en faveur de cette motion, cela va peut-être pousser le gouvernement à créer cette commission pour régler le retard actuel.

M. Bélanger: Il n'est pas nécessaire de faire des remontrances partisanes pour convaincre le comité.

M. Robinson: C'est simplement pour ajouter de la force à cette motion. Si on a un Livre rouge...

M. Bélanger: Ce n'est pas nécessaire. Je pense même que cela nuit au débat.

M. Robinson: Chacun a son idée là-dessus.

[Traduction]

M. Stinson: Le gouvernement fédéral assumerait-il le coût total de cette commission ou bien envisagez-vous d'autres modalités de financement?

.1650

M. Robinson: Franchement, c'est le genre de détail que je ne possède pas, monsieur Stinson. Mon collègue, M. Taylor, aurait sans aucun doute une réponse à vous donner, mais pour ce qui est du financement, je ne sais pas si les provinces et territoires en assumeraient une partie, puisque ces revendications territoriales les concernent également.

C'est une très bonne question et, encore une fois, cela fait partie des points que le Parlement pourrait aborder dans le débat sur la motion.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Robinson.

M. Robinson: Merci beaucoup.

La présidente: Monsieur Riis.

M. Nelson Riis, député (Kamloops): Mon projet de loi est motivé par le constat préoccupant que l'Accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique est relativement silencieux sur cet aspect. Je ne mentionne que trois ou quatre des critères auxquels ce projet de loi répond.

Ce n'est certainement pas une proposition triviale ou insignifiante en ce sens que l'eau au Canada est assimilable au sang d'un corps vivant. Sans eau douce, sans protection adéquate de l'eau, ce serait... nos cours d'eau et nos ressources en eau douce me paraissent être quelque chose d'intrinsèquement canadien.

Le projet de loi ne contient de discrimination envers aucune région du pays. Il y a des plans de détournement de cours d'eau dans virtuellement toutes les régions, certains de plus grande envergure que d'autres, mais particulièrement les projets de détournement de la Baie James vers le bassin du Mississipi et plus récemment, en Colombie-Britannique, le détournement de la rivière Thompson, qui est un affluent du Fraser, vers le sud de la Californie, en passant par une série de cours d'eau naturels, etc.

À ma connaissance, ce projet de loi ne fait double emploi avec aucune mesure spécifique sur le calendrier gouvernemental, ni dans le proche avenir ni à long terme. Le seul recoupement éventuel serait si le gouvernement élabore une politique globale concernant l'eau dans notre pays. Nous avons quelques déclarations d'intention à ce stade, mais pas de politique globale touchant l'eau.

Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit de particulièrement partisan dans ce projet de loi. Un certain nombre de députés se sont déclarés favorables au projet de loi, certains officiellement, d'autres officieusement. Le député réformiste de Revelstoke l'a officiellement appuyé, mais des membres de tous les partis politiques, tant reconnus que non reconnus à la Chambre, ont exprimé un intérêt et un soutien, au moins pour le principe représenté ici.

Ce serait une façon d'éliminer ou au moins de réduire la crainte que nourrissent certains groupes et certains Canadiens que l'ALÉ, et maintenant l'ALÉNA, ouvre la porte à de futures exportations d'eau vers les États-Unis et le Mexique, particulièrement le nord du Mexique. Ce projet de loi interdirait ces exportations, du moins s'agissant de transferts de bassin à bassin. Il n'empêcherait pas les exportations d'eau en bouteille, les exportations à petite échelle. Nous parlons uniquement de transfert d'un bassin hydrographique à un autre. Cela n'empêcherait pas les transferts entre bassins au Canada et d'une province à l'autre, qui sont expressément autorisés. Il s'agit uniquement des exportations.

Pour cette raison, madame la présidente et membres du comité, je propose que ce projet de loi, en raison de son importance, fasse l'objet d'un débat et d'un vote.

La présidente: Merci beaucoup.

Les membres du comité ont-ils des questions? Monsieur Bélanger.

M. Bélanger: Juste sur la question des exclusions, est-ce que ce projet de loi empêcherait l'exportation d'eau par aqueduc?

M. Riis: Éventuellement. Ce sont des détails à régler. Il n'empêcherait pas des exportations à petite échelle, comme de l'eau en bouteille. Je sais que trois ou quatre petites localités situées le long de la frontière canadienne en achètent pour l'approvisionnement domestique.

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M. Bélanger: Ou un aqueduc. Je ne connais pas le terme anglais.

M. Riis: Un canal.

M. Bélanger: Est-ce que ce serait interdit?

M. Riis: Oui, probablement. Je dirais que tout ce qui atteint la taille d'un navire citerne, d'un pipe-line ou d'un canal serait interdit par ce projet de loi. C'est mon interprétation.

M. Bélanger: Merci.

La présidente: Merci beaucoup. C'était un exposé très clair.

M. Riis: Merci beaucoup, madame la présidente.

Quand le comité prendra-t-il sa décision?

La présidente: Ce pourrait être ce soir, demain ou plus tard dans la semaine.

M. Riis: Mais probablement avant la fin de la semaine. Est-ce une question légitime?

La présidente: Oui.

Le greffier: Monsieur Riis, la nouvelle liste, sur laquelle vous êtes inscrit, prend effet le mercredi 22 novembre. De façon à disposer du plus grand nombre possible de projets de loi sujets à vote, le sous-comité attendra peut-être jusqu'à la toute dernière minute avant de déposer son rapport. En théorie, il pourrait faire rapport à la Chambre jusqu'à vendredi.

M. Riis: Mais ce tour commencerait le 27 novembre?

La présidente: Le mercredi 22 novembre.

Bonsoir, monsieur Mills.

M. Dennis J. Mills, député (Broadview-Greenwood): Je représente ici mon collègue de Gatineau-La Lièvre. Ceci concerne le financement des partis politiques. Êtes-vous informés de cette motion?

La présidente: Oui. Nous sommes un groupe très informé.

M. Mills: Voulez-vous que je commence, madame la présidente?

La présidente: Oui, je vous en prie.

M. Mills: Comme vous le savez, le système de financement actuel des partis politiques présente un certain nombre de faiblesses qu'il convient de rectifier. L'impression du public, bien entendu, est que les grosses entreprises et les groupements d'intérêts exercent une influence disproportionnée sur la vie politique, par le biais de leurs contributions financières.

Notre collègue a donc élaboré une formule qu'il présente sous forme de motion, comme vous le savez. Il aimerait donc que sa motion soit soumise à un vote lorsqu'elle sera introduite à la Chambre, ce qui sera le cas le 6 décembre, je crois.

Madame la présidente et chers collègues, je pense que notre collègue a eu une idée très intéressante. Je dois avouer que j'ai reçu de temps à autre des dons importants de grandes sociétés, non nécessairement que je les aie sollicitées, mais parfois ces dons sont nécessaires pour constituer une masse critique, pour pouvoir mener campagne.

Je n'aimerais pas penser que les personnes qui m'ont fait des dons importants - dans mon cas particulier, ce n'est pas un grand secret que je suis proche de l'entreprise Magna, parce que j'y travaillais. J'imagine que d'aucuns pensent probablement que je suis sous l'influence de cette société, ce qui me force à redoubler d'efforts pour éviter la perception, ou même la réalité, que l'influence de grandes entreprises - j'ai cité cet exemple particulier - m'amène à penser ou agir ou voter d'une certaine façon.

Mais je ne doute pas que le public a l'impression que ces personnes qui m'ont fait des dons importants ont une plus grande influence sur moi que celles qui m'ont fait des dons moindres.

.1700

Je pense que notre collègue a trouvé la solution. Elle va tout à fait dans le sens de ce que nous disions dans le Livre rouge. Je sais que cela n'impressionnera guère les députés de l'opposition ici, mais c'est sans doute quelque chose qui vous intéressera. Je vous demande donc de rendre la motion de notre collègue sujette à un vote.

La présidente: Monsieur Stinson.

M. Stinson: J'ai quelques questions rapides. On prévoit ici 99 cents per capita. Je suppose que vous parlez de la population de la circonscription. Cela ignore donc le problème de ce qu'il en coûte pour se déplacer dans le Nord et certaines régions de Colombie-Britannique, du Nord de l'Ontario, du Nord du Québec, au Labrador, etc. La population de ces circonscriptions est très dispersée et ses députés se verraient nettement défavorisés.

M. Mills: Non, je ne pense pas. Dans notre système actuel, il y a une formule de pondération pour les régions éloignées et défavorisées. Je pense que cela pourrait être modifié un peu, mais il y a une formule de pondération dans le système actuel pour tenir compte des tarifs du transport aérien dans les régions isolées.

M. Stinson: Et qu'en est-il des déplacements? Quantité de localités, particulièrement dans le centre de la Colombie-Britannique, n'ont pas d'aéroport et le trajet est très long par la route. Par exemple, la population du centre-ville de Toronto est importante comparée à celle des régions de Salmon Arm ou Kamloops, où les déplacements coûtent cher.

M. Mills: Oui, mais ceci concerne le financement des partis politiques.

M. Stinson: Oh, d'accord.

La présidente: Permettez-moi de clarifier cela pour ma propre gouverne. Les 99 cents per capita vont au Parti libéral central ou au Parti réformiste central ou au Bloc québécois central, à charge pour eux de les distribuer aux candidats?

M. Mills: Oui. C'est effectivement cela que prévoit la motion.

La présidente: Donc, une circonscription de la taille de la mienne produirait 250 000 dollars. Cette somme irait au Parti libéral qui déciderait, dans sa sagesse, combien me reviendrait.

M. Mills: Quelqu'un comme vous n'aurait probablement pas besoin de plus du dixième de cela.

La présidente: Tout à fait. Je rapporterais de l'argent au Parti libéral, je peux vous le dire.

Lorsque je regarde la motion, elle ne contient pas tous les détails qui figurent dans cette feuille explicative.

M. Mills: Mon collègue a malheureusement été retenu. Il n'a pu être là aujourd'hui à cause d'un arrangement de voyage qui n'a pu se faire. Je ne suis pas équipé pour expliquer sa motion en détail, mais il vous donnera tout à la prochaine réunion. Je suis là uniquement pour demander que la motion soit soumise à un vote.

La présidente: Rassurez-vous, monsieur Mills, vous êtes toujours très bien équipé.

M. Mills: Est-ce consigné au procès-verbal?

La présidente: Pour qu'on en débatte.

La motion ici parle uniquement d'ouvrir le concept. Je ne pense pas que la motion ait besoin de tous les détails figurant sur la note explicative. Le concept que vous présentez est qu'il y a quelque chose de pourri au royaume de Danemark et qu'il faut se pencher dessus.

M. Mills: Oui.

La présidente: Je vous remercie.

Y a-t-il d'autres questions sur cette motion?

Je ne suis pas d'accord avec vous, soit dit en passant.

J'ai besoin que le greffier me donne un éclaircissement, car je suis le seul membre régulier du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Ceci a été présenté comme un sujet de débat à ce comité par les membres réformistes et n'a pas encore été expédié. C'est toujours en discussion là-bas, et donc un comité en est saisi. Est-ce que cela nous cause un problème?

Le greffier: Est-ce que le comité en a été saisi par un ordre de renvoi de la Chambre?

La présidente: Je ne me souviens pas. Je sais simplement que cette question revient sur le tapis de temps à autre.

Le greffier: Nos lignes directrices parlent uniquement de l'ordre du jour du gouvernement. Si c'est à l'ordre du jour d'un autre comité, je ne pense pas que cela nous empêche de rendre la motion sujette à vote.

La présidente: Bien. Je vous remercie.

Y a-t-il d'autres questions?

M. Mills: Donc, tout le monde est d'accord pour la soumettre à un vote?

La présidente: Dennis, n'insistez pas trop.

M. Mills: Non, je voulais simplement m'assurer de comprendre. Je ne suis que l'assistant de M. Assad ici aujourd'hui. Je ne veux pas bâcler la mission qu'il m'a confiée.

La présidente: Vous avez très bien présenté sa motion. Nous ne prendrons pas de décision tout de suite.

M. Mills: Bien.

La présidente: Merci beaucoup.

M. Mills: Souhaitiez-vous poser une question?

La présidente: Il n'est pas autorisé à poser une question. Il n'est pas membre du comité.

M. Mills: Oh, désolé.

La présidente: Il peut vous poser une question dehors, dans le couloir.

M. John Solomon, député (Regina-Lumsden): Ce n'est pas vrai.

La présidente: Ce n'est pas vrai?

M. Solomon: On m'a dit que je devais venir.

.1705

La présidente: Non, vous êtes ici pour répondre à des questions.

M. Mills: Je vais me dépêcher de m'en aller avant que les choses ne se gâtent pour moi, d'accord? Je vous prends tous à témoin du fait que Mme Parrish m'a fait un compliment aujourd'hui. Toute la colline va en être remuée.

La présidente: Du moment que l'on n'en parle pas dans le magazine Frank!

Monsieur Solomon, voudriez-vous commencer votre exposé, s'il vous plaît? Nous avons un exemplaire de votre projet de loi.

M. Solomon: C'est parfait.

La présidente: Nous l'avons. Avons-nous une étape d'avance sur vous, ou bien quoi?

M. Solomon: Non, j'ai un exemplaire - je dors avec mes projets de loi pour ne pas les perdre de vue.

Chers collègues, j'apprécie cette occasion de comparaître ici pour vous présenter le projet de loi C-314, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada.

Comme vous le savez, elle exigerait que toutes les pensions ou allocations de retraite versées à un député sur les deniers publics soient déduites de son indemnité sessionnelle.

Ce projet de loi est motivé par deux considérations. Premièrement, les Canadiens sont très préoccupés par le cumul des pensions et des traitements. Ils s'inquiètent de voir que des sommes énormes sont versées à des élus à leur insu. On a révisé le régime de pension des députés, et cela a été un bon travail. Je pense que le souci de la Chambre des communes de réduire le coût pour le contribuable de ce régime de pension, de réduire le montant touché par les députés et de resserrer les conditions d'admissibilité a été apprécié des contribuables et de la plupart des Canadiens.

Ce projet de loi-ci est en fait un codicille de cette loi sur les pensions, car il revient à dire au contribuable que s'il va verser des pensions aux serviteurs du public - aux élus - il ne devrait payer qu'une seule fois, que ce soit sous forme de pension ou d'un revenu versé au député.

Cela aura également pour effet de rendre transparentes les affaires du député - financières et autres. Il y a des exemples, notamment en Saskatchewan, de codes d'éthique qui exigent que le député provincial déclare tout revenu supérieur à 5 000 dollars provenant d'un organisme public municipal, provincial ou fédéral. C'est ouvert au public, lequel peut donc déterminer d'où provient le revenu des élus, et je pense que de plus en plus de gens tiennent à le savoir.

Ce projet de loi revient à prendre acte, aux yeux des contribuables, de la situation difficile dans laquelle le Canada se trouve aujourd'hui. C'est reconnaître que les contribuables payent des gens - par exemple, les députés à la Chambre des communes - qui touchent des pensions, que ce soit d'une assemblée législative provinciale, d'une commission scolaire, des forces armées, de la GRC ou d'autres organismes municipaux, fédéraux ou provinciaux, et que si le député touche ce revenu, alors il lui incombe de servir son pays et de le faire sur un pied d'égalité avec tous les autres députés, au salaire de base de 64 400 dollars par an.

Je fais valoir aux yeux du comité que cela répond aux intérêts des Canadiens en rendant plus transparente la situation financière des députés. Cela réduit le coût que représente pour les contribuables le revenu des députés et pose une question d'éthique très positive et y répond en disant que qui paye le violon a bien le droit de danser - autrement dit, si le contribuable vous paye, c'est à lui que vous rendez compte. Si un député va toucher des pensions de diverses autres sources, il ne sera pas nécessairement au service du contribuable; il y a un conflit d'intérêt potentiel à l'égard de ceux qui payent votre pension.

Mais surtout, cela règle ce que je définis comme le cumul véritable, par exemple le fait de recevoir un revenu public par le biais d'une pension publique, en même temps que le plein salaire, avec tous les avantages complémentaires d'un député de la Chambre des communes. Je pense que ce cumul, ou ce cumul à l'envers, comme d'aucuns le qualifient, devrait faire l'objet d'un vote et les députés devraient se lever à la Chambre et dire à leurs mandants que cela n'a pas lieu d'être.

.1710

L'exemple que j'utilise, et c'est le meilleur exemple, est mon cas personnel. J'ai été député de l'assemblée législative de la Saskatchewan et aussi longtemps que je servirai mon pays à la Chambre des communes, je n'accepterai jamais un seul sou de pension. C'est mon credo personnel. Je l'ai déclaré publiquement et je m'y tiendrai aussi longtemps que je continuerai à siéger à la Chambre des communes.

Je pense que d'autres députés devraient avoir le même souci de l'intérêt de notre pays et de notre Parlement.

Je suis disposé à répondre à vos questions.

La présidente: Je vous remercie.

Vous avez fait ressortir que vous visez les revenus provenant des deniers publics. Mais avec la logique que vous utilisez, comment justifiez-vous de ne pas y englober tous les fonds de pension? Par exemple, si vous êtes retraité de la Banque royale du Canada et touchez 1,2 million de dollars de pension de source privée, vous touchez en fait un surcroît payé par les contribuables canadiens, ceux-là même qui font vivre la Banque royale. Comment séparez-vous ces notions? Ou bien ceci n'est-il qu'un début?

M. Solomon: C'est une réaction initiale au cynisme qui règne dans l'esprit du public, je pense. J'aimerais une loi cadre qui couvre tous les revenus, y compris les revenus de pension du secteur privé. Mais les rédacteurs du projet de loi - parce que je voulais à l'origine couvrir tous les revenus de pension, tant privés que publics - m'ont dit que la Chambre des communes ne peut que couvrir le secteur public.

La question que vous posez est importante, et elle pourrait peut-être être réglée par le biais d'un code de déontologie. Je crois savoir qu'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat a été constitué pour se pencher sur cette même question. On pourrait peut-être régler cela par ce biais.

Ceci est une première initiative. J'ai pensé que si la Chambre des communes pouvait adopter cela, la suite logique serait d'introduire un projet de loi cadre, ou un projet de loi de plus grande envergure.

La présidente: D'un point de vue pratique, si je suis une enseignante à la retraite, par exemple, et que je fais ce que vous avez fait et dis que je ne toucherai pas ma pension tant que je siégerai à la Chambre des communes, est-ce que ces revenus de pension s'accumuleraient dans un fonds?

M. Solomon: Dans certains cas oui, dans d'autres non. Les prestations à montant déterminé ne sont pas accumulables et les contributions déterminées sont accumulables.

Le problème, d'après les juristes qui ont rédigé cela, est que nous ne pouvons, en tant que Parlement, empêcher les gens de toucher une pension. Ce que nous pouvons faire, et ce que fait ce projet de loi... chacun a droit à la pension qu'il a accumulée.

Par exemple, si vous avez un revenu de pension de 50 000 dollars par an et que vous êtes député, la Chambre des communes ne vous paierait plus que la différence entre le salaire de 64 400 dollars et votre pension. Vous auriez donc en pratique 14 400 par an pour siéger comme député, plus votre allocation non imposable. Mais vous touchez déjà votre pension payée par le contribuable, si bien que vous aurez le même revenu total que les autres députés.

J'ai essayé de faire quelques recherches là-dessus. Cela a été très difficile, mais ma recherche préliminaire cursive montre qu'entre 55 et 65 députés touchent ou sont susceptibles de toucher actuellement des pensions du secteur public. Si cette mesure était mise en oeuvre, cela représenterait une économie importante pour le gouvernement fédéral.

M. Bélanger: L'effet de cette loi pourrait-il être de créer deux niveaux de revenus pour les députés, en ce sens que cela éliminerait les revenus de pension provenant d'un emploi antérieur que touchent les députés, par opposition aux députés qui touchent un revenu provenant d'un travail actuel à titre privé? Par exemple, un député peut être médecin et conserver une petite pratique, en prévision du jour où il ne sera plus député. Même chose pour les avocats, ou ceux qui touchent des droits d'auteur sur des ouvrages qu'ils ont publiés, etc. Cela pourrait-il être l'un des résultats de cette mesure?

M. Solomon: Le projet de loi ne traite pas directement de cela, monsieur Bélanger, mais il pose un précédent. Nous devons avoir un code d'éthique traitant des autres revenus. À tout le moins, ces revenus devraient être déclarés et accessibles au public quelque part.

C'est le cas en Saskatchewan. Si vous êtes élu, vous devez déclarer vos avoirs - vous, votre conjoint et vos enfants. Vous devez également déclarer tout revenu que vous touchez en sus de l'indemnité de député de l'assemblée législative de la Saskatchewan.

.1715

Ce projet de loi ne parle pas des autres revenus. Il se limite aux pensions et répond à la préoccupation des contribuables qui estiment qu'ils versent beaucoup d'argent à leurs élus alors que tout ce qu'ils font, c'est être députés. Je ne veux pas diminuer en disant cela le rôle des députés, loin de là, car ce travail est une lourde imposition.

La présidente: «Imposition» est un mauvais choix de mot, merci.

M. Solomon: Oui, d'accord. C'est un travail très difficile et accaparant.

Cela montre ou manifeste au public que les députés prennent au sérieux certaines des décisions qu'ils prennent concernant les citoyens, les majorations d'impôt et coupures de services et programmes qui leur sont imposées. Cela manifeste que nous sommes prêts à nous infliger les mêmes restrictions.

La présidente: Quelqu'un a-t-il des questions?

Je vous remercie, monsieur Solomon.

Monsieur Ménard, soyez le bienvenu. Vous venez juste à point. Nous en sommes à la motion 473.

[Français]

M. Réal Ménard, député (Hochelaga-Maisonneuve): Il s'agit d'une motion qui porte sur la reconnaissance du droit du Québec à l'autodétermination. Évidemment, cela survient dans un cadre tout indiqué, celui du geste que devra poser le Parlement canadien pour se conformer au droit international et reconnaître que le Québec, en sa qualité de nation, peut tout à fait tenir un second, un troisième et même un quatrième référendum et décider lui-même de son avenir.

C'est essentiellement le sens de la motion. Cela survient dans un contexte où je crois comprendre qu'il y a également, de la part du gouvernement canadien, une volonté de présenter des offres constitutionnelles. On a même parlé de la possibilité de présenter une motion qui porterait sur la société distincte. Donc, on ne peut se cacher, en tant que parlementaires, qu'on ait les pieds au Canada anglais ou qu'on les ait au Québec, que la Chambre des communes devra se prononcer à cet égard. Il n'y a pas de doute possible là-dessus.

Je souhaiterais qu'il puisse y avoir un vote qui permettrait de donner un signe de confiance et de démocratie, tant au reste du Canada qu'au Québec. C'est essentiellement le sens de la motion.

J'ai hésité entre celle-là et celle sur la Loi antigang, puisque j'en avais un certain nombre. La Loi antigang me plaisait beaucoup aussi, dans la mesure où c'était un sujet d'actualité, mais j'ai pensé que, pour le rétablissement du dialogue, celle-ci devait primer, étant convaincu que, puisqu'on vient ici toutes les quatre semaines, j'aurais l'occasion de faire valoir celle sur la Loi antigang ultérieurement.

M. Bélanger: Parmi les critères dont ce comité doit tenir compte, il y a celui voulant que les mesures proposées par les députés ne soient pas déjà des mesures à l'étude. Connaissez-vous ce critère? Est-ce que cela vous a guidé dans votre choix?

M. Ménard: Monsieur Bélanger, c'est la troisième fois... Le hasard a été de mon côté. Vous appartenez à la majorité ministérielle. Si vous disiez à ce comité que le gouvernement va, dans les prochains jours, reconnaître le droit du Québec à l'autodétermination, cela rendrait ma motion caduque, mais je pense que, de part et d'autre, on sait que ce ne sera pas le cas.

M. Bélanger: Ma question porte sur les critères.

M. Ménard: Tout à fait. Je ne crois pas que le gouvernement va disposer d'une motion semblable. On a parlé de la reconnaissance possible de la société distincte, ce à quoi le gouvernement serait prêt à s'engager. De notre côté, nous parlons de la reconnaissance du droit international, et je vous soupçonne d'être amateur de ces questions.

M. Bélanger: On peut soupçonner ce qu'on veut, monsieur Ménard.

M. Ménard: Évidemment.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Ménard, vous savez aussi que l'un des critères est que la motion ne doit pas être partisane ni faire partie de la plate-forme d'un parti. Pouvez-vous m'expliquer en quoi ceci pourrait être interprété comme ne faisant pas partie de la plate-forme du Bloc?

[Français]

M. Ménard: Ce n'est pas une motion partisane. C'est une motion de nation, en ce sens que des membres du Parti libéral du Québec ou de n'importe quelle autre formation politique tiendraient le même discours que moi. La question du droit à l'autodétermination n'est pas une question partisane. C'est une question de reconnaissance internationale et une question liée au statut qu'a le Québec comme nation. Ce n'est pas une question de politique partisane. Je pense qu'on peut s'entendre là-dessus.

.1720

Il me semble que le critère majeur qui a guidé les membres du comité par le passé a été de savoir si le gouvernement, en l'occurrence celui auquel vous appartenez, s'apprête à proposer une formule analogue. Je pense que ce n'est pas le cas. Mais ce n'est pas une question partisane. C'est une question d'actualité. C'est une question importante pour le rétablissement du dialogue. C'est un vote qui aurait une valeur historique. C'est un vote qui deviendra inévitable. Je pense qu'on aurait une excellente occasion de s'en saisir maintenant, dans ce contexte-ci.

Je vais vous donner la preuve que ce n'est pas du tout une question partisane. J'ai soulevé une question de privilège en Chambre afin de voir s'il y aurait possibilité que je substitue à ma motion celle sur la Loi antigang, et c'est le Parti réformiste qui s'y est opposé en disant qu'il était impératif... Le whip du Parti réformiste a soulevé une question de privilège, ce qui a empêché le consentement unanime, en disant qu'il était fondamental, à ce stade-ci, en 1995-1996, que nous soyons saisis de la question en tant que parlementaires.

Vous admettrez avec moi qu'il est peu fréquent que le Bloc et le Parti réformiste aient la même plate-forme politique et s'entendent sur les mêmes points. Je pense qu'on peut raisonnablement affirmer comme parlementaires, qu'on soit partisan du fédéralisme ou du nationalisme québécois - ce qui est une autre question - que le Parlement canadien peut statuer pour reconnaître le droit du Québec à l'autodétermination. Concrètement, dans la vie politique, le droit à l'autodétermination pour le Québec prendrait éventuellement la forme d'un autre référendum. C'est une question qui va continuer de se poser et elle est pertinente pour les parlementaires.

[Traduction]

La présidente: Est-ce un point de débat ou une question?

[Français]

M. Bélanger: Qu'est-ce qui vous a poussé, monsieur Ménard, à demander le consentement unanime de la Chambre pour intervertir l'ordre des motions?

M. Ménard: Peut-être avez-vous suivi les événements de cet été? Le décès du jeune Daniel Desrochers s'est produit dans Hochelaga - Maisonneuve. Il y avait là une question d'urgence. Les deux motions, selon moi, ont une très grande importance. Le ministre Allan Rock a accepté de rencontrer Mme Desrochers à la fin de novembre. Le moment aurait été bien choisi. Mais finalement...

M. Bélanger: Quand est-ce arrivé?

M. Ménard: La question de privilège?

M. Bélanger: Oui.

M. Ménard: Elle a été posée la semaine dernière.

M. Bélanger: Très bien. Merci.

M. Caron: J'aimerais une précision, s'il vous plaît. Le fait que le gouvernement fédéral ait déjà participé au référendum de 1980 de même qu'à celui de 1995 n'est-il pas, en soi, une reconnaissance du droit du Québec à l'autodétermination? Qu'est-ce que votre motion vient ajouter au droit du Québec à l'autodétermination?

M. Ménard: Il est clair qu'il n'y a jamais eu de débat formel sur la question au Parlement canadien. Certains avocats, particulièrement des avocats spécialisés en droit international, interprètent le fait que le gouvernement fédéral a pris part à la campagne de 1980, et même à celle de 1995, comme une manifestation de cette reconnaissance.

Ma motion ferait en sorte que tout cela ait lieu, formellement et explicitement, au Parlement canadien et que chacun des parlementaires puisse y participer. Ce débat n'a jamais eu lieu à Ottawa.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Stinson, avez-vous une question?

M. Stinson: Non, c'est bien. Je vous remercie.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Ménard.

[Français]

M. Ménard: Merci. Bonne journée!

[Traduction]

La présidente: Je propose de poursuivre à huis clos pour décider de la façon dont nous allons procéder à partir de là.

[La séance se poursuit à huis clos]

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