[Enregistrement électronique]
Le mercredi 3 mai 1995
[Traduction]
Le président: Je déclare la séance ouverte.
Nous reprenons aujourd'hui les audiences en recevant des gens qui nous ont rendu visite en juin dernier. Vous vous rappellerez peut-être l'excellent document qui nous avait été remis par ITC. Ils nous avaient alors promis qu'ils reviendraient nous voir. Nous sommes heureux de voir que vous tenez votre promesse. C'est avec plaisir que nous vous souhaitons de nouveau la bienvenue parmi nous. Nous avons à la table Peter Williamson; Peter Usher, directeur de la recherche; et Angela Stadel, attachée de recherche en environnement.
Je vous souhaite donc la bienvenue et vous cède la parole pour un bref exposé, après quoi nous vous poserons des questions. Nous entendons plusieurs témoins cet après-midi et nous devrons donc poursuivre à un certain rythme.
M. Peter Williamson (Inuit Tapirisat du Canada): Merci, monsieur Caccia. C'est un plaisir de vous revoir. La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, c'était en mars, à Bruxelles, où nous prenions la parole sur la question du Québec.
Le 21 juin dernier, des représentants d'Inuit Tapirisat ont comparu devant vous pour vous donner un aperçu de notre point de vue général sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous faire part aujourd'hui de nos préoccupations particulières ainsi que de nos recommandations.
Je représente notre présidente, Rosemarie Kuptana, qui s'excuse de ne pouvoir venir aujourd'hui. Je suis accompagné de notre directeur de la recherche, Peter Usher, et d'un nouveau membre de notre personnel, Angela Stadel. Il y a à peine quelques jours qu'elle travaille avec nous.
Inuit Tapirisat du Canada est la voix nationale des Inuits Canadiens. L'organisme représente plus de 35 000 Inuits vivant dans 55 communautés des Territoires du Nord-Ouest, du Nord québécois et du Labrador, ainsi que les Inuits des régions sud du Canada. Notre président est directement élu par tous les Inuits Canadiens. Notre conseil d'administration comprend les dirigeants politiques de chacune de nos six régions du Nord.
Nous, Inuits, sommes en étroite relation avec la terre, les eaux et les animaux qui nous entourent. Nous sommes un peuple de chasseurs et même si, depuis quelques générations, notre vie a connu de grands bouleversements, la chasse et la pêche continuent d'être au centre de notre vie et de notre culture.
Nos poissons, oiseaux et animaux constituent pour nous une source capitale d'alimentation ainsi qu'une importante ressource pour le développement économique. Notre subsistance et notre mode de vie dépendent de la santé et de la productivité de nos terres et de nos eaux, et c'est pourquoi l'état de notre environnement nous préoccupe beaucoup.
Il y a environ 25 ans, nous avons commencé à reconnaître que les projets de développement comme les champs de pétrole et de gaz naturel, les pipelines et les voies d'acheminement des citernes dans l'Arctique pouvaient menacer notre environnement et notre avenir s'ils n'étaient pas adéquatement contrôlés ou limités. Ces initiatives ont été le moteur du règlement de nos revendications territoriales: il nous fallait des outils pour nous protéger contre ces effets indésirables.
Depuis 1975, nous avons négocié trois ententes de revendications territoriales qui couvrent la plus grande part de la terre natale des Inuits. Il s'agit de la Convention de la Baie James et du Nord québécois de 1975, de la Convention définitive des Inuvialuit de 1984 et de l'Accord sur le Nunavut en 1993.
Nos seules revendications non résolues concernent le Labrador et la région située au large de Nunavik, dans le Nord québécois.
Les principaux outils de protection de l'environnement que nous procurent ces accords sont la propriété foncière et le droit de propriété sur plus de 20 p. 100 des Territoires du Nord-Ouest, par exemple, ainsi que la cogestion. En décembre dernier, nous avons présenté un mémoire sur les principes de la cogestion dans l'Arctique: nous vous prions de consulter ce document si vous voulez obtenir de plus amples détails.
De par leur esprit et leur intention, les ententes territoriales prévoyaient que nous aurions directement une part de responsabilité quant à la protection et à la gestion environnementales. Les revendications établissaient de nouvelles normes de participation et de consultation des Inuits en ce qui a trait à l'environnement et au développement ainsi qu'à la gestion environnementale proprement dite.
Nos plus récents accords clarifient le fonctionnement de ces organismes de cogestion par le truchement de plans de mise en oeuvre qui prévoient un financement suffisant pour garantir une participation et un rendement efficaces de la part de tous les membres.
Nos ententes-cadres sur les revendications territoriales sont des traités au sens où l'entend l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Les principes de la participation des Inuits à la gestion et à la protection de l'environnement ainsi que les institutions établies à cette fin font partie du droit fondamental du Canada. Ils ne sont ni optionnels ni discrétionnaires.
En outre, les dispositions de nos ententes territoriales sont prédominantes. Elles prennent donc le pas sur toute loi ou tout règlement fédéral, territorial, provincial ou municipal.
Au cours des dernières années, nous avons été amenés à croire, par de subtils et troublants indices, que notre environnement se dégradait. Des scientifiques nous ont dit avoir trouvé des traces de polluants organiques rémanents et de métaux lourds dans les tissus de mammifères et de poissons de l'Arctique, à des concentrations beaucoup plus élevées que dans le sud du Canada. Ce sont là nos aliments. Fait plus troublant encore, on nous dit que ces substances chimiques se retrouvent dans notre organisme, à des concentrations nettement plus élevées que la moyenne nationale.
Cependant, personne ne peut nous dire encore quel sera l'effet d'une exposition chronique à ces contaminants sur notre propre santé et sur celle de nos générations à venir.
Nos aînés et nos chasseurs nous ont également dit avoir observé des changements troublants, même s'ils ne peuvent les expliquer. Ils peuvent voir des signes de maladie et d'anomalie dans les organismes et le comportement des animaux. Ils observent chez les gens des maladies qu'ils n'observaient pas au cours des années passées.
Quelle est la cause de tout cela? Nous ne pouvons y répondre, pas plus que les scientifiques. Nous savons cependant que de nombreuses substances toxiques ont été amenées sur nos terres par les militaires, par l'industrie et par le gouvernement depuis les années cinquante et soixante. Elles ont été laissées sur place, sans avoir été traitées, dans des contenants inadéquats, quand on ne se contentait pas simplement de les déverser dans l'océan.
Nous savons également qu'il arrive dans l'Arctique des contaminants toxiques de bien d'autres parties du Canada et du monde. Les fleuves qui se jettent dans l'océan Arctique les amènent depuis vos villes, vos fermes et vos usines. Ils voyagent dans les courants océaniques et dans l'air; pour diverses raisons physiques et chimiques, ils y demeurent et s'accumulent. L'Arctique devient le creuset de la pollution mondiale et tous ces poisons sont absorbés, s'accumulent et s'amplifient dans chaque maillon de la chaîne alimentaire dont nous dépendons. On nous a même parfois mis en garde contre l'ingestion d'aliments que nous consommons chaque jour. Ce problème nous cause beaucoup d'anxiété et nous préoccupe énormément. Même si nous n'en sommes pas la source, nous en subirons quand même les conséquences et d'une certaine façon beaucoup plus que les autres Canadiens.
Nous ne pouvons pratiquement rien à cette situation, que nous n'avions absolument pas prévue au moment de négocier le règlement de nos revendications. Ni nos méthodes d'examen ou d'évaluation de l'environnement, ni celles qui sont prescrites dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ou celles qui l'ont précédée ne prévoient de mesures de contrôle ou de correction adéquates ou efficaces. C'est pourquoi nous considérons la LCPE comme un important outil législatif de protection de notre environnement arctique. C'est pourquoi nous croyons que cette loi devrait être améliorée et renforcée.
Permettez-moi une récapitulation en trois points.
Premièrement, la production, la dispersion ou le déversement incontrôlé des matières dangereuses, notamment de substances chimiques organiques, de métaux lourds et de radionucléides, même à une grande distance de l'Arctique, risquent de nuire énormément et de façon généralisée à l'environnement et à la santé humaine dans l'Arctique. Selon nous, les lois canadiennes en matière d'environnement, dont la LCPE, devraient reconnaître spécifiquement le problème de la rémanence et de la bioaccumulation dans l'Arctique. L'importance de l'utilisation et de la dispersion peut ne pas poser problème dans le sud du Canada, mais peut être catastrophique pour l'Arctique.
Le déplacement des polluants sur de longues distances ne peut être contrôlé par les outils traditionnels, par exemple par une évaluation des répercussions environnementales de projets particuliers sur l'Arctique. En outre, bien des sources de pollution locale ne sont pas couvertes par la LCPE et des méthodes semblables, soit parce que la source existe déjà dans l'Arctique et qu'il s'agit de ce fait d'une question de nettoyage d'un site pollué, soit parce que l'activité qui la suscite, par exemple une élimination accidentelle ou délibérée des déchets, n'est pas nécessairement sujette à d'autres examens ou à d'autres règlements.
Troisièmement, comme la LCPE est le principal outil contemporain de résolution de ce nouveau type de problème environnemental dans l'Arctique, elle devrait être mise en place selon l'esprit et l'intention des accords découlant des revendications proprement dites, compte tenu de l'accent qui y est mis sur la protection et la gestion de l'environnement. Autrement dit, les organismes inuits responsables, à l'échelle régionale ou à l'échelle nationale, devraient participer directement en tant que cogestionnaires à l'application de la LCPE. On devrait appliquer à celle-ci les mêmes normes quant au processus, à la consultation et à la pratique de la cogestion qu'en ce qui touche les études d'impact.
Certes, l'adoption de la LCPE en 1988 a constitué un pas en avant, mais pas aussi grand qu'il l'aurait fallu. Plutôt que d'adopter une approche exhaustive et stratégique de la protection environnementale, elle semblait ne consister qu'en un ramassis de plusieurs lois existantes. La LCPE n'enchâsse pas ni ne rend opérationnels les principes qui pourraient faire en sorte que le Canada agit de façon responsable sur le plan de l'environnement.
Certaines autres initiatives fédérales se sont révélées pour nous aussi importantes, sinon plus, à court terme. Par exemple, la Stratégie pour l'environnement arctique, programme du Plan vert d'une durée de six ans qui en est maintenant à sa cinquième année, s'est révélée éminemment pratique pour nous permettre de comprendre et de combattre les contaminants dans l'Arctique ainsi que pour le nettoyage de certains sites pollués.
S'il y a un aspect de la Stratégie pour l'environnement arctique qui nous a déçus, c'est l'absence jusqu'ici de toute répercussion sur les lois de notre pays. Pourtant, il s'agissait-là d'un objectif déclaré de la stratégie. Votre examen de la LCPE est sûrement l'occasion rêvée pour satisfaire à cet objectif. Nous devons pouvoir nous fier sur une loi appropriée et sur son application constante, ainsi que sur des programmes spécifiques et ponctuels visant à garantir l'hygiène et la productivité environnementale de l'Arctique.
Selon ce que nous savons du processus d'examen environnemental et du programme sur les contaminants dans le Nord de la Stratégie pour l'environnement arctique, la LCPE devrait, pour être efficace, intégrer les principes suivants.
Elle devrait permettre la prise de mesures quant à des substances ou à des déchets toxiques, même si on n'a pas de preuve scientifique absolue du tort qu'ils peuvent causer à l'écosystème ou à la santé humaine - le principe de précaution.
Elle devrait éliminer ou prévenir l'utilisation, la production et le déversement de polluants - l'approche de prévention de la pollution - , par opposition à des mesures qui visent principalement à empêcher la pollution de s'étendre après coup - l'approche du contrôle de la pollution.
Un principe opérationnel simple devrait s'appliquer aux activités, industrielles ou autres, qui ont cours dans l'Arctique: ramenez ce que vous y apportez. En raison de transformations physiques et chimiques naturelles, l'Arctique devient un bassin de pollution. Les méthodes humaines doivent-elles aggraver la situation? Le nettoyage des lieux, l'enlèvement des rebus et la prévention de la pollution devraient être considérés comme allant de pair avec les affaires dans l'Arctique, et ces principes devraient s'appliquer à tous, par souci de justice et d'équité ainsi que pour préserver la qualité de l'environnement.
Les Inuits doivent avoir l'occasion de participer pleinement à la prise des décisions, de façon opportune et sans problème d'accès, avant que ne soit approuvé le déversement de déchets ou le rejet de substances qui peuvent, directement ou indirectement, avoir un effet sur leur vie et sur leur mode de vie. Cette mesure est conforme à l'esprit et à l'intention des dispositions de nos revendications territoriales qui visaient la protection et la gestion de l'environnement. Les Inuits, qu'il s'agisse d'organismes ou de particuliers, devraient avoir accès aux mécanismes d'avis et d'appel prévus dans la LCPE.
L'article 11 de la LCPE définit les substances toxiques. Apparemment, cet article pourrait être jugé conforme au principe de précaution. Mais nous croyons savoir qu'Environnement Canada et Santé Canada donnent en pratique une interprétation très étroite à la loi.
Tout d'abord, la substance doit non seulement être intrinsèquement toxique, mais elle doit aussi être présente en quantité suffisante dans l'environnement pour poser un risque pour la santé humaine ou environnementale.
Ensuite, il incombe au gouvernement du Canada d'établir la toxicité, plutôt qu'au fabricant ou à l'utilisateur d'en prouver l'innocuité.
Enfin, la preuve doit être concluante et non simplement être établie d'après la prépondérance des probabilités.
À en juger d'après l'expérience que nous en avons, ces analyses sont extrêmement coûteuses. Les cinq premières années d'application de la LCPE en témoignent éloquemment. Même si la liste intérieure des substances toxiques prévue par la LCPE comprend quelque 21 000 substances commercialement fabriquées ou importées au Canada de 1984 à 1986, et que des nouvelles substances viennent s'y ajouter sans cesse, seulement 44 substances ont été évaluées selon les modalités de la liste des substances d'intérêt prioritaire établie par LCPE. De ces 44 substances, seulement 27 ont été jugées directement toxiques. Quant aux autres, elles ont été jugées soit non toxiques parce qu'elles n'étaient pas rejetées en quantité suffisante, soit de statut incertain parce qu'on n'avait pas assez d'information à leur sujet.
La partie II de la LCPE devrait par conséquent incorporer les principes particuliers suivants visant les substances toxiques.
Premièrement, à tout le moins, l'article 11 ne devrait être affaiblie d'aucune façon. Plus important encore, le processus d'identification des substances toxiques devrait être fondé sur les principes suivants, lesquels devraient être clairement affirmés dans la loi.
Deuxièmement, les substances chimiques devraient être évaluées par catégorie plutôt qu'une à la fois, comme c'est le cas actuellement. L'approche par catégorie reconnaît que les familles de substances représentent des caractéristiques semblables.
Troisièmement, la toxicité des substances devrait être évaluée en fonction d'une évaluation des dangers plutôt que des risques. L'évaluation du risque consiste en un examen d'une relation de cause à effet entre l'exposition à un contaminant et l'apparition d'un trouble de la santé, ce qui s'est toujours révélé difficile à prouver. Par contre, l'évaluation du danger consiste en une évaluation des caractéristiques intrinsèques d'une substance chimique, par exemple de sa toxicité intrinsèque, de la possibilité de bioaccumulation dans les tissus vivants ou de bioamplification d'un niveau à un autre de la chaîne alimentaire, et de la possibilité qu'elle persiste dans un écosystème durant une longue période.
Quatrièmement, on devrait appliquer le principe d'inversion de la charge de preuve lorsqu'on manque d'information quant au danger que présente une substance. Cette mesure devrait s'appliquer en particulier aux nouvelles substances et, à vrai dire, à toute substance dont on sait qu'elle présente les caractéristiques mentionnées ci-dessus. On devrait les considérer comme pouvant être dangereuses jusqu'à preuve du contraire.
Cinquièmement, l'importance de la preuve nécessaire aux décisions concernant la toxicité devrait être fondée sur le poids de la preuve ou la prépondérance des probabilités, plutôt que sur l'absolue certitude scientifique, comme le recommande également le Comité mixte international. L'absence de données concluantes quant à la nocivité d'une substance ne devrait pas être une raison pour permettre son utilisation.
Sixièmement, les substances inscrites sur la liste intérieure qui ne répondent pas aux critères énoncés ci-dessus devraient être désignées en vue d'être réduites ou supprimées par l'entremise d'un protocle de temporarisation intégré dans la loi. On devrait cibler les substances rémanentes, bioaccumulables et toxiques et envisager de les éliminer selon un calendrier établi.
Septièmement, si l'on veut déterminer la toxicité par l'évaluation des risques, on devrait préparer des scénarios de la pire éventualité. Une substance qui ne pose pas de risque dans le sud du Canada peut en poser dans l'Arctique. Les critères d'évaluation devraient être les milieux et les situations humaines les plus vulnérables. C'est pourquoi nous demandons à votre comité de recommander de déclarer l'Arctique zone d'élimination des contaminants.
Enfin, nous souhaitons souligner que les radionucléides ne sont pas réglementés dans la LCPE. Les Inuits se préoccupent depuis longtemps des activités qui supposent l'utilisation, la production et le rejet de radionucléides. À nos yeux, le danger que les radionucléides représentent pour notre alimentation et la santé de nos peuples et de nos générations futures est tout simplement inacceptable.
Nous recommandons par conséquent l'inclusion d'une réglementation sur les radionucléides dans la LCPE; autrement dit, la toxicité de ces substances devrait être évaluée au regard des critères énumérés ci-dessus, et elles devraient être réglementées ou éliminées si on peu montrer, d'après ces critères, qu'elles sont toxiques.
Cette question nous semble faire partie d'un problème plus importnat qui a trait à la portée de la LCPE. Les paragraphes 26(3), 34(3) et 54(1) prévoient d'importantes exclusions au règlement de la LCPE, notamment en ce qui touche les pesticides et les substances chimiques utilisées en agriculture, qui comptent parmi les principales sources de polluants organiques rémanents dans l'Arctique.
Nous recommandons l'une ou l'autre des deux solutions suivantes: modifier ces articles pour que la LCPE soit la principale loi fédérale en ce qui touche les substances toxiques, ou bien modifier les autres lois pertinentes pour y intégrer les principes que nous avons exposés ci-dessus.
La pratique de l'immersion en mer dans l'Arctique fait naître un certain nombre de préoccupations chez les Inuits, lesquelles s'appliquent largement aux principes de la LCPE et, de façon plus générale, à l'activité économique du Grand Nord. Aux yeux de bien des Canadiens, l'océan est une vaste immensité qui peut, de par sa taille, être beaucoup mieux en mesure de subir des agressions que des surfaces d'eau ou de terre plus petites. Cependant, pour les Inuits, l'océan est loin d'être illimité. Nous dépendons au moins autant de celui-ci que de la terre. C'est là que vivent des mammifères marins et le poisson que nous mangeons et qui sont au coeur de notre mode de vie. Tout ce qui peut avoir un effet néfaste sur l'océan doit faire l'objet d'une évaluation complète, ouverte, opportune, compte tenu de toutes les solutions qui s'offrent, avant qu'on puisse prendre une décision.
ITC a pour principe général de ne pas appuyer l'immersion ou le rejet de déchets dans les eaux de l'Arctique. Toute décision concernant l'activité dans l'Arctique doit se guider sur l'approche de la prévention: éviter d'emblée la pollution maritime plutôt que de la gérer ou de la réduire au minimum.
Les dispositions actuelles de la Partie VI de la LCPE au sujet de l'immersion en mer n'intègrent pas ces principes. Pour que l'article de la LCPE sur l'immersion soit conforme aux principes de la protection environnementale prescrits dans nos revendications territoriales ainsi qu'aux principes énoncés ci-dessus à l'égard des produits toxiques, nous recommandons que les changements suivants soient apportés en ce qui touche l'émission de permis conformément aux articles 71 et 72.
En ce qui touche l'océan Arctique et la mer du Labrador, le système d'avis public et d'approbation doit à tout le moins être soumis aux mêmes principes de cogestion que ceux qui sont prévus dans nos accords de revendications territoriales. À l'heure actuelle, le Comité consultatif régional sur l'immersion de déchets en mer a le pouvoir, en vertu de la LCPE, d'approuver ou de rejeter les demandes d'immersion en mer. Cet organisme est formé de représentants publics des organismes concernés. Les procédures d'avis sont limitées et, dans le cas de communautés arctiques éloignées, pratiquement sans effet. En ce qui concerne la consultation publique, ce Comité consultatif jouit d'un pouvoir discrétionnaire.
Les organisations inuites devraient avoir, au sein du Comité consultatif, la même représentation et le même rôle qu'au sein des organismes de cogestion établis après les accords sur les revendications.
Toutes les décisions du Comité consultatif devraient faire l'objet d'une justification publique, et les questions environnementales devraient avoir préséance sur les questions économiques au moment des décisions. Lorsque le ministre responsable rejette ou modifie une décision du Comité consultatif, il devrait en faire parvenir les motifs écrits au Comité consultatif et au public.
Les modifications apportées dernièrement à la partie VI de la LCPE, où les droits relatifs au permis d'immmersion ont été portés à un montant fixe de 2 500$ par permis, ne reconnaissent pas le principe du «pollueur payeur», en vertu duquel le responsable d'une dégradation de l'environnement ou d'une diminution des ressources devrait assumer l'intégralité du coût de la réparation.
À l'heure actuelle, la définition d'immersion en mer ne comprend pas les immersions en zone intertidale ni l'élimination de structures artificielles comme des îlots ou des plate-formes.
La Guerre froide aura laissé un héritage toxique à l'Arctique. Trois importants réseaux de premier avertissement au radar, le réseau d'alerte avancée DEW, la «Pole Vault Line» et le réseau médian de premier avertissement, qui ont tous été désaffectés, ainsi que des installations toujours opérationnelles du «Northern Warning System» couvrent tout l'Arctique canadien, depuis la frontière de l'Alaska jusqu'au détroit de Davis et la mer du Labrador. Les activités qui s'y sont déroulées ont entraîné des infractions quant aux quantités de contaminants permises dans la LCPE et témoignent de la mesure dans laquelle la loi ne peut être adaptée aux situations uniques posées par ces installations.
À l'heure actuelle, les 21 installations DEW abandonnées sont administrées par le ministère des Affaires indiennes et du Nord, tandis que le ministère de la Défense administre celles qui ont été converties au «Northern Warning System». Toutes ces installations sont situées sur des terres de la Couronne et le gouvernement fédéral a l'obligation de veiller à ce que les conditions qui y règnent satisfassent aux dispositions contenues dans le paragraphe 57(1) de la LCPE.
La quasi-totalité de ces installations sont situées le long des côtes. Dans certains cas, il s'agit de secteurs maritimes très productifs, qui hébergent d'importantes populations d'oiseaux. Bon nombre d'entre elles sont situées tout près de nos communautés et de nos importantes régions de chasse et de pêche.
De façon générale, on retrouve sur ces installations abandonnées une ou plusieurs décharges non clôturées, des citernes de produits chimiques ainsi que des bâtiments ou d'autres structures dont l'état va de gravement endommagé à intact. De récentes études montrent certains cas de contamination par des concentrations élevées de substances nutritives, de métaux lourds et de BPC dans les installations de la ligne DEW.
Environnement Canada et le MAIN ont élaboré un protocole pour le nettoyage de ces sites, mais il n'y a eu aucun examen externe officiel, pas même ceux qui sont prévus dans nos accords sur les revendications territoriales. Au cours des dernières années, le nettoyage a commencé à certains endroits, mais les progrès sont lents, le nettoyage est incomplet et rares sont les sites maintenant considérés comme étant sûrs.
Cependant, ces installations militaires abandonnées ne constituent que la pointe de l'iceberg. La quasi-totalité des terres de l'Arctique sont des terres de la Couronne, exception faite des terres inuites, et pratiquement toutes les activités qui y ont cours ont été autorisées par le gouvernement fédéral. Dans tout l'Arctique, on retrouve d'innombrables vestiges de l'activité humaine, tels que des installations d'exploration et de développement pour l'exploitation minière, pétrolière et gazière, des stations de recherche, des installations fédérales et même des communautés. La plupart ont été abandonnées telles quelles ou presque. Elles posent une grande diversité de problèmes environnementaux.
Je ne puis vous dire si toutes ces installations témoignent d'infractions à la LCPE dans sa forme actuelle. En effet, il n'existe aucun inventaire unique et complet des sites de déversement de déchets dans l'Arctique canadien, encore moins de système exhaustif d'établissement de priorités et d'objectifs pour l'évaluation environnementale et le nettoyage des sites contaminés. Toutefois, je peux vous dire qu'elles préoccupent énormément les Inuits, pour les raisons que je vous ai décrites au début de notre exposé.
Nous aimerions que votre comité demande au gouvernement fédéral, en plus de formuler des recommandations au ministre de l'Environnement à propos de la LCPE, d'instaurer immédiatement un mécanisme d'établissement des priorités où les Inuits seront appelés à jouer un rôle utile relativement au nettoyage des installations DEW et NWS.
Nous demandons aussi au comité de prier instamment le gouvernement fédéral de réserver immédiatement un financement adéquat pour accélérer le nettoyage de toutes les installations DEW et NWS sur une période n'excédant pas cinq ans selon l'ordre de priorité qui découlera de la recommandation ci-dessus, en fonction de l'examen environnemental approprié et des ententes contractuelles préconisées dans les ententes sur les revendications.
Les Inuits perçoivent l'environnement de façon très générale. Selon nous, nous ne pouvons en intégrer toutes sortes d'éléments dans les articles de loi précis. Par conséquent, nous recommandons au comité d'envisager la réforme de la LCPE dans le vaste contexte des initiatives et obligations connexes du gouvernement fédéral.
À tout le moins, nous aimerions vous faire part des commentaires suivants.
Nous sommes très préoccupés par les effets de ce projet de loi qui en est déjà à la deuxième lecture.
Le projet de loi C-62 permettrait la négociation d'ententes de conformité aux normes: des accords négociés privément entre l'autorité administrative et toute personne visée par le règlement au sujet des conditions d'exploitation ou du mode de conformité de certaines activités susceptibles d'avoir d'importants effets sur l'environnement. Ce genre d'accord pourrait être négocié en privé, et seul un résumé pourrait en être publié dans la Gazette du Canada, si les entreprises n'invoquent pas les larges dispositions relatives à la confidentialité qui sont prévues dans le projet de loi.
Il nous semble que ces accords de conformité sont contraires au principe de responsabilité ministérielle et de reddition de comptes au public. À ce que nous sachions, la règle de droit au Canada signifie qu'en ce qui touche la responsabilité environnementale, les Canadiens sont traités sur un pied d'égalité, quels que soient leur revenu, l'organisation de leur entreprise ou leur aptitude à négocier.
Les multiples accords semi-légaux qui seraient conclus dans tout le pays, au fil des négociations de chaque entreprise, seraient pratiquement impossibles à suivre et à examiner. Nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que cette procédure pourrait entrer en conflit avec nos ententes de revendications territoriales et, plus particulièrement, avec le travail des organismes de cogestion, qui sont des instruments du gouvernement public.
Nous recommandons le retrait du projet de loi C-62 dans sa version actuelle et son remplacement par un processus visant à améliorer le système de réglementation de façon que les règlements dépassés et inefficients puissent être étudiés et remplacés au besoin, avec une consultation publique pleine et entière.
Le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, tribune nationale du débat et des actions concertées en matière d'environnement, a récemment publié un accord-cadre préliminaire sur la gestion de l'environnement qui décrit une structure d'harmonisation des responsabilités quant à l'environnement entre le fédéral, les territoires et les provinces.
Nous craignons que l'entente-cadre ne finisse par permettre au gouvernement fédéral de déléguer aux provinces et aux territoires la quasi-totalité de ses responsabilités environnementales. On peut mettre en doute la constitutionnalité de cette délégation, surtout en ce qui touche les obligations qui incombent au Canada en vertu de nos ententes territoriales. Nous craignons également que les ressources mises à la disposition des provinces et des territoires pour assumer de façon efficace les responsabilités déléguées ne soient pas suffisantes.
Cette initiative est menée sans consultation adéquate, en contravention avec les normes établies dans nos accords sur les revendications territoriales.
Par-dessus tout, compte tenu de la prépondérance de ces accords, toute harmonisation doit être faite en pleine conformité avec les dispositions de nos ententes.
On ne peut s'empêcher de remarquer que tout cela se produit dans le contexte de l'examen des programmes fédéraux et de la réduction des dépenses, qui touchent particulièrement les ministères chargés des questions environnementales. La capacité du gouvernement fédéral de cerner les problèmes environnementaux, de réglementer les activités délicates sur le plan environnemental et de surveiller tant les tendances environnementales que l'efficacité de la réglementation et des mesures de correction diminue, alors qu'il nous faudrait davantage, et non pas moins, de réglementation et de mesures d'exécution.
Encore une fois, nous nous préoccupons de l'efficacité et de l'utilité de votre examen de la LCPE, ainsi que de l'élaboration de normes environnementales solides, au moment où d'autres initiatives peuvent avoir pour effet de dissoudre des pouvoirs du gouvernement fédéral. Par conséquent, nous recommandons le maintien à leur niveau actuel des mandats et des capacités fondamentales des ministères fédéraux qui s'occupent actuellement des questions environnementales.
La nécessité de révisions exhaustives de la LCPE n'est nulle part plus apparente que dans l'Arctique. Qu'il s'agisse de contaminants toxiques, de pollution atmosphérique, de pratiques d'immersion en mer, de nettoyage de sites contaminés ou des problèmes qui découlent des modification des structures et pratiques gouvernementales, il faut, de toute évidence, qu'une loi intègre solidement les principes de la prévention de la pollution, dans le respect des droits, des valeurs et des pratiques des Inuits.
Nous sommes tous conscients des déficits budgétaires et de la dette publique, ainsi que des répercussions de ces problèmes pour les Canadiens. Mais nous sommes aussi extrêmement sensibilisés au déficit environnemental qui se prépare depuis longtemps. Nous avons vécu dans un environnement propre et sain, qui répond à nos besoins physiques, culturels et spirituels les plus fondamentaux. Nous ne voulons pas que ça change. Nous savons qu'on ne peut se contenter de prélever des ressources de l'environnement et d'en abuser en en faisant une décharge. La réduction de la capacité des systèmes sans lesquels il ne saurait y avoir de vie - l'océan, l'air, la terre - ne peut mener qu'à une diminution des ressources et à une détérioration de santé humaine.
Il en coûtera déjà des sommes astronomiques pour tout nettoyer et renverser le processus. On n'a qu'à penser à ce qu'il en coûterait pour nettoyer les sites contaminés dans l'Arctique seulement, sans même qu'on ait pensé à réduire les sources de substances toxiques. On n'a qu'à penser à ce qui se produit dans la zone arctique de la Russie, où la situation, déjà plus grave, pourrait tourner à la catastrophe. Les déficits environnementaux sont réels et coûteux. Ils pourraient perdurer beaucoup plus longtemps que les déficits gouvernementaux et s'assortir de conséquences beaucoup plus néfastes.
Nous n'espérons pas de la réforme de la LCPE qu'elle mette un terme à toute la contamination et à la dégradation environnementales. Mais si vous souhaitez que cet exercice ait de la valeur, c'est vers cet objectif qu'il devrait tendre. Certes, nous nous attendons à de substantielles améliorations par rapport à la situation actuelle, que nous jugeons inacceptable.
Vous ne devez pas oublier que, dans votre recherche de cet objectif, il vous faudra tenir compte de la prépondérance de nos accords de revendications et des engagements solennels du Canada à leur égard.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Williamson, de votre très important exposé. Vous nous avez apporté de nouvelles informations très intéressantes dont nous prenons bonne note. Nous retiendrons aussi ce que vous avez dit au sujet du Comité consultatif régional sur l'immersion en mer, des frais pour l'obtention des permis d'immersion en mer, de l'immersion dans les zones intertidales et du réseau d'alerte avancée, ainsi que votre suggestion sur une participation significative des Inuits à l'établissement des priorités concernant le nettoyage des stations du réseau d'alerte avancée et du réseau d'alerte du Nord. Nous prenons aussi bonne note de vos remarques sur l'entente-cadre du CCME. Votre conclusion est très pertinente, particulièrement vos observations sur les déficits environnementaux à long terme. Encore une fois, nous vous remercions.
[Français]
Madame Guay, s'il vous plaît, vous avez cinq minutes.
Mme Guay (Laurentides): Merci, monsieur le président.
J'ai trouvé votre document très bien étoffé et très pertinent au moment où nous révisons la LCPE. J'aurais une ou deux questions à poser. J'aimerais savoir s'il y a des ententes qui sont faites concernant l'immersion des déchets en mer. Est-ce que les Inuit ont déjà fait des représentations pour que nous refassions la loi concernant l'immersion des déchets en mer?
[Traduction]
M. Williamson: Pour autant que nous sachions, il n'y a pas d'entente de ce genre. Nous n'en avons pas entendu parler. Mais nous ferons des représentations à ce sujet lorsque vous viendrez dans le Grand Nord. Les membres du comité pourront entendre les préoccupations des Inuits lorsqu'ils viendront au Nunavut.
[Français]
Le président: La semaine prochaine.
Mme Guay: Ça va! Comment cela fonctionne-t-il? Vous représentez un grand nombre d'Inuit à travers le pays; est-ce que les provinces jouent un rôle? Est-ce que vous négociez aussi avec les provinces ou si c'est strictement avec le gouvernement fédéral, sur le plan des ministères de l'Environnement?
[Traduction]
M. Usher (directeur de la recherche, Inuit Tapirisat du Canada): Votre question porte-t-elle plus précisément sur l'immersion des déchets en mer ou sur les questions environnementales en général?
[Français]
Mme Guay: Non, sur l'environnement en général.
[Traduction]
M. Usher: Les organisations inuites du Québec et de Terre-Neuve négocient avec les gouvernements provinciaux lorsqu'il s'agit de compétences provinciales.
Mme Kraft Sloan (York - Simcoe): Je tiens à vous féliciter de nous avoir présenté un mémoire aussi exhaustif et détaillé. Il sera certainement très utile au comité.
Monsieur Williamson, dans votre mémoire, vous faites part de certaines préoccupations concernant le projet de loi C-62. Vous ne savez probablement pas...
Le président: Je ne voulais pas interrompre M. Williamson pendant son exposé, mais nous étudions la LCPE et je préférerais que nous n'abordions pas le projet de loi C-62. M. Williamson a été très éloquent. Nous connaissons sa position, mais puisqu'il semble que le projet de loi sera modifié, nous voudrons peut-être qu'il nous fasse part de ses préoccupations à ce sujet une autre fois.
Mme Kraft Sloan: D'accord.
Vous avez parlé des pesticides dans l'Arctique. Pourriez-vous nous dire quelle est la source de ces pesticides? D'où viennent-ils? S'ils proviennent d'ailleurs, comment se rendent-ils jusqu'en Arctique?
M. Usher: Nous croyons savoir que la plupart de ces pesticides proviennent de pays étrangers, même s'il y en a au Canada. Ce sont les Toxaphènes qui nous préoccupent le plus; la plupart prennent la forme d'organochlorés rémanents. Vous voulez savoir quels sont ces pesticides et d'où ils proviennent?
Mme Kraft Sloan: Oui, et comment ils parviennent jusqu'au Canada?
M. Usher: Ces polluants viennent des États-Unis et de l'Asie. Ils circulent dans le monde entier et sont transportés surtout par les courants atmosphériques.
Mme Kraft Sloan: Vous avez aussi parlé de la bioamplification à différents paliers de la chaîne alimentaire. Pourriez-vous nous donner des exemples de substances qui sont la cause de difficultés particulières liées à la bioamplification?
M. Usher: Des exemples de substances chimiques?
Mme Kraft Sloan: Oui.
M. Usher: Il peut y avoir bioamplification d'organochlorés rémanents, de métaux lourds et de radionucléides. Ces produits sont assimilés par les premiers éléments de la chaîne alimentaire pour ensuite s'accumuler en concentrations plus élevées au niveau supérieur de cette chaîne.
Mme Kraft Sloan: Quels en sont les effets sur la santé des humains? Avez-vous mené des études à ce sujet?
M. Usher: C'est le plus grand mystère de tous. Il semble que cela ait des effets sur la santé des êtres humains. On nous dit que bon nombre de ces substances sont de nature toxique. Mais quels sont les effets d'une exposition chronique de faible intensité pour ceux qui absorbent des quantités assez faibles de ces substances? On ne semble pas pouvoir trouver de réponse à cette question à court terme et qui sait ce que la situation à plus long terme nous réservera?
Mme Kraft Sloan: Vous dites aussi dans votre mémoire qu'il existe des risques dans le Grand Nord que nous ne connaissons pas dans le Sud. Pourriez-vous nous en dire plus long à ce sujet?
M. Williamson: Je répondrai à cette question ainsi qu'à celle que vous venez de poser et à laquelle Peter Usher a répondu en vous disant que, dans la chaîne alimentaire, la teneur en contaminants s'élève au fur et à mesure qu'on monte dans la hiérarchie de la chaîne alimentaire. Or, chez nous, les gens mangent du caribou, du phoque, de la baleine, des aliments que vous ne connaissez pas dans le Sud. Voilà pourquoi ces polluants ont des effets nocifs dans le Grand Nord qu'ils n'ont pas dans les régions du Sud.
M. Usher: Si je peux me permettre d'ajouter quelque chose, il y a un aspect de l'environnement arctique qui est particulièrement troublant en ce qui concerne les organochlorés rémanents. Ces substances sont transportées par les courants atmosphériques vers l'Arctique et ne se dégradent pas par basse température. Elles persistent donc et s'accumulent dans notre environnement, contrairement à ce qui se passe dans les régions comme celle-ci.
Mme Kraft Sloan: C'est ce que je voulais savoir. Le froid préserve ces substances, rend leur dégradation plus difficile.
Vous savez sans doute que nous serons dans l'Arctique la semaine prochaine. Nous sommes très enthousiasmés à l'idée de faire ce voyage. D'après vous, y a-t-il des questions ou des enjeux importants sur lesquels notre comité devrait se pencher pendant son séjour dans le Grand Nord?
M. Williamson: Les habitants de l'Arctique vous parleront probablement de la responsabilité du gouvernement fédéral. Ils estiment que le gouvernement fédéral a l'obligation constitutionnelle de régler ces problèmes, parce que ces gens sont autochtones et que le gouvernement fédéral a des obligations constitutionnelles à leur égard en général.
Par ailleurs, vous entendrez des témoignages d'organisations inuites qui s'occupent de gérer et de mettre en oeuvre les ententes sur les revendications territoriales, qui s'assurent que le gouvernement fédéral s'acquitte des obligations que prévoient ces ententes. On vous posera probablement des questions sur la façon dont votre comité traitera de ces questions dans son rapport et on vous fera des suggestions sur la façon dont le gouvernement fédéral devrait régler ces questions en général.
M. Adams (Peterborough): Vous auriez peut-être des commentaires à faire au sujet de l'une des choses que j'aimerais inscrire à l'ordre du jour de la semaine prochaine lorsque nous en serons à l'étape des questions.
Comme je vous l'ai dit, nous n'irons pas à Rankin Inlet. J'en suis désolé. Nous n'irons pas à Resolute non plus. Il reste cependant qu'un des clubs Rotary de ma circonscrption est actuellement l'hôte d'un groupe de Resolute. On m'a dit que Tabitha Kulluk, le maire de cette ville, s'oppose au fait que le ministère des Affaires indiennes et du Nord a récemment autorisé la Panarctic Oils Ltd. de brûler, de déverser et d'enfouir 7 000 tonnes de métaux et d'autres matériaux à Rea Point dans l'île Cameron. Cela, en vertu d'un contrat de location foncière qui a été signé dans les années soixante. Bien sûr, Resolute est la collectivité la plus proche.
Je tenais à vous le mentionner. Si vous avez des commentaires à faire, nous pourrons revenir sur cette question la semaine prochaine à Iqaluit.
M. Williamson: C'est la première fois que j'en entends parler. Ma première réaction serait de dire que je suis surpris d'apprendre que le gouvernement fédéral continue à approuver des choses qui contaminent l'environnement de l'Arctique, surtout à proximité d'une agglomération.
Pendant que vous parliez, je me suis tout de suite souvenu d'une chose qui s'est passée à Rankin Inlet. Dans les années cinquante, il y avait là une mine de nickel. Il y a quelques années à peine - trois ou quatre ans - nous nous sommes rendus compte que Rankin Inlet avait été contaminée par la mine qui y était en exploitation dans les années cinquante. Depuis qu'elle a été abandonnée, le gouvernement fédéral n'a fait aucun test pour voir s'il y avait là des polluants attribuables aux activités minières. Voilà qu'on s'est aperçu que depuis 40 ans la population s'adonne à la pêche aux moules dans une région qui est contaminée et qu'elle éprouve toutes sortes de problèmes de santé.
Je suis troublé d'apprendre que le gouvernement canadien continue à approuver le déversement de substances toxiques dans l'Arctique.
M. Adams: Vous avez dit espérer que l'examen de la LCPE permettra de renforcer le rôle du gouvernement fédéral dans le Nord. Comme vous l'avez indiqué, cela à une époque où il doit y avoir des réductions qui, en un sens, s'expliquent par de bonnes raisons, comme vous dites. Mais il me semble que bien souvent, la région de l'Arctique est la première à en souffrir.
A-t-on parlé de ce qui pourrait remplacer la Stratégie pour l'environnement arctique lorsqu'elle arrivera à échéance, l'année prochaine?
Aussi, parce qu'il faut réduire les dépenses - et c'est une nécessité, comme vous le savez - pour que soient maintenues des normes nationales solides, y compris dans l'Arctique, bon nombre d'entre nous voudraient que le gouvernement fédéral exerce l'autorité dont il jouit à l'échelle internationale. Il pourrait intervenir à ce niveau, ce qui vous touche de très près, et user de son influence pour maintenir des normes nationales rigoureuses. Je me demandais ce que vous en penseriez, en ce qui concerne peut-être le Conseil de l'Arctique ou un autre organisme international dans le Nord dont ITC est membre.
M. Usher: Pour répondre à votre première question, nous croyons savoir que des discussions ont été entamées avec le ministère de l'Environnement et le ministère des Affaires indiennes et du Nord au sujet du renouvellement de la Stratégie pour l'environnement arctique. Nous aimerions beaucoup qu'elle soit renouvelée.
Pour ce qui est de votre deuxième question, vous savez peut-être que nous sommes affiliés à une organisation, la Conférence circumpolaire inuite, qui s'intéresse d'un peu plus près que nous à ce qui se passe sur la scène internationale. Il va de soi que nous sommes tout à fait en faveur des initiatives qui ont été prises, dont la création du Conseil de l'Arctique, et nous y attachons énormément d'importance - entre autres pour des raisons environnementales.
M. Adams: Monsieur Williamson, je crois savoir que la CCI a été l'une des premières organisations créée dans le Nord à fonder sa volonté politique sur des problèmes environnementaux.
M. Finlay (Oxford): Nous avons beaucoup aimé votre exposé. Vous y donnez beaucoup de détails qui sont très bien présentés, et j'ai appris énormément. Vous avez très bien compris les problèmes que pose la LCPE et ce que nous voudrions faire pour l'améliorer. Vous parlez de la prévention de la pollution, de l'inversion du fardeau de la province, etc.
Je voudrais revenir à la page 3 de votre mémoire. Le troisième paragraphe résume ce que je pense:
- Nos ententes sur les revendications territoriales globales sont des traités au sens où l'entend
l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Les principes de la participation des Inuits à la
gestion et à la protection de l'environnement ainsi que les institutions établies à cette fin font
partie du droit fondamental du Canada. Ils ne sont ni optionnels ni discrétionnaires. En outre,
les dispositions de nos ententes territoriales sont prédominantes. Elles prennent donc le pas sur
toute loi ou tout règlement fédéral, territorial, provincial ou municipal.
Vous disiez aussi, à la page 2, que trois ententes importantes ont été négociées au cours des 20 dernières années: une en 1975, soit la Convention de la baie James et du Nord québécois, une en 1984, et la dernière en 1993. Le comité s'est laissé dire par le chef des Cris du Québec qu'à son avis et de l'avis de son peuples le gouvernement fédéral n'a pas respecté ses engagements concernant la cogestion au Québec. À en juger par votre exposé d'aujourd'hui, je dirais que c'est un peu ce que vous pensez vous aussi. J'aimerais avoir vos observations là-dessus.
Les choses se passent-elles mieux en vertu d'autres ententes, ou est-ce parce qu'elles ne sont pas en vigueur depuis assez longtemps pour que nous le sachions au juste? Est-ce seulement l'entente de 1975 qui cloche, ou est-ce le cas aussi de celle de 1984?
M. Williamson: Pour répondre à votre question, je dirais que les ententes l'emportent sur toute loi fédérale, provinciale et territoriale. Elles sont protégées par l'article 35 de la Constitution.
Le problème, c'est que les dispositions des lois fédérales, territoriales et provinciales ne cadrent pas avec celles des ententes sur le règlement des revendications territoriales et qu'il faut prendre des mesures en ce sens. Le gouvernement fédéral, les provinces et les administrations territoriales ont modifié leurs lois pour qu'elles soient conformes aux revendications territoriales, et, dans certains cas, des problèmes se sont posés.
La Convention de la baie James et du Nord québécois est la première entente que les Inuits ont négociée en vue du règlement de leurs revendications territoriales. Elle porte sur la cogestion de la faune et de l'environnement, mais d'autres ententes négociées par la suite, soit avec les Inuvialuits et dans le Nunavut, comportent des dispositions plus rigoureuses pour ce qui est de la faune et de l'environnement parce qu'on a essayé d'apporter des améliorations à partir de ce qui s'était passé.
L'intention, c'est que les Inuits participent à la cogestion. Cela ne sera pas écrit dans une entente exactement de la même manière que dans une autre. L'idée de la cogestion continue de faire son chemin, et les structures mises en place entre 1975 et 1982 jusqu'en 1993 ont évolué.
L'un des objectifs visés, c'est que les améliorations qui pourront être obtenues grâce à ces revendications seront aussi applicables aux ententes qui ont été négociées et signées avant que ces structures de cogestion soient mises en place. L'idéal serait que le système soit le plus juste possible. Tout cela revient à modifier les lois fédérales, provinciales et territoriales pour qu'elles cadrent avec les ententes qui ont été négociées et à amener le gouvernement fédéral et les provinces à être plus conciliants - comme dans le Nord du Québec - et à s'interroger plus longuement sur ce que nous voulons accomplir.
M. Finlay: Vous venez de toucher à ma question supplémentaire. J'allais vous demander si le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux avaient pris un engagement en ce sens. Et si une nouvelle entente fonctionne mieux, allons-nous modifier les autres? Votre réponse est encourageante, mais il faudra peut-être pas mal de temps pour en arriver à une solution satisfaisante.
M. Williamson: Rien n'a encore été prévu pour que des améliorations de ce genre soient apportées. Lorsqu'il y a création d'un nouveau programme au niveau fédéral, provincial ou territorial ou lorsqu'une nouvelle loi fédérale ou provinciale est adoptée, je pense que l'une des façons de procéder consiste à avoir un contrat de mise en oeuvre signé par les organisations inuites, les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement fédéral pour qu'il en soit question dans l'entente sur les revendications territoriales. Je ne sais pas comment au juste on pourrait s'y prendre, mais c'est une question qui mérite qu'on s'y arrête.
M. Finlay: Ce ne sera donc pas automatique.
M. Williamson: Je ne le pense pas.
Le président: Monsieur Finlay, cette réponse vous satisfait-elle?
M. Finlay: Oui, mais je pense, monsieur le président, que nous avons une certaine responsabilité à cet égard. Cela n'entre peut-être pas dans nos attributions, mais nous devrions peut-être dire quelque chose à ce sujet.
Le président: Merci. Cela est très utile.
J'aurais une dernière question à poser en terminant. Elle a trait aux radionucléides. Cette question a-t-elle déjà retenu l'attention de l'Inuit Tapirisat du Canada? Dans l'affirmative, où et en fonction de quelles études scientifiques récentes? Ou est-ce la première fois que vous traitez de cette question?
M. Usher: Voulez-vous parler de notre recommandation voulant que la LCPE englobe les radionucléides?
Le président: Je voulais savoir ce que vous pensez en général des radionucléides. La recommandation concernant la LCPE n'est pas vraiment essentielle.
M. Usher: Je peux penser à deux occasions où la question s'est posée, pas tant pour notre organisation que pour certains de nos membres régionaux. Je pense à la mine Kivalliq qui a été proposée dans le Keewatin il y a à peu près cinq ans et à la mine d'uranium qui avait été proposée au Labrador il y a à peu près quinze ans, si je me souviens bien. Dans ces deux cas, nos membres étaient très préoccupés par les répercussions possibles de ce type particulier d'exploitation minière.
Je dois dire que les membres de nos collectivités ne s'opposent pas nécessairement à tous les types d'exploitations minières, mais qu'ils s'opposent à cette forme particulière d'exploitation.
Les conséquences possibles des radionucléides pour la chaîne alimentaire ont toujours été une source de grande préoccupation.
Le président: D'où proviennent les données scientifiques?
M. Usher: Personnellement, je ne pourrais pas vous dire quelle est la source des rapports scientifiques, mais je sais qu'on a attiré sur ceux-ci l'attention des organismes de réglementation compétents.
Le président: Les études scientifiques donnent-elles des raisons de s'inquiéter?
M. Usher: Je ne suis pas personnellement très au courant de la question. Je n'ai pas lu les études scientifiques en question, ou du moins je ne m'en souviens plus. Toutefois, à notre connaissance, des preuves ont été recueillies.
Le président: Nous vous remercions une fois de plus de votre apport très utile. Comme vous l'avez vu, les membres du comité sont très intéressés par tout cela. Nous avons hâte, bien sûr, aux audiences de la semaine prochaine, qui vont nous permettre de renforcer les liens et la collaboration entre l'ITC et le comité.
Je demanderais maintenant aux représentants de trois groupes différents de s'approcher: l'Association canadienne des industries de l'environnement, le Programme d'accélération de la réduction et de l'élimination des toxiques d'Environnement Canada et l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, de réputation internationale.
Je laisse la parole à Environnement Canada.
M. James Riordan (directeur, intérimaire, Bureau national de la prévention de la pollution, ministère de l'Environnement): On m'a demandé aujourd'hui de vous parler d'un programme qui a pour titre ARET, ce qui veut dire accélération de la réduction et de l'élimination des toxiques. Il s'agit d'une approche novatrice de la protection de l'environnement au Canada. On nous a demandé de venir vous donner aujourd'hui un aperçu de ce programme.
Ce en quoi le programme est novateur, c'est que nous essayons d'accélérer la réduction et l'élimination des toxiques sur une base volontaire. L'objectif des participants à ce programme - et je vous dirai tout à l'heure qui ils sont - est de démontrer si le volontariat peut permettre d'atteindre plus rapidement les buts environnementaux que la réglementation à elle seule. Le volontariat n'exclut pas la réglementation, qui consiste en une autre approche de la protection de l'environnement.
Au départ, les nombreux intervenants du processus ARET englobaient huit associations industrielles, dont l'Association minière du Canada, l'Association des manufacturiers canadiens et l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, de même que des associations de divers secteurs industriels - l'acier, le pétrole et le gaz, l'électricité, les pâtes et papiers - une association professionnelle de la santé, trois ministères fédéraux - Santé, Industrie et Environnement - et trois ministères provinciaux de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Six groupes environnementaux et syndicats en faisaient également partie, dont Pollution Probe, le Congrès du travail du Canada, Toxics Watch, en Alberta, la West Coast Law Association et l'Association canadienne du droit de l'environnement.
Le Groupe des orientations nouvelles regroupe des particuliers qui viennent de milieux différents, y compris des secteurs de l'industrie et des organismes non gouvernementaux. En septembre 1991, le Groupe des orientations nouvelles a demandé au gouvernement du Canada d'examiner de nouveaux moyens de protéger l'environnement. Un groupe a été mis sur pied. Il a fini par être connu sous le nom d'ARET, et notre première réunion a eu lieu en février 1992. Nous nous sommes réunis pendant 18 mois et nous avons discuté de nos objectifs, de nos buts et des moyens à prendre pour adopter l'approche novatrice préconisée. Comme vous pouvez vous l'imaginer, nous avons eu pendant ce temps des discussions assez animées au sujet de la manière de s'y prendre.
L'intention était d'accélérer la réduction ou l'élimination des émissions de substances toxiques. En septembre 1993, les organismes non gouvernementaux du secteur de l'environnement et les syndicats ont indiqué qu'ils ne pouvaient plus continuer à participer au projet parce qu'ils s'intéressaient davantage à l'utilisation des substances toxiques et préconisaient une approche réglementaire alors qu'il avait été question au départ des émissions de substances toxiques et d'une approche volontaire. Malheureusement, les organismes non gouvernementaux et les syndicats ont quitté le groupe.
Fait intéressant à noter et utile pour le programme, il y avait un sous-comité de la sélection des substances qui identifiait les substances considérées comme d'intérêt prioritaire. Ce comité était présidé par le Congrès du travail du Canada et l'Association minière du Canada et se composait d'un certain nombre d'organismes non gouvernementaux. Même si les représentants des écologistes et des travailleurs ont quitté le groupe, ils ont accepté d'en demeurer membres jusqu'à ce qu'on ait terminé l'important travail qui consistait à dresser la liste des substances à l'égard desquelles des mesures seraient éventuellement prises.
Comment a-t-on dressé la liste des substances? Nous avons examiné une base de données CEASARS, c'est-à-dire un système de recherche documentaire géré par le gouvernement de l'Ontario et l'État du Michigan et devant faciliter l'évaluation des produits chimiques. Cela nous a permis de nous pencher sur les propriétés de certaines substances et sur les critères fondés sur la toxicité, la bioaccumulation et la persistance. Nous avons pris des mesures de précaution et répertorié 101 substances en nous fondant sur la science, le bon sens et le consensus. Je le répète, des représentants d'organismes non gouvernementaux ainsi que de syndicats et de l'industrie faisaient partie du groupe qui est arrivé à un consensus.
Le nombre des substances et groupes de substances s'élève à 101. Essentiellement, les substances A-1 sont les substances d'intérêt prioritaire qui regroupent toutes les catégories et tous les critères. Elles sont persistantes, biocumulatives et toxiques. Il y a 14 substances dans cette catégorie. Il y a trois autres catégories, celle des substances toxiques, celle des substances toxiques et persistantes et celle des substances biocumulatives.
L'idée dans le cas de ces substances, notamment des substances toxiques biocumulatives persistantes, c'est la quasi-élimination de leur émission dans l'environnement. L'idée dans le cas des autres substances qui ne satisfont pas à tous les critères, c'est de réduire les émissions afin qu'elles ne causent aucun danger.
En mars 1994, nous avons proposé un défi à nos membres et nous avons communiqué par la poste avec diverses associations industrielles et entreprises pour les encourager à participer à un programme volontaire de réduction ou d'élimination de ces substances. Ce programme comporte des objectifs et des échéanciers précis. Nous envisagions des réductions importantes des émissions, une réduction de plus de 90 p. 100 des substances toxiques biocumulatives persistantes d'ici à l'an 2000, de même qu'une réduction de 50 p. 100 des autres substances toxiques, d'ici à l'an 2000 également. Nous savions qu'il fallait procéder graduellement et toujours faire de son mieux.
Nous demandons à chaque entreprise de produire un plan d'action qui puisse être rendu public sur demande. Certains des participants voulaient que les efforts déjà faits soient reconnus. Parce que nous considérions toutes les demandes comme raisonnables, nous leur avons demandé de nous présenter un rapport sur leurs plans d'action à partir d'une année de base choisie, c'est-à-dire 1993, après quoi nous voulions voir de nouvelles réductions entre 1993 et l'an 2000. C'est une des entreprises qui se sont engagées à mettre leur plan à la disposition du public et à le mettre à jour à mesure que nous approchons de l'an 2000.
Comment s'y prendront-elles? Comment rendront-elles compte des mesures prises? Elles vont produire des rapports annuels. Je suis persuadé que notre collègue, M. Lloyd, vous parlera du rapport environnemental de Dow, où il est question, d'un côté, de toutes les substances émises par installation et par année, d'ici à l'an 1995, puis jusqu'à l'an 2000.
Il y a des rapports sectoriels, comme celui-ci de l'Association minière du Canada, qui n'a jamais produit un rapport de ce genre - c'est-à-dire un rapport sur toutes les substances émises dans tout le Canada.
Environnement Canada a récemment publié un Inventaire national des rejets polluants qui donne la liste de 278 substances, les entreprises d'une certaine taille utilisant certaines substances étant obligées, par la loi, de faire rapport des rejets de ces substances.
Des rapports annuels ont été fournis par le secrétariat d'ARET, qui a été maintenu tout au long de ce processus.
La première année, nous avons reçu des plans d'action de 138 sociétés. Il est important de signaler que même si leur nombre s'élève à 138, certaines d'entre elles nous ont fait rapport pour plus d'une installation. Donc, même si nous parlons ici de 138 sociétés, il s'agit en fait de centaines d'installations. Nous avons reçu un rapport de sept ministères gouvernementaux, dont Environnement Canada, le ministère de la Défense nationale, EnerCan, Transports et le SCRS. Dix-huit autres sociétés se sont engagées à nous en présenter un pour 1995 tandis que 40 autres entreprises nous ont indiqué qu'elles sont en faveur de l'initiative ARET, mais qu'elles ne rejettent aucune des substances qui figurent sur la liste qui a été dressée.
Nous avons reçu une réponse positive de certains secteurs, dont celui des pâtes et papiers, avec lesquels nous avons négocié au fil des ans au sujet de la réglementation. Trente-sept sociétés de ce secteur, qui représentent 80 installations, nous ont présenté un plan d'action. Ce fut le cas de 13 d'entre elles dans le secteur des mines et de la fusion, c'est-à-dire 80 p. 100.
Dans le secteur des produits chimiques, le nombre des entreprises participantes s'est élevé à 37, soit 90 p. 100 du secteur, et on s'est engagé à atteindre un taux de participation de 100 p. 100.
La participation a été limitée dans les secteurs de l'aluminium et de l'électricité. Certaines des entreprises ont manifesté un certain intérêt, et des pressions ont été exercées sur d'autres pour qu'elles adoptent un plan d'action à l'appui du programme.
Pour ce qui est des pourcentages, nous avons essayé d'obtenir des engagements de réduction des émissions. Dans le cas des substances toxiques biocumulatives persistantes, nous avons essayé d'atteindre le taux de 90 p. 100 qui avait été durement négocié, et nous y sommes presque arrivés. Si on prend les HAP, c'est-à-dire les hydrocarbures aromatiques polycycliques, une substance très difficile à éliminer puisqu'il faut se rééquiper et investir de lourdes sommes, on s'aperçoit que la moyenne atteinte a été de 72 p. 100, mais si ce n'avait été des HAP, nous aurions pu avoir des réductions de près de 96 p. 100 d'ici à l'an 2000. Pour ce qui est des autres substances, c'est-à-dire de celles qui ne satisfont pas à tous les critères, nous avons obtenu en moyenne des promesses de réduction de 67 p. 100 des rejets de substances toxiques.
Nous avons un rapport qui a été publié à la fin de mars, Leaders environnementaux 1, qui donne une idée des plans d'action par organisation et par substance et qui définit les tendances. J'en ai ici des exemplaires si cela vous intéresse. On y trouve également une liste des personnes-ressources pour les plans d'action détaillés et pour des renseignements au sujet d'ARET. On y trouve aussi une liste des solutions qui s'offent aux entreprises, de même que des étapes qui vont suivre.
Nous sommes convaincus que la participation va être de plus en plus grande. Un bon pourcentage des plans d'action que nous avons déjà reçus nous donnent à entendre que d'autres engagements seront pris plus tard. Nous attendons 18 nouveaux plans d'action l'an prochain, et cinq autres associations ont manifesté leur intérêt. Elles représentent les secteurs de l'aérospatiale, du plastique et du caoutchouc. L'Association canadienne des industries environnementales nous a également écrit une lettre dans laquelle ses membres appuient unanimement le projet ARET.
Nous continuons à faire de la publicité autour du programme et nous espérons être en mesure de continuer à fournir des rapports positifs sur les résultats environnementaux.
Qu'est-ce qui s'en vient? Nous allons publier une mise à jour en décembre 1995. À l'automne 1996, nous publierons Leaders environnementaux 2, qui donnera une idée des plans d'action reçus jusqu'en juin prochain. Nous y expliquerons les résultats obtenus par rapport aux engagements. Nous ferons un lien avec ce que nous appelons le processus des options stratégiques. Nous allons nous intéresser aux substances toxiques prévues par la LCPE sur une base individuelle ou sectorielle et chercher des options qui devraient nous permettre d'obtenir certains résultats.
Nous savons par expérience que la protection de l'environnement exige un certain nombre d'outils, tant réglementaires que non réglementaires. L'action volontaire sert de complément à la réglementation et ne vise pas à la remplacer. L'action volontaire permet aux gouvernements d'aller au-delà de la réglementation et de l'application; par exemple pour obtenir des résultats au sujet de substances non réglementées. Sur les 101 substances dont la liste se compose, plus de 80 ne font l'objet d'aucune réglementation, et nous avons observé une réduction de leurs rejets. Un programme du genre de celui-ci permet aussi aux gouvernements de mettre l'accent sur la réglementation là où aucun résultat probant n'a été obtenu. Ils peuvent aussi s'en servir pour appuyer l'action volontaire.
Nous avions déjà une certaine expérience du protocole concernant l'emballage en vertu duquel des règlements devaient s'appliquer si l'industrie n'atteignait pas certains objectifs. Je pense que cela peut servir dans certains cas à encourager ceux qui peuvent profiter du système à chercher eux-mêmes à atteindre des objectifs en matière d'environnement. Il peut être nécessaire d'élaborer des règlements pour forcer ces parasites à entrer dans le jeu.
Il n'y a pas de solution unique à la protection de l'environnement. Les gouvernements auront toujours besoin de lois et de règlements, mais l'action volontaire offre l'occasion d'atteindre des résultats sans avoir à passer par la voie réglementaire.
Le président: Je vous félicite, monsieur Riordan, d'avoir su nous présenter un exposé aussi détaillé en moins de 10 minutes. Nous reviendrons à vous plus tard, au moment des questions.
J'inviterais maintenant M. Gallon à essayer de faire la même chose. Bienvenue parmi nous.
M. Garry T. Gallon (président, Association canadienne des industries environnementales): Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être à nouveau parmi vous.
Le secteur des industries environnementales est le produit d'une réglementation stricte qui s'échelonne sur 25 années au Canada et qui a débuté en 1970-1971, au moment de l'adoption de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Nous avons pratiquement mis au point les outils et les services destinés à aider le Canada et sa société à satisfaire l'obligation qui leur est faite d'assainir l'air et les eaux.
Par conséquent, nous avons pris de l'expansion et avons permis au Canada d'acquérir un avantage concurrentiel par rapport à la plupart des autres pays du monde. Notre pays fait maintenant partie des six principaux producteurs de technologies et de services environnementaux qui sont exportés à grande échelle. Nous nous situons en tête de liste avec l'Allemagne, le Japon, la France, la Suède et les États-Unis.
Cette compétitivité renforcée par la réglementation nous a permis de créer l'une des cinq principales industries au Canada pour ce qui est de l'emploi. Nous employons à l'heure actuelle 150 000 personnes. Notre industrie a un chiffre d'affaires de 11 milliards de dollars par année, et nous représentons environ 4 500 entreprises.
Nous sommes très diversifiés, puisque nous nous occupons de la gestion des déchets, du rendement énergétique, de l'énergie renouvelable, de l'amendement des sols, de la lutte contre la pollution des eaux, voire de la prévention de la pollution.
Alors, en 1988, ou vers cette époque, le gouvernement précédent a présenté le Plan vert et pris d'autres initiatives. Cela était le début des programmes volontaires, de la prévention de la pollution, et, en 1990, se sont créées des choses comme le Groupe des orientations nouvelles et ARET.
Notre industrie a constaté que le marché intérieur a commencé à stagner vers 1992-1993, vu la rareté des initiatives environnementales énergiques, aussi bien en ce qui concerne la réglementation que les instruments économiques ou le respect volontaire de la protection de l'environnement. Au début, quand on allait dire au gouvernement qu'il y avait un problème, on nous répondait que des mesures étaient en cours.
Toutefois, nos membres nous ont dit que les companies utilisatrices censées assurer le nettoyage n'ont plus besoin de nos services, et tant que des initiatives énergiques en matière d'environnement ne les forceront pas à y avoir recours, elles ne se prévaudront pas des services de nos membres. Donc, à l'heure actuelle, surtout après les amendements apportés en 1992 par les États-Unis au Clean Air Act, nous commençons à prendre du retard par rapport à ce pays et aux autres pour ce qui est de nos principales activités en matière de nettoyage.
Il faudrait donc que nous nous orientions vers des initiatives énergiques combinant le respect volontaire, les activités du type ARET et la prévention de la pollution. Nous pensons pouvoir le faire de façon efficace.
L'OCDE et les États-Unis ont récemment publié un certain nombre de rapports à ce sujet. Mathieu Glachant a notamment rédigé pour l'OCDE un rapport concernant les ententes volontaires en matière de politique environnementale. Ce document a été préparé par la Direction générale de l'environnement de l'OCDE en février 1994. On y dit fondamentalement que l'industrie ne respectera pas volontairement la réglementation si elle n'y est pas incitée par d'autres instruments.
Nicholas Ashford, du MIT, président d'un comité de l'EPA, le Technology Innovation and Economic Committee de NACEPT, le conseil consultatif national pour la politique et la technologie environnementales des États-Unis, a rédigé en 1991 un rapport intitulé: Permitting and Compliance Policy Barriers to U.S. Environmental Technology Innovation. On y fait principalement allusion au fait que les mesures volontaires ne donnent aucun résultat si elles ne sont pas accompagnées d'autres mesures.
J.Ph. Bard et P.F. Ténière Buchot ont rédigé, pour le bureau parisien de la Direction générale de l'environnement de l'OCDE en 1987, un autre rapport portant sur la promotion et la diffusion des technologies propres dans l'industrie. On y dit fondamentalement que faire respecter la réglementation ne coûte pas plus cher que des initiatives environnementales, et peut-être même moins. L'industrie sait mieux à quoi s'attendre. Cela peut diminuer considérablement le temps consacré à la négociation pour savoir si, oui ou non, les compagnies respectent leurs obligations ou pour essayer d'instaurer des règlements mettant toutes les entreprises sur un pied d'égalité et permettant d'identifier celles qui ne respectent pas leurs obligations. Ce rapport indique également que les règlements peuvent favoriser la création de nouvelles technologies et de nouvelles procédures.
Le Canada est d'ailleurs, dans ce domaine, l'un des chefs de file mondiaux en matière d'évaluation environnementale par suite du processus entamé dès 1973-1975 avec l'enquête Berger. Nous avons depuis renouvelé et élargi ce processus d'évaluation environnementale à un point tel que nous en exportons les modalités dans l'ensemble du monde par l'intermédiaire de nos sociétés d'experts-conseils en ingénierie ou en écologie.
Si on veut utiliser des initiatives volontaires, nous proposons d'agir de la façon suivante. On pourrait par exemple adopter un système d'initiatives efficaces en matière d'environnement reposant sur la définition d'objectifs et d'échéanciers. Il y aurait cinq paliers. Le premier correspondrait aux programmes volontaires.
Comme nous l'avons dit clairement, nous sommes en faveur de l'initiative volontaire d'ARET, surtout si elle est vraiment en vigueur.
Nous posons un certain nombre de questions au sujet d'ARET. Nous voulons nous assurer que ce programme est efficace de façon générale et atteint vraiment l'ensemble de ses objectifs... et non pas seulement les entreprises qui se portent volontaires. Il faut rendre hommage à certaines entreprises, comme Noranda, Dow et Du Pont, qui se portent volontaires et figurent parmi les chefs de file. Mais quel est le pourcentage des entreprises qui respectent le processus volontaire d'ARET?
En fait, je voudrais déposer aujourd'hui une lettre au sujet d'ARET que nous avons envoyée en tant qu'association de l'Ontario à l'honorable Sheila Copps le 14 mars 1994. Nous y présentons en gros ce genre de questions. Je ne vais pas en faire lecture ici, puisque cela fait partie de votre documentation.
Il y a d'abord le premier palier, c'est-à-dire les programmes volontaires, qui comprend ISO 14000 et les systèmes de gestion de l'environnement comme la gestion de la qualité environnementale totale.
Et ensuite le deuxième palier. Faut-il renforcer l'efficacité des mesures facultatives? Quelles mesures faudrait-il prendre en ce qui concerne les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations?
Il faudrait d'abord un système d'examen par les pairs au sein de l'industrie et du gouvernement. Il faut faire venir les contrevenants et leur dire qu'on doit examiner la façon dont ils ne respectent pas ce programme volontaire.
La deuxième façon, c'est d'en parler dans les médias, par exemple en plaçant des annonces dans les journaux. C'est le groupe d'ARET qui devrait s'occuper de cela. Si on peut faire savoir, par la presse, quelles sont les entreprises qui ne respectent pas ARET ou n'y participent pas, la crainte d'être exposé au grand jour est le meilleur moyen d'imposer le respect d'une réglementation. Cela peut également compromettre les relations entre les contrevenants et leurs acheteurs, par exemple dans le cadre des marchés publics fédéraux. Il suffit de ne plus passer de marchés avec les entreprises contrevenantes.
Quatrièmement, il y a la sensibilisation. Si les dirigeants d'une entreprise ne comprennent pas l'importance de la participation au programme volontaire, il faut les convoquer et leur parler afin de les sensibiliser.
Tout cela ne relève donc pas de la réglementation et pourrait être très efficace.
Le troisième palier correspondrait alors aux instruments économiques environnementaux. Il s'agirait notamment, premièrement, de la responsabilité civile et de l'assurance; deuxièmement, des instruments économiques; troisièmement, des critères écologiques en matière de passation de marchés; quatrièmement, de programmes de prévention de la pollution efficaces comportant, bien entendu, des échéanciers et des objectifs; et, cinquièmement, du respect des conventions internationales, y compris l'ALENA, les ententes accessoires de l'ALENA et les accords internationaux tels que, par exemple, le Protocole de Montréal sur les CFC. Je pense que l'on peut faire des choses de ce genre sans appliquer une réglementation.
C'est au quatrième palier que l'on arriverait enfin à la réglementation, qui ne devrait pas se limiter à un système de commandement et de contrôle, mais devrait combiner plusieurs facteurs. Dans les réunions de notre comité directeur et de notre conseil d'administration, nous avons des règlements qui servent d'abord à faciliter le respect de nos obligations, puis à établir des règles du jeu équitables et enfin à assurer le commandement et le contrôle.
Il est important de faire respecter la réglementation, et l'un des éléments clés est la menace que représente un règlement. Il n'y a rien d'aussi efficace pour inciter les entreprises à agir volontairment que de se mettre à rédiger des règlements. Nous l'avons constaté lorsque nous avons préparé nos projets de réglementation au gouvernement provincial lorsque j'y travaillais comme conseiller politique de 1985 à 1990.
Le cinquième palier serait composé des entreprises à impact nul sur l'environnement. Ce serait celles qui échappent complètement au cycle de la pollution en mettant en place des systèmes en circuit fermé à émissions virtuellement nulles. Il y en a un certain nombre qui font cela.
Pour finir, nous pensons que des initiatives environnementales énergiques de ce genre pourraient encourager la concurrence environnementale et la croissance industrielle et créer des emplois. Nous n'avons vu aucune initiative de ce genre au cours des dernières années. Nous espérons que, en examinant et modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, vous allez prévoir des procédures susceptibles d'appuyer des initiatives volontaires qui n'en sont qu'à leurs premiers balbutiements.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Gallon, de nous avoir présenté cette méthode, qui montre que vous avez beaucoup réfléchi à tout cela.
Nous avons enfin M. Lloyd , qui représente l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques. Bienvenue.
M. Gordon Lloyd (vice-président, Affaires techniques, Association canadienne des fabricants de produits chimiques): Merci, monsieur le président. L'ACFPC est heureuse de se présenter à nouveau devant votre comité dans le cadre de l'examen parlementaire. Nous vous avons déjà présenté à l'automne un mémoire plus complet qui portait sur un grand nombre de questions qu'examine le comité. Nous vous avons également expliqué le rôle important que notre association joue dans la vie économique. Nous vous avons également parlé de notre programme de Gestion responsable, et je ne vais donc pas revenir sur toutes ces questions.
Nous sommes très heureux de nous retrouver ici pour parler du programme ARET, que, comme on vous l'a dit, nous avons contribué à mettre en place.
Nous considérons ce programme comme très important.
Dans nos mémoires plus complets de l'automne, nous avons expliqué que, à notre avis, il faudrait combiner les mesures réglementaires et volontaires pour améliorer la protection de l'environnement, et nous avons dit qu'il ne fallait plus trop mettre l'accent sur la réglementation, mais plutôt permettre aux mesures volontaires de montrer quels résultats elles pouvaient donner.
Dans ce contexte, le programme ARET est une figure de proue, et on le suivra de très près. Il me paraît important de signaler ce qu'il a permis de réaliser. M. Riordan l'a dit de façon générale à propos des divers secteurs industriels qui y participent. Je voudrais donner un peu plus de détails à propos des résultats obtenus dans le secteur chimique.
Presque tous nos membres ont décidé de participer au premier rapport. Lors de la réunion de notre conseil d'administration, il y a plusieurs semaines, après la publication du premier rapport, nous avons constaté que la participation n'avait pas atteint 100 p. 100. Nous allons nous efforcer d'assurer la participation des autres membres. Il s'agit en général des entreprises les plus petites et de quelques-uns de nos nouveaux membres. Notre conseil d'administration considère cependant qu'il est très important que tout le monde y participe.
Dans le rapport d'ARET, des objectifs avaient été établis, comme l'a dit M. Riordan, pour les quatre secteurs entre lesquels on avait réparti la liste des produits chimiques. Dans chacune de ces catégories, la réduction des émissions du secteur chimique a dépassé les objectifs établis, ce qui correspond à ce que nous essayons d'atteindre dans le cadre de la gestion responsable. Dans l'ensemble du secteur chimique, en 1993, nos émissions se sont montées à 1 799 tonnes, et elles devraient diminuer pour atteindre 859 tonnes en l'an 2000.
Nous convenons qu'il est important que le public puisse constater l'efficacité des programmes volontaires. Nous avons par le passé dit à ce sujet qu'il fallait nous suivre, et ne pas nous faire confiance.
Notre association a pris une initiative en vue de réduire les émissions. Elle est semblable à l'Inventaire national des rejets de polluants dont a parlé M. Riordan, mais les substances suivies sont plus nombreuses, et on y trouve également des plans de projection de réductions présentés par nos membres et que nous regroupons dans le rapport. Nous donnons également des renseignements sur la façon dont le public peut s'adresser aux différentes entreprises pour discuter avec elles de leurs plans de masse.
Après la publication du rapport ARET, nous avons élargi la portée de notre rapport sur la réduction des émissions de l'année dernière pour nous assurer qu'il couvrait toutes les substances d'ARET. En publiant ce rapport à l'automne, nous montrons au public de combien nous avons réduit nos émissions pour les substances couvertes par ARET, ainsi que pour d'autres.
L'une des choses qu'il nous paraît important de signaler à propos d'ARET, c'est la latitude qu'il laisse et la façon dont il permet aux entreprises de dépenser leur argent en fonction de leurs priorités. Les substances figurant dans le rapport ARET sont nombreuses, puisqu'il y en a 101 ou 117, selon la façon dont on compte les HAP.
Elles sont groupées en diverses catégories. Comme je l'ai dit, les objectifs de réduction spécifiques pour les différentes substances du groupe sont établis pour chaque catégorie. Les entreprises peuvent ainsi choisir les produits sur lesquels il leur paraît le plus raisonnable d'axer leurs efforts, mais, de façon générale, cela permet d'atteindre dans l'ensemble les objectifs de protection de l'environnement et de réduction des émissions, comme on peut le constater.
L'ACFPC cherche à mieux faire connaître le concept que le Canada a lancé avec ARET. Nous le faisons au niveau international par l'intermédiaire de l'ICCA, l'International Council of Chemical Associations, et, selon nous, le programme ARET permet au Canada de donner l'exemple quant à la façon dont peuvent fonctionner les programmes volontaires.
Comme certains intervenants l'ont déjà dit, on discute beaucoup au sein de l'OCDE et ailleurs pour essayer de trouver des façons novatrices de gérer l'environnement en dehors du cadre purement réglementaire. Avec ARET, le Canada nous paraît disposer d'une solution véritable et d'une grande réussite. Nous devrions faire connaître ce programme au niveau international.
Même si nous avons obtenu d'excellents résultats grâce à ARET, il nous paraît nécessaire d'aller plus loin. Comme nous l'avons dit, notre conseil d'administration va s'assurer de la participation de tous nos membres. Notre secteur a, dans l'ensemble, eu une bonne participation au programme ARET, mais les membres de l'ACFPC qui nous représentaient au comité directeur d'ARET espèrent que la participation des entreprises d'autres secteurs sera également plus importante. Dans ce contexte, je pense que si les gouvernements fédéral et provinciaux et des comités comme le vôtre vantent les avantages du programme ARET, cela pourra contribuer fortement à renforcer cette participation.
Lorsque ARET en était à ses premiers pas, l'ACFPC a écrit à la ministre Copps pour lui expliquer que, à notre avis, ARET devrait être une des pierres angulaires de la politique fédérale en matière de gestion des substances toxiques. Sa réponse a été très positive. Je citerai quelques extraits de la lettre qu'elle a envoyée à notre président, Jean Bélanger:
- Si les résultats de l'initiative ARET montrent que les programmes volontaires peuvent
constituer une façon opportune et efficace de protéger l'environnement de façon satisfaisante et
à un coût raisonnable, on mettra fortement l'accent sur eux.
- Plus la réussite du programme ARET est grande dans un secteur, plus il est vraisemblable que
l'on aura recours dans ce secteur à des mesures volontaires pour atteindre les objectifs futurs.
Et nous considérons que le programme est une grande réussite. Nous convenons certainement qu'il ne faut pas utiliser seulement des mesures volontaires pour améliorer l'environnement. Il faut un peu de tout, mais, lorsque des programmes volontaires sont en place, nous devons nous assurer qu'ils fonctionnent bien, qu'ils reçoivent l'appui nécessaire et qu'on les utilise pleinement. ARET a prouvé que de tels programmes peuvent donner de bons résultats et, pour sa part, en a obtenu.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Lloyd. C'était très intéressant. Nous allons maintenant passer aux questions.
[Français]
Madame Guay, s'il vous plaît.
Mme Guay: Merci, monsieur le président. Cette présentation était très intéressante et très bien documentée. J'ai des questions à poser sur les mesures volontaires. Évidemment, quand nous discutons avec les groupes environnementaux et que nous parlons de mesures volontaires, ils n'accueillent pas cette idée très chaleureusement, à cause du manque de contrôle.
J'aimerais poser une première question en demandant quelle industrie participe le plus à ce programme. Quel type d'industrie y participe?
[Traduction]
M. Riordan: Il y a les producteurs de produits chimiques, l'Association minière du Canada, les sociétés productrices d'électricité dans une certaine mesure ainsi que le secteur des pâtes et papiers et la sidérurgie. Ce sont quelques-unes des plus grandes entreprises canadiennes.
[Français]
Mme Guay: Est-ce que les industries pétrolières y participent?
[Traduction]
M. Riordan: Les industries du gaz et du pétrole participent à ARET depuis le début. Certaines sociétés membres de l'association y participent et d'autres non. Elles n'obtiennent pas de résultats aussi bons que certaines des principales sociétés que vous avez évoquées. Je pense qu'elles sont en train d'essayer d'établir leurs priorités. Le programme ARET porte sur des substances toxiques. Or, elles accordent plutôt la priorité maintenant, comme le demandent les gouvernements, aux produits chimiques qui entraînent un changement climatique, épuisent la couche d'ozone ou contribuent au réchauffement de la planète. Ce sont des catégories différentes... dans certains cas tout au moins, mais pas dans tous.
[Français]
Mme Guay: Disons que vous avez des industries qui font appel à votre programme et qui fonctionnent avec les mesures volontaires, mais que ces industries se retrouvent dans des situations financières difficiles à un certain moment, est-ce qu'il n'y a pas un risque qu'une année, elles décident d'avancer énormément sur le plan environnemental, mais que l'année suivante elles laissent tomber un programme? Est-ce que vous faites un suivi très serré des industries qui participent? J'aimerais savoir un peu le fonctionnement de votre programme dans les grandes lignes.
[Traduction]
M. Riordan: Je dois d'abord souligner que, en fait, le programme a commencé en mars 1994; cela fait donc un an. Il a fallu un certain temps pour le mettre en route, mais il est en place depuis un an. Au cours de cette période, les entreprises ont préparé des programmes d'action publics, dans lesquels elles exposent ce qu'elles vont faire pour chaque substance pendant la période de validité du programme, c'est-à-dire pendant six ans.
Il y a deux façons de procéder. D'un côté, nous en avons déjà parlé, il y a les rapports annuels. De nombreuses entreprises présentent annuellement des rapports financiers, mais aussi des rapports environnementaux. C'est une façon de signaler le résultat qui est laissé à leur initiative. Il y a également l'Inventaire national des rejets de polluants, récemment annoncé, administré par Environnement Canada, qui suit les émissions de ces entreprises.
Par ailleurs, le public a accès à ces plans d'action, si bien que n'importe qui peut demander à toute entreprise participante un exemplaire de ce plan et un exemplaire du rapport relatif à l'application de ce plan. Il y a également les pressions qui s'exercent lorsque deux entreprises présentent un rapport dans le cadre d'ARET et que l'une d'entre elles constate que l'autre ne présente pas un rapport exhaustif. Il y a également des pressions qui sont exercées par les associations sectorielles, les pairs et les concurrents qui veulent que les autres entreprises présentent des rapports plus complets.
Pour ce qui est des investissements, je ne peux pas vraiment vous en parler. Peut-être la personne qui représente l'industrie elle-même pourrait-elle le faire.
Le président: Brièvement.
M. Lloyd: En ce qui concerne les participants, je voudrais signaler... Je crois que le rapport sur ARET a été fourni aux membres. On trouve, page 30, un tableau donnant la liste des participants. La question d'essayer de maintenir et de renforcer la participation, sur laquelle vous vous êtes penchés, me paraît également essentielle par rapport à ce dont j'ai parlé.
Il est certainement essentiel de pouvoir investir de l'argent, mais je crois qu'il y a de plus en plus d'entreprises qui se rendent compte qu'elles doivent planifier leurs activités en matière d'environnement dans le cadre de leurs investissements d'ensemble en adoptant un système intégré de développement durable. Ce ne sont pas des questions distinctes. Il faut les aborder conjointement.
Comme l'a dit M. Riordan, avec les mécanismes de suivi faisant partie d'ARET, l'examen public et le programme de Gestion responsable dans notre secteur ou des programmes équivalents dans d'autres secteurs, les entreprises seront plus incitées à respecter leurs engagements. Je voudrais cependant souligner à nouveau ce que j'ai dit au sujet de l'encouragement que peuvent donner des groupes comme le vôtre; les programmes volontaires, si l'industrie les applique, seront reconnus et contribueront, je crois, de façon importante, à faire se joindre au programme ARET certains secteurs et certaines entreprises qui envisageaient de le faire.
Le président: Monsieur Forseth.
M. Forseth (New Westminster - Burnaby): Merci. Monsieur Gallon, c'est à vous que je poserai d'abord une question. J'encouragerais ensuite les autres membres à intervenir pour donner leurs propres points de vue.
Monsieur Gallon, vous avez évoqué la façon dont les choses se font au Canada et vous avez ensuite parlé des États-Unis. Vous avez dit que le Canada était en tête, mais que c'était maintenant de l'autre côté de la frontière que l'on voyait prendre certaines initiatives. J'aimerais que vous nous parliez un peu plus longuement de cela pour nous en donner les raisons et nous expliquer exactement de quoi il s'agit.
Vous avez également dit, dans ce contexte, que vous aviez constaté une réduction ou une stagnation des initiatives prises ces derniers temps au Canada et que la situation avait changé au cours des deux ou trois dernières années. J'aimerais que vous nous disiez quelle en est à votre avis la raison et que vous nous décriviez exactement ce qui se passe pour nous indiquer ensuite quelle solution on devrait, selon vous, adopter. Comment redresser la barre et, surtout, quel doit être le rôle du gouvernement fédéral? Qu'aimeriez-vous que le gouvernement fédéral fasse en réaction aux changements que vous observez?
M. Gallon: En ce qui concerne la réglementation et son application, le Canada a plafonné après l'application du Plan vert en 1988. En 1990-1991, on a commencé à mettre au point ARET dans le cadre des orientations nouvelles. Ensuite, en 1991, les groupes environnementaux qui avaient participé à sa mise au point s'en sont détournés, et ont constaté que ce programme souffrait de vices fondamentaux.
Le gouvernement canadien a alors attendu la prise d'initiatives volontaires. En conséquence, aucune initiative importante n'a été prise au niveau national, alors que beaucoup de choses s'étaient faites au cours des 25 années précédentes. Il y a de nombreuses raisons à cela; en premier lieu, la tentative de recourir désormais à des mesures volontaires de prévention de la pollution en l'absence des éléments requis pour en assurer la réussite.
En deuxième lieu, il y a eu la récession au Canada. Mais elle sévissait en même temps aux États-Unis. Nous avons constaté au Canada que l'on ne pouvait pas payer pour nombre d'activités de nettoyage nécessaires pendant cette période de récession. À l'heure actuelle, on assiste à une accélération soudaine de la croissance économique et à d'excellents résultats dans le secteur des pâtes et papiers, qui est assujetti au Canada à certains règlements, dont il est évidemment nécessaire de renforcer l'application.
Comme vous l'avez remarqué, certains secteurs n'ont pas participé très activement au programme ARET tel qu'on nous l'a décrit: le secteur minier, le secteur énergétique, en particulier, avec ses contaminants toxiques. Ces secteurs ne sont pas représentés. Comment les inciter à se joindre au programme? S'ils ne veulent pas s'y joindre volontairement malgré l'excellent travail que fait le groupe qui s'occupe du programme ARET, peut-être que la menace d'une réglementation, dans la mesure où l'on montre...
Lorsque je travaillais pour le gouvernement provincial, nous rédigions des règlements en matière de recyclage. La menace de l'introduction d'une réglementation avait incité des gens à agir volontairement. Tant que ce pouvoir continuera d'exister dans le cadre de la LCPE, je pense que l'on pourra continuer d'inciter les entreprises à adopter des mesures volontaires à grande échelle entraînant des secteurs industriels entiers. Le secteur environnemental y contribuera et mettra au point de nouvelles technologies pour les marchés d'exportation.
M. Forseth: Tout en écoutant votre réponse, je regardais le visage de certaines des autres personnes intervenues aujourd'hui, et j'aimerais bien entendre leurs réactions à vos propos, car je ne pense pas qu'elles soient toutes d'accord avec la façon dont vous présentez les choses.
M. Riordan: Je signalerai simplement aux fins du procès-verbal que l'Association minière participe très activement au programme ARET.
Je pense que nous parlons là de deux choses différentes. M. Gallon parle du marché des entreprises du secteur de l'environnement alors que nous parlons des façons novatrices d'atteindre des résultats en matière d'environnement.
Je voudrais également souligner qu'Environnement Canada n'a pas attendu de voir quels résultats donnait ce programme volontaire avant de continuer à renforcer son dispositif réglementaire en qualifiant 25 substances de toxique aux termes de la LCPE, en procédant à une révision de cette loi, etc. Cela me paraît représenter seulement une petite partie de l'ensemble des activités d'Environnement Canada.
Je vais revenir à l'Association minière. Tout au long des consultations, différents groupes se méfiaient manifestement les uns des autres: les groupes environnementaux, les groupes industriels et le gouvernement. Autour de la table personne ne faisait entièrement confiance aux autres. C'est donc déjà une réussite que d'avoir pu se rencontrer pendant 18 mois et d'avoir vraiment parlé de l'environnement. C'est déjà une réussite que d'avoir une communauté multipartite, incluant des représentants des ONG, des syndicats, de l'industrie et du secteur gouvernemental, qui a décidé de mettre l'accent sur une liste de substances à propos desquelles nous voulions intervenir.
Malheureusement, pour une raison ou pour une autre, les organisations non gouvernementales et les syndicats ont choisi de se retirer. Nous avons néanmoins pris le risque de continuer à élaborer un programme à la préparation duquel nous avons tous consacré deux ou trois ans et dont nous pensions qu'il pourrait permettre d'atteindre des résultats valables sur le plan de l'environnement. C'est ce que nous constatons maintenant.
Par ailleurs, quand on parle de certaines de ces entreprises - et je reviendrai à l'Association minière - ce secteur n'a jamais été l'un des plus conscients des problèmes que pose l'environnement. Jusqu'au bout, avant de le convaincre d'émettre un bref d'exécution, notre ministre a dû déterminer s'il fallait continuer ce processus sans la participation des organisations non gouvernementales et seulement avec celle de l'industrie et du gouvernement.
Jusqu'à la dernière minute, l'Association minière disait: on ne peut pas faire ce que vous exigez; on ne peut pas réduire les émissions de substances toxiques qui sont biocumulatives de façon persistante de 90 p. 100 d'ici à l'an 2000. À quoi sert-il d'adhérer au programme si nous savons que nous n'y arriverons pas?
L'exemple qu'ils n'ont cessé d'utiliser était le cadmium. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais il s'avère qu'ils ont réussi à réduire les émissions de cadmium de 88 p. 100.
Je pense que nous avons lancé un défi aux gens, et l'on est en train d'essayer de déterminer ce qui pourra être fait grâce à des approches volontaires. C'est aussi simple que cela.
Le président: Madame Kraft Sloan, vous avez la parole.
Mme Kraft Sloan: J'aimerais signaler quelque chose au sujet de l'Inventaire national des rejets polluants...Je pense que vous avez parlé d'un total de 278 substances, mais j'ai un communiqué de presse qui fait état de 178 substances...
M. Riordan: Excusez-moi.
Mme Kraft Sloan: Je tiens tout simplement à ce que cela figure clairement au procès-verbal. Le chiffre que j'ai cité est bien le bon?
M. Riordan: Oui.
Mme Kraft Sloan: Merci. Pourriez-vous expliquer au comité quel processus est suivi pour faire inscrire une substance sur la liste? Si j'ai bien compris, il existe plusieurs catégories, pour lesquelles vous avez établi certains critères. J'aimerais savoir quel est le processus pour faire inscrire une substance sur la liste.
M. Riordan: La liste, comme elle vous a été décrite dans les transparents, s'appuie sur le système CEASARS. Nous avons examiné plusieurs centaines de substances pour en vérifier la toxicité biocumulative persistante. Une description détaillée est donnée dans le rapport sur le programme ARET. Les substances qui satisfaisaient à nos critères sont ces 101 substances qui répondent aux exigences en matière de toxicité biocumulative persistante établies par le sous-comité de sélection des substances.
La façon dont les nouvelles substances aboutissent sur la liste et la façon dont une substance peut en être retirée sont en train d'être examinées à l'heure actuelle, mais tout dépend de la conformité avec les critères. Nous n'allons pas autant dans le détail que la LCPE, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, relativement aux substances prioritaires, car ce processus demande beaucoup de temps; il prévoit, par exemple, des évaluations des risques. Nous utilisons le principe des précautions logiques à prendre, la bonne pratique scientifique, le système CEASARS et la méthode du consensus pour en arriver à ces 101 substances.
Mme Kraft Sloan: Qui siège au sous-comité?
M. Riordan: Au moment de l'établissement de la liste de 101 substances, le sous-comité était coprésidé par le Congrès du travail du Canada et par l'Association minière du Canada. Il comptait une représentation égale d'organismes environnementaux non gouvernementaux, des pouvoirs publics et de gens d'affaires.
Mme Kraft Sloan: Vous faites état à la page 44 de votre rapport de trois substances que vous envisagez de déclasser. Vous dites - et j'aimerais tout simplement que ce soit bien clair - que vous essayez toujours de déterminer le processus de radiation ou de déclassement d'une substance.
M. Riordan: S'il y a de nouvelles données, des renseignements qui n'étaient pas par exemple disponibles au moment de l'évaluation, ou de nouveaux éléments d'information qui peuvent être déposés auprès du comité de sélection des substances et convaincre ce dernier que la substance concernée devrait être considérée comme non toxique, non biocumulative et non persistante, alors, parce qu'il s'agit de nouveaux renseignements dont on ne disposait pas au moment de la sélection initiale, la substance pourrait être retirée de la liste.
Mme Kraft Sloan: Qui en prend la décision?
M. Riordan: Le sous-comité de sélection des substances, qui est un sous-comité multipartite.
Mme Kraft Sloan: Comment les renseignements lui sont-ils fournis? Je sais que les personnes qui y siègent représentent diverses industries, etc., mais les ONG participent-elles toujours au processus?
M. Riordan: Oui.
Mme Kraft Sloan: D'après ce que j'avais compris, les groupes environnementaux s'étaient retirés du processus.
M. Riordan: À l'exception du sous-comité de sélection des substances. S'il y a un appel - et je pense qu'il y en a eu deux - nous envoyons les renseignements par télécopieur au sous-comité. On accorde au sous-comité de sélection des substances le temps nécessaire pour se pencher sur les renseignements, puis celui-ci tient une conférence téléphonique ou une réunion pour prendre une décision, après quoi il présente sa recommandation au comité ARET, qui tranche.
Mme Kraft Sloan: Les organisations non gouvernementales participent donc toujours au processus.
M. Riordan: Oui.
Mme Kraft Sloan: Quelles sont les antécédents des participants? Si l'on prend les représentants de l'industrie, par exemple, ces personnes ont-elles une formation scientifique, ou bien...
M. Riordan: Les représentants du Congrès du travail du Canada, des diverses ONG et du gouvernement de l'Ontario, par exemple, ont fait les études nécessaires en matière de toxicologie et de science. C'est pourquoi le comité lui-même ne se sentait pas à la hauteur pour s'occuper de la dimension scientifique.
Mme Kraft Sloan: D'accord. Alors comment cela est-il fait? Fonctionne-t-on selon un régime de majorité de voix ou de consensus?
M. Riordan: De consensus.
Mme Kraft Sloan: Je me demandais également, étant donné que l'on se penche sur la LCPE, ce qui se passe si ARET décide de déclasser une substance, mais que le comité de gestion de la LCPE continue de considérer que celle-ci est toxique, ou bien la perçoit différemment...nous sommes préoccupés par les ramifications en ce qui concerne la LCPE, tout particulièrement s'il y a des contestations devant les tribunaux, etc.
M. Lloyd: Je vais tenter de vous fournir une réponse partielle. Lorsque vous envisagez de déclasser une substance, pour reprendre l'expression que vous avez employée, je pense qu'il est important de se rappeler que l'objet de la liste est de donner un menu de substances inquiétantes devant faire l'objet d'une décision prioritaire. Si on obtient de nouvelles données qui disent que l'une des substances sur la liste n'est plus une priorité, selon nous il n'est pas logique de continuer de s'en préoccuper.
Quant à votre question concernant une substance considérée comme toxique en vertu de la LCPE, il est inconcevable que l'on retire de la liste une telle substance. D'un autre côté, vous pourriez très bien avoir une situation où il y a eu une évaluation approfondie en vertu de la LCPE et que la substance visée a été déclarée sans risque. À notre avis - même si nous n'avons pas encore mis au point les règles qui s'appliqueraient - cela pourrait faire l'objet d'économies: en effet, pourquoi s'attarder sur une chose dont on a établi qu'elle ne pose aucun risque? Mais cela ne pourrait pas fonctionner en sens inverse.
Mme Kraft Sloan: Vous parlez sans cesse de l'apparition de nouvelles données. Je comprends cela, et je sais que la science ne cesse d'évoluer, mais dans le cas de la première substance - et je n'arrive même pas à prononcer son nom - on parle de questions relatives aux critères originaux utilisés. J'aimerais savoir de quelle façon les nouvelles données interviennent.
M. Anthony Stone (gestionnaire, Stratégie d'accélération de la réduction et de l'élimination des toxiques, Bureau national de la prévention de la pollution, Environnement Canada): En ce qui concerne cette substance en particulier, les nouvelles données parviennent d'études qui ont été faites en vertu de la loi américaine en matière de protection de l'environnement. Une fois ces données reçues, données qui indiquent apparemment que cette substance, le para-dichlorobenzène, n'est plus un problème, ces renseignements seront soumis au sous-comité afin qu'il juge de leur validité. Si tout le monde s'entend pour dire que les études faites aux États-Unis sont suffisantes, une recommandation sera alors soumise au comité ARET.
Mme Kraft Sloan: Vous nous avez saisis de certaines inquiétudes et vous nous avez également dit que dans le cas de la majorité des substances on progressait conformément aux objectifs, mais qu'il y avait des problèmes en ce qui concerne un groupe. Vous avez également dit qu'il y avait des problèmes de contrôle et de surveillance, et je constate que pour ce groupe il y a eu une demande de déclassement. Je me demande donc s'il y a un lien entre les deux.
M. Stone: Nous avons reçu une demande de déclassement de la part d'une compagnie. Les renseignements qu'elle nous a fournis ont été examinés par les membres du sous-comité. Plusieurs mois se sont écoulés depuis, et la compagnie a choisi de ne pas poursuivre son appel. À notre connaissance, la compagnie a accepté la décision du comité, à savoir que la substance satisfaisait à tous les critères et qu'aucun nouvel élément d'information n'avait été fourni.
Voilà où en sont les choses à l'heure actuelle. Nous avons communiqué avec la compagnie, et celle-ci a été invitée à nous fournir toute information supplémentaire.
Mme Kraft Sloan: Très bien. Merci.
Le président: Monsieur Finlay.
M. Finlay: Votre exposé a été fort intéressant, messieurs. J'aurais deux très petites questions à vous poser.
Monsieur Riordan, à la page cinq de votre exposé, vous parlez de PBT. De quoi s'agit-il?
M. Riordan: Persistance, bioaccumulation et toxicité. Il nous faudrait apprendre à ne pas employer d'acronymes.
M. Finlay: Merci. Cela m'a causé quelques difficultés.
À la page 8, vous parlez d'une année de base choisie, c'est-à-dire 1993, et je pense que dans vos explications vous avez dit que les personnes qui ont participé au programme ARET ont fait rapport à partir des données de cette année de base. Or, vous avez dit plus tôt que cela a en fait commencé en 1994. Je suis donc quelque peu perdu.
M. Riordan: Si vous dirigez une entreprise et que vous avez beaucoup investi ces dernières années en vue d'améliorer votre rendement environnemental, je pense que vous aimeriez que ce fait soit reconnu dans un rapport sur votre participation. Nous avons donc, par le biais de négociations, convenu qu'il n'était pas déraisonnable de demander que cette activité, ces investissements et ces résultats soient reconnus, mais les données de référence ne devraient pas remonter plus qu'à cinq ans en arrière. L'année de base pourrait donc être 1988, 1989, 1990, etc. Ce qui nous intéressait le plus, c'était de savoir ce qui allait se passer entre 1993 - vous avez raison - lorsque le programme a vu le jour, et l'an 2000. Nous voulions donc que les compagnies et, d'ailleurs, les ministères nous rapportent de nouvelles réductions entre 1993 et l'an 2000.
Je vais maintenant vous expliquer ce que j'ai voulu dire lorsque j'ai déclaré que cela a commencé en 1994. L'appel a été lancé en 1994, mais les compagnies participantes savaient que nous voulions qu'elles commencent à produire des rapports dès 1993.
M. Finlay: Lorsque vous énumérez les parties prenantes à la page 3, vous mentionnez que les trois ministères fédéraux participants étaient ceux de la Santé, de l'Industrie et de l'Environnement. Je pense qu'il était tout à fait évident que ces ministères-là allaient y participer, et j'en suis fort heureux. Cependant, l'une des critiques qui ont été faites à l'endroit de la LCPE, c'est que cette loi ne s'applique pas avec suffisamment de fermeté aux ministères fédéraux qui continuent de faire des choses qui sont maintenant interdites à l'industrie et aux autres.
J'ai noté ici sur ma liste les ministères des Ressources naturelles, des Affaires indiennes et du Nord canadien, du Commerce international, de l'Agriculture et de la Défense, et il y en a peut-être une demi-douzaine d'autres. J'imagine qu'ils devraient tous y figurer. Mais étant donné leurs responsabilités, pourriez-vous nous dire... Conviendriez-vous que le programme ARET serait renforcé si ces ministères y participaient? Savez-vous pourquoi ils n'y ont pas adhéré? On a certainement dû les inviter à y participer.
M. Riordan: Si vous prenez le rapport ARET à la page 62 vous verrez que les trois ministères qui ont siégé au comité ARET y ont participé. Par exemple, chacun des secteurs de l'industrie n'avait qu'un représentant, mais les gens étaient beaucoup plus nombreux que cela à participer au programme. En haut de la page 62, vous trouvez les noms des ministères qui ont véritablement participé au programme.
Vous avez donc le comité qui supervise le programme et les véritables participants. Le Service canadien du renseignement de sécurité, Environnement Canada, la Commission de la capitale nationale, le ministère de la Défense nationale, le Conseil national de recherches, le ministère des Ressources naturelles, comme vous l'avez dit, et Transports Canada sont tous des participants. Ils ont tous produit des plans d'action et sont tous en train de réduire leurs émissions de substances toxiques conformément aux exigences du programme.
M. Finlay: Le ministère de la Santé n'y est pas.
M. Riordan: Nous visons surtout les ministères qui émettent des substances visées par le programme ARET, et le ministère de la Santé soit n'en émet pas, soit y participera sous peu.
M. Finlay: Excusez-moi, mais n'avez-vous pas dit que ce ministère participait déjà au programme?
M. Riordan: Le comité avait besoin de ses connaissances et de sa compétence surtout dans le domaine de la toxicologie et de l'évolution du programme.
M. Finlay: J'aimerais revenir sur la deuxième partie de ma question. Je suis heureux d'y voir figurer le ministère de la Défense nationale et Transports Canada, mais je ne vois pas le Commerce international ni le ministère de l'Industrie; or, ils ont participé à la planification.
M. Riordan: Sauf le respect que je vous dois, certains de ces ministères n'utilisent ni ne produisent peut-être pas ces substances visées par le programme de réduction et d'élimination. Il pourrait s'agir de laboratoires ou peut-être du ministère de la Défense - qui était là - qui savent qu'ils manipulent ces substances dans des quantités appréciables. Nous ne nous étions pas attendus à ce que tous les ministères embarquent dès le départ. Cette année, nous avons obtenu que quatre autres secteurs industriels s'engagent à participer.
À Industrie Canada, on fait pression sur les sous-ministres pour qu'ils obtiennent, par exemple, d'autres sous-ministres qu'ils améliorent la participation. Environ 50 p. 100 des ministères participent à l'heure actuelle, et nous aimerions pouvoir atteindre les taux de participation enregistrés dans certains secteurs de l'industrie.
M. Finlay: Vous avez dit 50 p. 100 des ministères gouvernementaux?
M. Riordan: Cinquante p. 100 des ministères du gouvernement qui utilisent les substances concernées.
M. Finlay: Il n'y en a certainement pas 50 p. 100 là-dessus.
M. Riordan: Non, c'est exact.
M. O'Brien (London - Middlesex): Monsieur le président, j'aurais deux questions à poser. Premièrement, le message que j'entends de la part de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques est un peu contradictoire, ou en tout cas flou. Son porte-parole a dit deux choses: qu'il nous faut nous écarter d'un système trop axé sur les règlements pour aller dans le sens d'une approche plus volontaire, et qu'il nous faut un mélange des deux. Pensez-vous qu'il y ait trop de règlements à l'heure actuelle? Deuxièmement, quel serait le bon mélange, à votre avis?
M. Lloyd: J'espère que je n'ai pas dit des choses contradictoires. Comme nous l'expliquons dans le plus gros document, et c'est ce que nous avons dit la dernière fois au comité, nous pensons qu'il doit y avoir un mélange. Mais la tendance historique était de commencer par ordonner et contrôler.
Ce que sont en train de découvrir les gouvernements canadien, américain et autres, c'est qu'il s'agit là d'une façon très coûteuse d'atteindre des résultats qu'il faudrait plutôt réserver pour les cas extrêmes, et qu'il faut d'abord tenter de voir ce qui peut être fait sur une base volontaire. Le Conseil du Trésor a en fait publié une directive il y a quelques années établissant cela sous forme de politique générale. Voilà donc qui sous-tend l'approche qui devrait selon nous être suivie.
Si les approches volontaires ne donnent pas les résultats voulus, alors dans la zone rouge nous avons de bonnes preuves qu'un bon nombre des secteurs font ce qu'il faut. Qu'on ne gaspille pas l'argent des contribuables pour des règlements lorsque cela n'est pas nécessaire.
Nous conviendrions néanmoins qu'il y aura peut-être des préoccupations quant à l'établissement de règles du jeu égales pour tout le monde. Mais, encore une fois, si l'on met en place des règlements, nous espérons que ce serait fait d'une façon qui tienne compte de ce qui se fait déjà volontairement.
Il n'y a pas de règles précises que j'aimerais voir supprimer, et j'espère avoir tiré au clair l'approche générale que nous visons.
M. O'Brien: Je comprends. J'aimerais cependant que vous conciliiez cela avec ce qu'a ditM. Gallon, et peut-être qu'il pourrait se prononcer sur les règles... On nous dit depuis le début de nos audiences qu'une réglementation, ou en tout cas la menace de l'imposition d'une réglementation, est absolument impérative pour obtenir un niveau d'observation acceptable, notion qu'il faudrait également définir. J'imagine que le taux d'observation devrait être de 100 p. 100.
M. Lloyd: Le rapport ARET vous fournit la preuve que beaucoup a été fait dans le cadre de régimes volontaires. Je ne peux rien dire de plus. Je ne suis pas d'accord avec plusieurs des choses que M. Gallon a dites dans le bref... Mais je ne vais pas me lancer là-dedans.
M. O'Brien: Très bien.
M. Lloyd: Mais je pense que vous avez devant vous, dans le rapport ARET, la preuve que l'approche volontaire a donné de très bons résultats dans différents secteurs. Il faudrait peut-être renforcer cela dans certains domaines, mais soyons sélectifs.
M. Gallon: Les règles en matière de surveillance et de contrôle se sont effondrées là où il y a des technologies prescrites ou là où on a dit que le nettoyage doit se faire de telle ou telle façon. Nous sommes en train d'examiner de nouvelles approches qui n'imposent pas de façon de faire, qui ne font que fixer l'objectif, ce qui ouvre la voie à des initiatives axées sur le rendement destinées à permettre aux compagnies d'atteindre l'objectif visé.
Ce qui s'est passé, c'est que l'Allemage et le Japon, et même la Pologne... Hier nous avons eu une réunion avec trois représentants du gouvernement polonais et les porte-parole de 85 de nos compagnies environnementales, et cette réunion a fait ressortir que la Pologne va utiliser une réglementation environnementale pour appuyer l'élaboration de nouvelles techniques et pour devenir le moteur de la mise au point de nouvelles technologies dans toute l'Europe de l'Est.
La même chose s'est passée avec le Japon et l'Allemagne.
Ce qu'on nous dit maintenant, c'est que le ministère des Affaires étrangères et Industrie Canada essaient d'établir de nouvelles initiatives politiques en vertu desquelles le Canada irait à l'Organisation mondiale du commerce et au GATT et leur dirait: «Pas de règlements, s'il vous plaît, seulement des initiatives volontaires.» Je pense qu'il y a moyen d'y arriver.
M. O'Brien: En tant que membre du comité, je suis convaincu de la nécessité d'une réglementation. Une question pour M. Riordan, d'ARET. Quelles mesures l'industrie pourrait-elle prendre pour atteindre le niveau d'observation requis, c'est-à-dire 100 p. 100 en ce qui me concerne? Si l'initiative est si importante, pourquoi ne pas exiger une observation à 100 p. 100, et comment s'y prendre?
M. Riordan: En ce qui concerne les substances visées par le programme ARET, il n'y a pas de règles qui s'appliquent à la grande majorité d'entre elles. On obtient des résultats avant même qu'il y ait des règles en place. C'est là un des aspects positifs d'un système volontaire.
Un système volontaire n'est aucunement synonyme d'abandon de la réglementation. Je pense que les règles ont un rôle à jouer, soit en tant que garde-fou, soit en tant qu'incitation. Je pense que vous avez visé dans le mille lorsque vous avez parlé de motivation. Les règles établissent certains seuils, et parfois, bien franchement, ce n'est pas suffisant. Il peut très souvent s'agir du plus bas dénominateur commun. Les approches volontaires vont au-delà, visant cette observation à 100 p. 100 dont vous avez parlé.
M. O'Brien: Avez-vous des plans spécifiques visant à atteindre 100 p. 100 dans l'industrie?
M. Riordan: Est-ce que j'en ai?
M. O'Brien: Eh bien, il y a les responsables d'ARET et il y a l'industrie.
M. Riordan: Je pense que certains secteurs qui sont couverts par le programme ARET visent une participation à 100 p. 100 en vue de la réalisation des objectifs fixés dans le cadre du programme, soit une réduction de 90 p. 100 des émissions de substances biocumulatives persistantes et une réduction de 50 p. 100 des autres catégories de substances. Je ne pense pas que l'on puisse obtenir une telle participation. Ce sera peut-être possible dans le secteur minier. Ce sera peut-être également le cas du côté des produits chimiques. Je ne pense cependant pas qu'on obtiendra ce taux dans tous les secteurs. Quoi qu'il en soit, cela nous aidera à mieux cibler nos approches en matière de réglementation.
M. Lloyd a parlé de règles du jeu égales. J'imagine que dans certains cas l'industrie nous demandera de mettre en place une réglementation. C'est peut-être ce que fera une compagnie qui a une avance sur ses concurrents, qui trouve que ce n'est pas juste et qui demande où est le gouvernement lorsqu'on en a besoin. Mais essentiellement, je pense que l'approche ARET en est une qu'il nous faut examiner.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, cela fonctionne depuis un an. Selon nos résultats, il y aurait eu des réductions des émissions de substances toxiques de l'ordre de 18 000 tonnes. Sans une approche volontaire nous n'avions pas les règlements pour obtenir ce genre de résultat.
Mme Kraft Sloan: Je suis un fervent défenseur de l'industrie environnementale et de la technologie environnementale, car je pense qu'il s'agit là d'un important secteur de croissance pour nous. J'ai eu le plaisir d'accompagner le ministre au sommet du G-7 tenu à Florence l'an dernier, et je peux vous dire que c'est là une préoccupation qui a été exprimée par l'ensemble des pays présents.
Je pense que les approches volontaires sont une façon de faire. Cependant, nous avons entendu un exposé de KPMG, qui a fait une étude des plans de gestion de l'environnement, et il en est ressorti qu'un pourcentage élevé des compagnies interrogées, 70 ou 80 p. 100, ont déclaré avoir des plans de gestion de l'environnement. Mais lorsqu'on leur a posé des questions de base du genre: avez-vous telle ou telle chose en place? - et il s'agissait d'aspects fondamentaux de tout plan de gestion de l'environnement - le taux d'observation n'était que de 2 p. 100 en moyenne. Je m'inquiète quelque peu lorsque je vois ce genre de chiffres.
Le ministère de l'Environnement - et je me rends compte que vous ne vous occupez de cela que depuis un an - suit-il ce qui se passe, et à quel niveau se situe la reddition de comptes relativement au processus ARET?
M. Riordan: J'aimerais revenir de nouveau sur l'Inventaire national des rejets polluants. Nous aimerions savoir ce que les gens sont en train d'émettre. Si l'on savait ce que les gens émettent, on pourrait favoriser des initiatives en vue de la réduction ou de l'élimination de ces émissions.
Je n'ai peut-être pas tout à fait compris la question, mais je ne dis aucunement que les approches volontaires sont la seule voie envisageable. Il me semble que c'est ce que j'ai dit dès le départ. Il y a une fonction pour la réglementation et il y a une fonction pour l'application, mais on constate par ailleurs que les approches volontaires donnent lieu à des résultats en tandem; il n'y a pas que des résultats directs. Nous avons un protocole d'entente avec le gouvernement de l'Ontario et avec la Motor Vehicle Manufacturers Association. Cette association regroupe les trois grands: Ford, Chrysler et General Motors. Le protocole est en place depuis trois ans, et il y a eu des réductions de 2000 tonnes d'émissions de substances visées sur cette période. Le rapport de la troisième année est sur le point de sortir.
Avec les fabricants de pièces d'automobiles, les ateliers de finissage de métal, les imprimeries et les boîtes d'art graphique, les nettoyeurs à sec, etc., on constate que dans le cas des grosses compagnies il y a une amélioration du rendement environnemental en vertu de ces ententes. Elles les imposent à leurs fournisseurs, qui sont tenus d'améliorer leur rendement environnemental et les produits qu'ils vendent à ces grosses compagnies.
Le travail de protection de l'environnement est énorme, et je ne pense pas qu'il n'y ait qu'une façon de faire. Il nous faut utiliser les différents outils qui sont à notre disposition, et le programme ARET est une petite de ce que fait Environnement Canada et de ce qui doit être fait.
M. Lloyd: Une partie de votre question concernait la reddition de comptes. Je pense que l'élément crucial, c'est l'aspect surveillance. Si les groupes font rapport par le biais de l'inventaire ou, comme le fait l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, par le biais du rapport sur la réduction des émissions, on sait très bien ce qui a été fait et ce qui n'a pas été fait. Si vous fixez des objectifs en matière d'émissions pour l'avenir, vous feriez mieux de les atteindre, sans quoi on vous démolira dans la presse.
En vertu de la Gestion responsable, nous avons des processus consultatifs communautaires avec les gens qui vivent près des usines, avec des comités parlementaires et avec des groupes environnementaux. Il intervient un grand nombre de mécanismes de reddition de comptes dès que vous adoptez un processus du genre «surveillez-nous; ne nous faites pas confiance», et il y a beaucoup d'informations auxquelles les gens peuvent avoir accès. Je pense que l'information est la clé de la reddition de comptes.
Mme Kraft Sloan: Une dernière petite question. On discute de plans de prévention de la pollution avec les responsables du programme de la LCPE, et on se demande s'il ne faudrait pas élargir la liste des substances, surtout celles dont l'utilisation n'est pas réglementée, et je me demande si M. Riordan ne pourrait pas nous dire quelques mots sur la possiblité que le comité de gestion de la LCPE soit chargé de la prévention générale de la pollution, en utilisant l'Inventaire national des rejets polluants... en tant que liste partielle des substances qui seraient visées par un plan de prévention de la pollution.
M. Riordan: Dans le cadre de mes fonctions de directeur du Bureau national de la prévention de la pollution, j'oeuvre depuis un an à l'élaboration d'un plan d'action et d'une stratégie fédérale de prévention de la pollution. Nous avons eu l'occasion de discuter avec les responsables d'un grand nombre de ministères fédéraux. Nous avons eu des consultations publiques en mars et en avril et nous sommes en train de préparer des recommandations pour notre ministre - la ministre a été tenue au courant tout le long du processus - relativement à une gamme d'options de prévention de la pollution dans cinq secteurs.
Il y a deux éléments. Il y a, tout d'abord, les gens. Je suis certain que ce n'est pas le cas ici, mais les gens avec qui nous avons souvent discuté avaient la fausse impression qu'approche volontaire et prévention de la pollution sont synonymes, et vous et moi savons que ce n'est pas le cas. Interdire une substance, c'est faire de la prévention de la pollution.
La planification de la prévention de la pollution, si l'on s'appuie sur l'expérience américaine, par exemple, est un très bon outil pour encourager les compagnies, les ministères gouvernementaux, etc., à envisager sérieusement d'abord la prévention de la pollution plutôt que le contrôle ou le recours à des mesures correctives. Aux États-Unis, par exemple, il y a une loi sur la prévention de la pollution. Trente-trois États américains se sont dotés de lois en matière de prévention de la pollution qui exigent l'établissement d'un plan de prévention de la pollution.
Si on y pense, à l'intérieur d'Environnement Canada, nos supérieurs pensent automatiquement: bien sûr, mais qui va recevoir tous ces plans de prévention de la pollution dans une période de réductions, de compressions, etc.?
Certain sont d'avis que si l'on exigeait, dans la LCPE, des plans de prévention de la pollution dans le cas des substances d'intérêt prioritaire, par exemple, ou des substances inscrites au RNRP, sans pour autant demander à voir ces plans... ils feraient partie du concept de la diligence raisonnable, ainsi dans le cadre de ses opérations quotidiennes, une compagnie aurait à produire un plan, si elle traitait... Je pense que c'est là une option que le comité devra prendre en considération. Mais tout ce principe de la planification en vue de prévenir la pollution suscite certainement l'intérêt de divers secteurs d'activité.
M. Finlay: Je pense que vous nous avez donné un bon exemple de volontarisme et d'esprit de coopération à cet égard. L'attitude de plusieurs témoins représentait l'industrie et d'autres également, qui ont saisi ce que nous faisons en matière d'environnement et de développement durable et qui agissent sur ce plan, m'a encouragé. Je l'apprécie beaucoup.
Pour ce qui est de l'application de la loi, nous pourrions sans doute examiner votre liste. J'ai été impitoyable envers le gouvernement et les organismes gouvernementaux et donc je le serai tout autant à l'égard de l'industrie.
Je ne sais pas tout sur la compagnie, mais je trouve un tantinet illogique que Potacan soit portée à appuyer ce processus, alors qu'elle n'émet aucune substance ARET. Mais un peu plus bas, on trouve le nom de Metall Mining, puis celui d'Union Carbide... qui, si je ne m'abuse, a été responsable du désastre de Bhopal, n'est-ce pas? Ces compagnies disent n'émettre que des quantités néglibeables de substances toxiques.
Peut-être que si nous nous servions de votre liste, nous pourrions dépêcher nos inspecteurs là où il faut, et en faisant appel à un peu de logique, savoir ce que ces industries rejettent dans l'environnement.
M. Riordan: Pour revenir un peu en arrière, je vous rappelle qu'il y a des gens qui participent volontairement à ce programme. Rien ne les a obligés à le faire. De plus, nous avons un programme qui s'appelle RNRP auquel la loi les oblige à se conformer. Lorsqu'on fait des vérifications au hasard auprès des entreprises pour voir quelles substances elles ont signalées en vertu du RNRP ou quelles mesures elles ont adoptées au titre de l'ARET... à l'occasion, nous les appelons pour leur dire, par exemple, qu'elles ont oublié telle ou telle substance. Le RNRP est un outil dont nous nous servons pour encourager la participation à ce programme.
M. Finlay: On en compte deux ou trois.
M. Lloyd: Ce sont l'un de nos membres. C'est une question qu'on leur pose. Ce qu'elles produisent dans leur usine Prentiss, en Alberta, ne donne pas lieu à d'importants niveaux d'émission de ces substances. Ces gens-là ont plusieurs usines dans le monde qui ne produisent pas toutes la même chose. Mais c'est une question que nous avons posée à l'Union Carbide dans le cadre de l'ACFPC.
M. Finlay: Parfait.
Le président: Monsieur Riordan, pour quelques questions, après quoi nous passerons à vous, monsieur Gallon.
Sans vouloir minimiser l'importance de la SCSI, comptez-vous que Travaux publics Canada, Industries Canada et le ministère des Affaires indiennes et du Nord participeront à cette initiative?
M. Riordan: Je suis naturellement optimiste. Nous tenons ces gens informés et d'ailleurs, nous avons envoyé des exemplaires de ce rapport à tous les ministères fédéraux, par l'intermédiaire de notre sous-ministre. Les gens de ces ministères peuvent donc voir qui participe et qui ne participe pas. Notre sous-ministre a, par ailleurs, encouragé tous ses collègues sous-ministres à y participer.
Dans une certaine mesure, je crois que le moment n'était pas vraiment bien choisis étant donné toutes les autres initiatives que l'on prend en ce moment au gouvernement, en matière de réduction des coûts et autres. Les gens estiment que l'on fait appel une fois de plus à leur temps et à leurs ressources. Mais nous n'avons certainement pas renoncé et nous continuerons de chercher à intéresser ces autres ministères.
Le président: Diriez-vous que Travaux publics est un membre indispensable de votre équipe?
M. Riordan: Oui.
Le président: Et Industrie Canada aussi.
Pourriez-vous nous dire si d'autres secteurs d'Environnement Canada participent à la surveillance et si l'on a constaté des progrès ou au contraire l'absence de progrès en matière de qualité de l'air et de l'eau?
M. Riordan: Je ne suis pas en mesure de vous donner des détails, car les travaux de surveillance des effets sur l'environnement sont en cours. Le ministère effectue régulièrement d'autres types de surveillance. Nous espérons que l'on va commencer à déceler certains des résultats signalés dans les plans d'action.
Le président: Vous publierez ces résultats dans votre prochain rapport?
M. Riordan: J'ignore si les résultats seront probants. Nous ferons état des résultats que nous aurons, mais je ne sais pas si les résultats des travaux de surveillance des effets sur l'environnement et autres seront déjà prêts à ce moment-là.
Le président: Diriez-vous que les résultats des travaux de surveillance sont essentiels?
M. Riordan: Oui.
Le président: Dans un monde idéal, combien d'exploitations minières et d'entreprises de sidérurgie voudriez-vous voir figurer dans votre catalogue des réponses sectorielles?
M. Riordan: Nous aimerions qu'elles y soient toutes.
Le président: Combien y en a-t-il?
M. Riordan: Quatre-vingt pour cent.
Le président: Vous en avez 13 ici, c'est 13 sur combien?
M. Stone: Ce n'est pas tant le nombre d'entreprises qui compte, c'est la taille de leurs opérations.
Le président: Evidemment.
M. Stone: Autant que je sache, l'Association minière du Canada compte 48 membres. En lisant le rapport, on constate que ce sont les hauts-fournaux et les raffineries, etc., qui produisent le plus d'émissions. Nous avons toutes les entreprises qui participent au programme ARET. Il y en a une, qui exploite un haut fournau, et qui n'est pas membre de l'Association minière. Je ne vous donnerai pas son nom pour l'instant. Nous sommes en train de nous en occuper.
Pour l'instant, les mines qui ne sont pas membres de l'Association minière du Canada font l'objet de pressions très fortes de la part des 13 entreprises de tête qui participent au programme.
Le président: Dans le cas du pétrole et du gaz, vous en avez quatre sur combien?
M. Stone: Plusieurs dizaines.
Le président: Combien?
M. Stone: Je ne me souviens pas du nombre exactement.
Le président: Plus ou moins de 50?
M. Stone: Si je me rappelle bien, nous avons envoyé du courrier à une cinquantaine d'entreprises, membres et non membres.
Le président: Comment expliquez-vous ce faible taux de réponse?
M. Stone: Eh bien, la plupart des gens de l'industrie nous ont indiqué qu'ils avaient d'autres priorités et qu'ils voulaient avoir plus de précision au sujet des priorités en matière d'environnement avant d'agir. Cela ne veut pas dire qu'ils ne participeront pas à l'ARET, mais il est clair qu'ils attendaient de voir quelles seront les priorités en la matière et quelles ressources ils devront mobiliser.
Les grandes entreprises, qui représentent la moitié du volume de vente et de la capacité de raffinage au Canada participent au programme.
Le président: Dans le secteur des produits chimiques, vous avez huit entreprises sur combien?
M. Stone: Je ne me rappelle pas exactement, mais je pense qu'il y en a environ 80.
Le président: Donc 8 sur 80. Comment expliquent-elles leur réaction ou comment justifient-elles leur faible taux de participation? Est-ce la même raison?
M. Stone: La plupart d'entre elles prétendent ne pas émettre de substances dangereuses. La majorité de nos membres sont des entreprises qui achètent leurs produits chimiques auprès, entre autres, des entreprises membres de Gordon Lloyd, qui les mélangent, les emballent en petites quantités et les revendent. Ils estiment que ce procédé ne donne lieu qu'à très peu d'émissions.
Le président: Et les entreprises de distribution de l'électricité, vous en avez 11 sur combien?
M. Stone: Encore une fois, je ne me rappelle pas les chiffres exacts, mais pour l'instant il y en a beaucoup.
Le président: Qu'entendez-vous, par «beaucoup»? Des dizaines ou des centaines?
M. Stone: Eh bien si l'on compte des entreprises comme Nepean Hydro, Ottawa Hydro, cela fait plusieurs centaines.
Le président: Et comment expliquez-vous ce faible taux de réponse? Que vous ont-elles dit?
M. Stone: Pour l'instant, les plus importantes d'entre elles participent à une étude d'envergure de concert avec des entreprises semblables aux États-Unis. Je ne me rappelle pas ce que veut dire l'acronyme du programme en question exactement, mais il s'agit d'un projet très coûteux de l'EPA, baptisé PISCES. Il en est question dans le rapport.
Elles disent attendre les résultats de cette étude pour savoir d'où proviennent exactement les émissions les plus importantes afin d'investir le plus rentablement possible dans leur réduction.
Le président: Vous savez que la plupart des décharges publiques sont gérées par les collectivités. Certaines d'entre elles sont équipées de torchères qui contribuent considérablement à la pollution par le CO2 et d'autres émissions. Avez-vous l'intention de viser les décharges publiques et, dans l'affirmative, quand?
M. Riordan: La Fédération canadienne des municipalités s'est déclarée favorable au programme ARET. Celui-ci étant perçu comme étant un programme fédéral, nous essayer de trouver un moyen de faire participer toutes les municipalités, peut-être par l'intermédiaire du Conseil canadien des ministres de l'Environnement. Il ne convient pas que le gouvernement fédéral s'adresse directement aux municipalités pour les faire participer à ce qui est perçu comme étant un programme fédéral.
Le président: Enfin, monsieur Gallon, pouvez-vous nous parler un peu des entreprises qui appartiennent à la catégorie supérieure, au nec plus ultra... au paradis de toutes les catégories, je veux parler des entreprises à impact nul. Comment est-ce qu'on fait pour être admis au paradis? Est-ce qu'il y en a déjà qui s'y trouve?
M. Gallon: Vous savez, monsieur le président, il n'est certainement pas nécessaire de mourrir pour aller au paradis.
C'est David Buzzelli, et son groupe sur le développement durable, qui travaillent sur ce concept d'entreprise «à impact nul» depuis l'incident avec Dow Chemical en 1985 et depuis que la première série de règlements ont été proposés. En tant que président de Dow Canada Buzzelli estime que nous pourrions en arriver à des entreprises complètes fonctionnant en boucle fermée. Nous pouvons modifier les procédés de fabrication, modifier l'utiilsation des produits et réduire nos coûts à long terme, parce que nous n'avons plus à subir les affres d'une négociation permanente relative aux programmes volontaires et à la réglementation. Nous pouvons entièrement sortir de la boucle en réduisant nos émissions atmosphériques.
On y parvient par le biais de l'innovation...
Le président: Et, jusqu'ici, qui a été admis dans cette catégorie?
M. Gallon: Je ne pense pas que beaucoup ait déjà atteint le nirvana. Je ne pourrais pas vous les citer mais disons que des entreprises s'efforcent de parvenir à ce niveau élevé.
Le président: Diriez-vous que c'est une catégorie insaisissable?
M. Gallon: J'estime que c'est une catégorie qui devrait être un objectif, auquel d'ailleurs parviendront certaines entreprises. Je pense, par exemple, à INCO qui, en 1985, a été réglementée en vertu du Programme de lutte contre les pluies acides. À cette époque-là, INCO a soutenu qu'elle n'avait pas le technologie nécessaire pour parvenir à une réduction de 66 p. 100 de ses émissions. Mais il ne lui a fallu que quatre ans pour mettre au point la technologie voulue, pour changer ses fours à oxygène et capter les émissions de CO2. Aujourd'hui, la compagnie économise 90 millions de dollars par an et elle s'est rapprochée du nirvana.
Il faut donc compter sur les pressions des autres entreprises du milieu et, quand celles-ci ne fonctionnent pas, pas plus que l'action volontaire, sur le poids de la réglementation. Vous verrez que plus en plus d'entreprises se dégageront de ce noeud gordien soit 50 p. 100 de réduction de leurs émissions d'ici l'an 2000 et 90 p. 100 d'ici 2005. Elles s'en sortiront en passant à des systèmes en boucle fermée et en modifiant leurs procédés.
Le président: Nous vous remercions tous beaucoup. Cette séance a été pour nous très instructive et nous vous souhaitons bonne chance.
La séance est levée jusqu'à 19h15.