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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 octobre 1995

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[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Bonjour, mesdames et messieurs. Nous vous accueillons dans cette salle historique où se tiennent les réunions des caucus nationaux. Les fauteuils sont disposés autrement et la sonorité est différente.

Nous sommes ici cet après-midi pour entendre l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. Si j'ai bien compris, M. Adrian Bradford, son directeur exécutif associé, en dirige la délégation.

Bienvenue au comité! Je vous demanderais de bien vouloir présenter vos collègues avant de faire votre exposé.

M. Adrian Bradford (directeur exécutif associé, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Merci, monsieur le président. Je suis à l'emploi de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. Je suis en compagnie d'Ed Brune, directeur général, ingénierie des émissions, au centre technique de Toyota aux États-Unis; de Glenn Bryksaw, responsable de la conformité aux normes d'émission chez Honda Canada; et d'Eugene Dubecki, directeur de l'entretien technique chez Honda. D'autres représentants de Toyota sont là aussi pour nous aider à répondre à vos questions.

Je vais commencer par vous tracer le portrait de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada. Je vous remercie de l'avoir autorisée à venir vous présenter un mémoire sur le projet de loi C-94.

L'Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada représente les sociétés qui vendent des voitures de tourisme et des camionnettes et qui ne font pas partie du Pacte de l'automobile de 1965 parce que la société mère a son siège social en dehors de l'Amérique du Nord. Seize compagnies sont énumérées dans nos dépliants; la plupart d'entre elles ont apporté des technologies novatrices au marché canadien de l'automobile.

En 1991, notre association qui s'appelait alors l'Association canadienne des importateurs d'automobiles a changé son nom pour tenir compte du fait que plusieurs de ses membres fabriquaient désormais des véhicules et des pièces au Canada.

Elle représente les entreprises canadiennes de distribution devant les gouvernements fédéral et provinciaux, en particulier devant Transports Canada qui est chargé directement de réglementer les normes d'émission et de sécurité. Cependant, elle s'occupe aussi d'une foule d'autres questions telles que les normes provinciales relatives aux climatiseurs transportables, les initiatives destinées à économiser l'essence, et le recyclage des pièces d'automobile.

Cet après-midi, nous allons tenter de ne pas répéter ce qui vous a été dit plus tôt aujourd'hui, quoique nous répliquerons aux affirmations des représentants d'Ethyl. Le MMT pose un problème aux membres de l'AIAMC depuis longtemps, malgré que nous ayons réussi à nous conformer aux normes antipollution parce que, jusqu'en 1988, celles-ci nous laissait une marge de sécurité suffisante. Je vous expliquerai tout à l'heure.

L'accumulation d'oxyde de manganèse dans le système d'échappement des véhicules devenait vraiment importante après l'expiration de la garantie et était donc considérée comme un problème d'entretien à long terme. Toutefois, des études entreprises par Honda au milieu des années 80 ont permis de constater que, là où du MMT était ajouté à l'essence, plus le moteur était vieux, moins le système antipollution était efficace contre le monoxyde de carbone et les hydrocarbures.

À peu près à la même époque, des chercheurs de Mercedes-Benz en Allemagne ont effectué des études comparées en laboratoire pour découvrir que les convertisseurs catalytiques devaient atteindre une température plus élevée pour être aussi efficaces avec les moteurs fonctionnant à l'essence additionnée de MMT qu'avec ceux fonctionnant à l'essence non éthylée.

Ils ont constaté également que les dépôts d'oxydes de manganèse accumulés dans un catalyseur en réduisaient sensiblement l'efficacité lorsque la température du moteur dépassait 800 degrés Celsius.

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Mercedes-Benz a participé à l'étude effectuée en 1985 et 1986 par l'Office des normes générales du Canada; cette étude a constaté que les émissions d'hydrocarbures étaient plus élevées quand l'essence contenait du MMT, et confirmé que le MMT avait tendance à provoquer des dépôts d'oxydes de manganèse dans les systèmes d'échappement. Elle a montré, en outre, que ces dépôts pouvaient nuire au bon fonctionnement des capteurs et les empêcher de contrôler les gaz d'échappement.

Le protocole d'entente entre les fabricants d'automobiles et le gouvernement fédéral pour les modèles 1994 et 1995 reconnaît, dans un additif, les effets de ce que nous avons appelé à l'époque les «formulations d'essences canadiennes». Les membres de l'AIAMC ont insisté pour que cela figure dans le protocole à cause des effets du MMT observés dans les premières études dont je viens de parler.

Toyota a fait une autre étude, effectuée sur une Camry 1990, qui a révélé un taux d'émission d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone plus élevé chez les véhicules utilisant une essence au MMT. Mais une autre étude, exhaustive celle-là, l'a remplacée. C'est celle que M. Brune va vous exposer tout à l'heure.

Après l'adoption de la Clean Air Act aux États-Unis, en 1990, Environnement Canada a commencé à chercher des moyens de rendre plus sévères les normes canadiennes d'émission afin de s'assurer que les Canadiens aient accès à la même technologie antipollution de pointe que celle disponible aux États-Unis.

À la suite de cet engagement, les membres de l'AIAMC ont continué de participer activement aux initiatives du groupe de travail mixte gouvernement-industrie avec les sociétés pétrolières dans l'espoir de négocier, si possible, des accords volontaires visant à éliminer progressivement le MMT au fur et à mesure que d'autres antidétonants arriveraient sur le marché après l'abandon graduel du plomb à partir de 1990. Malheureusement, tout s'est arrêté en 1992.

Le protocole d'entente entre les fabricants d'automobiles et le gouvernement fédéral a été rédigé de manière à reconnaître que les mélanges carburants canadiens pouvaient nuire à la durabilité de certaines composantes des systèmes antipollution. Ce libellé a été choisi délibérément parce qu'il faisait état de la disparition de la «marge de sécurité» que l'on pourrait définir comme «l'écart entre les normes de produit et les normes d'émission autorisées». Grâce à cette marge, les modèles plus anciens demeuraient conformes aux normes d'émission en dépit de l'emploi de MMT.

À cause de la marge de sécurité...

Le président: Je m'excuse de vous interrompre, M. Bradford, mais vos propos seraient tout à fait compréhensibles si nous étions tous des ingénieurs en mécanique; malheureusement, nous n'en sommes pas. Nous avons du mal à saisir le sens de certaines expressions - marge de sécurité par exemple. Pourriez-vous le préciser?

M. Bradford: Bien. Je vous en ai donné une définition un peu sommaire. Je vais sans doute laisser certains de mes collègues ingénieurs qui sont ici définir le terme avec plus de précision. Il s'agit essentiellement de l'écart entre la norme d'émission fixée et la norme de produit, celle selon laquelle le véhicule est conçu de façon à se conformer à coup sûr à la norme autorisée.

Avant l'adoption des normes pour les modèles 1994 à 1996, la marge de sécurité était toujours assez grande pour que les fabricants automobiles soient certains de se situer largement en deçà des normes. Malheureusement, ils ont perdu presque toute cette marge de manoeuvre puisque les normes auxquelles les modèles 1994 à 1996 doivent se conformer sont beaucoup plus sévères.

Les pétrolières n'ont pas admis volontiers les problèmes de dépôts de manganèse dont ont fait état les fabricants d'automobiles; elles les ont entraînés dans un long débat sur la «compatibilité»: les carburants doivent-ils permettre aux systèmes antipollution d'atteindre un fonctionnement optimal ou simplement faire tourner les moteurs. L'efficacité de la technologie améliorée que les fabricants d'automobiles ont adoptée pour lutter contre les émissions polluantes est compromise par l'essence actuellement sur le marché.

Entre 1994 et 1996, les fabricants d'automobiles ont prolongé leurs garanties sur les systèmes antipollution afin qu'elles soient comme celles exigées aux États-Unis. Par la même occasion, ils ont installé des systèmes diagnostiqueurs incorporés de pointe - les systèmes OBD-II dont on vous a parlé ce matin et que je ne vais pas essayer de vous décrire car je présume qu'ils vous ont été bien expliqués - qui sont extrêmement sensibles et qui arrivent à détecter la détérioration du circuit antipollution, ce qu'était incapable de faire l'ancienne technologie de diagnostic OBD. L'OBD-II a donc remplacé l'OBD.

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Les fabricants internationaux d'automobiles commencent à planifier les modèles d'une année donnée plusieurs années à l'avance et ils tentent de prévoir tous les problèmes imaginables d'homologation et de production. Au cours de la dernière année, ils ont confirmé les plans pour les modèles 1996 en supposant que le MMT serait éliminé en septembre 1995. Ils prévoient encore sa disparition pour le début de 1996 afin que les convertisseurs catalytiques longue durée et les autres éléments du système antipollution soient le moins endommagés possible.

Pour les modèles 1996, les systèmes diagnostiqueurs OBD-II serviront de circuits d'inspection et d'entretien pendant toute la vie utile du véhicule, en indiquant immédiatement aux consommateurs la moindre hausse des émissions. Cependant, seuls les fabricants d'automobiles ont soumis les systèmes OBD-II actuels à des essais et ce sont ceux-là qui sont installés sur les véhicules 1996. Je suppose que c'est une preuve de la rapidité à laquelle la technologie évolue.

Je voudrais vous entretenir brièvement des affirmations voulant qu'ajouter du MMT à l'essence diminue les oxydes d'azote. On a claironné cet avantage mais sans jamais expliquer par quel phénomène la couche de manganèse sur les pièces du moteur et du système d'échappement entraîne une diminution des NOx.

Selon moi, il est faux de conclure qu'une couche de manganèse sur les systèmes d'échappement du moteur réduit systématiquement les émissions d'oxydes d'azote. Les données montrent clairement que chez six des huit modèles 1992 et 1993 retenus pour l'étude entreprise par Ethyl, il n'y a eu aucune diminution statistiquement significative des émissions de NOx.

Deux véhicules transitoires peu polluants - que nous appelons des TLEV dans l'industrie et qui sont équipés de la nouvelle technologie - émettent statistiquement à peu près autant de NOx.

En résumé, nous croyons que, dans son exposé, Ethyl s'est servi de données pour faire, sur le niveau des émissions, une extrapolation qui dépasse leur portée utile.

Le président: Pouvez-vous nous donner des exemples de ces véhicules transitoires peu polluants qui se trouvent sur le marché?

M. Bradford: Certainement. Il y en a au moins un en Californie, un modèle 1996 qu'un de nos membres offre là-bas.

Si vous permettez, je demanderais à Glenn Bryksaw de vous en parler, car il connaît bien lui-même la technologie utilisée pour ce véhicule.

Le président: Nous n'en sommes pas encore à la période des questions. Je veux simplement que votre exposé soit plus détaillé lorsque c'est pertinent. Nous entendons pour la première fois certains des termes que vous employez.

M. Bradford: Entre 1992 et 1993, Honda a lancé en Californie un modèle Civic homologué selon les normes d'émission en vigueur à ce moment-là, qui continue de s'appeler véhicule transitoire peu polluant.

Nous employons assez régulièrement dans l'industrie automobile les acronymes TLEV, LEV, ULEV et ZEV; on parle aussi des véhicules de niveau 1. Je vais tenter de les définir pour vous sans vous expliquer en détail parce que cela vous donnera une bonne idée d'ensemble.

Les véhicules de niveau 1 sont les modèles 1994, 1995 et 1996. Les véhicules TLEV servent à faire la transition aux véhicules peu polluants qui seront obligatoires en Californie à partir de 1998.

Ensuite il y a les ULEV, des véhicules très peu polluants, et les ZEV, des véhicules infiniment peu polluants, à émissions nulles, qui sont, à toutes fins pratiques, des véhicules fonctionnant à l'électricité.

Bref, chacun de ces véhicules se conforme à une norme de plus en plus stricte, le TLEV constituant le premier degré au-delà des modèles de niveau 1 fabriqués en 1994, 1995 et 1996.

Je voudrais dire quelques mots sur la situation actuelle aux États-Unis étant donné la décision judiciaire de vendredi dernier en faveur de l'enregistrement du MMT.

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Nous ne nous attendons pas à ce que le MMT fasse de grandes percées sur le marché américain des antidétonants puisqu'il est interdit en Californie et dans les autres régions qui exigent des essences reformulées. Dans ces régions, où il y a de sérieux problèmes de non-conformité aux normes et de pollution atmosphérique, l'usage de métaux lourds comme antidétonants est interdit. De plus, aux États-Unis, toute une gamme d'indices d'octane est déjà offerte grâce à la disponibilité d'autres substances comme le MTBE, l'ETBE et l'éthanol qui augmentent l'indice d'octane.

Je cède maintenant la parole à M. Brune qui va vous expliquer la recherche que Toyota a effectuée sur le MMT.

M. Edmond Brune (directeur général, Département AA1 de génie mécanique, Centre technique Toyota aux États-Unis): Je m'appelle Ed Brune et je travaille au Centre technique Toyota aux États-Unis. Je vous remercie de me permettre de vous entretenir de ce sujet aujourd'hui.

Je vais vous exposer les résultats d'un programme de tests réalisé au Japon au moment où l'Ethyl Corporation a demandé sa dernière série de dispenses à l'EPA. Ils datent donc d'il y a quelques années. Nous avons présenté ces données à l'EPA dans le cadre de la demande de dispense présentée par Ethyl. Nous les avons présentées aussi à Transports Canada il y a quelque temps déjà, mais nous croyons néanmoins qu'elles sont toujours d'actualité. Selon nous, elles sont tout à fait compatibles avec les données plus anciennes et plus récentes recueillies par l'industrie de l'automobile sur le MMT et c'est pourquoi je veux vous les exposer aujourd'hui.

Au terme du programme, nous avions de sérieuses inquiétudes au sujet du MMT. Les deux principales étaient, premièrement, l'effet du MMT sur la fiabilité à l'usage de nos systèmes antipollution, dont la défectuosité peut vraiment nuire à la qualité de l'air que l'on respire et, deuxièmement, bien entendu, le fait que les garanties nous coûteraient plus cher et que nos clients seraient mécontents si nos systèmes antipollution étaient ainsi abîmés. Voilà ce qui nous préoccupait le plus.

La diapositive suivante décrit sommairement les recherches que nous avons effectuées. Nous avons récupéré au Canada des pièces de voitures qui avaient utilisé de l'essence contenant du MMT, pour faire des tests internes de durabilité. Nous avons également récupéré des pièces aux États-Unis sur des voitures marchant à l'essence sans MMT, pour les comparer aux pièces canadiennes. Nous avons évidemment fait des tests d'émission avec ces composantes en utilisant de l'essence avec et sans MMT.

Le tableau suivant indique les résultats d'une étude réalisée au Japon avec une voiture utilisant une technologie encore assez actuelle chez Toyota. Il s'agit d'une Camry 1990 4 cylindres, mais avec moteur à injection électronique et convertisseur catalytique accouplé directement au moteur afin d'accélérer le réchauffement. La voiture a un catalyseur sous le plancher et un système à O2 avec deux capteurs d'oxygène, un avant le moteur et l'autre après afin de mieux doser le carburant. C'est la technologie qu'utilise Toyota encore aujourd'hui.

Comme vous pouvez le voir sur les graphiques de gauche, nous avons fait parcourir 30 000 milles à une voiture de ce type en employant de l'essence au MMT, puis nous avons changé les pièces avant de lui faire parcourir à nouveau 30 000 milles, mais cette fois avec de l'essence sans MMT. La courbe du haut indique une hausse assez sensible des émissions d'hydrocarbures lorsque c'est l'essence au MMT qui est utilisée. Le graphique du milieu montre une légère augmentation des émissions de monoxyde de carbone avec la même essence.

Chez cette voiture-ci, on n'a pas vraiment relevé d'émission de NOx à cause du MMT. C'est peut-être parce que le système à deux capteurs d'oxygène compense le décalage vers l'enrichissement qui se produit dans le capteur avant et dont Glenn va vous parler.

L'augmentation des émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone nous a vivement inquiétés parce que nos voitures doivent être conçues pour respecter les normes. Nous sommes préoccupés par tout ce qui...

Le président: M. Brune, je regrette de vous interrompre, mais comme je n'ai pas de doctorat en génie mécanique, j'ai besoin d'explications. Je suis peut-être le seul ici à comprendre les données de Toyota, que vous nous avez exposées tout à l'heure, sur les dépôts de Mn sur le catalyseur. Pouvez-vous nous expliquer les deux vecteurs et répéter vos observations? Que veut dire: «Emplacement de l'échantillon dans le catalyseur»? J'essaie de comprendre la signification de vos tableaux.

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M. Brune: Je vous expliquais ce graphique-ci.

Le président: Mais il y a quelques minutes...

M. Brune: Je suis vraiment désolé; il doit y avoir une erreur. J'en suis à ce graphique-ci.

Le président: Mais tout à l'heure, vous nous avez présenté ce tableau.

M. Brune: Non, ce tableau vient après. Dans mon document, il y a encore deux tableaux avant d'arriver à celui-là.

Le président: Dans celui que vous nous avez remis, ce tableau se trouve à la quatrième page après celle-ci.

M. Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le président, ces messieurs et ces dames sont peut-être tous diplômés en génie mécanique, mais ils auraient besoin de discuter de pagination avec leurs secrétaires.

M. Brune: Nous sommes désolés.

Le président: Je m'excuse de vous avoir interrompu. Poursuivez.

M. Brune: Voulez-vous que je reprenne mes explications de ce tableau?

Le président: S'il-vous-plaît.

M. Brune: C'est une étude effectuée par les ingénieurs du Japon sur une Camry 4 cylindres 2 L 1990. Cette voiture est équipée de notre technologie la plus récente: injection électronique, catalyseur à trois voies sous le plancher et catalyseur accouplé au moteur pour un allumage rapide et une diminution des émissions lors des départs à froid. Elle est également munie d'un système à O2 à deux capteurs. Le capteur en aval du moteur corrige la lecture de celui en amont pour améliorer le dosage air-essence.

Nous avons fait parcourir 30 000 milles à cette voiture en faisant le plein à l'essence au MMT, puis nous avons changé le capteur d'oxygène et le catalyseur avant de lui faire parcourir encore 30 000 milles à l'essence sans MMT. Les trois graphiques à gauche indiquent les résultats des tests sur les émissions d'hydrocarbures, de monoxyde de carbone et d'oxydes d'azote.

Comme vous pouvez le constater, il y a eu une nette augmentation des émissions d'hydrocarbures au cours des 30 000 milles; c'est pareil pour les émissions de CO. En ce qui concerne les NOx, que l'essence contienne du MMT ou non, cela revient à peu près au même. Nous croyons que c'est peut-être parce que le système des doubles capteurs d'oxygène permet de compenser le décalage vers l'enrichissement dont certains témoins vous ont parlé ce matin et que Glenn Bryksaw va vous expliquer en détail.

D'après ces résultats, il faut vraiment s'inquiéter de l'incidence du MMT sur les émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone. Quand nous concevons nos voitures, nous devons faire en sorte qu'elles respectent les normes visant ces émissions et aussi celles de NOx. Nous avons beaucoup de mal à accepter une telle hausse de la quantité d'hydrocarbures et de CO émise par nos véhicules à cause du MMT.

Le grand graphique à droite de la page illustre la température du catalyseur à l'allumage. Cela montre la rapidité à laquelle, selon la température, le catalyseur se met à fonctionner efficacement. Le seuil d'efficacité de 0 à 100 est indiqué à gauche et la température, en bas.

On peut voir que le catalyseur se réchauffe plus rapidement quand l'essence ne contient pas de MMT. Cela nous inquiète vraiment parce presque toutes les émissions qu'il reste à supprimer dans les voitures sont celles au départ à froid et nous travaillons très fort à toutes sortes de projets visant à réduire ces émissions, presque les seules qui subsistent.

Nous sommes très inquiets de voir qu'à cause du MMT, le catalyseur atteint plus lentement sa température de fonctionnement. Cela annule tous nos efforts.

Je dois dire que si le MMT agit vraiment comme couche de protection et favorise le fonctionnement du catalyseur, cela ne paraît pas dans le graphique. En fait il l'empêche de se réchauffer aussi rapidement que nous le souhaiterions.

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Nous sommes donc franchement préoccupés par ces constatations. Je pense que ces données sont compatibles avec le rapport de Mercedes dont Adrian a parlé tout à l'heure. C'est vraiment l'un de nos plus grands sujets d'inquiétude.

De plus, outre la température du catalyseur à l'allumage, nous sommes préoccupés par les émissions quand le moteur est arrêté. Au départ à froid, nous nous efforçons de réduire ces émissions tout en amenant le catalyseur à se réchauffer le plus vite possible. Nous avons pris toutes sortes de mesures pour empêcher l'évaporation de l'essence - redessiné la tuyauterie d'admission et la chambre de combustion, installé des dispositifs de refoulement de l'huile. Nous craignons un antidétonant qui reste à 80 p. 100 dans le moteur et qui peut se trouver dans la chambre de combustion, risquant ainsi d'annuler nos efforts en vue de réduire les émissions quand le moteur est arrêté. Cet antidétonant peut certainement contrer nos mesures.

Passons au tableau suivant qui compare les émissions avec et sans MMT. Ces résultats ont été obtenus avec des pièces récupérées aux États-Unis et au Canada. Évidemment, les pièces canadiennes ont subi les effets du MMT mais pas les pièces américaines. Je vous rappelle que ce sont des catalyseurs de Camry 4 cylindres et que ces voitures sont des modèles 1988 à 1990, car nous avions besoin d'automobiles au kilométrage élevé pour recueillir certaines de ces données.

Ces voitures ayant toutes un catalyseur sous le plancher, les résultats s'appliquent à ce type de catalyseur seulement. Vous voyez ici les trois points noirs indiquant les hydrocarbures avec du MMT et...

Le président: Excusez-moi, M. Brune, vous mentionnez une sorte de catalyseur. Pouvez-vous répéter comment vous l'appelez et nous expliquer ce que cela signifie? Je vous rappelle encore une fois que nous ne sommes que de bien humbles députés.

M. Brune: Je vous demande pardon.

On dit d'un catalyseur qu'il est sous le plancher s'il est situé sous le siège avant de la voiture, loin du moteur. Aujourd'hui, nous ne parlons que de ce type de catalyseur. Nombre des catalyseurs utilisés avant l'établissement de normes d'émission très rigoureuses fonctionnaient très bien sous le plancher, mais on étudie maintenant les catalyseurs à couplage direct qui sont branchés tout à côté du moteur afin de se réchauffer rapidement. Il existe donc deux types de catalyseurs: ceux à couplage direct et ceux sous le plancher. Certaines voitures ont même les deux.

Le président: C'est bien. Je vous remercie.

M. Brune: Je le répète, on constate que lorsque le kilométrage est plus élevé, les systèmes ayant fonctionné avec de l'essence additionnée de MMT émettent une plus grande quantité d'hydrocarbures, quand ils sont montés sur une voiture semblable au Japon, que les autres qui n'ont jamais été soumis à du MMT. En fait, nous estimons que les émissions d'hydrocarbures sont supérieures de 37 p. 100 pour les systèmes des voitures utilisant l'essence au MMT. Pour ce qui est du CO - c'est le tableau au milieu - , là encore les émissions sont plus élevées pour les systèmes qui ont utilisés de l'essence au MMT et qui ont accumulés énormément de kilomètres. Il y a corrélation avec les données précédentes. Nous avons estimé à 48 p. 100 cette hausse des émissions de CO.

Chez cette voiture équipée d'un système à un capteur d'O2 et à catalyseur sous le plancher, nous avons constaté que les émissions de NOx étaient inférieures lorsque l'essence contenait du MMT. C'est peut-être à cause du décalage vers l'enrichissement dont vous avez entendu parler.

Donc, il y a augmentation des émissions d'hydrocarbures et de CO chez les systèmes soumis au MMT. Pour cette voiture-ci, il y a eu une certaine diminution des émissions de NO2.

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Ce tableau a uniquement pour but de vous montrer comment les dépôts de manganèse s'accumulent sur le catalyseur. Regardez le petit graphique cylindrique en haut - un, deux, trois, quatre - et vous voyez les endroits où nous avons coupé le catalyseur pour examiner les dépôts. Le graphique indique comment ces dépôts s'étaient accumulés à ces divers endroits.

Cela signifie que le manganèse a tendance à s'accumuler d'abord à l'avant du catalyseur et plus on va vers le fond, plus les dépôts s'amenuisent.

Ces données ont été obtenues avec une Camry 1988 quatre cylindres, deux litres. À l'avant, qui est indiqué par ce petit un ici sur le cylindre, le poids de ce convertisseur en particulier avait augmenté de 3 p. 100 à cause du manganèse. On voit que plus on va vers l'arrière du catalyseur, plus le poids des dépôts diminue.

Comme d'autres l'ont fait avant nous, nous voulons montrer que le manganèse se dépose dans le convertisseur et qu'il a tendance à le faire d'abord à l'entrée. Plus le kilométrage de la voiture augmente, plus les dépôts s'éloignent de l'avant du catalyseur. Dans le cas qui nous occupe, le catalyseur avait un poids supérieur d'environ 3 p. 100 à l'avant.

Le petit graphique en bas porte sur un capteur d'oxygène sur lequel nous avons prélevé des échantillons pour analyse. Or, 28 p. 100 de tous les dépôts échantillonnés étaient formés de manganèse.

Le tableau suivant, celui en couleurs, vous montre seulement une partie d'un catalyseur provenant d'une camionnette canadienne, où l'on aperçoit l'accumulation de manganèse dans ses cellules. Dans la grande image, on voit que le manganèse obstrue en fait certaines des cellules du catalyseur.

Voici un énorme agrandissement de cette partie du catalyseur. On peut voir certaines des cellules complètement bouchées par le manganèse.

Je vais résumer nos constatations. D'après nos tests, le manganèse se dépose effectivement dans le moteur et dans les composantes du système antipollution. Celles-ci étaient recouvertes d'une couche d'oxyde de manganèse. Nos résultats indiquent que le MMT augmente les émissions d'hydrocarbures et de CO dans l'atmosphère. Ces émissions étaient plus élevées pour les systèmes des véhicules canadiens ayant fonctionné à l'essence avec MMT que pour ceux des véhicules américains non soumis au MMT.

Les effets du MMT sur la nouvelle technologie nous inquiètent énormément étant donné les normes d'émission très rigoureuses auxquelles nous devrons nous conformer dans l'avenir. Nous sommes également préoccupés par ces effets sur la fiabilité de certains de nos systèmes actuels et sur la garantie à long terme qui les vise, vu le résultat de nos tests.

Merci beaucoup.

M. Bradford: Je demanderais à Glenn Bryksaw d'exposer les recherches de Honda.

M. Glenn Bryksaw (coordonnateur de la conformité aux normes automobiles, Ingénierie de l'entretien, Division des pièces et de l'entretien, Honda Canada Inc.): Bonjour monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle Glenn Bryksaw et je suis le coordonnateur de la conformité aux normes automobiles chez Honda Canada Inc. à Scarborough. Je vais vous exposer la recherche que Honda a effectuée au sujet des effets du manganèse sur les systèmes antipollution de ses voitures.

Je vais également tenter de vous expliquer sommairement les systèmes d'échappement en espérant que vous comprendrez un peu mieux certaines de nos observations à propos du décalage vers l'enrichissement et du reste.

Je vais commencer par la première diapositive après la page de titre. On peut lire qu'au début de 1994, Honda a constaté que le taux de réclamation pour les capteurs d'oxygène était élevé au Canada. La société a supposé que le MMT en était probablement la cause et a commencé à se concentrer sur les problèmes des systèmes d'échappement au Canada. Tout au long de l'été 1994, Honda a continué à récupérer des échantillons et à faire des analyses pour faire rapport de ses constatations à Transports Canada et Environnement Canada en octobre 1994.

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Le président: Pouvez-vous nous rappeler ce que sont les capteurs d'oxygène?

M. Bryksaw: Certainement. Je vais d'ailleurs tout vous expliquer en détail.

Le capteur d'oxygène constitue le circuit de régulation du système antipollution d'un véhicule. Il permet à l'ordinateur fonctionnel de l'automobile de savoir si le mélange air-essence du moteur est riche ou pauvre et de décider comment compenser selon les diverses conditions de conduite, par exemple quand le conducteur accélère, décélère ou maintient une vitesse constante sur l'autoroute.

Les systèmes actuellement installés dans les modèles 1996 nécessitent deux capteurs d'oxygène. Avant, il y en avait un seul. Le premier sert maintenant surtout à compenser selon les diverses conditions de conduite passagères. Le second sert à surveiller le catalyseur et c'est là que le système diagnostiqueur OBD-II joue son rôle. Le système précédent, OBD I, était doté d'un seul capteur d'oxygène servant d'abord et avant tout à établir le rapport du mélange air-essence.

Nous avons commencé par comparer nos données sur les garanties entre les différentes provinces canadiennes et les États américains du nord dont le climat et le parc automobile sont semblables. Par semblables, j'entends 250 000 véhicules au Canada et 480 000 aux États-Unis. Nous nous sommes donc assurés que le rapport était d'environ deux pour un. En tout cas, l'échantillon était considérable. Après avoir comparé le nombre de réclamations concernant des capteurs d'oxygène selon le kilométrage accumulé, nous avons constaté que le taux de réclamation était bien plus élevé au Canada.

M. Forseth (New Westminster - Burnaby): Excusez-moi. Est-ce que ce que vous dites se rapporte à ce graphique?

M. Bryksaw: Oui.

M. Forseth: Avez-vous les chiffres qui correspondent aux deux vecteurs?

M. Bryksaw: Je suis vraiment navré, mais il s'agit d'informations extrêmement sensibles et très concurrentielles. Nous avons communiqué les chiffres à Transports Canada et à Environnement Canada, mais ils doivent demeurer confidentiels. Je ne suis pas disposé à vous les révéler maintenant.

M. Forseth: C'est bien, poursuivez.

M. Bryksaw: De plus, on constate que le taux de réclamation à tendance à augmenter au Canada, alors qu'il marque un palier aux États-Unis. Il semble que les problèmes survenant une fois la garantie expirée et dont nous n'avons pas connaissance seraient bien plus fréquents au Canada.

Ce tableau s'applique à un modèle très populaire au pays et comme vous le savez, l'axe des y représente le taux de réclamation et l'axe des x, le nombre de kilomètres accumulés au moment soit de la réclamation soit de la réparation par le concessionnaire.

Nous avons remarqué que même si les données varient d'un modèle à l'autre, les tendances observées au Canada et dans le nord des États-Unis suivent cette courbe.

Êtes-vous tous satisfaits des explications pour ce tableau?

Le président: Oui, continuez.

M. Bryksaw: Je vais maintenant tenter de vous donner un cours d'introduction sur les systèmes d'échappement afin de vous faire comprendre la question du décalage vers l'enrichissement. Nous avons analysé des capteurs d'oxygène encore efficaces, installés sur des voitures canadiennes et américaines échantillonnées. Nous avons simplement demandé aux concessionnaires d'appeler des clients au hasard et de leur demander de venir porter leur voiture au garage pour l'examiner afin de s'assurer de la souplesse du moteur et du bon fonctionnement de son système d'échappement. Nous leur avons demandé de remplacer les capteurs d'oxygène de ces autos dans les deux pays et les vieux capteurs ont été envoyés au Japon pour des tests.

Les résultats de ces analyses sont présentés sur ce tableau; c'est une étude comparée du fonctionnement. Sur l'axe des y, le mélange riche est en bas et le mélange pauvre en haut. L'autre axe est celui du kilométrage de la voiture.

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Les O représentent les données concernant les pièces provenant des États-Unis et les X, les données relatives aux pièces canadiennes. Nous avons tracé une droite de meilleur ajustement pour chacune des courbes afin de savoir s'il y avait une différence marquée entre les deux, ce que l'on appelle le décalage vers l'enrichissement.

Je ne veux pas vous embrouiller, mais ce décalage représente ce que l'on appelle «lambda» dans notre jargon. C'est une représentation numérique du rapport air-essence. L'écart entre ces deux droites de meilleur ajustement est de 0,05. Je vous demande de bien retenir ce chiffre parce que je vais m'en servir tout à l'heure pour vous expliquer pourquoi cela nous pose un problème.

M. Forseth: C'est 0,05 de quoi?

M. Bryksaw: Je vais vous expliquer. C'est 0,05 du rapport air-essence. Le rapport optimal air-essence est normalement de 14,7:1; c'est le rapport stoechiométrique, celui où le mélange a une combustion complète parce qu'il est parfaitement équilibré. Ce 0,05 peut être négatif ou positif par rapport à 14,7. Il entraîne un enrichissement, c'est-à-dire une augmentation de la proportion d'essence. Il diminue ce rapport de 14,7:1 d'un facteur de 0,05.

M. Forseth: À 14,2.

M. Bryksaw: Non, à 14,65. C'est une différence importante et je vais continuer mes explications pour vous montrer pourquoi il en est ainsi.

Est-ce que vous avez tous compris ce qu'est un décalage vers l'enrichissement? La performance de chacune de ces pièces a été mesurée.

À la page suivante, il est question des capteurs d'oxygène de Honda. Il y en a deux types conçus différemment. L'un est de style conventionnel et l'autre, un produit breveté de Honda, est un capteur qui a une réaction linéaire. La courbe à gauche sur le graphique que vous voyez ici est la courbe de réponse type d'un capteur d'oxygène avec une chute abrupte de la tension de sortie lorsque le rapport air-essence est optimal.

Vous voyez que la tension en haut, lorsque le mélange est riche, diminue très graduellement aux environs de 0,8 à 0,7 volt. Dès que le rapport optimal est atteint, la tension chute assez vertigineusement à 0,3 et 0,2 volt. Voilà comment les fabricants d'automobiles dosent le mélange air-essence. La réaction du moteur à ce changement abrupt nous permet de déterminer si nous approchons du rapport optimal ou stoechiométrique.

Si l'on arrive à maîtriser cela et à faire en sorte que le capteur d'oxygène passe en une fraction de seconde de 0,7 à 0,3 et de nouveau à 0,7, on sait qu'on en est presque au mélange air-essence optimal.

M. Forseth: Que veut dire stoechiométrique?

M. Bryksaw: Stoechiométrique désigne le rapport optimal, celui auquel la combustion de l'essence est complète.

La courbe de droite représente la technologie conçue par Honda; il s'agit de ce qu'on appelle un capteur air-essence linéaire. Elle est assez différente de l'autre puisqu'elle est formée de deux droites jointes à peu près au milieu. Cela nous permet de régler minutieusement le mélange air-essence. C'est prévu aussi pour notre technologie future. Cela nous permet de rétrécir de plus en plus la fenêtre. Nous ne craignons donc pas trop le plongeon depuis le haut du rapport air-essence optimal jusqu'au bas. Cela nous laisse assez de latitude pour régler encore plus précisément le rapport air-essence.

.1620

M. Forseth: Donc le premier fonctionne presque comme un interrupteur.

M. Bryksaw: C'est exact.

M. Forseth: Pouvez-vous nous le décrire? Est-ce qu'il ressemble à une sonde?

M. Bryksaw: C'est un cristal de zircone qui compare l'oxygène dans les gaz d'échappement à celui dans l'atmosphère. Ce cristal génère une tension. Ce que j'indique ici sur cette courbe, c'est la tension que génère le cristal quand il réagit à l'oxygène se trouvant dans les gaz d'échappement.

M. Forseth: Où se trouve ce capteur?

M. Bryksaw: Cela dépend des modèles de voiture. Il est toujours situé quelque part dans le système d'échappement: soit directement dans le collecteur, soit à l'endroit précis où se trouve la soupape d'échappement, ou un peu en aval de celle-ci ou plus loin encore. S'il s'agit d'un catalyseur sous le plancher, il peut être monté juste avant celui-ci.

De plus, avec la technologie des modèles 1996, celle de niveau I, il y a un deuxième capteur d'oxygène monté à la suite du catalyseur pour vérifier le fonctionnement de celui-ci. C'est donc l'emplacement du catalyseur qui détermine la place du capteur dans le système d'échappement.

M. Forseth: Je vous remercie.

M. Bryksaw: Le tableau suivant montre la courbe de réponse d'un catalyseur à trois voies. La courbe du bas représente le monoxyde de carbone, le CO; celle du centre, à gauche, les hydrocarbures, tandis que celle des NOx se trouve en haut.

Je vous dirai tout d'abord que les normes d'émission sont de plus en plus sévères; c'est pourquoi il faut régler avec le plus de précision possible le rapport air-essence pour arriver à une fenêtre optimale de 0,2 lambda. N'oubliez pas, toutefois, que le décalage dont nous avons parlé plus tôt était de 0,05. Donc, cette fenêtre de 0,2 est celle du rapport air-essence optimal. Cette infime fenêtre au milieu où il est écrit rapport air-essence optimal représente foncièrement 0,2 lambda et c'est ce que nous visons.

À l'intérieur de cette fenêtre, on voit qu'il y a équilibre optimal entre les trois polluants grâce à la neutralisation opérée par le convertisseur catalytique. Voici le sommet pour les trois polluants. Les systèmes sont conçus pour fonctionner ainsi. Le rapport air-essence optimal permet d'améliorer le rendement du catalyseur et tout déplacement à l'extérieur de cette fenêtre optimale nous inquiète énormément.

Remarquez que sur l'axe du bas, on oppose le mélange riche au mélange pauvre, et qu'il y a corrélation entre l'efficacité du catalyseur à gauche et le rapport air-essence en bas. On voit très bien que l'efficacité relativement au monoxyde de carbone chute radicalement quand le mélange est enrichi et qu'elle s'améliore quand il s'appauvrit. Regardez comme la courbe continue de monter du côté où le mélange est pauvre. Le catalyseur est de plus en plus efficace.

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Parallèlement, la courbe des hydrocarbures ne descend pas autant; elle monte elle aussi et se prolonge. Ce n'est pas visible dans le tableau en noir et blanc et je vous en demande pardon. Ces deux lignes se superposent et montent toutes deux vers la droite une fois sorties de la fenêtre du rapport air-essence optimal.

M. Forseth: Plus on va vers la droite où le mélange s'appauvrit graduellement, il est évident que les gaz d'échappement diminuent énormément. Mais il arrive aussi autre chose au moteur dans ce cas-là. Jusqu'où peut-on aller avant que le moteur cale ou cesse de tourner rond?

M. Bryksaw: La souplesse entre aussi en ligne de compte. Quand le rapport air-essence est optimal, le moteur ne pourrait tourner mieux.

On constate plutôt que cela se répercute sur l'autre polluant, en l'occurrence les NOx. Autrement dit, plus le mélange s'appauvrit, plus les émissions de NOx augmentent. Le rapport dépend essentiellement de la température de combustion.

En augmentant cette température, il se produit, lors de la combustion, une série de réactions chimiques qui créent des oxydes d'azote. Si le mélange est enrichi, la combustion se fait à une température plus basse et produit donc moins d'oxydes d'azote, ce qui complique les choses quand la conversion catalytique se fait plus loin en aval.

Le problème comporte deux volets. Il y a corrélation entre, d'une part, les émissions d'hydrocarbures et de CO et, d'autre part, celles des NOx. Les deux types ont des conséquences qui s'excluent l'une l'autre. On ne peut obtenir l'une sans avoir un effet sur les autres.

La diapo suivante porte précisément sur le rapport air-essence 0,2. Je me sers de cette flèche ici pour marquer la fenêtre du rapport optimal qui apparaissait sur le tableau précédent.

Le côté gauche du graphique représente le temps. La moitié du temps, la technologie actuelle réussit à maintenir le rapport dans la fenêtre optimale. C'est ce que montre cette grande courbe basse en cloche ici. Ça, c'est la technologie actuelle, celle que nous avons employée jusqu'à présent. Le problème, c'est que les normes d'émission deviennent extrêmement rigoureuses et nous obligent à une précision accrue.

M. Wappel: La fenêtre optimale, c'est cet objectif que vous avez montré?

M. Bryksaw: Oui.

M. Wappel: Vous dites que 50 p. 100 du temps vous vous situez à l'intérieur de cette petite fourchette?

M. Bryksaw: En effet. Le graphique est censé être une image seulement; ce n'est pas... Ce que j'essaie de vous dire, c'est que le chiffre est exact à l'intérieur de cette fenêtre.

M. Wappel: Ce qui m'étonne, c'est que cette courbe en cloche n'a pas l'air de se situer à l'intérieur de ce petit espace 48,9 p. 100 du temps. On dirait plutôt que c'est un infime pourcentage du temps.

M. Bryksaw: C'est vrai. Disons que ce serait environ 30 p. 100 du temps. Je vous prie de m'excuser si la courbe ne reflète pas fidèlement les chiffres qui, eux, sont exacts. J'essaie simplement de vous montrer ce que nous faisons et de vous donner une idée de ce à quoi la courbe va ressembler et de ce qui advient de ces chiffres là.

M. Wappel: Si je comprends bien, vous dites que, pour le moment, vous arrivez à rester à l'intérieur de la fourchette optimale 50 p. 100 du temps et que vous aimeriez atteindre les 80 à 90 p. 100. Je présume que vous voulez nous amener à la conclusion que ce sera impossible tant qu'il y aura du MMT dans l'essence.

M. Bryksaw: En effet. Vous faites un excellent faire-valoir.

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Avec le capteur air-essence linéaire Honda, on peut conserver un rapport optimal presque 85 p. 100 du temps; nous avons atteint 84,9 p. 100.

C'est maintenant que les choses se compliquent. Cette fenêtre a une largeur de 0,2 lambda d'air-essence. Comme nous avons un décalage de 0,05, nous avons déjà perdu le quart de cette fenêtre. Il arrive que, d'après notre test et les paramètres - en passant, les pièces dont nous nous sommes servies étaient toutes sous garantie - , il y a déjà un problème de temps. Nous attribuons ce décalage du capteur d'oxygène à la couche de manganèse découverte sur les pièces. Cela nous empêche de calibrer notre technologie future et de la maintenir à l'intérieur de la fenêtre comme nous voudrions le faire.

Au départ, on perd le quart de cette fenêtre et on n'y peut rien parce qu'il nous est impossible de prévoir l'épaisseur de la couche de manganèse sur chaque capteur. Comme nous avons du mal à connaître les conditions d'utilisation de chaque auto, nous ne savons pas quel réglage faire. Pour le moment, nous devons nous contenter d'estimer purement et simplement le pourcentage de temps où le système peut se maintenir à l'intérieur de cette fenêtre, en tenant compte de ce décalage de 0,05 dont nous sommes certains; cette proportion serait de 60 à 65 p. 100. C'est une estimation, mais elle est raisonnable étant donné la taille de la fenêtre et ce que nous entrevoyons. Même dans des conditions optimales, notre technologie de demain ne nous permettra pas de nous situer dans cette fenêtre 85 p. 100 du temps.

Le président: Je vais vous demander de mettre un point final à votre exposé afin que les députés puissent poser des questions.

M. Bryksaw: Très bien, je vais conclure.

Pour des voitures de construction identique, le taux de remplacement des capteurs d'oxygène au Canada est sensiblement plus élevé qu'aux États-Unis. Les capteurs canadiens sont recouverts d'une couche d'oxydes de manganèse et présentent un décalage vers l'enrichissement, ce qui ne se retrouve pas chez les capteurs américains. Nous espérons que les nouveaux capteurs perfectionnés permettront une régulation très précise du mélange air-essence. Cette précision est nécessaire si l'on veut se conformer aux normes d'émission de plus en plus rigoureuses, mais un dépôt aléatoire d'oxydes de manganèse est inacceptable tant sur la technologie actuelle que sur celle qui est prévisible.

Je vous remercie.

M. Bradford: Monsieur le président, je vais poursuivre dans la foulée de M. Bryksaw en tentant de simplifier mes observations au maximum. Je me rends bien compte que notre exposé est des plus techniques, mais ce n'est pas gratuit. Nous tentons de vous montrer que nos études ne sont pas anecdotiques, comme certains l'ont prétendu. D'ailleurs, si le MMT réduisait effectivement les gaz d'échappement sans abîmer les systèmes antipollution, les fabricants d'automobiles préconiseraient leur utilisation dans le monde entier.

Il n'est pas du tout étonnant, donc, qu'un expert indépendant retenu d'abord par l'Institut canadien des produits pétroliers, puis par Environnement Canada, ait conclu ainsi:

Par conséquent, nous exigeons que de l'essence sans manganèse soit disponible pour nos modèles 1996 et ceux des années suivantes, quoi que l'environnement bénéficierait de l'usage d'une telle essence par les modèles des années précédentes puisque leurs systèmes antipollution seraient alors plus efficaces. Si c'est impossible, chacun de nous devra réfléchir aux options qu'il lui restera, entre autres rendre inopérants les systèmes antipollution et s'en tenir aux normes d'avant 1996. Mais ce ne sera pas facile étant donné que nous avons tendance à construire nos véhicules pour tout le marché nord-américain. Nous n'aurons pourtant pas le choix parce que nous devons à la fois limiter le coût des garanties que nous offrons et satisfaire les consommateurs. Une telle décision mettrait en péril toute éventuelle amélioration de la qualité de l'air et empêcherait les consommateurs canadiens de bénéficier pleinement de la technologie actuelle et future contre la pollution par les gaz d'échappement.

Sur ce, je termine notre exposé et j'attends vos questions.

Le président: La deuxième page de vos conclusions finit en queue de poisson. C'est voulu ou c'est une erreur?

M. Bradford: Vous voulez parler de la dernière page?

Le président: Oui.

M. Bradford: N'en tenez pas compte. Ce sont des sujets dont je traiterai si quelqu'un les soulève.

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Le président: Bon, comme nous en avons l'habitude au comité, nous allons commencer par l'opposition: M. Forseth suivi de M. Bryden et de M. Wappel.

M. Forseth: Je vais m'attaquer à la documentation de Honda Canada. Je trouve intéressant que vous n'ayez mis aucun chiffre sur le graphique des données concernant les capteurs d'oxygène Honda sous garantie. Sans chiffre ou indication générale, le graphique ne veut plus rien dire.

J'ai sous les yeux le deuxième graphique sur la comparaison du fonctionnement où l'on indique le décalage vers l'enrichissement. Nous devons rechercher une certaine constance, bien entendu. Quand on essaie de regarder une fenêtre, on dirait que les données sur les pièces provenant de voitures ayant roulé à l'essence sans MMT sont très éparpillées, alors que l'usage du MMT donne l'impression d'un fonctionnement plus uniforme qui suit la ligne. On pourrait être tenté de conclure, donc, que l'essence oxygénée réduit le degré de variation. Cela va dans le sens de ce que vous avez constaté.

Vous avez parlé du cristal qui se trouve dans le capteur. Quelle serait la vie utile normale de ces cristaux? Ces capteurs ne peuvent certainement pas être éternels dans un système d'échappement. Il doit y avoir un taux de remplacement connu. Tout d'abord, quelle est la fiabilité prévue pour ces pièces?

M. Bryksaw: Dans les circonstances actuelles et jusqu'à présent, nous garantissons les pièces de nos systèmes d'échappement pendant cinq ans ou 100 000 kilomètres au Canada. Aux États-Unis, l'EPA nous a obligés à améliorer nos garanties qui sont de huit ans ou 130 000 kilomètres. C'est ce que nous offrons... Nous ne voulons absolument pas qu'il y ait de défectuosité pendant cette période, sinon le client sera mécontent. De fait, nous préférons que cela ne se produise jamais.

Les capteurs d'oxygène ne sont pas conçus pour durer un certain temps. Nous avons simplement pris ce qui nous a semblé être un certain taux de défectuosité aléatoire avant expiration de la garantie. C'est Honda qui décide du taux acceptable.

M. Forseth: Est-ce que ces capteurs coûtent très cher ou sont-ils comme des soupapes?

M. Bryksaw: Ce sont des pièces assez chères.

M. Forseth: On s'attendrait à ce que leur remplacement soit recommandé après 60 000, 70 000, 80 000, 100 000 kilomètres, qu'il suffirait de se présenter au garage pour faire enlever les vieux et installer des neufs en quelques minutes.

M. Bryksaw: Non, nous ne recommandons pas leur remplacement. Les systèmes diagnostiqueurs sont capables de déceler les capteurs défectueux. Tant que ceux-ci fonctionnent bien, on ne les remplace pas.

M. Forseth: Je n'ai pas d'autres questions pour le moment.

Le président: M. Bryden.

M. Bryden (Hamilton - Wentworth): Pour faire suite aux observations de mon collègue, je voudrais savoir combien coûte le remplacement de ces pièces qui sont jugées défectueuses.

M. Bryksaw: À l'heure actuelle, le coût moyen d'un capteur d'oxygène Honda courant est de l'ordre de 250 $ au détail. C'est un montant approximatif.

M. Bryden: Quel est le plus polluant de ces trois gaz: le monoxyde de carbone, les hydrocarbures ou les oxydes d'azote?

M. Bryksaw: Je ne crois pas qu'on puisse qualifier l'un de pire que l'autre. On vous a parlé assez longuement ce matin de l'équilibre entre les oxydes d'azote et les hydrocarbures. N'étant pas chimiste de l'atmosphère, je ne saurais vous dire avec précision lequel est «le pire». Ce que je sais, par contre, c'est que l'équilibre entre ces gaz est essentiel si l'on veut éviter la formation de brumée et d'ozone troposphérique. On ne peut pas en éliminer un à la place d'un autre. Comme nous sommes des fabricants, nous devons réduire les trois gaz conformément aux normes que le gouvernement a établies et que nous sommes tenus de respecter. Nous ne pouvons pas nous concentrer sur un ou deux sans nous préoccuper des autres.

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M. Bryden: J'avoue avoir eu l'impression que les NOx étaient des polluants bien plus complexes et qu'ils étaient plus dangereux que les deux autres gaz. Je vous fais remarquer que dans le tableau de Toyota - celui avec les trois ici - on relève une nette amélioration en ce qui concerne les NOx lorsque du MMT est ajouté à l'essence. Je voudrais que vous me disiez tous les trois ce que vous en pensez, car cela milite en faveur de...

Quand je compare ces résultats avec les autres, quand je pense que les oxydes d'azote sont plus polluants que les deux autres, je me demande s'il n'est pas préférable d'ajouter du MMT. Quel est votre avis?

M. Brune: Je ne pense pas que vous puissiez vraiment arriver à une telle conclusion. Si l'antidétonant MMT amène effectivement les capteurs d'oxygène à enrichir le mélange air-essence, comme Glenn en a discuté dans son exposé et comme nous en sommes convaincus par les études que nous avons faites, il est évident qu'un mélange plus riche entraîne une réduction des émissions de NOx, mais en même temps, une augmentation des hydrocarbures et du CO.

Je ne peux donc pas affirmer qu'en ajoutant ce produit pour modifier nos systèmes habituels qui tentent de restreindre les trois... Toute substance qui entraîne un changement nous cause des difficultés.

M. Bryden: Selon moi, le débat sur la richesse ou la pauvreté du mélange est tout à fait théorique. Le tableau qui retient mon attention est celui montrant très clairement que les voitures au Canada qui roulent à l'essence éthylée rejettent bien moins d'oxydes d'azote dans l'atmosphère que les véhicules identiques aux États-Unis qui utilisent de l'essence sans MMT. Je présume que c'est un tableau général comprenant des voitures utilisant des mélanges riches, des mélanges pauvres et d'autres. Est-ce que je m'abuse? N'y a-t-il pas une amélioration quand du MMT est ajouté à l'essence?

M. Brune: Je crois que vous faites erreur en y voyant une amélioration due au MMT.

M. Bryden: C'est vous qui avez produit ce tableau.

M. Brune: C'est bien ce que je dis. C'est une impression fausse parce que le mélange air-essence est plus riche, ce qui aggrave le problème des émissions d'hydrocarbures et de CO, alors que nous devons nous conformer à la norme pour les trois gaz.

M. Bryden: Si ces données sont fausses, alors les autres données indiquant une réduction des émissions d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone - ces deux autres tableaux - sont certainement suspectes elles aussi. Ce que je voudrais savoir, c'est ce que toutes ces données signifient? Si vous prétendez que les données du premier graphique sont fausses, est-ce que celles des deux autres sont correctes ou sont-elles erronées elles aussi?

M. Brune: Cela signifie que l'antidétonant MMT crée un phénomène dans le système qui entraîne un décalage vers l'enrichissement et donc une hausse des émissions d'hydrocarbures et de CO et peut-être une diminution des NOx. Or, pour cette série de données en particulier, cela nous pose un problème à cause de l'effet sur nos systèmes antipollution que nous sommes incapables...

M. Bryden: Je comprends.

Un dernier commentaire si vous le permettez, monsieur le président.

Il faut donc choisir, décider s'il vaut mieux continuer à ajouter du MMT dans l'essence pour diminuer les émissions d'oxydes d'azote même si cela entraîne une hausse de celles d'hydrocarbures et de monoxyde de carbone, ou l'inverse: interdire le MMT, ce qui fera augmenter les émissions d'oxydes d'azote et diminuer les hydrocarbures et le CO. Il faut donc déterminer quels sont les polluants les plus nocifs.

M. Bradford: Si les choses étaient aussi simples, nous ne nous serions pas donnés la peine de vous présenter ce matin un exposé aussi détaillé sur le système diagnostiqueur OBD-II.

M. Bryden: Je me fie aux résultats présentés ici.

M. Bradford: Eh bien! c'est le résultat des études effectuées au début des années 90. On est arrivé à cette conclusion.

.1645

Comme la technologie est de plus en plus perfectionnée avec les systèmes diagnostiqueurs de la deuxième génération, il faut concevoir un véhicule qui répond à des critères très stricts à l'intérieur d'une fourchette fort réduite. Il est impossible de modifier les plans de façon à privilégier un polluant au lieu d'un autre pour obtenir le bon mélange d'oxydes d'azote et d'hydrocarbures dans l'atmosphère.

M. Brune: L'important, c'est que nous arrivions, sans que du MMT soit ajouté à l'essence, à ramener les trois polluants à des niveaux qui...

M. Bryden: Donc ce tableau représente le passé et non l'avenir?

M. Brune: C'est exact.

M. Bradford: Il représente l'avenir au sens où le problème existe toujours, mais il est aggravé par l'existence du système diagnostiqueur de la deuxième génération.

Le président: Merci, M. Bryden.

M. Finlay.

M. Finlay (Oxford): Merci, monsieur le président.

Je prie les témoins de bien vouloir excuser mon retard. Je n'étais pas là au début parce que j'ai vraiment un emploi du temps beaucoup trop chargé aujourd'hui.

Je suis également navré de ne pas avoir été là pour interroger l'Ethyl Corporation au sujet de l'obstruction des cellules du catalyseur, que j'ai pu observer de mes propres yeux - et je remarque qu'il y a aussi, dans votre documentation, la photo d'un catalyseur qui serait obstrué par ce qui serait de l'oxyde de manganèse. L'Ethyl soutiendrait que ce n'est pas de l'oxyde de manganèse.

Mes collègues me disent que je me trompe, mais je sais pertinemment que les représentants de l'Ethyl ont affirmé que ce que je pouvais voir et ce que nous avons tous pu voir n'était pas causé par le MMT. Je pense que cela ne tient pas debout.

Les catalyseurs doivent atteindre une certaine température pour être efficaces, si je ne m'abuse. Vous constatez qu'en ajoutant du MMT à l'essence, le catalyseur met plus longtemps à atteindre la température à laquelle il est le plus efficace. Donc la période à froid est plus longue et il semble que ce soit le moment où le moteur rejette le plus de gaz polluants.

M. Brune: C'est exact.

M. Finlay: À ce sujet, selon vous, ce retard à atteindre la température optimale ferait augmenter de quel pourcentage les gaz d'échappement? De beaucoup?

M. Brune: Je ne crois pas pouvoir en préciser le pourcentage, mais c'est beaucoup. À l'heure actuelle, au moins 80 p. 100 sinon 90 p. 100 des polluants sont émis au moment du démarrage à froid de l'automobile; donc, chaque fois que le réchauffement du catalyseur est retardé, la proportion des gaz d'échappement rejetés dans l'atmosphère augmente sensiblement.

En outre, la courbe des hydrocarbures que nous venons de vous montrer indique que le MMT a un effet négatif sur l'allumage relativement aux NOx et au monoxyde de carbone. Les courbes sont comme ça. Donc, le MMT a un effet indéniable sur les émissions des trois polluants, parce qu'il ralentit le réchauffement du catalyseur, ce qui retarde le moment où celui-ci fonctionne efficacement.

M. Finlay: Merci.

À la page 43 du document que nous avons reçu de l'Association des fabricants internationaux d'automobiles que vous représentez, on trouve une citation dans laquelle l'Ethyl Corporation fait un certain nombre d'affirmations au sujet des avantages à utiliser le MMT pour les raffineurs de pétrole:

Vous dites qu'au mieux, ces réductions potentielles sont toutes hypothétiques; en ce moment, l'essence au Canada a, d'habitude, une teneur benzénique et aromatique plus élevée que l'essence aux États-Unis et ce, malgré l'addition de manganèse.

Comment cela se peut-il? D'une part, vous affirmez que le MMT réduit la teneur en benzène et en hydrocarbures aromatiques et, d'autre part, nous utilisons le benzène et notre essence est plus aromatique.

.1650

M. Bradford: Je suppose que cela a beaucoup à voir avec l'amélioration des carburants aux États-Unis depuis le début des années 90. On ne pouvait pas faire autrement après l'établissement de normes plus sévères. Si je ne m'abuse, les carburants reformulés sont devenus obligatoires aux États-Unis le 1er janvier 1995.

Ces rapides progrès technologiques ne se sont pas répercutés sur les carburants au Canada.

M. Finlay: Peut-être que, chez nous, le droit d'ajouter du MMT à l'essence a retardé la reformulation des carburants qui aurait permis de se débarrasser de ces autres substances.

M. Bradford: C'est plausible.

Le président: Merci, M. Finlay.

M. Waddell.

M. Wappel: Sauf votre respect, monsieur le président, je crois que M. Waddell a été défait aux dernières élections.

Des voix: Oh! oh!

Le président: Je veux dire M. Wappel. Je vous prie de m'excuser.

M. Wappel: Monsieur le président, j'ai des questions à poser à chacun des trois témoins, en commençant par M. Bradford.

À la première page de votre documentation, vous énumérez toutes ces merveilleuses compagnies. J'adorerais posséder l'une de ces voitures. Vous ajoutez presque en passant: «en font aussi partie trois sociétés qui fabriquent des automobiles et des camions pour les trois géants». Quelles sont ces sociétés?

M. Bradford: Ce sont trois sociétés d'importation dites captives. Elles fabriquent des véhicules destinés à être vendus au Canada par les trois géants. Je peux vous les nommer si vous voulez.

M. Wappel: Je vous en prie.

M. Bradford: Ce sont Mitsubishi, Isuzu et Daewoo.

M. Wappel: Daewoo?

M. Bradford: Oui. Je ne suis pas certain qu'elle fabrique quoi que ce soit pour General Motors en ce moment, mais jusqu'à tout récemment, c'est elle qui fabriquait la Pontiac LeMans.

M. Wappel: Cette société est membre de votre association?

M. Bradford: En effet.

M. Wappel: Je présume qu'elle ne doit pas être un membre très actif puisque vous avez du mal à vous rappeler son nom.

M. Bradford: Elle est membre par l'entremise de sa société coréenne et nous n'allons pas souvent en Corée.

M. Wappel: À la page suivante, il est écrit que le MMT a été interdit en Californie. M. Lynam, un vice-président d'Ethyl, nous a dit que cela s'est passé en 1978 pour protéger la santé. Contestez-vous cette déclaration?

M. Bradford: Nous ne nous sommes pas penchés sur les considérations liées à la santé. Sans doute que...

M. Wappel: Niez-vous que le MMT ait été interdit en Californie en 1978 pour des raisons de santé?

M. Bradford: J'ignore les raisons pour lesquelles il a été interdit à l'époque.

M. Wappel: Pourtant, vous avez tenu à nous signaler ce fait dans votre mémoire.

M. Bradford: Oui.

M. Wappel: Vous ne savez pas pourquoi le MMT a été interdit?

M. Bradford: Non. Je sais seulement qu'il l'a été, mais je pourrais me renseigner sans problème.

M. Wappel: Eh bien! je crois qu'on l'a interdit parce qu'il était dangereux pour la santé. Par la suite, on a démontré son innocuité, du moins selon Environnement Canada.

Il y a cinquante États américains. Combien d'entre eux ont expressément interdit le MMT, à part la Californie?

M. Bradford: Seule la Californie l'a expressément interdit.

M. Wappel: Dans le paragraphe au bas de la page, il est indiqué que la garantie des fabricants sur les modèles 1994 et 1995 ne s'applique pas lorsqu'un problème est attribuable à la composition de l'essence au Canada. Les fabricants ont exigé cette restriction pour tenir compte de l'effet du MMT. De qui les fabricants l'ont-ils exigée?

M. Bradford: Dans le cadre des négociations du protocole d'entente, nous avons exigé cette clause parce que nous estimions que l'étude effectuée à la fin des années 80 par l'Office des normes générales du Canada n'avait pas exploré à fond la question du MMT.

M. Wappel: Alors que dit la brochure qui se trouve dans la boîte à gants? Si je regarde la brochure qui se trouve dans la boîte à gants de ma Lamborghini, qu'est-ce que je vais y lire? Que ma garantie pourrait être nulle si je fais le plein avec de l'essence canadienne?

M. Bradford: Je vais demander à ces messieurs de vous répondre parce que chaque compagnie a un libellé qui lui est propre.

M. Wappel: Y a-t-il quelqu'un de Lamborghini ou de Bentley pour répondre à cette importante question?

M. Bradford: Non, Lamborghini a vendu cinq voitures au Canada l'an dernier, je crois, et pas beaucoup d'autres depuis; cela m'étonnerait qu'un représentant se déplace pour venir assister à une réunion ici. Je pourrais peut-être demander à ceux de mes collègues qui sont présents s'ils connaissent la marque qui vous intéresse.

M. Wappel: Je vais vous dire où je veux en venir. J'ai posé la même question à l'Ethyl Corporation parce que j'avais manqué, malheureusement, l'exposé de vos confrères des trois géants. Est-il proposé d'annuler les garanties des automobilistes qui utilisent une essence légale au Canada?

.1655

M. Bradford: Nous avons employé l'expression «application restrictive de la garantie» parce qu'il nous restait encore à prouver, à l'époque, que le problème découvert était effectivement imputable au MMT. Quelques fabricants étaient déjà en mesure de le faire. D'ailleurs, la garantie de l'un d'eux, Mercedes-Benz, est libellée dans des termes très précis. J'en ai même une copie ici.

M. Wappel: C'est une cause rêvée pour un avocat spécialisé en droit de la consommation.

De toute façon, sous la rubrique «Le problème aujourd'hui», vous écrivez: «Les fabricants ont établi les plans des modèles 1996 en prévoyant que le MMT ne serait plus utilisé en septembre 1995».

Vos plans sont préparés quelques années d'avance, n'est-ce pas?

M. Bradford: En effet.

M. Wappel: Donc, il y a quelques années, vous, messieurs - j'entends par là les grands fabricants d'automobiles - avez tout bonnement décidé qu'il n'y aurait plus de MMT dans l'essence en 1996 et vous avez préparé vos plans en conséquence. Vous avez conçu toute votre technologie, fait tous vos essais et recueilli toutes vos données en présumant qu'il n'y aurait plus de MMT. Et maintenant on apprend que le MMT n'a pas disparu en septembre ni en octobre et qu'il serait utile pour l'environnement que ce projet de loi soit adopté à la vapeur.

J'ai l'impression que vous avez arrêté votre position il y a quatre ou cinq ans, quand vous avez décidé que le MMT disparaîtrait de la circulation.

M. Bradford: Les plans sont «établis» à la fin du processus. Il va de soi qu'ils ont été préparés avant.

En vérité, la plupart des fabricants ont établi leurs plans au début de l'année, au moment où il était prévu que le MMT serait interdit. Mme Copps, la ministre de l'Environnement, a annoncé pour la première fois en octobre 1994, si je ne m'abuse, qu'elle allait interdire l'usage du MMT. Les fabricants ont alors présumé que l'interdiction serait en vigueur en septembre 1995 puisqu'ils s'attendaient à ce que cet antidétonant nuise au fonctionnement des systèmes antipollution de pointe qui devaient être installés sur les modèles 1996.

M. Wappel: Dans le dernier paragraphe, vous dites qu'en pratique seuls les fabricants automobiles ont fait des essais avec les systèmes diagnostiqueurs OBD-II actuels. Est-ce exceptionnel? Qui d'autre aurait pu faire des tests?

M. Bradford: Non, ce n'est pas exceptionnel.

M. Wappel: Il m'apparaît évident que ceux qui les fabriquent les mettent à l'épreuve. Pourquoi quelqu'un d'autre voudrait-il les étudier? À moins que l'Ethyl Corporation tente de réfuter vos affirmations selon lesquelles leur produit bousille, si vous me passez l'expression, vos systèmes antipollution.

Comme c'est la seule entreprise à fabriquer ce produit dans le monde entier, à part elle, vous êtes les seuls à avoir intérêt à étudier ces affaires-là. Alors, c'est un truisme, votre déclaration, n'est-ce-pas?

M. Bradford: Vous avez raison, mais comme vous le dites vous-même, Ethyl est une autre société susceptible de faire de telles études. En 1994, dès que les voitures sortaient de l'usine, leur système diagnostiqueur était testé pour déterminer s'il était compatible avec le MMT.

M. Wappel: En passant, monsieur le président, étant donné vos observations antérieures, je retire le mot «bousille» et je le remplace par «détériore».

En dernière analyse, vous concluez que le MMT ne devrait pas faire de grandes percées sur le marché américain. Pourquoi? Quand bien même il serait interdit en Californie, il reste 49 autres États dont celui de New York.

M. Bradford: Mais il est aussi illégal là où seules des essences reformulées peuvent être vendues. Je me suis laissé dire que les régions exigeant des essences reformulées représentent 30 p. 100 du marché américain.

M. Wappel: Qu'est-ce qui constitue une «grande» percée selon vous? Cette pauvre Ethyl Corporation se démène devant les tribunaux américains. Elle se ruine pour commercialiser son produit. Il faut être fou pour dépenser autant en honoraires d'avocat pour un si petit marché.

.1700

M. Bradford: Un grand nombre de raffineurs américains, semble-t-il, se sont déjà engagés à acheter certains antidétonants connus. C'est pourquoi une nouvelle venue sur le marché devra commencer par se faire connaître à l'extérieur de la Californie, là où les essences reformulées ne sont pas obligatoires.

Elle devra aborder en premier les entreprises qui n'utilisent pas déjà les autres antidétonants sur le marché. Une telle forme de croissance sera lente.

M. Wappel: Monsieur le président, puis-je interroger maintenant le représentant de Toyota? Je voudrais lui poser quelques brèves questions sur les diapositives.

Le président: Oui, M. Wappel.

M. Wappel: Merci.

Une seule question sur la page intitulée: «Effet du MMT sur les gaz d'échappement et les catalyseurs». Quelle est l'échelle temps du graphique à droite qui donne la température à l'entrée?

M. Brune: Je ne suis pas certain. Je ne saurais dire.

M. Wappel: C'est en minutes, en secondes, en microsecondes?

M. Brune: Je suis certain que c'est en secondes.

M. Wappel: En secondes. Il y a donc des microsecondes ou des secondes de différence entre les deux essences pour augmenter... Si j'ai bien compris vos propos, le catalyseur se réchauffe plus rapidement. C'est bien cela?

M. Brune: Oui.

M. Wappel: Il se réchauffe plus rapidement quand il n'y a pas de MMT dans l'essence.

M. Brune: C'est exact.

M. Wappel: Je veux quantifier cet écart. Est-ce une différence de quelques microsecondes, de microsecondes ou de simples secondes?

M. Brune: Pour ce qui est de la température d'allumage, nous tentons de faire en sorte que le réchauffement soit le plus rapide possible parce que tous les gaz actuellement rejetés dans l'atmosphère le sont au moment d'un départ à froid. C'est pourquoi tout ce qui retarde le moindrement l'allumage du catalyseur nous inquiète énormément. Que ce soit une question de secondes, de microsecondes ou de minutes, nous estimons qu'il y a un problème.

M. Wappel: Je comprends parfaitement. Je voulais seulement savoir si c'était calculé en microsecondes, en microsecondes ou en minutes.

M. Brune: C'est probablement une question de secondes; cela pourrait aller jusqu'à une minute. C'est de cet ordre. Cela dépend de l'emplacement du catalyseur. S'il se trouve près du collecteur d'échappement, il va se réchauffer beaucoup plus vite; s'il est plus loin, ce sera plus long.

M. Wappel: Passons à votre graphique sur les dépôts de manganèse sur le catalyseur. Le kilométrage est de quel ordre?

M. Brune: C'était une Camry qui avait accumulé beaucoup de kilomètres. Certaines des pièces ont été récupérées au Canada. C'était probablement 100 000 kilomètres.

M. Wappel: Est-ce que dans la partie un, là où les dépôts sont les plus importants, le manganèse s'est accumulé avec le temps ou tout d'un coup au début?

M. Brune: Nous pensons que c'est une accumulation graduelle avec le temps. Au début, c'est à l'entrée du catalyseur que c'est le pire, mais plus le kilométrage augmente, plus les dépôts se déplacent vers le fond.

M. Wappel: Je ne suis pas ingénieur, mais je vais chez Speedy Muffler de temps en temps. Quand on remplace le silencieux, est-ce que l'on remplace en même temps cette affaire-là? Est-ce que c'est une pièce différente? De quelle pièce est-ce que je parle?

M. Brune: Ce n'est pas cette pièce.

M. Wappel: S'agit-il du convertisseur catalytique? Il y a deux morceaux sous le plancher, si je peux m'exprimer ainsi. Il y a le long tuyau arrière - je présume que c'est le silencieux - et il y a une autre affaire plus courte qui se trouve en-dessous et vers l'avant de la voiture. Qu'est-ce que c'est?

M. Brune: Le silencieux à résonance.

M. Wappel: Le silencieux à résonance. Donc, ce n'est ni l'un ni l'autre.

M. Brune: Non.

M. Wappel: À quelle fréquence faut-il normalement remplacer le catalyseur?

M. Brune: Nous espérons que vous n'aurez jamais à le faire.

M. Wappel: C'est parfait. Je ne saurais même pas...

Le président: La prochaine fois que vous irez faire réparer votre silencieux, posez la question et vérifiez la réponse. Avez-vous d'autres questions?

M. Wappel: Encore une.

Le président: Alors je note votre nom pour le second tour.

M. Wappel: C'est très bien.

Le président: M. Chatters, c'est votre tour.

M. Chatters (Athabasca): Merci, monsieur le président.

Il me semble vous avoir entendu dire - et Ford a dit la même chose ce matin - que l'industrie de l'automobile continuera à faire d'immenses progrès dans la lutte contre la pollution atmosphérique due aux véhicules, uniquement si les fabricants d'automobiles coopèrent étroitement avec les fabricants d'essence. D'après ce qu'on a pu entendre, c'est effectivement essentiel.

.1705

Par conséquent, je me demande pourquoi, au lieu de collaborer, de coopérer avec les fabricants d'essence, les fabricants d'automobiles ont préféré coopérer entre eux, se concerter avec leurs concurrents pour exercer d'intenses pressions politiques en vue d'obtenir le type d'essence qu'ils souhaitent. Pourquoi ne pas avoir travaillé avec les fabricants d'essence pour arriver au même résultat? C'est pourtant la seule façon de parvenir à vos fins dans l'intérêt de la qualité de l'air, de vos clients et de tous les intéressés. Il me semble que ce serait une meilleure méthode. Pourquoi lui en avez-vous préféré une autre?

M. Bradford: Je crois qu'il faut remonter plusieurs années en arrière. J'en parle dans la documentation. En 1991, nous avons su que Transports Canada allait de nouveau étudier le MMT parce qu'il avait l'intention de rendre les normes d'émission plus sévères au milieu des années 90, probablement pour faire comme les États-Unis.

En 1993, le gouvernement fédéral a formé un groupe de travail mixte industrie-gouvernement regroupant deux parties: l'industrie pétrolière et l'industrie automobile. Nous avons commencé à discuter du MMT. De fait, c'était le premier point à l'ordre du jour.

Une année plus tard, nous avons produit un document. Je crois qu'on vous l'a lu ce matin. C'était une déclaration conjointe sur l'harmonisation. Nous avons cru suffisant que les pétrolières reconnaissent les effets du MMT.

Malheureusement, les choses ont tourné autrement. Nous sommes maintenant en 1995 et les modèles qui sortent sont munis d'une technologie de pointe incompatible avec les carburants sur le marché. Nous n'avons donc d'autre choix que de demander au gouvernement fédéral de réglementer le MMT.

Nous négocions tout cela depuis si longtemps maintenant; nous savons que nous sommes dans une impasse dont nous ne pourrons sortir à temps.

M. Chatters: Mais j'ai entendu ce matin - et je l'avais déjà entendu avant - que les raffineurs et l'Ethyl Corporation étaient disposés à participer à des études conjointes et coopératives, puis à en accepter les résultats. Selon eux, c'est vous qui avez refusé de le faire. Vous avez préféré opter pour la filière politique et demander au gouvernement de légiférer pour imposer votre position aux raffineurs. Voilà qui augure mal pour la coopération entre les deux industries à l'avenir.

M. Bradford: Nous avons tenté de régler le problème par la coopération tout au long de 1993 et 1994, mais en vain. Nous sommes maintenant acculés au mur.

M. Chatters: D'après les témoignages que j'ai entendus, je pense que ces efforts ont été vains parce que vous n'étiez pas disposés à collaborer à ces études indépendantes et coopératives. Mais je me trompe peut-être.

Avant d'aller plus loin, je vais passer à une autre question.

M. Bradford: Nous avons fait des études à la fin des années 80 dans le cadre de l'examen de l'Office des normes générales du Canada. Toyota a réalisé d'autres études en 1990 et Honda en a effectué une en 1994. Nous croyons avoir déjà présenté suffisamment d'informations pour montrer que le MMT a une incidence sur les systèmes antipollution. Toute nouvelle étude serait superflue étant donné qu'il est question d'établir des normes d'émission encore plus rigoureuses.

M. Chatters: Pourquoi n'avez-vous pas effectué ces études conjointes en coopération avec l'industrie pétrolière? Pourquoi avez-vous préféré faire les vôtres propres et les présenter comme si c'était parole d'évangile au lieu de les réaliser en collaboration avec les raffineurs et les producteurs d'additifs?

M. Bradford: Parce que nous avons cru qu'Environnement Canada s'en occuperait en temps opportun.

M. Chatters: Toujours la filière politique.

M. Bradford: Un groupe de travail mixte formé de représentants de l'industrie et du gouvernement avait été créé en 1993 pour étudier précisément cette question.

.1710

M. Chatters: Voici ma question suivante. Vous avez mentionné à plusieurs reprises qu'une vaste gamme d'indices d'octane était offerte aux États-Unis et que pour cette raison, le MMT aurait du mal à pénétrer le marché américain. Pourtant, les raffineurs nous ont affirmé que, si le MMT était interdit, il serait remplacé par d'autres antidétonants. Autrement dit, on utilisera un procédé de raffinage plus rigoureux pour augmenter l'indice d'octane des carburants, ce qui créera d'autres problèmes.

Pourquoi les raffineries américaines ont-elles choisi d'utiliser ces autres additifs plutôt que le procédé privilégié par les raffineurs canadiens si le MMT est interdit?

M. Bradford: Je crois que c'est le procédé qu'utilisent déjà les raffineurs américains.

M. Chatters: Vous en êtes certain?

M. Bradford: C'est l'un des procédés qu'ils utilisent, mais il y en a d'autres. D'autres additifs sont disponibles aux États-Unis, entre autres le MTBE...

M. Chatters: Mais ils coûtent plus cher qu'un raffinage plus poussé. C'est du moins ce que nous avons cru comprendre.

M. Brune: Je crois que le prix de l'essence reformulée n'a pas augmenté de plus de un ou deux cents le gallon aux États-Unis après que l'EPA ait établi les nouvelles normes pour le carburant. Je suis certain que l'analyse effectuée par l'EPA a montré que les avantages du carburant reformulé pour la qualité de l'air faisaient largement contrepoids à la légère hausse du prix de l'essence.

Dans les régions des États-Unis qui ne sont pas conformes aux normes, l'essence reformulée est obligatoire et il est interdit d'y ajouter quelque métal lourd que ce soit. Comme ces régions sont très densément peuplées et donc fort polluées, c'est là qu'il se vendra le plus d'essence.

J'ai l'impression que l'EPA avait l'intention de vendre vraiment beaucoup d'essence reformulée dont les émissions polluantes sont réduites et qui ne renferme aucun métal lourd. L'EPA a également prévu que les autres régions opteraient pour ce carburant. Selon moi, elle espérait que d'autres régions fassent ce choix pour atténuer la pollution atmosphérique. Dans son analyse, elle était profondément convaincue qu'il se vendrait très peu de carburant conventionnel. Le carburant conventionnel, c'est celui dans lequel on peut maintenant mettre du MMT grâce à une dispense.

Les avantages de l'essence reformulée pour la qualité de l'air...

M. Chatters: Je ne le nie pas. Ce que je voulais dire, c'est que si le MMT est interdit et que les raffineurs sont obligés de trouver d'autres solutions pour obtenir le même indice d'octane, ils vont retenir celle qui coûte le moins cher, à moins qu'une loi le leur interdise. Au Canada, on nous dit que le raffinage sera plus poussé et vous affirmez que certains raffineurs américains utilisent aussi ce procédé. C'est là que je voulais en venir.

M. Bradford: Mais il y a d'autres moyens...

M. Chatters: Plus chers, oui.

M. Bradford: Je ne sais pas s'ils sont vraiment plus chers.

M. Chatters: Les raffineurs nous ont dit qu'ils l'étaient. Je me fie à ce que l'on m'a dit.

Le président: Avant de terminer ce premier tour, je voudrais poser deux questions. Ce lambda, le rapport air-essence, m'intrigue. Selon votre tableau, le 0,2 lambda sera atteint 84,9 p. 100 du temps un peu plus tard. Quand?

M. Bryksaw: La Honda Motor Company a annoncé qu'elle avait l'intention de munir son véhicule très peu polluant de cette technologie en 1998; c'est une Accord qui sera vendue en Californie. Elle sera équipée de cette technologie conforme aux normes d'émission minimales, sensiblement inférieures à celles actuellement en vigueur au Canada et dans le reste des États-Unis. C'est notre technologie de l'avenir. C'est la première voiture à essence dont on a annoncé qu'elle sera conforme aux normes d'émission minimales.

Le président: Sera-t-il exact alors de dire que le lambda sera de 0,2 tout le temps?

M. Bryksaw: Nous espérons que cette technologie de l'avenir permettra d'atteindre ce rapport au moins 85 p. 100 du temps.

Le président: Comme l'indique votre tableau?

M. Bryksaw: Effectivement.

.1715

Le président: Mon autre question se rapporte à l'observation générale suivante. Tandis que nous recherchons continuellement, assidûment et avec persistance une solution technologique pour réduire les émissions des divers gaz composant le nuage chimique que rejettent les voitures, le nombre de véhicules sur nos routes augmente chaque année, parallèlement à l'accroissement de la population.

Dans votre boule de cristal, voyez-vous arriver le moment où la technologie sera suffisamment avancée pour que la pollution diminue considérablement jusqu'à disparaître, malgré l'augmentation du nombre de véhicules sur les routes?

M. Bryksaw: Vous adressez-vous à moi?

Le président: À vous tous. Quelles sont vos attentes à long terme?

M. Bradford: Si vous voulez voir très loin dans le siècle prochain, il nous est difficile de vous répondre car nous ne disposons pas des chiffres nécessaires. Nous pouvons toutefois vous affirmer que nos prévisions vont jusqu'en 2001, l'année où sortiront vraisemblablement les véhicules peu polluants. Ils seront obligatoires aux États-Unis en 2004 de toute façon. Ces véhicules seront sensiblement moins polluants que les modèles 1994 à 1996.

Vous n'êtes pas sans savoir que la Californie a réclamé avec beaucoup plus d'insistance que le reste des États-Unis non seulement des véhicules peu polluants, mais aussi des véhicules très peu polluants et éventuellement des véhicules à émissions nulles.

Le président: Vous voulez dire que même si l'on brûlera des carburants fossiles, la technologie sera suffisamment évoluée pour empêcher toute pollution. C'est faisable?

M. Bradford: Ce sera peut-être vrai au milieu du prochain siècle. Bien des fabricants représentés ici sont en train de mettre au point des prototypes qui marcheront à l'électricité. Je crois que Mazda a un véhicule qui fonctionne à l'hydrogène, mais le jour de leur mise en marché est encore loin.

Le président: Vous envisagez donc des carburants différents, autres que des carburants fossiles? C'est bien cela?

M. Bradford: Je crois qu'à long terme, il faudra passer à d'autres types de carburants en effet.

Le président: Très bien. Je vous remercie.

M. Forseth, un deuxième tour.

M. Forseth: Je voulais des précisions au sujet de ce tableau «B) Données de Toyota: Étude comparée des émissions pour l'essence avec et sans MMT». Il y a trois graphiques. C'est au sujet de celui sur les NOx au bas de la page. Je voudrais savoir qui a fait cette étude et avec quels instruments. A-t-on mesuré ce que vous appelez les émissions avec moteur arrêté? Je veux connaître les paramètres de l'analyse, savoir ce que cela représente, comment on a obtenu ces résultats et qui a fait l'étude.

M. Brune: Eh bien! la Toyota Motor Company du Japon, qui est chargé pour le moment de la conception et de la mise au point de nos systèmes antipollution, voulait connaître les effets du MMT sur nos systèmes. Elle a donc demandé au personnel du service de l'entretien chez TMS Canada et TMS USA de récupérer les capteurs d'oxygène des catalyseurs de voitures ayant atteint divers kilométrages donnés.

Ces pièces ont été expédiées au Japon et installées là-bas sur une voiture du même type que celle sur laquelle elles avaient été prélevées aux États-Unis ou au Canada, la Camry 4 cylindres. Ces pièces ont toutes été testées sur le même type de voiture au Japon. Les graphiques indiquent les résultats obtenus sur cette voiture avec les diverses pièces récupérées aux États-Unis et au Canada.

M. Forseth: Savez-vous de quel dispositif on s'est servi pour mesurer les émissions?

.1720

M. Brune: On a suivi la procédure normale de l'EPA avec échantillonnage à volume constant et le matériel d'homologation habituel. C'est le cycle LA 4.

M. Forseth: Et l'appareil de mesure même, quel était-il?

M. Brune: On a employé la spectrométrie d'absorption non dispersive dans l'infrarouge pour le monoxyde de carbone, le DIF pour les hydrocarbures et la chimiluminescence pour les NOx. Ce sont les tests couramment utilisés pour homologuer les voitures. On installe la voiture sur un dynamomètre Clayton et...

M. Forseth: C'est bien.

M. Brune: C'est le test de base dont tout le monde se sert.

M. Forseth: Est-ce que l'EPA aux États-Unis trouve concluantes ces données de Toyota et Honda?

M. Brune: Comme je l'ai précisé au début, nous avons présenté ces constatations à l'EPA qui a manifesté certaines inquiétudes et nous les avons produites lors de l'audition de la première demande de dispense présentée par Ethyl. Je suis certain que l'EPA a examiné ces résultats comme tous les autres qui se trouvent là-dedans, mais on sait maintenant qu'Ethyl a réussi à faire approuver sa dispense.

J'ignore quelle importance a été accordée à ces données par rapport à toutes les autres qui ont été soumises. Nous les avons présentées à l'EPA et en avons discuté avec elle. Nous lui avons fait part de nos préoccupations.

M. Forseth: Si l'EPA n'a pas prêté foi à ces constatations au moment de statuer sur la demande de dispense, je me demande pourquoi nous, nous devrions le faire.

M. Brune: En fait, nous craignons que l'EPA ait été prisonnière de certaines règles et de certains règlements plutôt désuets de la procédure de dispense. Lorsque les normes autorisaient des émissions assez élevées, on ne s'en faisait pas si le monde voulait mettre dans l'essence des additifs qui faisaient augmenter les gaz d'échappement, parce que la marge de manoeuvre était plus que suffisante.

Mais comme les normes sont de plus en plus rigoureuses, nous sommes obligés de concevoir une voiture dont les performances sont en-deçà de ce qui est exigé. C'est trop risqué de viser un résultat trop proche de la norme pour toutes sortes de raisons, entre autres les variations de production. Notre marge de sécurité se rétrécit comme peau de chagrin.

Les normes étant ce qu'elles sont maintenant, tout additif qui augmente les émissions gazeuses rend notre tâche extrêmement difficile parce qu'il annule notre marge de sécurité. C'est pour les voitures sur les routes que ce sera compliqué.

Je crois que dans la première dispense, l'EPA a précisé qu'elle ne s'appliquait pas aux autos qui excéderaient les normes avec de l'essence au MMT. Nos voitures sont conçues pour ne pas dépasser la moitié de la norme, sans MMT, parce que nous avons besoin d'une marge de sécurité. Il est évident que le MMT augmente les émissions de nos autos, mais nous ne pouvons pas être certains que toutes nos voitures vont dépasser la norme si elles fonctionnent à l'essence au MMT.

L'EPA s'est placée dans une situation telle que la dispense pouvait être refusée uniquement si aucun des véhicules n'est conforme à la norme. Personnellement, je trouve que ce n'est pas très logique, mais c'est ce que l'EPA a décidé.

M. Forseth: Vous êtes en train de donner tous les arguments en faveur de la conception d'un capteur de MMT.

M. Brune: Je ne vois pas comment ce serait réalisable. Je suppose que le catalyseur sert de capteur de MMT...

Des voix: Oh! oh!

M. Forseth: Ou alors il faudrait un convertisseur catalytique secondaire ou plus long.

M. Bradford: Ce matin, nous avons entendu un exposé sur le fait que le manganèse sous diverses formes passe tout droit dans le moteur. On ne peut pas dessiner en ce moment un moteur et un système d'échappement qui retiendraient le manganèse.

M. Forseth: On nous a dit que le système en récupère 80 p. 100.

M. Bradford: C'est bien cela le problème.

Le président: M. Finlay a sans doute une autre question à poser. Après lui, ce sera M. Wappel.

M. Finlay: Monsieur le président, ma question porte sur le pourcentage relatif ou la quantité relative de CO2, de CO, de NOx et de HC dans les émissions d'une automobile dont le moteur est bien réglé.

.1725

Je sais que c'est le pourcentage de CO2 qui est le plus élevé, suivi du CO, les NOx et les hydrocarbures venant ensuite dans une proportion à peu près équivalente. C'est du moins ce que je comprends des graphiques que j'ai sous les yeux, mais ils n'indiquent pas le CO2 ni le CO. Est-ce que je fais erreur?

M. Bryksaw: Pour vous donner une idée de l'ordre de grandeur, sachez que les trois principaux polluants - les hydrocarbures, le CO et les NOx - sont tous réglementés aujourd'hui en grammes au mille et en fraction de gramme au mille.

Les données que nous fournissons au gouvernement en vue de l'homologation contiennent des renseignements sur le CO2 dont la quantité varie d'une auto à l'autre. Cette quantité est de l'ordre de centaines de grammes au mille, en moyenne de 200 à 300 grammes au mille.

M. Finlay: De quoi?

M. Bryksaw: De CO2. Cela vous donne une idée de la quantité.

C'est différent pour chaque véhicule. Je vous donne une simple estimation bien approximative de la quantité.

M. Finlay: C'est ce que je veux savoir.

M. Bryksaw: D'accord. Vous vous êtes informé au sujet du CO2. Je suppose que sa quantité est 400 fois supérieure à celle de tous les autres polluants conjugués. Le CO2 est le produit d'une combustion complète.

M. Finlay: En effet.

M. Bryksaw: C'est ce que l'on tente d'obtenir quand on brûle un carburant fossile.

M. Finlay: Est-ce que l'ordre de grandeur est le même pour les trois autres?

M. Bryksaw: Non, ils se calculent tous en fractions de gramme au mille. Tous les véhicules doivent être conformes aux mêmes normes, mais les chiffres sont différents pour chacun, puisqu'ils varient selon la configuration de la voiture, le dégagement à la tête et tout le reste.

La quantité effectivement émise serait sûrement de l'ordre de moins de un gramme au mille pour les trois polluants. Pour les hydrocarbures, c'est 0,41 tendant vers 0,25 grammes le mille. C'est un peu plus pour les NOx mais tout de même moins de un gramme le mille.

M. Wappel: J'ai deux questions qui s'adressent à M. Bryksaw.

J'ai aimé votre exposé. Il était fort intéressant. J'ai été impressionné.

M. Bryksaw: Je vous remercie.

M. Wappel: Malheureusement, il faut en arriver à une conclusion irréfutable pour que tout ceci ait un sens. Je veux donc vous poser une question.

Mais auparavant, je remarque que sur la diapositive «Les capteurs d'oxygène Honda» où aucun chiffre n'apparaît, probablement à cause de la concurrence, il n'y a aucun X près de l'axe des y. Pourquoi?

M. Bryksaw: Parce qu'on a retenu une plus grande proportion de pièces parmi l'échantillon de véhicules choisis aux États-Unis que parmi ceux choisis au Canada.

Nous avions demandé aux concessionnaires de nous fournir ce que l'on appelle un échantillon aléatoire. Ils devaient communiquer avec leurs clients, s'assurer que les capteurs d'oxygène ne causaient aucune difficulté à leur connaissance et vérifier les systèmes diagnostiqueurs pour découvrir si certains codes étaient établis.

Nous les avons chargés de remplacer les pièces, mais en leur laissant le choix; or, nous avons reçu des États-Unis des pièces provenant de voitures ayant moins de kilométrage que les échantillons canadiens.

M. Wappel: N'aviez-vous pas la curiosité de savoir si des pièces canadiennes avec un kilométrage inférieur auraient été comparables à des pièces américaines équivalentes?

.1730

M. Bryksaw: Certainement. Je vous ai dit qu'il a fallu beaucoup de temps pour arriver à ces résultats. Ce que nous vous présentons est le fruit d'une étude qui a duré près de six mois. La collecte des données, leur analyse prend un certain temps. Il aurait été impossible de faire plus vite. L'expédition des pièces au Japon où se trouvent les installations de R-D n'est pas simple. Les tests sont faits là-bas. Nous avions des échéances précises parce que nous voulions soumettre ces informations à Transports Canada et à Environnement Canada afin que les deux ministères puissent apprécier eux-mêmes la validité des données avant de s'en servir.

M. Wappel: Et la diapositive «Les conclusions de Honda».

M. Bryksaw: Oui.

M. Wappel: J'y vois trois préoccupations et trois constatations, mais aucune conclusion. Je vous pose donc la question suivante.

Le taux de remplacement des capteurs d'oxygène est beaucoup plus élevé au Canada que dans le nord des États-Unis pour des voitures de construction identique. Selon Honda, est-ce dû exclusivement à la présence de MMT dans l'essence au Canada? Répondez par oui ou par non.

M. Bryksaw: Oui, nous croyons effectivement que le MMT a une incidence marquée sur le taux de remplacement des capteurs d'oxygène.

M. Wappel: Vous concluez que c'est à cause du MMT que renferme l'essence au Canada?

M. Bryksaw: Nous croyons que c'est un facteur, mais il y en a d'autres, puisque aux États-Unis aussi il faut remplacer des capteurs d'oxygène. Mais le taux de remplacement est sensiblement plus élevé au Canada et nous estimons...

M. Wappel: Voilà où je veux en venir. Le taux nettement plus élevé au Canada est-il imputable uniquement au MMT?

M. Bryksaw: Nous le pensons.

M. Wappel: Bien. Les capteurs d'oxygène au Canada sont couverts d'oxyde de manganèse. C'est uniquement à cause du MMT?

M. Bryksaw: C'est exact. Nous savons...

M. Wappel: On constate chez les capteurs d'oxygène au Canada un décalage vers l'enrichissement qui n'est pas observé chez les capteurs aux États-Unis. Est-ce uniquement à cause du MMT?

M. Bryksaw: Nous le croyons.

M. Wappel: Très bien. Voilà donc vos conclusions à l'égard du MMT.

M. Bryksaw: Nous nous contentons de vous présenter les faits et ce sont effectivement les conclusions de notre étude.

M. Wappel: Merci beaucoup.

Le président: Merci.

M. Chatters, c'est votre tour.

M. Chatters: Vous laissez entendre que vous avez opté pour la filière politique, si l'on veut, au lieu de régler l'affaire en coopération avec les raffineurs, parce que la ministre s'est publiquement engagée en 1994 à interdire l'addition de MMT à l'essence. Si la ministre n'avait pas pris un tel engagement, auriez-vous...? Comme il était urgent de régler le problème parce que les systèmes OBD II arrivaient sur le marché, auriez-vous réussi à vous entendre avec les raffineurs si la ministre n'avait pas pris cet engagement?

Le président: À la Chambre des communes, votre question serait jugée irrecevable parce que hypothétique. Voyons voir ce que les témoins vont répondre.

M. Bryksaw: Comme vous le dites vous-même, c'est une question bien hypothétique. Je vous assure que nous avons discuté en toute bonne foi avec l'ICPP au groupe de travail mixte industrie-gouvernement sur les véhicules et les carburants. Nous voulions que les discussions aboutissent à une entente sur des formulations d'essences qui nous paraissaient compatibles avec les modèles de l'avenir. Dans les ententes qui ont découlé du groupe de travail, il y avait un énoncé de position sur l'harmonisation que toutes les parties - l'ICPP, l'AIAMC et l'AFVM - ont approuvé et ratifié.

Nous avons cru que cette entente sur l'harmonisation traitant expressément de la qualité de l'essence et de son incidence sur les systèmes d'échappement était énoncée très clairement dans le document que l'ICPP a approuvé, surtout étant donné l'approche systémique. Dans le cours de nos discussions avec les pétrolières, nous ne nous sommes pas entendus sur les preuves à apporter relativement aux ennuis causés par le MMT.

.1735

Personnellement, je ne vois vraiment pas ce que nous aurions pu leur dire pour les convaincre que le problème était bien réel. Nous estimions disposer de toutes les preuves; nous en avons discuté avec elles, et même si l'un de leurs experts a fait savoir qu'il croyait à nos constatations, elles ont préféré les écarter.

M. Chatters: Il n'y a pas que les membres de l'ICPP que vous n'avez pas réussi à convaincre; ce sont tous les organismes externes ayant participé au débat, y compris les tribunaux américains selon lesquels vous ne seriez pas arrivés à prouver indubitablement que le MMT nuit au fonctionnement des systèmes diagnostiqueurs.

Je peux le comprendre, puisque les députés d'en face ont tiré une conclusion erronée d'un de vos tableaux. On nous a montré ce matin des photos d'une bougie d'allumage qui étaient censées nous convaincre que les dépôts de manganèse sur celle-ci causaient des ennuis; or, les deux photos ne montraient pas la même bougie.

Les profanes comme nous doutent sérieusement de vos preuves et les décisions judiciaires reflètent ces doutes. Les représentants de l'ICPP ne sont donc pas les seuls sceptiques, il y en a bien d'autres.

M. Bryksaw: Moi-même, je suis mal placé pour parler de ce qui se passe aux États-Unis. Il faudrait que je pose ces questions à mes collègues américains.

Nous sommes convaincus que nos constatations sont probantes, que notre cause est bien fondée, que nous comprenons ce qui se passe, et nous sommes très inquiets de ce que nous réserve l'avenir. Nous sommes franchement et sincèrement préoccupés. Quand bien même vous ne partageriez pas notre avis, nous n'en démordrons pas.

M. Chatters: Je vous crois quand vous dites que vous êtes franchement préoccupés. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi vous n'avez pas rencontré les raffineurs pour vous entendre sans...

M. Bryksaw: Nous avons bien essayé, mais ils ne voulaient pas...

M. Chatters: Eux affirment que vous ne l'avez pas fait.

M. Bradford: Nous avons essayé de le faire en 1993 et même en 1990 déjà. Quant aux discussions, toute la correspondance entre les deux industries emplirait la salle. Malheureusement, nous n'avons jamais réussi à amener l'autre partie jusqu'à la table de négociation.

Nous n'avons pu obtenir rien d'autre qu'un protocole d'entente sur l'harmonisation des normes. Jamais elle n'a accepté de reconnaître que le MMT faisait problème.

M. Chatters: Il me semble pourtant qu'une simple étude conjointe et coopérative, ou encore une analyse par une organisation indépendante, aurait suffi pour que vous atteigniez vos objectifs.

M. Bradford: Si on l'avait fait au début des années 90, on aurait pu régler ces problèmes plus amicalement.

Aujourd'hui, en 1995, on se retrouve avec des systèmes diagnostiqueurs de la deuxième génération qui fonctionnent bien uniquement avec de l'essence sans MMT. On a un peu parlé des systèmes OBD II ce matin, mais j'insiste sur le fait qu'ils servent aussi à l'inspection et à l'entretien pour aider à corriger les futurs problèmes d'émission.

Monsieur le président, vous avez mentionné tout à l'heure les problèmes à long terme que nous aurons, les possibilités de régler à long terme les problèmes liés aux émissions. Malheureusement, il y a déjà des problèmes à cause des gaz que les véhicules rejettent dans l'atmosphère. Grâce à la deuxième génération de systèmes, il sera possible de diagnostiquer ces problèmes bien plus tôt et d'intervenir avant que le véhicule se mette à polluer.

Le président: Merci, M. Chatters.

La séance tire à sa fin, mais permettez-moi d'abord de vous demander rapidement quelle est l'entente au sujet de la technologie des systèmes diagnostiqueurs. Qui a réclamé cette technologie et pour quelle date? Bref, peut-on dire que cette technologie doit être utilisée à partir de janvier 1996?

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M. Bryksaw: En effet. Il existe un programme d'implantation progressive qui a commencé avec les modèles 1994 et qui se termine avec les modèles 1996. C'est maintenant la seule technologie employée.

Le président: Doit-on présumer que l'industrie s'est alignée sur cette exigence?

M. Bryksaw: Oui.

Le président: Qui a fixé cette exigence?

M. Bryksaw: Au départ, les systèmes diagnostiqueurs ont été mis au point dans le but de se conformer à la réglementation de la Californie. Par la suite cette réglementation a été reconnue comme la norme par les 49 autres États et notre protocole d'entente a adopté cette norme pour le Canada. Voilà comment on en est arrivé à cette technologie.

Le président: Donc, cette conspiration politique se résume en fait à une norme imposée par les autorités américaines qui ont exigé l'utilisation de systèmes diagnostiqueurs à partir de janvier 1996. C'est bien ça?

M. Bryksaw: Sur les modèles 1996.

Le président: Serait-il possible qu'en 1994, des politiciens songeant à l'avenir - on les accuse trop souvent de ne pas le faire - aient pu déclarer que le Canada aurait avantage à interdire le MMT en 1995?

M. Bradford: Il aurait fallu y penser avant cela, monsieur le président; en 1993 au groupe...

Le président: Que s'est-il passé en 1993?

M. Bradford: On a formé un groupe de travail mixte industrie-gouvernement pour étudier le MMT et d'autres questions concernant l'essence et la technologie automobile.

Le président: Il faut donc remonter jusqu'au gouvernement précédent?

M. Bradford: Oui.

Le président: Ça ne date pas d'hier.

M. Bradford: Non, cela a commencé au printemps 1993.

Le président: Très bien. Alors Mme Copps a donné suite à un projet entrepris avant sa nomination.

M. Bradford: En quelque sorte. Elle a poursuivi la réalisation d'une initiative du gouvernement précédent.

Le président: On remarque que la progression est constante. Il y a eu d'abord le plomb. Mon Dieu! je me souviens de tout le tapage autour des convertisseurs catalytiques au milieu des années 80. Ensuite, il n'y a pas très longtemps, ce fut le tour du benzène, et maintenant c'est le MMT. Les progrès technologiques et les nouvelles exigences obligent à surmonter constamment de nouveaux obstacles. Peut-être que les politiciens n'arrivent pas à soutenir le rythme de la technologie. On le voit bien ici.

Je ne voudrais pas que l'on reproche à Mme Copps une déclaration qu'elle a faite en 1994 en étant manifestement au courant de ce qui avait été annoncé avant et en connaissant aussi l'échéance de janvier 1996 pour l'utilisation obligatoire des systèmes diagnostiqueurs. Je pense qu'elle s'est exprimée de la sorte sachant que c'était une progression irréversible, n'est-ce pas?

M. Bradford: Vous avez raison.

M. Wappel: N'allez surtout pas dire le contraire.

Des voix: Oh! oh!

M. Bradford: Je crois que, cette fois, nous acquiesçons.

Le président: Nous allons nous retrouver - mais ailleurs que dans cette salle - pour l'étude article par article du projet de loi, selon ce qui a été convenu conformément à votre position jeudi matin.

Au nom des membres du comité, je vous remercie d'être venus, de nous avoir présenté vos exposés et fourni vos explications.

La séance est levée.

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