[Enregistrement électronique]
Le mardi 10 décembre 1996
[Français]
Le vice-président (M. Paradis): Conformément à l'alinéa 108(3)d) du Règlement, nous allons procéder à l'étude du chapitre 33 du Rapport du vérificateur général du Canada de novembre 1996, lequel traite des Affaires indiennes et du Nord Canadien et du mode de financement des Premières Nations.
Il nous fait plaisir de recevoir cet après-midi le vérificateur général du Canada, M. Denis Desautels. M. Desautels est accompagné de M. Grant Wilson, le directeur principal des opérations de vérification. Également, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, nous recevons le sous-ministre, M. Scott Serson, le sous-ministre adjoint, M. Brent DiBartolo et le directeur général de la Direction des finances, M. Bill Austin. Bienvenue à vous tous.
Je vais maintenant demander à M. le vérificateur général de faire sa présentation.
M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président et merci de nous avoir invités à discuter avec votre comité de notre vérification des modes de financement entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et les Premières Nations.
La dernière fois que nous avons rencontré le Comité permanent des comptes publics pour discuter de questions relevant du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, c'était en 1992. Nous avions alors formulé des commentaires sur la reddition des comptes et sur d'autres questions soulevées dans notre rapport de 1991. Au fil des ans, nous avons fait rapport notamment en ce qui a trait aux immobilisations et à leur entretien dans les réserves, en 1995, et ensuite sur l'assistance sociale, en 1994. Nous avons fait rapport sur les services de santé non assurés en 1993 et sur la stratégie de développement économique des autochtones en 1993 également.
Les travaux les plus récents que nous avons effectués avant ce chapitre-ci sont notre étude des pratiques de reddition des comptes dans la perspective des Premières Nations. Il s'agissait du chapitre 13 de notre rapport de 1996. Je suis donc heureux de comparaître devant vous aujourd'hui au moment où le dépôt récent du Rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones a rendu la question autochtone tout à fait d'actualité.
Plus de 680 Premières Nations et conseils tribaux sont servis par des modes de financement qui touchent plus d'un tiers du million d'Indiens inscrits. Les trois quarts de ces Premières Nations comptent moins de 1 000 membres et la moitié en comptent moins de 500.
Près des deux tiers des collectivités des Premières Nations sont situées en milieu rural, dans des régions isolées ou dans des régions d'accès spécial. Les autres collectivités se trouvent en milieu urbain. Outre qu'elles diffèrent les unes des autres par la taille et par la situation géographique, les Premières Nations diffèrent à bien d'autres égards, notamment quant à leur disposition à résoudre les questions en suspens avec le ministère, à prendre en charge la mise en oeuvre des programmes et, en fin de compte, à exercer dans les faits leur droit fondamental à l'autonomie gouvernementale. Par conséquent, la solution à une question donnée peut ne pas convenir à toutes les Premières Nations. En fait, les questions elles-mêmes peuvent ne pas se poser du tout.
[Traduction]
Comme beaucoup de Canadiens le savent, la relation entre le gouvernement du Canada et les Premières nations est délicate et complexe. Les modes de financement sont un aspect important de cette relation. Ces modes de financement sont les mécanismes par lesquels le ministère officialise sa relation de financement et de reddition de comptes avec les Premières nations. La conception et la mise en oeuvre des modes de financement peuvent avoir une incidence considérable sur le succès des programmes et, en fin de compte, sur le niveau de vie des bénéficiaires.
Au cours des dernières années, les dépenses budgétaires d'Affaires indiennes et du Nord Canada ont atteint en moyenne 4 milliards de dollars par année. De ces fonds, environ 3 milliards de dollars sont administrés directement par les Premières nations, les conseils tribaux et les autres bénéficiaires. À une certaine époque, le ministère gérait directement la réalisation de nombreux programmes dans les collectivités indiennes. En 1986-1987, par exemple, environ 65 p. 100 des dépenses étaient administrées par les bandes. Toutefois, les responsabilités en la matière sont maintenant dévolues dans une grande mesure aux Premières nations, qui en administrent aujourd'hui plus de 80 p. 100.
Les fonds sont transférés du ministère aux bénéficiaires au moyen de contrats de financement passés dans le cadre de divers modes. Ces fonds sont utilisés pour l'éducation, l'assistance sociale et le développement de l'infrastructure et pour répondre à d'autres besoins, principalement dans les réserves.
Actuellement, six modes de financement ou des composantes de ceux-ci sont en usage au ministère. Ces modes ont évolué au cours des dix dernières années. La plupart de ces instruments sont des formes d'ententes de contribution assorties de conditions touchant, par exemple, les normes de programme gouvernemental, les exigences d'information, les excédents de financement et les manques à gagner.
Le principal objectif de notre vérification était de déterminer si les modes actuels et envisagés de financement et leur mise en application convenaient à l'évolution de la relation entre le gouvernement fédéral et les Premières nations. La vérification a permis de déceler diverses possibilités d'amélioration dans trois grands secteurs: la gestion du risque, la mise en oeuvre des modes de financement et la reddition de comptes.
[Français]
Les modes de financement retenus par le ministère doivent mitiger les risques relatifs liés au mode de financement retenu en tenant compte du bénéficiaire du financement. Par exemple, les évaluations visant à établir un rapport entre le mode de financement choisi et le besoin spécifique du bénéficiaire n'ont pas été exigées pour tous les bénéficiaires. Lorsqu'elles l'étaient, soit elles n'étaient pas toujours accessibles à des fins d'examen, soit elles n'étaient pas mises à jour pour tenir compte de l'évolution de la situation. Ainsi, le risque de mettre en oeuvre des modes de financement inappropriés s'accroît.
Nous notons que près du tiers des Premières Nations et des conseils tribaux se trouvent en situation déficitaire. Cela veut dire qu'en plus des autres facteurs de différenciation, leurs besoins sont différents de ceux des Premières Nations et des conseils tribaux qui sont plus solides sur le plan financier.
Il y a plus de trois ans, le ministère a reconnu la nécessité d'améliorer les modes de financement existants en vue d'obtenir plusieurs avantages, dont le réduction de la dépendance des Premières Nations, une meilleure optimisation des ressources et un resserrement de la reddition des comptes. C'est de là que vient l'initiative actuelle du ministère qui vise à remplacer tous les modes de financement existants par une nouvelle entente de transfert financier d'ici 1998-1999.
C'est dans ce contexte que nous avons formulé les observations que vous avez sous les yeux. Le chapitre contient de nombreuses questions liées aux modes de financement utilisés depuis des années, mais ces questions ont des répercussions pour l'avenir.
Nous ne préconisons pas l'utilisation d'un mode de financement donné et nous ne disons pas que l'initiative actuelle du ministère en vue de mettre en oeuvre une nouvelle entente de transfert financier est inappropriée. Nous ne croyons pas non plus qu'il existe une recette pour en arriver à un mode de financement parfait pour toutes les occasions et toutes les fins.
Nous avons plutôt fait rapport de questions qu'il faudra régler, peu importe le type d'instrument utilisé ou envisagé. À cet égard, on trouve parmi nos observations l'éternelle question de la reddition des comptes, qui est un défi de taille pour toutes les parties concernées.
En 1991, nous avions indiqué que les modes de financement du ministère ne s'accompagnaient pas de mécanismes de responsabilisation satisfaisants. Cette situation avait des conséquences importantes, empêchant notamment de savoir avec certitude si les fonds destinés aux Premières Nations étaient dépensés aux fins prévues et s'ils favorisaient l'obtention de résultats appropriés.
[Traduction]
Le ministère et les Premières nations auront à répondre conjointement à des questions de base quant à la nature et à l'étendue de la reddition de comptes. Par exemple, qui doit rendre des comptes et à qui? De quoi les parties doivent-elles rendre compte et comment la mise en oeuvre des mécanismes redditionnels doit-elle être façonnée pour répondre aux divers besoins des Premières nations?
En septembre 1996, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons fait rapport de notre étude des pratiques redditionnelles vues par certaines Premières nations. Selon les participants à l'étude, la réciprocité est un élément essentiel de la reddition de comptes entre partenaires ou égaux.
À notre avis, il faudrait reconnaître qu'une reddition de comptes efficace doit servir plusieurs parties, y compris le Parlement, le ministère, les représentants des Premières nations et les membres des Premières nations. Une reddition de comptes efficace se fonde sur une entente tant de la part du fournisseur du financement que de la part du bénéficiaire du financement.
De plus, les différences considérables entre les 680 Premières nations et conseils tribaux doivent être prises en considération. Ces différences tiennent à la taille, à la situation géographique ainsi qu'à la volonté et à la capacité des Premières nations et des conseils tribaux de fournir des programmes rentables à leurs membres.
Notre rapport soulève de nombreuses questions sur la reddition de comptes, mais il ne précise pas ce que la reddition de comptes devrait être pour chaque situation. C'est une question qui doit être réglée entre les parties aux modes de financement. De plus, jusqu'à 65 p. 100 des modes de financement en usage sont de nature restrictive et ce malgré le fait que depuis dix années, des modes de financement moins restrictifs étaient offerts aux bénéficiaires qui avaient la volonté d'assumer des risques financiers supplémentaires.
Il semblerait donc qu'il reste encore du chemin à parcourir avant d'obtenir les avantages attendus de la nouvelle entente de transfert financier moins restrictive. Le ministre devra répondre aux besoins en matière de reddition de comptes, aux capacités et aux priorités diverses des Premières nations et des conseils tribaux.
Voici, selon nous, des questions que le ministère et les Premières nations devraient être prêts à régler ensemble. Premièrement, comment la nouvelle entente de transfert financier réglera-t-elle les problèmes de reddition de comptes, de gestion du risque et de mise en oeuvre que présentent les modes de financement actuels?
Deuxièmement, les modes de financement seront-ils façonnés en fonction des différents paramètres de la capacité ou de la volonté des Premières nations de faire en sorte qu'ils répondent adéquatement aux divers besoins des Premières nations?
Troisièmement, comment le ministère atteindra-t-il son objectif d'appliquer à toutes les Premières nations la nouvelle entente de transfert financier au cours des deux prochaines années alors que la plupart des modes de financement actuellement en usage sont plus restrictifs? Est-il certain que le ministère atteindra son but ainsi que les résultats escomptés?
Nous croyons que des modes de financement solides et appropriés seront essentiels au succès de l'évolution de la relation entre les Premières nations et le gouvernement fédéral. Nous sommes d'accord avec ce que dit le ministère dans sa réponse à notre vérification. Le ministère devra faire face à de nombreux défis au fur et à mesure que sa relation avec les Premières nations évoluera. Il devra s'adapter aux différentes circonstances des Premières nations tout en veillant à ce que les exigences fondamentales de la reddition de comptes et de la rentabilité soient observées.
[Français]
Nous encourageons donc le ministère à voir à ce que la mise en oeuvre des modes de financement futurs tiennent compte des niveaux de risque liés à la capacité et à la volonté des Premières Nations bénéficiaires et reflètent des obligations redditionnelles appropriées pour toutes les parties. De plus, nous croyons que le ministère peut et devrait mettre en oeuvre, de concert avec les Premières Nations, des modes de financement qui contribueront à l'atteinte des objectifs énoncés tout en tenant compte des besoins de toutes les parties.
Je vous remercie. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Le vice-président (M. Paradis): Merci beaucoup, monsieur Desautels.
[Traduction]
Nous invitons maintenant le sous-ministre des Affaires indiennes et du Nord Canada à nous faire son exposé.
[Français]
M. Scott Serson (sous-ministre, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Je tiens à vous remercier de m'offrir l'occasion de vous entretenir au sujet du Rapport du vérificateur général sur les ententes de financement conclues avec les Premières Nations et du progrès que nous avons réalisé de concert avec les Premières Nations et les collectivités inuit.
Mes commentaires d'aujourd'hui porteront particulièrement sur les points suivants: l'évolution de notre relation avec les Premières nations; nos réalisations en matière de responsabilisation; et les orientations actuelles en vue d'améliorer les ententes de financement.
[Traduction]
L'autonomie gouvernementale est la pierre angulaire de notre relation avec les peuples autochtones, et nous faisons des progrès dans ce sens. Comme vous le savez, le MAINC finance les services essentiels dispensés aux Premières nations et aux collectivités inuit, comme l'éducation, les services sociaux, le logement et les infrastructures communautaires. Ailleurs au pays, ces services sont dispensés par les gouvernements provinciaux et municipaux.
Il y a 20 ans à peine, ces services étaient dispensés directement dans les réserves par des fonctionnaires fédéraux qui enseignaient dans les écoles, qui planifiaient et réalisaient des projets d'aqueduc et d'égouts et qui géraient les programmes de développement social. Aujourd'hui, presque tous ces programmes et services sont dispensés par des gouvernements autochtones. Nous avons, de toute évidence, effectué une transition importante.
Les conditions de vie essentielles au sein des collectivités des Premières nations ont tout de même accusé un certain retard par rapport à celles des autres Canadiens. En conséquence, s'il est vrai que nous travaillons collectivement à la mise en oeuvre de l'autonomie gouvernementale, nous essayons d'établir celle-ci sur de solides assises et ce, par l'amélioration des conditions de vie.
[Français]
Nous avons fait du progrès, mais il reste encore beaucoup à faire. C'est pourquoi, dans le dernier budget fédéral, les programmes destinés aux autochtones ont bénéficié d'une croissance modeste sur une période de trois ans. Les dépenses à ce chapitre augmenteront de 3 p. 100 cours de la présente année financière et de 2 p. 100 au cours de chacune des deux prochaines années. Les défis à relever seront d'autant plus grands que la croissance démographique des Premières Nations est deux fois et demie supérieure à celle de la moyenne canadienne.
Ce cadre financier nous oblige, ainsi que les Premières Nations qui sont nos partenaires, à considérer attentivement nos responsabilités financières et à trouver les moyens de gérer au mieux les fonds publics. En même temps, il nous faut tenir compte des besoins changeants des Premières Nations dans leur ascension progressive à l'autonomie gouvernementale.
[Traduction]
Le vérificateur général note que le MAINC a eu recours à plusieurs types différents d'ententes financières depuis quelques années. De diverses façons, ces ententes reflètent l'évolution de nos relations avec les Premières nations. Comme le signalait avec beaucoup de justesse la Commission royale sur les peuples autochtones, les gouvernements autochtones devraient avoir suffisamment de souplesse et de pouvoir pour satisfaire les besoins de leurs collectivités. En même temps, la responsabilisation et l'optimisation des ressources doivent être assurées à tous les niveaux.
Nous partageons ce point de vue. C'est pourquoi nos ententes de financement ne sauraient être perçues de façon isolée; il faut plutôt les considérer dans le cadre plus global de la responsabilisation.
Le Bureau du vérificateur général a joué un rôle déterminant pour en arriver à définir ce qui constitue une responsabilisation adéquate à l'égard des paiements de transfert aux gouvernements autochtones. Comme l'a dit le vérificateur général, le chapitre qui traite de ce sujet dans son rapport de septembre au Parlement et le travail qu'il a accompli auprès des Premières nations pour effectuer cette étude sont particulièrement utiles. Grâce à une coopération efficace, je crois que le gouvernement fédéral établit un bon équilibre dans les relations qu'il entretient avec les Premières nations.
Permettez-moi de décrire brièvement notre cadre de responsabilisation global. On s'attend à ce que les Premières nations gèrent leurs affaires selon les principes qui s'appliquent à tous les gouvernements du Canada, soient la transparence, la divulgation et le recours. Ces principes ont pour but de garantir l'imputabilité des dirigeants des Premières nations à l'égard de leurs collectivités. En fait, toutes les Premières nations, les collectivités inuit et les conseils tribaux financés par le MAINC doivent présentement évaluer leurs systèmes de gestion et la façon dont ils s'acquittent de leurs responsabilités pour que les collectivités disposent d'une information complète sur le mode de financement de leurs gouvernements.
Si l'on constate des lacunes, les conditions des ententes de financement prévoient un plan d'action destiné à renforcer les mesures de contrôle administratif et de responsabilisation. Nous reconnaissons, cependant, que le ministre doit rendre compte au Parlement de l'utilisation des fonds publics. Les chefs et les conseils des Premières nations doivent, par conséquent, rendre compte au ministre de ces mêmes deniers publics.
[Français]
En premier lieu, les ententes financières exigent que les Premières Nations élaborent des vérifications et des rapports annuels de rendement destinés aux membres de collectivités et au MAINC.
Comme le montrent les graphiques qui vous ont été remis, les Premières Nations produisent pratiquement toutes ces vérifications et respectent davantage les délais prévus et, de plus en plus, les vérificateurs émettent des opinions sans réserve. Cela dénote une amélioration considérable de la gestion et de la comptabilité financière effectuées par les Premières Nations.
On a constaté une nette amélioration de l'observance des conditions des ententes de la part des Premières Nations. Les ententes financières font maintenant l'objet d'une surveillance plus serrée.
[Traduction]
Le ministère a également renforcé le contrôle qu'il exerce sur l'usage que les Premières nations font de l'endettement. Des comités de vérification régionaux examinent les vérifications des bénéficiaires et font part de leurs observations aux Premières nations. La plupart des Premières nations gèrent efficacement leurs finances.
Dans les cas où il y a des problèmes d'endettement, on élabore un plan de gestion corrective pour établir les mesures de redressement et permettre de contrôler le progrès et l'application des dispositions de conformité. La plupart des Premières nations qui doivent apporter des mesures correctrices gèrent elles-mêmes leur processus de redressement.
L'imputabilité s'exerce dans les deux sens. En tant que ministère, nous évaluons continuellement notre gestion des ententes financières; les Premières nations, pour leur part, participent directement. En conséquence, nous sommes pleinement conscients des problèmes soulevés par le vérificateur général dans le Rapport sur les ententes financières et nous avons déjà pris des mesures pour mettre en application la plupart des recommandations du rapport.
Nous nous efforçons de mettre en oeuvre le processus de vérification de la gestion et de l'imputabilité. Nous sommes en train de clarifier les responsabilités et les attentes en matière d'imputabilité dans le contexte de toutes les ententes, d'examiner les exigences en matière de rapports, d'évaluer les ententes de financement et d'étudier les observations des Premières nations. Nous cherchons à améliorer continuellement la surveillance des bases de données et l'échange d'information et à travailler de concert avec les autres ministères pour mieux coordonner le financement.
De plus, j'ai le sentiment que nous avons beaucoup progressé dans un contexte global de transparence et d'imputabilité, à une échelle beaucoup plus vaste.
[Français]
C'est pourquoi le ministre Irwin a communiqué le plan d'activités ministériel à nos partenaires et au public et nous avons participé au projet pilote du gouvernement visant à améliorer les rapports présentés au Parlement.
[Traduction]
Notre premier rapport autonome de rendement a été déposé en Chambre le 31 octobre 1996. Nous avons communiqué ce rapport à nos partenaires et il a été rendu accessible au grand public, par l'entremise d'Internet.
[Français]
Nous apportons également notre appui aux Premières Nations pour leur permettre de confronter ces réalisations en évaluant les besoins et en nous assurant qu'elles aient accès aux ressources nécessaires à la formation et au développement des compétences.
[Traduction]
Nous investissons chaque année 16 millions de dollars dans des partenariats visant à augmenter le rendement des Premières nations. Par exemple, en Colombie-Britannique, un partenariat a permis la création d'une association d'agents financiers autochtones, tandis qu'une association de contrôleurs autochtones est à l'état de projet.
De plus, les conseils tribaux dispensent aux Premières nations des services consultatifs en matière de gestion et de gérance financières. De nombreux organismes autochtones privés et à but non lucratif offrent des programmes de formation.
Enfin, 260 millions de dollars octroyés par le MAINC profitent chaque année à quelque 26 000 étudiants de niveau postsecondaire - un investissement crucial pour le secteur des ressources humaines dans les collectivités autochtones.
Je suis d'avis que l'accroissement de la responsabilité est l'un des succès du partenariat entre les Premières nations et le ministère, tandis que nous entreprenons des mesures concrètes en vue de l'autonomie gouvernementale.
Je tiens à vous dire quelques mots au sujet de l'apport de l'Entente de transfert financier à cet égard. L'Entente de transfert financier représente le type le plus progressif d'entente de financement que permet la Loi sur les Indiens. L'entente est en voie d'élaboration et elle a été conçue et mise à l'épreuve au moyen de divers projets pilotes volontaires, menés avec les Premières nations.
À ce jour, 30 Premières nations et 6 conseils tribaux représentant 42 Premières nations additionnelles ont participé à des projets pilotes. Dans le cadre d'une évaluation continue de ces projets, les Premières nations participantes se sont déclarées satisfaites, dans l'ensemble, des ententes. Le dirigeant d'une collectivité a déclaré que l'Entente de transfert financier procure la souplesse nécessaire pour transférer des fonds et pour élaborer de nouveaux programmes. Cela s'appelle de l'habilitation ou de l'appropriation du pouvoir.
Les ententes de transfert financier allient la souplesse du financement global à un régime de responsabilité amélioré. Dans le cadre de ces ententes, les Premières nations bénéficient d'un meilleur contrôle collectif des prises de décisions pour satisfaire les besoins et les priorités des collectivités. Nous sommes d'avis que les gouvernements des Premières nations sont les plus aptes à prendre ces décisions. Nous sommes d'avis aussi que ce processus décisionnel représente le moyen le plus efficace d'obtenir l'optimisation des contributions fédérales aux programmes et services essentiels dans les réserves.
Simultanément, les exigences en matière de rapports sont en voie de rationalisation et s'orientent de plus en plus vers la responsabilisation axée sur les résultats. C'est un défi de passer d'un régime de responsabilité dont les rapports sont dirigés vers une intégration proportionnelle, à un système axé sur les résultats. Toutefois, nous progressons en ce sens de concert avec les Premières nations et les collectivités inuit.
Nous projetons de poursuivre les ententes de transfert financier pilotes au cours de la prochaine année et nous en discutons avec 22 autres Premières nations. Nous en sommes encore au stade expérimental pour déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans des situations réelles. Nous tenons à élaborer les meilleures ententes possibles qui s'adapteront aux divers besoins des Premières nations.
En conclusion, je veux bien faire comprendre que le véritable succès réside dans les nouvelles responsabilités et l'imputabilité accrue qu'ont assumées les Premières nations depuis 20 ans. Le Ministère s'est adapté en vue de satisfaire les besoins et les aspirations des Premières nations. Ce processus se poursuivra. Les membres du comité reconnaîtront que toutes les parties intéressées doivent prendre certains risques et apprendre par leurs erreurs dans le contexte de l'évolution du processus de changement.
Encore une fois, je tiens à remercier le vérificateur général pour la façon dont il encourage systématiquement l'élaboration de nouvelles relations avec les Premières Nations et avec les communautés inuit.
Merci, monsieur le président.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Serson.
Comme tous les collègues ici présents le savent, c'est la première fois que je préside ce comité. Au cours de ma longue vie, je me suis aperçu qu'en général, la première fois qu'on essaie quelque chose de nouveau, tout marche très bien; c'est la deuxième fois, quand on pense tout savoir, que les ennuis commencent. Je vous demanderais donc votre indulgence.
Le premier tour de questions de dix minutes revient à M. Rocheleau.
[Français]
M. Rocheleau (Trois-Rivières): Ma question va porter sur le nouveau mode de financement et l'entente de transfert financier, l'ETF, qui, j'imagine, porte sur une partie des 4,5 milliards de dollars que verse le ministère des Affaires indiennes dans le cadre de la contribution de six milliards de dollars de l'État canadien aux autochtones au Canada.
On peut lire dans le rapport qu'il y a 17 projets pilotes qui sont en application actuellement. J'aimerais que vous nous fassiez un petit rapport sur l'état de la situation. D'abord, avez-vous quelque chose d'écrit, au sein du ministère, sur l'évaluation que vous faites de ces 17 projets pilotes?
[Traduction]
M. Brent DiBartolo (sous-ministre adjoint, Services ministériels, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Nous procédons actuellement à une évaluation des expériences des Premières nations. Un document a été préparé qui n'est pas encore finalisé. Nous avons pour politique de ne pas communiquer les rapports d'évaluation avant d'avoir une version définitive. Dès que cette version sera prête, je m'engage à l'envoyer aux députés, ou encore à vous, personnellement, monsieur le président.
Nous tirons des leçons de nos projets pilotes. Comme le vérificateur général l'a observé, nous devons adapter les dispositions de financement aux besoins divers des Premières nations. C'est précisément la raison pour laquelle nous avons des projets pilotes. Dans le chapitre qu'il consacre à cette question, le vérificateur général observe que les Premières nations qui ont actuellement une ETF considèrent en général qu'elle est bien adaptée à leurs besoins. Voilà notre expérience.
Nous suivons donc le développement de chaque projet pilote et, actuellement, nous négocions de nouveaux projets pilotes avec les Premières nations, et nous le faisons sur la base de l'expérience acquise.
[Français]
M. Rocheleau: Il semble que vous projetez de conclure une entente avec toutes les Premières Nations d'ici 1998-1999. Il y en aurait encore quelque 600 à venir. Est-il réaliste de penser que vous pourrez vous entendre avec ces 600 Premières Nations dans un délai aussi bref?
[Traduction]
M. Serson: Cela me semble peu probable. Nous nous sommes fixé un objectif, mais nous savons déjà que ce sera beaucoup plus difficile que nous ne le pensions au départ. Cela n'est pas dû uniquement à l'instrument, l'entente de transfert financier, c'est dû également à l'environnement dans lequel nous nous trouvons.
Si vous consultez la documentation que nous avons distribuée, vous verrez qu'il y a un ralentissement dans la croissance du programme. Cela devient un facteur important pour nos partenaires des Premières nations qui commencent à s'interroger sur les avantages du programme. Ils demandent quels avantages cela représente pour eux.
Nous envisageons un financement global aligné sur la croissance, c'est-à-dire deux p. 100. Les Premières nations doivent décider si cette flexibilité supplémentaire leur sera utile pour financer en priorité les choses qui leur semblent les plus importantes, ou si elles préféreraient conserver un des systèmes actuels, et obtenir ainsi un niveau de croissance plus conforme à la croissance de leur population, par exemple.
Tous ces facteurs interviennent dans nos discussions avec les Premières nations.
[Français]
M. Rocheleau: Pourriez-vous nous expliquer en quoi cela va possiblement - il faut le souhaiter - améliorer la situation par rapport aux problèmes qu'on rencontre actuellement en termes de reddition des comptes, de gestion du risque et de mise en oeuvre des modes de financement? En quoi cela va-t-il améliorer la situation que l'on vit? Qu'est-ce que cela va changer et qu'est-ce qu'il y a de changé pour qu'on puisse penser que cela va s'améliorer?
[Traduction]
M. Bill Austin (directeur général, Direction générale des finances, Services ministériels, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Au cours des deux dernières années, nous avons beaucoup travaillé avec les Premières nations. Elles se sont adaptées à de nombreux changements. Par exemple, nous avons accordé plus d'importance à l'examen des termes et conditions des ententes en cours dans des domaines comme l'éducation élémentaire, l'assistance sociale, ce genre de choses.
Nous faisons également beaucoup sur le plan de la vérification de la qualité des données. Par exemple, beaucoup de mécanismes de financement exigent un dénombrement des élèves, et cela se fait dans n'importe quelle école publique lorsqu'il y a des questions de financement. Nous travaillons avec les Premières nations pour nous assurer que les données qui circulent entre le ministère et les Premières nations sont de la meilleure qualité possible. Nous revoyons également avec les Premières nations les divers mécanismes de formation; le sous-ministre en a parlé il y a quelques instants.
Nous avons mis en place un programme d'évaluation de la gestion qui porte sur toutes les Premières nations et qui considère divers aspects comme la politique en matière de ressources humaines, la politique financière, les procédures administratives - ce genre de choses - et qui essaie de déterminer dans quelle mesure les Premières nations sont compétentes. Lorsqu'on détecte certaines faiblesses, il est possible de déclencher un plan de développement; cela figure dans les termes et conditions des accords de financement.
Nous avons également beaucoup travaillé avec les Premières nations sur les vérifications. Chaque région a maintenant un comité de vérification. Comme vous le savez, toutes les Premières nations sont tenues de fournir régulièrement des vérifications. Dans le graphique qui accompagne le discours du sous-ministre, vous verrez que ces vérifications nous parviennent régulièrement. À mon avis, c'est une preuve de changement sur le plan des compétences, en particulier depuis deux ou trois ans.
Lorsque les Premières nations nous envoient ces vérifications, nous leur répondons. Nous nous sommes fixé un laps de temps maximum, et dans les 30 jours qui suivent réception d'une vérification, nous répondons. Le Comité d'examen des vérifications assure la troisième étape, ou encore parcourt le rapport de vérification pour déterminer s'il y a des problèmes majeurs. Le comité procède ensuite à une analyse approfondie dont il envoie les résultats à la Première nation concernée. Lorsqu'il y a des problèmes, un plan d'action est mis sur pied, ou encore un plan de gestion financière, qui explique concrètement la tâche de chacun, à quel moment, etc. On essaie ainsi d'améliorer les conditions financières de la Première nation concernée.
Nous avons également travaillé en collaboration avec le ministère du Solliciteur général. Lorsque des lettres nous parviennent, des accusations portées par des membres de la communauté, nous nous assurons que toute irrégularité est portée à l'attention de la police locale, ou d'une autre instance.
Nous avons donc apporté des changements considérables depuis trois ou quatre ans, et nous commençons maintenant à en voir les résultats.
Le président suppléant (M. Grose): Monsieur Rocheleau, vous avez une minute.
[Français]
M. Rocheleau: Y a-t-il des Première Nations ou des dirigeants de Premières Nations qui refusent carrément de collaborer avec le gouvernement fédéral pour rendre des comptes, pour expliquer comment ils ont utilisé les fonds publics? Si oui, avez-vous le pouvoir d'intervenir pour essayer de mettre de l'ordre là-dedans? Pouvez-vous exercer des représailles? Jusqu'où pouvez-vous aller? Je pense que vous ne vous permettriez pas de leur couper les vivres. Serait-ce possible? Jusqu'où pouvez-vous aller?
[Traduction]
M. Austin: C'est une question intéressante.
Que je sache, il n'y a pas de Premières nations qui ne soient désireuses de s'améliorer sur le plan de l'imputabilité. Je tiens à le dire dès le départ. Cela dit, nous ne sommes pas toujours d'accord sur les modalités de cette imputabilité au niveau de la communauté, en particulier la transparence, la déclaration et les mesures correctives.
Par exemple, nous exigeons des rapports de vérification de toutes les Premières nations. C'est un indicateur très simple. Nous leur demandons de communiquer ces rapports aux membres de leurs communautés. D'autre part, nous recevons effectivement ces rapports, du moins dans la majeure partie des cas, et quand je dis «majeure partie», je veux dire plus de 99 p. 100 des cas. Nous constatons donc de grosses améliorations.
Le président suppléant (M. Grose): Merci.
Je donne maintenant la parole à M. Silye.
Je crois comprendre que vous allez partager votre temps avec M. Duncan. Lorsque vous aurez terminé, vous n'avez qu'à céder la parole à M. Duncan, et il n'y aura pas d'interruption.
M. Silye (Calgary-Centre): Merci, monsieur le président.
J'aimerais prévenir le comité que le sous-ministre actuel du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est un dur de dur. Une année, nous avons fait partie de la même équipe de football, et nous avons gagné le championnat. Je peux vous assurer que c'est un dur, et que vous devez faire attention. C'est tout ce que j'avais à dire.
Cela dit, je cède la parole à un autre dur, John Duncan.
M. Duncan (North Island - Powell River): Quelle introduction!
Monsieur le président, je m'adresse d'abord au vérificateur général, après quoi j'aurai des questions pour les représentants du ministère.
Sur le plan des idées, le vérificateur général accorde beaucoup d'importance à la notion d'optimisation des ressources.
Je vous mets peut-être dans une position difficile, mais est-ce que le vérificateur général serait prêt à dire qu'actuellement le ministère des Affaires indiennes ne rend pas des comptes au Parlement et au public de la même façon que les autres ministères fédéraux?
De plus, pourriez-vous en quelques phrases nous expliquer en quoi consiste le mandat du vérificateur général pour les dépenses du ministère des Affaires indiennes et nous expliquer en quoi ce mandat diffère de celui des autres ministères?
Troisièmement, pouvez-vous nous dire si le vérificateur général serait heureux de voir le gouvernement confier un nouveau mandat aux Affaires indiennes?
M. Desautels: Monsieur le président, je vais essayer de répondre à ces trois questions assez vite et assez directement.
Vous m'avez demandé si la norme de responsabilisation appliquée au ministère des Affaires indiennes était inférieure à ce qui existe dans d'autres ministères. M. Duncan vous a exposé ses préoccupations en ce qui concerne l'optimisation des ressources.
Pour commencer, il y a un lien étroit entre l'optimisation des ressources et la responsabilisation. Quand on exige des comptes, c'est pour s'assurer que les ressources gouvernementales sont utilisées de façon optimale.
À mon avis, les normes en ce qui concerne l'obligation de rendre des comptes devraient être exactement les mêmes pour ce ministère que pour les autres. Toutefois, il y a un problème, car dans ce cas précis, les relatons sont particulièrement complexes sur le plan de la responsabilisation.
Il y a d'autres ministères où les relations sont complexes également, et d'ordinaire, cela se produit lorsque plusieurs parties sont en cause. Dans ce cas particulier, nous attendons du ministère l'exercice de certaines responsabilités, mais le ministère n'est pas la seule partie en cause.
Prenez l'exemple de l'ACDI. Cet organisme exécute des programmes en collaboration avec des partenaires. C'est donc très complexe également, et dans ce genre de situation, il est difficile d'obtenir des comptes identiques à ceux d'autres ministères où les relations sont beaucoup plus linéaires.
En conclusion, les mêmes normes d'imputabilité doivent s'appliquer, mais en même temps, il faut reconnaître la complexité et les difficultés de ce genre de partenariat.
Vous m'avez demandé ensuite quel était notre mandat en ce qui concerne le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Notre mandat en ce qui concerne le ministère est identique à notre mandat vis-à-vis d'autres ministères du gouvernement. Si cela inquiète M. Duncan, c'est parce qu'il se demande si ce mandat va jusqu'à la vérification, jusqu'à la destination ultime des fonds dans les communautés autochtones. Nous n'avons pas pour mandat de vérifier les comptes des communautés autochtones. Notre mandat s'arrête au transfert des fonds du ministère à une communauté autochtone.
Vous m'avez demandé ensuite si nous aimerions qu'on change notre mandat? Nous sommes toujours au service du Parlement, et c'est aux parlementaires de décider s'ils souhaitent nous voir allez plus loin. Bien sûr, vous ne devez pas oublier que le Parlement doit traiter toutes les Premières nations de la même façon.
Si le gouvernement est déterminé à aller vers la dévolution et l'autonomie gouvernementale, il en découle certains principes dont il faut tenir compte avant de décider d'étendre notre mandat aux activités des Premières nations. Mais pour l'instant, ce n'est pas le cas. Les députés pourraient fort bien décider de changer cela.
M. Duncan: Très bien. Merci.
Je passe maintenant aux représentants du ministère; les activités du ministère reposent sur une idéologie bien ancrée. D'après une certaine école de pensée, le gouvernement a une obligation fiduciaire prépondérante, et d'après beaucoup de gens, il y a deux domaines où cette obligation est en train de s'effriter. Il s'agit de la responsabilité démocratique et financière, et à mon avis, ces deux choses-là ne sont pas négociables.
Certains dirigeants autochtones considèrent que le ministère n'a pas assumé ses responsabilités en n'exigeant pas le respect de normes d'imputabilité très sévères, en particulier sur le plan financier.
Pour commencer, est-ce que le ministère va redresser cette situation d'ici la fin de l'année financière 1997-1998, et comment s'y prendra-t-il? Deuxièmement, est-ce que le ministère serait d'accord pour qu'on étende le mandat du vérificateur général et qu'on lui demande de suivre ces transferts jusqu'à leur destination, car c'est le seul moyen de déterminer que les ressources ont bien été utilisées d'une façon optimale?
Le président suppléant (M. Grose): Monsieur Duncan, vous avez une minute et demie, et votre sort dépend maintenant du témoin.
M. Duncan: Très bien, je poserai mes autres questions au tour suivant.
M. Serson: Monsieur Duncan, vous me posez une question très difficile. Dans le contexte que le vérificateur général et moi-même avons décrit, c'est-à-dire l'évolution d'une relation qui suppose des discussions permanentes avec nos partenaires des Premières nations en ce qui concerne la signification de l'autonomie gouvernementale, je pense que nous avons redressé la situation de façon assez satisfaisante. Lorsqu'il répondait à M. Rocheleau tout à l'heure, Bill a parlé des domaines où nous cherchons à apporter des améliorations sur le plan des relations comptables. Noua allons continuer à essayer d'améliorer cela, et continuer également à en discuter avec nos partenaires des Premières nations.
Un des facteurs, et je crois que le vérificateur général l'a constaté, c'est que nos partenaires des Premières nations continuent à comparer ce que nous exigeons d'eux à ce que nous exigeons des autres paliers de gouvernement. Et j'observe, par exemple, que nous faisons des transferts importants aux provinces sans réclamer beaucoup d'information à ce sujet. Nous n'en sommes pas à ce stade-là dans nos relations avec eux, mais c'est le genre d'argument qui surgit dans nos discussions avec eux, et nous en discutons.
En ce qui concerne le rôle du vérificateur général, c'est une question d'ordre politique, et en ma qualité d'administrateur du ministère, je vois mal comment je pourrais y répondre.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Serson.
Collègues, je tiens à vous dire qu'à mon avis les présidents ne devraient pas poser des questions aux témoins, sauf quand la séance commence à languir. Mais c'est votre comité, vous en penserez ce que vous voudrez.
Je donne maintenant la parole à M. Crawford.
Oui, monsieur Crawford, je vous préviendrai quand votre temps sera écoulé.
M. Crawford (Kent): Merci, monsieur le président.
Où commencer? Traditionnellement, les conditions de vie dans les communautés des Premières nations sont loin d'être ce qu'elles sont dans le reste de la société canadienne. À votre avis, en quoi consistent des conditions de vie minimales?
M. Serson: Vous pouvez mesurer cela avec n'importe quelle méthode socio- économique, les Premières nations sont systématiquement défavorisées, qu'il s'agisse du niveau d'emploi, du niveau de revenu, du niveau de santé, etc. Il y a eu des améliorations depuis dix ans, mais il reste beaucoup à faire.
M. Crawford: À ce sujet, il y a quelques années, notre hôpital a procédé à une restructuration et toutes les municipalités ont dû payer un certain pourcentage. La réserve a dû payer également, mais elle n'avait pas d'argent. Sa part était d'environ 250 000$. J'ai donc contacté votre ministère qui m'a répondu qu'il était impossible de fournir de l'argent, et pourtant, ils ont des fonds illimités. L'administrateur de la bande aurait bien aimé payer, mais la bande avait décidé que non. Il était au conseil d'administration de l'hôpital, il savait exactement ce qui en était, et il savait qu'il y avait de l'argent. Je n'ai donc pas réussi à tirer de l'argent de votre ministère. Jusqu'à aujourd'hui, ils n'ont pas payé un sous, et pourtant, ils bénéficient des mêmes services d'hospitalisation et autres que n'importe qui. Sur ce plan là, il n'y a pas de désavantage.
Sur le plan de l'éducation, leurs écoles sont aussi bonnes, sinon meilleures que celles des environs. Leur stade est nettement supérieur à celui de n'importe quelle municipalité de 12 000 ou 20 000 personnes.
En ce qui concerne les qualifications professionnelles, votre ministère leur a construit un atelier d'usinage qui a coûté des centaines de milliers de dollars. Comme personne ne pouvait s'en occuper, il est tombé à l'abandon.
Je ne veux pas les critiquer, je suis leur voisin, j'ai grandi avec eux, ils ont une bonne éducation.
Ils avaient besoin d'un projet, 620 000 ou 640 000$ il y a quelques années. Ils m'ont envoyé leur mémoire le matin où votre ministère l'étudiait. J'ai eu le temps seulement de le parcourir. Je leur ai téléphoné et je leur ai dit: «Seigneur, c'est beaucoup trop bon, vous avez prouvé dans votre mémoire que vous n'avez pas besoin d'un sou». Ils m'ont répondu: «Dites-leur d'attendre, parce que nous voulons ajouter quelque chose d'autre». Ce qu'ils ont ajouté démolissait tous les arguments de la première demande. Ça n'a pas été long, on leur a donné 640 000$. Or, si vous aviez vu l'original, vous auriez vu qu'ils n'avaient pas besoin d'un sou.
C'est une réserve très riche. Si vous divisez dix millions de dollars par année par 2 800 personnes... et ce n'est même pas de l'assistance sociale, ou quelque chose de ce genre. C'est ce que la réserve recevait chaque année. Moi qui dirigeais la municipalité voisine, j'aurais bien aimé avoir dix millions de dollars pour ma municipalité, qui était 20 fois plus grosse que cette réserve.
Une voix: [Inaudible]
M. Crawford: C'est ce que nous aurions dû faire. Nous nous sommes même demandé s'il ne serait pas possible de nous faire accréditer comme bande indienne.
Combien d'argent va-t-il falloir continuer à déverser? D'après ce document, 3 p. 100 de plus cette année et 2 p. 100 de plus l'année prochaine.
Non, je me trompe, je m'y perds.
M. Serson: Le vérificateur général dit qu'il s'agit d'environ quatre milliards de dollars pour le ministère. Cela comprend le Nord canadien.
M. Crawford: En ce qui concerne l'éducation, j'ai calculé qu'il s'agit d'environ 10 000$. À l'époque où mes enfants étaient à l'école et à l'université, j'aurais bien aimé avoir lu 10 000$.
Cette année, nous avons fait un recensement. Comment se fait-il que nous avions un contrat pour faire un travail, et pourtant, eux, ils étaient payés à l'heure, ils ont fini par avoir trois, quatre, cinq et même dix fois plus qu'un de mes voisins?
Vous dites que nous allons nous y retrouver dans les comptes. Je me demande bien comment. L'argent continue à couler, mais qu'est-ce que nous avons en retour? Nous avons des maisons qui sont détruites. Dans les îles de la Reine Charlotte, j'ai vu des maisons qui ont été complètement détruites après avoir été construites quelques années auparavant seulement. Combien de fois faut-il reconstruire les maisons?
J'ai de nombreux voisins qui ont une bonne éducation, qui sont allés à l'université, qui travaillent fort, et pourtant, ceux qui se fichent de la situation leur font du tort. Est-ce que c'est notre faute?
Après la guerre, quand j'étais enfant, les soldats qui revenaient - et c'était des Autochtones - tout d'un coup, ils ne pouvaient plus acheter de machines pour cultiver la terre. Ils n'avaient pas de crédit. Ce genre de chose, c'est de notre faute. Quand ils ont enfin eu du crédit, leur petite ferme de 25 ou 30 acres était devenue hors de prix. Une bonne possibilité leur était dorénavant fermée. Dans ce cas-là, effectivement, c'était notre faute.
N'allez pas penser que je suis contre eux systématiquement. Ce n'est pas vrai. Mais je pense que nous avons fait de mauvais investissements et que nous nous enfonçons de plus en plus. Il devrait être possible de s'entendre. Vous dites que nous allons nous en tirer avec votre comptabilité, avec vos budgets, mais si j'ai un budget illimité, je n'y arriverai jamais.
Cela fait beaucoup de choses d'un seul coup.
Scotty va probablement me prendre à partie, Jim.
M. Serson: M. Silye n'a pas parlé des nombreuses fois, en hiver, où il m'a laissé accroché aux barrières de la patinoire.
Vous avez parlé de beaucoup de cas particuliers que je ne connais pas. En ce qui concerne l'expansion de notre budget, il y a une chose que je dois vous dire, c'est qu'actuellement les communautés des Premières nations connaissent un baby-boom très comparable à celui que nous avons eu après la guerre. Pour suivre cette expansion, il faut un certain investissement.
Il est certain que nous devons travailler ensemble et chercher à élargir les possibilités économiques pour permettre aux Premières nations de faire face elles-mêmes à leurs besoins. Cela dit, la principale raison de l'expansion de notre budget, c'est la croissance démographique.
Vous avez parlé d'un certain nombre de relations. En ce qui concerne l'hôpital, cela relève, bien sûr, des services médicaux de Santé Canada. Nous avons nos relations particulières, et lorsque les économies d'échelle le justifient, nous fournissons une école aux réserves. Si ce n'est pas le cas, nous achetons des services aux commissions scolaires locales. Avec les Premières nations, nous essayons de dépenser d'une façon raisonnable, et nous espérons que cela leur permet d'acquérir une bonne éducation.
Brent, y a-t-il quelque chose à ajouter?
M. DiBartolo: À propos du baby-boom sur les réserves, le problème s'aggrave du fait que le ministère des Affaires indiennes fournit beaucoup de services qui, ailleurs, sont fournis par les gouvernements provinciaux ou municipaux. Par conséquent, notre budget et nos ressources sont taxés à la fois par cette circonstance du baby-boom, mais également à cause de ses répercussions sur le plan du logement, de l'éducation, de l'assistance sociale et de l'infrastructure.
M. Crawford: Vous avez parlé d'éducation, et dans certains endroits il y a des déjeuners subventionnés, etc. Dans notre réserve, il y a des gens qui mettent leurs enfants dans une école privée. Il y a plusieurs écoles privées. Quand je dis privées, je veux dire publiques et privées, par exemple l'école privée catholique. Lorsque les enfants ont les aptitudes voulues, les autres enfants se moquent d'eux. Les parents les envoient donc à l'extérieur de la réserve pour qu'ils aient une meilleure éducation. Là-bas, les enseignants sont excellents, mais c'est l'environnement qu'ils cherchent à éviter. Je ne sais ce qu'on peut faire contre cela.
M. Serson: Là encore, je ne peux pas commenter un cas particulier. En règle générale, d'après nos statistiques, lorsqu'une Première nation assume la direction de son école, lorsque les enfants sont exposés à leur culture propre, à une langue des Premières nations, les résultats s'améliorent, et de façon générale, les enfants retiennent mieux lorsqu'ils vont à l'école dans la réserve.
M. Crawford: Merci.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, messieurs.
Nous allons maintenant passer à un tour de cinq minutes et commencer par M. Rocheleau.
[Français]
M. Rocheleau: Monsieur le sous-ministre, dans la culture organisationnelle de votre ministère, que signifie l'obligation de rendre des comptes? Qu'est-ce que cela signifie chez vous, à votre ministère?
[Traduction]
M. Serson: Vous parlez de toute la question de la responsabilisation et de ce que cela signifie...?
[Français]
M. Rocheleau: Oui, que signifie pour vous l'obligation de rendre compte?
[Traduction]
M. Serson: Dans notre environnement, il s'agit de ce genre de situation, quand nous essayons de travailler avec nos partenaires des Premières nations et de les convaincre de la nécessité d'observer des normes très strictes pour la reddition de comptes, car ces comptes sont placés devant le public canadien et ils doivent justifier un budget qui, comme monsieur l'a mentionné, continue à augmenter à un moment où très peu de budgets augmentent.
Toutefois, en même temps nous essayons de leur faire comprendre que cette responsabilisation est également dans leur intérêt. La situation idéale que nous recherchons, c'est une Première nation qui rend des comptes très stricts à sa propre communauté dans l'espoir que tout cela va s'aligner et que le ministre et le Parlement en seront satisfaits également.
[Français]
M. Rocheleau: Monsieur le vérificateur général, pensez-vous qu'avec la nouvelle méthode, qu'on appelle ETF, on va parvenir à répondre aux questions que vous posez au paragraphe 33.48 de votre document? Avec cette méthode, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien va-t-il parvenir à répondre aux questions très pertinentes que vous posez là?
M. Desautels: La nouvelle méthode offre un certain potentiel de résoudre certains des problèmes qu'on a soulevés. Entre autres, elle peut nous donner plus de flexibilité pour traiter chaque Première Nation selon ses caractéristiques particulières.
Mais je dois ajouter qu'il n'y a rien d'automatique. Le problèmes que nous avons soulevés sont réels et, dans bien des cas, on peut les attribuer à une question de capacité. Comme on l'a mentionné dans nos statistiques, beaucoup des Premières Nations sont extrêmement petites, comptant une population de moins de 500 personnes, et on leur demande d'être à la fois des administrateurs, des comptables et des gestionnaires de programmes sociaux, de programmes de santé et de programmes de construction. En fait, il est presque impossible que ces Premières Nations puissent réunir toutes ces capacités.
L'une des choses sur lesquelles il faut travailler très fort, et je pense que le ministère le reconnaît, c'est à développer les capacités des Premières Nations dans le cadre de chacune des ententes de transfert de fonds. L'entente elle-même ne va pas régler ce problème-là.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Desautels.
Il vous reste environ trois quarts de minute. Mais si vous préférez, je serai très tolérant au prochain tour.
[Français]
M. Rocheleau: Ce serait une question complémentaire à celle-ci.
Comme ministère, pensez-vous être en mesure de répondre aux questions du vérificateur général ou si vous trouvez que le vérificateur en demande trop ou va trop loin? Est-il raisonnable de poser ce genre de questions compte tenu de la complexité du dossier?
[Traduction]
M. Serson: Je vais demander à mes collègues qui sont plus directement concernés de vous répondre, mais je ne pense pas que les demandes du vérificateur général échappent au cadre de nos capacités. En fait, ce sont précisément les questions que nous devons résoudre pendant que nous nous occupons de ces accords.
Vous n'êtes pas d'accord?
M. DiBartolo: Dans son rapport, le vérificateur général soulève des questions tout à fait légitimes, et il est certain que ce qu'il dit de la responsabilisation va nous aider dans nos relations avec les Premières nations. Son bureau a passé deux ans, je crois, à consulter les Premières nations pour définir ce qui, à leur avis, constitue un cadre d'imputabilité approprié. C'est une chose qui va nous aider dans nos consultations futures, mais nous n'oublions pas non plus que l'accord de financement n'est pas la seule considération. Comme le vérificateur général vient de le dire, l'accord de financement ne résoudra pas les problèmes; pour ce faire, il va falloir acquérir des compétences et savoir rendre des comptes.
Le président suppléant (M. Grose): Merci.
Monsieur Duncan, cinq minutes.
M. Duncan: Je reviens aux observations de M. Crawford; ces derniers temps, le ministère a dépensé des sommes énormes, à faire des investissements considérables pour construire des écoles et autres installations. Je connais des communautés où il n'y avait qu'une seule école et où maintenant il y en a deux, et où les deux populations sont séparées, autochtone et non autochtone. S'il y avait une seule école, la communauté en général serait mieux servie, on pourrait faire des économies sur les effectifs d'enseignants, etc.
On pose des questions aux gens de la communauté. On a essayé de résoudre un problème avec un bulldozer. Le conseil de bande avait des difficultés financières, et il a pensé qu'un gros projet d'immobilisations lui permettrait de s'extriquer de ses difficultés à court terme.
C'est du moins ce que pensent les gens de la communauté. Il n'y a pas eu de demande de la population, ce n'était pas vraiment un besoin. En fait, les gens ont l'impression que dans les deux communautés la qualité de l'éducation a souffert.
À mon avis, ce genre de chose ne se produirait pas avec un véritable système de responsabilisation axé sur l'optimisation des ressources. Pensez-vous qu'il soit possible d'établir les priorités d'investissement sur cette base-là?
M. Serson: Je vais répondre d'abord avant de céder la parole à mes collègues. Le travail que nous faisons sur les écoles est fondé sur un plan d'immobilisations auquel il reste trois ou quatre ans à courir, et il m'est donc difficile de croire que nous puissions réagir à une situation d'urgence, sauf si le besoin s'en fait sentir, mais nous somme disposés à examiner de plus près l'exemple précis que vous donnez.
Je crois que vous avez tout à fait raison de soulever la question des économies d'échelle. Nous allons tenter de relever le niveau de nos discussions avec nos partenaires des Premières nations pour ce qui est de l'importance des économies d'échelle. La Commission royale sur les peuples autochtones a remis cette question à l'avant-plan et je crois que nous devons le faire.
Nous avons axé notre vérification davantage sur les résultats. Au plan technique, cela nous amène à mettre davantage l'accent sur l'optimisation des ressources mais je vais laisser à l'un de mes collègues le soin de vous en parler.
M. DiBartolo: Oui, cela va au-delà d'une simple vérification. Chaque Première nation doit préparer et soumettre une vérification annuelle. Dans le chapitre qu'il consacrait à cette question, le vérificateur général a dit notamment que l'une des faiblesses des exigences actuelles en matière de vérification c'est qu'elle n'exige pas la prise en compte de tous les actifs ou de toutes les sources de revenu d'une Première nation ou d'une bande donnée. Au cours de la dernière année, nous avons demandé que les Premières nations nous fournissent des vérifications d'états financiers consolidés indiquant tous les revenus, afin que nous puissions nous faire une bien meilleure idée de la situation financière de chacune des bandes.
En outre, nous mettons davantage l'accent sur les besoins d'information tant pour les Premières nations, afin qu'elles puissent mieux gérer leurs programmes, que pour le ministère et le ministre, qui doivent rendre des comptes au Parlement. Ainsi, nous nous attardons beaucoup plus aux résultats.
Le sous-ministre a mentionné dans son exposé liminaire que nous avons participé cette année à un projet pilote sur l'amélioration des rapports de rendement, et nous venons tout juste de déposer le nôtre. Je crois que bon nombre des indicateurs décrivent davantage les résultats que les transactions détaillées décrites traditionnellement dans les rapports de rendement du gouvernement.
M. Duncan: Comment le MAINC donnera-t-il suite à la recommandation du vérificateur général voulant que l'on tienne compte aussi des autres sources de revenu des Premières nations afin d'évaluer adéquatement les risques et d'établir les priorités de financement en conséquence, particulièrement quand les changements proposés à la Loi sur les Indiens, rendus publiques en septembre, semblent aller dans le sens contraire?
M. DiBartolo: Comme je viens de le dire, monsieur Duncan, nous avons changé nos exigences de vérification pour l'exercice 1995-1996 et nous exigeons maintenant que toutes les Premières nations nous fournissent des vérifications d'états financiers consolidés qui reflètent non seulement les revenus que leur verse le gouvernement mais aussi les revenus qu'elles génèrent elles-mêmes ou qui proviennent d'autres parties. Nous serons dorénavant en mesure de mieux évaluer la totalité des revenus de chacune des Premières Nations, le total des revenus en proportion de l'endettement et ainsi faire une meilleure évaluation des risques dans des cas individuels.
M. Duncan: Nous dites-vous que cela ne changera pas même si les modifications proposées à la Loi sur les Indiens sont adoptées?
M. DiBartolo: Aucun des changements proposés ne changerait quoi que ce soit à cette façon de faire.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Duncan.
Nous passons maintenant à M. Hubbard.
M. Hubbard (Miramichi): Merci, monsieur le président.
Il semblerait, d'après ce que disent M. Crawford et d'autres encore, et même nos propres électeurs... un nombre croissant de Canadiens s'inquiètent de voir que des sommes aussi considérables sont dépensées sans contrôle et sans imputabilité.
On nous dit aujourd'hui que les trois quarts de vos dépenses ne sont pas vérifiées par le VG. Est-ce exact, pour ce qui est des 4 milliards de dollars?
M. Serson: Ce que dit le vérificateur général, je crois, c'est qu'il vérifie...
M. Hubbard: Est-ce bien 3 milliards de dollars qui sont versés aux 600 communautés pour lesquelles il n'y a pas de rapport de vérification? Est-ce exact?
M. Desautels: Puis-je tenter de répondre à cette question? Nous vérifions la totalité des dépenses du ministère. S'agissant des transferts aux Premières Nations, nous avons accès à l'information dont dispose le ministère pour justifier le transfert. Ainsi, nous vérifions le transfert des sommes versées par le ministère à la Première nation. Toutefois, une fois que cette dernière reçoit l'argent et qu'elle l'utilise pour l'enseignement ou les services sociaux, nous ne vérifions pas cela. Ce travail-là est fait par un vérificateur indépendant.
M. Hubbard: À l'heure actuelle, vous avez environ 600 partenaires différents. Cela semble être un grave problème. Vous traitez avec 600 groupes et tous les deux ans les dirigeants du groupe sont remplacés lors d'élections locales. Le ministère a-t-il un système de classement ou un système qui lui permettrait de dire que la nation 1 a un excellent système de comptabilité tandis que la nation 14 a un très mauvais système qu'il faudrait tenter d'améliorer? Y a-t-il moyen de savoir quelles Premières nations obtiennent une bonne ou une mauvaise cote pour leur système comptable?
M. DiBartolo: En réponse à la question précise, nous avons un système de classement, mais je ne l'appellerais pas ainsi. Tous nos transferts de fonds aux Premières nations sont des transferts conditionnels. Nous effectuons des vérifications de conformité pour vérifier si les Premières nations respectent les conditions dont sont assortis les transferts. Le vérificateur général a fait allusion au fait qu'il y a un certain nombre de types de financement différents et comme nous...
M. Hubbard: Je n'ai que cinq minutes. Très brièvement, savez-vous qu'un certain groupe fait un bon travail tandis que d'autres groupes - comme nous l'avons dit plus tôt, certaines collectivités comptent moins de 300 habitants et ont besoin de plus d'aide - n'ont pas de bons administrateurs.
M. DiBartolo: Oui, nous le savons, et nous faisons une évaluation de leurs capacités avant d'accepter de mettre en place pour eux des arrangements de financement plus souples.
M. Austin: Il m'apparaît important de comprendre que tous les fonds fédéraux transférés à une Première nation font à chaque année l'objet d'une vérification par un vérificateur professionnel. Un vérificateur professionnel donne un avis comme celui que le VG donne au gouvernement du Canada sur la façon dont les fonds sont dépensés au regard des conditions dont le transfert est assorti. Nous recevons tous ces rapports de vérification. C'est ce qu'illustre ce graphique.
M. Hubbard: Je sais cela. Mais pouvez-vous identifier... Comme nous l'avons signalé, certaines bandes ont de bons administrateurs et d'autres de mauvais administrateurs. Il doit bien y avoir certains groupes avec qui vous devez travailler année après année pour améliorer la qualité de l'administration.
Pour ce qui est de la situation socio-économique, vous parlez à la page 33-7 du revenu individuel moyen. Je m'inquiète un peu de ce graphique publié par votre ministère parce que, quand je l'examine et que je compare les chiffres qu'il renferme à d'autres statistiques que nous recevons dans nos bureaux, je vois que le revenu par habitant est de 10 141$ comparativement à 19 000$ pour le Canadien moyen. Pour en arriver à ce montant, tenez-vous compte de facteurs tels que la fiscalité, les soins de santé et dentaires, le transport? Ajoutez-vous tout cela aux 10 000$ ou est-ce que vous les retranchez aux 19 000$? Que comparez-vous exactement dans ce tableau? D'après ce que je sais de la situation dans ma région, je me demande si nos Autochtones sont traités comme ils le doivent avec ces 10 000$ de revenu par habitant. Ajoutez-vous ces autres avantages qu'ils obtiennent quand vous calculez ces 10 000$ ou est-ce que vous les omettez?
M. Austin: Le tableau dont vous parlez est celui du rapport du vérificateur général qui présente tout simplement le revenu moyen.
M. Hubbard: Ainsi, le total n'inclut pas l'impôt ou les déductions d'impôts. Ce tableau est publié par votre ministère, n'est-ce pas?
M. DiBartolo: Il s'agit de chiffres bruts, mais je pourrai me renseigner et vous communiquer la réponse.
M. Hubbard: Monsieur le président, si nous comparons ces chiffres à ceux de l'Institut Fraser pour ce qui est de la fiscalité, il me semble que nous devrions analyser plus avant ce tableau. Il a une véritable signification. Merci.
Le président suppléant (M. Grose): Madame Barnes, cinq minutes.
Mme Barnes (London-Ouest): J'aimerais revenir sur quelques-unes des questions déjà abordées. Nous pourrions peut-être nous reporter aux tableaux, particulièrement celui intitulé «Observations de vérification». Ce que je trouve encourageant c'est qu'au cours des 10 dernières années, la proportion de rapports de vérification sans réserve est passé de 49 p. 100...
Une voix: De quel tableau parlez-vous?
Mme Barnes: De celui intitulé «Observations de vérification». Il s'agit du quatrième tableau. Je veux m'assurer de bien comprendre ce que vous nous dites ici.
D'après ce que je vois dans votre tableau, au cours de la dernière décennie, entre 1983-1984 et 1994-1995, le pourcentage de «rapports de vérification sans réserve» est passé de 49 p. 100 - ce qui est à mes yeux et aux yeux de tout le monde, je crois, une bonne vérification - à 77,6 p. 100 de rapports de vérification sans réserve et vous donne ainsi, je crois, le total des bandes dont nous parlons... Le nombre de rapports de vérification avec réserve est tombé à 18,2 p. 100. Les récusations désignent, il me semble, la décision de ne pas présenter d'états. Ce n'est pas un refus de donner une opinion, mais un refus de participer au processus, ou un peu des deux?
M. Austin: Il y a aurait sans doute des états financiers, mais le vérificateur indique ainsi qu'il est incapable d'attester l'exactitude des renseignements qu'ils renferment.
Mme Barnes: D'accord. Le rapport de vérification porte essentiellement sur les états financiers, lesquels décrivent les dépenses. C'est bien cela?
M. Austin: Oui.
Mme Barnes: J'allais dire que tout cela est extrêmement encourageant. C'est un énorme progrès en 10 ans.
Ma question porte maintenant sur l'étendue de la vérification que vous demandez pour l'an prochain. Ai-je bien compris que vous voulez que les actifs soient vérifiés aussi bien que les états financiers?
M. DiBartolo: Oui.
Mme Barnes: D'accord.
M. DiBartolo: Nous avons demandé des vérifications des états financiers consolidés qui incluraient les autres sources de revenus.
Mme Barnes: C'est plus que ce que le Canadien moyen fournit au gouvernement à chaque année.
M. DiBartolo: Exactement.
Mme Barnes: Chacun de nous doit soumettre uniquement une déclaration de revenus et une entreprise paierait des impôts sur ses revenus. Ici, nous demandons une information complète et détaillée, ce qui est assez inhabituel. Je crois qu'on en demande beaucoup plus qu'à un ménage moyen.
Cela étant, je serais curieuse de savoir quelle sera la complexité du nouveau système et si vous croyez que le pourcentage de rapports de vérification sans réserve baissera?
Le deuxième volet de ma question c'est de savoir comment vous avez si bien réussi, étant donné la difficulté de la tâche. C'est manifestement une bonne augmentation. À mes yeux, un rapport de vérification sans réserve montre un bon contrôle des dépenses.
M. DiBartolo: Pour ce qui est de l'effet prévu de l'exigence de vérification d'états financiers consolidés sur les réserves accompagnant les rapports de vérification, je pense qu'il est encore trop tôt pour se prononcer. Comme je l'ai dit, nous avons établi cette exigence pour l'exercice 1995-1996, et nous commençons tout juste à recevoir les rapports de vérification. D'après les indications que nous avons reçues, la plupart des Premières nations ont pu présenter des vérifications d'états financiers consolidés en temps opportun.
Pour ce qui est de l'amélioration du pourcentage de vérifications sans réserve, je pense que cela reflète notre approche globale à la gestion financière. Dans les cas où l'on nous refuse les vérifications, dans les cas où une Première nation est en difficulté financière, où il y a tout lieu de croire à l'existence de problèmes financiers, nous travaillons avec la Première nation pour élaborer des plans de redressement qui lui permettront de corriger ces problèmes financiers, quels qu'ils soient. Il peut s'agir d'un plan que la Première nation peut administrer elle-même, avec l'appui et le soutien de nos bureaux régionaux ou encore de situations extrêmes où nous nommons un fiduciaire chargé de gérer les affaires de la communauté. Il y a peu de cas dans cette catégorie. La plupart des plans de redressement sont administrés par les Premières nations elles- mêmes.
Cela reflète, je crois, un effort concerté de notre part, en collaboration avec les Premières nations, pour améliorer la gestion financière dans les réserves.
Mme Barnes: J'espère que cette flèche ne sera pas orientée dans l'autre direction, quand nous aurons modifié le système, parce que c'est une nette amélioration.
J'aimerais maintenant que nous parlions du dernier graphique, parce que j'avoue franchement ne pas le comprendre. Comment passons-nous de 9,2 p. 100 de bénéficiaires qui ont un déficit cumulatif de plus de 8 p. 100 à 20 p. 100? Que se passe-t-il ici? Il doit y avoir à cela des raisons que nous devrions connaître.
M. DiBartolo: Je crois que si vous étudiez ce graphique en relation avec le pourcentage de rapports de vérification reçus, vous noterez une étroite corrélation. Cette augmentation s'explique en grande partie par la quantité d'informations que nous recevons sur la période de... nous n'avons pas reçu tous les états financiers vérifiés en 1983-1984 qui nous auraient permis d'avoir une idée de l'endettement total.
Mme Barnes: La vraie question est de savoir comment nous nous retrouvons avec certaines bandes qui ont constamment des déficits malgré les fonds que nous leur versons.
M. DiBartolo: Cela reflète l'emprunt sur les marchés financiers.
Mme Barnes: Il n'y a pas d'élément de mauvaise gestion là-dedans?
M. Serson: Nous sommes tous capables de mauvaise gestion et dans certains cas c'est peut-être l'explication à retenir. Il y a un autre élément dont nous devons être conscients et il est reflété dans ce graphique. Le soutien qu'elles obtiennent de nous...
Mme Barnes: Le graphique ne sera pas reproduit dans les procès-verbaux et témoignages et il serait donc bon que vous l'expliquiez.
M. Serson: Cela reflète la baisse du taux de croissance de notre budget, qui passe de 12 p. 100 en 1989-1990 à 3 p. 100 cette année et à 2 p. 100 l'an prochain. Cela suppose un ajustement considérable pour n'importe quelle communauté, qu'il s'agisse d'une Première nation ou d'une municipalité. Il faut parfois emprunter pendant la période d'ajustement et c'est un élément que reflète le graphique.
Mme Barnes: Merci.
Le président suppléant (M. Grose): J'accorde maintenant la parole à M. Paradis.
M. Paradis (Brome - Missisquoi): Merci beaucoup, monsieur le président.
Ma première question...
[Français]
pour le vérificateur général. Reportons-nous à la pièce 33.1, dans le texte français, à la page 33-7. Je reviens à la question qui a été soulevée plus tôt concernant le revenu individuel moyen de 10 141$. Plus tôt, on demandait à M. le sous-ministre ce que représentait cette somme 10 141$. Je vous renvoie la question. Que représente cette somme?
Au deuxième tableau, à la page suivante, on constate que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a un budget de 4,5 milliards de dollars et les autres ministères, un budget de deux milliards de dollars. Donc un total de 6,5 milliards de dollars est affecté aux réserves, aux autochtones.
À la page 33-17, on dit qu'il y a quelque 620 000 autochtones pour un budget de 6,2 milliards de dollars. Cela fait environ 10 000$ par personne. Lorsqu'on dit que le gouvernement canadien, dans son ensemble, dépense 10 000$ par personne autochtone, s'agit-il de ce revenu individuel moyen de 10 000$ que l'on voit ici ou d'une autre somme de 10 000$?
Il doit y avoir des autochtones qui travaillent aussi à l'extérieur des réserves, un peu partout. Donc, il y en a qui vont se chercher un revenu autre que les prestations d'aide sociale ou d'assurance-chômage. Je cherche à décortiquer cela. Ce montant de 10 000$ qui nous est présenté à la pièce 33.1 est-il un revenu d'activités économiques régulières et faut-il lui ajouter 10 000$ d'interventions du gouvernement fédéral dans l'ensemble des programmes?
M. Desautels: Monsieur le président, j'aimerais que M. Wilson réponde à cette question, s'il vous plaît.
[Traduction]
M. Grant Wilson (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président.
D'abord, l'information qui se trouve à la pièce 33.1 provient du ministère. Je voulais toutefois dire que le revenu individuel moyen est celui de la population d'Indiens inscrits vivant dans une réserve ou hors réserve. Cela comprend les Indiens inscrits mais qui travaillent à l'extérieur. Ces chiffres sont le produit d'une série d'intrants. Je crois qu'ils sont colligés par Statistique Canada, mais le ministère serait peut-être mieux placé pour répondre à la question.
[Français]
M. Paradis: J'adresse ma question à M. le sous-ministre ou à un autre responsable du ministère. Pour qu'on se comprenne bien,
[Traduction]
Ma question porte sur les 10 141$, chiffre qui figure à la pièce 33.1. J'aimerais savoir ce que comprend ce total. Si nous prenons toutes les dépenses du gouvernement fédéral, nous obtenons un total d'environ 6,2 milliards de dollars par année pour une population de 620 000.
M. Serson: Puis-je d'abord apporter une correction, monsieur Paradis? Si vous analysez ces chiffres, les 4,5 milliards de dollars du MAINC incluent aussi les dépenses du Programme des affaires du Nord. Ainsi, oui, il y a des dépenses effectuées au nord du 60e parallèle au profit de la population, dont une partie est composée de membres des Premières nations, mais il faut être prudent dans l'interprétation des chiffres.
Les programmes qui font le dernier quart du tableau circulaire sont destinés aux Autochtones. Nous parlons d'une population d'environ un million et il n'est donc pas possible de diviser tout simplement. La plupart des programmes des Affaires indiennes sont destinés à 337 000 personnes qui vivent dans les réserves, mais même là il y a quelques exceptions, notamment en ce qui a trait à l'enseignement post-secondaire. Il n'est pas nécessaire de vivre dans une réserve pour avoir droit au financement de l'enseignement post-secondaire.
Quant aux 10 000$, nous pourrions peut-être faire parvenir une réponse au comité par écrit, monsieur le président. La population d'Indiens inscrits est de 574 000 et je crois que vous parliez du revenu total, ce qui signifie le revenu provenant de l'emploi, des prestations d'aide sociale et d'assurance-chômage, enfin de toutes sources.
M. DiBartolo: Dans les réserves et hors réserve.
M. Serson: Mais il n'est pas possible de diviser le budget total par le nombre de personnes.
Le président suppléant (M. Grose): Permettez-moi de faire une interjection ici. Le gouvernement fédéral engage des dépenses pour le compte de tous ses citoyens et je me demande si ce n'est pas trompeur de parler de 10 000$ par Autochtone. Quel serait le total pour chacun des autres citoyens du pays? C'est une idée tout simplement, vous n'avez pas à me répondre.
M. Serson: Puisque vous avez entrouvert la porte. C'est un commentaire très valable. Il faudrait comparer nos dépenses aux dépenses brutes des provinces et des municipalités pour le même ensemble de programmes et de services. Si l'on faisait cette comparaison là, je ne sais pas si le résultat serait le même.
Le président suppléant (M. Grose): Ce serait intéressant de le savoir. Pourriez- vous nous faire parvenir un court rapport de moins de deux pages?
M. Serson: Nous allons voir ce que nous pouvons faire.
Le président suppléant (M. Grose): Merci.
Monsieur Rocheleau.
[Français]
M. Rocheleau: Dans le cadre de votre réponse au vérificateur général en ce qui a trait à l'effort de responsabilisation souhaité de la part des Premières Nations, vous disiez que les Premières Nations seront tenues de faire une évaluation de leur système de gestion et de responsabilisation.
Vu qu'on parle d'évaluation, faut-il comprendre qu'il y aura une grille d'évaluation? S'il y a une grille d'évaluation, par qui sera-t-elle conçue? Par le ministère ou par les Premières Nations? Faut-il comprendre aussi qu'il y aura une autoévaluation par les Premières Nations, avec ou sans grille?
[Traduction]
M. Austin: D'abord, en ce qui a trait aux vérifications, comme nous l'avons déjà dit, nous exigeons des rapports de vérification annuels. Ils sont préparés selon des normes fixées par les conseils de comptables professionnels, dont l'Institut canadien des comptables agréés.
Tous les rapports de vérification que nous recevons, monsieur, sont préparés selon ces normes ouvertes pour tous les secteurs de l'économie et tous les gouvernements. En réalité, on utilise les normes de comptabilité du secteur public.
[Français]
M. Rocheleau: Je ne parle pas de vérification, mais d'évaluation. C'est à la page 33-28 du texte français. C'est le premier point. On dit:
- Le Ministère a pris de nombreuses mesures pour renforcer la responsabilisation, notamment:
S'il y a une évaluation, y a-t-il une grille d'évaluation? Si oui, par qui est-elle faite? Il ne s'agit pas d'une vérification subséquente des états financiers, etc. C'est de cela que vous parlez.
[Traduction]
M. Austin: Pour ce qui est des Premières nations, nous avons construit une grille d'évaluation assez complexe qui prend en compte un certain nombre de fonctions différentes. Je peux vous en laisser un exemplaire. Chacune des Premières nations utilisera cette grille, souvent avec l'aide d'un consultant, parfois avec l'aide du ministère.
[Français]
M. Rocheleau: La grille est-elle faite par chacune des Premières Nations ou par le ministère?
[Traduction]
M. Austin: Non, la grille est préparée par nous, monsieur. Comme je l'ai déjà dit, on tient compte des ressources humaines, de la gestion financière, et autres éléments comme ceux-là. C'est une grille assez détaillée qui prend en compte la politique, la planification, le contrôle et les fonctions d'examen. On fait une évaluation de la capacité à certains égards, et si elle est jugée insatisfaisante, un plan de développement est préparé afin d'améliorer la capacité pour telle ou telle fonction au niveau communautaire.
C'est une évaluation très poussée et très complète, un outil d'évaluation qui a été mis au point et qui prend en compte différentes fonctions administratives.
[Français]
M. Rocheleau: Cette grille a-t-elle déjà été fournie au greffier du comité, par exemple?
[Traduction]
M. Austin: Non, mais je me ferai un plaisir de vous en laisser un exemplaire.
[Français]
M. Rocheleau: Pourrait-on en avoir une copie, s'il vous plaît?
[Traduction]
M. Austin: Je ne sais pas si j'en ai une copie en français, mais j'en ai une en anglais et je tenterai de vous en obtenir une en français.
Le président suppléant (M. Grose): Monsieur Rocheleau, il vous reste une minute, si vous avez une autre question.
[Français]
M. Rocheleau: Plus tôt, vous disiez que vous trouviez les questions très pertinentes, que vous étiez prêts à collaborer et que tout était correct dans le meilleur des mondes. Mais, pratiquement, comptez-vous entreprendre des actions pour répondre aux questions du vérificateur général au point 33.48?
Vous dites que vous vous entendez bien et que le vérificateur fait bien son travail et a bien perçu la situation, mais qu'entendez-vous modifier dans le fonctionnement du ministère pour satisfaire aux attentes du chien de garde qu'est le vérificateur général?
[Traduction]
M. Serson: Mes collègues voudront peut-être ajouter autre chose, monsieur Rocheleau, mais nous discutons activement avec nos partenaires des Premières nations pour déterminer la responsabilité de chacun pour ce qui est du rendement. D'ailleurs, M. DiBartolo a soulevé la question de savoir si en même temps qu'elles doivent nous rendre compte de leur utilisation des fonds publics, nous n'avons pas envers elles l'obligation de partager l'information que nous recevons. Donc toute cette question des rôles et des responsabilités de chacun fait partie intégrante de nos discussions.
Nous passons à la question des résultats. Il est encore tôt dans le processus, mais nous avons engagé des pourparlers avec elles pour savoir si nous ne pourrions pas modifier la nature des données que nous recueillons. Nous exigeons actuellement énormément de données et nous pourrions tenter d'alléger le fardeau des Premières nations en identifiant 12 à 15 indicateurs de résultats pour lesquels nous pourrions obtenir des données qui nous permettraient de déterminer si les fonds sont utilisés de façon optimale et pour les fins prévues.
Nous examinons toutes ces questions pendant la mise en place de ces arrangements et dans le cadre de nos relations avec les Premières nations.
M. DiBartolo: J'aimerais ajouter quelque chose à cela.
Le vérificateur général a noté des faiblesses précises dans les arrangements de financement existants. Nous avons dû admettre que la façon dont nous traitons avec les Premières nations est fonction de la nature de ces ententes de financement et nous avons pris un certain nombre d'initiatives pour tenter de corriger les faiblesses relevées par le vérificateur général.
Nous mettons davantage l'accent sur le respect des conditions imposées. Nous avons créé des unités spéciales dans chacune des régions. Nous mettons davantage l'accent sur des évaluations avant de conclure des accords de financement plus souples. Nous avons élaboré un plan d'action pour chacun de ces points.
Le président suppléant (M. Grose): Merci.
J'aimerais vous signaler qu'il y aura, me dit-on, une sonnerie de 15 minutes vers 17 h 15, alors réglez vos questions et vos réponses en conséquence.
J'ai sur ma liste M. Silye, M. Paradis et M. Duncan. Il est bien clair que nous ne pourrons pas passer tout le monde. Si vous voulez raccourcir vos questions, ce sera parfait.
M. Silye: Mes questions portent sur l'imputabilité. Cela m'apparaît très important.
Quant au graphique que vous nous avez donné sur l'opinion des vérificateurs, d'une partMme Barnes dit que ce sont de bonnes nouvelles et que c'est très encourageant, mais moi j'estime que ce sont de mauvaises nouvelles. Si vous songez à ce que représentent ces chiffres, cela signifie qu'environ 23 p. 100 ou près d'un milliard de dollars ont été dépensés de façon douteuse. Je ne sais pas ce que sont les rapports de vérification avec réserve ou avec récusations, mais tout cela représente des sommes considérables.
Mon collègue, qui est le porte-parole de notre partie pour les affaires autochtones, me dit que dans les réserves les habitants se plaignent de ne pas recevoir l'argent qui leur était destiné. Cela montre peut-être qu'il y a dans votre ministère un problème d'un milliard de dollars pour ce qui est de l'imputabilité et de l'acheminement des fonds à leurs destinataires.
Nous croyons fournir des fonds suffisants, mais ils ne se rendent pas à destination, et que fera le ministère en plus de faire vérifier les rapports de vérification qu'il a déjà reçus? Il faudrait un autre contrôle des états financiers vérifiés. Chaque société obtient des états financiers, mais il faudrait parfois faire une deuxième vérification pour bien rendre compte de ce milliard de dollars.
Mon deuxième commentaire est le suivant. En tant que porte-parole de mon parti en matière de revenu et de douane, je me suis toujours inquiété de la contrebande et je n'ai pas su par quel bout prendre ce problème. Nous savons tous que l'économie souterraine est alimentée par des gens qui transportent des marchandises d'un côté de la frontière à l'autre, et les points les plus névralgiques sont les réserves situées près de la frontière ou qui chevauchent la frontière avec les États-Unis, et notamment Akwesasne.
J'ai parlé à quelques personnes qui m'ont dit que les conseils de bande qui dirigent Akwesasne, par exemple, n'aiment guère les rumeurs. Ils n'aiment pas entendre parler de contrebande. Comment peut-on les aider à réduire l'ampleur de ce phénomène et à assurer eux-mêmes le contrôle policier? Cela se rattache à mon commentaire sur l'imputabilité.
Si les conseils de bande ont besoin d'aide, ce serait bien qu'ils puissent dire aux membres de la bande que s'il y a de la contrebande, le financement global sera réduit.
Autrement dit, si vous constatez que les fonds ne sont pas utilisés comme ils devaient l'être et que les résultats sont insatisfaisants - et des bâtiments ne doivent pas être démolis après quatre ou cinq ans - réduisez le montant du financement. Menacez de leur retirer leur financement. Dites-leur que leur financement sera réduit d'autant s'ils ne peuvent démontrer que les fonds ont été distribués comme ils devaient l'être.
Voilà l'une de mes suggestions pour améliorer l'imputabilité. Qu'en pense le ministère?
M. Serson: Permettez-moi de répondre d'abord à vos commentaires sur la contrebande.
La contrebande relève du ministère du Solliciteur général; ce n'est pas notre responsabilité. Dans les collectivités mohawk, nous avons créé des tables rondes pour être certains d'apporter une aide utile aux initiatives de développement économique. Nous espérons que cela découragera le recours à des moyens illégaux pour gagner un revenu et que cela favorisera davantage de véritables développements économiques et des vrais salaires. Voilà l'effort que nous faisons dans cette collectivité.
Bill, voulez-vous parler de cette question des vérifications?
Il ne s'agit pas ici du montant d'argent, monsieur Silye. Il s'agit du nombre de bandes, du pourcentage de bandes.
M. Austin: Je n'ai pas l'équivalent en dollars. Ce qu'il faut noter, c'est que là où il y a motivation ou refus de donner une opinion ou un sérieux problème d'endettement, il y en place des mesures correctives. On fait était du degré d'intervention que M. DiBartolo a mentionné il y a quelques instants - du degré approprié d'intervention.
Donc, ce n'est pas comme si on ne faisait rien dans ces cas.
M. Silye: Le vérificateur général voudra peut-être nous parler des futures vérifications.
M. Desautels: Monsieur le président, je tiens à attirer l'attention du comité sur ce que nous avons dit dans notre chapitre, particulièrement aux paragraphes 33.54, 33.55 et même 33.56, au sujet de certaines limites des états financiers à titre d'outils de responsabilisation. Nous sommes très heureux lorsqu'il y a ce genre de rapports et même du fait qu'un pourcentage élevé soit sans réserve. D'un autre côté, comme nous le disons au paragraphe 33.54, il y a des états financiers qui tiennent compte strictement des entrées et des sorties de fonds, mais qui ne font pas état des résultats des programmes en soit et des résultats qu'on a obtenus grâce aux dépenses, et justement nous encourageons les ministères à produire de telles données de manière générale. Il ne faut pas penser cependant que même si ces outils sont très valables, ils régleront tous les problèmes de responsabilisation qu'on a face à ces dépenses.
Le président intérimaire (M. Grose): Merci. Monsieur Silye, votre temps est écoulé.
Monsieur Paradis.
[Français]
M. Paradis: J'aimerais tout d'abord rappeler aux collègues que dans les Comptes publics du Canada, on publie le tableau de toutes les dépenses supérieures à 100 000$.
Quant à moi, pour la première fois, j'ai fait cet exercice d'examiner rapidement toutes les dépenses gouvernementales supérieures à 100 000$. La première réaction qu'on a, en terminant cette lecture qui prend une douzaine d'heures, est de se dire qu'environ la moitié des pages ont trait au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et aux subventions ou contributions aux autochtones.
D'un autre côté, ce qui est rassurant là-dedans, c'est qu'on verse beaucoup d'argent directement à des bandes ou à des groupes constitués, ce qui devrait faciliter, dans certains cas, notre vérification ou notre examen.
Ma question s'adresse à M. le sous-ministre. Parallèlement, si on regarde globalement ce qui se passe dans le milieu des autochtones et du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien... Je reprends un peu la question de M. Silye, qui disait plus tôt qu'on avait l'impression que l'argent ne se rendait pas aux véritables bénéficiaires. On dirait qu'une partie de l'argent est bloquée quelque part en cours de route.
Quand on traverse une réserve et qu'on voit les gens, on se dit: «Mon doux, ils vivent encore dans des cabanes! Ça ne va vraiment pas.» Comment se fait-il que, nonobstant l'ampleur des sommes d'argent que dépense le gouvernement pour aider les peuples autochtones, on a le sentiment que l'argent ne se rend pas aux véritables bénéficiaires? Que faites-vous pour assurer au public canadien que les six milliards de dollars qu'on dépense se rendent aux véritables bénéficiaires?
[Traduction]
M. Serson: Si vous voulez, monsieur Paradis, nous pouvons parler de résultats. M. Duncan a mentionné un cas individuel qui le préoccupe. Mais le fait est qu'on peut voir les résultats au niveau du nombre d'élèves, de l'éducation, de l'aide sociale et des services sociaux qui sont fournis.
On n'entend pas de plaintes infinies de la part des Premières nations du pays au sujet du fait que des citoyens ne sont pas desservis. On n'entend pas ce genre de choses. Mais on entend ici et là des accusations de détournement de fonds. Et lorsque nous entendons parler de tels cas, nous en saisissons les autorités compétentes.
Nous pouvons revenir. Nous avons dit plusieurs fois que le ministre est l'un des premiers à faire état de ces résultats au regard de ses plans. Nous pouvons cela parce que nous obtenons ces résultats avec l'argent qu'on nous donne. Nous pourrions vous donner beaucoup de détails sur ce que nous faisons, et sur ce que font les Premières nations avec cet argent.
M. DiBartolo: Je veux seulement ajouter que la plupart des fonds, et chose certaine toutes nos subventions et contributions, sont versées ou bien aux conseils tribaux ou bien aux conseils de bande élus. Nous avons dit au début que pour ce qui est du cadre de responsabilisation, nous travaillons de concert avec les Premières nations pour nous assurer qu'il y ait transparence et divulgation par les conseils aux Premières nations. Comme tout niveau de gouvernement municipal, ces conseils devront rendre des comptes à leurs administrés pour s'assurer que les fonds qu'ils obtiennent sont dirigés vers les administrés, et ce, pour les fins qui ont été prévues.
M. Paradis: Merci, monsieur le président.
Le président intérimaire (M. Grose): Je crains que notre temps soit écoulé.
M. Silye: Pouvons-nous prendre cinq minutes de plus?
Le président intérimaire (M. Grose): Monsieur Duncan, que diriez-vous de deux minutes?
M. Duncan: D'accord.
Tout d'abord, on entend beaucoup plus de plaintes que ce qu'on en dit ici. Nous avons69 bandes sur 70 dans la province de la Saskatchewan qui comptent des centaines, voire des milliers de membres, qui sont très bien protégées parce que leurs intérêts sont menacés.
Il n'y a pas d'organisme indépendant auquel peuvent s'adresser ceux qui demandent des comptes, à part le ministre ou le ministère, et ceux-ci peuvent mal paraître.
L'un des problèmes fondamentaux que nous avons, est que les membres de la bande sont oubliés et une bonne part de cette documentation n'est pas rendue publique. Les gens sont obligés de s'adresser à leur conseil de bande, et ils n'obtiennent tout simplement pas satisfaction. Lorsqu'ils s'adressent au ministre, on leur répond de s'adresser au conseil de bande.
Ce graphique dont tout le monde a parlé illustre une autre chose. La ligne s'est orientée à la hausse au moment où les accords de financement ont été rendus plus souples, à tel point qu'ils sont maintenant si souples que l'escouade des crimes commerciaux ne se donne même pas la peine dans certains cas de faire enquête s'il y a des allégations de fraude. Les bandes peuvent essentiellement faire ce qu'elles veulent de l'argent et il n'y a pas un comptable qui pourrait y trouver à redire quand les règles sont souples à ce point. C'est une plainte des plus sérieuses. Cela va au coeur même de ce dont parle le vérificateur général.
On nous dit qu'il n'y a pas de problème au MAINC. Le vérificateur général continue de dire qu'il y a un problème et les membres de la bande disent eux aussi qu'il y a un problème. Et il y a un problème. Nous devons faire sauter cet embâcle. Cela ne peut durer. Nous nous retrouverons ici dans un an à nous plaindre des mêmes problèmes si personne ne prend cela au sérieux.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Duncan.
J'aimerais une très courte réponse et une récapitulation de la part de M. Desautels.
M. Serson: Ma réponse très courte serait celle-ci, monsieur le président. J'ai dit plus tôt que nous sommes déterminés avec nos partenaires des Premières nations pour assurer la transparence, la divulgation et le recours. Voilà les questions dont parle M. Duncan. Voilà ce qui doit se passer dans les collectivités des Premières nations et nous travaillons avec elles dans l'esprit d'un partenariat et selon les principes de l'autonomie gouvernementale pour les encourager à mettre en place ces éléments dans les collectivités des Premières nations afin de trouver des solutions aux problèmes dont a parlé M. Duncan.
Le président suppléant (M. Grose): Merci, monsieur Serson.
Monsieur Desautels, allez-y, s'il vous plaît.
M. Desautels: Monsieur le président, très brièvement, nous avons beaucoup travaillé avec le ministère et les Premières nations ces dernières années pour le compte du Parlement. Je crois que nous avons acquis une assez bonne compréhension des dossiers et des défis que posent à chacun ces programmes. Je voudrais donc m'assurer que les membres de ce comité n'aient aucune illusion et ne croient pas que ces problèmes seront aisément réglés et que le MAINC pourra y parvenir dans le délai qu'il s'est fixé.
Je crois que c'est un véritable défi. C'est une dure tâche qui attend le ministère. Il semble partager nos préoccupations et je m'en réjouis. Je crois qu'il faudra énormément de soutien pour mener cette tâche à bien et le ministère aura aussi besoin, à notre avis, de consulter largement les Premières nations individuellement, afin d'en arriver à un consensus de toutes les Premières nations. Je crois que les députés ne doivent se faire aucune illusion. Ce ne sera pas une tâche facile et il faudra y mettre le temps voulu.
Le président suppléant (M. Grose): Merci.
J'aimerais remercier le vérificateur et nos autres témoins. C'est très agréable de vous voir de face plutôt que de profil.
J'aimerais aussi remercier mes collègues de leur courtoisie et de leur civilité. Nous pourrions peut-être remettre cela à une autre fois.
La séance est levée jusqu'à 11 heures, le mardi 12 décembre.