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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 12 février 1997

.1541

[Français]

Le président: À l'ordre! Bonne fin d'après-midi à tous et à toutes. Le comité poursuit la séance suspendue hier qui portait sur l'étude du chapitre 23 du Rapport du vérificateur général de novembre 1996, qui traitait de la gestion du matériel.

Nous avions ajourné nos travaux après les présentations des témoins. Certains collègues avaient manifesté le désir de parler hier et je leur donnerai la parole aujourd'hui. Si d'autres collègues veulent intervenir aujourd'hui, qu'ils se sentent libres de le faire. Nous devrions en avoir pour encore une demi-heure ou trois quarts d'heure tout au plus.

[Traduction]

Je donne la parole à M. Hubbard pour cinq minutes.

M. Hubbard (Miramichi): Merci, monsieur le président.

Aujourd'hui, comme hier, il sera surtout question de la Défense nationale. J'ai des réserves à propos de la façon dont le gouvernement gère l'inventaire, le matériel et les fournitures. Même dans nos bureaux à nous, il y a encore des dictaphones qui remontent à il y a vingt ans, qui avaient coûté 500 $ à l'origine et qui en valent peut-être 5 $ aujourd'hui. Mais ces appareils figurent toujours dans l'inventaire, ce qui donne l'impression que l'on possède des appareils coûteux.

J'ai le sentiment que l'on conserve parfois des articles alors qu'il serait moins coûteux de s'en débarrasser. C'est peut-être quelque chose que le vérificateur général pourrait examiner la prochaine fois. Évidemment, il y a un problème pour le logement. Il y a un coût de 25 p. 100, mais en réalité ce pourcentage n'est peut-être pas réaliste.

On dirait qu'il y a un problème dans les ministères. Il y a d'importantes compressions, par exemple. On s'attend à une réduction de 45 000 postes. Or, au même moment, Travaux Publics et Services gouvernementaux envisageait d'acheter pour plusieurs millions de dollars de matériel de bureau. Allez savoir pourquoi.

À la Défense nationale, l'effectif va être réduit de 30 à 40 p. 100. Pourquoi continuez-vous à acheter du matériel...? Y a-t-il un système applicable à l'ensemble des ministères qui permette de déterminer là où il y a un excédent? Dans l'affirmative, vérifie-t-on si les biens excédentaires peuvent aller dans un autre ministère avant d'être renvoyés au Centre de distribution des biens de la Couronne?

Le vérificateur général a d'ailleurs dit avoir de sérieuses inquiétudes à propos de cette distribution. Il semble que le Centre de distribution des biens de la Couronne, qui relève de TPSG, prend une commission de 30 p. 100 lorsqu'il se charge de l'élimination de ces biens pour un ministère. Cela fait beaucoup de chiffres, mais il faut songer à la fraction non amortie du coût et se demander s'il y a lieu d'un conserver un article qui a peut-être coûté cher à l'origine et qui pourrait encore servir.

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Par exemple, dans les forces armées, l'intendance s'assure que les soldats ont ce qu'il faut pour faire des réparations, fournit le matériel et s'occupe des besoins de la compagnie ou du bataillon. Au lieu de se débarrasser d'un article pour une bouchée de pain, il est sans doute préférable de le remiser quelque part au cas où il pourrait encore servir.

Enfin, toujours en ce qui concerne la Défense, je m'inquiète du fait que beaucoup d'achats auprès d'entreprises allemandes ont été assortis de conditions que les entreprises canadiennes ne peuvent pas remplir.

Ces contrats à long terme nuisent beaucoup à l'industrie canadienne, même dans ma circonscription. Il y a une entreprise qui peut fournir des pièces pour les transports de troupes blindés, mais, en raison des contrats signés dans les années 70, ces pièces ne peuvent pas être obtenues d'une compagnie canadienne.

J'aimerais avoir des réactions sur ce que je viens de dire, monsieur le président.

[Français]

Le président: Madame Fréchette.

[Traduction]

Mme Louise Fréchette (sous-ministre, ministère de la Défense nationale): En ce qui concerne les incitations à se débarrasser de matériel ou de fournitures qu'il coûte plus cher de conserver que d'envoyer à la casse, cela dépend en partie de la proportion du prix de vente qui revient aux ministères. Des changements ont été apportés ces dernières années, et les ministères touchent au moins aujourd'hui une partie du prix de vente. Voilà donc une incitation.

Il y a d'autres formes d'incitations très fortes aujourd'hui, à la Défense nationale en tout cas, où le choix est très évident. Ou bien vous réduisez vos coûts en services de soutien, ou bien il ne vous est pas possible d'acheter telle ou telle pièce ou de tenir tel ou tel exercice. On est donc poussé à déterminer le coût de conservation de matériel désuet, ou que l'on conserve juste au cas, par opposition aux diverses méthodes destinées à s'assurer que l'on dispose des fournitures nécessaires.

En ce sens, je suis tout à fait d'accord avec le vérificateur général, qui dit que mieux on connaît les coûts, mieux on voudra gérer correctement l'inventaire. On est en train d'y arriver. Les investissements que nous consacrons à l'amélioration de nos systèmes de gestion des fournitures devraient rendre encore plus évident le coût de conservation de ce matériel.

Chose certaine, la règle actuellement à la Défense, c'est de se débarrasser de ces choses. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, cependant, à cause de la nature du matériel que nous achetons - il nous faut des pièces pour toute la durée de vie du produit, par exemple - nous essayons dans la mesure du possible aujourd'hui de conclure des contrats avec une entreprise qui nous fournira les pièces au fur et à mesure que nous en aurons besoin. Cela nous fait épargner le coût d'entreposage. Mais ce n'est pas toujours possible.

Vous avez aussi parlé du manque de coordination au gouvernement quand il s'agit de répondre aux besoins de base. Vous avez parlé du mobilier de bureau. Actuellement, la Défense nationale est répartie à 28 endroits dans la région. Lorsque l'effectif du quartier général aura été réduit de moitié, celui-ci sera regroupé dans quatre immeubles. Pour loger le personnel dans ces quatre immeubles, il a fallu refaire la disposition des lieux et remplacer le mobilier de manière à pouvoir loger entre 20 et 30 p. 100 plus d'employés par étage grâce à des meubles récents de type ergonomique.

Il y a donc parfois des arguments de rentabilité qui justifient tout à fait le remplacement du mobilier; cela permet de gagner beaucoup d'espace et d'offrir un meilleur cadre de travail. Au QG de la Défense, le mobilier est très vieux. Chez nous, je sais que c'est parfaitement justifié sur le plan financier parce que cela nous permet de réduire le nombre d'immeubles qui abritent nos employés et de réaliser des économies importantes sur le loyer et ailleurs.

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J'aimerais demander à M. Lagueux de nous parler des arrangements que nous avons avec les fournisseurs.

M. P.L. Lagueux (sous-ministre adjoint (Matériels), ministère de la Défense nationale): Merci.

En ce qui concerne les pièces de rechange que nous obtenons des fournisseurs allemands, comme la sous-ministre l'a dit, chaque fois que nous achetons du matériel neuf et complexe, nous achetons un stock de pièces de rechange pour toute la durée de vie du produit parce qu'il arrive souvent qu'il n'y a plus de pièces quand l'entreprise ne fabrique plus le produit. Ces pièces ont donc été achetées parce qu'elles sont celles du fabricant d'origine.

Pour ce qui est du matériel que nous achetons, souvent les pièces ne sont pas semblables à ce qui existe pour une automobile, par exemple, que l'on peut trouver chez Canadian Tire. On ne les trouve pas dans le commerce, et c'est pourquoi il faut...

Je suis au courant de l'exemple que vous avez donné à propos de la compagnie dans votre circonscription. Ils fabriquent des chenilles pour une partie du matériel. Si nous remplaçons des pièces sur des véhicules blindés lourds à chenilles, il faut s'assurer que leurs caractéristiques correspondent à celles du fabricant, aussi bien pour des raisons opérationnelles que pour la sécurité. On ne peut pas risquer de perdre une chenille à haute vitesse, par exemple. Il faut donc suivre un processus assez long pour s'assurer que les pièces du nouveau fournisseur sont conformes à celles du fabricant d'origine.

Je suis heureux de vous dire que c'est ce que nous sommes en train de faire et que la compagnie de votre circonscription a réussi à remplir les conditions voulues et à nous fournir des pièces de rechange fabriquées au Canada.

Le président: Monsieur Grose, vous avez cinq minutes.

M. Grose (Oshawa): Merci, monsieur le président. Ma question s'adresse à Mme Fréchette.

Cela ressemble un peu à un complot. J'ai essayé de prendre la parole hier, et la séance a été interrompue. Aujourd'hui, on a cru que la séance n'allait jamais commencer et que je n'aurais jamais la chance de dire quoi que ce soit de favorable.

À première vue, je trouve votre rapport très satisfaisant. J'ai hâte de voir les résultats des mesures dont vous parlez, parce qu'à mon avis vous êtes dans la bonne direction. Je suis aussi heureux d'entendre que vous avez un peu d'avance sur les autres en ce qui concerne l'inventaire. Comme j'ai été dans les affaires, je sais que l'inventaire, c'est mortel.

J'aimerais vous poser une question. À Toronto et à Moncton, on a consolidé les dépôts de matériel. Je sais vaguement comment ça se passe. Il y avait toujours là des montagnes d'uniformes, et il était toujours possible d'en trouver un qui n'était pas à ma taille. On prétend faire des économies de 30 millions de dollars par année. Ce qui m'ennuie quand on fait une prédiction comme celle-là sans connaître le coût, c'est qu'on ignore ce que l'économie va nous coûter. Combien cela nous a-t-il coûté de fusionner ces dépôts de matériel, y compris l'éventuelle perte immobilière?

Si le chiffre était de 100 millions de dollars, vous récupéreriez la perte en quatre ou cinq ans, et c'est acceptable. Si le chiffre était de 300 millions de dollars, jamais vous ne récupéreriez la perte. Je pense qu'il nous aurait été utile de connaître ce chiffre. Je n'imagine pas que vous l'avez ici. Par contre, je serais heureux que vous nous le communiquiez.

Mme Fréchette: Volontiers. Nous l'avons peut-être quelque part. Si je me souviens bien, la période de récupération est inférieure à trois ans pour le déménagement et la vente des dépôts, en partie parce que... Les dépôts de Montréal et d'Edmonton sont beaucoup plus efficaces. On peut y stocker beaucoup plus d'articles dans un espace plus petit. Il y avait donc d'excellents arguments financiers pour procéder ainsi. De fait, nous l'avons fait un an plus tôt parce que cela nous a permis de commencer à économiser plus tôt.

M. Grose: Je sais que vous aviez un immense dépôt de matériel à Toronto, et je me demandais combien cela a pu coûter de déménager le matériel ailleurs. Je ne sais pas quelle quantité de matériel... Il y a longtemps que j'y suis allé.

Si vous m'assurez que la période de récupération est de trois ans, cela se défend financièrement. Parfois, c'est si long que les conditions initiales ne s'appliquent plus. Peut-être que dans cinq, six ou sept ans, Montréal ne sera plus l'endroit idéal, ou peut-être que l'on pourrait faire mieux. Je vous remercie de votre franchise à propos de la période de trois ans, et cela me satisfait. Merci.

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Mme Fréchette: Je pourrai vous communiquer des chiffres plus précis. Nous préparerons des chiffres dès que nous reviendrons au ministère.

[Français]

Le président: Merci. Monsieur Rocheleau, je vous cède la parole pour cinq minutes.

M. Rocheleau (Trois-Rivières): Un peu dans la même veine que mon collègue M. Grose, j'aimerais demander aux représentants du Conseil du Trésor ou du vérificateur général du Canada si, compte tenu des efforts que l'on connaît et qui sont reconnus, des tentatives ou essais en vue d'une meilleure gestion des stocks du gouvernement, ils ont une idée de l'ordre de grandeur des épargnes qu'a pu réaliser le gouvernement dans ses efforts de rationalisation et de meilleure efficacité de la gestion des stocks, si épargne il y a.

[Traduction]

M. Al Clayton (directeur exécutif, Bureau des biens immobiliers et du matériel, Secteur des opérations gouvernementales, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada): Je n'ai pas de chiffre à vous donner pour le moment. Nous pourrions bien sûr calculer un chiffre approximatif, mais pour le moment je n'en ai pas à vous donner.

[Français]

M. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Nous ne sommes pas en mesure de répondre maintenant à la question de M. Rocheleau. Nous avons toutefois l'intention de faire un suivi plus tard sur ce chapitre et sur les mesures qui ont été prises pour répondre à nos recommandations.

Le président: Comme vous le faites toujours d'ailleurs. Est-ce que vous parlez d'un suivi dans 24 mois, dans deux ans?

M. Desautels: Dans moins de deux ans, oui.

M. Rocheleau: Ma deuxième porte sur toute la question de l'aliénation des biens du gouvernement qui relève en bout de ligne du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Les ministères de la Défense, des Ressources naturelles et de l'Agriculture ne peuvent eux-mêmes disposer de leurs équipements et doivent les confier à Travaux publics et Services gouvernementaux.

À votre avis, est-ce là une règle ex cathedra ou si on devrait pousser la réflexion jusqu'à se demander si on ne devrait pas dorénavant déléguer une telle responsabilité à chacun des ministères et, au sein de chacun des ministères, aux fonctionnaires locaux, que ce soit à Toronto, Terre-Neuve ou Montréal? Ne devrions-nous pas confier cette responsabilité aux fonctionnaires qui voient le stock qui est entreposé et inutilisé, et non pas à un supérieur hiérarchique qui est à Ottawa, qui ne voit pas et qui n'est pas en mesure de palper toutes les conséquences et les coûts d'entretien? Autrement dit, jusqu'où devrait-on déléguer ce genre de responsabilité? J'invite celui qui se sent le mieux placé à répondre.

[Traduction]

M. Clayton: Je devrais peut-être prendre quelques instants pour vous décrire le système, parce que le sujet a été évoqué dans une ou deux questions.

Comme on l'a signalé, les recettes nettes provenant de l'aliénation sont maintenant reversées aux ministères. L'organisme gouvernemental qui effectue la plupart des aliénations est le Centre de distribution des biens de la Couronne. Notons que ce centre a des bureaux non seulement à Ottawa, mais aussi dans tout le pays, pour s'occuper de ce genre d'aliénations. À quelques exceptions près, tous les ministères sont maintenant tenus de faire appel à cet organisme pour aliéner les biens publics.

En 1992, le Parlement a modifié la Loi sur le Centre de distribution des biens de la Couronne afin de donner au Conseil du Trésor la souplesse nécessaire, s'il le désire, pour permettre aux ministères de le faire eux-mêmes. À ce jour, le Conseil du Trésor a accordé certaines exceptions dans des cas ponctuels.

Nous avons assisté à un exemple classique lorsque la création des administrations aéroportuaires locales a entraîné des transferts massifs de biens aux autorités locales. Le Conseil du Trésor a donné à ces dernières le pouvoir d'agir directement sans passer par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Hier, j'ai mentionné un examen qui devrait se terminer très bientôt - dans quelques jours - et qui porte sur les étapes suivantes. Dans le rapport du vérificateur général, j'ai noté les trois critères qui régissent cet examen.

Premièrement, cela se fera dans un cadre contrôlé. Autrement dit, chacun ne s'occupera pas de ses affaires, mais l'aliénation se fera en quelque sorte dans un cadre contrôlé.

Deuxièmement, les ministères auront le choix; ainsi, il n'y aura pas un seul fournisseur de services, mais tout se fera dans un cadre contrôlé. Par exemple, on pourrait avoir deux ou trois sociétés privées. Vous pouvez choisir qui vous voulez, mais c'est le gouvernement qui décidera en fonction de certaines règles.

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Troisièmement, les ministères en tireront un bénéfice raisonnable, et il n'y aura pas d'interfinancement. Cela nous ramène à une question antérieure sur la règle de 30 p. 100. Traditionnellement, il y avait un taux standard, parce que nous faisions de l'interfinancement. Le gouvernement vend un très grand nombre d'articles sans aucune valeur; par conséquent, nous utilisions les recettes provenant de la vente des articles de valeur pour compenser les ventes de meubles, en particulier, dont la valeur était très faible. Peu importait si les ministères ne recevaient pas l'argent.

Lorsqu'ils ont commencé à en recevoir, des organisations comme la Défense nationale et la GRC, qui disposaient d'articles de valeur, comme des voitures, se sont demandé pourquoi elles payaient pour que d'autres ministères se débarrassent de leurs meubles. En somme, c'était un facteur dissuasif. Dans le nouveau système, on va changer la structure tarifaire afin de supprimer l'inter-financement.

L'une des questions à régler lorsque vous aborderez ce système consistera à déterminer le sort des meubles et de tous les petits articles dont la vente n'est pas économique en raison des coûts. Comment résoudre ce problème dans un contexte politique où il faut donner aux Canadiens le droit et l'occasion de faire des soumissions et d'acheter ces articles, alors qu'il n'est pas économique de vendre les articles un par un? Voilà donc le genre de problème que nous essayons de régler, et cela fait partie de cet examen.

[Français]

Le président: Madame Fréchette, vous voulez ajouter quelque chose là-dessus?

Mme Fréchette: Juste un mot, monsieur le président, pour dire qu'on a des projets-pilotes au ministère de la Défense pour l'aliénation des biens par l'entremise du secteur privé plutôt que par les services des Travaux publics. Notre expérience jusqu'à maintenant est assez favorable. On trouve qu'on a un service rapide. On obtient une valeur adéquate et les commission qui nous sont demandées nous semblent raisonnables. Il y a toujours la question d'avoir un cadre et des contrôles suffisants dans ce genre d'opération, et c'est pourquoi on entreprend une vérification de ce projet-pilote pour en tirer les leçons nécessaires. Inutile de dire que pour nous, il serait avantageux de conserver ce genre de flexibilité.

[Traduction]

Le président: Monsieur Pagtakhan.

M. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Merci, monsieur le président.

Hier, dans son témoignage, le vérificateur général a formulé quatre observations ou préoccupations. Je voudrais lui demander - dans un sens, M. Clayton a déjà donné sa réponse - s'il est entièrement convaincu que ses préoccupations précises concernant le cadre de responsabilisation, le manque d'information, l'importance démesurée des stocks et le mécanisme d'aliénation sont prises en considération de façon spécifique et adéquate. Dans le cas contraire, à quel autre niveau peut-on agir?

Je présume que vous avez diagnostiqué les problèmes. M. Clayton a proposé sa solution, et j'aimerais savoir si cette solution vous semble satisfaisante eu égard au diagnostic.

M. Desautels: Certaines initiatives ont été annoncées par le Secrétariat du Conseil du Trésor lors de ces audiences, ou nous ont été annoncées pendant que nous étions à l'oeuvre, et nous en avons tenu compte dans notre rapport. Nous sommes évidemment encouragés par certaines des mesures dont nous avons entendu parler, particulièrement celles qui sont destinées à améliorer le système de gestion du matériel et à fournir de meilleurs renseignements sur les coûts de gestion des stocks de matériel. Toutefois, nous remarquons qu'il y a encore beaucoup à faire. Le changement ne pourra être implanté en six mois. Ainsi, il faudra deux à trois ans au moins pour implanter à l'échelle du gouvernement la comptabilité d'exercice pour toutes les opérations, comptabilité qui tiendra compte de tous les coûts.

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Sachez que même si les signes sont encourageants et que l'on semble montrer de la bonne volonté, il faudra tout de même du temps et beaucoup de détermination pour atteindre les objectifs et mettre en oeuvre les plans. Ce sera également tout un défi que de réduire les stocks à des niveaux plus faibles. On a déjà fait un certain progrès, mais nous ne savons pas exactement où nous en sommes actuellement. Il y a beaucoup d'économies à faire à cet égard, et il faudra garder l'oeil ouvert.

Nous avons déjà eu une saine discussion là-dessus, mais il reste encore à clarifier les liens d'imputabilité et le rôle de surveillance qu'exerce le Secrétariat du Conseil du Trésor à l'égard des ministères pris individuellement. Je crois que ce n'est pas encore assez précisé, mais il semble que nous avancions quelque peu là-dessus. Si ces audiences peuvent nous éclairer, elles auront été utiles.

Nous avons déjà fait quelques pas dans la bonne direction, et nous avons hâte de constater les résultats, mais il faudra néanmoins intensifier les efforts. Il nous reste encore à déterminer exactement ce que nous allons faire du dernier point.

M. Pagtakhan: Quel rôle le comité pourrait-il jouer? Que pourrait-il recommander en vue de faciliter la conciliation des points de vue et des idées entre le Bureau du vérificateur général et celui de M. Clayton, particulièrement en ce qui concerne le cadre de responsabilisation dont nous avons parlé hier? Il saute aux yeux que les points de vue divergent. Vous auriez beau établir des lignes directrices sur la façon de suivre le rendement de chaque ministère, mais à l'exception des examens ponctuels, il n'existe pas de mécanisme automatique d'évaluation.

Je me rappelle avoir déjà entendu un ministère affirmer par le passé - ce n'était pas au Parlement - ne pas s'être rendu compte que cela n'avait pas été fait. Si l'on exige la responsabilisation, il faut un mécanisme qui permette de la suivre d'office. Avez-vous l'impression que c'est essentiel ou que c'est une question avec laquelle vous pouvez transiger? Qu'en pensez-vous exactement?

M. Desautels: Je tenterai de répondre le plus clairement possible.

En premier lieu, je crois que vous comprenez tous que le rôle de surveillant du Secrétariat du Conseil du Trésor serait de loin facilité s'il existait au gouvernement des systèmes d'information appropriés. Le secrétariat pourrait alors voir beaucoup plus clairement si les politiques sont appliquées comme il se doit et si le rendement est satisfaisant à l'échelle du gouvernement, sans nécessairement avoir à demander des rapports spéciaux ni à effectuer des examens particuliers. L'information parviendrait tout naturellement. Mais nous n'en sommes pas encore là, peu s'en faut. Entre-temps, le Secrétariat du Conseil du Trésor doit trouver d'autres moyens d'exercer sa surveillance.

Je ne sais pas exactement comment pourrait faire le Conseil du Trésor, mais il pourrait rencontrer les ministères pour s'entendre sur le type d'information dont il aurait besoin pour exercer une vérification générale du système. Les renseignements que doit obtenir le Conseil du Trésor sont sans doute très semblables à ceux dont les ministères ont besoin pour leur propre gestion. Mais il y a une sorte de vide, et le Secrétariat du Conseil du Trésor devrait discuter rapidement avec les ministères pour savoir comment combler le vide et voir ce qu'on pourrait temporairement utiliser pour le combler, au moins en partie.

.1610

Vous me demandez si votre comité peut nous être utile. Le Conseil du Trésor lui-même cherche à définir son rôle dans ce domaine et dans le cadre des nouvelles structures gouvernementales. Je crois qu'il serait utile non seulement pour nous, mais aussi pour le Secrétariat du Conseil du Trésor, de savoir ce que pensent les parlementaires du rôle du Conseil du Trésor à la lumière de cette réorientation.

Je ne voudrais évidemment pas que le Conseil du Trésor s'occupe de la gestion minutieuse des ministères, car il ne doit se substituer en aucune façon aux ministères, qui doivent assumer eux-mêmes leurs responsabilités. Et pourtant, il arrive souvent que l'on entende le Secrétariat du Conseil du Trésor affirmer qu'il interprète son rôle d'une façon donnée, alors que les députés semblent avoir d'autres attentes. Plus le rôle et les attentes seront définis, mieux cela sera, à tous les égards, et non pas uniquement eu égard à la gestion du matériel. Le problème se pose aussi dans les autres secteurs.

M. Pagtakhan: Monsieur le président, ma dernière question s'adresse à M. Clayton.

Le président: Vous n'en avez plus le temps.

M. Pagtakhan: Me permettez-vous de poser une dernière question, dans la même veine?

Le président: Eh bien, soit. Mais j'aimerais que M. Clayton nous parle de...

M. Pagtakhan: Je m'adresse justement à M. Clayton.

Monsieur Clayton, vous avez entendu ce qu'a répondu le vérificateur général. Hier, vous avez mentionné que des projets pilotes étaient en oeuvre dans les ministères. Je crois vous avoir entendu dire qu'ils seraient mis en oeuvre au cours des prochaines années. Lorsqu'on parle des prochaines années, on peut se demander si ces projets seront maintenus au cours des prochaines années ou s'il faudra attendre plusieurs années avant qu'ils soient mis en oeuvre. J'aimerais avoir des précisions.

Enfin, que pensez-vous de l'idée de pousser votre logique jusqu'au bout? Je conviens avec vous qu'il faut laisser les grands patrons des ministères effectuer leurs propres vérifications, mais pensez-vous qu'ils offriraient quelque résistance à l'idée de vous rendre des comptes d'office? Pensez-vous qu'ils hésiteraient à le faire? Je féliciterais... Vous avez peut-être déjà fait quelques avances, mais j'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Clayton: Je répondrai d'abord à votre dernière question. Pour revenir à ce qu'a dit le vérificateur général, vous serez peut-être surpris d'entendre que nous sommes à peu près du même avis; toutefois, on peut toujours interpréter différemment ce que nous disons et jeter une lumière différente sur nos propos respectifs.

Revenons à ce que j'ai dit au début. La responsabilité première en matière de surveillance revient au grand patron de l'institution, et cela ne devrait pas changer. Nous avons en partie exercé ce rôle en fournissant à tous les ministères un guide de surveillance approuvé par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Ce guide existe depuis plusieurs années et explique comment exercer la surveillance, la vérification et l'évaluation de son système de gestion du matériel. C'est ainsi que nous répondons aux attentes du Secrétariat du Conseil du Trésor et définissons ce qui devrait être surveillé dans les ministères.

Lorsqu'il y a surveillance, évaluation et examen dans les ministères, les rapports sont remis au Secrétariat du Conseil du Trésor pour sa gouverne. Or, comme le fait remarquer le vérificateur général dans son rapport, nous avons constaté récemment que, pour diverses raisons, ces rapports ne sont pas toujours très utiles et ne répondent pas toujours aux questions que nous posons.

Les ministères n'ont pas à rendre de comptes au Conseil du Trésor pour ce qui est de la gestion de leur matériel et de la plupart de leurs autres secteurs fonctionnels. Ils doivent rendre des comptes en ce sens à leur ministre et au Parlement. Ils peuvent évidemment fournir de l'information au Conseil du Trésor, comme ils le font d'ailleurs dans ces secteurs fonctionnels, mais il ne s'agit pas là de liens de responsabilité. Nous ne déléguons pas notre pouvoir, notamment dans des secteurs tels que la gestion du matériel.

Pour parler en termes techniques et juridiques, la Loi sur la gestion des finances publiques est permissive, puisqu'elle porte que dans ce domaine le Conseil du Trésor peut créer des politiques s'il le désire. La loi ne porte pas que le Conseil du Trésor est le gestionnaire du matériel du gouvernement canadien. Et, dans une certaine mesure, le Conseil du Trésor a décidé de créer des politiques dans le domaine de la gestion du matériel.

Quant à ce que vous avez dit au sujet des projets pilotes, je n'ai pas très bien compris. Il y a eu certains projets pilotes dans le secteur de l'aliénation, et il y a aussi plusieurs initiatives en cours dans beaucoup d'autres secteurs. Ils ont un échéancier précis en matière de mise à jour des systèmes d'information et d'aliénation, etc. Est-ce ce dont vous parliez?

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M. Pagtakhan: Je parlais de l'initiative des systèmes communs.

M. Clayton: Cela fait longtemps que l'on n'en est plus à l'étape du projet pilote. L'initiative de lancement des systèmes communs en est maintenant au point où nous avons... Je vous parlerai en particulier de la gestion financière intégrée et bonifiée. Tout est déjà là. Les ministères sont actuellement à décider quels systèmes ils adopteront.

Le président: Monsieur Silye, vous avez cinq minutes.

M. Silye (Calgary-Centre): Merci, monsieur le président.

Monsieur Clayton, sur un total d'environ 50 milliards de dollars que nous aurions investis dans une vaste gamme d'articles et de matériel, combien est vraiment nécessaire, d'après vous?

M. Clayton: Je n'en sais rien du tout.

M. Silye: Sauriez-vous quel pourcentage de...

M. Clayton: Non. Ce n'est pas notre rôle de le décider. Je fais également remarquer...

M. Silye: Mais cela n'incite-t-il pas à accumuler trop de stocks?

M. Clayton: Même si l'on parle de nombres et de l'utilisation, si l'on revient au rapport que nous avions commandé sur les articles consommables, c'est-à-dire les 10 milliards de dollars d'articles qui se trouvaient dans les entrepôts, la commission a constaté que jusqu'à 50 p. 100 des articles ne devaient plus nécessairement être entreposés. Ce qui ne signifie pas nécessairement qu'il y ait trop de stocks. Cela veut dire tout simplement qu'il existe différentes façons de s'approvisionner. Autrement dit, il n'est pas nécessaire d'entreposer tous les articles, mais il pourrait être possible de demander aux fournisseurs...

M. Silye: Êtes-vous en train de dire que vous n'êtes pas d'accord pour dire que 50 milliards de dollars sont investis à tout moment dans une année dans le matériel?

M. Clayton: Non. On a évalué en gros à 50 milliards de dollars tout le matériel au gouvernement du Canada, dont une partie équivalant à environ 10 milliards de dollars est dans des entrepôts, le reste étant des chars d'assaut, des avions et d'autres articles qui sont utilisés dans...

M. Silye: Ils sont soit utilisés, soit recyclés, soit usés jusqu'à la corde. Et c'est à ce moment-là qu'on les remplace. Les dépenses annuelles de votre ministère se chiffrent à 8 milliards de dollars.

M. Clayton: Oui.

M. Silye: C'est cela qui correspond à ce qui est consommé, n'est-ce pas?

M. Clayton: Oui. Une partie des 8 milliards de dollars représente le coût du remplacement de ces articles, etc.

M. Silye: Monsieur Minto, que se passe-t-il si l'on passe d'un système de comptabilité des prix de revient à un système de comptabilité d'exercice? Pourquoi cela devrait-il être mieux?

M. Shahid Minto (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Il n'y a rien de mieux que de savoir que des coûts existent et de les voir. Actuellement, si vous avez payé le total de votre stock à partir de votre budget de l'année dernière, cela ne vous coûte rien, mis à part un minimum pour stocker les articles, puisque c'est un autre ministère qui assume les frais d'entreposage et un autre encore qui assume les coûts du financement. Vos coûts annuels correspondent sans doute à l'électricité et aux frais manuels découlant du stockage.

M. Silye: Je suis un peu confus. Je ne suis pas comptable, mais il me semble que, peu importe le système utilisé, si vous continuez à l'utiliser d'une année à l'autre, vous pouvez donc comparer des pommes avec des pommes, alors qu'en période de transition, la comparaison sera peut-être plus difficile.

Si à la fin de l'exercice on dépense de 30 à 40 p. 100 du budget pour acheter du matériel, ces achats sont imputés au compte de l'année précédente, et on considère que cela a été dépensé au cours de l'année précédente. Et cette année, vous pouvez décider de ne pas dépenser autant ou de le dépenser... Quelle est la différence?

Supposons que le total dépensé en achats de matériel l'année dernière par le ministère de la Défense ait été de 1 milliard de dollars. Une partie des articles devront être remplacés et une autre partie sera utilisée. Supposons qu'en 1997 le ministère dépense 1,5 milliard de dollars: cela représente 500 millions de dollars de plus que l'année dernière. Quelle est la différence entre la comptabilité des prix de revient par rapport à la comptabilité d'exercice pour le matériel acheté ou remplacé? Quelle est la différence entre les deux systèmes de comptabilité?

M. Minto: Monsieur le président, voici quelle est la différence: si vous teniez bien les comptes, les stocks toujours entreposés, par exemple, ne seraient pas traités comme une dépense jusqu'à ce qu'ils soient utilisés; dans vos livres comptables, ces coûts seraient comptabilisés comme un actif. Cela serait donc considéré comme un actif plutôt que comme des coûts irrécupérables.

M. Silye: Nous entrons donc dans le domaine des bilans.

M. Minto: Vous commencez à prendre conscience de la situation. Vous pensez: «J'ai un élément d'actif qui se trouve dans mon stock et je dois...»

M. Silye: J'ai des articles qui valent 50 000 $ chacun...

M. Minto: Ou autres... des pneus ou du matériel. Et vous commencez alors à aborder la question sous cet angle. Autrement, si vous n'êtes pas conscients de vos coûts de possession, comme vous l'avez dit, vous ne considérez que votre augmentation de dépenses cette année.

.1620

L'intérêt d'examiner votre stock - et M. Hubbard a soulevé la question plus tôt - c'est de voir si, d'un ministère à l'autre ou d'une région à l'autre, quelqu'un possède l'article en question, car il figure dans vos dossiers, votre actif, et vous pourrez peut-être l'utiliser avant d'acheter quelque chose. Cela influera sur votre décision quant à vos achats futurs.

M. Silye: La dernière question est de savoir ce qu'il faut faire pour mettre en vigueur une reddition des comptes plus efficace. Je suppose que ce qui nous intéresse, si l'on veut examiner les dépenses d'un ministère sous divers angles, en nous concentrant d'une part sur les articles matériels et d'autre part sur les dépenses, c'est de savoir qui rend compte des dépenses de fond, qui est responsable en cas de dépassement du budget, ou si celui-ci n'est pas entièrement dépensé. C'est vrai, le ministère et ses principaux cadres assument la principale responsabilité, je le comprends bien, mais quel est le rôle du Conseil du Trésor et du Secrétariat du Conseil du Trésor en matière de surveillance, ou de contrôle? Ne serait-il pas avantageux de créer un organisme de contrôle ou une fonction de contrôle au Conseil du Trésor?

D'après la question posée par le vérificateur général, j'ai l'impression que le Conseil du Trésor ne veut pas assumer cette responsabilité. Il préfère la confier aux responsables ministériels, d'après l'exposé que vous avez fait hier, monsieur Clayton. Pourtant, le vérificateur général recommande les mesures à prendre pour créer un cadre de responsabilisation efficace, lequel n'existe pas à l'heure actuelle, selon lui. Comment résoudre ce problème?

M. Clayton: D'après mon interprétation des propos du vérificateur général, je pourrais parler de ce que je considère comme les quatre éléments du cadre de responsabilisation qui doit être mis sur pied. Le premier est l'existence d'une politique du gouvernement central ou du Conseil du Trésor général. D'après ce qu'a dit le vérificateur général, le système actuellement en vigueur est tout à fait convenable. C'est la politique.

Le deuxième élément correspond aux politiques ministérielles et aux cadres internes des ministères. Comme l'a signalé le vérificateur général, et nous l'approuvons, depuis trois ou quatre ans, certains de ces systèmes sont devenus un peu désuets en raison des compressions, de la réorganisation, etc., effectuées par le gouvernement. En toute franchise, pour ce qui est des priorités, la refonte du manuel de gestion du matériel ne venait pas en tête de liste dans la plupart des ministères. Le vérificateur a signalé que d'importantes initiatives sont en cours au MDN, à la GRC, au ministère des Pêches et des Océans, etc. C'est à mon avis le deuxième élément.

Quant à savoir comment le Secrétariat du Conseil du Trésor, à mon avis, réglera ce problème, nous avons des questions à poser au sujet de la délégation accrue des pouvoirs relatifs aux marchés de l'État, etc. La mise à jour du cadre en fera partie.

Le troisième élément correspond aux systèmes de rapports ministériels. Nous en avons beaucoup discuté ces derniers jours. Je voudrais signaler, pour répondre à votre dernière question adressée à M. Minto, que le fait de disposer d'un bon système de comptabilité d'exercice et d'une information valable permet aux parlementaires et au Secrétariat du Conseil du Trésor de poser les questions pertinentes.

Une nouvelle expression est à la mode - j'espère qu'on ne l'utilisera pas pour la reddition des comptes - au sujet du rôle du Secrétariat du Conseil du Trésor, à savoir «s'en occuper, mais sans toucher». Autrement dit, il est tout à fait normal de poser des questions, mais pas de s'ingérer: nous ne sommes pas responsables. C'est aux sous-ministres de s'en occuper dans les nombreux secteurs liés au règlement des questions. Je ne veux surtout pas finir par exiger qu'on rende des comptes relativement à la façon dont le ministère de la Défense livre le matériel à ses soldats, mais il est tout à fait normal que le Secrétariat du Conseil du Trésor pose des questions, et si l'information est disponible, il est beaucoup plus facile de procéder de cette façon.

M. Silye: Pourquoi donc avons-nous besoin de vous au milieu?

M. Clayton: Eh bien, c'est pourquoi ces questions sont posées entre...

M. Silye: Mais il y a des ministres pour répondre aux questions. Nous avons un ministre des Finances qui établit un budget. À quoi servez-vous?

M. Clayton: C'est une excellente question, et qui est au coeur du débat actuellement en cours au Conseil du Trésor. Nous n'en sommes pas arrivés là, mais dans le domaine de la gestion du matériel nous avons une année-personne et demie au SCT. C'est tout. Nous avons pris ces décisions.

Le président: Madame Brushett.

Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Merci, monsieur le président. Je reconnais mon ignorance. Je remplace un collègue aujourd'hui et je vais poser des questions qui ont peut-être déjà obtenu des réponses ou des explications détaillées.

.1625

M. Silye: Nous vous le dirons si c'est le cas.

Mme Brushett: J'en reviens à une question fondamentale relative au même mandat. Chaque fois que quelque chose cloche, nous adoptons une nouvelle politique, mais celle-ci ne s'accompagne d'aucune vérification ou d'aucun critère financier qui fait que l'on doive fonctionner sans dépasser le cadre financier prévu. Les politiques s'ajoutent donc les unes aux autres. Une politique en amène une autre, mais là encore on ne fait jamais l'analyse des coûts. Lorsqu'on parle de la cession des biens de la Couronne, bien souvent cela coûte plus cher pour déplacer ces articles, faire de la publicité, dresser l'inventaire, en toutes les dépenses liées à une vente de grande envergure. Cela coûte beaucoup plus cher que ce que l'on peut récupérer.

Ma question est donc la suivante, étant donné que j'ai été dans les affaires pendant la majorité de ma vie. Qui effectue l'analyse des coûts en cours de route?

J'ai vu la même chose dans tous les ministères. Je l'ai vu pour les contrats de sous-traitance. On accorde un contrat, mais on n'a aucune idée de ce que cela coûte pour faire le même travail à l'interne, de sorte qu'il est impossible de savoir si on réalise une économie ou si cela coûte plus cher. Il a été dit et répété...

J'en reviens à ceci. Il existe toujours une nouvelle politique, mais on ne sait jamais combien elle coûte. Il faut que quelqu'un soit tenu responsable pour s'assurer qu'on ne dépasse pas le budget et que l'on évalue les résultats, pour établir s'il y a eu optimisation des ressources ou non. Depuis trois ans que je suis député, je n'ai jamais rien vu de tel.

M. Clayton: Ce qui se passe au Secrétariat du Conseil du Trésor depuis trois ou quatre ans, surtout dans le domaine de la gestion du matériel, c'est que l'on supprime les politiques. Si vous examiniez les politiques de gestion du matériel appliquées par le Secrétariat du Conseil du Trésor ou le Conseil du Trésor lui-même il y a sept ans, il existait des politiques précises relatives au mobilier... et la liste est longue. Aucune d'entre elles n'existe aujourd'hui. Nous appliquons en fait une politique générale qui consiste à dire aux ministères: «Faites preuve de jugement.»

Soit dit en passant, c'est l'une des raisons pour lesquelles on en arrive à cette question de responsabilité. Étant donné que le Conseil du Trésor a pris l'orientation inverse et, à toutes fins utiles, n'a imposé aucune directive, il est de plus en plus difficile d'assurer le contrôle et l'obligation de rendre compte. Dans le domaine de la gestion du matériel comme dans d'autres, on a donc pris l'orientation inverse, à savoir supprimer les politiques et renoncer aux lignes directrices précises, lesquelles débouchaient sur des initiatives dysfonctionnelles. On entend toutes sortes de récits sur ce qui s'est passé. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous sommes sur le point de modifier le système de cession. La politique qui était en vigueur jusque-là débouchait sur des décisions boiteuses.

Vous avez posé une autre question, mais je l'ai oubliée.

Mme Brushett: Encore une fois, M. Silye a dit que le Conseil du Trésor n'a peut-être plus lieu d'être si chaque ministère... Le ministère des Travaux publics n'a peut-être plus de rôle à jouer, pour ce qui est des Services gouvernementaux. La question revient toujours sur le tapis, et si un ministère ne veut pas commander son matériel par le biais des Travaux publics, ou gérer ses immeubles ou ses baux par l'entremise de ce ministère, il voudra peut-être s'adresser directement au secteur privé ou s'occuper lui-même de ses affaires commerciales et de la gestion de ses finances. Nous penchons-nous sur ces questions, ou convient-il d'envisager de nouvelles structures à l'heure actuelle?

En lisant le rapport transmis par la greffière principale du Conseil privé au premier ministre cette semaine, j'ai trouvé très intéressant d'y lire que les nouveaux stagiaires, les nouveaux jeunes gens engagés à la fonction publique, s'ennuyaient, trouvaient leur travail ni stimulant ni intéressant, car ils avaient l'impression que cela ne correspondait absolument pas à la société moderne. Voilà une nouvelle génération de jeunes gens qui nous dit que nous ne correspondons apparemment pas aux prototypes. Qu'en pensez-vous?

M. Clayton: J'aimerais revenir en arrière et parler à nouveau du Secrétariat du Conseil du Trésor et du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux dans ce domaine.

Comme je l'ai signalé, et j'ai utilisé l'exemple de mon organisme de gestion du matériel, dans le genre de scénarios dont vous avez parlé, nous sommes de moins en moins présents. Je prends note de ce qui s'est dit ces deux derniers jours. D'autres sont d'avis qu'il nous faudrait plus de gens, mais nous nous sommes retirés et nous affirmons que la responsabilité incombe au sous-ministre et que le rôle général du Conseil du Trésor est très restreint.

Quant à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, c'est un organisme qui offre énormément de services différents. La grande majorité d'entre eux sont, pour utiliser le jargon gouvernemental, «facultatifs». Autrement dit, à l'heure actuelle les ministères peuvent décider d'offrir les services eux-mêmes ou non. Ce ministère a effectué d'énormes compressions d'effectifs au cours des deux ou trois dernières années, et cela reflète en partie la réorganisation gouvernementale dont vous parlez et les secteurs d'activité auxquels souhaite participer le gouvernement ou dont il devrait se retirer.

.1630

Mme Brushett: Si le Conseil du Trésor cesse de tout contrôler, allons-nous demander la vérification de la responsabilité financière au lieu de nous contenter de créer une politique qui serve le bien public, de façon à pouvoir évaluer...? Par exemple, j'entrevois l'utilité d'un plus grand nombre de personnes aux premières lignes, qui recommanderaient l'affectation de fonds supplémentaires dans tel secteur, mais une réduction des dépenses dans tel autre, plutôt que des coupures généralisées. Toutefois, en tant que députés de l'arrière-ban, nous avons à notre disposition très peu de moyens pour évaluer notre efficacité dans ces initiatives.

M. Clayton: Vous entrez maintenant dans un domaine qui va bien au-delà de la question de la gestion du matériel, laquelle fait l'objet de ces délibérations. Je vais essayer d'y répondre.

Au niveau général, les décisions prises par le gouvernement ces deux dernières années ne prévoyaient manifestement pas des compressions généralisées. Il s'agissait de coupures qui étaient très différentes selon les ministères. Ces décisions étaient prises en fonction de questions de politique publique et de l'information dont on disposait sur l'efficacité et le rendement des organisations gouvernementales. C'est ce qui s'est fait au niveau général. Dans le domaine de la gestion du matériel, il n'est pas question pour nous d'aller plus loin et de commencer à microgérer des sous-éléments. C'est aux sous-ministres que reviennent ces décisions.

Il existe donc dans ce contexte tout un programme qui émane de mon bureau du Secrétariat du Conseil du Trésor, programme relatif aux indicateurs de rendement, à l'efficacité, à l'efficience et à tout ce domaine de l'obligation de rendre compte et de l'évaluation de ce qui reste. Le vérificateur général, qui s'occupe sans doute de cette question de beaucoup plus près que moi, pourrait vous en dire plus à ce sujet. Il s'agit non seulement de s'aligner sur ces indicateurs, mais aussi d'adopter divers modes de rapport au Parlement, etc., et tout cela fait partie de la réforme du système qu'adopte le gouvernement pour créer une base de données et pour présenter l'information sur ces activités pour la gouverne du public.

[Français]

Le président: Juste avant d'ajourner, madame Fréchette, hier soir, en préparant mon Kraft Dinner à l'appartement, je pensais à vous. Ce n'est pas parce que vous me faites penser à du Kraft Dinner. Pendant que les nouilles étaient sur la cuisinière, je relisais le rapport du vérificateur général et me demandais quelle approche je devais prendre avec vous, reconnaissant qu'il est vrai qu'au ministère de la Défense, vous êtes attaqués de toutes parts.

Je me demandais si j'allais être méchant avec vous puisque nous voulons que vous reveniez comparaître devant nous. Avant Noël, vous disiez que c'était la première fois que vous aviez la joie d'être devant le Comité permanent des comptes publics et vous en faites la preuve puisque vous prolongez cette joie en revenant ici. M. Harder m'avait aussi dit qu'il était content de témoigner devant nous pour une première fois, mais on ne l'a pas revu. Je me disais que ma séduction n'avait probablement pas eu le même effet avec M. Harder.

Je vais y aller avec une question facile. J'ai d'ailleurs retrouvé hier soir le nombre de chapeaux qu'avait commandés la GRC, puisque vous nous dites que vous travaillez fort au niveau de l'équipement et de la gestion des inventaires de matériaux. La GRC avait commandé 3 995 chapeaux excédentaires. Le vérificateur général n'a pas trouvé la même chose dans votre ministère, et j'espère qu'il n'y a pas de cadavres dans les placards.

Madame Fréchette, vous nous avez dit hier que votre ministère avait un plan d'action pour son programme de gestion du matériel. C'est là ma question facile. Pourriez-vous le faire parvenir au comité aussitôt que possible?

Mme Fréchette: Je crois que les commentaires très détaillés que j'ai fait parvenir au comité hier constituent essentiellement un plan d'action. Si vous désirez obtenir plus de détails, il me fera plaisir de vous les faire parvenir.

Le président: Est-ce que des dates précises y figurent pour chaque étape?

Mme Fréchette: Oui.

Le président: Et pour chacune des actions qui figurent dans les notes que vous nous avez données?

Mme Fréchette: Elles ne figurent peut-être pas dans les notes, mais elles figurent dans nos plans d'action. Si vous voulez que je vous envoie des précisions, je peux le faire.

Le président: C'est un peu le sens de ma question.

Mme Fréchette: Il me fera plaisir de vous fournir des précisions.

Le président: Oui, c'est cela. C'était davantage le sens de ma question.

Mme Fréchette: D'accord.

.1635

Le président: Pour ma deuxième question, je me reporterai au chapitre 23 du Rapport du vérificateur général. À la pièce 23.6, M. Desautels et son équipe avaient fait ressortir l'aberration suivante:

Il en a coûté 30 000 $ pour ramener le bateau. Ce sont les mauvais administrateurs de la Garde côtière qui ont agi ainsi.

Au paragraphe 27 de sa présentation, monsieur Desautels nous dit:

Prenons l'exemple du Preserver. Vous connaissez le Preserver?

Des voix: Oui.

Le président: Lorsque vous devez réparer le Preserver, est-ce le ministère de la Défense nationale qui s'occupe de l'exercice ou si c'est le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux? M. Desautels pourra peut-être me renseigner. Autrement dit, cette nouvelle politique est-elle automatiquement en vigueur au ministère de la Défense nationale?

Mme Fréchette: Cela dépend. Certaines réparations de navires sont effectuées dans les chantiers maritimes du ministère de la Défense nationale. Cela se fait donc entre nous. Lorsque nous avons recours au secteur privé, nos contrats passent évidemment par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et se font en vertu des règlements de ce ministère.

Le président: Vous avez octroyé, si ma mémoire est bonne, un contrat de réparation du Preserver à un chantier maritime d'Halifax dont la soumission pour une même demande aurait été de 25 p. 100 inférieure à celle des chantiers maritimes de la Davie à Lauzon. On essaie en vain d'avoir les deux soumissions. Si on en arrive à un écart de 25 p. 100, c'est qu'il y a quelqu'un qui n'était pas sur la même planète. C'est une aberration que d'avoir un aussi grand écart. Est-ce que vous pourriez vous engager à nous fournir les deux soumissions en vue du contrat de réparation du Preserver présentées en septembre ou octobre 1996?

Mme Fréchette: Je vais vérifier ce qu'il en est et voir ce que je peux fournir au comité à ce sujet.

Le président: Monsieur Clayton, le vérificateur général nous disait au paragraphe 23.27 de la version française de son rapport:

Vos réponses aux questions soulevées par M. Silye et M. Pagtakhan nous laissent perplexes. Je ne sais pas si vous êtes en train de vous chercher un rôle. Nous étudierons l'ensemble de votre témoignage aujourd'hui, mais ce que vous nous dites est à faire dresser les cheveux sur la tête. Nous, les députés, avons probablement une mauvaise compréhension de votre rôle. Lors de la première visite de M. Harder, je lui disais qu'il était la terreur des ministères et il a semblé la trouver bonne. Mais en réalité, je suis en train de me rendre compte que j'ai fait une bien bonne joke cette fois-là. Il n'est pas du tout la terreur des ministères. De toute façon, je réserverai mes propos pour le jour où je le reverrai.

[Traduction]

M. Clayton: Cette mention précise dans le rapport - et c'est moi que vous avez cité - voulait dire que, dans le cadre de nos examens horizontaux des politiques - et j'ai signalé que nous en avons fait beaucoup pour établir si les politiques du Conseil du Trésor donnent ou non de bons résultats en matière de gestion du matériel - nous avons constaté qu'une partie de l'information disponible, comme les rapports de vérification ministériels ou les systèmes d'information des ministères, était désormais insuffisante, comme nous le disons depuis quelques années. C'est pourquoi nous avons signalé que, au lieu d'utiliser ces renseignements, nous avons fait effectuer ces études horizontales sur les divers aspects du système, et notamment les articles en stock, ou les systèmes d'information, ou l'utilisation des cartes d'acquisition, etc. C'est grâce à ce genre d'études que nous avons pu établir les mesures que le Secrétariat du Conseil du Trésor, le Conseil du Trésor et les ministères devraient prendre pour améliorer le système.

.1640

C'est donc à cela qu'il était fait allusion au paragraphe 23.7, je suppose, relativement au type d'outils d'information dont nous disposons. Comme l'a signalé aujourd'hui le vérificateur général, et moi aussi, dans un monde idéal, surtout lorsque les systèmes de gestion financière et du matériel seront pleinement intégrés, nous disposerons d'une meilleure information sur laquelle fonder ce genre d'évaluations.

[Français]

Le président: Puisqu'aucun de mes collègues ne manifeste le désir de poser d'autres questions, conformément à la tradition de ce comité, je cède la parole à M. Desautels pour les commentaires de conclusion.

M. Desautels: Monsieur le président, M. Pagtakhan m'a posé plus tôt certaines questions qui m'ont permis de préciser ou de résumer ma pensée sur les questions qui ont été soulevées pendant ces réunions. Le comité pourra peut-être se reporter à ces remarques.

D'une part, il y a une certaine urgence à modifier les systèmes d'information et les systèmes comptables des différents ministères pour pouvoir mieux contrôler l'investissement important qu'on a fait dans le matériel. Il serait utile que les ministères concernés fournissent au comité un genre d'échéancier qui pourrait nous permettre de faire un suivi plus serré du progrès réalisé dans cette direction. Pour notre part, nous prévoyons revoir toute cette question et faire rapport au comité d'ici deux ans, comme c'est notre coutume, des progrès qui ont été réalisés par les différents ministères.

Le président: Merci, monsieur Desautels. Madame, messieurs, merci beaucoup pour votre grande disponibilité aujourd'hui et aussi pour la qualité de façon majoritaire de vos propos. Je voudrais ajourner notre séance pendant trois minutes, le temps que nos témoins nous quittent. C'est dommage que notre salle se vide et que les ministères amènent leur délégation avec eux. Nous avons une séance d'information sur le programme d'infrastructure. On ajourne donc nos travaux pendant deux minutes.

[Traduction]

Je vous remercie.

[La séance se poursuit à huis clos]

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