[Enregistrement électronique]
Le mardi 4 mars 1997
[Français]
Le président: À l'ordre! Bon après-midi à tous et à toutes. Le Comité permanent des comptes publics se réunit conformément à l'alinéa 108(3)d) du Règlement pour procéder à l'étude du chapitre 34 du Rapport du vérificateur général déposé en novembre 1996, qui traitait particulièrement de la Défense nationale et de façon plus spécifique de la productivité des services de soutien.
Avant de procéder à la déclaration d'introduction du vérificateur général, je demanderais aux témoins de bien vouloir se présenter, en commençant par vous, monsieur Desautels.
M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Je suis accompagné aujourd'hui de M. Peter Kasurak et de M. David Rattray, tous deux responsables du chapitre dont nous discutons aujourd'hui.
Mme Louise Fréchette (sous-ministre de la Défense nationale): Je m'appelle Louise Fréchette et je suis sous-ministre de la Défense nationale. M'accompagnent aujourd'hui le vice-amiral L. E. Murray, chef d'état-major de la Défense par intérim; M. Pierre Lagueux, sous-ministre adjoint responsable du matériel; et le lieutenant général A.M. de Quetteville, commandant des Forces aériennes.
Le président: J'ai déjà soulevé la question des téléphones cellulaires dans les comités. Étant donné que les comités sont le prolongement de la Chambre des communes, je demanderais aux personnes qui ont des cellulaires de bien vouloir les utiliser en dehors de la salle du comité et d'en arrêter le fonctionnement lorsqu'ils sont dans la salle du comité. Cela indispose tout le monde. Les règles en comité sont les mêmes qu'à la Chambre des communes.
Sur ce, j'accorde la parole au vérificateur général du Canada, monsieur Denis Desautels.
M. Desautels: Je vous remercie de me donner la possibilité de discuter des résultats du chapitre 34 de notre rapport de novembre 1996, qui porte sur la productivité des services de soutien au ministère de la Défense nationale. Comme le sait le comité, notre Bureau est préoccupé depuis au moins 1984 par le besoin d'améliorer la productivité du plus grand ministère opérationnel fédéral. Au fil des ans, nous avons signalé le coût de fonctionnement élevé des hôpitaux de la Défense, des établissements de formation et de l'entretien des bases. En 1994, nous avons indiqué que le ministère était toujours incapable d'évaluer adéquatement ses coûts ou son rendement.
Aux audiences du comité sur nos chapitres de 1994, le ministère a reconnu ces difficultés et présenté un plan pour devenir plus efficient. À cette même occasion, il a souligné la nécessité de changer de culture et de passer d'une mentalité peu encline à prendre des risques à une mentalité plus axée sur l'entrepreneuriat. Il a aussi, en 1994, mis l'accent sur l'introduction de la planification opérationnelle et de budgets opérationnels dans sa réponse au comité.
La vérification avait pour objet de comparer la productivité des fonctions de soutien à la Défense nationale avec celle d'autres fournisseurs de services similaires. Nous avons également voulu rendre compte des résultats des efforts de renouvellement du ministère.
[Traduction]
Le renouvellement et la réforme des services de soutien à la Défense nationale constituent une nécessité des plus urgentes. Nous avons conclu dans notre vérification des opérations de maintien de la paix - qui a fait l'objet d'un rapport au Parlement en mai 1996 - que le matériel et la formation des Forces terrestres étaient loin de satisfaire aux normes des Forces canadiennes. Le blindage, la puissance de feu et la mobilité des véhicules blindés présentaient des lacunes. Les normes de formation n'avaient pas été satisfaites. Le nombre de lits disponibles dans les hôpitaux de campagne était inférieur aux besoins prévus.
En outre, nous avons constaté que dans les Perspectives du ministère, les dépenses prévues pour le matériel devaient passer de 24 p. 100 à 20 p. 100 du budget de la Défense. À moins que des économies soient réalisées dans des secteurs tels que les services de soutien, il est peu probable que ces lacunes et d'autres lacunes semblables puissent être corrigées.
Dans son commentaire présenté au comité le 11 février 1997, à l'occasion de l'audience sur notre chapitre portant sur la gestion du matériel, la sous-ministre a reconnu la nécessité d'un transfert de ressources du secteur du soutien au secteur opérationnel. Elle a alors déclaré:
- L'objectif ultime de la restructuration et du renouvellement du ministère... est de préserver la
capacité opérationnelle de nos forces polyvalentes et aptes au combat...
Ces efforts ont contribué à faire diminuer les coûts indirects qui, comme nous l'avions signalé en 1994, étaient beaucoup trop élevés par rapport à la taille de la force militaire. Le ministère a aussi fait des efforts louables en tentant d'évaluer honnêtement sa philosophie de gestion et ses valeurs.
Cependant, nous constatons que les progrès sont lents dans d'autres secteurs ou qu'ils sont même en régression. Même si le ministère est devenu plus petit, toutes les parties ne sont pas devenues plus efficientes pour autant. Nous avons constaté, au moment de notre vérification, que de nombreux projets nécessaires pour rationaliser les opérations de soutien en étaient encore au stade conceptuel et que les gestionnaires ne pouvaient pas préciser les niveaux de productivité qu'ils espéraient atteindre à la fin du processus de renouvellement.
Le ministère croit toujours que son programme de renouvellement se déroule bien, mais nous sommes préoccupés parce qu'il n'a pas accordé une attention suffisante à l'amélioration de son rendement au niveau local où il utilise véritablement la plupart de ses ressources. Des mesures et des objectifs quantitatifs sont nécessaires pour appuyer un changement de philosophie. Ils sont absolument essentiels au succès de la planification opérationnelle, à l'amélioration de la productivité et à une reddition de comptes authentique.
Nos travaux de vérification indiquent qu'il existe peu d'obstacles techniques à la mesure du rendement des services de soutien et que les unités qui évaluaient leur travail avaient tendance à obtenir de meilleurs résultats.
[Français]
Nous ne suggérons pas de cesser d'utiliser les outils actuels jusqu'à ce que les systèmes de mesure soient en place, mais plutôt que le ministère s'intéresse davantage à la mesure dans laquelle les gestionnaires de base accordent maintenant plus d'importance au rendement. La mesure fait simplement partie de cette orientation. J'espère que le comité se penchera sur la question de savoir si la stratégie du ministère doit être examinée davantage.
J'aimerais aborder une autre question avant de demander à M. Kasurak de décrire les principales conclusions de notre vérification. Au cours des derniers mois, plusieurs critiques du ministère ont laissé entendre que les organisations militaires ne devraient pas faire de planification opérationnelle ou, en anglais, de business planning et que la gestion des ressources ne devrait pas faire partie des tâches d'un officier, mais devrait plutôt être confiée à des civils. Rien dans notre vérification n'appuie cette vue. La «planification opérationnelle» n'est peut-être pas le meilleur terme à utiliser pour établir un lien entre les ressources et les objectifs opérationnels dans le domaine militaire, mais je crois que le concept est valable. Dans les cas où des dirigeants militaires ont réussi à mesurer leur rendement, la production s'est améliorée, ce qui a dégagé des ressources pour la formation et les opérations. Dans l'ensemble, les objectifs mesurables constituent un élément essentiel d'une bonne gestion et de la reddition de comptes. Les efforts du ministère devaient donc viser à la fois l'amélioration de la reddition de comptes dans les Forces canadiennes et l'efficience des services de soutien.
[Traduction]
M. Peter Kasurak (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Notre vérification de la productivité des services de soutien à la Défense nationale a porté sur deux niveaux: les initiatives dans l'ensemble du ministère et le niveau de productivité véritablement atteint au premier niveau opérationnel sur les bases des Forces canadiennes du pays.
Notre première observation générale est qu'au niveau global, le ministère met en place la planification opérationnelle, mais que certains plans ne contiennent toujours pas de données adéquates sur les coûts et le rendement. Sans ces données, la valeur de ces plans est très limitée.
La deuxième grande initiative que le ministère a présentée au Comité en 1994 portait sur les budgets de fonctionnement. Elle consistait à déléguer davantage aux gestionnaires la possibilité d'affecter les dépenses au personnel civil, aux opérations et à l'entretien ou aux immobilisations locales. Les gestionnaires locaux pouvaient ainsi améliorer l'efficience de leurs opérations.
Même si le ministère a délégué la responsabilité des budgets, les gestionnaires locaux ont dû plutôt se conformer aux réductions de personnel exigées. Des économies ont pu être réalisées par ces réductions, mais nous n'avons trouvé que peu d'indications laissant croire qu'elles étaient attribuables au concept de budget de fonctionnement.
Nous avons constaté, toutefois, que l'écart relatif à l'amélioration de la productivité était le plus grand au niveau local. Nous avons examiné trois grandes fonctions de soutien communes à toutes les bases des Forces canadiennes: l'approvisionnement, le transport et l'entretien des véhicules. Nous avons aussi examiné deux autres fonctions de soutien coûteuses: la formation individuelle et la maintenance des aéronefs. Aucun de ces secteurs ne disposait d'information suffisante sur le rendement au moment de notre vérification et seulement deux semblaient utiliser les données qui étaient alors disponibles. Les gestionnaires locaux ne pouvaient pas nous dire si leur propre productivité s'améliorait ni comment leurs unités se comparaient avec celles d'autres unités similaires d'autres bases.
[Français]
Le manque de données sur le rendement est très troublant, car il s'agit d'un élément essentiel de la stratégie de planification opérationnelle du ministère. Si les gestionnaires ne connaissent pas les tendances relatives à leurs extrants et à leur rendement, ils ne peuvent faire des plans d'activités utiles. Ils ne peuvent que continuer à jouer le rôle de gardien des ressources qui leur ont été confiées.
Notre deuxième observation générale est que dans les deux secteurs où les données étaient insuffisantes pour examiner les tendances de la productivité - l'approvisionnement et la formation individuelle - la situation ne s'était pas améliorée. Dans ces deux secteurs, le coût unitaire des extrants a augmenté. Pour la fonction approvisionnement, la productivité était en baisse d'environ 10 p. 100, tandis que la productivité de la formation individuelle avait chuté de 40 p. 100 depuis 1990. Les représentants officiels nous ont dit que ces deux fonctions étaient dans une phase de transition à cause de la rationalisation, mais nous sommes préoccupés par le fait que la productivité n'est pas gérée étroitement et que la transition sera plus longue que nécessaire. En ce qui concerne la formation, la situation est particulièrement préoccupante, car le ministère avait promis, à la suite de notre vérification de 1990, de mettre en place des mesures et de se comparer à d'autres fournisseurs.
Dans l'ensemble, nous avons conclu que même s'il y a eu certaines améliorations, les niveaux de productivité actuels des fonctions de soutien demeurent faibles.
[Traduction]
La troisième observation générale est que la gestion locale peut faire une différence. Dans la plupart des secteurs que nous avons vérifiés, nous avons constaté qu'un ou plusieurs gestionnaires avaient pris des initiatives et qu'ils avaient radicalement amélioré le rendement à leur base. À titre d'exemple, la base Esquimalt a fait passer de 76 à 27 le nombre d'employés affectés à l'approvisionnement local, a négocié des réductions de coût d'expédition avec les fournisseurs et a libéré 30 p. 100 de l'espace d'entreposage sur la base. La base Montréal a réduit les coûts indirects de transport de près de 50 p. 100 et s'attend à tripler la productivité de ses activités liées au transport cette année. De l'avant-dernier rang, elle se rapprocherait ainsi des cinq bases les plus performantes. Les escadrons de maintenance (Air) à Winnipeg et à Cold Lake ont réussi à réduire de façon significative les coûts de maintenance des Dash-8 et des CF-18. Les coûts de maintenance des Dash-8 ont été réduits de plus de 50 p. 100 et la base de Cold Lake a réduit ses besoins de main-d'oeuvre de plus de 30 p. 100.
Les travaux de suivi de notre chapitre sur la gestion de l'infrastructure nous ont permis de trouver d'autres secteurs où l'on avait amélioré la productivité. Le comité avait recommandé que le ministère trouve des moyens de diminuer les coûts des services d'entretien. Nous avons constaté que le ministère prend des mesures pour y parvenir. Une étude pilote sur la prestation de services de rechange au service de génie construction à la base Kingston laisse entrevoir des économies se situant entre 10 p. 100 et 20 p. 100. Le ministère ne pouvait pas fournir des statistiques sur les économies totales prévues pour l'ensemble de la fonction génie de construction, mais il avait effectué un examen et s'était fixé des objectifs.
D'autres mesures, notamment le projet pilote de mesure du rendement et de rapport de rendement au dépôt d'approvisionnement d'Edmonton, mentionnées par la sous-ministre dans le commentaire présenté au comité le 11 février, indiquent que d'autres progrès sont en train d'être réalisés.
[Français]
Ces résultats indiquent que rien n'empêche les bases des Forces canadiennes de devenir plus productives. Ils indiquent l'ampleur des gains possibles et nous permettent donc d'être optimistes.
Néanmoins, nos consultations nous laissent croire que l'on n'a pas accordé suffisamment d'attention à l'établissement d'objectifs pour l'amélioration de la productivité au niveau de la base et d'un calendrier d'exécution. Comme le vérificateur général l'a déjà fait remarquer, nous croyons que l'on devrait agir de toute urgence. Le comité voudra peut-être demander au ministère d'établir un calendrier et de s'engager à apporter des améliorations.
[Traduction]
Enfin, j'attire votre attention sur les conséquences d'un manque continu d'amélioration de la productivité des services de soutien de la Défense. Dans le document Perspectives du ministère, le gouvernement a déclaré qu'il avait l'intention de maintenir les rôles et les capacités tout en effectuant des compressions budgétaires qui visent à réduire de 30 p. 100 le pouvoir d'achat du ministère. Le seul moyen d'y arriver est de commencer dès maintenant à augmenter la productivité. Notre vérification indique que le ministère a la capacité de continuer à réaffecter aux immobilisations et à la formation les ressources affectées aux coûts indirects. Le comité voudra peut-être demander au ministère combien d'argent affecté au soutien peut être réaffecté aux opérations, et à quelle date.
Je vous remercie, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
[Français]
Le président: Merci, messieurs. Nous accordons la parole à Mme Fréchette, sous-ministre de la Défense nationale.
Mme Fréchette: Monsieur le président, je vous remercie ainsi que les membres du comité de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui pour répondre aux remarques formulées par le vérificateur général concernant la productivité des activités de soutien au ministère de la Défense nationale.
L'amiral Murray et moi-même avons fourni au greffier une déclaration détaillée avant la réunion d'aujourd'hui. Je ferai donc seulement quelques brèves remarques.
Au ministère de la Défense nationale, nous sommes d'accord pour mettre l'accent sur la productivité des activités de soutien et nous estimons, comme le vérificateur général, qu'il est indispensable d'améliorer cette productivité pour maintenir la capacité militaire du Canada dans un contexte de ressources réduites.
Les nombreuses initiatives de renouveau que nous avons prises sur le plan de la gestion visent toutes le même but, soit consacrer le plus de ressources possible au maintien des capacités de combat de nos forces en réduisant le coup de nos activités de soutien.
Dans son rapport publié en novembre dernier, le vérificateur général a présenté un portait de notre organisation il y a plus d'un an. La situation a évolué sensiblement depuis lors. Le ministère est en pleine évolution, puisqu'il entame justement la troisième année d'un programme de renouveau qui s'étend sur cinq ans.
Le Rapport du vérificateur général laisse supposer que le ministère progresse dans la bonne voie, mais qu'il a encore beaucoup de pain sur la planche. Nous partageons cet avis. Les dirigeants du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes sont résolus à atteindre les ambitieux objectifs de renouveau qu'ils ont établis pour l'organisation.
Dans notre déclaration détaillée, nous avons présenté des renseignements et des exemples précis qui témoignent selon nous des progrès accomplis sur tous les fronts. Comme l'a constaté le vérificateur général, le renouvellement de la gestion au ministère de la Défense nationale s'effectue dans un contexte de grandes compressions budgétaires. Vous connaissez sans doute les chiffres, mais laissez-moi tout de même vous les rappeler.
Le budget de la Défense sera réduit de 12 milliards de dollars en 1994 à 9,25 milliards de dollars en 1999, soit une réduction de 23 p. 100.
Nous réduirons les Forces canadiennes de 32 p. 100, soit de 88 800 en 1989 à 60 000 d'ici 1999. Nous comptons aujourd'hui un peu plus de 61 000 militaires. De même, le nombre d'employés civils passera de 36 600 à 20 000 au cours de la même période, soit une réduction d'environ 45 p. 100. Nous comptons aujourd'hui un peu plus de 22 000 civils.
Ces réductions, ainsi que les compressions et les mesures de réorganisation appliquées dans d'autres domaines, donnent lieu à un accroissement de la productivité. En outre, nous avons pris un certain nombre d'initiatives pour renouveler nos façons de procéder. Comme je l'ai déjà dit, la gestion du changement est l'une des principales priorités de la haute direction.
Pour ce qui est de la question de la cohérence à l'échelle de l'organisation, nous sommes d'accord avec le vérificateur général sur la nécessité de coordonner les changements. Même si notre équipe spéciale de restructuration sera dissoute comme prévu l'été prochain, le chef des Services du renouveau de la gestion continuera de coordonner la gestion des initiatives de renouvellement. De plus, les grandes organisations pourront toujours compter sur une équipe Défense 2000 pour promouvoir les changements et communiquer les succès à cet égard.
Nous ne sommes pas d'avis, cependant, qu'il conviendrait d'instituer une gestion centralisée des changements. Notre programme a pour fondement même de déléguer les pouvoirs et les ressources aux personnes qui en ont besoin pour accomplir leur travail. Nous ne jugeons pas nécessaire que toutes les bases et unités fonctionnent exactement de la même manière. Il faut accorder aux commandants de base et aux gestionnaires la latitude voulue pour prendre des décisions sur le meilleur emploi des ressources.
La réussite du projet de délégation de pouvoirs et de responsabilités au niveau des bases démontre que les gestionnaires sont capables de trouver des façons d'économiser. Cela dit, nous employons tous les moyens dont nous disposons pour faire connaître les bonnes initiatives et les meilleures pratiques.
Dans son rapport, le vérificateur général a indiqué que de nombreux projets de renouveau n'en étaient qu'au stade conceptuel. Depuis lors, la majorité de ces projets sont passés à la phase de mise en oeuvre. Par exemple, notre organisation de gestion du personnel civil a été complètement remaniée et, dans le domaine de la gestion du matériel, nous avons adopté le principe des équipes polyvalentes de gestion d'équipement.
[Traduction]
Monsieur le président, au titre de la planification des activités du ministère, nous avons accompli des progrès marqués au cours des trois dernières années. Le vérificateur général a constaté avec raison que l'an dernier, le ministère n'avait établi que les plans des plus hauts niveaux. Ce n'est certainement plus le cas. En fait, certains de nos plans s'étendent aujourd'hui sur quatre niveaux; la majorité touchent deux ou trois niveaux et ceux qui ont été maintenus au premier niveau émanent pour la plupart de petites organisations à vocation consultative ayant des mandats spécialisés.
La critique la plus sévère formulée par le vérificateur général au sujet de la planification des activités au ministère a trait à la mesure du rendement. Il est vrai que, sur le plan stratégique, le Guide de planification de la Défense du ministère pour 1997 ne comportait qu'une ébauche de cadre de mesure de rendement. Nos activités de mise au point se poursuivent néanmoins, et elles sont tout à fait conformes aux initiatives récentes du Conseil du Trésor ayant pour but d'améliorer les rapports présentés au Parlement.
Le nouveau cadre de rendement stratégique vise clairement à établir un lien entre les activités de défense et les ressources connexes, d'une part, et les résultats souhaités par le ministère, d'autre part. Ainsi, nous pourrons non seulement rendre des comptes au gouvernement de façon plus efficace, mais également confirmer la pertinence et la valeur des activités elles-mêmes et des organisations responsables de ces activités.
Nous nous attendons à ce que les travaux amorcés permettent de produire cette année un cadre détaillé de normes et d'indicateurs fondés sur les résultats. Le cadre sera présenté dans le Guide de 1998.
En ce qui touche notre système stratégique de compte rendu du rendement opérationnel, notre ancien Système d'efficacité et d'état de préparation opérationnelle, le SEEO, est en voie d'être remplacé par un système amélioré qui porte le nom de Rapport sur les ressources et les capacités, ou RECAP. Au lieu de nous dire ce que nous avons accompli, le RECAP nous dira ce que nous sommes en train d'accomplir et ce que nous réaliserons probablement à plus long terme.
Nous reconnaissons aussi combien il est important à la fois de déterminer nos coûts par rapport à nos activités et de fournir des rapports sur les coûts pour étayer la planification des activités à tous les niveaux.
Nous disposons effectivement de systèmes qui nous fournissent des données sur les coûts. Ils étaient à la fine pointe au moment où nous les avons obtenus, mais ils ont été dépassés par l'évolution rapide de la technologie. Ces systèmes sont aujourd'hui mis à jour et améliorés, et leur niveau d'intégration est accru conformément aux initiatives du Conseil du Trésor visant l'harmonisation des systèmes. En bout de ligne, ces systèmes et les autres qui sont actuellement mis au point nous permettront de disposer d'une structure financière et de comptabilité de gestion pleinement intégrée à l'échelle du ministère.
Enfin, le vérificateur général a indiqué qu'il faut modifier en profondeur notre culture organisationnelle pour que les initiatives de renouveau réussissent. Heureusement, les membres du personnel du MDN et des Forces canadiennes font montre de qualités extrêmement favorables - le dévouement, le professionnalisme, le courage et l'intégrité - sur lesquelles l'organisation peut fièrement s'appuyer.
Nous avons lancé diverses initiatives en vue de susciter les qualités dont nous avons besoin pour gérer le nouvel environnement. Nous devons retenir que le ministère de la Défense nationale a mis en oeuvre une partie seulement de ses importantes mesures de réduction des effectifs, de restructuration et de renouveau. Les résultats ne peuvent se matérialiser du jour au lendemain. Il nous reste du travail à faire, mais nous avons déjà réalisé des progrès d'envergure sur plusieurs fronts et nous poursuivons nos efforts en ce sens. Nous sommes convaincus que nous pouvons relever le défi. Nous sommes déterminés, et il en va de même pour tous les membres de l'équipe de la Défense. Merci.
[Français]
Vice-amiral L.E. Murray (chef d'état-major de la Défense par intérim, ministère de la Défense nationale): Bon après-midi, monsieur le président. C'est aussi un privilège pour moi d'avoir l'occasion de m'adresser à ce comité.
Je vous dirai quelques mots sur nos efforts au niveau de la gestion de nos bases, de notre système d'approvisionnement, du transport, de l'entretien de nos véhicules et de nos aéronefs, ainsi que de notre système de formation. Des détails supplémentaires sur tous ces sujets sont inclus dans la déclaration déjà déposée.
Un objectif prépondérant du ministère de la Défense nationale, pendant cette période de renouvellement, a été de déléguer plus de pouvoirs aux bases militaires. Au cours des deux dernières années, les bases ont dû absorber des réductions budgétaires de 20 p. 100 ou plus. De nombreuses initiatives de restructuration ont été prises dans les bases afin de réduire leurs dépenses pour maintenir le soutien dont elles ont besoin.
On pourrait citer de nombreux exemples d'initiatives dont plusieurs sont décrites dans notre déclaration déjà déposée.
Le vérificateur général a indiqué dans son rapport que même si l'on peut constater de grandes améliorations de productivité pour ce qui est de l'approvisionnement des bases, entre autres à Esquimalt, la situation ne s'est pas améliorée ailleurs. Depuis lors, toutefois, la majorité des bases au Canada ont mis en pratique les leçons tirées à Esquimalt. C'est le cas notamment de Kingston, de Trenton, d'Ottawa et de Borden.
Le secteur des transports évoluent aussi rapidement. De plus en plus, on confie les fonctions courantes de conduite à des personnes de métier et à d'autres membres du personnel plutôt que de faire appel aux conducteurs professionnels.
En ce qui a trait à l'entretien des véhicules, la gestion de nos parcs subit une révolution à tous les niveaux, et les ressources consacrées à l'entretien diminuent de façon constante. Ces dépenses sont en effet passées de 17,2 millions de dollars en 1992 à 11,5 millions de dollars en 1996.
Le vérificateur général a aussi signalé l'augmentation de la productivité de l'entretien des aéronefs, et le Commandement aérien continue certainement de faire des efforts agressifs pour continuer d'accroître la productivité.
Les initiatives d'envergure prises à Cold Lake et citées par le vérificateur général sont maintenant évaluées par d'autres escadrons d'entretien d'aéronefs. Quelques exemples sont inclus dans notre déclaration. Si vous avez des questions à ce sujet, le lieutenant général de Quetteville, le commandant du Commandement aérien, sera heureux d'élaborer davantage.
[Traduction]
Les conclusions du vérificateur général concernant la productivité de l'instruction au ministère et dans les Forces canadiennes ont été une source de préoccupation. Toutefois, comme nous l'avons indiqué dans notre réponse, le rythme auquel a diminué le nombre de stagiaires a été supérieur au rythme auquel nous avons pu rajuster notre personnel d'instruction. Ainsi, une baisse temporaire de la productivité a été attribuable au ratio stagiaires-instructeurs. Depuis lors, dans les écoles administrées par le système du recrutement, de l'éducation et de l'instruction des Forces canadiennes, le personnel d'instruction et de soutien a diminué de 33 p. 100 par rapport à 1994 pour passer de 1 204 à 801. Le personnel du quartier général chargé du soutien de ces écoles a chuté de66 p. 100, soit de 298 à 101.
En outre, de nombreuses écoles ont été fusionnées ou fermées. Citons par exemple le regroupement de toutes les activités d'instruction des officiers et des recrues au sein d'une seule école, à Saint-Jean, au Québec. Par ailleurs, nous faisons appel de plus en plus au secteur privé lorsqu'il offre une instruction technique comparable à un coût moins élevé. De plus, de nombreuses écoles des Forces canadiennes ont établi des partenariats avec des collèges communautaires ou envisagent cette option.
En résumé, monsieur le président, le ministère ne dispose pas encore d'instruments fiables de mesure du rendement qui permettent de contrôler de façon complète et rigoureuse les fluctuations de la productivité des activités de soutien. La mise au point de tels outils essentiels est une priorité du ministère. Cependant, un nombre suffisant de preuves empiriques donnent à penser que le ministère parvient à réduire les coûts de soutien et à consacrer beaucoup de ressources aux opérations. Malgré les grandes réductions dont a fait l'objet le budget de la Défense, les Forces canadiennes maintiennent une activité intense en participant à des opérations en Bosnie, en Haïti, au Zaïre et sur le plateau du Golan, et en remplissant de façon générale tous nos engagements envers l'ONU, l'OTAN et le NORAD.
À l'heure actuelle, près de 2 300 de nos militaires participent à des missions de maintien de la paix des Nations Unies et à des opérations de soutien connexes. La prestation de nos unités, à l'étranger autant que sur notre propre territoire, témoigne du professionnalisme de nos Forces canadiennes. Au Canada, notre capacité de réaliser un vaste éventail de tâches demeure inébranlée. Nous continuons d'appuyer d'autres ministères dans des secteurs comme la patrouille des zones de pêche, la répression du trafic des drogues, la surveillance de l'environnement, la recherche et le sauvetage, ainsi que les secours aux sinistrés, comme ce fut le cas l'été dernier dans la région du Saguenay.
Dans l'Armée de terre, nous avons ajouté 2 200 fantassins à la force de campagne, c'est-à-dire à l'avant-garde, depuis 1994. D'ici l'été, l'objectif de 3 000 sera atteint, conformément à l'engagement pris par le gouvernement dans le contexte du Livre blanc.
Le comité a entendu parler, il y a quelques semaines, des profonds changements qui s'opèrent dans le domaine de la gestion du matériel, notamment les dispositions innovatrices d'approvisionnement et les mesures visant à grouper et à moderniser nos entrepôts. Grâce à de grands projets de restructuration menés avec la pleine collaboration des syndicats dans nos installations de radoub des deux côtes, nous sommes parvenus à réduire les coûts de façon marquée et à adopter de solides principes de gestion des activités dans les chantiers navals.
Dans le cadre de notre programme de diversification des modes de prestation de services, un vaste éventail d'activités secondaires seront soumises à l'épreuve du marché. Notre but consiste à déterminer les moyens les plus efficaces d'assurer le soutien de nos forces armées. Dans bien des cas, nos unités internes entreront en concurrence avec le secteur privé; il s'agit là d'une approche qui a connu beaucoup de succès au Royaume-Uni et en Australie et qui donnera à nos employés la possibilité de conserver leur emploi au sein de la fonction publique dans la mesure où ils peuvent fournir le service demandé à un prix concurrentiel.
Nous devons retenir que le ministère de la Défense nationale a mis en oeuvre une partie seulement de ses importantes mesures de réduction des effectifs, de restructuration et de renouveau. Les résultats ne peuvent se matérialiser du jour au lendemain. Il nous reste du travail à faire, mais nous avons déjà réalisé des progrès d'envergure sur plusieurs fronts et nous poursuivons nos efforts en ce sens. Nous sommes convaincus que nous pouvons relever le défi. Nous sommes déterminés, et il en va de même pour tous les membres militaires et civils de l'équipe de la Défense.
[Français]
Merci. Nous sommes maintenant prêts pour les questions.
Le président: M. de Savoye m'ayant informé qu'il devait s'absenter pour aller donner une entrevue à des journalistes, nous allons accorder la parole à M. Silye pour 10 minutes.
[Traduction]
M. Silye (Calgary-Centre): Merci, monsieur le président. Tout d'abord, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à M. Murray. Il ne doit pas croire que ce comité est aussi dur que l'enquête sur la Somalie. Il peut peut-être se détendre un peu.
Dans son exposé, à la page 5, le vérificateur général dit notamment, au point 18, que la gestion locale peut faire une différence. C'est certainement vrai. Nous le savons tous. Il faut toujours rechercher du personnel compétent. Le vérificateur général donne des exemples de gestionnaires qui ont pris des initiatives en vue de donner suite au programme de renouveau. À la base Esquimalt, le nombre d'employés affectés à l'approvisionnement local est passé de 76 à 27 et on a libéré 30 p. 100 de l'espace d'entreposage sur la base. À la base Montréal, on a réduit les coûts de transport et les frais indirects de 50 p. 100. Les escadrons de maintenance (Air) à Winnipeg et à Cold Lake ont pu réduire de façon marquée les coûts de maintenance des Dash-8 et des CF-18.
Dans ce contexte, j'aimerais vous demander si les gestionnaires responsables de ces améliorations ont été congédiés, mis à la retraite ou mutés?
Si je vous pose la question, c'est que j'ai entendu dire qu'à la fonction publique, ceux qui prennent des initiatives qui réussissent se font parfois dire de ralentir. Je ne plaisante pas, je veux savoir s'ils ont été «déshabilités», si c'est un mot?
Mme Fréchette: Quand nous parlons d'un changement de culture au ministère de la Défense et dans les Forces canadiennes, c'est justement parce que nous tentons de reconnaître la valeur de ceux qui prennent des initiatives et qui font preuve d'innovation. Les cadres supérieurs du ministère et des Forces canadiennes feraient certainement savoir à ces gestionnaires que de telles initiatives sont escomptées et appréciées. Nous avons mis en place plusieurs prix et mesures de reconnaissance afin de vraiment montrer que nous appuyons et reconnaissons les innovations très impressionnantes...
M. Silye: Il n'y a pas d'augmentation de rémunération, vous leur faites un compliment.
Mme Fréchette: Non, je serais très surprise de constater...
Certains sont extrêmement compétents et parce que cette compétence est démontrée, très franchement, le secteur privé tente de les attirer.
M. Silye: Si je soulève la question, et cela me ramène à ce que je disais au début, c'est parce que le bulletin préparé par le vérificateur général ne vous donne pas de bonnes notes. Si on regardait cela à première vue, on dirait qu'il y a des problèmes au ministère de la Défense. Vous répondez, à votre décharge, par des promesses et encore des promesses; nous le promettons, nous allons faire mieux. Et savez-vous? Vous avez raison, sur ce plan quinquennal de renouveau, oui, les deux premières années ont été mauvaises, mais cette troisième année, il y a des améliorations.
Si nous examinons les mêmes données que le vérificateur général, jusqu'à présent, il y a toujours des lacunes. À la page 4 de son exposé d'aujourd'hui, le vérificateur général précise qu'il a examiné cinq fonctions de soutien: l'approvisionnement, le transport, l'entretien des véhicules, la formation individuelle et les aéronefs. Après toutes les promesses du ministère de la Défense sur ces cinq points et après deux ans, voici les conclusions de son étude: «Aucun de ces secteurs ne disposait d'information suffisante sur le rendement au moment de notre vérification et seulement deux semblaient utiliser les données qui étaient alors disponibles». Comment pouvez-vous vous présenter ici et nous dire, honnêtement, que vous partagez l'avis du vérificateur général, c'est-à-dire que les deux premières années ont été minables, mais que vous avez réalisé des améliorations marquées au cours de la troisième année, que certains de vos employés y sont parvenus, que vous les avez félicités, pourtant...
Ce que je veux savoir c'est qui est responsable de ce manque de progrès, qui a des comptes à rendre à ce sujet. Pourquoi a-t-il fallu trois ans avant que cela ne démarre? Je vous ai entendu dire, au cours de votre témoignage, pourquoi vous êtes convaincue maintenant d'être sur la bonne voie, mais pour la population, pour un politicien comme moi, il est difficile de comprendre où et pourquoi il vous a fallu deux ans pour en arriver au point où vous en êtes aujourd'hui, si c'est vraiment votre intention de fonctionner d'une façon plus commerciale et plus compétitive.
Mme Fréchette: Je vais laisser mes collègues vous donner de plus amples précisions, mais je pense qu'il faut faire une distinction entre l'étape à laquelle nous sommes rendus dans la mise en place de nouvelles méthodes de gestion innovatrices qui démontrent que nous avons réalisé des économies et le problème qui demeure, celui d'un système fiable intégré de mesure.
M. Silye: Donc vous n'en avez pas.
Mme Fréchette: Nous sommes en train de mettre un système intégré en place. À certains endroits, nous avons déjà en place des indicateurs de rendement significatifs et utiles, mais c'est plutôt éparpillé. Il nous faut mettre au point un système d'évaluation du rendement et de calcul des coûts qui soit beaucoup plus facile à utiliser, utile et révélateur. Nous reconnaissons qu'il nous reste du chemin à faire. Au cours de mon exposé, j'ai mentionné que nous accordions à un tel système la plus grande priorité, que nous gagnions du terrain à tous les ans, mais vous savez c'est plutôt compliqué. Nous ne sommes pas le seul ministère à éprouver des problèmes à ce niveau.
M. Silye: Je sais, mais vous êtes le seul à comparaître ici aujourd'hui et donc c'est mon devoir de vous interroger.
Mme Fréchette: Il ne faudrait pas conclure que parce que nous avons encore du travail à faire pour mettre en place un bon système d'évaluation du rendement, nous n'avons pas réalisé de progrès sur les autres fronts. En fait, il y a de nombreuses preuves qui témoignent des économies qui ont été réalisées dans plusieurs activités.
M. Silye: En effet. Madame Fréchette, vous avez réalisé des progrès, je le reconnais, mais si le ministre Doug Young n'avait pas dit qu'au lieu de 12,2 milliards de dollars vous n'en dépenserez que 9,6 milliards, que vous allez réduire ici et là, les plans de renouveau n'auraient pas abouti aux économies qui nous ont été présentées aujourd'hui. Le budget serait toujours de 11 milliards de dollars même en réduisant le personnel militaire de 88 000 à 61 000.
J'aimerais maintenant passer à une question précise qui m'inquiète toujours. Je vous ai déjà posé cette question. La gestion du matériel était alors à l'étude, mais ici, c'est un peu plus ouvert et je pense que la question est appropriée. Vous dites rechercher un rôle plus clair afin que le personnel et les gestionnaires assument une plus grande part de responsabilité et rendent des comptes. C'est votre description d'emploi.
À la page 2 de son exposé, au paragraphe 6, le vérificateur général mentionne que jusqu'à présent le renouvellement a produit des résultats variables. À titre d'exemple, parlons des changements survenus dans les bases et de leur consolidation. La base de Calgary a été fermée et son personnel déménagé à Edmonton. On a fait la même chose un peu partout au Canada; on a déménagé beaucoup de personnel et même là on a fait des réductions.
Dans le cas du déménagement de Calgary, on nous avait dit qu'on épargnerait 26 millions de dollars même si au départ, il faudrait débourser 40 millions de dollars. Or, jusqu'à présent, le déménagement de Calgary à Edmonton a coûté plus de 100 millions de dollars.
Voilà pourquoi je dis qu'il y a confusion dans l'esprit de la population et des politiciens sur les responsables. Qui avait ce mandat, qui était responsable? Qui doit rendre des comptes? Est-ce le ministre de la Défense? Est-ce le sous-ministre? Est-ce le sous-ministre adjoint? Est-ce la personne à qui vous avez délégué cette activité? Qui doit expliquer ce dépassement de coût de plus de60 millions de dollars? C'est probablement d'ailleurs 120 millions de dollars. Est-ce que l'on punira quelqu'un? Est-ce que quelqu'un sera tenu responsable? Est-ce que nous finirons par savoir le nom de cette personne?
Nous voulons savoir comment cela a pu se produire. Il y a maintenant trois années d'écoulées dans la mise en oeuvre de ce plan de renouvellement et voici ce qui se passe. La sous-ministre peut-elle nous donner plus de renseignements à ce sujet?
Mme Fréchette: En ce qui concerne le déménagement de Calgary à Edmonton, je pense que vous avez soulevé cette question la dernière fois. J'ai examiné les chiffres et je pense vous les avoir fait parvenir à votre bureau plus tôt cette semaine. Les prévisions et les données actuelles correspondent exactement à ce que nous avions prédit il y a deux ans. Les économies prévues sont toujours celles que nous comptons réaliser. Donc, dans ce cas particulier...
M. Silye: Qu'en est-il des coûts du déménagement?
Mme Fréchette: Ils sont tels que prévus à l'époque. Je vous ai fait parvenir une ventilation des chiffres.
M. Silye: Merci.
Monsieur Murray, à la deuxième page de votre exposé, vous concluez en disant: «Malgré les grandes réductions dont a fait l'objet le budget de la Défense, les Forces canadiennes maintiennent une activité intense...». J'en conviens. Je tiens à féliciter le ministère de la Défense, nos militaires et les Forces armées canadiennes de leurs activités de maintien de la paix. On fait un excellent travail, nonobstant l'enquête sur la Somalie.
Je tiens également à vous féliciter ou quiconque est responsable du déploiement des Forces armées dans un si grand nombre d'endroits différents, instantanément, nonobstant ce que l'on entend raconter sur qui est prêt, qui a la formation voulue et qui ne l'a pas, et à quel niveau.
Vous faites du bon travail et ce ne sont pas quelques pommes pourries qui changeront mon avis à ce sujet. Mais on parle beaucoup ces temps-ci, et je ne sais trop si c'est à cause des compressions budgétaires ou de la réduction de l'effectif militaire. Je trouve très intéressant que vous n'ayez pas mentionné que malgré les grandes réductions budgétaires et d'effectifs, etc...
Je veux parler du moral. Les compressions budgétaires et la réduction des effectifs de 88 000 à 61 000 ont-ils une incidence sur le moral? Éprouvez-vous de la difficulté à motiver suffisamment de gestionnaires et de commandants de base à trouver des économies alors qu'ils voient les politiciens qui opèrent des coupes aveugles, sabrent dans les budgets comme l'ont fait ces terribles libéraux au ministère de la Défense?
Vam Murray: De mon point de vue, il est souvent question du moral. En fait, si les membres de ce comité rencontraient les membres des Forces armées - c'est d'ailleurs ce que je disais aux membres du SCDNAAC il y a environ une semaine, car ils auront l'occasion de le faire - vous constateriez qu'en fait le moral est plutôt bon.
Est-ce que les membres des Forces armées sont heureux que l'on bloque leur rémunération depuis quatre ou cinq ans? Non, ils n'en sont pas très heureux. Sont-ils fiers de ce qu'ils font? Estiment-ils s'acquitter de leurs fonctions comme des professionnels? Oui. Sont-ils malheureux de ce qu'ils considèrent comme une représentation injuste de leurs loyaux efforts? Oui. S'agit-il de Canadiens qui comprennent que ce pays connaît un sérieux déficit et un endettement national considérable qu'il faut régler depuis 1989? Oui, je crois qu'ils le comprennent fort bien.
Vous constateriez que, à l'instar de tous les Canadiens, ils comprennent assez bien tout cela. Et vous constateriez qu'en général, le moral est très bon, tout au moins au niveau opérationnel. Si vous rendiez visite à des troupes sur le théâtre des opérations, c'est à coup sûr ce que vous constateriez. La plupart des commandants de base sont en fait de braves militaires et je dirais que dans presque tous les cas, ils font vraiment de leur mieux.
L'un des défis que nous devons relever et dont la sous-ministre n'a pas parlé, c'est d'essayer de réaliser ce changement culturel, de ne pas nous enfoncer de nouveau dans l'ornière d'une organisation structurée de façon hiérarchique. Ce n'est pas parce qu'une certaine base fait quelque chose de bien dans son secteur qu'il faut imposer cela à la grandeur du pays, car il y a des différences.
Ce changement de culture est en train de se produire, les gens en prennent conscience et, même si cela prend du temps, c'est également bon pour le moral. C'est dur, mais il n'y a aucun doute que nous progressons. Mais c'est également difficile pour beaucoup d'autres secteurs au Canada.
Le président: Merci.
[Français]
J'accorde la parole à M. de Savoye pour 10 minutes.
M. de Savoye (Portneuf): Monsieur le vérificateur général, madame la sous-ministre, monsieur le vice-amiral, j'ai jeté un coup d'oeil au document sur lequel il est inscrit: Statement for Tabling, Please Check Against Delivery. Je présume que le document est livré tel quel, puisque vous n'avez sans doute pas pu le lire au complet pendant ma brève absence. Est-ce que je me trompe, madame Fréchette?
Mme Fréchette: Non, on ne l'a pas lu au complet.
M. de Savoye: J'aimerais me reporter à ce document pour commencer. Je voudrais faire quelques remarques et vous poser une question.
À la page 2 de ce document, dans la version anglaise, vous dites:
[Traduction]
- Ces réductions et restructurations ont pour effet direct d'augmenter la productivité.
Le fait de couper dans les dépenses et de réorganiser n'indique pas en soi qu'il y a eu une augmentation de la productivité, mais je ne vois nulle part ailleurs quelque indication qui puisse appuyer votre affirmation.
À la page 4 du même document, au dernier paragraphe, vous parlez de performance measurement et vous dites que le vérificateur général fait ses critiques les plus fortes à ce sujet. Il a effectivement raison. Dans le document que vous nous livrez, il n'y a pas de graphiques ou de chiffres comparatifs. Vous nous faites des affirmations. Vous nous donnez des indications.
Vous admettez que, malgré votre sentiment qu'il y a eu des améliorations, vous n'êtes pas en mesure de les chiffrer. Cela me déçoit. Cela me déçoit d'une organisation dont le budget est de10 milliards de dollars par année. C'est un énorme budget et vous devriez être mieux outillés.
Lorsqu'on parle d'objectifs mesurables, on peut parler de performances mesurables, mais encore faut-il avoir des objectifs. Il faut établir un plan de réalisation et un calendrier et avoir un plan d'assurance-qualité. Je n'en ai pas vu ou entendu parler là-dedans. Il faut établir des points de contrôle. Vous ne dites rien à cet effet. Il faut identifier et préparer des moyens de mesure et de contrôle. En fait, si j'ai bien compris, vous avez à peine débuté dans l'élaboration d'objectifs et d'indicateurs de performance mesurables.
Quelles priorités, quel budget et quel calendrier votre ministère s'est-il donnés pour mettre en place des instruments de planification, d'assurance-qualité et de mesure de résultats, afin qu'on ait, lorsque vous reviendrez nous voir, un véritable document nous permettant de comparer le passé et le présent et de vous faire des félicitations? Pour le moment, ce n'est pas le cas.
Mme Fréchette: J'ai indiqué dans ma déclaration d'ouverture qu'au niveau corporatif, pour l'ensemble de tout le système, nous avions posé un premier jalon cette année en élaborant un canevas général de mesures de productivité.
Pour l'année prochaine, nous sommes en train de définir de façon détaillée les mesures de productivité et de performance que nous souhaitons voir émerger du système au niveau de la planification d'affaires. Cela devrait être en place l'année prochaine.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas déjà des mesures de performance dans différents secteurs d'activités du ministère, qu'on n'a pas déjà des instruments d'évaluation et de comparaison des coûts et qu'on n'a pas déjà des embryons de mesures de performance dans certains secteurs d'activités du ministère.
À l'heure actuelle, il nous manque un système complet intégré et cohérent. L'élaboration d'un tel système est un exercice majeur, mais c'est une priorité pour nous. J'espère que lorsqu'on reviendra vous voir l'année prochaine, on sera en mesure de vous donner des preuves s'appuyant sur un système de mesures plus cohérent que celui que nous avons actuellement.
M. de Savoye: Une bonne façon d'apprécier la priorité dont fait l'objet un projet dans une organisation, c'est de poser une question très simple: combien d'argent avez-vous investi dans ce projet?
Mme Fréchette: Je ne peux vous donner cette réponse, mais j'en donnerai une évaluation au comité.
M. de Savoye: Vous comprenez que tant et aussi longtemps que vous n'avez pas les instruments en place, vous ne savez pas si vous atteignez vos objectifs; vous ne savez même pas si vous progressez vers l'atteinte de ces objectifs. Vous pouvez avoir un sentiment et vous pouvez observer certains faits isolément, mais il vous est très difficile d'être certains de vos résultats.
Pire, nous avons vu des organisations faire beaucoup d'efforts pour atteindre des résultats qui se sont avérés, en bout de ligne, ne pas être meilleurs, en termes de productivité et d'efficience, que ce qui était fait auparavant.
Actuellement, vous me dites que vous avez un calendrier de deux ans. D'ici deux ans, comment ferez-vous pour vous assurer d'améliorer vraiment votre performance et votre productivité et de livrer à des coûts inférieurs ce que la mission vous demande d'exécuter?
Mme Fréchette: Il y a des mesures qui sont plus macro et auxquelles l'amiral Murray a fait allusion. Ce sont celles qui ont trait au rythme des activités des Forces. Ce sont celles qui ont trait aux opérations qu'elles conduisent, au nombre d'exercices qu'elles tiennent, au nombre de jours que les bateaux passent en mer et au nombre de sorties que font nos avions. Ces mesures nous donnent certains paramètres au niveau des opérations. Dans la mesure où ces activités demeurent constantes ou augmentent, nous avons au moins certaines indications. Nos économies, on les fait dans le domaine des services de soutien.
M. de Savoye: Quand bien même vous maintiendriez toutes vos activités au niveau actuel à des coûts moindres, vous n'avez pas fait la démonstration que ces activités en soi sont performantes, c'est-à-dire livrent les résultats nécessaires à la mission.
Peut-être que la moitié des sorties suffiraient pour assurer les résultats, ou peut-être qu'il en faudrait 150 p. 100. Vous devriez alors les augmenter de 50 p. 100. Ce sont ces objectifs mesurables que vous n'avez pas mis en place.
Mme Fréchette: Je pourrais demander au vice-amiral Murray ou au lieutenant général de Quetteville de vous expliquer nos cadres de référence et d'objectifs au niveau opérationnel, c'est-à-dire ce qui nous permet de dire que tant de jours et tant de sorties d'avions sont nécessaires. C'est relié à tout un concept de préparation des Forces qui n'est pas totalement arbitraire. Je demanderais peut-être à mes collègues de répondre là-dessus.
Vam Murray: Dans le domaine opérationnel, le problème est un peu plus simple que dans le domaine des recherches et du sauvetage. Il est possible d'avoir des mesures de notre capacité, par exemple
[Traduction]
un certain nombre d'avions opérationnels C-130, F-15C et CF-13, capables de décoller dans les 30 minutes, ou encore décollage de l'appareil dans les deux heures. Autrement dit, quand on mesure les capacités opérationnelles, c'est en fait plus facile à mesurer.
Dans la marine, nous avons un système qui permet de mesurer de façon très cohérente et, à notre avis, très pertinente, l'état de préparation opérationnelle. L'armée de terre est en train d'en établir un. Et dans le
[Français]
Forces aériennes, on a la même chose. Le problème pour nous est d'établir des mesures aussi efficaces dans le domaine du soutien. Au niveau de la base d'Esquimalt et d'autres bases, on a maintenant des mesures. Le problème est de formuler un système au niveau stratégique et de joindre les deux. En ce moment, nous ne sommes pas parfaits, mais je pense que nous sommes parmi les meilleurs au gouvernement dans ce domaine. L'arrivée du business planning a exigé cela, et notre expérience dans le domaine opérationnel nous aide un peu à formuler un système.
M. de Savoye: J'aurais une dernière question, monsieur le vérificateur général. La mise en place d'objectifs mesurables et d'outils de mesure de performance va prendre deux ans. Vous avez entendu la réponse que Mme la sous-ministre m'a donnée. Êtes-vous satisfait de cette réponse? Croyez-vous que cela va permettre d'atteindre les objectifs? La mise en place de ces instruments devrait-elle être accélérée?
M. Desautels: Bien honnêtement, je partage certaines des préoccupations de M. de Savoye. Je pense que ce qu'on entend aujourd'hui est encourageant. Beaucoup de choses ont été réalisées depuis que nous avons terminé notre vérification, mais il est quand même assez difficile de juger. Si on additionne tout cela, qu'est-ce que cela donne comme résultat et de quelle façon est-ce que cela nous rapproche vraiment du but visé ultimement?
Personnellement, je suggérerais qu'on donne au ministère encore quelques mois faire avancer certains dossiers, dont les efforts dans la mesure du rendement. Quand je dis quelques mois, je pense qu'on pourrait lui donner jusqu'à l'automne prochain et lui demander à ce moment-là un rapport d'étape qui ferait bien la synthèse de tout l'effort et qui nous situerait par rapport à l'objectif ultime.
Je ne sais pas si six mois, c'est trop, mais ils pourraient nous faire vers la fin de l'année 1997 ou au début de 1998 un rapport d'étape qui nous donnerait l'assurance qu'on recherche.
M. de Savoye: Monsieur le vérificateur, j'aimerais une précision sur vos propos. Croyez-vous qu'il serait possible que le ministère nous livre son plan d'assurance-qualité?
M. Desautels: Son plan d'assurance-qualité?
M. de Savoye: Oui, c'est-à-dire les moyens qu'il met en place pour s'assurer d'avoir des objectifs mesurables, de pouvoir mesurer sa performance, d'avoir les bons points de contrôle, pour s'assurer finalement que ce qu'il fait est mesurable et livré.
M. Desautels: Je pense qu'il serait possible, du moins dans quelques mois, que le ministère nous fasse un bilan et nous dise où il en est rendu et quelles mesures il entend prendre pour s'assurer qu'il va arriver à son but dans les mois qui vont rester jusqu'à son échéance ultime. Je pense que cela peut faire partie du même rapport d'étape qu'on pourrait demander au ministère.
Le président: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Pagtakhan, vous avez dix minutes.
M. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Merci, monsieur le président.
Monsieur le vérificateur général, je veux m'assurer d'avoir bien compris. Il y a maintenant 12 ans, bientôt 13, que l'on est conscient du besoin d'améliorer la productivité et les services de soutien. Ce dossier existe-t-il vraiment depuis 1984?
M. Kasurak: Oui. Nous avons commencé à faire une vérification intégrée du ministère en 1984 et à cette époque, nous avons soulevé pour la première fois beaucoup de questions qui sont abordées dans ce rapport.
M. Pagtakhan: Dans votre présentation de concert avec la sous-ministre et le vice-amiral, vous énoncez la nécessité d'un changement de culture. À un moment donné, vous avez dit, ou du moins la sous-ministre l'a reconnu, qu'il fallait changer la culture de l'organisation. Puis, dans un autre paragraphe, vous parlez plutôt de la culture de gestion. À mes yeux, la culture de gestion n'est qu'un aspect de la culture globale de toute organisation. Je voudrais savoir si l'on parle d'un changement de culture dans le même sens, afin de bien se comprendre.
Je voudrais que le vérificateur général nous précise de quoi il est question quand on dit qu'il faut un changement de culture. S'agit-il seulement d'un changement dans la culture de gestion, ou d'un changement dans la culture générale de l'organisation?
M. Kasurak: Nous traitons - et je crois que le ministère et nous-mêmes voyons cela sous le même angle - d'un changement des éléments de la culture qui sont liés à la gestion. Il s'agit de savoir comment les gens abordent les activités, comment ils abordent le contrôle et l'utilisation des ressources. Mais nous ne limitons pas cela aux gestionnaires en tant que tels. Il faut mettre en cause tous les membres de l'organisation, jusqu'au plus bas échelon. Je pense que le ministère et nous-mêmes sommes d'accord là-dessus, quant à ce que nous voulons dire par un changement culturel et l'évolution culturelle que le ministère s'efforce de provoquer.
M. Pagtakhan: C'est très réconfortant. Au moins, il n'y a pas de malentendus.
Dans le document qu'on a déposé, le document long, on dit à la page 5:
- Par ailleurs, nous élaborons un programme de formation et de sensibilisation culturelle, et une
première séance de trois jours aura lieu en mai à l'intention de tous les membres du Comité de
gestion de la défense.
Mme Fréchette: Premièrement, beaucoup d'activités ont été mises en oeuvre au ministère - au niveau général, au niveau de commandement, et au niveau de groupes individuels - pour préparer les gens à oeuvrer dans ce nouvel environnement, qui souligne l'innovation, la flexibilité, le travail d'équipe, etc.
De plus, il était important d'après nous de travailler en groupe pour définir ces nouvelles valeurs et cette nouvelle culture. Après de nombreuses consultations avec un échantillon représentatif de nos employés, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il serait utile d'organiser des réunions courtes pour permettre à un grand nombre d'employés de participer aux discussions sur ces nouvelles façons de faire les choses au ministère de la Défense nationale et dans les Forces armées canadiennes.
Nous avons convenu que le premier groupe à entreprendre cet exercice serait le Comité de gestion. Cela permettrait aux membres de ce comité de voir comment avance ce changement de culture, et de voir si ces mesures sont vraiment celles qu'on devrait utiliser pour nos employés. Nous serons donc les premiers cobayes du processus.
Vam Murray: Vous avez soulevé la question de culture. Vous comprendrez que notre structure comprend beaucoup de cultures différentes. C'est donc une question assez complexe.
Il faut procéder avec prudence, parce que beaucoup de personnes se sentent menacées. Quelqu'un qui commande une section d'infanterie ou un navire de guerre considère cette planification d'affaires et ces nouvelles idées comme assez inquiétantes. Il faut utiliser toutes sortes de véhicules - comme les séminaires et les conférences - pour nous assurer que le commandant d'un navire ou d'un bataillon comprend ce que nous essayons de faire: nous ne voulons pas lui dire comment mener sa bataille, mais comment optimiser l'utilisation des ressources, comment profiter d'autres idées au maximum, etc.
La question de la culture au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes représente donc un défi qui comporte de multiples éléments.
M. Pagtakhan: À la page 5 de ce document détaillé, vous indiquez qu'il est difficile d'avoir les indicateurs de performance sous la main à ce moment-ci - mais ces indicateurs sont un facteur important dans cette réunion. Après cela, vous indiquez les résultats et les rôles que vous essayez de diviser et de subdiviser pour les utiliser comme fondement pour le développement de ces normes - la défense du Canada, la participation à des opérations de maintien de la paix, la coopération avec les États-Unis, et la promotion de la protection civile.
Plus loin, en haut de la page 6, vous dites: «Nous nous attendons à ce que les travaux amorcés permettent de produire cette année un cadre détaillé de normes et d'indicateurs fondés sur les résultats.» Cette année veut dire à la fin de 1997. Est-ce que cela pourrait être vraiment complété d'ici la fin de l'année?
Vam Murray: Nous avons l'intention de faire de notre mieux, et nous y consacrons beaucoup d'énergie.
Pour vous donner un exemple - et cela vous donnera une idée de la complexité de la question - nous essayons de mettre au point ce que nous appellerons un système de compte rendu du rendement.
Un exemple serait l'énoncé de mission, défendre le Canada et les intérêts et les valeurs du Canada, tout en contribuant à la paix et à la sécurité internationales. Notre mission première, c'est de défendre le Canada. L'objectif dans ce cas-là serait d'aider les autres ministères gouvernementaux à atteindre les objectifs nationaux. Par exemple, le ministère de la Défense nationale appuie le ministère des Pêches et des Océans dans la protection des pêches, une des missions du commandement maritime. Donc, pour mesurer le rendement, il faut étudier chaque élément, pour déterminer comment mesurer la conformité réglementaire et connaître les indicateurs. Est-ce que le nombre de bateaux de pêche abordés constitue un indicateur? Quelle est la norme? En d'autres mots, est-ce que la norme c'est d'aborder 50 p. 100 des bateaux de pêche dans une zone de patrouille particulière?
Si vous regardez l'ensemble du ministère et des Forces canadiennes... et c'est l'un des domaines les plus faciles. Comme je l'ai dit, quand on parle strictement de capacité de défense et de missions, c'est plus clair que s'il s'agit d'une structure quelconque à vocation largement consultative. Mais voilà le degré de détail où nous sommes, et nous tâchons de faire cela dans tout le système.
Ce qui n'est pas ressorti plus tôt, c'est peut-être l'impression que nous ne mesurons rien parce que nous n'avons pas de système tous azimuts. D'ailleurs, dans le document intitulé Perspectives du ministère que nous avons remis au Parlement en 1996, nous avons donné un rapport très détaillé de ce que nous faisions au niveau des compressions, des fermetures de base et tout cela. Ce n'est pas comme si l'on ne faisait rien.
Ce que nous disons, et ce que dit le vérificateur général, c'est que nous n'avons pas le genre de système de mesure du rendement tous azimuts dont nous avons besoin et, avec ça, un système d'établissement des coûts tous azimuts qui nous permettrait de créer un bon plan d'affaires pour tout le système. Mais nous faisons des tas de choses pour suivre ce qui se passe, le pourcentage des compressions et tout cela. Ce que nous n'avons pas, c'est un système comme celui que nous aimerions avoir. On y travaille, mais ça ne veut pas dire que nous ne mesurons pas les choses du mieux que nous pouvons dans bon nombre de secteurs.
M. Pagtakhan: Le vérificateur général, dans son exposé, a proposé au comité un tas de questions que nous pourrions poser au ministère. Partant de la dernière suggestion, la question 23, j'aimerais demander au ministère combien de dollars on peut retrancher du soutien aux opérations et à compter de quelle date?
Vam Murray: Je pense qu'en nous donnant un certain mal, nous pourrions probablement vous dire ce que nous avons fait jusqu'à présent. Je pense que ce serait très difficile, à ce stade-ci, de vous dire exactement ce que nous allons faire d'ici 1999, qui est la date cible que nous visons pour la mise en oeuvre du Livre blanc sur la défense. Mais chose certaine, nous avons l'assurance que pour la plupart de nos initiatives, lorsque nous prévoyons une activité de soutien d'une forme ou d'une autre, nous réalisons des économies d'environ 20 à 30 p. 100. Cependant, ce serait vous induire en erreur que de vous dire que je peux vous donner ce chiffre au pied levé cet après-midi. Je ne le pourrais certainement pas.
M. Pagtakhan: Encore là, au niveau de la terminologie, on s'est interrogé sur l'utilisation du terme «planification d'affaires» qu'on applique à une organisation militaire. Avez-vous trouvé une nouvelle terminologie? Je pense qu'on pourrait appeler ça la planification de la productivité.
Vam Murray: C'est possible. Tout cela nous ramène à la question de culture que vous avez soulevée et que j'ai expliquée. Nous avons chez nous diverses cultures, et l'un de nos défis, c'est de s'assurer que les gens ne se sentent pas menacés ou contestés parce que nous employons une terminologie différente de la terminologie militaire à laquelle nos gens sont habitués. Je pense que planification d'affaires est l'expression avec laquelle la plupart des gens sont à l'aise, donc pour le moment, nous continuons d'utiliser ce terme.
[Français]
Le président: Avant que nous passions au tour de cinq minutes, j'aurais une question pour Mme Fréchette. Quel est le pourcentage de la part du budget de la Défense qui est consacrée cette année aux fonctions de soutien?
M. Robert Emond (sous-ministre adjoint, Finances et Services, ministère de la Défense nationale): Dans le fond, notre problème est de faire la distinction entre le soutien et les opérations. Si vous me le permettez, je vais essayer de trouver le document en question.
Nous avons fait un calcul du changement du pourcentage du budget de la Défense alloué aux fonctions de soutien, c'est-à-dire les fonctions d'overhead, ainsi qu'à la formation et aux opérations. Le budget alloué aux fonctions d'overhead est passé de 52 p. 100 il y a quatre ans à environ 47 p. 100 aujourd'hui. On a fait un changement. Encore une fois, il est difficile de définir précisément la différence.
Le président: Je vais vous expliquer pourquoi je posais cette question. Au paragraphe 34.8 de la version française, à la dernière ligne, le vérificateur général nous dit:
- La Défense nationale consacre chaque année 46 p. 100 de son budget aux fonctions de soutien.
Mme Fréchette nous dit:
Ces réductions, ainsi que les compressions et les mesures de réorganisation appliquées dans d'autres domaines, donnent lieu à un accroissement de la productivité.
Cela est complètement contesté par le vérificateur général, qui nous dit au paragraphe 34.117:
- 34.117 Le Ministère a réduit sa taille, mais ses services de soutien n'ont toujours pas augmenté
leur productivité.
M. Emond: Merci, monsieur le président. Cela m'a donné le temps de trouver la section à laquelle je faisais allusion plus tôt.
Je me base sur nos définitions, mais je ne suis pas en mesure de confirmer que les définitions sont les mêmes. En 1991-1992, le pourcentage du budget alloué aux opérations était de 49 p. 100 et, en 1996-1997, il est passé à 56 p. 100 pour les opérations et la formation. Quant au pourcentage consacré à l'overhead, il est passé de 51 à 44 p. 100, mais la période est différente.
Je cite en exemple une mesure de productivité: le niveau des ressources consacrées aux quartiers généraux. Il y a une précision dans le budget de 1995 du ministère; on a indiqué une baisse de 50 p. 100, c'est-à-dire de 14 000 à 7 000 pour les quartiers généraux. On a déjà atteint 25 p. 100. On est donc à mi-chemin. Bien qu'on ne puisse pas démontrer que cela se traduit directement en gains de productivité, parce que le système en place n'est pas complet, on mesure les indicateurs jusqu'à ce que ce système soit en place.
Le président: Monsieur Desautels, est-ce que votre chiffre de 46 p. 100 est bon?
M. Desautels: Oui, le chiffre de 46 p. 100 était bon au moment où on l'a calculé. C'est un calcul qui avait été fait à un point près à l'époque. Ça se rapproche du chiffre de 47 p. 100 que le ministère a calculé.
Le président: Vous avez soumis votre rapport en novembre 1996. Vous avez obtenu ce chiffre-là au cours de l'été. On est maintenant à 47 p. 100.
[Traduction]
M. Kasurak: Monsieur le président, je pense que la différence de 1 p. 100 s'explique simplement par la différence dans la base que nous avons prise lorsque nous avons fait nos calculs. L'important ici, ce n'est pas tant de savoir s'il s'agit de 46 p. 100 ou de 47 p. 100; ce qu'il faut comprendre, c'est ce que vise notre rapport par rapport à ce que M. Emond dit.
Ce dont il est question dans notre rapport, c'est des services de soutien que nous avons examinés. Chose certaine, il y a déclin de la productivité dans la formation et les approvisionnements, et ce sont les deux domaines où nous avons pu réunir suffisamment de données pour mesurer ce qui s'est fait autour d'une certaine période. Il y a donc baisse, mais les niveaux d'activité avaient diminué plus vite que les réductions dans les ressources qui y étaient consacrées. C'était notre principale préoccupation.
Ce dont nous n'avons pas parlé, c'est des réductions au quartier général qui ont été mentionnées, qui ont fait baisser les coûts généraux d'administration, et je pense que c'est ce qui explique les chiffres que le ministère vous présente aujourd'hui. Je pense que dans ce cas-ci, il y a deux perspectives différentes, l'une qui inclut les dépenses administratives, et la nôtre, qui portait sur les activités des bases elles-mêmes. C'est là où se situe notre seule préoccupation, à savoir les secteurs des services qui n'ont pas encore été touchés par le programme de restructuration et qui représentent encore un atout important pour le ministère. Dans notre rapport, nous tâchons de souligner les compressions importantes qui ont déjà été faites au niveau des dépenses administratives.
J'espère que cela explique les différences dans ces chiffres, monsieur le président.
[Français]
Le président: D'accord. Monsieur de Savoye, cinq minutes.
M. de Savoye : Monsieur le vérificateur général, dans la présentation que vous nous avez faite au début de cette audience, vous disiez au point numéro 8:
- Le Ministère croit toujours que son programme de renouvellement se déroule bien, mais nous
sommes préoccupés parce qu'il n'a pas accordé une attention suffisante à l'amélioration de son
rendement au niveau local où il utilise véritablement la plupart de ses ressources.
Dans le même ordre d'idées, vous dites à la fin du paragraphe 9:
- J'espère que le Comité se penchera sur la question de savoir si la stratégie du Ministère doit être
examinée davantage.
[Traduction]
M. Kasurak: Nous tâchons d'attirer l'attention du comité sur ce qui se fait en réalité sur les bases des Forces canadiennes. Le ministère, tout comme le mémoire du ministère aujourd'hui, a concentré son attention sur le niveau stratégique de la gestion. Le ministère a un défi de ce côté. C'est un problème important.
Cependant, notre vérification indique qu'il y a des possibilités supplémentaires d'économies aux échelons inférieurs, et c'est bien là que les gestionnaires ont pris l'initiative, et ils ont pu ainsi réaliser des économies importantes. C'est sur cette facette de la gestion, le niveau de la gestion opérationnelle, que nous voulons attirer l'attention du comité.
[Français]
M. de Savoye: Si je comprends bien ce que vous nous dites, au niveau des bases militaires, de substantielles améliorations en productivité peuvent être faites parce que le gros des ressources est justement là. Madame la sous-ministre, quel est votre point de vue sur ce que M. le vérificateur vient de nous dire et comment entendez-vous y donner suite si vous ne le faites pas déjà?
Mme Fréchette: Je devrais peut-être passer la parole au général de Quetteville qui, en tant que commandant des Forces aériennes, a chez lui tout un réseau de bases. Il pourrait vous expliquer le genre d'activités qui sont en cours dans son secteur et qui sont un peu à l'image de ce qui se produit dans les deux autres services.
Au plan général, l'amélioration au niveau des bases est un élément important du plan de renouveau du ministère parce que cela absorbe beaucoup de ressources. Comme le vérificateur général l'a souligné dans sa présentation et comme nous l'avons nous-mêmes fait dans notre rapport, il y a beaucoup d'exemples d'initiatives qui ont eu beaucoup de succès et qui ont mené à des économies très importantes.
Le défi pour nous est non pas de forcer chacune des bases à faire exactement la même chose, mais de laisser chacune d'entre elles définir le modèle le plus approprié dans ses propres circonstances. En même temps, nous devons nous assurer que les bases ont en main toute l'information nécessaire pour pouvoir appliquer les recettes les plus positives dans leur cas.
On a un certain nombre de mécanismes pour cela, qui sont diffusés par voie de documents. Il y a maintenant des expériences et des conseils. C'est un nouveau forum.
M. de Savoye: Je vous interromps, madame. Je comprends que vous voulez laisser aux bases le soin d'appliquer les recettes qui leur semblent les plus propices, mais j'imagine que vous ne leur laissez point le soin d'établir les objectifs de performance à atteindre. Autrement, n'importe quelle recette permettrait d'atteindre n'importe quel résultat. Si je vous pose la question, c'est que la base militaire de Valcartier ouvre ses portes sur mon comté.
Elle est dans le comté de Charlesbourg, mais quand les gens sortent de la base, ils sont dans le comté de Portneuf. On sait qu'il y a eu récemment à Valcartier des événements qui ont été soulignés et qui le sont encore par la voie des journaux: il s'agit de malversations sur le plan financier. J'aimerais savoir quelle latitude vous donnez aux bases en termes de moyens, mais aussi en termes d'objectifs à atteindre. Comment est-ce que tout cela s'emboîte?
Mme Fréchette: Je vais donner la parole au général de Quetteville, qui va vous expliquer comment cela s'emboîte du niveau de la base jusqu'au sommet, mais je voudrais d'abord dire qu'on ne donne jamais aux gens la latitude de briser la loi, de frauder. C'est pour cela qu'ils se retrouvent en cour martiale. Des accusations sont portées contre les gens qui se rendent coupables de ce genre de choses. Leur latitude ne va jamais jusque-là.
Général de Quetteville.
[Traduction]
Le lieutenant-général A.M. de Quetteville (commandant, Commandement aérien, ministère de la Défense nationale): Monsieur le président, merci.
Permettez-moi de vous dire comment nous faisons cela au Commandement aérien. Vos documents décrivent une partie de ce que nous avons fait à Cold Lake où nous avons mis à l'essai bon nombre de ces principes.
Cold Lake a pour mission de former des pilotes de chasse prêts au combat et de maintenir deux escadrons opérationnels qui ont des responsabilités dans le cadre de l'OTAN et du NORAD. Nous pouvons donc très bien mesurer le rendement de ces unités dans l'accomplissement de leurs responsabilités.
Si l'on remonte quelques années en arrière, nous avons commencé par essayer de mesurer tous les éléments qui interviennent dans le rendement de chaque escadron. Bien sûr, cela revient à poser toute la question du rôle de soutien de la base, du génie civil au transport et aux approvisionnements et jusqu'au chef d'escadron et à son quartier général, tous ces éléments qui sont réunis avec pour objectif ultime de former des pilotes de chasse prêts au combat.
Nous sommes passés au travers d'un processus très complet afin d'établir toutes les formalités, et de là nous avons mis au point un logiciel qu'on appelle le Centre de gestion des coûts, que vous connaissez, je pense, si vous avez lu nos documents, qui nous permet d'établir un coût pour chacun de ces éléments. Nous nous sommes servis de Cold Lake comme base pilote, et nous sommes maintenant en mesure de compléter tous ces calculs. Vers le 1er avril de cette année, nous pourrons appliquer ce logiciel à tous les autres escadrons des Forces aériennes, et nous pourrons donc ainsi mesurer tous ces genres de choses.
Vous avez raison; nos gens ne se contentent pas d'établir leurs normes séparément pour ensuite faire tout ce qu'ils veulent. Tout d'abord, je reçois mes instructions du CEMD et du sous-ministre, dans le contexte de la politique de défense générale, sur ce que je dois faire dans ce domaine particulier que nous appelons le contrôle aérospatial. De là je peux transmettre ces instructions aux escadrons - dans ce cas-ci, Cold Lake - et cet ensemble d'instructions me permet de déterminer combien de pilotes de chasse la base doit former chaque année, et combien d'entre eux doivent être prêts au combat. Nous produisons un programme de formation détaillé qui dit exactement quelles opérations de vol doivent être faites.
Ce sont donc mes instructions, et je donne ensuite des ressources au chef d'escadron, et il doit gérer ces ressources en se servant des méthodes que je viens de décrire, les méthodes du Centre de gestion des coûts.
Vous savez aussi que nous avons réussi des choses formidables à Cold Lake en nous servant de cette technique. La base a réalisé des économies très importantes dans ses frais d'exploitation, économies qui nous ont permis d'opérer des réductions considérables dans notre gestion des CF-18.
Voilà qui vous dit un peu comment nous procédons dans les Forces aériennes.
[Français]
M. de Savoye: Monsieur le président, je vous remercie. C'est une des meilleures réponses que j'ai entendues cet après-midi.
[Traduction]
Le président: Monsieur Silye, vous avez cinq minutes.
M. Silye: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir à la sous-ministre. Je veux des précisions ici, parce que si je me trompe, je vais induire en erreur mes électeurs. Je veux revenir à cette question de la consolidation des bases, des coûts et des économies. J'aurai besoin de l'aide du vérificateur général ici, je vais donc lui poser des questions à lui aussi pendant mes cinq minutes.
Dites-vous, madame Fréchette, que le coût du déplacement de la base des Forces canadiennes de Calgary à Edmonton n'a pas excédé le budget? Cela nous ramène au budget de 1994 ou au budget de 1995. Je pense que ce n'était pas censé coûter plus de 40 millions de dollars.
Une fois la consolidation et les dépenses effectuées - après avoir dépensé pour faire le déménagement et la consolidation des bases - on devait économiser annuellement près de 26 millions de dollars. De toute évidence, après un certain temps, cette dépense de 40 millions de dollars devait nous rapporter.
Donc les économies projetées sont encore là, ce que je peux voir, mais le coût du déménagement ne dépasse pas les 100 millions de dollars, à ce qu'on m'a dit? Dites-vous que c'est vrai? Et dites-vous cela parce que le budget principal a été déposé la semaine dernière?
Mme Fréchette: M. Adams, notre sous-ministre adjoint, responsable de l'infrastructure et de l'environnement, a le détail des coûts. Je vais lui demander de vous dire quels éléments sont intervenus dans les prévisions des coûts au moment où l'annonce a été faite et quelle est l'estimation actuelle. C'est conforme à ce que nous avions projeté dans le temps.
M. John Adams (sous-ministre adjoint, Infrastructure et environnement, ministère de la Défense nationale): Je vais vous présenter cela sous forme de tableau. Je vais vous confirmer ce qu'étaient les estimations originales et vous donner ensuite notre estimation actuelle.
Si vous prenez la construction seulement, l'estimation originale était de 121 millions de dollars. Nous en sommes aujourd'hui à 119 millions de dollars. L'opération d'assainissement environnemental était estimée à l'origine à 43 millions de dollars, et nous en sommes maintenant à 33 millions de dollars. On avait estimé le déménagement lui-même à 19 millions de dollars, et nous n'avons pas bougé de ce côté. Les coûts de garde étaient de 2 millions de dollars, et ça n'a pas bougé. L'estimation totale à l'origine était de 185 millions de dollars, et notre estimation actuelle se chiffre à 173 millions de dollars. Nous avons donc respecté notre budget.
Maintenant, pour l'évitement des coûts...
M. Silye: Désolé de vous interrompre, mais on est loin des chiffres que nous avons entendus la première fois, lorsqu'on disait que le déménagement à Calgary n'allait coûter que 40 millions de dollars. C'est peut-être là que je me trompe.
M. Adams: J'ignore où vous avez pris ce chiffre de 40 millions de dollars. Il faudra voir où vous avez pris ça. Les chiffres que je vous cite étaient les chiffres qu'on avait donnés dans le temps.
M. Silye: J'accepte vos chiffres.
M. Adams: Il y avait un évitement des coûts associé au déménagement, et c'est peut-être ce qui explique cela. Nous aurions dû dépenser 131 millions de dollars à Calgary, si nous y étions restés. Nous n'avons pas dépensé autant. Si vous retranchez ce montant des 185 millions de dollars, cela vous donne 54 millions de dollars. Si vous retranchez ce montant des 173 millions de dollars, cela vous donne 42 millions de dollars. L'explication est peut-être là.
M. Silye: Je comprends. J'imagine que je n'aurai pas besoin de votre aide, monsieur le vérificateur général. On a probablement répondu à ma question.
Merci. Je n'ai plus d'autres questions.
Le président: Monsieur Hubbard.
M. Hubbard (Miramichi): Monsieur le président, moi aussi j'avais une base chez moi. Notre histoire n'est pas drôle non plus. Je pense que John Adams la connaît.
Pour ce qui est de la Défense nationale et de ces rapports du vérificateur général, comment sont-ils perçus par le ministère de la Défense nationale? Est-ce qu'on les trouve justes, indulgents, justes ou injustes, ou est-ce le genre de chose qu'on ne veut pas recevoir à tous les deux ou trois ans? Comment reçoit-on chaque nouveau chapitre de M. Desautels?
Mme Fréchette: Tout d'abord, permettez-moi de vous dire au sujet de ce chapitre en particulier, que nous attachons beaucoup d'importance aux rapports du vérificateur général. Comme vous le savez, avant la publication des rapports, les ministères ont la possibilité de les commenter. D'ailleurs, nous avons décidé de tenir plusieurs discussions au cours de l'été dernier, où l'amiral Murray, moi-même et M. Desautels étions présents. Tout d'abord, il y avait certaines constatations qui nous préoccupaient beaucoup. Nous voulions aussi lui expliquer notre plan de gestion.
Je pense qu'on peut dire que ce fut une discussion très fructueuse. Cela m'a certainement permis de porter mon attention sur quelques problèmes essentiels qui me préoccupent depuis que j'ai eu cette conversation avec lui.
Deuxièmement, je pense qu'on peut toujours contester le choix de certains indicateurs et dire qu'on en aurait choisi un autre pour mesurer notre productivité. Vous allez constater dans le rapport que dans le cas du transport, on se sert particulièrement du nombre de kilomètres par conducteur comme indicateur. À notre avis, ce n'est pas le meilleur indicateur qui soit. On en aurait préféré un autre. Mais, chose certaine, nous ne contestons pas les constatations du vérificateur.
M. Hubbard: Donc, lorsque la Défense nationale reçoit son rapport, un groupe l'étudie, et il faut le transmettre aux échelons inférieurs qui ont leur mot à dire et qui doivent expliquer à l'état-major pourquoi ces problèmes particuliers se posent. Il y a donc quelqu'un au niveau du chauffeur, qui est probablement le niveau le plus bas de votre organisation, qui se fait dire tout à coup par quelqu'un de l'état-major qu'il ne conduit pas assez loin tous les jours. Le vérificateur général a dit que la moyenne est de 100 km par jour, alors tu fais mieux de sortir et d'aller faire un tour, sans quoi on va écoper d'un autre mauvais rapport.
Quel genre de système utilisez-vous? Est-ce qu'il y a quelqu'un à la Défense nationale qui a la responsabilité de dire que ce n'est pas un bon rapport et que le public va faire tout un tabac avec ça? Est-ce qu'il y a un général, un colonel, un major ou un simple soldat à qui on confie la responsabilité d'améliorer les choses? Est-ce qu'il y a une personne qui va s'employer à obtenir un meilleur rapport dans deux ans?
Mme Fréchette: Tout d'abord, nous avons un bureau de coordination qui a pour fonction de maintenir la liaison avec le vérificateur général.
M. Hubbard: Il y a donc quelqu'un qui est responsable de ce bureau. Qui est-il?
Mme Fréchette: Ce bureau est chargé de la distribution du rapport du vérificateur général.
M. Hubbard: Pouvez-vous dire au comité qui est cette personne? Qui doit voir à ce que vous obteniez un meilleur rapport dans deux ans?
Mme Fréchette: C'est nous, les deux.
M. Hubbard: C'est donc la sous-ministre et le vice-amiral Murray, le CEMD.
Mme Fréchette: Oui.
M. Hubbard: Le problème que nous avons nous, politiciens, c'est que nous voulons être réélus, mais des fois, on ne l'est pas. Il y a des changements dans la députation, mais au niveau de notre comité, c'est la sous-ministre et... Vous n'envoyez pas quelqu'un faire le ménage afin d'obtenir un meilleur rapport?
Mme Fréchette: Il y a des niveaux de responsabilité dans toute l'organisation. Il est évident que lorsqu'il s'agit de la productivité des chauffeurs dans les bases, nous n'allons pas mettre au point un nouveau système pour les chauffeurs. On délègue par la filière, les groupes, jusqu'au bas...
M. Hubbard: Je trouve cela étrange.
Je voulais dire aussi qu'il y a eu une grande purge dans les Forces armées. On est passé de 88 000 personnes à 60 000 personnes. Mais beaucoup de gens disent qu'on n'a pas purgé aux bons endroits.
On me dit qu'il y a une centaine de généraux dans les Forces armées. Cela peut comprendre les généraux actifs et aussi les généraux à la retraite qui font partie de votre effectif civil. Combien de généraux avez-vous?
Vam Murray: Nous avions 120 généraux, je crois, en 1988 ou 1989. Nous avons en ce moment 72 postes de généraux et 68 généraux. Les Hollandais ont 112 généraux pour une armée qui a à peu près la taille de la nôtre. Les Autrichiens ont une armée qui est très semblable à la nôtre, mais ils ont 131 généraux.
Au niveau de la comparaison, le fait que nous en sommes à 68 généraux représente une réduction de près de 40 p. 100. Nous allons probablement aller encore plus loin que ça. Si on se compare à des pays de notre taille, on ne se débrouille pas si mal que ça, à mon avis.
M. Hubbard: Si je vous comprends bien, c'est une préoccupation importante pour vous parce que vous semblez avoir étudié la situation.
Mon autre question a trait à l'ensemble des forces. On entend partout dans la fonction publique - on a subi des réductions importantes - qu'il faut se rajeunir et injecter du sang nouveau, des idées nouvelles. Est-ce que cela ne pose pas un problème au niveau de la structure? On a parlé de culture. Je pense que c'est M. Pagtakhan qui l'a mentionnée. Est-ce qu'on a de grandes difficultés à recruter des éléments neufs pour l'administration et les forces?
Prenons l'exemple des retraites obligatoires, du PRPC et du reste, tout ce qui s'est fait. L'état-major ne se préoccupe-t-il pas du fait que nous n'avons pas pu maintenir un type de structure militaire vraiment dynamique, rajeunie, avec une nouvelle mentalité, ce qui est ce dont notre pays a vraiment besoin? Est-ce qu'on ne s'inquiète pas de ce côté?
Mme Fréchette: Du côté civil, je dirai simplement qu'on a très peu recruté au cours des quelques dernières années. Quand on demande à tellement de gens de partir, il faut donner la priorité aux nombreuses personnes qui peuvent travailler dans la fonction publique avant de recruter. Il y a donc eu très peu de recrutement.
À plus long terme, il se peut que cela crée des problèmes au niveau du rajeunissement et du remplacement de ceux qui vont partir dans les quelques prochaines années.
Je pense qu'on revient maintenant à des habitudes plus normales. Je pense que nous pourrons commencer à recruter plus systématiquement dans un avenir prochain.
M. Hubbard: Enfin, vice-amiral Murray, pouvez-vous donner à notre comité des statistiques sur le nombre de généraux actifs et retraités qui restent au service de la Défense nationale? Pouvez-vous nous donner cela, pas tout de suite, mais à notre comité plus tard?
Vam Murray: Absolument, oui.
J'aimerais dire une chose au sujet des anciens généraux qui sont restés au service du ministère à titre de membres civils ou ailleurs, ce qui peut susciter des interrogations. Nous avons un processus d'éthique auquel tous ces gens doivent se soumettre avant d'être engagés. Il semble y avoir de fausses conceptions ici. Chose certaine, nous pouvons vous obtenir ces informations, je crois, monsieur.
Le président: Monsieur Grose.
M. Grose (Oshawa): Merci, monsieur le président.
En vous posant la question, je vais peut-être vous donner une excuse ou une raison expliquant la lenteur apparente de la mise en oeuvre de ce plan. Dieu m'en préserve.
On parle toujours de planification d'affaires, de gestion d'affaires et de tout le reste. Dans le privé, on engage un gestionnaire qui a ou bien acquis de l'expérience ailleurs aux frais de quelqu'un d'autre ou qui a été formé par vous et qui fait les choses à votre façon.
Dans l'armée, bien sûr, vous recrutez des gens qui deviennent soldats, pilotes, amiraux ou je ne sais quoi d'autre. S'ils ont des compétences particulières, ils vont probablement monter en grade et occuper un poste de commandement. On leur demande ensuite de faire de la gestion. Est-ce qu'on ne leur en demande pas trop?
Amiral Murray, vous avez mentionné le fait que vous demandez à ces gens de faire tout cela et que vous ne voulez pas leur faire peur. Cela m'intéresse beaucoup. Est-ce qu'on utilise ces gens comme il faut? Est-ce qu'on ne s'attend pas à trop de choses de leur part?
Vam Murray: C'est une bonne question, monsieur. Très franchement, à mon avis... En fait, je pense que le vérificateur général a posé cette question dans son rapport, et il a dit qu'à son avis, le fait d'être bon gestionnaire est une caractéristique importante chez un bon chef.
Et chose certaine, dans notre pays, à mon avis, au vu de la taille des forces armées, au vu de nos exigences, et étant donné le fait que l'on confie à des chefs de 35 ans des navires qui coûtent des milliards de dollars ou un bataillon d'infanterie ou un escadron aérien où l'on dépense des tas d'argent très vite, je pense que le public canadien doit exiger, au seuil du XXIe siècle, que les chefs des Forces canadiennes ne soient pas seulement de bons chefs - c'est sûr qu'ils doivent être de bons chefs - mais aussi de bons gestionnaires.
Est-ce que les gens de ma génération ont reçu la préparation voulue, ou est-ce qu'on a fait les bonnes prédictions? Non, peut-être que non.
Est-ce que nous faisons des efforts pour réorganiser les programmes de collèges, tel que le collège de formation des officiers, en insistant sur la formation universitaire, sur certains cours particuliers dans le but d'équiper nos officiers des outils dont ils auront besoin pour faire leur travail? C'est une question qui mérite toute notre attention, c'est une question sur laquelle nous travaillons, mais je dois avouer que tout n'est pas encore à point. Néanmoins, j'estime que c'est une requête raisonnable dans la conjoncture actuelle, étant donné que notre budget est de 9,25 milliards de dollars. Il n'est pas déraisonnable d'attendre de ces gens qu'ils puissent faire les deux: se battre dans des bataillons d'infanterie et utiliser intelligemment les ressources qui leur sont confiées.
M. Grose: Au collège militaire où vous formez vos officiers de demain, avez-vous ajouté des cours de gestion administrative?
Vam Murray: Nous faisons tout ce que nous pouvons partout. Au collège militaire, le problème se situe plus au niveau des programmes de génie ou de commerce, car les élèves y suivent un programme universitaire comme partout ailleurs. Il faudrait que je vérifie. Ailleurs, nous essayons d'inciter le maximum de nos recrues à suivre des cours de gestion de notre école de gestion et du collège de formation des officiers. Et pour ce qui est des programmes qui aboutissent à des diplômes universitaires, nous examinons les programmes du collège militaire mais je ne peux pas vous dire exactement où en sont les choses sans vérifier.
M. Grose: Merci beaucoup. Vous avez répondu à ma question.
Merci, monsieur le président.
[Français]
Le président: Merci. Avant de passer la parole à M. Pagtakhan, j'aimerais vous poser une petite question, madame Fréchette.
Est-ce que vous avez une vision globale? Est-ce que vous savez où vous vous en allez au ministère? Par exemple, pouvez-vous nous dire ce que sera le ministère de la Défense nationale dans deux ans en termes d'effectifs et de budget? Avez-vous des données qu'on serait capables de vérifier?
J'aimerais aussi que vous nous donniez un exemple dans la foulée des questions intéressantes posées par M. de Savoye. Donnez-nous deux exemples d'objectifs précis que vous avez à l'heure actuelle pour les deux prochaines années. Je parle non pas de voeux pieux ou de souhaits, mais d'objectifs mesurables que vous avez pour les deux prochaines années.
Dites-nous, par exemple, que vous allez réduire telle ou telle chose de 12 p. 100 et que vous allez augmenter telle ou telle chose de 18 p. 100. Ensuite les parlementaires, à titre de fiduciaires de l'argent qui est versé par les contribuables, seront en mesure de dire qu'à la Défense nationale, vous faites un bon travail ou vous ne faites pas votre job.
Mme Fréchette: Nous allons réduire le nombre de militaires à 60 000 d'ici 1999. Nous y sommes presque. Nous allons maintenir le niveau des réserves; nous allons l'augmenter à 30 000. Nous allons réduire de 50 p. 100 les ressources consacrées aux quartiers généraux stratégiques. Nous avons déjà atteint le niveau de 25 p. 100. On devrait probablement être à 33 p. 100 d'ici la fin de l'année.
D'ici 1999, nous aurons réduit d'à peu près 50 p. 100 les ressources consacrées aux quartiers généraux. Nous aurons déménagé; nous aurons aboli les quartiers généraux des trois services pour les ramener à Ottawa. Il y en a déjà un qui est arrivé cet été. Le commandant des Forces terrestres est maintenant au sein du quartier général du ministère de la Défense et les deux autres viendront l'été prochain. Je pourrais vous donner d'autres exemples.
Nous avons des objectifs très précis, et chacun, au niveau des commandements, a bien sûr ses propres objectifs.
Pour revenir un peu sur les explications que donnait le général de Quetteville, c'est à cela que sert tout le système de plans d'affaires. Le plan d'affaires qu'on avait l'année dernière était moins élaboré que ceux qu'on a cette année. Dans certains cas, il y a plus de détails. Les plans d'affaires commencent à intégrer des débuts de mesures spécifiques. Comme l'a dit le général de Quetteville, on ne part pas de zéro; on est déjà très avancés. Donc, il y a beaucoup d'objectifs quantifiables.
Le président: Est-ce que c'est colligé dans un document que les collègues du comité pourraient apprécier comme lecture de chevet?
Mme Fréchette: Les perspectives du ministère de la Défense, qui ont été déposées au Parlement l'année dernière et qui sont renouvelées chaque année, contiennent beaucoup de ces détails. En plus, on est obligés de faire des plans d'affaires plus détaillés pour la conduite de nos affaires. Donc, cela existe.
Le président: Monsieur Desautels, je m'attendais à ce que dans le chapitre 34 de votre rapport... La productivité des services de soutien ne va peut-être pas là. Le vice-amiral Murray nous disait qu'on traitait de l'approvisionnement des bases, des transports, de l'entretien des véhicules, des avions, etc. Cependant, on s'est fait dire, lors de la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean au Québec, que la première raison de la fermeture du collège militaire était économique, mais selon des informations parcellaires que nous obtenons de Kingston, on aurait fait des dépenses et des investissements fantastiques à Kingston.
Vous ne vous êtes pas penchés là-dessus, mais est-ce que vous allez regarder si la décision de fermer le Collège militaire de Saint-Jean à l'avantage de Kingston a été une bonne décision au plan économique? Allez-vous fouiller pour voir tout ce qui s'est dépensé à Kingston? Est-ce qu'on va voir cela de notre vivant?
M. Desautels: Monsieur le président, nous n'avons pas planifié de nous pencher sur la fermeture du Collègue militaire de Saint-Jean. Comme vous le savez, nous avons fait rapport en 1994 sur certaines fermetures de bases. Nous en avons discuté ici, à ce comité, l'an dernier. Nous prévoyons revoir à un certain moment le dossier des fermetures de bases, mais nous ne prévoyons pas viser spécifiquement le Collège militaire de Saint-Jean ou la base de Calgary.
On a fait rapport sur plusieurs bases qui ont été fermées et on a offert des suggestions pour la fermeture de bases à l'avenir. On a fait le tour du problème de façon générale, mais sans s'attarder à Saint-Jean ou à Calgary. Je n'exclus pas la possibilité de revoir dans quelque temps ce qui est arrivé à certaines bases, comme on l'a fait dans le passé.
[Traduction]
Le président: Monsieur Pagtakhan.
M. Pagtakhan: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir à la raison pour laquelle il est impossible de fixer beaucoup plus tôt ces normes de performance. Pour faire suite aux questions posées par le vice-président, M. Grose, bien que je sache qui est le patron du ministère de la Défense, le chef d'état-major intérimaire de la Défense, le vice-amiral Murray, j'aimerais savoir qui a véritablement la responsabilité, aujourd'hui, de la gestion du ministère.
Mme Fréchette: Si votre question concerne les indicateurs de performance, il faut des indicateurs à plusieurs niveaux: au niveau stratégique, au niveau du commandement et ainsi de suite. Il va falloir élaborer des indicateurs pour chaque niveau.
M. Pagtakhan: Donc, si ce qui nous intéresse le plus, ce manque de productivité manifeste identifié par le vérificateur général au niveau local, si nous voulons savoir qui est responsable de cette mauvaise gestion des ressources...
Mme Fréchette: Le chef d'état-major et moi-même assumons cette responsabilité car nous sommes les gestionnaires du plan d'entreprise de l'organisation.
Au niveau du commandement aérien, c'est le général de Quetteville qui a la responsabilité des indices de performance, et c'est la même chose pour les forces navales, etc. Le ministère de la Défense nationale a la responsabilité de s'assurer que chacun des éléments individuels s'emboîte dans un système intégré.
Vous me demandez la raison pour laquelle il n'est pas possible de le faire plus rapidement. Élaborer des indices de performance dignes de ce nom pour les milliers et milliers de choses qu'il faut mesurer est non seulement une tâche gigantesque, mais en plus il faut qu'ils soient technologiquement compatibles pour que nous puissions faire des comparaisons d'un service à l'autre.
Lors de notre dernière visite, je vous avais parlé d'un certain nombre de projets majeurs de technologie d'information en cours qui devraient être au point d'ici un ou deux ans. Ils permettront de mesurer la performance, de calculer les coûts sur une base comparable et cohérente dans tout le système.
M. Pagtakhan: D'après le peu que je connais de la gestion, en même temps que vous définissez les objectifs, vous fixez des normes de performance pour mesurer la progression vers ces objectifs. Autrement, ils pourraient être simplement atteints par accident, par hasard. Ce n'est pas ce que nous voulons, nous voulons une constance dans les bons résultats.
La question que j'adresse au vérificateur général est la suivante. Nous constatons un dilemme au ministère de la Défense nationale. Vous dites qu'il y a un problème majeur. Notre pays ne manque pas de gestionnaires. La question est la suivante: quand est-il raisonnable d'appliquer la série de normes que vous envisagez en conséquence de votre vérification?
M. Kasurak: Il faut faire la distinction entre les divers niveaux de gestion.
Pour certaines de ces mesures, comme celles destinées aux gestionnaires locaux pour gérer les parcs de camions et pour gérer les écoles, nous ne pensons pas qu'il y ait de raison technique pour laquelle elles ne pourraient être mises en place dans un délai maximum d'un an. La majorité des concernés n'ont pas de mal à comprendre ce qui se passe à ce niveau d'activité.
Il y a beaucoup d'exemples industriels qui peuvent servir de guide aux niveaux plus élevés. La sous-ministre et le chef d'état-major intérimaire ont parlé aujourd'hui de mesures de performance stratégiques. Le ministère cherche une solution depuis déjà pas mal de temps. J'estime que le programme qu'il propose, programme de 18 mois, pourrait être utilisé comme point de départ. Il faudra le raffiner par la suite.
Ils se sont fixé des objectifs très ambitieux pour eux-mêmes et pour leur système. S'ils y arrivent, s'ils ne sont pas loin d'y arriver avec ce premier programme, le résultat sera supérieur à tout ce que j'ai pu voir ailleurs dans le monde. Les normes vont augmenter. Ils se sont fixé une cible très élevée. Je ne pense pas que 18 mois ou deux ans soit un délai déraisonnable pour essayer d'y arriver. Le seul regret maintenant est que le ministère n'ait pas commencé plus tôt.
Je crois que ça pourra se faire assez vite, mais pour ce qui est du système global de gestion de la performance au niveau stratégique, ce sera beaucoup plus difficile. Je trouve leur calendrier raisonnablement ambitieux.
M. Pagtakhan: Vous dites «assez vite»; je crois que c'est crucial. C'est l'observation principale du vérificateur général. Qu'entendez-vous par «assez vite» au niveau local?
M. Kasurak: Douze mois.
M. Pagtakhan: Donc, procéder à une vérification avant 12 mois ne serait pas raisonnable.
M. Kasurak: Non, ce ne serait pas suffisant pour qu'il y ait des changements. Il n'y aurait que des choses à moitié terminées. Il serait difficile de se faire vraiment une idée avant 12 mois.
M. Pagtakhan: Nous pouvons donc supposer que dans 12 mois, au plus tard, ces normes seront en place. Nous pourrons voir l'application de ces normes aux activités. Combien de temps faudra-t-il d'après vous pour appliquer ces normes et procéder à une évaluation raisonnable de la performance?
M. Kasurak: Monsieur le président, les vérificateurs s'intéressent plus au passé qu'à l'avenir. Je crois qu'il y aura d'énormes différences en fonction des domaines. Dans certains domaines, comme le transport, je crois qu'on verra des résultats assez rapidement.
Par exemple, pour la base de Montréal, il faudra attendre 18 mois pour passer de l'étude de restructuration à des résultats pratiques. Pour une proposition relativement simple, il faudrait s'attendre à voir des résultats dans l'année ou les 18 mois suivants. Dans d'autres domaines comme par exemple l'entretien des avions, qui peuvent fort bien s'avérer plus complexes surtout si la flotte est renouvelée, il est possible qu'il faille attendre plus de deux ans.
Je crois qu'il serait préférable de demander son avis au général de Quetteville. Je ne pense pas que cela puisse être fait globalement. Il faut que cela soit fait service par service en tenant compte de la complexité de la tâche.
M. Pagtakhan: À la fin de l'année il serait raisonnable d'avoir la série de normes de performance au niveau local, j'espère. La sous-ministre pourrait-elle s'engager à nous soumettre ce rapport?
Si nous atteignons ces normes de rendement à la fin de l'année, d'ici un an à partir d'aujourd'hui, la vérification ne se ferait pas avant un an plus tard. À ce moment-là, cela serait reporté à deux ou trois ans plus tard. Les discussions que nous aurons eues au comité auront été oubliées avec l'avènement d'une nouvelle législature. Voilà ce qui me préoccupe. Comment s'assurer qu'il y aura continuité? Est-il raisonnable d'exiger ce genre de performances de la sous-ministre?
C'est ma dernière question. Merci.
Mme Fréchette: D'après ce que m'a dit l'un des sous-ministres adjoints qui connaît bien le domaine, cela serait sans doute faisable en un an. Je ne suis pas certaine que nous puissions élaborer des normes valables pour chaque activité particulière dans toutes les bases, mais je pense qu'en un an, nous pourrions faire des progrès sensibles. Je reviendrai volontiers devant le comité pour faire rapport dans un an. Cependant, il ne faudrait pas oublier que dans l'intervalle, bon nombre des ces activités risquent d'être soumises au test du marché.
M. Pagtakhan: Merci beaucoup.
[Français]
Le président: Nous devons aller voter. Pour la conclusion, je cède la parole au vérificateur général.
[Traduction]
M. Desautels: Monsieur le président, à ce stade-ci, je n'ai pas grand-chose à ajouter, sauf que j'estime que c'est un sujet des plus importants. Il peut être rebutant d'en discuter à certains moments, mais c'est un sujet très sérieux. Je pense que cela est de la plus haute importance pour le ministère de la Défense nationale, et mes meilleurs voeux de succès accompagnent les dirigeants actuels du ministère pour la réussite de leurs plans.
On a répondu à ma préoccupation première. Ce que nous souhaiterions voir à un moment donné, c'est une reddition de compte exhaustive et systématique sur les progrès réalisés par le ministère dans l'application de ses plans. Je peux attendre. Il aurait été bien que ce soit une période de six mois, mais si l'exercice est plus valable sur 12 mois, cela me convient également.
Je pense que le rapport en question devrait également préciser quelles économies devraient découler des gains de productivité outre les économies découlant des réductions imposées. Je pense que cela serait utile au comité et répondrait à certaines préoccupations soulevées par les députés, et par M. de Savoye, en particulier.
[Français]
Le président: Madame et messieurs les témoins, merci beaucoup au nom des collègues. Cela nous a fait plaisir. Je suis persuadé que certains témoins ont trouvé plus relaxant de témoigner devant nous que de témoigner devant la Commission d'enquête sur la Somalie. Je pense au vice-amiral Murray qui a dû apprécier. Merci.
Le comité ajourne ses travaux jusqu'à nouvelle convocation du président.